Publications de la Chambre
Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
37e LÉGISLATURE, 1re SESSION
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 170
TABLE DES MATIÈRES
Le mercredi 17 avril 2002
1400 |
Le Président |
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS |
Le cheval national du Canada |
M. Murray Calder (Dufferin--Peel--Wellington--Grey, Lib.) |
L'industrie touristique |
M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne) |
Les Grands Prix du tourisme |
Mme Diane St-Jacques (Shefford, Lib.) |
L'industrie du tourisme |
M. Stan Keyes (Hamilton-Ouest, Lib.) |
1405 |
Le Club Lions Grantham |
M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.) |
Norm Ovenden |
M. Peter Goldring (Edmonton-Centre-Est, Alliance canadienne) |
La Charte des droits et libertés |
M. Gérard Binet (Frontenac--Mégantic, Lib.) |
La Constitution |
Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ) |
La Charte canadienne des droits et libertés |
Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.) |
1410 |
La pornographie juvénile |
M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, Alliance canadienne) |
Les droits de la personne |
M. Irwin Cotler (Mont-Royal, Lib.) |
La Charte canadienne des droits et libertés |
M. Bill Blaikie (Winnipeg--Transcona, NPD) |
La Constitution |
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ) |
Le premier ministre |
M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) |
1415 |
Le bois d'oeuvre |
M. Bill Casey (Cumberland--Colchester, PC) |
Le développement international |
Mme Colleen Beaumier (Brampton-Ouest--Mississauga, Lib.) |
QUESTIONS ORALES |
La défense nationale |
M. John Reynolds (chef de l'opposition, Alliance canadienne) |
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
M. John Reynolds (chef de l'opposition, Alliance canadienne) |
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
1420 |
M. John Reynolds (chef de l'opposition, Alliance canadienne) |
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
M. Leon Benoit (Lakeland, Alliance canadienne) |
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
M. Leon Benoit (Lakeland, Alliance canadienne) |
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
La Constitution |
M. Gilles Duceppe (Laurier--Sainte-Marie, BQ) |
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.) |
M. Gilles Duceppe (Laurier--Sainte-Marie, BQ) |
1425 |
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.) |
M. Richard Marceau (Charlesbourg--Jacques-Cartier, BQ) |
L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.) |
M. Richard Marceau (Charlesbourg--Jacques-Cartier, BQ) |
L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.) |
Le Président |
La défense nationale |
M. Bill Blaikie (Winnipeg--Transcona, NPD) |
M. Bill Blaikie |
Le Président |
M. Bill Blaikie |
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.) |
M. Bill Blaikie (Winnipeg--Transcona, NPD) |
1430 |
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.) |
Les dépenses gouvernementales |
M. Scott Brison (Kings--Hants, PC) |
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
M. Scott Brison (Kings--Hants, PC) |
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
M. Grant Hill (Macleod, Alliance canadienne) |
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
M. Grant Hill (Macleod, Alliance canadienne) |
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
La Constitution |
Mme Caroline St-Hilaire (Longueuil, BQ) |
1435 |
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.) |
Mme Caroline St-Hilaire (Longueuil, BQ) |
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.) |
Le rapport de la vérificatrice générale |
M. John Williams (St. Albert, Alliance canadienne) |
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.) |
M. John Williams (St. Albert, Alliance canadienne) |
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.) |
Les jeunes contrevenants |
M. Michel Bellehumeur (Berthier--Montcalm, BQ) |
L'hon. Martin Cauchon (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.) |
1440 |
M. Michel Bellehumeur (Berthier--Montcalm, BQ) |
L'hon. Martin Cauchon (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.) |
Le Président |
L'hon. Martin Cauchon |
Le Président |
La défense nationale |
M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Alliance canadienne) |
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Alliance canadienne) |
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
Les affaires étrangères |
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.) |
1445 |
L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.) |
Le rapport de la vérificatrice générale |
L'hon. Lorne Nystrom (Regina--Qu'Appelle, NPD) |
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.) |
La santé |
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD) |
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Santé, Lib.) |
Les pêches et les océans |
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC) |
L'hon. Robert Thibault (ministre des Pêches et des Océans, Lib.) |
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC) |
1450 |
L'hon. Robert Thibault (ministre des Pêches et des Océans, Lib.) |
La santé |
M. Rob Merrifield (Yellowhead, Alliance canadienne) |
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Santé, Lib.) |
M. Rob Merrifield (Yellowhead, Alliance canadienne) |
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Santé, Lib.) |
La fiscalité |
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe--Bagot, BQ) |
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.) |
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe--Bagot, BQ) |
L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.) |
La santé |
M. Gerry Ritz (Battlefords--Lloydminster, Alliance canadienne) |
L'hon. Don Boudria (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
1455 |
M. Gerry Ritz (Battlefords--Lloydminster, Alliance canadienne) |
L'hon. Don Boudria (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
L'environnement |
M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.) |
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.) |
L'industrie du transport aérien |
M. James Moore (Port Moody--Coquitlam--Port Coquitlam, Alliance canadienne) |
L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.) |
M. James Moore (Port Moody--Coquitlam--Port Coquitlam, Alliance canadienne) |
L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.) |
1500 |
La Constitution |
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ) |
L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.) |
Le commerce |
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.) |
M. Pat O'Brien (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.) |
Présence à la tribune |
Le Président |
AFFAIRES COURANTES |
Le directeur général des élections |
Le Président |
Décrets de nomination |
M. Geoff Regan (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) |
Réponse du gouvernement à des pétitions |
M. Geoff Regan (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) |
La Charte canadienne des droits et libertés |
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.) |
1505 |
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne) |
1510 |
M. Gilles Duceppe (Laurier--Sainte-Marie, BQ) |
1515 |
1520 |
M. Bill Blaikie (Winnipeg--Transcona, NPD) |
Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC) |
1525 |
Les comités de la Chambre |
Patrimoine canadien |
M. Rodger Cuzner (Bras d'Or--Cape Breton, Lib.) |
1530 |
M. John Bryden |
Le Président |
Procédure et affaires de la Chambre |
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.) |
Adoption de la motion |
Défense nationale et anciens combattants |
M. Geoff Regan (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) |
Adoption de la motion |
Pêches et Océans |
M. Geoff Regan (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) |
Adoption de la motion |
Patrimoine canadien |
M. Geoff Regan (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) |
Adoption de la motion |
Défense nationale et anciens combattants |
M. John Reynolds (chef de l'opposition, Alliance canadienne) |
1535 |
1540 |
Le Président |
M. John Reynolds |
1545 |
1550 |
1555 |
1600 |
1605 |
1610 |
1615 |
1620 |
1625 |
1630 |
1635 |
1640 |
1645 |
1650 |
1655 |
1700 |
1705 |
1710 |
1715 |
1720 |
M. Jim Gouk |
1725 |
Le président suppléant (M. Bélair) |
M. John Reynolds |
1730 |
1735 |
1740 |
1745 |
1750 |
M. John Reynolds |
INITIATIVES PARLEMENTAIRES |
La Loi sur les contraventions |
[------] |
Le président suppléant (M. Bélair) |
(Division 272) |
1825 |
Le président suppléant (M. Bélair) |
(Division 273) |
1835 |
Le président suppléant (M. Bélair) |
Annulation de l'ordre; etrait du projet de loi et renvoi à un comité |
Le président suppléant (M. Bélair) |
Recours au Règlement |
Les modalités du vote |
M. John Williams (St. Albert, Alliance canadienne) |
Le président suppléant (M. Bélair) |
1840 |
M. John Williams |
M. Jacques Saada (Brossard--La Prairie, Lib.) |
Le président suppléant (M. Bélair) |
1845 |
M. John Williams |
Le président suppléant (M. Bélair) |
M. John Williams |
1850 |
M. Geoff Regan (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) |
Le président suppléant (M. Bélair) |
Question de privilège |
Tentative d'enlèvement de la masse |
Le président suppléant (M. Bélair) |
Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.) |
Le président suppléant (M. Bélair) |
M. Keith Martin (Esquimalt--Juan de Fuca, Alliance canadienne) |
1855 |
Le président suppléant (M. Bélair) |
M. Dale Johnston |
Le président suppléant (M. Bélair) |
Initiatives parlementaires |
Loi sur le code de déontologie à l'intention des ministres |
M. Stéphane Bergeron (Verchères--Les-Patriotes, BQ) |
1900 |
1905 |
1910 |
M. Geoff Regan (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) |
1915 |
1920 |
M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne) |
1925 |
1930 |
M. Joe Comartin (Windsor--St. Clair, NPD) |
1935 |
1940 |
M. Peter MacKay (Pictou--Antigonish--Guysborough, PC) |
1945 |
1950 |
M. Stéphane Bergeron (Verchères--Les-Patriotes, BQ) |
1955 |
Le président suppléant (M. Bélair) |
Le président suppléant (M. Bélair) |
CANADA
Débats de la Chambre des communes |
|
• |
|
• |
|
• |
|
COMPTE RENDU OFFICIEL (HANSARD)
Le mercredi 17 avril 2002
Présidence de l'honorable Peter Milliken
La séance est ouverte à 14 heures.
Prière
[Article 31 du Règlement]
* * *
[Traduction]
Le Président: Comme nous avons l'habitude de le faire le mercredi, nous allons maintenant chanter le Ô Canada, qui sera entonné par le député de Nanaimo—Cowichan
[Note de la rédaction: Les députés chantent l'hymne national.]
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
[Article 31 du Règlement]
* * *
[Traduction]
Le cheval national du Canada
M. Murray Calder (Dufferin--Peel--Wellington--Grey, Lib.): Monsieur le Président, comme vous le savez, la Chambre étudie maintenant un projet de loi portant reconnaissance du cheval de race canadienne comme le cheval national du Canada.
Le cheval de race canadienne est un symbole parfait pour les Canadiens. Il est résistant. Il a beaucoup d'énergie pour sa petite stature et il est d'une nature très douce. Comme tous les immigrants arrivés en ce magnifique pays, depuis le début de sa longue présence au Canada, il s'est adapté aux rudes conditions de vie canadiennes.
Je sais que de nombreux collègues n'ont jamais eu la chance de voir un spécimen de cette forte race de petit cheval. Je suis donc heureux d'annoncer que cet après-midi, à l'extérieur de l'édifice du Centre, on offrira des promenades en voitures tirées par le cheval de race canadienne à tous les parlementaires désireux d'en profiter et à leur personnel. Les députés sont donc tous invités à se joindre à moi pour célébrer la présence des «Canadiens sur la Colline» et à venir voir cette merveilleuse race de cheval canadien.
* * *
L'industrie touristique
M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne): Monsieur le Président, depuis bien des années, le Canada connaît une croissance économique et une augmentation du nombre de travailleurs. Une bonne partie de cette réussite est attribuable à l'industrie canadienne du tourisme et à ses quelque 159 000 entreprises.
À l'heure actuelle, 99 p. 100 des entreprises de tourisme correspondent à la définition de PME selon Statistique Canada. Au moins 97 p. 100 d'entre elles sont de petites entreprises. L'industrie canadienne du tourisme est un pilier important de notre économie nationale et son rendement est supérieur à celui de l'économie en général, tant sur le plan des revenus générés que sur le plan de la croissance de l'emploi au cours de la dernière décennie, ce qui est un bilan fort impressionnant.
Je félicite donc l'industrie touristique de sa contribution à l'économie canadienne et je félicite les représentants de cette industrie présents ici aujourd'hui de leur dévouement envers la viabilité et la durabilité de cette industrie dynamique.
* * *
[Français]
Les Grands Prix du tourisme
Mme Diane St-Jacques (Shefford, Lib.): Monsieur le Président, la semaine dernière se déroulaient les Grands Prix du tourisme de la Montérégie et ce fut une excellence récolte pour la ville de Rougemont située dans mon comté de Shefford. La Cidrerie Michel Jodoin et le Théâtre de Rougemont ont tous deux remporté un prix dans la catégorie attraction touristique.
Pour la Cidrerie Michel Jodoin, ce prix s'ajoute aux nombreux qu'elle a reçus au cours des dix dernières années en reconnaissance pour son travail, ses fins produits et la visibilité touristique qu'elle apporte à la région.
De son côté, le Théâtre de Rougemont nous a fait rire depuis six ans avec des pièces d'une grande qualité et toujours de plus en plus appréciées.
En passant par chez nous sur la route des cidres, je vous invite à découvrir la Cidrerie et goûter leur délicieux nectar, après quoi vous pourrez assister à la production du Théâtre de Rougemont.
En terminant, je désire leur offrir mes sincères félicitations et leur souhaiter bonne chance pour les Grands Prix du tourisme québécois qui se dérouleront à Hull, le 10 mai prochain.
* * *
[Traduction]
L'industrie du tourisme
M. Stan Keyes (Hamilton-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, l'industrie du tourisme a une incidence considérable sur l'économie canadienne. L'an dernier, les dépenses dans le secteur du tourisme, malgré le pire déclin trimestriel enregistré en 15 ans par suite des événements du 11 septembre, ont continué d'augmenter par rapport à l'année précédente, se chiffrant à 54,6 milliards de dollars.
L'industrie touristique emploie directement plus de 500 000 Canadiens. En fait, d'un point de vue gouvernemental, l'industrie du tourisme engendre des recettes fiscales estimées à près de 17 milliards de dollars.
Aujourd'hui à Ottawa, l'Association de l'Industrie touristique du Canada tient un symposium sur le tourisme. Des intervenants de cette dynamique industrie sont venus de partout au Canada pour échanger. À titre de député, je suis conscient des effets positifs du tourisme non seulement dans ma circonscription de Hamilton-Ouest, mais aussi partout au pays. Je souhaite la bienvenue à Ottawa aux représentants de l'industrie du tourisme et je les encourage à continuer leur bon travail.
* * *
Le Club Lions Grantham
M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui pour rendre hommage au Club Lions Grantham de St. Catharines, qui célébrera, le samedi 4 mai 2002, le 50e anniversaire de sa fondation.
Le Club Lions Grantham a toujours relevé le défi de transformer le souci du prochain en soutien actif. Depuis sa création en 1952, des centaines de membres bénévoles ont généreusement consacré leur temps et leurs talents à d'excellents programmes comme le Camp Trillium pour les enfants atteints de cancer, le Camp Dorset pour les patients recevant des soins de dialyse, le Camp Lake Joseph pour les aveugles ainsi que nombre de programmes sportifs au parc sportif du Club Lions Grantham.
Au nom de tous les députés, je félicite le Club Lions Grantham du travail remarquable réalisé au cours des cinquante dernières années auprès de la collectivité de St. Catharines. Nous osons espérer que le Club Lions conservera pendant encore 50 ans l'esprit de partage et d'engagement qui le caractérise.
* * *
Norm Ovenden
M. Peter Goldring (Edmonton-Centre-Est, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le correspondant de longue date du Edmonton Journal à Ottawa, Norm Ovenden, nous quitte.
Après avoir travaillé d'arrache-pied durant 15 ans comme journaliste au Journal, l'esprit indompté, l'échine droite et le cerveau sorti relativement indemne des débats bruyants sur la Colline, Norm Ovenden entend l'appel des routes maritimes de notre pays et se dégage des liens amers de la Colline du Parlement.
Sans entrave, nouvellement libéré du joug d'un patron de presse, sur le point de s'embarquer pour un nouveau voyage de découverte et de conquête, troquant les articles d'un journal national grand format contre les prouesses de pêche en mer, Norm met les voiles pour une carrière de marin, prêt à ramener de grosses prises, à affronter de nouveaux défis, à lancer de nouvelles lignes et à inventer de nouveaux traits, tout cela en quête d'exploits maritimes pour le Canada.
Bon voyage, Norm. Puissent les flots être tranquilles, les vents favorables et les satisfactions abondantes. Peut-être aurai-je enfin bonne presse à Edmonton.
* * *
[Français]
La Charte des droits et libertés
M. Gérard Binet (Frontenac--Mégantic, Lib.): Monsieur le Président, aujourd'hui marque l'anniversaire de l'entrée en vigueur de la Charte canadienne des droits et libertés. Ces deux dernières décennies ont été palpitantes et le Canada a atteint sa majorité.
La Charte, qui orne les murs de nos foyers, de nos écoles et de nos bureaux, énonce nos droits et nos libertés, nos responsabilités et notre démocratie. Elle a contribué à définir qui nous sommes, nous les Canadiennes et les Canadiens, et constitue le moyen d'exprimer notre identité, nos convictions communes et les valeurs qui nous tiennent à coeur.
Chaque jour, le Parlement, les assemblées législatives et les tribunaux raffinent son sens et son effet sur nous en tant que particuliers et membres de notre société.
Alors que nous célébrons les 20 années passées sous la protection de la Charte, il convient de nous arrêter un instant, de réfléchir sur son influence et de fêter tous ensemble l'une des plus grandes réalisations canadiennes.
* * *
La Constitution
Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ): Monsieur le Président, le 17 avril 1982, le gouvernement canadien rapatriait unilatéralement la Constitution canadienne en excluant le Québec.
Vingt ans plus tard, les conséquences de ce rapatriement et surtout de l'exclusion du Québec se font toujours sentir. Pire, en s'inspirant de cette Constitution, le Canada, principalement le gouvernement libéral, s'est permis depuis de heurter de nombreux consensus québécois.
Ainsi, le Canada a décidé de se construire en ignorant les aspirations de la nation québécoise, en créant un gouvernement central fort et en refusant toujours de reconnaître le Québec comme une nation.
Voilà pourquoi aucun parti politique reconnu à l'Assemblée nationale, aucun gouvernement québécois, quel qu'il soit, n'a voulu signer cette Constitution.
Le Québec est une nation. Il respecte les autres nations et les citoyens et citoyennes de ces nations. Nous souhaitons, à notre tour, le respect mutuel de la part des Canadiens et des Canadiennes.
* * *
[Traduction]
La Charte canadienne des droits et libertés
Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): Monsieur le Président, nous célébrons aujourd'hui un anniversaire très important. Il y a 20 ans, la Charte canadienne des droits et libertés, un document consacrant les droits fondamentaux des Canadiens, est devenue une réalité, mais peu nombreux sont les Canadiens qui se rendent compte de la bataille que des femmes et des hommes de notre pays ont eu à livrer afin d'assurer l'égalité pour tous.
Après une longue semaine de négociations entre dirigeants provinciaux, organisations féminines et Canadiens, l'article 28 garantissant également les droits et les libertés aux personnes des deux sexes a été inscrit dans la Charte en 1982. Il a fallu trois ans, des milliers de pétitions signées par des Canadiennes et un groupe de politiciennes qui ont fait fi de l'esprit de parti pour que ces droits soient garantis à tous les Canadiens sans distinction de race, d'origine nationale ou ethnique, de couleur, de religion, d'âge, de déficiences mentales ou physiques ou de sexe.
C'est grâce à cette bataille que le Canada demeure engagé à défendre les principes énoncés dans la Charte au sujet de l'égalité pour les femmes. Les Canadiens devraient célébrer non seulement l'inclusion de cet article dans la Charte, mais aussi la capacité de tous les Canadiens d'exercer une influence très positive sur leur pays.
* * *
La pornographie juvénile
M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, hier soir, quelque 30 députés des divers partis ont rencontré des représentants de la police. Ils voulaient discuter des conséquences de la décision rendue récemment par la Cour suprême de la Colombie-Britannique qui a acquitté John Robin Sharpe de possession de pornographie juvénile. La cour a jugé que les écrits de M. Sharpe, qui décrivent des fantasmes sexuels violents impliquant des enfants, ne constituaient pas, même s'ils étaient dégoûtants, des infractions contre les enfants et qu'ils avaient une certaine valeur artistique.
Les participants à la table ronde ont eu droit à un diaporama très bref mais extrêmement cru montrant de jeunes enfants, y compris des bébés, être victimes des actes de perversion les plus dégradants qu'on puisse imaginer. Des experts dans le domaine ont prétendu que des écrits comme ceux de Sharpe, loin d'être artistiques, contribuent en fait à l'exploitation sexuelle des enfants.
Beaucoup d'entre nous dans cette enceinte prévoyaient cette décision tout de suite après la décision initiale de janvier 1999 et luttent depuis pour obtenir des changements à la loi. Le secrétaire parlementaire du ministre de la Justice a assisté à la réunion d'hier soir. Il pourra peut-être convaincre son patron de la nécessité de protéger les enfants du Canada maintenant.
* * *
Les droits de la personne
M. Irwin Cotler (Mont-Royal, Lib.): Monsieur le Président, la journée d'aujourd'hui marque une convergence historique plutôt remarquable. En effet, c'est le cinquante-quatrième anniversaire de la fondation de l'État d'Israël et le vingtième anniversaire de l'adoption de la Charte canadienne des droits et libertés. Ces deux événements ont entraîné leurs propres révolutions. La fondation de l'État d'Israël a été un événement révolutionnaire dans l'histoire des Juifs et de l'humanité puisqu'il s'agissait de rétablir l'ancien peuple juif sur sa terre d'origine tandis que la Charte canadienne des droits et libertés a eu des répercussions révolutionnaires sur la promotion et la protection des droits de la personne au Canada et a eu un rayonnement international.
En fait, on retrouve un seul droit générique dans la charte, soit l'article 7 qui dit que chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne, ce que soutient également le droit du peuple juif à l'autodétermination, un droit humain international fondamental, ainsi qu'à la sécurité individuelle et collective. Il soutient le droit de l'État d'Israël de vivre à l'intérieur de frontières sûres et reconnues sans être menacé par quoi que ce soit, notamment par l'usage de la force, en paix avec ses voisins.
Dans la numérologie hébraïque, le nombre 18, chai, signifie la vie. Le nombre 54 qui suggère le cinquante-quatrième anniversaire de l'État d'Israël, signifie la vie en tant que triple bénédiction. Puisse le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne prévu dans la Charte canadienne des droits et libertés et le droit international être une bénédiction pour le Canada, Israël et d'autres peuples ailleurs et puisse la prière en faveur de la paix tant souhaitée se réaliser.
* * *
La Charte canadienne des droits et libertés
M. Bill Blaikie (Winnipeg--Transcona, NPD): Monsieur le Président, aujourd'hui, nous célébrons le 20e anniversaire de la Charte canadienne des droits et libertés. Durant cette période de réflexion sur cet anniversaire, bien des choses se diront au sujet de l'ex-premier ministre Pierre Trudeau, et à bon droit.
L'ex-premier ministre Trudeau n'a jamais nié que Frank Scott, un professeur de droit à l'Université McGill et un des membres fondateurs du CCF, qui est devenu plus tard le NPD, comptait parmi ceux qui ont exercé sur lui une influence déterminante durant ses années de formation. D'ailleurs, le CCF, puis le NPD, ont constamment demandé la création d'une charte des droits constitutionnelle dans les années qui ont précédé l'adoption de la charte.
J'étais au Parlement il y a 20 ans et j'ai eu connaissance d'une bonne partie des échanges entre le NPD et les libéraux à l'époque où la charte est passée de l'état d'ébauche à texte final, et c'est pourquoi je veux rendre hommage à celui qui était mon chef à ce moment-là, Ed Broadbent, et à l'ensemble du caucus du NPD d'alors.
Sur le plan politique, monsieur le Président, vous vous rappellerez que le premier ministre Trudeau voulait avoir notre appui et qu'il était prêt à modifier ses propositions pour l'obtenir et le conserver. Je me souviens que le NPD voulait, notamment, que des changements soient apportés à la charte de manière à ce que son libellé soit plus ferme relativement à l'égalité des femmes et à la reconnaissance des droits des autochtones.
Quoi qu'il en soit, la charte est toujours en vigueur et la Cour suprême a rendu une intéressante variété d'arrêts sur elle. Les Canadiens semblent y être attachés.
* * *
[Français]
La Constitution
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, au moment où le gouvernement fédéral célèbre le 20e anniversaire de la Charte canadienne des droits et libertés, le 17 avril marque, pour une majorité de Québécois, le triste anniversaire du rapatriement unilatéral de la Constitution canadienne.
Lors de ce rapatriement, le Québec a été victime d'un coup de force qui a affaibli les droits et les pouvoirs de son gouvernement et de son Assemblée nationale, et qui l'a fait basculer dans un régime constitutionnel auquel il n'a jamais consenti et auquel il ne consentira jamais.
Le gouvernement fédéral sait tout cela et c'est la raison pour laquelle il omet, lors des célébrations du 20e anniversaire de la charte, toute mention du rapatriement unilatéral de la Constitution sans l'accord du Québec. C'est une fracture fondamentale dans l'histoire du Canada.
Des deux peuples fondateurs, le Canada est passé à une seule nation canadienne ayant pour principe l'égalité des provinces, alors que le Québec n'a jamais été une province comme les autres, mais une nation dont le patrimoine culturel, économique et politique lui est spécifique.
* * *
[Traduction]
Le premier ministre
M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.): Monsieur le Président, hier soir, le premier ministre a reçu le prix d'homme d'État de l'année 2002 du prestigieux Institut Est-Ouest.
[Français]
De temps à autre, nous nous rendons compte que la communauté internationale voue un grand respect au Canada et aux valeurs canadiennes. Le premier ministre nous en a donné un bel exemple.
Le premier ministre déclarait hier soir: «L'hommage que vous me rendez ce soir, c'est en fait au Canada que vous le rendez. J'ai utilisé ma fonction pour faire valoir sur la scène internationale des valeurs auxquelles tous les Canadiens tiennent profondément: la tolérance, la démocratie, l'internationalisme, la consolidation de la paix, le respect des droits de la personne et la primauté du droit.»
[Traduction]
Tous les Canadiens devraient être fiers du rôle progressiste que nous jouons sur la scène internationale. Je félicite le premier ministre de faire entendre notre voix et de faire connaître nos valeurs dans le monde entier.
* * *
Le bois d'oeuvre
M. Bill Casey (Cumberland--Colchester, PC): Monsieur le Président, l'industrie canadienne du bois d'oeuvre a eu une occasion de réagir contre l'imposition par les États-Unis de droits compensateurs et antidumping de 29 p. 100 aux exportations canadiennes de bois d'oeuvre.
Depuis des mois, nous demandons au ministre du Commerce international de définir une position de négociation nationale, mais il s'est toujours opposé à cette stratégie. Maintenant que le Canada a une occasion d'agir, il est étonnant de constater que ce n'est pas le gouvernement canadien, mais le gouvernement de la Colombie-Britannique qui demande la tenue d'une rencontre stratégique nationale des parties prenantes de l'industrie du bois d'oeuvre.
Il est temps que le gouvernement canadien fasse preuve de leadership. Il est temps que le ministre réunisse et écoute les parties prenantes et qu'il élabore et applique enfin une stratégie nationale sur le bois d'oeuvre.
* * *
Le développement international
Mme Colleen Beaumier (Brampton-Ouest--Mississauga, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse d'attirer l'attention de la Chambre sur une initiative essentielle appuyée par le Canada.
Avec le soutien du programme de sécurité humaine du MAECI, une ONG de Montréal, Alternatives, a tenu à Montréal et Ottawa, du 6 au 9 avril, une série de consultations auprès du public, de sociétés civiles et du gouvernement. Plus de 700 représentants de sociétés civiles et du gouvernement ainsi que des membres du public ont participé aux discussions sur le sujet délicat du rôle de la politique énergétique dans le conflit en Afghanistan.
Depuis plus d'une décennie, l'organisme Alternatives appuie les initiatives de paix en Asie du Sud en oeuvrant avec des organisations civiles de cette région. Ce dialogue nécessaire facilite une meilleure compréhension des conditions sociales et politiques du sud et du centre de l'Asie par la tenue d'un débat sur les risques et conséquences du conflit en Afghanistan, en particulier en ce qui concerne la question du pétrole et le développement économique. Les participants ont bien accueilli les nouvelles perspectives sur la façon de gérer cette crise à multiples facettes, afin d'aider le peuple afghan à réaliser les tâches complexes que sont la reconstruction et la consolidation de la paix.
Des aspects cruciaux du conflit et de la consolidation de la paix en Asie du Centre, comme le rôle que joue la politique énergétique dans le conflit et la façon de préserver l'indépendance et la viabilité économique des républiques d'Asie centrale sans provoquer de bouleversements économiques et politiques, sont essentiels pour la sécurité humaine. En continuant de travailler ensemble, nous pourrons établir une paix durable et la stabilité dans une région instable.
Je félicite Alternatives pour la réussite de cette conférence.
QUESTIONS ORALES
[Questions orales]
* * *
[Traduction]
La défense nationale
M. John Reynolds (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, ce matin, le secrétaire américain à la Défense, Donald Rumsfeld, a annoncé que les États-Unis formaient un Commandement du Nord pour les forces armées américaines. Ce commandement sera responsable de la défense pour les États-Unis, l'Alaska, les Antilles et le Canada.
Quelles consultations le Canada a-t-il eues avec les États-Unis avant cette annonce?
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, des discussions sont en cours depuis l'automne dernier. Au départ, nous voulions nous assurer que notre commandement binational, NORAD, serait maintenu, ce qui a été fait en ce qui a trait à cette annonce.
En plus de cela, nous avons entrepris des discussions avec nos homologues américains pour voir comment nous pourrions collaborer davantage de façon pratique pour contrer les menaces terroristes. Ce sont toutes des choses qui en sont au stade exploratoire.
M. John Reynolds (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je veux que le premier ministre, le ministre des Affaires étrangères ou le ministre de la Défense nationale soit très clair. Cette question est d'une importance cruciale pour la souveraineté canadienne.
Quel apport le gouvernement du Canada a-t-il eu dans la décision annoncée aujourd'hui par le secrétaire Rumsfeld aux États-Unis? Quel rôle avons-nous joué dans cette décision? Étions-nous au courant? Faisons-nous partie de toute cette initiative en matière de sécurité pour l'Amérique du Nord?
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, tous les détails de ce plan n'ont pas encore été arrêtés. Essentiellement, il s'agit là d'un changement par rapport à la structure de commandement militaire des États-Unis. Nous voulions nous assurer que nous avions voix au chapitre dans la mesure où nous avons des préoccupations communes relativement à la défense de nos pays respectifs. Nous voulions nous assurer que NORAD, le haut niveau de commandement binational, serait maintenu, ce qui a été confirmé dans l'annonce faite aujourd'hui.
Nous continuerons de chercher des façons de collaborer avec nos voisins du Sud sur des questions d'intérêt commun pour défendre les habitants de notre pays, tout comme ils travaillent pour défendre les habitants de leur pays.
M. John Reynolds (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, on dirait que le ministre de la Défense nationale a lu cela dans le New York Times.
Permettez-moi de citer un extrait d'un article publié dans le Toronto Star du 12 janvier 1991 au sujet de la guerre du Golfe et de la participation du Canada. Selon cet article, le chef de l'opposition libérale à l'époque aurait dit ceci :
Mulroney a envoyé nos soldats là-bas parce qu'il aime entretenir des liens d'amitié avec George Bush [...] Je ne veux pas entretenir des liens d'amitié avec George Bush. |
Le premier ministre peut-il nous assurer qu'il entretient des liens d'amitié avec George Bush fils et que le Canada travaillera avec les États-Unis pour voir à ce qu'il y ait un seul commandement pour l'ensemble de l'Amérique du Nord, et non un commandement distinct pour les États-Unis?
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, nous sommes deux pays souverains. Nous continuerons d'agir de manière à défendre nos intérêts communs.
Les Forces canadiennes seront sous le commandement du gouvernement, en respectant la chaîne de commandement normale, mais nous travaillerons ensemble de façon coordonnée pour défendre nos intérêts communs et assurer la sécurité des habitants du Canada, des habitants des États-Unis et du continent que nous partageons.
M. Leon Benoit (Lakeland, Alliance canadienne): Monsieur le Président, il est évident que le Canada a été écarté de ce commandement militaire sans précédent qui aura une incidence sur notre pays ainsi que sur l'ensemble du continent. Je voudrais poser la question suivante au ministre: le Canada a-t-il été invité à participer au Commandement du Nord? Dans la négative, pourquoi pas?
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, le Commandement du Nord est un commandement militaire américain. Il y aura cumul de fonctions, puisque le chef de ce commandement agira également à titre de commandant de NORAD. C'est déjà le cas, sauf que cette personne dirige également un autre commandement, celui de la défense aérienne. Les choses ne changeront pas tellement. NORAD continuera d'être un commandement binational devant rendre des comptes aux deux pays.
Au cours de mon entretien avec M. Rumsfeld, l'automne dernier, je lui ai recommandé de maintenir cet arrangement. C'est d'ailleurs ce qui est prévu dans le plan annoncé aujourd'hui.
M. Leon Benoit (Lakeland, Alliance canadienne): Monsieur le Président, si le gouvernement avait mis de l'ordre dans ses affaires et vraiment réinvesti dans nos forces armées, les États-Unis nous auraient confié un rôle dans le Commandement du Nord au lieu de prendre les choses en main sur notre propre territoire.
L'ambassadeur des États-Unis, le secrétaire général de NORAD et d'innombrables Canadiens nous avaient pourtant avertis que nos forces militaires étaient en pleine crise.
Ma question s'adresse au ministre. La vraie menace à la souveraineté du Canada ne vient-elle pas de l'érosion de nos forces militaires que le gouvernement prive de ressources?
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, la seule crise que je vois ici frappe l'Alliance canadienne, certainement pas notre gouvernement ou nos forces militaires.
Nous avons envoyé une équipe de représentants chargés de discuter avec les Américains de la meilleure façon de coordonner nos efforts pour défendre nos pays respectifs. Nous pouvons le faire tout en préservant toute la souveraineté que doit maintenir le Canada.
* * *
[Français]
La Constitution
M. Gilles Duceppe (Laurier--Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, pour une majorité de Québécois, le 17 avril est le triste anniversaire du rapatriement unilatéral de la Constitution, une constitution imposée au Québec que tous les gouvernements québécois ont refusé de signer. Et ce sera encore le cas dans l'avenir, car jamais un gouvernement québécois n'acceptera de nier l'existence de la nation québécoise.
Dans ce contexte, le premier ministre reconnaîtra-t-il qu'il dirige un pays dont près du quart des citoyens refusent que leur gouvernement, le gouvernement du Québec, signe la Constitution canadienne?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la Constitution canadienne est une loi canadienne qui était autrefois une loi britannique.
Je suis très fier que nous ne soyons plus une colonie juridique de la Grande-Bretagne et que nous soyons ici, au Canada, dans un pays qui a sa Constitution, laquelle a été approuvée par le Parlement du Canada et sert tous les citoyens du Canada, y compris moi-même, en tant que citoyen du Québec.
M. Gilles Duceppe (Laurier--Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, le Québec est une nation, et à ce sujet, permettez-moi de rappeler le point de vue d'un politicien québécois qui proposait, pour remédier à ce qui ne marche pas au Canada, et je cite, «de refaire la Constitution, pas entre dix provinces, mais entre deux nations». Cette déclaration, c'est l'actuel premier ministre fédéral qui l'a faite lors de sa première assemblée d'investiture en 1963.
Comme la Constitution canadienne ne reconnaît que l'existence d'une nation, la nation canadienne, le premier ministre admettra-t-il que depuis le rapatriement unilatéral, il a dévié de la mission qu'il s'était lui-même donnée en 1963?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, quand je me suis présenté au Parlement, c'est parce que je voulais que nous, les francophones du Québec et les autres francophones dans tout le Canada, ayons notre place au gouvernement canadien.
Je dois dire que j'ai quitté la province de Québec à l'âge de 29 ans pour venir travailler et représenter les gens du comté de Saint-Maurice, pour m'assurer que tous les citoyens de mon comté étaient bien représentés au Parlement du Canada. Je pense qu'ils ne l'ont pas regretté.
Je suis très fier du fait d'être francophone, de venir de la province de Québec et je suis très fier d'être Canadien.
M. Richard Marceau (Charlesbourg--Jacques-Cartier, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre peut bien se bercer d'illusions, se fermer les yeux et soutenir que le rapatriement unilatéral de 1982 ne cause aucun problème.
Comment peut-il expliquer alors qu'aucun parti politique sur la scène québécoise n'a signé la Constitution de 1982, et que même le très fédéraliste Parti libéral du Québec soutenait, ce matin encore, qu'il ne la signerait pas?
L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, le Bloc québécois peut bien vivre dans le passé, mais les Québécois regardent l'avenir.
Pour ce qui est de l'avenir, ils se rendent compte à quel point la Charte canadienne des droits et libertés, que nous ont donnée l'actuel premier ministre et le premier ministre Trudeau, est un accomplissement dont les Québécois et l'ensemble des Canadiens peuvent être fiers. Elle va protéger leurs droits comme cela s'est fait dans le passé depuis 20 ans et comme cela se fera dans l'avenir. C'est cela que célèbrent aujourd'hui les Québécois.
M. Richard Marceau (Charlesbourg--Jacques-Cartier, BQ): Parlons-en de l'avenir, monsieur le Président.
Le premier ministre de même que le ministre des Affaires intergouvernementales réalisent-ils que depuis 1982, si tous les premiers ministres du Québec ont refusé et refusent encore de signer la Constitution, c'est qu'avec le temps, on se rend compte que la construction du Canada se fait de plus en plus et de plus en plus rapidement au détriment de la spécificité du Québec? C'est cela l'avenir.
L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, je défie le Bloc québécois de me trouver un seul jugement de la Cour suprême qui a été contre l'intérêt des Québécois.
Depuis vingt ans, les Québécois ont progressé dans une fédération avec les autres Canadiens en voyant leurs droits renforcés. De cela, ils sont fiers.
C'est certainement l'une des raisons pour lesquelles ils votent plus pour le Parti libéral du Canada que pour le Bloc québécois.
Des voix: Bravo!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. L'honorable député de Winnipeg--Transcona a la parole.
* * *
[Traduction]
La défense nationale
M. Bill Blaikie (Winnipeg--Transcona, NPD): Monsieur le Président, j'étais ici il y a 20 ans, et je me rappelle que 74 des 75 députés du Québec ont voté en faveur de la charte. Je n'avais pas l'impression que la Charte des droits et libertés ne recueillait pas d'appui au Québec.
Des voix: Bravo!
M. Bill Blaikie: Vous pouvez vous détendre. Je n'avais même pas l'intention de poser une question à ce sujet. Silence!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je dois dire que je suis d'accord avec le député dans ce cas-ci. Nous devons être en mesure d'entendre la question du député.
M. Bill Blaikie: Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre et elle concerne l'annonce de la mise en place du Commandement du Nord par les États-Unis. À mon avis, cette initiative soulève manifestement beaucoup de préoccupations que même le gouvernement est susceptible de partager au sujet des conséquences de la création de ce Commandement du Nord.
Je me demande si le premier ministre est disposé à s'engager à ce qu'en temps opportun, comme la ministre de la Santé aime le dire, lui-même ou le ministre des Affaires étrangères se présente devant la Chambre et y fasse une déclaration complète quant à la position du gouvernement canadien au sujet du Commandement du Nord.
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je souligne très catégoriquement que la décision prise par l'administration américaine au sujet de sa propre défense ne regarde qu'elle. La défense du Canada sera assurée par le gouvernement canadien et non par le gouvernement américain.
M. Bill Blaikie (Winnipeg--Transcona, NPD): Monsieur le Président, rien de ce que font les Américains, dont le pays est si vaste et voisin du nôtre, ne concerne qu'eux. De toute évidence, leur décision a des répercussions chez nous.
Le premier ministre est-il disposé, par exemple, à convoquer des audiences parlementaires qui permettraient d'établir comment devrait réagir le Canada face à l'annonce de la création du Commandement du Nord et comment nous pouvons agir de façon appropriée dans les circonstances?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le député a raison. Nous partageons beaucoup d'intérêts. Ce sont nos voisins et nous devons collaborer avec eux. C'est pourquoi nous faisons partie du NORAD, où l'on trouve un commandement interarmées chargé de s'occuper de ces problèmes. Nous devons agir de la sorte, mais une décision prise par l'administration des États-Unis ne peut priver le Canada de sa souveraineté.
Si le Comité des affaires étrangères veut se pencher sur la question, je n'y vois pas de problème. Nous avons des comités à cette fin, et une partie de leur mandat consiste à étudier les problèmes susceptibles d'affecter le Canada. Si le comité veut se pencher sur cette question, je n'y vois aucune difficulté.
* * *
Les dépenses gouvernementales
M. Scott Brison (Kings--Hants, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.
Un rapport présenté au chef d'état-major de la Défense sur l'acquisition des avions Challenger renferme le passage suivant: «aucune mesure corrective comme la modernisation ou le remplacement de la flotte n'est recommandée à ce stade-ci».
Pourquoi le ministre des Finances, en sa qualité de prudent pacha des libéraux, n'en profite-t-il pas pour retirer au sultan de Shawinigan ses tapis volants de 100 millions de dollars? Pourquoi le vieil adversaire du premier ministre ne dit-il pas simplement non aux nouveaux Challenger du premier ministre?
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, on l'a dit à maintes reprises: ces avions sont plus efficaces. Ils peuvent franchir de plus longues distances. Ils peuvent utiliser des pistes plus courtes. Ils consomment moins de carburant. Ils ne sont pas luxueux. Ils sont aménagés de la même façon que les Challenger actuels.
Nous remplaçons deux anciens Challenger par deux Challenger plus récents pour que les membres du gouvernement puissent se déplacer aussi vite que possible afin de voir aux affaires de l'État.
M. Scott Brison (Kings--Hants, PC): Monsieur le Président, il y a 10 ans, le premier ministre a promis de déchirer le contrat des EH-101 et de ne pas acheter d'hélicoptère. Il a tenu parole, de sorte qu'aujourd'hui, les membres des Forces canadiennes montent à bord de vieux hélicoptères décrépits alors que le vieux Cabinet décrépit s'apprête à monter à bord de nouveaux jets.
Le ministre des Finances va-t-il dire au premier ministre de déchirer le contrat des Challenger et de ne pas acheter de nouveaux Taj Mahal volants pour le Cabinet?
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, l'acquisition des EH-101 par le parti d'en face était une mauvaise affaire pour les Canadiens. Ce que nous sommes en train de faire permettra une économie de plus d'un milliard de dollars et nous aurons un hélicoptère qui répondra mieux aux besoins d'aujourd'hui.
Entre-temps, nous avons investi quelque 50 millions de dollars dans les Sea King actuels. Ils fonctionnent extrêmement bien dans la région du golfe Arabo-Persique pour appuyer la lutte contre le terrorisme.
M. Grant Hill (Macleod, Alliance canadienne): Monsieur le Président, les libéraux ont gaspillé 101 millions de dollars pour acheter de luxueux avions à réaction. Ils prétendent que de cette somme, 8,2 millions de dollars doivent servir aux attestations de compétence des pilotes, alors que le coût réel de ces attestations n'est que de 570 000 $.
Pourquoi les libéraux ont-ils truqué les chiffres correspondant à la formation des pilotes de ces luxueux appareils?
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, je serai heureux de déposer une liste détaillée des éléments portant sur la formation et les comptes divers. On parle d'environ 1 million de dollars pour la formation. Environ 16 pilotes seront appelés à se servir de ces appareils. Il y a également d'autres éléments qui font partie de ce programme.
Toutefois, comme je l'ai souligné, nous obtiendrons en fin de compte un produit plus efficace qui aidera le gouvernement à mieux faire son travail.
M. Grant Hill (Macleod, Alliance canadienne): Monsieur le Président, nos 16 pilotes sont des pilotes militaires chevronnés et ils ont déjà commandé des appareils très semblables. La société Bombardier me fait savoir que l'attestation de compétence coûte 47 800 $ par pilote. Le prix d'achat comprend l'attestation de quatre pilotes. On est donc loin des 8,2 millions de dollars.
Où les libéraux cachent-ils le reste de l'argent?
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, on ne cache rien du tout. Je suis heureux de soumettre les chiffres suivants. La somme de 8,2 millions dont on a parlé couvre plus que la formation. Il y a d'autres coûts que nous devons prévoir aussi, comme le matériel de servitude au sol et les systèmes de communications par satellite qui doivent être installés dans chaque appareil et qui correspondent à ce qui existe déjà dans les appareils actuels. Tout cela fait partie de la somme prévue de 8,2 millions de dollars. Je suis heureux de déposer ces chiffres pour que le député puisse les étudier et se rendre compte que nous dépensons très judicieusement l'argent des contribuables.
* * *
[Français]
La Constitution
Mme Caroline St-Hilaire (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, la construction du Canada, qui découle du rapatriement unilatéral de la Constitution en 1982, est en totale contradiction avec la vision même du Québec.
Est-ce que le premier ministre admettra que les bourses du millénaire, l'union sociale et les jeunes contrevenants sont autant de projets qui vont à l'encontre des consensus québécois et qui illustrent bien que le Canada se construit sans respect pour la vision du Québec?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je vais répondre à cette question parce que les Québécois sont très heureux de recevoir les bénéfices de ces programmes.
À ce moment-ci, je suis très surpris de voir que le Bloc québécois veut rouvrir le problème de la Constitution. Les Québécois sont tellement contents que ce gouvernement ait décidé de ne pas parler de Constitution, mais de parler des vrais problèmes qui touchent la population.
Mme Caroline St-Hilaire (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, pour se donner bonne conscience et pour justement réparer son erreur de 1982 à l'endroit du Québec, le premier ministre a fait adopter une résolution de «société distincte», ici même à la Chambre.
Comment le premier ministre explique-t-il aujourd'hui qu'il n'ait jamais utilisé cette résolution pour faire respecter le point de vue du Québec, notamment dans le dossier des bourses du millénaire, des jeunes contrevenants et de l'union sociale?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, lorsque le Parti libéral et le gouvernement ont présenté la résolution sur la société distincte, le Bloc québécois a voté contre en masse, ici à la Chambre des communes. Ils ont le culot de se lever et de nous reprocher de ne pas se servir de quelque chose contre quoi ils se sont eux-mêmes opposés. Quelle disgrâce!
* * *
[Traduction]
Le rapport de la vérificatrice générale
M. John Williams (St. Albert, Alliance canadienne): Monsieur le Président, hier, la vérificatrice générale a dénoncé l'existence d'un trop grand nombre de fondations et le fait qu'il y a dans des comptes bancaires secrets plus d'argent que le gouvernement lui-même n'en a conscience. J'ai l'impression qu'il a la folie des caisses noires.
Ma question s'adresse au ministre des Finances. Pourrait-il nous dire combien exactement il y a de fondations? Et à combien s'élèvent les sommes qui dorment dans des comptes secrets en attendant que les libéraux s'en servent pour acheter des voix aux prochaines élections?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le nombre des fondations est du domaine public. Quant aux comptes bancaires secrets, ils n'existent pas. Toutes les fondations publient un rapport annuel qui est à la disposition du public. Chaque fois qu'une fondation octroie une subvention, l'information est rendue publique. Tout se fait de manière ouverte et transparente.
M. John Williams (St. Albert, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'aimerais bien que ce soit vrai, mais, à en croire la vérificatrice générale, ça ne l'est pas. Il y a plus de 7 milliards de dollars qui dorment dans des comptes bancaires et nous ignorons ce que le gouvernement a l'intention d'en faire. C'est 5 000 $ par famille canadienne qui ont été soustraits à l'examen de la vérificatrice générale, du Parlement et de tout un chacun sauf le Parti libéral.
Voici ma question à l'intention du ministre des Finances. Va-t-il s'engager aujourd'hui à récupérer cet argent au nom des contribuables, à l'utiliser à d'autres fins que l'achat de voix, et à rembourser la dette?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, d'abord, non seulement chacune de ces fondations publie un rapport annuel, mais si les comités parlementaires veulent faire comparaître devant eux des représentants de ces fondations, ils peuvent le faire.
Je vais donner un exemple au député. La Fondation canadienne pour l'innovation a été créée il y a cinq ans, en 1997. Des représentants de la fondation ont comparu à 11 reprises devant divers comités parlementaires de la Chambre, et ils demeurent à leur disposition.
Si le député prétend qu'investir dans l'avenir du Canada, dans la recherche et le développement, dans l'avenir de nos enfants et dans les universités ne vaut pas la peine, cela en dit long sur ce que son parti pense de l'avenir du Canada.
* * *
[Français]
Les jeunes contrevenants
M. Michel Bellehumeur (Berthier--Montcalm, BQ): Monsieur le Président, en 1982, le premier ministre et ses collègues ont donné le ton pour l'avenir en se donnant le droit de changer des choses fondamentales sans l'accord du Québec. Vingt ans plus tard, le même coup de force s'est répété dans le cas des jeunes contrevenants, lorsque le gouvernement fédéral a imposé au Québec son approche répressive, faisant fi du consensus québécois.
Le premier ministre admet-il que l'approche qui a prévalu lors du rapatriement unilatéral de la Constitution en 1982 est la même qui a forcé le Québec à abandonner une approche de réhabilitation qui a fait ses preuves en matière de jeunes contrevenants?
L'hon. Martin Cauchon (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, il est malheureux de constater qu'encore une fois, le Bloc québécois continue sa campagne de désinformation par rapport à la population du Québec.
Le projet de loi C-7 sur les jeunes contrevenants satisfait les aspirations de la province de Québec ainsi que les techniques et la façon de voir les choses qui ont été développés par la province de Québec.
Deuxièmement, quant à la question de la Constitution, on retrouve dans celle-ci la Charte canadienne des droits et libertés, qui a eu une application généreuse eu égard aux droits partout au Canada et une application flexible pour tous les droits au Canada. Elle a été d'une grande aide pour le Québec à bien des points de vue, tant au niveau de la langue qu'à celui de la langue d'affichage.
M. Michel Bellehumeur (Berthier--Montcalm, BQ): Monsieur le Président, si le ministre était venu au Québec avant l'adoption du projet de loi, il aurait vu que l'approche canadienne en matière de jeunes contrevenants ne respecte pas la réalité québécoise. Pire encore, elle la nie en ne permettant pas au Québec de faire les choses différemment.
Alors qu'au Québec on reconnaît la différence du régime canadien en matière de jeunes contrevenants—et on peut s'en accommoder—, le Canada, lui, est incapable de vivre avec cette diversité et impose ses vues centralisatrices aux Québécois et aux Québécoises.
Est-ce que c'est ça l'héritage de 1982?
L'hon. Martin Cauchon (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le problème du Bloc québécois, et ce qui a toujours été son problème depuis le début, c'est qu'il refuse de travailler ici...
Des voix: Vendu!
L'hon. Martin Cauchon: Monsieur le Président, on me traite de vendu. Le Bloc refuse de travailler ici de façon constructive et de façon positive. Regardez l'impact de la charte...
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Il est impossible d'entendre l'honorable ministre et il faut que nous puissions l'entendre. L'honorable ministre de la Justice a la parole.
L'hon. Martin Cauchon: Monsieur le Président, on parle de démocratie de l'autre côté. On me traite de vendu. Je trouve malheureux que, dans un pays démocratique, alors que je veux exercer ma liberté d'expression et mon droit de parole, on me traite de vendu. Ce sont mes concitoyens du Québec. C'est honteux!
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Il est impossible d'entendre ce qui se dit aujourd'hui. L'honorable député de Calgary-Ouest a la parole.
* * *
[Traduction]
La défense nationale
M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Alliance canadienne): Monsieur le Président, depuis que ce gouvernement a été élu pour la première fois, la Défense nationale a perdu deux fois plus de personnel qu'elle n'en a embauché. Quelque 31 500 militaires ont quitté les Forces canadiennes et seulement 14 700 les ont remplacés. C'est une statistique alarmante. Il y a parmi ceux et celles qui ont quitté beaucoup d'ingénieurs, de pilotes et de médecins. Et la situation ne fera qu'empirer.
Ma question s'adresse au ministre de la Défense nationale. Pourquoi le gouvernement a-t-il perdu deux fois plus de militaires qu'il n'en a recrutés?
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, j'ai eu du mal à comprendre toute la question. Nous avons un programme de recrutement très solide depuis un an. Nous avons réussi à recruter environ 50 p. 100 de nouveaux membres de plus que l'année d'avant, soit quelque 10 000 militaires.
Nous ciblons certains groupes professionnels, tels que les ingénieurs, afin d'attirer un plus grand nombre de ceux-ci dans nos rangs. Nous tâchons aussi d'assouplir les conditions d'affectation et de trouver d'autres moyens d'attirer des gens et de maintenir l'effectif. Nos mesures de conservation de l'effectif fonctionnent assez bien puisque notre taux d'attrition a diminué d'environ 20 p. 100 depuis un an.
Nous sommes en voie de solutionner le problème.
M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la vérité est tout autre. La vérificatrice générale a indiqué que les problèmes de personnel de la Défense nationale remontent à 1990. Que s'est-il passé? Ces problèmes ont été le fruit encore une fois des compressions et de la mauvaise administration des libéraux.
La vérité se trouve dans les chiffres, et la vérificatrice générale a indiqué que même les centres de recrutement étaient à court d'agents de recrutement, ce qui explique probablement pourquoi ils ont raté d'environ 25 p. 100 leur objectif de 4 800 nouvelles recrues. Les pénuries de personnel sont le résultat direct des compressions effectuées par le gouvernement au milieu des années 1990, et il faudra compter une trentaine d'années avant de rétablir la situation.
Pourquoi le ministre n'a-t-il pas donné à son ministère les ressources nécessaires pour faire le travail?
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement a accordé aux Forces canadiennes les ressources nécessaires pour faire du recrutement. La vérificatrice générale a fait sa vérification l'automne dernier, avant l'année de recrutement. Nous avons recruté depuis un nombre considérable de gens et avons dépassé nos objectifs dans bien des catégories d'occupations. Il nous reste des progrès à faire dans le recrutement d'ingénieurs, de médecins et d'autres spécialistes. Nous travaillons là-dessus.
* * *
Les affaires étrangères
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères. Le peuple somalien souhaite vivement que la paix et la stabilité reviennent dans la Corne de l'Afrique. Que fait notre gouvernement pour appuyer le processus de paix en Somalie et comment l'importante diaspora somalienne du Canada peut-elle contribuer au dialogue à cet égard?
L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, d'énormes problèmes se posent manifestement en Somalie, mais il est plutôt rassurant de voir que de bons résultats ont été obtenus en Érythrée et en Éthiopie, les pays voisins. Nous voudrions obtenir aussi de bons résultats en Somalie. Nous y travaillons en collaboration avec les Somaliens.
Nous avons fourni une aide humanitaire considérable pour soulager les victimes de la sécheresse et alléger la crise humanitaire en Somalie, et nous exhortons les citoyens canadiens d'origine somalienne, dont beaucoup sont représentés ici, à la Chambre, à faire leur part en tant que membre de la diaspora en exhortant leurs anciens compatriotes, en Somalie, à trouver une solution pacifique à cette situation.
Ensemble, nous pouvons y arriver, et je remercie le député dont de nombreux électeurs, je le sais, veulent se rendre utiles dans cette région du monde.
* * *
Le rapport de la vérificatrice générale
L'hon. Lorne Nystrom (Regina--Qu'Appelle, NPD): De retour au ministre des Finances, monsieur le Président, et au rapport de la vérificatrice générale. Le gouvernement a transféré quelque 7,1 milliards de dollars à des fondations sans tenir de débat parlementaire ni rendre de comptes au Parlement, en court-circuitant le Parlement. Autrement dit, c'est une dictature bienveillante qui va trop loin.
Le ministre des Finances permettra-t-il à la vérificatrice générale de vérifier les livres de chacune de ces fondations et rendra-t-il obligatoire pour les fondations de se soumettre à l'examen du Parlement?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit tout à l'heure en réponse à une autre question, si un comité parlementaire veut convoquer le président ou un représentant de l'une ou l'autre de ces fondations, il peut le faire. Chacune de ces fondations publie un rapport annuel. Je le répète, au cours des cinq dernières années, la Fondation canadienne pour l'innovation a, à elle seule, comparu 11 fois devant divers comités parlementaires.
La réponse à la question du député est que cela se fait déjà. Le député devrait aller à l'occasion aux séances de comité.
* * *
La santé
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, nous venons d'avoir une nouvelle preuve flagrante de l'incapacité de Santé Canada de protéger les Canadiens. Des années durant, le ministère de la Santé a négligé de mettre la population en garde contre les niveaux dangereusement élevés de plomb présents dans certaines variétés de raisin sec importé, ou d'en interdire la vente. Il a plutôt choisi, sciemment choisi, de ne pas dire aux parents canadiens que ce fruit sec qu'ils donnent à leurs enfants, comme substitut plus nourrissant aux friandises, pourrait contenir une neurotoxine très dangereuse.
Quand la ministre de la Santé cessera-t-elle de défendre l'indéfendable en tenant des propos alarmistes, et entreprendra-t-elle de mettre de l'ordre dans un ministère dont se méfient beaucoup de Canadiens?
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, la députée se trompe. À compter de 1992, le ministère de la Santé a effectué une évaluation des risques posés par les raisins secs. Cette évaluation a conclu que le risque pour la santé n'était pas inacceptable. C'est ce qui explique que les consommateurs n'en aient pas été avertis.
Je tiens à rassurer la députée en lui disant que, à compter de 1995, on a établi des niveaux très précis pour la présence de plomb dans les raisins secs et que, depuis novembre 1995, le Canada n'importe plus de raisins secs dont la teneur en plomb dépasse ce niveau.
* * *
Les pêches et les océans
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC): Monsieur le Président, le ministère des Pêches et des Océans n'a qu'un seul bâtiment de surveillance pour patrouiller les deux extrémités des Grands Bancs et le Bonnet flamand. Pas étonnant qu'il y ait tant d'abus.
Étant donné que le gouvernement gaspille 100 millions de dollars pour acheter des Challenger dont nous n'avons nul besoin, le ministre des Pêches et des Océans a-t-il demandé une partie de cet argent pour acheter les nouveaux navires de surveillance dont nous avons vraiment besoin?
L'hon. Robert Thibault (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, le député prend à la légère une question qui me paraît très grave. Le gouvernement attache beaucoup d'importance à la surveillance de notre zone de 200 milles. Nous ne la surveillons pas avec des avions qui transportent les ministres, mais au moyen d'appareils militaires Aurora. Nous utilisons aussi des appareils loués à des sociétés. Nous nous servons de notre navire de surveillance et nous avons des observateurs à bord de tous les autres navires. Voilà ce que nous faisons au sein de l'OPANO. Nous sommes à la recherche d'une solution diplomatique internationale à un problème international.
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC): Monsieur le Président, le ministre sait aussi bien que moi que l'échec a été total. Lorsque le ministre du Commerce international a laissé tomber la balle, dans le dossier du bois d'oeuvre, le premier ministre est intervenu.
Le premier ministre interviendra-t-il maintenant dans ce très important dossier et exercera-t-il son pouvoir pour convaincre les autres pays de respecter les règles, à défaut de quoi le Canada réclamerait la gestion de tout le plateau continental?
L'hon. Robert Thibault (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, ce n'est pas un échec, mais ce le fut à un moment donné. Lorsque nous avons pris le pouvoir, au début des années 1990, la gestion et la réglementation étaient inexistantes. En 1995, nous sommes intervenus énergiquement.
Nous aurions cru que le problème serait réglé, car le député, qui représente le Canada atlantique et dont le chef a été ministre des Affaires étrangères, a eu toutes les chances possibles de résoudre l'ensemble des problèmes internationaux qui se posent aux deux extrémités des Grands Bancs. Nous avons pris les choses en main.
* * *
La santé
M. Rob Merrifield (Yellowhead, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la mauvaise gestion est toujours florissante à Santé Canada. Hier, la vérificatrice générale a révélé qu'on avait passé outre aux règles de passation des marchés et dépensé 25 millions de dollars pour un nouveau site web. Du matériel coûteux, de haute technologie, se trouve actuellement dans un entrepôt, et n'est pas utilisé. Il aurait mieux valu consacrer cet argent à l'achat de systèmes IRM ou à l'embauche d'infirmières de première ligne.
Que fait la ministre pour imposer des mesures disciplinaires aux responsables de ce gâchis?
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, effectivement, la vérificatrice générale a cerné des problèmes de passation de marchés dans le Réseau canadien de la santé. Permettez-moi de rassurer le député: avec la collaboration de la vérificatrice générale, nous nous sommes attaqués à ces problèmes. Nous gérons désormais le RCS à l'interne. Une grande partie du matériel en question est maintenant utilisé.
Je tiens à rassurer le député: ce site web reçoit cinq millions d'appels de fichier par mois, ce qui témoigne du désir des Canadiens d'avoir accès à une information digne de foi sur leur santé.
M. Rob Merrifield (Yellowhead, Alliance canadienne): Monsieur le Président, les problèmes de gestion à Santé Canada ne sont pas nouveaux. Il y a la clinique Virginia Fontaine. Il y a l'achat du CIPRO. Il y a l'innocuité des médicaments. Aujourd'hui, nous apprenons que Santé Canada a négligé d'agir au sujet de raisins couverts de plomb, mettant ainsi la vie d'enfants en danger.
La ministre pourrait-elle assurer aux Canadiens que Santé Canada n'est pas ce qui menace leur santé?
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit à d'autres députés, j'estime qu'il est irresponsable et déraisonnable de faire peur aux Canadiens en ce qui concerne leur sécurité et leur santé.
Permettez-moi de rassurer le député: nous avons pris des mesures au sujet des raisins. Nous avons pris des mesures à l'égard du Réseau canadien de la santé.
* * *
[Français]
La fiscalité
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe--Bagot, BQ): Monsieur le Président, en imposant unilatéralement sa Constitution après le coup de force ignoble de 1982, le gouvernement fédéral s'est donné un premier outil politique nécessaire pour imposer sa volonté au Québec.
Est-ce qu'avec le déséquilibre fiscal, le gouvernement n'est pas en train de se donner un deuxième outil, celui qui lui manquait pour imposer de force, encore une fois, au Québec, sa vision économique et sa vision sociale?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le député sait fort bien que lorsqu'on regarde par exemple les projections du Conference Board pour appuyer la Commission Séguin, on voit qu'il n'y a pas de déséquilibre fiscal. Cela démontre très clairement qu'il n'y aura pas, dans les prochains cinq ans, un surplus effarant. Pour les 15 années à venir, lorsqu'on regarde les hypothèses de base, il faut dire qu'encore là cela prouve la position du gouvernement canadien.
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe--Bagot, BQ): Monsieur le Président, depuis 1982, l'approche du fédéralisme canadien n'a pas changé. Les décisions politiques se prennent à Ottawa et les provinces n'ont plus qu'à les appliquer servilement.
Est-ce que le premier ministre va convenir qu'en maintenant cette situation de déséquilibre fiscal, le gouvernement fédéral s'est donné le pouvoir économique qui lui manquait et qu'il peut ainsi limiter à sa guise la capacité d'agir du Québec?
L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, les dépenses de programmes du gouvernement du Canada sont autour de 12 p. 100 du PIB. Il faut remonter à 1948 pour trouver un pourcentage aussi bas. Le Canada est une des fédérations les plus décentralisées au monde et l'est encore plus qu'en 1982.
Les Québécois retiendront surtout qu'aujourd'hui, au moment où on fête le 20e anniversaire de la Charte, le comportement parlementaire du Bloc a été plus qu'affligeant. La façon dont il a insulté le ministre de la Justice n'est pas une façon québécoise digne des Québécois.
* * *
[Traduction]
La santé
M. Gerry Ritz (Battlefords--Lloydminster, Alliance canadienne): Monsieur le Président, hier, la vérificatrice générale a signalé que Santé Canada a accepté une soumission de 300 000 $ d'un entrepreneur censé fournir une formation en matière de télécommunications. Le marché, qui a été signé le 31 mars 1998, stipulait que la formation devait être terminée le même jour. Malgré le fait que Santé Canada n'ait jamais pu expliquer comment cette formation pouvait être dispensée en une journée, Travaux publics Canada a payé la note.
Comment le ministre des Travaux publics justifie-t-il ce gaspillage éhonté des fonds publics?
L'hon. Don Boudria (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, il n'y a pas eu de prétendu gaspillage éhonté des fonds publics.
Le ministère des Travaux publics a suivi très rigoureusement les règles à cet égard, à la fois par rapport à l'adjudication du marché, au traitement des paiements et aux paiements finaux versés pour acquitter les factures visées.
M. Gerry Ritz (Battlefords--Lloydminster, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la vérificatrice générale voit les choses un peu différemment. Elle dit que le plan d'action de Santé Canada «n'indique pas qu'il faut contrôler et gérer adéquatement les biens du gouvernement».
Je réitère ma question au ministre des Travaux publics. A-t-il une preuve que, dans la frénésie des dépenses de mars, cette formation a bel et bien été dispensée?
L'hon. Don Boudria (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, le député ne fera pas, à cet endroit, d'allégations non fondées. En ce qui concerne le marché dont il est ici question, les règles ont été suivies rigoureusement. Mon ministère a suivi la ligne de conduite autorisée, celle qui consiste à recourir à un avis d'adjudication de contrat préalable. De plus, et c'est peut-être là le plus important, il n'y a pas eu de paiement excédentaire à cet égard.
* * *
L'environnement
M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.): Monsieur le Président, du fait que le sénateur américain Frank Murkowski a ajouté un amendement au projet de loi sur l'énergie, qui permettrait le forage dans la Réserve faunique nationale de l'Arctique, du fait que le premier ministre et le gouvernement du Canada se sont battus contre cela pendant des années, du fait que les ministres de l'Environnement et des Affaires étrangères se sont battus pour protéger la collectivité canadienne nordique gwich'in et du fait que la harde de caribous de la Porcupine est menacée, le ministre de l'Environnement peut-il nous assurer que le Canada poursuivra la bataille tant que le Sénat américain n'aura pas voté, demain?
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.): Certainement, monsieur le Président. J'ajouterais même que le gouvernement du Canada espère que le Sénat américain rejettera clairement, demain, la proposition de forage dans le secteur 1002 de la Réserve faunique nationale de l'Arctique.
La harde de caribous de la Porcupine est essentielle à la culture de la collectivité gwich'in, et le forage sur les terres de mise bas des caribous menacerait la harde et serait une erreur grave. J'ajoute que des députés ministériels, le député de Yukon et d'autres ont saisi la moindre occasion de faire part de cette position au gouvernement des États-Unis et à diverses assemblées législatives américaines.
* * *
L'industrie du transport aérien
M. James Moore (Port Moody--Coquitlam--Port Coquitlam, Alliance canadienne): Monsieur le Président, dans son troisième rapport provisoire, Mme Debra Ward, la conseillère du gouvernement en matière de restructuration des transporteurs aériens, a déclaré ce qui suit:
On a dit beaucoup de choses récemment sur les coûts «cachés» des billets d'avion, notamment sur les redevances d'usage que doivent payer les passagers. La plus récente, le droit de sécurité, est perçue par certains comme le comble, et elle risque d'avoir un effet néfaste sur la décision des gens de prendre l'avion. Pour stimuler les voyages, le gouvernement devrait peut-être songer à réduire ou à supprimer certaines des redevances et taxes qu'il impose actuellement au secteur du transport aérien. |
Étant donné que la propre conseillère indépendante du gouvernement demande qu'on réduise les taxes sur le transport aérien, le ministre va-t-il bien vouloir écouter pour une fois?
L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, les alliancistes ne cesseront jamais de me surprendre. Ils disent croire dans un budget équilibré. Or, qui a présenté un budget équilibré? C'est notre gouvernement.
Le fait est que les redevances d'usage dans le secteur du transport aérien ont été acceptées par tous les partis à la Chambre. Le système fonctionne extrêmement bien en couvrant toutes les dépenses possibles. À mon avis, les passagers appuient la politique du gouvernement.
M. James Moore (Port Moody--Coquitlam--Port Coquitlam, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis tenté de faire gagner encore plus de temps au ministre. Il pourrait écrire nos annonces publicitaires durant la campagne électorale.
Air Alma vient de fermer ses portes. CanJet essaie de reprendre ses vols. Tango éprouve des difficultés. WestJet essaie de prendre de l'expansion et les transporteurs régionaux ont du mal à survivre sous le poids des taxes gouvernementales.
Étant donné qu'il sait que cette taxe va rapporter un énorme excédent, pourquoi le ministre des Transports ne décide-t-il pas de devancer la date prévue et de réduire la taxe avant l'été? Si les transporteurs aériens ne réalisent pas de profits durant l'été, ils perdront la bataille. Le ministre va-t-il devancer la réduction de taxe et y procéder dès maintenant afin que les transporteurs aériens puissent voler? Va-t-il faire cela?
L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je signale toujours que le député ne se prépare pas bien. Je sais qu'il était pris ailleurs ces dernières semaines, mais il n'a peut-être pas noté hier que IMP a annoncé que CanJet allait reprendre ses vols cet été. Il n'a peut-être pas noté que Skyservice s'était joint au plus important affréteur du pays.
Il est évident qu'il ne comprend pas que la politique du gouvernement, qui fonctionnait avant le 11 septembre et qui a été durement touchée par les événements du 11 septembre, fonctionne à nouveau. Pourquoi ne veut-il pas le reconnaître?
* * *
[Français]
La Constitution
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, le ton qui a été donné en 1982, c'est que désormais, on peut agir sans l'accord du Québec. Par exemple, en matière de congés parentaux, au lieu de retourner au Québec les impôts qu'on y perçoit, le gouvernement fédéral continue de vouloir imposer une seule vision des choses, c'est-à-dire la sienne.
Le premier ministre peut-il nier que l'attitude qui a prévalue à l'endroit du Québec lors du rapatriement unilatéral de 1982 continue de prévaloir aujourd'hui en matière financière et que cette approche consiste à garder l'argent à Ottawa et à imposer ses propres vues au Québec?
L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, le Bloc québécois déchire sa chemise sans trop savoir pourquoi. Pour les congés parentaux, la province de Québec peut très bien ajouter son programme au nôtre. Dans une fédération décentralisée, c'est ce qui se passe.
Mais puisqu'ils veulent absolument parler du passé, faut-il que je leur rappelle qu'en mars 1982, 48 p. 100 des Québécois désapprouvaient l'attitude du gouvernement Lévesque au sujet de l'accord constitutionnel; seulement 32 p. 100 approuvaient; 49 p. 100 considéraient la loi constitutionnelle comme une bonne chose; et seulement 16 p. 100 pensaient le contraire. Les Québécois de 1982 avaient raison.
* * *
[Traduction]
Le commerce
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Monsieur le Président, le ministre du Commerce international dirigera une mission commerciale en Inde du 22 au 26 avril. L'Inde a connu une vigoureuse croissance économique au cours de la dernière décennie, ce qui a fait de la plus grande démocratie au monde un marché idéal pour les exportations canadiennes.
Étant donné que beaucoup d'électeurs de la circonscription d'Etobicoke-Nord s'intéressent vivement à ce projet, le secrétaire parlementaire voudrait-il nous mettre au courant de cette mission commerciale?
M. Pat O'Brien (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, l'Inde est la douzième économie en importance dans le monde. Comme son PIB a augmenté de 30 p. 100 depuis cinq ans, elle constitue évidemment un marché très important pour le Canada.
Une centaine d'entreprises participeront à cette mission composée de 130 délégués, ce qui en fera la plus importante mission commerciale jamais dirigée par un ministre. Nous mettrons l'accent sur des secteurs canadiens comme l'agroalimentaire, les produits et services de construction, l'éducation, l'environnement, les services financiers et la technologie de l'information, pour n'en mentionner que quelques-uns.
* * *
Présence à la tribune
Le Président: Je voudrais signaler aux députés la présence à la tribune d'un célèbre joueur de hockey, M. Paul Henderson.
Des voix: Bravo!
AFFAIRES COURANTES
[Affaires courantes]
* * *
[Traduction]
Le directeur général des élections
Le Président: Conformément à l'article 552 de la Loi électorale du Canada, j'ai l'honneur de déposer les rapports financiers des partis politiques produits par le directeur général des élections.
[Français]
Ce document est réputé renvoyé en permanence au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.
* * *
[Traduction]
Décrets de nomination
M. Geoff Regan (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai le plaisir de déposer, dans les deux langues officielles, quelques décrets annonçant les nominations faites récemment par le gouvernement.
* * *
Réponse du gouvernement à des pétitions
M. Geoff Regan (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à 17 pétitions.
* * *
La Charte canadienne des droits et libertés
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui pour souligner, avec tous les députés, le 20e anniversaire de la Charte canadienne des droits et libertés.
Il y a quelques heures, j'ai eu le plaisir d'assister à une cérémonie spéciale marquant l'anniversaire de la charte en présence d'un groupe d'élèves qui n'étaient même pas nés quand la charte a été proclamée le 17 avril 1982. Ces jeunes n'ont jamais connu le Canada sans sa charte. Ils n'ont pas eu connaissance des péripéties dramatiques et des grands débats qui ont entouré sa création. Ayant été dans le feu de l'action, j'ai peine à le croire.
En réfléchissant à tout cela, j'ai repensé à une phrase du très honorable Pierre Elliott Trudeau. Dans un discours qu'il prononçait en 1968, il a dit que légiférer est un moyen d'améliorer le sort d'êtres humains en chair et en os.
[Français]
Pierre Elliott Trudeau était un homme admiré, davantage en raison de son intellect et de sa sophistication que de sa simplicité. Par ces paroles, il a témoigné une compréhension rigoureuse, terre-à-terre de son rôle comme législateur et du nôtre. Tout ce que nous faisons dans cette enceinte, nous le faisons pour la population.
Après avoir eu le privilège de servir pendant près de 40 ans comme député, je ne saurais citer aucune loi ou aucune mesure législative qui ait mieux servi les intérêts de la population canadienne que la Charte des droits et des libertés.
La charte est d'abord et avant tout un document qui confère des pouvoirs réels, un document qui place les droits fondamentaux de tous les Canadiens au-dessus des gouvernements et qui leur fournit les outils nécessaires pour défendre ces droits contre les gestes arbitraires de ces gouvernements.
La charte est aussi un document profondément canadien. Elle reconnaît que la liberté et l'égalité de tous les citoyens sont les pierres d'assise de notre édifice social. Mais en plus, elle assure la protection de certains aspects uniques de notre identité et de notre histoire nationale: les minorités de langue anglaise et de langue française, les peuples autochtones, les communautés multiculturelles et le principe du partage de la prospérité et de l'égalité des chances.
Depuis son inscription dans la Constitution, il y a 20 ans, la charte est devenue la marque du Canada. Les pays qui évoluent vers les principes d'une saine gouvernance apprécient l'expérience que nous avons acquise en élaborant la charte et font appel à nos conseils.
[Traduction]
La meilleure preuve que la charte était un document destiné aux citoyens, c'est la façon dont les Canadiens l'ont adoptée et l'usage qu'ils en ont fait. Sans leur volonté collective d'endosser la charte, de la reprendre à leur compte, elle serait sûrement tombée dans l'oubli.
Je me sens certes privilégié d'avoir eu un rôle à jouer dans cet événement historique. Comme l'a souligné le député de Winnipeg, il y a eu un grand débat à la Chambre qui a duré des mois et des mois. La charte a été approuvée par une très grande majorité des députés, y compris, et le député avait raison, 74 des 75 députés élus par les Québécois.
La charte a été efficace parce qu'elle appartient aux citoyens. En célébrant ce 20e anniversaire, il est bon de penser à l'avenir et de nous engager, à l'instar de Pierre Elliott Trudeau, à «faire confiance tout d'abord aux citoyens du Canada, qui lui insuffleront la vie».
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir aujourd'hui à l'occasion du vingtième anniversaire de la Charte canadienne des droits et libertés.
De nombreux Canadiens peuvent retracer leurs origines jusqu'à des réfugiés ou des immigrants arrivés ici depuis quelques centaines d'années. Certains sont venus pour échapper aux persécutions religieuses ou politiques que leur infligeaient des autorités oppressives, y compris ma propre famille qui a fui vers le Canada pour échapper aux injustices du brutal régime soviétique des années 20. La mémoire collective des descendants n'oublie pas facilement de telles expériences.
Cependant, même au Canada, les descendants d'immigrants et de réfugiés ont appris par leur propre expérience amère que certaines choses comme l'éducation et la liberté de pratiquer sa religion n'étaient pas toujours garanties. Les autochtones savent aussi que le gouvernement a parfois limité leur développement à titre de partenaires égaux au sein de la société canadienne.
La Charte canadienne des droits et libertés s'est révélée être un puissant outil pour contrôler le pouvoir du gouvernement d'empiéter déraisonnablement sur nos droits et nos libertés. De nos jours, les Canadiens appuient massivement la Charte canadienne des droits et libertés. Les Canadiens de toutes les régions disent préférer avant tout les aspects de la charte qui favorisent l'unité, comme la protection des droits des minorités et la promotion des droits à l'égalité.
La charte n'est toutefois pas une panacée à toutes les injustices de notre société. Les Canadiens ont souvent désapprouvé certains des changements qui ont été apportés grâce à la charte et qui ont eu des répercussions sur notre société, à la suite de diverses décisions rendues par les tribunaux. Prenons, par exemple, l'affaire mettant en cause John Robin Sharpe et la conclusion à laquelle est arrivé le tribunal, celle selon laquelle la liberté d'expression et le mérite artistique englobent la production de matériel glorifiant l'exploitation sexuelle avec violence d'enfants par des adultes.
La charte n'est certes pas un document parfait. Certains droits fondamentaux comme les droits de propriété ne sont pas inclus dans la charte. Par conséquent, aux termes de mesures législatives comme la Loi sur les espèces en péril, le gouvernement fédéral pourrait légalement exproprier des Canadiens qui sont propriétaires de terrains et de ressources, sans les indemniser pleinement, équitablement et dans des délais opportuns.
Depuis l'adoption de la charte, les politiciens hésitent de plus en plus à proposer des initiatives politiques légitimes ou à substituer leurs opinions politiques à celles des tribunaux.
La Charte des droits permet au Parlement de temporairement rejeter les décisions des tribunaux en faisant valoir la disposition dérogatoire, mais les politiciens hésitent à se prévaloir de cette disposition, parce qu'ils craignent que le fait d'y recourir ne soit perçu comme un non-respect de la Constitution. Par conséquent, les politiciens acceptent simplement les jugements qui privilégient les intérêts étroits de particuliers, même lorsque ces jugements vont à l'encontre des intérêts de l'ensemble de la société. À titre de parlementaires, nous devons continuer à être vigilants pour éviter que la charte ne devienne un outil limitant l'efficacité des institutions démocratiques, dont le Parlement.
En tant que peuple, nous devons, en protégeant nos droits et libertés individuels, veiller à ne pas miner notre responsabilité qui consiste à encourager et à protéger des valeurs sociales d'une plus vaste portée. Notre capacité de vivre ensemble dans une société civilisée exige que nous soyons constamment vigilants.
[Français]
M. Gilles Duceppe (Laurier--Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, pour une majorité de Québécois, le 17 avril est le triste anniversaire du rapatriement unilatéral de la Constitution canadienne.
Ce rapatriement découle de la volonté du Canada de se construire selon ses valeurs, selon ses priorités; les Québécoises et les Québécois reconnaissent le droit de toute nation de se construire comme elle l'entend, dans le respect des nations voisines. Cette façon de faire constitue la base de relations harmonieuses et constructives entre les nations.
Malheureusement, il nous faut constater que depuis 1982, le nation building canadien s'effectue en ignorant les aspirations de la nation québécoise.
Depuis 1982, aucun gouvernement québécois, quel qu'il soit, n'a accepté de signer cette Constitution qui a été imposée au Québec. Cette situation ne changera pas. Le Québec ne signera pas la Constitution de 1982; aucun gouvernement québécois n'acceptera de nier l'existence de la nation québécoise.
Comme les Canadiennes et les Canadiens, les Québécoises et les Québécois veulent construire leur nation comme ils l'entendent. À maintes reprises, ils ont tenté de le faire à l'intérieur de la fédération canadienne, mais sans succès.
En fait, loin d'y trouver son compte, le Québec s'est vu confronté à des politiques qui visaient à créer un gouvernement central fort. Le Québec ne se retrouve pas dans cette construction, parce qu'il n'est pas une province comme les autres, c'est une nation qui tient à ses outils de développement, comme toute autre nation.
Le refus historique du Québec de signer la Constitution de 1982 illustre d'ailleurs le malaise que le rapatriement unilatéral de la Constitution nous rappelle toujours aujourd'hui.
En raison de ce malaise, le gouvernement fédéral a délibérément choisi de mettre l'accent sur le vingtième anniversaire de la Charte canadienne des droits et libertés.
Bien sûr, dans une société démocratique, l'existence d'une charte des droits est importante. Elle est tellement importante que le Québec s'est doté d'une Charte des droits et libertés de la personne dès 1975, bien avant Ottawa, soit sept ans avant le gouvernement fédéral.
Mais au-delà de la charte, les conséquences du rapatriement unilatéral de la Constitution se font sentir encore aujourd'hui, alors que la construction du Canada va en s'accélérant.
En s'appuyant sur le cadre juridique qui rend à toutes fins utiles impossibles les changements constitutionnels qui donneraient plus de pouvoirs au Québec, la nation canadienne, au cours des dernières années, a heurté de nombreux consensus politiques et sociaux du Québec.
Ce cadre juridique se trouve appuyé par une philosophie qui détermine les orientations politiques qui sont prises par ce gouvernement. Ces actions ont créé des insatisfactions profondes chez les Québécoises et les Québécois.
Citons le cas des jeunes contrevenants, où les Canadiens souhaitent une approche punitive, alors que les Québécois préfèrent une approche préventive; le cas des bourses du millénaire, où les Canadiens souhaitent favoriser les élites, pendant que le Québec fait le choix de l'accessibilité; le cas des congés parentaux, que le Québec voudrait offrir à tous les jeunes parents en reconnaissant que, chez les jeunes, la réalité du travail a changé.
De même, le Québec, qui veut gérer ses programmes sociaux en fonction de ses besoins, n'a pas voulu d'une union sociale qui préconise la mise en place de normes pancanadiennes.
En allant toujours plus loin dans sa volonté de se donner les moyens de sa politique, le gouvernement fédéral dispose maintenant de moyens financiers beaucoup plus importants pour soutenir sa vision du développement du Canada grâce au déséquilibre fiscal.
L'ensemble de ces politiques de construction canadienne ne tiennent pas compte des aspirations du Québec et provoquent l'isolement du Québec. Cette situation ne profite à personne, car l'isolement du Québec n'a cessé de miner les sociétés québécoise et canadienne.
Vingt ans après le rapatriement unilatéral de la Constitution canadienne, il est devenu évident que les aspirations du Québec ne peuvent plus se réaliser au sein du Canada. Tous constatent que les tentatives de réparation, dont celle de l'Accord du lac Meech, ont été des échecs.
Finalement, quoi qu'en dise le premier ministre, l'histoire démontre que la présence d'un gouvernement fédéraliste ou souverainiste à Québec ne change rien au fait que les Québécoises et les Québécois ne sont plus considérés par le Canada comme un peuple fondateur, mais bien comme faisant partie d'une province comme les autres qu'il est possible, au besoin, d'ignorer.
Le gouvernement propose aujourd'hui de souligner les 20 ans de la Charte des droits. Je propose que nous soulignions également les 20 ans du rapatriement unilatéral de la Constitution canadienne.
Nous devons le faire afin de nous rappeler qu'encore aujourd'hui, les Québécoises et les Québécois se souviennent de cette journée du 17 avril 1982 comme du moment où les Canadiens ont choisi de se doter d'un pays qui leur ressemble. Les Canadiennes et les Canadiens en ont le droit. Je souhaite et je travaille avec mes collègues du Bloc québécois pour qu'un jour il en soit de même pour les Québécoises et les Québécois.
[Traduction]
M. Bill Blaikie (Winnipeg--Transcona, NPD): Monsieur le Président, nous célébrons aujourd'hui le 20e anniversaire de la Charte canadienne des droits et libertés. Inscrite dans la Constitution canadienne lors du transfert de la Grande-Bretagne au Canada, en 1982, de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, la charte est un instrument essentiel à la protection de l'individu contre un gouvernement injuste et des minorités contre une majorité injuste.
Tout au long de cette période de réflexion que suscite le 20e anniversaire de la charte, il sera abondamment question du premier ministre Pierre Trudeau, et avec raison. Mais comme Trudeau lui-même ne refusait pas de l'admettre, une des personnes qui l'avait influencé au cours de sa formation était Frank Scott, professeur de droit à l'Université McGill, poète, militant des causes sociales et l'un des membres fondateurs du CCF, prédécesseur du NPD. Tout au long de sa carrière universitaire et politique, Frank Scott a lutté en faveur des droits des individus et des minorités, et prôné vigoureusement une charte des droits.
D'ailleurs, au cours des décennies qui ont mené à l'adoption de la charte, le CCF et le NPD ont constamment réclamé que soit garantie par la Constitution une charte des droits. Une charte inscrite dans la Constitution était, avec raison, considérée comme étant nettement supérieure à la déclaration des droits, en grande partie symbolique, adoptée par le Parlement sous le gouvernement du premier ministre John Diefenbaker, même s'il faut savoir gré à M. Diefenbaker d'avoir fait avancer l'idée.
Je siégeais au Parlement il y a 20 ans et j'ai participé à la majeure partie du dialogue entre mon parti, le NPD, et le gouvernement libéral de l'époque, alors que la charte passait de l'état d'ébauche à sa version finale, et c'est pourquoi je tiens à souligner le rôle joué par le chef de mon parti à l'époque, M. Ed Broadbent, et par le caucus du NPD.
Vous vous souviendrez, monsieur le Président, et le premier ministre s'en souviendra peut-être aussi, que le premier ministre Trudeau cherchait à obtenir l'appui du NPD et il était prêt à apporter des changements à son projet constitutionnel afin d'obtenir et conserver cet appui. Je crois me souvenir que le NPD demandait, entre autres choses, que des changements soient apportés à la charte, et notamment qu'elle reconnaisse plus clairement l'égalité des femmes et les droits des autochtones. Le gouvernement avait acquiescé à ces deux demandes, quoique le libellé relatif aux droits des autochtones ait été dilué pendant les négociations finales avec les premiers ministres provinciaux.
Bien sûr, la charte a été modifiée à la dernière minute par l'adoption de la disposition de dérogation. Aujourd'hui encore, on discute pour savoir si cette clause constitue une violation inacceptable de l'idéal dont s'inspire la charte ou si elle constitue un moyen approprié permettant au Parlement de contrer le pouvoir judiciaire.
Quoi qu'il en soit, la charte est aujourd'hui en vigueur et la Cour suprême a rendu des jugements intéressants qui s'en inspirent. Les Canadiens semblent tenir à la charte, quoiqu'ils n'approuvent pas nécessairement certaines décisions qu'elle a engendrées. Ils la voient pour ce qu'elle devait être à l'origine: un moyen de protéger les démunis, les droits des minorités, l'égalité, la règle du droit, la démocratie, la liberté de circulation et d'établissement et les libertés fondamentales.
Les gens qui se préoccupent de l'atteinte aux pouvoirs parlementaires par les tribunaux feraient mieux de protéger les pouvoirs démocratiques du Parlement contre certains accords commerciaux non démocratiques. La Cour suprême, du moins, est une institution canadienne qui interprète les lois canadiennes.
Le vingtième anniversaire de la charte mérite certainement d'être célébré, et le NPD se joint à ceux qui le font. Nous espérons également voir un jour adopter une charte des responsabilités sociales, économiques et environnementales à l'intention des entreprises, du gouvernement et des citoyens, afin d'assurer non seulement la protection des droits et libertés, mais aussi la justice sociale et la viabilité.
Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, je voudrais d'abord souligner le rôle important que l'actuel premier ministre a joué dans l'adoption de la Charte canadienne des droits et libertés. Il est juste de dire qu'aucun autre politique, pas même le regretté Pierre Trudeau, n'a pris une part aussi active au processus.
[Français]
Par ailleurs, il convient que le premier ministre ait reconnu les contributions du Parlement à la charte. Cet apport ne se limite pas aux nombreuses audiences et multiples débats qu'il a mentionnés, mais inclut aussi les modifications au sujet de l'égalité des hommes et des femmes et des droits autochtones que le Parlement a poussé le gouvernement à adopter.
La façon dont le gouvernement a procédé pour le rapatriement de la Constitution et l'adoption d'autres modifications constitutionnelles, y compris la charte, a engendré de profondes divisions. Je me souviens.
La Cour suprême a jugé que le gouvernement a enfreint les conventions constitutionnelles du pays. L'imposition des modifications constitutionnelles a alimenté les aspirations à l'indépendance du peuple québécois. Cela aussi fait partie de l'héritage du 17 avril.
[Traduction]
La charte a marqué un jalon dans le droit canadien. Pour bien des Canadiens, elle s'inscrit dans la définition même de notre pays.
Il importe de ne pas oublier que les principes de la charte remontent loin dans le temps, bien avant l'adoption de la loi en 1982. Bien que nous ayons atteint imparfaitement cet objectif, le Canada est une société qui s'est toujours efforcée de respecter autant les droits individuels que la réalité de nos collectivités. Ils font incontestablement partie des rêves et de l'aspiration à une vie meilleure qui ont attiré au Canada des personnes de tous les coins du monde recherchant la liberté et le respect.
La charte reflète cette tradition, tout comme la déclaration des droits de M. Diefenbaker avant elle. Notre plus grand défi aujourd'hui consiste à voir au-delà de la célébration d'anniversaires et de faire en sorte que nos actions témoignent de ce respect pour les valeurs fondamentales de la démocratie canadienne.
Nous devrions agir pour désamorcer les tensions qui existent entre le rôle de législateur du Parlement et le rôle que jouent les tribunaux en interprétant la charte. Le plus récent exemple en est le jugement Sharpe en Colombie-Britannique.
[Français]
Nous avons proposé une façon de faire: avant d'adopter une loi, le Parlement devrait être tenu d'obtenir un avis juridique indépendant au sujet de l'effet de la charte sur cette loi.
Une autre mesure de réforme consisterait à renvoyer immédiatement toute loi annulée par les tribunaux à un comité parlementaire qui recommanderait toute action que le Parlement devrait prendre.
[Traduction]
Le changement le plus appréciable--au moment où le pouvoir judiciaire s'accroît peu à peu--serait de renforcer les pouvoirs du Parlement pour qu'il puisse agir indépendamment du gouvernement et lui demander des comptes.
Nous pourrions également élargir les droits garantis par la charte elle-même afin de protéger le droit à la vie privée et le droit à la propriété. Ce sont des questions qui ont été mises de côté en 1982. Le Parlement devrait les considérer comme du travail inachevé.
Ces changements ne se feraient pas sans heurts, mais la création, la modification et l'amélioration de la charte, il y a 20 ans, ont elles aussi connu leur part de difficultés. Les gouvernements peuvent initier aussi bien que célébrer. La meilleure façon de commémorer les droits et les libertés des Canadiens, c'est de les élargir.
* * *
Les comités de la Chambre
M. Rodger Cuzner (Bras d'Or--Cape Breton, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter dans les deux langues officielles le troisième rapport du Comité permanent du patrimoine canadien.
Conformément à son ordre de renvoi du lundi 18 février 2002, votre comité a étudié le projet de loi S-22, Loi portant reconnaissance du cheval de race canadienne comme le cheval national du Canada, et a convenu le mercredi 10 avril 2002 d'en faire rapport sans propositions d'amendement.
M. John Bryden: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Il convient probablement, à l'occasion du 20e anniversaire de la Charte des droits et libertés, de demander à la Chambre son consentement unanime afin que le projet de loi C-391 puisse faire l'objet d'un vote. Ce projet de loi--la présidence s'en souviendra--modifierait le serment de citoyenneté de façon à tenir compte des principes de la charte.
Si vous me le permettez, monsieur le Président, je vais lire le nouveau serment afin que les députés puissent...
Le Président: Je suis convaincu que nous en tirerions tous beaucoup d'enseignements, mais il conviendrait au préalable de demander à la Chambre de se prononcer. Y a-t-il consentement unanime pour que ce projet de loi puisse faire l'objet d'un vote?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
* * *
Procédure et affaires de la Chambre
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter le 51e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, au sujet de la liste des membres de quelques comités. Si la Chambre donne son consentement, je propose que le rapport soit adopté.
Le Président: Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
* * *
Défense nationale et anciens combattants
M. Geoff Regan (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, il y a eu des consultations entre les leaders à la Chambre et vous constaterez que la Chambre donnerait son consentement unanime à l'égard de la motion qui suit. Je propose:
Que le Sous-comité des anciens combattants du Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants soit autorisé à se déplacer à Ste-Anne-de-Bellevue le 18 avril 2002 et à Toronto, les 1er et 2 mai 2002, relativement à son étude sur les soins de longue durée prodigués aux anciens combattants, et que le personnel nécessaire accompagne le comité. |
Le Président: Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
* * *
M. Geoff Regan (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, dans le même ordre d'idées, il y a eu consultation entre les partis et vous constaterez que la Chambre donnerait le consentement unanime à l'égard de la motion qui suit. Je propose donc:
Que, relativement à son étude sur l'aquaculture, le Comité permanent des pêches et océans soit autorisé à se rendre en un groupe à Vancouver et Port McNeil, C.-B., du 20 au 26 avril 2002, et que le personnel nécessaire accompagne le Comité. |
Le Président: Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
* * *
M. Geoff Regan (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, vous constaterez que la Chambre donnerait également le consentement unanime à l'égard de la motion suivante. Je propose donc:
Que, relativement à son étude sur le système de télédiffusion canadien, le Comité permanent du patrimoine canadien soit autorisé à se rendre à Iqaluit, Whitehorse, et Yellowknife du 26 au 31 mai 2002, et que le personnel nécessaire accompagne le Comité. |
Le Président: Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
* * *
Défense nationale et anciens combattants
M. John Reynolds (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je propose que le troisième rapport du Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants, présenté à la Chambre le mercredi 7 novembre 2001, soit adopté.
C'est le jour idéal pour adopter cette motion; en effet, il semblerait que les Américains aient annoncé un plan de défense continentale sans en avertir le gouvernement canadien. Le Canada n'est mentionné dans aucun de leurs communiqués de presse et pourtant l'un d'entre eux mentionne leurs relations avec les Russes et plus particulièrement avec l'un de leurs généraux.
Les libéraux disent qu'ils sont un peu au courant et qu'ils en ont parlé, mais il est évident qu'ils ne savent pas ce que préparent les Américains et qu'ils ignorent ce qui se passe.
Le rapport dont il est question aujourd'hui est le rapport du Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants qui date de novembre 2001. Le comité avait publié son rapport avant le dépôt du budget fédéral en décembre dans l'intention d'influencer la politique du gouvernement présentée dans le budget. Le rapport majoritaire avait l'appui de tous les libéraux membres du comité, de tous les néo-démocrates membres du comité, de tous les conservateurs membres du comité et de tous les bloquistes membres du comité.
L'Alliance canadienne a publié un rapport minoritaire dans le but de renforcer les recommandations. Ce rapport mentionne notamment ce qui suit:
Pendant qu’a lieu la guerre contre le terrorisme, les capacités des Forces canadiennes sont en situation de crise. Après des décennies de négligence, les ressources des Forces ne sont plus en mesure de satisfaire à nos engagements et de défendre la sécurité des Canadiens. |
Pendant près de neuf mois, le Comité permanent de la défense nationale de la Chambre des communes a entendu de multiples témoins venus exposer les énormes lacunes de notre appareil militaire. Les hommes et les femmes des Forces canadiennes ont accompli un travail fantastique avec de maigres ressources, mais ils n’ont pas bénéficié d’un appui adéquat de la part du gouvernement et du Parlement. |
En outre, dans son récent rapport, la Conférence des associations de défense soutient que les membres des Forces canadiennes peuvent à tout moment et sans préavis se trouver en situation de danger et, par conséquent, perdre la vie ou être victimes d'une blessure ou d'une maladie invalidante. L'organisme estime en outre, qu'à la responsabilité illimitée des soldats, des marins et des aviateurs doit correspondre une responsabilité illimitée du gouvernement qui doit veiller à ce que les Forces canadiennes, même si elles sont en danger, puissent accomplir leur mission en courant le moins de risques possible. Pour atteindre cet objectif et mener à bien des missions justes commandées par les autorités politiques canadiennes, il faut de bons outils, notamment de l'équipement moderne et un haut niveau d'entraînement. |
De toute évidence, au cours des dernières décennies, nous avons énormément négligé nos soldats. Heureusement, de façon générale, le rapport majoritaire reconnaît cette lacune. Néanmoins, au moins trois éléments de ce rapport de même que son libellé nous semblent discutables. |
Il y a tout d'abord la question du traitement de l'institution parlementaire.
Le rapport a été rédigé en secret par un groupe de responsables travaillant sous la direction du président. Les députés de l'opposition en ont entendu parler pour la première fois lorsqu'on a convoqué une réunion du Comité, le 5 novembre, pour discuter d'un document dont aucun d'entre eux ne savait qu'il était en train d'être rédigé. Les membres du Comité n'ont pas été autorisés à voir le rapport avant 19 h le soir du 5 novembre. On leur a alors donné moins d'une heure pour le lire et exprimer leur accord ou leur désaccord avec des dispositions et recommandations précises. Aucune consultation avec les caucus respectifs n'était autorisée, et les membres du Comité se sont fait dire que le rapport serait immédiatement adopté et renvoyé au Comité des finances de la Chambre des communes, qu'ils en approuvent ou non les recommandations. Il était tout simplement impossible pour l'opposition officielle de souscrire sans réserve au rapport majoritaire dans le court délai dont elle disposait. |
Toute cette procédure ne consistant qu'à donner un préavis de quelques heures, à appeler les députés le soir pour lire le rapport et y souscrire, est tout à fait non parlementaire, mais pas inhabituelle de la part de ce gouvernement qui est devenu extrêmement arrogant. Son arrogance dépasse tout ce que j'ai vu en 30 ans de politique.
La politique de défense du Canada existe pour protéger la sécurité de tous les Canadiens.
Tous les efforts possibles doivent être faits pour veiller à ce que la politique de défense reflète le consensus des partis à la Chambre des communes. Cela doit comprendre une consultation adéquate entre tous les partis politiques, ainsi que la possibilité d'une véritable discussion et d'un véritable débat. Ce n'est que de cette façon que nous pourrons nous assurer d'adopter des politiques cohérentes et crédibles qui reflètent un consensus national bien réel et à long terme.
Il devrait être inacceptable d'utiliser le Parlement pour simplement approuver sans discussion les décisions qui ont déjà été prises en cette période de crise que nous vivons depuis quelques mois.
Nous pouvons certes, à la lumière des idéaux du gouvernement qui consistent à faire approuver des mesures sans discussion, voir pourquoi la vérificatrice générale a publié deux rapports d'affilée qui sont extrêmement critiques à l'égard du gouvernement non seulement dans le domaine de la défense, mais dans d'autres domaines. Trop de mesures sont prises sans qu'on procède aux enquêtes voulues.
J'ai oublié le montant exact, mais je pense qu'on a investi 174 millions de dollars environ dans un système de communications par satellite qui n'a jamais servi. Pour le Canadien moyen, il est incroyable de penser à ce que représentent 174 millions de dollars environ. Lorsqu'on dit ce chiffre rapidement, cela ne semble pas beaucoup, mais c'est une somme énorme. Le ministre a eu le culot de dire à la Chambre hier que le gouvernement avait fait appel temporairement à un autre système qui s'était révélé être meilleur et qu'il n'avait donc jamais eu à utiliser le système de 174 millions de dollars.
Peut-on imaginer comment le militaire en Afghanistan se sent lorsqu'un exemplaire du hansard lui tombe sous la main ou qu'il a assez de chance d'être à bonne distance d'une antenne parabolique pour pouvoir regarder la période des questions le soir et voir le ministre responsable de nos forces se lever et présenter des excuses comme celle-là alors que les militaires n'ont même pas de toilettes portables dans leur camp. Ce sera encore pire lorsque ce militaire apprendra que le ministère de la Défense a acheté au gouvernement de nouveaux avions d'affaires au coût de 101 millions de dollars alors que les militaires ne peuvent même pas avoir de nouveaux hélicoptères. Ces nouveaux avions ont de belles toilettes dotées d'éviers avec des robinets en or alors que les soldats ne peuvent même pas avoir de toilettes portables. Ce gouvernement est arrogant.
Nous avons besoin d'un engagement clair et précis à l'égard d'une augmentation des dépenses de défense. Mon parti n'est pas seul à réclamer cela, mais la vérificatrice générale, une personne respectée par tous les Canadiens et tous les députés en tant que fonctionnaire de la chambre et qui fait rapport au Parlement, a dit hier que cela pourrait prendre jusqu'à 30 ans pour combler les pénuries dans les forces. C'est tout simplement trop long. C'est trop long pour nos enfants et nos petits-enfants et trop long pour la sécurité du Canada.
Voilà pourquoi nos amis du Sud, les Américains, nous ignorent. J'ai honte de voir des ministres se lever pour parler de la souveraineté canadienne et dire qu'ils feront leurs affaires. Ils oublient que 80 p. 100 de nos échanges commerciaux se font avec nos amis américains de l'autre côté de la frontière. En plus d'être nos amis au plan du commerce, ils devraient être nos amis au plan de la défense et de la sécurité des frontières en Amérique du Nord. Toutefois, ils ne font pas appel à nous, parce que ce gouvernement a décidé de les ignorer. Je suis certain que le président Bush n'a pas oublié les commentaires que notre premier ministre a faits au sujet de son père lorsqu'il était chef de l'opposition, des commentaires honteux à l'effet que nous ne voulions pas avoir affaire aux Américains. Il se trouve que nous devrons vivre avec les conséquences que ces commentaires ont entraînées.
Le rapport majoritaire fait état de façon importante du sous-financement sérieux des Forces canadiennes. Cela reflète ce que nombre de témoins nous ont dit, à savoir que les restrictions constantes des ressources causaient l'érosion constante des capacités. Malgré cela, le rapport majoritaire ne fait aucune recommandation précise pour l'augmentation des dépenses de défense. En revanche, il signale le manque de ressources de l'ordre de 750 millions à 1,2 milliard de dollars du budget de fonctionnement et d'entretien dont nombre de témoins ont parlé, en plus du déficit de 5 à 6 milliards de dollars dans le budget d'équipement constaté par la vérificatrice générale, mais ne recommande aucune augmentation précise des dépenses.
Le Président: J'hésite à interrompre le chef de l'opposition, mais je dois annoncer à la Chambre que, en raison de la déclaration ministérielle, la période réservée à l'étude des initiatives ministérielles sera prolongée de 24 minutes. J'ai pensé qu'il voudrait en être informé.
M. John Reynolds: Monsieur le Président, je pourrais probablement utiliser ces 24 minutes pour renseigner les Canadiens sur les faiblesses du système de défense au Canada. J'espère que certaines des personnes qui occuperont votre fauteuil au cours de l'après-midi seront éclairées par l'excellent travail effectué par les préposés à la recherche de mon parti et par mon personnel.
À moins que les ressources nécessaires ne soient débloquées, la participation militaire du Canada à la guerre contre le terrorisme ne pourra pas durer. En fait, elle n'ira peut-être pas plus loin que la prochaine rotation, compte tenu de l'insuffisance du budget d'exploitation et de maintenance et du budget d'équipement. Le besoin immédiat d'une augmentation minimum de 2 milliards de dollars du budget du ministère de la Défense nationale aurait dû être exprimé clairement.
Cela a été exprimé clairement par la vérificatrice générale, qui a dit que nos forces armées avaient besoin de 2 milliards de dollars de plus. Cela a également été exprimé clairement à la Chambre par l'opposition officielle.
En fait, même cette modeste hausse risque d'être insuffisante puisque des représentants de la Conférence des associations de la défense ont informé le comité que le budget de la défense devrait être augmenté d'au moins 1 milliard de dollars par année pendant les cinq prochaines années. Le rapport de la vérificatrice générale parle d'une période critique de 30 ans si nous ne donnons pas le financement nécessaire à nos forces armées.
La crise à laquelle les Forces canadiennes sont confrontées est devenue si grave que nous ne pouvons plus nous attendre à ce que des demi-mesures suffisent.
Regardons la question de la démilitarisation. Le 8 mai 2001, un des plus grands soldats canadiens, le général Lewis MacKenzie, a dit ceci au comité permanent:
[...] si j'étais commandant d'une force ennemie, je préférerais de loin me battre contre l'armée canadienne aujourd'hui que contre l'armée canadienne d'il y a dix ans. [...] Je ne doute pas que les soldats eux-mêmes soient à la hauteur de la tâche, même si on a immolé les normes d'aptitude physique et de discipline sur l'autel des droits individuels et de la rectitude politique.[...] Si la [guerre du Golfe] avait lieu aujourd'hui, nous ne pourrions pas envoyer de brigade. Il n'en existe pas.[...] On ne peut pas simplement distribuer çà et là des armes de haute technologie et dire qu'on a augmenté la capacité opérationnelle. Pour pouvoir combattre, comme vous-mêmes l'avez dit dans votre ordre de renvoi, il faut avoir de l'équipement pour plus d'une journée. Il faut pouvoir durer. |
Voilà une dénonciation virulente des conséquences de l'ingérence politique auprès des Forces canadiennes. Le général MacKenzie est très respecté. C'est un grand Canadien. Il ne fait pas des déclarations comme celle-là à la légère et nous devrions l'écouter.
Le comité a entendu de nombreux témoins qui ont parlé de l'érosion constante des normes de formation et du délabrement de l'esprit de corps et du moral qui en résulte dans les forces armées canadiennes. Certains en ont parlé comme d'une démilitarisation de l'intérieur des Forces canadiennes et pourtant, à part la grosse allusion à la rectitude politique, le rapport majoritaire n'aborde pas sérieusement ce problème.
Dans la crise à laquelle nous sommes maintenant confrontés, nous ne pouvons tout simplement pas tolérer dans l'appareil militaire une ingérence politique injustifiée qui fait diminuer graduellement notre efficacité au combat. En effet, une des principales raisons pour lesquelles nous sommes maintenant insuffisamment capables de réagir rapidement et efficacement aux menaces qui surgissent, c'est que l'on a dissout le régiment aéroporté en 1995 pour des raisons de basse politique.
Le comité a répondu en recommandant d'apporter des améliorations substantielles à la capacité de la Force opérationnelle interarmées 2. Le rapport majoritaire garde le silence sur les conditions politiques qui ont entraîné la perte de cette capacité. Si on n'y remédie pas, la politisation des forces armées demeurera un problème et nos forces pourraient très bien être incapables de rebâtir leur cohésion et leur efficacité.
Une partie du rapport majoritaire concluait que la crise actuelle exige une réponse résolue et unie du Parlement. Le rapport majoritaire constitue un pas dans la bonne voie, mais si nous voulons vraiment rebâtir notre défense nationale, nous devons être prêts à aller encore plus loin. Cela requiert une discussion franche et honnête de même que la volonté de s'attaquer directement à tous les problèmes pertinents, aussi pénible que cela puisse être sur le plan politique.
C'est ce que l'Alliance canadienne s'efforcera de faire en attendant le dépôt du rapport sur la pleine capacité opérationnelle au début de l'an prochain. Nous savons que les Canadiens ne s'attendent à rien de moins. C'est, en substance, ce que nous disons dans le rapport minoritaire.
Comment le gouvernement a-t-il réagi à notre rapport minoritaire et à la recommandation unanime de tous les autres députés de l'opposition et des députés ministériels dans le rapport majoritaire? Il n'a nullement tenu compte de ce que recommandaient les parlementaires des deux côtés de la Chambre.
Le budget de décembre dernier ne permettra absolument pas de remédier à la crise que traversent les Forces canadiennes. Encore une fois, comme je l'ai déjà dit, il suffit de lire le rapport présenté hier par la vérificatrice générale, et son rapport précédent. Dans les deux cas, elle insiste sur ce fait, et dans des termes peut-être encore plus énergiques que ne le fait l'opposition car, contrairement à cette dernière, la vérificatrice générale a au moins la possibilité d'examiner les livres et de vérifier les détails.
Quelques mois après le dépôt du budget de décembre, le commandant des forces armées, le général Mike Jeffery, a déclaré au Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants que ce budget n'était pas à la hauteur des attentes des Forces canadiennes.
Je n'envie pas le commandant de ces forces armées qui combattent en de nombreux endroits ou participent à des initiatives de paix ailleurs, lorsqu'il aura à dire aux braves hommes et femmes qui travaillent pour nous que les dirigeants politiques n'ont plus d'argent à leur donner, alors qu'ils ont pu trouver 101 millions de dollars pour acheter des réactés pour promener les ministres. On a entreposé une antenne parabolique de 174 millions de dollars parce que l'antenne de remplacement qui a été achetée était tellement efficace que l'autre n'était plus nécessaire, et il y a de nombreux autres exemples de ce genre. J'y reviendrai d'ailleurs un peu plus tard. Nos militaires doivent être fort mécontents de servir sous un gouvernement qui tient aussi peu compte de leurs besoins.
Les fonds dégagés suffisent à peine à maintenir les forces armées en vie. La vérificatrice générale rapportait, en décembre, que les forces armées accusent toujours un manque à gagner de 1,3 milliard de dollars. Le budget du matériel est lui aussi déficitaire.
Bien que le Canada soit en guerre, le gouvernement ne tient pas compte des besoins des Forces canadiennes. Il préfère s'appuyer sur les Américains lorsque cela fait son affaire. Pendant ce temps, la réputation internationale du Canada se détériore.
Le gouvernement n'a pas les fonds nécessaires pour combler les besoins de nos militaires, mais il peut retirer 101 millions de dollars du budget de la Défense pour acheter deux nouveaux appareils Challenger qui serviront à transporter les ministres et le premier ministre lors de leurs déplacements au pays ou en vacances. Ce projet, approuvé en dix jours seulement, est une véritable honte.
L'administration militaire elle-même a admis qu'il n'était pas nécessaire de remplacer le Challenger que nous avions. Cette position n'est pas celle de l'opposition, mais bien celle du personnel militaire, de ceux-là même qui pilotent ces aéronefs.
Il a suffi de dix petits jours pour que tout soit réglé. En cet endroit, il faut habituellement plus de dix ans pour obtenir des résultats; même des projets fort valables et nécessaires ne sont pas traités aussi rapidement en ce Parlement. Cependant, lorsqu'il s'agit du confort de ceux qui siègent du côté ministériel, les choses peuvent se produire très rapidement. Je me souviens encore, à l'époque où ces gens siégeaient du côté de l'opposition, des hauts cris au sujet des Taj Mahal et des Gucci dans les placards.
Nos militaires, hommes et femmes, savent qu'ils doivent se déplacer en avions de transport Hercules qui ont déjà plus de 35 ans. Ils doivent emprunter des hélicoptères Sea King qui ont près de 40 ans et qui requièrent 40 heures d'entretien pour chaque heure de vol.
En passant, les députés savent-ils depuis combien de temps le bureau de projet pour le remplacement des Sea King est ouvert? Il a été créé en 1981. Pourtant, la décision sur les Challenger a été prise en dix jours. C'est absolument honteux.
Une voix: Dix jours par rapport à vingt ans.
M. John Reynolds: Notre collègue dit que, en vingt ans, les militaires n'ont pas obtenu ce qu'ils voulaient alors que le gouvernement a obtenu ces jets en dix jours. De toute évidence, la gestion de la politique de défense laisse gravement à désirer.
Que faisons-nous maintenant? J'aimerais préciser ce que l'Alliance canadienne aimerait voir inclus dans le rapport final de préparation opérationnelle qui sera déposé par le Comité permanent de la défense et des anciens combattants le mois prochain. J'aimerais me rapporter à la présentation faite par notre porte-parole principal en matière de défense, le député de Lakeland, au Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants. Il a fait d'importantes suggestions.
Il a proposé que le Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants fasse les recommandations suivantes et ce sera fait.
Tout d'abord, le comité devrait blâmer le gouvernement pour sa mauvaise gestion et pour le peu d'attention qu'il a consacrée à la défense du Canada. Pourquoi? Le budget du mois de décembre et les réponses faites par le gouvernement au rapport provisoire présenté par le comité en novembre, de même qu'au rapport de l'année dernière sur le processus d'acquisition, constituent un affront pour tous les membres du comité et pour tous les militaires canadiens.
Le comité doit recommander une augmentation minimum du budget de la défense de 2,1 milliards de dollars par année pour régler l'important manque à gagner souligné dans les budgets de fonctionnement et d'équipement et surtout pour reconstruire nos forces militaires. Pourquoi est-ce nécessaire? C'est nécessaire parce que le rapport majoritaire déposé par le comité plus tôt cette année faisait allusion à un manque à gagner de l'ordre de 750 millions à 1,2 milliard de dollars par année dans le budget de fonctionnement et d'entretien soulevé par plusieurs témoins, mais sans réellement recommander d'augmentation précise des dépenses.
Nos recommandations doivent être claires. Il ne suffit pas de parler vaguement d'augmentations. Le dernier rapport de la vérificatrice générale devrait nous le faire comprendre. Il ne suffit pas de faire des promesses. Il faut appuyer nos militaires.
Les dépenses en matière de défense ont totalisé 9,7 milliards de dollars, soit 1,6 milliard ou 14 p. 100 de moins que les 11,3 milliards prévus dans le budget de 1993. Ce ne sont pas mes chiffres. Ils viennent directement des comptes publics. Pourtant, nous avons entendu le ministre dire je ne sais trop combien de fois à la Chambre que le gouvernement investit dans les forces armées, que la situation s'améliore et que tout est fantastique.
Revenons à 1993. Les députés gagnaient probablement environ 45 000 $ par année. Nous gagnons actuellement 135 000 $ par année. Pourtant, au chapitre de la défense, un des éléments les plus importants dans notre pays, surtout depuis les activités terroristes, le budget a baissé de 14 p. 100 ou de 1,6 milliard de dollars par rapport à 1993.
Pouvons-nous blâmer les soldats de nos forces armées lorsqu'ils disent que nous nous préoccupons d'abord de nous? Pas du tout. Nous ne nous demandons pas de prendre place dans des avions ou des hélicoptères de 40 ans. Nous prenons nos Challenger de 16 ans et les remplaçons par des flambants neufs, des plus luxueux. C'est honteux. Tous les députés devraient avoir honte, même si nous n'avons pas un mot à dire sur ce que le gouvernement a fait. Je me suis entretenu avec beaucoup de membres des forces armées, et ils ne sont pas très heureux de la façon dont le gouvernement s'occupe d'eux.
Il faudrait porter le budget de la défense à 12,6 milliards de dollars, compte tenu de l'inflation, seulement pour ramener les dépenses au niveau de 1993. Il s'agit là d'une forte augmentation. Nous pourrions nous demander d'où viendra cet argent. Si nous examinons les rapports de la vérificatrice générale, nous constatons dans les deux derniers qu'environ 16 milliards de dollars ont été gaspillés. Je suis sûr que nous pouvons trouver cet argent et nous assurer, à l'avenir, que nos amis américains se rendront compte que nous voulons sérieusement affecter des fonds à la défense et collaborer avec eux dans un périmètre de sécurité nord-américain. Cependant, il est bien dommage qu'ils fassent maintenant des annonces sans même nous consulter, sans même être à nos côtés pour dire que nous travaillons ensemble.
À moins que les ressources nécessaires ne soient accordées, l'engagement des Forces canadiennes à l'égard de la guerre contre le terrorisme ne sera pas réalisable. De toute façon, il ne le sera peut-être pas au-delà de la prochaine rotation.
Cela est entièrement justifié, selon ce que la vérificatrice générale a indiqué au Parlement. Ce ne sont pas mes chiffres. Ce sont ceux de la vérificatrice générale. Celle-ci a dit, dans son rapport de 2001, que les Forces canadiennes avaient besoin d'au moins 1,3 milliard de dollars de plus chaque année juste pour combler les déficits actuels, et que pour remplacer l'équipement désuet au cours des cinq prochaines années, il faudrait doubler pour cette période le budget de l'équipement, le faisant passer de 6,5 milliards de dollars à 11 ou 11,9 milliards de dollars par année.
Il faut combler ce déficit immédiatement pour garder les effectifs militaires à leur niveau actuel et remplacer une plus grande quantité d'équipement.
De plus, il faut ajouter un milliard de dollars par année à la base budgétaire de la Défense nationale, afin d'améliorer et de renforcer nos Forces canadiennes. En fait, le Comité sénatorial de la défense, à prédominance libérale, a réclamé une augmentation de 4 milliards de dollars des dépenses consacrées à la défense. Nous croyons aussi que c'est ce qu'il faut faire, et pourtant nous ne sommes pas souvent d'accord avec le Sénat sur bien des choses. Ces sénateurs indépendants sont aussi frustrés que l'opposition au Canada de voir ce que le gouvernement fait des dépenses consacrées à la défense.
Les libéraux prétendent avoir déjà augmenté le budget de la défense. Nous entendons continuellement cette rengaine de la part du ministre de la Défense nationale. Quelle est donc la vérité? La vérité est que le budget libéral est au moins un milliard de dollars en deçà de ce qu'il devrait être chaque année. Dans le budget présenté en décembre dernier, les libéraux ont annoncé l'attribution d'une somme de 1,2 milliard de dollars à la Défense nationale, mais, de cette somme, seulement 500 millions de dollars ont été consacrés aux dépenses militaires au cours des cinq prochaines années. Même s'il s'agit bel et bien d'une augmentation, on est loin du minimum de 1,3 milliard de dollars qui est nécessaire, selon le rapport de 2001 de la vérificatrice générale, juste pour maintenir le niveau des Forces canadiennes.
En réalité, la majeure partie du budget de décembre n'a rien à voir avec des dépenses militaires réelles. En fait, on inclut de plus en plus de dépenses non militaires dans le budget de la défense. Il ne faut pas oublier que le gouvernement n'a pas augmenté de manière sensible les dépenses militaires en ajoutant 1,2 milliard de dollars en cinq ans au budget de la défense puisque, en fait, cette somme sera en grande partie dépensée pendant les deux premières années pour financer l'opération Apollo en Afghanistan, par exemple. En ne dépensant plus rien les années suivantes, le gouvernement ne fera rien pour arrêter le déclin à long terme des forces armées canadiennes.
Comparons ce que fait le Canada en matière de défense nationale à ce que font nos alliés. Le résultat des compressions draconiennes imposées par les libéraux est que, aujourd'hui, le Canada consacre à la défense la moitié de ce que les pays de l'OTAN y consacrent en moyenne, soit 2,1 p. 100 du PIB. D'où la nécessité d'ajouter immédiatement au moins 2 milliards de dollars à la base budgétaire du ministère de la Défense, soit 10 milliards de dollars sur cinq ans, et de fournir des fonds supplémentaires temporaires pour financer les déploiements nécessaires dans le cadre de la guerre contre le terrorisme.
Il est embarrassant de penser que, avec tous les avantages que nous avons au Canada, nos énormes ressources, l'enthousiasme des Canadiens, l'aide que nous avons apportée au monde au cours de la Première et de la Deuxième Guerres mondiales, nos forces militaires fondent de la sorte. Il est honteux que nous consacrions à la défense moins de la moitié de ce que nos partenaires de l'OTAN y consacrent. Le gouvernement devrait avoir honte, mais comme il ne réagit pas, je ne peux que supposer que ce n'est pas le cas.
L'Alliance canadienne demande depuis longtemps aux libéraux d'ajouter immédiatement au moins 2 milliards de dollars par an au budget de base de la défense nationale, soit 10 milliards de dollars sur cinq ans. Des fonds supplémentaires sont également nécessaires pour appuyer nos déploiements dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Toutefois, ces augmentations suffiraient tout juste à arrêter l'érosion de notre capacité militaire. Comme le suggère le Sénat dans son rapport sur la défense, le Canada doit faire passer son financement de son niveau actuel, qui est de 1,2 p. 100 du PIB, à ce qu'il est en moyenne dans les pays de l'OTAN, soit actuellement 2,1 p. 100 du PIB.
La crise qui secoue les Forces canadiennes est maintenant si grave que nous ne pouvons plus nous attendre à ce que des demi-mesures suffisent. Or, je ne vois aucune indication que les gens d'en face soient prêts à faire quelque chose pour résoudre le problème. Tout ce que nous voyons, c'est leur gaspillage et leur arrogance, mais aucun signe d'aide pour nos militaires.
Quelle autre recommandation fera l'Alliance canadienne? Nous avons dit que les commandos de la Force opérationnelle interarmées 2, ou FOI2, qui accomplissent un travail remarquable, devraient demeurer une force d'élite à l'effectif relativement peu nombreux. On ne devrait pas porter l'effectif de la FOI2 à plus de 400 militaires, et même ce nombre devrait être envisagé dans le contexte d'une analyse globale de la défense tenant compte d'autres problèmes sérieux dans les Forces canadiennes. Le Canada a besoin d'une véritable force de réaction rapide similaire à l'unité aéroportée que les libéraux ont démantelée en 1995. Il faudrait ajouter une telle capacité d'intervention rapide aux Forces canadiennes.
Avant le dépôt du rapport provisoire du Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants, un seul témoin a recommandé que l'on augmente la taille de la Force opérationnelle interarmées. Il l'a proposé tout en faisant une mise en garde. Il a mentionné que dans le cadre d'un mandat plus vaste, il était important que l'on modifie la doctrine concernant l'utilisation des militaires et que l'on assure une meilleure surveillance des opérations spéciales et des activités qui en découlent.
Ce témoin a précisé clairement qu'il existe en règle générale deux catégories de forces spéciales: les forces ayant comme tâche principale d'assurer la protection des personnes de marque, de récupérer les otages et d'accomplir d'autres missions qui relèveraient principalement d'une force de réaction; et les forces chargées de pénétrer loin en territoire ennemi pour se livrer à des activités de reconnaissance, à des arrestations et peut-être même à des combats. Le Canada ne comptant qu'un groupe de militaires formés pour se livrer à des opérations spéciales, le témoin a recommandé que l'on revoit le mandat de la FOI2 afin d'y prévoir des missions s'apparentant davantage à des pénétrations en profondeur. Il a dit que, dans ce contexte, il faudrait plus d'effectifs, et il a recommandé d'accroître le nombre de militaires.
Pourtant, le rapport majoritaire du Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants présenté en novembre recommandait que l'effectif de la FOI2 soit porté à près de 1 000 militaires. Pourquoi en est-il ainsi? Nous estimons que l'effectif de la FOI2 ne devrait pas dépasser les 400 militaires. La FOI2 n'étant tenue de rendre des comptes qu'au ministre de la Défense, l'unité est capable de s'acquitter à l'étranger de missions devant faire l'objet d'un examen attentif de la part du public et des parlementaires. C'est là un des aspects clés.
Une force menant des activités entourées d'un certain secret est nécessaire dans certaines conditions. Toutefois, l'effectif de la FOI2 ne devrait pas être porté au-delà de 400 militaires. Compte tenu de son mandat actuel, il serait dangereux d'en accroître la taille. À moins de se livrer à un examen exhaustif de la défense dans le contexte d'une politique claire en matière d'affaires étrangères, le Canada ne devrait pas s'engager à porter à au-delà de 400 militaires la taille de cette force dont les activités sont entourées du plus grand secret.
La FOI2 est similaire au SAS britannique, de sorte que nous pourrions soutenir la comparaison avec la Grande-Bretagne. Je souligne de nouveau que le Canada a besoin d'une force de réaction rapide similaire au corps des marines de Grande-Bretagne ou de Hollande ou à la brigade de commandos parachutistes de Belgique, en mesure d'accomplir bon nombre des opérations dont s'acquittait le régiment aéroporté.
Dernièrement, le ministre des Affaires étrangères a parlé de la nécessité de revoir la politique en matière d'affaires étrangères et de défense. Ce besoin est évident. L'influence que nous exerçons sur la scène internationale a tellement diminué sous la direction du gouvernement libéral que c'est à peu près tout ce que nous pouvons faire. La révision de la partie défense porterait sur de nombreux aspects, mais mes collègues et moi pensons qu'elle devrait surtout consister à voir ce qu'il faudrait, en termes de ressources, de formation et de matériel, pour établir une force spéciale de type brigade au Canada. Jusqu'en 1995, le Canada a entretenu une Force d'opérations spéciales, qui était équipée comme une brigade et qui était composée d'environ 5 000 soldats dotés surtout de matériel léger. Nous devons songer à rétablir une telle force et à lui fournir le transport aérien et maritime nécessaire pour intervenir en cas d'urgence, au Canada et à l'étranger.
Le besoin de forces mobiles légères est reconnu au Canada au moins depuis le Livre blanc sur la défense, en 1964. Depuis ce temps, le gouvernement a commencé à établir et à entretenir une telle force. Mais les ressources qu'il faut pour assurer le transport nécessaire ont toujours fait défaut, surtout à cause du manque d'intérêt du gouvernement en matière de défense nationale.
L'examen que le gouvernement doit faire des dépenses de la défense devrait surtout porter sur les ressources, la formation et le matériel qu'il faudrait pour établir une force spéciale de type brigade au Canada. Le gouvernement devrait alors présenter ses propositions au Parlement et s'efforcer de faire approuver la politique par tous les partis représentés à la Chambre des communes.
Pour qu'un livre blanc donne de bons résultats, il doit être signé par le ministre des Finances et le premier ministre. Le soutien d'un Parlement uni est la seule façon de voir à ce que la politique en matière de défense fasse l'objet d'une approche impartiale et d'un financement garanti. C'est ce qui manque à la Chambre. L'opposition offre son soutien au gouvernement, mais il n'y a aucune communication, aucune collaboration. Nous voudrions qu'il y en ait.
Des membres du Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants se sont dits prêts à appuyer une solide politique de défense. Le gouvernement devrait envisager sérieusement de les faire participer à l'élaboration de la politique. Nous, de l'Alliance canadienne, croyons que le Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants doit signaler dans son prochain rapport que tous les témoins indépendants qui ont comparu devant lui depuis avril 2001 ont déploré le manque de préparation des forces armées canadiennes.
Voici ce que certains experts ont dit. Le 10 mai 2001, le lieutenant général Roméo Dallaire a déclaré ceci:
J'affirme qu'actuellement, nous disposons de capacités limitées pour faire face à un état de guerre sans recourir à la mobilisation. Cela ne réduit pas la capacité ni le désir du gouvernement de notre pays et de sa population d'être en mesure de participer à une guerre, même si Stratégie 2020 décrit le rôle que l'on pourrait y jouer en le limitant à un créneau. [...] Il s'agit en soi d'un problème complexe auquel il faut faire face quand on réfléchit aux responsabilités et aux risques que court notre pays au niveau de sa propre défense, ou de sa participation à des alliances genre OTAN ou NORAD, et/ou des alliances passées sous la conduite d'un seul pays, comme dans le cas des États-Unis pour la guerre du Golfe. |
Le général Dallaire a ajouté ceci:
C'est aussi un problème pour participer aux opérations destinées à maintenir la sécurité internationale dans le cas de guerres traditionnelles ou de guerres ouvertes. |
Si les Américains font aujourd'hui des annonces en l'absence des Canadiens, c'est à cause de ce que le général Dallaire a signalé. Nous ne l'avons pas écouté, toutefois. N'est-ce pas honteux que nous ne soyons pas aux côtés de nos alliés américains, de nos principaux partenaires commerciaux, de nos voisins et amis, pour une annonce aussi importante pour la sécurité de l'Amérique du Nord?
Le général Dallaire a aussi déclaré ceci:
Je soutiens que nous rencontrerions même des problèmes à participer à la résolution de conflits à grande échelle—comme certains qualifieraient la guerre du Golfe, par opposition à une guerre réelle, où le pays est en danger ou en guerre. |
Et puis encore ceci:
Nous avons passé dix ans à épuiser les forces, en particulier l'armée. Nous avons épuisé les réserves. Nous avons maintenant des réservistes qui partent deux ou trois fois. Selon moi, les troupes ont été engagées, ont couru les risques—avec quelques pertes—et ont acquis des compétences en résolution de conflit, mais elles sont fatiguées car elles ne sont pas suffisamment nombreuses. |
N'est-ce pas là une condamnation? Hier à la Chambre, le ministre a affirmé que le gouvernement respectait ses engagements. Or, la vérificatrice générale soutient que ce n'est pas le cas. Aujourd'hui, le ministre tente encore de convaincre notre porte-parole que le gouvernement respecte ses engagements. Ce n'est pas vrai. C'est tout simplement de la frime.
Lorsque des personnalités comme le général Dallaire font de telles affirmations, je m'interroge parfois. Je vois ce que les médias recherchent. C'est devenu un enjeu important pour le Canada. J'espère que l'annonce par les Américains, aujourd'hui, de cette nouvelle mesure de sécurité secouera les Canadiens et les médias.
Le Canada n'appuie pas son principal partenaire commercial, qui est également son voisin, son allié et son ami, parce que le gouvernement n'a pas fourni le financement nécessaire pour assurer le maintien de nos forces armées. À titre de chef de l'opposition, c'est ce que je dirais. Les généraux et les membres des Forces canadiennes émettent la même opinion. Seuls les membres du gouvernement ne semblent pas comprendre la situation. Ce gouvernement gaspille des millions de dollars pour de grosses acquisitions matérielles, notamment des avions à réaction et des systèmes de sécurité qui sont remisés. Comme la vérificatrice générale l'a souligné, le gouvernement a gaspillé des dizaines de milliards de dollars.
Le gouvernement devrait remettre de l'ordre dans sa situation financière. Il faut allouer une partie de cet argent au secteur militaire. Le reste devrait servir à acquérir de l'équipement d'imagerie par résonance magnétique ou IRM. En fait, les 101 millions de dollars auraient vraisemblablement pu servir à acheter 50 appareils de IRM, d'un océan à l'autre. Cela aurait évité à nombre de citoyens plusieurs mois d'attente pour entrer à l'hôpital et recevoir un traitement. Les citoyens sont certainement emballés de savoir que le premier ministre et son entourage ont la chance d'avoir de la robinetterie plaquée or dans leurs salles de bain et qu'ils peuvent se rendre partout au pays en avion.
Le 8 mai 2001, le major-général Lewis MacKenzie a déclaré que, s'il était le commandant de forces ennemies, il préférerait de loin combattre contre l'armée de terre canadienne d'aujourd'hui, par rapport à cette même armée il y a dix ans, du fait que celle-ci est aujourd'hui constituée de bric et de broc, qu'elle est équipée de matériel de haute technologie, et que les effectifs en ont été réduits depuis une dizaine d'années, surtout dans la marine et dans les forces aériennes. Je l'avais déjà dit, mais cela m'avait tellement choqué que j'ai ressenti le besoin de le répéter.
Une voix: Nous avons de bons soldats dans nos forces armées.
M. John Reynolds: Nos militaires sont excellents. La presse nous apprend cependant que, lors d'une réunion tenue il y a quelques mois à Cornwall, un général a déclaré devant des réservistes et des militaires venus d'un peu partout au Canada qu'il était temps de dire la vérité aux Canadiens. Nous recevons des lettres de militaires qui s'excusent de se mêler de cette polémique et de faire des commentaires politiques, mais ne peuvent s'en empêcher, car ils souffrent de la situation actuelle. Il est temps d'agir. Et c'est pourquoi nous avons présenté cette motion aujourd'hui.
Le gouvernement veut poursuivre l'étude du projet de loi sur les espèces en péril, dont l'adoption lui permettra de saisir des biens fonciers sans avoir à en indemniser les propriétaires. Mais nous préférons traiter de la motion, que nous croyons plus importante, compte tenu notamment de ce qu'on a vu aujourd'hui aux États-Unis et que l'on voit depuis quelques jours en ce qui concerne l'achat de jets par le gouvernement.
Le 26 avril 2001, la Conférence des associations de la défense a déclaré:
[...] nous sommes préoccupés depuis peu par l'impression qu'on semble avoir que les Forces canadiennes sont en mesure de remplir tous leurs engagements et qu'elles sont plus aptes au combat qu'elles ne l'étaient il y a dix ans. |
Nos effectifs militaires ont été réduits du tiers. J'en déduis, à la lecture des propos de l'Association, que le gouvernement libéral est sans doute le premier dans l'histoire du Canada à être passé maître dans l'art de jeter de la poudre aux yeux. Il fait sa propagande, et les Canadiens y croient.
Une voix: Ils sont les meilleurs à ce jeu.
M. John Reynolds: Je n'ai jamais vu de plus habile propagandiste que le gouvernement libéral. Mais la vérité sur l'arrogance et les habitudes dépensières du gouvernement sort de l'ombre peu à peu. Ce n'est pas une bonne chose pour le Canada, mais les prochaines élections pourraient s'avérer très favorables aux Canadiens.
À sa deuxième comparution devant le comité le 5 novembre dernier, la Conférence des associations de la défense a déclaré ce qui suit: «Nous en concluons que, parce que le MDN ne dispose pas d'un budget suffisant, les Forces canadiennes ne peuvent remplir leurs engagements au-delà d'un certain niveau marginal au regard de ce que prévoyaient les plans actuellement en cours d'exécution en ce qui concerne les ressources qu'on entendait mobiliser et les échéanciers qu'on s'était fixés.»
Un autre expert, le professeur Douglas Bland, a déclaré devant le comité, le 3 avril 2001:
Je conclurai en mettant en doute l'affirmation émanant de certains officiers supérieurs—et du ministre à quelques reprises—selon laquelle les Forces canadiennes sont aujourd'hui mieux préparées au combat qu'elles ne l'ont été à n'importe quel moment depuis les 10 ou 20 dernières années. Il s'agit là d'une affirmation d'une importance cruciale, qui est peut-être vraie, mais je n'en ai trouvé aucune preuve dans les rapports, études ou recommandations de l'état-major ou du quartier général. Je suis convaincu--ou à tout le moins j'espère--qu'un tel document se trouve quelque part dans l'organisation de la défense. Mais je pense qu'il serait dangereux de faire de telles affirmations sans s'être livré au préalable à une évaluation de ce qu'était notre capacité il y a dix ans, de ses changements et de ses améliorations et de ce qu'elle est maintenant.[...] Je ne connais aucun officier militaire d'expérience ou expert qui puisse appuyer cette remarque. |
Permettez-moi de répéter cette dernière phrase: «Je ne connais aucun officier militaire d'expérience ou expert qui puisse appuyer cette remarque.»
D'autres experts nous racontent la triste histoire du sous-financement du gouvernement et de l'absence d'appui pour les militaires. Le 5 avril 2001, le Bureau du vérificateur général a déclaré qu'en l'an 2000, il avait constaté qu'il y avait eu d'importantes réductions de la structure des forces. Le ministre nous dit que les ressources augmentent sans cesse, mais c'est le Bureau du vérificateur général qui faisait alors état des faits.
À ce point, le ministère s'est adressé au conseil des ministres pour lui dire qu'il n'avait plus de marge de manoeuvre et que les pressions étaient grandes. À notre avis, il n'y a toujours pas d'équilibre entre la structure des forces, la modernisation et l'état de préparation actuel. Il reste encore des décalages entre les différents piliers et des choix difficiles doivent être faits. Il faut pratiquer des réductions quelque part ou rajouter des crédits pour maintenir l'équilibre entre les différents objectifs actuels. Cela se passait il y a un an et pourtant les fonds n'ont pas encore été versés et un autre rapport, que je citerai plus tard, blâme encore davantage le gouvernement.
Le 25 octobre 2001, lorsqu'on lui a demandé si le Canada avait la capacité voulue pour remplacer les forces américaines en Afghanistan, compte tenu de nos engagements actuels dans les Balkans, M. John Thompson a répondu:
Nous sommes en train de gratter le fond du baril en ce moment même. Par exemple, s'il se produisait une crise du genre de celle d'Oka, nous ne pourrions pas réagir. |
N'est-ce pas effrayant? Si nous éprouvions un problème grave, nous ne pourrions pas, à cause de nos engagements à l'étranger, assumer cette responsabilité chez nous. Faut-il s'étonner que, aujourd'hui, les Américains aient annoncé un important programme sans dire un mot du Canada? Ils vont de l'avant avec d'autres, puisque nous n'avons pas l'argent qu'il faut.
Je ne me souviens pas qu'un ambassadeur américain ait jamais critiqué le gouvernement du Canada. L'ambassadeur en poste nous dit sans cesse que les États-Unis veulent que notre gouvernement augmente ses dépenses pour l'armée. Ils veulent que nous atteignions le niveau moyen des autres pays de l'OTAN et que nous mettions de l'ordre chez nous. L'ambassadeur n'a pas eu beaucoup de succès jusqu'à maintenant, mais nous allons continuer de l'encourager.
Nous tiendrons d'autres débats comme celui-ci aux Communes et nous ferons tout notre possible pour forcer la main au gouvernement. Ainsi, nos forces armées sauront qu'au moins les partis d'opposition les soutiennent. Nous essayons d'obtenir pour elles plus d'argent et un meilleur équipement.
Une voix: Il a acheté de nouveaux Challenger.
M. John Reynolds: Madame la Présidente, quelqu'un vient de parler des Challenger. J'en ai parlé à quelques reprises. Je me suis dit aujourd'hui que c'est peut-être pour cela que le gouvernement a commandé deux Challenger. Avec le système de défense nord-américain que les Américains ne veulent pas que nous soutenions, les membres du gouvernement ont voulu quelques appareils plus rapides pour avoir un peu plus d'endroits où se cacher. Les jets leur permettent maintenant d'atterrir à 55 aéroports de plus.
David Rudd a déclaré le 20 novembre 2001:
Je considère que les événements du 11 septembre n'ont en fait révélé aucune faille dans les capacités opérationnelles des Forces canadiennes étant donné que ces failles existaient avant les attaques. |
M. Jack Granatstein a dit le 22 novembre 2001:
Il est plus que temps que les Canadiens se comportent comme une nation. Cela veut dire qu'ils doivent avoir une véritable armée de bons soldats bien entraînés, de l'équipement moderne de haute technologie et les fonds nécessaires pour la défense. [...] Je dirais pour ma part que vous pouvez payer aujourd'hui en argent pour avoir une armée professionnelle efficace et une réserve bien entraînée ou vous pouvez payer plus tard en argent et avec le sang de vos fils et de vos filles. |
Le colonel Brian MacDonald, à la retraite, a dit le 27 novembre 2001 qu'entre 2010 et 2015:
... les Forces canadiennes se retrouveront avec un très grand nombre de plates-formes importantes en fin de cycle pendant cette période. Dans cette perspective, il faut se demander quel budget sera suffisant pour remplacer les ressources qui arriveront pendant cette période à la fin de leur vie opérationnelle. Selon moi, le budget d'équipement prévu n'y suffira pas. En conséquence, les Forces canadiennes se retrouveront dans la situation déplaisante d'avoir à se débrouiller avec un budget tout simplement insuffisant pour répondre, au niveau de l'équipement, aux attentes de la politique énoncée par le gouvernement dans le Livre blanc de 1994. |
Le major général Clive Addy a dit le 5 février 2002:
Ayant écouté le ministre de la Défense nationale tenter de définir avec exactitude ce que nous pourrions produire et ayant vu les gens courir en tous sens dans les Forces canadiennes pour concocter ce que nous avons aujourd'hui en Afghanistan, ce qui, pour l'essentiel, correspond à l'engagement du Livre blanc, je crois que cela témoigne suffisamment de l'état de sous-financement, de sous-dotation, de surcharge de travail et de préparation médiocre de nos forces armées. |
Quant au volume de l'effectif, nous n'en avons pas autant par dollar investi dans la défense que la plupart des pays de l'OTAN et les coûts de notre infrastructure, dans ce pays vaste et froid qui est le nôtre, tout comme le coût concurrentiel de la main-d'oeuvre de notre force volontaire expliquent en bonne partie la situation. Mais, nous pouvons faire mieux. |
Bref, comme membre du G-7 et pays aussi dépendant du commerce, surtout avec les États-Unis, comme pays qui croit au multilatéralisme et s'en remet à lui pour construire un monde meilleur, le Canada doit être vu par ses citoyens comme contribuant à sa propre sécurité et par ses amis et alliés comme faisant sa part. Consacrer 1,2 p. 100 du PIB à la défense ne satisfait aucunement à ces exigences, à mon avis. |
Je me demande ce qu'il dirait aujourd'hui après avoir pris connaissance de cette dépense de 101 millions de dollars pour l'achat de Challenger et de 174 millions de dollars pour des systèmes de sécurité conservés dans des entrepôts et jamais utilisés.
Une voix: Votre gouvernement.
M. John Reynolds: Un député d'en face a dit mon gouvernement. Je n'ai jamais fait partie du gouvernement conservateur, Dieu merci. J'étais membre du gouvernement social-créditiste en Colombie-Britannique. Nous avons équilibré le budget, il n'y avait pas de dette et tout était merveilleux.
Une voix: Parlons-en.
M. John Reynolds: Quelqu'un veut qu'on en parle. Si les conservateurs à l'époque avaient dirigé le pays comme les gouvernements conservateurs...
Une voix: Parlez-nous de Peterborough.
M. John Reynolds: Peterborough est une ville fantastique. Sa population sera aussi exaspérée au sujet de nos militaires. Dans ma vingtaine, j'ai travaillé pour Ethicon sutures, une société du groupe Johnson & Johnson, qui a attiré quantité de gens d'ailleurs dans la région, lesquels ont eu un effet stimulant sur celle-ci. À cette époque, nos militaires étaient des gens assez heureux. Nous avions de bons militaires à cette époque. Je me souviens de mon grand-père...
M. John O'Reilly: J'étais dans la réserve à cette époque.
M. John Reynolds: Vous avez été dans la réserve toute votre vie.
Mon grand-père vivait à Barrie, en Ontario, à Camp Borden, et il s'est battu dans les deux conflits mondiaux. J'ai toujours certaines de ses médailles à la maison. Je ne l'ai jamais entendu se plaindre. J'avais coutume d'aller à Camp Borden avec lui à cette époque et je tondais la pelouse certains samedis. Je n'ai jamais entendu des militaires se plaindre. Ils étaient toujours des gens fiers, fiers de leur pays et fiers de ce que nous faisions pour eux.
Les deux derniers gouvernements, celui-ci en particulier, avec ses grandes compressions, nous ont fait vraiment mal. Même les députés d'en face doivent être embarrassés aujourd'hui quand ils voient les Américains annoncer leur périmètre de sécurité pour l'Amérique du Nord et dire qu'il comprendra le Mexique, le Canada et les Antilles. Nous ne sommes même pas là. Ils font comme si nous n'existions pas. L'ambassadeur américain nous demande d'injecter plus d'argent dans les forces armées pour qu'elles puissent mieux faire leur travail.
Nous lisons au sujet de tous projets où il y a eu du gaspillage dans le rapport de la vérificatrice générale. Certaines de ces choses-là sont bien réelles, il faut être réaliste, mais pas 174 millions de dollars pour un système de sécurité. C'est un peu trop. Tout le monde peut se tromper dans les comptes de dépenses, mais cette erreur-là est ridicule.
Une voix: Ce sont les conservateurs qui l'ont acheté.
M. John Reynolds: Le député dit que ce sont les conservateurs qui l'ont acheté. Si c'est vrai, pourquoi les libéraux ne s'en sont-ils pas débarrassé pendant leur première année au pouvoir? Ils se sont débarrassé de bien d'autres choses.
Il est vraiment incroyable que le budget de décembre ait fait fi de ce que tous ces experts ont dit. Les besoins du Canada en matière de sécurité et la souveraineté canadienne elle-même sont en péril. Pourquoi?
D'abord, nous ne pouvons plus nous imposer dans les coalitions internationales, ce qui réduit notre influence et notre crédibilité. Cela était on ne peut plus évident aujourd'hui, juste avant la période des questions.
Notre marine ne pourra probablement pas soutenir le déploiement de son groupe opérationnel au-delà de six mois, en raison de pénuries de personnel et d'autres lacunes dans les ressources navales. Il ne reste à la marine que deux navires de soutien opérationnel. Il sera donc impossible de soutenir un groupe opérationnel dans l'océan Indien tout en appuyant nos navires dans les océans Atlantique et Pacifique.
Qu'avons-nous entendu hier? Un de nos navires est inutilisé dans le port de Victoria. S'il se trouvait dans le port de Montréal ou quelque part, un peu plus près du centre du Canada, il pourrait peut-être servir, mais il est en Colombie-Britannique. Le premier ministre n'a visité la Colombie-Britannique que pendant 15 jours ces quelques dernières années, habituellement pour présider des dîners de financement du Parti libéral. Il a passé 39 jours en Floride, en Jamaïque ou ailleurs.
M. John O'Reilly: Le premier ministre a organisé un dîner de financement pour vous.
M. John Reynolds: L'ancien premier ministre a effectivement organisé une activité de financement, il y a de nombreuses années, et nous avons eu beaucoup de succès. Il n'a pas voyagé dans un jet du gouvernement. À cette époque-là, il voyageait dans un avion ordinaire, comme je le fais encore en tant que chef de l'opposition, et cela me convient fort bien.
Il n'en demeure pas moins que le navire est probablement vide dans le port de Victoria parce qu'on l'a oublié. Il se trouve dans l'Ouest, et les libéraux ont tendance à nous oublier, les gens de l'Ouest.
Une voix: Ces Canadiens de l'Est...
M. John Reynolds: Nous ne nous en prenons pas aux Canadiens de l'Est. J'en suis un. Je suis né en Ontario et ai grandi au Québec. Je dis simplement que le gouvernement a ignoré l'Ouest canadien, la région du pays qui enregistre la croissance la plus rapide. C'est une honte.
Les hélicoptères Sea King nécessitent 40 heures d'entretien par heure de vol, ce qui amoindrit sérieusement la capacité de la marine de maintenir une flotte efficace à l'appui de ses bâtiments en mer. Quarante heures d'entretien par heure de vol, c'est plus ou moins ce qu'il faut pour que mon ami passe deux ou trois bonnes heures à la Chambre chaque semaine.
L'armée ne peut même pas soutenir 750 militaires en Afghanistan pour une deuxième rotation de six mois sans amoindrir sa capacité de maintenir 1 600 militaires en Bosnie. Certaines de nos unités seront peut-être obligées d'enchaîner les rotations outre-mer. Qu'est-ce que cela signifie pour les réservistes outre-mer d'enchaîner deux rotations?
J'ai vu une émission intéressante à 60 Minutes ou Dateline il y a quelques mois au sujet d'un jeune homme qui a participé à la guerre du Vietnam. Il a vécu une expérience semblable. Il a enchaîné trois rotations, puis s'est évanoui dans la nature. On l'a retrouvé 30 ans plus tard en Australie, où il menait une vie plutôt normale. Sa famille, qui décrivait comment elle croyait qu'il était mort, avait découvert qu'il vivait en Australie à cause d'une contravention qu'il avait reçue là-bas. Toute l'émission portait là-dessus et sur les conséquences que trois rotations consécutives pendant la guerre du Vietnam avaient eues sur la santé mentale de cet homme.
Que fait-on aux jeunes réservistes que l'on dépêche deux ou trois fois en mission? Savons-nous vraiment ce qui se passe là-bas? Ne vaudrait-il pas mieux mettre en place un programme d'envergure pour encourager les jeunes à joindre les rangs des Forces canadiennes? Certes, quelques publicités méritent des éloges, mais nous pourrions faire beaucoup plus pour encourager les gens à servir dans les forces. Nous devrions veiller à ce que nos forces aient un niveau d'efficacité acceptable, que nos militaires aient tous des uniformes et qu'ils n'aient pas à enchaîner inutilement deux ou trois rotations.
La force aérienne ne peut pas transporter nos soldats outre-mer parce qu'elle n'a pas d'appareils de transport lourd. Ses appareils de transport moyen prennent de l'âge et tombent souvent en panne. Comme il n'a pas d'appareils de transport lourd, il doit en louer à Federal Express ou à qui que ce soit d'autre. Je ne sais pas si on fait appel à cette compagnie pour ce genre de chose, mais le gouvernement loue des appareils à quelqu'un ou emprunte des appareils américains, ou je ne sais quoi. Pourtant, il a les moyens d'acheter deux jets pour transporter ses députés un peu partout, alors qu'il a déjà quatre appareils qui, selon l'armée, sont en bon état. C'est plutôt triste.
Le déploiement de CF-18 outre-mer, comme nous l'avons vu durant la guerre du Golfe en 1991 et au Kosovo en 1999, est devenu de plus en plus difficile étant donné la décision de réduire le nombre de ces appareils de 120 à seulement 80. Nous ne serons pas capables à la fois de défendre notre propre espace aérien et de respecter des engagements internationaux possibles.
Nous avons déjà de la difficulté à simplement répondre aux urgences ici même, au Canada. C'est là un autre point important. Nous avons besoin de ressources ici. Les avons-nous? La plupart des gens disent non. La force aérienne a seulement 32 aéronefs de transport C-130, dont au moins 75 p. 100 ne sont pas disponibles à quelque moment que ce soit.
C'est incroyable. Si la compagnie de location de voitures Avis avait 75 p. 100 de son parc automobile qui n'était pas disponible, elle ferait faillite. Est-ce encourageant pour les membres de nos forces armées? C'est comme le vieux gag où il y a 100 avions sur la piste, mais seulement 25 parviennent à décoller. Ce n'est tout simplement pas acceptable.
De plus, comme 19 des 32 C-130 ont plus de 35 ans, les pannes sont fréquentes. Les appareils Challenger n'avaient que 16 ou 19 ans, des bébés comparativement aux autres. Nous n'avons pas d'aéronefs ou d'hélicoptères stratégiques ou tactiques de transport lourd.
Durant la tempête de verglas en 1998, on a dû faire appel à des appareils américains pour transporter des militaires et du matériel de l'ouest du Canada vers l'est du pays afin de répondre à cette urgence. Nous sommes chanceux qu'il fasse environ 30 degrés dehors aujourd'hui et que nous ne risquions plus d'avoir une tempête de verglas cette année, mais cela pourrait bien se produire de nouveau l'an prochain. Cependant, nous sommes à Ottawa et nous ferions mieux de faire attention, parce que cela pourrait arriver ce week-end.
Lors de la crise d'Oka en 1990, les forces armées ont déployé pratiquement une brigade complète, plusieurs milliers de soldats, pour faire face à cette situation d'urgence. Compte tenu du fait que l'effectif total des forces armées est inférieur à 19 000 soldats, dont seulement 9 000 à peu près peuvent être considérés comme des soldats de première ligne, il est très difficile pour les forces armées de s'acquitter de leurs engagements outre-mer tout en répondant aux situations d'urgence au niveau intérieur, notamment celles à volets multiples.
L'effectif total de la réserve de l'armée de terre est actuellement inférieur à 14 000 membres; il compte peut-être même aussi peu que 11 000 membres, dont la plupart sont mal entraînés et disposent de matériel inadéquat. Ils peuvent offrir un soutien très limité à la force régulière et ne seraient pas en mesure de garder d'une manière efficace des points stratégiques au Canada, comme des centrales électriques et des pipelines.
La protection de la souveraineté canadienne est de plus en plus compromise. Le temps de vol de l'aéronef Aurora, notre principal appareil chargé de protéger notre souveraineté, est actuellement ramené à seulement 8 000 heures par année. C'est 3 500 heures de moins que ce qu'a recommandé le chef d'état-major de la force aérienne.
L'autre jour, en réponse à une question que je lui ai posée au sujet du fait qu'il prend des vols à partir de l'aéroport de Gatineau et non pas de l'aéroport d'Ottawa parce qu'il faut 10 minutes de moins pour se rendre à l'aéroport de Gatineau à partir de la promenade Sussex, le premier ministre a dit qu'il ne prend pas ces décisions, que c'est la GRC qui les prend pour lui. Le premier ministre a donné cette réponse à la Chambre et je veux bien la considérer comme étant exacte.
Si c'est le cas, lorsque les responsables des forces armées recommandent 11 500 heures de vol par année et que le gouvernement ramène cela à 8 000 heures par année, pourquoi s'ingère-t-on dans les affaires militaires? Pourquoi le gouvernement nuit-il aux membres des forces armées en réduisant le nombre d'heures qu'ils estiment nécessaires pour assurer la protection dont nous avons besoin au Canada?
Le gouvernement ne peut pas gagner sur tous les tableaux. Il ne peut pas dire qu'il va dépenser 20 000 $ de plus pour que le premier ministre prenne un avion à partir de Gatineau pour des raisons de sécurité, tout en refusant d'accorder le financement nécessaire à nos militaires outre-mer parce que nous estimons que les heures qu'ils réclament ne sont pas justifiées. Elles sont justifiées, et nous devrions suivre leurs recommandations.
Ces recommandations ont été faites par le chef d'état-major de la force aérienne, le lieutenant-général Campbell, en 1999, alors qu'il dirigeait la 1re Division aérienne du Canada. Il a préconisé le minimum d'heures acceptable pour que les appareils Aurora puissent s'acquitter de leur mission en survolant l'Arctique, mais ces heures ont été ramenées à pratiquement rien. C'est une honte!
Une voix: Ces appareils sont plus nécessaires que jamais là-bas.
M. John Reynolds: Ils sont plus que jamais nécessaires. Aujourd'hui, les Américains ont annoncé leur politique concernant le périmètre de sécurité pour l'Amérique du Nord, mais il n'y a pas de vol au-dessus du Nord. C'est absolument honteux.
Nous réussissons de moins en moins à faire notre part au sein du NORAD. Comme on l'a fait remarquer, l'aviation réduit du tiers le nombre de ses avions de chasse CF-18. Nous devrons donc compter davantage sur les appareils américains pour protéger l'espace aérien canadien.
Le gouvernement a été ovationné par les députés à la Chambre quand son porte-parole a déclaré «Nous allons être des Canadiens d'abord, nous sommes indépendants», mais il a réduit notre force aérienne du tiers et il faudra maintenant compter sur les appareils américains. Cela ne me pose aucun problème, car les Américains possèdent une force abondante, mais nous devrions travailler avec eux. Quand ils annoncent une politique importante comme ils l'ont fait aujourd'hui, j'aimerais voir notre ministre debout à côté de leur ministre et notre premier ministre debout à côté de leur président.
J'ai trouvé intéressant de voir que, il y a quelques semaines à peine, tandis que le premier ministre se trouvait en Afrique, le premier ministre de l'Angleterre se trouvait aux États-Unis pour y discuter de la guerre et de questions sérieuses. Notre premier ministre essayait de laisser un legs à l'Afrique en racontant une histoire différente dans chaque pays.
Nous réussissons de moins en moins à faire notre part au sein du NORAD, comme je le disais. Comme on l'a fait remarquer, l'aviation a réduit du tiers le nombre de ses avions de chasse CF-18, et il en résultera que nous dépendrons davantage des appareils américains. Nous savons déjà que les avions américains ont joué ce rôle dans plusieurs parties du Canada le 11 septembre.
Notre marine est totalement absente du troisième océan qui baigne le Canada, l'océan Arctique. Nous avons beaucoup de peine à exercer à cet endroit une souveraineté qui n'est pas reconnue par les États-Unis. Nos retards continus à offrir notre appui politique aux États-Unis dans le dossier du système national de défense antimissile font que les Américains vont de l'avant dans ce domaine, sans attendre le Canada. Cela compromet l'avenir de NORAD, un moyen de surveillance essentiel du territoire canadien, financé à 90 p. 100 par les États-Unis.
Toutes ces menaces à la souveraineté et la sécurité du Canada ne feront que s'accentuer dans les années à venir, en raison de l'insuffisance des budgets d'équipement et de fonctionnement du ministère de la Défense nationale. Les Forces canadiennes auront de plus en plus de difficulté à maintenir leurs niveaux de capacité actuels. Il en résultera inévitablement une dépendance accrue à l'égard des États-Unis et une perte considérable de crédibilité ou d'influence auprès des pays étrangers sur les questions de sécurité. Ce scénario représente la plus grande menace pour notre souveraineté.
Il est très important que le gouvernement agisse rapidement. Les enjeux sont trop grands pour qu'il reste assis à ne rien faire.
Voici un extrait du numéro du 17 avril 2002, volume 9, de la revue Esprit de corps. L'article est intitulé «Que peuvent faire nos Forces canadiennes?» Il y est écrit ceci:
Notre marine est le principal élément militaire canadien engagé dans la guerre contre le terrorisme. Avec ses destroyers de classe Tribal modernisés, ses frégates de classe City ultramodernes et sa capacité d'opérer en douceur avec la marine américaine, elle a été dépêchée pour soutenir la flotte de la coalition dirigée par les États-Unis. La faiblesse majeure de notre force opérationnelle est sa flotte d'hélicoptères Sea King désuets, qui ont besoin de 40 heures d'entretien pour chaque heure de vol. |
Quarante heures d'entretien pour chaque heure de vol. On peut imaginer quelques mécaniciens s'affairant autour des appareils une clé à la main.
Les appareils Sea King ont une endurance et une capacité réduites par temps chaud. |
On ne peut pas les utiliser à bien des endroits.
Les six navires canadiens sont équipés d'armes antiaériennes, antinavires et sous-marines, ainsi que de défenses antimissiles. Malheureusement, ils n'ont plus d'armes navire-terre à longue portée ni aucun appareil d'attaque si ce n'est les Sea King conçus précisément pour chasser et attaquer les sous-marins. Le piètre état de ces hélicoptères embarqués les empêche même d'être utilisés à bord d'un navire pour jouer un rôle d'hélicoptère d'assaut. |
L'Afghanistan, qui est un pays sans littoral, n'a plus de force aérienne et n'a aucune marine. Étant donné qu'au plus fort de la guerre du Golfe en 1991, Iraq n'a pas réussi une seule sortie contre la flotte de la coalition américaine, le rôle limité de la force opérationnelle navale du Canada serait donc d'assurer la défense contre la menace improbable d'une attaque aérienne ou par mer. Cependant, la bâtiment amiral de commandement et de contrôle, le NCSM Iroquois, le bâtiment de soutien NCSM Preserver et les quatre frégates se tiendront à distance pour offrir un certain soutien symbolique à nos alliés américains. Étant donné que la marine américaine est tout à fait interopérable avec la marine américaine, les navires de guerre américains pourraient en théorie être placés sous le commandement de la flotte canadienne, comme cela a été le cas durant la guerre du Golfe. |
Les opérations de recherche et de sauvetage constitueront une tâche qu'on pourrait confier aux hélicoptères embarqués au cas où un avion d'attaque ou un hélicoptère américain s'abîmerait en mer. |
Une autre mission possible serait la protection de superpétroliers et d'autres navires marchands si le conflit actuel s'étend au-delà de la mer d'Oman.
Pour tenir prêts à intervenir un si grand nombre de navires canadiens, la marine canadienne opérera à la limite de ses possibilités. Avec seulement quatre destroyers dont un cloué au quai en permanence, pour en soutenir un dans la mer d'Oman, l'un doit se préparer, l'un doit revenir et l'autre doit être déployé. Parmi les 12 frégates de la marine, 7 sont en disponibilité opérationnelle réduite. Pour soutenir 3 ou 4 frégates, il faudrait mettre en action toute la flotte. Étant donné qu'il manque à la marine quelque 400 marins compétents sur le plan technique, cela sera extrêmement difficile. La marine a deux bâtiments ravitailleurs et ainsi, le minimum normal, soit un ratio de déploiement de deux pour un, est impossible. Le temps supplémentaire que les équipages devront passer en opération sera extrêmement difficile pour eux. De plus, ou notre flotte de la côte ouest ou celle de la côte est se retrouvera sans bâtiment de soutien. |
L'aviation canadienne a un moins grand rôle à jouer étant donné que ses capacités sont moindres. Le premier problème est celui du déploiement. Le Canada a vendu ses Boeing 707 ravitailleurs en vol en 1997, mais il a cinq Hercules C-130 conçus pour servir d'avions ravitailleurs. Cependant, les Hercules ne transportent que la moitié de ce qu'un Airbus peut transporter et ne peuvent voler suffisamment vite ou haut pour ravitailler les CF-18 à quatre reprises comme cela est nécessaire lorsque les CF-18 traversent l'océan. Le Canada ne peut plus compter sur les ravitailleurs en vol américains car ils ont tous été affectés au soutien des forces américaines. Le Canada est le seul pays de l'OTAN sans un gros avion ravitailleur. |
Je le répète, c'est le seul pays de l'OTAN. C'est honteux.
Les CF-18 ont la capacité d'atterrir sur des porte-avions, mais les pilotes n'en ont pas les moyens. |
Voyez ce qui est dit par la suite:
L'avionique à bord de ces appareils n'est pas compatible avec les avions d'attaque des États-Unis. |
Pourtant, les Américains sont nos alliés, les gens avec qui nous collaborons. Quelle belle planification.
Les lacunes aux niveaux de la capacité de déploiement, de la compatibilité et de la capacité d'appontage pourraient expliquer pourquoi les États-Unis n'ont pas réquisitionné ces appareils. L'appareil de surveillance Aurora est presque identique au USN P3 Orion. C'est ce genre d'aéronef (muni toutefois d'instruments différents) qu'un avion de chasse chinois a percuté il y a plusieurs mois. Le rôle premier de ces appareils est de patrouiller les côtes. Ils joueront probablement ce rôle dans le golfe Persique ou la mer d'Arabie. |
Les aéronefs de transport tactique C-130 Hercules seront probablement utilisés dans le cadre des opérations psychologiques, pour larguer de la nourriture et d'autres colis d'aide humanitaire aux réfugiés afghans, qui ont d'abord fui le régime taliban et qui fuient maintenant en nombre croissant les raids aériens des Américains. |
L'avion de transport stratégique Airbus servira probablement à livrer de l'aide aux aires de stationnement dès que celles-ci seront aménagées. |
Le groupe de commandos secrets, la FOI2 comme on l'appelle dans le jargon militaire, est une unité antiterroriste très bien formée et équipée. Il est en mesure d'accomplir quelques-unes des missions secrètes nécessaires, notamment de mener des opérations de reconnaissance et de diriger des frappes aériennes. Le seul défaut de cette unité est sa taille. Elle compte environ 250 membres, dont au plus 64 environ pourront être soutenus au-delà de notre engagement de six mois. Toutefois, notre armée sera probablement incapable d'apporter une contribution plus substantielle. |
À l'heure actuelle, l'armée canadienne a un groupement tactique de 1 500 militaires en mission en Bosnie, qui regroupe des unités du 5e Groupe-brigade mécanisé du Canada (5 GBMC). Une brigade a normalement un effectif d'environ 5 000 militaires. À cause du manque de recrutement et de l'attrition, les brigades de nos jours comptent à peine plus de 3 000 membres. Ce qui signifie que, plus de la moitié des troupes combattantes de ces brigades étant déjà monopolisées, il faudra les remplacer par des réservistes afin de former un groupement tactique puissant et prêt au combat. |
Le Canada n'a que trois brigades, une a été déployée, une revient tout juste d'une mission outre-mer et l'autre est en formation. Un puissant groupement tactique formé à partir du 1er GBMC pourrait en théorie être dépêché dans cette région ou appelé à remplacer les unités américaines en mission en Bosnie. Ce ne serait qu'une solution temporaire, car dans six mois nous n'aurions plus d'unités pour remplacer nos troupes déployées. De nos jours, l'armée canadienne ne peut soutenir indéfiniment qu'un seul groupe de combat déployé. |
On pourrait aussi employer un des trois bataillons «légers» de l'Armée, ou les trois. Il s'agit ici des fantassins qui ne bénéficient pas de véhicules blindés comme les LAV III, Coyote ou Leopard C2. Le déploiement tactique pourrait se faire par attaque aérienne au moyen de la version militarisée de l'hélicoptère Bell 412, ou Griffon. |
Cela poserait un problème. Avant de déployer tout matériel sur le théâtre des opérations, le Canada devrait soit demander l'aide des États-Unis (lesquels la lui refuseraient probablement, leur priorité étant de transporter leurs propres unités), soit louer des appareils civils pour effectuer un déploiement rapide. L'autre possibilité serait de louer des navires (tel le GTS Katie), puisque notre Marine n'a aucune capacité de ravitaillement par mer. |
Ensuite, le Griffon a une moins bonne capacité de fonctionnement que l'appareil qu'il a remplacé, le vénérable «Twin Huey» (qui a été vendu et qui a finalement été acquis par les forces armées de la Colombie), et ne peut pas transporter les obusiers 105 mm «légers» qui sont attribués aux bataillons d'infanterie légère. Par souci d'économie, on a supprimé de l'ordre de bataille tout le peloton de mortiers du bataillon (huit mortiers moyens de 81 mm), lequel aurait pu être facilement transporté par hélicoptère. Cela retarde sérieusement la puissance de feu de l'unité. Les sept hélicoptères moyens CH147, ou Chinook, de l'Armée auraient eu la portée et la capacité nécessaires pour compenser les lacunes du Griffon, mais ils ont tous été vendus à la Hollande au début des années 90. |
La seule unité qui aurait pu servir avec un court préavis n'existe plus depuis des années. Le Régiment aéroporté du Canada a été démantelé en 1995 sur les ordres du gouvernement libéral. |
On oublie parfois que nous avions un excellent régiment aéroporté, mais que le gouvernement l'a supprimé en 1995.
Je me demande si nous devrions informer les familles militaires du Canada des priorités du gouvernement. Les nouveaux Challenger, les avions de luxe, des deux Taj Mahal, que le gouvernement a acquis pour que les gros chats du Cabinet puissent aller plus vite, plus haut et plus loin.
Certains pilotes maintenant retraités des forces armées ont piloté des hélicoptères Sea King, il y a 40 ans. Aujourd'hui, les enfants de ces pilotes sont aux commandes des ces mêmes appareils.
Une voix: Les petits-enfants aussi.
M. John Reynolds: Eh oui, les petits-enfants aussi, comme le mentionne un député.
Ces familles qui servent le Canada s'inquiètent de leurs proches. Tous les jours, elles craignent pour leur sécurité quand un de ces hélicoptères s'envole. Voici un extrait du rapport préparé, le 19 octobre 1998, par Michel Rossignol de la division des affaires publiques et sociales de la Direction de la recherche parlementaire.
Les hélicoptères Sea King, qui mènent leurs opérations à partir des nouvelles frégates et d'autres bâtiments de guerre du Canada, sont entrés en service en 1963. Conçus avant tout pour la lutte anti-sous-marine (ASM) , les Sea King confèrent également une capacité de surveillance et de transport aux navires de guerre canadiens, et ils participent à l'occasion à des opérations de recherche et de sauvetage. |
La modernisation des capteurs électroniques ASM des hélicoptères a permis à ces derniers de continuer à jouer assez bien leur rôle principal, et l'entretien régulier et les révisions, au fil des ans, les ont maintenus en état de voler malgré une utilisation intense dans des conditions météorologiques souvent difficiles. Toutefois, plus les Sea King vieillissent, plus ils exigent d'entretien, et plus on s'inquiète de la sécurité de leur utilisation. |
Si nous sommes préoccupés de la sécurité du fonctionnement des aéronefs, nous devons de toute évidence être très préoccupés de la sécurité des personnes qui sont aux commandes de ces appareils. Dans son rapport, M. Rossignol ajoute:
C'est pourquoi, au milieu des années 80, le ministère de la Défense nationale a entamé des démarches pour choisir un nouvel hélicoptère qui remplacerait le Sea King vers la fin des années 90. Le EH-101 a été choisi pour remplacer à la fois le Sea King et le Labrador... Des contrats ont été signés en 1992, d'une part, avec EH Industries pour la fourniture de 50 hélicoptères, et, d'autre part, avec Paramax Canada pour la fourniture de matériel ASM et autres matériels électroniques pour 35 de ces appareils. Le coût estimatif total de l'achat était de cinq milliards de dollars; les cellules et les moteurs ne représentaient qu'environ la moitié des coûts, les capteurs électroniques ASM représentant une bonne partie du reste. |
Le coût des nouveaux hélicoptères, à un moment où les forces armées de l'OTAN et d'autres pays faisaient face à des compressions à cause de la fin de la guerre froide, a fait du dossier une question très litigieuse même après l'annonce, en août 1993, d'une réduction du nombre d'EH-101 ASM dans le but de comprimer les coûts. |
Le nouveau gouvernement formé en novembre 1993 par le Parti libéral a annulé les contrats, donnant suite à une promesse électorale du parti. Néanmoins, étant donné l'âge des hélicoptères actuels et les préoccupations croissantes au sujet de leur sécurité—puisqu'il y a eu un certain nombre d'accidents—, le remplacement des Sea King semble toujours s'imposer, bien qu'à un coût inférieur à celui du projet d'achat des EH-101. Qui plus est, l'hélicoptère embarqué demeure un élément important des capacités militaires du Canada. |
Si l'on remonte à 1993, nous savons que des promesses électorales, de nombreuses promesses électorales, ont été faites. La suppression de la TPS en est une autre importante. Le gouvernement n'y a jamais donné suite. Le libre-échange en est encore une. Le gouvernement l'a oubliée. M. Mulroney a cependant commandé des hélicoptères et le premier ministre l'a fait pour cette raison.
Il a également soutenu que jamais il ne volerait à bord du gros Airbus que Mulroney avait commandé pour le premier ministre. Je pense qu'ils s'en servent encore un peu, mais il s'est tenu la plupart du temps à ce qu'il a dit. Le problème me paraît plutôt d'ordre juridique, car l'avion existe et c'est un bon appareil. Il n'était pas nécessaire d'acheter deux jets Challenger au coût de 101 millions de dollars. Nous aurions pu utiliser cet autre appareil pour les vols longs courriers. Cet appareil convient assurément pour la gouverneure générale. Il convient pour le premier ministre. Cette décision politique prise il y a bientôt 10 ans est vraiment regrettable, car nos forces de l'air auraient pu piloter aujourd'hui les hélicoptères les plus modernes et apporter leur concours à nos alliés dans cette guerre contre le terrorisme. Mais nous voilà, aujourd'hui, à débattre encore de la question des hélicoptères, à nous demander pourquoi on a acheté deux jets Challenger équipés de robinets en or et de toilettes de luxe, mais pas de nouveaux hélicoptères.
Le rapport de M. Rossignol se poursuit ainsi:
Bien que la menace sous-marine ait beaucoup diminué depuis la fin de la guerre froide, l'appareil qui remplacera le Sea King complétera tout de même les capacités des navires canadiens en assurant une surveillance au-dessus et autour des bâtiments, en transportant des fournitures et du personnel et en remplissant au besoin des missions de recherche. Les Sea King ont beaucoup servi dans le golfe Persique et la mer Adriatique, ainsi que près d'Haïti pour inspecter les cargos et faire respecter les sanctions de l'ONU contre ce pays; ils ont également servi au transport du ravitaillement des soldats de la paix de l'ONU en Somalie. |
Le choix d'un appareil de remplacement du Sea King est aussi influencé par un autre facteur, à savoir la nécessité de remplacer les hélicoptères de recherche et de sauvetage Labrador. |
Le Canada exploite des hélicoptères Labrador à partir de la BFC Comox (Colombie-Britannique), de la BFC Trenton (Ontario) et de la BFC Greenwood (Nouvelle-Écosse) et à partir d'autres endroits, au besoin, uniquement pour les opérations de recherche et de sauvetage. Comme les Sea King, les Labrador sont entrés en service, dans les Forces canadiennes, au début des années 60, et au milieu des années 80, le ministère de la Défense nationale a commencé à chercher un appareil pour les remplacer. Autour de 1990, il a été décidé de remplacer les Labrador par 15 EH-101, capables de voler par tous les temps. En utilisant le même hélicoptère pour remplacer le Sea King et les Labrador, on espérait réduire les frais d'entretien et de formation des pilotes. |
L'achat des EH-101 annulé, le problème du remplacement des Labrador demeurait entier. À un moment où le Commandement aérien diminue le nombre de types d'appareils dans sa flotte pour réduire les frais d'exploitation, l'entretien d'une petite flotte de vieux hélicoptères pose problème. Comme dans le cas des Sea King, on se préoccupe également des effets de l'âge sur la sécurité de vol, surtout depuis que, en avril 1992, un Labrador s'est écrasé à cause d'une panne de moteur. |
Le 31 octobre 1994, le Comité mixte spécial sur la politique de défense du Canada a déposé son rapport, dans lequel il recommande, entre autres, qu'on procède rapidement à l'achat de nouveaux hélicoptères embarqués et de nouveaux hélicoptères de sauvetage. Après le dépôt de l'étude parlementaire, le ministre de la Défense nationale a déposé le Livre blanc sur la défense de 1994 dans lequel est exposée la nouvelle politique de défense du Canada. |
Selon le Livre blanc, il y a un besoin urgent de nouveaux hélicoptères embarqués, et les Sea King seraient remplacés d'ici à la fin de la décennie. Quant aux hélicoptères de recherche et de sauvetage Labrador, les auteurs du Livre blanc indiquent qu'ils seraient remplacés le plus tôt possible, mais signalent que même si un seul appareil pourrait être acheté pour assurer tant les fonctions assurées par les hélicoptères embarqués que les fonctions de sauvetage, d'autres possibilités sont envisagées, par exemple, de nouvelles formes d'alliances avec le secteur privé pour l'entretien et même pour le financement de l'achat de nouveaux appareils. |
Bien qu'il puisse sembler coûter moins cher de moderniser les cellules des appareils existants que d'acheter de nouveaux hélicoptères, cette option est la moins intéressante à long terme, car elle ne fait que repousser à plus tard l'acquisition de nouveaux appareils. Les cellules des Sea King et des Labrador ont plus de 30 ans, et, même si on leur apportait des modifications considérables, elles devraient être remplacées 5 ou 10 ans après, ou n'être utilisées qu'occasionnellement. |
Il arrive qu'on modernise de vieux appareils pour en prolonger l'utilisation. Ainsi, l'Australie modernise ses Sea King pour continuer à les utiliser jusqu'aux environs de 2005. Il convient toutefois de souligner que les appareils australiens ont été construits une dizaine d'années après les canadiens, ce qui rend leur modernisation plus rentable. Pour le Canada, l'achat de nouveaux hélicoptères semble donc être le meilleur choix. |
Le plus tôt sera le mieux.
Le rapport Rossignol ajoute:
Il existe un grand choix d'hélicoptères moyens, dont des versions du Eurocopter Super Puma (Cougar ou Panther), le Agusta-Westland Cormorant, qui a la même cellule et les mêmes moteurs que le EH-101, et le Sikorsky S-70 (que les militaires américains appellent le H-60). Beaucoup de pays utilisent déjà certains de ces appareils pour les fonctions ASM et de surveillance maritime. Il y a aussi quelques types d'hélicoptères russes, mais on a exprimé des doutes quant aux coûts à engager pour les porter au niveau des normes occidentales et à la disponibilité de pièces de rechange. |
Les hélicoptères légers peuvent s'acquitter de certaines fonctions de surveillance maritime et de sauvetage, mais leur rayon d'action est moindre ou ils transportent de moins lourdes charges, et ils ne peuvent pas transporter autant de capteurs ASM et de passagers. Il est difficile de comparer divers types d'hélicoptères. Ainsi, tel appareil peut avoir un rayon d'action moindre, mais être équipé pour le ravitaillement en vol. L'armée de l'air dispose de 99 CH-146 Griffons (des Bell 412 construits au Canada) commandés en 1992 au coût de un milliard de dollars pour remplacer presque tous ses hélicoptères légers comme les Twin Huey et les Kiowa. Cependant, les appareils de taille moyenne conviennent mieux aux opérations maritimes et de sauvetage. |
D’ailleurs, étant donné les conditions climatiques difficiles au Canada, les nouveaux appareils doivent être dotés de radars, de matériel de navigation et d'une capacité de dégivrage des pales de rotor. Il faut s'assurer que les nouveaux appareils auront une certaine capacité de vol par mauvais temps de manière à garantir la sécurité du personnel de vol et à permettre aux appareils d'accomplir leurs missions. Le coût d'achat de nouveaux hélicoptères dotés d'une capacité appropriée de vol par tous les temps, bien qu'inférieur à celui du EH-101, pourrait demeurer très élevé. Mais le Canada n'a peut-être pas beaucoup le choix s'il tient à préserver ses capacités actuelles de sauvetage, assurer la surveillance de ses eaux territoriales et honorer ses engagements internationaux. |
En juin et en juillet 1995, des articles de presse ont signalé que le Cabinet étudiait les propositions du ministère pour l’acquisition de nouvel équipement militaire, dont des hélicoptères embarqués et des hélicoptères de sauvetage. Le ministère avait espéré obtenir rapidement l'approbation pour les quatre projets; il semble toutefois qu'au cours de réunions du Cabinet, des questions ont été soulevées quant aux coûts de ces acquisitions et à la nécessité d'y procéder alors qu’on sabre dans les programmes sociaux et d'autres dépenses gouvernementales. Il a aussi été signalé que des membres du Cabinet s'inquiètent de la distribution des retombées régionales lors de l’attribution des contrats. |
Conséquemment, un seul des quatre projets a obtenu l’approbation rapide du Cabinet, à savoir celui de l'acquisition de nouveaux transports de troupes blindés et la modernisation de ceux qui sont déjà en service, annoncée en août 1995. L'approbation finale du Cabinet pour l'achat de nouveaux hélicoptères embarqués et de nouveaux hélicoptères de sauvetage à, quant à elle, été retardée. Le ministre de la Défense nationale a déclaré que l'on prendrait la décision finale vraisemblablement avant la fin de l'exercice 1995-1996. |
Le rapport de M. Rossignol se poursuit:
Comme dans le cas des hélicoptères embarqués, on a prétendu que la décision finale du Cabinet avait été retardée parce que le gouvernement voulait assurer une plus large distribution des retombées économiques régionales de la mise en oeuvre du projet. Le 8 novembre 1995, le ministre de la Défense nationale a toutefois annoncé que le gouvernement avait décidé d’acheter de nouveaux hélicoptères de sauvetage à un coût d’environ 600 millions de dollars. Le gouvernement conserve toutefois l’option de louer des hélicoptères et de confier l’entretien à des sous-traitants. Les premières livraisons pourraient avoir lieu en 1998. |
Après l’annonce, le ministère de la Défense nationale a émis un appel de présélection à l’industrie, ainsi que l’énoncé des besoins opérationnels. Selon cet énoncé, le ministère souhaite obtenir des hélicoptères ayant un rayon d’action de 500 milles nautiques et une capacité minimale de dégivrage des pales de rotor. De plus, il y est signalé qu’une porte arrière d’embarquement, un cockpit de verre (un tableau de bord dernier cri permettant une présentation vidéo des données) et un pilote automatique sont des éléments souhaitables. On s’attendait à ce que les avionneurs répondent à l’appel au plus tard à la fin de février 1996. |
La décision du gouvernement d’acheter de nouveaux hélicoptères de sauvetage a été prise au moment où les dernières questions ayant trait à l’annulation du projet d’achat des EH-101 ont été résolues. Le 31 mars 1996, peu après le dépôt du budget, le gouvernement a annoncé qu’il avait conclu une entente avec la société Unisys GSG Canada, autrefois Paramax et maintenant Lockheed Martin Canada, l’entrepreneur principal pour l’équipement électronique de la version embarquée des hélicoptères EH-101 que le Canada devait acheter. Ainsi le gouvernement a versé à la compagnie 166 millions de dollars en compensation pour le travail accompli avant l’annulation du contrat des EH-101. |
Quand on ajoute cela aux 100 millions de dollars versés pour les jets, je ne doute pas que nous aurions pu acheter certains de ces appareils il y a longtemps.
Le rapport Rossignol se poursuit:
Le 9 novembre 1995, le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, David Dingwall, a déclaré à la Chambre des communes qu’un accord de principe avait été conclu avec EH Industries, le consortium établi par Westland et Agusta. Le 23 janvier 1996, le gouvernement a annoncé les modalités de l’entente : versement de 157,8 millions de dollars à EH Industries, dont 136,6 millions pour les travaux effectués jusqu’à l’annulation du contrat et 21,2 millions pour la résiliation de celui-ci. Cette somme, plus les 166 millions versés à Unisys GSG Canada et les 154,5 millions consacrés à la recherche et au développement ainsi qu’aux coûts d’administration du projet, a porté le total consacré au projet des EH-101 à environ 478,6 millions de dollars. |
Un demi-milliard de dollars est parti en fumée, et nous attendons de nouveaux hélicoptères depuis dix ans. Si on prend ce demi-milliard et qu'on y ajoute les 100 millions consacrés à l'achat de jets pour le transport de ministres, puis les 174 millions d'une antenne parabolique cachée dans un entrepôt quelconque, on a tôt fait de constater qu'il serait possible d'acheter des hélicoptères assez rapidement, si seulement nous voulions soutenir nos forces armées. C'est déplorable.
Il y a eu encore d'autres retards et d'autres problèmes, explique M. Rossignol:
Alors que les manufacturiers préparaient leurs propositions, le ministère de la Défense nationale a annoncé que la Demande de proposition pour les nouveaux hélicoptères de sauvetage serait reportée de six mois, soit à la fin de 1996. D’ailleurs, le ministère a annoncé le 21 août 1996 qu’il y aurait maintenant deux Demandes de proposition, à savoir une pour l’achat des hélicoptères et une pour leur entretien. La dernière doit être émise à la fin de 1998. |
Dans l’intervalle, les Sea King et les Labrador connaissaient d’ailleurs certains problèmes au cours de l’été. Le 23 août 1996, trois appareils de la flotte canadienne de Sea King ont été cloués au sol pour qu’on puisse inspecter et réparer des fissures trouvées dans la partie arrière des cellules. Des fissures ont été constatées dans les autres appareils, mais dans une autre partie de la cellule et les vols se sont quand même poursuivis; les appareils seront réparés à une date ultérieure. Les trois Sea King cloués au sol étaient de nouveau en état de vol tôt en septembre. Il arrive souvent qu’on trouve des fissures dans les cellules, même celles d’aéronefs presque neufs; on fait donc des inspections de façon régulière afin de déceler ces fissures avant qu’elles causent d’importants problèmes structurels. En novembre, quatre Sea King étaient cloués au sol en attendant que leur cellule soit réparée. |
Au cours du mois d’août, certains se sont interrogés sur le manque de suivi en ce qui concerne certaines recommandations faites à la suite de l’enquête officielle sur l’écrasement d’un Sea King en avril 1994. Les auteurs de l’enquête ont recommandé qu’un trou dans le plafond de la cabine soit bouché pour empêcher les fuites d’essence dans celle-ci, et des mesures ont été prises dans ce sens... |
Imaginez donc, il a fallu boucher un trou et des mesures ont été prises pour le faire.
... d’autres recommandations ont toutefois été rejetées par les militaires ou acceptées seulement en partie. Les médias ont d’ailleurs souligné que l’on a averti les équipages de Labrador de mener les vols d’entraînement au-dessus des champs plutôt qu’au-dessus des forêts parce que les risques sont moins grands en cas de panne de moteur. |
N'est-il pas triste de penser que nos avions ne peuvent voler qu'au-dessus de terrains plats et ouverts au cas où leur moteur tomberait en panne?
Les membres de nos forces armées se sentiraient-ils vraiment en confiance s'ils recevaient un avis les enjoignant de ne pas survoler une forêt au cas où leur avion tomberait en panne? Que penseraient-ils alors des députés cossus d'Ottawa, surtout depuis que ces derniers ont obtenu de nouveaux avions munis de toilettes luxueuses et de sièges tout confort et que des choses disparaissent des entrepôts?
Il semble que des pannes de ce genre soient de plus en plus fréquentes. Un Labrador a fait un atterrissage forcé en mai 1995 dans une forêt en Nouvelle-Écosse à cause de problèmes mécaniques.
Le rapport continue en ces termes:
Les Labrador et les Sea King ont fait un certain nombre d’atterrissage d’urgence au fil des ans, et à chaque nouvel incident, les questions d’âge et d’entretien de ces appareils reviennent sur le tapis. Un Labrador de la BFC Greenwood a effectué un atterrissage d’urgence le 20 octobre 1996 en raison de défectuosités mécaniques, et un autre Labrador, de la même base, a dû atterrir d’urgence à deux reprises au début de décembre de la même année. Le 13 janvier 1997, un Labrador de la BFC Comox s’est posé en catastrophe dans le détroit de Georgie après que le feu eut pris à bord. |
C'était terrible. Certains députés vont à la pêche dans cette région. Il est dangereux de faire de la pêche sportive lorsque des militaires nous survolent à bord de ces hélicoptères. Il faut téléphoner et demander si des vols en hélicoptères sont prévus au-dessus des îles du Golfe la fin de semaine, quand on a l'intention de faire un peu de navigation de plaisance. Il est plutôt triste de voir que le gouvernement n'ait rien fait pour empêcher cela.
Le rapport continue:
... un Sea King a fait un atterrissage forcé sur le pont d’envol du NCSM Huron lorsque l’un de ses moteurs est apparemment tombé en panne. Deux Sea King ont atterri d’urgence près de Halifax, l’un le 7 novembre 1996 et l’autre le 12 juin 1997. |
J'ai entendu le député libéral dire que ces hélicoptères servent en Afghanistan. Comment aimerions-nous voler à bord de ces hélicoptères en Afghanistan? Des appareils qui s'écrasent dans le détroit de Georgie et dans les eaux canadiennes ne sont pas sûrs. C'est un fait.
Une voix: Continuez de faire peur aux familles.
M. John Reynolds: Le député dit qu'on continue de faire peur aux familles. Je peux vous dire qu'elles ont terriblement peur chaque jour. Nous avons parlé aux proches des militaires et ils nous ont dit qu'ils avaient peur, parce que le gouvernement force leurs maris et leurs femmes à monter à bord de ces hélicoptères pourris. Le gouvernement devrait remplacer ces appareils. Il aurait dû le faire il y a dix ans. Il n'a même pas honte.
Le rapport ajoute:
En dépit des ennuis mécaniques que certains éprouvaient, les Labrador et les Sea King ont continué d’occuper une place importante dans les opérations de sauvetage partout au Canada. C’est avec des Labrador qu’on a évacué des gens au cours des inondations de 1996 dans la région du Saguenay, au Québec, et ce sont également des Labrador et des Sea King qui ont servi aux opérations de sauvetage pendant les inondations de la vallée de la rivière Rouge, au Manitoba, en 1997. |
Dans l’intervalle, le processus de sélection des remplacements des Labrador s’est poursuivi. Le 27 novembre 1996, le gouvernement émettait, à l’intention des avionneurs, une demande de propositions dont la date d’expiration était le 5 mai 1997. Quatre avionneurs ont officiellement présenté des soumissions. Le consortium Agusta-Westland (E.H. Industries) a proposé le AW520 Cormorant (une version du EH-101), Boeing Canada Technology Ltd, le Boeing CH-47D Chinook, Eurocopter, le Cougar Mark 2 (une version de l’Aérospatiale Super Puma) et Sikorsky Canada Inc., une version canadienne (Maplehawk) du Sikorsky S-70A Black Hawk. On a laissé entendre que certaines compagnies canadiennes offriraient des versions modifiées d’hélicoptères de fabrication russe, comme le Kamov Ka-32 et le Mi-17KF Kittiwake. Cependant, ces compagnies n’ont pas présenté de soumissions surtout parce que les types d’hélicoptères proposés attendent toujours l’homologation de Transports Canada. |
La plupart des avionneurs soumissionnaires ont fait équipe avec différentes compagnies aérospatiales canadiennes, dont certaines fabriquent déjà des pièces d’hélicoptère. D’autres fabriqueront des composantes des hélicoptères ou participeront à l’assemblage des cellules si leur équipe remporte le contrat. En attendant la décision finale, les équipes continuent faire valoir la création d’emplois au Canada et les retombées industrielles qui résulteraient de la fabrication de leur type d’hélicoptère. |
L’équipe Cormorant (Agusta-Westland) comprend Bombardier Inc. de Montréal, Bristol Aerospace de Winnipeg, CAE Electronics de Saint-Laurent (Québec) et CHC Helicopter de St. John’s. L’équipe Cougar (Eurocopter) est constituée de Spar Aerospace de Mississauga (Ontario), de SNC-Lavalin de Montréal et d’IMP Group d’Halifax. L’équipe Maplehawk (Sikorsky) regroupe CAE Aviation d’Edmonton, Canadian Marconi de Kanata, Litton Systems de Toronto, et General Electric de Mississauga. Boeing n’a pas encore formé d’équipe, mais elle rappelle que son Chinook serait construit à même des composantes fabriquées par certaines compagnies canadiennes, et que son usine actuelle d’Arnprior, en Ontario, mettrait la dernière main à l’assemblage des cellules. À l’exception de Boeing, dont le modèle Chinook est jugé trop gros pour les navires de guerre canadiens, les mêmes avionneurs devraient présenter des soumissions pour le projet d’hélicoptères embarqués si jamais il se concrétisait. |
Le 5 janvier 1998, le ministre de la Défense nationale et le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux ont annoncé que le gouvernement avait choisi l’AW520 Cormorant proposé par E.H. Industries pour remplacer les Labrador, et indiqué que le coût maximal du projet serait de 790 millions de dollars pour la livraison de 15 Cormorant de recherche et de sauvetage. Le coût du projet comprend un maximum de 593 millions de dollars à verser à E.H. Industries et environ 200 millions de dollars pour la formation, les pièces de rechange et le soutien logistique. |
Pour revenir au sujet dont nous parlions plus tôt, nous avons gaspillé un demi-million de dollars pour rien. Et voilà que nous dépensons un peu plus que cela pour acquérir ce dont nous avons vraiment besoin.
M. Rossignol continue en ces termes:
Le 23 avril 1998, le ministère de la Défense nationale a annoncé que le contrat avec E.H. Industries avait été signé et que les coûts d’acquisition avaient été réduits de 593 à 580 millions de dollars. La réduction des coûts est en grande partie attribuable à la décision de prendre livraison des nouveaux hélicoptères à la sortie de la ligne de montage en Italie plutôt qu’au Canada. Pour sa part, E.H. Industries a pris l’engagement de créer pour 629 millions de dollars de retombées industrielles et régionales au Canada. Le premier Cormorant devrait être livré en janvier 2001, et l’ensemble des 15 appareils, en octobre 2002. |
La décision en faveur de l’AW520 Cormorant a suscité la controverse à cause des similarités entre cet appareil et les 15 versions de sauvetage du EH-101 qui avaient été commandées en même temps que les versions maritimes en 1992, commande qui devait être annulée à la fin de 1993 par le gouvernement libéral. En fait, même avant l’annonce, un des soumissionnaires, Sikorsky, s’était plaint du processus de sélection. Certains ont craint que l’annulation de 1993 n’ait fait que retarder le remplacement des Labrador et des Sea King qui, à cause de leur âge, nécessitaient un nombre accru d’heures de maintenance par heure de vol. Certains ont aussi pensé que les réductions du budget de la Défense inciteraient le gouvernement à remplacer les Sea King par un appareil moins coûteux et moins intéressant en termes de portée, de performance et d’équipement. |
Les critiques étaient particulièrement préoccupés par la sécurité, selon le rapport, étant donné le:
... risque grandissant d’accidents en raison du vieillissement des Labrador et des Sea King, les deux types d’appareil ayant été mis en service dans les années 60. La question a encore une fois suscité la controverse après l’écrasement d’un Labrador en Gaspésie le 2 octobre 1998, dans lequel tout l’équipage, composé de six militaires, a été tué les 12 autres Labrador ont été cloués au sol (sauf en cas d’urgence pour une question de vie ou de mort), précaution normale lorsque les causes de l’écrasement d’un type particulier d’appareil ne sont pas évidentes. Même si, deux semaines après l’écrasement, les enquêteurs n’avaient pas mis le doigt sur la cause exacte, on s’est demandé si l’ordre de maintien au sol ne pouvait pas être levé après une inspection détaillée des appareils encore en service. Néanmoins, la perte de six personnes et la destruction complète de l’appareil qui s’est écrasé ont fortement remis en question la capacité de recherche et de sauvetage du Canada. |
Les effets de l’écrasement du 2 octobre se sont conjugués lorsque l’ensemble de la flotte de Sea King a été clouée au sol le 15 octobre après la découverte d’une fuite de carburant dans un des appareils avant un vol d'entraînement. La flotte de Labrador étant clouée au sol, il revenait aux Sea King, qui ont effectué des missions de sauvetage dans le passé lorsqu’aucun Labrador n’était disponible, ainsi qu’aux Griffon, des appareils plus petits, d’être affectés aux missions de sauvetage nécessitant des hélicoptères. (Les Hercules et les autres appareils à voilure fixe peuvent aussi être déployés dans des missions de sauvetage.) Même si le 18 octobre, on avait inspecté tous les Sea King sauf un et levé l’ordre de leur maintien au sol, cette question du maintien au sol des Labrador et des Sea King a fait naître des doutes quant à la sécurité et à l’importance de ces appareils dans la capacité de sauvetage du Canada. |
Le Canada n’est pas le seul pays à connaître des problèmes de vieillissement de ses hélicoptères. L’U.S. Marine Corps utilise une autre version du Labrador appelée le Sea Knight, qui est tout aussi sujet aux défaillances. Toutefois, le Canada a au moins commencé à remplacer ses Labrador et fixé la date de prise de possession de ses hélicoptères de sauvetage. L’incertitude est plus grande quant aux Sea King dont le remplacement se fera dans plusieurs années. Par conséquent, on procède à d’importantes modifications, dont le remplacement de la section centrale de la cellule à un coût de 500 000 dollars par appareil, pour s’assurer que ces hélicoptères demeureront en service jusqu’en 2005. Les moteurs T58 ont aussi été améliorés par Acro Aerospace du Canada afin qu’ils soient plus fiables et plus performants. Du nouvel équipement a aussi été acheté pour améliorer la capacité des Sea King de faire de la surveillance et d’effectuer d’autres missions militaires. |
Après l'écrasement, le 28 avril 1994, d'un hélicoptère Sea King, dans lequel deux membres d'équipage ont perdu la vie, un député, à la période des questions, a demandé au ministre de la Défense nationale, David Collenette, si des mesures seraient prises rapidement pour remplacer les vieux appareils. Le ministre a déclaré le 5 mai que l'on continuerait de bien entretenir les Sea King, qui devraient pouvoir continuer à voler jusqu'en l'an 2000. Il a précisé que, comme toutes les autres questions de défense, le remplacement des Sea King serait abordé dans l'examen de la politique de défense, et qu'une décision serait prise seulement au terme de cet examen. |
Dans son rapport intitulé La sécurité dans un monde en évolution, publié le 31 octobre 1994, le Comité mixte spécial du Sénat et des Communes sur la politique de défense du Canada a recommandé que l'on s'occupe rapidement de l'acquisition de nouveaux hélicoptères embarqués et de nouveaux hélicoptères de sauvetage pour remplacer les Sea King et les Labrador. Dans sa réponse du 1er décembre 1994 au rapport, le ministre de la Défense nationale a signalé que le gouvernement tenait compte de presque toutes les recommandations du Comité dans le Livre blanc sur la défense de 1994 publié le même jour. En effet, il est précisé dans le Livre blanc que l'étude des solutions de remplacement des hélicoptères embarqués et des hélicoptères de sauvetage a déjà été entamée. |
Voici une suite chronologique intéressante. Le 26 juin 1986, le Conseil du Trésor a approuvé le début de la phase de définition du projet concernant le nouvel aéronef embarqué devant remplacer le Sea King. Le 15 mars 1991, le ministère de la Défense nationale a fusionné les travaux de planification du NAE ainsi que des nouveaux aéronefs de recherche et de sauvetage. Le 30 avril 1992, un Labrador s'est écrasé en Colombie-Britannique au cours d'une opération de sauvetage, entraînant la mort d'un technicien de recherche et de sauvetage. Le 8 octobre 1992, le gouvernement canadien a conclu des marchés avec EH Industries Ltée et Paramax Canada en vue de la livraison de 50 hélicoptères EH-101 destinés à remplacer les Sea King et Labrador. Le 27 février 1993, un Sea King a amerri d'urgence dans le golfe du Mexique après une panne de ses systèmes électriques.
Je vais ajouter ici à cette chronologie un autre fait pertinent. Le 3 avril 1993, le Toronto Star de Toronto a cité le leader libéral de l'opposition de l'époque à la Chambre. Face à l'intention annoncée du gouvernement Mulroney de remplacer les hélicoptères militaires déjà trop vieux à l'époque, il a dit: «Je suis sûr que, lorsque le Cabinet a pris cette décision ce jour-là, probablement tous les ministres, et non seulement Charest et Campbell, fumaient du pot. C'est impensable lorsqu'on voit autant de pauvreté dans les rues». C'était le chef de l'opposition de l'époque, qui est aujourd'hui le premier ministre.
Eh bien, il y a toujours de la pauvreté dans les rues. Il y a aussi de la pauvreté chez les militaires. Nos bons soldats ont dû faire la queue devant les banques alimentaires civiles, et il flotte toujours des nuages au-dessus du bureau du premier ministre. Il s'agit probablement de la fumée qui se dégage encore de l'appareil gouvernemental qui s'est mis en branle lorsque le premier ministre a décidé que lui et son Cabinet avaient besoin de nouveaux palais volants luxueux pour se rendre à des parcours de golf encore plus vite qu'avec les avions à réaction dont ils disposaient auparavant, et qui étaient encore évidemment en parfait état de vol selon les militaires. Ceux-ci ont dit en effet que ces appareils étaient en excellent état et n'avaient pas besoin d'être remplacés.
Dommage qu'ils ne mettent pas leurs priorités à la bonne place. Ces 100 millions de dollars auraient grandement contribué à assurer la sécurité de nos militaires en leur procurant de nouveaux hélicoptères. Le gouvernement a envoyé à bien des gens le message troublant que l'argent qu'ils envoient à Ottawa est traité comme de vulgaires détritus, une chose dont on veut se débarrasser le plus vite possible.
Je devrais mentionner que le gouvernement a aussi dépensé l'an dernier 120 000 $ en balles de golf et 15 000 en tés de départ. Je doute que bien des soldats outre-mer reçoivent des balles de golf et des tés.
En novembre 1993, le nouveau gouvernement libéral annonçait l'annulation des marchés avec EH Industries et Paramax Canada pour la construction d'appareils EH-101. Le 28 avril 1994, deux membres de l'équipage d'un hélicoptère Sea King trouvaient la mort et deux autres étaient blessés dans l'écrasement de leur appareil au Nouveau-Brunswick. Le 18 août 1994, tous les hélicoptères Sea King étaient cloués au sol temporairement pour inspection, en raison de fuites d'essence découvertes dans certains appareils.
M. Jim Gouk: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Notre chef s'est donné énormément de mal pour rassembler des faits très pertinents et il serait bien qu'il y ait un quorum minimum de libéraux à la Chambre.
* * *
Après le compte:
Le président suppléant (M. Bélair): Il y a quorum. Le chef de l'opposition a la parole.
M. John Reynolds: Monsieur le Président, le 28 avril 1994, les appareils Sea King ont été temporairement gardés au sol pour fins d'inspection, en raison d'une fuite de carburant constatée à la suite d'un atterrissage d'urgence d'un de ces appareils. Le 31 octobre 1994, un rapport du Comité mixte spécial du Sénat et de la Chambre des communes sur la politique de défense du Canada a recommandé que des mesures soient prises rapidement afin d'acquérir de nouveaux hélicoptères embarqués et des appareils de recherche. Le 1er décembre 1994, le Livre blanc sur la politique de défense a révélé que le gouvernement irait de l'avant avec le remplacement des appareils Sea King et Labrador dans un proche avenir.
Le 31 mars 1995, le gouvernement du Canada et Unisys GSG Canada, un des principaux entrepreneurs pour le marché des EH-101, sont arrivés à un accord relatif au paiement de 166 millions de dollars à titre d'indemnisation pour le travail accompli par l'entreprise avant l'annulation du marché. Le 1er mai 1995, un Labrador basé à la BFC Greenwood, en Nouvelle-Écosse, a fait un atterrissage d'urgence à cause de problèmes mécaniques. Le 20 septembre 1995, un appareil Sea King a fait un atterrissage d'urgence en raison d'ennuis mécaniques. Le 8 novembre 1995, le gouvernement a annoncé son intention d'acquérir de nouveaux hélicoptères de recherche et sauvetage.
Le 9 novembre 1995, le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux annonçait la conclusion d'un accord de principe avec EH Industries au sujet des frais de résiliation du contrat d'achat d'avions EH-101.
Le 23 janvier 1996, le gouvernement annonçait que les frais de résiliation du contrat d'achat de EH-101 avec EH Industries étaient de 157,8 millions de dollars. Le 8 mars 1996, le ministre de la Défense nationale déclarait que la décision touchant le projet d'achat d'hélicoptères embarqués serait reportée d'une autre année. Le 23 août 1996, trois des hélicoptères de la flotte du Canada étaient clouées au sol en attendant des travaux d''inspection et la réparation de fissures constatées dans la queue de l'aéronef. Le 27 novembre 1996, le gouvernement publiait la demande de propositions des fabricants d'aéronefs relativement au projet d'achat d'hélicoptères de sauvetage.
Le 13 janvier 1997, un hélicoptère Labrador effectuait un atterrissage en catastrophe dans le détroit de Georgie, après qu'un incendie eut éclaté à bord. Ce fut le plus sérieux de plusieurs atterrissages d'urgence effectués par des Labrador et des Sea King à la fin de 1996 et au début de 1997. Le 5 mai 1997, quatre fabricants soumettaient, dans les délais prescrits, des propositions concernant de nouveaux hélicoptères de sauvetage: Agusta-Westland, Boeing Helicopter et Sikorsky.
Le 5 janvier 1998, le ministre de la Défense nationale et le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux annonçaient que EH Industries avait été choisie pour fabriquer 15 Cormorant devant remplacer les hélicoptères de recherche et de sauvetage Labrador. Le 23 avril 1998, le ministère de la Défense nationale annonçait la signature du contrat avec EH Industries pour la fabrication de 15 Cormorant, au coût de 580 millions de dollars. Le 2 octobre 1998, un hélicoptère Labrador du 413e Escadron basé à Beechwood, en Nouvelle-Écosse, s'écrasait dans la péninsule gaspésienne, tuant ses six occupants. Les 12 Labrador restants furent cloués au sol par mesure de précaution. Le 15 octobre 1998, les 30 Sea King de la flotte étaient cloués au sol après la découverte d'une fuite de carburant dans l'un des aéronefs. Tous les aéronefs sauf un ont repris leurs opérations de vol le 18 octobre.
Permettez-moi une brève digression, afin de parler du dernier budget. Selon le point du vue du ministère de la Défense nationale et des Forces canadiennes, le budget fédéral laisse grandement à désirer. Ce budget, qu'on a voulu adapté à la situation qui prévaut depuis le 11 septembre, ne tient à peu près pas compte des besoins urgents d'une composante essentielle de la sécurité nationale, à savoir les forces armées. Deux problèmes majeurs se posent.
Les fonds supplémentaires dégagés au titre des capacités militaires générales et de la capacité opérationnelle ne sont que de 510 millions de dollars sur deux ans. Or, selon les calculs de la vérificatrice générale et d'autres, les compressions budgétaires annuelles de la défense nationale dépassent de loin cette somme. La façon dont le financement de la défense est présenté manque de clarté et pourrait induire en erreur des personnes qui s'intéressent aux questions de défense mais qui connaissent mal les pratiques budgétaires.
En bref, le budget consent 1,2 milliard de dollars au MDN et à ses organismes, sur une période de cinq ans allant de l'exercice financier 2001-2002 à l'exercice 2006-2007. Pour obtenir plus de détails, il suffit de consulter le site web du ministère des Finances, à l'adresse www.fin.gc.ca.
Pour cette période de cinq ans, plus l'année en cours, les crédits sont répartis ainsi: capacité accrue de lutter contre le terrorisme, 119 millions de dollars; menaces d'origine nucléaire, biologique, chimique, 513 millions de dollars; et les éventualités, 100 millions de dollars. Le reste est réparti sur une période de deux ans, comprenant l'année en cours, comme suit: soutien aux Forces canadiennes, 510 millions de dollars. Ce qui fait 1,2 milliard de dollars.
Je signale que le document budgétaire, soit le Plan budgétaire de 2001, prévoit également 396 millions de dollars pour la protection civile, comme il est mentionné à la page 97. Comme ce montant sera accordé à d'autres ministères et organismes, qui s'occuperont de le dépenser, il n'est pas inclus dans cette analyse. Un peu la même chose s'applique à la somme de 513 millions réservée pour faire face aux menaces d'origine nucléaire, biologique et chimique, même si une partie de ces crédits sera versée à la Défense nationale.
Les fonds supplémentaires sont utiles, mais seulement 510 millions de dollars sont consacrés à la capacité militaire conventionnelle et aux engagements pris dans le Livre blanc de 1994 sur la défense.
Par ailleurs, cette somme de 510 millions de dollars a été réservée à des fins particulières et ne peut donc pas servir à combler les lacunes de la capacité opérationnelle des Forces canadiennes, comme cela a été mentionné non seulement dans le cadre du débat d'aujourd'hui, mais également par la vérificatrice générale du Canada.
Les opérations de la coalition antiterroriste dans le cadre de l'opération Apollo coûtent 210 millions de dollars et les acquisitions d'immobilisation totalisent 300 millions de dollars. Les fonds réservés à l'opération Apollo ont déjà été dépensés et ne contribueront pas à stopper l'érosion de la capacité opérationnelle des Forces canadiennes. La somme de 300 millions de dollars réservée aux acquisitions d'immobilisations s'appliquera essentiellement à des projets déjà en cours. Ainsi, les ententes de bail-achat conclues pour la nouvelle flotte de sous-marins de la classe Victoria atténueront dans les années qui viennent les pressions exercées sur le programme d'immobilisations du MDN.
Les crédits affectés à l'accroissement de la capacité de lutter contre le terrorisme, dont j'ai parlé un peu plus tôt, visent à renforcer la Force opérationnelle interarmées 2, la FOI2, et à lui fournir l'équipement nécessaire. Les crédits réservés à cette nouvelle force n'atténueront en rien le malaise généralisé qui ronge les forces armées. Étant donné les ressources humaines qu'exige cette force, des pressions encore plus grandes sont exercées sur une organisation déjà à bout de souffle.
Récemment, différents organismes ont publié des rapports et des études analysant les difficultés causées par le refus du gouvernement d'accorder au MDN et aux Forces canadiennes les crédits nécessaires pour leur permettre de mettre en oeuvre la politique arrêtée en 1994 dans le Livre blanc de la défense. Les organismes en question sont le Royal Canadian Military Institute, la Fédération des instituts militaires et interarmées du Canada, la Conférence des associations de la défense, la Défense et la sécurité canadienne au XXIe siècle et le Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants de la Chambre des communes.
Le gouvernement a fait fi des recommandations formulées par le comité de la Chambre des communes. Je sais que le Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants est l'un de ceux où les députés travaillent en étroite collaboration, la question étant particulièrement importante pour le Canada. Ce comité est sans doute l'un des moins sectaires des comités. Nous travaillons main dans la main, en tant que Canadiens, comme, par exemple, au Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international. Le Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants a fait des recommandations dont le gouvernement n'a pas tenu compte. Nous devrions tous en avoir honte. Le Comité permanent des finances de la Chambre des communes a lui aussi fait des recommandations.
Ces rapports et études ont tous fait état de graves problèmes au sein des Forces canadiennes, problèmes attribuables entre autres à un personnel qualifié insuffisant, à une formation insuffisante, à du matériel en train de rouiller et à un soutien logistique inadéquat.
Le 7 décembre 2001, la vérificatrice générale du Canada a sorti son rapport annuel, dans lequel elle a vérifié et confirmé les conclusions des rapports que je viens de citer. Elle y relève notamment un déficit annuel de quelque 1,3 milliard de dollars pour l'entretien et le fonctionnement. Ce déficit signifie que, pendant deux ans, le ministère de la Défense nationale aura besoin de 2,6 milliards de dollars simplement pour éponger ce déficit. Dans le budget de 2001, le gouvernement n'a accordé que 510 millions de dollars sur deux ans. Ces crédits sont déjà affectés à d'autres projets.
Dans des rapports antérieurs, la vérificatrice générale avait dit qu'il fallait prévoir de 6 à 10 milliards de dollars additionnels au cours de la prochaine décennie pour remplacer du matériel important. Dans le rapport qu'elle a présenté hier, elle dit qu'il faudra 30 ans pour rattraper le retard accumulé.
Jusqu'à maintenant, le ministère de la Défense nationale a réussi à survivre en réorganisant ses priorités et en réaffectant ses ressources. Étant donné que le budget de 2001 ne prévoyait pas beaucoup de nouveaux fonds, la politique voulant qu'on prenne à Pierre pour donner à Paul n'est plus valable. Il est donc probable que la nouvelle politique de défense qui doit voir le jour au début de 2002 prévoira une autre rationalisation des Forces canadiennes, accompagnée de la suppression ou d'une réduction du potentiel de combat.
Le plan budgétaire de 2001 manque de clarté à cet égard. Par exemple, il commence par parler de fonds supplémentaires pour la défense de 1999 à 2001. Il présente l'information d'une manière qui risque d'induire le lecteur en erreur. J'en veux pour preuve la déclaration suivante qui figure à la page 106 du plan budgétaire de 2001:
Ensemble, les nouveaux fonds de 3,9 milliards de dollars prévus dans les budgets de 1999 et de 2000 et les crédits de plus de 1,2 milliard inscrits dans le présent budget signifient que le gouvernement aura majoré le budget du MDN de 5,1 milliards sur les cinq prochaines années. |
La somme de 5,102 milliards est calculée comme ceci: 550 millions dans le budget de 1999, 3,35 milliards dans le budget de 2000 et 1,202 milliard dans le budget de 2001.
On a déjà montré dans d'autres paragraphes de cette note que seulement 510 millons, sur la somme de 1,202 milliard de dollars allouée au budget de la défense pour 2001, serviraient à appuyer la capacité militaire existante des Forces canadiennes. En outre, cette somme est déjà destinée à des fins précises. Les 550 millions de dollars prévus dans le budget de 1999 servent à financer des programmes de qualité de vie. C'est fort bien, mais cela ne sert pas directement à rétablir la capacité militaire.
Cela pourrait aussi être critiqué de la même façon qu'on le fait dans le prochain paragraphe. Toutefois, ce sont les sommes totales de 3,35 milliards de dollars pour le budget de 2000 et de 5,102 milliards de dollars pour les années 1999, 2000 et 2001 qui sont représentées de la façon la plus contestable. Le problème réside dans le fait que l'on confond des hausses approuvées du budget de base du ministère de la Défense nationale pour une année donnée et les totaux cumulatifs pour des années successives.
La première hausse correspond bien sûr à une augmentation du financement qui accroît le niveau de la base budgétaire. Toutefois, le gouvernement présente cette hausse continue étalée sur plusieurs années comme un investissement. C'est peut-être correct, mais cela signifie également que la base budgétaire a continué à augmenter au-delà de la première année. Lorsqu'il n'en est pas ainsi, il y a une nette différence de signification entre les notions d'augmentation de la base, d'une part, et d'investissement total, d'autre part. Ces notions sont expliquées en détail. Le paragraphe 2 de la page 99 du plan budgétaire se lit comme suit:
Le présent budget prévoit donc des fonds substantiels pour améliorer l’intervention en cas d’urgence et la protection civile. Il affecte plus de 1,6 milliard de dollars sur cinq ans à l’amélioration de la capacité du gouvernement de déceler et de prévenir les menaces, et d’y réagir, ainsi qu’au financement de la participation militaire du gouvernement à la coalition internationale contre le terrorisme. |
À ce propos, il faut noter que le budget 2001 diffère passablement des précédents quant à la formule retenue. Au lieu de faire des affectations directes aux ministères et aux organismes, les crédits sont affectés aux différents programmes. Le ministère de la Défense nationale et les Forces canadiennes sont compris dans le programme en matière de sécurité. De ce fait, le MDN ne peut consacrer la grande partie des 1,6 milliard de dollars à des dépenses, tel qu'indiqué précédemment, ces fonds étant réservés à l'amélioration de la capacité d'intervention en cas d’urgence et à la protection civile.
Qui plus est, les fonds alloués au MDN sont affectés à l'avance à des éléments de dépenses précis. Plusieurs de ces éléments se trouvent à l'extérieur du MDN, notamment les menaces nucléaires, chimiques et biologiques. L'objectif politique de la citation précitée peut être interprété comme étant de répondre aux préoccupations du public face au ralentissement économique et au terrorisme, de diriger la plus grande partie du nouveau financement consenti au MDN vers les économies locales et de détourner la critique provenant des alliés et des analystes selon lesquels les forces armées, notamment les éléments affectés à l'Opération Apollo, ne sont pas prêts au combat. Ailleurs, le gouvernement a admis cette lacune en déclarant que les éléments affectés à l'Opération Apollo n'auraient pas à livrer de combats.
Nous voyons cela aujourd'hui dans l'opération annoncée par les Américains. Il n'y avait personne représentant le Canada dans cette salle alors qu'on parlait de la défense de l'Amérique du Nord. On ne nous respecte pas. Nous perdons le respect de nos alliés, car le gouvernement n'a aucun respect pour nos militaires. Il n'a aucun respect pour les traditions du Canada lorsqu'il s'agit de collaborer avec nos alliés du Sud, nos meilleurs amis et nos principaux partenaires commerciaux. C'est tout à fait regrettable.
Les résultats du budget de 2001 montrent que l'état de préparation opérationnelle des Forces canadiennes va continuer de baisser, surtout à cause d'un sous-financement. Ce n'est pas simplement l'opposition qui se plaint, car c'est ce qu'elle a tendance à faire. C'est également le cas de la vérificatrice générale du Canada, la personne que nous devons respecter et qui vérifie les livres et veille à ce que le gouvernement ne s'écarte pas du droit chemin. Elle a déclaré que nos forces armées étaient dans une situation extrêmement difficile. Nous avons des navires, mais pas d'équipages et des officiers sans uniforme. Le gouvernement peut avoir de belles toilettes dans ses avions à réaction, mais les soldats canadiens n'ont pas de toilettes portatives en Afghanistan.
À cause du sous-financement, il y a un manque de personnel entraîné, l'équipement rouille progressivement et le soutien logistique est inadéquat. Le gouvernement n'entend pas accroître les dépenses de défense au-delà du niveau de 1,1 p. 100 du PIB et, ainsi, les politiques énoncées dans le Livre blanc sur la défense de 1994 demeureront en grande partie inabordables en raison des priorités du gouvernement.
Nous recommandons que le gouvernement lance immédiatement un large examen de la sécurité nationale comprenant un examen public et parlementaire complet des besoins du Canada en matière de politique étrangère et de défense. À la fin du processus, il devrait publier un nouveau livre blanc sur la défense dans lequel il s'engagerait par écrit à financer adéquatement à long terme ce secteur. Ce processus a été lancé et mis en oeuvre récemment en Australie. Si nous devons avoir un livre blanc, nous devons avoir cet engagement du gouvernement.
Il ne sert à rien de lancer une étude si le gouvernement ne dit pas à l'avance qu'au bout du compte, lorsque cette question aura été soumise à un comité de la Chambre des communes, le gouvernement fournira les fonds nécessaires. Cela améliorerait immédiatement le moral de nos forces. Même s'il nous fallait un petit peu de temps pour réaliser cela, au moins, nos militaires sauraient que nous allons nous réunir et élaborer un livre blanc exposant nos orientations dans ces domaines, et ils sauraient que le gouvernement entend bien fournir tous les fonds nécessaires après un débat complet au comité et à la Chambre.
Les chiffres et explications présentés à la page 107 du Plan budgétaire sont très problématiques, car ils pourraient tromper le lecteur et la population. Pour bien les analyser, il faut comprendre la structure fondamentale des budgets ministériels et savoir que celle-ci se divise en deux parties, soit la base et une autre superstructure plus petite, ces deux parties n'existant que pour une seule année et devant être renouvelées au début de chaque exercice financier.
La fondation, qu'on appelle aussi la base, et la superstructure comportent des sommes qui s'ajoutent à l'extérieur de la base en cours d'année. La structure complète est décrite dans le Budget des dépenses annuel du ministère. Récemment, dans le cas du MDN, le soi-disant budget du cadre financier a atteint 9,5 milliards de dollars par année, et le budget des dépenses, 11,5 milliards de dollars environ. Il importe que la base budgétaire du MDN soit assez élevée pour financer les engagements contractés au nom des Forces canadiennes selon le Livre blanc sur la défense de 1994.
Une bonne base budgétaire assure la stabilité, permet une planification prospective cohérente et maintient les Forces canadiennes dans un réel état de préparation opérationnelle. S'il n'existait pas de budget fédéral pour fournir des sommes additionnelles au MDN, ou si un budget donné n'offrait aucune allocation additionnelle, l'organisme central devrait établir une base comme il l'a fait lors de l'année antérieure et, avec l'approbation du Cabinet, du Conseil du Trésor, du ministère des Finances et du Bureau du Conseil privé, il devrait ajouter la superstructure requise, par exemple dans le Budget supplémentaire des dépenses pour les dépenses approuvées en cours de route durant l'année.
Ce qu'il faut retenir, c'est que la base est faite de briques individuelles, la plupart comportant des augmentations approuvées par rapport à la base des années antérieures. Si une augmentation de la base n'est pas approuvée pour un exercice donné, il faut l'ajouter à nouveau pour chacune des années subséquentes. Par conséquent, il y a une véritable augmentation du financement de la défense uniquement la première année où la somme est indiquée. Lors des années subséquentes, il s'agit simplement d'une réinsertion qui permet de garder la base au niveau approuvé. Depuis la dernière augmentation de la base, dans le budget de 2000, cette brique s'appelle le programme intégrité ou durabilité.
Elle avait été établie à 400 millions de dollars pour l'exercice financier 2000-2001. Puisque les fonds supplémentaires accordés au MDN dans le budget de 2000 totalisent 3,3 milliards de dollars, y compris les projections subséquentes jusqu'en 2006-2007, on peut se demander pourquoi cette brique ne vaut que 400 millions de dollars.
Une partie de la réponse réside dans le fait que ces 3,3 milliards de dollars représentent le financement original plus les injections annuelles de fonds sur cette période étendue au cours de l'exercice 1999-2000. De même, d'autres fonds ont été prévus et affectés directement à des articles de dépense tels les programmes provinciaux de secours aux sinistrés et la guerre au Kosovo. Ces facteurs et d'autres signifient qu'en fin de compte, la brique d'argent neuf appliquée à la base au cours de la première année n'était que de 400 millions de dollars. On pourrait faire une analyse de ce genre pour la brique d'un montant de 140 millions de dollars relative à la qualité de la vie qui a été ajoutée au budget de 1999.
Par contre, la brique de 400 millions de dollars qui accroît la base budgétaire et qui a été approuvée dans le budget de 2000 pourra être accrue de façon restreinte au cours de la période allant jusqu'à l'exercice financier de 2007. Cela accroîtra la base budgétaire d'un montant total de 300 millions de dollars pendant cette période. Cela signifie qu'entre 2001 et 2007, la base du budget de la Défense nationale augmentera de 400 millions plus 300 millions de dollars, pour un total de 700 millions de dollars.
Toutefois, le gouvernement n'interprète pas la situation de la même façon. Le gouvernement additionne toutes les briques, la première ainsi que les ajouts annuels, et parle d'un investissement total de 5,1 milliards de dollars dans le domaine de la défense. Cela pourrait induire en erreur ceux qui ne connaissent pas bien les modalités budgétaires et les porter à croire que le gouvernement a accordé davantage de fonds au budget du MDN, alors qu'il n'a fait que des insertions dans le budget.
En utilisant la logique du gouvernement, on pourrait dire que les crédits budgétaires du MDN pour les exercices 2001 à 2007 totalisant la somme de quelque 60 milliards de dollars constituent également un investissement dans la défense. L'insertion annuelle de nouvelles briques permet de conserver le niveau de financement initialement approuvé dans un budget, sans que cela ne constitue une augmentation du niveau de financement.
Ce qu'on ne reconnaît pas au Cabinet, c'est que la base n'est pas assez grande pour supporter le déficit annuel courant du MDN de 1,3 milliard de dollars identifié par la vérificatrice générale dans son rapport du 2 décembre 2001. Pour résoudre le grave problème de sous-financement au MDN, il est nécessaire d'ajouter une nouvelle brique plus grosse à la base du budget du MDN, de l'ordre de un milliard de dollars par année pour chacune des cinq prochaines années afin de porter la base budgétaire à un niveau constant de 14 à 15 milliards de dollars. Tant qu'on ne le fera pas, pour utiliser une autre analogie, toute augmentation moindre du financement réel ne servira qu'à maintenir le système de maintien des fonctions vitales au lieu de guérir le patient.
Je voudrais maintenant citer une observation que l'un de mes collègues, l'honorable député de Lakeland, a formulée à plusieurs reprises à la Chambre:
Pendant que nos hommes et nos femmes risquent leur vie au nom de la liberté, de la justice et de la démocratie, il incombe aux députés de les soutenir non seulement en paroles et en pensée, mais aussi, et plus important encore, par des gestes. Nous devons nous demander si le gouvernement en fait assez pour défendre ceux qui nous protègent. Je dois répondre non à cette question. |
Les Canadiens ont posé la même question. Non seulement les Canadiens, mais le propre Comité de la défense du gouvernement, des analystes militaires de tout le pays, des militaires à la retraite, la vérificatrice générale et même certains de nos alliés ont exhorté le Canada à mieux appuyer les militaires. La réponse que tous ont obtenue est non. Le gouvernement n'a pas à coeur les militaires et n'accorde pas aux hommes et aux femmes des forces armées l'appui auquel ils sont en droit de s'attendre. |
À toutes fins pratiques, nos militaires ont été laissés pour compte dans le budget de décembre dernier, bien que ce budget ait été qualifié de budget de la défense et de la sécurité.
La vérificatrice générale a clairement indiqué cette semaine qu'il convenait d'investir un minimum de 2,2 milliards de dollars par an pour maintenir nos forces armées à leur niveau actuel, et encore davantage pour les aider à se reconstituer. Or le gouvernement a affecté au titre des Forces canadiennes moins de 5 p. 100 des crédits recommandés. C'est inadmissible. Ce fait témoigne de la nature de l'engagement du gouvernement à l'égard de nos militaires. Je trouve cela inadmissible pour les hommes et les femmes en mission en Afghanistan, qui risquent leur vie au quotidien pour leur pays.
Je vais citer ce que le premier ministre a dit en réagissant aux critiques formulées par des gens qui se préoccupent des militaires. Il a dit durant le congé de Noël qu'il «y a des lobbyistes représentant des marchands d'armements qui disent qu'ils vous paieront un meilleur repas si vous parlez plus d'eux».
Telle a été la réponse du premier ministre quand on l'a interrogé au sujet des gens qui se préoccupent vraiment de nos militaires. Il est honteux que notre premier ministre blâme les gens qui s'inquiètent vraiment. Leur seule faute a été de dire ce qui se passe vraiment dans les forces armées.
Je me demande qui a fait du lobbying pour l'obtention de ces deux jets dont le premier ministre a si grandement besoin, de ces deux belles toilettes dans un jet qui va un peu plus loin. Je me demande qui a fait du lobbying pour vendre au gouvernement l'antenne parabolique de 174 millions de dollars qui se trouve dans un entrepôt et que personne n'utilise. Je me demande qui a fait du lobbying pour obtenir toutes ces subventions qui profitent à des amis du Parti libéral.
Le dossier du gouvernement relativement aux militaires est absolument honteux. Nous avons un gouvernement arrogant et corrompu. Deux personnes ont d'ailleurs été inculpées au Québec pour usage non conforme des subventions.
Le gouvernement s'attaque à quiconque parle des réalités de la vie. Des députés ministériels et le ministre de la Défense nationale continuent de nous donner l'assurance que les troupes sont bien équipées pour leurs missions. Ils affirment qu'elles disposent de toutes les ressources requises pour bien faire leur travail et qu'elles le font en toute sécurité. Ils affirment que tout a été bien planifié et bien pensé et que le gouvernement a tiré des enseignements de ses erreurs du passé. C'est ce que nous disent régulièrement le premier ministre et le ministre de la Défense nationale.
La réalité se trouve dans le rapport de la vérificatrice générale. C'est malheureux que mon temps de parole soit presque écoulé, parce que j'avais encore des tas de choses à dire à propos du rapport de la vérificatrice générale. On pourrait parler pendant des heures de ce rapport et du gaspillage du gouvernement, non seulement du ministère de la Défense, mais de tous les autres. N'est-il pas honteux qu'il faille que la vérificatrice générale dise au gouvernement, pour une deuxième année de suite, ce qu'il ne fait pour les militaires?
Le pays est prêt pour un changement. Il est prêt pour une vision rajeunie et un chef plus jeune, qui prendra place de ce côté-ci après le 13 septembre. Le pays a besoin de renouveau. À en juger par le rapport de la vérificatrice générale, cela est très évident. À en juger par l'arrogance de l'autre côté, cela est très évident.
Une voix: Attention aux types qui ont les cheveux blancs.
M. John Reynolds: Monsieur le Président, un collègue de l'autre côté dit de faire attention aux types qui ont les cheveux blancs. C'est mon cas, mais je dois dire que j'ai bien hâte de voir, parce que mon parti compte de jeunes députés, représente la diversité ethnique et a un nouveau jeune chef qui captivera le pays et assurera que nos militaires ont les ressources financières adéquates.
Il nous fera reconquérir le respect de nos alliés américains et de nos amis aux quatre coins du monde. Le pays perd le respect dont nous jouissions auprès de nos collègues américains. Nous devons reconquérir ce respect et nous le ferons avec l'Alliance canadienne sous la gouverne de Stephen Harper, le chef de notre parti.
Je remercie les députés de la Chambre de leur attention. J'espère que tous les députés libéraux iront s'assurer que leurs collègues du Cabinet ont bien écouté ce que nous avons dit aujourd'hui. Occupons-nous de nos militaires comme ils le méritent.
INITIATIVES PARLEMENTAIRES
[Initiatives parlementaires]
* * *
[Traduction]
La Loi sur les contraventions
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 11 avril, de la motion: Que le projet de loi C-344, Loi modifiant la Loi sur les contraventions et la Loi réglementant certaines drogues et autres substances (marihuana), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité, ainsi que de l'amendement.
Le président suppléant (M. Bélair): Comme il est 17 h 44, conformément à un ordre du mercredi 10 avril, la Chambre passe maintenant au vote par appel nominal différé sur l'amendement à la motion de deuxième lecture du projet de loi d'initiative parlementaire C-344.
Convoquez les députés.
(L'amendement, mis aux voix, est adopté par le vote suivant:)
(Vote no 272)
|
Le président suppléant (M. Bélair): Je déclare l'amendement adopté.
La prochaine mise aux voix porte sur la motion principale telle que modifiée. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le président suppléant (M. Bélair): Que tous ceux qui appuient la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le président suppléant (M. Bélair): Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le président suppléant (M. Bélair): À mon avis, les non l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
Une voix: J'invoque le Règlement.
Le président suppléant (M. Bélair): Les rappels au Règlement seront entendus après le vote.
(L'amendement, mise aux voix, est adoptée par le vote suivant:)
(Vote no 273)
|
Le président suppléant (M. Bélair): Je déclare la motion adoptée.
(L'ordre est annulé, le projet de loi est retiré et son objet est renvoyé à un comité.)
Le président suppléant (M. Bélair): À l'ordre, s'il vous plaît. Le député de St. Albert invoque le Règlement.
* * *
Recours au Règlement
[Recours au Règlement]
M. John Williams (St. Albert, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je voudrais vous signaler que, comme vous l'avez sûrement remarqué, un grand nombre de députés sont sortis après le premier vote. Lorsque la sonnerie s'est fait entendre, nous sommes venus voter sur l'amendement au projet de loi C-344. Après, vous avez vu, comme tout le monde du reste, un grand nombre de députés sortir.
Vous aviez l'obligation, monsieur le Président, de faire entendre la sonnerie pendant une demi-heure pour convoquer les députés avant que vous ne lisiez la motion et que nous ne votions sur la motion principale concernant le projet de loi C-344. Je vous demande donc d'annuler le dernier vote comme non réglementaire.
Le président suppléant (M. Bélair): Je suis désolé d'informer mon collègue que son rappel au Règlement n'est pas recevable. Je m'explique. Notre Règlement dispose, au deuxième paragraphe de l'article 93:
Toutefois, à moins qu'on en ait disposé plus tôt, au plus tard quinze minutes avant la fin de la période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés, le Président interrompt toute délibération dont la Chambre est alors saisie et met aux voix, sur-le-champ et successivement sans autre débat ni amendement, toute question nécessaire en vue de disposer de la motion choisie ou du projet de loi choisi à l'étape de la deuxième lecture. |
M. John Williams: Monsieur le Président, je vous remercie beaucoup de votre décision. Je ne conteste pas la décision de la présidence, mais je crois que la présidence est passée à côté de la question, à savoir qu'un article précis du Règlement dit que les députés doivent être convoqués pour le vote.
Le timbre a sonné et nous sommes venus voter sur l'amendement proposé au projet de loi C-344. Comme la présidence et tout le monde l'ont vu, un grand nombre de députés ont quitté la Chambre. À mon avis, la présidence avait donc l'obligation de convoquer de nouveau les députés et de laisser le timbre sonner pendant 30 minutes. Comme la présidence le sait, cela ne s'est pas produit.
Les députés qui avaient quitté la Chambre n'ont pas pu y revenir, car lorsqu'ils l'ont quittée, la présidence ne s'était pas levée pour lire la motion principale. On peut donc dire qu'ils ignoraient qu'un vote devait avoir lieu et le timbre aurait dû sonner pendant 30 minutes. Comme il n'a pas sonné, le vote était contraire au Règlement. Les travaux n'étaient pas contraires au Règlement, mais le vote l'était.
[Français]
M. Jacques Saada (Brossard--La Prairie, Lib.): Monsieur le Président, je me réfère ici à l'ordre projeté des travaux d'aujourd'hui. Au bas de la page, il est clairement indiqué, et je cite: «Mise aux voix de la motion principale—on a voté sur l'amendement—immédiatement après que l'on aura disposé de l'amendement, conformément à l'article 93 du Règlement.»
Je ne vois vraiment pas ce qu'on essaie de faire au point de vue procédural, si ce n'est de vouloir faire une déclaration politique qui me paraît tout à fait hors d'ordre.
[Traduction]
Le président suppléant (M. Bélair): Pour revenir à l'argument du député selon lequel des députés avaient quitté la Chambre, le greffier au Bureau me dit qu'il y a eu deux votes d'affilée et que rien dans aucun règlement n'empêche un député de quitter la Chambre entre les deux votes.
M. John Williams: Monsieur le Président, avec le respect que je dois à la présidence, je crois toujours que la présidence passe à côté de la question. Bien sûr nous pouvons quitter la Chambre. Bien sûr nous pouvons demeurer assis et ne pas nous prononcer lorsqu'on donne notre nom, comme certains l'ont peut-être fait. Cependant, cela n'a rien à voir avec la question.
Le fait est que la présidence savait qu'un grand nombre de députés n'étaient pas présents. Afin de nous permettre d'exercer notre responsabilité démocratique de voter à la Chambre, le Président a l'obligation de demander que le timbre sonne pendant 30 minutes, ou 15 minutes s'il s'agit d'un vote différé.
Le fait est que le timbre aurait dû sonner. Voilà ce que j'essaie de faire comprendre. Comme le timbre n'a pas sonné et que les députés n'ont pas été convoqués à la Chambre, le vote est contraire au Règlement.
Le président suppléant (M. Bélair): Je crois que les leaders de la Chambre se sont entendus pour dire que, lorsqu'un vote par appel nominal différé est prévu à une date précise et que tout le monde sait d'avance qu'il y aura un vote sur l'amendement, suivi immédiatement d'un vote sur la motion principale, le timbre ne sonne pas entre le vote sur l'amendement et le vote sur la motion principale.
M. John Williams: Monsieur le Président, je m'excuse encore de mes multiples interventions. Comme chacun le sait, il se passe bien des choses à la Chambre de manière officieuse, mais il y a des modalités et des règles officielles à respecter pour veiller à ce que tout soit fait convenablement, légalement et judicieusement. Le problème, en l'occurrence, c'est la convocation des députés pour un vote.
La présidence sait qu'un grand nombre de députés ont quitté la Chambre. Ils sont sortis en guise de protestation ou pour toute autre raison que ce soit. Cependant, comme un grand nombre de députés sont sortis, ils devaient être convoqués à nouveau parce qu'il y avait un autre vote qui n'avait pas commencé. La motion n'avait pas été lue. La présidence ne s'était pas levée pour lire la motion. Comme celle-ci n'avait pas été présentée aux fins du vote, la présidence avait l'obligation de convoquer les députés. Le timbre aurait dû se faire entendre, ce qui n'a pas été le cas. Les députés n'ont pas été convoqués et n'ont pas eu la chance de revenir à la Chambre.
M. Geoff Regan (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole au sujet du même recours au Règlement. Sauf le respect que je dois au député, il est clair qu'une fois que les députés se présentent à cet endroit pour voter, ils ont la possibilité et le devoir de rester ici et de voter. Les députés qui ont décidé de quitter la Chambre ce soir en guise de protestation ou pour toute autre raison avaient la possibilité de rester. Ils savaient tous qu'il y aurait un vote après le premier. Ils ont décidé de ne pas être présents pour ce vote. C'était leur choix. S'ils ne voulaient pas rester pour le vote, la décision leur appartenait.
Le député laisse entendre qu'il faudrait rester assis et gaspiller le temps de la Chambre en faisant retentir le timbre pendant une demi-heure, simplement parce que certains députés veulent se prêter à de petits jeux. Ce n'est certainement pas une objection valable.
Le président suppléant (M. Bélair): Je reviens à ma dernière remarque à l'intention du député de St. Albert. Il fallait procéder immédiatement à deux votes d'affilée. Si certains députés de son parti ont décidé de sortir, c'était leur décision. La Chambre devait malgré tout passer au vote sans que le timbre ne retentisse, parce qu'il en avait été décidé ainsi il y a 10 jours. C'en est donc fait de ce recours au Règlement.
* * *
Question de privilège
Tentative d'enlèvement de la masse
[ Privilège]
L'hon. Ralph Goodale (leader du gouvernement à la Chambre des communes, ministre responsable de la Commission canadienne du blé et interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, Lib.): Dans les dernières minutes, monsieur le Président, la Chambre a été témoin d'un comportement extraordinaire.
Je suis ravi que le député de St. Albert ait parlé d'un comportement correct, légal et judicieux, car, plus tôt ce soir, nous avons été témoins d'un comportement tout autre. Faisant un affront à la dignité de la Chambre et portant atteinte à son ordre et à son décorum, un député de l'opposition a tenté de saisir et d'enlever la masse de la table du greffier. On ne saurait faire pire affront à la dignité, au décorum et à l'ordre de la Chambre.
Je tiens à protester vivement et officiellement et à dire à la présidence que, dès que je le pourrai, à la prochaine séance de la Chambre, j'entends revenir là-dessus d'un point de vue légal. J'estime que cette question de privilège mérite d'être examinée. Je tenais donc à en donner avis au plus tôt.
Le président suppléant (M. Bélair): C'est chose faite et, compte tenu de la gravité de la situation, je suis persuadé que le Président voudra examiner lui-même la question et en faire rapport à la Chambre.
La députée d'Ottawa-Ouest--Nepean veut-elle soulever la même question de privilège? Le député d'Esquimalt--Juan de Fuca attend patiemment de prendre la parole.
Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.): Monsieur le Président, j'invoque une question de privilège.
On a soulevé la question de privilège à l'égard de la pire atteinte possible au décorum de la Chambre et je demande que, jusqu'à ce que la question de privilège soit résolue, le député responsable, soit celui qui fait l'objet de la question de privilège, ne soit pas autorisé à prendre la parole à la Chambre.
Le président suppléant (M. Bélair): Non, je ne suis pas d'accord ici avec la whip du gouvernement. Le Président devra d'abord se prononcer sur la gravité du geste du député d'Esquimalt--Juan de Fuca.
M. Keith Martin (Esquimalt--Juan de Fuca, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je vous présente mes excuses, à vous ainsi qu'à la Chambre, pour avoir touché à la Masse, un symbole de démocratie dans cette Chambre. Le leader du gouvernement à la Chambre a fait état des affronts à la Chambre et de ce qu'il est convenable, légal et judicieux de faire dans cette enceinte. Or, il n'y a pas plus grand affront que l'atteinte à la démocratie qui a eu lieu aujourd'hui en rapport avec la motion du gouvernement.
Je m'excuse cependant à la Chambre d'avoir touché la Masse. J'ai agi sous l'impulsion du moment et pour montrer qu'on avait porté atteinte à la démocratie en détruisant quatre années de travail et en mettant en péril la vie de certaines personnes. J'ai fait cela pour faire valoir un point. Je n'aurais pas dû et je tiens à m'en excuser.
Le président suppléant (M. Bélair): Les excuses du député sont acceptées, mais j'ignore si le Président voudra pousser l'affaire plus loin. J'ai cependant bien pris acte des excuses.
M. Dale Johnston: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je veux répliquer au leader du gouvernement à la Chambre et au whip. Je tiens à aviser la présidence, et je suis certain qu'il est au courant, que j'ai fait des arrangements avec le bureau de la Chambre pour que le député puisse parler avant cette intervention. La présidence est au courant de cela et j'en ai également prévenu le bureau de la Chambre.
[Français]
Le président suppléant (M. Bélair): Comme il est 18 h 55, la Chambre abordera maintenant l'étude des affaires émanant des députés selon l'ordre indiqué au Feuilleton d'aujourd'hui.
Initiatives parlementaires
[Initiatives parlementaires]
* * *
[Français]
Loi sur le code de déontologie à l'intention des ministres
M. Stéphane Bergeron (Verchères--Les-Patriotes, BQ) propose: Que le projet de loi C-388, Loi régissant les conflits d'intérêts et prévoyant un code de déontologie à l'intention des ministres, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
--Monsieur le Président, j'aurais voulu commencer mon allocution en disant qu'il me faisait plaisir de prendre la parole dans le cadre de ce débat portant sur le projet de loi C-388, qui a vu le jour après un peu plus de deux années de travail. Toutefois, je dois malheureusement conclure, après le triste spectacle auquel on a assisté tout à l'heure de la part du gouvernement, que la quantité de travail et le nombre d'années au cours desquelles on a préparé un projet de loi importent peu ici à la Chambre. Le gouvernement peut s'attaquer de façon tout à fait scandaleuse aux affaires émanant des députés et aux droits des parlementaires de soulever à la Chambre des questions qui font l'objet de préoccupations de la part de leurs concitoyennes et concitoyens.
Cela étant dit, ne serait-ce que pour la forme, je vais continuer ma présentation, parce que j'estime que le contenu de ce projet de loi mérite d'être entendu, même si, malheureusement, on n'aura pas l'opportunité de se prononcer sur ce projet de loi par un vote.
Le sommaire du projet de loi stipule que:
Le texte a pour but de régir la conduite des ministres en ce qui concerne les conflits d'intérêts et l'après-mandat. Il est fondé principalement sur le Code régissant la conduite des titulaires de charge publique en ce qui concerne les conflits d'intérêts et l'après-mandat ainsi que sur le «Code of Conduct for Members of Parliament» du Royaume-Uni. |
Ce projet de loi a donc pour effet d'établir les règles de conduite des ministres en ce qui concerne les conflits d'intérêts et de définir également ce qui constitue un conflit d'intérêts pendant l'exercice de leurs fonctions et lors de l'après-mandat.
Le projet de loi prévoit, pour ce faire, la mise en place d'un code de déontologie principalement fondé sur le code déjà existant régissant la conduite des titulaires de charge publique en ce qui concerne les conflits d'intérêts et l'après-mandat, de même que sur le «Code of Conduct for Members of Parliament» du Royaume-Uni, qui feraient désormais partie du corpus législatif canadien. Tout manquement pourrait dès lors faire l'objet de sanctions prévues dans ce projet de loi.
On remarquera que le projet de loi débute avec une description détaillée de la manière dont doivent être traités les biens des ministres. On définit clairement la différence existant entre les biens exemptés, qui sont les biens réservés à l'usage personnel du ministre et de sa famille, et les biens dont il doit se dessaisir, compagnies, actions en bourse, ainsi de suite, dont il doit se départir ou dont il doit confier l'administration à une tierce partie, par exemple à une fiducie. Outre la question des biens et des déclarations réglementaires s'y rapportant, le projet de loi définit également, afin d'éviter toute confusion, les liens familiaux pertinents.
Une partie des informations sur les avoirs des ministres dévoilées en vertu des dispositions du présent projet de loi seraient rendues publiques, garantissant ainsi la transparence du système, condition sine qua non devant permettre à la population de retrouver un certain niveau de confiance dans nos institutions politiques et l'intégrité de ses principaux acteurs, à savoir les ministres.
Le cynisme de la population à l'égard des institutions publiques, déjà très perceptible dans les sondages, se traduit, élection après élection, par une désaffection croissante et un taux de participation de plus en plus anémique. Un gouvernement n'a guère à se féliciter et à se targuer d'avoir été élu avec près de 40 p. 100 des quelque 60 p. cent des électeurs qui ont pris la peine de participer au scrutin.
Un tel phénomène témoigne d'un système malade, dont il ne faut pas se satisfaire avec complaisance parce qu'il nous arrange, mais dont il nous faut nous inquiéter très sérieusement.
Des modifications importantes en matière d'éthique et de conflit d'intérêts sont donc plus indiquées que jamais, d'autant que la nébuleuse affaire de l'Auberge Grand-Mère et le départ précipité d'Alfonso Gagliano au Danemark, à la suite d'allégations de népotisme et de favoritisme, n'ont fait qu'éroder encore davantage la confiance déjà chancelante de nos concitoyennes et de nos concitoyens à l'égard des politiciens.
D'ailleurs, l'article 3 projet de loi C-388 décrit clairement l'objectif poursuivi par cette initiative, et je cite:
La présente loi a pour objet d'accroître la confiance du public dans l'intégrité des ministres et dans le processus de prise de décision du gouvernement fédéral: |
Il est évident qu'un tel projet de loi ne pourrait que favoriser un accroissement du niveau de confiance de la population envers le gouvernement et modifier la conception très négative que nos concitoyennes et concitoyens ont actuellement des politiciens.
En effet, les résultats d'un sondage effectué par la firme de sondages Léger Marketing, et rapportés dans un article publié dans l'hebdomadaire La Voix de l'Est, le 25 février dernier, indiquent que le taux de confiance de la population à l'égard des politiciens n'a jamais été aussi faible, atteignant, et je cite:
[...] un creux historique de 18 pour cent [...] |
Les gens «font plus confiance à un vendeur d'autos qu'à un politicien», note le sondeur. Les politiciens arrivent en effet au dernier rang des 20 métiers suggérés [...] |
On le voit et on le sent bien, la cote de confiance des gens envers nous est au plus bas. J'estime, pour ma part, que cette situation est des plus alarmantes et qu'on doit s'en inquiéter en tant que parlementaires, puisqu'elle constitue probablement la pire menace à laquelle nos institutions aient eu à faire face depuis belle lurette. C'est un danger d'autant plus insidieux qu'il peut nous sembler banal, passager, conjoncturel.
Or, comme je l'ai déjà déclaré à la Chambre, la démocratie est une richesse qu'il ne nous faut jamais prendre définitivement pour acquise et qu'il nous faut chérir soigneusement.
Des mesures exigeant un peu plus de transparence de la part des membres du Cabinet, comme le prévoit le projet de loi dont nous débattons ce soir, devraient donc faire partie non pas simplement des préoccupations, mais également du menu législatif du gouvernement et ce, le plus rapidement possible. D'ailleurs, il n'est nul besoin d'insister sur le fait que l'actuel gouvernement fédéral a bien besoin de redorer son blason en matière de probité et de crédibilité auprès de la population.
En adoptant un code d'éthique régissant la conduite des ministres dans le cadre de leurs fonctions et après leur mandat, la Chambre des communes se doterait d'un outil solide en matière d'intégrité et de probité publique, qui ne pourrait que susciter le respect de nos concitoyennes et de nos concitoyens. Ce serait toujours un bon début pour retrouver leur confiance perdue.
Vivre en société implique que nous devions assumer les conséquences de nos actes, de même que les obligations et responsabilités découlant de nos choix. Les membres du gouvernement, à titre de citoyens responsables, se doivent d'agir dans l'intérêt public et non en fonction de leurs intérêts personnels. Pour s'assurer que les ministres agissent en toutes circonstances dans l'intérêt public et de façon intègre, leurs responsabilités et obligations devraient logiquement être inscrites dans le corpus législatif canadien.
En plus du serment d'office qu'ils doivent prêter avant d'exercer leurs fonctions, les ministres seraient formellement appelés, en vertu de ce projet de loi, à produire, entre autres, une déclaration de confidentialité et une déclaration de dessaisissement.
Finalement, on retrouve dans le projet de loi C-388 la création d'un poste de commissaire à l'éthique, un vrai. Celui-ci serait nommé par la Chambre et redevable à celle-ci dans l'exercice de ses fonctions. Il serait nommé pour un mandat d'une durée de sept ans, renouvelable une seule fois, et ses fonctions seraient essentiellement, et je cite:
a) de recueillir les déclarations et les rapports des ministres; |
b) de donner des directives et des conseils aux ministres quant aux mesures qu'ils devraient prendre afin de se conformer aux dispositions de la présente loi; |
c) de tenir un registre public dans lequel il verse les déclarations publiques des ministres; |
d) de faire des études et de tenir des enquêtes; |
e) de surveiller l'application de la présente loi. |
Le commissaire serait donc investi d'un véritable pouvoir d'enquête et pourrait instituer une enquête de sa propre initiative ou à la suggestion de parlementaires ou même de simples citoyennes et citoyens, s'il estime que les faits exposés le justifient.
En plus de la rencontre annuelle statutaire prévue dans ce projet de loi, le commissaire en éthique pourrait en tout temps demander une rencontre avec un ministre et vice-versa. Le commissaire donnera à cette occasion des conseils et émettra des directives au ministre qui, lui, devra obligatoirement, sous peine de sanctions, se conformer à ces mêmes directives émises par le commissaire.
Il est important de rappeler, pour le bénéfice des personnes qui suivent ce débat, que les projets de loi ainsi que les motions qui sont présentés par les députés à la Chambre des communes sont examinés par un sous-comité de parlementaires, le Sous-comité des affaires émanant des députés du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, qui a le pouvoir et le mandat de décider quelles seront les affaires qui feront l'objet d'un vote.
Nous avons eu maints débats à cet égard, à savoir s'il serait opportun de permettre que toutes les affaires émanant des députés fassent l'objet d'un vote, mais malheureusement, la récente mini modernisation du Règlement de la Chambre n'aura pas permis qu'on aille de l'avant dans cette ligne.
Pour qu'un député voie son projet de loi ou sa motion être jugée votable, celui-ci ou celle-ci doit d'abord répondre à une série de six critères obligatoires, dont je vous épargnerai la lecture, sauf celui qui stipule que, et je cite:
Les projets de loi et les motions devraient viser des questions qui ne figurent pas au programme législatif actuel du gouvernement et sur lesquelles la Chambre des communes ne s'est pas prononcée ou ne s'est pas penchée par ailleurs pendant la session parlementaire en cours. |
Or, il semblerait que le projet de loi dont nous débattons actuellement aurait été jugé non votable par le Sous-comité des affaires émanant des députés, parce qu'il ne répondait pas au critère décrit précédemment.
L'Alliance canadienne aurait en effet présenté, nous dit-on, une motion se rapportant au même sujet que celui évoqué dans le projet de loi C-388. Aurais-je donc omis de vérifier, pendant la préparation de ce projet de loi qui a d'ailleurs duré plus de deux ans—comme je l'indiquais plus tôt—, si celui-ci répondait à tous les six critères retenus pour le choix des affaires votables?
Eh bien non. Après maintes vérifications et recherches, je n'ai pu que constater qu'aucune motion présentée par l'Alliance canadienne ou qui que ce soit d'autre ne proposait l'adoption d'une loi concernant un code régissant la conduite des ministres, en ce qui a trait aux conflits d'intérêts et à l'après-mandat.
Il y a par contre eu une motion déposée, en effet, par les alliancistes, qui a peut-être été la cause d'une telle méprise. Cette motion qui a été présentée par le député de Okanagan--Coquihalla, le 8 février 2001, et rejetée le 13 février par la majorité libérale à la Chambre, se lisait comme suit:
Que la Chambre adopte la politique suivante, tirée du livre rouge libéral, première version, et demande instamment au gouvernement de la mettre à exécution: «Nous désignerons un conseiller indépendant pour émettre des avis à l'intention des titulaires de charges publiques et des groupes de pression sur l'application du Code de déontologie. Le conseiller sera nommé après concertation avec les chefs de tous les partis représentés à la Chambre des communes et fera rapport au Parlement.» |
Il est compréhensible pour certaines personnes que les termes employés dans cette motion puissent effectivement porter à confusion, puisqu'on y retrouve des mots identiques, tels que «code», «conseiller» et «déontologie».
Cette motion proposée par l'Alliance canadienne avait simplement pour objectif de demander aux libéraux de respecter et de donner suite à l'une de leurs propres promesses. Le gouvernement avait d'ailleurs apporté un amendement à cette motion des alliancistes, pour éviter d'avoir à voter contre sa propre promesse électorale. Notre crédibilité dans la population ne fait que s'amoindrir davantage chaque fois que le gouvernement se prête à de petites manigances partisanes et qu'il s'emploie ainsi à éviter de tenir parole.
Il serait bien fallacieux de tenter de faire croire à quiconque que le projet de loi C-388 et la motion de l'Alliance canadienne sont du même ordre et, ainsi, que la Chambre se soit déjà penchée sur cette question au cours de la présente session. Nous avions ce soir une occasion inespérée de répondre aux attentes de la population qui ne demande qu'à accorder sa confiance aux institutions politiques qui sont les nôtres, pour peu qu'on veuille faire la démonstration de notre volonté d'assurer une plus grande transparence et une plus grande intégrité au processus de prise de décision.
C'est une occasion manquée, malheureusement, puisque les libéraux auront manoeuvré, encore une fois, pour éviter d'avoir à se prononcer sur cette question.
En 1993, les libéraux s'étaient pourtant engagés, avant d'être élus, à accroître le niveau de confiance de la population dans nos institutions, en faisant de l'intégrité et de la probité publique la pierre angulaire de leur campagne électorale. D'ailleurs, le premier ministre avait déclaré, au printemps 1993, et je cite: «Donner des emplois à mon barbier, à la femme de mon barbier, à celui qui s'occupait des enfants quand on était partis de la maison et puis à mon hôtelier favori à la dernière minute, ça n'arrivera plus.»
Ce genre de comportement, qui favorise des proches du gouvernement, peut parfois entacher sa propre réputation, celle des ministres, celle de la députation tout entière, mais par dessus tout, ces agissements sapent les fondements mêmes de notre démocratie.
Afin de donner suite aux attentes de la population, alimentées par ces commentaires antérieurs du premier ministre et de certains ministres, il faut sans tarder mettre sur pied un ou des mécanismes de transparence et de responsabilisation à l'intention de ce même premier ministre et de ses ministres. C'est d'ailleurs ce que proposait le projet de loi C-388.
Il faut à tout prix éviter que des situations embarassantes telles que la déplorable affaire de l'Auberge Grand-Mère, les allégations de patronage qui pèsent toujours sur l'ancien ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Alphonso Gagliano, et le fait de faire payer les contribuables à deux reprises pour un même rapport, comme ce fut le cas pour celui de Groupaction, se reproduisent encore et encore.
Afin de sauvegarder intacte la réputation des ministres et celle de leur parti politique, pour tous les parlementaires de cette Chambre, pour la population et nos institutions démocratiques, il est plus que temps que le gouvernement agisse. Il doit s'imposer des règles de conduite strictes et claires afin de légitimer les gestes qu'il pose aux yeux de la population.
M. Geoff Regan (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir l'occasion de prendre la parole au sujet du projet de loi déposé par le député de Verchères--Les-Patriotes proposant une Loi sur le code de déontologie à l'intention des ministres. Je tiens tout d'abord à le remercier d'avoir saisi la Chambre de l'importante et sérieuse question des valeurs et de l'éthique.
[Traduction]
C'est une question importante pour tous les députés. Nous sommes tous responsables devant la Chambre et les Canadiens du maintien de normes de conduite les plus strictes. Depuis son élection en 1993, le gouvernement a fait des valeurs et de l'éthique une priorité absolue. Selon moi, le projet de loi dont nous sommes saisis aurait pour effet de saper les progrès que nous avons faits depuis 10 ans pour restaurer les valeurs et l'éthique. Le sommaire du projet de loi précise:
Il est fondé principalement sur le Code régissant la conduite des titulaires de charge publique en ce qui concerne les conflits d'intérêts et l'après mandat ainsi que sur le Code of Conduct for Members of Parliament du Royaume-Uni. |
D'une part, le projet de loi est fondé sur quelque chose qui existe déjà au Canada pour les ministres, un code que le premier ministre a revu et renforcé en 1994. Ces révisions ont permis de préciser les obligations existantes et d'ajouter de nouvelles lignes directrices concernant la prise de décisions au sein du gouvernement. On a interdit le traitement préférentiel des personnes ou des groupes en fonction des individus engagés pour les représenter. Les titulaires de charge publique doivent maintenant déclarer les avoirs et les activités externes de leurs conjoints et des personnes à leur charge. Le premier ministre a déposé ce code au Parlement. Nous n'avons pas besoin d'une loi pour que ce code entre en vigueur, il fait déjà partie de la manière dont fonctionne le gouvernement.
D'autre part, le projet de loi C-388 est fondé sur le Code of Conduct for Members of Parliament du Royaume-Uni. En fait, le projet de loi ne concerne que les ministres et ne vise pas tous les députés. Le code du Royaume-Uni n'est que cela, un code, pas une loi. Il n'y a rien qui le rende exécutoire. Il tire son autorité de résolutions de la Chambre, et non pas d'une loi ou de la common law.
Le projet de loi C-388 passerait outre aux responsabilités du premier ministre en matière d'éthique ministérielle. Tous les députés de la Chambre devraient être fiers de nos traditions en tant que démocratie parlementaire. La démocratie parlementaire signifie que le premier ministre et les ministres sont responsables devant le Parlement, comme nous le constatons tous les jours pendant la période des questions. Cela vaut également pour le comportement des ministres en matière d'éthique.
Dans notre système de responsabilité gouvernementale, le premier ministre est responsable de la conduite des ministres. Il fixe les normes de conduite et s'assure de leur respect. Comme l'a dit le premier ministre, il détient l'ultime responsabilité en la matière. Le projet de loi C-388 lui ôterait cette responsabilité et la confierait à la Chambre, ce qui n'est la pratique ni au Royaume-Uni ni dans d'autres pays.
Il y a au Parlement du Royaume-Uni un guide des règles concernant la conduite des députés qui accompagne le code. Ce guide précise que les lignes directrices et les exigences supplémentaires concernant les ministres sont fixées par le premier ministre et que ce n'est pas à la Chambre des communes de les faire respecter. C'est parce que, au Royaume-Uni, comme au Canada, c'est le premier ministre et non la Chambre des communes qui est responsable de la conduite des ministres.
[Français]
À l'article 3 du projet de loi, il est mentionné que celui-ci a pour objet d'accroître la confiance du public. Je tiens à féliciter le député qui, tout comme le gouvernement, s'est donné pour objectif d'accroître la confiance de la population à l'égard des représentants publics.
En 1994, le premier ministre a déclaré devant cette Chambre que depuis l'élection de 1993, et je le cite: «Rien n'a été plus important pour ce gouvernement ou pour moi personnellement en tant que premier ministre que d'amener les Canadiens à avoir de nouveau confiance dans leurs institutions».
[Traduction]
Le gouvernement doit rendre des comptes au Parlement sur son intégrité et il a pris des mesures. Le premier ministre a déposé une version révisée et plus rigoureuse du Code régissant la conduite des titulaires de charge publique en ce qui concerne les conflits d'intérêts et l'après-mandat. Il a nommé un conseiller en éthique indépendant chargé de l'application de ce code, et il l'a fait après avoir consulté l'opposition.
Le rôle du conseiller en éthique à l'égard de la conduite des ministres est clair. Agissant de façon indépendante, il conseille le premier ministre dans les dossiers liés aux conflits d'intérêts et à la conduite des représentants du gouvernement, y compris des ministres.
Le gouvernement a présenté des modifications visant à accroître la transparence et à raffermir la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes. Nous avons fait en sorte que les lobbyistes poursuivent leurs activités au grand jour, et non plus dans l'ombre. Nous avons veillé à ce que le conseiller en éthique joue un rôle efficace, qu'il exerce de vrais pouvoirs d'enquête et que ces rapports soient déposés au Parlement. Le conseiller en éthique peut aussi être appelé à témoigner devant des comités, et il l'a fait.
Sous la direction du premier ministre, le gouvernement a prouvé qu'il favorisait vraiment l'ouverture et l'intégrité. En fait, une des modifications apportées à la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes avait été proposée par un député de l'opposition, le député de Elk Island.
Nous avons fait en sorte qu'il y ait plus de débats d'orientation à la Chambre et nous avons innové en organisant des consultations prébudgétaires. Nous savons tous que, jadis, le vérificateur général ne faisait rapport qu'une fois l'an. Le gouvernement lui a donné la possibilité de déposer quatre rapports par année. Nous avons reçu un de ces quatre rapports hier.
En 1995, nous avons formé un comité mixte spécial chargé d'établir un code d'éthique à l'intention des députés et des sénateurs. Malheureusement, nous n'avons pu obtenir le soutien des partis d'opposition pour qu'il devienne réalité. Le gouvernement a pris des mesures pour revoir le régime de retraite des députés et des sénateurs, et mettre un terme au cumul de pension et de retraite.
[Français]
En 1999, le gouvernement a établi des lignes directrices à propos des dons que font les sociétés d'État aux partis politiques. Nous avons bonifié la Loi électorale du Canada afin que l'influence des tiers partis ne soit pas disproportionnée par rapport à celle des autres intervenants dans le processus électoral. Les lignes directrices concernant les rapports des ministres avec les organismes quasi judiciaires ont été renforcées.
[Traduction]
Accroître la confiance du public à l'égard du gouvernement demeure, encore de nos jours, un de nos grands objectifs. Aujourd'hui, en 2002, le gouvernement s'emploie à élaborer de nouvelles lignes directrices concernant les relations qu'entretiennent les ministres avec les sociétés d'État. Le gouvernement a également pris des mesures pour rehausser l'intégrité à tous les niveaux de la fonction publique.
[Français]
Sous la direction de ce gouvernement, la fonction publique a pris, entre autres, les mesures concrètes suivantes: en 1996, une étude et un rapport ont porté sur les valeurs et l'éthique de la fonction publique; un Bureau des valeurs et de l'éthique a été mis sur pied au Secrétariat du Conseil du Trésor; les sous-ministres, co-champions des valeurs et de l'éthique, ont entrepris un dialogue soutenu pour mobiliser tous les fonctionnaires; des modules de formation et d'information pour les employés ont été élaborés.
[Traduction]
À l'heure actuelle, en vue de l'élaboration d'un énoncé de principes, nous menons des consultations auprès de la fonction publique afin qu'elle nous aide à énoncer les valeurs et principes qu'elle veut y inscrire.
Le gouvernement tient à rehausser l'intégrité et à rétablir la confiance du public dans les institutions gouvernementales. Je suis persuadé que la gamme complète de nos initiatives a bien servi et continue de bien servir les Canadiens.
Nous n'avons pas oublié à quel point le niveau de confiance des Canadiens dans le gouvernement a chuté sous le règne des conservateurs.
M. Peter MacKay: Il a atteint son niveau le plus bas sous votre règne.
M. Geoff Regan: J'entends le leader parlementaire des conservateurs qui commente mes observations. Pas plus que la population, nous n'avons oublié à quel point le niveau de confiance dans le gouvernement a chuté pendant que son parti était au pouvoir, il y a de cela quelques années.
Depuis que nous sommes au pouvoir, le premier ministre et ses ministres ont toujours rendu compte au Parlement des politiques qu'ils ont mises de l'avant et du comportement éthique qu'ils affichaient. Le projet de loi parviendra non seulement à miner la responsabilité personnelle du premier ministre envers ses ministres, mais également l'obligation de rendre des comptes et notre système de gouvernement responsable en général.
[Français]
Comme je l'ai mentionné précédemment, on doit féliciter le député de Verchères--Les-Patriotes d'avoir soulevé à la Chambre la question concernant l'intégrité des titulaires de charge publique. Comme chacun le sait, la charge publique est une affaire de confiance. En 1994, le premier ministre a déclaré devant la Chambre que «la confiance dont jouissent nos institutions est aussi importante à la démocratie que l'air que nous respirons».
[Traduction]
Étant donné les normes qu'il respecte depuis 1993, notre gouvernement a relevé la barre au niveau du comportement éthique, et les Canadiens lui ont réitéré leur confiance en le réélisant en 1997 et en 2000. Le projet de loi va à l'encontre des progrès que nous avons réalisés depuis 1993 et minera les principes d'un gouvernement démocratique.
Le projet de loi est également contraire à l'éthique ministérielle adoptée au Royaume-Uni, sur laquelle le projet de loi est censé se fonder.
Voilà pourquoi je n'appuierai pas ce projet de loi. J'invite tous les députés à faire de même.
M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis ravi d'accéder au désir du député ayant pris la parole avant moi et souhaité que j'intervienne à ce sujet.
Je m'intéresse au plus haut point à la question de l'éthique et je cherche à faire en sorte que les Canadiens reprennent confiance dans l'intégrité de leur gouvernement. Je m'intéressais déjà à cette question avant de me présenter comme député. Une fois élu, je me suis présenté ici et j'ai eu l'occasion de participer notamment aux travaux d'un comité mixte de la Chambre des communes et du Sénat chargé de se pencher sur la question d'un code d'éthique pour les parlementaires. Nous avons franchi un très intéressant processus.
Il faut se demander ce qui est à l'origine de la confiance. J'ai rencontré au cours de ma vie des personnes auxquelles j'ai accordé implicitement ma confiance. J'en ai croisé d'autres auxquelles je ne faisais pas confiance. Quelle est la différence? La différence tient au jugement que l'on porte sur ce qu'elles ont fait.
Si je devais me remémorer les personnes auxquelles je fais confiance, et il y en a un bon nombre que je ne me donnerai pas la peine de nommer, je citerais probablement en premier lieu mon propre père adoré. Il est maintenant âgé de 90 ans et je lui ai implicitement fait confiance pendant toute ma vie. Jamais je ne l'ai vu traiter quelqu'un de façon malveillante. Je ne l'ai jamais vu non plus chercher à profiter d'une personne ou à l'escroquer. Ce fut tout le contraire. Il a toujours fait tout en son pouvoir pour bien traiter les gens. Il m'a appris que la confiance, ça se gagne. C'est ce qu'il nous faut au gouvernement.
Je souligne avec tout le respect que le lui dois au député de Verchères--Les-Patriotes qu'il est important d'avoir un code parce qu'il limite et contrôle les personnes qui ne sont pas dignes de confiance. C'est la seule raison pour laquelle nous en avons besoin. Dans le cas des personnes qui sont déjà dignes de confiance, nous n'avons pas besoin d'un code, car elles agiront comme il convient. Il ne s'adresse qu'aux personnes qui ne sont pas dignes de confiance.
Pourquoi les Canadiens devraient-ils faire confiance au Parlement? Pourquoi devraient-ils avoir confiance en ses députés? Malheureusement, on nous fait tous porter le chapeau. J'ai entendu une très mauvaise blague à ce propos il y a quelque temps. Un de mes amis m'a demandé: «Est-ce que tu peux me dire ce qui ne va pas chez les politiques?» Je sais que les gens se moquent régulièrement des membres de la classe politique, mais, comme un idiot, j'ai dit que je n'en savais rien. J'aurais mieux fait de me taire, car il m'a répondu: «Ce qui ne va pas chez ces gens, c'est que 95 p. 100 d'entre eux donnent une mauvaise réputation aux 5 p. 100 restants.»
Or, c'est inexact. Je ne l'ai pas observé. Le comportement des députés que je côtoie, pas uniquement ceux de mon parti, mais ceux de tous les autres partis également, me convainc de l'intégrité et de la loyauté de la très grande majorité d'entre eux. Malheureusement, la population oublie difficilement les abus de confiance et elle en fait porter la responsabilité à l'ensemble des députés ainsi qu'à l'institution proprement dite.
Certains abus de confiance ont été étalés au grand jour. J'estime, par exemple, qu'il y a abus de confiance quand la vérificatrice générale nous présente un rapport comme celui dont nous avons pris connaissance hier. C'est abuser de la confiance du contribuable qui travaille dur, qui tire souvent le diable par la queue et qui s'escrime pour joindre les deux bouts et payer ses factures que de lui dire que le gouvernement a très mal géré les fonds publics et qu'il a gaspillé son argent.
Il faut trouver une solution radicale à ce problème de gestion financière qui accable le gouvernement. La tâche est colossale. Cela ne fait aucun doute. La ministre du Développement des ressources humaines a soutenu que l'on avait entrepris d'examiner les problèmes éprouvés dans son ministère, et qu'elle s'emploie à améliorer les choses. Je veux bien le croire. Je le veux vraiment.
Je n'en vois pas les résultats. La vérificatrice générale, dont le travail est de faire rapport, a présenté nombre d'exemples de mauvaise gestion, de comptabilité inappropriée, de paiements non autorisés et d'achats farfelus. Nous avons entendu dire que, dans certains cas, le gouvernement aurait payé deux fois pour la préparation d'un rapport fictif. Ce genre de situation engendre la méfiance. Il faut à tout prix éviter cela.
C'est également une question d'ouverture. Je suis renversé de voir que la vérificatrice générale qui, à mon avis, n'a aucun intérêt personnel à faire une déclaration ou à présenter une évaluation à la Chambre et aux Canadiens sur la mauvaise gestion des finances, signale que l'argent des contribuables a été dépensé à mauvais escient ou a été mal géré. Le ministre des Finances a répondu à une question à ce propos. Or, plutôt que d'admettre que la vérificatrice générale a souligné un problème et que le gouvernement entend faire le nécessaire pour remédier à la situation, le ministre des Finances a été troublé et s'est emporté en déclarant que l'opposition essayait toujours de mettre l'accent sur les éléments négatifs. Or, ce n'est pas le cas; nous voulons simplement que le problème soit réglé.
J'aimerais surtout dire qu'il faut un conseiller en éthique indépendant. Le secrétaire parlementaire qui vient tout juste de prendre la parole a mentionné que le gouvernement avait nommé un conseiller en éthique indépendant. Ce n'est pas le cas. J'ai rencontré M. Wilson. C'est un homme charmant et j'aimerais bien lui faire confiance. Toutefois, le gouvernement et le premier ministre l'ont muselé en ne lui donnant pas la liberté de présenter un rapport indépendant comme le fait la vérificatrice générale.
Le secrétaire parlementaire a aussi dit quelque chose qui, à mon avis, est inexact. Il a dit que le conseiller en éthique a déposé des rapports régulièrement à la Chambre. Je n'en ai jamais vu un. Je suis ici depuis huit ans, et le gouvernement est au pouvoir depuis huit ans. Dans son programme électoral, il a dit qu'il y aurait un conseiller en éthique indépendant. Nous avons souhaité cela. À l'occasion d'un jour désigné, nous avons présenté une motion semblable à ce qui est proposé aujourd'hui, mais le gouvernement l'a rejetée. Il a dit qu'il ne voulait d'un conseiller en éthique qui relève directement du Parlement.
Pourquoi pas? Si le premier ministre et ses transactions dans la circonscription de Shawinigan sont honnêtes et justes, je serais ravi qu'on nomme un conseiller en éthique indépendant qui n'est absolument pas assujetti au premier ministre. Au lieu de cela, le conseiller en éthique a les mains liées. Il ne peut faire rapport qu'au premier ministre. Celui-ci y va de son interprétation, et on ne sait toujours pas si la situation à cet égard est acceptable ou non. Lorsque nous réclamons une enquête indépendante, le premier ministre a le dernier mot. C'est lui qui invite ses députés à voter. Comme ils votent contre la tenue d'une enquête indépendante, cela ne se fait jamais.
Si je suis innocent, je souhaite la tenue d'une enquête, car je serai déclaré innocent et exonéré de tout blâme. Si je suis coupable, je ne veux pas d'une enquête, car je serai alors démasqué. Lorsque, avec son manque de sagesse, le gouvernement décide qu'il n'y aura pas de conseiller en éthique indépendant, il fait justement le contraire de l'objectif qu'il poursuit, celui de bâtir la confiance des Canadiens dans notre institution et en chacun de nous.
Je ne saurais trop insister sur le fait que nous avons besoin d'un conseiller en éthique indépendant. J'exhorte tous les députés à se comporter de manière honorable, comme le suppose le titre qui nous est conféré. Puisque nous nous appelons d'honorables députés, comportons-nous donc de manière honorable. Adoptons un code de déontologie qui règle le problème de ceux qui, malheureusement, n'ont pas un sens moral inné.
[Français]
M. Joe Comartin (Windsor--St. Clair, NPD): Monsieur le Président, je voudrais commencer par remercier le député de Verchères--Les-Patriotes de tout son travail concernant ce projet de loi.
[Traduction]
En préparant quelques notes au sujet du projet de loi, je n'ai pas pu m'empêcher de penser qu'il faudrait établir des critères pour les conflits d'intérêts et un code de conduite. J'ai donc noté ceux qui devaient, selon moi, figurer dans le projet de loi, mais le député de Verchères--Les-Patriotes les avait déjà tous prévus et en avait même noté d'autres.
Lorsque j'ai pensé à ce que je dirais à ce sujet, j'ai d'abord cru qu'il fallait placer le projet de loi dans son contexte historique. Les excès commis par le gouvernement au pouvoir de 1984 à 1993 ont, dans une large mesure, contribué à l'élection de la présente administration en 1993. Ils ont donné lieu à une grande méfiance à l'égard des politiques en général, et de certains ministres en particulier. Cette méfiance ne s'est pas dissipée sous l'effet des promesses que la présente administration a faites avant d'arriver au pouvoir, lesquelles étaient clairement énoncées dans son premier livre rouge. Le gouvernement a failli à l'une de ces promesses.
Le livre rouge établissait clairement comment les libéraux entendaient s'attaquer à certaines des considérations éthiques soulevées avant son arrivée, soit entre 1984 et 1993. Ils ont brisé leurs promesses envers les électeurs canadiens et perdu leur confiance. À l'instar du député qui est intervenu au nom du gouvernement, ils peuvent bien se lever à la Chambre et dire qu'ils ont été réélus. La réponse n'est pas satisfaisante.
La confiance envers nos politiciens a-t-elle augmenté depuis 1993? La réponse va de soi, compte tenu des votes que nous obtenons maintenant, du nombre d'électeurs qui votent et du cynisme qui règne en général. Comme le député de Elk Island l'a dit en blaguant, le cynisme n'a pas diminué. S'il y a une chose, sous la direction de ce gouvernement, il a augmenté.
En raison de son contenu, ce projet de loi devrait recevoir l'appui de tous les députés. Mais il est évident que les députés du gouvernement s'y opposeront. Le projet de loi renferme diverses dispositions qui pourraient redorer la réputation des politiciens au Canada. C'est toujours cet objectif que vise le projet de loi et, à cette fin, il propose différents moyens. Je m'arrête sur certains d'entre eux.
Le projet de loi donne les lignes directrices claires régissant la conduite que nous attendons de nos ministres, de nos membres du Cabinet. Il précise ce qu'ils doivent faire pour se dessaisir de biens susceptibles de les placer dans une position de conflit d'intérêts. Il définit clairement les membres de leurs familles, leurs relations et la manière de traiter avec eux. Il établit un code de conduite, partie que devraient étudier attentivement les députés du gouvernement en particulier, et fait la distinction entre ce qui est permis et ce qui est interdit, notamment à l'égard de leurs électeurs et des autres Canadiens, ainsi qu'entre ce que le ministre peut faire et ce qu'il ne peut pas faire. Si ce code de conduite avait déjà été inscrit dans la loi, l'affaire de Grand-Mère n'aurait peut-être jamais eu lieu.
Le projet de loi énonce très clairement ce qu'un ministre doit divulguer. Il institue un conseiller en éthique qui sera nommé de façon indépendante et il établit très clairement que le conseiller en éthique sera indépendant et rendra des comptes au Parlement, non au Cabinet ni au premier ministre.
Le député de Verchères--Les-Patriotes a fait du très bon travail. Son projet de loi énonce très clairement le rôle que le conseiller devra jouer. Le conseiller pourra consulter individuellement les ministres et les conseiller quant à leur ligne de conduite. Il permettra au conseiller de mener des enquêtes. Comme tous ces points sont abordés en détail, il n'y a aucun doute quant au rôle et à l'ampleur du rôle du conseiller en éthique.
Le projet de loi C-388 permettra au conseiller de prendre des décisions concernant un ministre à propos de ce qui lui est interdit ou de ce qui lui est permis de faire. Par exemple, si un ministre se demande s'il peut siéger à un conseil d'administration ou faire partie d'un comité sans but lucratif, ou d'un organisme de bienfaisance quelconque, le conseiller peut juger si la chose est interdite ou permise.
Le projet de loi fournit des lignes directrices, mais donne aussi très concrètement au conseiller le pouvoir d'offrir un soutien au ministre qui ne sait pas très bien quelle ligne de conduite n'est pas convenable.
Le projet de loi traite aussi des transferts économiques faits sous forme de cadeaux et de marques d'hospitalité au profit de ministres, et définit ce qui est permis et ce qui ne l'est pas.
Une question qui m'a toujours embêté concerne le rôle que peut jouer un ministre quand il quitte le Cabinet. Cela m'embête peut-être parce que je vis à Windsor et que j'ai été influencé à bien des égards par la vie politique américaine. Au fil des ans, j'ai été témoin de bien des abus dans ce domaine. Les ministres américains, tant au niveau fédéral qu'au niveau des États, du moins dans le passé bien que la situation se soit un peu resserrée, passent trop rapidement du Cabinet au secteur privé, où ils sont très clairement en conflit d'intérêts. Cela ne laisse pas une bonne image à l'électorat en général.
Si jamais le projet de loi est adopté, il doit prévoir des sanctions sévères et efficaces pour les infractions. Le projet de loi C-388, grâce à tout le travail accompli par le député, s'attaque vraiment à ce problème.
Je tiens à féliciter le député de Verchères--Les-Patriotes du travail qu'il a réalisé sur ce projet de loi. Il me semble que cette mesure est complète et qu'elle couvre tous les points dont nous avons parlé relativement aux abus observés au sein des deux derniers gouvernements, et elle le fait d'une manière fort efficace.
[Français]
M. Peter MacKay (Pictou--Antigonish--Guysborough, PC): Monsieur le Président, je suis également très heureux d'avoir la possibilité de participer à ce débat. J'offre mes félicitations à mon collègue, le député du Bloc québécois. Je pense qu'il a travaillé très fort sur ce projet de loi. C'est un sujet très important pour le Parlement et pour le pays.
[Traduction]
Je tiens également à remercier de leurs observations d'autres députés, particulièrement l'intervenant précédent, de Windsor, qui participe toujours très sérieusement et avec une grande perspicacité au débat, à tous les niveaux, à la Chambre. Le sujet est sans doute très inquiétant pour bien des gens, étant donné ce qui a transpiré ces dernières années et très récemment au sujet du bilan du gouvernement.
Je dois prendre fortement ombrage et m'élever vigoureusement contre les observations du secrétaire parlementaire, qui ne cesse d'amplifier les insinuations, les hyperboles, les allusions voilées et les grands traits avec lesquels il se plaît à dépeindre l'ancien gouvernement. Cela rappelle la poursuite pathologique d'un ancien premier ministre au sujet d'une allégation qui n'a jamais été prouvée. En fait, les libéraux ont probablement utilisé suffisamment de papier pour provoquer une autre crise du bois d'oeuvre, en tentant de prouver quelque chose qui n'est tout simplement pas vrai, à savoir que l'ancien premier ministre a été mêlé à une sorte d'activité illégale. Pourtant, le gouvernement et, malheureusement, l'Alliance canadienne se plaisent à renforcer ce mythe courant. Stevie Cameron a également rédigé beaucoup d'ouvrages de fiction à ce sujet.
Je préviens le secrétaire parlementaire, car il se trouve en terrain dangereux. Je suis personnellement offensé par la perpétuation de ce mythe, car mon père faisait partie de cet ancien gouvernement. Encore une fois, je m'élève fortement contre les activités de dénigrement auxquelles lui et d'autres membres de son gouvernement se plaisent à se livrer.
J'aimerais ramener certains faits dans la discussion sur la question de l'éthique. Par exemple, le fait que Pierre Corbeil, un solliciteur de fonds libéral du Québec, se livrait au taxage. Armé de la liste des subventions et contributions du ministère du Développement des ressources humaines, il allait voir des contributeurs potentiels dont les noms étaient sur la liste et leur disait: «Crachez un peu de sous pour le Parti libéral du Canada, et nous verrons à ce que ces projets soient approuvés.» C'est un fait. C'est un fait avéré parce que cet homme a été reconnu coupable de trafic d'influence. C'est vrai.
Il y a d'autres choses que je pourrais dire. Je pourrais dire que le premier ministre a reconnu avoir exercé des pressions auprès du président de la Banque de développement du Canada pour qu'un ami, collègue et solliciteur de fonds dans sa circonscription de Shawinigan, propriétaire d'un terrain de golf qui avait déjà été à lui, obtienne de l'argent pour ce projet. Est-ce conforme à l'éthique? Est-ce légal? Il appartient aux Canadiens d'en juger.
L'annulation d'un simple trait de plume du projet d'acquisition de l'hélicoptère EH-101, dont la députée de Saint John a parlé maintes fois à la Chambre, a coûté 800 millions de dollars et des milliers d'emplois dans l'Ouest canadien. Le gouvernement a ensuite fait volte-face pour dépenser, le dernier jour du processus d'allocation budgétaire, 101 millions de dollars pour l'acquisition d'avions d'affaires luxueux qui serviront aux déplacements du premier ministre et de son Cabinet. Est-ce conforme à l'éthique? Ces faits sont consignés.
Il y a eu aussi l'annulation du contrat de modernisation de l'aéroport Pearson au coût de centaines de millions de dollars. Et il y a eu la promesse éhontée d'abroger la TPS. Nous ne l'avons pas oubliée celle-là. Était-ce conforme à l'éthique? Était-ce honnête?
La question du libre-échange est un autre exemple. Le premier ministre avait fait une promesse catégorique, promesse qu'il s'est contenté de laisser dans son célèbre livre de fables, son livre de contes de fées, le livre rouge. Celui-ci renferme un des thèmes du projet de loi d'initiative parlementaire prévoyant la nomination d'un conseiller en éthique relevant directement du Parlement plutôt que de la personne qui pourrait avoir un comportement contraire à l'éthique, à savoir le premier ministre lui-même. C'est tout à fait contraire à l'éthique et cela dénature le souhait du député que nous affichions un comportement conforme à l'éthique.
Il y a une foule d'autres questions. Qu'on pense à la nomination de M. Gagliano, qu'on a exclu du Cabinet et expédié au Danemark pour lui éviter d'avoir à répondre de ses actes au Canada. Est-ce une chose éthique? Son comportement ici avant son départ était-il éthique? Cela reste à voir.
Les libéraux agissent ainsi dans l'espoir qu'en niant et en ignorant les faits, et en différant toute action, les problèmes disparaîtront et ils finiront par être réélus. C'est le but ultime. Nous avons entendu cette intention machiavélique et le secrétaire parlementaire y a fait écho ici même dans cette Chambre en disant «Faisons-nous réélire.» Et quand cela se produit, tout le reste ne compte plus. C'est un peu comme si on se disait «Tout va bien parce que les Canadiens nous ont choisis encore une fois.»
L'opposition doit assumer une certaine part de responsabilité pour cette situation, parce qu'elle n'est pas en mesure d'offrir aux Canadiens une autre option, un groupe, un parti, un mouvement en qui ils peuvent avoir confiance. On doit certainement examiner toutes ces choses et rappeler aux Canadiens le comportement du gouvernement. D'ailleurs, cela a toujours été le mantra du Parti libéral: à force de répéter une chose, qu'elle soit vraie ou non, les gens finissent par y croire.
Devrait-on avoir au Parlement un conseiller en éthique indépendant qui examinerait toutes les choses, les nombreuses choses qui sont survenues sous cette administration? Tout à fait. J'endosse entièrement l'intention du député qui a présenté le projet de loi C-388, prévoyant un code de déontologie à l'intention des ministres.
Une telle mesure aiderait sûrement à améliorer l'opinion que le public a des ministres et l'impression produite par ceux-ci, surtout quand on voit des chèques servant à financer la campagne à la direction du parti de certains ministres être expédiés au mauvais bureau. On n'aurait pas à se soucier de conflits d'intérêts possibles s'il y avait un conseiller en éthique indépendant qui soulèverait ces questions ici, après les avoir analysées en détail.
Ce qui est effrayant, c'est que la série des problèmes que j'ai énumérés ne représente que la pointe de l'iceberg. Il ne s'agit que de ce que l'on sait. Ce n'est que lorsqu'un individu se trompe et envoie un chèque au mauvais endroit que la vérité éclate au grand jour, ou lorsqu'un journaliste futé nous révèle la bévue, ou lorsque la vérificatrice générale la pointe du doigt, par exemple l'affaire du ministre des Travaux publics et l'accueil chaleureux qui lui a été réservé par ses nouveaux collaborateurs. Le problème n'était pas de sa faute. Il en a simplement hérité. Le gouvernement a payé deux fois le même rapport. Ce gaspillage éhonté des fonds publics est absolument scandaleux. Sans compter les 7 milliards de dollars dont il a été question dans le dernier rapport de la vérificatrice générale et dont on ne sait pas très bien ce qu'ils sont devenus.
Des ministres ont été accusés d'outrepasser les limites de la démocratie en votant illégalement lors d'élections partielles. Et nous n'avons pas oublié la fois où un ministre de la Couronne a voté deux fois.
Toutes ces affaires auxquelles j'ai fait référence n'ont pas débouché sur la démission de ministres. Elles n'ont pas incité le premier ministre à démettre de leurs fonctions les ministres mis en cause. Non. Plus on tarde à reconnaître la vérité, plus il devient difficile de l'admettre.
Ce que fait le premier ministre, c'est attendre que passe la tempête. Il s'écrase et attend que les manchettes accusatrices disparaissent. Il espère qu'elles n'apparaîtront pas du tout. Il espère les effacer simplement et tranquillement de la scène ou les expédier au Danemark. Qu'est-ce que les Danois ont fait pour mériter cela?
La position de notre parti là-dessus a toujours été claire. Nous exigerions que le conseiller en éthique fasse rapport directement au Parlement et non au premier ministre, comme c'est le cas à l'heure actuelle. C'est ce que nous préconisons depuis un certain temps déjà.
Il nous faut des lignes ditrectrices. Nous savons qu'il nous en faut absolument pour nous assurer qu'il n'y ait pas de conflit d'intérêts entre le travail d'un ministre et une course à la direction. Il faut des lignes directrices pour s'assurer que les amis du gouvernement n'aient pas un accès spécial aux deniers publics. Il en faut pour s'assurer que des ministres rendent des comptes à la Chambre avant qu'on les envoie représenter le Canada à l'étranger ou que des ministres qui induisent la Chambre en erreur soient tenus responsables.
Lorsqu'on fera de telles promesses au cours d'une campagne électorale, lorsque des auteurs et des producteurs de fiction décideront d'imprimer de telles promesses, j'espère que les Canadiens songeront à des députés comme l'auteur du projet de loi pour avoir une idée de la façon dont nous pourrions ramener ici une certaine démocratie et une certaine responsabilité.
Nous en avons eu aujourd'hui un autre exemple flagrant. Nous avons assisté à un recours des plus abusifs à la clôture. Le gouvernement est allé encore plus loin aujourd'hui en retirant ni plus ni moins du Bureau un projet de loi d'initiative parlementaire.
Rien d'étonnant à ce que le niveau de frustration monte et à ce qu'un cynisme frôlant l'apathie soit à la hausse. Depuis près de dix ans qu'ils sont au pouvoir, les libéraux n'ont pas fait grand-chose pour promouvoir l'éthique ou la responsabilité.
[Français]
M. Stéphane Bergeron (Verchères--Les-Patriotes, BQ): Monsieur le Président, d'entrée de jeu, j'aimerais remercier les députés qui ont pris part au débat. Je voudrais les remercier de leurs commentaires très positifs, très constructifs également. Toutefois, je ne puis m'empêcher, à ce stade-ci, de dire ouvertement à quel point je déplore la duplicité affichée par le secrétaire parlementaire, par le porte-parole du gouvernement ce soir dans ce débat.
Je parle de duplicité parce qu'il a tenté de banaliser l'objectif poursuivi par ce projet de loi en disant que, de toute façon, le premier ministre avait entrepris de nombreuses démarches pour assurer une plus grande transparence, une plus grande intégrité du système; que ce projet de loi, et ce qu'il proposait, notamment la création d'un poste de conseiller en éthique, ne faisait en sorte que de soustraire le premier ministre à ses responsabilités, alors que c'est exactement ce qu'il proposait lui-même dans le livre rouge de 1993.
Est-ce à dire que le premier ministre, à l'époque où il n'était que chef de l'opposition, a mené la population en bateau pendant tout ce temps? Il tente de se justifier aujourd'hui en disant: «La population nous a élus une fois et réélus deux autres fois.»
On se contente de bien peu, de l'autre côté de la Chambre. Comme je l'ai indiqué dans mon discours, on ne doit pas se targuer de n'être élu que par 40 p. 100 des 60 p. 100 de citoyens qui ont exercé leur droit de vote. On est élus par une minorité de citoyens et on semble vouloir s'en satisfaire. C'est le cocu content. Alors que ce seul signe devrait nous alarmer, le gouvernement l'invoque comme une légitimation de ses actions, comme un signe que la population endosse ses actions. La majorité des Canadiens et des Canadiennes, la majorité des citoyens de ce pays ont voté contre ce gouvernement. Le gouvernement a été élu par une minorité.
Les libéraux n'ont donc pas aujourd'hui à claironner et à fanfaronner devant nous pour prétendre que ce qu'ils font a été endossé par la population. Le gouvernement doit faire ses devoirs et répondre de ses agissements envers la population et les parlementaires.
Ce même parti, qui est au pouvoir depuis déjà trop longtemps, ne s'est-il donc jamais aperçu que les citoyennes et les citoyens n'attendent qu'un signe de sa part pour retrouver confiance en nos institutions politiques?
Comme je l'indiquais précédemment, le projet de loi C-388 vise à mettre en place un code de déontologie à l'intention des ministres et prévoit la création d'un poste de commissaire en éthique indépendant et redevable à la Chambre des communes. On pourra me rétorquer que le premier ministre a su tenir ses promesses, comme je l'évoquais il y a peu de temps, en créant un poste de conseiller en éthique. Mais il a pris bien soin de nommer un conseiller en éthique qui ne relève que de lui et qui ne rend compte qu'à lui, et à lui seul.
Alors que le conseiller en éthique blanchissait de tout soupçon le premier ministre dans le dossier de l'Auberge Grand-Mère, on comprenait alors qu'il n'était en fait qu'un conseiller politique du premier ministre et du gouvernement, au lieu d'être le gardien de la transparence de l'administration fédérale, comme le reconnaissait d'ailleurs candidement la majorité libérale au Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie, dans son quatrième rapport concernant la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes déposé à la Chambre en juin dernier.
La saga de l'Auberge Grand-Mère, qui a été éclipsée suite aux tragiques événements du 11 septembre dernier, a permis de mettre en lumière la nécessité de resserrer le cadre législatif et réglementaire entourant l'intégrité à laquelle la population est en droit de s'attendre de la part des membres du cabinet fédéral.
L'éditorialiste Gilbert Lavoie, du journal Le Soleil, écrivait, le 26 janvier 2002, et je cite:
L'assainissement des moeurs politiques sous René Lévesque avait été remarqué partout au Canada. Cet effort du gouvernement québécois avait contribué à dissiper la vieille réputation politique à la Duplessis que traînait le Québec depuis si longtemps. Malheureusement, nos représentants au pouvoir à Ottawa n'ont pas semblé s'inscrire dans cette démarche. Ils n'ont pas établi clairement que l'éthique et la transparence comptaient parmi leurs priorités, à un point tel que le conseiller en éthique du gouvernement est devenu un objet de ridicule. |
Si les membres du gouvernement ont la conscience tranquille sur la question de l'éthique, ils devraient en toute confiance, et avec toute l'ouverture requise, accepter que ce projet de loi puisse faire l'objet d'un vote.
Aussi, je demande le consentement unanime pour que ce projet de loi soit jugé votable.
Le président suppléant (M. Bélair): Y a-t-il consentement unanime pour que ce projet de loi fasse l'objet d'un vote?
Des voix: Oui.
Des voix: Non.
Le président suppléant (M. Bélair): La période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés est maintenant expirée. Puisque la motion n'a pas été choisie pour faire l'objet d'un vote, l'ordre est rayé du Feuilleton.
Comme il est 19 h 55, la Chambre s'ajourne jusqu'à demain, à 10 heures, conformément à l'article 24(1) du Règlement.
(La séance est levée à 19 h 56.)