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INST Rapport du Comité

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CHAPITRE 2: LE DOSSIER DE L'INNOVATION

Mesurer l’innovation de par le monde

            L’économie axée sur le savoir, même si elle en est encore à ses balbutiements, progresse à un rythme accéléré sous la poussée de l’innovation en matière de produits et de procédés. Les preuves sont tout autour de nous. Le cycle de vie des produits raccourcit sans arrêt. Par exemple, la durée moyenne d’un modèle d’ordinateur personnel en vente aujourd’hui ne dépasse pas six mois, pour un logiciel, elle est de six mois et, pour les semiconducteurs, elle va d’une à deux années. Même nos produits plus traditionnels subissent une transformation rapide. Les modèles d’automobiles qui, auparavant, passaient une décennie sans modifications techniques majeures, sont maintenant presque complètement transformés à tous les quatre ou six ans. La durée utile d’un modèle type d’aéronef est passée d’environ deux décennies à plus ou moins dix ans. On peut en dire autant des services ordinaires comme les services financiers et téléphoniques, qu’est venue compléter une batterie de caractéristiques à valeur ajoutée.

En effet, on trouve de l’innovation dans toutes les industries, mais cette innovation varie considérablement, depuis des changements mineurs et des produits qui sont d’abord accessoires jusqu’à la mise au point de produits flambant neufs, qui deviennent des découvertes mondiales. Il est vrai que l’innovation est en tout temps plus intense dans certains endroits plutôt qu’à d’autres. Mais peu importe l’industrie, il y a partout des entreprises novatrices qui introduisent sur le marché de nouveaux produits et de nouveaux procédés, ou parfois les deux simultanément. [John Baldwin; 13, 9:11]

            Comme il fallait s’y attendre, ce sont les nouvelles technologies de l’information découlant de la révolution du traitement micro-informatique numérique qui souvent génèrent bon nombre de ces modifications. Ce n’est cependant pas la seule source de changement; des découvertes capitales en génétique, lesquelles sont au cœur même de la révolution en biotechnologie, transforment constamment la productivité et la qualité de nos systèmes d’alimentation et de santé. Le Comité examine de plus près les possibilités que ces progrès ouvrent pour l’avenir au chapitre 5.

            Au-delà de ces données non scientifiques, il est plus difficile de mesurer la rapidité de l’innovation dans une société donnée. Pour la majorité des gens, il est évident que, parallèlement à l’augmentation des ressources consacrées à la production des connaissances, le rythme auquel nous repoussons les frontières du savoir (découvertes scientifiques, inventions) s’accélère. Il est par contre moins évident pour la plupart que l’efficience du « système d’innovation » dans son ensemble influe aussi positivement sur la cadence de l’innovation. Le problème vient en partie de ce que, pour les activités de S. et T., il est beaucoup plus difficile de mesurer l’extrant que l’intrant. Alors qu’un intrant comme la R. et D. peut, règle générale, se calculer en termes financiers ou par un dénombrement des effectifs, l’évaluation de l’extrant est truffée de difficultés car : (1) il est plus diversifié, (2) il est souvent obtenu de façon indirecte et se retrouve dans une plus grande variété de produits et services dont le prix est fixé pour l’ensemble et (3) il n’a parfois aucun équivalent financier étant donné l’absence d’un marché actif, par exemple dans le cas de plusieurs produits et services du domaine de l’environnement, de la santé et de l’éducation.

[L]’innovation est hétérogène. L’innovation consiste en différents types de résultats et l’intensité de cette innovation varie d’une industrie à l’autre et d’une entreprise à l’autre. Aucune dimension ne domine en elle-même les autres, mais certaines ont plus de poids que d’autres. [John Baldwin; 13, 9:11]

            Dans ce cas, la procédure normale a été d’utiliser un extrant de R. et D. à la place de l’extrant réel de l’innovation. Les publications scientifiques et les brevets, qui sont en réalité des intrants intermédiaires à l’innovation, servent donc de facteurs pour mesurer respectivement les découvertes scientifiques et les nouvelles technologies, mais il faut faire attention car ce ne sont que des indicateurs partiels et imparfaits.

Figure 2.1
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            Le Comité traitera d’abord des intrants à l’innovation puis abordera l’efficience du système d’innovation. Pour ce qui est des intrants, la dépense intérieure brute en R. et D. (DIRD), exprimée en pourcentage du produit intérieur brut (PIB), reste le meilleur indicateur. La figure 2.1 met en lumière cet intrant de R. et D. pour le Canada, pour notre plus sérieux compétiteur (les États-Unis) et pour l’OCDE au cours de la majeure partie des deux dernières décennies. Elle révèle que le financement relatif de la R. et D. dans les pays de l’OCDE ne montre pas de tendance perceptible, ni à la hausse ni à la baisse, fluctuant de quelque 2,2 % du PIB. En termes absolus, cette dépense s’est élevée en 1998 à 518,3 milliards de dollars US (selon la formule de l’OCDE concernant le pouvoir d’achat pour consolider la dépense en une devise unique). Les rendements canadiens et américains ressemblent à celui de l’OCDE, mais leurs moyennes sont différentes : 1,5 % du PIB pour le Canada et 2,8 % pour les États-Unis.

Figure 2.2

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            Pour ce qui est des extrants de la recherche, le Comité s’intéressera d’abord aux découvertes scientifiques évaluées d’après les publications scientifiques, puis aux inventions technologiques évaluées d’après les demandes de brevet.

            Chaque nouvelle publication scientifique permet d’espérer une expansion des frontières du savoir. Seul un nombre accru de publications, sur une base annuelle, offre la perspective d’un rythme accéléré de production de connaissances et, indirectement, une plus grande cadence d’innovation (en supposant, pour des raisons de simplicité, que chaque article confère un avantage semblable à la société). Ainsi, la figure 2.2 indique que le nombre annuel de publications scientifiques, estimé à 438 966 entre 1995 et 1997, reste relativement inchangé par rapport à 1986-1988 dans la plupart des pays du G-7, le Japon faisant légèrement exception. Seuls les petits pays de l’OCDE montrent des signes d’une productivité croissante de leurs activités de recherche. Le Comité doit par conséquent conclure que l’efficience de la communauté scientifique n’a pas changé : les extrants et les intrants du savoir scientifique sont à peu près les mêmes qu’il s’agisse des années 1980 ou des années 1990.

            S’agissant de l’innovation technologique, la figure 2.3 trace le coefficient d’inventivité de l’OCDE, défini en fonction des demandes de brevet des résidants d’un pays par 10 000 habitants, entre 1985 et 1997 pour ce qui est du Canada, des États-Unis et de l’OCDE. Cet indicateur de l’efficience d’un système d’innovation laisse lui aussi supposer un rendement plutôt terne dans les pays de l’OCDE, le Canada compris, les améliorations américaines compensant les détériorations des autres pays de l’OCDE —conclusion peut-être prématurée.

Figure 2.3
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            Étant donné l’apparente divergence, sur une aussi longue période, du rendement des États-Unis par rapport aux autres pays de l’OCDE quant aux demandes de brevet de résidant, il faut approfondir les résultats. Il est à noter que, tôt dans les années 80, plusieurs initiatives et décisions de la Cour fédérale américaine sont venues renforcer le système des brevets des États-Unis, tandis que des modifications aux lois étendaient la protection des brevets aux logiciels, aux pratiques des entreprises et aux formes de vie perfectionnées. En plus d’unifier dans tout le pays le traitement judiciaire des droits de brevet, ces initiatives des tribunaux ont transformé le climat juridique : de sceptique qu’il était en général au sujet des brevets, il est devenu favorable à l’octroi de vastes droits exclusifs aux titulaires. La Cour a aussi rendu plus difficile la contestation de la validité d’un brevet en relevant la norme de preuve, en plus de se montrer encline à accorder des injonctions provisoires aux brevetés durant une poursuite en contrefaçon. Ainsi, la plus grande tendance à breveter, observée aux États-Unis, ne résulte peut-être pas d’une productivité accrue en R. et D., mais indique plutôt que les initiatives judiciaires pro-brevet ont déclenché aux États-Unis une « course aux brevets ». Une telle course pourrait avoir une double cause : 1) les grandes sociétés d’industries caractérisées par l’innovation cumulative de produits et de procédés, comme le semiconducteur, le matériel informatique, la machinerie et l’équipement, l’électronique, etc., « exploitaient » leurs précédentes recherches de façon plus intensive pour les utiliser stratégiquement dans la négociation des droits d’utilisation avec d’autres titulaires de brevets complémentaires; 2) les petites entreprises novatrices qui ont fait leur apparition dans toutes les industries avaient besoin de brevets pour obtenir du capital de risque à de meilleures conditions ou pour s’en procurer là où elles n’auraient pu le faire autrement. Ces possibles explications soulignent de nouveau la nécessité de faire preuve de prudence dans l’utilisation de telles mesures comme indicateurs d’innovation. En fait, la qualité de chaque revendication de brevet a probablement diminué en raison de l’intensification de l’exploitation.

            Bref, d’après la quantité d’intrants consacrée à la R. et D. et l’efficience de leur utilisation dans l’activité de R. et D. au sein de l’OCDE,ch2fig4-f.gif (38100 bytes) les faits portent à croire qu’il n’y a pas eu d’accélération de l’innovation durant les années 1990. Les intrants en R. et D. et le rapport entre les extrants en R. et D. et les intrants en R. et D. n’ont pas changé au cours de la dernière décennie dans l’OCDE. La preuve anecdotique du contraire laisse supposer qu’il doit y avoir d’autres facteurs externes en cause. Aussi, s’appuyant sur son observation que le phénomène de la mondialisation touche la plupart des autres activités commerciales, le Comité adopte-t-il, comme explication possible de l’augmentation perçue du rythme d’innovation, l’attestation d’une plus grande diffusion internationale des innovations et d’une coopération accrue en matière de recherche.

            La figure 2.4 donne une certaine indication de l’accroissement de la coopération internationale dans le monde de la recherche en S. et T. En 1995-1997, les publications scientifiques de par le monde qui portaient le nom d’un coauteur étranger correspondaient à un pourcentage moyen de 14,8 %, alors que ce pourcentage n’était que de 7,8 % en 1986-1988. Autrement dit, ce type de coopération a plus que doublé en moins de dix ans. Même surpassé par la plupart des pays du continent européen, le Canada, avec un pourcentage de 31,2 % de ses publications scientifiques citant un coauteur étranger, se place en bonne position dans cette mesure de la coopération internationale : c’est le double du taux mondial. Pour ce qui est des brevets à l’échelle internationale, 8,8 % mentionnaient un coinventeur étranger en 1993-1995. Ici encore, le Canada dépasse sensiblement la moyenne mondiale, soit à peu près du triple, ne cédant le pas qu’à l’Irlande.

            Le nombre de brevets nationaux déposés dans les pays de l’OCDE chaque année entre 1985 et 1997 a augmenté selon un taux composé moyen annuel de 14,3 %. Pourtant, les demandes de brevet par des résidants dans chaque pays ont seulement connu une hausse de 2,5 % durant la même période, ce qui porte à croire que les brevetés réclament de plus en plus une protection au-delà de leurs propres frontières, et les statistiques confirment cette déduction. Selon l’OCDE, le rapport de dépendance concernant les brevets (les requêtes de non-résidants par rapport aux requêtes de résidants) dans tous ces pays a augmenté, passant de 0,99:1 en 1985 à 3,16:1 en 1997, alors que le taux de diffusion des brevets (demandes de brevets déposés à l’étranger par rapport à celles des résidants) au sein de l’OCDE, comme le montre la figure 2.5, est passé de 1.8:1 en 1985 à 6.15:1 en 1997.

 

 

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La figure 2.5 fait également valoir que le Canada a, en moyenne, devancé cette marée mondialisante plus que ne l’ont fait les États-Unis et les pays de l’OCDE. Les rendements en matière de coopération internationale viennent peut-être prouver par des statistiques les données non scientifiques d’une accélération de l’innovation perçue, du moins, par les Canadiens. Si une telle conclusion s’avère, le système d’innovation de chaque pays est resté en moyenne le même — bien qu’il puisse être plus spécialisé —, et l’accélération sur le plan de l’innovation ne tient qu’à des gains en efficience découlant de la mondialisation de la communauté de la S. et T.

Classer le rendement du Canada en innovation

            Comme l’ont montré plusieurs des graphiques de la section précédente, le dossier canadien de l’innovation a été constant et est restéch2fig6-f.gif (36674 bytes) plus ou moins inchangé, ce qui a été le cas de la plupart des pays de l’OCDE. Ces graphiques présentent un profil chronologique du rendement de notre système d’innovation, de la fin des années 1980 jusque dans les années 1990. Relativement à la R. et D. exprimée en pourcentage du PIB, aux publications scientifiques et au ratio des demandes de brevet de résidant comparativement au nombre d’habitants, le statu quo s’est maintenu. Sauf pour ce qui est de la coopération internationale, le système d’innovation du Canada au début du XXIe siècle est sensiblement le même qu’il était durant les années 1980.

            Dans la présente section, le Comité voudrait établir le rang ou la position du Canada au sein de l’OCDE. Ici encore, le principal indicateur des intrants dans le système d’innovation est la DIRD par rapport au PIB. La figure 2.6 situe le Canada au neuvième rang parmi les 12 pays de l’OCDE examinés. Avec un ratio de 1,64 % entre la DIRD et le PIB, le Canada est de beaucoup en deçà de la moyenne de l’OCDE en 1998 (2,23 %). À égalité avec l’Australie, notre pays surclasse seulement l’Irlande et l’Italie. Enfin, la R. et D. menée par les entreprises (DIRDE) et les établissements d’enseignement supérieur (DIRDES) affiche un rendement et un rang semblables.

            Que penser de la position relativement faible du Canada en R. et D., voilà ce qui a constamment préoccupé bien des commentateurs par le passé. Le Comité se contentera de formuler deux observations. Premièrement, alors qu’on s’attend à ce que les puissances économiques comme les États-Unis, l’Allemagne et le Japon soient en tête de liste parce qu’elles peuvent plus largement répartir les frais généraux que ne le peuvent les autres pays, il est surprenant que la Suède (au premier rang) et la Suisse aient également obtenu un bon rendement. Ces données portent à croire que, si la taille d’un pays est un facteur positif par rapport à la R. et D., le peu d’envergure économique ne constitue pas un obstacle insurmontable pour ce qui est du rendement en R. et D. Deuxièmement, une caractéristique commune aux pays les plus performants, sauf les É.-U., est qu’il s’agit de petites entités géographiques, donc en principe relativement pauvres en ressources naturelles. Pareille pénurie a nécessité l’adoption de stratégies économiques presque diamétralement opposées à celle du Canada, qui est d’exploiter son avantage comparatif en ressources naturelles. Les petits pays en cause ont plutôt appliqué une stratégie relative à leur avantage comparatif dans les industries novatrices exigeant de grands investissements en R. et D. et en capital humain. Ultimement, la figure 2.6 montre bien que, si le Canada décidait de baser sa stratégie relative à l’avantage comparatif sur les industries du savoir et de l’innovation plutôt que sur les industries de ressources naturelles, le seul obstacle serait la volonté du pays.

            D’autres commentateurs ont aussi noté les incidences de ces stratégies économiques opposées. Pour bien exploiter ses richesses naturelles, le Canada a eu besoin de beaucoup de capital — le secteur des ressources naturelles est hautement capitalistique en termes tant absolus que relatifs —, et il a donc dû en importer. La dépendance au capital étranger engendre une structure économique caractérisée par des manufactures sous contrôle étranger, ce qui a des répercussions sur le rendement et le classement du Canada en matière de R. et D.

Je vais d’abord me permettre un petit avertissement […] Il est bien connu maintenant que la R. et D. n’est pas une activité à laquelle on consacre beaucoup de temps et d’argent au Canada. Le ratio des dépenses de R. et D. par rapport au PIB est plus bas au Canada que dans bien des pays de l’OCDE. Cela ne veut pas dire que notre industrie est en retard pour ce qui est de notre capacité de profiter des connaissances découlant de la R. et D. N’oublions pas que plus de la moitié des industries du secteur manufacturier canadien sont la propriété de capitaux étrangers, ce qui veut dire que la R. et D. qui est faite dans les maisons mères à l’extérieur du Canada profite à ces entreprises. Si vous tenez compte des dépenses de R. et D. au Canada et de ce que nos entreprises paient pour ce qui est fait à l’étranger dans ce domaine, nous voyons que notre pays retrouve alors un rang tout à fait honorable dans la liste. [John Baldwin; 13, 9:25]

La structure du secteur industriel d’un pays a d’autres conséquences pour ce qui est des comparaisons entre pays du ratio de la DIRD au PIB :

Il faut aussi remarquer que cette liste qui compare les ratios de R. et D. et de PIB devient une source d’erreurs si l’on n’apporte pas de corrections pour tenir compte de la différence particulière des tissus industriels d’un pays à l’autre. [L]’innovation diffère beaucoup d’une industrie à l’autre. Certaines études ont montré que certains secteurs d’activité, comme l’électronique et la construction de machines, … sont des secteurs clés pour l’innovation. C’est-à-dire qu’une partie importante de la R. et D. s’y est faite et que le volume d’innovation dépasse les besoins. Dans d’autres secteurs, l’alimentation par exemple, on utilise des nouveaux matériaux et de nouvelles machines qui viennent de ces secteurs clés; on ne dépense pas autant en R. et D., mais plus en technologie, ingénierie et systèmes de production. Les deux secteurs collaborent dans un rapport de véritable symbiose […] Dans certains pays, le secteur clé est plus développé; dans d’autres pays, c’est le contraire, et c’est le cas du Canada qui va alors dépenser moins en R. et D., même si l’on y dispose d’un secteur industriel hautement novateur. [John Baldwin; 13, 9:25]

            On pourrait donc en déduire que le faible rendement du Canada en R. et D. d’entreprise ne révèle pas nécessairement un problème d’innovation pour le pays, mais c’est plutôt l’indication que notre structure industrielle se concentre — probablement trop — sur l’exploitation de la base de ressources naturelles. Ce point de vue est en partie corroboré par une étude de l’OCDE qui désigne le Canada comme unique parmi les pays de l’OCDE en ce que son augmentation de l’intensité en R. et D. au sein de son secteur commercial dans les années 90 tenait presque entièrement à un mouvement de la structure industrielle vers les industries de haute technologie, alors que les changements d’intensité en R. et D. (certains positifs, d’autres négatifs) de pratiquement tous les autres pays de l’OCDE découlaient d’effets industriels intrinsèques2. Ainsi, la structure industrielle du Canada a connu, dans les années 1990, plus de changements que celle d’autres pays.

Pour ces raisons, les décideurs risquent de trop mettre l’accent sur des mesures d’intrants relativement à l’innovation, comme la R. et D. :

[N]ous devons être prudents lorsque nous utilisons les ratios de R. et D. par rapport au PIB, pour nous situer dans l’ensemble des pays industrialisés. Après tout, ce ratio est un rapport entre un intrant et un extrant total. Il n’est pas toujours sûr que nous voulions maximiser le ratio intrant-extrant. Voulons-nous par exemple essayer de maximiser nos dépenses de transport ou notre coût de main-d’œuvre? Si c’était le cas, cela signifierait que nous voulons des ratios de productivité bas pour la main-d’œuvre, et non pas élevés. Ce que nous voulons en réalité, c’est maximiser le rendement par rapport aux intrants, ou réduire au minimum le ratio intrant-extrant. D’une certaine manière, avoir une économie prospère et forte qui fait plus avec moins, y compris en matière de R. et D., doit être notre objectif final. [John Baldwin; 13, 9:25]
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            Au sujet des extrants de R. et D. comme les découvertes scientifiques et les inventions technologiques, le Comité utilise de nouveau les facteurs de mesure de remplacement — les publications scientifiques par 100 000 habitants et les demandes de brevet de résidant par 10 000 habitant respectivement. La figure 2.7 place le Canada au troisième rang des 11 pays de l’OCDE examinés, pour ce qui est du nombre de publications scientifiques. Le Canada est dans les premiers pour le rendement en S. et T. : il semble s’être distingué en médecine clinique et en recherche biomédicale.

            La figure 2.8, par contre, situe le Canada au dernier rang des 11 pays relativement aux demandes de brevet de résidant, ce qui souligne sa faible prestation en R. et D. Ici encore, toutefois, on a mis le Comité en garde par rapport à ces statistiques :

Même si l’on ne fait pas de R. et D. de façon intensive au Canada — les chiffres sont souvent cités pour dire que nous avons là un grave problème , cela ne doit pas être interprété comme signifiant que les scientifiques canadiens ne sont pas efficaces. Nous avons énormément de preuves montrant que les universités canadiennes qui font de la R. et D. réussissent, et que le nombre de documents produits, le nombre de brevets déposés, est relativement élevé, si l’on ramène ça au nombre d’universitaires. Vous pouvez utiliser cette même mesure pour juger de l’efficacité de la R. et D. au Canada. Si nous créions un indice du nombre de brevets utilisés sur les marchés américains par rapport au nombre de scientifiques de R. et D. du pays d’origine, et si nous faisions ce calcul pour le Canada et les pays européens, nous nous retrouverions dans la bonne moyenne. C’est-à-dire que les scientifiques canadiens en R. et D. sont d’une efficacité tout à fait honorable. [John Baldwin; 13, 9:25]

            Ces données confirment l’opinion du Comité que le niveau de R. et D. en soi ne détermine pas nos capacités d’innovation, mais que c’est plutôt la gestion de la R. et D. limitée que nous réalisons qui importe et qui a eu le plus d’incidence sur le rythme d’innovation. Toutefois, ainsi qu’il en a été question au chapitre 1, le Canada perd de nombreux avantages indirects de la R. et D. à cause de ses faibles niveaux d’activité en R. et D. et, comme le laisse entendre le chapitre, les faibles niveaux de R. et D. peuvent découler d’une structure anormale de l’industrie; il est à noter que cette structure fait en ce moment l’objet d’améliorations marquées. En vue d’accroître le rythme du passage de la structure industrielle du Canada vers une structure compatible avec l’économie du savoir, le Comité recommande :

2. Que le gouvernement du Canada conçoive et adopte un instrument de politique publique qui cible les industries à prédominance de R. et D. et les encourage à investir au Canada.