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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.
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37e Législature, 1ère Session
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 022
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 27 février 2001
LE RAPPORT DU VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL |
Le Président |
AFFAIRES COURANTES |
BUDGET PRINCIPAL DES DÉPENSES DE 2001-2002 |
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE |
Procédure et affaires de la Chambre |
M. Derek Lee |
LE CODE CRIMINEL |
Projet de loi C-285. Présentation et première lecture |
M. Art Hanger |
BUDGET PRINCIPAL DES DÉPENSES 2001-2002 |
Renvoi aux comités permanents |
L'hon. Lucienne Robillard |
Motion |
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE |
Procédure et affaires de la Chambre |
Motion d'adoption |
M. Derek Lee |
PÉTITIONS |
Les affaires étrangères |
M. Peter Adams |
Les maladies du rein |
M. Peter Adams |
Le prix des produits pétroliers |
M. Claude Bachand |
Les armes nucléaires |
M. Brent St. Denis |
QUESTIONS AU FEUILLETON |
M. Derek Lee |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LOI SUR L'IMMIGRATION ET LA PROTECTION DES RÉFUGIÉS |
Projet de loi C-11. Deuxième lecture. |
Mme Lynne Yelich |
M. Inky Mark |
L'hon. David Kilgour |
M. Werner Schmidt |
Mme Libby Davies |
Mme Raymonde Folco |
M. Inky Mark |
M. Paul Forseth |
M. Rick Casson |
M. Mark Assad |
M. Peter Stoffer |
M. Keith Martin |
M. Joseph Volpe |
M. Peter Stoffer |
M. Janko Peric |
M. Antoine Dubé |
M. Inky Mark |
M. Mark Assad |
M. Robert Lanctôt |
M. Randy White |
M. Mark Assad |
M. Jason Kenney |
M. John Bryden |
M. Leon Benoit |
M. Peter Stoffer |
M. Werner Schmidt |
M. Grant McNally |
M. John Reynolds |
Report du vote sur la motion |
LOI SUR LES ESPÈCES EN PÉRIL |
Projet de loi C-5. Deuxième lecture |
M. Joe Comartin |
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS |
L'ORDRE DU CANADA |
M. Andrew Telegdi |
LES TECHNIQUES DE REPRODUCTION |
M. James Rajotte |
BIBI ZAMAN |
M. John Cannis |
LA GALERIE DE LA RENOMMÉE ET LE MUSÉE NAUTIQUES |
Mme Anita Neville |
LE TRANSPORT URBAIN |
M. Alan Tonks |
LE COMMERCE |
M. John Duncan |
L'IMMIGRATION |
L'hon. Charles Caccia |
LA BAIE DE BEAUPORT |
L'AGRICULTURE |
M. Murray Calder |
LES AFFAIRES AUTOCHTONES |
M. Reed Elley |
L'AGRICULTURE |
M. Paul Steckle |
LA VERSATILE TRACTORS |
M. Pat Martin |
LES FEMMES |
Mme Pierrette Venne |
LE COMMERCE |
M. Bill Casey |
L'HÉPATITE C |
M. Grant Hill |
QUESTIONS ORALES |
L'ÉCONOMIE |
M. Stockwell Day |
L'hon. Paul Martin |
M. Stockwell Day |
L'hon. Paul Martin |
M. Stockwell Day |
L'hon. Paul Martin |
LE CRIME ORGANISÉ |
M. Randy White |
L'hon. Lawrence MacAulay |
M. Randy White |
L'hon. Elinor Caplan |
LE BOIS D'OEUVRE |
M. Gilles Duceppe |
M. Pat O'Brien |
M. Gilles Duceppe |
M. Pat O'Brien |
M. Pierre Paquette |
M. Pat O'Brien |
M. Pierre Paquette |
M. Pat O'Brien |
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES |
Mme Alexa McDonough |
L'hon. David Kilgour |
Mme Alexa McDonough |
L'hon. David Kilgour |
LA BANQUE DE DÉVELOPPEMENT DU CANADA |
Le très hon. Joe Clark |
L'hon. Herb Gray |
Le très hon. Joe Clark |
L'hon. Brian Tobin |
LES SUBVENTIONS ET CONTRIBUTIONS |
Mme Val Meredith |
L'hon. Herb Gray |
Mme Val Meredith |
L'hon. Jane Stewart |
LE SOMMET DES AMÉRIQUES |
Mme Francine Lalonde |
M. Denis Paradis |
Mme Francine Lalonde |
M. Denis Paradis |
LA BANQUE DE DÉVELOPPEMENT DU CANADA |
Mme Deborah Grey |
L'hon. Jane Stewart |
Mme Deborah Grey |
L'hon. Jane Stewart |
LA DÉFENSE NATIONALE |
M. Claude Bachand |
L'hon. Art Eggleton |
M. Claude Bachand |
L'hon. Art Eggleton |
LES SUBVENTIONS ET CONTRIBUTIONS |
M. John Williams |
L'hon. Herb Gray |
M. John Williams |
L'hon. Lyle Vanclief |
LA SANTÉ |
Mme Rose-Marie Ur |
L'hon. Andy Mitchell |
LES PÊCHERIES |
M. Yvon Godin |
L'hon. David Anderson |
L'ÉNERGIE |
M. Joe Comartin |
L'hon. Ralph Goodale |
L'IMMIGRATION |
M. Peter MacKay |
L'hon. Elinor Caplan |
L'INDUSTRIE DU BOIS D'OEUVRE |
M. Bill Casey |
M. Pat O'Brien |
LE MULTICULTURALISME |
M. Gurmant Grewal |
L'hon. Hedy Fry |
M. Gurmant Grewal |
L'hon. Hedy Fry |
L'INDUSTRIE DE LA CREVETTE |
Mme Suzanne Tremblay |
L'hon. David Anderson |
Mme Suzanne Tremblay |
L'hon. David Anderson |
L'EMPLOI |
M. Jim Pankiw |
L'hon. Jane Stewart |
M. Jim Pankiw |
L'hon. Jane Stewart |
L'AMÉRIQUE LATINE |
Mme Alexa McDonough |
L'hon. David Kilgour |
L'ENVIRONNEMENT |
Mme Paddy Torsney |
L'hon. David Anderson |
LE REMBOURSEMENT POUR LA HAUSSE DES COÛTS DU CHAUFFAGE |
M. James Moore |
L'hon. Paul Martin |
M. James Moore |
L'hon. Paul Martin |
LE LOGEMENT SOCIAL |
Mme Diane Bourgeois |
L'hon. Alfonso Gagliano |
L'AIDE EN CAS DE CATASTROPHE |
M. Howard Hilstrom |
L'hon. Art Eggleton |
LES MUNICIPALITÉS |
M. Mario Laframboise |
L'hon. David Collenette |
RECOURS AU RÈGLEMENT |
La période des questions |
L'hon. Jane Stewart |
M. Jim Pankiw |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LE RÈGLEMENT |
Motion portant que le débat ne soit plus ajourné |
L'hon. Don Boudria |
Adoption de la motion |
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE |
M. Michel Gauthier |
Motion |
LE RÈGLEMENT |
Motion |
M. Michel Gauthier |
M. Bill Blaikie |
M. Peter MacKay |
Le très hon. Joe Clark |
M. Serge Marcil |
M. Randy White |
M. Grant McNally |
Mme Marlene Jennings |
M. Larry Bagnell |
INITIATIVES PARLEMENTAIRES |
LA LOI ÉLECTORALE DU CANADA |
Projet de loi C-213. Deuxième lecture |
Mme Bev Desjarlais |
M. Derek Lee |
M. Keith Martin |
M. Stéphane Bergeron |
Mme Bev Desjarlais |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LE RÈGLEMENT |
Motion |
M. Larry Bagnell |
M. Stéphane Bergeron |
M. Gurmant Grewal |
M. Lynn Myers |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
M. Yvon Godin |
M. Reg Alcock |
M. Keith Martin |
M. Geoff Regan |
M. John Harvard |
M. Werner Schmidt |
M. Steve Mahoney |
M. Steve Mahoney |
M. John Bryden |
M. John Finlay |
M. Deepak Obhrai |
M. Chuck Strahl |
M. Gar Knutson |
M. Derek Lee |
M. Michel Bellehumeur |
Rejet de l'amendement |
Adoption de la motion |
LA LOI ÉLECTORALE DU CANADA |
Projet de loi C-9. Deuxième lecture |
Adoption de la motion |
LOI SUR L'IMMIGRATION ET LA PROTECTION DES RÉFUGIÉS |
Projet de loi C-11. Deuxième lecture |
Adoption de la motion |
(Version officielle)
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 022
CHAMBRE DES COMMUNES
Le mardi 27 février 2001
La séance est ouverte à 10 heures.
Prière
[Traduction]
LE RAPPORT DU VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. J'ai l'honneur de déposer sur le Bureau le rapport supplémentaire du vérificateur général du Canada à la Chambre des communes, intitulé «Le point sur une décennie au service du Parlement».
[Français]
Conformément à l'article 108(3)e) du Règlement, ce document est réputé renvoyé en permanence au Comité permanent des comptes publics.
AFFAIRES COURANTES
[Traduction]
BUDGET PRINCIPAL DES DÉPENSES DE 2001-2002
Le président du Conseil du Trésor présente un message dont le Président donne lecture à la Chambre et par lequel Son Excellence la Gouverneure générale transmet le Budget principal des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2002.
* * *
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE
PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter le quatrième rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre au sujet de la liste des membres associés de quelques comités permanents.
Si la Chambre donne son consentement, j'ai l'intention de proposer l'adoption du quatrième rapport plus tard aujourd'hui.
* * *
LE CODE CRIMINEL
M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Alliance canadienne) demande à présenter le projet de loi C-285, Loi modifiant le Code criminel (absence de libération conditionnelle en cas de condamnation à l'emprisonnement à perpétuité).
—Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir présenter à nouveau ce projet de loi d'initiative parlementaire. Il modifie certaines dispositions du Code criminel concernant l'emprisonnement à perpétuité. Il éliminera toute disposition relative à la libération conditionnelle anticipée, à la libération anticipée ou à l'admissibilité à la libération conditionnelle pour un criminel condamné à l'emprisonnement à perpétuité.
Le projet de loi a trait à la justice pour les familles des victimes, pour ceux qui ont subi une perte irremplaçable à cause de tueurs. Pour ces gens, le fait de savoir que le criminel ne se trouvera plus jamais en liberté dans les rues apportera un sentiment de soulagement et ils pourront tourner la page sur cet événement triste de leur vie.
Mon projet de loi envoie un message clair aux meurtriers sur le fait que s'ils tuent quelqu'un ils seront enfermés pour le reste de leur vie. L'emprisonnement à perpétuité sera vraiment un emprisonnement à perpétuité.
(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
[Français]
BUDGET PRINCIPAL DES DÉPENSES 2001-2002
RENVOI AUX COMITÉS PERMANENTS
L'hon. Lucienne Robillard (présidente du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, en vertu des articles 81(4) et 81(6) du Règlement, je désire proposer une motion de renvoi du Budget principal des dépenses de 2001-2002 aux comités permanents de la Chambre.
Étant donné que la liste des crédits visés par cette motion est longue, je demande à la Chambre de consentir à ce que cette liste soit inscrite dans le hansard sans être lue.
Le vice-président: La Chambre y consent-elle?
Des voix: D'accord.
L'hon. Lucienne Robillard: Monsieur le Président, je propose donc:
Que le Budget principal des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2002, qui a été déposé le 27 février 2001, soit renvoyé aux comités permanents appropriés de la Chambre, conformément à la distribution détaillée qui suit.
[Note de la rédaction: La liste précitée suit:]
Au Comité permanent des affaires autochtones, du développement du Grand Nord et des ressources naturelles
Affaires indiennes et du Nord canadien, crédits 1, 5, 10, 15, L20, L25, L30, 35, 40, 45 et 50
Ressources naturelles, crédits 1, 5, 10, 15, 20, 25 et 30
Au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire
Agriculture et Agroalimentaire, crédits 1, 5, 10, 15, 20, 25, 30 et 35
Au Comité permanent du patrimoine canadien
Conseil privé, crédits 30 et 35
Patrimoine canadien, crédits 1, 5, L10, 15, 20, 25, 30, 35, 40, 45, 50, 55, 60, 65, 70, 75, 80, 85, 90, 95, 100, 105, 110, 115, 125 et 130
Au Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration
Citoyenneté et Immigration, crédits 1, 5, 10 et 15
Au Comité permanent de l'environnement et du développement durable
Conseil privé, crédit 40
Environnement, crédits 1, 5, 10 et 15
Au Comité permanent des finances
Agence des douanes et du revenu du Canada, crédits 1, 5 et 10
Finances, crédits 1, 5, L10, 15, 25, 30 et 35
Au Comité permanent des pêches et des océans
Pêches et Océans, crédits 1, 5 et 10
Au Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international
Affaires étrangères, crédits 1, 5, 10, 15, 20, 25, L30, L35, 40, 45, 50 et 55
Au Comité permanent de la santé
Santé, crédits 1, 5, 10, 15, 20 et 25
Au Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées
Développement des ressources humaines, crédits 1, 5, 10, 15 et 20
Au Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie
Industrie, crédits 1, 5, L10, L15, 20, 25, 30, 35, 40, 45, 50, 55, 60, 65, 70, 75, 80, 85, 90, 95, 100, 105, 110, 115, 120 et 125
Au Comité permanent de la justice et des droits de la personne
Conseil privé, crédit 50
Justice, crédits 1, 5, 10, 15, 20, 25, 30, 35, 40, 45, 50 et 55
Solliciteur général, crédits 1, 5, 10, 15, 20, 25, 30, 35, 40, 45 et 50
Au Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants
Anciens combattants, crédits 1, 5 et 10
Défense nationale, crédits 1, 5, 10, 15 et 20
Au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre
Conseil privé, crédit 20
Parlement, crédit 5
Au Comité permanent des comptes publics
Finances, crédit 20
Au Comité permanent des transports et des opérations gouvernementales
Conseil du Trésor, crédits 1, 2, 5, 10 et 20
Conseil privé, crédits 1, 5, 10, 15, 45 et 55
Gouverneur général, crédit 1
Parlement, crédit 1
Patrimoine canadien, crédit 120
Transports, crédits 1, 5, 10, 15, 20, 25, 30 et 35
Travaux publics et Services gouvernementaux, crédits 1, 5, 10, 15, 20 et 25
Au Comité mixte permanent de la Bibliothèque du Parlement
Parlement, crédit 10
Au Comité mixte permanent des langues officielles
Conseil privé, crédit 25
(La motion est adoptée.)
* * *
[Traduction]
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE
PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, si la Chambre y consent, je propose que le quatrième rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre présenté plus tôt aujourd'hui soit adopté.
(La motion est adoptée.)
* * *
PÉTITIONS
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter une pétition au nom des habitants de la région de Peterborough qui s'inquiètent de la situation en Irak.
Les pétitionnaires font remarquer que les diverses Églises canadiennes ont demandé la levée des sanctions. Ils demandent au Parlement d'accepter les recommandations du comité permanent en faveur de la levée des sanctions, de l'établissement d'une présence diplomatique à Bagdad et l'arrêt immédiat des bombardements.
Les pétitionnaires demandent en particulier que le Canada presse le comité des Nations Unies d'approuver sans délai des fonds pour la remise en état des canalisations d'eau, le rétablissement de l'énergie électrique, la reprise de la production pétrolière et la suspension du programme «pétrole contre nourriture».
LES MALADIES DU REIN
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, j'ai une deuxième pétition de la part de citoyens qui s'inquiètent du problème croissant que constituent les maladies du rein au Canada. Il y a plusieurs façons de prévenir ces maladies.
Les pétitionnaires demandent au Parlement d'encourager les Instituts canadiens de recherche en santé à reconnaître expressément la recherche sur le rein en nommant l'un d'eux l'Institut des maladies du rein et des voies urinaires.
[Français]
LE PRIX DES PRODUITS PÉTROLIERS
M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, je dépose aujourd'hui une pétition de la part d'un millier de mes concitoyens de Saint-Jean qui s'opposent aux hausses abusives du prix des produits pétroliers.
Ces gens sont d'avis que les consommateurs s'appauvrissent et que les entreprises peuvent ralentir leurs activités, créant ainsi un danger de récession. Ces gens demandent au gouvernement d'agir de toutes les façons possibles pour justement contrôler ces prix abusifs du pétrole.
Comme je le disais, il y a selon eux un danger de ralentissement de l'économie en perspective. Ces gens sont aussi un peu tannés de devoir sortir énormément d'argent de leur poche à toutes les semaines. Ils ont nettement l'impression que la Chambre des communes ne contrôlent pas ces prix.
Il me fait plaisir de déposer cette pétition en leur nom.
[Traduction]
LES ARMES NUCLÉAIRES
M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter une pétition signée par plusieurs centaines d'habitants de ma circonscription qui s'inquiètent du grand nombre d'armes nucléaires qu'il y a encore sur la planète.
Reconnaissant que le Canada et d'autres États ont signé le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires il y a cinq ans, ils demandent que nous réaffirmions notre engagement et demandent au Parlement d'appuyer l'établissement d'un calendrier exécutoire pour l'abolition de toutes les armes nucléaires.
* * *
QUESTIONS AU FEUILLETON
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.
Le vice-président: Est-ce d'accord?
Des voix: D'accord.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LOI SUR L'IMMIGRATION ET LA PROTECTION DES RÉFUGIÉS
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 26 février, de la motion: Que le projet de loi C-11, Loi concernant l'immigration au Canada et l'asile conféré aux personnes déplacées, persécutées ou en danger, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
Mme Lynne Yelich (Blackstrap, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est un honneur pour moi de prendre la parole devant vous au cours de la première session de la 37e législature. Je profite de l'occasion pour vous féliciter d'avoir été élu par vos collègues de la Chambre à ce poste prestigieux.
Je tiens à saluer mes défunts parents, John et Olga Zdunich, mes beaux-parents, George et Katherine Yelich, ainsi que mon époux, Matt, et nos filles, Elaina et Ivana.
Je remercie tous ceux dont le soutien et l'encouragement m'ont amenée ici: l'équipe de ma campagne, les bénévoles qui ont travaillé dur, mes amis et ma famille et en particulier les habitants de Blackstrap pour le vote de confiance qu'ils m'ont accordé. C'est un honneur et un privilège de les représenter à la Chambre des communes.
La circonscription que je représente s'appelle Blackstrap. Ce nom a toujours suscité l'intérêt et des conversations. On me demande constamment d'où il provient. Selon la légende locale, durant la prohibition, un contrebandier d'alcool n'avait pas remarqué qu'un de ses barils fuyait et il a traversé la vallée en laissant derrière lui une traînée de mélasse. Cette légende est tellement répandue que certaines personnes y croient réellement. Pour moi, la véritable histoire n'est pas aussi colorée.
Avant que les eaux du lac Diefenbaker n'y soient déversées en 1967, pour en faire un réservoir, le lac Blackstrap était un long marais étroit où proliféraient les roseaux. Du haut de ses rives escarpées, il ressemblait vraiment à une longue ceinture noire.
De nos jours, le lac Blackstrap est un parc provincial de 540 hectares dont le centre abrite un lac artificiel. Le parc provincial est un centre de villégiature qui offre des activités à longueur d'année. En hiver, sa montagne artificielle devient le centre d'un parc d'activités sportives hivernales. À l'été, on peut s'y baigner, camper et pêcher.
Située près du centre de la province de la Saskatchewan, la circonscription de Blackstrap est bordée à l'ouest par la rivière Saskatchewan-Sud et au nord par la route Yellowhead. Couvrant une superficie de 11 000 milles carrés, elle compte environ 72 000 habitants et offre une diversité unique. Cette circonscription est mon chez-moi.
Mes racines dans cette circonscription sont presque aussi anciennes que la province de la Saskatchewan. Mes grands-parents, originaires de Lovinac, un petit village de la Croatie, ont immigré au Canada à la faveur du programme de colonisation massive du début des années 1900. Le ministre de l'Intérieur de l'époque, sir Clifford Sifton, avait offert des terres aux nouveaux immigrants qui désiraient s'établir dans les Prairies.
La venue de ma famille au Canada fut un acte de foi considérable de sa part. Mes ancêtres ont quitté tout ce qui leur était familier, parce qu'ils croyaient pouvoir trouver au Canada une vie meilleure pour eux-mêmes et pour leurs descendants. Je leur serai toujours reconnaissant de leur courage, grâce auquel j'ai pu grandir au Canada. Ayant vécu et travaillé dans cette circonscription développée presque uniquement grâce à l'immigration, je sais à quel point il est important d'améliorer notre système. J'y reviendrai.
Les choses ont beaucoup changé depuis le tournant du siècle dernier, alors qu'un avenir nouveau et prometteur attendait ceux qui étaient prêts à labourer 160 acres de terre dans les Prairies. À une certaine époque, la circonscription de Blackstrap dépendait presque exclusivement de l'agriculture. Toutefois, en ce début de siècle, l'économie des Prairies connaît des changements radicaux, et peut-être encore davantage dans ma circonscription que n'importe où ailleurs.
On trouve partout sur le territoire de la circonscription de Blackstrap des exemples de l'inventivité dont les gens ont su faire preuve en période de crise. Il n'y a pas d'autres mots pour décrire ce qui s'est passé dans le secteur agricole au cours des deux dernières décennies. Un exemple d'inventivité est le parc d'engraissement Pound-Maker, à Lanigan, où on a décidé d'intégrer le parc d'engraissement existant à une usine de production d'éthanol.
Environ 55 millions de litres d'éthanol sont produits chaque année au Canada. De ce nombre, 17 millions de litres servent de carburant et le reste est utilisé pour la fabrication d'articles de toilette, de produits de beauté et de médicaments à usage externe. L'installation Pound-Maker est en mesure de produire environ 13 millions de litres par année, soit le quart de la production canadienne totale, en plus de gérer un parc d'engraissement pour 28 500 bovins.
À peine quelques milles plus loin, on trouve la société Drake Meat Processors, une énorme usine de transformation de la viande qui a du succès et qui emploie plus de 50 personnes dans ce qui fut une installation coopérative de congélation à cases. La société a mis au point des familles de produits vendus exclusivement en Saskatchewan.
L'industrie du porc est très dynamique dans ma circonscription. Bon nombre de nouvelles installations ont été construites et des milliers de porcs sont vendus chaque année sur les marchés canadiens. Une bonne partie de ce nouvel essor est dû à l'initiative de trois producteurs de porcs qui ont décidé d'unir leurs énergies et de changer de cap. Leur étable de démarrage installée à Outlook comprend maintenant 17 installations communautaires pouvant produire jusqu'à 500 000 porcs par année.
Les agriculteurs de la région du Lac Diefenbaker ont consacré des milliers d'acres à la production irriguée de pommes de terre et on s'affaire actuellement à construire une usine de production de menthe à Outlook. La Saskatchewan Wheat Pool de Watrous a instauré une ferme d'amélioration des cultures où l'on produit et met à l'essai de nouvelles cultures de canola.
Les exploitations maraîchères sont de plus en plus courantes dans presque toutes les collectivités alors que les gens luttent pour la survie de leurs collectivités rurales malgré les faibles revenus tirés de l'agriculture. Des centaines de gens de la circonscription ont relevé avec succès les défis posés par la crise dans le domaine de l'agriculture et ils ont réussi à ériger une base économique diversifiée. C'est tout à leur honneur et je les en félicite.
L'industrie agricole constitue sans contredit une partie importante de la configuration tant historique que moderne de l'économie de Blackstrap, mais elle n'est pas la seule.
C'est en raison de l'importance des différentes industries qui y survivent et y prospèrent, que la région se distingue dans l'économie des Prairies. Cinq mines de potasse y sont établies, notamment IMC Kalium et la Potash Corporation of Saskatchewan, ou PCS.
La PCS permet à elle seule une étude intéressante des possibilités qu'ouvre la diversification. En effet, la PCS a déjà été une société d'État déficitaire, dans laquelle les contribuables de la province engloutissaient des centaines de millions de dollars. Elle a été privatisée à la fin des années 1980 et vendue à des employés et divers investisseurs. Aujourd'hui, la PCS est le premier producteur de potasse dans le monde et exploite 20 usines en Amérique du Nord, au Chili et à Trinidad. Une usine doit également être mise en route sous peu au Brésil.
Six entreprises de vente au détail d'automobiles sont établies dans la circonscription. Quand la construction du mail d'automobiles sera terminé dans le sud de Saskatoon, la circonscription comptera le groupe de vendeurs d'automobiles le plus nombreux en Saskatchewan.
Grâce au programme d'obligations de développement communautaire, les habitants de Manitou Beach et des environs ont investi dans leur propre collectivité. C'est ainsi que la station thermale de Manitou revit l'époque dorée qu'elle avait connue au début des années 1920 et 1930.
En misant sur ses qualités thérapeutiques naturelles, qui sont uniques en Amérique du Nord et qui ne se retrouvent qu'à deux autres endroits dans le monde, soit à Karlovy Vary, en République tchèque, et à la mer Morte, en Israël, le comité a créé ce qui est devenu une installation de plusieurs millions de dollars. Aujourd'hui à Manitou Beach, il y a un centre des congrès, un spa et un centre complet de villégiature qui attire les touristes du monde entier.
À Blackstrap, il y a aussi la base de la Défense nationale de Dundurn, où se trouve le plus grand dépôt de munitions au Canada. La première nation des Dakota-Sioux de Whitecap remonte au XVIIIe siècle et habite le coin nord-ouest de la circonscription. Ce sont des Dakota-Sioux qui ont émigré des États-Unis vers Blackstrap.
Au Canada nous connaissons trop bien les problèmes de nos collectivités autochtones; pourtant, cette réserve est un exemple d'innovation, de prospérité et de stabilité économique.
Nous sommes des gens de vision, des Canadiens inventifs, innovateurs et courageux. Je crois que ces qualités sont arrivées avec les premiers colons dans cette région du pays et se sont perpétuées jusqu'à notre génération. Voilà ce que sont les gens de Blackstrap. Ils m'ont confié le mandat de les représenter à Ottawa. Ils ont un message à transmettre, que j'ai apporté avec moi aujourd'hui. Je négligerais mon devoir en ne profitant pas de l'occasion pour faire connaître à tous mes collègues à la Chambre des communes, de tous les partis politiques, ce que les gens de Blackstrap ont à dire.
On a beaucoup accordé d'attention récemment à ce que l'on a appelé l'aliénation de l'Ouest et on a beaucoup parlé de la séparation de l'Ouest. Il serait facile de me laisser distraire, mais je sais à quel point la Confédération est importante pour les gens de ma circonscription. Je sais avec quelle passion ils aiment leur pays. En fait, chers collègues, je crois qu'on a regardé le dossier de la séparation par le mauvais bout de la lorgnette. Ce n'est pas tant que les gens de ma circonscription veulent se séparer du pays, c'est plutôt qu'ils veulent en faire vraiment partie.
Les gens que je représente veulent faire savoir à Ottawa que leur voix appartient aussi au Canada. Lorsqu'on parle d'égalité, on insiste automatiquement sur les droits, et ce n'est pas nécessairement le message qu'on devrait entendre. Les habitants de l'Ouest croient à l'équilibre et au partage des responsabilités qu'implique le fait d'être partenaire dans la Confédération.
Les habitants de Blackstrap tiennent à ce que l'on sache que, même s'ils acceptent de bonne grâce de payer un impôt légitime sur l'argent qu'ils ont gagné à la sueur de leur front, ils en ont assez des innombrables cas qui leur rappellent constamment que le gouvernement fédéral ne gère pas l'économie nationale avec la même diligence qu'eux-mêmes gèrent leurs finances personnelles. Ils voudraient que la fiscalité soit rééquilibrée.
Les habitants de Blackstrap sont déçus par un système de lois dans lequel il n'y a plus de justice. Ils voudraient que soit rétabli l'équilibre dans les lois qui nous gouvernent.
Les habitants de Blackstrap sont déçus de voir le gouvernement fédéral considérer les différences régionales comme des sources de division, au lieu d'y voir des possibilités de coopération. Ils souhaitent l'équilibre des intérêts régionaux dans un système fédéral qui favorise la concertation pour surmonter ces difficultés.
Quand mes grands-parents ont immigré au Canada, ils ne connaissaient ni l'est, ni l'ouest, ni le centre du Canada. Le Canada francophone et le Canada anglophone ne posaient pas problème.
Ils ont immigré au Canada parce que ce pays leur inspirait confiance, leur donnait foi en l'avenir, leur paraissait prometteur et favorable à l'épanouissement des individus. Des milliers de personnes comme eux ont opté pour le Canada et entrepris de bâtir un pays qui a la particularité d'être le meilleur pays au monde.
J'ai personnellement parrainé des réfugiés et travaillé avec de nombreuses familles d'immigrants. Leur perception du Canada est la même que celle qu'ont eue mes ancêtres.
Je prie pour qu'aucun d'entre nous dans cette Chambre n'oublie que c'est un privilège que d'être Canadien et pour que nous travaillions tous de concert au renforcement de la structure mise en place par nos ancêtres.
Au cours du débat sur le projet de loi C-11, qui porte sur la citoyenneté et l'immigration, nous discuterons des moyens d'améliorer le système existant. Nous essaierons de répondre aux questions de mes électeurs: pourquoi faut-il tant de temps aux travailleurs qualifiés pour immigrer au Canada? Comment pouvons-nous résorber l'arriéré? J'ai discuté avec des dizaines de personnes qui m'ont parlé des longs délais nécessaires pour faire venir leur conjoint au Canada. Pourquoi le ministère réduit-il ses effectifs? Comment pouvons-nous mettre un frein au trafic des êtres humains?
Mes électeurs, dans la circonscription de Blackstrap, connaissent certes la valeur de l'immigration, tout comme mon parti. Ils y voient une force constructive et dynamique, essentielle à la croissance économique, à l'épanouissement culturel et à la diversité de notre pays. Nous devons maintenir la longue tradition humanitaire du Canada et continuer d'accueillir les réfugiés authentiques. Les Canadiens s'inquiètent de notre système d'immigration actuel. Nous devons leur redonner confiance.
Un dicton revêt une importance toute spéciale pour ma famille et moi. Il résume l'essentiel de ce que peut et doit être l'immigration, selon moi. Le voici: «La Croatie a donné la vigueur, et le Canada a ouvert les perspectives.» Cette formule traduit l'importance que l'immigration a eue pour mes électeurs. Je vais travailler très fort pour bien les servir.
Je vous remercie, monsieur le Président, de m'avoir accordé le privilège de m'exprimer aujourd'hui devant la Chambre. J'aborde avec enthousiasme le travail que nous ferons ensemble dans les années à venir pour servir ceux qui ont mis leur confiance en nous.
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je félicite la députée de Blackstrap pour son premier discours. Il ne fait aucun doute qu'elle nous a transmis un message très clair et concis de la part des électeurs de Blackstrap. Nous savons tous désormais, à la Chambre comme dans tout le Canada, d'où la circonscription tire son nom.
J'ai été ému d'apprendre que les racines familiales de la députée sont en Croatie. À l'instar de tous les autres immigrants, les immigrants croates ont certes cru dans le Canada. Ils sont arrivés ici au tournant du siècle et ont apporté une contribution précieuse à notre pays.
La députée de Blackstrap vient de la Saskatchewan et je viens du Manitoba. Comme tout le monde le sait, ces deux provinces ont tendance à se dépeupler.
Je demanderai à la députée de Blackstrap comment une immigration accrue en Saskatchewan peut aider cette province à l'avenir.
Mme Lynne Yelich: Monsieur le Président, une immigration accrue sera d'une grande aide. Les immigrants sont un atout précieux. Nous avons eu des réfugiés très instruits. Ce sont d'authentiques réfugiés qui étaient en Croatie au cours de la guerre en Bosnie. Ils apportent une telle contribution. Nous avons besoin d'augmenter le nombre d'immigrants car ils ont des valeurs et des principes solides et sont un véritable atout pour notre province.
L'hon. David Kilgour (secrétaire d'État (Amérique latine et Afrique), Lib.): Monsieur le Président, mon collègue et moi tenons à féliciter la députée de Blackstrap pour son excellente allocution. Elle prononcera sans doute dans les années à venir à la Chambre de nombreux autres discours tout aussi excellents.
M. Werner Schmidt (Kelowna, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je veux moi aussi féliciter ma collègue, la députée de Blackstrap. Nous avions un représentant de Blackstrap dans le passé, mais je n'ai jamais réussi à découvrir d'où venait au juste le nom de Blackstrap. Je la remercie d'avoir éclairé ma lanterne et de nous avoir expliqué ce qu'il en est de Blackstrap et les origines de ce nom.
Il est très intéressant que les électeurs de Backstrap aient choisi la députée pour les représenter. Elle fait non seulement bonne figure à cet endroit, mais elle a aussi une voix très puissante. J'ai été très impressionné par la comparaison qu'elle a faite entre la Croatie, le pays de ses ancêtres, et le Canada.
Je crois l'avoir entendue dire que la Croatie leur donne la vigueur et que le Canada leur ouvre des perspectives. C'est une déclaration absolument extraordinaire. J'aimerais qu'elle puisse l'approfondir davantage.
Le Canada est un pays multiculturel formé de personnes provenant de divers pays dans le monde. Se pourrait-il que le Canada soit devenu l'État fort et pacifiste qu'il est à cause de ces différents pays? Ces pays ont donné aux individus la vigueur, tandis que le Canada leur a offert l'occasion de montrer au monde entier la signification du multiculturalisme dans notre pays et ailleurs dans le monde. La députée pourrait-elle dire ce qu'elle en pense?
Mme Lynne Yelich: Monsieur le Président, je voudrais simplement dire comment tout a commencé. Des immigrants venus de Croatie se sont établis ici au tournant du siècle, et mes beaux-parents étaient du nombre. Ces gens ont dû travailler fort. La vie en Saskatchewan au tournant du siècle était très difficile. Ils vivaient dans le froid et la solitude, mais ils ont enduré. Ils ont eu une très grande famille, 12 enfants qui seront très fiers d'avoir été mentionnés à la Chambre. Tous ces enfants ont des vies bien remplies et plusieurs vivent à l'étranger.
Lorsque mes beaux-parents sont décédés, leurs enfants ont voulu leur rendre hommage. Leurs parents n'avaient jamais vraiment eu beaucoup de biens, mais ils avaient aimé le Canada et lui étaient reconnaissants des possibilités qui leur avaient été offertes, étant donné qu'ils n'avaient rien d'autre que du roc dans leur pays d'origine. Ils sont venus ici à la recherche de débouchés, et le Canada leur a offert plein de possibilités. Comme je l'ai mentionné dans mon discours, ils n'ont bénéficié d'aucun traitement spécial en raison de leur couleur, de leur race ou de leurs antécédents. S'ils ont su en profiter, c'est grâce à leur volonté et à leur éthique du travail.
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, je suis très heureuse d'aborder, au nom du NPD, le projet de loi C-11. Tout d'abord, je voudrais remercier mes collègues qui sont déjà intervenus, soit notre porte-parole en matière d'immigration et du statut de réfugié, la députée de Winnipeg-Centre-Nord, ainsi que le député de Winnipeg-Centre, qui ont tous deux remarquablement exposé les préoccupations du NPD et sa position en ce qui concerne non seulement l'ancien projet de loi C-31, mais également la mesure législative à l'étude aujourd'hui. Ils ont fait un excellent travail de collaboration auprès des organisations locales et nationales afin de bien comprendre leurs vives inquiétudes à propos du projet de loi.
Je voudrais tout d'abord dire, à titre de députée de Vancouver-Est, que je représente une circonscription qui, à l'instar des circonscriptions de bien d'autres députés, symbolise vraiment la diversité culturelle et ethnique du Canada. La circonscription de Vancouver-Est est une communauté d'immigrants, et nous en sommes très fiers. Cette collectivité a accueilli des travailleurs des quatre coins du monde, des gens qui ont choisi de s'installer au Canada afin d'améliorer leurs perspectives et leur qualité de vie et d'offrir un meilleur avenir à leurs enfants.
Chaque jour, dans ma circonscription de Vancouver-Est, tant dans Strathcona que dans Mount Pleasant ou dans le secteur est du centre-ville, dans Grandview-Woodlands que dans Hastings-Sunrise, je rencontre des familles de première, parfois de deuxième ou de troisième génération qui ont de nouvelles racines et qui sont chez eux dans cette collectivité. Je suis très fière de représenter une circonscription qui valorise une telle diversité. Les gens provenant d'horizons différents, s'exprimant dans d'autres langues et appartenant à diverses classes sociales qui sont venus s'installer dans Vancouver-Est apportent une contribution des plus enrichissantes pour toute la collectivité.
Le Canada est probablement l'un des rares pays au monde où la politique concernant l'immigration et les réfugiés est aussi importante et aussi fondamentale.
Je suis moi-même immigrante. Comme d'autres députés immigrants dans cette Chambre, ma famille est venue au Canada parce qu'elle savait que c'était un très grand pays. Comme certains d'entre eux, j'étais enfant lorsque je suis arrivée ici avec mes parents, et je m'y suis installée.
Les politiques de même que les mesures législatives adoptées par le gouvernement et débattues dans cette Chambre sont au coeur des convictions que nous avons en tant que Canadiens. L'une des préoccupations exprimées par le Nouveau Parti démocratique est que le projet de loi redéposé par la ministre reflète une opinion publique devenue plus négative au sujet des politiques concernant l'immigration et les réfugiés.
Je ferai ressortir un aspect particulier, très pertinent pour Vancouver et Vancouver-Est. Il y a plus d'un an et demi, nous avons vu arriver une vague de gens qu'on appelle communément des réfugiés de la mer, des migrants économiques que le désespoir pousse à recourir à la migration clandestine. Ils s'exposent à de grands risques et périls. Ils parcourent d'énormes distances dans des conditions très dangereuses pour trouver le moyen de fuir l'environnement dans lequel ils vivent.
Ce que nous avons vu sur la côte ouest du Canada a été abondamment rapporté dans les médias: l'arrivée d'environ 600 prétendus réfugiés de la mer venant de la province de Fujian, en République populaire de Chine. Il était très intéressant de voir les réactions dans les médias et dans l'opinion publique en général à propos de cette affaire.
La migration clandestine suscite des inquiétudes. Nous devons empêcher ce genre de situations de se produire. En travaillant avec des organismes locaux, j'ai visité des femmes qui étaient détenues à l'établissement correctionnel pour femmes de Burnaby. À ce moment-là, 33 femmes étaient en prison. Elles n'avaient commis aucun crime. Elles n'avaient été accusées de rien. Elles étaient incarcérées parce qu'on craignait qu'elles ne s'enfuient si elles étaient mises en liberté.
En visitant ces femmes en prison, j'ai été très émue par la situation dans laquelle elles se trouvaient. Elles avaient un accès insuffisant à une représentation juridique, à des services d'interprétation linguistique et culturelle et à des services téléphoniques, et elles ne pouvaient pas communiquer avec leurs enfants dont elles avaient été séparées et qui avaient été confiés à des familles d'accueil, et ne pouvaient recevoir de visite de leur part. Certains seront peut-être étonnés d'apprendre que, plus de 18 mois plus tard, 25 personnes restent encore détenues en Colombie-Britannique à la suite de leur arrivée sur les rives canadiennes.
Il est facile pour nous de songer à des événements qui remontent à il y a 40 ou 50 ans quand des gens arrivaient et se voyaient interdire l'entrée au Canada. En rétrospective, nous pouvons dire que cette attitude était raciste ou xénophobe et que nous craignions l'arrivée d'autres gens, mais lorsque cela se produit dans notre société actuelle, il vaut vraiment la peine de débattre la question pour savoir comment nous réagissons.
Une des préoccupations que mes collègues néo-démocrates et moi avons à l'égard du projet de loi, c'est que nous estimons qu'une majeure partie de la réaction du gouvernement repose sur une très vive réaction face à l'arrivée des réfugiés de la mer. Je trouve inacceptable que, 18 mois après leur arrivée, des personnes soient toujours incarcérées et tentent de présenter de façon légitime et légale leurs revendications de statut de réfugié. Nous craignons que cela ne soit un aspect sous-jacent du projet de loi. Il semble que le projet de loi repose davantage sur le refus d'admettre de nouveaux immigrants que sur la reconnaissance du rôle primordial que l'immigration joue dans notre pays.
Je suis très préoccupée, depuis quelques années, par le fait que les propres objectifs du gouvernement à l'égard des niveaux d'immigration ne soient pas atteints. il est très facile d'alimenter les craintes dans les collectivités. Il est plus facile de dramatiser et de souligner des cas individuels teintés d'irrégularités, où il a fallu expulser des réfugiés, que d'insister sur la contribution extrêmement positive non seulement des nouveaux immigrants, mais aussi des réfugiés au Canada.
Le projet de loi prévoit certes quelques mesures pour réunir les familles, mais le NPD estime qu'il faudrait mettre beaucoup plus d'accent sur la réunion des familles et sur l'élargissement de la catégorie des parents. Il faudrait dire que le Canada accueille des gens de partout dans le monde et que nous ne devrions pas être aussi méfiants.
Dans ma circonscription, je reçois chaque année des centaines de cas de familles qui cherchent désespérément à obtenir une aide pour naviguer à travers le système actuel. Je suis certaine que nous avons tous connus des cas où nous sentions réellement la frustration et l'anxiété éprouvées par des familles aux prises avec le système. Les autorités ont un énorme pouvoir discrétionnaire pour refuser d'admettre des personnes et pour déterminer si un membre de la famille peut être admis au Canada.
Il y a dans ma circonscription une campagne qui s'appelait une fois dans sa vie. C'était une idée lancée par la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration il y a un an environ. Il s'agissait d'une disposition spéciale en vertu de laquelle tout Canadien pourrait parrainer, une fois dans sa vie, quelqu'un qui ne serait pas admissible dans la catégorie de la famille. Malheureusement, l'idée a été tout simplement abandonnée.
Des organisations locales de ma circonscription, comme Success, ont recueilli plus de 15 000 noms de personnes appuyant cette idée. La ministre a ensuite laissé tomber cette patate chaude. J'ai décidé de relancer l'idée. Nous avons fait circuler une pétition et lancé une campagne une fois dans sa vie qui ont reçu une accueil très favorable. Si cette idée a reçu autant d'appuis, c'est que les définitions actuelles sont si étroites et restrictives qu'il est devenu très difficile de réunifier des familles dans le cadre des politiques en vigueur.
Certaines des autres préoccupations relativement au projet de loi, dont il n'a pas encore été question et que nous soulèverons à l'étape de l'étude en comité, ont trait au programme concernant les aides familiaux résidants. Il y a eu des cas dans ma propre circonscription où des femmes venues au Canada dans le cadre de ce programme ont été carrément exploitées. Elles ont vu leurs droits violés et elles ont été placées dans des situations très vulnérables et précaires à cause de cette disposition spéciale par laquelle elles ont pu entrer au Canada.
Nous estimons que le projet de loi ne règle pas les problèmes liés au sexe des personnes qui viennent dans le cadre du programme des aides familiaux résidants. Il faut faire un examen approfondi pour veiller à ce que les femmes qui viennent au Canada dans le cadre de ce programme ne soient pas exploitées.
Nous avons également exprimé des réserves relativement à certaines des dispositions du projet de loi qui représentent certes une amélioration par rapport à la situation actuelle, mais qui ne vont pas assez loin. J'ai rencontré dans ma circonscription des employés d'organismes qui ont fait beaucoup de travail et d'analyses autour de la question des dispositions concernant les relations entre personnes du même sexe.
Même si la ministre et le gouvernement reconnaissent enfin, en plus de quelques autres modifications à la loi qui ont été proposées à la Chambre, qu'il faut traiter les relations entre personnes du même sexe de la même façon, au plan légal, que toute autre relation conjugale, les dispositions à cet effet ne se trouvent malheureusement pas dans le projet de loi, mais dans le règlement connexe. On m'a dit que cela posait une inquiétude puisque les personnes concernées demeuraient vulnérables à toute modification future du règlement.
L'autre sujet dont je voulais parler concerne les réfugiés. La présence hier sur la colline du Parlement d'un conférencier de grand renom, le professeur Goodwin-Gill de l'Université d'Oxford, sur l'invitation du Caledon Institute et de la Maytree Foundation, et sous le patronage d'un comité des droits de la personne du Sénat, tombait à point. M. Goorwin-Gill venait s'adresser à un groupe de personnes qui s'étaient assemblées hier pour discuter de cette habitude qu'a le Canada de contrevenir à la convention de l'ONU concernant le statut de réfugié.
Le professeur Goodwin-Gill, un spécialiste de réputation internationale du droit des réfugiés, a déjà enseigné à l'Université Carleton, si bien qu'il est très au courant des lois canadiennes et qu'il sait comment nous traitons les réfugiés au sens de la Convention.
Il a exprimé de graves inquiétudes au sujet des pratiques qui ont cours au Canada, où l'on refuse aux réfugiés le droit de voyager ou l'accès à d'autres ressources ou programmes existant au sein de la société canadienne. Il a insisté surtout sur le fait que le Canada ne respecte pas ses obligations internationales aux termes de la Convention des Nations Unies, en particulier aux articles 25, 27 et 28, qui portent sur les pièces d'identité des réfugiés.
Je trouve que c'est une situation très grave. Je dirai à l'intention des députés et sénateurs qui ont assisté hier à l'allocution du professeur Goodwin-Gill que j'espère sincèrement que ce qu'il a dit se reflètera dans notre débat et que, une fois le projet de loi devant le comité, nous pourrons y apporter des amendements conformes à ce qu'il nous a dit.
La réunion d'hier a pris une tournure plus humaine parce qu'une femme qui est réfugiée au sens de la Convention y assistait. Je crois qu'elle est originaire du nord de la Somalie. Elle est mère de quatre enfants. Elle nous a décrit avec beaucoup de franchise et d'honnêteté les sentiments qu'elle a éprouvés lorsqu'elle s'est retrouvée en prison et qu'elle ne pouvait pas subvenir aux besoins de sa famille.
De plus, ses adolescents ne peuvent pas faire d'études postsecondaires parce qu'elle n'a pas les moyens de payer ces études. Elle travaille, même si elle ne gagne qu'un petit salaire, alors ni elle ni ses enfants ne peuvent accéder au Programme canadien de prêts aux étudiants. Elle est établie au Canada en tant que réfugiée au sens de la convention, mais, en raison de la manière dont nous traitons ces réfugiés, elle et ses enfants n'ont pas accès aux études postsecondaires.
C'est ce genre d'exemple qui illustre le mieux les effets des politiques et procédures que nous avons au Canada. L'étude du projet de loi nous donne la possibilité de corriger certains défauts en nous inspirant de l'expérience que vivent les réfugiés au Canada et en montrant notre détermination à ne pas créer de nouveaux obstacles.
Je pense que ce qu'il y a de vraiment tragique dans tout cela, c'est que les gens abusent du système, comme on l'a dit hier. On abuse de tous les systèmes existant au Canada mais, dans ce cas, l'abus devient une raison de dresser des barrières et de faire des règlements qui empêchent la vaste majorité des réfugiés au sens de la Convention de se voir accorder ce statut au Canada.
Ce n'est pas, à mon avis, la bonne façon de procéder. Ce n'est pas ainsi qu'il faut aborder la question. Nous devons reconnaître que la vaste majorité des réfugiés au sens de la Convention font une contribution positive à la communauté locale, que ce soit par leur travail, leur expérience enrichissante, leur bénévolat ou toutes ces choses dont on dit qu'elles font partie de notre société. Opposer des barrières à ces gens et leur rendre plus difficile la possibilité de devenir un membre à part entière de la société sont à mon avis des mesures très négatives qui doivent être revues.
Le NPD a de très sérieuses réserves à l'égard de ce projet de loi. Nous voulons aborder ce projet de loi de façon constructive. Il s'agit d'une mesure législative très importante. Les changements se sont fait trop attendre. Toutefois, ces changements et l'impact qu'ils signifient pour les personnes qui résident aujourd'hui au Canada et qui veulent faire venir des membres de leur famille d'un autre pays, ou pour les personne qui veulent émigrer au Canada, sont très importants.
Nous devrions prendre le temps de bien réfléchir au projet de loi. Nous devrions veiller à ce qu'il ne constitue pas uniquement une réaction aux idées véhiculées dans les médias, qui décrivent très négativement les revendicateurs du statut de réfugié en particulier et, dans une certaine mesure, l'immigration en général.
En notre qualité de députés, nous devrions avoir le courage de dire que nous voulons que le Canada soit un pays faisant bon accueil aux gens. Nous voulons que le système fonctionne équitablement. Nous désirons trouver des moyens de faciliter la réunification des familles. Qui plus est, nous voulons revenir en arrière et nous pencher sur certaines des injustices historiques commises.
Un des événements critiques de l'histoire de l'immigration a été la taxe d'entrée. Une campagne est en cours depuis longtemps. Les citoyens de ma circonscription, Vancouver-Est, cherchent très activement à faire éliminer la taxe d'entrée. Ils veulent aussi que soit reconnue l'injustice historique commise et cherchent à obtenir un redressement sous la forme d'une contribution et d'un dédommagement dont la collectivité serait bénéficiaire.
À moins que nous puissions agir de la sorte, j'entretiens de profondes préoccupations concernant la nature de ce nouveau projet de loi et la question de savoir si nous récidiverons avec le genre de politiques que nous avons adoptées dans le passé. Notre histoire est fondée sur le racisme et la crainte d'autrui. Nous devons trouver des moyens de changer cette mentalité.
Le projet de loi est très important. Il soulève chez nous de très graves préoccupations. Nous voulons que le projet de loi soit un instrument positif qui appuie et renforce les politiques du Canada en matière d'immigration de façon juste et équitable, en s'abstenant de jeter davantage de discrédit sur les revendicateurs du statut de réfugié ou de poser des obstacles à leur venue. Nous voulons qu'il véhicule un message selon lequel le Canada est une terre d'accueil vraiment favorable à la diversité et à la compréhension interculturelle.
[Français]
Mme Raymonde Folco (secrétaire parlementaire de la ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, si vous le permettez, j'aimerais quand même adresser quelques remarques correctives aux commentaires que ma collègue du Nouveau Parti démocratique vient de faire sur le projet de loi sur l'immigration et le statut de réfugié.
Le Canada, il est vrai, a une tradition d'immigration qui a bâti notre pays, qui a aussi bâti la circonscription que je représente à la Chambre des communes, soit celle de Laval-Ouest, où j'ai une forte proportion de gens qui sont venus au Canada, d'abord comme immigrants, et qui ont ensuite fait venir leur famille.
Le gouvernement du Canada a reconnu depuis maintenant des générations l'importance de la réunification des familles ici au Canada. Ce projet de loi, qui est présenté par le gouvernement à la Chambre, continue cette tradition. C'est un héritage que nous avons, soit la responsabilité envers les personnes qui sont venues ici de les aider à réunir leur famille et à reconstruire un noyau familial ici au Canada.
Dans le projet de loi, on prévoit que nous permettrons maintenant aux enfants qui ont 22 ans de faire partie de la famille, donc d'être réunis avec leurs parents ici au Canada. On prévoit aussi, dans ce projet de loi, que les personnes qui sont les derniers membres de ces familles et qui sont encore dans leur pays d'origine pourront venir ici au Canada. Ce qui veut dire très souvent qu'une mère âgée ou un père âgé vivant ailleurs, seul dans un appartement, dans une maison ou dans un village, va maintenant pouvoir revenir avec sa famille.
Je voulais corriger cet élément qui, quand même, continue cette tradition qui est extrêmement forte chez nous au Canada, soit celle de continuer dans un esprit humanitaire, dans un esprit familial, de reconstruire les familles ici.
Je veux aussi corriger un autre élément à savoir quand la députée a dit que le Canada n'atteignait pas les niveaux d'immigration qu'il s'était donné.
En fait, il est vrai que, pendant plusieurs années, ce fait se produisait. Cependant, à la grande satisfaction de tous, je dois dire que cette année, le gouvernement a effectivement rencontré les niveaux d'immigration qu'il s'était donnés.
En vertu de notre nouvelle façon de voir l'immigration, du nouveau projet de loi que nous présentons à la Chambre des communes, ainsi que des règlements qui vont suivre, nous voyons que nous sommes maintenant sur une voie où nous élargissons la porte pour que de plus en plus d'immigrants puissent venir s'installer au Canada.
En dernier lieu, qu'il me soit permis d'ajouter que ce projet de loi poursuit une longue tradition canadienne, à savoir que notre société est une société de droit. À ce titre, autant les personnes qui demandent le statut de réfugiés que celles qui veulent venir ici comme immigrants doivent rencontrer certains critères.
En tant que gouvernement, notre rôle est d'ouvrir la porte à ces personnes qui veulent venir s'installer ici, mais aussi de protéger les citoyens qui sont ici et qui ont le droit de protection envers certains immigrants qui enfreignent la loi.
[Traduction]
Mme Libby Davies: Monsieur le Président, je remercie certes la députée d'en face de ses observations.
Je reconnais que certaines dispositions du projet de loi C-11 dont nous sommes saisis constituent une amélioration par rapport à la loi actuelle. La disposition qui permet la réunification des familles pour les enfants en fonction d'une limite d'âge plus large est certes une amélioration.
Le point que je défendais et la préoccupation que nous avons au NPD m'a été signalée par de nombreuses organisations qui doivent faire face quotidiennement aux règles et aux politiques d'immigration. Ceux qui travaillent dans de telles organisations voient le système tel qu'il est. Ils s'inquiètent du fait que la définition générale de la catégorie de la famille est encore très restrictive en ce qui concerne le type de membres de la famille pouvant être parrainés.
Toute l'idée d'une fois dans la vie découle du fait que nous avions des restrictions sur la façon de définir la catégorie de la famille. La collectivité souhaitait et souhaite encore vivement qu'on élargisse la définition de façon à permettre la réunification des familles.
Certains affirment que nous devons avoir une définition, que nous devons être en mesure de définir d'une façon quelconque ce qu'il faut entendre par famille. C'est tout à fait vrai. Cependant, dans la société occidentale, on a tendance à rendre ces définitions très étroites et très linéaires, alors que dans de nombreuses cultures et régions d'où viennent les immigrants, la définition de la famille est beaucoup plus vaste. Nous devons vraiment nous pencher là-dessus.
Je vais répondre à l'autre point très brièvement en ce qui concerne les quotas. Il est vrai, car j'ai vu l'annonce et le communiqué de presse et le reste, que cette année, pour la première fois depuis de nombreuses années, le Canada a atteint son objectif pour ce qui est du nombre de personnes qui sont entrées au Canada. Si on examine la situation à plus long terme, dans l'ensemble, nous n'avons pas très bien réussi.
J'espère que le gouvernement est vraiment décidé non seulement à atteindre les objectifs, mais à examiner ces objectifs. Il ressort de toute étude sur l'immigration que l'immigration contribue à notre activité économique, à notre force économique et à la solidité de notre collectivité. Lorsque nous affirmons que nous devrions ouvrir davantage nos portes, j'espère que ma collègue reconnaîtra avec moi que nous devrions examiner cet objectif et réclamer qu'il soit accru. Si on regarde le bilan d'un certain nombre d'années, on s'aperçoit que nous n'avons pas atteint l'objectif, à part peut-être l'année dernière.
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, tout d'abord, je remercie la députée de Vancouver-Est pour ses remarques et pour la mise en garde qu'elle a faite aux Canadiens quant à la couverture médiatique des questions liées aux immigrants et aux réfugiés. Je suis entièrement d'accord avec elle. S'il est une chose que nous ne voulons pas faire dans notre pays, c'est bien raviver tout mouvement anti-immigration.
La députée a commencé son discours en disant qu'il y avait peut-être encore 25 réfugiés de la mer chinois—je suppose que c'est ainsi qu'on les appelle—en détention. En réalité, comme je l'ai dit hier dans le débat sur ce projet de loi, on parle ici d'environ 600 personnes sur un total d'environ 24 000 réfugiés arrivés au Canada. Il ne fait pas de doute que les médias ne présentent pas les faits tels qu'ils sont aux Canadiens afin que ceux-ci puissent avoir une idée juste du nombre de personnes en cause. Parfois, il y a une perte d'équilibre dans la couverture médiatique.
Selon la députée de Vancouver-Est, quelles solutions devrions-nous mettre en place pour aider les médias à assurer une couverture plus juste de ces situations?
Mme Libby Davies: Monsieur le Président, il est très important que nous, les députés, surveillions de près ce qui se passe dans les médias. Je suis d'accord avec le député pour dire que, dans des situations particulières comme l'arrivée de réfugiés de la mer, l'ampleur de la couverture médiatique, qui tient du sensationnalisme, est assez incroyable.
Lorsque nous, en tant que députés, faisons des commentaires sur ces questions, nous devons faire très attention à cela. Nous devons prendre le temps de voir au-delà des grands titres pour nous assurer que nous relatons la situation telle qu'elle est. Certaines de ces personnes sont dans des circonstances très désespérées et on les prend comme cibles. Elles deviennent des boucs émissaires. C'est une des raisons qui amènent les gens à croire que, comme le système ne fonctionne pas, il faut être plus sévère.
J'espère que le député et les autres députés de la Chambre penseront à cela la prochaine fois qu'on leur demandera de faire des commentaires sur une situation de ce genre lors d'un point de presse. J'espère que nous donnerons des réponses réfléchies et que nous ne contribuerons pas à susciter le genre de réaction négative qui peut facilement se produire lorsque les médias s'en mêlent.
M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le gouvernement nous a saisis du projet de loi C-11 pour que nous en débattions. Le titre indique qu'il s'agit d'une «loi concernant l'immigration au Canada et l'asile conféré aux personnes déplacées, persécutées ou en danger». Ce projet de loi remplacerait la Loi sur l'immigration actuellement en vigueur. La ministre soutient que le projet de loi clarifiera la loi et permettra au système canadien d'immigration et de protection des réfugiés de relever les défis que lui pose la situation internationale.
Les dispositions prises par le gouvernement en matière d'immigration n'ont pas favorisé la confiance au Canada. Si l'on prête l'oreille à ce que disent les Canadiens, que ce soit au café du coin ou dans les tribunes téléphoniques, on a vite fait de comprendre l'état d'esprit qui règne dans le pays: le gouvernement n'est pas très réputé pour ses compétences administratives. Les libéraux ne semblent pas savoir administrer un système qui inspire confiance au Canadien moyen, notamment lorsqu'il s'agit d'équité, de protection, ou simplement d'efficacité. Quoi qu'il en soit, je suis heureux de voir que le gouvernement fait au moins l'effort d'essayer d'améliorer les choses avec ce projet de loi.
Le gouvernement énonce de grands principes dans ce projet de loi. La ministre affirme qu'il renferme des objectifs qui reflètent les valeurs de la société canadienne. C'est un peu gros.
On soutient qu'il mettra en place un processus efficace de présentation de rapports au Parlement, sous forme d'un rapport annuel intégré et complet. En outre, des accords visant à faciliter la coopération avec les provinces et les gouvernements étrangers seront conclus.
Le projet de loi donne une description générale des grandes catégories d'immigrants: immigration économique, regroupement familial, réfugiés au sens de la Convention, et autres personnes à protéger. On y reconnaît également le principe de l'intérêt supérieur de l'enfant.
On tente d'établir des critères clairs et objectifs en matière de résidence pour les résidents permanents.
Un programme de protection des réfugiés garantit un processus décisionnel unifié, fondé sur les motifs de protection prévus, notamment, dans la Convention de Genève et la Convention contre la torture, et fondé sur la notion de menace pour la vie ou de traitement ou punition cruel et inusité.
On a parlé d'un processus de détermination du statut de réfugié plus efficace, comportant un recours plus fréquent à un tribunal composé d'un seul commissaire. Le projet de loi prévoit également la création d'une Section d'appel des réfugiés au sein de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, afin de renforcer la rigueur, l'équité et l'uniformité du processus décisionnel.
Il devrait y avoir des dispositions rendant irrecevables devant la Commission de l'immigration et du statut de réfugié les demandes d'asile présentées par des grands criminels, des personnes qui constituent une menace pour la sécurité publique, ainsi que par les revendicateurs réitérants.
On établit un processus officiel d'évaluation des risques avant le renvoi, visant à examiner si des circonstances nouvelles représentent des risques en cas de renvoi de l'intéressé.
Le projet de loi définit également des dispositions relatives à l'interdiction de territoire des criminels, des personnes qui constituent une menace pour la sécurité publique, des individus ayant commis des violations des droits de la personne et des personnes qui ne devraient pas être admises au Canada en raison d'activités frauduleuses ou de fausses déclarations, ou pour des motifs d'ordre sanitaire ou d'ordre financier. Le projet de loi précise des critères de détention clairs, assortis du pouvoir de préciser les motifs de détention dans le règlement. Il met aussi sur pied un processus de délivrance d'un certificat en matière de sécurité ainsi que la tenue d'enquêtes afin de traiter plus efficacement les cas de menace pour la sécurité.
Le projet de loi prévoit l'infliction de peines pour les responsables de l'introduction de clandestins et du trafic de personnes, dont la peine maximale d'emprisonnement à perpétuité. Des peines sont infligées à ceux qui aident des personnes à obtenir le statut de résident permanent par la fraude ou de fausses déclarations. Il existe aussi un système d'appel des décisions en matière d'immigration qui est sensé renforcer l'efficacité tout en préservant l'équité du processus et les garanties juridiques.
Ce sont toutes de grandes déclarations. Malheureusement, la Chambre les a déjà entendues de la part du gouvernement et lors de législatures précédentes. Cependant, nous tentons encore une fois d'améliorer le fondement législatif d'un système qui jouit d'une mauvaise réputation partout au Canada.
Il faut essayer de faire mieux en tant que pays. Nous avons des suggestions sur la façon d'améliorer le projet de loi. Nous avons examiné le problème en fonction d'un principe de base. L'Alliance canadienne appuie l'accueil de vrais réfugiés et d'immigrants dans la mesure où cela contribue à la croissance de l'économie. L'Alliance canadienne voit le Canada comme un pays bâti par l'immigration. Nous continuerons à accueillir de nouveaux immigrants.
Nous appuyons le parrainage des membres de la famille immédiate. Notre politique d'immigration tient compte des besoins de l'économie canadienne. Nous avons promis de rendre le système plus équitable et plus sécuritaire en veillant notamment au respect des obligations en matière de parrainage.
Nous travaillons en collaboration avec les provinces dans le domaine de l'établissement des immigrants. Nous voulons aussi protéger l'intégrité de la contribution précieuse qu'apportent au Canada les millions d'immigrants respectueux des lois.
Par conséquent, il faut davantage se concentrer sur des processus réalistes afin que la bonne réputation de l'immigrant moyen ne soit pas mise en péril par des étrangers qui prennent part à des activités criminelles. Nous sommes déterminés à régler les problèmes de nature juridique et logistique afin de pouvoir déporter rapidement les contrevenants et les fraudeurs.
Nous affirmons que le Canada a l'obligation humanitaire d'accueillir les vrais réfugiés et nous sommes fiers que notre pays ait offert un refuge aux personnes en détresse dans le monde. Mais si l'on veut garantir l'équité et mettre un terme au resquillage, nous disons depuis longtemps que le Canada doit faire mieux, sur le plan de l'expulsion des faux réfugiés et autres immigrants illégaux. Il doit y avoir des peines plus sévères pour décourager ceux qui cherchent à abuser du système.
Nous verrions également à ce que les revendications du statut de réfugié soient traitées d'une manière expéditive, uniforme et professionnelle. Cela exige un meilleur fondement juridique et des ressources suffisantes. Nous sommes engagés à mettre un terme au recours abusif à la revendication du statut de réfugié comme voie accélérée pour obtenir le statut de résident permanent.
On doit mettre en place un système dans lequel tous les Canadiens croiront. Pour cela, il faut qu'il y ait un solide fondement juridique pour que les responsables fassent preuve de sagesse et aient une motivation plus professionnelle que politique.
Le projet de loi C-11 est censé rendre tout le processus plus efficace, réduire le temps d'attente et garantir plus de sécurité aussi bien aux habitants qu'aux immigrants du Canada. Cependant, tout cela restera lettre morte en l'absence d'une plus grande obligation de rendre compte et d'un ministère nettement plus ouvert.
Par exemple, aucune norme mesurable et comptable ne s'applique aux activités de nos bureaux à l'étranger. Il faut mettre à jour les examens de santé habituels et vérifier soigneusement les antécédents pour garantir la crédibilité des rapports. Les agents de visas doivent être mieux formés pour pouvoir repérer les demandes frauduleuses et les criminels, ainsi que pour ne pas succomber à la corruption locale.
Il est absolument ahurissant de constater que le manque de personnel nuit à la compétence fonctionnelle du ministère. Il faudrait peut-être une vérification complète de sa structure de classification, de supervision et de promotion du personnel ainsi que de la pertinence des niveaux généraux de dotation.
L'Alliance canadienne approuve les niveaux d'immigration actuels, mais nous voudrions voir plus d'immigrants dans les carrières pour lesquelles ils ont été formés dans leur pays d'origine. Des médecins ne devraient pas être obligés de gagner leur vie au Canada en faisant du taxi.
Nous souhaitons que le Canada attire les meilleurs et les plus brillants, qu'il ne contente pas de choisir parmi ceux qui se présentent à sa porte. Ne serait-il pas possible de modifier les activités générales qui sont réactives pour qu'elles deviennent plus proactives?
Nous sommes favorables à la réunification opportune des membres d'une famille. Nous réaffirmons que nous préconisons d'accepter notre juste part de véritables réfugiés. Nous serions disposés à élaborer avec les provinces des politiques concernant l'établissement des immigrants, dans le cadre desquelles l'argent consacré à leur établissement irait à l'immigrant plutôt qu'au gouvernement.
L'Alliance canadienne est favorable à l'expulsion immédiate des individus indésirables dans les cas d'activité criminelle et de violation de la Loi sur l'immigration. Le projet de loi C-11 prétend en avoir l'intention, mais la décision rendue récemment par la Cour suprême complique les moyens de défense du Canada en matière d'immigration. Rien dans le projet de loi ne réplique à la décision de la Cour suprême.
Malgré tous les efforts du gouvernement libéral pour nous faire accepter le nouveau projet de loi, ses nobles idéaux demeureront impossibles à atteindre sans une meilleure mise en application, une responsabilité accrue et une meilleure gestion. Les niveaux d'effectifs nécessaires pour remplir les missions semblent complètement insuffisants. De même, il existe des problèmes au niveau opérationnel. Un flot de gens se présentent à nos bureaux de circonscription pour parler de problèmes d'immigration. La ligne d'assistance téléphonique en matière d'immigration ne marche pas, car elle est surchargée. Le personnel de mon bureau doit communiquer avec nos ambassades partout dans le monde puisque le ministère ne réussit pas à répondre aux demandes d'information de base. Les bureaux d'immigration locaux ne sont pas réceptifs et ne fournissent pas le service nécessaire en matière de relations avec la communauté.
Le bureau d'un député ne devrait se mêler de ces questions que dans des circonstances très spéciales et ne devrait pas être considéré comme un prolongement du ministère de l'Immigration. Je soupçonne également que le ministère regorge de mandarins d'Ottawa qui n'ont pas passé suffisamment de temps sur le terrain partout au Canada ou à l'étranger pour bien comprendre les problèmes opérationnels.
Nous nous sommes engagés dans ce débat sur l'immigration pour être constructifs parce que les Canadiens nous l'ont demandé. Il faut constater que lorsque notre parti a commencé à refléter sérieusement l'opinion nationale à la Chambre il y a plusieurs années, plus particulièrement à propos de l'incrédulité du gouvernement et de l'apparente ineptie avec laquelle il gère le système d'immigration, nous avons été traités de racistes. Cependant, malgré les mensonges à notre sujet, nous avons persisté et il est maintenant socialement acceptable de signaler à la Chambre les bourdes administratives du ministère. C'était auparavant un sujet tabou.
Les problèmes étaient tellement graves que nous avons essuyé l'affront et que nous n'avons pas cessé de soulever les questions qu'on nous demandait de soulever. Il est maintenant acceptable d'exiger, sans craindre de se faire taxer de racistes, à tout le moins pas par ceux qui sont «honorables», que la ministre et le ministère justifient devant les Canadiens leur mandat et le rendement de leur ministère. Le vérificateur général a blâmé le ministère de l'Immigration. Par conséquent, nous avons continué de faire entendre la voix de la collectivité dans cette Chambre. Le gouvernement a commencé à reconnaître que des améliorations d'ordre législatif s'imposent, et reconnaît au moins la volonté de la collectivité.
Néanmoins, il faut montrer beaucoup de prudence lorsqu'il s'agit d'évaluer les motifs et la probité de quiconque oserait dire, même si ce sont des députés du Parlement, que les politique de l'Alliance sentent la xénophobie. Malheureusement, hier, un député du NPD a utilisé une expression péjorative à l'endroit de notre parti en parlant d'hystérie xénophobe. L'expression signifie une haine maladive des étrangers. Cela me rappelle les insultes mesquines que la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration a adressées à mon parti durant la dernière campagne électorale.
Toutefois, au-delà des accusations, il y a lieu d'observer que nos homologues aux États-Unis, en Australie, en Chine et en Europe partagent notre désir de trouver des solutions, sous la forme d'un accord des Nations Unies contre le trafic d'être humains, par exemple. Nous ne saurions laisser les passeurs de clandestins réussir en se servant à mauvais escient de nos programmes de protection des réfugiés. Nos mesures législatives prévoient que les réfugiés légitimes, ceux qui se retrouveront en danger si on les refoule dans leur pays, sont autorisés à devenir résidents permanents, dans le cadre d'un processus en bonne et due forme. Ceux qui ne sont pas des réfugiés devraient être renvoyés sans tarder. Ce n'est pas ce que la ministre a fait en Colombie-Britannique ces dernières années.
À notre avis, il est possible de faire respecter la Charte de droits et libertés, pas seulement pour quelques-uns de temps en temps, mais pour tout le monde au Canada tout le temps, et d'être néanmoins capables de contrôler nos frontières. Malheureusement, dans le trafic international des êtres humains, l'occasion fait le larron. Par conséquent, il nous faut des procédures simplifiées qui seront rapides mais toujours aussi équitables.
L'immigration est une force positive dans la vie du pays depuis des siècles maintenant. Elle a contribué à ce que nous sommes devenus et elle contribuera à ce que nous deviendrons. Le Canada compte des réalisations historiques en matière d'immigration. Nous avons été et nous demeurons une destination plutôt qu'un point de départ pour les défavorisés. Pourtant, dans notre société, au fil des réalisations personnelles, le Canada est aux prises avec un exode des cerveaux vers les États-Unis en raison de la médiocrité de la gestion des affaires publiques.
La mission de Citoyenneté et Immigration Canada est la suivante: bâtir un Canada plus fort en tirant un maximum d'avantages économiques et sociaux du mouvement international des personnes; maintenir la tradition humanitaire du Canada en protégeant les réfugiés ainsi que les personnes requérant une protection humanitaire; définir l'appartenance à la société canadienne; et appuyer l'établissement et l'intégration des nouveaux arrivants.
Par conséquent, le ministère suit et évalue les événements nationaux et internationaux qui pourraient influer sur les retombées de l'immigration. Par exemple, les pays sources des immigrants changent, tout comme évoluent les qualifications de ceux-ci, la situation du marché du travail et les facteurs qui poussent les immigrants à quitter un lieu donné et à les attirer dans un autre. Tous ces changements ont une incidence sur le nombre et la catégorie des immigrants qui souhaitent venir au Canada et sur leurs besoins en matière d'établissement.
De plus, les conditions économiques et sociales qu'affrontent les immigrants à leur arrivée peuvent influer grandement sur leurs capacités de s'intégrer efficacement à la vie canadienne.
Il existe entre les migrations internationales et la durabilité environnementale de nombreux liens complexes. La rareté des ressources, comme la famine et les pénuries d'énergie, la dégradation de l'environnement, comme la pollution et le déboisement, les catastrophes naturelles, comme les tremblements de terre et les épidémies, et de graves changements climatiques, comme les sécheresses et inondations, peuvent occasionner des déplacements massifs et constituer un important facteur d'émigration à l'échelle internationale.
La perception du Canada comme un pays aux ressources naturelles abondantes, aux grands espaces et à l'environnement sain a également contribué à attirer les immigrants, tout comme les possibilités associées à une société plutôt démocratique et à une économie remplie de promesses.
La mondialisation devrait favoriser les voyages internationaux et la migration. Sur le plan écologique, cette mobilité accrue augmente les risques que représente l'arrivée de nouveaux aliments, de nouvelles plantes et de nouveaux organismes dans des écosystèmes délicats. Il faut aussi songer au risque de propagation plus rapide de certaines nouvelles maladies. Bien que ces questions soient graves et fassent l'objet de diverses méthodes de sélection nationales et internationales, il faut soupeser les risques et les avantages qu'offre la mondialisation et la libre circulation des biens, des services et de la population à l'échelle internationale.
Par exemple, le recrutement de travailleurs hautement qualifiés devrait apporter au Canada de nouvelles compétences et technologies. De même, les étudiants étrangers nous font partager les technologies qu'ils maîtrisent et les connaissances qu'ils possèdent. Les immigrants ont également des valeurs et des pratiques différentes des nôtres, qui peuvent nous ouvrir de nouvelles perspectives sociales fort enrichissantes.
Pour aspirer à un avenir durable, il faut s'engager à préserver un environnement sain et une économie pouvant améliorer le bien-être social des Canadiens. Ce n'est qu'en reconnaissant et en étudiant la multitude des questions que j'ai mentionnées que nous parviendrons à créer un contexte juridique favorable à l'immigration et à prendre les décisions éclairées qui nous permettront de façonner l'avenir du Canada.
L'Alliance canadienne appuie l'immigration. Nous espérons que le gouvernement acceptera les amendements que nous proposons afin d'accroître la responsabilité et la transparence sur le plan opérationnel, de sorte que les opérations courantes puissent acquérir une plus grande légitimité politique.
Avec ce projet de loi, le gouvernement vise des objectifs plutôt nobles. Espérons que le gouvernement ne s'arrêtera pas là et qu'il accroîtra les ressources mises à la disposition du système et le professionnalisme de ses agents afin que nous puissions être tous fiers de notre système d'immigration.
M. Rick Casson (Lethbridge, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je remercie mon collègue de son discours. Une question revient sans cesse et je crois qu'il en a parlé: Quelles mesures prendre à l'égard de ces gens qui se livrent au trafic d'êtres humains à travers le monde?
Je me demande si certaines mesures proposées dans ce projet de loi pour contrer le trafic de personnes seront efficaces. Pour que l'on puisse définir une personne, celle-ci doit se rendre dans notre pays et l'on doit pouvoir la détenir.
De même, que faire par rapport aux faux réfugiés? Combien de temps faudra-t-il attendre avant de pouvoir les expulser du pays?
Le député peut-il expliquer plus amplement certains de ses commentaires concernant les gens tels que les passeurs, comme on les appelle, et les chefs de réseaux de migration clandestine? Pourrait-il aussi commenter ce que l'on pourrait faire par rapport aux faux réfugiés et comment on pourrait accélérer le processus pour les expulser du Canada?
M. Paul Forseth: Monsieur le Président, le problème est d'envergure internationale. Le Canada doit certes faire sa part et participer à l'élaboration d'une solution internationale. Nous devons aussi instaurer une base juridique appropriée pour pouvoir appliquer régulièrement la loi, maintenir notre souveraineté, protéger nos frontières et lancer le message adéquat dans tous les coins de la planète pour faire savoir que le Canada ne sera plus une cible aussi facile pour les passeurs. Le principe étant que l'occasion fait le larron. S'il existe une faille, il est certain qu'une personne mal intentionnée va chercher à l'exploiter. Ce n'est rien de nouveau.
Le gouvernement a de la difficulté avec cela. Je le félicite cependant d'avoir fait l'effort de reconnaître le contexte international dans lequel nous devons étudier ces questions avec nos voisins, et d'établir des fondements juridiques plus appropriés pour l'étude des cas au pays.
Il reste la question des ressources. Nous devons avoir la possibilité de mener diverses audiences et de suivre nos fondements juridiques. Nous aurons beau crier sur tous les toits que nous avons un système extraordinaire, il faut pouvoir y affecter le personnel nécessaire à l'exécution de notre mandat. C'est comme lorsqu'on dit que nous allons remplir des missions de paix à l'étranger, mais que nous ne fournissons pas à nos soldats l'équipement dont ils ont besoin. À ceux qui défendent la paix dans le monde comme à ceux qui défendent nos frontières, nous devons fournir les ressources nécessaires à l'accomplissement de leur mandat.
J'ai parlé à quelques hauts fonctionnaires en région qui ont du mal à convaincre les mandarins d'Ottawa à venir sentir le pouls de l'immigration dans leurs bureaux locaux ou les missions étrangères. Il existe toujours à Ottawa un système bureaucratique de gestion descendante. La ministre peut faire beaucoup pour amener son ministère sur la voie du modernisme et le rendre plus responsable et plus attentif aux besoins. Ceux qui utilisent la théorie moderne de gestion, avec les ressources pertinentes, pourront ensuite répondre à la question et régler le problème de l'occasion qui fait le larron.
M. Mark Assad (secrétaire parlementaire de la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement mon collègue d'en face et je suis entièrement d'accord avec lui sur l'extrême importance d'un fondement juridique. Je crois que ce projet de loi fournira ce fondement. Le projet de loi ne sera jamais parfait, mais il constituera un grand pas en avant comparativement à ce que nous avons déjà.
L'autre point qu'il a fait valoir est vrai, car j'ai moi aussi connu des sentiments de frustration. Le ministère connaît une surcharge de travail et manque de personnel. J'espère qu'il disposera très bientôt des ressources dont il a besoin. Nous convenons tous que notre politique de l'immigration compte parmi les plus importantes réalisations de la présente législature. Elle nous permettra de nous assurer que nous avons le fondement juridique pour faire le plus rapidement possible les choses que nous voulons faire.
Il est vrai que toute organisation, publique ou privée, comporte une certaine bureaucratie. Plus ce projet de loi sera clair, plus nous l'améliorerons, et plus nous arriverons à supprimer certains des irritants que nous observons.
Je suis essentiellement d'accord avec ce que vous avancez. J'espère qu'au comité parlementaire nous pourrons supprimer les irritants un à un.
Le vice-président: Avant d'inviter le député à répondre, je rappellerai aux députés des deux côtés de la Chambre de bien vouloir s'adresser à la présidence et non directement l'un à l'autre.
M. Paul Forseth: Monsieur le Président, oui, mes observations visent à adopter une approche plus collégiale, une approche multipartite, pour élaborer un projet de loi qui répondra aux besoins du Canada.
Je dois féliciter la ministre d'avoir été présente à la Chambre, hier, pendant presque toute la durée du débat. Il y a eu des indications d'une volonté de collaborer et d'écouter les propositions de tous les partis. Beaucoup de personnes ont des intérêts dans cet enjeu. Qu'on le croie ou non, nous avons même ce que nous appelons l'industrie de l'immigration. Il y a toute une suite, il y a des professionnels qui gagnent leur vie avec l'industrie de l'immigration. Ils ont tous beaucoup à dire sur le projet de loi.
Lorsque nous adopterons le projet de loi à la deuxième lecture, il serait pratiquement impossible de l'amender, en raison de ce vote à la deuxième lecture. La capacité du comité d'apporter des amendements est très limitée. J'espère que les amendements de l'opposition seront acceptés et que la ministre, en s'appuyant sur d'autres témoignages, sera disposée à apporter ses propres amendements pour tenir compte de certaines failles que signaleront les divers intéressés.
L'autre question est le bureau de circonscription. Mon bureau ne devrait pas être un prolongement du ministère de l'Immigration, mais je compatis avec mes électeurs lorsqu'ils se présentent à mon bureau très bouleversés de ne pas pouvoir communiquer du tout, semble-t-il, avec le ministère de l'Immigration. Nous tentons de décourager l'intervention inutile de notre bureau. Nous tentons d'expliquer aux électeurs qu'ils devront attendre 18 mois ou plus avant même d'obtenir une réponse sur certains sujets. Nous pouvons aider certains électeurs à cet égard, mais la demande en provenance de la collectivité est énorme.
Le plus gros de mon travail porte sur les électeurs qui viennent à mon bureau pour exprimer toutes sortes de frustrations ou pour se plaindre du ministère de l'Immigration. Il ne devrait pas en être ainsi. Le ministère de l'Immigration devrait disposer de toutes les ressources nécessaires, afin que le député de la localité ne soit obligé de jouer un rôle d'ombudsman qu'en de rares occasions.
M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, j'écoutais le député parler d'immigration et de notre capacité de protéger nos frontières.
Beaucoup de ces gens quittent des pays du tiers monde par désespoir et pour des raisons économiques. Ce problème a une cause profonde, le commerce international. Il faudrait nous assurer que les accords commerciaux dans d'autres pays prévoient l'application de normes environnementales, de normes de travail et de normes de santé adéquates dans ces pays. Ainsi, nous pourrons améliorer ces normes et éviter que ces personnes ne deviennent des immigrants illégaux cherchant à fuir la pauvreté.
Le député ne reconnaît-il pas qu'une partie du problème est liée aux accords commerciaux et que nous devrions veiller à ce que les droits humains fondamentaux soient respectés, comme c'est le cas chez nous?
M. Paul Forseth: Monsieur le Président, je crois que le député adopte une approche négative, et je ne crois pas que la solution qu'il propose sera efficace.
La solution, pour le tiers monde, serait de lui assurer l'accès à une autoroute commerciale et économique qui lui permette de sortir de la pauvreté. Il ne serait plus nécessaire, alors, de dicter leur conduite aux pays du tiers monde, de leur accorder des prêts à la condition qu'ils se conforment à certaines normes. À mesure que ces pays pourront accéder à un certain niveau de vie et l'améliorer, nous pourrons résoudre graduellement les autres problèmes. Il faut adopter une approche d'ouverture plutôt qu'une approche paternaliste et négative.
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis très heureux de prendre la parole au sujet du projet de loi C-11.
Avant d'aborder mon discours, je tiens à déclarer que je suis moi-même un immigrant, comme beaucoup d'autres députés à la Chambre. Mes parents, mes frères et moi sommes arrivés au Canada en 1968. Mes parents avaient le choix entre de nombreux pays. Le fait d'émigrer fut pour eux un grand sacrifice, mais ils ont choisi de venir au Canada. Ils auraient pu opter pour les États-Unis, l'Australie ou quelques autres pays, mais ils ont choisi le Canada parce qu'ils voulaient donner à leurs fils un avenir meilleur. J'ai envers eux une dette que je ne pourrai jamais leur rembourser. Le Canada a offert à ma famille, à mes frères et à moi-même un avenir que nous n'aurions pu trouver nulle part ailleurs au monde. J'ai donc envers le Canada une dette que je ne pourrai jamais lui rembourser.
En 1993, j'ai adhéré au Parti réformiste, parce que je voulais faire beaucoup de choses. L'une des choses qui m'ont attiré vers ce parti est le pragmatisme avec lequel il abordait l'amélioration de notre système d'immigration. Ce parti est devenu l'Alliance canadienne, et son groupe parlementaire est celui qui a la plus grande diversité ethnique, ce qui reflète bien le fait qu'il préconise une politique de l'immigration solide et efficace. On ne le sait peut-être pas beaucoup, car on nous a accusés de choses bien différentes.
Mon parti est profondément convaincu que l'immigration est l'un des piliers du Canada. Les vagues d'immigrants qui se sont succédé au fil des ans ont fait en sorte que le Canada soit un chef de file dans une foule de domaines. Ces immigrants ont contribué à la société canadienne d'innombrables façons, et une seule intervention ne suffirait pas pour les énumérer. Nous profitons tous de cet apport.
Malheureusement, au fil des ans, notre système d'immigration s'est dégradé, et les Canadiens n'ont plus le système qu'ils méritent. Il ne donne pas aux candidats à l'immigration les meilleures occasions de venir chez nous.
Nous croyons en un système d'immigration juste et efficace qui permet aux réfugiés authentiques de venir chez nous, qui permet une réunification véritable et rapide des familles et qui met l'accent sur la catégorie des immigrants indépendants, ceux qui ont bâti le Canada.
Voilà les questions que je vais aborder maintenant et dont mes collègues ont déjà traité. Le député de Dauphin—Swan River a présenté au gouvernement des options constructives et efficaces pour que le projet de loi C-11 réponde à nos demandes et à celles de la population canadienne.
Je veux tout d'abord parler de la question des réfugiés. Dans ma circonscription, Esquimalt—Juan de Fuca, nous avons vu des réfugiés arriver de la province du Fujian l'été dernier. Cela a été une grosse affaire pour nous tous.
Je voudrais proposer quelques mesures pour améliorer le système. On pourrait d'abord tenter d'établir une distinction entre les vrais et les faux réfugiés. La plupart des faux réfugiés qui viennent au Canada arrivent par avion.
On estime leur nombre à environ 30 000. Ce sont des réfugiés économiques, et qui pourrait les blâmer de venir au Canada pour améliorer leur sort? Beaucoup d'entre nous ferions la même chose si nous étions à leur place. Cependant, nous devons établir une distinction entre les vrais et les faux réfugiés. Nous pourrions nous assurer que les personnes qui réclament le statut de réfugiés peuvent établir leur identité. Une identification rapide à l'arrivée au Canada est importante.
Le projet de loi prévoit des audiences à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié jusqu'à 90 jours après leur arrivée. C'est trop long. Les gens méritent d'avoir rapidement une audience et une identification rapide afin que nous puissions déterminer s'ils sont de vrais ou de faux réfugiés.
Il y a également la catégorie des indépendants. Il faut insister davantage sur cet aspect. Il y a peu de temps, je lisais une liste de professions en demande au Canada. C'était renversant de constater que cette liste n'a pas été mise à jour depuis longtemps. La profession d'infirmière n'y figure même. Pourtant, le Canada a sérieusement besoin d'infirmières. Nous devons mettre à jour la liste des professions et des compétences requises pour créer ce que la ministre veut avoir et ce que nous voulons tous, à savoir un ensemble diversifié de compétences dans notre économie.
Les réfugiés devraient être évalués pour cela d'une manière efficace, et les personnes disposant des compétences recherchées devraient être invitées à venir au Canada. Toutefois, il faut commencer par mettre à jour la liste des compétences et faire en sorte qu'elle reflète bien nos besoins. La liste n'a pas été mise à jour depuis fort longtemps. J'espère que le secrétaire parlementaire en fera part à la ministre. Nous en avons besoin. Le pays en a besoin. Il faudrait que ce soit fait le plus rapidement possible pour que nous puissions avoir un meilleur système d'immigration.
En ce qui concerne la Charte des droits et libertés, quiconque entre au Canada jouit de sa protection. Tout immigrant jouit de la même protection que n'importe quel citoyen canadien. Aucun autre pays n'offre cette protection. Ce que nous devrions faire, c'est protéger tous les arrivants en vertu des mêmes normes de base qui sont utilisées ailleurs dans le monde, soit les droits humains garantis par la charte des Nations Unies. Telles sont les normes de bases qui devraient s'appliquer à tous ceux qui viennent au Canada, et surtout les immigrants.
Par ailleurs, le trafic d'êtres humains constitue un problème international. Il est lié aux gangs criminels internationaux. Ces gangs sont composés de criminels, et nous nous réjouissons que la ministre ait fait en sorte que le projet de loi prévoie des peines supplémentaires à cet égard. Des amendes d'un million de dollars sont prévues pour quiconque profite de la misère humaine causée par le trafic d'êtres humains. Les gens qui participent à ces activités sont des criminels membres de groupes organisés. Ils profitent de la misère humaine, et nous devons travailler avec nos partenaires là-dessus.
J'ai une proposition à faire au gouvernement. Le Sommet des Amériques se tiendra du 20 au 22 avril à Québec. Étant donné que ce problème est international, il devrait être soulevé durant le sommet. Abordons le problème du trafic d'êtres humains à l'échelle des Amériques. Travaillons avec nos partenaires, avec les bureaux judiciaires internationaux comme l'Interpol, et mettons le SCRS et la GRC à contribution. Travaillons avec les autres pays afin d'enrayer ce problème à la source. Il faudra adopter une approche multinationale pour venir à bout de ces individus. Nous devrions soulever la question lors du Sommet des Amériques. C'est un bon point de départ pour sensibiliser les autres pays.
Mon collègue du NPD a soulevé une excellente question sur l'accueil de nombreux réfugiés voulant améliorer leur situation économique. Ces personnes ne viendraient pas dans notre pays si elles vivaient dans un pays où l'économie est forte et stable.
Je viens de rentrer d'un voyage en Colombie avec le secrétaire d'État, qui a fait un excellent travail là-bas pour représenter le Canada dans le dossier des tarifs et du libre-échange. Il est ahurissant que, d'une part, nous prétendions vouloir améliorer la situation de bon nombre de ces pays étrangers, alors que, d'autre part, nous imposons des tarifs et nous érigeons des obstacles qui empêchent ces pays d'être autonomes. Nous les empêchons d'avoir une économie forte, mais nous voulons que la nôtre le soit.
Si nous voulons vraiment aider les pays en développement qui sont pauvres à améliorer leur situation, nous devrions éliminer les obstacles au commerce, dans leur intérêt et le nôtre. Nous devrions supprimer les tarifs. Nous devrions libéraliser davantage le commerce. Nous devrions abroger les lois de double imposition qui prévoient qu'une entreprise désireuse d'investir à l'étranger doit être imposée non seulement dans son pays d'origine, mais aussi dans celui où elle mène ses activités.
C'est absurde. Cela ne devrait pas être permis. Si nous éliminions ces obstacles au commerce, nous aurions moins de réfugiés économiques. Les pays en développement seraient capables d'améliorer le sort de leurs habitants et verraient leur taux d'émigration diminuer. Ils seraient capables de se suffire à eux-mêmes et de développer une économie forte, ce qui assurerait la sécurité régionale et internationale, si on le leur permettait.
Au Sommet des Amériques qui se tiendra du 20 au 22 avril, faisons preuve de leadership. Que le Canada défende cet argument à ce sommet. Qu'on parle de la libéralisation des échanges. Qu'on parle de la création d'une zone de libre-échange transhémisphérique. Qu'on élimine les obstacles au commerce et qu'on donne à ces pays la possibilité d'acquérir leur indépendance économique. C'est la meilleure chose que nous puissions faire pour faire diminuer le nombre de réfugiés économiques qui veulent venir dans notre pays.
Les questions de gestion des affaires publiques et de corruption sont d'autres questions d'ordre international. Nous devons travailler avec nos partenaires pour régler le problème de la corruption. Mon collègue de l'Alberta fait du travail très novateur dans ce domaine. Il travaille avec des ministériels et des députés d'autres partis à l'élaboration d'un plan intégré pour lutter contre la corruption à l'échelle internationale. Nous pourrions être des chefs de file en ce qui a trait aux lois visant à assurer le bon gouvernement et à empêcher la corruption, ce qui contribuerait à améliorer la sécurité, y compris la sécurité économique, dans le monde entier.
Sur la question de l'ACDI et du développement, nous devrions mettre l'accent sur les soins de santé primaires et l'éducation dans les pays en développement, et accorder plus d'importance au microfinancement, c'est-à-dire les petits prêts qui permettent à des individus et à des petits groupes de faire du commerce pour assurer une certaine sécurité dans les régions pauvres.
Mes collègues ont soulevé à maintes reprises la question des criminels. Pourquoi devraient-ils être autorisés à entrer au pays? Nous avons dernièrement entendu parler à maintes reprises de criminels ayant franchi notre frontière en raison de notre incapacité totale d'en assurer la protection et d'établir une distinction entre les criminels et les vrais réfugiés. Nous ne collaborons pas avec Interpol. Il y a un manque de communication entre le SCRS, la GRC et Interpol. Par conséquent, des criminels sont autorisés à entrer dans notre pays.
Les États-Unis ont reproché à juste titre au Canada son incapacité de resserrer la surveillance de ses frontières. Par conséquent, bon nombre de ces criminels sont passés aux États-Unis. Ils disent au Canada de mettre de l'ordre dans ses affaires et de resserrer la surveillance de notre frontière, et tous en bénéficieront.
Lorsque des personnes recherchées par Interpol sont interceptées à notre frontière, nous devrions les mettre en état d'arrestation, les jeter en prison et les retourner dans leur pays d'origine où elles peuvent faire l'objet d'un procès équitable. Le Canada ne peut et ne doit pas devenir un refuge pour les criminels, comme c'est le cas à l'heure actuelle.
En ce qui concerne les tests de santé, la liste des maladies que nous cherchons à dépister a 40 ans. Il incombe au ministère d'assurer la santé et le bien-être de tous les Canadiens et des personnes qui souhaitent entrer au Canada.
Les immigrants et les citoyens canadiens ne veulent pas que des maladies se répandent dans le pays. Veillons à ce que les personnes qui désirent immigrer au Canada subissent des tests dans leur pays d'origine et à ce que soit mise à jour la liste des maladies.
Je porte également à l'attention du gouvernement une autre question ayant déjà été abordée, soit la nécessité d'écouter les fonctionnaires pleins d'ardeur au travail du ministère. Ils sont sur la ligne de front et subissent tout le poids des personnes qui veulent entrer au Canada, en plus d'interagir avec ces dernières. Ils doivent composer avec les volontés, les désirs et les lois du Canada. Ils sont entre l'arbre et l'écorce. Ces employés trouvent cela très difficile. L'avantage, c'est qu'ils constituent une source de renseignements constructifs.
Cette question a déjà été soulevée à la Chambre. Je demande au secrétaire d'État et à la ministre d'écouter ces employés. Ils ne devraient pas seulement être à l'écoute des ambassadeurs, mais aussi, et dans un climat serein, du personnel des ambassades qui fait face à ces problèmes.
Il a d'excellentes idées sur la façon de simplifier le système. Il peut fournir des renseignements de manière sûre à des personnes qui veulent savoir comment émigrer au Canada. Ce sont là des renseignements de base. Je sais qu'il existe de très bonnes raisons pour lesquelles ils ne sont pas fournis, mais parce qu'ils ne le sont pas les bureaux de nombreux députés se retrouvent avec une énorme charge de travail.
Cela peut être évité en simplifiant le système afin de s'assurer que nous écoutons nos employés qui sont aux premières lignes. On pourrait leur fournir une boîte à suggestions qui leur permette de rester anonymes. Ces suggestions pourraient être acheminées directement à la ministre par l'entremise des voies diplomatiques habituelles. De simples solutions pourraient ainsi être proposées afin de rendre le système d'immigration plus efficace. Cette efficacité accrue faciliterait la vie des députés et le travail de nos employés dévoués.
Le Canada est une terre d'avenir. Nous avons l'obligation de collaborer avec nos partenaires afin de faire en sorte que nous détenions un système d'immigration davantage axé sur les immigrants indépendants pour que nous possédions un vrai système de détermination du statut de réfugié. En outre, nous pourrions ainsi assurer l'équité à tous.
Un problème demeure, et à mon avis cela est tout à fait injuste pour les personnes qui immigrent au Canada; on leur impose une période durant laquelle ils ne peuvent travailler. Pourquoi ne pas laisser les immigrants travailler dès leur arrivée? Le meilleur programme social que nous puissions offrir à quelqu'un est un emploi. Ce sont des gens qui veulent travailler, qui sont prêts à travailler fort et qui veulent apporter une contribution au pays auquel ils souhaitent appartenir. Qu'on les laisse faire des demandes d'emploi. Qu'on les laisse travailler.
Si nous sommes prêts à accueillir de véritables réfugiés, nous pourrions aller les chercher par l'entremise d'Amnistie Internationale et d'autres instances qui fournissent des renseignements pertinents et précis sur les gens qui sont vraiment persécutés et dont la vie est en danger et qui souhaitent quitter leur pays. Nous pourrions poser un geste humanitaire en leur fournissant un asile sûr au Canada. Nous pourrions aller chercher ces personnes et les accueillir au nom de la protection des réfugiés. Ce faisant, nous sauverions des vies.
Nous pourrions aussi être une courroie de transmission efficace en améliorant le sort de certains pays. J'examine des questions telles que les tarifs et le libre-échange. Nous devons aussi nous entendre avec l'Organisation mondiale du commerce. Nombre de gens et de groupes se plaignent de l'OMC et s'y opposent farouchement. Leurs propos ne manquent pas d'intérêt. Parmi les opposants aux négociations de Seattle, au forum de Davos et à d'autres sommets, il y en a qui se plaignent de ceux qui défendent leurs propres intérêts. Ce sont eux qui parlent de protection environnementale. Ils parlent de normes de sécurité pour les travailleurs. Ils parlent de codes du travail et des moyens d'améliorer le sort des populations des pays en développement. Si beaucoup d'individus se plaignent, c'est en partie à cause du manque de communication et du manque de transparence.
Il y a quelques jours, nous avons parlé de ce comité avec un groupe du Bundestag, la chambre basse du Parlement allemand. Les membres du groupe nous ont demandé pourquoi les gens se plaignaient de l'OMC et d'autres organisations. Ils ont demandé si le libre-échange était une mauvaise chose. Non, pas du tout. Le libre échange est une bonne chose, de même que le commerce équitable. Le problème vient du manque de transparence.
Mon parti a appuyé une mesure proposée par le Bloc, qui aurait permis de s'assurer que les accords de libre-échange soient soumis à la Chambre pour un examen transparent et une analyse publique des dispositions prévues dans ces accords. J'irai plus loin. Je dirai qu'à mon avis, le gouvernement peut faire beaucoup pour apaiser et réduire l'opposition à ses efforts en vue d'améliorer le libre-échange, des efforts qu'appuie l'Alliance canadienne, par exemple rendre public ce qui se passe à huis clos. Il pourrait écouter leurs remarques et en tenir compte. Le gouvernement pourrait faire connaître publiquement sa position dans ces négociations.
Les plaintes seront nettement moins nombreuses si nous agissons de façon publique et transparente. Finalement, les gens qui se plaignent sauront que ceux qui travaillent à huis clos, qu'il s'agisse des négociations de l'OMC, de l'AMI ou des entretiens de Davos, poursuivent tous un programme commun.
En conclusion, j'espère que le gouvernement tiendra compte des suggestions constructives que lui ont faites les membres des divers partis politiques, qu'il écoutera celles de ses propres membres, et qu'il agira en conséquence. Le projet de loi n'est pas satisfaisant. Des solutions constructives ont été proposées pour l'élaboration d'une politique d'immigration solide et efficace pour tous les Canadiens.
M. Joseph Volpe (Eglinton—Lawrence, Lib.): Monsieur le Président, après avoir écouté cette intervention, je me rappelle des questions qui se posent. Croyons-nous vraiment dans l'immigration? Pensons-nous que cela fait partie intégrante de notre politique intérieure et étrangère? Avons-nous les bonnes façons d'aborder la question de l'immigration?
Notre vis-à-vis a parlé de façon générique, générale, de l'importance de l'immigration et de la façon dont les pays peuvent aborder cette question. Fondamentalement, il y a deux solutions. Ou nous pensons qu'il s'agit d'un problème international et nous investissons beaucoup de ressources, au niveau national, dans le développement international, ou nous admettons au Canada des gens par générosité ou pour d'autres raisons valables et altruistes.
Je ne pense pas que ce projet de loi réponde à cela. Ce devrait faire l'objet d'un autre débat peut-être dans cette enceinte ou ailleurs. On parle dans ce projet de loi des procédures à suivre une fois qu'une décision a été prise d'ouvrir nos portes à d'autres. Nous avons vraisemblablement fait cela. Statistiquement, nous sommes relativement généreux pour ce qui est d'accueillir des gens.
En partie, c'est une générosité intéressée. Les manchettes de certains de nos journaux nous disent aujourd'hui que nous nous approchons d'une pénurie d'un million de travailleurs qualifiés. Que faisons-nous? Où obtenons-nous ces travailleurs qualifiés? Nous irons les prendre dans d'autres pays car au niveau national, nous n'avons pas réussi à résoudre ce problème. Cependant, lorsque nous agissons ainsi, lorsque nous invitons des gens à venir au Canada contribuer à l'essor de notre pays, nous avons alors une procédure particulière permettant de déterminer l'admissibilité des gens.
C'est l'objectif de ce projet de loi. Les députés de l'opposition n'en ont pas parlé. Je voudrais poser une question bien précise à mon vis-à-vis. Voudrait-il se pencher sur la question de la criminalité? À ma connaissance, personne ne veut accueillir des criminels au Canada. Nous ne voulons pas d'eux ici. Personne n'en veut nulle part.
Les criminels sont par définition des gens qui échappent à toute surveillance et à la vigilance des autorités légitimes. Autrement dit, il s'agit de gens qui vivent dans la clandestinité en tout temps et cherchent des façons de contourner le système.
L'une des choses que nous faisons ici au Canada, c'est d'inviter les familles à venir s'installer chez nous. Cela me gêne un peu et peut-être le député pourra-t-il nous dire ce qu'il en pense. Ces gens amènent leurs enfants, nouveaux-nés ou très jeunes. Si l'on s'en remet à notre définition du mot enfant et à l'interprétation que nous en faisons, il s'agit d'enfants de sept à quatorze ans.
Ces enfants grandissent chez nous, mais pour une raison quelconque, ils ne deviennent jamais citoyens canadiens. À l'approche de la vingtaine, ils ont des ennuis avec les autorités et se retrouvent en prison. Dès qu'ils ont purgé leur peine et payé leur dette, ils sont libérés et font immédiatement face aux agents d'exécution de la GRC qui les renvoient dans leur pays d'origine.
Le député d'en face a très bien défini le concept de la justice mondiale, des droits de la personne et des droits des particuliers partout au monde, et je me demande ce qu'il pense de cette question. Cela arrive beaucoup plus souvent qu'on veut bien l'admettre au Canada. Nous expulsons des criminels que nous avons nous-mêmes entraînés. Le député pourrait-il nous préciser son opinion à ce sujet?
M. Keith Martin: Monsieur le Président, je pensais avoir été précis, au cours des 20 dernières minutes, sur plusieurs enjeux. Le député a posé toute une série de questions et a abordé un certain nombre d'enjeux.
Au début, il a dit qu'il fallait admettre les immigrants de la catégorie des immigrants indépendants. Nous appuyons cela fortement. Nous avons besoin d'un plus grand nombre d'entre eux car, vu les changements démographiques qui s'opèrent dans notre pays, nous ne pouvons pas espérer disposer du nombre de travailleurs qualifiés dont notre économie a besoin.
J'ajoute que nous n'allons pas priver d'autres pays de leurs ressortissants. Nous autorisons des immigrants à venir au Canada et des Canadiens vont s'installer dans d'autres pays.
Ce qu'il nous faut, c'est un moyen efficace pour assurer que ces gens seront autorisés à entrer au Canada. À l'heure actuelle, beaucoup de travailleurs qualifiés qui désirent venir au Canada n'y sont pas autorisés. C'est consternant. J'ai mentionné un exemple précis, celui des infirmières, dont la profession ne figure même pas dans notre liste de professions et de compétences nécessaires. Comme je l'ai dit au gouvernement au cours de mon intervention, il faut qu'il mette à jour cette liste de compétences, car elle ne reflète pas les besoins de notre économie.
En ce qui concerne la criminalité, les personnes qui ont commis des crimes au Canada devraient être renvoyées dans leur pays d'origine.
Le Canada doit collaborer, par l'entremise de la GRC et du SCRS, avec Interpol, aux points d'entrée du pays, pour que les personnes recherchées par Interpol soient appréhendées et renvoyées dans le pays où elles sont recherchées. Nous n'agissons pas ainsi assez fréquemment. Nous devrions le faire.
M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, comme mon collègue, je suis moi-même arrivé des Pays-Bas en 1956, avec ma famille. Nous avons quitté notre pays pour des raisons purement économiques. Notre venue au Canada a été pour nous une source de stimulation extraordinaire et ce pays a permis à ma famille de connaître une existence merveilleuse. À l'instar du député de l'île de Vancouver, je voudrais moi aussi remercier le Canada pour la chance qu'il nous a donnée.
Le député voit dans les échanges commerciaux avec les pays du tiers monde et d'autres pays un moyen d'améliorer les conditions qui y prévalent. Le commerce est effectivement le moyen d'y arriver. Cependant, avant de conclure des ententes commerciales, ne devrions-nous pas préalablement négocier les normes concernant l'environnement, les droits de la personne et le travail?
Mon collègue a mentionné qu'il est allé en Colombie. Il doit savoir ce qui se passe dans les pays du tiers monde, y compris la Colombie. Au cours des 16 derniers mois, 192 syndicalistes y ont été assassinés. Il le sait.
Le Nouveau Parti démocratique l'a dit et redit. Si nous voulons conclure des accords commerciaux à la grandeur de notre hémisphère, il faut que les droits syndicaux, les droits des travailleurs et les normes environnementales soient protégés. Les gens pourront ainsi se construire un existence, vivre dans leurs pays et participer au système économique mondial.
Le député ne croit-il pas que ce serait la façon de faire?
M. Keith Martin: Monsieur le Président, j'invite le député d'en face à traverser le parquet et à joindre les rangs de l'Alliance canadienne. Il a parlé avec éloquence des choses mêmes que défend mon parti. Il a parlé du libre-échange, d'échanges commerciaux équitables, de normes environnementales, des lois du travail, de la protection des travailleurs. Je suis convaincu que le député travaillerait avec nous pour faire en sorte que les accords commerciaux dont la Chambre pourrait être saisie respectent toutes ces normes, comme doivent précisément le faire le libre-échange et les échanges commerciaux équitables.
Le problème est que beaucoup de ces accords ne communiquent pas ces notions au public. Comme je le disais dans mon intervention, le gouvernement n'attire pas dans la discussion et dans les débats des personnes qui ont le même genre d'engagements que le député et que des députés de tous les autres partis.
M. Janko Peric (Cambridge, Lib.): Monsieur le Président, le député allianciste m'a impressionné. À mon arrivée au Canada en 1968, j'avais 19 ans. Je suis venu seul. J'ai choisi le Canada à cause de ce qu'il est et de ce qu'il sera.
Le député a invité le Canada à faire preuve de leadership, lorsque les pays des Amériques se réuniront à Québec. Il a proposé un contrôle plus serré aux frontières. Du même souffle, il a proposé un commerce plus libre et équitable. Je suis d'accord avec lui, mais quelque chose me tarabuste.
Nous avons reçu 225 000 nouveaux immigrants l'an dernier au Canada. Le député pourrait-il nous parler un peu du pourcentage de ceux qui sont entrés illégalement au Canada? Je lui rappelle qu'en Europe, surtout dans les pays membres de l'Union européenne, on circule plus librement. Plus de personnes quittent leur pays pour s'installer en Europe de l'Ouest que nous n'en recevons au Canada.
M. Keith Martin: Monsieur le Président, selon les estimations actuelles, quelque 30 000 personnes entrent au Canada comme faux réfugiés. Plus de 95 p. 100 arrivent par avion et un grand nombre de ces personnes ont détruit leurs papiers au point de départ et entrent au Canada sans la moindre pièce d'identité. C'est pourquoi j'ai proposé dans mon intervention que le ministère exige que toute personne qui entre au Canada et revendique le statut de réfugié soit tenue de présenter des papiers. Bien sûr, les circonstances ne le permettent pas toujours, mais c'est une exigence qu'il faudrait mettre en place.
[Français]
M. Antoine Dubé (Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais intervenir sur le projet de loi C-11 qui traite de l'immigration. C'est un sujet extrêmement important, tel que perçu par les différents partis, bien qu'on voit des différences dans les discours faits jusqu'à présent.
Je veux joindre ma voix à celle de notre porte-parole en matière d'immigration, la députée de Laval-Centre. Je ne voudrais pas reprendre son argumentation, parce que le discours qu'elle a prononcé hier était, à mon sens, un excellent discours.
C'est à titre de membre du Sous-comité sur les droits de la personne que j'aimerais prendre la parole. Ce sous-comité n'a pas encore commencé ses travaux, mais nous nous intéressons à ce problème. On comprendra donc ma sensibilité à ce sujet, surtout au sort réservé aux réfugiés.
Les réfugiés sont des gens qui ont quitté involontairement leur pays puisqu'ils n'avaient pas d'autre choix dans certaines circonstances. Souvent, ils le font dans des situations assez dramatiques. Pour avoir lu sur le sujet et avoir lu les journaux, au moins depuis que je suis député, on voit qu'il y a certains problèmes.
Je veux réagir aux propos du député qui m'a précédé qui disait que des gens ne sont même pas capables de produire des documents pour prouver leur identité. Dans certaines situations, lorsque les réfugiés quittent leur pays, ils le font en catastrophe.
Lorsqu'ils sont poursuivis ou qu'ils se sentent poursuivis, ils ne sont pas toujours en situation de prouver leur identité ou de présenter quelque document que ce soit. Il faut être bien conscients de ces situations. Lorsque quelqu'un vous poursuit alors qu'il est armé, vous n'avez pas toujours le temps de retourner à votre domicile pour aller chercher les documents nécessaires.
J'attire l'attention là-dessus, parce que pas plus tard qu'hier, je participais à une rencontre où, justement, des gens soulignaient les difficultés des personnes qui sont actuellement au Canada, qui sont reconnues comme réfugiés, mais qui n'ont pas encore de documents provenant de leur ancien pays pour prouver leur identité.
C'est là une situation assez inusitée au sujet de laquelle il vaut la peine d'entretenir la Chambre. Il y a des gens qui sont ici depuis une dizaine d'années, ils ont le statut de réfugié, mais ils n'ont pas de documents pour le prouver. Cela fait en sorte qu'ils ne peuvent évidemment pas retourner dans leur propre pays, parce qu'ils y étaient persécutés ou s'y sentaient persécutés. Alors, ils ne peuvent pas y retourner. Ils ne peuvent évidemment pas visiter leurs familles qui sont restées là, souvent. Ils ne peuvent pas non plus recevoir de gens de leurs familles, ici, qui viennent de ces pays. Dans certains cas, ils ne peuvent tout simplement pas voyager à l'étranger, même dans un pays qui n'a rien à voir avec leur pays d'origine.
Il y a également la perte de droits dont un citoyen canadien ou québécois bénéficie. Par exemple, ils ont plus de difficulté lorsqu'ils veulent se trouver un travail, il y a aussi le permis de travail—c'est extrêmement compliqué—et ils n'ont pas droit à un système de prêts et bourses pour les jeunes qui veulent aller à l'université. La personne que je mentionnais et avec laquelle j'ai discuté, hier, était une femme qui avait des enfants en âge d'aller à l'université, mais qui, étant sans document, était incapable d'avoir droit à des systèmes de prêts ou de bourses pour ses enfants qui étaient d'âge universitaire, à des conditions dont tout Canadien ou tout Québécois pourrait normalement bénéficier.
Cela existe, malgré le fait que, dans la Convention sur les réfugiés des Nations Unies de 1951, il est exigé des pays acceptant des réfugiés dans ces conditions particulières qu'ils émettent un document qui fait en sorte qu'ils puissent avoir certains droits, retrouver certains droits. Mais ce n'est pas le cas.
Souvent, le premier ministre du Canada dit qu'on vit dans le «plus meilleur pays au monde». Je me permets d'en douter, en tout cas en cette matière, lorsque le gouvernement actuel n'est pas capable de respecter la Convention internationale des Nations Unies en matière d'immigration depuis 1951.
J'ai souvent déploré, à la Chambre, pour d'autres sujets, à quoi il sert de faire des lois ou des règlements s'ils ne sont pas appliqués. Mais dans cas-ci, c'est un traité, si vous voulez, c'est une Convention internationale. Le Canada n'applique pas les règles que cette Convention exige.
J'invite les membres du comité, dont ma collègue de Laval-Centre—elle m'a assuré qu'elle reparlerait de ce type de cas—à faire en sorte que le Canada s'assure de respecter les traités internationaux. Avant de faire de nouvelles lois, ou encore en faisant de nouvelles lois—au moment même où on présente une nouvelle loi comme celle-ci qui vient modifier considérablement le régime—il faudrait s'y pencher.
Il y a un deuxième aspect. Je souligne que parfois—pas ce matin, pas aujourd'hui—certaines personnes parlent des souverainistes québécois comme étant un peu xénophobes. Je ne l'ai pas entendu ce matin; ce n'est pas cela que je relate. Toutefois, je voudrais témoigner à l'effet que les Québécois et les Québécoises sont des personnes très accueillantes envers les réfugiés. À toute époque de notre histoire, nous avons accueilli très correctement les réfugiés et encore dernièrement, lors des récentes vagues.
Pour le prouver, hier, je lisais—c'est une coïncidence—Pierre Bourgault dans le Journal de Montréal. C'est un souverainiste très convaincu et très convainquant qui ne se cache pas de l'être. Il faisait la réflexion suivante. Si on durcit trop les règles concernant les réfugiés, si on a en quelque sorte une attitude de fermeture de portes à toute épreuve, les pays comme le Canada et les pays occidentaux ne risquent-ils pas de subir un effet pervers, c'est-à-dire l'augmentation de la clandestinité? Finalement, les gens voulant se sauver—qu'on me pardonne l'expression—de leur pays n'auraient d'autre recours que d'utiliser des services de professionnels. Qui dit professionnels, dit organisations criminelles et ainsi de suite. Cela aurait pour résultat le contraire du but visé.
Comme nous le savons, et cela arrive dans toute loi, il faut toujours se méfier de ses effets pervers. M. Bourgault, à juste titre, soulignait ce danger. Par ailleurs, lorsque nous lisons les notes d'information présentés au moment de la présentation du projet de loi par la ministre, nous ne pouvons qu'être étonnés de la dureté de ses propos. Elle parle de fermer les portes, de rendre plus dur ce projet de loi pour contrer la perception populaire dans certains milieux, à savoir que le Canada serait une porte d'entrée de criminels plus importante qu'ailleurs.
Je ne suis pas en train de mettre en doute qu'il y ait effectivement des criminels qui réussissent à passer à travers le filtre de la Commission de l'immigration et qui sont peut-être ici. Concernant ce problème, je pense qu'il faut prévoir des dispositions dans le projet de loi qui ferait en sorte que lorsque nous nous en rendons compte, il y ait une clause de renvoi. C'est assez clair qu'il ne faut pas encourager ce genre de choses. En même temps, si nous mettons trop l'accent sur cet aspect du problème et que nous voulions trop fermer la porte et durcir toutes les conditions, nous pouvons obtenir un résultat contraire à celui que nous visons et interdire et empêcher l'entrée au pays de vrais réfugiés dont la vie est menacée, soit à cause de leurs convictions politiques ou religieuses. Des gens qui sont menacés dans tous les droits généralement reconnus par la Charte canadienne des droits de la personne, celle du Québec et également celle des Nations Unies.
Je voulais ajouter mes propos à ceux que ma collègue exprimait hier. Je m'inquiète d'un autre aspect du projet de loi. Comme tous les députés, je reçois beaucoup de gens dans mon bureau au sujet de l'immigration. Nous ne voyons peut-être qu'un aspect du problème, soit les cas les plus problématiques. Après bientôt huit ans d'expérience, je me rends finalement compte que, selon les cas qui sont jugés par un commissaire ou par toute autre personne, les interprétations diffèrent. Je ne dis pas que c'est nécessairement le cas de tous les gens en place actuellement, mais nous pouvons, à l'examen des nominations passées, nous poser parfois certaines questions quant à la nécessité de continuer à faire ces nominations par le biais politique.
À mon avis, s'il est un domaine qui exige beaucoup de compétences en termes d'efficacité, d'impartialité et de formation, parce que c'est très juridique et que c'est une question de droit, c'est celui-là. Nous devrions à l'avenir faire attention afin que ces nominations ne soient surtout pas politiques. J'ajoute ces propos à ceux de ma collègue et je suis persuadé qu'elle les partage.
Il faudrait donc que ce projet de loi se penche sur les mécanismes de nomination. Il faut un mécanisme plus serré qui donne au moins l'impression que c'est un système très impartial, très juste et plus efficace, surtout quand nous voyons le nombre de demandes qui sont laissées en plan.
À titre d'exemple, on me dit que 400 000 personnes dans le monde sont en attente d'une réponse quant à leur entrée ou à leur acceptation au Canada. Je ne parle pas juste des réfugiés, mais de tout l'aspect immigration, évidemment.
Il y a des délais considérables pour l'obtention d'une réponse. Je m'interroge encore à savoir pourquoi le Canada—et dans le projet de loi, ce n'est pas encore assez clair—agit ainsi, malgré qu'il ait reçu un avertissement de la Commission sur les réfugiés à l'effet qu'on ne devrait pas emprisonner des personnes d'âge mineur, des enfants et des adolescents, automatiquement ou encore en grand nombre comme actuellement, lorsqu'il s'agit de réfugiés qui arrivent sans papiers.
Nous sommes sensibles au travail exécuté par des enfants dans certains pays. Lorsque ces derniers arrivent au Canada, dans «le plus meilleur pays du monde»—selon les mots du premier ministre et selon plusieurs porte-parole du parti d'en face—ils font face à une possibilité d'emprisonnement, juste parce qu'ils sont d'âge mineur, et ce, parce que nous ne sommes pas tout à fait prêts à les accueillir, que l'on n'a pas tous les documents et que nous n'avons pas les personnes-ressources en nombre suffisant pour examiner rapidement leurs dossiers.
Ce sont les points que je voulais soulever. Je ne veux pas prolonger inutilement mon discours. J'aimerais conclure en rappelant que nous nous étonnons de l'attitude ou du discours dur fait au moment de la présentation de ce projet de loi, alors qu'il s'agit d'un sujet d'importance, tant pour le Canada que pour le Québec.
Bien que les députés du Bloc québécois soient d'accord avec le principe du projet de loi, nous considérons que les pouvoirs acquis par le Québec en matière d'immigration ne sont pas définis assez clairement. C'est là où le bât blesse.
On sait que le Québec a conclu une entente avec le gouvernement fédéral qui lui permet de sélectionner ses immigrants, ceux qu'on appelle les immigrants économiques. Par contre, l'aspect qui traite des réfugiés est actuellement laissé entièrement au gouvernement fédéral.
Je le répète encore, bien que nous soyons très ouverts à des cas de ce genre, ne serait-ce que par humanisme, et très conscients de ce qui se passe dans certains pays et dans certaines circonstances, nous, du Bloc québécois, considérons qu'il serait bon de préciser et de définir les pouvoirs acquis par le Québec en vertu de l'Entente sur l'immigration.
[Traduction]
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Alliance canadienne): Madame la Présidente, je remercie le député de Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière de ses observations très utiles. Les problèmes qu'il a évoqués présentent un défi pour le comité permanent et pour tous les Canadiens.
La députée de Vancouver-Est a signalé ce matin qu'il y a apparemment 25 soi-disant migrants qui n'ont aucun statut et sont par conséquent détenus sur la côte ouest. Les Canadiens ne sont pas d'accord pour que nous détenions longtemps des migrants parce qu'il nous manque des renseignements permettant d'établir leur identité. Nous savons que les personnes qui montent à bord des avions à destination du Canada sont obligées de produire leurs papiers d'identité. C'est aux transporteurs qu'il incombe de l'exiger.
Je vais citer l'énoncé de mission de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. La mission de la CISR, qu'elle remplit au nom de tous les Canadiens, «consiste à rendre, avec efficacité et équité, des décisions éclairées sur des questions concernant les immigrants et les réfugiés, conformément à la loi». Il faudrait peut-être accroître le rôle de la Commission.
Le député trouve-t-il nécessaire de changer les moyens actuellement en place pour qu'ils puissent servir à tâcher de découvrir d'où viennent les migrants et qui ils sont?
[Français]
M. Antoine Dubé: Madame la Présidente, je ne suis pas un spécialiste en matière d'immigration. Mes propos sont influencés plutôt par mon travail de député. Je suis ici depuis huit ans. Ce n'est pas mon premier mandat, comme je pense que c'est le cas pour la plupart des députés ici à la Chambre. Comme députés, nous sommes évidemment exposés à ceux qui ont des problèmes.
Mais la plupart du temps, ceux qui viennent voir leur député ne sont pas des criminels. Ce sont des gens qui sont déjà installés au Canada et qui veulent faire venir les membres de leur famille au pays. Alors, leur souci, c'est de réunir leur famille. Souvent, comme députés, on a la chance de pouvoir vérifier par l'intermédiaire de leurs voisins ou par d'autres personnes vivant dans le milieu comment se comportent ces personnes. Dans la majorité des cas, ce sont des gens très corrects.
Je ne dis pas au député que je suis un expert en matière de règles d'immigration et je n'aspire pas non plus à être commissaire à l'immigration. Je fais confiance aux membres du Comité, qui appartiennent à tous les partis, et en particulier à ma collègue de Laval-Centre pour que, séance tenante, ces aspects-là soient étudiés en Comité.
Je remercie le député de me donner la chance d'aborder un point que j'avais oublié dans mon discours, soit la possibilité d'entendre des témoins. Comme c'est un projet de loi important, il y a toutes sortes de groupes dans la société qui ont des opinions. Il y a des gens qui sont spécialisés justement dans ce domaine. Ils ne viennent pas uniquement du monde gouvernemental mais aussi de la société civile. Ils vivent au Canada et ils rencontrent des cas comme ceux-là à tous les jours.
Je suggérerais de prendre tout le temps nécessaire et de ne pas chercher à bousculer les étapes, parce que ce sont des cas délicats. Je pense qu'on ne change pas la Loi sur l'immigration à tous les ans. Il faut prendre à ce moment-ci le temps nécessaire en comité pour avoir la meilleure loi possible.
M. Mark Assad (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Madame la Présidente, notre collègue de Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière a mentionné qu'il y avait une partie de la loi qui était dure. Il a raison. Il y a une partie qui est très dure.
C'est la partie où on veut empêcher les entrées illégales au Canada de ceux qui ont des papiers frauduleux ou qui sont des criminels. C'est évident qu'il faut être très vigilants et cet aspect de la loi est dur. C'est nécessaire, parce que si on veut vraiment assurer une immigration qui va bien servir l'ensemble de notre pays, il faut être certains que ceux qui arrivent ici vont passer par les canaux légaux et qu'on sera capables de les vérifier et de les identifier. Cet aspect-là est dur.
Il y a une autre chose qu'il ne faut pas oublier. C'est vrai ce que notre collègue a mentionné, à savoir qu'il y avait au-delà de 400 000 demandes en attente d'une réponse. Voilà la raison pour laquelle nous avons déposé un nouveau projet de loi. C'est justement pour avoir un système qui va être beaucoup plus efficace et efficient pour pouvoir réduire ce retard. Le but principal, évidemment, c'est d'avoir un système qui va répondre adéquatement à nos besoins et réduire ces retards.
M. Antoine Dubé: Madame la Présidente, lorsque j'ai commencé à parler de ce projet de loi, je disais que j'ajoutais mes propos à ceux de ma collègue de Laval-Centre en insistant sur un point qui a attiré mon attention, soit celui des réfugiés qui n'ont pas de document.
Je pense qu'il vaut la peine de porter une attention particulière à ceux qui n'ont pas de papiers. Le député d'en face parle de ceux qui ont des documents falsifiés. Il a raison, il faut que des vérifications soient faites. Je ne nommerai pas les pays, mais dans certains pays en guerre ou en crise—cela varie d'un pays à l'autre ou d'une situation à l'autre—il est parfois inutile de demander un document à ces pays, surtout si on sait que le groupe qui se sent opprimé est un groupe adverse, un opposant, car on ne l'obtiendra pas.
Je voulais faire une mise en garde. L'absence de documents ne devrait pas être traitée comme une demande irrecevable. Il faudrait voir à ce que ce soit fait avec humanisme. On le voit dans le cas des guérillas; ce ne sont pas toujours les gouvernements qui oppriment leurs citoyens, parfois, ce sont des groupes parallèles, des milices. On le sait bien, toutes sortes de situations se présentent.
À titre de membre du Sous-comité sur les droits de la personne, je me soucie des gens qui vivent des situations épouvantables. Lorsqu'ils arrivent en groupe, des familles avec de jeunes enfants, on doit traiter ces gens avec humanisme. Je soulignais surtout le fait qu'il ne fallait pas détenir ces gens trop longtemps, surtout les enfants. Ceci déroge aux règles internationales du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés.
Par exemple, si on a accepté la légitimité de la situation de certaines personnes, qu'on a accepté le fait qu'elles n'avaient pas de papiers, il ne faut pas les laisser dix ans sans nouveau document du gouvernement du Canada. J'ai même entendu une personne dire que parfois, elle se sentait comme si elle était en prison puisqu'elle ne pouvait pas aller à l'étranger, elle ne pouvait pas recevoir des gens de sa famille qui avaient réussi à sortir de son pays d'origine, parce qu'elle était en quelque sorte un citoyen ou une citoyenne sans droits.
C'est ce genre de situation que je déplore. Faisant partie du Sous-comité sur les droits de la personne, je ne surprendrai personne ici avec ce genre de point de vue.
M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ): Madame la Présidente, je voudrais poser une courte question qui est importante.
Mon collègue a à peine effleuré le fait qu'on n'a pas profité de l'occasion importante de la présentation de ce projet de loi sur l'immigration pour permettre que soit modifiée cette entente, pour que le Québec ait au moins son mot à dire, qu'il puisse décider d'avoir des réfugiés et que cela ne relève pas exclusivement au fédéral.
M. Antoine Dubé: Madame la Présidente, je pense que ce serait justifié, d'autant plus que le tiers des réfugiés au Canada vont où? Ils vont au Québec. Alors, le nombre le justifie.
[Traduction]
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Alliance canadienne): Madame la Présidente, je suis heureux d'intervenir dans le débat du projet de loi C-11. Plus tôt au cours du débat, un député ministériel a demandé des détails. Je vais lui en donner. Ma circonscription est une de celles qui affichent les taux les plus élevés d'immigration. J'ai aidé de très nombreuses personnes à entrer au Canada.
Je ne parlerai pas de cet aspect aujourd'hui. Je vais plutôt décrire à quel point le système de détermination du statut de réfugié nous a déçus et de quelle façon les criminels en profitent. Je vais également parler des dispositions que nous pourrions prévoir dans la loi pour remédier à la situation.
J'ai déjà entendu les députés d'en face dire qu'il fallait rectifier la situation, mais, en toute justice, le gouvernement ne semble pas s'apprêter à régler le problème. Je ne pense pas qu'il veuille le faire. Dans cette optique, je vais parler de plusieurs cas bien concrets.
Madame la Présidente, je vous félicite d'avoir été nommée pour présider nos délibérations. J'en reviens à l'immigration, et je voudrais parler des criminels qui abusent du système. Si j'ai choisi de parler des criminels, c'est que j'ai consacré beaucoup de temps à ces questions à titre de porte-parole pour la justice, et maintenant de porte-parole chargé du ministère du Solliciteur général. On dirait que je suis l'un des rares députés à me préoccuper de ces questions. J'ai passé des centaines d'heures à m'occuper de ce genre de cas au nom des victimes. Chaque fois que j'ai été mêlé à ces cas, on m'a demandé d'intervenir pour les victimes.
Je voudrais parler d'un article qui a paru dans une revue spécialisée imprimée en Amérique centrale, aux États-Unis et au Mexique. Je signale l'incident parce qu'il montre bien ce qu'on pense de nous dans d'autres pays. Voici l'article en question qui a paru sous la forme d'une annonce payée: «Immigration garantie au Canada avec l'achat d'une franchise de Fleet Rent-a-Car. Investissement total de 50 000 $ CAN, ou environ 30 000 $ US. L'immigration au Canada est garantie»—le mot est souligné—«même si le candidat a un casier judiciaire.»
J'ai donné suite à cette annonce, parce qu'on donnait une adresse, rue Bathurst, à Toronto, et un numéro de téléphone. J'ai fait interroger ces gens, en leur faisant croire qu'on venait d'un autre pays et qu'on avait un casier judiciaire. De fait, ils ont confirmé ce qui avait paru dans l'annonce. Ils ont essentiellement dit qu'ils pouvaient faire en sorte que les personnes ayant un casier judiciaire puissent entrer au Canada. Il leur a ensuite été demandé comment de telles personnes pouvaient se faire admettre en Russie, en Angleterre, au Canada, ou ailleurs. Il en est ressorti essentiellement qu'il suffisait d'arriver dans le pays souhaité, et que le tour était joué. C'est effectivement le cas.
J'ai récemment accompagné la police dans une région réputée fréquentée par les trafiquants de drogues. Nous avons arrêté trois Honduriens. Nous leur avons demandé leurs papiers d'identité. Les trois étaient entrés au Canada par des moyens illégaux. L'un d'eux s'y trouvait depuis 10 mois. Il avait deux condamnations à son actif et faisait l'objet d'une accusation en instance pour trafic de drogues. Le deuxième était au Canada depuis environ six mois. Il faisait lui aussi l'objet d'une accusation en instance pour trafic de drogue. Le troisième venait d'arriver au Canada, si je ne m'abuse, caché sous un train en provenance des États-Unis.
Nous avons une situation où ces jeunes gens vendent de la drogue à nos enfants, renvoient l'argent à leur famille et échappent à l'expulsion. Voilà, en partie, où réside le problème avec notre système d'accueil des réfugiés. Je vais expliquer pourquoi il faut y remédier. Je ne me fais guère d'illusions à ce sujet. J'ai soulevé le problème à maintes et maintes reprises à la Chambre et rien ne change. Je tiens à ce que l'on sache aujourd'hui que le problème persiste à ce jour et que je n'ai pas l'impression que les gens d'en face ont envie de le régler.
Un individu, originaire de Cuba, est arrivé au Canada tout récemment. Des parents m'ont demandé d'intervenir car leur enfant est mineure. Je dois préciser que cette enfant était mineure à l'époque, mais que, grâce aux gouvernements conservateur et libéral, l'âge pour les relations consensuelles a été ramené de 16 à 14 ans. Cette enfant que la loi autorise aujourd'hui à avoir des relations consensuelles est âgée de 15 ans à présent et le jeune trafiquant de drogue est âgé de 32 ans. Les parents m'ont demandé d'intervenir et c'est ce que j'ai fait.
Nous ne savons pas comment il est entré au pays. Personne ne le sait vraiment. Lorsqu'il a découvert que je m'intéressais à ce dossier en particulier, je savais ce qui allait arriver. Quelqu'un lui a conseillé de demander le statut de réfugié. Les gens apprennent assez facilement qu'il suffit de demander le statut de réfugié pour entrer dans un processus interminable et rester au pays; alors, j'ai demandé d'être admis comme intervenant à l'audience de la revendication du statut de réfugié.
Comme il avait la discrétion de le faire, il a tenté de s'opposer à ce que je participe à l'audience. J'ai dû présenter une demande à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié pour participer à l'audience. J'ai dû lutter. J'ai gagné le droit d'assister au processus. Il est scandaleux de voir qu'on peut ainsi refuser à un citoyen canadien le droit d'assister à une audience. Toute personne demandant le statut de réfugié au Canada, peu importe qu'il s'agisse d'un criminel ou non, a le droit d'interdire à des Canadiens d'assister à l'audience de sa demande. C'est scandaleux.
J'ai obtenu le droit d'assister à l'audience. À cette audience, à laquelle j'ai obtenu l'autorisation d'assister, je me suis représenté moi-même à titre d'intervenant. Je ne suis pas avocat. J'ai appris par moi-même les éléments fondamentaux de la procédure. Je suis donc présent à l'audience et on me remet un document—provenant de la bonne source—qui indique que cet individu est recherché par le FBI aux États-Unis pour trafic de drogues. Il est recherché au Nevada et en Californie.
Le voilà avec une enfant de 15 ans au Canada, les parents de l'enfant ne veulent pas de lui, nous ne voulons pas de lui, il a fait du trafic de drogue et les États-Unis le recherchent. Nous découvrons qu'il vivait aux États-Unis pendant quatre ans mais, à sa discrétion, lorsque la situation s'est corsée pour lui aux États-Unis, il traverse la frontière pour se rendre au Canada et dit alors qu'il réclame le statut de réfugié, simplement pour éviter de faire face à la loi aux États-Unis et non en tant que revendicateur venant de Cuba, même si c'est ce qu'on lisait sur sa demande.
J'ai lutté contre cela à l'audience. J'ai demandé ce que nous faisons à nous-mêmes et pourquoi nous ne renvoyons pas cet individu demain matin aux États-Unis pour qu'il paie ses dettes à la société. Mais non. Nous avons plus qu'une audience. Il y a eu de nombreuses audiences pour cet individu. Les parents sont hors d'eux, car ils ne comprennent pas vraiment pourquoi le Canada se donne la peine d'offrir à cet individu une audience alors qu'il vit aux États-Unis depuis quatre ans.
À la fin, nous avons eu gain de cause et la Commission de l'immigration et du statut de réfugié a déclaré qu'il n'était pas un réfugié véritable. Après la décision, j'ai dit à la commission qu'il fallait détenir cet individu, car il allait se sauver. Non, la commission ne voulait pas de cela, car ce serait violer ses droits. Elle lui a dit qu'il n'était pas un réfugié. Qu'a-t-il fait? Nous ignorons où il est aujourd'hui, car il s'est enfui. C'est exactement ce que j'avais dit qu'il ferait. C'est exactement la façon dont les choses se sont passées à d'innombrables reprises lorsque j'ai contesté des demandes.
On peut se demander comment il se fait que les gens n'écoutent pas la voix de la raison dans le cadre des audiences de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. J'ai récemment appris, la semaine dernière, que cet individu s'est enfui avec la jeune fille. Les parents se demandent pourquoi nous lui avons même offert une audience au départ, et encore moins la raison pour laquelle on ne l'a pas détenu une fois qu'on a déclaré qu'il devait être expulsé.
Qu'y a-t-il de mal dans cette façon de penser?
Prenons d'autres cas. Il y a dans ma circonscription un certain Chander. Il est arrivé en 1996 en tant que visiteur en provenance de l'Inde et il s'est rapidement marié. Quelques semaines plus tard, il bat sa femme, mais il est marié maintenant et se dit qu'il va pouvoir rester au Canada. Son épouse m'a demandé d'intervenir. Au moment où j'interviens, cet individu qui est accusé d'agression et qui est au Canada fondamentalement sous un faux prétexte, revendique le statut de réfugié.
C'est une chose courante. J'ai même déjà entendu des arbitres de l'immigration dire que lorsque l'expulsion échoue, la personne peut toujours demander le statut de réfugié. Certains invoquent cette procédure pour les mauvaises raisons.
Cet homme a commencé à contester. Il a essayé de m'expulser de l'audience. J'ai dû faire des pieds et des mains pour rester. Je suis resté. La même chose est arrivée. Il a reçu le même conseil que donnent à leurs clients tous les avocats de l'aide juridique. Le même.
Nous avons défendu le cas jusqu'à la commission du statut de réfugié, qui a jugé qu'aucune preuve crédible ou valable ne justifiait une demande de statut de réfugié au sens de la Convention. J'ai dit à la commissioin qu'il valait mieux le garder derrière les barreaux, car je savais qu'il ne serait pas là le jour de son expulsion. Il est parti. Nous ne savons pas où il est.
Toutefois, une petite loi prévoit que, après l'échec total d'une demande, si une personne retourne dans son pays puis revient au Canada 90 jours plus tard, elle peut présenter une autre demande.
Six mois plus tard environ, j'ai reçu un appel, cette fois de Calgary et non d'Abbotsford, en Colombie-Britannique. Devinez qui demandait à nouveau le statut de réfugié. Je l'ai découvert par hasard. Si je ne l'avais pas découvert, l'affaire aurait été dans le sac.
L'histoire s'est donc répétée. Il a demandé à ce que je sois expulsé de l'audience. Il ne voulait pas que l'audience soit publique. Il en avait le droit. Je l'ai combattu là-dessus et j'ai gagné. Nous avons assisté à l'audience à Calgary, nous nous sommes opposés à l'octroi du statut de réfugié et avons à nouveau eu gain de cause. Pour une deuxième fois, j'ai dit que si l'individu en question devait être expulsé, il vaudrait mieux l'incarcérer parce que, autrement, il disparaîtrait et ferait une nouvelle demande ailleurs, peut-être à Halifax, la prochaine fois. C'était impossible de l'incarcérer, car cela aurait porté atteinte à ses droits. Nous ne savons pas où il est actuellement. Il a fort probablement déjà présenté une autre demande de statut de réfugié dont je n'ai pas entendu parler, ou alors il s'apprête à le faire et il se pourrait que je n'en sois pas informé.
On utilise le système et on en abuse.
Essayez de voir la logique là-dedans. Cet individu a même prétendu être un réfugié de l'Inde—un pays pourtant démocratique—parce qu'il était persécuté. Sa demande de statut de réfugié ayant été rejetée, il est revenu à la charge et a eu le culot de mentir lors de la deuxième audience visant l'obtention du statut de réfugié. Il a dit qu'il était retourné en Inde et qu'il y était resté un moment avant de revenir ici. On lui a demandé s'il avait été persécuté là-bas et pourquoi il était retourné s'il s'exposait à y être persécuté. Il n'a pas pu répondre.
Ce genre de situation se produit quotidiennement, à répétition, dans notre pays. Je n'arrive pas à croire que le système soit devenu si absurde. Pourtant, lorsque nous discutons d'une loi sur l'immigration, on ne fait pas mention de ces difficultés.
Dans des secteurs en pleine désolation, dans la partie est du centre-ville de Vancouver où il y a énormément de consommation et d'abus de drogue, de nombreux non-Canadiens font le trafic de drogue. Bon nombre ont n'ont pas 2 ou 3 chefs d'accusation et condamnations qui pèsent contre eux, mais 20, 30 ou 40. J'ai les dossiers pour le prouver. Ils ne sont pas expulsés. Ils vendent de la drogue à nos enfants et ne sont pas expulsés. Si nous essayons de les expulser, ils demandent le statut de réfugié, et les commissions chargées des expulsions et du statut de réfugié ne sont pas en rapport l'une avec l'autre. L'une dira que cela la regarde et que ce n'est pas de nos affaires. Ensuite, lorsque l'individu esquive l'expulsion et présente une demande à la commission du statut de réfugié, ses responsables disent que cela nous regarde et que ce n'est pas de leurs affaires. Toutefois, cela nous concerne et nous préoccupe tous.
Même si de nombreuses personnes qui viennent dans notre pays sont d'authentiques immigrants et réfugiés, ce dont nous nous réjouissons, il y en a qui abusent de façon flagrante du système, et nous devons régler ce problème. Ce n'est pas en présentant un projet de loi et en n'en discutant pas que nous réglerons le problème. Nous ne pourrons pas le régler si, pendant que je prends la parole pour défendre les droits des victimes, les députés d'en face m'accusent d'être raciste parce que je dis que le système d'immigration ne fonctionne pas.
On m'a demandé d'aborder ces questions au nom des victimes, dont certaines ont été violées par certains de ces individus. Une femme, qui est maintenant une amie à moi, a été violée par un homme venant du Salvador, qui a été expulsé. Nous l'avons renvoyé dans son pays à la condition que la victime retire sa plainte. Elle a accepté afin qu'il soit expulsé.
L'individu a donc été renvoyé chez lui par avion sous escorte. Or, six mois plus tard, alors qu'elle faisait le plein à une station d'essence de ma localité, qui pensez-vous que la victime a vu derrière elle au même poste d'essence? Nul autre que l'individu qui l'avait violée et que nous avions expulsé. Qu'a-t-il fait? Pour éviter d'être expulsé de nouveau, il s'est présenté avec deux avocats de l'aide juridique et a demandé le statut de réfugié. Le processus a duré deux ans pendant lesquels la victime a vécu un véritable cauchemar. Il compte parmi les individus qui, soit dit en passant, refusent d'être testés pour le VIH; c'est le problème de la victime.
Si la Chambre veut avoir d'autres détails, j'en ai en quantité. Je ne tente pas de brosser un tableau apocalyptique. Je ne fais que dire à la Chambre, pour la nième fois, que certains problèmes doivent être réglés.
Les victimes espèrent que les députés passeront à l'action au lieu de dire que tout va bien et de laisser les choses aller telles quelles en apportant quelques changements. Il y a des gens qui ont besoin de notre aide.
Les criminels au Canada et dans les autres pays considèrent le Canada comme un refuge. Je ne l'invente pas. Il n'y a qu'à interroger le FBI ou la CIA aux États-Unis. Ils vous diront que les criminels considèrent le Canada comme un refuge, parce qu'une fois admis dans notre pays, ils peuvent se prévaloir de la Charte des droits et libertés et ont droit à l'aide juridique en cas de problèmes avec la justice. Que peut-il, au pire, leur arriver au Canada? Une peine d'emprisonnement avec sursis, une condamnation avec sursis, une suspension de l'instance, le retrait de l'inculpation? Même s'ils font une année ou deux en prison, ils sont rarement expulsés. Il n'y a qu'à voir certaines affaires, c'est dégoûtant.
Un homme originaire de Tchécoslovaquie a commis une agression sexuelle contre une très bonne amie à moi, Joan, dans ma circonscription. Joan a 63 ans. L'homme a fait de la prison. Ce n'est qu'après trois longues années d'efforts que nous avons réussi à convaincre les fonctionnaires et les services correctionnels du Canada de le renvoyer en Tchécoslovaquie. Des choses pareilles ne devraient pas arriver.
Tout étranger admis au Canada doit respecter les lois. C'est tout ce que nous demandons, bon sang.
[Français]
M. Mark Assad (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Madame la Présidente, notre collègue nous a donné le côté très négatif. Il n'y a aucun doute qu'il y a eu des difficultés dans le passé. Je ne le nie pas, mais ce sont des cas assez extrêmes.
L'année dernière, au-delà de 8 600 personnes ont été renvoyées. On parle de personnes qui étaient entrées de façon illégale au pays. Le système n'est pas parfait, mais il fonctionne. D'ailleurs, depuis 1995, il n'y a donc pas si longtemps, 45 000 personnes ont été renvoyées.
[Traduction]
Des cas comme ceux cités par notre collègue se produisent malheureusement. Ce sont des cas extrêmes. Personne à la Chambre ne souhaite voir de tels abus de notre système. Nous savons que cela arrive et arrive aussi, j'en suis sûr, dans d'autres pays, c'est pourquoi nous proposons une nouvelle mesure législative qui nous permettra d'être beaucoup plus efficaces et d'éliminer ces cas extrêmes. Toutefois, penser que l'on peut arriver à un système parfait du jour au lendemain est complètement irréaliste; ça n'existe nulle part.
M. Randy White: Monsieur le Président, voilà la réponse. Ceux d'en face devraient la prendre en note. C'est tout ce qu'ils disent. Il ne s'agit pas de cas extrêmes. Il s'agit d'honnêtes citoyens canadiens qui sont victimes d'individus entrant dans notre pays. Dans ma région, il ne s'agit pas de cas extrêmes. Je n'invente pas ces cas. Le député soutient-il que ce cas et les douzaines d'autres qui se sont produits dans la région immédiate où j'habite sont des cas extrêmes ou isolés? Ils ne le sont pas.
Le problème, c'est que lorsque des projets de loi sont déposés à la Chambre des communes et que nous formulons des critiques à leur endroit, on nous qualifie d'extrémistes, de sectaires ou quoi encore. Faire ce genre de commentaires, c'est ignorer la réalité législative. Cette réalité est bien différente pour une victime. La situation à la Chambre des communes est bien différente de la situation qui prévaut dans la rue. Je le sais, parce que je passe beaucoup de temps dans la rue. Peut-être le député devrait-il en faire autant.
M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne): Madame la Présidente, je félicite mon collègue, le député de Langley—Abbotsford, pour la sincérité et la passion avec lesquelles il s'est occupé de cette question et pour son intervention en faveur des droits des victimes et de la réforme du système, ce système qui continue de se détériorer pendant que les libéraux affichent une totale indifférence aux répercussions de cette détérioration sur la vie réelle des gens. Ceux d'en face parlent de cas extrêmes, mais je pense que ces cas mettent en cause des personnes réelles et qu'il ne s'agit pas de cas extrêmes.
Le plus souvent, lorsque nous parlons des problèmes du système et des énormes lacunes qui existent, notamment dans le système de détermination du statut de réfugié, les députés d'en face et ceux des autres partis réagissent en nous reprochant de vouloir discréditer l'ensemble du système d'immigration et de créer, selon eux, une hystérie anti-immigration.
Mon collègue ne reconnaîtra-t-il pas que c'est là un argument entièrement irresponsable et que, s'il y a quelque chose qui mine l'attitude de générosité et d'ouverture des Canadiens envers les nouveaux immigrants, ce sont précisément les utilisations abusives du système dont il a parlé? Ne reconnaît-il pas que la meilleure façon de créer une attitude d'ouverture et de tolérance envers les centaines de milliers de nouveaux Canadiens qui viennent s'établir au Canada légalement et qui contribuent à notre prospérité serait de remédier à ces injustices?
M. Randy White: Madame la Présidente, mon collègue a tout à fait raison. Les députés d'en face estiment que si nous n'abordons pas les problèmes exactement comme eux, c'est qu'il y a quelque chose d'irresponsable dans la position que nous adoptons.
Cela me rappelle les dernières élections et les commentaires de la ministre de l'Immigration, qui a essentiellement dit que les personnes associées à l'Alliance canadienne nient l'historicité de l'holocauste, en plus d'être des racistes et des fanatiques. Cela comprendrait, ma mère, qui a perdu son premier mari en Italie pendant la guerre.
La perpétuation de ce genre d'idées pousse tous les Canadiens, et non uniquement une partie d'entre eux, à faire preuve de méfiance. À mon avis, les propos de la ministre de l'Immigration ont sans doute eu plus d'impact en raison du poste qu'elle occupe.
M. Jason Kenney: Elle devrait être congédiée.
M. Randy White: Mon collègue de Calgary le dit très clairement. La majorité des Canadiens estime qu'elle aurait dû être congédiée ou à tout le moins que, au moment de la réorganisation du Cabinet, elle n'aurait pas dû obtenir ce poste. Elle représente une façon de penser qui ne devrait pas exister mais qui est perpétuée par l'autre côté.
Lorsqu'on aborde les vraies questions qui affectent les gens de la rue et les victimes dans ce pays, on érige devant nous un mur, un barrage, comme celui des personnes niant l'historicité de l'holocauste. D'où cela peut-il bien venir si ce n'est de la bouche de la ministre de l'Immigration? J'y ai vu des propos vraiment dégoûtants.
Mon collègue a tout à fait raison lorsqu'il dit qu'encourager de tels propos contribue à la dégradation de notre pays et pas uniquement à celle d'un parti politique. Lorsqu'on utilise des mots comme extrémiste, je souligne qu'il n'y a rien d'extrémiste dans les propos que j'ai tenus ici aujourd'hui. Je peux donner à mes collègues de la Chambre l'assurance que si les victimes dont j'ai parlé aujourd'hui se trouvaient parmi nous, elles en auraient beaucoup plus long à dire que moi sur le mauvais fonctionnement du système.
Il arrive parfois, comme le dit mon collègue, que tout un système soit terni par des problèmes moins grand que le tout. À mon avis, pour que tout le système fonctionne bien et paraisse bien, nous devons en corriger tous les aspects, et non uniquement certains d'entre eux.
M. John Bryden (Ancaster—Dundas—Flamborough—Aldershot, Lib.): Madame la Présidente, je ne peux m'empêcher de faire remarquer que le député d'en face n'apporte rien au débat en prêchant à un converti, c'est-à-dire le député qui l'a interrogé, et en répétant tous les propos déplacés qui ont été formulés à l'égard de la ministre de l'Immigration. Nous ne devrions pas en ternir compte. Peu importe qui rappelle ces propos, nous devrions en faire fi.
Mais je voudrais ramener le débat sur la bonne voie à l'intention du député.
Le député croit-il qu'il serait utile de réexaminer certaines des décisions fondées sur la Charte qui ont eu une profonde incidence sur la politique canadienne en matière d'immigration? Je pense précisément à la décision Singh rendue en 1984 qui, comme les députés ne le savent peut-être pas, est une décision avec avis minoritaire. Seulement trois juges ont déterminé qu'une personne qui arrive au Canada devrait avoir droit au processus habituel aux termes de la Charte tandis que les trois autres juges ont plutôt invoqué la Loi sur les droits de la personne.
Alors, en fait, aucune mesure législative, encore moins la Charte, n'a obtenu une majorité. Mais la décision de la Cour suprême a ultérieurement été interprétée comme une décision fondamentale découlant de la Charte.
Je me demande quel est le point de vue du député. Devrions-nous encourager le gouvernement à renvoyer à nouveau la question à la Cour suprême?
M. Randy White: Madame la Présidente, je sais gré au député de soulever la question parce que, en matière d'immigration, la décision Singh de 1984 est un point repère et je suis d'avis que, dans une large mesure, elle tend à discréditer tout le système justement à cause de cet aspect.
Ceux qui viennent au Canada devraient bénéficier de certains droits et privilèges, mais je doute que ce devrait être les mêmes droits, privilèges et libertés dont jouissent les Canadiens. J'en doute fort.
Par exemple, j'étais dans un bureau de l'immigration un jour quand des individus ont décidé de demander l'asile. Sans tenir compte de leurs antécédents, et à cause de la décision Singh sur tous ces droits et privilèges, un médecin et deux avocats qui étaient présents sont intervenus aussitôt et trois ou quatre autres personnes ont offert leur aide. Il y avait un représentant du bureau de l'aide sociale qui a promis une aide immédiate. Je pensais qu'on aurait avantage à s'arrêter un peu pour refroidir les ardeurs de chacun.
Je pense qu'il faut revoir la Charte des droits et libertés. Je suis d'accord avec le député. Je serais prêt à entamer une longue discussion sur le sujet. Ce serait nécessaire et très opportun. La société va beaucoup trop loin avec la Charte des droits, de nos jours.
M. Leon Benoit (Lakeland, Alliance canadienne): Madame la Présidente, je veux d'abord vous féliciter de votre nomination à la présidence. C'est aujourd'hui un véritable honneur pour moi de parler du projet de loi C-11.
Dans mon intervention, je voudrais parler d'abord de ce que les Canadiens veulent voir dans un système d'immigration, et ensuite de ce qu'ils ne veulent pas voir. Après cela, je vais relever 28 points différents dans le projet de loi auxquels on devrait s'intéresser sérieusement au moment de l'étude en comité. Ces points doivent être examinés et, dans bien des cas, modifiés à l'aide d'amendements pour faire de ce texte de loi un instrument conforme aux désirs des Canadiens.
Que veulent donc les Canadiens? Ils veulent un système qui fonctionne d'abord et avant tout pour les immigrants de la composante économique et les immigrants indépendants. Il est clair que le système actuel ne fonctionne pas bien. N'importe quel député ici pourrait citer des cas particuliers, beaucoup même. Dans chaque circonscription au Canada, il y a des centaines de cas de personnes victimes du système, de gens qui ont attendu beaucoup trop longtemps pour franchir toutes les étapes. Cela n'a pas de bon sens. Et il ne s'agit pas de cas isolés. On parle de situations très courantes.
Pourtant, dans le passé, notre système fonctionnait extrêmement bien. Je pense à ma circonscription, aux immigrants qui se sont installés dans la région de Lakeland et qui l'ont développée. À compter de la seconde partie du XIXe siècle, le Canada a commencé à accueillir des immigrants, venus d'abord de la Grande-Bretagne, puis de l'Allemagne et ensuite de presque tous les pays d'Europe de l'Ouest.
Vers la fin du XIXe siècle, des Libanais sont venus s'établir et sont encore une communauté de premier plan à Lac La Biche et dans certaines parties de ma circonscription. Ils forment des groupes bien implantés dans la collectivité. Ils ont contribué à la bâtir. À cette époque et à deux autres occasions par la suite, soit après la Première et la Seconde Guerres mondiales, des Ukrainiens sont arrivés d'Europe de l'Est.
Ces immigrants ont édifié notre pays. Je crois que nous en sommes tous conscients. Tous les députés pourraient parler de l'apport de l'immigration dans leur circonscription.
Pourquoi ne pas s'inspirer de ce qui a bien fonctionné dans le passé pour construire un système qui fonctionnera encore mieux dans l'avenir? C'est ce que les Canadiens souhaitent à l'égard de la catégorie des indépendants.
Les Canadiens veulent aussi un système qui réunira rapidement les familles. Lorsque les familles sont séparées, que ce soit parce que certains de leurs membres sont arrivés comme demandeurs du statut de réfugié ou comme immigrants indépendants, les Canadiens veulent un système qui leur permettra d'être réunis rapidement.
Probablement tous les députés pourraient rapporter de nombreux cas dans leur circonscription où quelqu'un a été admis au Canada, mais où son conjoint ou des enfants à charge n'ont pas été autorisés à faire de même avant des mois, voire des années.
Dans ma circonscription, je connais un cas où il a fallu trois ans avant qu'un mari et sa femme puissent être à nouveau ensemble. Les Canadiens veulent un système qui permettra une réunification plus rapide des familles, comme on peut s'y attendre de la part d'un pays développé comme le Canada.
De plus, les Canadiens veulent un système qui acceptera les vrais réfugiés. Il ne fait aucun doute que les Canadiens sont favorables à l'accueil des vrais réfugiés. Je n'ai entendu que des commentaires en sens dans tout le Canada. Les Canadiens veulent que l'on accepte les vrais réfugiés sans attendre. Ils savent que notre système laisse tomber les vrais réfugiés.
Par exemple, moins de 5 000 des 23 000 réfugiés que nous acceptons chaque année sont choisis dans des camps à l'étranger où les gens ont été désignés comme étant des réfugiés par les Nations Unies. Nous accueillons moins de 5 000 de ces personnes par année, ce qui veut dire que la plupart des gens que nous accueillons ne viennent pas de camps de réfugiés. On les fait venir de l'étranger, mais ils ont été rejetés par un autre pays. Très peu viennent de camps. Les Canadiens veulent que notre système mette l'accent sur les véritables réfugiés, ce qu'il ne fait pas.
Les Canadiens ne veulent pas d'un système qui permettrait à des gens d'abuser de notre pays et de notre système d'immigration. Les Canadiens ne veulent pas cela. Ils ne veulent pas de resquilleurs qui abusent de la générosité de notre pays et qui prennent la place d'autres personnes qui suivent la voie normale. Cela arrive trop souvent. Nous le savons tous, et je ne crois pas qu'il y ait aucun doute à cet égard.
Les Canadiens ne veulent pas que les gens qui ne sont pas de véritables réfugiés et qui ont été rejetés par le système soient autorisés à rester dans notre pays. Pourtant, cela arrive. En fait, même si notre taux d'acceptation officiel pour ce qui est des réfugiés est d'environ 50 p. 100, ce qui est beaucoup plus élevé que dans la plupart des autres pays, seulement 15 p. 100 des revendicateurs du statut de réfugié qui viennent au Canada finissent par quitter le pays. C'est ce qui rend les Canadiens furieux au sujet de notre système et de la façon dont le gouvernement a permis que ce système devienne inefficace. C'est ce que les Canadiens ne veulent pas.
Je veux lire aux députés la politique de l'Alliance canadienne en matière d'immigration. L'Alliance canadienne est un nouveau parti politique. Notre formation n'existe que depuis un peu plus d'un an; notre politique n'est donc pas encore tout à fait au point pour beaucoup de domaines. Il nous reste beaucoup à faire. Nous attendons impatiemment notre prochain congrès, d'ici un an, et nous en profiterons alors pour étoffer nos politiques.
Voici ce que dit l'énoncé de politique de l'Alliance canadienne au sujet de l'immigration. J'en suis fier, et je veux que les Canadiens la connaissent. Je ne veux pas que restent sans réplique les fausses interprétations et les déclarations erronées des députés des autres formations politiques, des médias ou de tout autre personne.
Nous considérons le Canada comme un pays bâti par des immigrants, et allons continuer à accueillir les nouveaux immigrants. Nous soutenons le parrainage des membres de la famille immédiate. Notre politique d'immigration tiendra compte des besoins économiques du Canada et nous allons améliorer l'équité et la sécurité du système, notamment le respect des obligations de parrainage. Nous allons collaborer avec les provinces dans le cadre de l'établissement des immigrants.
Nous voulons protéger l'intégrité de la contribution précieuse au tissu social canadien des millions d'immigrants légitimes. Nous ne laisserons pas leur bonne réputation être ternie par des non-citoyens qui commettent des actes criminels et allons déporter ces individus sans attendre une fois qu'ils auront purgé leur peine.
Nous reconnaissons l'obligation humanitaire du Canada d'accueillir les véritables réfugiés et sommes fiers que notre pays soit un havre de paix pour des démunis du monde entier. Dans le but d'assurer l'équité et de mettre un terme au resquillage, nous allons immédiatement déporter les faux réfugiés et autres immigrants illégaux, et pénaliser sévèrement ceux qui permettent d'abuser du système.
Il s'agit de passeurs de réfugiés clandestins, de contrebandiers de personnes, de malfaiteurs de ce genre. Je poursuis:
Nous allons veiller à ce que le statut de réfugié soit déterminé rapidement, uniformément et professionnellement. Nous allons mettre un terme à l'abus à la demande du statut de réfugié comme moyen de profiter plus rapidement des avantages du statut d'immigrant reçu.
Voilà la politique de l'Alliance canadienne en matière d'immigration, et j'en suis fier. Cette politique nous a été dictée par nos membres, et tous nos membres l'appuient. Je pense que nous avons eu l'appui d'environ trois millions de Canadiens aux dernières élections. Je n'ai pas de chiffres précis, mais 25 p. 100 de l'ensemble des Canadiens nous ont appuyés aux dernières élections. Je pense que chacun d'entre eux se dirait très fier de notre politique d'immigration. Nous devrions tous en être très fiers et j'en retire, moi-même, une grande fierté.
Je m'attarderai maintenant à des points précis. Le comité se doit d'examiner très attentivement 28 aspects du projet de loi. Vingt-huit, c'est beaucoup, mais chacun d'eux est important. Je m'en tiendrai à ceux qui me paraissent les plus importants. Dans le peu de temps qui m'est accordé, je décrirai les aspects de la mesure législative que le comité se doit d'examiner de près. Des experts devront aussi venir témoigner et exposer leur point de vue. Les renseignements recueillis seront fort utiles pour améliorer le projet de loi.
Premièrement, la section énonçant l'objet de la loi, qui figure au tout début du projet de loi, dit d'une façon générale que la loi sur l'immigration se fondera désormais sur de nouveaux principes. Voilà un élément tout nouveau sur lequel devra se pencher le comité.
Certains aspects de la nouvelle loi concernent des domaines très particuliers. D'autres sont très généraux et se rapportent à différents articles de la loi. Je tenais à ce que ceux qui écoutent ces commentaires comprennent cela.
Ma deuxième observation a trait à la Charte canadienne des droits et libertés. L'alinéa 3(3)d) du projet de loi semble offrir à des non-citoyens la protection en vertu de la Charte. Aucun autre pays au monde n'en fait autant. Des personnes qui n'ont pas la citoyenneté canadienne, qui ne sont même pas dans notre pays, bénéficieraient de la protection garantie par notre Charte. Comment un pays peut-il faire cela? Une disposition législative le prévoit et il y a lieu de l'examiner soigneusement et de la modifier au besoin. J'invite le comité à se pencher sur la question.
Un troisième aspect général de la loi porte sur le contenu des mesures législatives actuelles et sur ce qui ressortit à la réglementation. Or, les règlements peuvent être modifiée par un ministre, ou des fonctionnaires peuvent demander au ministre de les modifier. Ils peuvent aussi être modifiés par décret en tout temps, sans même que la Chambre en soit saisie.
Ce projet de loi est très général, et beaucoup trop d'éléments ressortissent aux dispositions réglementaires. Il s'ensuivra un vice au plan de la reddition de comptes qui ne manquera pas de devenir très évident.
Le quatrième grand domaine est celui des ententes fédérales-provinciales et des consultations avec les provinces. Le projet de loi en fait état, mais on n'y trouve aucune assurance que les provinces devront donner leur accord au gouvernement fédéral et approuver les mesures réglementaires mises de l'avant. Le gouvernement ne fera qu'écouter les provinces sur ces questions. Il ne cherchera pas nécessairement à obtenir leur approbation. Cela est préoccupant, à mon avis. De telles questions ayant des répercussions directes et profondes sur chaque province, il serait approprié que les provinces aient voix au chapitre en ce qui concerne le contenu de la Loi sur l'immigration.
Le cinquième point concerne le vaste domaine de l'immigration économique. Il s'agit du pivot de notre système d'immigration. La catégorie d'immigrant indépendant se compose de gens qui sont très vite en mesure de contribuer à notre économie pour faire du Canada un pays plus fort et meilleur où vivre. Il s'agit du principe directeur dans le processus de sélection, dont je parlerai tout d'abord.
Je trouve très inquiétant que l'élément le plus important et le plus précieux de l'immigration canadienne, la catégorie de l'immigration économique, ne mérite qu'une seule phrase dans le projet de loi. Il est difficile à croire que le sujet soit expédiée en une seule phrase.
Cette phrase, au paragraphe 12(1), servira de principe directeur à partir duquel d'innombrables règles seront élaborées. La loi, en fait, sera établie par son règlement d'application, qui ne figure pas dans le projet de loi. Cela me préoccupe vraiment. Comment demander aux hauts fonctionnaires du ministère, au ministre et au Cabinet de nous rendre des comptes si nous n'avons pas l'assurance que des modifications seront apportées en les faisant adopter par le Parlement?
Je comprends parfaitement et j'admets qu'il faut s'en remettre au règlement pour l'application de certains aspects d'une loi, mais l'équilibre fait vraiment défaut dans ce projet de loi.
Le sixième point a trait aux efforts déployés pour rationaliser le processus d'immigration. J'ai écouté des nouveaux immigrants d'un bout à l'autre du pays, et notamment de la région métropolitaine de Toronto. La moitié de tous les immigrants s'établissent dans cette région.
J'ai établi un groupe de travail dans cette ville et, au cours des dernières années, j'ai reçu des centaines de commentaires de la part des nouveaux immigrants. Après les avoir écoutés, j'ai constaté que leurs propos renfermaient un thème commun et récurrent. Ils disent qu'immigrer au Canada prend beaucoup de temps, que le système ne fonctionne pas, qu'il est excessivement bureaucratique et que les responsables ne semblent pas se préoccuper des résultats. Voilà le sentiment généralisé. Je suis convaincu que tous les députés ont entendu des commentaires semblables de la part de gens qu'ils ont rencontrés ou aidés et qui avaient eu recours au système.
Le projet de loi ne traite pas de l'efficacité du ministère de l'Immigration. Il ne prescrit rien qui obligerait les intervenants à fixer des objectifs ou à atteindre les objectifs établis en matière d'immigration. Comment savoir si l'on réussit lorsque les objectifs ne sont pas énoncés clairement dans la mesure législative? Or, ils n'y sont pas. À mon avis, cette lacune crée un véritable problème.
Le septième point, ce sont les principes directeurs pour les immigrants de la catégorie regroupement familial. Le projet de loi est excessivement vague quant à ceux qui peuvent être considérés comme membres de la famille. Une seule disposition, l'article 12, définit la famille. L'article 14 stipule que les détails seront déterminés par voie de règlements. Voilà la réalité du projet de loi. Comme dans le cas de l'immigration économique, il y a peu de lignes directrices en ce qui concerne la famille; elles se résument à une seule phrase. Tout le reste serait laissé à l'interprétation subséquente des bureaucrates, du ministre et du Cabinet du jour.
En comptant uniquement sur les règlements pour gérer l'immigration, le Canada n'a pas très bien réussi jusqu'à maintenant. Cette façon de faire a mal servi les Canadiens et ceux qui demandent à venir y habiter. Nous devons modifier le système pour prévoir dans la loi des principes clairs permettant de définir la famille, et j'encourage le comité à voir à ce que cela se concrétise.
Le huitième point porte sur l'immigration aux fins de la réunion des familles. Il s'agit d'un élément important qui va de pair avec la définition de ce qui constitue une famille et de ce à quoi correspond la réunion des familles. Il est important de déterminer si une situation entre dans la catégorie de la réunion des familles. Quand on fait venir des grands-parents au Canada par exemple, alors que la majorité des membres de leur famille vivent dans leur pays d'origine ou ailleurs, peut-on parler de réunion de familles lorsque ces grands-parents viennent vivre avec un seul enfant, ici, au Canada? Nous devrons nous pencher très sérieusement sur cette question. Il sera très important que le comité étudie la question et détermine ce qu'il en est.
Le neuvième point est beaucoup plus limité. Il porte sur les conjoints de fait. Si je m'en tiens au premier texte provisoire du projet de loi C-23, et nous en sommes actuellement au troisième, la ministre a prévu une disposition qui permettra de reconnaître un membre de la famille comme étant un conjoint de fait. Cela soulève plus de questions que cela n'en règle.
À l'heure actuelle, le ministère de l'Immigration a beaucoup de mal à confirmer la légitimité d'un mariage. Le ministère ne peut résoudre le problème et est souvent incapable de faire la différence entre un mariage de convenance pour faciliter l'immigration et un mariage de bonne foi. Comment pourrons-nous y arriver, si on autorise en plus les unions de fait en vertu de ce projet de loi? C'est administrativement impossible, un vrai cauchemar administratif.
Le dixième point porte sur l'autorisation d'entrer et de séjourner au Canada, ce qu'on appelle la double intention dans le projet de loi, ou la catégorie des demandeurs au Canada. Cette mesure législative prévoit une disposition qui le permettra, sous réserve du règlement. Nous ne savons pas si les règlements auront une vaste portée ou non. Un étranger peut entrer au Canada avec une double intention, d'abord à titre de visiteur, puis dans le but d'immigrer.
Qui plus est, la même disposition du projet de loi crée une catégorie d'immigrant obtenant le droit d'établissement une fois au Canada. Cette disposition avait été supprimée il y a plusieurs années, parce que son application avait été cauchemardesque. Il s'agit exactement de la même disposition qui se trouvait dans l'ancienne Loi sur l'immigration d'il y a 15 ou 20 ans. La dernière crise importante date d'il y a environ 11 ans, en 1990. C'est justement à la suite de cette situation que le ministère de l'Immigration a accordé une amnistie générale à quiconque était entré illégalement dans notre pays. Ces amnisties ne nous ont pas bien servis. Nous laissons tout les gens entrer dans ce genre de situation, sans examen et quels que soient leurs antécédents. Ce changement rendra nécessaire une autre amnistie.
Je n'ai abordé que 10 des 23 points, mais je sais que j'aurai l'occasion de parler du projet de loi dans l'avenir. Je prendrai encore 30 secondes pour conclure avec une observation. Je veux parler de l'opportunité que la ministre de l'Immigration actuelle reste en fonction.
La ministre a parlé des trois millions ou plus de Canadiens qui ont appuyé l'Alliance canadienne. Elle a qualifié les membres de l'Alliance canadienne de racistes et de bigots et elle a dit qu'ils niaient l'existence de l'holocauste. Je me demande si cette personne peut légitimement demeurer ministre, notamment ministre de l'Immigration. Je veux qu'elle soit démise de ses fonctions, rien de moins.
M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Madame la Présidente, j'ai une question pour le député. Dans son allocution, il a parlé d'une immigration fondée sur les besoins économiques. Tels sont les mots qu'il a employés, je crois. Il y a plusieurs années, son ancien chef avait soulevé la question et on s'était demandé avec inquiétude au Canada ce que cela pouvait bien vouloir dire.
Le député pourrait-il clarifier ce qu'il veut dire au juste lorsqu'il dit ici que l'immigration devrait être fondée sur les niveaux ou les besoins économiques? Je veux lui donner la chance de le préciser. Le député veut-il dire—je ne le crois pas—que nous devrions fonder nos niveaux d'immigration sur nos besoins économiques ou sur un paramètre plus vaste?
M. Leon Benoit: Madame la Présidente, je remercie le député de poser la question. Il me donne ainsi la chance de clarifier le malentendu que j'ai laissé planer.
Je parle de nous doter d'un système qui cible les gens qui peuvent contribuer très rapidement à notre système et à notre économie. C'est un des buts avoués du présent système de l'immigration. Il est prévu dans le nouveau projet de loi. Rien n'indique qu'on entend améliorer quoi que ce soit.
Je vous renvoie ici à la neuvième recommandation du groupe de travail sur l'immigration. Les renseignements provenaient de personnes qui ont immigré au Canada pour la plupart au cours des 20 ou 30 dernières années et pour beaucoup depuis au plus un an, de personnes qui ont eu suffisamment affaire au système pour en comprendre certains problèmes.
Ces gens ont présenté à cet égard une recommandation précise qui, à mon avis, serait extrêmement profitable. Pourtant, je ne vois dans ce projet de loi rien qui tiennent compte de ce qu'ils ont proposée. Ils rapportent le problème suivant qui est courant.
Des consultants en immigration, qu'ils soient avocats ou non, se rendent, par exemple, au Pakistan ou en Inde, deux pays d'ou viennent un grand nombre de nos immigrants, puis organisent un colloque pour environ 300 ou 400 personnes. Ils leur disent que le Canada est un pays merveilleux, ce qui est vrai, mais ils leur disent aussi des choses qui ne sont pas tout aussi vraies. Ils disent, par exemple, que des ingénieurs pakistanais ou indiens peuvent venir au Canada et exercer immédiatement leur profession. Ce n'est tout simplement pas vrai.
J'ai connu une expérience que je n'oublierai jamais. Trois ou quatre personnes m'ont dit que, si elles pouvaient trouver le consultant qui leur avait dit cela, elles lui causeraient des torts graves parce qu'il leur a rendu la vie misérable.
Cela améliorerait vraiment le système si nous veillerions à que les personnes qui viennent au Canada sachent vraiment à quoi s'en tenir. Il est important qu'elles comprennent à quoi ressemble le milieu du travail au Canada et ce qui les attend. Le groupe de travail recommande d'insérer dans la loi sur l'immigration une disposition prévoyant que les immigrants des catégories de l'immigration économique, et non les réfugiés—il s'agit d'un sujet à part—subissent des examens de connaissance du milieu de travail canadien. à mon avis, cela nous épargnerait pas mal de peines et nous permettrait d'accroître en fait les avantages économiques que nous procurent ces immigrants. C'est une des recommandations qui aurait un impact considérable. Des gens ne viendraient pas au Canada dans l'espoir d'être un ingénieur pour se retrouver employés à Future Shop et, dans beaucoup de cas, renoncer à leur espoir de devenir un jour ingénieur.
Beaucoup d'entre nous qui ont parlé à des chauffeurs de taxi à Ottawa et dans la région du Grand Toronto ont entendu pas mal d'histoire de gens venus au Canada dans l'espoir de trouver un bon poste, qui se sont retrouvés chauffeurs de taxi. Il n'y a pas de mal à être chauffeur de taxi, mais quand on s'attend à exercer le métier d'ingénieur ou une autre profession et qu'on se retrouve au volant d'un taxi pour gagner sa vie, c'est très pénible. C'est souvent une cause d'éclatement de la famille.
Une fois que les gens ont immigré au Canada ou dans un autre pays, il n'est plus question qu'ils retournent chez eux. Ils ont rompu les liens. Ils ont souvent dû vendre leurs biens. Ils ont dit à tout le monde, familles et amis, qu'ils n'étaient pas satisfaits de ce qu'ils avaient dans leur pays, qu'ils voulaient mieux.
Si nous faisons en sorte de nous assurer que les immigrants savent à quoi s'attendre et sont prêts à l'accepter, je crois que nous aurons alors un bien meilleur système d'immigration, un système qui procurera au Canada le maximum d'avantages économiques. Ce changement est indispensable. Il y a beaucoup d'autres changements innovateurs à faire, mais aucun ne figure dans cette mesure législative.
M. Werner Schmidt (Kelowna, Alliance canadienne): Madame la Présidente, je félicite le député pour ses observations et la fougue avec laquelle il a répondu à la question. Je l'ai trouvé excellent. À l'évidence, il a étudié le projet de loi très sérieusement. Il souhaite attirer l'attention du comité sur quelque 28 à 30 points.
Sachant qu'il connaît à fond le projet de loi et ses différents enjeux, je voudrais qu'il nous donne son avis sur trois de ces points. Il les a tous abordés, mais, à mon avis, il n'a pas été jusqu'au bout et je voudrais lui donner la possibilité de nous en parler un peu plus longuement.
Le premier point concerne les personnes qui abusent du système pour immigrer au Canada. Le deuxième point concerne le fait que des employés de nos ambassades à l'étranger, ou peut-être même ceux au Canada, profitent des lacunes de la loi, commettent des abus lorsqu'ils donnent des conseils aux gens qui placent leur confiance en eux. Ces employés sont réputés bien informés et ils induisent les gens en erreur.
Le dernier point, qui touche en fait au coeur du problème, concerne la question de savoir où se trouve dans le projet de loi la disposition qui parle de l'obligation de rendre des comptes quand on sait le genre de déclarations que la ministre de l'Immigration a faites lors de la dernière campagne électorale. Je voudrais que le député nous éclaire sur ces trois points.
M. Leon Benoit: Madame la Présidente, le député est trop élogieux, mais j'apprécie toujours ce genre de propos.
Parlant de responsabilité et du fait que la ministre a qualifié de racistes, sectaires et négateurs de l'Holocauste les trois ou quatre millions d'électeurs qui ont appuyé l'Alliance canadienne, je crois qu'elle a perdu toute crédibilité et qu'elle ne devrait pas occuper son poste.
En ce qui concerne le système, le vérificateur général a fait, il y a moins d'un an, des observations intéressantes dans son rapport sur le système d'immigration. Il y dit beaucoup de choses profondes, mais je me contenterai d'en citer une. Voici ce qu'il déclare:
Dans l'ensemble, nous sommes très préoccupés de la capacité du Ministère à assurer le respect des exigences législatives dans ce domaine. Nous avons noté des lacunes sérieuses dans l'application des critères d'admissibilité, tant au niveau de la santé que de la criminalité et de la sécurité. Il est plutôt décevant de constater le peu de progrès réalisés à ce chapitre depuis la publication de notre rapport de 1990.
Le vérificateur général avait formulé des observations presque identiques à l'égard de nombreux autres domaines en 1990 et il signale, dans son rapport de 2000, que beaucoup de ces problèmes subsistent encore aujourd'hui.
La responsabilité n'est pas présente dans la loi. Elle ne l'est pas dans la pratique ni dans la façon dont le ministère administre la loi. C'est l'une de mes plus sérieuses préoccupations. Même s'il s'agissait d'une bonne mesure législative, s'il n'y a pas d'amélioration au chapitre de l'administration de la responsabilité notre système d'immigration ne s'améliorera pas. C'est ma réponse au premier point.
Pour ce qui est des abus commis à l'endroit du système, j'ai trouvé intéressant ce que disaient une députée néo-démocrate qui a pris la parole plus tôt, notamment au sujet des quelque 6 000 personnes qui sont arrivées de Chine par bateaux l'été dernier. Elle a dit qu'il s'agissait de réfugiés économiques, venus chez nous pour améliorer leur situation. Si ces gens veulent venir chez nous comme immigrants économiques, ils devraient passer par le système d'immigration, mais elle semble accepter que des gens puissent venir chez nous demander le statut de réfugié, même s'ils ne sont pas des réfugiés.
La définition de réfugié au sens de la convention des Nations Unies indique clairement qu'une personne qui immigre en vue d'améliorer sa situation économique n'est pas un réfugié. Les propos de la députée m'ont abasourdi. Les personnes qui demandent le statut de réfugié devraient satisfaire aux critères énoncés dans la convention des Nations Unies. Le Canada a sensiblement assoupli l'interprétation de ces critères.
Ces personnes ne correspondaient à aucun des critères de la définition, mais cela n'a pas semblé troubler la députée. Je ne suis pas du tout d'accord. Pour moi, il s'agit d'un abus du système.
Quant au troisième point, qui concernait les échappatoires dans nos bureaux à l'étranger, une fuite m'a permis de prendre connaissance d'un document, il y a environ un an lorsque j'étais porte-parole de mon parti en matière d'immigration, qui mettait très clairement au jour de nombreux problèmes dans nos bureaux à l'étranger, auxquels il faudra remédier. Le vérificateur général était du même avis.
M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Alliance canadienne): Madame la Présidente, je reprendrai là où mon collègue de Lakeland a laissé, c'est-à-dire en commentant les propos tenus par la ministre de l'Immigration pendant la campagne électorale. À mon avis, ils ne méritent pas d'être répétés, toutefois il est utile de rappeler le très mauvais service que la ministre s'est rendue à elle-même ainsi qu'à la Chambre en abaissant ainsi le niveau du débat politique. J'ose espérer que les députés de ce côté-ci ne seront pas les seuls à dénoncer les propos de la ministre, mais que les députés ministériels oseront dire publiquement ce qu'ils se disent entre eux à propos des déclarations de leur collègue.
J'ai eu l'occasion de siéger au Comité de la citoyenneté et de l'immigration pendant environ deux ans. Ce fut une expérience très enrichissante. Nous avons accompli bien des choses et tenu des débats fort animés sur différents sujets. D'ailleurs, madame la Présidente a participé à ces débats, du moins pour un certain temps. Pendant une bonne partie de cette période, mon collègue de Lakeland a été notre porte-parole en matière d'immigration et a fait valoir de nombreux points saillants dans le cadre de nos discussions sur l'immigration.
Permettez-moi de traiter du projet de loi et de certaines lacunes que j'ai relevées en le parcourant, dont certaines seront traitées par mes collègues et d'autres ont déjà été mentionnées aujourd'hui.
Bien sûr, le projet de loi renferme certaines dispositions que nous appuyons. Il faut bien rendre à César ce qui appartient à César. Dans toute mesure législative, bien peu de dispositions feraient l'unanimité à la Chambre. Après avoir examiné l'article 3 énonçant l'objet global de la loi, force nous est d'admettre que nous appuyons l'immigration et les objectifs que vise la mesure législative et qui consistent à améliorer notre pays et à permettre à des étrangers de tous les coins du monde de venir s'établir chez nous. Le Canada s'est édifié grâce à l'arrivée de personnes d'autres pays. Nous le reconnaissons et nous voulons que cela continue.
Nous avons relevé quelques défauts dans le projets de loi. Nous espérons que la ministre saura admettre ces défauts lors de l'étude en comité. Ceux d'entre nous qui sont à la Chambre depuis longtemps se sentent un peu découragés de voir leurs suggestions rejetées du revers de la main, comme cela se produit si souvent. D'une certaine manière, nous sommes un peu déçus que les modifications positives proposées par les députés de l'Alliance canadienne et d'autres partis, même du parti ministériel, puissent tout simplement être rejetées sans aucune considération. C'est malheureux. Nous devrions travailler tous ensemble chaque fois que nous le pouvons dans un climat impartial pour trouver des solutions aux problèmes qui sont évidents aux yeux de tous plutôt que de toujours tout voir dans une optique de parti.
À l'alinéa 3(2)a) de son projet de loi, la ministre reconnaît que le programme des réfugiés vise en premier lieu à sauver des vies et à protéger les personnes de la persécution. Nous sommes d'accord sur ce point. Nous dirons cependant à la ministre et aux députés ministériels que tant d'individus ont pu abuser du système d'immigration qu'il nécessite de sérieux correctifs.
Il y a des millions de réfugiés dans le monde qui ont besoin de notre protection. Ce sont des réfugiés et, par conséquent, ils n'ont pas à se soumettre à un processus quelconque. Le gouvernement doit reconnaître que les personnes vivant dans des camps de réfugiés sont manifestement des réfugiés, en raison de circonstances qui se sont produites dans leur pays d'origine, et donc des personnes susceptibles de recevoir la protection du Canada. Cela n'est pas précisé dans le texte de loi. Il doit y avoir en place un processus de sélection approprié. C'est ce qu'on demande depuis longtemps.
Il y a quelques années, j'ai lancé en comité l'idée d'éliminer la taxe imposée aux réfugiés lorsqu'ils arrivent au Canada, ce qu'on appelle le droit exigé pour l'établissement. Il s'est produit quelque chose d'intéressant. Nous avions débattu de cette idée, avec laquelle les membres du comité provenant des deux côtés de la Chambre étaient généralement d'accord, jusqu'à ce qu'arrive le moment du vote par appel nominal. Ce fut alors comme si quelqu'un avait rompu brutalement les bonnes relations de travail que nous avions réussi à établir depuis deux ans, dans certains cas.
Soudainement, les accusations et les remarques désobligeantes ont commencé à s'abattre sur moi et sur mes collègues pour avoir présenté une motion à laquelle ils avaient souscrit en comité. Les députés ministériels avait dit en privé qu'ils étaient en faveur de l'élimination de la taxe d'entrée pour les réfugiés, mais ils ont voté contre la motion par huit voix contre sept.
Ce fut pour moi un dur réveil d'apprendre que c'est comme cela que les choses fonctionnent ici. Une bonne idée proposée par un député de l'opposition ou même par un député ministériel d'arrière-ban sera battue à plates coutures et ne verra jamais la lumière du jour.
Près d'une année plus tard, la ministre a fait exactement ce que j'avais proposé, et je l'en remercie. C'est pour cela que j'avais proposé cette motion en comité. J'ai vu les députés gouvernementaux la défaire au moment du vote, puis la ministre la mettre en oeuvre.
Nous devons aller au-delà de ce genre de relations de travail dans cette enceinte si nous voulons répondre aux voeux de la population. Nous devons cesser de penser que l'opposition ou, du point de vue de l'opposition, le parti ministériel, ne peut avoir de bonnes idées.
Une voix: Cela arrive rarement.
M. Grant McNally: Nous devons trouver un autre moyen de travailler ensemble. Le député dit que cela arrive rarement et il a raison à bien des égards, parce que nous avons entretenu pendant tellement d'années des relations chaotiques dans les travaux de la Chambre. Il faut que cela change.
L'Alliance canadienne se fait le champion de ce changement. L'Alliance est en faveur de changements pour le mieux dans tous les domaines, y compris notre comportement relativement à ce projet de loi et à d'autres et la façon dont nous pouvons changer comment nous travaillons au Parlement. Nous invitons les autres députés à se joindre à nous dans cette quête parce que nous sommes déterminés à changer nos façons de faire et que nous continuerons à travailler fort en ce sens.
La population du Canada nous dit que le temps est venu pour du changement. Il est temps de changer la façon dont nous nous occupons des affaires du pays. Les Canadiens veulent que cela se reflète à la Chambre des communes, l'endroit où 301 représentants sont envoyés pour débattre de mesures législatives et adopter des règles et des lignes directrices non seulement pour maintenant, mais pour l'avenir.
Le projet de loi dont nous sommes saisis comporte un certain nombre de très graves problèmes. L'un d'eux concerne un principe sur lesquels se fonde le projet de loi: l'observation volontaire.
Le projet de loi est conçu de manière à ce que nous établissions un cadre que la population sera appelée à respecter. Si elle ne s'y conforme pas, il y a des échappatoires qui ne sont pas avantageuses pour la sécurité de notre pays et le bien-être de ceux qui aspirent à la citoyenneté canadienne. Il faut examiner l'utilisation du pouvoir discrétionnaire dans la Loi sur l'immigration, voir quelles personnes et quels ministères peuvent utiliser ce pouvoir.
Je veux parler de l'utilisation du pouvoir discrétionnaire dans un cas que je connais personnellement concernant un homme d'Afghanistan qui est venu au Canada et que j'ai rencontré. Il s'appelle Sharif Karimzada. Le secrétaire parlementaire est au courant de ce cas également. Cet homme est venu au Canada comme réfugié. Il a été jugé comme ayant fait partie d'un régime visé à l'article 19.1 de l'ancienne loi. Il n'y avait pas de droit d'appel dans ce cas, ce qui fait qu'il n'a pas pu expliquer sa situation. Il a simplement été classé dans cette catégorie et jugé inadmissible, sans égard aux circonstances.
La ministre a essayé de corriger ce problème à l'article 25 de la Loi sur l'immigration. Du moins, c'est ce que je lis entre les lignes. Je voudrais cependant qu'elle me le confirme.
Il faut qu'il y ait un certain pouvoir discrétionnaire relativement aux critères d'inadmissibilité parce que la personne que j'ai mentionnée prouve que le système ne fonctionne pas. Nous laissons entrer dans notre pays des gens que nous n'aurions pas dû laisser entrer, ce que nous découvrons plus tard, et nous en excluons d'autres. C'est pourquoi nous devons examiner attentivement ce projet de loi et c'est pourquoi l'Alliance proposera des options à la ministre en espérant qu'elle les acceptera. Nous continuerons d'être la voix de ceux qui réclament des changements, non seulement en ce qui a trait à ce projet de loi, mais pendant toute la durée de la présente législature, et nous le ferons pour l'avenir de notre pays.
M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Alliance canadienne): Madame la Présidente, je n'avais pas l'intention de prendre la parole à propos du projet de loi avant d'avoir examiné le budget de ce ministère qui a été publié aujourd'hui. Il est assez intéressant de constater que le budget d'un ministère qui éprouve autant de problèmes que Citoyenneté et Immigration en a connus ces dernières années ait été réduit de 61 millions de dollars par rapport à l'année précédente. Ce qui m'inquiète réellement, c'est la section sur la gestion de l'accès au Canada, qui se lit comme suit:
Le secteur d'activité, Gérer l'accès au Canada:
élabore des politiques et des programmes afin d'empêcher qu'on recoure abusivement aux programmes du Canada concernant la citoyenneté, l'immigration et les réfugiés, et d'assurer la protection des Canadiens ainsi que la sécurité du Canada;
contribue à la gestion des migrations et des déplacements internationaux en luttant contre les migrations clandestines, y compris le trafic de personnes, tout en facilitant le mouvement des voyageurs légitimes;
admet au Canada les personnes respectant les dispositions de la Loi sur l'immigration et ses règlements; refuse l'admission aux personnes ne respectant pas ces dispositions, y compris les criminels et les terroristes;
détecte les cas où l'on recourt abusivement aux programmes concernant la citoyenneté, l'immigration et les réfugiés;
gère les cas soumis à la CISR, à la Cour fédérale et à d'autres tribunaux;
détient les personnes qui posent un risque grave pour les Canadiens ou qui refusent de comparaître aux fins de poursuites judiciaires en matière d'immigration; et
renvoie les personnes n'ayant pas légalement le droit de demeurer au Canada.
Le ministère et le gouvernement ont été critiqués ces derniers jours à propos du fait qu'il a fallu des mois avant qu'on se rende compte qu'un membre d'une bande criminelle était entré au Canada. Ce criminel est actuellement en prison où l'on voit à son bien-être et à ses soins dentaires et où il bénéficie de tout ce que la moyenne des Canadiens ne peuvent s'offrir. De toute évidence, il n'est pas entré au Canada de façon légale. Nous aurions dû l'attraper à la frontière. Il est une des personnes les plus recherchées au pays.
Le plus grand criminel chinois au monde se trouve dans une prison de Vancouver. Il a vécu tranquillement ici pendant un bon bout de temps, prenant régulièrement un vol vers Windsor où il allait dépenser son argent au casino. On ne trouve pas pire escroc dans toute la Chine. Sept de ses copains ont été exécutés l'autre jour. Et nous savons qu'il ne quittera jamais le pays parce que désormais, nous avons une loi qui interdit l'expulsion de quiconque risquerait d'être condamné à mort dans son pays. Les chances sont minces pour qu'il survive 24 heures s'il rentre en Chine, et tant mieux, d'ailleurs, compte tenu des gestes qu'il a posés.
Il y a aussi cette fillette de 11 ans à qui deux hommes et une femme, connus pour leurs activités criminelles, ont fait passer la frontière illégalement en Colombie-Britannique. La police savait parfaitement à qui elle avait affaire. Que prévoit le budget? Des crédits de 61 millions de dollars pour la défense, mais là n'est pas le plus important. L'important concerne la section du budget des dépenses relative à la gestion de l'accès au Canada.
L'année dernière, les crédits à ce poste totalisaient 171 953 000 $. Cette année, ils se chiffrent à 142 187 000 $, soit 30 millions de moins pour un programme qui fonctionne déjà mal. Nous aurons bien l'occasion d'examiner le budget prochainement, afin de déterminer où le gouvernement dépense plus, mais, dans un pays où l'accès illégal constitue un problème sérieux, le gouvernement a retranché 30 millions de dollars cette année à un programme qui pourrait prévenir ce type de problème.
Des députés de ce côté-ci de la Chambre et de l'autre côté ont participé à un comité de l'immigration où il a été question d'installer des scanners à divers endroits dans le monde. Les porte-parole en matière d'immigration de ce côté-ci de la Chambre le répètent depuis 1993. Nous avons même convaincu les libéraux, les néo-démocrates et les bloquistes d'accepter, il y a quelques années, que l'on installe des scanners dans certains pays. Je pense, madame la Présidente, que vous siégiez peut-être au comité en question lorsque nous avons examiné la question.
Nous avons mis en place un programme en Malaisie en ayant recours à des scanners, à des agents de la GRC et à des agents d'immigration. On a ainsi empêché de nombreuses personnes d'entrer au pays. Nous avons épargné des millions de dollars en bloquant les gens à la source au lieu d'attendre qu'ils entrent au Canada et de leur donner tous ces droits.
C'est scandaleux lorsqu'on entend parler de l'histoire de cette petite fille de 11 ans. La prostitution est l'une des choses les plus terribles qui puissent arriver à nos enfants. fillette aurait dû être arrêtée à la frontière avec ces trois malfaiteurs et remise aux autorités compétentes pour veiller à ce qu'elle ne soit pas condamnée à ce genre de vie.
Le tueur à gages de la mafia chinoise qui était à Vancouver n'aurait jamais pu entrer au Canada si nous avions le système de contrôle voulu. Le tueur à gages qu'on a retrouvé à Québec et qui donne tant de fil à retordre au ministre n'aurait pas pu entrer au Canada si nous avions le système de contrôle nécessaire à cet égard. Quelle est la solution du gouvernement? Il veut réduire de 30 millions de dollars les crédits destinés à ce programme. Les Canadiens vont être furieux.
Généralement, nous n'aidons pas vraiment la ministre, mais nous allons essayer de l'aider maintenant à récupérer une partie de l'argent pour son ministère afin de corriger les lacunes du programme. Les Canadiens ne devraient pas avoir à accepter ce type de programme. Ils ne devraient pas être forcés d'endurer des malfaiteurs et des criminels qui entrent au Canada quotidiennement. Les Canadiens en ont assez. Lorsqu'ils entendront les nouvelles aujourd'hui, ils seront scandalisés à juste titre.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): La Chambre est-elle prête à se prononcer?
Des voix: Le vote.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Le vote porte sur la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): À mon avis, les non l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Convoquez les députés.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Le vote sur la motion est reporté.
* * *
LOI SUR LES ESPÈCES EN PÉRIL
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 21 février, de la motion: Que le projet de loi C-5, Loi concernant la protection des espèces sauvages en péril au Canada, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD): Madame la Présidente, bien que j'aie déjà pris la parole à quelques occasions et posé quelques questions, c'est la première fois que j'ai la chance de parler des résultats des élections de novembre et de souligner l'appui et la confiance que m'ont manifestés mes électeurs de Windsor—St. Clair.
Je les remercie de leur appui et je remercie mes partisans de tout le travail qu'ils ont fait pour moi, en faisant de la sollicitation personnelle et des appels téléphoniques. C'est difficile d'exprimer tout cela en mots. Il y a également d'autres groupes que j'aimerais remercier. Je vais commencer par ma famille, mon épouse avec laquelle je vis depuis 31 ans et mes trois enfants, qui ont participé très activement à la campagne et qui m'ont beaucoup aidé au cours des dernières élections comme au cours des deux précédentes. Je tiens à les en remercier publiquement.
Quelques groupes m'ont également apporté une aide particulière. Le mouvement ouvrier de la ville de Windsor est très fort et bon nombre de ses membres m'ont accordé leur aide, tant le jour des élections que pendant la campagne qui a précédé.
Il y a un autre groupe que je tiens expressément à mentionner. J'avais promis de souligner que c'est un des plus importants groupes à avoir influé sur l'issue des élections dans ma circonscription, car les résultats y ont été très serrés. Ce sont les citoyens qui ont travaillé à une époque aux États-Unis et qui sont rentrés vivre au Canada à leur retraite, pour y constater que le gouvernement avait profondément bouleversé le régime fiscal. Ils sont très préoccupés par ce simulacre de justice et ils ont l'intention de voir à ce que la situation soit modifiée. Je m'attaquerai également à cette question en leur nom jusqu'à ce que ce simulacre de justice ait disparu. Je tiens à saluer les gens qui m'ont appuyé tout au long de la campagne et qui ont voté pour moi le jour du scrutin.
J'interviens aujourd'hui au sujet du projet de loi C-5, qu'il est maintenant convenu d'appeler la mesure législative concernant les espèces en danger. Ce n'est pas la première fois que cette mesure législative est étudiée à la Chambre. En réalité, le projet de loi initial a été déposé à la Chambre en 1994. Tant dans ses livres rouges que dans ses discours du trône, le gouvernement a continuellement promis cette mesure législative. Sept ans plus tard, en réalité huit ans après la première élection du gouvernement, cette mesure législative n'a toujours pas été adoptée.
Cette tergiversation et cette inaction caractérisent malheureusement beaucoup trop souvent le bilan du gouvernement dans le domaine de l'environnement. Ce n'est pas du tout un bon bilan. Aucune nouvelle mesure législative sur l'environnement n'a été adoptée depuis 1993. Le régime applicable à l'intendance et à la protection de notre environnement a fait l'objet de modifications, mais n'a connu aucun changement draconien.
À l'heure actuelle, nous ne possédons aucune mesure législative protégeant de façon utile nos espèces en danger. C'est intéressant. Des sondages effectués par le gouvernement révèlent qu'il existe au Canada un très fort appui en faveur d'une mesure législative visant à protéger nos espèces en danger. À l'occasion d'un sondage récent mené par Pollara à la demande du gouvernement fédéral, on a constaté que 94 p. 100 des Canadiens de toutes les régions appuient l'adoption d'une mesure législative fédérale concernant les espèces en danger. Plus important encore, il convient de souligner que 74 p. 100 des habitants des collectivités rurales sont favorables à une mesure législative obligatoire, et non discrétionnaire, concernant la protection des habitats.
En dépit de ce vaste soutien de la part des groupes environnementaux, des syndicats, des scientifiques et des porte-parole de l'industrie préconisant une mesure législative vigoureuse et efficace concernant les espèces en danger, nous n'avons toujours rien de tel à l'heure actuelle.
Le projet de loi C-5 dont nous sommes saisis est, à quelques modifications mineures près, essentiellement le même que le projet de loi C-33 dont nous avons été saisis au cours de la législature précédente. Il est intéressant de constater que le projet de loi C-5 et le projet de loi C-33 sont considérablement plus faibles que le projet de loi C-65 que le gouvernement avait présenté en 1996.
D'après des données scientifiques solides, nous avons actuellement au Canada 354 espèces en voie de disparition. Voilà un rappel brutal que notre patrimoine naturel est menacé. Le rythme auquel les espèces disparaissent n'a jamais été aussi élevé.
À l'échelle mondiale, nous observons actuellement plus d'extinctions d'espèces naturelles qu'à n'importe quelle période de notre histoire depuis la disparition des dinosaures. Le taux d'extinction actuel est plus de 10 000 fois plus élevé que le taux naturel. Pour m'exprimer autrement, autrefois, deux ou trois espèces en moyenne disparaissaient chaque année en raison de causes naturelles. À l'heure actuelle, cette année et au cours des années précédentes, deux ou trois espèces environ disparaissent à chaque heure, toutes pour des causes humaines. Au rythme actuel, d'après les scientifiques, nous risquons de voir disparaître 25 p. 100 des espèces sur terre au cours des 30 prochaines années.
Voyons ce qui se passe au Canada. Nous avons nos propres problèmes. Au cours des 150 dernières années, 27 espèces sont devenues éteintes. Comparons ce chiffre à celui que j'ai cité tout à l'heure. Actuellement, 354 espèces en voie de disparition ou menacées d'extinction figurent sur notre liste. Cette liste s'allonge d'année en année. Quarante espèces s'y sont ajoutées au cours des deux dernières années, depuis 1999.
Voilà presque dix ans que le Canada attend ce projet de loi. En 1992, lors du Sommet de la Terre, le Canada s'est engagé à élaborer une mesure législative qui viserait expressément à protéger nos espèces vulnérables. Le Canada a été un des premiers signataires de cet accord. Or, nous sommes maintenant en 2001 et nous examinons encore la mesure législative.
En outre, le projet de loi qui a été présenté à la Chambre est foncièrement faible. Permettez-moi d'aborder une des grandes faiblesses du projet de loi. Le Parti libéral et le gouvernement nous avaient promis que la mesure législative protégerait les espèces en péril. Ce que le projet de loi dit maintenant, ce n'est pas que nous allons protéger les espèces en péril. C'est que nous allons peut-être les protéger.
Ce projet de loi accorde un pouvoir discrétionnaire énorme au ministre et au Cabinet. Tout ce qu'il demande au gouvernement, c'est de tenir des consultations et de présenter un rapport. Il ne lui demande pas de protéger, en mettant les choses au pire, ne serait-ce qu'une des espèces. Pas une. Il pourra tenir ces consultations avec le milieu scientifique, avec les autres Canadiens, et il pourra faire fi de leurs opinions. Étant donné son bilan, c'est probablement ce qu'il fera.
Le projet de loi C-5 est très faible. Il est beaucoup plus faible que les lois de notre partenaire, les États-Unis, et même que celles du Mexique.
Je vais revenir à quelques-uns des sondages réalisés auprès de la population dans lesquels on demandait ce qu'elle était disposée à accepter dans ce projet de loi. La plupart des Canadiens nous ont dit qu'ils étaient disposés à en accepter les conséquences économiques pour assurer la protection de nos espèces naturelles. Huit Canadiens sur dix ont préconisé l'imposition de restrictions aux secteurs industriels qui présentent une menace pour les espèces en péril et se sont dits d'accord pour qu'on limite des activités comme l'exploitation forestière, l'exploitation minière et même le tourisme.
Je vais parler un instant de ma propre région. Dans ma circonscription, à part les mines, nous avons le plus petit des parcs nationaux. Il y a environ 10 ans, il est devenu évident qu'il fallait limiter le nombre de visiteurs dans ce parc. Nous l'avons donc coupé de moitié à cause du risque auquel une partie de la faune du parc était exposé. La population de ma région a accepté cette restriction. Il y a eu une campagne de sensibilisation et d'une façon générale, les gens ont compris le risque qu'il y avait et ils ont accepté de réduire leurs activités dans le parc ainsi que le nombre de fois où ils pouvaient s'y rendre. Ce n'était pas facile, mais ils ont accepté. Je pense que la même chose s'applique dans le reste du Canada. Nous sommes prêts à accepter ces concessions.
Le projet de loi renferme trois points faibles sur lesquels je voudrais m'arrêter. Le premier et le plus important est le manque de protection de l'habitat. Selon les estimations, les humains seraient presque toujours à blâmer quand des espèces disparaissent. Dans ce contexte, la perte de l'habitat est à 80 p. 100 responsable de la disparition d'espèces au Canada.
Si ce projet de loi était adopté, il ne protégerait pas du tout l'habitat. Comparons la situation avec celle qui règne aux États-Unis et au Mexique. Ces deux pays ont adopté des lois que non seulement protègent les espèces, mais aussi leur habitat. Dans le projet de loi que l'on propose au Canada, cette protection relèverait du pouvoir discrétionnaire du ministre et du gouvernement. Si des espèces méritent qu'on les protège, protégeons-les.
Le Président: Lorsque l'étude de ce projet de loi reprendra, le député de Windsor—St. Clair disposera encore de sept minutes environ sur le temps qui lui a été attribué pour faire ses observations.
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
[Traduction]
L'ORDRE DU CANADA
M. Andrew Telegdi (Kitchener—Waterloo, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je salue deux personnalités distinguées de ma circonscription qui recevront l'Ordre du Canada demain. Ce sont MM. Howard Dyck et John English.
Howard Dyck est chef de choeur et directeur artistique du choeur philharmonique de Kitchener-Waterloo. On le réclame comme moniteur en musique, conférencier et juge. Hôte des émissions Saturday Afternoon at the Opera et Choral Concerts à la radio de la CBC, il stimule l'enthousiasme des Canadiens et leur curiosité pour toutes les formes d'art vocal.
John English est professeur d'histoire et de sciences politiques et directeur du Centre on Foreign Policy and Federalism de l'Université de Waterloo. Par ses écrits, il a contribué à mieux faire connaître et comprendre notre riche patrimoine culturel.
Outre son intérêt pour l'histoire, M. English a été un excellent député, représentant Kitchener de 1993 à 1997. Sa contribution et son sens de la collégialité manquent beaucoup à ses anciens électeurs et à ceux d'entre nous qui ont travaillé avec lui.
Au nom de la Chambre, je félicite Howard Dyck et John English de leur admission à l'Ordre du Canada.
* * *
LES TECHNIQUES DE REPRODUCTION
M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne): Monsieur le Président, cette année, le Dr Severino Antinori et son équipe de médecins américains et japonais procéderont à la première expérience de clonage humain, la première d'une série de 200 qui est prévue.
Ces expériences et leurs résultats auront des conséquences graves et considérables pour l'humanité. Le clonage humain fait surgir des questions scientifiques et éthiques fondamentales pour l'humanité en général et pour les Canadiens en particulier.
Le Canada n'a pas le cadre réglementaire nécessaire pour fixer les paramètres de ce genre de recherche. Il y a huit ans que la Commission royale d'enquête sur les techniques de reproduction a recommandé la mise en place d'un cadre national pour soutenir et régir ces techniques. Il y a cinq ans que le gouvernement libéral a présenté un projet de loi mal conçu à ce sujet, et il a dû le retirer.
J'exhorte le gouvernement à présenter immédiatement une mesure législative sur le clonage humain et d'autres techniques se rattachant à la reproduction et à la génétique.
* * *
BIBI ZAMAN
M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir à la Chambre pour parler d'une Canadienne remarquable, une de mes électrices, Mme Bibi Zaman. Mme Zaman a fondé le Canadian Center for Women's Education and Development. Avec l'aide de dix bénévoles, le centre offre un éventail de services pour aider les femmes à se remettre sur pied, et notamment à échapper à une relation de violence.
Madame Zaman dit qu'elle veut donner aux femmes le pouvoir de prendre leur vie en main dans l'intérêt de leurs enfants, que c'est la mission de sa vie. Elle dirige cette organisation de façon bénévole depuis 1990 et a dépensé des milliers de dollars au fil des ans pour couvrir les dépenses de cette organisation qui offre également une clinique médicale qui fonctionne elle aussi grâce à des médecins bénévoles.
Elle espère également mettre sur pied une clinique juridique gratuite en mars. Madame Zaman a été choisie avec 59 autres Canadiens pour recevoir de la Gouverneure générale le Prix pour l'entraide. À titre de député et surtout d'ami de Mme Zaman, je tiens à la féliciter.
* * *
LA GALERIE DE LA RENOMMÉE ET LE MUSÉE NAUTIQUES
Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je profite de cette occasion pour inviter tous les députés et, en fait, tous les Canadiens à La Galerie de la Renommée et au Musée Nautiques du Canada qu'on retrouve à la piscine Pan-Am, l'une des meilleures en Amérique du Nord, qui est située dans ma circonscription, dans la baie Poseidon, qui porte bien son nom.
Vaughan Baird, le président du musée, m'a récemment fait visiter à nouveau les installations. Au fil des ans, il a su acquérir un ensemble d'objets représentant l'art et l'histoire des sports aquatiques au Canada et dans le monde entier. La collection comprend des articles allant de la célèbre collection Cutty Sark de voiliers et de souvenirs nautiques aux maillots de bain portés par le médaillé d'or olympique Mark Tewkesbury et même par le regretté Pierre Elliott Trudeau.
Des articles intéressants venant de tous les sports aquatiques se retrouvent là. Ils représentent la natation, le water-polo, la nage synchronisée et, bien entendu, le sport favori de M. Trudeau, le plongeon. Toutes ces pièces ont une valeur d'à peu près 4 millions de dollars.
Je félicite M. Baird et son équipe de La Galerie de la Renommée pour avoir réuni et conservé une collection aussi spéciale.
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LE TRANSPORT URBAIN
M. Alan Tonks (York-Sud—Weston, Lib.): Monsieur le Président, le nombre d'automobiles et de camions qui roulent sur les routes canadiennes a doublé en vingt ans. La population canadienne est de plus en plus préoccupée par la détérioration de la qualité de l'air et de l'eau et par l'étalement urbain qui se poursuit inexorablement, ce qui accroît la congestion sur les routes et la rage au volant et nuit gravement à l'environnement et à l'économie.
Les transports en commun représentent un moyen abordable de se déplacer et jouent un rôle crucial dans le développement durable pour toutes les collectivités, tant urbaines que rurales.
L'Association canadienne du transport urbain représente les fournisseurs de services de transport en commun, les fournisseurs de l'industrie, les organismes gouvernementaux et les organisations connexes s'occupant de transport au Canada. Elle s'efforce de faire valoir le rôle déterminant que joue le transport urbain dans l'amélioration de la mobilité et dans la sauvegarde d'un environnement plus durable pour tous les Canadiens.
Les membres de l'Association canadienne du transport urbain sont à Ottawa aujourd'hui pour rencontrer des députés afin de discuter du transport en commun et de la crise dans ce domaine et afin de faciliter les discussions et la recherche de solutions potentielles. J'interviens pour saluer et féliciter l'ACTU.
* * *
LE COMMERCE
M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, hier, le ministre se trouvait à Washington pour parler de commerce, un mois avant la fin de l'accord canado-américain sur le bois d'oeuvre.
Naturellement, les arguments fusent de toutes parts et la coalition américaine du bois d'oeuvre adopte une position agressive par rapport aux exportations de bois d'oeuvre canadien. Les Américains menacent d'avoir recours à des mesures anti-dumping et à des mesures compensatrices.
L'industrie canadienne a diligemment travaillé pour mettre au point une position consolidée en faveur du retour au libre-échange dans le domaine du bois d'oeuvre.
Les producteurs des provinces signataires, soit la Colombie-Britannique, le Québec, l'Ontario et l'Alberta, ont, dans une large mesure, appris à se plier aux grandes différences qui les distinguent. Ce consensus a été bénéfique pour le Canada.
La détermination de chacun sera mise à l'épreuve durant les jours à venir qui s'annoncent difficiles. Je prie tous les partis politiques et toutes les provinces d'agir dans le meilleur intérêt du Canada: le libre-échange pour tous.
* * *
L'IMMIGRATION
L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, comme chaque député le sait ou devrait le savoir, il arrive souvent que quelqu'un aille au bureau de circonscription d'un député pour demander de l'aide en matière d'immigration. Cela se produit quotidiennement. Cela fait partie du travail du député.
Les bureaux de circonscription de Montréal, de Toronto et de Vancouver reçoivent facilement de 2 000 à 3 000 demandes de cette nature par année. Il est de notoriété publique que les bureaux de circonscription des ministres reçoivent encore plus de demandes que ceux des simples députés, ces demandes provenant souvent de circonscriptions voisines.
Il est aussi de notoriété publique que les demandes de renseignements qu'un bureau de circonscription reçoit au sujet du traitement d'une demande d'immigration sont des questions de routine et qu'elles sont rarement portées à l'attention du député, généralement occupé à Ottawa.
Il est donc fort regrettable que des députés de l'opposition qui ne connaissaient pas cet aspect du travail usuel accompli par un député dans sa circonscription aient mené une campagne de dénigrement à l'endroit du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, lequel est, comme chacun le sait, un travailleur acharné et un parlementaire profondément dévoué envers les électeurs de sa circonscription.
* * *
[Français]
LA BAIE DE BEAUPORT
M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ): Monsieur le Président, récemment, nous apprenions avec joie que trois députés libéraux fédéraux de la région de Québec appuyaient la position du Bloc québécois dans le dossier de la baie de Beauport.
Sans doute penauds de n'avoir pu réussir à bloquer les fusions municipales, figure de proue de leur programme électoral, les voilà qui entérinent les positions bloquistes. Qu'à cela ne tienne, bienvenue du côté du bon sens.
L'administration portuaire de Québec empêche depuis 20 ans le développement récréotouristique d'un site exceptionnel, l'un des rares où les Québécois ont encore accès au fleuve, soit la baie de Beauport.
Pire, en décembre dernier, cet organisme affirmait très sérieusement vouloir transformer la plage actuelle en terminal pour vraquiers et recréer la plage un peu plus loin, en empiétant sur le fleuve. Cette annonce a provoqué un tollé général et une mobilisation populaire.
L'administration portuaire rendra public son plan définitif d'utilisation des sols très bientôt. Espérons qu'elle prendra note du consensus régional qui entoure l'avenir de la baie de Beauport.
* * *
[Traduction]
L'AGRICULTURE
M. Murray Calder (Dufferin—Peel—Wellington—Grey, Lib.): Monsieur le Président, le caucus rural libéral national rencontre les agriculteurs et les organisations agricoles de toutes les régions du Canada afin de discuter des défis sérieux que doivent relever les familles d'agriculteurs de nos jours.
À titre de président du caucus rural, je tiens à dire que je comprends les producteurs agricoles du Canada, que je les appuie et que je suis dévoué à leur cause.
Le gouvernement doit axer son attention sur les agriculteurs, notamment en ces temps difficiles pour eux. L'avenir de la sécurité alimentaire au Canada dépendra des mesures que nous prenons aujourd'hui.
* * *
LES AFFAIRES AUTOCHTONES
M. Reed Elley (Nanaïmo—Cowichan, Alliance canadienne): Monsieur le Président, les faits sont clairs: les logements inadéquats, les mauvais systèmes d'aqueduc, l'écroulement de l'infrastructure, le sous-développement économique et la faible éducation causent aux autochtones du Canada des souffrances inutiles.
Le vérificateur général vient de confirmer ce que les membres des bandes indiennes et l'opposition officielle disent depuis des années. Je cite:
Indépendamment du transfert des programmes, le ministère conserve le devoir de rendre compte de la façon dont les fonds fédéraux sont utilisés et de veiller à l'obtention de résultats acceptables.
Il ajoute que le ministre et son ministère connaissent une grande variété de problèmes, dont une mauvaise reddition de comptes et des résultats inacceptables.
Pourquoi la bande Sagkeeng n'a-t-elle pas d'école adéquate pour ses enfants? Pourquoi les besoins en matière d'éducation et de santé des Cris de Sturgeon Lake ne peuvent-ils être satisfaits? Pourquoi les Mohawks de Kanesatake contestent-ils la validité des résultats des récentes élections sur leur réserve? Le ministère est incapable de répondre adéquatement à ces questions.
J'exhorte le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien à écouter ces autochtones et à leur rendre des comptes. Le vérificateur général a clairement dit que ces questions devaient être réglées. Je me joins au vérificateur général pour inciter le gouvernement à mettre de l'ordre dans cette affaire.
* * *
L'AGRICULTURE
M. Paul Steckle (Huron—Bruce, Lib.): Monsieur le Président, j'interviens de nouveau à la Chambre pour rappeler à chacun des députés que nous sommes à moins de trois mois des semailles du printemps et que nos agriculteurs sont encore en pleine détresse. Dans bien des cas, faute d'une aide immédiate et significative, les semences ne pourront être mises en terre cette année.
Au risque de me répéter, je signale que des années de subventions déloyales accordées aux agriculteurs américains et européens ont nettement défavorisé le secteur agricole du Canada. Ajoutons à cela la hausse vertigineuse des coûts de production et le fléchissement constant du prix des produits de base et l'on comprendra que notre industrie agricole jadis florissante s'affaiblit rapidement.
Les secteurs ruraux et agricoles ont toujours formé la base solide sur laquelle repose le Canada. L'agriculture est la base de notre pays et cette base s'effrite.
Aucune solution temporaire ne pourra suffire. Il faut agir sans tarder pour réparer les dommages et prendre les mesures nécessaires afin de garantir à nos agriculteurs un avenir prospère. Différer l'aide qui leur est indispensable, c'est la refuser.
* * *
LA VERSATILE TRACTORS
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, si je prends la parole aujourd'hui, c'est par solidarité avec les 250 travailleurs canadiens de l'automobile, à la Versatile Manufacturing, à Winnipeg, qui sont en grève depuis près de quatre mois pour tenter de garder ouverte la dernière usine de tracteurs agricoles du Canada.
Depuis que John Buhler a pris le contrôle de la Versatile Tractors, 350 travailleurs ont été mis à pied et les 250 employés restants font âprement la grève sur des questions fondamentales de sécurité d'emploi. Pire, Buhler menace maintenant de déménager l'usine à Fargo, au Dakota du Nord, emportant avec lui un prêt de 32 millions de dollars du gouvernement fédéral.
Pourquoi le gouvernement permettrait-il qu'une entreprise bénéficie d'un tel prêt sans en exiger le remboursement si l'entreprise quitte le pays? Allons-nous attendre tranquillement que 32 millions de dollars de l'argent des contribuables canadiens servent à créer des emplois pour des Américains à Fargo, au Dakota du Nord?
C'est de la trahison économique que d'abandonner ainsi des travailleurs canadiens. J'exige que le gouvernement se fasse rembourser le prêt avant que John Buhler ne parte pour Fargo, au Dakota du Nord, et sauve les emplois de la Versatile Tractors pour des Canadiens.
* * *
[Français]
LES FEMMES
Mme Pierrette Venne (Saint-Bruno—Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, à l'occasion de la Journée internationale des femmes qui sera célébrée le 8 mars prochain, le thème québécois étant: «Cliquons sur nos pouvoirs», il nous faut, tous ensemble, reconnaître l'apport particulièrement dynamique des femmes au développement économique du Québec et du Canada.
De tout temps, les femmes ont travaillé, peu importe leur origine, leur âge, leur culture et leur statut. Au Québec, comme partout ailleurs, elles ont dirigé des écoles et des hôpitaux, quand elles n'étaient pas à la tête d'une famille très nombreuse. Elles ont travaillé aux champs, soigné le bétail, pris la relève dans les usines en temps de guerre, effectué mille métiers où elles ont toujours excellé.
À toutes ces femmes qui, encore aujourd'hui, luttent pour obtenir l'égalité et la justice sociale, le Bloc québécois les assure de son appui inconditionnel.
* * *
[Traduction]
LE COMMERCE
M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Monsieur le Président, l'attitude cavalière du ministère du Commerce international préoccupe et désole beaucoup les entreprises canadiennes.
La question du bois d'oeuvre s'en va à la dérive comme un baril vers les chutes Niagara. Le gouvernement n'a même pas établi un consensus dans tout le Canada et encore moins conclu un marché avec les Américains. Au lieu de cela, la crise éclatera, le 1er avril, lorsque les Américains useront sûrement de mesures antidumping et de représailles contre le bois d'oeuvre canadien.
Les pommes de terre de l'Île-du-Prince-Édouard sont interdites aux États-Unis, leur principal marché. Le gouvernement n'a même pas commencé à régler cette affaire et débuteront bientôt des négociations sur les questions énergétiques, les produits laitiers et le blé.
Pour en revenir au bois d'oeuvre, je demanderai au ministre du Commerce de commencer tout de suite à établir un consensus dans tout le Canada et, notamment, à examiner la demande des quatre premiers ministres provinciaux de l'Atlantique de reconduire l'accord maritime.
* * *
L'HÉPATITE C
M. Grant Hill (Macleod, Alliance canadienne): Monsieur le Président, les victimes du sang contaminé continuent d'être traitées injustement. Après une enquête de trois ans sur la destruction de dossiers gouvernementaux, la GRC a décidé qu'elle ne disposait pas d'assez de preuves pour pouvoir porter des accusations. C'est le dernier et plus récent chapitre de cette triste histoire.
À cause de la négligence du gouvernement, des dizaines de milliers de Canadiens innocents ont été mortellement contaminés. Ces Canadiens ont lutté sans relâche pour obtenir justice. En dépit de son évidente responsabilité morale, le gouvernement refuse toujours de faire ce qui s'impose, soit emboîter le pas au premier ministre de l'Ontario Mike Harris en indemnisant toutes les victimes qui ont été contaminées.
Le gouvernement libéral ne devrait pas encore compter ces victimes pour battues. J'ai pu travailler de près avec elles pendant cinq ans. Je sais qu'elles vont continuer de se battre pour ce qui n'est que justice selon elles et tous les Canadiens: une pleine indemnisation de leurs souffrances et la reconnaissance du caractère juste de leur cause afin qu'il n'y ait plus jamais de tragédies semblables.
QUESTIONS ORALES
[Traduction]
L'ÉCONOMIE
M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, hier, le Canada atlantique a reçu une autre gifle du gouvernement fédéral dans une réponse du ministre des Finances.
Les Canadiens de l'Atlantique veulent amener leurs provinces considérées comme pauvres au même rang que les provinces mieux nanties, mais le ministre des Finances a fermement l'intention de leur mettre des bâtons dans les roues en continuant de récupérer les recettes provenant des ressources naturelles à des taux de près de 100 p. 100. Hier, il a dit aux trois ministres de l'Atlantique qu'aucun changement ne serait apporté à ce paiement de transfert avant 2004.
Pourquoi le ministre des Finances force-t-il le Canada atlantique à attendre presque quatre ans encore avant de pouvoir bénéficier d'une bonne croissance économique?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le député confond des choses tout à fait distinctes. Je soupçonne qu'il ne s'en rend même pas compte. Ainsi, au lieu d'aller dans les détails, je serais ravi s'il pouvait parler au gouvernement de l'Alberta et lui demander s'il est prêt à traiter les ressources naturelles de la Nouvelle-Écosse et de Terre-Neuve différemment de celles de sa province. Je lui serais très reconnaissant s'il pouvait parler aux gouvernements du Manitoba et de la Saskatchewan, de même qu'à ceux du Nouveau-Brunswick et de l'Île-du-Prince-Édouard, et leur demander s'ils sont prêts à faire de même.
Nous sommes très ouverts en ce qui concerne ce dossier, mais il faut qu'il y ait consensus au niveau des provinces. Je peux dire au député que ce consensus n'existe pas et qu'il n'existait pas non plus lorsqu'il occupait le poste de trésorier de l'Alberta.
M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le ministre doit parler à son propre collègue, le ministre de l'Industrie, qui, lorsqu'il était premier ministre de Terre-Neuve, voulait qu'on amorce des discussions à ce sujet. C'est à lui qu'il devrait parler.
Le ministre a-t-il demandé à chacune de ces autres provinces si elle sont prêtes à avoir des discussions au sujet de l'avenir économique du Canada atlantique? Il sera peut-être surpris de la réponse. A-t-il fait cela, le fera-t-il ou a-t-il décidé de lui-même que l'avenir économique du Canada atlantique dépendra uniquement des caprices des libéraux fédéraux?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Oui, monsieur le Président, j'ai fait cela, j'en ai parlé aux autres provinces. D'ailleurs, comme le député le sait puisqu'il a déjà été trésorier de l'Alberta, je l'ai fait à une réunion fédérale-provinciale des ministres des Finances où il était présent. Il sait que je l'ai fait et je suis certainement ouvert à cela.
M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le ministre veut-il dire qu'il a consulté chacune des provinces et qu'elles ont dit qu'elles ne voulaient pas rouvrir les discussions à ce sujet? Est-ce ce qu'il dit?
Qu'il nous dise clairement aujourd'hui ce qui s'est passé lorsqu'il a posé la question à chacune des provinces, comme il dit l'avoir fait. Quelles provinces ont refusé catégoriquement de rouvrir les discussions et lesquelles ont dit oui?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, j'ai parlé aux autres provinces de la nécessité absolue de donner au Canada atlantique le genre d'élan dont il a besoin, de même qu'aux autres régions du Canada qui ont demandé une telle aide.
J'ai discuté de cette question avec les provinces à plusieurs reprises lors de réunions fédérales-provinciales. C'est dans ce contexte que le gouvernement fédéral, suivant le concept élaboré par notre caucus de l'Atlantique, a injecté 700 millions de dollars dans la stratégie de l'Atlantique l'an dernier. Nous ne faisons pas que parler, nous agissons.
* * *
LE CRIME ORGANISÉ
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Alliance canadienne): Monsieur le Président, Alfonso Caruana est un membre important du crime organisé. Il purge une peine de 18 ans pour avoir fait entrer de grandes quantités de cocaïne au Canada.
Après un an, il vit dans un confort semblable à un celui d'un grand appartement au pénitencier Fenbrook, rebaptisé le Club Fed. Ses deux frères ont aussi été transférés dans un pénitencier à sécurité moindre à Bath après seulement un an de détention. Leur neveu a été libéré sous condition après avoir purgé seulement un an de sa sentence de quatre ans.
Le solliciteur général peut-il nous dire comment le fait de transférer ces détenus si rapidement dans des pénitenciers à sécurité moindre représente un traitement plus dur envers le crime organisé, ce qui est, semble-t-il, un de ses objectifs?
L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le député a raison, le gouvernement se montre plus dur envers le crime organisé.
Lorsque des délinquants commettent des crimes, ils sont évalués. Ils peuvent purger leur peine dans un établissement à sécurité maximale, moyenne ou minimale.
Ce qui se passe au Canada, c'est que les criminels doivent payer pour leur crime, mais aussi subir une réadaptation.
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je ne sais pas quoi dire. J'imagine que tout est dans la rapidité de leur passage à un établissement de niveau inférieur.
La famille Caruana n'a aucune raison de cesser ses nombreuses activités au Canada. En fait, nous avons vu un homme de main de cette famille admis au Canada après que le dossier d'immigration de sa femme a reçu une attention particulière de la part du ministre des Travaux publics. On voit maintenant plusieurs membres de cette famille transférés le plus rapidement possible dans des établissements où la sécurité est moins rigoureuse.
Pourquoi la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration insiste-t-elle pour ouvrir nos frontières à ces criminels et leur permettre de s'installer au Canada?
L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, je peux donner l'assurance à tous les Canadiens que nos frontières sont sûres et que nos agents de première ligne font leur travail. Plus de 100 millions de personnes sont entrées au Canada l'an dernier. En fait, il y a eu plus de 200 millions d'entrées et de sorties aux frontières.
Que le député et les Canadiens sachent que plus de 100 millions de personnes sont entrées au Canada. Nous tenons à faire en sorte que les gens qui ont des raisons légitimes de venir au Canada passent les frontières en subissant le moins de tracasseries possible. Nous voulons aussi que les Canadiens puissent se déplacer dans le monde parce que le Canada est un pays commerçant.
* * *
[Français]
LE BOIS D'OEUVRE
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, hier, le ministre du Commerce international a semblé exaspéré par les réponses de son homologue américain sur la question du bois d'oeuvre.
La situation est inquiétante, car il y a 30 000 emplois qui dépendent de l'industrie du bois d'oeuvre au Québec.
Le ministre de l'Industrie peut-il nous confirmer que la position canadienne n'a pas changé, qu'elle ne changera pas et qu'elle va continuer d'exclure toute mesure transitoire?
[Traduction]
M. Pat O'Brien (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, le ministre a été assez clair hier après sa réunion à Washington. Il a indiqué très clairement aux Américains que le but ultime du Canada dans le domaine du bois d'oeuvre est le libre-échange.
Le gouvernement reconnaît qu'il s'agit d'une question très complexe et aussi très délicate. Les discussions se poursuivent maintenant avec les hauts fonctionnaires. Le but ultime du gouvernement est clair: favoriser le libre-échange dans le domaine du bois d'oeuvre.
[Français]
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, ce matin même, le président de l'Association du bois d'oeuvre de la Colombie-Britannique affirmait que les producteurs de cette province, tout comme ceux du Québec, sont prêts à livrer bataille pour qu'on applique les règles du libre-échange immédiatement, pas comme but ultime, pas avec des solutions transitoires, pas comme objectif à long terme, mais immédiatement.
Est-ce que le gouvernement ne serait pas mieux avisé de mettre sur pied une stratégie pour appuyer l'industrie du bois d'oeuvre plutôt qu'une stratégie pour négocier des mesures transitoires, possiblement des quotas? On ne parle pas d'objectif ultime à long terme, mais immédiatement, à la fin du mois de mars.
[Traduction]
M. Pat O'Brien (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, malgré tout le respect que je lui dois, je crois que mon collègue embrouille les choses quand il parle d'un système de contingentement. Un tel système n'intéresse pas le gouvernement. Le ministre l'a dit à plusieurs reprises.
Les discussions se poursuivent dans tout le pays avec les intéressés et les différents secteurs impliqués dans le domaine du bois d'oeuvre. Comme mon collègue le sait, les ministres fédéral et provinciaux se sont rencontrés à ce sujet dans le passé, et les hauts fonctionnaires se réuniront très bientôt à leur tour. Le bois d'oeuvre est une très grande priorité du gouvernement.
Je rappelle au chef du Bloc québécois que l'accord n'expire pas avant le 31 mars.
[Français]
M. Pierre Paquette (Joliette, BQ): Monsieur le Président, les déclarations récentes du ministre du Commerce international n'ont rien de rassurant, compte tenu en particulier des propos du secrétaire parlementaire, qui nous parlait hier et vendredi à la Chambre d'un objectif à long terme pour ce qui est du libre-échange.
On voudrait savoir du gouvernement s'il est prêt à prendre l'engagement aujourd'hui que le retour au libre-échange à court terme, c'est-à-dire à l'expiration de l'entente actuelle, est le seul objectif qu'il recherche avec les Américains?
[Traduction]
M. Pat O'Brien (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, comme mon collègue le sait, l'accord est en vigueur jusqu'à la fin mars.
Le ministre a bien fait entendre sa position et celle du gouvernement et fait connaître notre objectif final. Des discussions de haut niveau ont lieu en ce moment. Le ministre était hier à Washington. Il a bien fait entendre la position du gouvernement, et il n'est pas question d'en changer. Notre objectif final, c'est le libre-échange du bois d'oeuvre.
[Français]
M. Pierre Paquette (Joliette, BQ): Monsieur le Président, à la lumière des déclarations du ministre et du secrétaire parlementaire, est-ce qu'on peut nous assurer que le Québec ne servira pas de monnaie d'échange dans les négociations qui seront entreprises?
[Traduction]
M. Pat O'Brien (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, le ministre a bien précisé que le gouvernement représentait l'ensemble du pays et que les intérêts du pays et de toutes les régions ont été pris en considération et le seront durant les négociations.
Mon collègue sait que le ministre du Commerce international a rencontré récemment son homologue provincial, le ministre de l'Industrie et du Commerce du Québec, pour s'entretenir avec lui de cette question. L'intention est d'arriver à un système qui soit dans l'intérêt du pays tout entier, à savoir le libre-échange du bois d'oeuvre.
* * *
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, le secrétaire d'État pour l'Amérique latine rentre tout juste de Colombie. Il doit comprendre maintenant que les escadrons paramilitaires de la mort qui oeuvrent en Colombie avec l'appui d'une aide militaire américaine d'un milliard de dollars commettent impunément des meurtres et des enlèvements politiques. Loin de représenter une solution, le Plan Colombia appuyé par les États-Unis servira plutôt à envenimer le conflit et à accroître la violence.
Le secrétaire d'État pour l'Amérique latine peut-il nous affirmer très clairement qu'à l'instar de l'Union européenne et de plusieurs autres, le Canada n'appuie pas la stratégie de guerre totale prévue par le Plan Colombia? Est-il prêt à le faire aujourd'hui?
L'hon. David Kilgour (secrétaire d'État (Amérique latine et Afrique), Lib.): Monsieur le Président, je m'excuse, je ne prêtais pas attention. Veuillez répéter la question.
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, c'est justement là le problème, le gouvernement n'écoute pas.
Des droits humains fondamentaux sont bafoués en Colombie. Des vies humaines sont écrasées. Préoccupé par le commerce, le gouvernement semble tout à fait indifférent aux atrocités commises au chapitre des droits de la personne et aux meurtres commis de sang-froid en Colombie. Au moins 20 000 civils ont été tués depuis 1996. Trente-cinq syndicalistes ont été assassinés depuis que j'ai soulevé cette question ici à la Chambre en juin dernier.
Je pose donc de nouveau ma question au ministre. Pourquoi le Canada ne condamne-t-il pas l'approche militaire du Plan Colombia...
Le Président: Le secrétaire d'État à l'Amérique latine et l'Afrique a la parole.
L'hon. David Kilgour (secrétaire d'État (Amérique latine et Afrique), Lib.): Monsieur le Président, si le chef du Nouveau Parti démocratique me posait des questions plus souvent, je l'écouterais très attentivement.
Elle a tout à fait raison. Un nombre incroyable de gens ont perdu la vie en Colombie. En moyenne, 71 personnes perdent la vie de façon violente chaque jour en Colombie. Le Canada n'a pas appuyé le Plan Colombia. Nous offrons notre aide indépendamment du Plan Colombia.
Comme le sait notre collègue de la Colombie-Britannique qui m'a accompagné la semaine dernière, le taux de chômage est de 20 à 30 p. 100 en Colombie. Les gens veulent désespérément avoir accès aux marchés canadiens. Il y a 40 millions d'habitants en Colombie...
Le Président: Le député de Calgary-Centre a la parole.
* * *
LA BANQUE DE DÉVELOPPEMENT DU CANADA
Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse au vice-premier ministre.
Nous savons que Yvon Duhaime a écrit cette lettre très péremptoire au premier ministre tout juste avant les élections de 1997. Nous savons que le directeur du bureau régional de la BDC a déclaré, en juillet 1997, que le prêt à l'auberge n'était pas conforme aux politiques et critères habituels de la banque. Nous savons que le premier ministre est intervenu à au moins trois reprises au nom de M. Duhaime.
Le vice-premier ministre va-t-il nous dire ce qui s'est passé entre juillet et septembre 1997, pour que la banque ne tienne pas compte de ses propres...
Le Président: Le vice-premier ministre a la parole.
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la banque a accepté de consentir un prêt d'un certain montant. J'aimerais demander au député ce qui a amené la succursale de la caisse populaire et le fonds de solidarité du Québec à s'associer à ce prêt. Qui leur a parlé? Le député ne va-t-il pas soutenir qu'il y a quelque chose d'anormal de leur part? S'il ne peut pas l'affirmer et en faire la preuve, il n'y avait pas non plus de mal à ce que le premier ministre intervienne à titre de député de cette région.
Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, la banque a changé d'avis et nous voulons savoir pourquoi elle l'a fait au cours de cette période de deux mois?
Puisque le vice-premier ministre parle de documents, nous avons ici le document dans lequel le directeur régional de la banque indique que le prêt à l'auberge ne respectait pas les critères de la banque.
Le vice-premier ministre va-t-il déposer à la Chambre les documents et les raisons qui ont amené la banque à faire fi de l'opinion de son propre directeur régional et à se plier aux directives de Yves Duhaime et du premier ministre en approuvant un prêt qui n'était pas conforme à ses propres critères?
L'hon. Brian Tobin (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, l'intervention du chef du Parti conservateur est, de toute évidence, la conséquence d'un dialogue direct ou indirect avec l'ancien président de la banque.
Cette personne se trouve maintenant devant les tribunaux avec la BDC, au sujet d'un différend portant sur des millions de dollars. Est-il indiqué, de la part du chef du Parti conservateur, de soulever cette question devant la Chambre des communes alors que les tribunaux en sont saisis?
* * *
LES SUBVENTIONS ET CONTRIBUTIONS
Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Alliance canadienne): Monsieur le Président, aujourd'hui, la propagandiste du premier ministre a envoyé une longue lettre dans laquelle elle a donné sa version des regrettables ingérences du premier ministre dans les programmes gouvernementaux en oeuvre dans sa circonscription. Cette version contredit les faits cités par son propre patron, par le vérificateur général et par le conseiller en éthique, ou n'en tiennent pas compte.
Des quatre versions des faits qui nous ont été servies, laquelle est la bonne, celle du premier ministre, celle du vérificateur général, celle du conseiller en éthique, ou bien celle de la propagandiste?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, j'ai lu cette lettre très attentivement avant de venir à la Chambre. Elle confirme à tous égards la position du premier ministre.
La députée aurait intérêt à se faire examiner la vue et à relire la lettre parce qu'il n'y a aucune contradiction. La lettre confirme clairement la position du premier ministre, laquelle a été aussi confirmée par le conseiller en éthique.
Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Alliance canadienne): Monsieur le Président, si le premier ministre a agi avec la vitesse de l'éclair pour obtenir un emprunt de la Banque de développement du Canada pour Yvon Duhaime, ce n'est rien à côté de la vitesse avec laquelle il a pu lui obtenir la subvention du Fonds du Canada pour la création d'emplois.
Cette subvention a été annoncée le 28 mai au cours d'une conférence de presse, soit plus de deux mois avant qu'elle n'ait été approuvée. Pourquoi le premier ministre a-t-il court-circuité le processus d'approbation du ministère?
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, la députée se trompe. Revoyons les faits.
Le projet a satisfait aux critères du programme. Il a donné lieu à un investissement de 164 000 $ et à la création de 19 emplois. Il réunissait d'autres partenaires, soit la Caisse populaire et le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec, et a reçu le plein appui du gouvernement du Québec.
* * *
[Français]
LE SOMMET DES AMÉRIQUES
Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, 34 chefs d'État seront bientôt réunis au Québec dans le cadre du Sommet des Amériques, et le premier ministre du Québec souhaite les accueillir comme il se doit, chez lui, au Québec, en s'adressant à eux.
Le gouvernement fédéral, bien conscient de cette demande légitime du premier ministre du Québec, va-t-il enfin autoriser cette communication entre le premier ministre et les chefs d'État, comme l'ensemble des Québécois le souhaitent?
M. Denis Paradis (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement du Canada et le gouvernement du Québec ont des contacts fréquents au sujet du Sommet des Amériques. J'ai confiance que nous allons trouver tous ensemble un modus operandi sur le rôle du gouvernement du Québec lors du Sommet.
Le représentant personnel du premier ministre, M. Marc Lortie, s'entretient régulièrement avec les représentants du gouvernement du Québec. Ces rencontres, me dit-on, sont tout à fait cordiales et fructueuses.
Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, c'est vrai que si le Québec était souverain nous n'aurions pas à quémander une place au Sommet des Amériques.
Des voix: Oh, oh!
Mme Francine Lalonde: Cela irait de soi, comme c'est le cas pour les peuples qui seront réunis, par l'intermédiaire de leur premier ministre, autour de la table.
Puisque le droit du premier ministre du Québec de s'adresser aux 34 chefs d'État est subordonné à l'accord du gouvernement fédéral, ne serait-ce pas une marque de respect minimale pour le peuple du Québec...
Des voix: Oh, oh!
Mme Francine Lalonde: ...que d'accepter que le leader politique des Québécoises et des Québécois souhaite la bienvenue chez nous aux 34 chefs d'État?
M. Denis Paradis (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, c'est encore une fois de la vieille rengaine.
Le dialogue avec le gouvernement du Québec porte sur une foule de choses qui vont se passer au Sommet. Je pense que le dialogue, à l'heure actuelle, est tout à fait constructif. On s'attend, de ce côté-ci de la Chambre, à ce que ce dialogue continue.
* * *
[Traduction]
LA BANQUE DE DÉVELOPPEMENT DU CANADA
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le fait est que, le 21 avril 1997, Yvon Duhaime a écrit au premier ministre pour lui demander de l'aider à obtenir un prêt de la Banque de développement du Canada. Le ministère du Développement des ressources humaines a pris connaissance de la demande deux semaines plus tard. Il était étonnant de constater que le financement était assuré.
Peu après, quatre jours seulement avant le déclenchement des élections de 1997, l'octroi de la subvention de DRHC était annoncé publiquement. Or, c'était deux mois avant que la subvention ne fût approuvée par la ministre.
De quoi s'agissait-il: achat de votes, protection d'intérêts financiers ou les deux?
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, il s'agissait de venir en aide à une région en proie à un chômage extraordinairement élevé. C'est un programme qui avait été mis en place pour reconnaître l'importance du tourisme dans une région du Québec qui avait besoin d'aide.
C'est une initiative dont on a discuté à maintes reprises à la Chambre, une initiative qui a fourni des emplois à des habitants d'une région du Québec où sévissait un fort taux de chômage. C'est un projet que nous continuons de soutenir.
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'était effectivement extraordinaire; cela est sûr. Le 15 juillet, quelque temps après, la succursale de la Banque de développement à Trois-Rivières a écrit aux cadres supérieurs de la banque pour leur dire que l'Auberge constituait «un risque général élevé qui échappait à la politique normale et aux critères de la banque».
Le prêt avait cependant été approuvé et annoncé deux mois auparavant, chose étrange, au cours de la campagne électorale de 1997. Comment des subventions et prêts accordés dans la circonscription du premier ministre ont-ils obtenu une approbation politique avant l'approbation du ministère?
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je ferai remarquer deux choses très importantes. Premièrement, dans son rapport de l'automne dernier, le vérificateur général a conclu qu'à son avis, le projet répondait aux critères du FTCE.
Deuxièmement, et c'est peut-être le plus important, il s'agissait peut-être d'un projet risqué, mais il y a aujourd'hui au travail 74 personnes qui n'auraient pas eu d'emploi autrement.
* * *
[Français]
LA DÉFENSE NATIONALE
M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, le ministre de la Défense nationale fait preuve d'une insensibilité inimaginable à l'égard des militaires qui ont servi dans les Balkans et qui pourraient avoir été victimes des munitions à l'uranium appauvri.
À l'instar des pays comme le Portugal, la Norvège et la Grèce, le gouvernement a-t-il l'intention de soumettre tous les soldats—je dis bien «tous les soldats»—qui ont servi dans les Balkans, à un examen médical complet?
[Traduction]
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, nous collaborons avec l'OTAN à des études qui sont en train d'être menées. Nous effectuons aussi nos propres études et nous avons reçu des études d'autres pays. Il n'a pas été prouvé scientifiquement qu'il existe un lien entre l'uranium appauvri et les maladies dont souffrent les soldats canadiens. Rien n'indique non plus que les poussières pourraient causer des maladies.
Cependant, afin de rassurer nos militaires, nous leur avons offert la possibilité de subir des tests effectués par des laboratoires indépendants, et nous comptons continuer ainsi.
[Français]
M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, certains pays plus courageux ont demandé un moratoire sur l'utilisation de l'uranium appauvri. D'autres menacent même de ne plus participer à des missions de paix. Encore une fois, le Canada reste muet.
Quand le ministre entend-il annoncer une position claire à l'égard de l'uranium appauvri?
[Traduction]
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, nous ne sommes pas du tout muets. Il serait pour le moins prématuré d'interdire l'uranium appauvri étant donné que le lien n'a pas été prouvé scientifiquement.
Nous veillerons certes à continuer d'étudier la question. Nous continuerons à travailler avec nos alliés afin de trouver la cause des problèmes qu'éprouvent nos militaires et des maladies dont ils souffrent.
* * *
LES SUBVENTIONS ET CONTRIBUTIONS
M. John Williams (St. Albert, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le gouvernement a annoncé plus tôt aujourd'hui qu'il dépensera 165 milliards de dollars au cours de la prochaine année. Le vérificateur général a déclaré ce matin, lors de sa comparution, que la gestion financière n'est pas une priorité du gouvernement. Selon lui, le Canadien moyen gère mieux son budget que le gouvernement du Canada.
Les Canadiens sont confrontés à un gâchis financier d'un milliard de dollars, à une affaire d'extorsion à Shawinigan, à une croisière aux Caraïbes, et j'en passe. Nous apprenons maintenant qu'un montant de 26 millions de dollars sera affecté au bureau du millénaire. Le millénaire est depuis longtemps chose du passé.
Le ministre des Finances peut-il nous dire s'il existe un concours visant à déterminer qui peut gaspiller le mieux l'argent?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le député devrait lire les documents avec soin. Il parle ici de fonds reportés pour terminer des projets mis en marche pendant l'année du millénaire ou qui ont dû être reportés au-delà de l'année du millénaire en raison de la nécessité de terminer des évaluations environnementales fédérales.
Si le député ne tient pas à ce que les règles en matière d'environnement soient suivies, s'il ne désire pas connaître les faits, il devrait retourner faire ses devoirs.
M. John Williams (St. Albert, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je m'intéresse beaucoup aux faits. Ainsi, au nombre des autres faits, je souligne qu'il existe à l'heure actuelle une crise agricole et que, pendant que tous les autres ministères obtiennent des crédits supplémentaires, DRHC obtient 2,5 milliards de dollars de plus, les subventions et contributions destinées aux agriculteurs diminuent de 470 millions de dollars.
Il y a une crise agricole. Pourquoi devons-nous nous contenter de moins alors que tous les autres en obtiennent davantage?
L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, si le député comprenait les chiffres qu'il a consultés aussi bien qu'il le dit, il constaterait que le passif a été créé la même année où d'autres paiements ont été effectués.
Il est inscrit en double au cours d'une année, mais il a été créé à ce moment-là. C'est là que le passif doit être inscrit. C'est là la façon pertinente de tenir les livres. Je suis convaincu que c'est ce que le député souhaite que nous fassions, et c'est ce que nous ferons.
* * *
LA SANTÉ
Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, les Canadiens des régions rurales ou éloignées connaissent bien des difficultés, dont l'accès aux soins de santé. Le secrétaire d'État chargé du développement rural pourrait-il dire à la Chambre ce que fait le gouvernement fédéral pour soutenir les soins de santé dans les régions rurales?
L'hon. Andy Mitchell (secrétaire d'État (Développement rural) (Initiative fédérale du développement économique pour le Nord de l'Ontario), Lib.): Monsieur le Président, la prestation des soins de santé dans le Canada rural est une priorité pour le gouvernement. Nous reconnaissons que les difficultés qu'éprouvent les Canadiens des régions rurales sont exceptionnelles et que nos solutions doivent également être exceptionnelles.
C'est pourquoi j'ai été heureux d'annoncer, hier, au nom du ministre de la Santé, l'injection de 1,5 million de dollars pour aider les infirmières et les infirmiers à se doter des moyens voulus pour assurer les soins de santé dans les régions rurales ou éloignées de l'Ontario. Cela fait partie de l'engagement qu'a pris le gouvernement dans le budget de 1999. Un montant de 50 millions de dollars a été affecté aux soins de santé dans les régions rurales. Le gouvernement se soucie du Canada rural et des Canadiens des régions rurales.
* * *
[Français]
LES PÊCHERIES
M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le Président, à la suite de la décision Marshall, en 1999, le gouvernement a racheté des permis de pêche pour les redistribuer dans les réserves autochtones, et il continue d'en acheter.
Or, ces rachats de permis occasionnent des pertes d'emplois pour ces hommes de pont qui travaillent sur les bateaux et, de plus, redistribuent cette ressource hors de la région, créant ainsi des pertes d'emplois au sein des usines de poisson locales.
Je voudrais que le gouvernement libéral nous dise ce qu'il entrevoit faire pour contrer cette situation qu'il a lui-même initiée.
[Traduction]
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, je suis troublé par le fait que le député comprend mal la situation. Il s'agit très clairement d'un programme volontaire où des gens ont le droit de vendre au gouvernement quelque chose qu'ils possèdent, pour les fins que le député a mentionnées.
À mon avis, il serait bien déplorable que le député veuille donner l'impression que son parti empêcherait une vente volontaire entre un vendeur et un acheteur consentants.
* * *
L'ÉNERGIE
M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD): Monsieur le Président, hier le ministre des Ressources naturelles se trouvait à Washington pour discuter d'une politique énergétique confidentielle avec les États-Unis et faire la promotion d'une augmentation massive de la production de pétrole et de gaz au Canada, qui permettrait d'aider les États-Unis à répondre à leurs besoins en énergie.
Au lieu de préconiser des politiques favorables à l'exploitation de ressources énergétiques renouvelables et à l'efficacité énergétique, le gouvernement envisage d'augmenter considérablement l'utilisation de combustibles fossiles et la production d'émissions délétères.
Pourquoi le gouvernement fait-il passer la demande énergétique des États-Unis avant l'environnement et nos engagements internationaux quant à la réduction des émissions de gaz à effet de serre?
L'hon. Ralph Goodale (ministre des Ressources naturelles et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.): Monsieur le Président, le député a totalement mal saisi la teneur des discussions qui ont eu lieu hier à Washington.
Je suis heureux de lui dire que, durant ma rencontre avec le secrétaire à l'énergie des États-Unis, M. Abraham, au moins la moitié de notre conversation a porté sur des sujets comme la conservation de l'énergie, l'efficacité énergétique, les ressources renouvelables, les ressources de remplacement et la nouvelle technologie, par opposition aux sources conventionnelles de combustibles.
Je tiens aussi à rappeler au député que, dans notre plan budgétaire de l'année dernière, nous avons réservé un total de 1,1 milliard de dollars à la réalisation des objectifs du Canada en matière de changement climatique.
* * *
L'IMMIGRATION
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, hier à la Chambre, la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration s'est vantée du fait qu'un individu figurant sur la liste des 500 criminels les plus recherchés par Interpol avait été arrêté trois semaines après que le gouvernement a appris qu'on l'avait laissé entrer au Canada.
La ministre a fait allusion aux 100 millions de personnes qui sont entrées au Canada l'an dernier. Elle ou son collègue, le solliciteur général, savent-ils combien parmi les autres que son ministère a laissés entrer au Canada étaient des criminels?
L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, la grande majorité des personnes qui arrivent au Canada ont une raison légitime d'y venir. Je signale à la Chambre que l'an dernier, les agents de première ligne dans nos bureaux d'entrée ont interrogé quelque 65 000 personnes. Sur ce nombre, ils ont refusé 7 300 individus qu'ils soupçonnaient d'activités criminelles.
Le Canada est un leader mondial en matière d'expulsion. L'an dernier, nous avons expulsé 8 600 personnes, dont 1 700 criminels. L'expulsion de criminels est une priorité du gouvernement.
* * *
L'INDUSTRIE DU BOIS D'OEUVRE
M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse au vice-premier ministre. Le 7 février, quatre premiers ministres de la région de l'Atlantique ont signé une lettre adressée au premier ministre et intitulée «Bois d'oeuvre—Demande des premiers ministres de la région de l'Atlantique de reconduire l'accord concernant les provinces maritimes.» Ils disaient dans la lettre que la non-reconduction de l'accord et des dispositions actuelles serait catastrophique pour le secteur du bois d'oeuvre de la région.
Le 22 février, le ministre du Commerce international a déclaré à la Chambre que personne au Canada ne voulait du genre d'accord de contingentement que nous avions depuis cinq ans.
Le vice-premier ministre est-il disposé à reconnaître la demande des premiers ministres de la région de l'Atlantique de reconduire l'accord? Va-t-il aussi reconnaître que, n'ayant pas obtenu de consensus, ils ont monté l'Est contre...
Le Président: Le secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international a la parole.
M. Pat O'Brien (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, le député s'intéresse peut-être à monter une région canadienne contre une autre, mais ce n'est pas du tout ce qui intéresse le gouvernement.
En répondant à cette question hier, j'ai dit qu'en élaborant la position du Canada, le point de vue de toutes les régions canadiennes serait pris en compte.
Notre but ultime est très clair. Le ministre était à Washington hier. Il a exposé la position du gouvernement canadien sans la moindre ambiguïté. Pour la troisième fois aujourd'hui, j'affirme que le but ultime est le libre-échange en ce qui concerne le bois d'oeuvre. Les opinions de tous les Canadiens seront prises en compte à cet égard.
* * *
LE MULTICULTURALISME
M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, février est le Mois de l'histoire des noirs. La ministre du Multiculturalisme a publié une liste d'éminents Canadiens d'origine africaine. Or, cette liste ressemble davantage à une liste de membres du Parti libéral.
Le nom de l'honorable Lincoln Alexander n'a pas été retenu. Il a pourtant été le premier député noir du Canada, le premier noir à avoir été nommé ministre et le premier lieutenant-gouverneur noir d'une province. Il y a même une grande autoroute qui porte son nom dans la circonscription de la ministre du Patrimoine.
Pourquoi la ministre les classe-t-elle selon des stéréotypes? S'ils ne sont pas libéraux, ils sont rayés de la liste?
L'hon. Hedy Fry (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme), Lib.): Monsieur le Président, la liste que nous avons dressée pour souligner le Mois de l'histoire des noirs et rendre hommage à tous les Canadiens noirs qui ont contribué à l'édification du pays est tirée d'un livre publié par la communauté noire elle-même.
M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est ce que j'appelle créer des stéréotypes. Il y a cinq ans, le premier ministre a demandé à Lincoln Alexander d'être président de la Fondation canadienne des relations raciales. Il relève directement de la ministre du Multiculturalisme.
M. Lincoln Alexander est le Canadien d'origine africaine le plus remarquable de notre histoire politique. Pourquoi la ministre fait-elle de la petite politique en présentant ce simulacre de liste sur laquelle le nom de cet homme ne figure pas?
L'hon. Hedy Fry (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme), Lib.): Monsieur le Président, je trouve le genre de questions de ce parti politique vraiment intéressantes. Il ne croit pas du tout à la reconnaissance d'intérêt spécial.
Nous reconnaissons les Canadiens noirs et leur contribution en célébrant le Mois de l'histoire des noirs. Nous avons raison de le faire, car cela fait partie de la suppression des barrières systémiques du racisme au Canada.
Je voudrais également dire que c'est le gouvernement libéral qui a nommé Lincoln Alexander au poste de président de la Fondation canadienne des relations raciales.
* * *
[Français]
L'INDUSTRIE DE LA CREVETTE
Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Neigette-et-la Mitis, BQ): Monsieur le Président, en volant au secours de Terre-Neuve, alors gouvernée par «Capitaine Canada», et en lui accordant tout de go 50 351 tonnes de crevettes du Nord, le ministre des Pêches et des Océans devait être conscient qu'il créerait un problème dans l'ensemble de l'industrie de la crevette.
Comme cela était prévisible, la méga-entreprise terre-neuvienne a complètement déséquilibré le marché.
Le ministre peut-il nous dire s'il est maintenant prêt à rétablir une certaine justice en accordant un nouveau quota de 6 000 tonnes de crevettes pour le Québec?
[Traduction]
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, il est difficile de répartir les quotas, parce qu'il y a bien plus de pêcheurs que de quotas disponibles. J'admets que bien des gens ont été déçus des quotas annoncés.
Cela dit, le problème ne justifie pas une solution comme celle que la députée propose. Cela n'aura en soi aucun impact sur le marché.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Neigette-et-la Mitis, BQ): Monsieur le Président, comme le ministre des Pêches et des Océans et ses homologues provinciaux se réuniront à St. Andrews, le 30 mars prochain, le ministre peut-il nous dire s'il est prêt à répondre à la demande écrite que lui adressait le ministre des Pêches du Québec, qui réclame 6 000 tonnes de crevettes pour le Québec?
[Traduction]
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, le ministre des Pêches et des Océans reçoit de beaucoup de régions de nombreuses demandes qui portent sur des tonnes et des tonnes de crevettes.
Je dois admettre que je n'ai pas cette volumineuse correspondance sous les yeux. J'ignore à quelles lettres il a répondu à tel ou tel moment, mais je vais répondre qu'il prendra une décision sur les quotas de crevettes de la façon appropriée, à la lumière des critères qui ont été établis à cette fin. La décision une fois prise, ceux qui ont demandé un quota seront informés.
* * *
L'EMPLOI
M. Jim Pankiw (Saskatoon—Humboldt, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la semaine dernière, la ministre du Multiculturalisme a tenté de justifier une offre d'emploi émise par le Service correctionnel du Canada, qui n'acceptait des demandes d'emploi que des autochtones. Les travailleurs de toute autre origine ethnique ne pouvaient même pas soumettre leur demande.
J'ai ici une offre d'emploi du ministère du Développement des ressources humaines qui utilise également des pratiques discriminatoires pour exclure des candidats de certaines races.
Quelle explication la ministre peut-elle fournir aux personnes qui sont privées du droit de présenter une demande d'emploi uniquement en raison de la couleur de leur peau?
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, les députés de ce parti ne cessent de parler de racisme et de discrimination à rebours.
Nous sommes convaincus que des mesures spéciales s'imposent. Il ne s'agit pas de faire de la discrimination à rebours, mais bien d'éliminer la discrimination. Dans l'intérêt du pays, nous voulons que le secteur public soit le reflet de toute la société canadienne.
M. Jim Pankiw (Saskatoon—Humboldt, Alliance canadienne): Monsieur le Président, il est évident que la ministre ne comprend pas qu'il est impossible d'exercer une discrimination en faveur de quelqu'un en se fondant sur la race sans exercer de discrimination envers quelqu'un d'autre en raison de sa race.
J'ai l'offre d'emploi ici, devant moi. On y précise que les candidats autochtones, tout comme les candidats qui ne sont pas de race blanche, seront exclus.
Comme il est interdit aux autochtones de postuler, que dit la ministre aux autochtones qualifiés qui se voient priver du droit de présenter une demande d'emploi du seul fait qu'ils...
Le Président: La ministre du Développement des ressources humaines a la parole.
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, il semble que le député ne voit rien de mal à ce que les Canadiens ne soient pas tous pleinement représentés au sein du gouvernement du Canada et de sa fonction publique.
Les députés de ce côté-ci de la Chambre rejettent carrément cette façon de voir et continueront de multiplier leurs efforts jusqu'à ce que toute la société canadienne, comme je l'ai dit, puisse s'identifier à notre gouvernement et à notre fonction publique.
* * *
L'AMÉRIQUE LATINE
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, plus tôt, cet après-midi, lorsque nous avons réussi à avoir son attention, le secrétaire d'État chargé de l'Amérique latine et de l'Afrique a fait savoir que le Canada n'appuie pas le Plan Colombie. Ce n'est pas la condamnation claire et sans équivoque que les Colombiens méritent, compte tenu des horribles violations des droits de la personne qui ont cours en Colombie, mais c'est mieux que de garder le silence.
Le secrétaire d'État chargé de l'Amérique latine et de l'Afrique peut-il absolument garantir que le Canada ne vend ni ne vendra aucun équipement aux militaires colombiens, compte tenu des atroces violations des droits de la personne, des massacres et des enlèvements qui ont cours aujourd'hui en Colombie?
L'hon. David Kilgour (secrétaire d'État (Amérique latine et Afrique), Lib.): Je remercie le député, monsieur le Président. Le Plan Colombie comporte un très important programme d'aide sociale et un certain nombre de volets non militaires.
Comme ne l'ignore pas le ministre de la Défense, le Canada ne participe à aucun volet militaire du Plan Colombie. Le Canada ne fournira aucun équipement militaire. Ce serait là violer notre engagement de non-participation à la guerre en Colombie.
* * *
L'ENVIRONNEMENT
Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Monsieur le Président, les Canadiens sont préoccupés par les déchets dangereux et toxiques canadiens et étrangers.
Le ministre de l'Environnement peut-il nous dire quelles mesures prend son ministère pour s'assurer qu'il ne se fasse aucun déversement illégal de déchets dangereux et toxiques au Canada?
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, le Canada a ratifié la Convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et de leur élimination et nous la prenons au sérieux.
La nouvelle Loi canadienne sur la protection de l'environnement de 1999, qui est entrée en vigueur le 1er avril de l'an dernier, donne aux agents d'exécution de mon ministère, dont le nombre, soit dit en passant, a été considérablement accru, de nouveaux outils pour lutter contre le déversement illégal de déchets dangereux, dont un nouveau règlement pour contrôler certains déchets, des conditions pour l'élimination des déchets par les exportateurs et de nouveaux critères pour l'obtention de permis.
* * *
LE REMBOURSEMENT POUR LA HAUSSE DES COÛTS DU CHAUFFAGE
M. James Moore (Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam, Alliance canadienne): Monsieur le Président, lorsqu'on lui a demandé pourquoi des étudiants, des retraités, des détenus et même des personnes décédées recevaient un remboursement pour la hausse des coûts du chauffage, le ministre des Finances a répondu ceci à la Chambre: «Le but du programme était d'aider les plus démunis au moyen d'un chèque de 125 $.»
Lors de la dernière campagne électorale, le chef du NPD a dit aux Canadiens que les gens qui gagnaient plus de 60 000 $ par année étaient riches. À titre de député, je gagne plus de 60 000 $, mais à mon grand étonnement, lorsque je suis retourné dans ma circonscription la fin de semaine dernière, j'ai trouvé dans ma boîte aux lettres un chèque du ministre des Finances, un chèque de remboursement pour la hausse des coûts du chauffage domestique.
Le ministre des Finances va-t-il admettre à la Chambre que son programme de remboursement laisse foncièrement à désirer et qu'il est tout à fait inacceptable?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, plus de 99 p. 100 des chèques émis ont été remis à des gens nécessiteux et à ceux qui en ont réellement besoin. Nous avons dit qu'il y aurait des ratés. Je ne pensais pas qu'il pourrait y avoir une erreur aussi énorme.
La seule explication que je vois, c'est que le député a reçu un chèque qui lui était destiné avant qu'il ne devienne député et avant qu'il ne bénéficie de toute une augmentation de salaire.
M. James Moore (Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam, Alliance canadienne): Monsieur le Président, les Canadiens méritent une meilleure réponse que cela. En Colombie-Britannique, le gouvernement accorde des crédits pour la hausse des coûts de chauffage domestique, mais contrairement au ministre des Finances, il ne distribue pas des chèques truffés d'erreurs. Il y a des façons plus efficaces d'arriver au même résultat. Le ministre des Finances refuse de voir la vérité en face. L'inefficacité dans ce dossier est consternante.
Le chèque que j'ai reçu est daté du 31 janvier 2001, c'est-à-dire de plus de deux mois après mon élection à la Chambre des communes. Voilà le genre d'ineptie totalement injustifiée qui met les Canadiens hors d'eux.
Le ministre des Finances s'engagera-t-il aujourd'hui à créer un meilleur système qui attribue les sommes adéquates aux Canadiens qui en ont vraiment besoin?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, nous avons adopté une façon de faire, la même qui a été adoptée par le gouvernement de l'Alberta et de nombreuses autres provinces.
Ce que le député devrait savoir, c'est que le remboursement est fondé sur sa déclaration de revenus de 1999, déclaration que je n'ai pas vue. Si le député veut bien me la montrer, je serai ravi d'en examiner chaque point avec lui.
* * *
[Français]
LE LOGEMENT SOCIAL
Mme Diane Bourgeois (Terrebonne—Blainville, BQ): Monsieur le Président, lors de la Marche mondiale des femmes, ces dernières ont demandé que soit augmentée de 1 p. 100 la part du budget global attribuée au logement social.
Les engagements du gouvernement pendant la campagne avec son projet de logements abordables sont très loin de répondre aux demandes des femmes et aux besoins en logements sociaux.
Le gouvernement entend-il intervenir afin que soit modifié l'engagement pris durant la campagne électorale, de sorte que le gouvernement fédéral fasse vraiment sa part en matière de logement social, comme le lui demandent les femmes?
L'hon. Alfonso Gagliano (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, pendant la campagne électorale, nous avons annoncé, dans notre livre rouge, un programme pour mettre en place des logements à prix abordable, des logements locatifs.
Actuellement, nous négocions avec les provinces pour en venir à une entente sur un programme partagé afin de construire, d'aider à la construction de plusieurs logements pour des gens qui sont dans le besoin.
Donc, nous travaillons avec les provinces. Dès que les consultations seront terminées, ainsi que les discussions avec mes collègues du Cabinet, je serai en mesure d'annoncer un nouveau programme.
* * *
[Traduction]
L'AIDE EN CAS DE CATASTROPHE
M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Alliance canadienne): Monsieur le Président, une délégation du sud-ouest du Manitoba est à Ottawa aujourd'hui. Elle est composée de députés des deux partis présents dans la législature manitobaine, les députés John Gerrard et Larry Maguire, ainsi que de préfets, gens d'affaires et agriculteurs. Ils sont venus à Ottawa parce qu'ils n'ont toujours pas reçu d'aide fédérale depuis les terribles inondations du printemps 1999.
Au Manitoba seulement, on estime que les pertes non dédommagées pourraient atteindre 85 millions de dollars. Le préfet Moior n'a pas mâché ses mots lorsqu'il a dit: Nous vivons dans un état de désespoir muet. Le premier ministre va-t-il reconnaître que les inquiétudes de cette délégation sont fondées et lancer enfin un programme d'aide aux sinistrés?
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, nous avons le programme d'aide financière en cas de catastrophe. Des crédits fédéraux de quelque 12 millions de dollars puisés dans le budget de ce programme ont d'ailleurs été consentis en dédommagement par suite des inondations de 1999.
J'ai indiqué à la délégation, hier, que nous examinerions les modalités du programme d'aide en cas de catastrophe. Je suis entièrement d'accord avec eux, nous devons nous doter d'une stratégie visant à atténuer l'impact de catastrophes. Le gouvernement se penche actuellement sur une telle stratégie.
* * *
[Français]
LES MUNICIPALITÉS
M. Mario Laframboise (Argenteuil—Papineau—Mirabel, BQ): Monsieur le Président, le ministre des Transports a indiqué que le gouvernement fédéral pourrait envisager de donner aux grandes villes du pays des pouvoirs accrus par le biais d'une réforme constitutionnelle.
Le gouvernement partage-t-il le point de vue du ministre des Transports, compte tenu du fait que les municipalités sont des créatures des gouvernements des provinces et que leurs pouvoirs ne regardent en rien les responsabilités fédérales?
[Traduction]
L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, cet article est un peu trompeur. J'ai déclaré que le gouvernement fédéral s'était engagé à verser deux milliards de dollars dans un fonds d'infrastructure pour que les municipalités définissent des projets en transport et dans d'autres domaines. C'est un engagement majeur de la part du gouvernement.
J'ai également déclaré que, devant l'urbanisation croissante du Canada, les gouvernements devront collaborer pour tenter d'aider les gens qui vivent dans les villes et que j'espérais que la Constitution serait assez souple pour permettre la mise en oeuvre du genre de programmes envisagés.
* * *
RECOURS AU RÈGLEMENT
LA PÉRIODE DES QUESTIONS
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Les partis d'opposition précisent rarement de quels projets ils parlent lorsqu'ils posent des questions à la Chambre des communes.
Par souci d'exactitude, je voudrais confirmer que, lorsque je parle d'une subvention accordée à l'Auberge Grand-Mère, je parle de 19 emplois durables et, dans le cas de l'Auberge des Gouverneurs, ce sont 74 emplois.
M. Jim Pankiw (Saskatoon—Humboldt, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Pendant la période des questions, j'ai fait allusion à une annonce qui excluait expressément les Indiens de postuler un emploi au ministère du Développement des ressources humaines.
Pour des raisons qui, à mon sens, sont devenu des raisons historiques, je voudrais déposer cette annonce à la Chambre des communes.
Le Président: Le député a-t-il le consentement unanime pour déposer le document?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LE RÈGLEMENT
MOTION PORTANT QUE LE DÉBAT NE SOIT PLUS AJOURNÉ
L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, en ce qui a trait à l'article no 2 des Affaires émanant du gouvernement, je propose:
Que le débat ne soit plus ajourné.
Le Président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le Président: À mon avis, les oui l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
Le Président: Convoquez les députés.
Avant le vote:
M. John Williams: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je viens juste d'apprendre sur quoi nous nous prononçons. Est-ce la soixante-dixième fois que nous appliquons la clôture à la Chambre?
Le Président: Je crains que le Président ne tienne pas de comptes et je ne peux donc pas répondre au député. Je pense que c'est la première fois que cela se produit depuis que j'occupe le fauteuil, si cela peut être utile au député.
(La motion, mise aux voix, est adoptée.)
Vote no 12
POUR
Députés
Adams | Alcock | Allard | Anderson (Victoria) |
Assad | Assadourian | Augustine | Bagnell |
Baker | Beaumier | Bélair | Bélanger |
Bellemare | Bennett | Bertrand | Bevilacqua |
Binet | Blondin - Andrew | Bonin | Bonwick |
Boudria | Bradshaw | Brown | Bryden |
Bulte | Byrne | Caccia | Calder |
Cannis | Caplan | Carroll | Castonguay |
Catterall | Cauchon | Chamberlain | Charbonneau |
Coderre | Collenette | Comuzzi | Copps |
Cotler | Cullen | Cuzner | DeVillers |
Dion | Dromisky | Duhamel | Easter |
Eggleton | Eyking | Finlay | Folco |
Fontana | Fry | Gagliano | Gallaway |
Godfrey | Goodale | Graham | Gray (Windsor West) |
Grose | Guarnieri | Harb | Harvard |
Harvey | Hubbard | Jackson | Jennings |
Jordan | Karetak - Lindell | Keyes | Kilgour (Edmonton Southeast) |
Knutson | Kraft Sloan | Lastewka | LeBlanc |
Lee | Leung | Lincoln | Longfield |
MacAulay | Macklin | Mahoney | Malhi |
Maloney | Marcil | Marleau | Martin (LaSalle – Émard) |
Matthews | McCallum | McCormick | McGuire |
McKay (Scarborough East) | Minna | Mitchell | Murphy |
Myers | Neville | Normand | O'Brien (London – Fanshawe) |
O'Reilly | Owen | Pagtakhan | Paradis |
Parrish | Patry | Peric | Peterson |
Phinney | Pickard (Chatham – Kent Essex) | Pillitteri | Pratt |
Price | Proulx | Provenzano | Redman |
Regan | Richardson | Robillard | Savoy |
Scott | Serré | Sgro | Shepherd |
St. Denis | St - Jacques | St - Julien | Steckle |
Stewart | Szabo | Telegdi | Thibeault (Saint - Lambert) |
Tirabassi | Tobin | Tonks | Torsney |
Ur | Vanclief | Volpe | Whelan – 140 |
CONTRE
Députés
Abbott | Ablonczy | Anders | Bachand (Richmond – Arthabaska) |
Bachand (Saint - Jean) | Bellehumeur | Benoit | Bergeron |
Bigras | Blaikie | Borotsik | Bourgeois |
Breitkreuz | Brien | Brison | Burton |
Cadman | Cardin | Casey | Casson |
Clark | Comartin | Crête | Cummins |
Dalphond - Guiral | Davies | Day | Desrochers |
Dubé | Duceppe | Duncan | Elley |
Epp | Forseth | Gagnon (Champlain) | Gallant |
Gauthier | Godin | Goldring | Gouk |
Grewal | Grey (Edmonton North) | Guay | Guimond |
Hanger | Harris | Hearn | Hill (Macleod) |
Hill (Prince George – Peace River) | Hilstrom | Hinton | Johnston |
Keddy (South Shore) | Kenney (Calgary Southeast) | Laframboise | Lalonde |
Lanctôt | Lebel | Lill | Loubier |
Lunney (Nanaimo – Alberni) | MacKay (Pictou – Antigonish – Guysborough) | Manning | Marceau |
Mark | Martin (Esquimalt – Juan de Fuca) | Martin (Winnipeg Centre) | McDonough |
McNally | Ménard | Meredith | Merrifield |
Mills (Red Deer) | Moore | Obhrai | Pankiw |
Paquette | Penson | Peschisolido | Picard (Drummond) |
Plamondon | Proctor | Rajotte | Reid (Lanark – Carleton) |
Reynolds | Ritz | Robinson | Roy |
Sauvageau | Schmidt | Skelton | Solberg |
Sorenson | Spencer | St - Hilaire | Stinson |
Stoffer | Tremblay (Lac - Saint - Jean – Saguenay) | Tremblay (Rimouski - Neigette - et - la Mitis) | Vellacott |
Venne | Wasylycia - Leis | Wayne | White (Langley – Abbotsford) |
Williams | Yelich – 106 |
«PAIRÉS»
Députés
Discepola | Fournier | Gagnon (Québec) | Girard - Bujold |
McLellan | Reed (Halton) | Rocheleau | Rock |
Le Président: Je déclare la motion adoptée.
* * *
[Français]
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Tel que nous en avons discuté à la réunion des leaders parlementaires, je demande le consentement unanime de la Chambre pour proposer la motion suivante:
Que le projet de loi C-209, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu (frais de transport en commun), inscrit au Feuilleton au nom de la députée de Jonquière, lors de son renvoi en comité, soit renvoyé au Comité permanent des finances plutôt qu'au Comité permanent des transports.
C'est une erreur qui s'est glissée au moment où le projet de loi a été inscrit au Feuilleton, et j'obtiendrais, je pense, le consentement de la Chambre pour pouvoir apporter cette correction.
Le Président: Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
[Traduction]
Mme Marlene Catterall: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Si vous vérifiez, je crois que vous constaterez qu'il y a consentement unanime pour que le vote sur le projet de loi C-11, qui a été reporté plus tôt à la fin des initiatives ministérielles demain, soit plutôt prévu pour la fin des initiatives ministérielles aujourd'hui.
Le Président: Y a-t-il consentement unanime pour adopter la modification d'horaire prévue par le whip en chef du gouvernement?
Des voix: D'accord.
* * *
[Français]
LE RÈGLEMENT
La Chambre reprend l'étude interrompue le 26 février, de la motion, ainsi que de l'amendement.
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, j'entends bien, au cours des trois minutes dont je dispose, démontrer l'odieux de la situation que nous fait vivre le gouvernement dans cette Chambre des communes.
Le gouvernement vient de nous faire vivre une chose inacceptable, un bâillon sur un bâillon. Voilà qu'on discute d'une motion dont l'objectif est essentiellement de diminuer le rôle de l'opposition à la Chambre et de nous empêcher de déposer des amendements lors de l'étude des projets de loi, comme nous le faisions auparavant.
Voilà qu'après trois heures de débat sur cette importante question—une modification au Règlement, une modification dans l'équilibre des pouvoirs des parlementaires des deux côtés de la Chambre—le gouvernement fait adopter un bâillon. Trois heures de débat sur une question d'une telle importance, sur un changement au Règlement, et le gouvernement trouve que nous en avons trop parlé.
Comment comprendre une telle approche, si ce n'est de considérer que le gouvernement est maintenant sur une pente extrêmement dangereuse. Non seulement l'arrogance gouvernementale de l'après-élection—élection dont personne n'a pu justifier la tenue de toute façon—se manifeste-t-elle dans une espèce de mandat que le gouvernement s'est trouvé au sein de la population pour appuyer toutes ses initiatives, non seulement n'assiste-t-on pas depuis plusieurs jours à la Chambre à une séance de réponses à la période des questions orales qui ont un peu d'allure, mais maintenant, les ministres sont même absents de la Chambre pour répondre aux questions.
Il ne me reste plus qu'une minute, mais comment puis-je exprimer en une minute tout l'odieux de la situation dans laquelle on nous a placés?
Le gouvernement ne veut plus débattre, le gouvernement refuse d'échanger avec l'opposition, le gouvernement se considère comme le détenteur tranquille de la vérité, le gouvernement refuse d'enlever ses oeillères pour comprendre ce que les citoyens que nous représentons veulent, le gouvernement a décidé de nous bâillonner de la plus odieuse façon qui soit, c'est-à-dire en vous obligeant à jouer un rôle partisan et à vous prononcer sur la qualité des amendements que nous proposerons.
Je vous invite, monsieur le Président, à vous intéresser d'abord et avant tout aux 200 amendements que le gouvernement a lui-même proposés à son propre projet de loi sur les jeunes contrevenants. Peut-être allez-vous en trouver un certain nombre qui sont futiles.
[Traduction]
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, je suis ravi de pouvoir enfin placer un mot à propos de cette motion, même si je comprends que le député d'Elk Island soit tenté de profiter du temps illimité qui lui a été accordé, chose que l'on ne m'a jamais accordé à la Chambre. Il a très bien mis son temps à profit en reprochant au gouvernement le côté perfide de cette motion.
J'ai été moi-même particulièrement frappé par la façon dont le leader du gouvernement à la Chambre a essayé d'utiliser, ou mieux, de «mésutiliser» le rapport du Comité McGrath de 1985 pour justifier ses actions d'hier lorsqu'il a proposé la motion no 2.
Je dirai à l'intention des personnes qui ignorent ce dont nous débattons et ce sur quoi nous avons imposé la clôture—en fait, même des députés libéraux m'ont demandé avant le vote ce sur quoi nous votions—qu'il s'agit d'une motion qui permettrait au Président de choisir les modifications proposées à l'étape du rapport qui feront l'objet d'un vote, au lieu de mettre aux voix toutes les modifications proposées par les députés, comme c'est l'usage.
La motion no 2, qui aurait pour effet de mettre fin à la stratégie à laquelle ont eu recours les bloquistes et les réformistes sous la dernière législature, est une motion indépendante qui n'entre pas dans le cadre d'une réforme parlementaire et qui a seulement pour but d'apaiser les inquiétudes du gouvernement à cet égard. C'est l'une des raisons pour laquelle je la trouve tellement inadmissible. On ne peut qualifier de réforme parlementaire une motion qui a seulement pour but d'apaiser les inquiétudes du gouvernement.
La motion no 2 corrigerait une situation qui pose un problème au gouvernement, mais aussi à chacun d'entre nous. Le problème, toutefois, c'est qu'il ne s'agit pas du seul problème que nous avons. Il ne peut être réglé sans créer toutes sortes d'autres problèmes.
Permettez-moi simplement de citer le comité McGrath. Le leader du gouvernement à la Chambre a mentionné que j'étais peut-être le seul membre encore en vie du Comité spécial de la Chambre sur la réforme de la Chambre des communes, le seul à encore prôner la réforme parlementaire. On peut lire, à la page 40 du rapport McGrath:
Nous sommes d'avis que l'étape du rapport n'est pas utilisée aussi efficacement qu'elle pourrait l'être dans le processus législatif. L'étape du rapport a été intégrée au processus législatif dans le cadre des réformes entrées en vigueur en 1968. Ces réformes ont entraîné, entre autres, le renvoi de la plupart des projets de loi au comité permanent après leur adoption en deuxième lecture. L'étape du rapport a été instaurée pour permettre aux députés qui ne participent pas à l'étude en comité d'un projet de loi donné de proposer des amendements au moment de son renvoi à la Chambre. Elle permet aussi au gouvernement de présenter à la dernière minute des amendements de nature technique. Toutefois, l'étape du rapport ne devait pas être une occasion de reprendre l'ensemble des délibérations d'un comité.
Jusqu'ici, ça va. Je dirais même que le parti ministériel et l'opposition s'entendent sur l'objet de l'étape du rapport. Cependant, le comité poursuit en disant:
Si les partis de l'opposition en sont venus à se servir de l'étape du rapport pour faire de l'obstruction...
C'est une tactique que conteste le gouvernement et qu'il tente d'abolir, parce que l'opposition se sert désormais encore plus de l'étape du rapport pour faire de l'obstruction qu'à l'époque du comité McGrath. Il faut dire que, à cette époque, il nous était arrivé de proposer entre 150 et 200 amendements à l'étape du rapport, mais jamais des centaines et même des milliers d'amendements, comme on en voit maintenant.
Je cite de nouveau le rapport:
...c'est en réaction contre le traitement réservé à bon nombre de projets de loi controversés à l'étape de l'étude en comité. Cette étape est donc devenue, comme l'a dit un député, un moyen pour l'opposition de se venger d'un gouvernement qui lui refuse toute concession au chapitre des amendements proposés en comité.
Nos recommandations sur l'étape du rapport doivent être considérées dans le contexte global de la réforme du processus législatif.
Voilà les mots clefs, nos recommandations. Ils ont proposé ensuite quelque chose qui ressemble un peu à ce que le leader du gouvernement à la Chambre a déposé, disant que les recommandations...
...doivent être considérées dans le contexte global de la réforme du processus législatif.
Pourtant, nous avons ici une recommandation, isolée du contexte législatif global dont le rapport McGrath fait mention, et présentée comme étant une mesure adéquate en elle-même.
Je dis aujourd'hui au gouvernement que tout cela est en complet désaccord avec les recommandations du rapport McGrath puisque ce qui constituait le contexte global de la réforme du processus législatif tel que le définit le rapport et aux termes duquel le comité McGrath a déterminé qu'il serait acceptable que le Président reprenne le pouvoir de choisir les amendements devant faire l'objet d'un vote à l'étape du rapport. Le contexte était un élément d'un ensemble de réformes parlementaires visant notamment le travail des comités qui, particulièrement dans le traitement des projets de loi, devait devenir le moins partisan possible.
En fait, les mesures législatives ne devaient pas être soumises à un comité permanent. Elles devaient plutôt être soumises à un des comités législatifs spéciaux devant être présidés par des gens choisis parmi un groupe de candidats à la présidence représentant tous les partis. Nous avons mis ces mesures à l'essai pendant un certain temps. C'est un système qui a été adopté ici pendant plusieurs années, et un certain nombre de députés de l'opposition ont acquis une réputation en tant que présidents de comité compétents et équitables.
Renvoyer les mesures législatives à des comités présidés parfois par des députés de l'opposition, mais toujours par des personnes choisies parce qu'elles étaient reconnues pour être équitables, s'inscrivait dans ce contexte. C'est pour cette raison que ces personnes étaient choisies pour présider ces comités législatifs spéciaux, et non pour la raison qui l'emporte souvent dans le cas des présidents de comités permanents, c'est-à-dire leur loyauté envers le gouvernement.
C'était sensé être des comités au sein desquels il n'y aurait pas de secrétaire parlementaire pour guider les députés du gouvernement, leur dire quoi faire et jouer la police de la pensée, signalant au ministre tout député qui aurait pensé par lui-même. Ces comités allaient être entièrement différents. Ils allaient être des comités nous permettant d'abandonner le système actuel auquel nous sommes revenus à un moment donné dans les années 80. Cela a résulté du fait que le gouvernement Mulroney s'est lassé de la réforme parlementaire et a renoncé à certaines des réformes qu'il avait été disposé à essayer dans les premières années de son mandat.
Le premier ministre actuel ne souffre pas d'un tel idéalisme, que ce soit tôt ou tard dans son mandat. Il ne veut même pas faire d'essais. Le leader du gouvernement à la Chambre tente de faire la mauvaise chose en ce qui concerne la réforme parlementaire et de se pencher sur les questions qui préoccupent le gouvernement en les présentant comme si elles préoccupaient l'ensemble des parlementaires.
Bien sûr, tous les parlementaires s'inquiètent du fait que nous puissions être amenés à voter pendant 24 ou 48 heures. Je ne crois pas que cela ait plu à aucun d'entre nous. Outre le fait que ce soit dur physiquement, je crois que nous nous sommes tous demandé ce que les Canadiens ont pensé de cet exercice.
Il demeure que la situation découle de la frustration légitime éprouvée par l'opposition, même si je n'ai pas été d'accord avec la position prise par le Parti réformiste à propos des Nisga'as et que je n'aie pas été d'accord avec le Bloc québécois lorsqu'il s'est agi du projet de loi C-20, le projet de loi sur la clarté. Mais là n'est pas la question, que je sache. La question en jeu, c'est que le gouvernement ne voulait pas permettre la tenue de ces débats que ces deux partis jugeaient approprié au vu de l'importance des enjeux.
Le gouvernement s'est conduit de façon particulièrement méprisable lorsqu'il s'est agi du projet de loi C-20, le projet de loi sur la clarté. Non seulement nous a-t-il imposé la clôture à la Chambre, mais il l'a également imposée au comité. On ne nous a donné que quelques semaines pour examiner un projet de loi extrêmement important destiné à nous éviter d'avoir à brader notre pays, Dieu nous en préserve. Pourtant, le tout devait être réglé dans des délais très courts. Des témoins que nous aurions dû entendre n'ont pas pu comparaître. Les ministériels qui faisaient partie du comité déploraient ouvertement de ne pouvoir faire leur boulot convenablement.
C'est au vu de tout cela que, à l'occasion, l'opposition décide de faire appel à toutes les échappatoires de la procédure pour obtenir une espèce de vengeance parlementaire et politique sur le gouvernement. Mais ce n'est pas très efficace. D'après ce que je peux voir, ce n'est pas une façon d'agir qui a rapporté au Bloc beaucoup plus de votes au Québec lors des élections du 27 novembre. Cette attitude n'a pas non plus permis à l'Alliance réformiste de faire une percée. De tels comportements n'ont pas grande vertu politique dans l'ensemble.
Quoi qu'il en soit, nous voilà en train de discuter de réforme parlementaire. Nous discutons d'une culture parlementaire. Le gouvernement a tort de penser que seuls ses problèmes, seules les frustrations que lui inspire le système actuel doivent recevoir une attention immédiate. Je suis déçu de voir que le leader du gouvernement à la Chambre n'a pas tenté d'élaborer ne serait-ce qu'un modeste ensemble de propositions. Il n'aurait pas été nécessaire qu'il s'attaque à l'ensemble de la réforme parlementaire et à toutes les modifications auxquelles nous pourrions songer à bon droit si nous tentions d'élaborer une réforme parlementaire en bonne et due forme. Ce modeste ensemble aurait cependant pu répondre à certaines des critiques que les députés d'opposition formulent à l'égard de l'attribution de temps, par exemple.
Vers la fin de la dernière législature, on avait parlé de créer un mécanisme prévoyant que, lorsqu'il veut proposer l'attribution de temps pour l'étude d'une motion, le gouvernement réserve au moins deux ou trois heures de débat à la Chambre au cours desquelles le ministre responsable de la mesure législative devrait répondre aux questions et expliquer pourquoi il est tellement important d'adopter tout de suite la mesure en question. C'est une des choses que le gouvernement aurait pu proposer. Il y en a d'autres.
Si nous nous reportons aux recommandations que le comité McGrath a formulées il y a 16 ans, nous constatons que pas grand-chose n'a changé à certains égards. Des projets de loi importants ne sont pas étudiés comme il le faudrait à la Chambre. En fait, il semble exister un rapport inverse: plus le projet de loi est important, moins on l'étudie comme il faut.
Si la loi régissant l'enregistrement des chiens relevait de notre compétence, nous y consacrerions beaucoup de temps. Le projet de loi serait renvoyé à un comité qui prendrait tout son temps, convoquerait des témoins, entendrait des chiens, et ainsi de suite. Le comité se rendrait un peu partout au Canada. Mais s'il s'agit de mesures comme le projet de loi sur la clarté, l'accord des Nisga'as ou la réforme du Régime de pensions du Canada, etc., nous devons nous compter chanceux d'avoir deux jours de débat. Imaginez, deux jours de débat au Parlement. Nous aurions droit à deux jours pour des mesures importantes, mais à quatre pour des insignifiances.
Voilà le bilan du gouvernement. Plus le projet de loi est important, plus le gouvernement cherche à faire vite, à l'évacuer de la Chambre pour le renvoyer à un comité où il est confié à des chiens savants. Le gouvernement ne peut pas se permettre la moindre ouverture d'esprit et refuse d'écouter les propositions d'amendement. Il ramène ensuite le projet de loi à la Chambre et il s'attend à ce que l'opposition soit d'excellente humeur à l'étape du rapport.
Nous ne sommes pas de bonne humeur à l'étape du rapport si l'attribution de temps a été imposée à la deuxième lecture et si elle l'a été aussi au comité, comme c'est arrivé dans le cas du projet de loi C-20. Nous ne sommes pas contents lorsque l'étape du rapport arrive, et c'est normal. Nous avons le droit de ne pas l'être, parce que nous n'avons pas l'impression que les choses se sont passées correctement. Il arrive donc que l'opposition recoure aux tactiques que le gouvernement essaie maintenant de prévenir.
En principe, je ne suis pas contre le fait que la présidence puisse choisir les amendements. Je n'ai jamais été contre. J'ai signé le rapport McGrath. J'ai cité d'autres cas. Il m'est arrivé à d'autres occasions de soutenir que le Président devrait avoir ce pouvoir. J'ai aussi soutenu, monsieur le Président, que la présidence devrait pouvoir faire mettre fin aux abus parlementaires commis non seulement par l'opposition, mais aussi par le gouvernement. La présidence devrait avoir le pouvoir de refuser l'attribution du temps lorsqu'on n'a pas accordé suffisamment de temps au débat.
Si la motion était équilibrée, si elle accordait à la présidence un pouvoir discrétionnaire non seulement sur les abus de l'opposition, mais encore sur les abus du gouvernement, les tactiques du gouvernement, le mauvais usage par le gouvernement d'échappatoires de procédure, les députés pourraient être d'un autre avis que moi aujourd'hui. Mais nous avons cette chose mal équilibrée.
Voilà ce qui est censée être la réforme parlementaire, avec le scrutin électronique. Supprimer une échappatoire importante pour l'opposition, établir le scrutin électronique conformément à ce qui a été promis dans le discours du Trône, tel est le programme du gouvernement. J'espère qu'il ne se résume pas à cela. Le leader parlementaire du gouvernement me laisse entendre qu'il ne se résume pas à cela. Toutefois, compte tenu des faits établis jusqu'à maintenant, il est difficile d'en venir à une autre conclusion.
Voilà pourquoi le NPD s'oppose vivement à cette motion et nous espérons que d'autres députés font de même. Peut-être que certains députés ministériels décideront de prononcer un discours en faveur d'une réforme parlementaire équilibrée au lieu de se limiter à défendre cette mesure unilatérale et dictatoriale qu'a présentée le leader parlementaire du gouvernement.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, j'aimerais beaucoup associer mes observations à celles de l'intervenant précédent, le député de Winnipeg—Transcona, un doyen de la Chambre et membre du comité McGrath, dont il a parlé. Il a certes l'autorité morale pour traiter de la question qui nous occupe et il le fait avec une grande perspicacité.
Le leader du gouvernement à la Chambre veut modifier le Règlement de la Chambre, à l'aide d'une note adressée à la Chambre, afin d'interdire ce qu'il appelle des amendements à caractère répétitif et abusif à l'étape du rapport. Comme on l'a mentionné, il ne s'agit là que d'une approche et d'une tentative pour s'attaquer à un problème qui a surgi lors de la dernière législative au sujet de l'avalanche d'amendements inscrits au Feuilleton, des amendements que le leader du gouvernement à la Chambre a décidé de qualifier de frivoles et abusifs.
Cependant, lorsque j'ai examiné les observations du leader du gouvernement à la Chambre, j'ai remarqué qu'il a parlé de consultation. Nous, les députés de l'opposition, sommes devenus quelque peu habitués, malheureusement, à une consultation symbolique. En effet, nous apprenons après coup que le gouvernement a adopté une certaine position sur une question et nous recevons ensuite un appel téléphonique pour la forme, nous informant tout simplement que cela s'est produit. C'est le genre de consultation qui a eu lieu dans le cas actuel. C'est pourquoi, et le ton utilisé par la plupart des députés de ce côté-ci de la Chambre en témoigne manifestement, nous avons été particulièrement offensés par la façon dont le gouvernement a décidé d'agir à propos de cette motion.
De toute évidence, le gouvernement aurait pu chercher d'autres solutions, et une consultation véritable n'est pas la moindre de ces solutions. Il est fort étrange, et le comble de l'ironie, qu'on parle d'imposer la clôture sur cette question. Je souligne avec beaucoup d'insistance que la clôture a été imposée lors de l'étude du tout premier projet de loi dont la Chambre a été saisie à l'ouverture de l'actuelle 37e législature. Le gouvernement fait ainsi clairement part à l'opposition de ses intentions concernant la réforme parlementaire, sans parler de la collaboration.
Selon le député qui est intervenu sur cette question avant moi, il n'est pas du tout certain que le gouvernement fasse preuve de bonne volonté à l'avenir. C'est surtout en ce qui concerne la possibilité qui reste aux députés de l'opposition, ainsi qu'à certains députés ministériels, d'exprimer leur inquiétude, et encore moins leur opposition, face à ce que le gouvernement a décidé de faire.
Je vais résumer les événements qui ont abouti à la situation actuelle. Nouvellement venu à la Chambre des communes, je n'avais pas de quoi être fier de me lever à la Chambre pour voter pendant des heures durant. De même, on peut dire que le Parlement non plus n'avait pas de quoi s'enorgueillir. C'est pourtant cela qui est au coeur du débat dont nous sommes saisis.
Les députés sont carrément frustrés dans leur possibilité non seulement d'exprimer leur inquiétude et leur opposition, mais aussi d'interagir avec les députés du gouvernement, en particulier les membres du Cabinet. Le gouvernement a décidé de ne garder que ce qu'il veut de la tradition de Westminster, autrement dit l'exemple qui fait son affaire. Je fais ici allusion à la motion dont nous sommes saisis qui est indéniablement conforme à la tradition britannique.
Si l'on regarde cette tradition dans son ensemble, on constate que la motion, tout comme le leader du gouvernement à la Chambre, oublie que le Parlement britannique dispose d'autres pouvoirs qui permettent au Président de la Chambre de refuser le recours à la clôture ou de rejeter la motion d'attribution de temps. De même, le Président a le pouvoir d'ordonner aux ministres de se présenter devant le Parlement pour rendre compte non seulement à la Chambre et aux députés, mais aussi à tout le pays. Nous avons rarement, et même jamais, assisté à un tel exercice.
Ce que nous voyons trop souvent malheureusement, ce sont des annonces importantes venant du gouvernement qui sont faites de l'autre côté de la rue, à la Tribune de la presse. Nous l'apprenons après le fait. Pourtant, la presse et la population canadienne se demandent ouvertement pourquoi on réduit ainsi le rôle du Parlement et pourquoi sa pertinence est remise en question. C'est largement attribuable aux gestes de la présente administration, aux gestes du gouvernement qui a étouffé, réduit la possibilité pour l'opposition de questionner ses actions. Même ses propres députés n'ont pas la possibilité de questionner ses gestes, ses décisions stratégiques et ses initiatives législatives. Le gouvernement l'a leur enlevée.
Au risque de me répéter, je rappelle que, dans le discours du Trône, le gouvernement a vaguement mentionné qu'on moderniserait le Parlement en instaurant le vote électronique. Nous connaissons le résultat de ce changement. Il y aura moins d'interaction avec le gouvernement, moins de reddition de compte directe, et certainement moins de démocratie directe. Il n'y aura plus moyen de transiger à la Chambre. La modernisation retirera à l'opposition le dernier outil qui lui restait pour arrêter le gouvernement, ou du moins pour le ralentir lorsqu'il veut faire adopter à la hâte de nouvelles mesures législatives.
Je m'interromps un instant pour signaler que je partagerai mon temps avec le député de Calgary-Centre.
La façon de faire du gouvernement est extrêmement curieuse, compte tenu de la manière peu orthodoxe qu'il a employée pour présenter la motion. Il est incapable de présenter cette motion à la Chambre dans les deux langues officielles. Il est impossible pour un comité de la Chambre de rédiger un rapport et de le renvoyer à la Chambre des communes afin d'expliquer ce que la Chambre veut et quelles seront les règles si celles-ci s'inspirent de l'usage en vigueur à Westminster. Comme chacun le sait, ces règles de procédure ne sont pas disponibles à la Chambre dans les deux langues officielles. L'idée que le gouvernement semble vouloir imposer au Parlement du Canada des lignes directrices indéterminées et étrangères qui proviennent d'une autre Chambre nous inquiète aussi grandement. Est-ce à dire que notre ligne de conduite nous sera dictée par la Grande-Bretagne, comme dans le passé?
Il est certainement paradoxal que la plus ancienne démocratie parlementaire du monde libre vienne nous dicter comment moderniser nos règles de procédure. C'est certainement un aspect dont un pays souverain comme le nôtre devrait s'occuper lui-même. La ministre de la Justice s'appuie-t-elle sur le code pénal de l'Irlande? Le ministre de la Défense nationale voit-il d'un bon oeil que d'autres États décident à la place de son pays?
On peut dire que le gouvernement disposait d'autres solutions en l'occurrence. Il aurait pu procéder différemment. Il a choisi de ne pas le faire. En présentant cette motion, le ministre parle au nom du Cabinet. Le Cabinet a-t-il accepté de renoncer à toute indépendance là-dessus? Si c'est le cas, il devrait démissionner.
C'est une question qui devrait être décidée par tous les députés, et non seulement l'exécutif. Dire le contraire, c'est aller à l'encontre des fondements de la démocratie. Dire que le Cabinet peut, de son propre chef, décider comment la Chambre doit fonctionner est insultant.
Le gouvernement a un problème. Le leader parlementaire a un problème. La Chambre elle-même a un problème. S'il doit y avoir une répétition de la destruction de notre processus de l'étape du rapport, ce que pourrait entraîner cette motion, nous devons y faire face tous ensemble. Nous devons y faire face collectivement. La solution ne consiste pas à imposer la clôture. Ce n'est certainement pas la façon dont la Chambre devrait fonctionner.
La Chambre a déjà accordé à la présidence les pleins pouvoirs pour choisir les amendements à l'étape du rapport. La présidence dispose de ce pouvoir actuellement. Le redire est une façon de contourner le vrai problème. S'il y a un doute qu'il s'agit là de la façon convenue de modifier la jurisprudence et de préserver notre amour propre national, alors nous devrions nous engager dans un processus plus poussé que ce que nous avons vu. La Chambre peut faire mieux que dire que nous devons le faire parce que la Grande-Bretagne le fait. Il nous faut une solution qui nous soit propre. Le comité permanent devrait se mettre au travail pour trouver cette solution.
Je suis d'avis que la vraie raison pour laquelle le gouvernement a présenté cette motion, c'est parce qu'il veut éviter tout délai dans l'étude du projet de loi sur la justice pénale pour adolescents. Il procède de cette façon afin d'éviter d'être embarrassé de nouveau en ne pouvant pas présenter une de ses dix principales priorités.
Je vais céder la parole au député de Calgary-Centre, qui conclura nos observations et notre position sur la motion.
Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, je remercie le député de Pictou—Antigonish—Guysborough de partager son temps de parole avec moi.
Mon collègue a parlé d'une solution qui soit propre au Canada. Il faudrait aussi avoir une solution propre au Parlement, mais ce n'est pas le cas. Elle provient du gouvernement, qui l'impose à la Chambre des communes. Ce n'est pas ainsi que nous réussirons à modifier cette institution qui porte le sceau de la légitimité.
Je prends part à ce débat parce que je crois qu'il nous offre une occasion exceptionnelle d'apporter des changements qui rendront le Parlement beaucoup plus efficace. Cela exige du leadership de la part du gouvernement. Malheureusement, ces premières mesures indiquent qu'il n'est pas disposé à apporter les changements nécessaires.
Le leader du gouvernement à la Chambre affirme qu'il s'agit d'une question unique et très limitée. Ce n'est pas le cas. Elle s'inscrit dans une tendance qui vise à supprimer la démocratie à la Chambre des communes et à faire de ce Parlement et, je le dis à regret, du Président de simples serviteurs du gouvernement. Cela va à l'encontre de toute l'histoire et de toute l'idée de parlement. Cette tendance réduit la responsabilité du gouvernement. Plus grave encore peut-être, elle porte atteinte à l'indépendance du Président et de la Chambre des communes.
Nous devons incontestablement trouver des façons qui permettent au Parlement de fonctionner. Toutefois, il n'est pas non plus douteux que l'opposition doit pouvoir retarder les actions du gouvernement qu'elle juge condamnables. C'est précisément le rôle du Parlement. Les pouvoirs du gouvernement doivent être limités. C'est la raison pour laquelle le Parlement s'est doté de règles.
Les tactiques employées par l'Alliance canadienne au sujet du projet de loi concernant les Nisga'as, et celles utilisées par le Bloc québécois dans le cas du projet de loi sur la clarté référendaire ont soulevé des préoccupations légitimes de la part du gouvernement comme chez tous les parlementaires. Ce n'est pas la première fois que ces questions se posent.
Durant la dernière législature, le Président n'a jamais été appelé à statuer sur la rectitude des tactiques utilisées. Je soupçonne que le gouvernement, craignant une décision défavorable du Président, a préféré garder le silence.
Dans le cas actuel, le gouvernement ne risque pas de s'exposer à une décision défavorable du Président parce que, en vertu de cette motion, il lui dit ce qu'il est censé décider.
Au lieu de laisser à l'ensemble de la Chambre des communes le soin de se prononcer, comme ce devrait être le cas, le gouvernement ordonne au Président de ne pas accepter des amendements que le gouvernement juge futiles. Et je précise qu'il le fait sans l'appui d'aucun autre parti à la Chambre.
[Français]
Lorsque les parlements changent leurs règles, le problème qui s'ensuit est celui d'assurer que ces changements sont perçus comme étant légitimes.
La façon traditionnelle de former un consensus est par le biais de comités constitués de représentants de tous les partis. Ce n'est certainement pas ce qui est arrivé ici.
C'est une modification aux règles imposée par la matraque de la clôture. Il n'y a eu aucune consultation ou tentative d'en arriver à un accord faisant en sorte que la Chambre se retrouve maintenant avec une règle qui ne sera pas perçue comme étant légitime, et ce, pour plusieurs décennies à venir. Cette modification au Règlement de la Chambre des communes s'avère d'autant plus difficile puisqu'il s'agit de directives adressées au Président de la Chambre, émises malgré les objections des partis minoritaires de la Chambre, et qui restreint les partis minoritaires de la Chambre.
Il n'y a donc plus rien pour prévenir que le bureau du premier ministre demande aux libéraux de museler la gênante Chambre des communes.
La Chambre vient de procéder à l'élection de son Président, un Président en lequel nous avons mis tous nos espoirs, afin que celui-ci honore cette Chambre. Et la première chose que fait le premier ministre du Canada, c'est dire au Président comment remplir ses propres fonctions. L'action du premier ministre mine grossièrement le Président de la Chambre des communes.
[Traduction]
Il y a de meilleures solutions que la modification du Règlement par l'imposition de la clôture. On pourrait demander à la présidence de rendre une décision en s'appuyant sur la procédure existante. Si nécessaire, on pourrait demander à un comité d'élaborer de nouvelles lignes directrices pour la Chambre, et de les faire connaître aux députés. On pourrait demander aux députés qui ne sont pas mêlés aux luttes de pouvoir et qui ne prennent pas part aux combats quotidiens à la Chambre de proposer des correctifs, comme cela s'est fait dans le passé.
Aucune de ces options n'a été examinée. Aucun effort n'a été fait pour trouver une solution qui ferait consensus. Non, on a plutôt choisi d'imposer la modification en recourant à la clôture.
Comme mon collègue l'a dit, le gouvernement prend ce qui lui plaît bien dans la procédure suivie au Royaume-Uni. En passant, je trouve très ironique qu'un gouvernement qui a fait toute une histoire avec le rapatriement de la Constitution soit maintenant en complète admiration devant Westminster.
Sommes-nous oui ou non un pays indépendant capable de fixer ses propres règles? Les règles qui existent en Angleterre sont telles qu'il y a au Parlement anglais un bien meilleur équilibre que ce que souhaite avoir ici le gouvernement du Canada. Celui-ci choisit les règles anglaises qui amoindrissent les droits des députés sans offrir aucune contrepartie, par exemple, le pouvoir qu'a le Président au Royaume-Uni de refuser une motion de clôture ou d'attribution de temps.
Il est pratiquement certain qu'un président britannique aurait refusé la motion imposant la clôture sur une motion visant à modifier le Règlement après seulement deux heures de débat.
Au Parlement anglais, le Président peut aussi insister pour que les ministres soient présents à la Chambre pour faire leurs déclarations plutôt que de toujours courir s'adresser à la tribune de la presse. Le Président a le pouvoir de prolonger ou de limiter les débats.
C'est le Règlement de la Chambre des communes en Grande-Bretagne, si nous voulons avoir un tableau d'ensemble de la situation au lieu de nous concentrer seulement sur les règles qui limitent les pouvoirs de l'opposition.
Ce qui est plus grave dans le cas présent, c'est l'attaque du gouvernement contre le Président. En adoptant cette façon de faire, il donne l'impression que le Président n'est qu'un outil entre les mains du gouvernement. Il traite le Président comme s'il était encore un député libéral d'arrière-ban. Il dit au Président ce qu'il doit faire.
Soyons réalistes. Ce n'est pas la Chambre dans son ensemble qui nie au Président le droit d'exercer son propre jugement, mais bien le Cabinet qui donne cet ordre et utilise son pouvoir au niveau disciplinaire et la peur pour ramener à l'ordre ses députés d'arrière-ban.
Monsieur le Président, comme vous le savez, au grand regret de nous tous, il y a eu à la Chambre il y a une quarantaine d'années un président tristement célèbre, René Beaudoin, au cours du débat sur le pipeline. René Beaudoin a perdu la confiance de l'opposition et de la population canadienne, car il semblait suivre les directives du gouvernement.
Ce projet de loi fait que tous les présidents qui vont succéder risquent de devenir des René Beaudoin. Il est possible que tous les présidents de la Chambre à l'avenir ne soient plus que de simples serviteurs du gouvernement au lieu d'être des serviteurs et des défenseurs de la Chambre des communes dans son ensemble. Cela nuit à l'impartialité qui est au coeur du pouvoir et de la légitimité du Président de la Chambre des communes. Cela fait de la Chambre des communes du Canada un simple sous-comité du Parti libéral du Canada. C'est tout à fait inacceptable.
Le gouvernement nous demande dans le projet de loi d'accepter sa définition de ce qui est frivole. Cette requête vient d'un gouvernement qui trouve tout à fait convenable que le premier ministre exerce des pressions sur une société d'État pour qu'elle donne de l'argent à un de ses amis.
Je tiens à signaler que le gouvernement Saint-Laurent aurait pu considérer comme frivoles les objections qui ont conduit au débat historique sur le pipeline à la Chambre.
Le gouvernement Trudeau aurait pu considérer comme frivoles les amendements qui l'ont forcé en fin de compte à soumettre le rapatriement de la Constitution à la Cour suprême du Canada qui a jugé que le gouvernement violait les conventions constitutionnelles du pays.
Le gouvernement Mulroney aurait pu juger frivoles les amendements à la Loi sur les brevets.
Le gouvernement actuel pourrait considérer comme frivoles des amendements tendant à ce que le conseiller en éthique fasse rapport à la Chambre des communes dans son ensemble.
La définition du gouvernement de ce qui est frivole diffère naturellement de celle de l'opposition. Qui devrait décider de façon impartiale dans ce cas-ci? C'est le Président de la Chambre des communes en utilisant son pouvoir discrétionnaire et son jugement. Cependant, cela ne sera plus possible une fois que cette disposition sera modifiée à la suite du recours à la clôture.
Cela affaiblit toute la Chambre des communes. Cela affaiblit notre régime parlementaire. C'est un pas en arrière auquel on doit s'opposer.
[Français]
M. Serge Marcil (Beauharnois—Salaberry, Lib.): Monsieur le Président, le débat sur cette motion a un but bien particulier et bien précis et c'est la question qu'il faut se poser.
Après tout ce qu'on a entendu à la Chambre depuis quelque temps, je suis d'avis qu'on en est rendu à l'étape où il faut réellement remettre les pendules à l'heure. Il faut réellement mettre les points sur les «i» et les barres sur les «t», parce qu'on a l'impression que la Chambre, à un moment donné, sert plutôt à certaines personnes non pas pour bonifier le travail des députés à la Chambre ou en comités parlementaires, mais davantage à empêcher qu'un débat se réalise.
J'interprète souvent cela comme étant le fait de certaines personnes qui font de l'enflure verbale—donc qui ne parlent que pour parler—, mais on ne tente pas de permettre aux gens de s'exprimer dans le but d'essayer de bonifier un projet de loi. On établit des tactiques qui font en sorte que, à un moment donné, on décide de bloquer parce qu'il y a une faille au niveau du Règlement et on en profite.
Il me semble que, pour ce qui est des parlementaires, la Chambre doit permettre à l'ensemble des députés de cette Chambre de s'exprimer dans le but de bonifier un projet de loi.
Le problème actuellement est qu'on lance un peu partout le fait que le gouvernement veut imposer un bâillon à la Chambre. Ce que je comprends bien, c'est que le gouvernement ne dirige pas cette Chambre, elle est dirigée par un Président élu par l'ensemble des députés de cette Chambre.
L'actuel leader du gouvernement à la Chambre, le leader du parti ministériel et le leader des députés qui sont en majorité dans cette Chambre, parle au nom de ses députés, tout comme les leaders de chacun des partis d'opposition formant cette Chambre parlent au nom de leurs députés.
Lorsque le leader de la majorité dans cette Chambre se lève et dépose une motion, il la dépose au nom de l'ensemble des députés et non au nom du gouvernement, tel qu'on a tendance à le faire croire.
Lorsque les ministres se présentent à la Chambre, ils sont imputables devant la Chambre. Ils sont assis devant les députés d'opposition et ces derniers peuvent leur poser des questions. Mais ce ne sont pas les ministres du gouvernement qui dirigent cette Chambre.
En fait, cette Chambre est autonome. Elle est dirigée par un Président élu par l'ensemble des députés de cette Chambre. Cependant, il existe quand même un Règlement qui établit le cadre d'intervention de l'ensemble de la députation dans cette Chambre.
Il faut se poser la question: est-ce que le leader parlementaire de la majorité à la Chambre propose une motion dans le but d'amender le Règlement de la Chambre des communes? Poser la question, c'est y répondre, et la réponse est non.
La motion n'a pas pour but d'amender le Règlement de la Chambre des communes, elle vise à permettre au Président de la Chambre d'utiliser le pouvoir qui lui a été conféré, justement, de faire ce choix de motions, ce qu'on ne fait plus depuis un certain temps, depuis plusieurs années, presque une trentaine d'années, et ce, au nom de la tradition.
La motion sur laquelle nous nous penchons aujourd'hui a un but, et ce n'est pas de mettre quoique ce soit en cause, ce n'est pas pour parler de bâillons, ce n'est pas pour dire que le leader du parti majoritaire à la Chambre veut amender le Règlement. Il y a une raison pour laquelle cette motion a été proposée. Le rôle d'un député, c'est de participer au débat afin de pouvoir améliorer un projet de loi. Nous avons établi une procédure, à la Chambre, et dans toutes les assemblées législatives des provinces des différents gouvernements, justement pour permettre aux députés d'intervenir, de débattre d'un projet de loi ou d'une motion qui est déposée à la Chambre.
Voici la procédure: on dépose un projet de loi, on le renvoie à un comité, le comité permanent ou le comité en question étudie le projet de loi, article par article, et c'est là que les motions sont présentées; le vote se prend en comité.
Lorsqu'on dépose le projet de loi à l'étape du rapport à la Chambre, en fait, on ne devrait pas essayer de faire ce qui est indirectement impossible de faire autrement, parce que les amendements doivent être proposés là, au comité. Ainsi, les amendements qui ont été refusés au comité ne doivent pas être proposés également à la Chambre à l'étape du rapport. On ne peut donc pas faire indirectement ce qu'on n'est pas en droit de faire directement.
C'est à ce moment que le Président a le pouvoir d'intervenir pour faire le choix d'accepter ou de refuser des motions, de faire des regroupements de motions. Lorsqu'on voit—parce que la Chambre des communes existe depuis plusieurs décennies—ce qui se fait aujourd'hui, quand on parle du projet de loi sur les jeunes contrevenants, par exemple, à un moment donné, on pourrait utiliser une expression de chez nous, à savoir: «Trop, c'est comme pas assez».
On pourrait parler des 3 133 motions d'amendement qui ont été proposés; les motions nos 2 646 à 3 029, donc 400 motions, avaient pour but de changer la date d'entrée en vigueur de la loi. Cela a été proposé par 44 députés. À un moment donné, à mon âge et avec mon expérience, je ne veux pas passer mon temps—et je n'ai pas été élu pour ce faire—dans une assemblée pour voter sur des futilités pendant des nuits et des nuits.
On pourrait parler des motions de l'ancien député, M. Marchand, qui portaient les numéros 2 657 à 2 658, proposant différentes dates d'entrée en vigueur pour la même section de la loi.
Je trouve qu'il y a un abus d'utilisation du temps. Je pourrais donner d'autres exemples. Il y a une centaine de motions visant la durée d'une disposition de la loi. Cela a été ainsi pendant tout ce débat-là. Et lorsque nous sommes à l'étape du rapport du projet de loi, à ce moment-là, lorsque des gens veulent proposer des amendements qui ont déjà été refusés en comité, eh bien, il doit y avoir quelqu'un qui puisse trancher la question. C'est à ce moment-là que le Président doit utiliser le pouvoir qui lui a été attribué, conféré à la suite des recommandations d'un comité qui s'était penché sur le Règlement de la Chambre en 1968.
Depuis ce temps—il n'y avait probablement pas eu d'abus depuis lors—on a laissé passer. Aujourd'hui, ce qu'on demande—et la motion vise strictement à confirmer à nouveau le pouvoir du Président de la Chambre de choisir les motions qui feront l'objet d'un débat à l'étape du rapport—c'est de procéder ainsi qu'il était prévu qu'il le fasse lorsque la procédure parlementaire actuelle a été adoptée, il y a environ 32 ans.
La motion n'a donc pas pour but de bâillonner, d'amender les Règlements de la Chambre. Elle n'a pour but que de favoriser l'intervention du Président, ce qui est une coutume, une tradition, à tout le moins un amendement au Règlement qu'on avait adopté à l'époque pour permettre au Président de mettre de l'ordre à la Chambre et d'éviter que les débats aillent à droite et à gauche, éviter qu'à un moment donné, des motions ne portent que sur l'application de virgules, de points-virgules, de points d'exclamation, de points d'interrogation et de points finaux.
C'est donc un peu cela. Les motions proposées doivent également avoir un sens qui aurait pour but d'améliorer le projet de loi ou de l'amender pour le rendre plus applicable, et non pas uniquement de bloquer les procédures. Dans ce sens-là, je vais appuyer la motion du leader du gouvernement à la Chambre.
[Traduction]
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je veux expliquer certains des problèmes que présente cette motion. Il est intéressant que le gouvernement suggère que le Président ne choisira pas, pour la tenue d'un débat, une motion ou une série de motions à caractère répétitif, frivole ou abusif.
On peut rarement dire à la Chambre des communes qu'un amendement ou une motion n'est pas à caractère frivole, abusif ou répétitif. La majeure partie de ce que nous disons à la Chambre des communes est répétitif, et il y a une raison à cela. Les 301 députés ont le droit de choisir ce dont ils vont parler. J'ai le droit de parler de la même chose que n'importe quel de mes collègues ici. De la même façon, n'importe quel de mes collègues, quel que soit le parti qu'il représente, a le droit de proposer un amendement qui est semblable à tout amendement que je peux moi-même proposer. Après tout, c'est pour cela que nous avons été élus.
Encore une fois, le gouvernement nous montre que ce qu'il veut vraiment faire, c'est gérer les affaires de l'État uniquement du point de vue du Parti libéral, sans tenir compte du point de vue des autres partis. Je serais surpris d'apprendre que tous les ministériels à la Chambre sont en faveur de cela, particulièrement les députés d'arrière-ban.
Le gouvernement parle de faire des changements afin de réformer le Parlement. Il laisse même entendre que cette motion pourrait faire partie de ces réformes parce que la Chambre des communes britannique fait quelque chose de semblable. Le gouvernement ne voit pas très clair dans ce dossier de la réforme parlementaire. Il ne peut pas choisir une série de changements qui seront en sa faveur et appeler cela une réforme parlementaire. Cela ne se fait tout simplement pas de cette façon. Il doit considérer le Parlement dans son ensemble et déterminer tout ce qu'il y a lieu de changer, au lieu de se limiter à certains aspects.
Soit dit en passant, je partagerai mon temps avec le député de Dewdney—Alouette. Il faut que les députés comprennent que nous avons tenté plusieurs fois à la Chambre d'obtenir des réformes. Par exemple, pourquoi ne pas procéder en ce qui concerne les questions et observations après les interventions comme on le fait pour la période des questions, au lieu qu'un député tienne le crachoir pendant cinq ou sept minutes pour poser une question? Pourquoi ne pas faire cela? Qu'y a-t-il de mal à cela? Le gouvernement dit que ce ne serait pas nécessairement en sa faveur, donc il ne le fera pas.
Peut-être l'attribution du temps total à la Chambre des communes devrait-elle se faire en fonction du nombre de sièges détenus par chaque parti. Le gouvernement dit que cela ne s'est jamais vu auparavant. Pourquoi ne pas imposer des sanctions ou des amendes aux personnes qui divulguent certaines informations au sujet des rapports de comités? Le gouvernement dit qu'il n'y pas pensé. Il y a un problème, mais il ne veut pas faire cela. Pourquoi les travaux des comités ne sont-ils pas tous publics au lieu d'être à huis clos? Le gouvernement dit que c'est peut-être une chose dont nous devrions discuter.
Peut-être la présidence des comités devrait-elle être attribuée en fonction de la taille des partis représentés à la Chambre des communes, au lieu de l'approche bizarre qui consiste à avoir une majorité de députés libéraux au sein des comités. Comme les membres choisissent leurs propres présidents, ce n'est pas étonnant que les comités soient partiaux, c'est le moins qu'on puisse dire.
Les députés ministériels disent que cela pourrait leur nuire en tant que gouvernement, mais qu'ils sont prêts à adopter cette mesure tout de même, parce que cela se fait en Angleterre. Ils disent que le Président de ne devrait pas choisir, pour la tenue d'un débat, une motion ou une série de motions à caractère répétitif, frivole ou abusif.
Nous avons alors demandé pourquoi ne pas nommer des gens aux comités pour de plus longues périodes. Le gouvernement nous a répondu que cela ne s'était jamais fait auparavant. Nous avons proposé de télédiffuser toutes les séances des comités pour les rendre publiques. Même si la Chambre des communes à Londres et d'autres assemblées aux États-Unis le font, le gouvernement ne sait pas si ça pourrait se faire ici.
Que dire des documents et des rapports diffusés par les comités? Ils pourraient peut-être faire l'objet de débats à la Chambre des communes. Les libéraux disent qu'ils ne veulent pas, car cela pourrait les gêner quelque peu.
Que dire alors du calendrier des travaux parlementaires? Nous pourrions peut-être le modifier. Le vendredi est une journée perdue à la Chambre, tout le monde le sait, mais nous ne sommes pas censés le dire. Le gouvernement ne veut pas modifier le calendrier. Toutefois, il dit vouloir un petit changement; il ne veut pas de motion frivole qui pourrait moderniser la Chambre des communes. Il dit qu'il apportera cette modification aujourd'hui même.
Pourquoi ne pas mettre aux voix toutes les motions et tous les projets de loi d'initiative parlementaire? Si ces mesures méritent d'être débattues à la Chambre des communes, pourquoi ne pas les mettre aux voix? C'est ce que font d'autres assemblées nationales, comme la Chambre des communes britannique. Pourquoi ne pas faire de même ici?
Si ces changements ne sont pas apportés à la Chambre des communes, c'est qu'ils ne conviennent pas aux ministériels. Ces changements ne leur permettraient pas de choisir les questions et contrôler le débat. Il ne suffit pas d'être élu à la Chambre des communes, d'y représenter une région comme la mienne et de vouloir apporter des changements, à moins bien sûr de faire partie des rangs du gouvernement.
Si le gouvernement veut apporter des changements, il peut le faire et dire que c'est parce qu'il veut une réforme parlementaire. C'est de la foutaise. Le gouvernement ne tient pas du tout à réformer la procédure parlementaire. Il ne veut que ce qui est bon pour le gouvernement. C'est ce qu'il cherche.
Le gouvernement prétend que nos amendements ne servent qu'à gruger sur la période de débat puisqu'il faudra voter. Ça aussi, c'est de la foutaise. Le vote a lieu après le débat. Cela ne fait que permettre l'utilisation probablement la plus efficace de notre temps. Plutôt que de nous lever pendant des heures pour voter, nous aurions du temps pour débattre de la question à l'étude. Mais nous ne pouvons pas prendre plus de temps que ce que le gouvernement est prêt à nous accorder, sans quoi il impose une mesure d'attribution de temps, ce qui met fin au débat.
La Chambre des communes est en grande partie dysfonctionnelle. Sur certains points, elle est toujours bloquée aux vieux principes des années 1950 et 1960. Le gouvernement rechigne encore à l'idée des débats télévisés et du vote électronique, qui se fait partout au monde. Il prétende que si nous enregistrons notre vote de façon électronique en appuyant sur un bouton, le whip ne sera pas en mesure de voir qui vote pour et contre au sein de son propre caucus. C'est de la foutaise.
La motion renforce dans mon esprit le fait que le gouvernement ne fait preuve d'aucune initiative et qu'il n'a aucunement le désir de réformer le parlement. Ça revient au contrôle exercé par le gouvernement dans une Chambre des communes qui est en grande partie dysfonctionnelle et que rien ne changera tant que le gouvernement sera au pouvoir.
M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis déçu que nous ayons à tenir ce débat aujourd'hui, alors que nous venons à peine d'amorcer les travaux de la nouvelle législature. Déjà, il est question d'une motion de clôture. Le gouvernement met à profit sa majorité pour modifier le Règlement et s'arroger de plus grands pouvoirs pour mieux contrôler le débat à la Chambre.
Que l'on me permette une petite anecdote. En tant que membre du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, l'Alliance, de concert avec des députés d'autres partis, a proposé de procéder par scrutin secret pour le choix des présidents des comités de cette législature. Il s'agit d'une initiative d'importance relativement mineure, qui permettrait cependant d'intégrer un peu de démocratie à la structure des comités où nous passons beaucoup de temps pour mener à bien notre travail de parlementaires. Le gouvernement a rejeté la motion, au prétexte qu'il ne lui était pas possible d'opter de la sorte pour une approche fragmentée, que ce serait un tort et que nous devrions envisager une réforme parlementaire.
Le gouvernement ne nous propose pas de réforme parlementaire. Il nous ressert l'argument qu'il a invoqué pour rejeter notre motion. Il opte aujourd'hui pour une approche fragmentée en présentant cette motion, et cela nous déçoit réellement. Cela témoigne de l'arrogance du gouvernement. Il tire parti de sa grande majorité pour limiter le débat sur les sujets qui ne lui plaisent pas et avoir gain de cause, et c'est désolant.
Les députés devraient rejeter cette motion. Malheureusement, je ne pense pas que ce sera le cas. Depuis huit ans, le gouvernement a profité de sa majorité pour réduire la participation de l'opposition aux débats et faire taire les dissidents dans ses propres rangs, au Cabinet. Il a tout à voir avec la consolidation du pouvoir et l'accroissement des pouvoirs du gouvernement.
Le gouvernement est censé être le gardien de cet endroit, celui qui va évoluer de façon à protéger la démocratie et à établir le cadre de réglementation des débats à la Chambre, non seulement pour l'immédiat, mais aussi pour l'avenir. Pourtant, le gouvernement suit le cheminement inverse. Il oublie les leçons qu'il a apprises dans l'opposition, époque où il parlait de semblables mesures adoptées par un gouvernement majoritaire. Il oublie qu'un jour il ne formera plus le gouvernement et que cela se produira, faut-il l'espérer, plus tôt que tard.
Je garantis que les députés ministériels se remémoreront cette journée de débat et se demanderont ce qu'ils ont fait. Ils ont privé les députés de l'opposition d'une occasion de soulever des préoccupations légitimes et ils dénonceront un jour cette motion. Il est déplorable qu'ils ne cherchent pas de façon non partisane à faire de cette Chambre un meilleur endroit, un lieu où les débats sont utiles et où les personnes peuvent présenter des idées et des suggestions.
Des limites très serrées seront imposées aux députés d'arrière-ban du gouvernement en ce qui concerne les amendements qu'ils peuvent proposer à l'égard de leur propre mesure législative. À l'heure actuelle les députés ministériels d'arrière-ban ont peu d'outils à leur disposition. Ils viennent d'en perdre un autre qui réduit encore plus leur capacité de présenter des amendements aux mesures législatives. Je m'attendais à ce que les députés ministériels soulèvent ce point au cours du débat aujourd'hui et qu'ils s'abstiennent ensuite d'appuyer la motion.
À l'occasion de la rencontre du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre tenue aujourd'hui, la députée de Mississauga-Centre, une députée respectée qui effectue un bon travail à la Chambre, a déclaré que l'on devrait revoir tout le fonctionnement de la Chambre des communes. Elle a dit qu'il est temps de procéder à une réforme parlementaire. Je suis d'accord avec elle, comme le sont d'autres députés de ce côté.
Nous avons présenté des propositions positives. Je sais que mon collègue de Langley—Abbotsford a consacré pendant de nombreuses années beaucoup de travail à la réforme parlementaire. C'est un dossier dans lequel nous poursuivons notre travail.
Lorsque le leader à la Chambre de mon parti a présenté ces propositions, le gouvernement a réagi en disant qu'il s'agissait de demi-mesures, qui ne valaient pas d'être examinées. Qu'est-ce que cela nous dit sur la véritable intention du gouvernement de procéder à une réforme parlementaire? Ses actes sont plus éloquents que ses paroles. La façon dont le gouvernement agit ici aujourd'hui montre qu'il n'est pas intéressé à créer un cadre de travail qui permettra à la Chambre de mieux fonctionner et aux députés de collaborer sur des questions au sujet desquelles ils s'entendent.
Bien sûr, nous ne serons pas toujours d'accord sur tout. Nous devons avoir un moyen de montrer aux Canadiens que nous allons de l'avant. Il doit y avoir une façon de leur faire comprendre que nous nous préoccupons davantage de ce qui se passe au pays, et du cadre que nous mettons en place pour eux, que de nos propres carrières politiques. Nous voulons créer un cadre qui réponde aux besoins actuels et futurs du Canada. L'occasion nous est donnée de le faire. Les Canadiens nous disent que le moment est venu de procéder à une réforme parlementaire. À notre grande déception, la réticence dont le gouvernement fait preuve montre aux Canadiens qu'il n'est pas prêt à s'engager dans une réforme.
L'Alliance canadienne a présenté 12 propositions concrètes dans son document intitulé Une question de confiance. Je parlerai brièvement de certaines de ces propositions. Mes collègues ont déjà parlé de certaines autres.
La première vise à permettre davantage de votes libres à la Chambre des communes. Nous avons rédigé la motion suivante:
Que la Chambre ne considère pas le vote sur quelque motion que ce soit comme un vote de confiance envers le gouvernement, sauf si la motion est directement liée au budget du gouvernement ou si elle est explicitement formulée comme une question de confiance.
Nous pourrions donner suite à cette proposition. C'est une proposition concrète.
Nous avons déjà présenté la seconde proposition. Reprenant en partie la phraséologie du livre rouge libéral, cette proposition concerne le conseiller en éthique. Nous avons présenté une motion, mais le gouvernement l'a rejetée. Elle s'inscrivait dans le cadre de notre programme de réforme parlementaire. Nous avions proposé que le conseiller en éthique relève directement de la Chambre des communes. On sait ce qui s'est passé. Les libéraux ont voté contre une promesse qu'ils avaient faite à ce sujet dans le livre rouge.
La troisième proposition est de créer un nouveau comité permanent sur la vie privée, l'accès à l'information et l'éthique:
Dans le but de faciliter les travaux des Communes et d'insister sur l'obligation de rendre compte du gouvernement, il faudrait former un nouveau comité permanent, présidé par l'opposition, chargé d'examiner tous les aspects des lois et des rapports relevant des conseillers à la protection de la vie privée et à l'information et du conseiller en éthique, et rendant compte au Parlement.
C'est une chose que nous pourrions faire. Nous pourrions mettre un tel comité en place.
La quatrième réforme consiste à présenter des candidats à l'élection du Président. Il faudrait modifier le Règlement pour permettre aux candidats de participer à un forum ouvert, et même les y obliger, avant qu'on ne procède à l'élection du Président. C'est une chose qui s'est effectivement produite cette fois-ci, mais pas en vertu d'une tradition de la Chambre ou d'une modification au Règlement, ce qui s'impose. Mon collègue, le député de Langley—Abbotsford a contribué à mettre ce processus en place.
La cinquième réforme que préconise notre plan a trait à la nomination du greffier qui devrait se faire par le truchement d'un comité indépendant. Cette nomination serait par la suite ratifiée et approuvée par tous les députés.
La sixième réforme de notre plan concerne la nomination des hauts fonctionnaires du Parlement. Il faudrait modifier le Règlement de façon que le gouvernement soumette toutes les candidatures à ces postes de hauts fonctionnaires à l'examen d'un comité. Le comité serait libre de recommander des candidats. Comme c'est le cas actuellement, c'est à la Chambre des communes qu'il incomberait de prendre la décision finale par l'adoption d'une motion.
La septième réforme a trait à l'élection au scrutin secret des présidents et vice-présidents des comités permanents. Comme je l'ai dit, cette proposition a déjà été présentée et rejetée. C'est décevant, car il s'agit d'une proposition concrète.
La huitième réforme de notre plan propose de réduire l'ingérence du gouvernement dans les travaux des comités permanents. Cela favoriserait l'indépendance des comités permanents.
Le neuvième point porte sur les nominations par décret. Nous croyons qu'un comité devrait avoir le droit de faire tenir un vote à la Chambre en vue d'approuver ou de réfuter une nomination effectuée par le gouvernement. Un rapport de comité recommandant l'annulation d'une nomination entraînerait l'abolition de la nomination à moins que le gouvernement ne réagisse en présentant une motion tendant à rétablir la nomination.
Le dixième point, dont nous discutons notamment aujourd'hui, est l'attribution de temps et la clôture. Nous pensons que des changements doivent être apportés à ce processus. Entre autres, une période de questions devrait précéder l'attribution de temps ou la clôture imposée par un ministre. Selon nous, ce ne serait que justice. Le Président ne devrait permettre la présentation d'une motion d'attribution de temps que s'il estime qu'elle n'empiète pas sur les droits de la minorité.
Comme je n'ai presque plus de temps, je serai très bref sur les onzième et douzième points. Le onzième concerne l'obligation de rendre compte des dépenses. Nous devons faire en sorte que le gouvernement rende compte de ses dépenses. En dernier lieu, nous devons améliorer le débat à la Chambre.
Nous avons proposé des solutions concrètes agencées en un plan concret de changements à la Chambre. Nous espérons que les députés du gouvernement ne sont pas réfractaires au changement et qu'ils n'ont pas peur de joindre le geste à la parole.
De toute façon, nous interviendrons à la Chambre à maintes reprises pour réclamer des changements positifs, car nous croyons que c'est ce que les Canadiens attendent de nous. C'est ce que nous ferons.
M. Randy White: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Étant donné une motion comme celle-ci, qui crée un précédent important, ne pourrais-je pas, en vertu du Règlement, amener la présidence à reconnaître l'absence de députés libéraux à la Chambre au moment où nous débattons cette motion?
Le président suppléant (M. Bélair): Je vais y réfléchir un instant.
Le député sait qu'il ne doit pas mentionner le fait que certains députés sont absents. Par conséquent, il ne s'agit pas d'un rappel au Règlement.
[Français]
Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Monsieur le Président, avant de faire mes commentaires et mes observations, j'aimerais simplement relire la motion parce que nous avons entendu beaucoup de choses qui ont surtout été dites par les députés des partis d'opposition. Il y a eu une certaine déformation de la motion qui a été soumise par le leader du gouvernement à la Chambre des communes. La motion se lit comme suit:
Il est entendu que l'Orateur ne choisit pas, pour la tenue d'un débat, une motion ou une série de motions à caractère répétitif, frivole ou abusif ou de nature à prolonger inutilement les délibérations à l'étape du rapport. Dans l'exercice de son pouvoir de choisir les motions, l'Orateur s'inspire de la pratique de la Chambre des communes du Royaume-Uni.
La tâche qui nous incombe aujourd'hui consiste à réduire la vôtre, mais à augmenter vos responsabilités. Cependant, l'amendement qui est proposé devrait également accélérer considérablement les travaux de la Chambre et donc améliorer son efficacité pour le mieux-être général de la population que nous avons tous le devoir de servir.
Il s'agit de combler une lacune de notre procédure parlementaire qui s'est développée au cours des années par la simple pratique du quotidien, bien plus que par règlement. Nous la connaissons bien cette pratique qui consiste à bloquer aussi longtemps que possible l'adoption d'un projet de loi lequel, pour diverses raisons, ne répond pas aux aspirations de nos propres électeurs. Lorsque je dis «nos propres électeurs», je parle du point de vue individuel des députés et parfois d'un parti donné.
Comme je l'ai déjà dit, nous connaissons bien cette pratique et son objectif est simplement de bloquer aussi longtemps que possible l'adoption d'un projet de loi.
En toute honnêteté, nous devons bien reconnaître que nombreux sont ceux et celles d'entre nous qui, des deux côtés de la Chambre, je tiens à le préciser, ont usé de cette pratique, et pas dans le seul but d'abuser de la procédure. Il n'est pas question ici de prêter de mauvaises intentions à qui que ce soit. Nos actes dans cette enceinte trouvent tous leur motivation dans la mission qui nous a été confiée, soit celle de servir nos électeurs et électrices.
Quels que soient les objectifs derrière une stratégie politique quelconque, ils correspondent aux espoirs de ceux et celles qui nous ont choisis pour défendre leurs intérêts au meilleur de notre capacité. Il reste néanmoins que la fin ne justifie pas toujours les moyens, car pour satisfaire les intérêts des uns, on brime parfois, et même souvent, ceux des autres. On empiète nécessairement sur du temps précieux qui, normalement, appartient à l'ensemble de cette Chambre pour administrer les affaires de toute la nation.
Certes, la grande réforme de notre processus parlementaire, en 1968, prévoyait cette éventualité et conférait à la Présidence le pouvoir de l'enrayer. Mais vos prédécesseurs, monsieur le Président, ont eu tendance, peu à peu, à laisser libre cours à l'expression de la démocratie, et cela à un tel point qu'avec les ans, cette tendance a pris place dans la tradition parlementaire et la pratique s'est imposée. Il est bien évident que, dans bien des cas, il s'agit tout simplement d'un abus de la pratique. Je le répète: il est bien évident que, dans bien des cas, il s'agit tout simplement d'un abus de la pratique.
Le ministre mentionnait plus tôt que l'amendement proposé n'est pas le fruit d'une décision unilatérale. Après consultation avec les leaders parlementaires, on a reconnu cet état de fait et la nécessité d'y remédier. Mais comment y remédier demeure toutefois problématique. Diverses avenues se présentaient mais ne permettaient pas les solutions ciblées portant sur d'autres règlements qu'il fallait modifier. Le ministre a donc tout simplement choisi le retour aux sources, le retour à la réforme globale de 1968, qui renferme la meilleure solution dans la mesure où elle permet de régler le problème, sans pour autant modifier d'autres règlements qui ont fait leurs preuves.
Il suffit, en effet, de réaffirmer les pouvoirs qui appartiennent déjà à la Présidence, mais qu'elle n'exerce plus pour mieux satisfaire à la liberté d'expression. Je veux réellement mettre l'accent sur ce point.
L'opposition prétend que par le biais de cette motion les pouvoirs de la Présidence seront restreints et même contraints. Ce n'est pas le cas, c'est renforcer les pouvoirs et l'autorité de la Présidence. Cela est au coeur même du débat.
Le Règlement veut qu'après avoir passé l'examen d'un comité permanent de la Chambre où il est déjà soumis à des amendements, un projet de loi revienne à la Chambre pour ce qu'on appelle l'étape du rapport. C'est donc le comité permanent qui soumet son rapport sur l'étude effectuée sur le projet de loi en question.
Nous savons tous que lorsqu'un projet de loi est étudié en comité, il y a des consultations publiques et tous les membres ont le loisir de déposer les amendements ou les modifications qui, pensent-ils, vont améliorer ce projet de loi.
Cela vaut autant pour un projet de loi du gouvernement que pour un projet de loi d'initiative privée, présenté par un député, qui a réussi à passer la première étape à la Chambre afin d'être renvoyé pour étude au comité permanent.
C'est donc le moment opportun pour les députés, surtout ceux qui n'étaient pas membres du comité, d'exprimer leur opinion sur le projet de loi et de proposer les amendements qu'ils aimeraient y apporter, à condition, bien sûr, d'en avoir donné avis par écrit. La seule exception à la règle: les projets de loi portant sur des motions de subsides ou de voies et moyens.
Depuis la réforme de 1968, l'article du Règlement portant sur l'étape du rapport a subi diverses modifications, notamment en ce qui a trait à la durée des interventions. Mais si, à l'origine, l'étape du rapport visait surtout un élargissement du débat, elle ne se voulait surtout pas une répétition de l'examen déjà effectué en comité. Or, c'est exactement ce qui se produit maintenant et depuis un certain temps.
Comme nous le savons bien, la stratégie actuelle consiste précisément à répéter à la Chambre les arguments déjà avancés en comité, qui ont déjà fait l'objet de discussions, d'échanges, de débats, de commentaires en comité. Il arrive même que l'on avance sciemment certains arguments devant le comité permanent qui est chargé de l'étude du projet de loi, afin de les exposer devant l'ensemble de la Chambre.
La dernière grande réforme de la procédure avait prévu cela. Le Règlement conférait à la Présidence le pouvoir, d'une part, de regrouper les amendements proposés pour éviter les répétitions et, d'autre part, de juger du bien-fondé des amendements et, donc, de leur recevabilité.
Avec la pratique, cependant, les prédécesseurs de notre Président ont cédé devant le bénéfice du doute et, peu à peu, par crainte de brimer les droits d'expression, ils ont délégué leur pouvoir décisionnel à l'ensemble de la Chambre avec les résultats abusifs que l'on tente aujourd'hui de corriger par l'entremise de cet amendement.
Ce pouvoir comporte tous les droits nécessaires à la solution recherchée. Ainsi, le Président a le droit de rejeter une motion que le comité a déjà déclarée irrecevable, sauf s'il estime personnellement qu'elle mérite attention. Et s'il le juge à propos, il peut demander suffisamment d'explications au parrain de la motion pour faciliter sa décision. Il ne doit retenir que les amendements qui, pour diverses raisons, n'ont pu être débattus en comité.
Enfin, pour alléger les débats, il peut regrouper les motions qui portent sur le même sujet ou qui ont une similitude quelconque.
Ici, deux critères s'imposent: le contenu de l'amendement proposé et l'endroit d'insertion dans le projet de loi. Il importe toutefois de préciser que la Présidence n'a pas à se prononcer sur l'objet ou sur le fond de l'amendement proposé, ou même s'il mérite une discussion. Il lui appartient seulement de décider si l'amendement est recevable dans le cadre des règles de procédure qui s'appliquent à la recevabilité.
Sur cet aspect du Règlement relatif à la procédure, le Parlement britannique dispose d'une jurisprudence imposante, bâtie sur de très longues années d'expériences multiples, laquelle, j'en suis persuadée, serait un guide précieux et fort utile à notre Présidence. Cependant, la responsabilité est lourde, j'en conviens. Elle présuppose des situations parfois délicates, parfois très délicates.
Mais il importe surtout de penser ici à la raison d'être fondamentale de cette Chambre: servir, au mieux de nos aptitudes, la population qui nous a investi de sa confiance pour améliorer ses conditions de vie.
Il y a là aussi une responsabilité que nous devons tous assumer pour le bien collectif de la société. Je suis persuadée que cet amendement proposé à notre procédure parlementaire facilitera notre tâche et celle de la Présidence et nous permettra d'assumer plus rigoureusement cette responsabilité qui nous incombe.
Je pense aussi que, ce faisant, l'efficacité générale de ce Parlement en profitera et que, à la limite, c'est l'intégrité globale de la classe politique canadienne qui s'en trouvera valorisée.
[Traduction]
Les députés des partis d'opposition ont fait valoir de nombreux arguments. L'un d'eux, c'est que cet amendement réduira la capacité des députés d'arrière-ban, des simples députés, d'apporter des amendements à des projets de loi, et que l'amendement restreindra le pouvoir du Président. Ce pouvoir existe déjà. Ce qui s'est produit, c'est que, au fil des ans, de 1968 à tout récemment, les Présidents précédents ont décidé de ne pas utiliser ce pouvoir. Cela remonte donc à plus de 30 ans.
Je mets les députés de l'opposition au défi. Qu'ils me nomment un tribunal, que ce soit un tribunal judiciaire ou administratif, où le juge n'a pas le pouvoir d'écarter immédiatement, sur la foi des preuves ou du dossier, les poursuites frivoles ou abusives.
Il suffit de regarder certaines de nos commissions, au niveau fédéral ou provincial, qu'elles s'occupent de l'intendance ou de la surveillance civile des forces de l'ordre. Elles ont ce pouvoir. Il s'agit d'une pratique bien ancrée et un principe établi: les poursuites frivoles, abusives et répétitives n'ont pas leur place.
Vous possédez déjà ce pouvoir, monsieur le Président. La modification proposée réaffirme seulement que le pouvoir du Président de considérer comme non recevables les motions frivoles, non conformes au Règlement, vexatoires et abusives qui sont présentées à la Chambre. Dans bien des cas, le seul objectif de ces motions est de retarder les travaux de la Chambre.
Des députés d'en face ont prétendu que cela revenait à brimer la liberté d'expression des députés en démocratie. Je ne vois pas en quoi le fait de devoir voter pendant des heures sur des motions frivoles et parfois vexatoires qui visent à changer une virgule ici ou là me permet, à titre de députée, d'exprimer les vues de mes électeurs. Cela est inutile.
En réalité, cela limite le temps que moi ou d'autres députés avons pour débattre des vraies questions, le temps mis à la disposition de la Chambre pour traiter de questions de fond et pour le faire sérieusement.
[Français]
Je veux revenir au point en question. Cet amendement ou cette modification ne limite, ne contraint ou ne réduit en aucune façon les pouvoirs du Président de la Chambre. Au contraire, cela renforce les pouvoirs qui étaient déjà existants, mais dont une pratique qui s'est instaurée a empêché, d'une certaine façon, la Présidence de les exercer et de les mettre en application.
Je crois qu'avec cet amendement non seulement le gouvernement mais la Chambre auraient plus de facilité et plus de moyens pour faire valoir l'expression démocratique des points de vue de leurs commettants et de leurs commettantes.
Je crois que cela donnerait également—on entend toujours des plaintes à savoir qu'on n'a pas suffisamment de temps pour les projets de loi des députés—plus de temps si on n'est pas accaparés, si notre temps n'est pas accaparé avec des votes qui changent des virgules. Le seul objectif de ce genre de motion—il ne faut pas le cacher—, qui est souvent présenté par l'opposition, est simplement de bloquer et de stopper le travail légitime de la Chambre, le travail légitime des députés.
On veut bien parler du gouvernement, mais il y a des députés ici. Nous avons également du travail que nous voulons faire, que ce soit par voie de projets de loi ou par motions. Les procédures et les amendements qui sont à mon avis et de l'avis de beaucoup, frivoles, vexatoires, abusifs, devraient être déclarés non recevables. La Présidence en a le pouvoir. Cet amendement renforce ce pouvoir. C'est un rappel à la source.
Je vais terminer mon intervention. J'incite donc tous mes collègues des deux côtés de la Chambre à appuyer la motion du gouvernement.
[Traduction]
M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.): Monsieur le Président, je vous sais gré de me donner l'occasion d'intervenir dans le débat sur cette motion qui réaffirme le pouvoir traditionnel du Président de choisir les motions à débattre et de rejeter les motions à caractère répétitif, frivole ou abusif ou de nature à prolonger inutilement les délibérations à l'étape du rapport.
Je suis particulièrement honoré parce qu'il est question ici de principes qui sont au coeur de la démocratie canadienne, c'est-à-dire la dignité des débats parlementaires.
Les Canadiens croient dans leur pays. Ils se sont engagés à défendre ses valeurs d'équité et de compassion. Ils s'efforcent de préserver des libertés qui leur sont acquises dès le départ. À cause de cela, ils tiennent énormément à leurs institutions, y compris les procédures des débats parlementaires. Ils y voient le symbole des valeurs et des libertés qui leur sont si précieuses.
Reconnaissant cela, les députés cherchent depuis longtemps à améliorer la procédure parlementaire, et de rehausser l'image de dignité qu'ont les Canadiens de l'institution. C'est à cette fin que nous participons, par exemple, à tant d'associations parlementaires partout dans le monde; nous voulons connaître ce qui se fait ailleurs et améliorer notre façon de faire.
Malheureusement, nous n'avons pas toujours su relever la difficulté. Depuis quelques années, certains disent voir des signes précurseurs et inquiétants selon lesquels les Canadiens ne tiennent plus toujours en haute estime l'institution parlementaire.
Même si cela peut simplement résulter d'une remise en question généralisée des institutions, la source de cette désillusion est peut-être plus près de nous, à la Chambre. Par exemple...
Le président suppléant (M. Bélair): Je regrette de devoir interrompre le député. Nous devons passer à l'étude des initiatives parlementaires. Quand nous aurons terminé cette étude, le député disposera encore de 18 minutes pour terminer son discours.
Comme il est 17 h 30, la Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.
INITIATIVES PARLEMENTAIRES
[Traduction]
LA LOI ÉLECTORALE DU CANADA
Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD) propose: Que le projet de loi C-213, Loi modifiant la Loi électorale du Canada, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
—Monsieur le Président, je suis heureuse d'intervenir aujourd'hui pour lancer le débat sur mon projet de loi d'initiative parlementaire qui vise à donner le droit de vote aux jeunes âgés de 16 et 17 ans. Comme de nombreux députés le savent, ce projet de loi a été présenté à l'origine au cours de la dernière législature par notre ancien collègue, Nelson Riis, qui a très bien représenté les gens de Kamloops, Fraser and Highland Valleys et la région avoisinante au cours des 20 dernières années.
Nelson Riis était un député respecté par ses collègues des deux côtés pour sa perspicacité, sa très bonne connaissance des questions, sa maîtrise des procédures parlementaires, son flair pour le dramatique, et par-dessus tout, son intention inébranlable de servir ses électeurs et tous les Canadiens. Très peu de parlementaires peuvent jamais avoir l'espoir de servir aussi bien que lui son pays à la Chambre.
Je suis heureuse de reprendre ce projet de loi présenté au cours de la dernière législature par M. Riis et de lancer le débat aujourd'hui à la Chambre des communes. Je reconnais que lorsque Nelson a parlé pour la première fois du projet de loi et l'a présenté, j'étais plutôt sceptique. Je me demandais si des jeunes de 16 ans étaient suffisamment mûrs pour voter. Je peux donc comprendre que les députés participant au débat d'aujourd'hui soient également sceptiques.
Cependant, après avoir examiné la question attentivement et après avoir parlé littéralement à des centaines de jeunes adultes dans ma circonscription, je suis persuadée que le fait d'accorder aux jeunes de 16 et 17 ans le droit de vote donnerait un nouveau souffle à la démocratie au Canada et la renforcerait. À l'heure actuelle, notre démocratie a besoin d'être stimulée. La participation des électeurs au cours des dernières élections avait baissé à 58 p. 100. C'est le plus faible taux de l'ère moderne. Plus de quatre Canadiens sur dix sont restés chez eux plutôt que d'exercer leur droit de vote.
En quoi le fait de donner le droit de vote à des jeunes de 16 et 17 ans pourrait accroître la participation des électeurs? Certains disent que cela réduirait cette participation qui est déjà la plus faible chez les jeunes âgés de 18 à 25 ans. Cet argument ne fait qu'effleurer la question. En observant de près le comportement lors d'un vote, on constate que l'exercice du droit de vote, comme bien des valeurs fondamentales dans la vie, est un comportement que la plupart des Canadiens apprennent dans leur famille, lorsqu'ils sont jeunes.
Statistiquement, il est plus probable que nous allons voter si nos parents votent que si nos parents ne votent pas. Les gens qui votent le font parce qu'ils accordent une valeur à leurs droits et responsabilités de citoyens vivant en démocratie. On acquiert généralement des valeurs comme celle-là dans nos foyers.
Le droit de vote fixé à 18 ans fait que, lorsque les jeunes ont enfin l'âge de voter, ce qui peut signifier 19 ou 20 ans selon le cycle électoral, ils ont déjà quitté la maison. À cet âge, la plupart des jeunes adultes sont partis poursuivre des études postsecondaires ou, s'ils sont chanceux, ont déjà trouvé du travail et quitté le foyer. Nous n'agissons pas ainsi dans la plupart des autres domaines.
La plupart des jeunes adultes demeurent encore chez leurs parents lorsqu'ils commencent à travailler à temps partiel. Lorsque les jeunes adultes obtiennent leur premier emploi, ce sont généralement leurs parents qui leur enseignent les valeurs importantes comme l'éthique du travail. Même si les jeunes ne travaillent pas, leurs parents les initient souvent à l'éthique du travail en veillant à ce qu'ils fassent leur devoirs ou en leur confiant des tâches domestiques qu'ils devront accomplir en échange d'une allocation.
La plupart des jeunes adultes apprennent donc les valeurs importantes de la vie avant de quitter le foyer et de vivre en adultes autonomes. Les parents sont ceux qui enseignent l'éthique du travail, le sens du bien et du mal, la conduite automobile et même comment plier le linge. Lorsqu'un jeune adulte quitte la maison, on s'attend à ce qu'il possède tous les outils nécessaires pour vivre et fonctionner en société, sauf en ce qui concerne le vote.
Il est insensé de compter que les jeunes adultes apprendront les règles et les valeurs de la vie à la maison, mais pas leur comportement en ce qui concerne le vote. Nous attendons qu'ils aient pour la plupart l'âge de quitter la maison avant de leur permettre d'exercer leur droit de vote. Il n'est pas étonnant qu'il y ait une telle chute dans la participation électorale des jeunes. Même les jeunes adultes dont les parents votent ont moins tendance à voter que leurs parents.
Le plus tragique de tout, c'est que si l'on ne vote pas quand on est jeune, on ne votera probablement jamais. On ne commence pas comme par magie à s'intéresser à la politique à l'âge de 30 ans. Beaucoup ne votent pas de toute leur vie. Voilà pourquoi la participation électorale diminue régulièrement depuis des décennies.
Il ne fait aucun doute que nous, parlementaires, devrions tous chercher des moyens d'améliorer la participation électorale. Nous savons que les citoyens canadiens ne semblent pas avoir confiance dans notre système. Très franchement, je crois que l'une des principales raisons en est qu'ils n'ont pas confiance dans les politiciens.
Une étude menée il y a quelques années a révélé que les professionnels dans lesquels on avait le plus confiance étaient les infirmiers et les infirmières, et ceux dans lesquels on avait le moins confiance étaient d'abord les avocats, puis les politiciens. Il y a donc là un problème. Nous, parlementaires, devons nous efforcer d'améliorer notre image, que celle-ci soit méritée on pas. Nous devons nous efforcer le plus possible de faire que les gens aient de nouveau confiance dans le système démocratique. Autrement, nous risquons de perdre la démocratie, ce quelque chose que nous, Canadiens, chérissons depuis plus de cent ans.
En étendant le droit de vote aux personnes de 16 et 17 ans, nous contribuerions beaucoup à stopper la tendance à la baisse de la participation électorale. La plupart des jeunes adultes auraient l'occasion de commencer à voter pendant qu'ils vivent encore chez leurs parents. Cela donnerait aux familles la chance de discuter de politique. Les jeunes adultes apprendraient de leurs parents la valeur de la citoyenneté et de l'exercice du droit de vote, comme ils apprennent d'eux d'autres valeurs humaines. Cela ferait des jeunes adultes des électeurs pour toujours.
Cela inciterait certains parents qui ne se prévalent pas de leur droit de vote actuellement à s'intéresser davantage à la question s'il y aurait à la maison de jeunes adultes qui leur posent des questions sur les élections. Cela encouragerait ce genre de discussion dans les foyers. Nous pourrions peut-être amener ainsi certains de ces parents et adultes à participer de nouveau au processus électoral. Le fait d'accorder le droit de vote aux jeunes de 16 et 17 ans aurait aussi des effets positifs pour les parents.
Avec un taux de participation au scrutin qui a chuté à 58 p. 100, il est évident que de nombreux parents ne vont pas voter et, partant, ce ne sont pas eux qui vont inculquer à leurs fils et à leurs filles l'importance des devoirs du citoyen et du droit de vote. Bon nombre de ces jeunes adultes pourraient quand même se renseigner sur le droit de vote en en parlant à d'autres mentors, comme leurs professeurs, voire leurs camarades de classe.
J'ai été fort surprise des discussions très éclairées auxquelles participent les jeunes adultes des écoles de ma circonscription. À mon avis, le fait de voir leurs fils ou leurs filles s'intéresser à la politique pourrait vraiment influencer de nombreux parents, qui auparavant ne votaient pas, à participer de nouveau à la politique.
J'ai expliqué à quel point le fait d'accorder le droit de vote à des jeunes de 16 et 17 ans dynamiserait la démocratie. C'est là le principal effet de la proposition. Je veux maintenant parler du principal reproche formulé à l'égard de cette idée, c'est-à-dire le fait que les jeunes de 16 et 17 ans ne sont pas suffisamment mûrs pour voter. Lorsque je parle de cette question à des personnes plus âgées, c'est la principale critique qu'ils formulent. D'après mon expérience, c'est on ne peut plus faux.
À titre de députée, je me fais un devoir de visiter des écoles de ma circonscription. Je suis toujours très disponible lorsqu'il s'agit d'aller parler du travail de député et du régime parlementaire canadien dans son ensemble à des classes ou à des groupes d'élèves. Je m'efforce beaucoup dans le système scolaire de ne pas être partisane. Il n'y a eu aucune critique de la part des enseignants, des parents, des commissaires d'école ou de qui que ce soit d'autre parce que le but est de faire participer les jeunes au processus politique.
J'ai parlé à bien des classes depuis que j'ai été élue la première fois en 1997. La plupart de ces jeunes adultes ne sont pas moins intelligents ou n'ont pas moins de maturité que les jeunes de 18 ou 19 ans. Très souvent, les discussions politiques que j'ai eues avec des élèves du secondaire à qui j'ai rendu visite étaient aussi intenses que celles que j'ai eues dans la rue ou avec des représentants de chambres de commerce.
Les questions dont nous avons discutées étaient peut-être différentes, mais elles n'étaient pas moins importantes. Nombre de jeunes adultes s'intéressent aux questions dont nous discutons en tant que députés et qui les touchent directement. Les jeunes adultes s'intéressent de très près aux coûts de l'éducation postsecondaire qui montent en flèche ainsi qu'à l'économie au moment où ils sont à la recherche d'un premier emploi et où ils songent à leur carrière.
Ils s'intéressent à ce qui leur arrivera quand ils seront sur le marché du travail. Ce dernier pourrait ne pas être sûr. Nous entendons parler année après année de l'augmentation du nombre d'accidents et de décès de jeunes gens sur les lieux de travail. Il est essentiel que les jeunes puissent participer au processus législatif relativement à des lois qui les concernent et à la réglementation en matière de santé et sécurité.
Un de ces accidents me vient à l'esprit. Un ouvrier de la construction albertain de 14 ans a perdu la vie au travail, et des accusations ont été portées contre son employeur. Je puis dire aux députés que ce jeune de 14 ans n'a pas eu l'occasion de participer à la discussion sur la sécurité au travail.
Les jeunes adultes ont été très durement touchés par les compressions du gouvernement dans les collèges et les universités aussi bien que par celles de l'assurance-emploi et par la mauvaise gestion de l'économie en général. Tous les jours, le gouvernement prend des décisions sans tenir le moindrement compte des jeunes adultes, même si nombre d'entre eux ont des emplois et contribuent à la société, tant à titre de citoyens que de contribuables. C'est comme s'ils n'existaient pas avant d'avoir 18 ans, ce qui n'est pas correct. Ils méritent d'être entendus.
Une autre question qui touche les jeunes adultes directement est la Loi sur les jeunes contrevenants. Dans le moment, le gouvernement parle de modifier la Loi sur les jeunes contrevenants pour qu'il soit plus facile de traduire les jeunes de 16 ans devant les tribunaux pour adultes. Si les parlementaires et le gouvernement sont d'avis que les jeunes de 16 ans devraient être traités comme des adultes dans le système de justice pénale, ils devraient aussi être traités comme des adultes dans le système électoral.
En terminant, je suis heureuse que cette question puisse finalement être débattue à la Chambre des communes. Il est malheureux que le projet de loi n'ait pas été choisi parmi ceux qui peuvent faire l'objet d'un vote, mais au moins nous avons la possibilité de débattre cette question.
Ce n'est pas facile de changer le système électoral. Il y a cent ans, les femmes n'avaient pas encore le droit de vote au Canada. Il a fallu des années d'efforts persistants pour que les femmes gagnent enfin ce droit, et ce fut même encore plus long dans le cas des autochtones. En effet, cela fait seulement 40 ans que ces derniers ont le droit de voter.
Quelques autres démocraties dans le monde ont déjà donné le droit de vote aux jeunes de 16 et 17 ans. La plupart d'entre elles sont de nouvelles démocraties en développement comme le Nicaragua et certaines des anciennes républiques yougoslaves. Comme ces nouvelles démocraties commençaient à zéro, c'était plus facile pour elles d'établir l'âge de voter selon ce qui leur semblait le plus opportun.
Au Canada, nous traînons un bagage historique plus lourd. Les gens sont habitués à ce que l'âge de voter soit 18 ans, et c'est compréhensible qu'on hésite à le changer. Je crois dans le dicton suivant lequel il ne faut pas essayer de réparer ce qui n'est pas brisé, mais le fait est que notre système électoral est justement «brisé». Cela est évident lorsque l'on constate que 42 p. 100 des Canadiens ne vont plus voter. Nous devons réparer notre système, et une des façons de le faire serait de donner le droit de vote aux jeunes de 16 et 17 ans.
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole au sujet de ce projet de loi d'initiative parlementaire, que la députée vient de décrire, et qui vise à abaisser à 16 ans l'âge minimal requis pour avoir qualité d'électeur aux élections fédérales.
Je suis d'autant plus heureux de prendre la parole que je sais que tous les députés veulent que tous les Canadiens puissent participer pleinement au système électoral et exprimer leurs vues sur les questions d'actualité. C'est particulièrement le cas des jeunes Canadiens qui, après tout, incarnent l'avenir de notre pays.
Aussi, je félicite la députée de l'intérêt qu'elle a manifesté pour la jeunesse canadienne et pour sa détermination à sauvegarder les droits démocratiques, une détermination que partagent pleinement le gouvernement et, j'en suis sûr, tous les députés.
J'avoue qu'il y a quelque chose de très séduisant dans l'idée d'accorder le droit de vote à plus de jeunes. Nous le savons tous, les jeunes sont des passionnés du Canada et sont déterminés à en faire un pays encore meilleur, comme en témoigne le nombre des jeunes qui s'intéressent à la vie politique au Canada, autant durant les campagnes électorales qu'entre les élections. Comme d'autres députés, j'ai été très impressionné par les efforts, l'engagement et le dévouement des jeunes pour notre grand pays, et je reconnais qu'il faut chercher une façon de les faire participer encore davantage à notre système politique.
Il ne faudrait pas oublier, cependant, les aspects pratiques de la question, qui risquent de poser problème. Nous devons réfléchir davantage aux problèmes qui risquent de se poser si nous abaissons l'âge requis pour avoir droit de vote, et nous demander si le moment de le faire est bien choisi.
Il est important de signaler que le projet de loi, même s'il fait figure d'initiative, n'est pas sans précédent. La Chambre des communes a été saisie de cette question à plusieurs reprises au cours des deux dernières décennies et encore récemment, comme le disait la députée, lorsque l'ancien député Riis a déposé son projet de loi. Ainsi, en 1970 le Parlement a abaissé à 18 ans l'âge minimum requis pour avoir qualité d'électeur.
En 1991, la commission Lortie sur la réforme électorale et le financement des partis avait mené une enquête approfondie en vue de déterminer si on devrait réduire à 16 ou 17 ans l'âge minimal pour voter. Elle a entendu un certain nombre de témoins qui ont présenté des arguments solides en faveur de la réduction de l'âge de voter. Cependant, elle a aussi entendu des arguments tout aussi convaincants visant le maintien du statu quo, tels que ceux-ci: les personnes de moins de 18 ans n'étaient pas considérés comme des adultes en regard du système de justice pénale et elles étaient traitées et jugées différemment en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants; les mineurs devaient obtenir le consentement de leurs parents pour de nombreuses choses importantes, comme demander la citoyenneté canadienne, se marier et obtenir certains soins médicaux; et toutes les provinces avaient établi l'âge de voter à 18 ans.
Il fallait veiller à l'harmonisation des âges de voter dans les diverses administrations. En s'appuyant sur ces constatations, la commission a décidé de ne pas recommander une réduction de l'âge de voter et a plutôt suggéré que le Parlement revoie cette question de temps à autre. C'est ce que nous faisons maintenant, et ce que nous continuerons certainement de faire si nous n'agissons pas tout de suite.
Un comité réunissant des représentants de tous les partis a étudié la question en juin 1998 et recommandé de conserver l'âge minimal actuel pour voter. On est revenu encore sur ce sujet l'an dernier, quoique de façon superficielle, dans le cadre de l'étude parlementaire de la Loi électorale du Canada, et on a décidé de garder à 18 ans l'âge de voter. Enfin, la réduction de l'âge de voter a fait l'objet de nombreuses initiatives parlementaires, qui ont toutes été rejetées jusqu'à présent.
La cohérence remarquable des députés sur cette question au cours des années, sous réserve bien sûr des diverses initiatives telles que le présent projet de loi présenté par le député, n'est pas étonnante. Il y a beaucoup de bonnes raisons de garder l'âge de voter à 18 ans pour le moment. Tout d'abord, dans la plupart des sociétés démocratiques de la planète, l'âge de voter est fixé à 18 ans et on ne sent pas le besoin de le changer.
L'expérience canadienne aussi suggère de garder l'âge de voter à 18 ans étant donné l'importance de l'âge de la majorité à bien des égards en droit et étant donné que, dans la plupart des provinces, l'âge de voter est lié à l'âge de la majorité, cet âge étant un critère dans l'exercice de toutes les activités et responsabilités civiles et juridiques.
Certaines dispositions du Code criminel s'appliquent à compter de 18 ans tandis que des dispositions spéciales s'appliquent aux personnes mineures. La plupart des lois à caractère social tiennent compte de l'âge de la majorité dans l'octroi des prestations d'aide sociale. Dans la plupart des cas, les allocations familiales sont calculées en fonction des enfants de moins de 18 ans.
Beaucoup de lois de nature économique font aussi référence à l'âge de la majorité, particulièrement celles qui ont trait aux sociétés par actions, qui exigent qu'une personne ait 18 ans avant d'être élue à un conseil d'administration. La plupart des lois sur la consommation d'alcool, mais pas toutes, sont aussi liées à l'âge de la majorité.
Compte tenu de tout cela, il est tout à fait logique de conserver une certaine cohérence en gardant à 18 ans l'âge de voter dans la Loi électorale fédérale. Cela assure l'harmonie et la cohérence dans tout notre pays très diversifié. Garder un seul âge de majorité dans tous les domaines du droit aide à prévenir une catégorisation et une segmentation excessives de nos droits civils en fonction de l'âge et assure une certaine uniformité pour les Canadiens qui se déplacent d'une partie du Canada à une autre.
Cependant, cela ne veut pas dire que l'âge de voter actuel est fixé à 18 ans à tout jamais et ne peut pas être changé. Au contraire, puisque le Canada est un pays dynamique, son système de gestion des lois électorales doit changer de temps à autre afin de répondre aux besoins de tous ses citoyens, besoins qui reflètent l'évolution des réalités sociales, économiques et culturelles.
S'il devient évident en raison d'un consensus nouveau qu'il est nécessaire d'abaisser l'âge minimum car les circonstances auront changé, j'envisagerais d'appuyer une telle modification.
Je cherche s'il y a un consensus nouveau. Il est possible que les députés devancent la tendance. Nous ne savons pas, mais faute d'une preuve évidente d'un tel consensus, nous devons continuer de faire confiance aux commissions royales et parlementaires antérieures qui nous ont dit que le temps n'est pas encore venu d'abaisser l'âge minimum.
Bien que je ne puisse pas appuyer le projet de loi, je veux néanmoins féliciter la députée d'être la représentante de possiblement toute une génération de jeunes en évolution, des jeunes qui sont assez mûrs pour penser, raisonner et distinguer le bien du mal. La plupart des gens conviendront que c'est le cas des jeunes de 16 ans. Tous les députés constatent que notre système d'éducation nous a grandement aidés à cet égard.
L'engagement qu'ont manifesté la députée et d'autres collègues au cours du présent débat et à d'autres occasions en témoigne. J'exhorte tous les députés à continuer de travailler ensemble, non seulement en ce qui concerne cette question, mais aussi en ce qui concerne toutes les questions portant sur nos droits et responsabilités en matière d'élections afin de faire en sorte que notre système électoral puisse assurer la meilleure représentation possible des Canadiens.
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole au sujet du projet de loi C-213. Je félicite mon amie du NPD qui l'a mis de l'avant.
Elle a abordé une question extrêmement importante tant pour les jeunes que pour les adultes du pays: pourquoi, en tant que nation, sommes-nous de plus en plus nombreux à nous désintéresser du processus politique. Aux élections fédérales de novembre, le taux de participation des électeurs a été le plus faible des 60 dernières années. Moins de 60 p. 100 des gens ont voté à ces élections.
Pourquoi cela? Ce n'est pas uniquement attribuable à l'apathie et au désintéressement. Les Canadiens sont franchement dégoûtés du processus politique suivi à la Chambre et dans le pays, aujourd'hui, et ils ont toutes les raisons de l'être. Cela tient au fait que nous ne vivons pas dans une démocratie.
Nous vivons dans un régime totalitaire. Le système est contrôlé par un premier ministre et une petite clique de personnes qui ne sont pas élues, qui ne rendent pas de comptes et qu'on ne voit jamais. Ce sont elles qui dictent aux députés quoi faire, que dire et quand le dire. Et gare au député dissident. Dans un processus pyramidal comme celui-là, les députés ne votent pas selon leur conscience ou la volonté des gens qu'ils représentent, mais dans le sens qu'on leur demande.
Le gouvernement garde la main haute sur la structure des comités, et c'est pour cela que les efforts déployés et les initiatives lancées ont très peu à voir avec les problèmes urgents auxquels la nation est confrontée aujourd'hui. On traite de questions non pertinentes parce que le travail en comité et à la Chambre n'est qu'une façon artificielle d'occuper les députés plutôt qu'un moyen de chercher des solutions aux problèmes sérieux qui affligent notre pays.
Il suffit d'observer le code de conduite tacite respecté à la chambre pour mieux comprendre pourquoi les députés votent comme ils le font, ce qui explique aux Canadiens pourquoi ils voient des députés voter manifestement contre ce qu'ils pensent et ce qu'ils veulent faire, et en contradiction avec ce qui devrait être fait.
Voici en gros ce qu'il en est: faites ce que les dirigeants vous disent de faire. On parle aussi du principe de la loyauté aveugle. Si un député obtient de l'extérieur des renseignements défavorables à ce que soutiennent les dirigeants, il doit à tout prix s'abstenir d'en tenir compte, même si cette information de l'extérieur est contraire à ce que disent les dirigeants et est vraie. Si les règles d'éthique et les connaissances des députés vont à l'encontre de ce que leur disent les dirigeants, ils ne doivent pas en tenir compte. Cela provoque une schizophrénie qui les empêche d'agir comme il convient, et c'est une situation très difficile à vivre.
Le zèle est récompensé; l'objectivité est pénalisée. S'ils font ce que veulent leurs électeurs, ce qu'ils jugent responsable sur les plans éthique ou intellectuel, alors que cela va à l'encontre des désirs des dirigeants, ils sont excommuniés e leur parti, ils perdent leurs droits démocratiques, ils voient leur capacité de représenter leurs électeurs grandement limitée et ils deviennent politiquement impotents.
De fait, dans le paysage politique, on ne se donne plus la peine de dénombrer les laissés pour compte politiques qui ont été à l'encontre de leurs dirigeants et qui ont agi comme il convient. C'est un système qui est faible. C'est un système qui prête à l'insatisfaction politique et au manque d'intérêt du public canadien à l'endroit de la Chambre des communes.
Que faire? Bon nombre de députés ont lutté en faveur de l'adoption de solutions constructives et démocratiques en vue de faire de cet endroit un lieu responsable pour les Canadiens. Nous entendons parler de votes libres. En avons-nous? Pas du tout. Je parle de vrais votes libres portant sur des projets de loi non monétaires. Cette solution s'impose pour les députés de tous les partis politiques.
Pourquoi ne pas soumettre les textes provisoires des projets de loi aux comités? Si les projets de loi étaient étudiés à cette étape, les députés et le public pourraient jouer un rôle beaucoup plus constructif dans la préparation de ces documents. À l'heure actuelle, les comités ne servent au fond qu'à approuver sans trop discuter les projets de loi qui leur sont soumis et qui ont déjà été mis au point par le cabinet du premier ministre et par le ministère en cause. Les projets de loi viennent du ministère et les députés ministériels jouent le jeu de l'analyse.
Cela me fend le coeur, et je suis persuadé que je ne suis pas le seul, de voir des gens intelligents et bien intentionnés comparaître devant les comités et présenter des solutions brillantes et intelligentes aux problèmes sur lesquels les comités se penchent, quand je sais que leurs interventions n'auront que très peu de poids. Nos dirigeants n'y accordent certainement pas beaucoup d'attention.
Lorsque le rapport d'un comité est déposé, on en parle dans les médias cette journée-là puis on le range soigneusement sur une tablette où il ne sert qu'à ramasser de la poussière dans un recoin quelconque. C'est ce qu'on fait de tout ce travail que les membres du comité ont consacré à un dossier pendant si longtemps.
Les comités doivent fonctionner de façon indépendante. Il faut en sortir les secrétaires parlementaires. Ils n'y ont pas leur place. Ces derniers jouent jusqu'à un certain point un rôle de whip pour le gouvernement. Ils empêchent les comités de bien faire leur travail. Accordons l'indépendance aux comités pour qu'ils puissent faire un travail efficace dont les Canadiens pourront tirer profit.
Il faudrait consacrer trois heures de plus aux initiatives parlementaires chaque semaine, par exemple deux heures le vendredi et une heure le lundi. Il faudrait modifier le système qui régit le choix des sujets à l'ordre du jour. À l'heure actuelle, on fait un tirage au sort. Tous les députés ont droit à voir au moins un de leurs projets de loi et une de leurs motions d'initiative parlementaire choisis pour un vote au cours d'une législature.
Il devrait de plus y avoir davantage de débats constructifs et moins de mesures destructives de la part du gouvernement. À l'heure actuelle, le gouvernement se cache sous une carapace et les partis d'opposition le bombardent, très souvent dans des dossiers qui n'intéressent nullement le public.
Pourquoi n'y a-t-il pas de débat efficace sur des façons de sauver notre système de santé? Pourquoi n'y a-t-il pas un débat sur les conséquences de la démographie pour la société canadienne, depuis les pensions jusqu'aux programmes sociaux? Nous avons des pensions et un système de santé qui ne peuvent pas durer; un RPC non durable en est un exemple. Notre environnement est pollué. Il existe des solutions pour corriger cela et, pourtant, aucune mesure efficace n'est prise pour s'attaquer à ce problème et à bien d'autres.
Pourquoi en est-il ainsi? Il en est ainsi parce que la Chambre ne cherche aucunement des mesures constructives pour s'attaquer aux problèmes qui touchent le pays, mais cherche surtout à se donner du pouvoir et à le maintenir. Il est vrai qu'il faut accéder au pouvoir pour appliquer les mesures souhaitées, mais cela n'exclut pas la possibilité pour tous les députés de la Chambre de tirer parti de leurs talents et de leurs compétences pour représenter leurs électeurs dans l'intérêt supérieur du Canada.
Nous devons créer à la Chambre un climat propice à l'examen des questions importantes qui touchent le pays. Ce que nous pouvons faire pour nous attaquer à la question que la députée a soulevée dans son projet de loi, c'est sensibiliser la population. Ce qui est triste, lorsque nous nous adressons à la population, notamment aux jeunes, c'est leur méconnaissance des grandes questions qui touchent notre pays.
Le gouvernement pourrait collaborer avec les provinces pour qu'elles offrent un cours d'éducation civique dès la première année d'études. Il faut brancher les gens pour qu'ils se sentent liés à leur environnement, et il est plus facile de les brancher lorsqu'ils sont jeunes. Un cours d'éducation civique offert dans les écoles permettrait aux élèves de prendre conscience de ce qui se passe dans leur milieu et d'y prendre une part active. Lorsqu'ils seraient plus âgés, ils seraient plus enclins à participer à la vie sociale, que ce soit en politique ou ailleurs.
À cause du manque de participation des Canadiens, nous devons réveiller ces ardeurs. Le seul moyen de le faire, c'est de veiller à ce que le processus parlementaire soit démocratique, de façon à ce que la volonté du peuple soit entendue et qu'il y soit donné suite.
Deuxièmement, nous devons nous assurer que les jeunes d'aujourd'hui sont au courant de ce qui se passe. Une façon de le faire serait de collaborer avec les provinces—et le gouvernement devrait effectivement le faire—pour faire en sorte que, dans toutes les écoles au Canada, les enfants reçoivent une instruction civique dès leur plus jeune âge. Nous arriverons ainsi à créer des générations d'enfants qui plus tard pourront devenir des leaders et s'attaquer aux problèmes de la nation.
Il ne me reste qu'une minute, mais je remercie encore une fois la députée et j'adresse une requête au gouvernement. Cette question ne touche pas simplement les députés de l'opposition. Elle intéresse tous les députés à la Chambre, peu importe le parti auquel ils appartiennent. Si nous ne démocratisons pas le processus parlementaire et si nous n'arrivons pas à faire en sorte que les Canadiens aient leur mot à dire par l'intermédiaire de leurs députés et grâce aux systèmes en place à la Chambre, nous ne méritons pas d'être ici et la Chambre ne mérite pas d'avoir une meilleure réputation que celle dont elle jouit à présent.
Si nous tenons compte de ce qui a été dit à la Chambre au fil des ans et que nous agissons en conséquence, alors notre pays pourra être fier.
[Français]
M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Monsieur le Président, il me fait également plaisir d'intervenir sur le projet de loi présenté par notre collègue de Churchill.
J'en profite pour la féliciter. Je pense que c'est une initiative fort louable que de présenter à la Chambre cette proposition visant à faire en sorte que nos jeunes concitoyens et concitoyennes de 16 et 17 ans puissent exercer leur droit de vote.
Mais le secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes a bien signalé que ce n'est pas la première fois que cette question est débattue ici. Si nous devons, de façon récurrente, ramener cette question et en débattre périodiquement, c'est tout simplement parce qu'il y a un certain nombre de forces un peu plus conservatrices qui ne sont pas très ouvertes à l'idée, non seulement d'envisager cette réforme qui aurait pour effet de permettre à nos jeunes concitoyens de 16 et 17 ans de pouvoir participer au processus électoral, mais qui sont également plus ou moins ouvertes, je dirais même complètement fermées, à toute réforme en profondeur du régime électoral actuel, système électoral qui, soit dit en passant, les favorise grandement.
N'est-il pas étrange que nous devions dire aujourd'hui de nos amis libéraux qu'ils font preuve de conservatisme au point de vue électoral, parce que le système électoral, tel qu'il existe actuellement, les avantage, les favorise? C'est la raison pour laquelle ils ne souhaitent pas en changer un iota, puisqu'ils n'ont aucun avantage politique, à court terme, à y apporter quelque changement que ce soit.
J'en veux pour preuve ce que disait justement le secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes lorsque qu'il disait, par exemple: «Lorsque nous avons étudié la réforme de la Loi électorale, au cours de la dernière législature, le comité, la Chambre a choisi de rejeter cette idée visant à faire en sorte que nous puissions octroyer le droit de vote aux citoyennes et citoyens de 16 et 17 ans.» «Nous l'avons rejetée» disait-il. «Donc, imbus de la sagesse de nos prédécesseurs dans le précédent Parlement, nous devrions ne pas rouvrir cette question, puisque nous venons tout juste d'en parler, et nous avons statué», disait le secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes.
Cela étant dit, je pense qu'il convient ici de faire une petite mise au point et d'expliquer ce qui s'est véritablement passé. Il convient de signaler aux députés que—ayant moi-même siégé au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre lorsque nous avons étudié le projet de loi C-2—c'est le gouvernement qui a utilisé sa majorité au comité pour faire rejeter cette motion d'amendement qui avait été présentée par le Nouveau Parti démocratique et qui visait à faire en sorte d'introduire un amendement à la Loi électorale pour permettre aux jeunes de 16 et 17 ans d'exercer leur droit de vote.
Il est inexact et, d'une certaine façon, un peu malhonnête de laisser entendre aux députés de la Chambre et à nos concitoyennes et concitoyens de 16 et 17 qui nous écoutent peut-être aujourd'hui, que le Parlement, dans toute sa sagesse, a décidé, pendant la dernière législature, de clore ce sujet, de ne pas donner suite à cette suggestion. Le gouvernement a décidé de ne pas aller de l'avant dans cette avenue. Il faudrait connaître les motivations de ce gouvernement.
Somme toute, le gouvernement a procédé à des modifications cosmétiques de la Loi électorale, à des modifications sommaires. Certaines, on doit l'admettre, étaient valables, certes, mais il n'y a eu aucune modification en profondeur du système électoral qui régit la démocratie au Canada.
Par exemple, sur la recommandation même de la Commission Lortie et celle du directeur général des Élections, nous aurions pu procéder à un changement relativement à la nomination des directeurs de scrutin. Le gouvernement souhaite toujours avoir la main haute sur la nomination des directeurs de scrutin. Pourquoi? Pourquoi choisirions-nous les directeurs de scrutin en fonction de leur allégeance partisane, plutôt qu'en fonction de leurs compétences réelles, avérées? Il semble que quelque part, le gouvernement veuille pouvoir faire ses nominations et pense pouvoir en tirer quelque avantage.
Le gouvernement a également refusé d'envisager toute la question de la révision du système de financement des partis politiques. Au Bloc québécois, et je sais que le Nouveau Parti démocratique réfléchit actuellement à la question, nous avons proposé d'introduire ici à Ottawa le financement populaire des partis qui s'appuie sur deux piliers fondamentaux. Tout d'abord, il y a celui visant à plafonner les contributions admissibles. Le gouvernement a dit non.
Le deuxième pilier est celui visant à restreindre les sources de contributions possibles aux seules personnes qui ont une voix dans le système politique, c'est-à-dire les électeurs et les électrices, ceux qui choisissent les représentants de la population au Parlement. Le gouvernement a dit non également. Il faut croire que l'actuel régime de financement les favorise et qu'ils ne veulent pas en changer, là non plus, un seul iota.
J'en viens au coeur du sujet qui nous intéresse actuellement. Je pense que l'idée selon laquelle nous devrions octroyer le droit de vote à nos concitoyennes et concitoyens de 16 ou 17 ans est une idée qui mérite très certainement d'être considérée. Plus encore, c'est une proposition qui mérite d'être adoptée.
Malheureusement, le sort a voulu, en vertu de la décision du Sous-comité des affaires émanant des députés, que ce projet de loi ne puisse faire l'objet d'un vote. Pour le moment, nous ne pourrons guère aller plus loin, puisque le gouvernement n'a manifestement pas l'intention d'incorporer une telle disposition dans ses propres législations, mais au moins le débat se poursuit. Le débat poursuit son cours et nous pensons pouvoir, éventuellement, faire évoluer les choses de telle sorte que nous puissions envisager une telle mesure.
Il serait normal que dans une société où un jeune de 16 ans a le droit d'avoir son permis de conduire, dans une société où un jeune de 16 ans peut travailler, donc payer des impôts, en vertu du principe de no taxation without representation, nous devrions pouvoir permettre à ces jeunes de 16 et 17 ans de choisir celles et ceux qui disposeront de leurs impôts, puisqu'ils ont le droit de travailler à cet âge. Ils peuvent payer des impôts à 16 ans.
La loi actuelle, le Code criminel, permet que l'on puisse considérer des jeunes de 16 et 17 ans comme des adultes. Plus encore, la Loi sur la défense nationale permet que l'on puisse embaucher dans les Forces canadiennes un jeune de 17 ans. Un jeune de 17 ans, qui n'a pas l'âge de la majorité, pourrait être appelé, s'il le souhaite, à servir sous les drapeaux et même aller défendre le Canada, au péril même de sa vie. Pourtant, nous ne voudrions pas octroyer à ce jeune de 17 ans le droit de choisir qui sera celui ou celle qui le représentera ici, à la Chambre, quelles seront les personnes qui seront appelées à diriger les destinées du pays pour lequel il est prêt à risquer sa vie.
À sa face même, cette idée selon laquelle nous ne devrions pas envisager la possibilité d'octroyer le droit de vote aux jeunes de 16 et 17 ans est saugrenue.
Nous nous inquiétons ici à la Chambre. Le directeur général des élections et la société civile en général s'inquiètent de la participation décroissante aux élections fédérales. Nous avons atteint, aux dernières élections, l'un des taux de participation les plus bas de l'histoire électorale du Canada.
Pourquoi? Pourquoi est-ce ainsi? Peut-être est-ce simplement parce qu'à ces jeunes dans la fleur de l'âge, qui s'intéressent à la chose publique, qui ont développé une pensée autonome et qui voudraient pouvoir participer à ce processus électoral, on leur dit: «Non, non, non, vous devez encore attendre. Vous devez encore attendre deux ans. Vous devez encore attendre un an».
Qu'est-ce qui arrive au terme de cette année ou de ces deux ans pendant lesquels on les aura fait attendre, on les aura fait «plantonner» à la porte en leur disant: «Non, vous n'avez pas encore ce qu'il faut. Vous n'êtes pas encore assez matures. Vous n'avez pas encore développé une pensée politique suffisamment structurée pour vous permettre d'exercer un choix judicieux, un choix éclairé le jour des élections»?
On voit bien que cela n'a pas de sens. On a là le résultat de ce maintien délibéré à l'extérieur du processus électoral de ces jeunes de 16 et 17 ans.
Comme il ne me reste que peu de temps, je vais conclure très rapidement en disant que oui, c'est une question qui mérite d'être considérée et que nous ne devrions pas, comme le gouvernement l'a fait depuis un certain nombre d'années, pousser sous le boisseau ce projet de réforme de la Loi électorale, tout comme les autres projets de réforme de la Loi électorale. Ce faisant, si on acceptait d'envisager des réformes, peut-être pourrions-nous augmenter le taux d'intérêt de la population à l'égard de la chose publique.
[Traduction]
Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Madame la Présidente, c'est la première fois que j'ai l'occasion de vous féliciter pour votre accession à la présidence. Je sais que le Parlement, dominé par des hommes, a mis de nombreuses années avant de demander à une femme d'occuper le fauteuil du Président.
Je remercie tous mes collègues qui ont participé au débat aujourd'hui, notamment pour les points de vue différents qu'ils ont exprimés. Tout comme il a fallu attendre longtemps pour qu'une femme occupe le fauteuil de Président, de nombreuses années se sont écoulées avant qu'on accorde le droit de vote aux femmes et aux autochtones.
Mon collègue bloquiste rappelait que les jeunes hommes et femmes de 17 ans, de jeunes adultes, peuvent aller à la guerre et risquer d'y perdre la vie pour leur pays, mais qu'ils n'ont pas le droit de voter.
De nombreux Canadiens ignorent que c'est précisément ce qu'ont fait des autochtones canadiens pendant de nombreuses années et plusieurs guerres. Ils y ont perdu la vie ou en sont revenus avec des membres en moins. Ils n'avaient pas pour autant droit de vote, ne pouvaient pas entrer dans les mêmes établissements que tout le monde ni jouir des mêmes droits que les anciens combattants.
La société canadienne n'est pas exempte d'injustice. L'histoire le démontre. Nous ne devons cependant pas rester dans le passé, mais aller de l'avant et contribuer une fois encore à l'édification d'une société démocratique et juste.
Les Canadiens ne font plus confiance au système parlementaire. Ils n'ont plus confiance dans le système électoral. Nous avons beaucoup à faire, en tant que parlementaires, pour rétablir la confiance des Canadiens envers le système. Les députés, qu'ils soient dans l'opposition ou dans les rangs ministériels, ne peuvent se permettre de tenir un discours avant les élections et oublier ce qu'ils ont dit une fois de retour à la Chambre des communes. Nous devons préserver le système démocratique et rétablir la confiance des gens envers le système.
Idéalement, le projet de loi devrait être présenté par le gouvernement. Cela nous éviterait d'avoir à traverser tout le processus des projets de loi d'initiative parlementaire, espérer être favorisés par le tirage au sort et espérer, contre toute attente, que le projet de loi soit désigné comme pouvant faire l'objet d'un vote. Nous ne devrions pas avoir à passer par là.
Le projet de loi apporterait de bons changements, des changements progressistes au système électoral et il devrait être présenté par le gouvernement, comme de nombreuses autres mesures législatives que le gouvernement devrait proposer pour améliorer le pays. Comme il refuse de le faire, nous avons décidé de prendre l'initiative.
En tant que députés de l'opposition, nous allons pousser le gouvernement, et je sais que quelques ministériels le feront aussi, pour le faire entrer bien malgré lui dans le prochain siècle. Espérons que cela amènera des changements et contribuera à rétablir la confiance des gens envers notre système démocratique.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): La période réservée aux initiatives parlementaires est écoulée. Comme la motion n'est pas désignée comme pouvant faire l'objet d'un vote, l'article est rayé du Feuilleton.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LE RÈGLEMENT
La Chambre reprend l'étude de la motion et de l'amendement.
M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.): Madame la Présidente, je tiens à vous féliciter de votre nomination. Vous faites de l'excellent travail.
Avant que la Chambre ne passe à l'examen des initiatives parlementaires, j'étais en train de parler de l'institution du Parlement et de la nécessité de respecter les procédures parlementaires relatives au débat, à l'étude des projets de loi et à la prise de décisions.
Les députés ont toujours cherché à améliorer les procédures concernant le débat et à donner une plus grande dignité à l'institution aux yeux des Canadiens. Malheureusement, nous n'avons pas toujours été à la hauteur de ce défi. Depuis quelques années, certains ont cru observer des signes précurseurs inquiétants indiquant que les Canadiens ne tiennent plus toujours l'institution parlementaire en aussi haute estime.
Bien que cela puisse être attribuable à une méfiance généralisée à l'égard des institutions, il demeure que nous portons sans doute une part de responsabilité à cet égard. À titre d'exemple, il arrive à l'occasion que les propos de certains députés raniment la déception et le cynisme des Canadiens. Ces propos sont parfois attribuables à une mauvaise compréhension du fonctionnement du Parlement et de la notion de loyale opposition de Sa Majesté.
Encore à ce jour, j'avoue ne pas avoir compris toutes les procédures prévues dans ce gros bouquin qu'on nous a donné, mais j'espère en arriver à mieux les comprendre et à percer le mystère de certains agissements que je pourrais observer, si j'étais simple spectateur à la télévision.
D'autre fois, certains croient que ce n'est rien de plus qu'une manifestation d'entrain et de plaisanterie bon enfant de la part de certains députés et peut-être le reflet de l'esprit de collégialité dont est imprégnée l'histoire de notre institution et d'autres du même genre. D'autres fois encore, il se produit cependant des incidents moins positifs qui donnent à penser que certaines procédures à la Chambre sont peut-être dysfonctionnelles et ne fonctionnent plus comme on l'avait prévu à l'origine. J'ai noté une sensibilité spéciale à ces incidents chez les nouveaux députés comme moi.
À cet égard, nous n'avons pas besoin de chercher plus loin que l'utilisation, ces dernières années, de l'étape du rapport pour proposer des centaines, voire des milliers de motions dans l'espoir de paralyser les travaux de la Chambre.
Un bref examen de l'histoire récente fournit plusieurs exemples frappants d'usage abusif de cette étape du processus législatif.
Par exemple, en décembre 1999, la Chambre a passé plus de 42 heures consécutives à voter sur 469 motions à l'étape du rapport destinées à retarder l'étude à la Chambre du projet de loi sur l'accord des Nisga'a.
En mars 2000, on s'est livré à un exercice similaire quand la Chambre a passé 36 heures consécutives à voter sur 411 motions concernant le projet de loi sur la clarté.
En septembre 2000, la Chambre faisait face à la perspective d'avoir à voter sur plus de 3 000 motions, qui auraient exigé plus de deux semaines de séance consécutives, concernant le système de justice pénale pour les adolescents. Quelqu'un de l'opposition peut-il expliquer en quoi cela aurait été utile? Après tant d'années d'étude, après tant de recommandations, après avoir entendu tant de témoins experts et après tant de travaux pour en arriver au meilleur compromis et à des améliorations, comment 3 000 motions pour embêter le monde pouvaient-elles être bénéfiques? Cela aurait été clairement un usage abusif de la procédure parlementaire qui aurait porté atteinte au travail de la Chambre.
Pire encore peut-être, cela aurait porté atteinte à la dignité du débat parlementaire aux yeux des Canadiens.
C'est vraiment déplorable, car cela veut dire que nous gaspillons le respect et la légitimité dont les démocraties comme la nôtre ont besoin pour survivre et prospérer.
Il ne faut pas s'étonner de voir des Canadiens se désintéresser de ces obstructions systématiques. Au cours des séances marathons de votes, les Canadiens voient leurs députés se lever et s'asseoir comme des marionnettes, dormir sur leurs bureaux et lire des livres ou des journaux. À la vue d'un tel spectacle, des Canadiens peuvent conclure que le Parlement n'est vraiment pas l'endroit où l'on s'attaque sérieusement aux problèmes du pays et que les députés ne s'intéressent qu'à de ridicules jeux politiques.
Ce n'est clairement pas le cas, mais il faut admettre que ces tactiques, même si elles sont justifiées dans l'esprit de ceux qui les utilisent, nuisent à la dignité du Parlement et au respect des Canadiens envers leurs institutions. De toute évidence, cela ne peut durer.
La motion dont nous sommes saisis vise à redresser la situation et réparer le dommage causé par le mauvais usage fait de la procédure parlementaire dans les délibérations. À cette fin, la motion propose de redonner au Président le pouvoir de choisir les motions pour la tenue d'un débat et de rejeter les motions à caractère répétitif, frivole ou abusif ou de nature à prolonger inutilement les délibérations à l'étape du rapport.
La décision de rejeter les motions à caractère frivole qui sont soumises à l'institution honorée que représente le Président ne devrait pas soulever beaucoup d'opposition. Notre Président jouit du respect de tous les députés, et je crois que les acclamations qui ont suivi son élection en témoignent. De même, le vice-président et les présidents suppléants jouissent d'une excellente réputation à la Chambre.
Pour être en mesure de remplir cette fonction, de nombreux parlementaires ont étudié pendant des années les procédures et le fonctionnement d'autres parlements. On peut généralement se fier à l'expérience de la Chambre des communes britannique. La motion demande donc au Président d'imiter la pratique en vigueur au Parlement du Royaume-Uni et ainsi, elle lui permet de profiter de l'expérience du Parlement ayant la plus longue histoire du monde quant au choix des motions devant faire l'objet d'un débat à l'étape du rapport.
Une fois mis en oeuvre, le changement permettrait aux députés de tous les côtés à la Chambre de poursuivre leur travail, c'est-à-dire débattre et étudier des mesures législatives, ce pourquoi les Canadiens nous ont élus après tout. En outre, il rétablirait les fonctions traditionnelles de la Chambre et renforcerait le rôle des comités dans l'étude d'amendements aux projets de loi.
Comme les députés le savent, bien des amendements qui devraient normalement être présentés à l'étape de l'étude en comité le sont plutôt à l'étape du rapport. Cette pratique affaiblit le système des comités en retirant aux députés de tous les partis la possibilité de s'exprimer en proposant de tels amendements durant leur étude détaillée d'un projet de loi.
Enfin, et c'est peut-être l'aspect le plus important, ce changement éliminerait un mauvais usage des procédures de la Chambre qui a été préjudiciable à la dignité du Parlement et a discrédité l'institution aux yeux de bien des Canadiens. Ce changement faciliterait donc le travail du Parlement et contribuerait à restaurer la confiance des Canadiens dans les débats et la capacité de la Chambre de se pencher sur les questions qui les préoccupent prioritairement. Ce serait excellent pour le Parlement et pour toute la nation.
Il y a bien des questions à régler dans ma circonscription. Je reçois des douzaines d'appels téléphoniques et des courriels. Des groupes veulent me rencontrer. Si j'occupe mon temps à discuter de motions frivoles, cela ne va pas m'aider à accomplir ma tâche et ce sera très frustrant.
À titre de nouveau parlementaire, j'ai déjà constaté que je manquais de temps pour faire tout ce qui m'est permis, ce qu'on attend de moi et ce que je veux accomplir en ma qualité de député. J'ai le grand honneur de jouer ce rôle. Il y a beaucoup de choses que je voudrais faire pour aider mes électeurs et ces groupes à faire valoir leur programme et pour améliorer la législation. Toutefois, les responsabilités et les possibilités sont tout bonnement immenses. Tous les intervenants à la Chambre en conviendront sûrement.
Contrairement à certaines assemblées provinciales ou territoriales, la Chambre siège tous les jours de la semaine, la plupart du temps jusqu'à 18 h 30. Ce soir, nous siégerons jusqu'à 23 heures, peut-être. Nous siégerons jusqu'au 22 juin. C'est beaucoup de temps de séance pour un seul poste de député.
Il y a aussi les séances de comité, où l'on discute en détail de projets de loi, d'études et d'observations. Lorsque beaucoup d'études ont été menées, nous avons de pleins cartons de documents et de témoignages à examiner. Pour faire du bon travail, nous devons examiner le projet de loi à l'étude en détail et nous assurer que c'est un excellent projet de loi. Cela prend beaucoup de temps.
Je trouve très frustrant de devoir, uniquement parce que ces deux rôles coïncident dans le temps, favoriser l'un aux dépens de l'autre, à savoir soit siéger à la Chambre pour essayer de suivre le débat sur tous les projets de loi, soit se concentrer sur les travaux des comités. Sans motion frivole, nous avons déjà bien peu de temps pour assumer nos fonctions.
Le temps consacré à diverses réunions du caucus sur des questions précises est très productif. Par exemple, j'ai participé à de telles réunions sur les enfants, les affaires étrangères et les affaires régionales dans diverses parties du Canada. Il est très productif d'examiner en détail des questions que nous ne pourrions pas autrement examiner. Ces réunions sont pour moi très productives, car je peux faire avancer des dossiers auxquels mes électeurs s'intéressent. D'un autre côté, c'est une autre contrainte de temps.
Nous recevons aussi beaucoup de messages par courrier électronique à nos bureaux de circonscription ou d'Ottawa. Je suis sûr que tous les députés font de leur mieux pour y répondre et pour être attentifs aux besoins de leurs électeurs.
Il ne faut pas oublier non plus les mémoires sur papier. Il arrive, c'est du moins mon cas, que les mémoires s'accompagnent d'une énorme documentation. Je les emporte avec moi à bord de l'avion pour essayer de tout parcourir. Je n'ai pas encore fini. Il y a beaucoup à lire.
Et puis, il y a aussi des groupes qui sont des experts de leur domaine. Nous essayons d'en tenir compte. Ces groupes peuvent nous communiquer beaucoup de documents de recherche. Lorsqu'il s'agit du Yukon, nous avons l'association minière, la Yukon Tourism Association, la British Columbia and Yukon Chamber of Mines, la Klondike Placer Miners Association, la Société pour la protection des parcs et des sites naturels du Canada, la Yukon Grants, la Chambre de commerce du Yukon, la Chambre de commerce de Whitehorse, le centre d'amitié Skookum Jim et le Victoria Faulkner Women's Centre. Toutes sortes de groupes ont un point de vue très particulier qu'ils veulent faire valoir, et cela ajoute à notre charge de travail.
Je ne peux pas croire que je sois le seul à me sentir ainsi. Tous les députés doivent être un peu déprimés devant la besogne à abattre et le peu de temps que nous avons pour le faire.
Les députés comprendront que, comme je suis un nouveau venu, je ne sais pas toujours très bien établir mes priorités. Il m'arrive de rester à mon bureau jusqu'à trois heures du matin. Les députés peuvent avoir l'assurance que je serais très en colère s'il fallait que je reste ici pour voter sur 3 000 amendements frivoles. Les députés de tous les partis ont bien d'autres choses à faire.
J'espère que tel est l'objet de la motion et que tel serait le résultat si elle était adoptée. Je ne peux pas croire que les députés d'en face ne pensent pas la même chose, qu'ils ne voudraient pas avoir plus de temps pour pouvoir faire tout ce que leurs électeurs veulent qu'ils fassent et examiner plus en profondeur les projets de loi. De toute évidence, aucun d'entre nous ne peut examiner à fond tous les projets de loi dont la Chambre est saisie, à cause de toutes ces autres fonctions. Si nous pouvions nous libérer un peu en n'ayant pas à voter sur ces amendements frivoles, je pense que nous serions tous plus heureux.
La motion n'accorde pas plus de pouvoir au gouvernement, quel que soit le parti au pouvoir. Tout ce qu'elle fait, c'est donner plus de pouvoir à la présidence pour supprimer les amendements et motions frivoles. Je pense que personne ne peut être en désaccord là-dessus.
Les députés de l'opposition ont évoqué différentes améliorations à apporter, comme vient de le faire le député qui a pris la parole avant moi. Je ne puis croire qu'ils n'appuieront pas cette motion, car elle est en droite ligne avec ce qu'ils tentent de promouvoir.
Le fonctionnement du Parlement entraîne d'énormes coûts. Évidemment, les 301 députés ne sont pas tout seuls sur la colline, ils sont appuyés par toute une série d'employés de soutien. Y a-t-il quelqu'un qui pense au coût que cela représente pour les contribuables canadiens et au coût que représente le temps qui est détourné des débats sérieux?
M. Gar Knutson: Dix-sept mille dollars l'heure.
M. Larry Bagnell: Quelqu'un a avancé le chiffre de 17 000 $ par heure, mais je crois qu'il y a aussi beaucoup de temps personnel qui pourrait être consacré à quelque chose de plus utile qu'à des amendements frivoles.
Nos vis-à-vis, particulièrement le député d'Elk Island, possèdent des années d'expérience et beaucoup de grandes qualités dont ils peuvent faire profiter le Parlement, les électeurs, les lois, les comités et l'ensemble des Canadiens. Est-ce que les députés croient sincèrement qu'il est profitable de gaspiller ces qualités en siégeant ici pendant qu'on lit 3 000 amendements frivoles et qu'on les met aux voix?
Au début de leurs allocutions, les députés de la loyale opposition ont utilisé l'expression «parlez-vous». Ils ne connaissaient pas le français, mais ils croyaient que cela voulait dire quelque chose comme discussion et que la Chambre était un endroit où doivent avoir lieu des discussions et des débats sérieux. C'est exactement cela que donnerait la motion. Si nous éliminons la possibilité d'avoir à faire lever tout le monde 3 000 fois pour voter sur des amendements frivoles, n'aurons-nous pas plus de temps pour des débats sérieux?
[Français]
Ne devrions-nous pas parler juste des choses qui sont importantes pour nous, députés du Parlement?
[Traduction]
En terminant, j'espère qu'une modification mineure qui éliminera les amendements frivoles nous permettra de passer à certaines des choses très importantes que nous faisons ici. J'éprouve personnellement un très grand respect pour notre institution et je ferai de mon mieux pour utiliser mon temps de façon productive.
M. Ken Epp: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je me demande si nous pourrions obtenir le consentement unanime de la Chambre pour avoir cinq minutes de questions et d'observations avec ce député parce que j'ai vraiment des choses importantes à dire.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Je suis désolée, mais ce n'est pas là un rappel au Règlement. Je crois que le député d'Elk Island a déjà eu la chance de poser des questions et de faire des observations.
[Français]
M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Madame la Présidente, je pense que c'est un euphémisme de dire que cela me fait plaisir de prendre la parole. Cela me fait plaisir, bien sûr, de débattre avec mes collègues, comme c'est toujours un plaisir de le faire chaque jour. Mais débattre d'une motion comme celle-ci, je dois dire que je ne suis pas sûr que cela me fasse grand plaisir.
J'étais surpris tout à l'heure d'entendre mon collègue de Yukon dire que 3 000 amendements, c'est long, que cela n'a pas de bon sens. M'est-il permis de signaler à mon collègue de Yukon, qui vient tout juste d'être élu à la Chambre des communes, que c'est un épisode de l'histoire parlementaire qu'il n'a pas encore vécu. Conséquemment, il n'est peut-être pas le mieux placé ici pour émettre un commentaire de cette nature sur l'incident des 3 000 amendements et sur les incidents—si on peut appeler cela ainsi—relatifs au projet de loi touchant les Nisga'as et celui sur la soi-disant clarté référendaire.
Cela étant dit, on me permettra de faire une espèce de lien avec l'intervention que je viens tout juste de faire à propos d'un éventuel amendement à la Loi électorale, visant à octroyer le droit de vote à nos concitoyennes et concitoyens de 16 ou 17 ans. C'est un curieux hasard que j'aie eu à intervenir, il y a quelques minutes seulement, sur le projet de loi présenté par ma collègue de Churchill et que je doive maintenant prendre la parole sur la motion no 2. J'y vois en quelque sorte un certain lien de parenté. Pour moi, il y a un lien entre les deux et on me permettra d'évoquer en quoi j'y vois effectivement un lien.
Il y a quelques minutes, je faisais état—et j'ai eu l'occasion de le faire un peu plus tôt durant la session dans le cadre de débats touchant la Loi électorale—de ce faible taux de participation aux dernières élections fédérales. Je pense qu'il convient de réitérer et de répéter ce fait parce qu'il est majeur, il est fondamental.
Si le gouvernement veut se complaire en disant: «Nous avons obtenu une plus grande majorité encore que lors des élections de 1997, nous avons donc le mandat de gouverner», qu'il me soit permis de lui signaler qu'il a été élu avec à peu près 40 p. 100 de 60 p. 100 de l'électorat. Ce n'est pas peu dire, ou plutôt, c'est peu dire.
Il y a là un problème fondamental par rapport à notre régime politique. Lorsque les citoyennes et les citoyens se désintéressent de la chose publique, il y a péril en la demeure. La démocratie doit être comme une fleur qu'on doit chérir tous les jours, entretenir, dont on doit prendre grand soin. Manifestement, dans le cas qui nous intéresse, la démocratie est malade, puisque élection après élection l'intérêt de nos concitoyens à l'égard de la chose publique, à l'égard des élections, à l'égard de la gestion des affaires de l'État s'étiole tranquillement, lentement mais sûrement.
Élection après élection, le taux de participation baisse, toujours un peu plus. Il faut qu'on s'administre nous-mêmes un électrochoc, que l'on comprenne que quelque chose de grave se passe. Cela peut s'expliquer de diverses façons.
Peut-être que le manque d'éthique du gouvernement—on en a fait état ces dernières semaines—est l'une des façons d'expliquer cet intérêt toujours décroissant de la population canadienne à l'égard de ce qui se passe ici à Ottawa.
Il y a deux autres facteurs que j'identifie et que j'aimerais présenter de nouveau. Tout d'abord, il y a le refus systématique de ce gouvernement d'envisager quelque réforme en profondeur que ce soit du régime électoral actuel. J'ai fait état tout à l'heure de la nomination des directeurs de scrutin.
On ne se mettra pas la tête dans le sable, chacun et chacune d'entre nous, à la Chambre, ont connu des problèmes organisationnels au cours de la dernière campagne électorale. Peut-être devrions-nous nous poser un certain nombre de questions, notamment sur la compétence ou sur l'incompétence de certains directeurs de scrutin lors des dernières élections fédérales. Manifestement, il s'est produit un certain nombre de problèmes majeurs qu'il nous faut analyser. Peut-être, comme je le disais, la question de la compétence des directeurs de scrutin est-elle en cause dans certains cas.
Le gouvernement refuse d'entrevoir une quelconque modification au régime de financement des partis politiques. Le directeur général des Élections disait: «En démocratie, il est important de savoir où va l'argent et d'où vient l'argent». Il est inquiétant, pour les citoyens, de sentir ou d'avoir l'impression que celles et ceux qui contribuent aux caisses des partis—notamment les grandes corporations qui versent des sommes colossales dans les caisses des partis traditionnels—ont plus d'écho, ont de plus grandes entrées auprès des élus qu'eux-mêmes, celles et ceux qui les choisissent.
On ne peut pas se surprendre de cette espèce de cynisme, de ce manque de confiance dans les institutions que manifeste actuellement la population canadienne à l'égard de ce qui se fait ici à Ottawa.
Il y a un autre facteur qu'il est important de considérer: la réforme parlementaire. Ce gouvernement a été élu, en 1993, en prétendant vouloir changer les choses, vouloir redonner confiance à la population dans les institutions parlementaires. Qu'a-t-il fait depuis? Rien. Absolument rien, sinon que de renforcer le pouvoir déjà concentré entre les mains du premier ministre et du Cabinet. On a renforcé ce pouvoir déjà trop concentré entre les mains de si peu de personnes. C'est quand même étonnant—je le signalais à la Chambre il y a peu de temps—qu'avec à peine 40 p. 100 des voix, un si petit nombre de personnes puisse avoir entre ses mains près de 100 p. 100 des pouvoirs.
Non seulement le gouvernement a failli à sa tâche et à ses engagements concernant la réforme parlementaire, mais qui plus est, il pousse l'odieux jusqu'à présenter une réforme parlementaire en catimini. Le gouvernement cherche à faire en sorte que le peu de pouvoirs dévolus à ce Parlement, aux partis d'opposition et aux simples députés ministériels leur soit enlevé et transféré, là encore, entre les mains de la toute-puissante clique entourant le premier ministre.
Il est quand même étonnant de savoir que les pierres angulaires d'une démocratie, à savoir les systèmes électoral et parlementaire dans un pays, soient unilatéralement modifiés par le gouvernement. Il est inquiétant de savoir cela. Je pense que cela peut effectivement contribuer à ce cynisme, à ce manque de confiance que manifestent les Canadiennes et les Canadiens, les Québécoises et les Québécois tout particulièrement, à l'égard de ce qui se passe ici à Ottawa.
Le gouvernement a procédé, dans le cas de la réforme électorale, la dernière fois, de façon unilatérale. Il n'a pas obtenu l'appui des partis d'opposition. Il a même poussé l'audace jusqu'à faire en sorte qu'en troisième lecture, le projet de loi de réforme de la Loi électorale ne soit débattu qu'entre le leader parlementaire du gouvernement et le porte-parole de l'opposition officielle en la matière.
Il a donc été débattu en troisième lecture par seulement deux des cinq formations politiques présentes dans ce Parlement. Ainsi en va-t-il maintenant de cette tentative de réforme parlementaire, parce que c'est bien ce dont il s'agit.
Le gouvernement tente de nous imposer les défuntes motions M-8 et M-9 qui visaient à priver l'opposition d'un certain nombre de pouvoirs. Il nous revient avec une motion reformulée, la motion M-2, qui vise exactement le même objectif. Mais cette fois, il ne veut pas en porter l'odieux. Il veut faire porter l'odieux à la Présidence de la Chambre, ce qui est d'autant plus inacceptable et d'autant plus scandaleux.
Encore une fois, il procède sans l'accord des partis d'opposition, unilatéralement, toujours en tentant de faire en sorte de concentrer entre les mains de quelques-uns tous les pouvoirs, rendant ce Parlement d'autant plus...
Une voix: Antidémocratique.
M. Stéphane Bergeron: Ce n'est pas tellement le mot «antidémocratique» que je cherche. C'est quand même grave, mais je ne trouve pas la traduction du mot «irrelevant» qui me vient à l'esprit. De plus en plus, on fait perdre de la pertinence à cette institution démocratique en faisant en sorte que l'ensemble des pouvoirs soit concentré entre les mains du gouvernement et qu'on enlève progressivement au Parlement les pouvoirs qui lui étaient auparavant dévolus.
Le gouvernement invoque des motifs pécuniaires pour justifier la présentation de cette motion, en disant: «Écoutez, quand on vote tard le soir, cela coûte terriblement cher aux contribuables.» Le leader parlementaire indiquait que cela coûtait 27 000 $ l'heure en temps supplémentaire pour faire fonctionner cette institution.
Je ne sais pas où le leader parlementaire du gouvernement à la Chambre a pris ces chiffres, mais les hauts fonctionnaires de la Chambre nous disaient aujourd'hui même qu'il était très difficile d'évaluer le coût de fonctionnement de cette Chambre en dehors des heures régulières de session. Alors, il est étonnant que le gouvernement puisse parler de 27 000 $ l'heure.
Une autre chose que le gouvernement dit est la suivante: «C'est effrayant, nos députés sont coincés ici, à la Chambre, à devoir voter pendant de longues heures. Quelle mauvaise utilisation du temps des députés et de l'argent des contribuables que d'obliger les parlementaires à voter si longtemps», dit le gouvernement.
Mais n'est-ce pas là notre travail que de voter? N'est-ce pas la raison pour laquelle chacun et chacune de nous avons été élus, c'est-à-dire pour voter, pour adopter des lois et adopter des amendements à ces lois? Bien sûr que c'est la raison pour laquelle nous avons été élus. Alors, paraît-il que cela coûterait très cher l'heure.
Encore une fois, ce gouvernement, qui veut toujours valider son postulat selon lequel il coûte très cher de faire siéger la Chambre en dehors des heures régulières lorsqu'il y a une flopée d'amendements, a demandé, par l'entremise du président du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre et d'autres députés ministériels membres de ce comité, aux autorités de la Chambre de quantifier, de nous dire combien un député pouvait coûter l'heure. Quelle pouvait être la rémunération horaire d'un député ou d'une députée ici, à la Chambre des communes?
Alors, en triturant les chiffres et en faisant preuve de beaucoup d'imagination, on nous a dit qu'un député coûtait autour d'une trentaine de dollars l'heure.
L'effet pernicieux de ce genre de manipulation de chiffres, c'est qu'il pourrait y avoir des gens à la maison qui trouvent que c'est très utile de faire siéger les députés plus longtemps parce que, à ce moment-là, ils seraient payés moins cher l'heure. On en viendrait à les payer 25 $ ou 26 $ l'heure. D'aucuns trouveraient cela absolument fantastique de savoir que leurs députés gagnent moins cher l'heure s'ils siègent plus souvent.
Je pense que cette logique, ce rationnel, cet argument selon lequel on doive quantifier ce que coûte un député et ce que coûte le Parlement lorsqu'on le fait siéger en dehors des heures régulières est un débat tout à fait byzantin. C'est un débat tout à fait—je reprends mon terme—«irrelevant», qui n'a pas sa place actuellement parce qu'il est très dommageable.
Je reviens à ce que je disais tout à l'heure: la démocratie est une fleur qu'il faut chérir. Il est inquiétant d'entendre un gouvernement dire: «Canadiens et Canadiennes, la démocratie coûte cher.» Mais la démocratie n'a pas de prix.
Actuellement, le gouvernement tente de faire avaler la couleuvre budgétaire à nos concitoyennes et concitoyens en leur disant: «Il faut que nous adoptions cette motion, parce qu'actuellement, les députés de l'opposition sont tellement inconscients qu'ils vous coûtent cher, parce qu'il font siéger la Chambre en dehors des heures régulières.» Il n'y a pas de logique, pas de rationnel qui puisse tenir derrière un tel argument. Je reprends les termes de la motion:
Il est entendu que l'Orateur ne choisit pas, pour la tenue d'un débat, une motion ou une série de motions à caractère répétitif, frivole ou abusif ou de nature à prolonger inutilement les délibérations à l'étape du rapport.
J'aimerais dire deux choses par rapport à cela. Il est fondamentalement disgracieux et inacceptable que l'on puisse prétendre que ce que les députés proposent pour améliorer les projets de loi ou même pour enrichir le débat parlementaire, puisse être considéré comme étant répétitif, frivole ou abusif ou de nature à prolonger inutilement les délibérations de la Chambre à l'étape du rapport.
Le gouvernement n'a que lui-même à blâmer. Cette pratique de la part des partis d'opposition qui s'est développée depuis un certain nombre d'années à l'effet de proposer une série d'amendements à l'étape du rapport, cette pratique, dis-je, il en est le principal responsable.
Et il voudrait, aujourd'hui, faire pleurer la population canadienne sur l'utilisation abusive que font les partis d'opposition des règles de la Chambre? Mais il en responsable! Pourquoi? Tout simplement parce que ce gouvernement gouverne par bâillon et il pousse l'odieux, comme je le disais tout à l'heure, jusqu'à imposer une réforme du Règlement de la Chambre, une modification au Règlement de la Chambre. Il se croit même investi du pouvoir d'imposer cette modification au Règlement de la Chambre par un bâillon. Le Bonhomme Sept Heures est revenu, hier, M. Bâillon est revenu, hier, en nous imposant un nouveau bâillon pour changer la façon dont se font les choses ici à la Chambre.
Si nous comparons les chiffres, à savoir les bâillons imposés sous le précédent gouvernement conservateur, qui a gouverné pendant neuf ans, et les chiffres de l'actuel gouvernement libéral qui, jusqu'à présent, aura gouverné pendant sept ans, nous constatons que le gouvernement a fait croître de façon considérable le nombre de bâillons imposés sur les législations. Donc, le nombre de bâillons imposés sur les législations s'est considérablement accru depuis que les libéraux sont au pouvoir.
Entre 1984 et 1993, sous le régime conservateur, le gouvernement a imposé 49 bâillons pour 519 projets de loi présentés à la Chambre, soit une proportion de 9,4 p. 100. En sept ans de pouvoir, le gouvernement libéral a imposé plus de 60 bâillons pour seulement 350 projets de loi présentés à la Chambre, c'est-à-dire une proportion de 17,4 p. 100, c'est-à-dire près du double.
Et c'est ce gouvernement qui dénonçait avec véhémence, particulièrement les membres du «Rat Pack» dont faisait partie l'actuel leader du gouvernement à la Chambre, l'attitude dominatrice, dictatoriale du gouvernement conservateur. Ils viennent aujourd'hui nous faire la leçon en disant: «L'opposition n'est pas responsable.» Cet argument ne tient pas.
Si l'opposition est contrainte d'utiliser de telles pratiques, c'est parce que c'est la seule façon, le seul moyen qui lui reste, dans ce Parlement, de faire respecter ses droits, d'entamer un débat, de faire en sorte que nous puissions nous opposer à une législation quelconque. C'est la seule façon de faire entendre la voix de ces citoyennes et citoyens que nous représentons et qui ne partagent pas nécessairement le point de vue du gouvernement. C'est la seule façon que nous permet le Règlement de la Chambre, parce que ce gouvernement, étape après étape, coupe court au débat, interrompt les délibérations et impose le bâillon à la Chambre. On s'étonne, par la suite, que l'opposition soit obligée de faire appel à ces façons de procéder.
Je termine en disant que le gouvernement, par le biais de cette motion, veut forcer la main à la Présidence.
Le quotidien Le Devoir d'aujourd'hui cite le leader du gouvernement à la Chambre: «M. Boudria a clairement indiqué qu'il ne serait pas possible pour le Président de faire fi de la motion.» On veut forcer la main du Président.
Mais je rappelle un article du volume de Montpetit-Marleau, aux pages 260 et 261, où on dit que «la Présidence a l'obligation de protéger les parlementaires de l'opposition contre la tyrannie de la majorité.» Je ne peux malheureusement lire la citation, mais c'est ce qu'on dit dans le livre de Montpetit-Marleau.
Même si cette motion devait être adoptée par la majorité gouvernementale, la Présidence doit retenir, parce que c'est à la Présidence qu'on veut forcer la main, qu'elle a toujours la responsabilité, quoi qu'il advienne, de défendre les droits des simples députés et ceux des députés de l'opposition.
[Traduction]
M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Alliance canadienne): Madame la Présidente, je prends la parole au nom des habitants de Surrey-Centre pour prendre part au débat sur les modifications que le gouvernement propose d'apporter au Règlement de la Chambre.
La motion du gouvernement dit ceci:
Que les paragraphes (5) des articles 76 et 76.1 du Règlement soient modifiés par adjonction, à la fin des nota qui les suivent, de ce qui suit:
Il est entendu que l'Orateur ne choisit pas, pour la tenue d'un débat, une motion ou une série de motions à caractère répétitif, frivole ou abusif ou de nature à prolonger inutilement les délibérations à l'étape du rapport. Dans l'exercice de son pouvoir de choisir les motions, l'Orateur s'inspire de la pratique de la Chambre des communes du Royaume-Uni.
L'opposition officielle propose qu'on modifie la motion du gouvernement en ajoutant:
Qu'il soit en outre entendu que l'Orateur peut choisir, pour la tenue d'un débat, toutes les motions, peu importe leur caractère, s'il juge que la majorité a empiété de quelque façon que ce soit sur les droits de la minorité.
Il est malheureux que, au moment où des députés de tous les côtés de la Chambre conviennent que le pouvoir est trop centré entre les mains du cabinet du premier ministre et que le premier ministre exerce un trop grand pouvoir, le gouvernement propose une modification au Règlement qui renforce le pouvoir que détient l'organe exécutif et diminue le rôle que jouent les députés dûment élus à la Chambre des communes.
La motion brime les droits des représentants que les Canadiens élisent à la Chambre des communes. Le gouvernement ne veut choisir parmi les pratiques appliquées au Royaume-Uni que celles qui lui permettront d'accroître son pouvoir sur la Chambre des communes. Il pourrait toutefois adopter d'autres pratiques du Royaume-Uni qui contribueraient à renforcer notre démocratie. Permettez-moi d'en décrire quelques-unes; je vais parler des comités plus tard.
Je veux parler de ce qui se passe à la Chambre des communes. Lorsque le gouvernement croit qu'un obstacle formidable se dresse devant lui ou que l'opposition réussit à le mettre dans l'embarras, il met fin au débat à la Chambre et fait adopter la mesure à l'étude.
Le gouvernement songe-t-il à apporter des changements? Non. Écoute-t-il ce que les Canadiens ont à leur dire? Non. Cela m'amène à parler de l'essence même de certaines procédures de la Chambre qui n'ont parfois quasiment aucun sens.
Pourquoi le gouvernement ne prévoit-il pas la tenue de votes immédiatement après la période des questions? Tous les députés se présentent à la Chambre des communes pour la période des questions. Ne serait-il pas logique de tenir les votes lorsque tout le monde est présent?
Le gouvernement refuse d'étudier les bonnes suggestions et idées que lui proposent des députés de tous les côtés de la Chambre, y compris ses propres députés de l'arrière-ban. Le gouvernement est reconnu pour son programme législatif plutôt mince. Lorsque les partis d'opposition tentent d'y apporter un peu de substance, le gouvernement refuse net.
Le pays n'a pas eu de référendum depuis celui sur l'Accord de Charlottetown, sauf, bien sûr, pour celui sur le démantèlement du pays. Les libéraux ne permettent pas que les Canadiens se prononcent directement sur les questions importantes. Les libéraux veulent tout contrôler.
Une autre question, celle des pétitions. Le gouvernement ne veut pas laisser aux Canadiens la liberté de dire ce qu'ils pensent. Les pétitions en sont un bon exemple. Les Canadiens consacrent pas mal de temps et d'efforts à préparer des pétitions pour qu'elles soient présentées à la Chambre. Ils dépensent de l'argent pour l'essence, ils vont frapper aux portes pour recueillir des signatures, même en hiver quand il fait froid ou en été quand il fait chaud. Les députés sont fiers de présenter les pétitions de leurs électeurs, qui sont le fruit de leur travail et les libéraux les mettent sur une étagère où elles ramassent la poussière. Parfois, ils y répondent de façon symbolique après des mois, en utilisant toutes les expressions politiquement correctes. Le gouvernement ne donne aucune suite à ces pétitions.
En ce qui concerne les votes, le whip du Parti libéral dit aux députés libéraux comment voter, à défaut de quoi, gare. Où est la démocratie dans tout cela? Tous les votes ne doivent pas nécessairement être des votes de confiance. Il arrive même que les députés de l'opposition assurent qu'un vote donné ne sera pas considéré comme tel. Un exemple, le vote sur l'hépatite C.
Le gouvernement doit se tenir à l'écoute des gens en ce nouveau millénaire. On ne s'attend pas à ce qu'il tombe chaque fois que les 301 députés lui disent ce qu'il doit faire. Si le vote va à l'encontre du gouvernement, les députés devraient s'efforcer avec le gouvernement, soit d'arriver à un compromis, soit d'amener le gouvernement à revoir sa position, soit encore de faire bien d'autres choses qui permettraient de voir à ce que la volonté du peuple soit respectée.
La façon dont travaillent les comités est un autre aspect important de cette question. Le gouvernement pourrait permettre à des députés de l'opposition de présider un plus grand nombre de comités permanents, comme c'est le cas ailleurs, notamment au Royaume-Uni. Pour ce qui concerne l'élection des présidents de comités, le scrutin secret n'est toujours pas autorisé, bien que l'opposition ait insisté.
Le vote aux comités est un exercice purement partisan, dont les ministériels profitent pour se liguer contre les députés de l'opposition. Même les travaux futurs des comités sont choisis sur des bases partisanes, les ministériels prenant leurs ordres auprès des gros bonnets. Même la décision de savoir quels témoins seront autorisés à comparaître devant les comités est arrêtée sur des bases partisanes.
Le gouvernement empêche les comités de se prononcer sur des questions importantes. Au moyen des votes dans les comités où les libéraux sont majoritaires, le gouvernement veille à faire avancer son propre programme. Les questions dont il ne veut pas traiter ne seront jamais abordées dans les comités.
Ce n'est pas un secret que le gouvernement refuse d'adopter la plupart des amendements que les députés de l'opposition, quel qu'en soit le parti, proposent d'apporter aux projets de loi. Souvent, les ministériels donnent des conférences de presse sans avoir préalablement communiqué aux députés de l'opposition les rapports dont ils traitent, pour ne pas leur donner le temps de préparer une riposte ou pour ne pas reconnaître leur contribution la plupart du temps.
Le gouvernement cherche aussi à empêcher la télédiffusion des audiences des comités. Il sait que la façon dont les comités sont dirigés est une farce et il ne veut pas que les Canadiens assistent au cirque que sont malheureusement devenus les comités sous la dictature de ce gouvernement.
En ce qui concerne les nominations, le pouvoir de nommer les sénateurs, le vérificateur général, le conseiller en éthique, le commissaire à la vie privée, le commissaire à l'information et d'autres personnes clés ne devrait pas être conféré exclusivement au Cabinet du premier ministre. Des personnes nommées aux postes de vérificateur général, de conseiller en éthique ou de commissaire à l'information par exemple pourraient, après leur travail intensif, faire d'excellentes recommandations aux ministères fédéraux, mais elles ne sont pas autorisées à le faire. Elles ne font rapport que des conclusions de leurs enquêtes et le gouvernement peut ensuite jeter leurs rapports.
Pourtant, certains de ces rapports devraient avoir une force exécutoire et devraient fournir une certaine orientation au gouvernement. Ils ne devraient donc pas être écartés, enterrés, oubliés dans les tiroirs ou ridiculisés. Non seulement le gouvernement dissimule ce genre de choses, mais il ridiculise la personne qui ose le critiquer et tente de démolir son intégrité.
En ce qui concerne les voyages de parlementaires, bon nombre de députés de tous les partis font à l'occasion des voyages à l'étranger. Toutes les fois qu'une délégation du Parlement du Canada voyage à l'étranger, ce devrait être un effort d'équipe. Or, les députés de l'opposition sont souvent tenus à l'écart des séances d'information, ainsi que de certains des événements et des réunions ayant lieu à l'étranger. Souvent aussi, les fonctionnaires du gouvernement interdisent aux députés de l'opposition de parler aux médias de ce qu'ils ont vu ou d'autres questions se rapportant au voyage. Ils les empêchent d'exprimer le point de vue de l'opposition. Les procédés employés par le gouvernement sont de nature partisane. Les libéraux s'accrochent à une mentalité d'exclusion contraire à une représentation pleine et entière du peuple canadien à l'étranger.
En ce qui concerne les traitements spéciaux, notamment les subventions, les emplois, les faveurs et les nominations, les décisions prises par le gouvernement visent à profiter au parti au pouvoir, en l'occurrence les libéraux. Parfois, des permis ministériels ou des visas de visiteur sont délivrés à des visiteurs au Canada à la demande de députés du gouvernement bien que des permis ou des visas aient été refusés à ces mêmes visiteurs quand ils en ont fait la demande par l'entremise de députés de l'opposition.
Les Canadiens ne sont pas traités équitablement à bien des égards. Le gouvernement fait preuve de favoritisme en fonction du soutien politique et peut-être parfois de dons monétaires. Ce sont là des problèmes de procédure. Le processus devrait être bien établi de sorte que ces genres de choses ne soient pas autorisées.
À la Chambre, le greffier occupe un poste de responsabilité et respectable. Il est nommé par le premier ministre et il conseille le Président. Avec tout le respect que je dois au greffier, le Président est élu par scrutin secret, et le premier ministre continue d'essayer d'avoir le dernier mot par l'intermédiaire du bureau du greffier. Cela va à l'encontre de l'objectif de l'élection du Président de la Chambre. Les Canadiens ne croient pas qu'il est juste que le premier ministre attribue un poste au greffier et qu'il s'attende ensuite à ce que le greffier soit neutre et impartial. Je dis cela avec le plus grand respect pour le greffier de la Chambre, qui est une personne extraordinaire, mais je maintiens que c'est injuste. C'est même injuste envers le greffier.
Il faudrait aussi envisager d'apporter des changements à la période des questions. La plupart du temps les ministres ne donnent pas de vraies réponses à des questions impartiales importantes.
Une voix: C'est pourquoi on appelle ça la période des questions.
M. Gurmant Grewal: On nous dit que c'est pourquoi on appelle ça la période des questions. Ce n'est pas comme ça qu'elle devrait se dérouler. Les ministres rejettent souvent les faits présentés par des députés de l'opposition. Ils ridiculisent souvent les députés de l'opposition qui posent des questions sincères. Les médias disent que la période de questions manque de sérieux, que c'est un véritable cirque, et cela n'a rien de surprenant.
En ce qui concerne les débats à la Chambre, les débats informatifs n'ont également rien de sérieux. La procédure que le gouvernement suit, c'est que le Cabinet ou le Cabinet du premier ministre prend la décision et ensuite, une fois que la décision est prise, on permet un débat à la Chambre. Les ministériels ne tiennent pas compte de ce qu'on y dit. Les interventions ne modifient en rien les décisions déjà prises. Les ministres n'adoptent aucune recommandation faite par les députés de tout parti politique au cours de ce débat.
La plupart des ministériels lisent des discours préparés par des bureaucrates. Cependant, moins de 10 p. 100 des députés sont présents à la Chambre durant les débats. J'ai déjà prononcé un discours à la Chambre alors que les seules personnes présentes étaient votre serviteur et le Président. Souvent, comme on le voit aujourd'hui, il y a plus de pages à la Chambre que de députés.
La procédure empêche quiconque du côté ministériel d'assister aux travaux de la Chambre avec l'esprit ouvert. Une bonne partie des projets de loi dont nous discutons ici ne font que deux ou trois pages. Pourtant, des centaines de pages de règlements sont parfois rattachées à ces projets de loi et on n'en discute pas à la Chambre.
Le gouvernement s'en tient à une procédure qui lui permet de diriger le pays par voie de règlements plutôt que par voie législative. Il gouverne de façon détournée, selon moi.
J'ai été le coprésident du Comité mixte permanent du Sénat et de la Chambre des communes d'examen de la réglementation. Ce comité veut faire modifier ou supprimer 800 règlements environ, mais le Cabinet refuse de prendre des mesures en ce sens dans le cas de ces 800 dossiers. Il fait traîner les choses et donne des réponses très évasives au comité. Certains de ces 800 dossiers remontent à jusqu'à 25 ans. Qu'on y songe. Ces règlements ne sont pas censés être encore en vigueur. Cela fait 25 ans qu'ils le demeurent. C'est une honte. C'est tout à fait antidémocratique.
La motion présentée dont nous discutons aujourd'hui est une insulte et une attaque contre les droits des députés et la démocratie. Il s'agit d'une mesure vindicative en réponse au débat sur l'entente cadre avec les Nisga'a au cours de la dernière législature, lorsque l'opposition officielle s'est servie d'un outil de procédure pour déclencher un vote marathon afin d'alerter les Canadiens sur la façon antidémocratique dont le gouvernement dirige la Chambre.
On me dit qu'à l'occasion du débat sur les Nisgas, le député d'Elk Island, qui est un député très dévoué, plus dévoué que bon nombre d'autres députés, et qui est toujours à la Chambre en train d'écouter les débats et d'y participer activement, a demandé ce qu'il en coûtait de plus pour ce débat, mais la réponse fut que ces données n'étaient pas disponibles. Peut-être ne l'étaient-elles pas parce que bon nombre de membres du personnel échangeaient leurs heures de travail. Il se peut que la motion de clôture dont nous discutons aujourd'hui nous oblige à rester ici jusqu'à 23 heures ou même plus tard.
Je crois fermement que les libéraux veulent éviter que nous recourrions de nouveau un jour à ce moyen, au moyen que nous avons cherché à utiliser pour exercer nos droits démocratiques. Pourquoi le gouvernement ne se comporte-t-il pas tout simplement d'une façon qui enlèverait à jamais à l'opposition toute velléité d'utiliser de nouveau la procédure utilisée dans le cas de l'Accord Nisga'a?
Faites preuve d'un esprit démocratique et les partis d'opposition ne recourront plus à cette procédure.
Les initiatives parlementaires constituent un autre enjeu important. Là encore, c'est une farce. Dans l'idéal, ou en théorie du moins, les initiatives parlementaires devraient donner aux représentants élus des Canadiens l'occasion de contribuer à l'établissement des lois au Canada. Ce devrait être une occasion de faire valoir le point de vue de leurs électeurs au Parlement.
Un projet de loi d'initiative parlementaire ou une motion portant dépôt de documents n'apporte pas une grande contribution au processus législatif, à moins qu'il puisse être mis aux voix. Un nombre limité de projets de loi d'initiative parlementaire et de motions est mis aux voix par le gouvernement. Mettre un projet de loi d'initiative parlementaire aux voix est un exercice partisan. Il n'est pas censé en être ainsi, bien qu'il y ait des députés de tous les partis au sein du comité. Mon expérience pratique m'a convaincu que c'est un exercice partisan.
C'est censé être un débat non politique. Très peu de députés se présentent à la Chambre avec un esprit ouvert. Les initiatives ministérielles jouent un peu le rôle d'une sucette. Une sucette est ce que l'on donne à téter à un bébé, mais il n'y a pas de lait qui en sort. On la donne à un bébé sans lui dire de se taire. C'est un peu comme de dire si diplomatiquement à quelqu'un d'aller au diable qu'il a hâte de partir. C'est un peu la même chose en ce qui concerne les initiatives parlementaires. Nous pouvons préparer des projets de loi et des motions, mais cela ne change pas grand-chose.
Quel est le dernier projet de loi d'initiative parlementaire à avoir été adopté au Canada? Combien de ces projets de loi ont été adoptés au cours des 20 dernières années? Il y en a eu très peu, je dirais même moins d'une demi-douzaine. Pourquoi nous donnons-nous même la peine de discuter des initiatives parlementaires? Le gouvernement ne nous suit pas et il ne suit pas non plus les Canadiens.
Enfin, les procédures auxquelles le gouvernement s'accroche empêchent la Chambre de se pencher sérieusement sur les dépenses du gouvernement. Les budgets provisoires et les prévisions budgétaires supplémentaires sont à peine examinés. L'examen minutieux des sommes dépensées par le gouvernement n'est-il notre vraie raison d'être ici à la Chambre? Même cela ne peut pas faire l'objet d'un débat.
Je pourrais en dire long sur le fait qu'il n'y a rien à la Chambre qui permette d'unir les gouvernements provinciaux et fédéraux. Il n'y a que très peu de collaboration entre ces deux niveaux de gouvernement et aucun changement n'est prévu à ce sujet.
Le gouvernement n'aime pas le changement, qu'il s'agisse de réforme électorale, de réforme du Sénat, de réforme parlementaire, de réforme démocratique ou autre. Il n'est pas étonnant de constater que la participation aux élections fédérales est de plus en plus faible et qu'elle a atteint un plancher sans précédent au cours des dernières élections.
La crédibilité des politiciens est loin derrière celles d'autres professions au pays. Il est plus que temps d'entreprendre une réforme quand les députés de tous les partis se plaignent du fait que le Cabinet du Premier ministre a trop de pouvoirs. Le gouvernement propose un amendement au Règlement dont nous discutons aujourd'hui et qui donne encore plus de pouvoirs à l'exécutif et affaiblit la démocratie en amoindrissant et en banalisant le rôle des députés élus.
M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Monsieur le Président, je suis très honoré d'intervenir ce soir dans le débat sur la motion dont nous sommes saisis. Afin d'informer la population, je rappelle que la motion est la suivante:
Que les paragraphes (5) des articles 76 et 76.1 du Règlement soient modifiés par adjonction, à la fin des nota qui les suivent, de ce qui suit: Il est entendu que l'Orateur ne choisit pas, pour la tenue d'un débat, une motion ou une série de motions à caractère répétitif, frivole ou abusif ou de nature à prolonger inutilement les délibérations à l'étape du rapport. Dans l'exercice de son pouvoir de choisir les motions, l'Orateur s'inspire de la pratique de la Chambre des communes du Royaume-Uni.
D'abord et avant tout, je trouve absolument scandaleux les propos du député de Surrey-Centre. Je m'explique. Il fait valoir toutes sortes de griefs, réels ou perçus, et tente de s'en servir pour illustrer comment nous allons améliorer le fonctionnement du Parlement.
Je suis à la Chambre depuis quelques années déjà et je sais que cette institution nous vient des Pères de la Confédération qui, en 1867, ont élaboré de concert une structure, un modèle qui fonctionne bien et qui est conforme à la démocratie du Parlement britannique. C'est un modèle qui a évolué avec le temps et qui a fait ses preuves. Il fonctionne bien, d'une façon démocratique et pour le grand bien, par conséquent, de tous les Canadiens.
Je trouve à la fois insultants et pathétiques les propos des députés d'en face, en particulier celui qui avait la parole avant moi et les autres aussi, qui ont laissé entendre qu'au Canada la démocratie reposait sur des piliers branlants et que l'honneur du Parlement était atteint. Je vais expliquer pourquoi.
Nous sommes en présence d'une oeuvre ciselée par le temps. Nous avons semé les graines de la démocratie, et l'arbre porte ses fruits aujourd'hui. Je pense que la démocratie doit inspirer de la fierté à tous les parlementaires et qu'elle doit être soutenue.
Cela me fait mal d'entendre des députés, surtout les députés de l'Alliance réformiste, démolir cette institution. Ils ont l'art d'être négatifs. Tenter de déchirer le tissu national, ils font bien cela. Ils offrent un spectacle navrant, mais à quoi peut-on s'attendre d'eux sinon qu'ils soient fidèles à eux-mêmes, des gens qui préfèrent détruire plutôt que bâtir, des gens qui préfèrent saboter la machine plutôt que la huiler.
L'objet de cette motion est simple. Il s'agit de confirmer l'autorité du président. Votre autorité, madame la Présidente, et l'autorité de vos collègues. Nous reconnaissons votre compétence en ce qui a trait au choix des motions à débattre à l'étape du rapport, comme le veut le processus législatif suivi à la Chambre.
Nous pouvons remonter dans le temps, jusqu'en 1867. Plus important encore, à mon avis, la procédure parlementaire et les pouvoirs que nous pouvons exercer dans cette Chambre ont été définis il y a 32 ans dans le cadre des travaux d'un comité qui s'est penché sur la question.
Pour l'information du public, je me permets de rappeler qu'en 1968, craignant que les députés ne profitent de l'étape du rapport pour proposer de pareils amendements de peu d'importance ou à caractère dilatoire, le comité spécial de la procédure a recommandé dans son rapport l'adoption d'une règle permettant au Président de «choisir et combiner les modifications dont avis lui avait été donné». Cette règle a été adoptée.
Pourquoi l'a-t-on adoptée? Pour veiller à ce que les travaux de la Chambre s'effectuent d'une façon digne d'une assemblée élue démocratiquement, dans l'intérêt de tous les Canadiens. Nous avons des comités où nous entendons des témoins. Nous acceptons des amendements. Nous peaufinons le projet de loi dont nous sommes saisis. En mettant à profit l'expérience de tous les députés présents, nous finissons par en arriver à un projet de loi qui est applicable et dans l'intérêt de tous les Canadiens.
Quand le projet de loi revient à la Chambre à l'étape du rapport, nous ne devrions pas avoir à nous faire embobiner—un vieux terme que j'utilise de temps en temps—par des gens comme les députés de l'alliance réformiste ou du Bloc. Ils ne devraient pas nous lier les mains en recourant à toutes sortes de manoeuvres scandaleuses, en proposant par exemple des motions d'amendement frivoles, abusives ou carrément exagérées pour lier les mains des parlementaires et paralyser les travaux de la Chambre des communes.
Le Président peut choisir ou grouper les motions d'amendement qui seront proposées à l'étape du rapport. C'est à cela que nous essayons de revenir. C'est exactement ce qui avait été adopté il y a trente-deux ans et c'est ainsi que les choses devraient se dérouler. Nous voudrions que la décision du Président quant au regroupement des motions d'amendement à l'étape du rapport soit conforme aux valeurs du Parlement.
En agissant ainsi, le Président réglerait deux questions. Premièrement, il regrouperait les motions en vue du débat et deuxièmement, il déterminerait l'ordre pour le vote. Ce sont là deux choses très importantes. Les motions sont regroupées en fonction de deux facteurs, soit leur contenu et l'endroit où elles seront insérées dans le projet de loi.
Elles sont regroupées en fonction du contenu si elles peuvent faire l'objet d'un seul débat, si, une fois adoptées, elles auront le même effet à différents endroits dans le projet de loi, ou encore, si elles portent sur la même disposition ou des dispositions semblables dans le même projet de loi.
C'est simple, c'est logique et ça permettrait au Parlement de fonctionner efficacement, comme il est censé le faire. Les motions d'amendement sont placées en série, selon l'endroit où elles seront insérées dans le projet de loi, lorsqu'elles se rapportent à la même ligne ou aux mêmes lignes. Des modalités de vote seraient définies pour que la Chambre se prononce sur ces motions d'amendement.
Il me semble que les Présidents ont toujours eu le droit d'agir ainsi. C'est certainement une procédure qui a été élaborée au cours des années 70 et a évolué par la suite. Il m'apparaît important de réaffirmer le pouvoir du Président de rendre des décisions de ce genre.
Ces dernières années, les Présidents qui se sont succédé ont été de moins en moins enclins à l'exercer, si bien que l'étape du rapport est devenue vulnérable à des utilisations douteuses et non voulues.
Ainsi, en décembre 1999, la Chambre a dû voter pendant plus de 42 heures consécutives sur 469 motions à l'étape du rapport, dont la plupart avaient été concoctées à la dernière minute ou en consultation avec les gens de l'alliance réformiste, en guise de stratagème pour prendre la Chambre en otage, de façon non seulement non professionnelle et non démocratique, mais carrément stupide. En fin de compte, nous avons gaspillé énormément de temps. Les députés de l'Alliance ont vraiment procédé de façon non démocratique.
En mars 2000, le Bloc s'est livré au même exercice. Sans doute inspiré par les excentricités et les manigances de l'Alliance, le Bloc a décidé de passer lui aussi aux actes. C'était au sujet d'un autre projet de loi et la situation est devenue ingérable. Je crois que le mot ingérable est le seul qui convienne.
En septembre 2000, la Chambre a été saisie de 3 000 motions, des motions futiles, contrariantes, sans grande utilité, des motions qui étaient tout simplement stupides et carrément ridicules. Le Bloc voulait imiter l'alliance réformiste. Je remercie l'opposition de ne pas avoir fait son travail. Il lui incombe de s'opposer, de façon constructive et dans le respect des principes démocratiques. Ce n'est pas ce qu'a fait l'opposition en ayant recours à ces manigances. Elle s'est livrée à des stratagèmes idiots qui l'ont fait paraître idiote. Si c'est ce qu'elle voulait, elle a réussi.
Durant la dernière législature, nous avons dû voter pendant plusieurs jours sur des motions présentées à l'étape du rapport, parce que l'opposition avait abusé de l'échappatoire du Règlement à l'étape du rapport. Nous cherchons précisément à supprimer cette échappatoire ce soir, afin d'éviter que ne se reproduise le genre d'abus dont nous avons été témoins en 1999.
[Français]
M. Yvon Godin: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je ne pense pas qu'il y ait quorum à la Chambre.
Et les députés ayant été comptés:
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Convoquez les députés.
[Traduction]
Et la sonnerie s'étant arrêtée:
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Il y a quorum et le débat se poursuit.
M. Lynn Myers: Madame la Présidente, comme je le disais, c'est précisément le genre d'échappatoire que nous voulons fermer pour assurer le déroulement efficace des travaux du Parlement.
Le coût des abus dont nous avons été témoins avec les réformistes-alliancistes au sujet de l'accord nisga'a et avec les bloquistes à l'égard du projet de loi sur la justice pour les adolescents est tout à fait inacceptable, non seulement pour la Chambre des communes, mais aussi pour tous les Canadiens.
Les Canadiens qui nous ont élus pour débattre et étudier des mesures législatives n'apprécient pas que nous gaspillions autant de temps, comme celui que les réformistes-alliancistes et les bloquistes nous ont fait perdre. Les Canadiens ne veulent tout simplement pas voir les gens qui devraient débattre des projets de loi et voter selon les désirs et les besoins de leurs électeurs se faire ligoter par ceux qui préfèrent abuser du système. Il s'agit là d'un abus pour les contribuables, qui n'aiment pas voir dépenser des centaines de milliers de dollars, comme cela a été le cas avec les réformistes-alliancistes lors de l'étude de l'accord nisga'a et avec les bloquistes pendant l'étude du projet de loi sur le système de justice pour les adolescents. Les Canadiens n'aiment pas voir le gaspillage de cet argent des contribuables.
Les réformistes-alliancistes montent toujours sur leurs grands chevaux lorsqu'il s'agit de s'assurer que...
M. Ken Epp: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Le Président a décidé qu'il faut désigner notre parti sous le nom d'Alliance canadienne à la Chambre des communes. Par respect pour la présidence, le député devrait respecter cette décision.
M. Lynn Myers: Les contribuables n'apprécient pas ce gaspillage frivole de leur argent. Est-il préférable de verser 800 000 $ à un bureau d'avocats qui se serait contenté de 60 000 $?
M. Ken Epp: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Il semble qu'il n'y ait pas quorum à la Chambre.
Et les députés ayant été comptés:
Le président suppléant (Mme Bakopanos): La présidence constate que le quorum est atteint. Nous poursuivons le débat.
M. Lynn Myers: Madame la Présidente, ce n'est pas juste pour le personnel de la Chambre des communes qui accomplit beaucoup de travail pour nous parlementaires. Il n'est pas juste que les réformistes-alliancistes et les bloquistes, par exemple...
M. Ken Epp: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. La décision de la présidence a été que notre parti doit être appelé Alliance canadienne. Le député continue de manquer de respect envers la présidence en la défiant ainsi. Madame la Présidente, vous devriez les obliger à appeler notre parti par son nom.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): La période consacrée au débat est écoulée. Le député de Waterloo—Wellington est prié de conclure.
M. Lynn Myers: Madame la Présidente, ce n'est pas juste pour notre grande institution. C'est une institution qui a évolué, comme je l'ai dit au début de mon discours, selon les grands principes du modèle britannique. Je pense que nous avons conçu un genre de démocratie qui fait l'envie du monde.
Il est injuste de recourir à ces tactiques abusives. J'estime qu'il vaut mieux éliminer cette échappatoire et vous permettre, à vous, madame la Présidente, et à vos collègues de prendre la décision qui convient sur les amendements présentés à l'étape du rapport qui devraient nous être renvoyés.
[Français]
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Madame la Présidente, avant de commencer mon discours, je veux vous indiquer que je vais partager le temps qui m'est alloué avec mon collègue, le député de Acadie—Bathurst.
[Traduction]
Il est intéressant de prendre la parole après le député de Waterloo—Wellington, qui suscite toujours toute une réaction de la part des députés de tous les partis. Il lui arrive de soulever l'indignation d'autres députés. Il n'a pas fait exception ce soir.
Inutile de dire que je suis en total désaccord avec le ton et la teneur de ses propos. J'estime qu'il a présenté sous un faux jour la nature du débat et des enjeux. J'espère que, dans le peu de temps qu'il nous reste pour discuter de cette question cruciale, nous saurons rétablir les faits.
J'ai hâte d'entendre la suite du débat de ce soir. J'espère que le député de Winnipeg-Sud y participera. Par le passé, il a beaucoup parlé de la réforme parlementaire et de la nécessité d'apporter des changements en profondeur à la Chambre pour favoriser une plus grande démocratie et une plus grande participation de tous. Je crois que le député et bien d'autres comme lui doivent être déçus, dans leur for intérieur, devant cette initiative du leader du gouvernement à la Chambre.
Je ne peux m'empêcher de penser que certaines des interventions entendues ce soir s'expliquent par le fait que les députés libéraux se sentent obligés d'appuyer cette mesure, de suivre les directives du leader du gouvernement à la Chambre et, malgré tout ce qu'ils peuvent penser, d'obéir aveuglément.
Ce à quoi nous assistons ce soir n'est que le comportement typique de ce que nous avons appris à appeler des chiens savants. Je constate que le député de Winnipeg-Sud a la réaction appropriée.
M. Dick Proctor: Il s'exerce.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Il s'exerce, comme vient de le dire mon collègue, le député de Palliser, et c'est justement cela qui est au coeur du débat de ce soir.
Il est très paradoxal que nous débattions ce soir d'une motion du parti ministériel, qui a imposé la clôture. Cette motion a pour effet de miner les pouvoirs des élus en cet endroit. C'est paradoxal parce que c'est justement aujourd'hui que le vérificateur général a présenté son dernier rapport à cet endroit. Aujourd'hui, au Comité des comptes publics, il a insisté très clairement sur l'importance de préserver les traditions parlementaires et de veiller à ce que les députés puissent exercer leurs droits, s'acquitter de leurs responsabilités et exiger des comptes du gouvernement, non seulement sur le plan financier, mais aussi en ce qui concerne toutes les questions liées aux mesures législatives, aux programmes et aux initiatives.
Je pense qu'il serait tout à fait opportun de rappeler aux députés ce que le vérificateur général a dit aujourd'hui. Il a dit ceci:
J'invite ceux et celles qui sont devenus cyniques à l'égard de leur gouvernement à reconsidérer leur point de vue [...] Les institutions gouvernementales représentent la meilleure défense des citoyens ordinaires contre certaines tendances qui nécessitent une action collective. Il est de notre devoir, en tant que citoyens, de renforcer les institutions du gouvernement. Ceux et celles d'entre nous qui sont au sein du système ou qui l'ont été, ont le devoir de veiller à ce que nous rendions compte de nos actes et des ressources importantes qui nous ont été confiées.
C'est ce que nous tentons de faire dans le débat de ce soir. Voilà pourquoi nous nous sommes montrés si préoccupés par la conduite du gouvernement aujourd'hui.
Nous avons amorcé la session avec de grandes aspirations et en espérant vivement que la 37e législature du Canada soit l'occasion pour le gouvernement d'adopter une nouvelle attitude et une nouvelle approche à l'égard de l'obligation de rendre compte, de la démocratie et de la transparence. Nous avons nourri de tels espoirs parce que des députés des deux côtés de la Chambre et de tous les partis parlaient de la nécessité de réformer le Parlement. Nous avons nourri de grands espoirs parce qu'il était fait mention dans le discours du Trône de la nécessité de réformer le Parlement. Nous avons gardé l'espoir parce que, en fait, un formidable débat est en cours dans les médias et dans la population sur la nécessité de s'assurer que cet endroit, la Chambre du peuple, soit en mesure d'assumer ses responsabilités conformément aux voeux des Canadiens.
Inutile de dire que cela commence très mal. C'est un début très précaire pour un programme qui était censé apporter des changements significatifs à notre Parlement et à notre système électoral. La session avait à peine deux semaines lorsque le gouvernement a décidé de sortir son fouet et de s'assurer que tous les députés votent contre la motion visant à nommer un conseiller en éthique indépendant.
Un jour ou deux plus tard, le gouvernement a imposé la clôture sur le tout premier projet de loi qu'il ait présenté au cours de la présente session, à savoir le projet de loi sur l'assurance-emploi. Nous avons calculé que c'était là la 69e ou la 70e fois que le gouvernement imposait la clôture ces dernières années.
Seulement deux semaines plus tard, le gouvernement a proposé cette motion visant, en fait, à priver les parlementaires et les partis de l'opposition à la Chambre du pouvoir de modifier des projets de loi à l'étape du rapport. Le comble, c'est que le gouvernement a eu le culot d'imposer la clôture sur cette motion. En fait, nous débattons aujourd'hui de la clôture sur la clôture.
Ce soir, les députés ministériels essaient de défendre cette position en laissant entendre qu'ils le font parce que c'est dans l'intérêt supérieur du Parlement et dans l'intérêt supérieur des Canadiens. Ils veulent nous empêcher de soulever des questions vexatoires et frivoles. Ce sont les argumentations des députés libéraux qui sont vexatoires et frivoles. Les députés libéraux ne vont pas au coeur du sujet, qui est de savoir comment vraiment réformer cet endroit de façon juste et raisonnable, avec la collaboration de tous les partis et de tous les intervenants à la Chambre.
Comme certains de mes collègues l'ont dit plus tôt, le gouvernement a choisi d'appliquer arbitrairement une réforme pour s'attaquer à ce qu'il considère comme un abus du processus parlementaire sans toucher à ses propres abus du système, sans remettre en question son recours incessant à la clôture, sa manipulation politique des comités et toute la façon dont le pouvoir exécutif contrôle notre institution, l'utilise et en abuse.
Nous devrions tous chercher ensemble des moyens de réformer notre institution. Or, ce dont nous sommes saisis n'est pas la façon de procéder. Nous devons trouver une façon de collaborer pour apporter les modifications nécessaires. C'est ce type d'action dictatoriale et arbitraire de la part du gouvernement qui vient nuire à la réalisation de cet objectif tout à fait valable, de cette aspiration importante consistant à rendre notre institution plus représentative et plus démocratique.
Il convient particulièrement aujourd'hui de citer le rapport du vérificateur général où il dit:
Pour que la démocratie fonctionne et que le gouvernement soit efficient et efficace, le Parlement doit être en mesure de jouer son rôle.
Il ne fait aucun doute que le Parlement ne peut jouer son rôle à l'heure actuelle. Cela est dû à une série de mesures prises par le gouvernement pour enlever au Parlement ses pouvoirs et nier aux députés la possibilité de jouer un rôle utile dans le processus.
Je n'ai qu'à me reporter aux comités permanents pour voir la façon dont le gouvernement contrôle tout ce processus en empêchant les députés de se pencher sur les graves questions de l'heure, comme l'avenir des soins de santé au Canada.
Le gouvernement nie aux députés la possibilité de jouer pleinement leur rôle, il prend des décisions à l'extérieur de la Chambre et il a recours à la mesure drastique qu'est la clôture et à des motions comme celle dont nous sommes saisis aujourd'hui qui vise à nous retirer tous nos pouvoirs et à nous enlever la capacité de représenter les gens comme nous cherchions à le faire lorsque nous nous sommes lancés en politique.
J'espère que les députés libéraux réexamineront cette position et la supprimeront, et mettront un terme à cette ineptie afin que nous puissions tous nous attaquer au travail important qui consiste à procéder à une sérieuse réforme parlementaire et à veiller à ce que notre institution préserve sa fière tradition et demeure un exemple de démocratie et de participation des citoyens.
[Français]
M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Madame la Présidente, premièrement, je pourrais dire qu'il me fait plaisir de me lever ce soir à la Chambre pour parler de cette motion. Mais, en même temps, il est regrettable qu'on soit en train, encore une fois, de faire un pas à reculons à l'égard de la démocratie ici au Canada. C'est vraiment un pas à reculons. On a une belle Chambre des communes qui est ici pour pouvoir étudier des lois, des projets de loi, des motions et gouverner le pays.
On a un gouvernement libéral, de l'autre côté de la Chambre, qui dit: «On doit avoir du respect pour notre Chambre des communes, mais on va faire taire l'opposition. On va enlever des privilèges à l'opposition.». C'est regrettable de voir un parti qui, pour autant que je me rappelle, vers les années 1988-1989, alors qu'il formait l'opposition, était heureux d'être capable de se lever à la Chambre des communes et de débattre des projets de loi. Les libéraux étaient heureux d'être capables de faire des amendements à des projets de loi. À cette époque, ils n'aimaient pas cela du tout quand les conservateurs essayaient de les arrêter.
On se rappelle du projet de loi sur la TPS. Les libéraux sont arrivés avec une foule d'amendements. Est-ce que le gouvernement de l'époque a dit: «Vous êtes une gang d'abuseurs. Vous abusez du Parlement parce que vous voulez faire votre job»? C'est honteux. C'est honteux ce qui se produit en l'an 2001, surtout quand on arrive ici après l'élection de 2000, et que le gouvernement dit: «Oui, on va être ouverts à une réforme parlementaire. On va s'asseoir au Parlement. On sera capables de discuter et de regarder ensemble une réforme parlementaire.»
Ce soir, on arrive ici avec une motion. Ils veulent encore faire taire l'opposition. Mais je pense qu'en démocratie, on a un rôle. On est capables aussi de prendre nos responsabilités. Si le gouvernement veut dire que l'opposition ne prend pas ses responsabilités parce qu'il y avait apparemment 100 ou 200 amendements à un projet de loi, prend-il ses responsabilités quand il met un terme aux débats comme ce qu'on a vu depuis les dernières années?
Mon collègue de Mississauga vient de dire: «Mais ne vouliez-vous pas l'avoir le projet de loi C-2 sur l'assurance-emploi? N'avez-vous pas hâte qu'il soit adopté?» Oui, j'ai hâte qu'un projet de loi sur l'assurance-emploi soit adopté. J'ai hâte qu'il soit adopté, mais j'aimerais, comme député qui représente Acadie—Bathurst, être capable de me lever à la Chambre des communes et d'expliquer les problèmes et les échappatoires qu'il y a dans le projet de loi C-2.
J'ai été élu pour cela. J'ai été élu pour faire cette job et prendre ces responsabilités. J'ai été élu pour pouvoir aller aux comités parlementaires, prendre mes responsabilités et présenter le problème que le projet de loi C-2 nous amène. J'ai été élu pour pouvoir présenter des motions à la Chambre des communes, pour faire des amendements au projet de loi C-2 qui ne va pas assez loin. J'ai été élu pour faire cela à la Chambre des communes. Ce fauteuil-ci appartient à Acadie—Bathurst. Il n'appartient pas au député, il appartient à Acadie—Bathurst. Ce faisant, je devrais pouvoir me lever et m'exprimer en comité parlementaire. Je devrais pouvoir présenter des amendements aux projets de loi du gouvernement.
Le Canada n'appartient pas seulement aux libéraux, il appartient aux Canadiens et aux Canadiennes. Les Canadiens et les Canadiennes ont choisi d'envoyer des députés à la Chambre pour les représenter.
C'est regrettable. Lorsque le projet de loi C-2 a été présenté pour étude à la Chambre, il n'y a eu qu'une journée de débat là-dessus, et ensuite, c'était fini. C'est honteux.
Les libéraux viennent nous dire que nous abusons du système, de ce côté-ci de la Chambre. Pourtant, les libéraux ont proposé au-delà de 100 amendements à leur propre projet de loi sur les jeunes contrevenants, et ce sont eux qui détiennent le pouvoir. Est-ce qu'on va les qualifier d'abuseurs parce qu'ils ont rédigé un mauvais projet de loi et qu'ils se sont aperçus qu'ils avaient manqué le bateau?
Cela ne coûte pas plus cher au gouvernement, à mon avis, si je suis ici, ce soir, en train de débattre de l'une de ses motions. C'est pour ça que j'ai été élu—je ne suis pas pour m'en aller à la maison—pour pouvoir être ici et débattre des problèmes qui touchent les Canadiens et les Canadiennes, les gens de ma région.
Je trouve que l'attitude du gouvernement est regrettable. C'est insultant de voir le député de Waterloo—Wellington se lever ici et essayer, comme on dirait en bon français, «de crucifier l'opposition». On nous dit: «Vous êtes méchants, vous n'êtes pas corrects, vous êtes des abuseurs.»
Va-t-on les qualifier d'abuseurs parce qu'on a dû demander le quorum, car les députés du gouvernement n'étaient pas ici? Chaque fois que des députés de l'opposition se lèvent pour aller chercher les choses auxquelles ils ont droit, on les appelle des abuseurs. Pourtant, les libéraux, quand ils étaient dans l'opposition, ils faisaient des choses semblables; ils voulaient attirer l'attention du gouvernement pour lui indiquer qu'il était dans la mauvaise direction. C'est ce que l'opposition voulait faire, essayer de le convaincre qu'il ne se dirigeait pas dans la bonne direction.
En procédant ainsi, avec cette motion, ils ne sont pas corrects. Ils auraient pu attendre qu'on fasse la réforme parlementaire ensemble, qu'on s'assoie en comité pour en débattre.
Je suis le whip du Nouveau Parti démocratique. Les whips de tous les partis, les leaders parlementaires de chaque parti ont dit qu'on allait voir à faire une réforme parlementaire. Tout à coup, le leader du gouvernement nous arrive avec une motion qui nous transmet le message suivant: «Vous êtes une gang d'abuseurs, on va adopter une motion.» Où est la démocratie? Qu'est-il arrivé à la suggestion qu'on allait travailler ensemble?
Lorsque vous étiez de ce côté-ci de la Chambre, par exemple...
[Traduction]
M. John Harvard: Vous allez avoir une crise cardiaque.
M. Yvon Godin: Je le répète. Le député dit que je vais faire une crise cardiaque. Si je fais une crise cardiaque en défendant la population d'Acadie—Bathurst, que j'en meure tout de suite et j'en serai fier. Le député ne devrait pas s'en faire pour moi. Je sais prendre soin de moi.
[Français]
Je pense qu'il est important que le gouvernement cesse d'utiliser ces tactiques-là. Il faut qu'il donne la chance aux différents partis de faire leur job.
C'est honteux. Ils donnent comme excuse que l'opposition ne voulait pas que le projet de loi C-2 sur l'assurance-emploi soit adopté. Mais ils ne proposaient qu'un petit 5 p. 100, alors que les gens de chez nous se retrouvent dans le trou noir, de février à mai. Pourtant, ils savent qu'il faut se débarrasser de la règle d'intensité. Nous, de l'opposition, allons prendre nos responsabilités, nous allons représenter les gens de chez nous.
Qu'ils ne viennent pas nous dire que nous sommes des abuseurs, car jamais je n'accepterai cela des députés de l'autre côté de la Chambre. Jamais je n'accepterai cela, parce que j'ai été élu pour représenter les gens d'Acadie—Bathurst et je vais les représenter du mieux que je peux. Je ne me laisserai pas influencer et intimider par ces gens de l'autre côté de la Chambre, les libéraux, je peux vous le garantir.
Ici, on vit en démocratie. On est au Canada, ici, on n'est pas au Royaume-Uni. On n'a pas besoin de prendre exemple sur le Royaume-Uni. On peut prendre nos propres exemples et travailler ensemble. Je suis certain que si on s'assoie à la même table et qu'on essaie de trouver des solutions à certains problèmes, on obtiendra des résultats.
Peut-être que la raison pour laquelle l'opposition propose tout un paquet d'amendements, c'est parce que le projet de loi du gouvernement n'a aucun sens. Quel est l'outil dont dispose l'opposition?
Je me rappelle d'une tactique qui a déjà été utilisée: un parti d'opposition avait refusé d'entrer à la Chambre des communes. Ils ont peut-être brûlé trois ou quatre cloches à l'époque. Certains diront que ce n'était peut-être pas correct, mais d'autres diront: «Ah bien, au moins, ils ont marqué leur point. Les Canadiens ont eu la chance de l'entendre.»
Pour le projet de loi sur les Nisga'as, l'Alliance canadienne avait présenté 471 amendements.
J'étais heureux de leur dire non 471 fois. J'ai trouvé que mon salaire avait été bien payé. Je pense qu'après cela l'Alliance canadienne avait compris que les Canadiens et les Canadiennes ne voulaient pas avoir ces amendements.
Il y a une chose, c'est que je pense qu'on a pu se servir de notre démocratie à la Chambre des communes et on n'a pas besoin des libéraux pour nous faire taire. C'est une chose qu'on n'acceptera pas et c'est inacceptable.
J'aimerais remercier la Présidence malgré le peu de temps qu'elle m'a accordé. C'est à souhaiter que les libéraux changent d'idée d'ici 11 heures ce soir, qu'ils ramènent à nouveau la démocratie à la Chambre des communes et qu'ils arrêtent d'être une bande de dictateurs.
[Traduction]
M. Reg Alcock (Winnipeg-Sud, Lib.): Madame la Présidente, ce sujet m'intéresse en particulier et je me demande si vous pourriez demander à la Chambre s'il y a consentement unanime pour m'accorder une période de temps illimitée.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
M. Reg Alcock: Madame la Présidente, je vais tenter de tout dire dans les 20 minutes qui me sont accordées. Voyons si j'ai bien compris. Nous sommes ici ce soir pour débattre du droit de l'opposition d'obliger toute la Chambre des communes du Canada à passer des centaines d'heures à voter sur des motions importantes visant à remplacer, par exemple, un point par une virgule.
Voilà, si je comprends bien, ce à quoi se résume le débat de ce soir. Je comprends un peu la raison de ce débat. Certains députés ne le savent peut-être pas, mais j'ai été leader de l'opposition à l'Assemblée législative du Manitoba. La députée de Winnipeg-Centre-Nord le sait. J'ai beaucoup de sympathie pour l'opposition et je comprends qu'il a besoin d'outils pour exhorter le gouvernement à rendre des comptes.
Jusqu'à maintenant, j'ai prêté beaucoup d'attention au débat. Il me semble que, peu importe l'assemblée législative, que ce soit au Manitoba ou à la Chambre des communes, il y a toujours deux conversations qui se déroulent en même temps. Il y a d'abord celle qui se déroule devant les caméras, celle qui est consignée dans le hansard, puis il y a celle qui se déroule dans les corridors, derrière les rideaux et dans les cafés.
Je ne connais aucun député à la Chambre des communes qui juge utile que nous passions des centaines d'heures à nous lever et à nous rasseoir pour voter sur des motions à caractère frivole. Mis à part les échanges enflammés, les tentatives faites pour nous mettre dans l'embarras les uns les autres et tous les débats idiots, je n'ai entendu personne qui croit que le temps consacré à ce genre de questions représente une utilisation productive du temps limité dont nous disposons.
Je voudrais remettre les choses dans leur contexte. Moi aussi je m'inquiète devant le recours excessif à l'attribution de temps. Moi aussi je m'inquiète devant tous les outils à la disposition du gouvernement pour forcer l'adoption des lois sans un débat ou un examen suffisants. Moi aussi je m'inquiète de voir une Chambre où un côté devient si puissant qu'il n'a absolument pas besoin de tenir compte de l'opinion de l'autre côté.
On peut à juste titre être préoccupé de voir que le Parlement du Canada, comme d'autres Parlements dans le monde, s'est mué en un outil qui permet au gouvernement de faire exactement cela, d'imposer sa volonté sans avoir à tenir compte des arguments présentés au cours des débats par l'opposition.
Cependant, à toute action il y a une réaction. En partie parce qu'elle n'a que des outils limités à sa disposition, l'opposition en est venue à recourir à des moyens frivoles et extrêmes pour faire valoir ses arguments, jusqu'à un point où nous avons tous l'air idiot.
Tout à l'heure, j'ai entendu un député parler du traité nisga'a en tentant de conférer une certaine dignité au fait que nous avons siégé jour et nuit pendant une quarantaine d'heures. Je crois que ce que l'histoire retiendra de ce député, c'est qu'il a pu voter sur tous les amendements parce qu'il pouvait courir à la toilette et en revenir.
Avant d'aborder certaines des solutions que je vois à ce problème, je vais essayer de parler un peu du contexte. C'est une question que je prends très au sérieux. Je passe beaucoup de temps à y réfléchir, comme d'autres députés d'ailleurs. J'ai eu de longues discussions qui, je crois, ont été très utiles avec le leader parlementaire du Nouveau Parti démocratique, un des députés les plus chevronnés et les plus distingués de la Chambre. Il a passé beaucoup de temps ici et il connaît bien ces questions. Je respecte ses conseils.
La première chose qu'il faut se demander, c'est comment nous en sommes arrivés à ce point. Je dirais qu'il y a toutes sortes de facteurs en jeu ici, mais un d'entre eux est que tout dans le monde extérieur va plus vite, la vie, les affaires, le changement, tout ce qui influe sur le besoin de prendre des décisions.
Dans son plus récent livre, Bill Gates décrit la décennie dans laquelle nous sommes comme étant celle de la vélocité, celle où le plus grand défi pour chacun sera de gérer la rapidité avec laquelle les choses doivent se produire. Cette accélération n'est pas apparue avec le nouveau millénaire; nous avons pu l'observer pendant toute notre vie. Elle existe depuis le début des temps, mais elle a atteint un rythme où les changements se produisent à l'intérieur d'une seule génération. Ils sont intragénérationnels. On peut voir de multiples changements à l'intérieur d'une seule génération.
Les institutions gouvernementales subissent donc des pressions énormes pour répondre rapidement aux circonstances changeantes dans le monde extérieur et dans les collectivités où vivent les citoyens à qui nous devons rendre compte.
Au fil du temps, procédant lentement, une étape à la fois et de façon odieuse, les ministériels ont adopté une série d'instruments pour faire avancer leur programme plus rapidement et dans les meilleurs délais. Il faut reconnaître que cela a enlevé du temps de réflexion. Cela a privé l'opposition de certains instruments dont elle disposait pour forcer le débat et ralentir l'étude de certaines mesures.
Je pense que le débat sur la réforme parlementaire est important. C'est un débat qu'il faut poursuivre maintenant. Cependant, c'est un débat distinct par rapport à cette motion. Je le dis sans problème parce que nous avons des engagements à respecter. La réforme, ce n'est pas des paroles en l'air. Ce n'est pas un voeu pieux. C'est dans le discours du Trône.
Dans le discours du Trône, le gouvernement a dit reconnaître qu'il y a un problème. En fait, je vais vous lire ce qu'il a dit car je pense qu'il est important de ce concentrer là-dessus.
L'une des choses que j'admire beaucoup chez notre premier ministre, c'est cette façon qu'il a d'aborder les problèmes un par un, petit à petit. Il n'en fait pas tout un plat. Il dit simplement qu'il y a un problème que nous allons régler de telle façon. C'est tout.
On peut lire dans le discours du Trône:
Nous continuerons à renforcer les institutions du gouvernement. Depuis 1993, celui-ci a adopté un ensemble de mesures pour permettre aux députés de mieux représenter leurs électeurs.
Au cours de cette nouvelle session du Parlement, le gouvernement proposera de nouvelles améliorations aux procédures de la Chambre et du Sénat. Entre autres mesures, les procédures de vote à la Chambre des communes seront modernisées. Pour aider les parlementaires à s'acquitter de leurs tâches, le gouvernement compte accroître les ressources de la Bibliothèque du Parlement pour qu'elle réponde mieux aux besoins des comités permanents de la Chambre et du Sénat en matière de recherche.
Mais nous ne nous en sommes pas tenus à cela. Le lendemain même, le premier ministre a témoigné devant la Chambre de son engagement personnel en déclarant ceci:
Pas plus que toutes les autres institutions humaines la Chambre des communes n'est parfaite. Il est possible de la renforcer. Au fil des ans, de nombreux changements ont été apportés pour améliorer le Parlement, et d'autres seront apportés pour moderniser l'institution parlementaire à l'aube du XXIe siècle.
Le leader à la Chambre travaille avec ses collègues des différents partis sur des réformes qui vont permettre à notre assemblée de servir encore mieux les intérêts de tous les Canadiens...
C'est un engagement ferme. Ce ne sont pas des paroles en l'air. J'y crois.
La députée de Winnipeg-Centre-Nord a commenté dans son intervention ma position à ce sujet. Elle s'est demandée comment je pouvais défendre la motion d'aujourd'hui. Je n'ai aucun scrupule à défendre cette motion car je ne veux plus être partie prenante d'un processus aussi ridicule et bête, qui amène les Canadiens à s'interroger sérieusement sur notre intégrité. Ce processus est bidon. Il nuit au bon fonctionnement de l'institution. Il nous fait perdre un temps fou, et nous savons que le temps est une denrée rare. Je n'ai aucun scrupule à voter contre.
Quel moyen avons-nous choisi pour modérer l'usage de cette procédure? Nous n'avons pas dit qu'il fallait l'interdire, puisque les motions à l'étape du rapport représentent un outil important. Ce que nous faisons, par cette motion, c'est réaffirmer le pouvoir et l'autorité que détient le Président. Nous ne les donnons pas au gouvernement ou au leader du gouvernement à la Chambre. Nous donnons ce pouvoir à un collègue élu par tous les députés de cette Chambre et qui a l'appui de la majorité.
Ce collègue n'est pas chargé, aux termes de cette motion, de rejeter les motions de l'opposition. Le Président, comme son homologue à Westminster, est habilité à examiner ces motions. S'il juge que le gouvernement essaie d'imposer des choses par la force, il peut autoriser toutes sortes de motions. Par contre, il peut refuser les motions qui lui apparaissent frivoles.
La présente motion met en application une des réformes démocratiques des temps modernes. Il n'y a pas si longtemps que la Chambre s'est finalement entendue pour donner à une personne habituellement nommée jusque-là par le parti ministériel, des pouvoirs indépendants du gouvernement. Ce sont ces pouvoirs que réaffirme la motion.
Je vais parler un peu de ce qui pourrait survenir maintenant, parce que j'ai eu vent d'une chose ou deux. J'aimerais bien ne pas entendre les bêtises qui s'en viennent. En fait, j'ai peut-être utilisé un mauvais terme, et je m'en excuse, car je ne veux pas rabaisser ainsi les commentaires des autres députés. Ayant été dans l'opposition et forcé de critiquer à l'occasion des choses qui m'apparaissaient intéressantes, je sais qu'il est parfois très difficile de se sentir à l'aise de faire cela. Je comprends que les députés tentent de préserver le principe de reddition de comptes, mais ce qu'ils tentent de défendre est quelque chose de tellement frivole qu'ils doivent avoir beaucoup de mal au fond d'eux-mêmes à le faire.
J'ai essayé d'en faire abstraction et d'entendre d'autres propos. On a parlé du vote récent sur le conseiller en éthique. Un de mes amis a une affiche sur le mur de son bureau qui dit ceci: «Pour chaque problème complexe, il y a une solution simple, mais qui n'est pas la bonne.»
C'est le problème qui survient quand nous prenons à la légère les changements à la Chambre. Nous pouvons tous relever un petit élément qui doit être modifié selon nous. Nous pouvons tous trouver une façon de changer ce petit élément qui nous ennuie sur le moment, mais ce n'est pas en procédant de cette manière que la Chambre est devenue ce qu'elle est aujourd'hui. Ce n'est pas comme ça que les règles, les procédures, les précédents et tout ce qui nous permet de travailler à la Chambre ont évolué. Il faut du temps et de la réflexion.
La Chambre est l'endroit au pays qui gère le pouvoir et l'autorité dans la vie de tous les citoyens et qui leur donne des droits. Il s'agit d'un débat important qui doit être abordé avec sérieux. Tous les députés doivent y participer à part entière, mais il faut tenir compte des deux côtés de la question. Nous devons tous reconnaître les exigences émanant de l'extérieur. La Chambre doit se moderniser.
Je voudrais ajouter un autre volet à la question. Je vais revenir un instant à M. Gates. M. Gates parle des conséquences extraordinaires que les technologies de communication et de l'information ont eues sur le monde. Il qualifie les années 1980 de décennie de la qualité. Au fur et à mesure que ces nouveaux outils ont gagné en popularité, que plus de gens les ont utilisés et que des boucles de rétroaction ont été mises au point, les gens ont pu commencer à gérer en temps réel le processus d'établissement de la qualité influant sur leur domaine d'opération, qu'il s'agisse de la fabrication, du domaine des services ou autre.
Il qualifie ensuite les années 1990 de décennie de la restructuration. Au fur et à mesure que ces outils sont devenus plus performants, que les informations se sont accumulées et qu'il est devenu plus facile de tirer des connaissances de ces données, on a constaté des changements très similaires dans les très grandes organisations. C'était un peu comme de revenir à des organisations plus plates et plus rapides pouvant confier certaines décisions en périphérie aux clients et présentant certaines informations au centre pour faire participer la haute direction plus directement au processus de prise de décision. Ce furent là des changements radicaux mais très importants. Ces changements ont accru la qualité des services et des produits et réduit les coûts.
Si je peux ramener les députés à ce petit paradigme, j'aimerais leur demander ce qu'a signifié le mouvement axé sur la qualité pour le gouvernement. Cela s'est produit à l'extérieur. Où se trouvent les cercles de qualité, les rétroactions sur le service et les systèmes d'amélioration des opérations des clients au gouvernement? Rien de tout cela n'existe.
Qu'est-ce que la restructuration a signifié pour le gouvernement? Dieu sait que l'on en a vu des consultants parcourir le pays dans tous les sens pour vendre des programmes de restructuration, tentant généralement d'intégrer des modèles primitifs provenant du secteur privé dans les institutions publiques. Le gouvernement est une organisation fondamentalement beaucoup plus complexe que la plus grosse des entreprises privée.
Quel genre de réorganisation, de changement ont eu lieu au sein de l'appareil gouvernemental? Pendant que le monde subissait des changements de plus en plus rapides et que ces changements extraordinaires se produisaient dans l'environnement extérieur ou se déroule la vie de tous ceux que nous servons, quels changements a subi cette institution? La réponse: aucun.
La réorganisation au sein des gouvernements a débuté à la fin des années 80 et jusqu'à maintenant, elle a pris la forme de la privatisation. Il s'agissait de séparer du gouvernement les services dispensés par l'appareil gouvernemental.
Je prônais cette approche lorsque je suis arrivé ici. Je présidais le comité des transports lorsque les ports ont été privatisés. J'ai souscrit à tous les arguments. La privatisation devait permettre d'assurer des services rapides et adaptés aux besoins et aux conditions des communautés. Cette solution devait faire merveille. Que disions-nous en réalité? Nous disions que le gouvernement était trop lent, trop stupide, trop inepte pour être utile dans la vie des Canadiens.
C'est le défi qui se pose aujourd'hui à nous, à chacun des députés qui siègent à la Chambre. Je parle de cette institution mais aussi de tous les Canadiens puisque le Parlement influe sur la vie de tous les Canadiens. Le défi se pose à nous est de savoir comment rendre les instruments de la démocratie plus utiles pour tous. Nous nous engageons aujourd'hui dans ce débat, mais je crois qu'il se prolongera longtemps, car il pose un énorme défi aux gouvernements du monde entier.
Je m'oppose à ce qu'on personnalise la question. On dit que c'est l'affaire du premier ministre, ou l'affaire du leader du gouvernement à la Chambre. Ça n'a pas de sens. Tous les gouvernements démocratiques du monde sont actuellement aux prises avec cette question, sans parvenir à la résoudre.
Nous faisons face à un défi énorme, beaucoup plus considérable que nous ne le pensons à l'heure actuelle. Je trouve cela enthousiasmant. Examinons les changements à apporter.
Débattons des mesures à prendre pour assurer un examen adéquat, une responsabilité et la maîtrise des institutions importantes qui influent sur la vie de tous les Canadiens. Cessons de débattre de l'importance de voir la Chambre siéger pendant 400 heures pour changer une virgule. C'est stupide. Nous savons tous que c'est stupide. Laissons donc cela de côté et engageons-nous plutôt dans ce que je crois être l'entreprise la plus importante de la Chambre au cours de cette décennie.
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Alliance canadienne): Madame la Présidente, je suis heureux de parler de la motion car elle témoigne d'une continuation de ce dont nous parlions plus tôt aujourd'hui, soit l'étiolement du caractère démocratique de la Chambre des communes.
Depuis plusieurs années, des députés de tous les partis expriment avec éloquence les frustrations qu'ils ressentent en tant que députés. Il y a la frustration que nous ressentons quand, de retour dans notre circonscription, nous parlons avec les gens qui nous ont envoyés siéger à la Chambre, en les écoutant exprimer leurs préoccupations et en nous sentant impuissants à les faire comprendre à la Chambre.
Nous sommes d'accord avec l'idée de base et avec le principe de la motion que le gouvernement a présentée, c'est-à-dire que nous ne voulons pas d'une situation où l'on propose des amendements frivoles simplement pour plonger la Chambre dans une période prolongée d'action inutile. D'un autre côté, comme l'a dit mon collègue, le député d'Elk Island, nous ne pouvons pas laisser compromettre les droits des minorités. Voilà de quoi nous parlons aujourd'hui.
Il ne s'agit pas seulement des droits de la minorité, mais aussi des droits de la majorité. Nous avons maintenant une situation où la Chambre est menée par un premier ministre qui a solidement prise sur les activités de la Chambre et du pays.
Le public comprend cela et nous aussi. Voilà pourquoi nous avons observé un taux de participation au scrutin de moins de 60 p. 100 lors des dernières élections fédérales. Il n'y a pas de quoi être fier. Cela devrait servir de signal d'alerte et faire comprendre qu'il faut prendre des mesures pour faire participer le public. Il faut faire quelque chose pour restaurer la confiance que le public devrait avoir en notre noble institution.
Au fil des décennies, notre institution s'est étiolée. Les pouvoirs démocratiques des députés élus ont été rognés d'année en année. Le défunt premier ministre Trudeau disait que les députés ne sont rien du tout dès qu'ils sont à 100 pieds de la colline. Je soutiens que les députés ne sont rien du tout sur la colline, et c'est là tout le problème.
Le public comprend cela et, pour dire la vérité, nous aussi nous comprenons cela. Le fait est qu'il y a de bons députés, dans tous les partis, qui ont des contributions importantes à faire pour améliorer le bien-être de tous les Canadiens, mais ils n'ont pas le pouvoir de représenter leurs électeurs.
Nous avons certes des comptes à rendre. Nous en rendons tous les quatre ans. Cependant, dans l'intervalle, avons-nous vraiment le pouvoir de représenter nos électeurs pour qu'ils puissent bien nous juger sur nos activités? Non, nous ne l'avons pas. Nous n'avons pas le pouvoir de représenter nos électeurs.
Au fil des ans, nous avons vu le triste sort qui a été réservé aux députés qui ont tenté de faire ce qu'il convenait. Ils ont tenté de représenter leurs électeurs et d'agir selon leur conscience. Lorsque cela a attiré le mécontentement des dirigeants de leur parti, ils ont été émasculés, rendus impuissants et, pire encore, évincés de leur parti.
Qui peut oublier John Nunziata qui, sur une question de principe, sur une question de conscience, sur la question de la TPS et d'une promesse du gouvernement, a dit qu'il ne pouvait pas appuyer le gouvernement? Il a violé une promesse qu'il a faite lorsqu'il a été élu. Pour avoir agi ainsi, il a été évincé du groupe parlementaire.
C'est la situation à laquelle doivent faire face, à divers degrés, tous les partis politiques. Il faut changer cela. Les députés de mon parti ont présenté des propositions, notamment à l'égard du conseiller en éthique. Nous avons présenté une motion pour donner au gouvernement une occasion de voter en faveur de la promesse même qu'il a faite aux Canadiens dans le premier livre rouge.
Le gouvernement a voté contre sa propre promesse de nommer un conseiller en éthique indépendant. Nous ne voulons pas d'un conseiller en éthique qui rend des comptes au premier ministre. Même les députés d'en face n'en veulent pas. Nous devrions avoir un conseiller en éthique indépendant qui ne relève pas du premier ministre mais qui fait rapport à la Chambre.
Nous craignons que cette motion ne permette au premier ministre d'exercer encore plus de contrôle inutile sur la Chambre et d'accroître son pouvoir, de sorte que les décisions seront surtout prises par le premier ministre et ses collaborateurs au sein du CPM, des gens non élus et invisibles qui dirigent le pays et n'ont de comptes à rendre à personne.
Bien des gens parmi ceux qui nous écoutent ce soir ne savent pas et ne comprennent pas que la structure que nous avons érigée nous empêche aujourd'hui de faire connaître leur point de vue et leurs souhaits à la Chambre des communes.
Un autre problème très grave est le fait qu'il n'y a pas de vote libre à la Chambre. Nous parlons de vote libre mais nous n'en débattons pas.
En général, les comités ne servent qu'à occuper les députés. Que c'est triste. Prenons l'exemple du Comité de la santé. Notre régime de soins de santé traverse une crise actuellement. Au fil des ans, les députés de tous les partis, et je sais que c'est le cas du porte-parole du NPD en matière de santé, ont uni leurs efforts pour soulever le problème. Nous ne nous entendons peut-être pas sur la solution au problème, mais nous unissons certainement nos voix pour réclamer un examen de la situation. Nous devons étudier le problème et trouver des solutions efficaces pour préserver notre régime public de soins de santé. Il s'agit du principal sujet de préoccupation des Canadiens, pas d'une question purement théorique, mais bien d'un problème qui menace la vie des Canadiens. Pourtant, le gouvernement s'est contenté de charger un comité d'étudier la banalisation des paquets de cigarettes, la santé des autochtones et d'autres questions qui, bien qu'importantes, sont peu de choses en comparaison du grand défi que représente la préservation de notre régime public de soins de santé.
Le gouvernement se préoccupe-t-il du vieillissement de la population? Le vieillissement de notre population et notre situation démographique perturberont tous nos programmes sociaux, allant du Régime de pensions du Canada aux soins de santé, en passant par d'autres programmes sociaux. C'est une épée de Damoclès. Notre immobilisme face au problème du vieillissement de notre population et de son impact sur nos programmes sociaux et, en fait, sur notre économie, aura des répercussions sociales tellement profondes que nous serons incapables de trouver des solutions et que les membres les plus démunis de notre société, les personnes âgées et les jeunes, en souffriront. La seule manière de faire face à ce problème consiste à agir de façon proactive. Nous ne pouvons pas nous permettre de réagir impulsivement. Nous devons nous attaquer au problème de façon proactive parce qu'il faut du temps pour élaborer des solutions et les mettre en application. Si nous n'agissons pas, certains de nos concitoyens vont en pâtir.
Sur la question de l'environnement, le Canada s'est fait dire à maintes reprises qu'il y a de graves problèmes. Nous devons y faire face, mais que faisons-nous? Nous n'arrêtons pas de ressasser tout ce que nous entendons et de tourner en rond. Notre incapacité de faire face aux problèmes est la source de difficultés inimaginables pour les Canadiens ordinaires.
Dans notre système de santé, il y a des gens qui regardent la pollution causée par des industriels qui jettent leurs déchets dans nos rivières et nos cours d'eau. Ces gens veulent savoir pourquoi le gouvernement ne réagit pas. Qu'entendent-ils en retour? Le silence le plus complet. Cette absence de réaction inspire-t-elle le respect et la volonté de s'engager et de collaborer avec le gouvernement, de participer à la vie politique? Absolument pas. D'ailleurs, la plupart des gens voudraient participer, mais ils constatent que, comme la Chambre ne fait rien, ils seraient mieux de chercher d'autres moyens d'exercer leurs droits démocratiques. Malheureusement, bien des gens sont devenus tellement indifférents qu'ils ne participent plus du tout.
La présente situation est due en partie au code de conduite tacite qui existe à la Chambre, qui récompense le zèle partisan plutôt que l'objectivité et qui laisse entendre que, si les idées, l'objectivité et la formation professionnelle de quelqu'un vont à l'encontre du leadership, elles doivent être étouffées et la personne doit faire aveuglément ce qu'on lui dit. C'est aussi un code de conduite qui spécifie qu'il faut suivre aveuglément le leadership du parti. C'est un code qui exclut les informations venant d'autres sources à l'extérieur lorsqu'elles sont contraires aux dires de la direction du parti.
Ce n'est pas loyal. Notre système récompense tout naturellement ceux qui peuvent détruire l'autre côté. En fait, le rôle de l'opposition, c'est de veiller à ce que le gouvernement reste vigilant; c'est d'être le critique le plus exigeant possible à l'égard du gouvernement. Cependant, ce rôle ne devrait pas empêcher les députés de tous les partis de tenir des discussions constructives et positives dans le meilleur intérêt des gens du pays.
Si nous ne pouvons utiliser l'intelligence que Dieu nous a donnée, si nous ne pouvons profiter des meilleures idées des citoyens de notre pays, si nous ne pouvons stimuler les gens et les inciter à nous proposer leurs idées sur la façon de faire du Canada la meilleure nation du monde en sachant qu'on y donnera suite, alors à quoi servons-nous?
On ne peut le faire maintenant. Notre magnifique pays se fissure. On parle de l'aliénation de l'Ouest. On parle de la désaffection de l'Ouest, qui est bien connue, mais qui n'est pas la seule aliénation au pays. Il y a aussi l'aliénation de l'Est. Les gens des Maritimes soutiennent que ce qui se passe à Ottawa les concerne bien peu. Ils se sentent abandonnés.
Il y a l'aliénation des ruraux. Il existe, entre les villes et les régions rurales, une fracture dont on ne parle pas et qui n'a pas été analysée adéquatement. L'aliénation des régions rurales est bien réelle. On oublie bien des gens qui forment l'armature économique de notre pays. À cause de l'insuffisance des services de santé, du manque de ressources et d'une infrastructure lamentable—autant de cadeaux du gouvernement—, les gens sont démotivés et dégoûtés et éprouvent une profonde antipathie envers le gouvernement fédéral.
Des autochtones se sentent également laissés de côté. De nombreuses collectivités autochtones connaissent les pires conditions sociales qui soient dans notre pays. Cela dure depuis bien trop longtemps.
Mon parti a été accusé à tort d'être contre les autochtones ordinaires. Nous sommes le seul parti qui a donné aux autochtones ordinaires une voix à la Chambre. Nous ne voulons pas tant nous porter à la défense des dirigeants autochtones que veiller à ce que les voeux, les espoirs et les craintes des autochtones puissent être exprimés à la Chambre avec le plus d'éloquence et de conviction possible. Nous avons essayé d'être leurs porte-parole à maintes reprises.
M. Werner Schmidt: Nous continuerons de la faire.
M. Keith Martin: Comme l'a dit mon collègue, nous continuerons de le faire.
Il y a aussi un sentiment de désaffection chez les francophones. C'est en partie parce que, par le passé, les communications avec le Québec ont été catastrophiques. Il y a une désaffection bien normale chez les Québécois et les francophones du reste du pays, car nous ne les avons pas écoutés. Allez au-delà des premières apparences, et vous trouverez chez bien des séparatistes des préoccupations très réelles, une volonté bien réelle de réformer le Canada pour que tous s'y sentent mieux.
C'est à tout cela qu'il faut être attentif et c'est de tout cela que nous devons nous occuper. Ce n'est pas bien compliqué. Le gouvernement doit écouter ce que disent ces gens, aller les voir dans leur région, chez eux, dans leurs localités, écouter ce qu'ils ont à dire, leur demander ce qu'ils ont à dire. Le gouvernement constatera à sa grande surprise que beaucoup de collectivités disent exactement la même chose.
Je ne souscris pas à la notion selon laquelle il y aurait divers types de Canadiens. Nous n'avons pas des Homo sapiens Britannocolombiensis, des Homo sapiens Maritimiensis et des Homo sapiens Ontarioensis. Il y a un type de Canadien et un Canada. Qu'ils soient des gens de l'Ouest, des Ontariens, des gens des Prairies ou des Maritimes, des autochtones, des non-autochtones, des immigrants, des non-immigrants, des ruraux ou des citadins, et où qu'ils vivent au pays, les Canadiens ont les mêmes espoirs et les mêmes craintes.
Ils veulent un emploi et des rues sûres. Ils souhaitent de bons soins de santé. Ils veulent pouvoir compter sur des programmes sociaux lorsqu'ils en ont besoin. Ils veulent s'assurer qu'on s'occupe des gens les plus défavorisés dans notre collectivité. Ils veulent que l'avenir de leurs enfants soit meilleur que ce qu'ils ont eu.
Si le gouvernement voulait se pencher sur les problèmes et les préoccupations des gens du pays de façon directe, il serait réélu sans cesse. Cependant, il existe un vide politique que nous essayons de combler. Mon parti essaie de forcer le gouvernement à dire aux Canadiens qu'il peut faire mieux.
Pourquoi accepter un dollar valant 66 cents? Pourquoi accepter un taux de chômage supérieur à celui qu'on retrouve aux États-Unis? Pourquoi acceptons-nous un taux d'imposition qui est si élevé par rapport à ce qu'on retrouve chez nos voisins du Sud qu'il incite nos gens les plus brillants à quitter le pays?
Pourquoi acceptons-nous des normes d'enseignement, notamment au niveau postsecondaire, qui sont inférieures à celles de nos concurrents? Pourquoi acceptons-nous des normes environnementales qui ne sont pas respectées? Pourquoi acceptons-nous que des collectivités autochtones vivent dans des conditions sociales qui ressemblent à ce qu'on retrouve dans le tiers monde? Pourquoi acceptons-nous d'attendre trois années et demie pour voir un chirurgien orthopédiste? Pourquoi nous contentons-nous de soins de santé qui se rapprochent de ceux des pays socialistes? Pourquoi acceptons-nous que nos gens les plus brillants quittent le pays?
Nous ne devrions pas accepter et nous n'acceptons pas le niveau de médiocrité que le gouvernement essaie de faire avaler aux Canadiens, sans y parvenir. Nous pouvons aspirer à beaucoup plus. Cela n'a rien de compliqué. Il existe au Canada des solutions efficaces et constructives qu'il nous faut appliquer rapidement et efficacement pour résoudre ces problèmes. Ce faisant, nous pourrons aspirer à plus que ce que nous avons actuellement et édifier un pays qui sera garant d'un meilleur avenir pour tous les Canadiens, et en particulier pour nos enfants.
Quelles sont les mesures que nous pouvons prendre? De nombreux députés de mon caucus ont proposé des solutions constructives. Notre leader à la Chambre en a aussi proposé un grand nombre. Mes collègues de la Colombie-Britannique et de l'Alberta et des députés de toutes les allégeances ont proposé des solutions constructives, dans certains cas depuis de nombreuses années.
Nous nous sommes notamment battus pour la tenue de votes libres à la Chambre des communes, et je veux parler ici de véritables votes libres. Aucun projet de loi ne peut faire l'objet d'un vote de confiance à l'endroit du gouvernement. Si un projet de loi est rejeté parce qu'il laissait à désirer, il faut le renvoyer à un comité et l'améliorer.
Nous pouvons aussi réformer la structure des comités. Pourquoi avons-nous des structures de comités qui créent artificiellement du travail pour les députés? Faisons en sorte que les comités aient davantage leur mot à dire. Donnons-leur plus de souplesse dans leur étude. Laissons-les examiner les grands problèmes de notre pays. Ne laissons pas les secrétaires parlementaires se comporter comme de petits whips en obligeant les députés du parti ministériel à voter d'une certaine manière. Tenons des votes secrets pour élire les présidents de comité; de cette manière, c'est la personne la plus compétente, quelle que soit son affiliation politique, qui pourra présider les travaux du comité, et celui-ci sera le plus efficace possible.
Élargissons les initiatives parlementaires. La population sera peut-être surprise d'apprendre que la seule façon pour un député de présenter un projet de loi d'initiative parlementaire, c'est carrément en participant à une loterie. Le nom d'un député est tiré au sort. Si quelqu'un a la chance de voir son nom tiré, son projet de loi sera examiné par un comité qui décidera s'il peut ou non faire l'objet d'un vote.
À ma connaissance, aucune autre démocratie au monde ne permet que des projets de loi d'initiative parlementaire soient présentés mais sans qu'ils puissent faire l'objet d'un vote. Un projet de loi d'initiative parlementaire ne pouvant faire l'objet d'un vote! Quelle contradiction dans les termes! Pourquoi se donner la peine de présenter un projet de loi d'initiative parlementaire s'il ne peut jamais être adopté? C'est une perte de temps.
Les Canadiens voudront peut-être se demander aussi pourquoi le gouvernement a réduit les possibilités et les pouvoirs juridiques dont nous avons besoin pour rédiger nos projets de loi d'initiative parlementaire. Il les a réduits considérablement. On nous enlève des avocats, qui nous sont pourtant essentiels pour rédiger nos projets de loi d'initiative parlementaire.
À un moment donné, il y avait seulement trois avocats pour 225 députés. Et pourtant, le Cabinet avait plus de 70 juristes à sa disposition. C'était une façon sournoise, mais efficace d'empêcher les députés de tous les partis de présenter des projets de loi au nom de leurs électeurs.
On devrait nous donner davantage de juristes pour rédiger nos projets de loi d'initiative parlementaire! On devrait prolonger, de deux heures le vendredi et d'une heure le lundi, la période réservée aux initiatives parlementaires! On devrait s'assurer que tous les députés aient au moins un projet de loi à présenter!
Le temps mis à ma disposition tire à sa fin. J'implore le gouvernement de démocratiser la Chambre, dans l'intérêt de tous ici, mais surtout dans l'intérêt de notre pays. Si nous ne démocratisons pas la Chambre, nous ne mériterons pas le respect des Canadiens, car la Chambre ne sera qu'une dictature qui empêchera le Canada d'être le meilleur pays possible. Il faut le faire dès maintenant. Tous les partis sont d'accord. Si nous ne le faisons pas tout de suite, nous ne mériterons pas le respect que nous devrions avoir.
M. Geoff Regan (Halifax-Ouest, Lib.): Madame la Présidente, je partagerai mon temps de parole avec le député de Charleswood—St. James—Assiniboia.
La motion dont nous avons été saisis aujourd'hui réitère le pouvoir traditionnel de la présidence de ne pas choisir, pour le débat de l'étape du rapport, des motions à caractère répétitif, frivole ou abusif. Cela n'est pas une mesure aussi dramatique ou inhabituelle, il me semble. Revoyons la teneur de la motion.
Il est entendu que l'Orateur ne choisit pas, pour la tenue d'un débat, une motion ou une série de motions à caractère répétitif, frivole ou abusif ou de nature à prolonger inutilement les délibérations à l'étape du rapport. Dans l'exercice de son pouvoir de choisir les motions, l'Orateur s'inspire de la pratique de la Chambre des communes du Royaume-Uni.
Que faisons-nous? Nous revenons au système que nous utilisions avant. Nous revenons au système qui est utilisé au premier Parlement de tous, celui du R.-U. Ce n'est pas un changement radical. Nous revenons à l'objet initial du Règlement que nous observons maintenant.
Fait intéressant, c'est le même concept de base qu'observent des milliers d'organisations communautaires de tout le pays qui s'appuient sur un livre de procédure bien connu, le Robert's Rules of Order. Je vais lire un extrait de cet ouvrage qui traite des motions dilatoires, absurdes ou frivoles. L'objet de ce règlement, qui est utilisé dans tout le pays par un si grand nombre d'organisations, est assez semblable à celui de la motion d'aujourd'hui. Voici: L'article dit:
«si la présidence est persuadée que les députés se servent de formules parlementaires dans le seul but de faire de l'obstruction, elle doit s'abstenir de leur donner la parole, ou encore déclarer leur intervention irrecevable. Quand sa décision est maintenue après un rappel au Règlement, la présidence ne doit pas accepter d'entendre un autre rappel au Règlement qui serait présenté par les mêmes députés obstructionnistes, si ces derniers s'emploient par ce moyen à freiner la progression des travaux. La présidence doit toujours faire preuve de courtoisie et se montrer équitable, certes, mais elle doit néanmoins protéger avec fermeté l'assemblée contre toute motion qui, bien qu'elle soit présentée en stricte conformité avec l'ensemble des règles de la procédure parlementaire sauf celle-ci, est susceptible d'être une motion dilatoire, absurde ou frivole, et donc inadmissible.
À titre d'exemple d'une motion frivole ou absurde, supposons que M. A. a l'intention de descendre en ville la semaine prochaine et qu'il a été proposé par voie de motion de l'inviter à prendre la parole à la prochaine réunion de l'assemblée, ces réunions étant hebdomadaires. Si une motion proposait de soumettre la question à un comité qui recevrait pour instruction de faire rapport à la réunion régulière suivante, la présidence devrait déclarer cette motion irrecevable au motif qu'elle est frivole ou absurde.
C'est la règle qui est observée dans toutes les organisations démocratiques d'un bout à l'autre du pays. Nous retenons essentiellement le même principe, pratiquement mot pour mot.
Les députés d'en face en sont choqués et prétendent que cela limitera les débats importants. Est-il important que nous votions des heures durant sur la question de savoir s'il convient ou non de mettre une virgule après chacun des mots du projet de loi, ou si l'étude du projet de loi ne devrait pas être retardée de six mois, ou si ce projet de loi ne devrait pas être réexaminé article par article? De telles motions ridicules n'ont pas pour objet de modifier le fond du projet de loi, mais simplement de faire perdre du temps à la Chambre. Ce n'est assurément pas pour cette raison que nous avons été élus.
Durant la dernière législature, les députés ont dû voter pendant des heures sur des motions à l'étape du rapport à cause d'une faille dans le Règlement.
En décembre 1999, il y a eu plus de 42 heures ininterrompues de votes sur 469 motions visant à modifier le projet de loi sur les Nisga'as à l'étape du rapport. Ces motions visaient-elles vraiment à améliorer le projet de loi ou à y apporter des changements importants? Non. La grande majorité de ces motions étaient des motions à caractère abusif, répétitif et frivole.
En mars 2000, la Chambre a passé 36 heures à voter sur 411 amendements visant à modifier le projet de loi sur la clarté à l'étape du rapport. Encore une fois, il s'agissait de motions à caractère frivole, abusif et répétitif.
En septembre 2000, l'automne dernier, plus de 3 000 amendements visant à modifier le projet de loi sur le système de justice pour les jeunes avaient été présentés à l'étape du rapport. Il aurait fallu deux semaines ou plus pour voter sur ces amendements, et ce, sans arrêt. Les députés auraient dû passer deux semaines à la Chambre à se lever et à s'asseoir à tour de rôle, nuit et jour, pour voter sur toutes sortes d'amendements ridicules.
Les gens de ma circonscription ne toléreront pas cela. Je ne peux pas imaginer que les députés d'en face puissent s'attendre à ce que leurs électeurs tolèrent cela non plus. Nous prenons déjà assez de temps à nous lever et à nous asseoir à tour de rôle pour voter. C'est bien que le gouvernement examine l'idée d'introduire le vote électronique à la Chambre pour essayer de rationaliser le processus des votes. Parfois, cela n'en finit plus. Les votes pourraient se faire de façon beaucoup plus efficiente et nous pourrions employer notre temps à faire des choses beaucoup plus utiles.
J'ai mentionné le projet de loi sur le système de justice pour les jeunes. Je veux parler de certaines de ces motions. Les motions nos 2 646 à 3 029, presque 400 motions proposées par 44 députés seulement, visaient à changer la date d'entrée en vigueur des dispositions de la loi. Par exemple, les motions nos 2 654 et 2 655, au nom du même député, proposaient deux dates d'entrée en vigueur différentes pour le même article de la loi. Les motions d'un autre député, les nos 2 657 et 2 658, proposaient une date d'entrée en vigueur différente pour le même article de la loi. Les motions nos 2 327 à 2 418, soit presque 100 motions, portaient sur la durée d'un période mentionnée dans une disposition, de 691 jours à 792 jours, soit un jour de plus dans chaque motion.
Un député, qui n'a pas été réélu, M. Turp, proposait des durées différentes pour les mêmes dispositions. Encore là, ces motions étaient frivoles, vexatoires, répétitives et ridicules et faisaient perdre le temps de la Chambre et l'argent des contribuables.
Les motions nos 3 030 à 3 133, présentées par seulement 44 députés, incluaient plus de 100 amendements qui obligeaient la tenue d'un examen de différentes dispositions de la loi.
Quel était le but visé sinon retarder les choses, faire de l'obstruction, créer des problèmes, gaspiller l'argent des contribuables, faire perdre le temps des députés et de la Chambre? Le coût de ces abus est tout à fait inacceptable pour les Canadiens qui nous ont élus pour discuter des projets de loi, pas pour passer des journées entières à voter sur des amendements frivoles, répétitifs et vexatoires.
Les Canadiens de ma circonscription et de tout le pays ne se préoccupent pas de savoir s'il y a 10 virgules ou deux dans une phrase. Ils s'inquiètent de questions comme les soins de santé, les impôts qu'ils paient et la croissance économique du Canada.
Les préoccupations que j'ai entendues pendant la campagne électorale dans Halifax-Ouest avaient trait au fait que cette circonscription est la région qui croît le plus rapidement dans le Canada atlantique. Nous n'avons cependant pas l'infrastructure pour soutenir la croissance à laquelle nous avons assisté ces 20 dernières années. Nous n'avons pas les nouvelles écoles dont nous avons besoin. Nos enfants sont dans des écoles surpeuplées et les vieilles écoles tombent en ruine. Il faut investir dans de nouvelles écoles.
Ils s'inquiètent du manque de routes dans la circonscription de Halifax-Ouest et de l'urgence de construire de nouvelles routes en appui à ce secteur en croissance. Ils se préoccupent de la nécessité de construire des installations de loisir et du gaspillage que l'on fait de l'argent des contribuables. La dernière chose qu'ils veulent, c'est de voir les députés gaspiller 8 000 $ de l'heure pour passer des nuits entières à voter sur des motions ridicules. C'est la dernière chose qu'ils veulent.
Ils veulent que nous travaillions. Ils veulent que nous examinions comment les ministères dépensent leur budget et que nous essayions d'améliorer leur façon de faire. Ils veulent que nous aidions le gouvernement à mieux travailler. C'est la raison pour laquelle nous sommes ici. Occupons-nous de ce que les ministères et les agences gouvernementales font et essayons d'en améliorer le fonctionnement. Dieu sait qu'il y a place à l'amélioration.
Il y a de nombreux détails que nous devons étudier, dans le cadre de notre travail de chiens de garde, pour forcer les ministères à mieux faire leur travail pour le public. Cela fait très certainement partie de nos fonctions. Nous ne sommes pas ici pour passer des grandes soirées à voter sur des motions ridicules, ce qui nous fatigue et nous empêche de faire notre travail le lendemain ou une fois ces mesures terminées.
C'est un coût inacceptable pour les contribuables qui doivent payer des centaines de milliers de dollars en heures supplémentaires aux employés de la Chambre des communes qui doivent rester après les heures lorsqu'il y a des votes qui se poursuivent tout au cours de la nuit.
C'est aussi inacceptable pour les employés de la Chambre des communes qui doivent faire des heures supplémentaires. Cela peut leur causer des ennuis de santé.
Nous devrions nous pencher sur les répercussions que tout cela peut avoir sur les institutions parlementaires. Le fait de se lancer dans des activités futiles qui n'ont rien de constructif ou de concret ne fait que déprécier le Parlement aux yeux du public.
Je sais bien que les députés d'en face aiment soulever des sujets qui leur permettent de discuter de toutes sortes de questions qui les préoccupent. Je comprends cela, mais à mon avis, ce n'est pas en passant la nuit à voter que nous arriverons à régler les préoccupations de leurs électeurs ou des miens. Nous sommes certainement tous en mesure de comprendre que l'adoption de cette motion rendra le Parlement plus efficace et nous aidera à faire notre travail.
M. John Harvard (Charleswood St. James—Assiniboia, Lib.): Madame la Présidente, je tiens premièrement à remercier mon collègue de Halifax-Ouest de me permettre de prendre part au débat en partageant son temps de parole.
En premier lieu, je veux faire savoir très clairement que je crois sincèrement que tous les partis de l'opposition, et pas seulement le parti de l'opposition officielle, jouent un rôle très important à la Chambre et au Parlement. Leur rôle est tout aussi important que le nôtre, c'est-à-dire celui du gouvernement.
M. Leon Benoit: C'est le premier ministre qui mène le bal. Si vous n'étiez pas là, quelle différence cela ferait-il?
M. John Harvard: Nous avons besoin que chacun, dans la mesure du possible et si nous pouvons changer nos règles et les améliorer, peut-être pourrions-nous...
Des voix: Oh, oh!
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Je suis certaine que nous voulons tous, à cette heure, entendre ce que le député a à dire. Je lui demande donc de poursuivre.
M. John Harvard: Je vous remercie, madame la Présidente. J'espère que cette interruption ne sera pas retranchée de mon temps de parole.
Ce qui vient de se produire est très instructif. J'ai amorcé mon intervention en essayant d'être positif et flatteur envers l'opposition. L'opposition joue en effet un rôle important. Elle est tout aussi importante que le gouvernement.
Pourtant, le député de l'Alberta a immédiatement prétendu que le premier ministre contrôle chaque parole qui est prononcée à la Chambre, ce qui est tout à fait hors de propos, en particulier dans ce débat et étant donné la motion dont nous sommes saisis.
J'ai écouté très attentivement le député d'Esquimalt—Juan de Fuca il y a quelques minutes. Il est un des députés les plus respectés à la Chambre. Quand il parle, j'aime l'écouter. Le député a, je dirai, fait un excellent discours, mais rien de ce qu'il a dit n'a rapport avec la motion dont la Chambre est saisie.
Je vais donner un exemple. Je pense qu'on va comprendre. Que débattons-nous ce soir? Nous débattons d'une modification du Règlement visant à éviter les motions futiles et contrariantes qui ont été proposées ces dernières années à l'étape du rapport. C'est très légitime.
J'aimerais que les députés de l'opposition se concentrent dans leurs remarques sur la motion dont nous sommes saisis. Or, qu'a dit le député d'Esquimalt—Juan de Fuca? J'ai pris des notes. Il nous a parlé de la soi-disant dictature qu'exercerait le premier ministre. Je ne vois pas quel est le rapport avec la motion dont nous sommes saisis. Il a parlé de rendre les députés impuissants. Je ne vois pas ce que cela a à voir avec la motion. Il a parlé de la valeur du dollar, du niveau du chômage, des soins de santé au Canada et des autochtones. Il a même parlé des motions qui ne faisaient pas l'objet d'un vote.
Peut-être ses remarques seraient-elle appropriées et feraient-elles du sens dans un autre contexte, dans le cadre d'un autre débat, mais ce n'est pas ce dont nous débattons ici. Nous débattons ici d'une motion qui modifierait le Règlement de la Chambre pour éviter la proposition de motions futiles, complètement dénuées de sens à l'étape du rapport.
Une voix: Donnez-nous des exemples.
M. John Harvard: Des exemples? Les meilleurs exemples sont les motions dont l'auteur proposait de changer un point par une virgule ou une virgule par un point, ou bien, comme le député de Halifax-Ouest l'a mentionné il y a quelques minutes, le cas où un député a proposé à l'étape du rapport une centaine de motions concernant la date d'entrée en vigueur du projet de loi. Voilà des motions à caractère frivole, et on ne devrait pas tolérer pareille chose.
Un des intervenants—je ne sais pas si c'était le député d'Esquimalt—Juan de Fuca—a dit que la motion dont nous sommes saisis accroîtrait le pouvoir du premier ministre et aggraverait sa dictature. La motion n'a absolument rien à voir avec le premier ministre. En fait, s'il est quelqu'un qui en tirera un pouvoir accru, c'est le Président de la Chambre. Nous nous en remettons en effet au Président élu pour prendre des décisions à l'égard des motions à caractère frivole ou abusif. Cela n'a absolument rien à voir avec le premier ministre, absolument rien, mais voilà le genre d'accusation à laquelle nous faisons face.
Si nous tenons ce genre de débat, c'est notamment à cause du genre de culture absurde qui règne à la Chambre. L'opposition estime devoir critiquer tout ce que propose le gouvernement. D'une façon ou d'une autre, selon cette culture, tout ce que fait ou propose le gouvernement doit être mauvais. En fait, si le gouvernement fait quelque chose qui paraît désagréable ne serait-ce qu'à un seul Canadien, c'est automatique, on nous accuse de ne pas écouter. C'est l'accusation la plus courante que l'on puisse entendre.
Nous pourrions aller consulter 30 millions de Canadiens et trouver une opinion favorable chez 70 ou 80 p. 100 d'entre eux. Devinez ce qui arrivera: l'opposition nous accusera de ne pas écouter la population, d'être totalement irresponsables sinon même probablement idiots. Voilà le genre de culture qui règne ici.
Nous tâchons, dans une très modeste mesure, d'améliorer notre travail, pas seulement celui des députés d'opposition mais aussi des députés ministériels. Je propose que dans le cadre d'un débat comme celui que nous avons maintenant, nous nous en tenions à la motion dont nous sommes saisis au lieu de nous perdre dans les méandres d'une discussion qui donne lieu à toutes sortes d'allégations et d'accusations.
Il y a quelques années, on m'a raconté une anecdote au sujet d'un débat tenu à la Chambre probablement 40 ou 50 ans plus tôt. C'était un débat sur le blé. Un député s'était levé. Je connais son nom, mais je ne le dirai pas. À l'époque, il paraît que les députés avaient la parole pendant 40 minutes. Le député s'était donc levé pour parler du blé pendant 40 minutes sans jamais utiliser, ne serait-ce qu'une fois, le mot blé.
Je relate cette anecdote pour la raison suivante. J'estime que le député de Esquimalt—Juan de Fuca est l'un des meilleurs à la Chambre, mais quand il intervient au sujet des motions frivoles dont nous ne manquons jamais d'être saisis à l'étape du rapport et qu'il se met à parler de la valeur du dollar, des soins de santé, des autochtones et de l'emploi, je ne comprends pas comment il fait avancer le débat.
Je crois qu'un resserrement des règles inciterait tous les députés à se montrer plus responsables. Je pense que les députés de ce côté-ci de la Chambre ont la fâcheuse habitude de faire des digressions farfelues.
Des voix: Oh, oh!
M. John Harvard: Oui, cela arrive parfois. Oui, nous sommes humains et nous commettons ce genre d'erreurs. Peut-être devrions-nous avoir des règles plus strictes nous obligeant à mieux travailler et à nous occuper de la question qui nous est soumise.
J'espère que les Canadiens qui suivent le débat comprennent de quoi il retourne. Il s'agit de modifier les modalités de fonctionnement à la Chambre pour éviter la présentation de motions frivoles et ridicules à l'étape du rapport.
Pensez-y, plus de 400 amendements au projet de loi sur les Nisga'a ont été proposés en 1999. Nous avons consacré 42 heures à 469 motions présentées à l'étape du rapport. Un an plus tard, en l'an 2000, nous avons consacré 36 heures à voter sur 411 motions à l'étape du rapport. Cela n'a pas de sens. C'est ridicule.
Nous essayons de mettre de l'ordre là-dedans. Oublions ces propos ridicules laissant entendre qu'il s'agit d'une dictature, que nous n'avons pas la situation en main et que nous ne sommes pas responsables. Je crois que nous sommes responsables et que la motion que nous proposons mérite l'appui de tous les députés.
M. Werner Schmidt (Kelowna, Alliance canadienne): Madame la Présidente, c'est pour moi un honneur et un privilège d'intervenir dans ce débat, car je crois que nous discutons probablement ici d'un des éléments les plus importants à avoir été abordé à la Chambre depuis un bon bout de temps. Il s'agit de la réforme parlementaire.
Je veux revenir en particulier sur la citation du député de Winnipeg-Sud. Il l'aurait tirée d'une affiche qu'il aurait vue. Voici à peu près ce qu'il a dit: «Pour chaque problème complexe, il existe une solution simple.» C'est faux.
À mon avis, la réforme parlementaire correspond à un problème très complexe. Ce n'est pas quelque chose qui va être résolu de manière simple. Il faudra examiner en profondeur bon nombre de choses et je crois que le député de Winnipeg-Sud l'a dit. C'est un problème compliqué.
Je voulais lui poser une question mais, malheureusement, le règlement de la Chambre ne m'y autorise pas. La question que j'allais lui poser est la suivante: n'est-ce pas une solution très simple à une question très complexe? C'est ce qu'il me semble.
Il est très bien que le Président ait le droit d'écarter les amendements vexatoires et frivoles. Cela ne fait pas problème. Nous sommes d'accord.
Cependant, il y a une difficulté et c'est pourquoi l'Alliance canadienne a présenté un amendement. Le voici:
Qu'il soit en outre entendu que l'Orateur peut choisir, pour la tenue d'un débat, toutes les motions, peu importe leur caractère, s'il juge que la majorité a empiété de quelque façon que ce soit sur les droits de la minorité.
Voilà le coeur du problème. Le Parlement est là pour donner une voix aux Canadiens.
Je constate que le député de Winnipeg-Sud est de retour à la Chambre, et il est agréable de le voir faire oui de la tête.
C'est notre rôle. Il faut que le Parlement soit en prise sur la réalité des Canadiens. Un certain nombre de députés ont dit cet après-midi que, pour bien des gens, le Parlement ne rimait plus à rien. C'est une lourde condamnation pour tous les députés. Nous devrions pouvoir mener nos débats de façon qu'ils intéressent à peu près tout le monde au Canada, que nous soyons dans l'opposition ou du côté du gouvernement.
Je vais formuler mes observations en conséquence. Je vais parler du ministre des Finances. Il n'y a pas très longtemps le ministre a fait un certain commentaire au cours d'une intervention. Je vais lire textuellement le paragraphe en question. Le ministre des Finances a déclaré:
Nous avons discuté du rôle du Parlement, de la consécration des valeurs de notre pays et de la façon dont le Parlement réagit aux changements, ce qui est un débat vide de sens, à moins qu'il ne reconnaisse le rôle des parlementaires, en l'occurrence les 301 députés qui siègent actuellement à la Chambre des communes... Les députés doivent avoir l'occasion de vraiment représenter leurs électeurs et d'exprimer leurs idées en leur âme et conscience.
Je ne saurais mieux dire. C'est là une magnifique déclaration de la part d'un très honorable représentant qui occupe un poste très important et plein de responsabilités au gouvernement. Je l'admire vraiment d'avoir dit cela.
La question est de savoir si ce genre de motion donne aux parlementaires davantage voix au chapitre. Ce sera le cas s'il n'y a pas de motions vexatoires.
S'il y a des motions que certains qualifient de frivoles et de vexatoires, c'est notamment parce que les parlementaires éprouvent un sentiment de frustration. Ils ne peuvent pas s'exprimer autant qu'ils le voudraient. Ils ne peuvent pas être les porte-parole de leurs électeurs. Ils ne peuvent pas voter dans l'intérêt de leurs électeurs. Pourquoi? Les députés d'en face ne savent que trop bien ce que je veux dire.
Je tiens à revenir sur la position du premier ministre. Le premier ministre a dit ceci à la Chambre: «Je suis un député ordinaire qui défend les intérêts de ses électeurs.» Un premier ministre n'est pas un député ordinaire. Le premier ministre est une personne très spéciale avec des pouvoirs uniques. Le premier ministre a le pouvoir de nommer des juges de la Cour suprême, des sénateurs et tous les ministres d'État. Le premier ministre a également le droit d'annuler ces nominations. Il peut déplacer des postes. Il n'est pas un député ordinaire.
À certaines occasions, le premier ministre exerce sur les députés certains pouvoirs qui les empêchent d'assumer la responsabilité de représenter leurs circonscriptions.
Je me rappelle très clairement le vote qui a eu lieu à la Chambre au sujet de l'indemnisation des victimes de l'hépatite C. Tous les députés savent sûrement qu'il y a, en face, des gens qui ont voté contre cette proposition pour laquelle ils s'étaient battus et dont ils savaient qu'elle était la chose convenable à faire. Pourquoi ont-ils agi ainsi? Parce qu'on leur a dit qu'ils devaient respecter la ligne de parti. C'est répréhensible. C'est un déni des principes démocratiques de la Chambre. C'est ce que nous décrions.
Si un tel sentiment de frustration n'existait pas, il serait inutile de présenter toutes sortes de motions frivoles et abusives. Ces motions témoignent d'une autre chose qui ne va pas. Nous ne pouvons pas régler un problème complexe en changeant un petit aspect et en pensant que tous les autres aspects vont disparaître. Ils ne disparaîtront pas. Les problèmes sont inhérents au système. Il faut modifier le système.
Il faut que le premier ministre rende des comptes au Parlement. Nous avons été témoins d'un exemple très récemment, en cette trente-septième législature. On avait promis aux Canadiens, dans le livre rouge, qu'un conseiller en éthique serait nommé par le Parlement et qu'il relèverait de ce dernier. Le premier ministre lui-même avait dit que c'est ce qui se ferait.
Quand est venu le temps de voter à la Chambre des communes pour donner effet à cette promesse et la mettre en oeuvre, qu'a fait le premier ministre? Il a déclaré que son parti voterait contre cette motion, empêchant ainsi le conseiller en éthique de devenir vraiment quelqu'un d'impartial et d'objectif, capable d'évaluer ce que le premier ministre faisait et ce que d'autres ministres pourraient faire.
Voilà ce qui nous frustre. Voilà pourquoi les parlementaires sont incapables d'accomplir la tâche pour laquelle ils ont été élus. L'affaire est grave.
J'aimerais aborder un autre point. Je cite ici une étude effectuée à l'université Queen's. Je suis convaincu que certains députés d'en face connaissent très bien cette institution de grand savoir que je respecte.
M. Reg Alcock: Vous êtes bien trop intelligent.
M. Werner Schmidt: Je m'adresse tout particulièrement au député de Winnipeg-Sud, car il comprend très bien cette université. Il connaît probablement de nombreux professeurs qui enseignent à cet endroit. Je me reporte donc à l'étude intitulée «Searching for Good Governance». Je citerai quelques paragraphes de cette étude. En 1994, Bill Stanbury a conclu que le système actuel de gouvernement de cabinet était gravement défaillant quant à une de ses vertus les plus évoquées, à savoir la reddition de comptes.
C'est exactement ce dont nous venons de parler. L'enjeu en l'occurrence est l'obligation de rendre compte. Ce ne sont pas des motions à caractère frivole ou abusif qui nous sont présentées. Ce sont les sous-produits d'un problème bien plus grave, celui de la reddition de comptes.
M. Stanbury a ajouté ceci: «Il y a peu d'informations utiles qui sont divulguées et qui permettraient aux électeurs de bien évaluer le rendement du gouvernement. La capacité du Parlement et des électeurs d'exiger des comptes du Cabinet et du reste du pouvoir exécutif est extrêmement limitée.»
C'est justement de cela dont il est question aujourd'hui et c'est très important. C'est de l'obligation de rendre compte du Parlement, du premier ministre et des ministres dont il est question. L'auteur a aussi fait valoir qu'entre deux élections, un gouvernement majoritaire n'a finalement comme limites que celles qu'il s'impose volontairement, qu'une forme d'autodiscipline.
Comme on le sait, l'autodiscipline dont il est ici question n'est ni plus ni moins que l'autodiscipline du premier ministre, car c'est le cabinet du premier ministre qui détermine ce qui va arriver ou non. M. Stanbury dit encore: «Le gouvernement contrôle souvent les moyens de surveillance du rendement. Il contrôle dans une large mesure la quantité, la qualité et le type d'information disponible. Il est peu probable qu'il avoue une absence de rendement et il fera tout son possible pour dissimuler un rendement insatisfaisant.»
Dans son ouvrage intitulé Checks Unbalanced: The quiet Side of Public Spending, Herman Leonard a écrit ceci:«Les peuples civilisés se donnent beaucoup de mal pour éviter des nouvelles déplaisantes et des sentiments désagréables, mais lorsque nous esquivons et embrouillons les questions relevant des affaires publiques, nous en subissons tous les conséquences. Une personne civilisée aura tendance à détourner le regard. Le désir de certains de faire des cachotteries et le fait que d'autres tolèrent ces cachotteries dans le domaine des affaires publiques est tout à fait contraire à l'éthique de notre société. Le principe directeur fondamental de la société c'est de gouverner avec le consentement éclairé des gouvernés.»
C'est là une réflexion importante que nous devons absolument comprendre. Cette idée est au coeur même du débat d'aujourd'hui. Nous faisons en sorte que le Parlement soit efficace, de manière à ce que chaque Canadien puisse dire que c'est un endroit où leur représentant peut expliquer ce que les gens souhaitent voir accompli de manière démocratique. Il est vrai que les élus adopteront une position qui s'inspire de celle de la majorité, mais les gens veulent pouvoir être entendus à cet endroit.
C'est justement ce que fait valoir M. Leonard. Il dit que, si l'information n'est pas fournie ou qu'elle est camouflée ou dénaturée d'une certaine façon, les électeurs ne sont plus en mesure de décider de manière éclairée qui pourra les représenter. C'est de cela dont il est question.
Il passe ensuite à la reddition de comptes. Cela est probablement encore plus lourd de sens que tout ce que j'ai dit jusqu'à maintenant. Les auteurs de cette étude ont conclu que:
La plus grande en partie de l'attention que les médias consacrent à l'obligation de rendre compte concerne la présentation du déficit dans le budget des dépenses par le ministre des Finances.
Le ministre des Finances ne présentera pas de budget ce mois-ci, mais tout le reste s'applique. Il est maintenant une pratique bien établie que les médias portent surtout attention à la dernière ligne du budget présenté par le ministre. Le ministre peut, à cette occasion, manipuler les chiffres de manière à les présenter sous un jour meilleur.
On peut lire dans l'étude:
Par exemple, les dépenses peuvent être transférées hors budget à un organisme indépendant comme une société d'État ou sous forme de garantie de prêt, par opposition à une subvention directe, pour réduire le déficit inscrit dans les comptes publics. Les comptes peuvent même être présentés sous un jour encore plus mauvais afin de faire paraître plus spectaculaires les améliorations attendues. Il est bien connu que les nouveaux gouvernements ont tendance à attribuer la plus grande responsabilité des déficits aux gestionnaires politiques précédents.
Combien de fois avons-nous vu cela à la Chambre? Nous l'avons vu à maintes reprises.
Les auteurs de l'étude font également remarquer que le travail préliminaire réalisé par Postner souligne la nécessité d'un budget consolidé, d'un budget qui comprendrait une présentation unifiée de toutes les activités gouvernementales, y compris les activités générales du gouvernement, les activités des fonds en fiducie, comme le régime de pensions du secteur public, et les activités d'entreprises comme les sociétés d'État.
Si on procédait de cette façon, on mettrait en lumière l'ensemble de la situation financière du gouvernement et on ferait échec à la tentation de transférer des activités hors budget afin de dissimuler des informations politiquement embarrassantes.
Nous sommes ici au coeur du problème. Nous sommes incapables d'évaluer correctement si l'information qui se trouve dans les documents budgétaires donne une description exacte des dépenses du gouvernement et du montant de celles-ci. Nous ne le savons pas et nous ne pouvons pas le savoir parce que le système de comptabilité est tel qu'il ne fournit pas de données sur toutes les dépenses, certaines d'entre elles étant transférées hors budget. C'est une dette du gouvernement, il a dépensé l'argent, mais le montant n'est pas inscrit dans les documents budgétaires remis aux médias et aux Canadiens. Cela ne reflète pas correctement la situation financière réelle du gouvernement.
Voilà ce qui est au coeur de notre frustration. Nous avons beau réclamer des votes libres, parler du rôle des comités et des amendements, mais si nous ne réglons pas le problème fondamental qu'est la représentation de nos électeurs, de notre conscience de député, nous nions le principe fondamentale de la démocratie. C'est cela qu'il faut corriger.
Je voudrais ajouter une chose sur la réforme parlementaire. Nous devons d'abord reconnaître que nous sommes des Canadiens, que nous vivons dans une démocratie, une démocratie qui a résisté au temps, mais qui traverse une crise actuellement, une démocratie dont bien des gens soutiennent qu'elle n'est plus pertinente et qu'ils s'en moquent. C'est un bien triste constat. Il faut s'intéresser à la démocratie, parce que nous, comme tous les Canadiens, sommes assujettis à la loi rigide de la politique. Ceux qui décident de ne pas s'y intéresser sont immanquablement gouvernés par ceux qui décident de le faire.
Le temps est venu pour chacun de nous de mettre l'épaule à la roue, de faire valoir les principes d'une véritable démocratie où les gens sont élus selon leurs mérites, les programmes et la philosophie qu'ils préconisent, selon les politiques et les principes fondamentaux qu'ils défendent et qu'ils mettront en oeuvre quand on leur confiera le pouvoir. Ils sont élus parce que la population croit qu'ils vont tenir leurs promesses.
M. Dennis Mills: C'est la définition des libéraux.
M. Werner Schmidt: Monsieur le Président, le député dit que c'est la définition libérale. C'est faux. Je viens juste de donner un exemple qui montre clairement que les libéraux avaient promis de nommer un conseiller en éthique. Le conseiller devait être nommé par le Parlement et faire rapport au Parlement. Les libéraux ont refusé. Ils ont voté contre la motion. C'est ce qu'ont fait les libéraux.
Le conseiller en éthique aurait dû être nommé par le Parlement. Les libéraux auraient dû lui donner ce genre de pouvoir et, s'ils ne voulaient pas le faire à ce moment-là, ils devraient le faire maintenant. Il serait de loin préférable que le gouvernement ait présenté une motion de ce genre à la Chambre. Nous aurions tous pu appuyer une motion de ce genre, mais non cette motion qui ne va pas au fond de la question et qui traite de tâches secondaires. Ces autres questions sont la véritable source de mécontentement. Voilà ce dont il faut tenir compte.
J'ai parlé à plusieurs députés qui sont membres de divers comités et, qu'ils siègent de ce côté-ci de la Chambre ou dans les rangs ministériels, ils se demandent à quoi ils servent. Ils ont l'impression de perdre leur temps. Ils disent que le ministre leur dit sur quel projet de loi voter ou de quel projet de loi ils parleront. Ils ne peuvent pas proposer des amendements à tel ou tel projet de loi. Ils ne peuvent choisir les témoins. Dans une certaine mesure, il existe une certaine flexibilité mais, de façon générale, si le ministre ou le premier ministre refuse que certains témoins comparaissent, ces derniers ne comparaîtront pas, bien que la loi confère au comité le pouvoir d'assigner des gens à comparaître. Mais que se passe-t-il dans les faits? Rien.
Voilà où se trouve la source de mécontentement. Nous devons faire face à la réalité et donner aux parlementaires un rôle utile, à l'intérieur comme à l'extérieur des comités. Nous devons leur permettre de voter comme ils l'entendent et de réclamer les mesures qui s'imposent. Voilà ce qui répond à ce que les électeurs attendent d'eux. C'est là le coeur de la question. Je demande une réforme parlementaire qui rende la chose possible.
M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, en écoutant les interventions de certains députés d'en face, je m'attendais presque à voir surgir à la Chambre un super héros vêtu d'une cape rouge ou bleue. C'est qu'ils ont tout simplement la solution à tous les maux. Je dois avouer que je trouve cela un peu fatiguant et ennuyeux.
Tout d'abord, permettez-moi d'apporter quelques précisions. Il est 21 h 15 et Chambre siège toujours. Elle aurait dû normalement lever la séance à 18 h 30 environ. Nous serons ici au moins jusqu'à 23 h 30 ou minuit. À ceux que cela peut intéresser, je mentionne qu'il en coûte environ 25 000 $ l'heure lorsque la Chambre siège en dehors de ses heures régulières. C'est donc dire que le débat de ce soir coûte aux contribuables canadiens environ 125 000 $, ce qui ne dérange pas tellement, je présume, mon collègue du Bloc. Je tenais à préciser combien ce débat nous coûtera.
Quel est le but de la motion de ce soir? Des députés sont intervenus pour nous demander de nous en tenir à la motion. Il nous est arrivé de siéger 24 heures non pas pour débattre d'une question, mais simplement pour voter sur des motions qui n'allaient aucunement modifier le projet de loi à l'étude ou encore l'améliorer. Les motions n'allaient avoir aucune incidence sur le produit final et ne faisaient que retarder les travaux. Cette tactique n'est pas qu'un simple gaspillage d'argent; c'est aussi un abus de notre régime démocratique.
Si les députés d'en face veulent parler de réforme à apporter à la Chambre, pourquoi ne pas commencer par cette motion? Cette motion contribuera réellement à la réforme parlementaire. Elle signale à mes collègues d'en face que, s'ils veulent faire de l'obstruction, s'ils veulent intervenir pour débattre d'une façon tant soit peu intelligente d'une question, ils sont libres de le faire. Ils en ont l'occasion. Naguère, ceux qui pratiquaient l'obstruction systématique débattaient en long et en large de la motion à l'étude.
Je me souviens avoir assisté, quand je siégeais à l'Assemblée législative de l'Ontario, à des séances d'obstruction systématique qui ont duré une journée ou deux. Je pouvais ne pas les aimer ou ne pas les approuver, mais je devais respecter le droit accordé aux parlementaires de s'opposer au gouvernement en place. Que nous formions le gouvernement ou étions dans l'opposition, nous devions respecter la capacité des députés de parler de la question qui intéresse leurs électeurs, c'est-à-dire les habitants de toute la province dans ce cas-là, ou encore ceux de tout le Canada, dans le cas qui nous occupe maintenant.
Et qu'avons-nous eu? Nous avons eu un débat important. Un débat qui vient tout de suite à l'esprit est celui portant sur l'Accord nisga'a. Les députés de l'opposition n'étaient pas d'accord avec nous. Ils n'aimaient pas l'accord. Très bien. Ils avaient entièrement le droit de ne pas être du même avis que nous.
Par contre, l'opposition a présenté des centaines d'amendements abusifs—j'aime ce terme, qui signifie ennuyeux. Il s'agissait d'amendements qui ne changeaient rien à l'accord, qui ne changeaient pas d'un iota l'aboutissement de la mesure législative proposée par le gouvernement, mais qui forçaient celui-ci à voter sur des points, des virgules et des points- virgules.
Vraiment, est-ce pour cela que la population canadienne nous a élus? Pas du tout. Les Canadiens peuvent avoir du respect pour un député de l'opposition qui peut expliquer, article par article, ligne par ligne, mot par mot, pourquoi il n'est pas d'accord avec un projet de loi en particulier.
Peu m'importe de quel projet de loi il s'agit. J'ai siégé du côté de l'opposition et aussi du côté du gouvernement. Je respecte les responsabilités et l'important rôle de l'opposition dans notre régime démocratique.
Ce qui m'ennuie, cependant, c'est que, lorsque l'opposition n'aime pas ce que le gouvernement fait, elle s'en prend au processus. Cela en dit beaucoup. Plutôt que de présenter des arguments sur le fond de la motion, le projet de loi ou le document dont le Parlement est saisi, les députés de l'opposition protestent, prétendent que le méchant premier ministre les torture, les enchaîne et les maltraite sans merci. Le gouvernement leur enlève leur cerveau et les place dans le formol dès qu'ils entrent à la Chambre des communes. Ils dénigrent le rôle des députés.
Lorsque je suis dans la capitale nationale, comme beaucoup de mes collègues des deux côtés de la Chambre, je travaille entre 12 et 18 heures par jour. Notre journée commence très tôt avec les réunions des comités, puis c'est le travail en caucus, puis le travail avec les députés de l'opposition. Il est assez intéressant de souligner que, en dépit de toute la comédie qui se joue ici, lorsque des députés de tout le Canada se retrouvent en comité pour discuter, ils se montrent très raisonnables. Je me demande pourquoi ce n'est pas la même chose à la Chambre des communes. Pourquoi ne pouvons-nous pas travailler ensemble?
Un député néo-démocrate a demandé quand nous commencerions à travailler ensemble. L'autre jour, j'étais au comité des ressources humaines où il était question d'amendements au projet de loi C-2, sur l'assurance-emploi. J'ai alors posé des questions aux représentants de la Chambre de commerce du Canada et à ceux des syndicats de la construction qui étaient venus témoigner.
J'ai demandé à la Chambre de commerce pourquoi nous n'entendons pas parler d'elle lorsque le pays est en récession, lorsque le gouvernement aide tous les gens qui perdent leur emploi et lorsque la caisse d'assurance-emploi est gravement en déficit. Pourquoi ces gens ne disent-ils pas qu'ils savent que la caisse est en déficit et qu'ils sont prêts à payer plus? Nous n'entendons pas parler de la Chambre de commerce dans ces circonstances parce que c'est le gouvernement qui est l'assureur de dernier recours.
Est-ce là une question qu'on pourrait attendre d'un ministériel? Je ne crois pas, parce que je pense que certains gens à tendance plus socialiste pourraient être d'accord. Par contre, certains des gens qui se rapprochent plus de la droite pourraient ne pas être d'accord. Ils pourraient penser que je suis dur envers la pauvre Chambre de commerce. Je vois ce genre de divergences constamment en comité.
Le député d'en face qui pépie le plus a siégé avec moi au Comité de la citoyenneté et de l'immigration pendant un certain temps. À une rare exception près—soit lorsque ce député a décidé de faire fi des règles du Parlement et de fournir un document aux médias avant même qu'il n'ait été déposé à la Chambre, geste pour lequel il a été bien réprimandé par le Président du jour—j'ai trouvé que le député essayait vraiment de se pencher sérieusement sur les questions épineuses relatives au projet de loi sur la citoyenneté et aux réfugiés. Il contribuait même parfois au débat en faisant des observations éclairées.
Comment se fait-il que, après avoir perdu de vue la question...
M. Ken Epp: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je ne sais pas exactement pourquoi nous, de ce côté-ci de la Chambre, serions les seuls à devoir écouter cette diatribe. J'aimerais voir plus de libéraux à la Chambre et je vous demande donc de vérifier s'il y a quorum.
Et les députés ayant été comptés:
Le vice-président: Il y a maintenant quorum.
M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, je voulais un auditoire. Je donne en général un meilleur rendement quand on m'écoute, alors allons-y. C'est exactement là le genre d'absurdité qui crée le désarroi dans cette Chambre parce que nos vis-à-vis n'ont pas à...
M. Leon Benoit: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Il nous est permis de sortir un peu du sujet au cours du débat, mais je ne suis pas certain que les propos du député sont très pertinents.
Le vice-président: Avec tout le respect que je vous dois, cher collègue, je crois qu'il ne s'agit pas d'un recours au Règlement.
M. Steve Mahoney: Monsieur le Président, ils m'interrompent sans cesse parce qu'ils sont très susceptibles.
J'aimerais dire quelques mots sur le sujet. Nous parlons de réforme parlementaire. Il s'agit de déterminer si le Président devrait avoir le droit de décider qu'un amendement déposé par un député est irrecevable. En fait, je ne suis pas même certain qu'il soit nécessaire d'apporter un tel amendement au Règlement. J'ai lu le Règlement, je pense que le Président a déjà le pouvoir de rejeter ce genre de choses.
Si la présidence considère qu'un amendement est vexatoire ou hors de propos, à mon avis, elle a le pouvoir de le déclarer irrecevable. Toutefois, nous voulons discuter de la possibilité de renforcer le Règlement, précisant de façon plus claire que nous ne permettront plus de remplacer des points par des virgules parce que cela ne change rien au principe du projet de loi. Nous n'autoriserons plus un député à présenter 3 000 amendements dans le seul but de stopper un projet de loi que le gouvernement, dûment élu à la majorité, a non seulement le droit, mais aussi la responsabilité de présenter. C'est le programme du gouvernement qu'il faut exposer.
Si les députés d'opposition avaient la moindre crédibilité, ils se battraient. Ils participeraient aux débats. Ils manifesteraient leurs désaccords. Mais ils ne le font pas. Que font-ils? Ils disent que cet endroit ne fonctionne pas et que les députés ont perdu de leur pertinence. Je ne suis pas d'accord.
À mon avis, une des choses dont on peut être le plus fier dans notre merveilleux pays, c'est servir à la Chambre. C'est clairement un honneur que de se faire dire par nos concitoyens, par nos voisins et nos amis, qu'ils nous font confiance et qu'ils veulent que nous les représentions à Ottawa, qu'ils croient en ce que nous leur disons. Ils n'aiment pas tout ce que nous faisons. Ils sont en désaccord avec nous à l'occasion. Nous votons peut-être d'une certaine façon parce que nous sommes pour ou contre un certain projet de loi. Ils comprennent cela. C'est ainsi que fonctionne le processus. C'est la façon démocratique d'agir.
Je vais paraphraser Winston Churchill qui a dit que ce n'est peut-être pas le meilleur système au monde, mais il a une bonne longueur d'avance sur tout système qui vient en deuxième place.
Il faut comprendre que, lorsqu'ils perdent et pestent contre le système, c'est une chose. C'en est une autre quand ils dénigrent des collègues. Cependant, lorsqu'ils se regardent dans le miroir et disent que les députés ne font pas leur travail, ont perdu de leur pertinence ou sont des singes savants, ils se dénigrent eux-mêmes.
Voilà le problème qui existe dans cette Chambre. Si nous voulons que les Canadiens éprouvent à nouveau du respect pour le Parlement et pour les parlementaires, il est temps que nous nous respections nous-mêmes. Cela ne veut pas dire que nous devrions être arrogants. Nous n'avons pas le droit de l'être. C'est plutôt le contraire. Nous devons travailler, comme mes collègues et même les députés d'en face le font. Nous organisons des tables rondes et des assemblées publiques dans nos circonscriptions. Nous publions des bulletins parlementaires. Nous répondons tous, je l'espère, aux appels téléphoniques de nos électeurs.
Je trouve intéressant que des électeurs appellent à mon bureau et disent qu'ils m'appellent parce que telle ou telle chose les rend furieux. Ils laissent ensuite leur nom et leur numéro de téléphone. Ils pensent que je ne les rappellerai pas, mais je le fais.
J'ai pour politique de rappeler personnellement dans les 24 heures. Devinez ce qu'ils disent, monsieur le Président. Ils demandent si c'est vraiment moi. Ils sont étonnés qu'un député les rappelle. S'ils ne voulaient pas que je les rappelle, pourquoi m'ont-ils appelé et laissé un message?
Nous avons pour tâche de parler aux gens. Cela ne veut pas dire et ne voudra jamais dire que nous sommes des pantins. J'aime cela quand j'entends le whip du parti allianciste dire que les députés de l'Alliance voteront en faveur de la motion à moins que leurs électeurs leur disent de voter autrement.
Ont-ils une ligne directe? Ont-ils tous leurs électeurs en ligne, avec un téléphone à haut-parleur, qui disent oui ou non, dans une sorte de référendum? Je présume plutôt que 3 p. 100 des gens leur ont dit ce qu'ils attendaient de leur député. Ils sont tous là à demander: «Marie, pensez-vous que je devrais voter pour ou contre?»
Je blague un peu, mais le point important, c'est que nous sommes injustes envers les Canadiens lorsque nous dénigrons notre institution. Si les députés veulent savoir ce qui cause la désaffection dont on nous parle au Québec et dans l'Ouest, par exemple, eh bien c'est exactement ce type de comportement qui consiste à dénigrer la Chambre. Les députés jettent de l'huile sur le feu, et les gens disent que c'est vraiment atroce que les affreux politiciens d'Ottawa ne nous écoutent pas.
Chose vraiment curieuse, au bout du compte, les Canadiens ne marchent pas. J'ai discuté avec des gens de chez moi. Ils me disent qu'ils n'aiment pas les politiciens, mais qu'ils ne veulent pas parler de moi. Je suis sûr que tous les députés se font dire la même chose. Je ne tiens pas à entendre un autre point de vue non plus.
Voilà ce qui se passe. Parce qu'ils l'ont lu dans les journaux ou l'ont vu aux informations ou parce que quelqu'un a dit au Parlement que nous ne valions rien du tout, les gens disent que nous ne nous soucions pas de nos collectivités. Nous savons que ce n'est pas vrai. Proposer des motions pour changer des points, des virgules et des points-virgules n'est pas une utilisation intelligente de la démocratie parlementaire, dans cette assemblée merveilleuse, dans cette institution incroyable.
Cela montre aux Canadiens que nous sommes là. Je suis d'accord sur une chose que le député a dite, soit que nous sommes ici pour prêter une voix à tous les Canadiens.
J'en viens maintenant à la question du conseiller en éthique à propos de laquelle l'opposition s'en donne à coeur joie. Personne dans l'opposition n'a mentionné le fait qu'en 1999, le conseiller en éthique avait comparu devant le comité de l'industrie et présenté un rapport au Parlement. Comme il s'agit d'un comité permanent de la Chambre, je suppose, peut-être à tort, que des députés de l'opposition étaient présents, qu'ils ont entendu M. Wilson faire son rapport et ont eu la possibilité de lui poser des questions. Ce comité a ensuite fait rapport au Parlement.
Parlons maintenant du commissaire de la GRC, qui m'amène à une autre question, celle du rejet, par le député du cinquième parti dans le coin de l'autre côté, des résultats de l'enquête indépendante menée par la GRC, qui a conclu qu'il n'y avait pas eu malversation. Les députés veulent que cette question soit renvoyée au commissaire à l'éthique, mais lorsque celui-ci déclare qu'il n'y a pas malversation de la part du premier ministre, que font-ils? Ils se plaignent du processus. C'est ce que je disais tout à l'heure. Il traitent le commissaire à l'éthique de toutou, tout cela parce que sa réponse ne leur plaît pas. C'est aussi une insulte.
Pour ce qui est de la façon dont mes collègues et moi avons voté, j'estime que nous avons tenu les promesses que nous avions faites dans le livre rouge en nommant le commissaire à l'éthique. Celui-ci a la responsabilité et la possibilité de comparaître de temps à autre devant les comités de la Chambre et il sera invité à le faire. Tout ce que nous avons à faire, c'est le lui demander; il viendra, répondra aux questions et le comité fera rapport à cet endroit. C'est tout à fait normal.
Je peux reconnaître à nos vis-à-vis le mérite d'au moins une chose. Ils ont réussi à tromper quelque peu les médias. Ils sont parvenus à transmettre un message, à donner l'impression que nous étions en train de violer une promesse alors qu'en fait, ils savaient parfaitement que nous avions déjà tenu cette promesse et respecté cet engagement.
Le conseiller en éthique existe bel et bien. Si nos vis-à-vis veulent lui demander de faire enquête, ils peuvent le faire. S'ils n'aiment pas la réponse qu'ils reçoivent, qu'ils ne viennent pas se plaindre à moi. Il est là pour faire un travail et assumer ses responsabilités. C'est ce qu'il fait.
Je veux parler d'une autre personne. Il y a toujours quelqu'un pour parler de mon ancien collègue, M. Nunziata. M. Nunziata a voté contre le gouvernement dans le cadre d'une motion de confiance qui était reliée au budget. Tout le monde dit qu'il a été merveilleux.
Permettez-moi de poser une question. Tous les Canadiens adorent le hockey. Si je jouais au sein d'une équipe et lançais la rondelle volontairement dans mon propre filet, que diraient mes coéquipiers? Ils me demanderaient de rester assis sur le banc ou ils me mettraient en dehors de l'équipe.
Si M. Nunziata avait eu le courage de se retirer du caucus et de voter contre le gouvernement, je n'aurais eu que de l'admiration pour lui, mais ce n'est pas ce qu'il a fait. Il a voté contre le gouvernement; il a joué contre sa propre équipe. En fin de compte, il s'agit d'un sport d'équipe, un sport de contact que j'adore. Je ne pourrais être plus fier de représenter les électeurs de Mississauga-Ouest et je continuerai de le faire avec vigueur dans cette enceinte.
[Français]
M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ): Monsieur le Président, je vais essayer de ne pas monter d'un octave supplémentaire par rapport à la tonalité du discours de notre collègue, le député de Mississauga-Ouest.
Les personnes qui nous écoutent et celles qui s'apprêtent à chercher le sommeil dans la quiétude de leur salon, pendant que les enfants sont couchés, ont pu entendre des exemples de hockey de mon collègue de Mississauga-Ouest. Sans vouloir l'insulter, sans vouloir le traiter de chien, il nous a fait un discours digne d'un chihuahua. On doit comprendre qu'un chihuahua, c'est un petit chien qui jappe fort, fort, mais qui ne mord pas. Le député de Mississauga-Ouest nous a donc fait un discours digne d'un chihuahua. Et je ne fais que parler du ton de son discours, non pas du contenu du discours.
Pour en venir au sujet qui nous intéresse ce soir, il est malheureux que nous devions poursuivre les travaux jusqu'à 23 heures sur cette motion M-2 qui a été proposée par le leader du gouvernement, parce que cette motion...
Une voix: Une motion de clôture.
M. Michel Guimond: ...cette motion de clôture—comme me le rappelle mon collègue de Roberval—nous devons le comprendre, est très grave au niveau des implications. Je pense qu'il serait pertinent de la lire.
Monsieur le Président, je dois vous dire dès le départ que ce n'est pas l'intégrité de votre personne en tant que Président, ni l'intégrité de la présidence ou du fauteuil, comme les gens l'appellent ici, qui est remise en question, mais bien le geste posé par le leader du gouvernement à la Chambre.
Donc, cette motion stipule:
Que les paragraphes (5) des articles 76 et 76.1 du Règlement soient modifiés par adjonction, à la fin des nota qui les suivent, de ce qui suit:
«Il est entendu que l'Orateur ne choisit pas, pour la tenue d'un débat, une motion ou une série de motions à caractère répétitif, frivole ou abusif ou de nature à prolonger inutilement les délibérations à l'étape du rapport. Dans l'exercice de son pouvoir de choisir les motions, l'Orateur s'inspire de la pratique de la Chambre des communes du Royaume-Uni.»
Monsieur le Président, je sais que vous êtes un homme de droit. J'ai bien précisé un «homme de droit» et non un «homme de droite».
Je sais d'autant plus que le gouvernement a pu vous faire fléchir sur un de vos points sensibles. Je ne vous connais pas assez intimement pour connaître tous vos points sensibles—est-ce que vous êtes sensible à la hauteur de la palette des genoux, comme on dit au hockey—, mais en référant au système parlementaire du Royaume-Uni, je pense que le leader du gouvernement à la Chambre a apporté un point qui vous touche, parce que vous êtes très friand du système parlementaire qui prévaut au Royaume-Uni.
Dans cette motion, il y a des éléments qui donnent une latitude incroyable auxquels nous ne pouvons souscrire. Entre autres, qui sera en mesure de discuter du bien-fondé du caractère répétitif, frivole ou abusif?
Avec respect, je soumets qu'en droit parlementaire, il s'agit là de notions totalement subjectives. On n'est pas en présence d'un caractère objectif. On est dans le domaine de la subjectivité.
Par cette motion, le gouvernement veut donc se donner bonne conscience en faisant inclure une initiative que nous considérons totalement partisane, à laquelle il songeait depuis très longtemps, mais dont il ne voulait pas porter l'odieux. Profitant des élections du 27 novembre dernier et du premier bloc de la session, de la première période de cinq semaines où nous siégeons, le gouvernement, particulièrement le leader du gouvernement à la Chambre, s'est dit: «On va donner la claque immédiatement.» Je soumets que ce gouvernement devra en porter l'odieux.
Cette motion confère donc à la présidence le droit de décider des motifs et des motivations des députés de l'opposition quant aux motions d'amendements que ceux-ci présenteront à la Chambre.
Si on enlève à l'opposition le droit de déposer des amendements ou si on soumet nos amendements à une décision arbitraire, que reste-t-il de l'opposition? Est-ce que le gouvernement est mécontent du fait qu'il y ait une opposition? Est-ce que le gouvernement aurait voulu avoir 301 sièges sur 301 dans la 37e législature?
Je pense que les députés de ce côté-ci de la Chambre sont aussi légitimes, c'est-à-dire qu'ils ont été élus de façon aussi démocratique que les députés de l'autre côté. Est-ce que cela veut dire qu'on n'est pas satisfaits qu'il y ait de l'opposition?
Il est certain que lorsque le leader du gouvernement à la Chambre a soumis sa motion, il ne croyait certainement pas que ses propres motions d'amendement pourraient être frivoles et abusives. Ce ne sont sûrement pas les quelque 200 amendements au projet de loi C-7 sur les jeunes contrevenants.
Cette motion est, par le fait même, particulièrement insultante pour tout parti politique qui se respecte et qui travaille sincèrement à améliorer la législation soumise par le gouvernement.
Ainsi, en vertu de la motion qui est soumise par le gouvernement, le Président aura le pouvoir de juger, à toutes fins utiles, de la pertinence de toute la stratégie politique d'un parti. Ce gouvernement libéral souhaite entendre la critique le moins possible et impose des modifications au Règlement afin de gérer seul les affaires de l'État.
Mais ici, nous avons une question fondamentale à nous poser. Est-ce qu'une majorité numérique de députés donne au gouvernement le droit de tout faire? Est-ce que ce gouvernement peut s'arroger ce pouvoir, uniquement à cause qu'il a fait élire 172 députés lors des dernières élections? Est-ce que cela lui donne le droit, littéralement, de nier toute opposition? Si ce gouvernement est démocratique et transparent, comme il le dit, quel est le bien-fondé de présenter une telle motion comme la motion M-2, déposée par le leader du gouvernement?
Il y a un prix politique à payer pour la gestion des affaires de l'État.
Lorsque les décisions gouvernementales sont impopulaires, c'est au Parlement que l'on doit en débattre. C'est au Parlement que l'opposition a un travail légitime à faire en vue de modifier la législation. Si on retire ce droit, cela veut carrément dire: qu'est-ce que ça donne d'avoir du travail en comité? Qu'est-ce que ça donne de faire des discours, ici, la plupart du temps devant des chaises vides? Qu'est-ce que ça donne?
J'aurais quelque chose à suggérer au gouvernement. Si le gouvernement veut y aller rapidement, il n'a qu'à déposer ses projets de loi et dire: «Sur ce projet de loi que nous avons concocté, il n'y aura aucun débat. Aucun député de l'opposition ne pourra prendre la parole, seuls les députés du parti au pouvoir auront droit de parole. Il n'y aura pas de comité parlementaire et aucun témoin ne sera convoqué devant les comités parlementaires. Voici: je me lève, je suis tel ministre, je dépose le projet de loi et je demande à mes collègues du parti de la majorité ministérielle s'ils ont des discours à faire, je leur donne la parole et je décrète que nous procédons immédiatement à l'adoption en première, deuxième et troisième lectures du projet de loi.» Bingo! On l'envoie à l'autre Chambre et c'est fini, on n'en parle plus.
Est-ce que c'est ce genre de démocratie que les libéraux désirent et ce genre de pays dans lequel ils veulent vivre? Si c'est cela, on devrait le savoir. Je pense que cela aurait dû être carrément exprimé lors de la dernière campagne électorale qui a donné lieu à l'élection du 27 novembre dernier.
Le processus où l'opposition tente de modifier une législation est, en soi, un processus sain en démocratie. C'est l'expression de la démocratie par une partie de la population qui pense autrement que le gouvernement. J'ai regardé cela, et on devrait, de ce côté-ci de la Chambre, se faire faire des lobotomies pour s'assurer que tout ce qui est dit en face, on va l'accepter de façon bête.
Des voix: Bravo!
M. Michel Guimond: Oui, oui. Bien sûr, on applaudit du côté gouvernemental. Bien sûr, c'est le genre de chose que le gouvernement désire, mais il n'a pas à applaudir quand je fais des commentaires de ce genre, car c'est ce qu'il vise, mais de façon un peu plus hypocrite, je dirais, pour ne pas dire subtile, de façon un peu plus hypocrite.
Donc, le processus selon lequel l'opposition veut modifier une législation est un processus sain et démocratique, et c'est le devoir de l'opposition de voir à ce que le gouvernement respecte la population dans sa gestion des affaires de l'État.
Retirer aux partis d'opposition les outils dont ils ont besoin pour faire leur travail tend à changer le rôle de nos institutions démocratiques. Et ça, c'est grave. C'est par les débats d'idées et les décisions démocratiques dans l'intérêt de tous et de toutes que l'on gère les affaires publiques, non dans l'intérêt d'une poignée d'individus, non plus que dans l'intérêt d'une certaine catégorie de députés siégeant au Conseil des ministres.
Le rôle de chacun des 301 parlementaires élus—que ce soit ceux de l'opposition de la cinquième rangée ou ceux du parti ministériel de la cinquième rangée—c'est d'améliorer les législations, à moins que le leader du gouvernement pense qu'il a le monopole de la vérité, auquel cas, je parle pour rien ne dire et je devrais m'asseoir immédiatement et plus personne ne devrait prendre la parole.
Avec respect, je soumets que je ne pense pas que le leader du gouvernement ait le monopole de la vérité. De toute façon, il suffit de voir de quelle façon il gère les travaux de cette Chambre et on est à même de constater, nous, de ce côté-ci de la Chambre, qu'il n'a pas le monopole de la vérité.
Le gouvernement demande à l'institution que vous représentez, monsieur le Président, d'intervenir afin de limiter les tactiques dilatoires de l'opposition. La raison que le leader du gouvernement invoque dans tous les médias est la suivante: «Je ne veux pas que les députés soient des machines à voter.»
Je regrette, mais les gens nous ont élus pour écouter les débats, pour se faire une idée sur les projets de loi et respecter les préoccupations et les besoins de nos concitoyens et de nos concitoyennes. Ensuite, après que nous ayons entendu tout cela, nos concitoyens s'attendent à ce que nous venions ici justement pour voter. Est-ce que c'est cela être des machines à voter? Si dans une année nous sommes capables d'adopter 600 lois progressistes qui aident à améliorer la société, qui ajoutent quelque chose à la démocratie, à la relation des citoyens avec leur gouvernement—parce que c'est ce qu'on reproche souvent au gouvernement et je ne parle pas nécessairement de celui-ci, ni d'un gouvernement provincial—, nous aurons fait notre travail de parlementaires.
Quand les gens qui nous écoutent se promènent au centre commercial et que nous les rencontrons pendant que nous sommes en train de faire notre épicerie, que reprochent-ils souvent au gouvernement? Ils lui reprochent d'être loin de leurs préoccupations, de ne pas les écouter. C'est pour cela qu'ils envoient quelqu'un lors d'une élection et qu'ils lui disent: «Toi, monsieur, madame, nous avons décidé que vous serez celui ou celle qui ira nous représenter là-bas au Parlement d'Ottawa et nous voulons que vous soyez notre porte-parole. Nous voulons que vous soyez celui ou celle qui portera notre parole.» Est-ce que c'est cela être une machine à voter?
Le leader du gouvernement à la Chambre des communes ajoutait que des motions dilatoires pouvaient nous amener à voter inutilement pendant des heures. Parler de voter inutilement, c'est encore une fois un jugement de valeur que porte le leader du gouvernement à la Chambre des communes. C'est dans sa tête à lui. C'est lui qui juge que c'est voter inutilement. Mais si le gouvernement arrive avec des projets de loi qui ont de l'allure, si le leader du gouvernement à la Chambre des communes arrive avec des projets de loi qui se tiennent, qui font consensus dans la société et dans tous les partis d'opposition, nous sommes d'accord.
Les députés ont été à même de constater que, dans ces cas-là, il n'y a pas de discours qui se font pendant des heures et des heures et il n'y a pas d'amendement. Quand c'est un projet de loi qui fait l'unanimité, nous sommes en mesure de l'adopter rapidement. Il est certain que lorsque le gouvernement arrive avec des projets de loi qui n'ont pas d'allure, comme le projet de loi sur les jeunes contrevenants, comme celui dit «de la clarté», comme le projet de loi sur le Traité des Nisga'as, que nos collègues de l'Alliance canadienne considéraient, eux, pour leurs concitoyens, les gens qu'ils représentent, que cela n'avait pas d'allure, il est bien entendu que des amendements sont déposés.
C'est le droit d'un parlementaire. La plus belle preuve que c'est un droit est que nous ne l'utilisons pas de façon abusive et de façon répétée sur chacun des projets de loi. Un droit, tu t'en sers quand tu as le goût de t'en servir, quand tu sens que tu as besoin de t'en servir. Un droit et un privilège pour un parlementaire, c'est cela.
Le gouvernement nous dit que nous votons inutilement pendant des heures et que cela coûte environ 27 000 $ pour chaque heure supplémentaire que siège la Chambre. À cela, je réponds au leader du gouvernement à la Chambre que la démocratie n'a pas de prix. Si nous trouvons que 27 000 $ de l'heure c'est trop cher, et si le leader du gouvernement à la Chambre a des économies à faire...
Une voix: Qu'on abolisse le Parlement.
M. Michel Guimond: Qu'on l'abolisse. Disons que si nous avons des économies à faire, nous devrions le fermer. Fermons-le, disons six, huit, neuf mois par année. Essayons de rassembler tout le travail parlementaire en une semaine. Siégeons pendant une semaine et nous allons en économiser des 27 000 $ l'heure par 24 heures pendant 51 semaines. C'est une belle économie cela.
Mais la démocratie a un prix. Je pense que d'accepter une motion comme la motion M-2 serait de nier le droit de tous les partis, incluant bien entendu les partis d'opposition, de déposer des amendements.
Pendant que le gouvernement nous sert cet argument fallacieux, pendant qu'il veut nous empêcher de faire valoir les préoccupations de nos concitoyens et concitoyennes, il a empoché, depuis 1993, sur le dos des chômeurs et des travailleurs, pas moins de 31 milliards de dollars de surplus dans la caisse de l'assurance-emploi. Le gouvernement a plusieurs façon de réduire l'opposition à un projet de loi.
Je vais donner un exemple. On n'a pas besoin de donner des trucs ou des idées au leader du gouvernement pour nous donner des coups de batte sur la tête, il en connaît plusieurs, et il s'en sert allègrement. Un des outils, entre autres, dont se sert le leader du gouvernement, c'est le bâillon.
Que vise le bâillon, avant tout? Il vise à faire taire les députés de l'opposition. Le leader du gouvernement décrète: «Sur tel ou tel projet de loi, il y aura encore deux heures et demie de débat. On juge que pendant ces deux heures et demie, vous aurez dit tout ce que vous aviez à dire, et on ne veut pas en entendre plus. Que vous apportiez des arguments additionnels, que vous ayez eu des adjoints de recherche capables de trouver une étude quelque part dans le monde, ou au Canada, venant prouver au gouvernement qu'il fait fausse route, non, on a décidé que c'était deux heures et demie de débat et on vous impose le bâillon. Vous n'aurez plus rien à dire après»—je dis deux heures et demie, mais ce peut être une heure, trois heures ou même trois jours de débat. On ne peut pas accepter une telle chose.
En guise de comparaison, de 1984 à 1993, le gouvernement conservateur avait utilisé 49 bâillons pour 519 projets de loi, donc une proportion de 9,4 p. 100, tandis que le gouvernement libéral, quant à lui, en sept ans de pouvoir, a imposé le bâillon 60 fois sur 350 projets de loi...
M. Stéphane Bergeron: C'est même plus de 60.
M. Michel Guimond: ...soit une proportion de 17,4 p. 100, presque le double. Mon collègue de Verchères—Les-Patriotes me rappelle que c'est plus de 60...
M. Stéphane Bergeron: C'est à peu près 70.
M. Michel Guimond: ...parce que, régulièrement, à chaque semaine, on s'en fait imposer, un bâillon.
Mon professeur de latin me disait tempus fugit, le temps fuit. Étant donné que vous me signalez qu'il ne me reste plus qu'une minute, je veux simplement dire ceci, en conclusion: quel pouvoir aura l'opposition si elle peut de moins en moins se prévaloir des outils parlementaires nécessaires à l'expression d'une véritable démocratie? Comment pourra-t-elle alors défendre les intérêts fondamentaux de ses concitoyennes et concitoyens?
À partir du moment où on n'écoute plus la population, que l'on gère à la petite semaine selon un programme strictement partisan et qui ne tient compte que des intérêts de quelques-uns, à nouveau, ce sont toutes nos institutions qui perdent leur sens.
[Traduction]
M. John Bryden (Ancaster—Dundas—Flamborough—Aldershot, Lib.): Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec le député d'Oxford.
Je tiens à féliciter le député d'en face pour ses propos passionnés. Ce débat est important et je suis tout à fait conscient du fait que les députés de l'opposition ont toujours raison de chercher à protéger et garantir leur droit de s'exprimer devant la Chambre.
Cela dit, je ne suis pas convaincu que l'amendement dont nous discutons maintenant ajoute quoi que ce soit de constructif à la motion d'origine car, monsieur le Président, je rappelle que cette motion donne à la présidence la possibilité d'interpréter le sens des mots «prolonger inutilement».
En d'autres mots, monsieur le Président, si vous pensez sincèrement qu'il convient de protéger les intérêts de l'opposition ou des minorités à la Chambre des communes, dans les cas où, jugeant utile de faire valoir son point de vue, l'opposition entreprendrait de proposer une série d'amendements, et dans les cas ou vous-même, monsieur le Président, jugeriez effectivement utile et dans l'intérêt des Communes qu'elle en discute, vous pourriez décider de donner votre accord. Par conséquent, je ne crois pas que cet amendement ajoute quoi que ce soit de constructif à la motion principale.
Monsieur le Président, j'ai voulu prendre part à ce débat pour la raison que je suis très sensible à la nécessité de protéger le droit des députés de l'arrière-ban des deux côtés de la Chambre de présenter des amendements portant sur des questions de fond et, monsieur le Président, la notion de question de fond est en fait subjective.
J'estime donc qu'il est très important que les députés conservent le droit de présenter des amendements auxquels ils croient. Même si ces amendements ne sont pas adoptés, ils peuvent servir à souligner ce que ces députés pensent, individuellement ou collectivement, des lois.
Je dois dire que j'ai présenté des amendements à l'étape du rapport en bon nombre d'occasions, bien conscient que je ne pouvais faire valoir mes idées en ce qui concerne la mesure législative à l'étude dans le cadre des travaux du comité.
Pour le bénéfice des téléspectateurs à l'écoute, monsieur le Président, je précise qu'après la deuxième lecture, la mesure législative est renvoyée à un comité. Celui-ci entend des témoins, étudie leurs témoignages et entend ensuite les propositions d'amendements susceptibles d'être présentées par des membres du comité ou des députés ministériels par l'entremise du secrétaire parlementaire. Ces amendements sont ensuite mis aux voix au comité et transmis, puis le gouvernement décide s'ils seront étudiés à l'étape du rapport.
Le problème que pose ce système, c'est que bon nombre de nos comités sont dominés par le gouvernement. C'est un artifice propre à la structure des comités. Qu'on soit député de l'opposition ou ministériel d'arrière-ban, il arrive parfois, lorsqu'on présente un amendement dans le cadre des travaux du comité et que celui-ci est rejeté, qu'il ne puisse être entendu ou soumis de nouveau à l'étape du rapport.
La difficulté, c'est qu'un député d'arrière-ban ou de l'opposition voulant présenter un amendement en sachant fort bien que le gouvernement ne l'appuie pas perdra à tout jamais la possibilité de le faire valoir s'il le présente au comité et qu'il est battu.
La présentation d'amendements à l'étape du rapport comporte un avantage pour un député d'arrière-ban comme moi, ou un député de l'opposition: si nous savons que nous ne pouvons pas gagner au comité, nous pouvons présenter l'amendement à l'étape du rapport à la Chambre. Ce faisant, nous pouvons prendre la parole dans cet endroit et présenter notre amendement parmi d'autres amendements ou d'autres motions groupés, c'est-à-dire que nous pouvons faire valoir avec conviction cet amendement devant tous nos collègues des deux côtés de la Chambre et devant la population, même si nous savons très bien qu'il sera défait.
Je continue de croire que le rôle de cette Chambre va au-delà de l'adoption des lois, que le rôle des députés transcende le fait de pouvoir voter ou non, de gagner ou de perdre. Cette Chambre est l'endroit où ont lieu les débats, l'endroit où l'on présente des idées. Je crains que le public ne soit franchement découragé si les propos qu'il entend ne sont pas valables, non seulement ceux de l'opposition mais aussi ceux des députés d'arrière-ban de ce côté-ci de la Chambre.
Je tiens à féliciter le leader du gouvernement à la Chambre pour le type de motion qu'il a présentée, car il me semble que d'autres intervenants ont laissé entendre que le leader du gouvernement avait présenté, il y a un an environ, des amendements—relativement à l'étape du rapport et aux amendements frivoles et non pertinents qui y sont présentés—que beaucoup de députés de ce côté-ci de la Chambre ne pouvaient pas accepter.
Selon moi, les députés d'en face devraient savoir que, lorsque cela s'est produit, nous avons été nombreux, de ce côté-ci, à faire entendre clairement au leader du gouvernement que nous n'appuierions pas la proposition dont il avait saisi la Chambre. Le gouvernement a accepté la résistance qui s'est manifestée de ce côté-ci et a mis au point la proposition maintenant présentée par le leader du gouvernement à la Chambre.
En définitive, je n'ai aucun problème avec le fait que les députés de l'opposition tentent de prolonger le débat à l'étape du rapport afin de signifier qu'ils s'opposent à une mesure du projet de loi.
Pendant le débat sur le projet de loi sur la clarté, par exemple, qui a fait l'objet d'une centaine d'amendements, si ce n'est davantage, présentés par l'opposition, dont un grand nombre étaient futiles, je n'ai eu aucun problème avec le fait que la Chambre a siégé jusqu'au milieu de la nuit, car si j'ai été présent jusqu'au milieu de la nuit, les députés de l'opposition en ont fait de même. Quand vient le temps de défendre une mesure législative du gouvernement, je suis prêt à rester à mon siège aussi longtemps qu'il le faudra et à y rester plus longtemps, si nécessaire, que tout député de l'opposition qui tente de faire valoir un point de cette façon.
En fin de compte, je ne voyais pas de problème à ce que de temps à autre l'opposition présente de nombreux amendements disons futiles. Le problème, et je crois que le leader du gouvernement à la Chambre a raison à ce sujet, c'est la façon dont le public perçoit des amendements qui consistent essentiellement à déplacer une virgule et à corriger la grammaire. Cette perception me fait craindre que la population n'aura plus confiance que la Chambre travaille sérieusement. Toutefois, je suis d'avis que l'opposition devrait disposer d'autant d'occasions possibles de faire valoir un point, même si c'est en faisant de l'obstruction ou en prolongeant le débat.
Cela dit, monsieur le Président, je crois que ce qu'a fait le leader du gouvernement à la Chambre en présentant cette motion, qui vous confie des possibilités énormes, sinon un pouvoir d'interprétation énorme, et la raison pour laquelle j'étais si impatient de prendre la parole au cours de ce débat, et, monsieur le Président, je m'adresse directement à vous et j'espère que vous me prêtez toute votre attention, c'est que j'espère que lorsque vous interpréterez le changement proposé par le leader du gouvernement à la Chambre, vous le ferez seulement de façon à défendre le droit des députés d'arrière-ban et le droit des députés de l'opposition de présenter des amendements de fond à l'étape du rapport.
Il s'agira, de votre part, d'une décision subjective. Je suis heureux que vous me prêtiez toute votre attention parce que j'essaie de faire valoir ici un point d'une importance fondamentale. Je voulais simplement m'assurer que vous compreniez ce qu'il en est, monsieur le Président. Je suis convaincu que lorsque vous interpréterez ce changement, et je précise que je n'appuie cette motion gouvernementale qu'à la condition que vous l'interprétiez en pensant aux droits des minorités, aux droits à la libre expression, aux droits relatifs à la position de l'État qui doit faire partie des fonctions des députés d'arrière-ban ou des députés de l'opposition.
Cela dit, la motion proposée par le leader du gouvernement, et je sais que les députés d'opposition auront de la difficulté à le croire, a suscité dans les rangs ministériels beaucoup d'objections dans sa forme originale. Le gouvernement a concédé qu'il allait trop loin et je crois qu'il a proposé une solution de compromis. Je ne crois vraiment pas que ce soit nécessaire parce que je n'ai pas d'objection à ce que l'opposition veuille prendre le temps de la Chambre. Je suis cependant conscient que la perception qu'on aurait serait faussée et je céderai toujours au gouvernement lorsqu'il proposera une mesure qui me paraîtra raisonnable et conforme aux intérêts de la Chambre dans son ensemble.
Je terminerai sur une mise en garde parce que je sais que le député d'Oxford veut prendre la parole sous peu. Je vous rappelle, monsieur le Président, que quoi que vous fassiez, vous devez protéger le droit des députés d'arrière-ban, ceux de l'opposition, de dire leur mot dans les débats sur les projets de loi à l'étape du rapport.
M. John Finlay (Oxford, Lib.): Monsieur le Président, la motion doit vous conférer, à vous et à vos adjoints, le pouvoir de prendre des décisions, à l'étape du rapport, concernant des motions à caractère répétitif, frivole ou abusif.
J'ai écouté les interventions faites cet après-midi et ce soir, et je suis d'accord avec de nombreux arguments défendus par certains de mes vis-à-vis, en particulier les députés de Winnipeg—Transcona et d'Esquimalt—Juan de Fuca.
Nous pourrions demander à un comité de se pencher sur les buts et les actions démocratiques de la Chambre des communes. Ce serait possible, mais ce n'est pas la question sur laquelle porte le vote de ce soir. Nous devons nous prononcer de manière à éviter le mauvais usage des amendements et donc du vote.
J'ai participé aux travaux concernant l'accord avec les Nisga'as et le projet de loi de mise en oeuvre, au sein du Comité des affaires autochtones et du développement du Grand nord.
Je rappelle aux députés que les Nisga'as préparent ce projet de loi depuis 500 ans. Le chef Gosnell y a travaillé pendant 21 ans et Frank Calder, sa vie entière. Le gouvernement actuel et ceux qui l'ont précédé y ont travaillé pendant 20 ou 30 ans. C'est finalement au cours des 11 dernières années qu'un accord a pu être conclu. Le fait de retenir le projet de loi pendant 42 heures pendant que les députés se prononçaient sur des amendements à caractère répétitif, frivole ou abusif a été terriblement décourageant pour moi et, j'en suis certain, pour les Nisga'as qui suivaient les travaux. Cela n'a rien fait pour modifier la façon dont le public nous perçoit.
On a fait grand cas du fait que les Canadiens ne comprenaient pas ce gaspillage de temps, de talent et d'efforts. Je n'arrive pas non plus à le comprendre. Nous avons un système de comités qui fonctionne. Ce système signifie qu'on entend des témoins, qu'on se déplace, que tous les partis présents au comité travaillent dans un but commun. C'est ce qui me plaît le plus dans le fait d'être député à la Chambre et de travailler avec les collègues. Parfois, les choses se gâtent entre l'étape du comité et celle de l'étude à la Chambre, mais pas toujours.
L'étape du rapport permet d'entendre les motions de députés qui ne sont pas membres du comité et n'ont pas eu la chance de proposer un amendement, mais elle ne doit pas servir à jouer des jeux au détriment du travail des parlementaires sérieux. Voter interminablement sur des amendements à caractère frivole, répétitif ou abusif ne génère que du cynisme, de l'ennui et de l'irrespect.
Notre collègue de Winnipeg-Nord a parlé avec éloquence de la clôture, mais ce n'est pas le sujet de la discussion. La question est de savoir comment on peut élaborer de bonnes lois pour Canadiens. Certains députés d'en face parlent de réforme globale, de clôture, du rapport du vérificateur général et ainsi de suite. Ils oublient qu'on a tenu, il n'y a pas très longtemps, des élections fondées sur les programmes des partis et sur les choix de ce pays pour l'avenir.
Mon collègue de Waterloo—Wellington a parlé du développement de la démocratie parlementaire. Selon lui, ce fut un processus lent, mais constant. C'est un processus qui s'adapte aux défis des nouvelles technologies et aux changements sociaux. Il n'est pas sorti par enchantement de la cuisse de Jupiter ou de l'imagination de Simon de Montfort. Ce processus s'est développé graduellement, un peu à la fois.
On a fait de grands pas, comme la Grande Charte et la Reform Act au XVIIe siècle. On a fait de nombreux petits pas, au jour le jour. Espérons que ce soir nous allons faire un de ces petits pas en disant que nous sommes allés trop loin dans ce sens, que nous devons changer, que nous devons revenir vers le centre et faire ce qu'il faut. Le but des amendements à l'étape du rapport n'était pas de nous plonger dans un tel pétrin.
La procédure a pourtant donné de bons résultats puisque le Canada vient d'être élu, pour la huitième année d'affilée, meilleur pays au monde pour la qualité de vie. C'est très bien.
Un autre dicton que l'on emploie ici veut que l'on ne change pas ce qui fonctionne bien. Le système des comités fonctionne bien. Il est bon d'étudier les projets de lois en trois étapes au moins. Notre système de votation est bon et le minutage des interventions semblent fonctionner. Aucun député qui croit travailler pour ses électeurs et son pays ne trouvera productif, raisonnable ni défendable de gaspiller du temps sur des amendements ridicules.
La plupart des députés parlaient franchement ont appartenu à de nombreuses organisations et vu comment elles fonctionnent. Nous avons tous une expérience de la rédaction de motions, d'élections et d'amendements. Pour ma part, j'ai commencé à dix ans environ, au sein d'un club de collectionneurs de timbres composé d'amis d'enfance. Nous avions des élections, des procès-verbaux et un ordre du jour. Nous avions même un comité d'évaluation des timbres.
Ensuite, j'ai été louveteau, puis chef scout, chef de patrouille, membre, puis président de l'association des étudiants, membre, puis président du personnel de l'école secondaire, président de mon syndicat, membre du conseil d'administration de l'hôpital et d'une foule d'autres organisations sociales, et, enfin, député. Mon collègue, le député de Winnipeg-Sud, a bien parlé. Il s'est étendu sur la raison d'être de la motion dont nous sommes saisis, à savoir réaliser des choses.
Pour terminer, tenons-nous-en à la motion! Adoptons-la! Crevons l'abcès dès ce soir! Nous pourrons améliorer ensuite notre système parlementaire.
M. Deepak Obhrai (Calgary-Est, Alliance canadienne): Monsieur le Président, avant tout, je tiens à préciser que je partagerai le temps qui m'est accordé avec mon collègue de Fraser Valley. Ce n'est pas que cela me plaise particulièrement, mais il a une excellente proposition à soumettre à la Chambre et je veux qu'il ait le temps de le faire.
J'ai écouté un peu plus tôt l'intervention du député de Mississauga-Ouest. Quand j'ai regardé ma montre et que j'ai vu l'heure qu'il était, je me suis dit que le député devrait aller se coucher parce qu'il commençait à divaguer. De sa voix forte et tonitruante, il tentait de convaincre les Canadiens du bien-fondé de cet amendement. Il nous a servi des citations. Il parlait de la motion d'opposition que l'Alliance avait proposée et qu'elle avait tirée directement du livre rouge. En fait, le député la défendait et soutenait que les libéraux avaient tenu leur promesse. Difficile à croire, n'est-ce pas? Il a affirmé qu'il y avait un conseiller en éthique, mais a omis de dire que ce conseiller relève du premier ministre et non du Parlement, contrairement à ce qui a été promis dans le livre rouge. Le député est intervenu à la Chambre pour déclarer que la promesse contenue dans le livre rouge avait été respectée. Voilà pourquoi je me disais qu'il était temps qu'il aille se coucher.
La motion a trait essentiellement au Parlement, à l'expression de la volonté de la population. À la Chambre des communes, la démocratie passe par le gouvernement et par l'opposition. Les gens en désaccord avec le gouvernement s'expriment par l'entremise de l'opposition. Toutefois, au fil des ans, ils ont été réduits au silence par les procédures, les manoeuvres et tout le pouvoir qu'utilisait le gouvernement, grâce à sa majorité. Les partis d'opposition sont constamment à la recherche de moyens, de plus en plus faibles, de transmettre leur message à la population.
Les libéraux d'en face prétendent que ces amendements sont purement des changements de forme, mais ils ne disent pas ce que l'opposition, cette autre voix, essaie de faire. L'opposition tente de se faire entendre et d'informer la population de ce qui se passe à la Chambre, mais elle est réduite au silence.
L'Alliance canadienne a élaboré des propositions que mon collègue, le député de Fraser Valley, a exposées au sujet de la réforme de la Chambre. L'objectif général de la réforme, c'est de permettre la tenue de débats sensés et raisonnables. C'est de faire en sorte que l'autre voix puisse aussi être entendue, et non pas seulement la voix du parti ministériel.
Les députés d'en face ont dit qu'il existe des comités où l'opposition peut se prononcer sur les sujets du jour. Nous savons tous qu'ils formaient l'opposition avant 1993. Ils devraient savoir pertinemment que les comités sont tout à fait inefficaces. Nous le savons par expérience.
C'est mon deuxième mandat. Je suis député depuis trois ans et demi. Je n'ai jamais vu le gouvernement écouter les membres d'un comité. Il ne le fait pas. Les comités sont une belle invention. Les comités sont un beau moyen pour le gouvernement de détourner les critiques à l'endroit de ce qu'il propose.
Le gouvernement dit qu'une question sera renvoyée à un comité. Elle l'est, et lorsque le comité en fait rapport, c'est au ministre et au parti ministériel qu'il appartient de décider s'ils suivront ou non les recommandations du comité. Nous constatons que, la plupart du temps, ces recommandations ne sont pas suivies.
Qu'advient-il de la voix de l'opposition, de la voix de l'autre côté, de la voix de ceux qui nous ont élus pour que nous nous exprimions à la Chambre? Nous prenons la parole et participons au débat, mais qu'arrive-t-il? Rien.
Chose intéressante, la motion dit que le gouvernement veut s'inspirer de la pratique de la Chambre des communes du Royaume-Uni. Bien entendu, nous savons tous qu'il s'agit du modèle tous les parlements et que ce serait bien beau Or, elle suit d'autres pratiques qui donnent une voix à l'opposition également. On parvient à un équilibre dans les opinions exprimées dans cette institution, mais pas ici. Au Canada, le gouvernement ne retient que ce qui lui convient afin de pouvoir faire adopter envers et contre tous les mesures qu'il souhaite en ne tenant aucun compte de ce que pensent et disent les autres.
Lorsque la ministre de l'Immigration a affirmé que l'Alliance canadienne attirait des racistes, des gens sectaires ou des gens qui nient l'Holocauste, de qui parlait-elle? Des millions de gens qui ont voté pour notre parti. Parlait-elle d'eux?
Est-ce le respect que le gouvernement a pour les autres Canadiens? Ne peut-il pas respecter le point de vue de l'opposition et celui d'autres Canadiens? Non. Cette motion est un autre exemple de la même attitude qui consiste pour le gouvernement à faire adopter des mesures envers et contre tous.
Nous reconnaissons qu'il faudrait beaucoup de temps pour se prononcer sur 3 000 amendements. Le Président a encore un pouvoir discrétionnaire à cet égard. Cependant, ce ne sont pas les amendements qui nous préoccupent, mais la méthode utilisée pour passer le message. C'est ce qu'on appelle la démocratie.
Il n'est pas surprenant que les Canadiens perdent confiance dans la Chambre. Il est intéressant de noter que les députés d'en face le savent et y font allusion. Le député de Mississauga-Ouest a déclaré ce soir que l'un de ses électeurs lui aurait dit qu'il haïssait tous les politiciens sauf lui. Je pense que c'est probablement un membre de sa famille qui a dit cela, mais le fait est que les Canadiens perdent confiance en notre institution. Ils ne font plus confiance à la Chambre, car le débat est étouffé. Ils constatent le pouvoir du gouvernement, le pouvoir dictatorial du gouvernement, et leur incapacité d'obtenir un changement à la Chambre.
Ensuite, on commence à voir les premiers signes d'un séparatisme auquel nous ne souscrivons pas du tout, mais ces sentiments commencent à ressortir. J'espère qu'ils ne vont pas s'amplifier, mais c'est comme cela que les choses commencent.
Le ministre des Affaires intergouvernementales a parlé de chantage. Il n'en est rien. Les gens essaient de trouver des façons de s'exprimer et de se faire entendre. Si nous n'écoutons pas, les gens trouveront alors d'autres moyens de se faire entendre. C'est le fondement de ces amendements.
M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole sur la motion, même si nous ne sommes pas tous très heureux d'être ici à cette heure tardive. Une fois de plus, nous parlons du nouveau moyen qu'a trouvé le gouvernement pour restreindre le rôle légitime des députés de l'opposition à la Chambre.
Le gouvernement propose encore une fois de restreindre la capacité des députés de l'opposition de ralentir les travaux du gouvernement, un rôle décrit comme un rôle légitime des partis d'opposition tant dans le Beauchesne que dans Marleau et Montpetit. Encore une fois, le gouvernement va nous ôter, après le vote de ce soir, la capacité que nous avons de bloquer les mesures législatives émanant du gouvernement et d'informer le public des points de vue de l'opposition concernant les mesures législatives contestées.
Monsieur le Président, j'aimerais rappeler la mise en garde que je vous avais faite au sujet du premier recours à l'attribution de temps par le gouvernement au cours de la présente session. Je vous avais dit à l'époque que vous seriez appelé à un moment donné à intervenir pour départager les droits du gouvernement et le droit de l'opposition de jouer son rôle.
C'est la 70e fois que le gouvernement a limité le débat la Chambre. Le fait d'invoquer la clôture pour imposer des changements au Règlement n'est pas seulement choquant, c'est inexcusable. L'actuel ministre des Travaux publics avait dit en 1991, je cite:
Le gouvernement prétend que les changements proposés rendront les travaux de la Chambre plus pertinents et qu'ils aideront la Chambre à devenir plus efficace.
Cela vous rappelle-t-il quelque chose? Avons-nous entendu cela toute la soirée de la part des gens d'en face? Disent-ils que cela rendra le Parlement plus efficace? Je continue:
Tout d'abord, il faut comprendre qu'une telle proposition vient d'un gouvernement qui, depuis seulement 1988, a invoqué la clôture à 13 occasions différentes et qui a limité le temps alloué pour débattre des projets de loi importants à plus de huit reprises. Donc, comment peut-on prendre au sérieux un gouvernement qui propose d'améliorer l'efficacité de la Chambre alors que dans le passé il n'a démontré que du mépris pour le Règlement de la Chambre?
Le ministre des Travaux publics se plaignait d'un gouvernement ayant eu recours à l'attribution de temps et à la clôture à 21 reprises. Il a trouvé cela des plus révoltants. Le même député fait maintenant partie d'un gouvernement qui a eu recours à l'attribution de temps et à la clôture 70 fois, et non 21 fois, pour étouffer le débat.
Il devrait avoir honte de son leader parlementaire. Il devrait avoir honte de la façon dont le premier ministre gère le Parlement. Le fait qu'il n'ait pas honte montre que lord Acton est toujours vivant. Si le pouvoir corrompt, on peut dire que le pouvoir concentré dans le premier ministre est tel qu'il corrompt absolument celui qui l'exerce de façon presque absolue.
J'ai entendu ces amendements qualifiés de spécieux et de vexatoires. Parlons donc des arguments spécieux et vexatoires présentés par les gens d'en face. J'ai entendu que nous ne pouvons pas rien changer à moins de tout changer en même temps. D'abord, j'ai entendu qu'il fallait y aller à la pièce. Que ce n'était qu'une étape.
Comment se fait-il que chaque fois que le gouvernement fait un pas, il renforce toujours le pouvoir de l'exécutif? Comment se fait-il que chaque fois que le gouvernement étouffe le débat, il renforce le pouvoir du gouvernement?
Il restreint la liste des témoins, et il renforce le pouvoir du gouvernement. Il ne permet pas la tenue d'un vote libre pour l'élection d'un président de comité. Pourquoi? Parce que cela renforce le pouvoir du gouvernement. Pourquoi le whip vient-il à la dernière minute et retire-t-il d'un comité des membres qui y ont siégé avec assiduité pendant des mois? Pourquoi les remplace-t-il par des singes savants au moment de voter? Pourquoi? Parce que cela renforce l'emprise du gouvernement, le pouvoir exécutif.
Monsieur le Président, je suis convaincu que, à moins que vous n'interveniez pour mettre fin à l'étude de la motion, la question ne sera pas de savoir si nous devons continuer de siéger le vendredi, mais tout simplement pourquoi se donner la peine de siéger. J'ai fait cette déclaration qui a été publiée aujourd'hui dans The National Post. Pourquoi siéger si le gouvernement n'exprime que mépris pour la Chambre des communes? Chaque fois qu'il en a l'occasion, il fait une annonce, pas ici, à la Chambre des communes, mais ailleurs, n'importe où ailleurs.
Nous avons demandé au Président à maintes reprises au cours de la dernière législature comment le gouvernement pouvait faire ailleurs qu'à la Chambre des annonces portant sur des millions sinon des milliards de dollars et traiter la Chambre des communes comme si cela ne la regardait pas. Le Président de l'époque avait déclaré qu'il ferait des remontrances au gouvernement pour qu'il cesse ce manège. Il a dit que le gouvernement manquait de respect envers la Chambre des communes et qu'il ne le devrait pas.
Que s'est-il passé ensuite? Devinez un peu. Dès qu'il a eu une nouvelle annonce à faire, le gouvernement a traité la Chambre des communes comme une quantité négligeable et a fait comme si de rien n'était.
Monsieur le Président, vous devez intervenir et faire cesser cela. Vous devrez faire preuve d'autorité.
Ce qu'il faut retenir, c'est que le gouvernement bloque toute possibilité pour les partis d'opposition de présenter des amendements et on doit se demander pourquoi les députés de l'opposition ont cru bon de proposer tant d'amendements.
Je vais vous dire pourquoi, monsieur le Président. C'est parce que, lorsque nous nous retrouvons en comité, devinez un peu ce qui arrive à notre liste des témoins. Cette liste est tout simplement mise au rebut. Seuls les députés ministériels ont le droit de proposer des témoins.
Quand il s'est agi de l'Accord nisga'a, ils se sont déplacés jusqu'en Colombie-Britannique, soi-disant pour approcher la population. Ils n'ont pas voulu entendre les bandes indiennes qui revendiquaient les mêmes terres que les Nisga'as. Ils n'ont même pas voulu les entendre. Ils ont fait venir quelques témoins de Vancouver, pour les faire comparaître devant le comité. Ils n'ont pas voulu entendre les témoins de Prince George, de Prince Rupert et des bandes indiennes voisines. Ils n'ont pas voulu les écouter et ils ont clos le débat au comité. Ils ne nous ont pas permis de le poursuivre.
Le gouvernement a ramené le projet de loi à la Chambre. Il a fait appel à la clôture en comité. Il a limité le nombre de nos témoins. Il nous a empêchés de soumettre certaines questions à la Chambre. Quand l'heure de vérité a sonné, qu'est-il arrivé? Le gouvernement a usé de son pouvoir pour mettre encore une fois un terme au débat à la Chambre qui est justement un lieu de débat. Le gouvernement y a mis un terme, et c'est inadmissible. Le gouvernement a clos le débat à 70 reprises.
Savez-vous, monsieur le Président, ce qui est susceptible de se produire lorsque le gouvernement traite la Chambre avec mépris...
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, je vous prie. Je sais que nous voulons tous entendre le député de Fraser Valley. Il est n'est pas facile d'entendre si tout le monde chahute.
M. Chuck Strahl: Devinez, monsieur le Président, ce qui est susceptible de se produire quand le gouvernement clôt le débat, ce qu'il vient de faire pour la soixante-dixième fois d'affilée. Des gouvernements sont tombés pour avoir interrompu le débat. Que l'on se souvienne du débat sur les pipelines, à l'époque où c'était un crime odieux que d'interrompre le débat dans cette enceinte, mais devinez ce qui se passe ici aujourd'hui.
Le gouvernement a interrompu le débat sur le premier projet de loi dont la Chambre a été saisie au cours de la présente session. Au second jour du débat, il y a mis un terme. Il a présenté une motion d'attribution de temps. Il a décrété que nous ne pouvions plus en parler. Pourquoi? Pour la raison qu'il fallait le renvoyer au comité. L'ennui, c'est que les comités n'avaient pas encore été constitués. Le gouvernement met fin au débat de sorte qu'il puisse faire quoi avec le projet de loi, le garder tout simplement en suspens et attendre quoi, une apparition? Qu'est-ce qu'il attendait? Connaître l'expérience du chemin de Damas? Il n'en a rien fait.
Le gouvernement est tout simplement habitué à mettre fin au débat. Il a tellement peur des autres points de vue qu'il met fin au débat même quand il n'a aucune raison de le faire. Il n'y avait même pas de comité auquel renvoyer le projet de loi. Nous en étions à la deuxième journée de débat, mais le gouvernement a tout simplement mis fin au débat à la Chambre. Les députés ministériels ont dit qu'ils ne voulaient pas écouter qui que ce soit de l'autre côté de la Chambre. Ils ont dit: «Quiconque n'est pas d'accord avec nous ne compte pas. La Chambre ne compte pas.»
Qu'arrive-t-il alors? Les partis d'opposition trouvent des moyens de se faire entendre. Il le faut bien. Nous avons pour tâche de nous opposer légitimement au gouvernement. Au lieu de nous laisser une période de temps raisonnable pour débattre d'un projet de loi, au lieu de nous laisser entendre un nombre raisonnable de témoins, au lieu de nous laisser travailler en comité, de faire des concessions et d'apporter des amendements et ainsi de suite, que fait le gouvernement? Il envoie siéger les secrétaires parlementaires dans les comités, où ils disent aux autres membres ce qu'ils doivent faire, quels amendements ils laisseront adopter et quel genre de mesure ils laisseront passer dans le système.
Voilà ce que fait le gouvernement au lieu de faire des concessions, de discuter, de proposer des amendements, d'améliorer les projets de loi et d'écouter un point de vue auquel il n'avait peut-être pas songé. Le gouvernement ne le fait jamais, même quand il pourrait le faire et que ça ne lui nuirait pas du tout. Non, cela ne fait pas partie de son programme législatif ou ne figure même pas dans le discours du Trône. Le gouvernement ne veut pas écouter un point de vue contraire.
Monsieur le Président, quand a été lancée cette idée de vous donner le pouvoir de limiter le nombre des amendements qui pourraient être présentés à l'étape du rapport, j'ai parlé avec le leader du gouvernement à la Chambre. J'ai dit que si nous étions pour faire cela, nous devrions aller jusqu'au bout comme au Royaume-Uni. C'est même indiqué dans la motion. Parlons des autres points. Permettons au Président d'intervenir quand il estime que le débat n'a pas été suffisamment long. Permettons au Président d'intervenir quand il pense que les droits des minorités ont été injustement enfreints. Accordons au Président le vrai pouvoir d'intervenir non seulement contre l'opposition, mais aussi en faveur des partis minoritaires afin que leurs points de vue puissent être exprimés.
Cependant, rien de cela ne s'est produit. Pourquoi? Parce que chaque amendement au Règlement, aux règles de la Chambre, à la façon de mener les travaux de la Chambre renforce la main de l'exécutif d'en face et affaiblit celle des simples députés ministériels et des partis de l'opposition.
Monsieur le Président, le temps est venu pour vous d'intervenir, d'utiliser l'influence dont vous bénéficiez pour ordonner la tenue d'un débat. Vous avez été élu, monsieur, pour nous assurer des débats équitables. Les points de vue opposés doivent être entendus.
Monsieur le Président, si vous continuez de permettre au gouvernement de traiter la Chambre d'endroit de deuxième ordre au lieu d'une enceinte de premier ordre comme il se doit, non seulement l'électorat canadien continuera de nous trouver de plus en plus inutiles, mais les députés penseront aussi de même. Ce sera la honte extrême que de permettre à ces genres de motions d'être adoptées à la Chambre.
M. Gar Knutson (Elgin—Middlesex—London, Lib.): Monsieur le Président, je suis honoré de me lever pour prononcer mon premier discours en cette trente-septième législature.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, je voudrais féliciter le député qui a pris la parole avant moi. Il a présenté des arguments très logiques et très convaincants. Je conviens que l'opposition devrait se préoccuper des pouvoirs du gouvernement.
Nous évoluons dans un système qui confère énormément de pouvoir au premier ministre et au gouvernement. Si les gens d'en face s'étaient donné la peine un jour de suivre un cours de première année de sciences politiques, ils sauraient que cela fait partie de notre système. Il serait bon d'avoir un débat pour déterminer si le système est bon ou non. Cela ne dépend pas du premier ministre, ni de la personne qui occupe actuellement ce poste. Cela dépend des règles qui nous régissent, et ces règles présentent des avantages.
Monsieur le Président, je signale que je partage mon temps avec mon collègue de Scarborough—Rouge River.
Je ferai remarquer aux gens d'en face que notre débat devrait avoir pour objet de nous demander si notre Parlement, nos règles et notre régime répondent aux besoins du Canada du XXIe siècle.
Je devais intervenir aujourd'hui dans le débat sur le projet de loi sur les espèces en péril. Ce devait être mon premier discours. J'aurais nettement préféré intervenir sur une question fondamentale comme celle des espèces en péril ou de l'environnement. De plus, j'ai regardé les actualités ce soir, et les nouvelles économiques ne sont pas réjouissantes. J'aurais préféré de loin parler d'économie ou de questions que les Canadiens jugent pressantes.
À la place, nous parlons du droit du Président de faire respecter le Règlement. Nous nous demandons s'il est correct que les partis d'opposition monopolisent les travaux de la Chambre pendant trois, quatre, cinq ou six jours pour décider s'il faut déplacer une virgule ou remplacer un point par un point virgule. Nous parlons d'amendements à caractère répétitif, frivole ou abusif. C'est le droit auquel l'opposition tient tant.
La motion présentée dit ceci:
Il est entendu que l'Orateur ne choisit pas, pour la tenue d'un débat, une motion ou une série de motions à caractère répétitif, frivole ou abusif...
Rien dans le libellé de cette motion n'empêchera l'opposition de présenter des centaines d'amendements de fond. Toutefois, il devra s'agir d'amendements de fond, et pas d'amendements ridicules comme ceux que nous avons vus à la dernière législature. Ils devront porter sur des idées. On peut avoir un débat sur des idées, mais pas sur des personnalités. Nous pourrions avoir un débat sérieux au cours des prochains mois sur la réforme parlementaire.
Cessons de nous accuser les uns les autres d'être des marionnettes. Parlons de la façon dont on fait fonctionner le système. Nous sommes au XXIe siècle. Discutons des moyens d'améliorer le système pour mieux servir les Canadiens. Cela ne veut pas dire passer trois, quatre, cinq, six jours ou plus à débattre uniquement de la place d'une virgule. Je regrette, mais ce n'est pas la raison pour laquelle les Canadiens nous ont demandé de venir les représenter ici. Ce n'est pas la raison pour laquelle j'ai été élu.
Mes électeurs veulent que je me concentre sur des questions de fond, des questions qui comptent pour eux, des questions comme la qualité de l'air et la pérennité de l'emploi. Ils ne veulent pas que nous concentrions notre attention sur pareilles futilités.
Voilà pourquoi je trouve cette motion parfaitement légitime. Tout ce qu'elle fait, c'est dire au Président d'appliquer le Règlement. Si on veut un débat sur l'opportunité de modifier le Règlement, alors faisons cela aussi.
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais faire quelques observations avant que le débat ne prenne fin. Je suis d'avis que le débat était plutôt relevé ce soir et j'estime que la majorité d'entre nous a eu l'occasion de faire connaître ses vues sur la question à l'étude.
Je tiens à situer ce débat dans une perspective historique. Qu'est-ce qui nous a menés ici? Pourquoi discutons-nous de ce changement au Règlement? À mon avis, ce n'est pas vraiment un changement de Règlement. Je suis convaincu que tous les députés ont lu le Règlement actuel, et celui-ci précise clairement que le Président a le pouvoir de choisir les amendements qui seront proposés à l'étape du rapport.
Monsieur le Président, vous avez déjà le pouvoir de choisir les amendements à l'étape du rapport. Le problème, justement, c'est que le Président ne choisit pas les amendements à l'étape du rapport. Il les regroupe aux fins du vote ou du débat, mais il ne les choisit pas.
Pourquoi le président ne les choisit-il pas à l'heure actuelle? Il ne les choisit pas parce qu'il y a 20 ou 30 ans un président a décidé qu'il ne le ferait pas. Avec l'évolution de la pratique, nous avons fini par avoir beaucoup d'amendements. Le président ne choisissait toujours pas les amendements proposés jusqu'à ce que nous aboutissions dans la situation actuelle où nous avons 400, 500 ou même 3 000 amendements, parce que le président n'utilise pas le pouvoir que lui confère le Règlement actuel. On pourrait nous obliger ainsi à voter 24 heures par jour, pendant des jours ou même des semaines. La Chambre a connu cette situation il y a un an ou deux. Il était clair pour tous les députés que nous ne pouvions continuer à agir de la sorte.
Nous pourrions nous demander pourquoi nous devons proposer ce petit changement au Règlement si le Président a déjà le pouvoir de déterminer quels amendements sont recevables, ce qui signifie qu'il peut exclure des amendements qui ont été proposés. Cela s'explique, je crois, par le fait que le Président se sentait un peu coincé par l'évolution des pratiques et qu'il ne voulait pas prendre une mesure qui ne répondait pas à la façon dont les choses avaient évolué.
J'étais en voyage à Westminster il y a un an ou deux quand a eu lieu le vote qui a duré toute une nuit sur la question du projet de loi sur la clarté référendaire. Je me trouvais au Parlement au Royaume-Uni. Lorsqu'ils ont entendu parler de ce marathon de votes, les députés et les greffiers britanniques m'ont demandé ce qui se passait. Ils ne comprenaient pas. Je ne comprenais pas non plus. Je ne pouvais pas leur expliquer comment notre Chambre avait pu permettre qu'une telle situation, dans laquelle plus de 10 000 amendements avaient été déposés à l'étape du rapport, puisse se produire. Notre Règlement ne prévoyait aucune restriction. Avec le temps, les présidents en étaient venus à considérer que cela n'avait aucune importance qu'il y ait un seul amendement, ou 100 ou 1 000 ou même encore 10 000.
Je me suis donc informé de ce qui se passait au Royaume-Uni. Normalement, en vertu d'un règlement qui est semblable au nôtre et de pratiques également semblables aux nôtres, le Président choisit les points qu'il convient de soumettre au débat, rejetant tous les amendements pouvant être considérés comme frivoles, abusifs ou répétitifs ou qui n'auraient pour but que de prolonger inutilement le processus.
Tout ce que nous avons fait ici a été de proposer, dans un but de clarté pour le Président, une règle générale qui lui permettrait de faire une sélection en rejetant tout ce qui peut être considéré comme frivole, abusif ou répétitif ou qui n'aurait pour but que de prolonger inutilement le processus.
L'opposition croit qu'on l'empêche de le faire.
M. Peter MacKay: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Étant donné que le député d'en face, le secrétaire parlementaire a essentiellement décrit ce que pense le Président et ce qu'il a décidé en la matière, ce qui est certainement hors de l'ordinaire, je soutiens que c'est tout à fait inadmissible. Le Président est certainement en mesure d'exprimer lui-même son avis. Je sais que c'est contraire à la pratique courante, mais le Président voudrait peut-être aborder lui-même la question.
Le Président: Je remercie le député de Pictou—Antigonish—Guysborough de penser à moi. Il sait sûrement que le député de Scarborough—Rouge River voulait parler de la présidence, car je n'ai, quant à moi, aucune opinion à formuler en ce qui concerne un sujet comme celui-ci.
M. Derek Lee: Monsieur le Président, les députés de l'opposition prétendent qu'on réduit leur champ d'action, qu'on les empêche de faire des choses qu'ils devraient pouvoir accomplir en tant qu'opposition au gouvernement. L'opposition a effectivement un rôle à jouer.
Disons simplement que, ce soir, les partis d'opposition jouent très bien leur rôle. Toutefois, nous voulons que le Règlement leur interdise de présenter une motion à caractère répétitif, frivole ou abusif ou de nature à prolonger inutilement le débat. Il ne s'agit pas à mon avis d'un changement monumental au Règlement.
Des voix: Oh, oh!
M. Derek Lee: Je constate que le parti au bout de la Chambre commence à s'intéresser au débat. C'est bien de les voir participer à ce stade-ci.
Permettez-moi de conclure en disant que ce changement au Règlement n'a pas tellement de conséquence. Il n'accorde pas à la présidence plus de pouvoirs qu'elle n'en a actuellement. Il ne fait que lui donner des directives lui permettant de prendre des mesures qu'elle aurait dû appliquer depuis longtemps, ce qui lui était impossible à cause de la lente évolution des pratiques à la Chambre.
Il me semble que la présidence ne pourra que se réjouir d'obtenir ce genre de directive de la part de l'ensemble des députés.
[Français]
M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, avant d'arriver ici, je me demandais ce que le gouvernement cherchait exactement par cette motion et pourquoi on en était rendu à vouloir imposer ce genre de motion à l'opposition.
Je pense que c'est très grave ce sur quoi la Chambre s'apprête à voter ce soir. Le gouvernement d'en face semble tenir deux discours, selon que les personnes sont du côté de l'opposition ou du côté du gouvernement. Je me souviens fort bien, lorsque le parti gouvernemental occupait les banquettes de ce côté-ci de la Chambre, qu'il poussait les hauts cris parce que le gouvernement conservateur imposait des bâillons grâce à sa majorité.
Avant de voter sur cette motion, la question qu'il faut se poser est la suivante: est-ce que l'opposition a exagéré?
Des voix: Bravo!
M. Michel Bellehumeur: Le leader du gouvernement à la Chambre applaudit comme un enfant de cinq ans. Il peut bien le faire ce soir.
Mais est-ce que l'opposition a empêché le Parlement d'être gouverné? Est-ce qu'il y a eu de l'exagération en ce qui a trait à l'utilisation des outils législatifs et des outils réglementaires? C'est cette question que nous devons nous poser ce soir avant de voter.
Si quelqu'un a exagéré dans l'utilisation des moyens législatifs dont il dispose, c'est bien le gouvernement. C'est le gouvernement qui a exagéré dans l'utilisation des bâillons, entre autres.
Je suis certain qu'on se souvient du «Rat Pack»; cela, c'était quand les libéraux formaient l'opposition. Ils ont décrié le gouvernement d'alors et aujourd'hui, un des membres du «Rat Pack» est le leader du gouvernement à la Chambre, et il est fier de cela. C'est antidémocratique.
Si on regarde les statistiques, le gouvernement conservateur a utilisé le bâillon 49 fois pour 519 projets de loi. Le gouvernement libéral, pour une période de temps plus courte, l'a utilisé à 17,9 p. 100 pour 350 projets de loi. Est-ce que c'est ça, un gouvernement responsable?
L'hon. Stéphane Dion: On est un gouvernement responsable, pas comme vous.
M. Michel Bellehumeur: J'entends le ministre des Affaires intergouvernementales dire que le gouvernement est responsable parce qu'il bâillonne l'opposition. En bâillonnant l'opposition, on bâillonne également la démocratie. Est-ce que c'est cela un gouvernement responsable pour le ministre des Affaires intergouvernementales? Je comprends qu'il est aussi le ministre le plus aimé au Québec.
Pourquoi est-ce que la motion d'aujourd'hui, et je pense qu'il faut la lire, copie l'exemple de la Chambre des communes du Royaume-Uni. Même si on a une histoire britannique, la Chambre des communes du Royaume-Uni n'a pas toutes les mêmes législations que nous.
Avant de prononcer mon discours, je m'interrogeais. Le gouvernement d'en face veut bâillonner l'opposition parce qu'on fait notre travail. Oui, je plaide coupable d'avoir déposé à la Chambre 3 000 amendements sur un projet de loi. Encore une fois, le ministre des Affaires intergouvernementales applaudit.
Si j'ai déposé 3 000 amendements au projet de loi sur les jeunes contrevenants, c'est parce qu'au Québec, personne ne veut du projet de loi de la ministre. Grâce à mes 3 000 amendements, le gouvernement a fait ses devoirs encore davantage. Parce que dans ce même projet de loi, le gouvernement a déposé 170 à 200 amendements. Dans certains de ces amendements—et je vous invite à les lire—il a déplacé des virgules. Est-ce que c'est un amendement frivole, comme la motion le dit?
Monsieur le Président, quand vous allez rendre une décision à ce sujet, est-ce que vous allez rejeter un amendement du gouvernement? Non. Le leader parlementaire peut bien regarder ses papiers, parce que j'aurais honte à sa place de faire cela.
Nous sommes dans un drôle de pays ici, parce qu'on peut bâillonner l'opposition. On veut m'enlever des droits prévus dans la Constitution, soit le droit de pouvoir m'exprimer dans cette Chambre.
Le gouvernement ne bouge pas quand il s'agit des Hell's Angels. Ils ont des droits constitutionnels. La mafia et les milieux du crime organisé ont des droits constitutionnels. Mais nous, cependant, nous sommes élus démocratiquement. Il y a quand même quelque chose d'ironique. Je ne comprends pas qu'il y ait des députés du Québec qui s'apprêtent à voter en faveur de cela.
Aujourd'hui, sous le couvert de la Charte canadienne des droits et libertés, on peut à peu près tout faire. On peut même avoir un site avec des propos calomnieux. Dans un jugement de la Cour suprême, on dit même que quelqu'un pouvait faire des petits dessins pornographiques dans son logement, si c'était pour sa consommation personnelle. C'est la liberté d'expression.
Mais nous avons eu un mandat légitime, suite à une élection. Nous venons ici pour défendre les intérêts de nos commettants et de nos commettantes, comme ce fut le cas pour les 3 000 amendements que j'ai déposés à la Loi sur les jeunes contrevenants. Ce n'était pas parce que je me tapais un «trip» de pouvoir proposer des amendements. C'est parce que je représentais adéquatement la population du Québec, ce que les ministres québécois ne font pas présentement en s'assoyant sur leur «steak» et en ayant une main sur la poignée de leur limousine.
Ils devraient se lever et appuyer le Bloc québécois dans un projet de loi semblable. Mais non. Où sont les députés du Québec dans le caucus ministériel pour défendre les intérêts du Québec?
Cela va plus loin que cela. Ce n'est même pas une question de parti aujourd'hui, c'est une question de démocratie, parce qu'un jour, vous allez être dans l'opposition, vous allez y retourner.
Où est la députée de Laval-Ouest quand vient le temps de défendre les intérêts du Québec dans un dossier comme celui de la Loi sur les jeunes contrevenants? Elle se cache derrière les rideaux, comme tous les ministres des banquettes avant, comme le ministre des Affaires intergouvernementales. Où est-il? Et aujourd'hui, il va s'abrier et se cacher derrière une motion dans laquelle les libéraux font référence «au Royaume-Uni». Mais le Royaume-Uni n'a pas de Constitution canadienne, cette belle Constitution dans «le plus beau pays du monde» du premier ministre, avec les polices montées et tout le reste.
Sincèrement, et je vais reprendre les mots de mon leader, je n'envie pas votre charge, monsieur le Président, lorsque le Parlement aura adopté cette motion. J'ai hâte de voir ce que ce sera pour vous que d'être répétitif, frivole, abusif.
Est-ce que le geste de la ministre de la Justice, quand elle a déplacé une virgule dans son projet de loi C-3, était frivole? Est-ce que c'est abusif? Alors que nous savons que le législateur ne parle pas pour ne rien dire, la petite virgule peut faire une différence dans l'interprétation. Je ne dis pas que la ministre ne devait pas mettre une virgule, ne devait pas changer le vocabulaire comme elle l'a fait, ce que je dis, monsieur le Président, c'est que vous allez être dans une position très inconfortable quand il vous faudra décider de ce qui sera considéré comme frivole et ce qui ne le sera pas.
Très honnêtement, vous allez vous trouver sur une ligne très difficile à franchir. Et éventuellement, cela va se retourner contre une personne, celle qui occupe le fauteuil.
M. Guy St-Julien: Alors, on changera de Président.
M. Michel Bellehumeur: Le député d'en face vient de me donner une réponse: «on n'a qu'à changer de Président». J'ai plus de respect pour vous, monsieur le Président, que les députés d'en face. Au tout début de mon exposé, j'ai posé une question...
M. Guy St-Julien: On n'a qu'à changer l'opposition.
M. Michel Bellehumeur: J'invite les députés d'en face qui font des commentaires à regarder au moins leur propre bilan, surtout le député d'Abitibi qui dépose des motions sans même être capable de trouver un appuyeur dans son propre parti.
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît.
M. Guy St-Julien: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Il n'a pas dit toute la vérité. Il aurait pu dire le nom de mon comté au complet, Abitibi—Baie-James—Nunavik. De plus, j'ai réussi à faire mon discours quand même.
Le Président: Je crois que c'est un point d'argument, mais pas un recours au Règlement.
M. Michel Bellehumeur: Monsieur le Président, j'étais présent à la Chambre, et je peux dire que cela a été très laborieux pour le député de se trouver quelqu'un pour appuyer sa motion et être capable de finir son discours.
Cela étant dit, je vais finir par une citation tirée du volume Marleau-Montpetit. Le gouvernement veut donner des leçons de démocratie, mais si on savait tout ce qui se dit en avant de nous pendant qu'on fait des discours...
M. Yvan Loubier: C'est honteux.
M. Michel Bellehumeur: ...c'est assez honteux pour la démocratie canadienne. Je vais essayer de m'élever un peu plus haut que les libéraux.
M. Pierre Paquette: Ce ne sera pas difficile.
M. Michel Bellehumeur: Dans le livre intitulé La procédure et les usages de la Chambre des communes, page 260, on lit ce qui suit:
Les fonctions du Président de la Chambre des communes consistent à concilier les droits et les intérêts de la majorité et de la minorité à la Chambre afin de veiller à la conduite efficiente des affaires publiques, de même qu'à la défense et à la protection des intérêts de toutes les parties de la Chambre contre l'application d'un pouvoir arbitraire.
Un peu plus loin, c'est encore plus intéressant:
[...] le Président est au service non pas d'une partie de la Chambre ou d'une majorité de ses députés, mais de l'institution tout entière et de ses meilleurs intérêts, fixés dans ses pratiques au fil des générations.
J'étais présent lorsque le leader du gouvernement a déposé cette motion. Il a dit que, finalement, cela ne changeait pas grand-chose, parce que la présidence faisait déjà ce travail. J'invite le gouvernement à ne pas aller plus loin et à retirer cette motion, parce qu'effectivement la présidence a, jusqu'à maintenant, utilisé à bon escient ses pouvoirs.
Dans un projet de loi comme celui sur les jeunes contrevenants, sur les 3 000 amendements que j'ai déposés, le président en a quand même accepté 2 977. C'est donc la preuve que ces amendements n'étaient pas si futiles et que la présidence pourrait très bien continuer à faire ce travail comme elle le fait présentement.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Comme il est 11 h 01, il est de mon devoir d'interrompre les délibérations et de mettre aux voix sur-le-champ toute question nécessaire pour disposer de la motion dont la Chambre est maintenant saisie.
La question porte sur l'amendement. Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de l'amendement veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le Président: À mon avis, les non l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
Le Président: Convoquez les députés.
(L'amendement, mis aux voix, est rejeté par le vote suivant:)
Vote no 13
POUR
Députés
Abbott | Anders | Anderson (Cypress Hills – Grasslands) | Benoit |
Blaikie | Borotsik | Breitkreuz | Brison |
Cadman | Casson | Clark | Comartin |
Cummins | Davies | Day | Desjarlais |
Duncan | Elley | Epp | Forseth |
Gallant | Gallaway | Godin | Grewal |
Grey (Edmonton North) | Hanger | Harris | Hearn |
Herron | Hilstrom | Hinton | Keddy (South Shore) |
Kenney (Calgary Southeast) | Lill | Lunney (Nanaimo – Alberni) | MacKay (Pictou – Antigonish – Guysborough) |
Mark | Martin (Esquimalt – Juan de Fuca) | Martin (Winnipeg Centre) | McDonough |
McNally | Meredith | Merrifield | Mills (Red Deer) |
Moore | Obhrai | Pankiw | Peschisolido |
Proctor | Rajotte | Reid (Lanark – Carleton) | Reynolds |
Robinson | Schmidt | Skelton | Solberg |
Sorenson | Spencer | Stinson | Stoffer |
Strahl | Vellacott | Wasylycia - Leis | White (Langley – Abbotsford) |
Williams | Yelich – 66 |
CONTRE
Députés
Adams | Alcock | Allard | Anderson (Victoria) |
Assad | Assadourian | Augustine | Bachand (Saint - Jean) |
Bagnell | Baker | Beaumier | Bélanger |
Bellehumeur | Bellemare | Bennett | Bergeron |
Bertrand | Bevilacqua | Bigras | Binet |
Blondin - Andrew | Bonin | Bonwick | Boudria |
Bourgeois | Bradshaw | Brien | Brown |
Bryden | Bulte | Byrne | Caccia |
Calder | Caplan | Cardin | Carignan |
Carroll | Castonguay | Catterall | Cauchon |
Chamberlain | Charbonneau | Coderre | Collenette |
Comuzzi | Cotler | Crête | Cullen |
Cuzner | Dalphond - Guiral | Desrochers | DeVillers |
Dion | Dromisky | Dubé | Duceppe |
Duhamel | Duplain | Easter | Eggleton |
Eyking | Finlay | Folco | Fontana |
Fry | Gagliano | Gagnon (Champlain) | Gauthier |
Girard - Bujold | Godfrey | Goodale | Graham |
Grose | Guarnieri | Guay | Guimond |
Harb | Harvard | Harvey | Hubbard |
Jackson | Jennings | Jordan | Karetak - Lindell |
Keyes | Kilgour (Edmonton Southeast) | Knutson | Kraft Sloan |
Laframboise | Laliberte | Lalonde | Lanctôt |
Lastewka | Lebel | LeBlanc | Lee |
Leung | Lincoln | Longfield | Loubier |
MacAulay | Macklin | Mahoney | Malhi |
Maloney | Marceau | Marcil | Marleau |
Martin (LaSalle – Émard) | Matthews | McCallum | McCormick |
McKay (Scarborough East) | McTeague | Ménard | Mitchell |
Murphy | Myers | Neville | Normand |
O'Brien (London – Fanshawe) | O'Reilly | Owen | Pagtakhan |
Paquette | Paradis | Parrish | Patry |
Peric | Peterson | Phinney | Picard (Drummond) |
Pickard (Chatham – Kent Essex) | Pillitteri | Plamondon | Pratt |
Price | Proulx | Provenzano | Redman |
Regan | Robillard | Roy | Sauvageau |
Savoy | Scherrer | Scott | Sgro |
Shepherd | St. Denis | St - Hilaire | St - Jacques |
St - Julien | Steckle | Stewart | Szabo |
Telegdi | Thibeault (Saint - Lambert) | Tirabassi | Tobin |
Tonks | Torsney | Tremblay (Rimouski - Neigette - et - la Mitis) | Ur |
Vanclief | Venne | Whelan – 167 |
«PAIRÉS»
Députés
Discepola | Fournier | Gagnon (Québec) | Girard - Bujold |
Gray (Windsor West) | McLellan | Reed (Halton) | Rocheleau |
Rock | Tremblay (Lac - Saint - Jean – Saguenay) |
Le Président: Je déclare l'amendement rejeté.
Le prochain vote porte sur la motion principale. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le Président: Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le Président: À mon avis, les non l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
[Traduction]
Mme Marlene Catterall: Monsieur le Président, je crois que si vous le demandiez, vous constateriez qu'il y a consentement unanime pour que les députés qui ont voté sur la motion précédente soient inscrits comme ayant voté sur la motion dont la Chambre est maintenant saisie, les députés libéraux votant oui.
[Français]
Le Président: Consent-on à procéder de cette façon?
Des voix: D'accord.
[Traduction]
M. John Reynolds: Monsieur le Président, l'Alliance canadienne vote contre cette motion.
[Français]
M. Stéphane Bergeron: Monsieur le Président, les députés du Bloc québécois s'opposent à cette motion.
M. Yvon Godin: Monsieur le Président, les députés du Nouveau Parti démocratique votent non sur cette motion.
[Traduction]
M. Rick Borotsik: Monsieur le Président, les députés progressistes conservateurs votent contre cette motion.
M. Roger Gallaway: Monsieur le Président, je tiens à signaler que je vote contre la motion.
[Français]
(La motion mise aux voix est adoptée par le vote suivant:)
Vote no 14
POUR
Députés
Adams | Alcock | Allard | Anderson (Victoria) |
Assad | Assadourian | Augustine | Bagnell |
Baker | Beaumier | Bélanger | Bellemare |
Bennett | Bertrand | Bevilacqua | Binet |
Blondin - Andrew | Bonin | Bonwick | Boudria |
Bradshaw | Brown | Bryden | Bulte |
Byrne | Caccia | Calder | Caplan |
Carignan | Carroll | Castonguay | Catterall |
Cauchon | Chamberlain | Charbonneau | Coderre |
Collenette | Comuzzi | Cotler | Cullen |
Cuzner | DeVillers | Dion | Dromisky |
Duhamel | Duplain | Easter | Eggleton |
Eyking | Finlay | Folco | Fontana |
Fry | Gagliano | Godfrey | Goodale |
Graham | Grose | Guarnieri | Harb |
Harvard | Harvey | Hubbard | Jackson |
Jennings | Jordan | Karetak - Lindell | Keyes |
Kilgour (Edmonton Southeast) | Knutson | Kraft Sloan | Laliberte |
Lastewka | LeBlanc | Lee | Leung |
Lincoln | Longfield | MacAulay | Macklin |
Mahoney | Malhi | Maloney | Marcil |
Marleau | Martin (LaSalle – Émard) | Matthews | McCallum |
McCormick | McKay (Scarborough East) | McTeague | Mitchell |
Murphy | Myers | Neville | Normand |
O'Brien (London – Fanshawe) | O'Reilly | Owen | Pagtakhan |
Paradis | Parrish | Patry | Peric |
Peterson | Phinney | Pickard (Chatham – Kent Essex) | Pillitteri |
Pratt | Price | Proulx | Provenzano |
Redman | Regan | Robillard | Savoy |
Scherrer | Scott | Sgro | Shepherd |
St. Denis | St - Jacques | St - Julien | Steckle |
Stewart | Szabo | Telegdi | Thibeault (Saint - Lambert) |
Tirabassi | Tobin | Tonks | Torsney |
Ur | Vanclief | Whelan – 136 |
CONTRE
Députés
Abbott | Anders | Anderson (Cypress Hills – Grasslands) | Bachand (Saint - Jean) |
Bellehumeur | Benoit | Bergeron | Bigras |
Blaikie | Borotsik | Bourgeois | Breitkreuz |
Brien | Brison | Cadman | Cardin |
Casson | Clark | Comartin | Crête |
Cummins | Dalphond - Guiral | Davies | Day |
Desjarlais | Desrochers | Dubé | Duceppe |
Duncan | Elley | Epp | Forseth |
Gagnon (Champlain) | Gallant | Gallaway | Gauthier |
Girard - Bujold | Godin | Grewal | Grey (Edmonton North) |
Guay | Guimond | Hanger | Harris |
Hearn | Herron | Hilstrom | Hinton |
Keddy (South Shore) | Kenney (Calgary Southeast) | Laframboise | Lalonde |
Lanctôt | Lebel | Lill | Loubier |
Lunney (Nanaimo – Alberni) | MacKay (Pictou – Antigonish – Guysborough) | Marceau | Mark |
Martin (Esquimalt – Juan de Fuca) | Martin (Winnipeg Centre) | McDonough | McNally |
Ménard | Meredith | Merrifield | Mills (Red Deer) |
Moore | Obhrai | Pankiw | Paquette |
Peschisolido | Picard (Drummond) | Plamondon | Proctor |
Rajotte | Reid (Lanark – Carleton) | Reynolds | Robinson |
Roy | Sauvageau | Schmidt | Skelton |
Solberg | Sorenson | Spencer | St - Hilaire |
Stinson | Stoffer | Strahl | Tremblay (Rimouski - Neigette - et - la Mitis) |
Vellacott | Venne | Wasylycia - Leis | White (Langley – Abbotsford) |
Williams | Yelich – 97 |
«PAIRÉS»
Députés
Discepola | Fournier | Gagnon (Québec) | Girard - Bujold |
Gray (Windsor West) | McLellan | Reed (Halton) | Rocheleau |
Rock | Tremblay (Lac - Saint - Jean – Saguenay) |
Le Président: Je déclare la motion adoptée.
* * *
LA LOI ÉLECTORALE DU CANADA
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 23 février, de la motion: Que le projet de loi C-9, Loi modifiant la Loi électorale du Canada et la Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
Le Président: Conformément à l'ordre adopté le vendredi 23 février 2001, la Chambre procédera maintenant au vote par appel nominal différé sur la motion à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-9.
Mme Marlene Catterall: Monsieur le Président, vous constaterez qu'il y a unanimité pour que les députés qui ont voté sur la motion précédente soient enregistrés comme ayant voté sur la motion dont la Chambre est actuellement saisie, les députés libéraux ayant voté oui.
Le Président: Est-ce qu'il y a consentement unanime de la Chambre afin de procéder de cette façon?
Des voix: D'accord.
[Traduction]
M. John Reynolds: Monsieur le Président, l'Alliance canadienne vote contre cette motion.
[Français]
M. Stéphane Bergeron: Monsieur le Président, les députés du Bloc québécois sont en faveur de cette motion.
[Traduction]
M. Yvon Godin: Monsieur le Président, les députés néo-démocrates votent en faveur de cette motion.
[Français]
M. Rick Borotsik: Monsieur le Président, les députés du Parti progressiste-conservateur votent oui sur cette motion.
(La motion, mise aux voix, est adoptée par le vote suivant:)
Vote no 15
POUR
Députés
Adams | Alcock | Allard | Anderson (Victoria) |
Assad | Assadourian | Augustine | Bachand (Saint - Jean) |
Bagnell | Baker | Beaumier | Bélanger |
Bellehumeur | Bellemare | Bennett | Bergeron |
Bertrand | Bevilacqua | Bigras | Binet |
Blaikie | Blondin - Andrew | Bonin | Bonwick |
Borotsik | Boudria | Bourgeois | Bradshaw |
Brien | Brison | Brown | Bryden |
Bulte | Byrne | Caccia | Calder |
Caplan | Cardin | Carignan | Carroll |
Castonguay | Catterall | Cauchon | Chamberlain |
Charbonneau | Clark | Coderre | Collenette |
Comartin | Comuzzi | Cotler | Crête |
Cullen | Cuzner | Dalphond - Guiral | Davies |
Desjarlais | Desrochers | DeVillers | Dion |
Dromisky | Dubé | Duceppe | Duhamel |
Duplain | Easter | Eggleton | Eyking |
Finlay | Folco | Fontana | Fry |
Gagliano | Gagnon (Champlain) | Gallaway | Gauthier |
Girard - Bujold | Godfrey | Godin | Goodale |
Graham | Grose | Guarnieri | Guay |
Guimond | Harb | Harvard | Harvey |
Hearn | Herron | Hubbard | Jackson |
Jennings | Jordan | Karetak - Lindell | Keddy (South Shore) |
Keyes | Kilgour (Edmonton Southeast) | Knutson | Kraft Sloan |
Laframboise | Laliberte | Lalonde | Lanctôt |
Lastewka | Lebel | LeBlanc | Lee |
Leung | Lill | Lincoln | Longfield |
Loubier | MacAulay | MacKay (Pictou – Antigonish – Guysborough) | Macklin |
Mahoney | Malhi | Maloney | Marceau |
Marcil | Marleau | Martin (LaSalle – Émard) | Martin (Winnipeg Centre) |
Matthews | McCallum | McCormick | McDonough |
McKay (Scarborough East) | McTeague | Ménard | Mitchell |
Murphy | Myers | Neville | Normand |
O'Brien (London – Fanshawe) | O'Reilly | Owen | Pagtakhan |
Paquette | Paradis | Parrish | Patry |
Peric | Peterson | Phinney | Picard (Drummond) |
Pickard (Chatham – Kent Essex) | Pillitteri | Plamondon | Pratt |
Price | Proctor | Proulx | Provenzano |
Redman | Regan | Robillard | Robinson |
Roy | Sauvageau | Savoy | Scherrer |
Scott | Sgro | Shepherd | St. Denis |
St - Hilaire | St - Jacques | St - Julien | Steckle |
Stewart | Stoffer | Szabo | Telegdi |
Thibeault (Saint - Lambert) | Tirabassi | Tobin | Tonks |
Torsney | Tremblay (Rimouski - Neigette - et - la Mitis) | Ur | Vanclief |
Venne | Wasylycia - Leis | Whelan – 187 |
CONTRE
Députés
Abbott | Anders | Anderson (Cypress Hills – Grasslands) | Benoit |
Breitkreuz | Cadman | Casson | Cummins |
Day | Duncan | Elley | Epp |
Forseth | Gallant | Grewal | Grey (Edmonton North) |
Hanger | Harris | Hilstrom | Hinton |
Kenney (Calgary Southeast) | Lunney (Nanaimo – Alberni) | Mark | Martin (Esquimalt – Juan de Fuca) |
McNally | Meredith | Merrifield | Mills (Red Deer) |
Moore | Obhrai | Pankiw | Peschisolido |
Rajotte | Reid (Lanark – Carleton) | Reynolds | Schmidt |
Skelton | Solberg | Sorenson | Spencer |
Stinson | Strahl | Vellacott | White (Langley – Abbotsford) |
Williams | Yelich – 46 |
«PAIRÉS»
Députés
Discepola | Fournier | Gagnon (Québec) | Girard - Bujold |
Gray (Windsor West) | McLellan | Reed (Halton) | Rocheleau |
Rock | Tremblay (Lac - Saint - Jean – Saguenay) |
Le Président: Je déclare la motion adoptée.
Le projet de loi est donc renvoyé au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.
(Le projet de loi, lu pour la deuxième fois, est renvoyé à un comité.)
* * *
[Traduction]
LOI SUR L'IMMIGRATION ET LA PROTECTION DES RÉFUGIÉS
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 26 février, de la motion: Que le projet de loi C-11, Loi concernant l'immigration au Canada et l'asile conféré aux personnes déplacées, persécutées ou en danger, soit maintenant lu une deuxième fois et renvoyé à un comité.
Le Président: Conformément à l'ordre adopté plus tôt aujourd'hui, la Chambre passe maintenant au vote différé sur la motion à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-11.
Mme Marlene Catterall: Monsieur le Président, vous constaterez qu'il y a unanimité pour que les députés présents qui ont voté sur la motion précédente soient enregistrés comme ayant voté sur la motion dont la Chambre est actuellement saisie, les députés libéraux ayant voté en faveur de la motion.
Le Président: Y a-t-il unanimité de la Chambre pour procéder de cette façon?
Des voix: D'accord.
M. John Reynolds: Monsieur le Président, les députés présents de l'Alliance canadienne votent contre la motion.
[Français]
M. Stéphane Bergeron: Monsieur le Président, les députés du Bloc québécois sont d'accord avec cette motion.
M. Yvon Godin: Monsieur le Président, les députés du NPD votent non sur cette motion.
[Traduction]
M. Rick Borotsik: Monsieur le Président, les députés du Parti progressiste conservateur votent en faveur de la motion.
(La motion, mise aux voix, est adoptée.)
Vote no 16
POUR
Députés
Adams | Alcock | Allard | Anderson (Victoria) |
Assad | Assadourian | Augustine | Bachand (Saint - Jean) |
Bagnell | Baker | Beaumier | Bélanger |
Bellehumeur | Bellemare | Bennett | Bergeron |
Bertrand | Bevilacqua | Bigras | Binet |
Blondin - Andrew | Bonin | Bonwick | Borotsik |
Boudria | Bourgeois | Bradshaw | Brien |
Brison | Brown | Bryden | Bulte |
Byrne | Caccia | Calder | Caplan |
Cardin | Carignan | Carroll | Castonguay |
Catterall | Cauchon | Chamberlain | Charbonneau |
Clark | Coderre | Collenette | Comuzzi |
Cotler | Crête | Cullen | Cuzner |
Dalphond - Guiral | Desrochers | DeVillers | Dion |
Dromisky | Dubé | Duceppe | Duhamel |
Duplain | Easter | Eggleton | Eyking |
Finlay | Folco | Fontana | Fry |
Gagliano | Gagnon (Champlain) | Gallaway | Gauthier |
Girard - Bujold | Godfrey | Goodale | Graham |
Grose | Guarnieri | Guay | Guimond |
Harb | Harvard | Harvey | Hearn |
Herron | Hubbard | Jackson | Jennings |
Jordan | Karetak - Lindell | Keddy (South Shore) | Keyes |
Kilgour (Edmonton Southeast) | Knutson | Kraft Sloan | Laframboise |
Laliberte | Lalonde | Lanctôt | Lastewka |
Lebel | LeBlanc | Lee | Leung |
Lincoln | Longfield | Loubier | MacAulay |
MacKay (Pictou – Antigonish – Guysborough) | Macklin | Mahoney | Malhi |
Maloney | Marceau | Marcil | Marleau |
Martin (LaSalle – Émard) | Matthews | McCallum | McCormick |
McKay (Scarborough East) | McTeague | Ménard | Mitchell |
Murphy | Myers | Neville | Normand |
O'Brien (London – Fanshawe) | O'Reilly | Owen | Pagtakhan |
Paquette | Paradis | Parrish | Patry |
Peric | Peterson | Phinney | Picard (Drummond) |
Pickard (Chatham – Kent Essex) | Pillitteri | Plamondon | Pratt |
Price | Proulx | Provenzano | Redman |
Regan | Robillard | Roy | Sauvageau |
Savoy | Scherrer | Scott | Sgro |
Shepherd | St. Denis | St - Hilaire | St - Jacques |
St - Julien | Steckle | Stewart | Szabo |
Telegdi | Thibeault (Saint - Lambert) | Tirabassi | Tobin |
Tonks | Torsney | Tremblay (Rimouski - Neigette - et - la Mitis) | Ur |
Vanclief | Venne | Whelan – 175 |
CONTRE
Députés
Abbott | Anders | Anderson (Cypress Hills – Grasslands) | Benoit |
Blaikie | Breitkreuz | Cadman | Casson |
Comartin | Cummins | Davies | Day |
Desjarlais | Duncan | Elley | Epp |
Forseth | Gallant | Godin | Grewal |
Grey (Edmonton North) | Hanger | Harris | Hilstrom |
Hinton | Kenney (Calgary Southeast) | Lill | Lunney (Nanaimo – Alberni) |
Mark | Martin (Esquimalt – Juan de Fuca) | Martin (Winnipeg Centre) | McDonough |
McNally | Meredith | Merrifield | Mills (Red Deer) |
Moore | Obhrai | Pankiw | Peschisolido |
Proctor | Rajotte | Reid (Lanark – Carleton) | Reynolds |
Robinson | Schmidt | Skelton | Solberg |
Sorenson | Spencer | Stinson | Stoffer |
Strahl | Vellacott | Wasylycia - Leis | White (Langley – Abbotsford) |
Williams | Yelich – 58 |
«PAIRÉS»
Députés
Discepola | Fournier | Gagnon (Québec) | Girard - Bujold |
Gray (Windsor West) | McLellan | Reed (Halton) | Rocheleau |
Rock | Tremblay (Lac - Saint - Jean – Saguenay) |
Le Président: Je déclare la motion adoptée. Par conséquent, le projet de loi est renvoyé au Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration.
(Le projet de loi, lu pour la deuxième fois, est renvoyé à un comité.)
Le Président: Comme il est 23 h 40, la Chambre s'ajourne à 14 heures demain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.
(La séance est levée à 23 h 40.)