FINA Rapport du Comité
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
Opinion dissidente du Bloc Québécois
Consultations prébudgétaires 2001
Comité permanent des Finances
Suite à la lecture du rapport de la majorité libérale du comité permanent des Finances, le Bloc Québécois se dissocie de ce rapport qui ne tient nullement compte des vrais besoins des Québécois et des Canadiens en ces temps pour le moins particuliers.
certaine hypocrisie puisque le Comité des Finances et le ministre fédéral des Finances ne tiennent pas réellement compte des recommandations et des doléances des Québécois et des Canadiens en regard de l’utilisation qui devrait être faite des surplus fédéraux. Personne n’est dupe : les jeux sont faits d’avance!
LE TRAFICOTAGE DES CHIFFRES
Tout d’abord, le processus budgétaire fédéral est malheureusement devenu un outil de camouflage plutôt que d’information sur l’état des finances publiques fédérales. Comme nous avons tous été à même de le constater au cours des dernières années, le ministre des Finances a la fâcheuse habitude de sous-estimer les surplus budgétaires. En effet, depuis 1996, le gouvernement fédéral a accumulé des surplus budgétaires de plus de 30 milliards de dollars.
Depuis 1996, le gouvernement fédéral a accumulé des surplus budgétaires d’environ 35 milliards de dollars. Alors que tous devraient se réjouir d’une bonne gestion publique, le gouvernement fédéral a plutôt démontré son incapacité à prévoir ses déficits en les gonflant artificiellement et ses surplus budgétaires en les sous-estimant continuellement. Il a donc exclus de tout débat public près de 60 milliards en marge de manœuvre que le Bloc Québécois, avec beaucoup moins de moyens, était en mesure d’estimer de manière bien plus précise.
En faussant de cette façon le véritable portrait des finances publiques canadiennes, le gouvernement fédéral a aussi détourné d’importantes ressources financières des priorités de la population, notamment la santé et l’éducation. Il a également nui à la participation publique puisque la population reçoit des messages dont les contenus divergent énormément.
Par ailleurs, nous déplorons l’alarmisme du rapport qui en plusieurs points menace d’un retour aux déficits. D’une part, en ces temps d’incertitude et d’insécurité, il nous semble que la société aurait eu droit à une attitude positive afin de lui donner confiance en affirmant simplement que le gouvernement « ne retournera pas en situation de déficit ». Une déclaration claire en ce sens aurait contribué à maintenir la consommation à un niveau plus élevé et aurait envoyé un signal positif d’une économie qui peut ralentir sans s’effondrer.
D’autre part, nous ne croyons absolument pas à cette possibilité de retour au déficit. Les surplus budgétaires pour les six premiers mois de l’exercice montent à 13,6 milliards de dollars. Comment le gouvernement pourrait faire en sorte qu’un tel surplus disparaisse en totalité. Même avec un ralentissement et une hausse des dépenses militaires et pour l’amélioration de la sécurité canadienne, on ne peut imaginer qu’une « approche équilibrée », si chère au gouvernement, puisse faire hausser le montant de la facture jusqu’à 13 milliards. En fait, pour retourner en déficit, il faudrait que la croissance annuelle soit inférieure à –5% ou que les dépenses croissent de 11%, d’où le ridicule de cet alarmisme.
Finalement, le Bloc Québécois tient à rappeler à la majorité libérale du comité des Finances ainsi qu’au ministre des Finances qu’une grande partie des surplus fédéraux de la dernière année – environ sept milliards et demi – proviennent des surplus de la Caisse de l’assurance-emploi. Et selon l’actuaire en chef de la caisse d’assurance-emploi, le surplus de la caisse, cette année, sera comparable aux 7,8 milliards engrangés lors du dernier exercice financier.
DONNER DE L’OXYGÈNE À L’ÉCONOMIE !
IDans le contexte du ralentissement économique actuel et de l’impact des événements du 11 septembre dernier, le Bloc Québécois a proposé au ministre des Finances un plan de stabilisation de l’économie de 5 milliards, sans déficit. Ce plan est élaboré autour de deux axes primordiaux soient le soutient à l’économie et le soutient à l’emploi et se veut réaliste, efficace et responsable. Il est dommage que le Comité ne s’en soit pas inspiré.
Notons par ailleurs, que malgré les dépenses qu’engendrerait ce plan, le ministre fédéral des Finances bénéficierait quand même d’une marge de manœuvre amplement suffisante pour répondre aux nouveaux besoins en terme de sécurité et d’aide internationale.
Des estimations crédibles
Ce plan est basé sur des estimations plus que réalistes puisqu’il fait appel au scénario le plus conservateur. En effet, par prudence, parce que le Bloc est un parti responsable et qu’il ne veut pas plonger le Québec et le Canada dans une situation de déficit budgétaire, nous retenons donc l’hypothèse basée sur une croissance nette négative de l’ordre de 2% pour les deux derniers trimestres de l’année 2001-2002. Le cas échéant, au terme du présent exercice budgétaire, les surplus fédéraux seraient de l’ordre de 13,6 milliards $. Nos estimations tiennent compte des baisse d’impôt et des transferts fédéraux aux provinces.
Ainsi, si l’on soustrait à cela les cinq milliards nécessaires à la réalisation du plan de relance économique proposé par le Bloc Québécois et qui représentent des dépenses non récurrentes, le ministre des Finances pourrait tout de même bénéficier d’une confortable marge de manœuvre de 8,6 milliards $.
Le plan de redressement en bref
- Soutien aux PME 1,85 milliards
Dans un premier temps, à l’image des mesures adoptées par le gouvernement du Québec dans son récent budget, un report des acomptes provisionnels pour les PME doit être accordé jusqu’au 31 mars 2002. Également, nous sommes d’avis que le gouvernement fédéral devrait accordé aux PME un congé de cotisations à l’assurance-emploi pour deux mois.
- Assurance-emploi 1,15 milliard
Le Bloc Québécois est d’avis que le gouvernement fédéral doit mettre de l’avant une série de mesures afin de redonner confiance et remettre au travail les milliers de Québécois et de Canadiens qui sont allés grossir les rangs des sans emplois depuis le début de cette crise.
Nous rappelons au gouvernement que l’application immédiate des recommandations du rapport du Comité permanent du développement des ressources humaines déposé en mai 2001 apparaît prioritaire en ce sens qu’elles font référence à des mesures passives qui s’inscrivent dans la foulée des recommandations que propose notre formation politique. Bien que nous jugions qu’il s’agit d’un bon premier pas, nous considérons insuffisante la recommandation qui réduirait les cotisations de 10 cents.
- Aide sectorielle diverse 1 milliard
En ce qui concerne ce volet,. le Bloc Québécois propose que le gouvernement fédéral apporte une aide rapide aux secteurs ayant durement subis les conséquences des attentats du 11 septembre dernier soit celui du tourisme, de l’industrie aérienne, des biotechnologies, de l’aéronautique et du transport de marchandises.
Le gouvernement libéral pourrait ainsi disposer d’un montant de 1 milliard $ réparti sur les six prochains mois de façon à venir en aide aux secteurs les plus touchés de l’économie québécoise et canadienne. Ces initiatives pourraient se traduire par des garanties de prêts, des investissements dans le secteur de la recherche et du développement ou encore par le biais de subventions ciblées.
- SSécurité et défense 1 milliard
Bien entendu, le Bloc prévoit une marge de manœuvre pour répondre aux besoins accrus en matière de sécurité et de défense à la suite des attentats du 11 septembre. Il juge opportun de laisser suffisamment de flexibilité pour faire face plus efficacement aux inquiétudes de la population. De plus, le redressement des mesures de sécurité est d’autant plus nécessaire qu’il aura un impact direct sur l’économie en favorisant le retour à la normale du commerce.
AUTRES CONSIDÉRATIONS
Le Bloc Québécois a d’autres considérations dont il espère que le comité entendra. Premièrement, le rapport vante les compressions des dépenses de programme du gouvernement. En fait, de 1993-1994 à 1999-2000, les dépenses ont diminué de seulement 1%. Pour le reste, ils ont laissé surfer les revenus gouvernementaux sur la vague de la croissance économique.
Rappelons que le gouvernement a fait un arbitrage des coupures à l’intérieur des dépenses totales. Ce sont les transferts au Québec et aux provinces (qui servent principalement à financer les soins de santé, l’éducation supérieure et l’aide sociale) qui ont le plus écopé car ils ont diminué de 18% entre 1993 et 2001. Pendant ce temps, les autres dépenses de programmes ont augmenté de 8%. Tous s’entendront d’ailleurs pour dire que dans l’amélioration du ratio des dépenses sur le PIB, son amélioration est majoritairement due à la croissance du PIB.
Deuxièmement, plusieurs propositions font référence à la prudence dans les prévisions budgétaires. En fait, le comité privilégie une approche qui utiliserait des hypothèses prudentes, une réserve pour éventualité et une marge de prudence. Il s’agit de trois critères conservateurs qui s’additionnent et qui transforment le processus budgétaire en cet exercice de traficotage de chiffres qu’il est devenu. Nous partageons la nécessité de demeurer prudent, mais pas aux dépens de la transparence.
Troisièmement, nous aurions aimé que les baisses d’impôt soient modifiées afin de favoriser les ménages à faible revenu. Les baisses d’impôt et de taxes actuellement prévues ciblent avant tout les très hauts revenus, tant et si bien que dans les deux derniers budgets, les Canadiens ayant un revenu de plus de 250 000 $ se sont vus offrir plus de 9 000 $ de baisses d’impôt dès cette année, alors que les familles ayant un revenu de 40 000 $ environ auront des baisses d’impôt de 300 $. En outre, on aménageant mieux les baisses d’impôt, on aurait pu soulager immédiatement les familles qui ont un revenu de 40 000 $ et moins, particulièrement les familles monoparentales avec deux enfants à leur charge. Avec un tel revenu, elles auraient pu tout à fait éviter de payer de l’impôt au gouvernement fédéral, si on avait tenu compte d’un équilibre dans la société et non pas d’une baisse d’impôt favorable d’abord et avant tout aux millionnaires de ce pays.
Quatrièmement, certaines sections se concentrent notamment sur le domaine de la santé. Pour le Bloc Québécois, le désire du gouvernement central de s’immiscer dans ce domaine démontre encore une fois l’irrespect de ce champ de compétence provinciale. Le gouvernement s’est désengagé en sabrant dans ses transferts aux provinces quitte à ne fournir, au Québec, que 13 cents sur chaque dollar investi dans la santé. Nous souhaitons souligner à double traits au comité qu’il serait inacceptable de réinvestir dans les réseaux de la santé et d’éducation en exigeant normes et autres conditions aux provinces. Le nécessaire réinvestissement doit se faire en laissant toute la liberté et la flexibilité aux provinces d’utiliser les sommes où les besoins sont les plus urgents.
Cinquièmement, nous jugeons que la création d’un fonds pour la formation des services d’urgence municipaux en collaboration avec les provinces serait une bonne initiative, en autant que les provinces aient préséance dans l’orientation des initiatives étant donné qu’elles connaissent mieux leurs municipalités. Toutefois, les fonds qui serviraient aux différents services de renseignements ou de communications doivent être distribués de manière à ce que les libertés et le droit à la vie privée des Québécois et Canadiens soient respectés.
Sixièmement, nous portons à l’attention du Comité les commentaires du rapport sur les dépenses. Plus particulièrement, nous nous intéressons aux 10 millions remis au Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada (CANAFE). Nous félicitons cette hausse de financement mais craignons que ce ne soit pas assez. Le problème principale du CANAFE est que sa réglementation n’est pas complète. En effet, les exigences relatives aux déclarations obligatoire ne sont pas encore en vigueur puisque le Règlement d’application est en cours d’élaboration. Ainsi, il n’y a toujours pas de déclaration obligatoire au Canada, ce qui favorise toujours l’existence des paradis fiscaux et qui, par le fait même, facilite le financement des réseaux terroristes.
Septièmement, nous espérons que la recommandation sur l’aide fiscale pour les outils de mécaniciens, qui fait suite à une initiative du Bloc Québécois, soit mise en œuvre le plus vite possible.
Huitièmement, nous émettons une forte réserve sur la cohérence des deux recommandations. La première propose d’atteindre l’objectif de l’OCDE de dépenser 0,7% du PIB en aide pour les pays en développement dans un certain délai. La deuxième demande un moratoire aux dépenses internationales qui n’ont pas de rapport avec la sécurité. Il est clair que l’objectif de l’OCDE ne pourra être entrepris cette année.
Finalement, les recommandations sur l’environnement sont à notre avis très intéressantes. Toutefois, il nous semble que le gouvernement étudie depuis longtemps les incitatifs fiscaux et les outils économiques en environnement. De nombreux pays ont d’ailleurs une énorme longueur d’avance sur le Canada. Peut-être serait-il temps que le gouvernement cesse d’être passif et qu’il agisse finalement.
CONCLUSION
Nous avons donc présenté notre opinion sur le rapport de la majorité libérale du comité permanent des Finances. Nous croyons que ce rapport est empreint d’un pessimisme qui n’a pas sa place dans le contexte actuel. Les Québécois et les Canadiens ne recevront pas le bon signal afin de leur redonner confiance.
Le Bloc Québécois est déçu que le rapport ne tienne pas compte de son plan de stabilisation. Pourtant, ce plan, à l’image des souhaits des Québécois, se voulait réaliste, efficace et responsable. Il reste maintenant à espérer que le ministre des Finances entendent nos suggestions et considérations.