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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.
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37e Législature, 1ère Session
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 064
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 17 mai 2001
RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS |
M. Derek Lee |
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE |
Comptes publics |
M. John Williams |
Projet de loi C-25 |
M. Charles Hubbard |
Bibliothèque du Parlement |
M. Raymond Lavigne |
LOI SUR LE GOUVERNEMENT DU TERRITOIRE PROVISOIRE DE |
Projet de loi S-24. Première lecture |
L'hon. Allan Rock |
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE |
Bibliothèque du Parlement |
Motion d'approbation |
M. Raymond Lavigne |
PÉTITIONS |
Les données de recensement |
M. Murray Calder |
QUESTIONS AU FEUILLETON |
M. Derek Lee |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LES CRÉDITS |
Jour désigné—Les drogues |
M. Randy White |
Motion |
M. Réal Ménard |
M. Peter MacKay |
L'hon. David Kilgour |
Mme Elsie Wayne |
M. John Maloney |
Amendement |
M. Randy White |
Mme Elsie Wayne |
M. Réal Ménard |
M. Randy White |
M. Randy White |
AFFAIRES COURANTES |
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE |
Procédure et affaires de la Chambre |
M. Grant Hill |
Motion |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LES CRÉDITS |
Jour désigné—Les drogues |
Motion |
M. Dick Proctor |
M. Vic Toews |
L'hon. David Kilgour |
M. Randy White |
M. Peter MacKay |
M. Dick Proctor |
M. Vic Toews |
M. John Maloney |
M. Werner Schmidt |
L'hon. Allan Rock |
M. Randy White |
M. Lynn Myers |
M. Peter MacKay |
M. Larry Spencer |
M. Lynn Myers |
M. Werner Schmidt |
M. Randy White |
M. Lynn Myers |
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS |
LES RANGERS CANADIENS |
M. Jean-Guy Carignan |
L'AGRICULTURE |
M. David Anderson |
LE GOUVERNEMENT DE COLOMBIE-BRITANNIQUE |
M. John Harvard |
LES JEUX OLYMPIQUES |
M. Irwin Cotler |
LE GOUVERNEMENT DU NOUVEAU-BRUNSWICK |
M. Andy Savoy |
LE GOUVERNEMENT DE LA COLOMBIE-BRITANNIQUE |
Mme Betty Hinton |
LES SCIENCES ET LA TECHNOLOGIE |
M. Larry McCormick |
BERNADETTE RENAUD |
M. Stéphane Bergeron |
SPIELO GAMING INTERNATIONAL |
M. Dominic LeBlanc |
JESSICA KOOPMANS |
M. Ken Epp |
LES TUMEURS CÉRÉBRALES |
M. Joseph Volpe |
LES HABITANTS DU CAP-BRETON |
M. Peter Stoffer |
LE PRIX RECONNAISSANCE JEAN-BESRÉ |
M. Serge Cardin |
L'ÉCONOMIE |
M. John McCallum |
LES RÉGIMES DE PENSION |
M. Norman Doyle |
L'EMPLOI |
Mme Sophia Leung |
QUESTIONS ORALES |
L'ÉCONOMIE |
M. Stockwell Day |
L'hon. Paul Martin |
M. Stockwell Day |
L'hon. Paul Martin |
M. Stockwell Day |
L'hon. Paul Martin |
M. Jason Kenney |
L'hon. Paul Martin |
M. Jason Kenney |
L'hon. Paul Martin |
LES LANGUES OFFICIELLES |
M. Gilles Duceppe |
L'hon. Stéphane Dion |
M. Gilles Duceppe |
L'hon. Stéphane Dion |
M. Gilles Duceppe |
L'hon. Stéphane Dion |
M. Gilles Duceppe |
L'hon. Stéphane Dion |
L'ÉCONOMIE |
Mme Alexa McDonough |
L'hon. Paul Martin |
Mme Alexa McDonough |
L'hon. Paul Martin |
M. Scott Brison |
L'hon. Paul Martin |
M. Scott Brison |
L'hon. Paul Martin |
LA JUSTICE |
M. Vic Toews |
L'hon. Lawrence MacAulay |
M. Vic Toews |
L'hon. Lawrence MacAulay |
LES LANGUES OFFICIELLES |
Mme Pauline Picard |
L'hon. Stéphane Dion |
Mme Pauline Picard |
L'hon. Stéphane Dion |
LA JUSTICE |
M. Randy White |
L'hon. Lawrence MacAulay |
M. Randy White |
L'hon. Lawrence MacAulay |
LES LANGUES OFFICIELLES |
M. Benoît Sauvageau |
L'hon. Stéphane Dion |
M. Benoît Sauvageau |
L'hon. Stéphane Dion |
L'IMMIGRATION |
M. Inky Mark |
L'hon. Elinor Caplan |
M. Inky Mark |
L'hon. Elinor Caplan |
LA SANTÉ |
Mme Beth Phinney |
L'hon. Allan Rock |
L'ENVIRONNEMENT |
L'hon. Lorne Nystrom |
L'hon. Paul Martin |
LA PAUVRETÉ |
L'hon. Lorne Nystrom |
L'hon. Paul Martin |
L'IMMIGRATION |
M. John Herron |
L'hon. Elinor Caplan |
LA DÉFENSE NATIONALE |
M. Gerald Keddy |
L'hon. Art Eggleton |
LE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES |
M. John Williams |
L'hon. Jane Stewart |
LE CONSEIL DU TRÉSOR |
M. John Williams |
L'hon. Lucienne Robillard |
LES CONGÉS PARENTAUX |
M. Paul Crête |
L'hon. Jane Stewart |
M. Paul Crête |
L'hon. Jane Stewart |
LA COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE |
M. Keith Martin |
M. John Maloney |
M. Keith Martin |
M. John Maloney |
LA SÉCURITÉ NAUTIQUE |
Mme Aileen Carroll |
L'hon. Herb Dhaliwal |
LES AFFAIRES AUTOCHTONES |
M. Reed Elley |
L'hon. Robert Nault |
M. Reed Elley |
L'hon. Robert Nault |
LES JEUNES CONTREVENANTS |
Mme Caroline St-Hilaire |
M. John Maloney |
LA JUSTICE |
M. Stephen Owen |
M. John Maloney |
M. Vic Toews |
L'hon. Lawrence MacAulay |
L'INDUSTRIE MINIÈRE |
M. Peter Stoffer |
L'hon. Ralph Goodale |
PRÉSENCE À LA TRIBUNE |
Le Président |
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE |
M. John Reynolds |
L'hon. Alfonso Gagliano |
M. Peter MacKay |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LES CRÉDITS |
Jour désigné—Les drogues |
Motion |
M. Lynn Myers |
Mme Sophia Leung |
M. Gurmant Grewal |
M. Reed Elley |
M. Grant Hill |
M. Werner Schmidt |
M. Derek Lee |
M. Werner Schmidt |
M. Peter MacKay |
M. Chuck Cadman |
M. Werner Schmidt |
Mme Aileen Carroll |
M. Jim Abbott |
M. Chuck Cadman |
M. Grant Hill |
INITIATIVES PARLEMENTAIRES |
LA LOI MARITIME DU CANADA |
Projet de loi C-253. Deuxième lecture |
M. Paul Crête |
M. Brent St. Denis |
M. Joe Comartin |
M. Norman Doyle |
M. Antoine Dubé |
M. Paul Crête |
MOTION D'AJOURNEMENT |
L'industrie du bois d'oeuvre |
M. Gerald Keddy |
M. Pat O'Brien |
(Version officielle)
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 064
CHAMBRE DES COMMUNES
Le jeudi 17 mai 2001
La séance est ouverte à 10 heures.
Prière
RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à quatre pétitions.
* * *
[Français]
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE
COMPTES PUBLICS
M. John Williams (St. Albert, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le cinquième rapport du Comité permanent des comptes publics relativement au chapitre 11, «Développement des ressources humaines Canada: Les subventions et les contributions», du rapport du vérificateur général d'octobre 2000, et le sixième rapport du Comité permanent des comptes publics relativement au chapitre 14, «Agence canadienne de développement international: La gestion des marchés et des accords de contribution», du rapport du vérificateur général d'octobre 2000.
Conformément à l'article 109 du Règlement de la Chambre des communes, le Comité demande au gouvernement de déposer une réponse globale à ces deux rapports.
[Traduction]
PROJET DE LOI C-25
M. Charles Hubbard (Miramichi, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles et sans proposition d'amendement, le premier rapport sur le projet de loi C-25, Loi modifiant la Loi sur la Société du crédit agricole et d'autres lois en conséquence.
Je voudrais remercier les membres de notre comité de leur attention et de la rapidité avec laquelle ils ont examiné ce projet de loi et l'ont renvoyé au Parlement.
[Français]
BIBLIOTHÈQUE DU PARLEMENT
M. Raymond Lavigne (Verdun—Saint-Henri—Saint-Paul—Pointe Saint-Charles, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le premier rapport du Comité mixte permanent de la Bibliothèque du Parlement.
Si la Chambre y consent, j'ai l'intention d'en proposer l'adoption plus tard aujourd'hui.
* * *
[Traduction]
LOI SUR LE GOUVERNEMENT DU TERRITOIRE PROVISOIRE DE KANESATAKE
L'hon. Allan Rock (au nom du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien) propose: Que le projet de loi S-24, Loi visant à mettre en oeuvre l'entente conclue par les Mohawks de Kanesatake et Sa Majesté du chef du Canada concernant l'exercice de pouvoirs gouvernementaux par ceux-ci sur certaines terres et modifiant une loi en conséquence, soit lu pour la première fois.
(La motion est adoptée, et le projet de loi est lu pour la première fois.)
* * *
[Français]
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE
BIBLIOTHÈQUE DU PARLEMENT
M. Raymond Lavigne (Verdun—Saint-Henri—Saint-Paul—Pointe Saint-Charles, Lib.): Monsieur le Président, si la Chambre y consent, je propose que le premier rapport du Comité mixte permanent de la Bibliothèque du Parlement, présenté à la Chambre plus tôt, soit adopté.
(La motion est adoptée.)
* * *
[Traduction]
PÉTITIONS
LES DONNÉES DE RECENSEMENT
M. Murray Calder (Dufferin—Peel—Wellington—Grey, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais présenter à la Chambre une autre pétition demandant qu'on communique au public les données de recensement historiques. La pétition est signée par plus de 5 500 Canadiens. Si on compte les signatures des pétitions précédentes que j'ai présentées à ce sujet au cours de la présente session, cela fait plus de 9 000 signatures.
La pétition souligne qu'environ 7,5 millions de Canadiens s'intéressent à la généalogie de leur famille et que les données de recensement constituent un instrument précieux de recherche. Ces données ont servi à mener des recherches historiques ainsi qu'à repérer des maladies génétiques et à régler des problèmes de testament et de succession.
Les pétitionnaires demandent au Parlement d'adopter toutes les mesures nécessaires pour modifier avec effet rétroactif les dispositions sur la confidentialité de la Loi sur la statistique en vigueur depuis 1906 en vue de permettre la communication au public, après un délai raisonnable, des données de recensement postérieures à 1901.
* * *
QUESTIONS AU FEUILLETON
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.
Le président suppléant (M. Bélair): D'accord?
Des voix: Est-on d'accord.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LES CRÉDITS
JOUR DÉSIGNÉ—LES DROGUES
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Alliance canadienne) propose:
Qu'un comité spécial de la Chambre soit chargé d'examiner les facteurs sous-jacents ou parallèles à la consommation non médicale de drogues ou de médicaments, et de recommander au gouvernement des moyens qui lui permettront de réduire, seul ou avec le concours des autres paliers de gouvernement, l'ampleur du problème que ce phénomène constitue;
que les membres de ce comité spécial soient choisis par le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre;
que le Comité permanent fasse rapport à la Chambre de la composition du comité spécial dans les cinq jours de séance suivant l'adoption de la présente motion;
que les membres du comité spécial puissent se faire remplacer de temps à autre selon les modalités prévues au paragraphe 114(2) du Règlement;
que le comité spécial ait tous les pouvoirs conférés aux comités permanents à l'article 108 du Règlement;
que le comité spécial présente son rapport final au plus tard le 1er juin 2002.
—Monsieur le Président, c'est un honneur d'intervenir au sujet de la motion et de la proposer à la Chambre. J'ai commencé à m'intéresser de près à cette question il y a huit ans, en 1993, et je tenais à ce que la Chambre en soit saisie.
En prenant connaissance des transcriptions de la Chambre des communes, je me suis rendu compte que les drogues n'avaient pas fait l'objet d'un débat depuis des dizaines d'années. Cela m'inquiète, d'autant que les parents, voire tous les Canadiens, sont extrêmement inquiets au sujet des drogues.
Nous réclamons la formation d'un comité spécial, car il est temps que la Chambre des communes se mobilise et parcoure le pays dans un esprit dénué de partisanerie politique, recueillant de village en ville les points de vue des gens dans le seul but d'évaluer la gravité de la situation. Nous pourrions aussi tenir des audiences aux Communes.
J'ai constaté moi-même l'état de la situation, et je suis bien prêt à en parler à mes collègues. Je le répète, je me penche sur cette question depuis un certain temps.
D'aucuns ont dit qu'un comité sénatorial examinait la question, mais il se trouve que ce comité se penche uniquement sur la question du cannabis. Je propose qu'on évalue la consommation non médicale des drogues telles que l'héroïne, la cocaïne, l'ecstasy et le LSD, qui créent de la dépendance chez nos jeunes.
La composition de ce comité revêt une extrême importance. Des députés de tous les partis de la Chambre devraient en faire partie. Il devrait par ailleurs s'agir de députés décidés à s'engager à long terme et vivement intéressés par la question. Ces personnes devraient avoir certaines affinités entre elles, sans égard à leurs convictions philosophiques ou politiques. Elles devraient avoir des vues compatibles sur les enjeux et les drogues elles-mêmes.
Cela, je n'en ai aucun doute, va demander beaucoup de temps et d'efforts, mais nous devons nous attaquer à ce problème et je vais expliquer pourquoi.
La toxicomanie est en hausse dans notre pays. Selon une étude que je regardais dernièrement, le sondage sur la consommation de drogues parmi les élèves de l'Ontario effectué tous les deux ans depuis 1977, les résultats sont étonnants. Selon cette étude, entre 1997 et 1999, la consommation de certaines drogues a pratiquement triplé. Le pourcentage d'élèves qui ont déclaré ne pas pouvoir arrêter de consommer de la drogue est passé de 2,9 p. 100 à 6,5 p. 100.
Après avoir atteint 31,7 p. 100 en 1979, le pourcentage d'étudiants qui consomment du cannabis est tombé au cours des six sondages suivants pour se situer à 11 p. 100 en 1991. Depuis, il est remonté en flèche pour atteindre 24,9 p. 100 en 1997. Nous pouvons voir que la consommation de cannabis est en hausse.
La consommation de cocaïne est suivie depuis 1977, celle de crack depuis 1987. Alors que la consommation de cocaïne a atteint un sommet en 1979, avec un taux de 5,1 p. 100 puis est retombée pour remonter à nouveau, celle de crack a augmenté régulièrement. En 1999, la consommation de cocaïne a nettement augmenté dans les écoles en Ontario où le taux se situe à 3,7 p. 100. C'est inquiétant.
En 1999, 36 p. 100 des élèves ont déclaré que quelqu'un leur avait proposé de leur vendre de la drogue au cours de l'année et 32 p. 100 ont déclaré avoir été témoins de la vente de drogues. Cela se passe dans nos écoles.
Il n'y a pas longtemps, je visitais une école où trois élèves d'une classe d'enfants affichant des troubles de comportement ont admis consommer de l'héroïne. C'est très inquiétant. L'héroïne est une drogue tellement toxicomanogène que ces jeunes finiront par voler, se prostituer ou faire n'importe quoi pour en avoir. Ces jeunes sont nos enfants. C'est pourquoi la motion est importante.
J'ai devant les yeux la stratégie canadienne antidrogue. Elle a été mise au point par le gouvernement en place. Je me suis penché sur cette stratégie et je l'ai comparée à celle qui avait été retenue par le gouvernement progressiste-conservateur précédent. En toute justice, je pense que les deux gouvernements ont fait de leur mieux pour évaluer le problème à l'époque et avaient peut-être fait rédiger la stratégie par les bureaucrates.
J'ai soumis cette stratégie aux personnes travaillant sur le terrain, c'est-à-dire auprès des toxicomanes, et aux toxicomanes eux-mêmes. Je leur ai demandé leur avis. Ils n'avaient pas la moindre idée de ce dont je parlais et m'ont avoué en toute sincérité que cette stratégie n'avait rien changé dans leur quotidien.
La comparaison de ces stratégies est des plus intéressantes. J'invite les députés que la question intéresse à comparer la stratégie présentée par le gouvernement progressiste-conservateur en 1987 à celle présentée par le gouvernement libéral. Loin de moi l'idée de discréditer l'un ou l'autre de ces gouvernements. Je cherche simplement à expliquer que la bureaucratie a peut-être une certaine idée de ce que devrait être une stratégie antidrogue.
En 1987, le but ou le principal objectif visé par la stratégie antidrogue du gouvernement de l'époque était de réduire les risques pour les individus. En 1998, la stratégie antidrogue proposée cette fois par un autre gouvernement mais la même bureaucratie avait pour objectif à long terme de réduire les dangers liés à la consommation de drogues et d'alcool.
Entre 1987 et 1998, la situation en matière de consommation de drogues a beaucoup changé. Elle s'est aggravée car il y avait plus de drogues fabriquées en circulation, or la même bureaucratie a produit un document pratiquement identique mais pour un autre gouvernement. Je ne pense que c'est ainsi que l'on règlera le problème.
Jetons un coup d'oeil sur le cadre complet de la stratégie. En 1987, les responsables de la stratégie à l'époque avaient dit qu'il s'agissait d'une réponse à multiples facettes à un problème complexe. Ils avaient dit que ses éléments les plus importants étaient l'éducation et la prévention. En 1998, le gouvernement et ses bureaucrates disaient que la stratégie reposait sur un cadre complet dont les éléments les plus importants sont la prévention et l'éducation.
En 1987, ils avaient dit que la stratégie consistait dans l'application et le contrôle. En 1998, ils disaient qu'elle consistait dans les lois, l'application et le contrôle. En 1987, ils avaient dit qu'il fallait mettre l'accent sur le traitement et la prévention. En 1998, ils disaient qu'il fallait mettre l'accent sur le traitement et la réhabilitation, et ainsi de suite.
C'est une répétition. La stratégie se répète absolument de 1987 à 1998. Or, le problème est probablement devenu trois ou quatre fois plus grave. Je veux faire comprendre en fait que je ne constate aucune amélioration. Il faut former un comité de la Chambre et aller étudier le problème là où il se situe, au niveau de la rue. Nous devons ensuite revenir ici présenter un rapport dénué d'esprit de parti et recommander les mesures à prendre. Il ne s'agit pas de rédiger une stratégie antidrogue comme celle qui n'a pas changé depuis dix ans et qui a produit de piètres résultats.
J'ai vu bien des choses dans ma vie. L'une des pires expériences que j'aie connues depuis que je suis député a été de voir dans la rue une enfant de 13 ou 14 ans qui s'injectait de l'héroïne entre les orteils parce qu'elle ne trouvait plus d'autres endroits sur ses bras ou ailleurs où elle pouvait planter une aiguille. Cette enfant est probablement morte aujourd'hui. Elle était l'enfant de quelqu'un. Nous l'avons oubliée.
Il y a beaucoup d'autres enfants comme elle dans les rues. Aujourd'hui, nous arrêtons des prostituées les unes après les autres et les traitons comme des criminelles plutôt que comme des victimes d'un commerce des drogues très cruel, dont les exploitants au sommet font d'énormes bénéfices au détriment des jeunes au bas de l'échelle.
Une nuit où j'étais de quart à titre de policier, nous avons appréhendé quatre prostituées. La plus âgée avait 16 ans. Nous avons procédé à leur arrestation, avons rédigé un rapport et les avons laissées partir. Toutefois, avant que mon quart ne soit terminé, l'une des jeunes filles se trouvait de nouveau sur le coin de la rue. Elle est restée sur le trottoir parce que l'arrestation n'avait pas entraîné de conséquences. Ces jeunes ont besoin d'une dose d'héroïne. Cela ne peut continuer ainsi.
J'ai plusieurs rapports de police. Les forces policières me tiennent passablement au courant de la situation. Je tiens à citer quelques exemples de tentative pour faire entrer de la drogue en contrebande au Canada. Cette information vient de rapports de services de renseignement et, non, je ne dirai à personne où je les ai obtenus. Une saisie de MDMA, de méthylènedioxyamphétamine, transportée par une femme, a été effectuée à l'aéroport international de Vancouver. Les inspecteurs ont saisi 10 212 gélules de MDMA qu'une jeune femme en provenance d'Amsterdam transportait sur elle. L'événement a eu lieu le vendredi 3 décembre 1999.
Le 30 novembre 1999, on a découvert à l'aéroport international de Vancouver, 23 057 gélules de MDMA dissimulées dans des chaussettes. Le 4 novembre 1999, on a saisi, à l'aéroport international de Vancouver, 104 000 gélules de MDMA, en possession de deux ressortissants israéliens arrivés sur le vol 681 de la KLM, en provenance d'Amsterdam. Le 18 août 1999, dans la zone commerciale routière de la côte ouest, on a saisi 33 kilos de cocaïne transportés par des Californiens.
J'ai ici des pages et des pages de rapport de ce genre. Sans aucun doute, toutes les personnes qui m'écoutent comprennent de quoi il s'agit. Nous n'avons pas le contrôle de la situation. Je ne parle pas de mettre la main au collet de tous ceux qui sont impliqués dans le narcotrafic, de les mettre sous les verrous et de jeter la clé. Il ne s'agit pas de déclencher une guerre contre la drogue. Les Américains ont déclaré la guerre au narcotrafic, mais, dans une certaine mesure, j'estime qu'ils sont sur la mauvaise voie.
Je parle de faire le point sur la consommation de drogues et le prostitution de rue au Canada, la situation de nos enfants à l'école et celle que vivent les parents qui communiquent avec moi pratiquement chaque jour. Certains me demandent de les aider à sortir leur enfant d'une fumerie ou d'une piquerie, ou encore à les faire admettre dans un centre de traitement situé dans une autre province.
Il n'y a même pas assez de centres de désintoxication au Canada pour accueillir ne serait-ce qu'un petit nombre de toxicomanes. Bon sang, seulement à Vancouver, presque 8 000 héroïnomanes s'injectent quotidiennement leur drogue qui coûte 20 $ la capsule. Comme il leur faut de cinq à huit injections par jour, ils doivent gagner cet argent, le voler ou se prostituer. Je ne parle que d'une ville.
Toujours à Vancouver seulement, les surdoses ont causé 147 morts cette année. Les victimes sont toujours les enfants ou les parents de quelqu'un. S'ils étaient violés et assassinés, on établirait un registre de délinquants sexuels en moins de deux. S'ils tombaient sous les balles d'une arme à feu ou s'ils étaient renversés par un conducteur en état d'ébriété, on légiférerait.
Nous demandons à tous les partis d'examiner objectivement cette question dès aujourd'hui. Ne prenons pas cinq ans pour le faire. Donnons-nous un an, mais allons au fond de la question afin de proposer à la Chambre des mesures concrètes.
En réalité, les stratégies de lutte antidrogue semblent échouer. Il est inutile de critiquer un gouvernement à cause de ces stratégies. Ceux qui ont besoin d'aide ne veulent rien savoir des stratégies qui n'ont aucune prise sur la réalité.
J'ai participé à un programme d'échange de seringues qui distribue des seringues à des toxicomanes, mais pas à tous. Dans un établissement, 1,5 million de seringues ont été remises à des toxicomanes, l'année dernière. J'ai vu le centre d'échanges de seringues de Sydney, en Nouvelle-Écosse. Qui aurait cru que cela pourrait se passer dans une petite ville comme Sydney?
Dans la localité d'Abbotsford, on se demande actuellement si un tel programme devrait y être implanté. Nous pouvons réserver de nous prononcer sur l'efficacité des échanges de seringues et des piqueries légales. Nous en parlions hier, à Vancouver. Pour l'instant, il ne s'agit pas de dire si cela est bien ou mal, mais de savoir comment il se fait que Sydney, en Nouvelle-Écosse, et d'autres petites villes doivent avoir de tels programmes d'échange. Pourquoi? Quelle ampleur prendra ce phénomène?
Mon collègue me dit que Stellarton, en Nouvelle-Écosse, compte de 4 000 à 5 000 habitants. Des renseignements récents, qui mettent en lumière le problème grandissant de la toxicomanie chez les jeunes de Stellarton, incitent le service de police de la municipalité à demander des fonds au gouvernement pour l'aider à payer le salaire d'un nouvel agent antidrogue. Les problèmes de toxicomanie de la municipalité ont été révélés au grand jour à la suite d'un récent rapport de presse faisant état d'un incident où la police a découvert qu'une adolescente de 11 ans, de Stellarton, portait sur elle 140 comprimés d'une drogue vendue dans la rue.
Nous débattons à la Chambre un projet de loi dont les gens ordinaires se fichent éperdument alors qu'une fillette de 11 ans est mêlée à ce trafic. Ce n'est pas que Stellarton qui est touchée. Ce sont toutes les régions du pays et nous fermons les yeux sur ce problème.
Le comité doit se pencher sur beaucoup de choses. Je crois que nous obtiendrons, sinon un consentement unanime, du moins un appui majoritaire à la création du comité. J'implore la Chambre pour que le comité examine la question sur la place publique, dans un esprit non partisan. Oublions les fonctionnaires qui siègent dans les tours à bureaux et allons rencontrer les gens dans la rue, afin de trouver une solution.
Il existe une longue liste de problèmes reliés au système judiciaire. On ne compte plus les cas d'individus ayant fait pour 300 000 $ ou 400 000 $ de trafic de la drogue. Ils se font prendre, puis sont condamnés avec sursis. Certains ont été condamnés plus de 60 fois. Ils entrent au tribunal et en ressortent pour mieux poursuivre le trafic de la drogue. Ils en achètent, la revendent, font des profits, se retrouvent de nouveau devant les tribunaux et retrouvent encore leur liberté. Pendant que ces individus s'enrichissent, nos enfants deviennent dépendants de la drogue. Le système judiciaire se traîne les pieds, pendant que la police nous demande ce que nous attendons d'elle.
Je parlais, en présence d'un agent de la paix, à des immigrants illégaux. L'un d'entre eux fumait un joint de marijuana en notre présence, parce qu'il savait qu'il ne lui arriverait rien. Je ne suis pas ici pour dire si la marijuana est bonne ou mauvaise, mais pour obtenir que nous agissions. J'espère sincèrement que si nous créons le comité, on y retrouvera des gens qui s'intéressent réellement à la question et qui tenteront de faire quelque chose.
Enfin, je voudrais remercier toutes les personnes qui suivent ce débat et qui s'intéressent au sujet. J'espère qu'elles écriront aux députés à la Chambre des communes, pour leur faire comprendre qu'il est important de prendre des mesures. Au nom de nos enfants, dont des dizaines de milliers sont devenus dépendants de la drogue, agissons et, pour une fois, faisons quelque chose de positif.
[Français]
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, je veux dire à mon collègue que nous, comme parti politique, allons appuyer cette motion.
Nous partageons son constat à l'effet qu'il est plus que temps que les parlementaires se penchent sur la question de la drogue, de sa consommation et des liens qui existent avec d'autres problématiques.
La question que je veux poser à notre collègue est celle-ci: a-t-il entendu parler de la stratégie de la réduction des méfaits? Il existe un cadre d'intervention, autant à Vancouver qu'au Québec, qui s'appelle la stratégie de la réduction des méfaits, où il existe des sites d'échanges de seringues.
Cela part du principe que, en attendant que les individus deviennent complètement sobres, il y a une démarche d'accompagnement, et il faut jouer sur les conditions les plus sécuritaires dans lesquelles ils vont consommer de la drogue. C'est pour cela qu'il existe des sites d'échanges de seringues. Plus tôt, notre collègue a donné des chiffres dont j'ai pris note. Il y a 1,5 million de seringues dans sa région. Cela existe également à Montréal.
En préparation de nos travaux futurs, je lui indique tout de suite mon intérêt pour ce genre de comité. Je sais que mon collègue de Rosemont—Petite-Patrie a aussi un intérêt.
Le député croit-il que l'on doive partir de la prémisse de la stratégie de la réduction des méfaits et a-t-il entendu parler de cette réalité?
[Traduction]
M. Randy White: Monsieur le Président, je connais le concept de la réduction des méfaits. Je ne veux pas limiter le comité en proposant qu'il fonde ses travaux sur le modèle de la réduction des méfaits.
Je me pose beaucoup de questions à ce sujet. J'ai parlé de ce concept à des centaines de gens et j'ai constaté qu'il y a une variété d'interprétations de ce qu'est le concept de la réduction des méfaits. C'est pourquoi nous devons l'examiner. Qu'entent-on par réduction des méfaits?
Pour certains, la réduction des méfaits, c'est ne pas trop en faire sur le plan de la répression. C'est, par exemple, inciter les toxicomanes à suivre un traitement à la méthadone et à fréquenter des lieux d'injection sûrs. Bien des gens s'opposent à l'établissement de lieux d'injection sûrs, par exemple, comme on songe à le faire à Vancouver. Quand on parle de réduction des méfaits, je pense que personne ici ou ailleurs ne peut dire exactement ce qu'il faut entendre par là et jusqu'où nous devrions aller. À mon avis, la réduction des méfaits, c'est recourir aux meilleurs moyens pour traiter les toxicomanes.
Il faut aussi faire en sorte que personne ne devienne toxicomane. Je me préoccupe aussi de ceux qui font le trafic des stupéfiants et en tire des bénéfices. C'est une question complexe, mais je réserve mon jugement quant à savoir si la réduction des méfaits est, premièrement, définie et, deuxièmement, acceptable jusqu'à ce que j'aie eu l'occasion d'examiner la question et que je sache ce que le comité fera.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, en commençant, je tiens à féliciter le député de Langley—Abbotsford. C'est un sujet dont il s'occupe depuis longtemps et je sais que sa participation aux travaux du Comité de la justice lui a permis de réitérer sa ferme volonté de trouver des solutions.
Le député a parlé de Stellarton, en Nouvelle-Écosse, un endroit qui me tient tout particulièrement à coeur. Je connais le chef de police, Ambrose Heighton, et d'autres personnes de cette ville, dont le directeur de l'école, Jeff Green, ainsi que d'autres membres de la collectivité qui se sont attaqués avec détermination à la question de la possession de drogues très dangereuses.
La jeune fille dont le député a parlé était en possession de tablettes de dilaudid, je crois, qui est une substance proche de la morphine créant l'accoutumance et qui est maintenant très répandue et facilement accessible dans le comté de Pictou et les régions environnantes.
Ma grande préoccupation, comme la sienne, c'est de trouver comment aborder la question dans son ensemble. Il faudra faire appel aux corps policiers, au système d'éducation et aux professionnels de la santé. Cependant, j'imagine qu'il pourrait nous dire plus précisément l'orientation que pourrait prendre le comité et qu'il aura quelques paramètres à nous suggérer. Il a parlé d'un délai d'un an pour la production du rapport. Est-ce que cette période inclut l'audition de témoins? Est-ce que cela inclut certaines études auxquelles il a déjà fait allusion comme bases du travail du comité?
M. Randy White: Monsieur le Président, le député sait pertinemment que j'ai pour lui un grand respect. À mon avis, il est l'une des personnes dont la Chambre a besoin au sein de ce comité.
Quant aux conditions de travail du comité, il faudra lui établir un budget, car il devra faire de nombreux déplacements. Je n'aime pas me déplacer, mais le comité devra se rendre non seulement dans les grandes villes, mais aussi dans des petites localités comme Stellarton pour voir quel est le problème, comment il se pose et comment le régler. Il faut que la composition du comité soit judicieuse. Les membres ne doivent pas être trop nombreux, mais être bien choisis et partager un souci commun de trouver une solution. Nous devons fixer les objectifs. La Chambre doit s'engager à au moins débattre le rapport lorsque le comité le lui enverra. Le comité doit arrêter d'autres paramètres dont je n'ai pas le temps de parler maintenant, mais dont je suis disposé à discuter.
L'hon. David Kilgour (secrétaire d'État (Amérique latine et Afrique), Lib.): Monsieur le Président, je sais que le député s'intéresse vivement à cette question, qui est très importante pour les Canadiens ou devrait l'être.
Combien d'habitants de Vancouver meurent chaque jour ou chaque semaine? Le député peut-il nous donner des précisions? En dehors de ce que le député a déjà dit pendant son exposé, peut-il nous indiquer un endroit ou un pays où il y a une stratégie efficace de lutte contre la drogue?
M. Randy White: Monsieur le Président, il y a annuellement, à Vancouver seulement, en moyenne 147 décès par overdose. Ensemble, Toronto et Vancouver ont enregistré l'an dernier plus de 400 décès attribuables à une overdose. Le problème est grave. Ce ne sont là que deux villes.
Je serais prêt à croire qu'il y en a plus de mille par année au pays. Je crois que le comité doit commencer par évaluer la gravité du problème. Il arrive souvent dans des petites villes comme la mienne que quelqu'un meure d'une overdose, mais que la cause du décès est enregistrée autrement. C'est parfois le cas, d'autres fois non. Il peut arriver par exemple qu'une personne ayant consommé de la drogue se tue dans un accident de voiture par exemple. La définition est très vague.
Quant à la situation dans d'autres pays, j'ai beaucoup lu sur ce qui s'est fait en Hollande. Certains parlent d'un échec. D'autres affirment que c'était la seule façon de faire. D'autres encore sont d'avis que cette expérience a accru le commerce des drogues en Europe. D'autres pays prônent le commerce des drogues. Dans certains pays du sud, l'exportation de drogues est une importante source de revenus pour l'État. En Colombie-Britannique, de grandes quantités de BC bud sont exportées vers le sud contre de l'argent ou échangées pour de la cocaïne.
Franchement, je n'ai trouvé dans aucun pays de solution entièrement satisfaisante. Ce comité devrait au moins être en mesure de nous revenir et de nous dire si le problème est d'envergure mondiale ou si certains pays semblent avoir trouvé des solutions plus efficaces que nous aurons intérêt à prendre comme modèles. À l'heure actuelle toutefois, le Canada ne sait plus trop où donner de la tête à ce sujet. Les provinces et même les villes ont chacune leur façon d'affronter le problème. Nous devons faire mieux.
Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, je tiens à ce que le député sache que j'ai rédigé un mémoire de recherche sur la marijuana et sur ses effets sur les jeunes et sur les personnes de tout âge. La recherche a été faite à l'université Berkeley. Je tiens à ce que le député sache que, dès le premier joint, les éléments actifs de la marijuana vont se loger dans le cerveau et, contrairement à une cigarette ordinaire, y restent pendant neuf jours. Nous savons très bien que les jeunes qui se mettent à fumer dans les ruelles le font plus souvent que tous les neuf jours.
Pour la gouverne des députés, je dirai qu'il y a trois ou quatre ans, la veille de Noël, un jeune homme a sonné à ma porte et m'a dit que son père et sa mère voulaient qu'il vienne me remercier pour l'avoir aidé à arrêter de prendre de la cocaïne dans les ruelles.
On m'a dit que le député et son parti étaient en faveur de la décriminalisation de la marijuana et d'en autoriser la vente. Je voudrais savoir si c'est vrai. Est-ce que cela ferait partie de ce que ce comité étudierait? Est-ce que cela fait partie de ce qu'on propose?
M. Randy White: Monsieur le Président, je le dis catégoriquement, ce n'est pas vrai.
La députée devrait se défaire de son attitude partisane sur la question et l'étudier d'une manière qui permettrait de venir en aide à nos jeunes. Moi aussi j'ai habité à Saint John, au Nouveau-Brunswick. Je connais bien la ville. La drogue y est un problème là-aussi. C'est un problème auquel il faut s'attaquer d'un bout à l'autre du pays.
La réponse à sa question est un non catégorique. Nous n'avons pas d'intention cachée. Notre objectif est d'essayer de protéger nos enfants contre la drogue.
M. John Maloney (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je suis content de pouvoir intervenir sur cette question ce matin. J'admire la conviction et la passion avec lesquelles le député de Langley—Abbotsford a proposé et présenté cette motion.
Je parle au nom du ministre de la Santé ce matin. J'aimerais remercier le député d'en face d'avoir pris l'initiative de cette motion. Je le félicite de s'intéresser à la question de la consommation non médicale de drogues au Canada, car c'est un sujet qui mérite l'attention de tous les députés et de tous les partis.
Réduire l'ampleur de ce phénomène dans l'ensemble du Canada, et plus particulièrement dans les centres urbains et dans certaines localités autochtones, est une priorité de notre gouvernement.
Par ailleurs, je veux me faire l'écho des propos du député de Langley—Abbotsford.
La consommation de drogue constitue l'un des défis les plus complexes et frustrants qui se pose à nous aujourd'hui. Il ne suffit pas de limiter l'offre de produits illicites de la drogue, il faut aussi réduire la demande et s'occuper des répercussions sur la santé, de la criminalité et d'une foule d'autres conséquences de la consommation non médicale de drogues ou de médicaments.
Il s'agit d'un problème si complexe qu'il exige une vaste gamme de solutions. Il nécessite la coopération de nombreux ministères et organismes du gouvernement du Canada ainsi que des partenariats significatifs parmi et entre les gouvernements, les institutions, les organismes bénévoles, les groupes communautaires et les organisations de défense. C'est là l'essence de la Stratégie canadienne antidrogue.
Il s'agit d'une approche exhaustive qui vise à réduire les maux associés à l'alcool et à d'autres drogues, les préjudices causés aux personnes vivant sous l'emprise de ces substances qui créent une accoutumance ainsi qu'à leur famille et à leur collectivité.
La stratégie témoigne d'une approche équilibrée qui vise à réduire à la fois l'offre et la demande de drogue. C'est une approche dosée qui est axée sur notre capacité d'empêcher la consommation de drogue, d'améliorer les traitements et la réadaptation et d'appuyer une vaste gamme de mesures de contrôle et d'application de la loi.
Avec le temps, nous avons intégré à la stratégie d'autres éléments qui visent la nature globale du problème de toxicomanie; par exemple, nous avons accru notre appui à la recherche et à l'évaluation, chez nous. Je tiens à souligner que si la stratégie est si bien acceptée et qu'elle remporte autant de succès, c'est parce qu'elle fait une place privilégiée au partenariat.
Divers partenaires participent à la Stratégie canadienne antidrogue, dont 14 ministères fédéraux, provinciaux et territoriaux ainsi que des organismes d'aide aux toxicomanes, des organisations non gouvernementales, des associations professionnelles, des organismes chargés d'appliquer la loi, le secteur privé et des groupes communautaires.
Comme nous l'avons expliqué dans notre dernier livre rouge et dans le discours du Trône, notre engagement à lutter contre l'abus d'alcool et de drogue et le rôle que nous jouons à ce chapitre demeurent une priorité.
En ce qui concerne la consommation de drogues injectables, Santé Canada copréside avec la Colombie-Britannique un comité fédéral-provincial-territorial comprenant des représentants des milieux de la santé, de la justice, des collectivités autochtones et d'autres personnes concernées. Le comité est chargé de recommander des mesures que les gouvernements et leurs partenaires pourraient adopter de manière coordonnée afin de réduire les méfaits associés à la consommation de drogues injectables au Canada. Le comité s'est déjà engagé dans de vastes consultations sur l'aménagement de lieux d'injection sûrs, mais toute proposition concrète visant à contrer l'utilisation de drogues injectables ne sera mise en oeuvre qu'avec l'engagement complet des collectivités en cause.
Santé Canada est aussi partenaire dans le projet innovateur de Vancouver. Le postulat de ce projet quinquennal, c'est qu'il faudra une vaste gamme de solutions pour régler les problèmes liés à la toxicomanie dans le centre-ville est. Cela signifie des approches aussi diverses que le traitement, la promotion de la santé, l'augmentation du nombre de logements sociaux, la sécurité publique et la revitalisation économique.
L'été dernier, j'ai eu l'occasion de visiter le centre-ville est de Vancouver avec le sous-comité sur le crime organisé. J'ai été témoin d'un aspect très sinistre de notre société. J'ai observé des gens qui, cachés dans des coins sombres, s'injectaient des drogues. J'ai vu des gens mourir de surdose, presque devant nos yeux, dans la rue. J'ai vu les taudis que ces gens habitent dans des conditions sordides. Cette situation a profondément bouleversé ceux parmi nous qui ont parcouru cette partie de la ville en compagnie d'un agent de la brigade des stupéfiants.
J'ai vu des jeunes avec tant de potentiel. Je pouvais voir dans leurs yeux qu'ils dépérissaient. J'en ai vu d'autres qui se trouvaient là pour s'amuser pendant un certain temps et goûter un peu du fruit défendu. Je leur ai dit de sortir de ce milieu avant de s'y enliser. J'ai trouvé tout cela incompréhensible.
Nous avons vu une jeune femme qui, de toute évidence, connaissait l'agent, car ils étaient en très bons termes. Au lieu d'être des pères fouettards, ces agents sont plutôt des gardiens qui surveillent les individus en question. Cette jeune femme a donc dit à l'agent qu'un homme s'attaquait aux femmes dans le quartier et avait violé plusieurs d'entre elles durant la semaine. Elle-même avait été violée quelques jours auparavant. En outre, elle était séropositive.
Il était facile de voir la spirale dans laquelle étaient engagés tous ces gens. Ce fut pour moi une expérience incroyable. Notre comité examinait comment les drogues entraient dans la région aux aéroports et aux ports maritimes. Nous avons été témoins du résultat final de ces activités. Ce fut une expérience bouleversante pour nous tous. N'importe quel député aurait été profondément touché par une telle visite.
Il convient de souligner que les quatre piliers de l'entente de Vancouver, soit la prévention, le traitement, l'application de la loi et la réduction du mal, sont conformes aux objectifs de la Stratégie canadienne antidrogue.
Comme d'autres Canadiens, des membres des premières nations et des Inuits sont aux prises avec diverses toxicomanies. Santé Canada s'emploie à former des partenariats avec les collectivités autochtones pour corriger les problèmes de toxicomanie liés à l'alcool et à d'autres drogues. L'hiver dernier, nous avons vu des jeunes qui respiraient des vapeurs d'essence et qui ont été retirés de leur collectivité dans une tentative en vue de les réadapter et de les remettre dans la bonne voie. Nous voyons cela à l'échelle du Canada.
Le programme national de lutte contre l'abus de l'alcool et des drogues chez les autochtones est une des façons dont nous cherchons ensemble à éradiquer le problème. Nous avons comme objectif de regarder en face les aspects culturels, sociaux et personnels de la dépendance. Outre un réseau de 53 centres de traitement, le programme comprend plus de 500 projets communautaires ayant pour objet de fournir aux premières nations et aux Inuits des programmes d'éducation et de prévention correspondant à leur culture, ainsi que des services de consultation d'urgence, d'orientation vers des traitements et de suivi.
Dans ce contexte, l'abus de solvants chez les jeunes autochtones est particulièrement préoccupant. C'est pourquoi nous avons travaillé avec les collectivités autochtones à la mise sur pied d'un réseau de 10 centres en milieu résidentiel chargés de traiter dans un milieu culturellement adapté des jeunes aux prises avec une dépendance aux solvants.
Le programme de lutte contre l'abus de solvants chez les jeunes comprend aussi un volet d'action sociale. Le personnel des centres de traitement collabore avec les collectivités en vue d'offrir de l'information concernant l'utilisation abusive de solvants, comme l'essence et les aérosols, et d'assurer un suivi aux jeunes qui ont terminé leur traitement. Le suivi est presque aussi important que le traitement lui-même, si l'on veut éviter que les jeunes retournent à leur ancien mode de vie.
De toute évidence, tant que les drogues demeureront un problème pour les Canadiens, nous devrons en savoir beaucoup plus long sur les raisons qui poussent les gens à devenir toxicomanes, afin de les aider à vaincre leur toxicomanie.
Les Instituts canadiens de recherche en santé versent à l'heure actuelle quelque 20 millions de dollars à plus de 300 chercheurs des domaines de la recherche sur les drogues et des sciences pharmaceutiques. Ces fonds servent à appuyer tout un éventail de travaux, y compris des enquêtes au sujet du casse-tête que constitue la toxicomanie. Comme il en va de toutes les initiatives canadiennes de recherche en santé, ces travaux se déroulent dans un cadre de collaboration et font appel à des équipes de chercheurs représentant tout un éventail de disciplines.
Je tiens à souligner que nos efforts visant à réduire la toxicomanie se déroulent dans un contexte international. Le Programme des Nations Unies pour le contrôle international des drogues et la Commission interaméricaine de lutte contre l'abus des drogues ont tous deux exhorté les gouvernements à élaborer des cadres nationaux pour s'attaquer au problème mondial de drogue.
Le trafic et la vente de stupéfiants qui alimentent notre demande intérieure sont des problèmes internationaux qui exigent une action coordonnée. De plus, pour respecter nos engagements internationaux, nous travaillons également en étroite collaboration avec d'autres pays pour voir si nous pouvons appliquer à notre situation les leçons qu'ils ont apprises.
Le député de Langley—Abbotsford a parlé du trafic de drogues entre la Colombie-Britannique et les États-Unis. Ce commerce se fait dans les deux sens et il faut y mettre un terme. Il y a une approche coordonnée aux frontières de la part des corps policiers et des services des douanes et du revenu qui unissent leurs efforts pour lutter contre le problème des deux côtés de la frontière.
Le ministre de la Santé est le principal responsable de la stratégie de lutte contre les drogues du Canada, ce qui est tout à fait approprié étant donné que l'usage des drogues est d'abord et avant tout une question de santé humaine. Cependant, c'est une question qui a également des aspects économiques, sociaux, légaux, judiciaires et de sécurité publique. C'est pourquoi il est heureux de la contribution de beaucoup d'autres partenaires qui permettent à la stratégie d'être efficace.
L'Agence canadienne des douanes et du revenu vise à stopper le trafic de stupéfiants par la frontière. Nous avons tous vu les chiens-détecteurs de drogue au travail. Ils sont extrêmement efficaces lorsqu'il s'agit de trouver des produits de contrebande. Le solliciteur général et la GRC qui déploient tant d'efforts pour faire en sorte qu'il n'y ait plus de drogues dans nos rues, ainsi que les provinces et les territoires sont tous des partenaires essentiels dans tous les aspects de la stratégie.
Il y en a beaucoup d'autres, trop nombreux pour les énumérer, comme des particuliers, des groupes communautaires, des bénévoles, des fonctionnaires, des chercheurs et d'innombrables autres personnes qui font leur part pour réduire les dangers reliés à l'usage des drogues au Canada.
Dans ce contexte et au nom du ministre de la Santé, je suis heureux que le député de Langley—Abbotsford nous fasse part de ses préoccupations. En tant que gouvernement, nous nous sommes engagés à poursuivre la lutte contre l'utilisation de stupéfiants. Nos efforts ne peuvent que profiter de l'intérêt renouvelé de la part d'un comité de la Chambre.
Si les députés décident d'établir un comité, je peux donner l'assurance que nous attendrons avec impatience les recommandations du comité sur les nouvelles façons pour le gouvernement du Canada d'aider à réduire encore davantage la gravité du problème de drogue au Canada. À ce stade-ci, je propose:
Que la motion soit modifiée par substitution, aux mots «1er juin», de ce qui suit:
«1er novembre».
Cela donnerait plus de temps pour mettre en oeuvre la motion.
Le président suppléant (M. Bélair): L'amendement est recevable.
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis content que le gouvernement ait appuyé cette motion et ait accepté de constituer un comité.
Je voudrais cependant mettre le gouvernement en garde contre certaines remarques qui viennent d'être faites. Il est probablement nécessaire de dire tout ce que fait le gouvernement à propos de ce problème mais, sincèrement, personne ne croit que nous en faisons assez. Il existe dans notre pays un grave problème de drogue dans les écoles, à la maison, au travail et dans les espaces récréatifs.
Nous avons beau dire que le gouvernement travaille à des programmes intégrés, qu'il a rédigé des documents et qu'il a mis en place une stratégie, peu de gens estiment que tout cela donne des résultats, parce que, en fait, cela n'en donne aucun. C'est pourquoi il est tellement nécessaire de constituer un comité parlementaire.
Je remercie le député de l'autre côté pour sa coopération en ce qui concerne cette motion. Le député dispose-t-il de statistiques susceptibles de nous renseigner sur le nombre de personnes qui, au Canada, sont mortes d'une overdose ces deux ou trois dernières années?
Le député sait, j'en suis sûr, que le problème s'aggrave. Il sait sans doute que de nombreuses personnes au Canada s'inquiètent pour un membre de leur famille qui est toxicomane. Le député pense-t-il que ce problème s'aggrave? Ou bien les programmes mis en place jusqu'ici ont-ils vraiment donné des résultats?
M. John Maloney: Monsieur le Président, je ne sais pas moi-même combien de personnes au juste ont succombé à des doses trop fortes de drogue au cours des deux ou trois dernières années. Tout ce que je peux dire, c'est qu'une seule personne serait déjà une personne de trop. Je puis dire aussi que nous avons effectivement un problème. Et nous nous efforçons de le régler au moyen d'une démarche polyvalente et coordonnée.
La Chambre est saisie du projet de loi C-24, qui donnera aux forces policières les moyens de lutter contre le crime organisé. Nous conviendrons tous ici, je crois, que le crime organisé est derrière le narcotrafic. Notre démarche est double. Nous voulons nous attaquer au problème du point de vue de la santé et du point de vue de la répression criminelle. Ensemble, et de concert avec nos partenaires internationaux, nous allons faire la guerre aux drogues.
Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, le député a parlé de la contrebande de drogues illégales. À une assemblée qui s'est tenue il n'y a pas si longtemps dans ma circonscription et à laquelle j'ai participé, un représentant des forces policières provinciales a présenté une allocution. Lorsque est venue la période des questions, je lui demandé si la contrebande de drogues avait augmenté depuis qu'il n'y a plus de police portuaire—car, comme nous le savons, le gouvernement a décidé qu'il n'y aurait plus de police portuaire nulle part au Canada.
Il m'a remercié d'avoir posé cette question, car j'étais la première personne à le faire. Il a répondu que la situation était épouvantable dans tous les ports. Il a ajouté que, avec le retrait de la police portuaire, nous devrions étudier sérieusement la situation du narcotrafic au Canada.
Je demanderai au député de faire que son comité examine la question à sa prochaine séance, car je crois que nous pourrions obtenir des changements très positifs si nous rétablissions la police portuaire.
M. John Maloney: Monsieur le Président, il s'agit certainement d'un facteur intéressant que le comité devrait prendre en compte. L'élimination de la police portuaire était une mesure d'économie, étant entendu que les forces municipales, la police provinciale et la GRC pourraient gérer la situation et coordonner les choses. Si cette solution ne fonctionne pas, il appartiendra au comité d'examiner cette possibilité et de faire des recommandations au gouvernement.
M. Randy White: Monsieur le Président, comme il est secrétaire parlementaire de la ministre de la Justice, j'aimerais lui poser une question au sujet de la drogue dans les prisons. Je suis assez bien informé à ce sujet, auquel je m'intéresse depuis des années. Aussi incroyable que cela paraisse, il existe des cartels de la drogue dans les prisons.
Il y a une chose qui m'a toujours rendu perplexe, c'est le fait que certaines personnes qui n'ont pas de dépendance à l'égard de la drogue lorsqu'elles entrent en prison en ressortent toxicomanes. Il y a beaucoup de drogue dans les prisons. Si nous ne parvenons pas à freiner le trafic de la drogue dans les prisons, où on trouve des barreaux et qui sont entourées de barbelés et de murs épais pour empêcher la drogue d'y entrer, comment pourrons-nous jamais empêcher la prolifération des drogues à l'extérieur des prisons?
M. John Maloney: Monsieur le Président, le député évoque un fait des plus intéressants, que l'homme de la rue a peine à croire; c'est le fait qu'il y a un problème de drogue dans les prisons. Voilà un autre sujet que le comité devrait examiner. Le député ferait peut-être mieux, cependant, de soulever le problème auprès du solliciteur général ou de son secrétaire parlementaire, qui ont compétence en la matière.
Nous luttons contre la drogue dans les prisons. Ces établissements sont dotés de détecteurs à ions et le personnel des prisons effectue des fouilles. La drogue est introduite dans les prisons de diverses façons. Une des méthodes utilisées consiste à introduire les produits dans les orifices humains. La question est de savoir jusqu'où nous sommes prêts à pousser les fouilles. Il faudra aller plus loin. Nous devrons faire preuve de vigilance à l'égard des individus qui, lorsqu'ils sont en libération conditionnelle de jour, achètent de la drogue de trafiquants.
D'une façon ou de l'autre, la drogue entre dans les prisons, et nous devons faire échec à ce trafic. Nous devons lutter contre la présence de la drogue dans les prisons, mais aussi contre les maladies qui peuvent être transmises par les aiguilles qu'utilisent les consommateurs de drogues. Nous devons lutter contre ces pratiques. Le comité devra se pencher sur ces questions et faire des recommandations au gouvernement. Je suis convaincu que le gouvernement y donnera suite.
[Français]
M. Réal Ménard: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Le sens de l'amendement déposé par le gouvernement ne nous apparaît pas clair. Est-ce que vous pourriez nous lire l'amendement qui a été déposé par le gouvernement?
Le président suppléant (M. Bélair): L'amendement dit tout simplement qu'au lieu de la date du 1er juin 2002, on indique plutôt la date du 1er novembre 2002.
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, je veux d'abord féliciter moi aussi le député de Langley—Abbotsford. Je le répète, le Bloc québécois appuiera cette motion.
Je voudrais cependant, comme l'amendement est maintenant traduit en français, lire la première partie, si on me le permet, pour les gens qui se joignent à nous.
La motion déposée par l'Alliance canadienne demande:
Qu'un comité spécial de la Chambre soit chargé d'examiner les facteurs sous-jacents ou parallèles à la consommation non médicale de drogues ou de médicaments, et de recommander au gouvernement des moyens qui lui permettront de réduire, seul ou avec le concours des autres paliers de gouvernement, l'ampleur du problème que ce phénomène constitue;
Je veux donc faire trois commentaires en ce qui a trait au libellé qui est proposé par nos collègues de l'Alliance canadienne.
Nous voulons participer de bonne foi à ce comité. Je suis moi-même député de Hochelaga—Maisonneuve, dans l'est de Montréal, et la question de la consommation de la drogue, du trafic de la drogue et des piqueries est une réalité qui y est présente.
Cependant, je ne veux pas qu'on aborde la philosophie du comité et les travaux du comité dans une perspective de «law and order». Je crois qu'il y a certaines circonstances où la consommation de la drogue est un problème. Il y a d'autres circonstances où la consommation de la drogue n'est pas un problème.
Tantôt, j'écoutais notre collègue de Saint John. Elle s'énervait déjà un peu avant même que les travaux n'aient commencé. Je pense qu'il faut lui lancer un appel au calme. Elle dit qu'elle a conduit elle-même—imaginons la scène—une étude sur la question du cannabis, et que le cannabis, automatiquement, une fois la cigarette allumée, brûle neuf cellules à la seconde.
J'espère qu'elle aura la gentillesse de déposer devant nous ces études, parce que dès cette semaine, rappelons-nous que l'Association médicale canadienne—et en tout respect pour la députée de Saint John, j'ai davantage tendance à m'en remettre à l'Association médicale canadienne qu'à elle-même lorsqu'il s'agit de traiter de ces questions—demandait que l'on décriminalise la possession de marijuana, la possession à des fins simples, à des fins personnelles, en disant qu'il n'y avait pas d'étude concluante à l'effet que cela avait des effets nocifs.
Bien sûr, lorsqu'on parle l'héroïne, lorsqu'on parle d'autres types de drogues dures, je crois que notre attitude ne doit pas être la même. Mais j'espère que dans les travaux de ce comité—et je sais que mon collègue de Rosemont—Petite-Patrie a aussi un intérêt pour ces questions—et dans les travaux que nous conduirons, il y aura place pour la nuance et que nous ne serons pas animés, en soi, par une mentalité de «law and order». C'était là mon premier commentaire.
Mon deuxième commentaire est le suivant. Dans mon parti, l'an passé, en fait au mois de juin dernier, le chef du Bloc québécois m'a demandé de travailler avec un groupe de députés, à savoir ma collègue de Longueuil et la députée de Saint-Bruno—Saint-Hubert sur toute la question de la prostitution de rue.
Je suis allé visiter Vancouver. J'ai visité le quartier où il y a beaucoup de prostitution, où il y a beaucoup de consommation de drogues—je pense qu'on appelle cela le Middle-East—et où il y avait beaucoup de difficultés qui se posaient. J'ai vu des scènes d'horreur. J'avoue que je ne pensais pas que cela pouvait exister dans un pays comme le Canada.
Il est certain qu'il y a des liens à faire entre la prostitution de rue et la toxicomanie. Bien sûr, on ne peut pas réduire la problématique de la prostitution et la problématique de la toxicomanie, mais il y a quand même des liens à faire entre les deux.
Troisièmement, je souhaite aussi que le comité parlementaire que notre collègue veut créer ait les ressources qu'il faut pour conduire des enquêtes. Je pense qu'en la matière, on s'en remet souvent à des ouï-dire et à des constats qui alimentent des préjugés.
J'espère que nous aurons l'entière collaboration du ministère de la Justice, de Santé Canada et de Service correctionnel Canada pour avoir vraiment recours à l'ensemble des données qui sont disponibles.
Troisièmement, je rappelle qu'il y a quand même un certain travail qui a été fait. Ce n'est pas d'aujourd'hui que le Canada et les provinces se posent des questions sur les conséquences de la consommation de la drogue. Rappelons que dès 1969, il y a eu, au Canada, la Commission Le Dain. Je crois qu'il faudra retourner également à ce qui a été fait. Évidemment, nous devrons partir d'autres prémisses, mais je pense que nous devrons quand même partir de ce qui a été fait.
Rappelons également que tout à l'heure, notre collègue, parrain de la motion, a dit que le comité sénatorial avait limité ses travaux à la question du cannabis. Une fois les vérifications faites, je rappelle que le comité sénatorial n'étudie pas que la question du cannabis, mais jette un regard plus global sur l'ensemble de la consommation de la drogue au Canada. Ce comité sénatorial est présidé par le sénateur Nolin pour un mandat de deux ans. Ce n'est pas quelque chose qui va se faire en quelques jours.
Même si ma formation politique et celle du député, auteur de la motion, souhaitent l'abolition du Sénat, puisqu'il existe des ressources et des gens qui font des travaux, je pense que nous devrions également nous en inspirer.
Nous devrions également nous rappeler que la question de l'évaluation des conséquences de la consommation de la drogue ne peut pas être une problématique qui doit exister indépendamment des considérations sociales. On devra également faire des liens avec la question de la pauvreté et avec celle du sens à la vie. Il est quand même intéressant de savoir qu'il existe souvent des corrélations entre la consommation de drogues et les milieux où la pauvreté sévit. J'espère que nous aurons ces données à l'esprit lorsque le temps viendra de faire des recommandations et de nous pencher sur ces questions.
Une autre considération que le comité devra évaluer est de savoir ce que les stratégies prohibitionnistes ont donné jusqu'à maintenant. Le sens de la motion trahit, je dirais, une certaine propension conservatrice. On parle de la consommation de la drogue comme étant un phénomène, comme si c'était un problème. Mais le parrain de la motion a été très éloquent pour poser un constat à l'effet que, en ce moment, les stratégies prohibitionnistes ne donnent rien. Nous ne pouvons pas dire que les stratégies prohibitionnistes, le fait d'interdire la consommation de la drogue et de prévoir que c'est une infraction au Code criminel, a eu beaucoup d'effet sur le plan de l'équilibre social que nous recherchons comme parlementaires.
J'aimerais maintenant aborder un autre sujet d'importance. J'ai posé la question, un peu plus tôt, à savoir si nous devions partir d'un cadre comme celui que propose la stratégie de la réduction des méfaits. Ce cadre d'intervention, qui est connu des fonctionnaires de Santé Canada, est assez balisé. Bien sûr, ce n'est pas un cadre miraculeux qui fait en sorte que les gens arrêtent de consommer automatiquement, mais cela permet un certain modèle d'intervention.
La stratégie de réduction des méfaits est constituée par trois éléments. On constate qu'il y a des gens qui ont des problèmes de dépendance à la drogue. On ne cherche pas à jeter un regard moral sur la situation. On ne dit pas que c'est bien ou que c'est mal. On fait plutôt un constat qu'il y a des gens qui consomment et que cette consommation les rend dysfonctionnels et qu'elle peut même être un facteur nuisible pour les communautés où ces gens évoluent.
Entre le moment où on fait ce constat et celui où les gens vont arrêter de consommer, particulièrement des drogues douces, il peut facilement s'écouler deux, trois, quatre ou cinq ans.
Que fait-on pour s'assurer que dans un contexte où il y a consommation de drogue, cela se fasse de la façon la plus sécuritaire possible pour celui qui consomme et pour son environnement? Quand on parle du cadre le plus sécuritaire possible, cela veut dire qu'on s'assure qu'on n'a pas recours à des seringues souillées, que ces seringues ne circulent pas parmi différents utilisateurs, qu'il y a des sites d'injection, des endroits où retourner les seringues, qu'elles sont récupérées et ne peuvent être utilisées dans la communauté.
Voilà le modèle proposé par la stratégie de réduction des méfaits. C'est un modèle connu des différents intervenants, particulièrement les gens qui se trouvent dans les régies régionales et ceux qui sont liés au domaine de la santé.
Il y a également une statistique que l'on devra avoir présente à l'esprit dans la conduite de nos travaux. Selon les données policières, selon les données disponibles auprès des différents services de police, que ce soit la GRC, la SPCUM ou la Sûreté du Québec, on intercepte à peine 1 à 10 p. 100 de la drogue qui circule. C'est donc dire qu'il y a tout un pan de la consommation de drogue, tout un pan du narcotrafic qui échappe complètement au contrôle des policiers.
D'après les différentes données policières, c'est entre 1 et 10 p. 100 des stupéfiants qui sont interceptés par ces forces policières. Est-ce qu'il n'y a pas un lien à faire entre une stratégie prohibitionniste, telle qu'on la connaît depuis plusieurs décennies, et le fait que les policiers ont été incapables de mettre en échec ceux qui se livrent au trafic des stupéfiants? Le comité devra se poser cette question.
Je veux aussi rappeler que, dans la conduite de nos travaux, la question du cannabis devra être distincte, à mon point de vue, de ce que l'on veut faire concernant l'héroïne ou d'autres drogues dures.
Un député de l'Alliance canadienne a déposé un projet de loi en 1999. Je sais qu'on ne peut pas appeler nos collègues par leur nom, mais comme je ne connais pas le nom de son comté, permettez-moi donc d'enfreindre le Règlement pendant 30 secondes. Il s'agit de notre collègue le médecin que l'on connaît, qui a été candidat à la direction de l'Alliance canadienne, et qui est un ami du leader de l'Alliance canadienne. Le 26 avril 1999, il a déposé le projet de loi C-503, qui avait pour but de décriminaliser la simple possession de marijuana. Je voudrais que notre collègue, auteur de la motion présentée aujourd'hui, nous dise s'il appuie le projet de loi qui avait été déposé par son collègue.
Dans mon parti, le député de Rosemont—Petite-Patrie a aussi présenté une motion qui a fait l'objet d'un vote, par laquelle il invitait les parlementaires à décriminaliser l'utilisation de cannabis à des fins thérapeutiques.
Je comprends que, par la motion qui nous est présentée aujourd'hui, nous allons nous pencher sur l'utilisation de drogues à des fins non thérapeutiques; c'est très clair dans la motion. Devra-t-on admettre, dès le début de nos travaux, que le cannabis doit faire l'objet d'un traitement différent de celui des autres drogues? Selon toute vraisemblance, il n'y a pas de corrélation, il n'y a pas de conséquence à en faire une consommation modérée. L'Association médicale canadienne nous rappelait que cet état de fait peut être soutenu scientifiquement.
Voilà pour ce qui est des prémisses à partir desquelles nous allons travailler. Je suis reconnaissant au député de Langley—Abbotsford d'avoir présenté cette motion. Je crois que, comme parlementaires, nous sommes capables de jeter un regard objectif sur cette question. Évidemment, quand je dis qu'il faut jeter un regard objectif, chacun a des valeurs morales face à la drogue, c'est certain. Toutefois, comme parlementaires, nous ne pouvons pas faire en sorte que la morale des uns devienne celle des autres.
J'espère que dans les prémisses à partir desquelles nous conduirons nos travaux, nous aurons deux grandes balises. Premièrement, il faut se préoccuper de la sécurité dans les collectivités. Deuxièmement, il faut se préoccuper de la question de la criminalité.
Encore une fois, on devra se poser des questions au sujet des stratégies prohibitionnistes, telles qu'elles existent au Canada depuis 50 ans, qui ont ont donné lieu à un marché noir considérable et à des affrontements au sein du crime organisé.
Depuis 1995, au moins 147 personnes ont été victimes d'un attentat, suite à des rivalités confrontant les différents gangs de motards criminalisés. Derrière le crime organisé, il y a bien sûr la lutte pour le contrôle d'un territoire qui est liée à l'établissement de périmètres de vente de drogue. Ce sont des questions que nous devrons avoir présentes à l'esprit.
Je peux assurer notre collègue de l'Alliance que le Bloc québécois travaillera avec beaucoup de sérieux à ce comité. Je ne sais pas si l'Alliance canadienne est d'accord avec l'amendement qui a été présenté par le gouvernement afin de déposer le rapport au mois de novembre, mais nous aurons l'occasion d'en discuter. Je vais aussi étudier cela avec le leader de mon parti.
De toute manière, je crois qu'il y a un assez bon consensus à la Chambre à l'effet que ce comité doive voir le jour. J'espère qu'il disposera de tous les moyens possibles pour que nous puissions faire un travail de qualité et, par conséquent, soumettre des recommandations éclairées.
[Traduction]
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je répondrai à mon collègue que nous sommes d'accord avec le changement de date. C'est un amendement qui nous agrée parce qu'il nous donne tout l'été 2002 pour étudier la question.
Je lui répondrai également qu'il y a probablement des députés de mon parti et de tous les partis à la Chambre qui pensent qu'on devrait songer à légaliser ou à décriminaliser la marihuana. L'une des raisons pour lesquelles les politiciens au Canada sont si réticents à parler de drogues, comme nous le faisons aujourd'hui pour la première fois depuis des décennies, c'est parce qu'ils ne veulent pas se prononcer sur la légalisation de la marihuana au pays. Voilà un bon sujet d'étude pour le comité. Beaucoup de gens, et il y en a certainement à la Chambre, ne se sont pas encore fait une opinion sur la question.
Mon collègue a suggéré qu'il existait un lien entre la prostitution et les drogues, un rapport de cause à effet. Ayant moi-même visité en compagnie de policiers de Vancouver quelques-uns des endroits où vivent les prostitués et les toxicomanes, je peux assurer aux députés que le commun des mortels ne laisserait pas un chien entrer dans ces endroits. Ce sont des lieux terriblement délabrés, infestés par les rats et jonchés de seringues et de condoms utilisés.
Mon collègue croit-il que les prostitués sont des criminels ou des victimes du commerce de la drogue?
[Français]
M. Réal Ménard: Monsieur le Président, je m'intéresse à la prostitution depuis cinq ans. La réponse est plus nuancée que la question. Je voudrais lancer un appel au calme. Ceux qui veulent faire lever le débat devront le faire avec sérieux.
Il y a certains cas où les prostituées, que l'on appelle aussi les travailleuses du sexe, sont définitivement des victimes, parce qu'elles n'ont pas choisi ce travail, parce qu'elles sont sous le contrôle d'un «pimp», parce qu'elles se font violenter et parce qu'il y a des préjugés dans la société. L'état du droit ne permet pas de considérer la prostitution comme un véritable travail.
Je rappelle à tous les députés de la Chambre que lorsque des prostituées se font violenter, elles ne peuvent porter plainte à la police parce que, comme elles opèrent dans un cycle clandestin, et comme la sollicitation, enfin tout ce qui entoure la prostitution est criminalisé—il existe un cadre législatif—souventes fois, elles sont des victimes.
Je vais donner un exemple que j'ai vécu. En 1995, il y a eu une rencontre à mon bureau sur la question de la prostitution. Parmi les travailleuses du sexe présentes, se trouvait une ancienne page de la Chambre des communes, une personne qui avait travaillé ici comme page en 1993-1994. À ce moment-là, j'étais jeune député et je me rappelle très bien de cette personne. Je la rencontre quelques années plus tard. Elle était allée à l'université; elle était issue d'un milieu tout à fait confortable, d'une famille tout ce qu'il y a de plus classique. Elle avait choisi le travail du sexe.
Lorsqu'on veut parler de prostitution, il n'y a pas de place pour les idées arrêtées; il n'y a pas de place pour les préjugés et il n'y a pas de place pour les automatismes. La réalité de la prostitution est une réalité nuancée.
Je dirai concrètement que, à ce moment-ci, il est vrai qu'il y a un lien très réel entre la toxicomanie et la prostitution. Je souhaite que comme parlementaires nous ayons un débat sur la prostitution. Que l'on en fasse un lieu où on reconnaît également la citoyenneté des prostituées, mais celles-ci doivent aussi admettre qu'elles ne peuvent pas opérer n'importe où, n'importe quand et n'importe comment.
Rappelez-vous que dans le centre-sud, dans le comté du chef du Bloc québécois, en juin 2000, il y a eu un affrontement entre les citoyens et les travailleuses du sexe parce que les citoyens ont, eux aussi, droit à une qualité de vie. Ils ont aussi le droit de ne pas être témoins de scènes disgracieuses devant leur perron. C'est pour cela qu'il faudra donner un cadre législatif à la prostitution, ce qui fait cruellement défaut actuellement.
[Traduction]
M. Randy White: Monsieur le Président, la prostitution est un grave problème au Canada. Les nombreuses prostituées avec qui j'ai eu l'occasion de m'entretenir étaient toutes des toxicomanes et beaucoup d'entre elles étaient de très jeunes enfants. C'est triste à voir.
Que pense mon collègue de l'efficacité de notre système judiciaire? Je pourrais citer des centaines de cas, mais je m'en tiendrai à celui du type qui a été arrêté en possession de drogues ayant une valeur marchande de 366 000 $. Il était sur l'assistance sociale comme beaucoup d'autres dans sa situation. Il a été condamné à une journée de prison. Il avait pourtant déjà été arrêté et condamné des douzaines de fois depuis 1972, notamment pour possession d'une drogue d'usage restreint, possession de stupéfiants, trafic, importation de stupéfiants, culture de stupéfiants, et j'en passe. Malgré toutes ces condamnations, il n'a passé qu'une journée derrière les barreaux.
Je demande au député: Qu'est-ce qui ne va pas dans notre système judiciaire aujourd'hui? Pourquoi les peines prononcées ne semblent pas tenir compte du nombre de condamnations. Il n'y a aucune uniformité. Certains individus ont des casiers judiciaires qui remontent à des années et pourtant ils sont condamnés à cinq jours de prison, dix jours, zéro jour, avec sursis, et j'en passe. C'est un système judiciaire qui manque de suite. N'est-ce pas se faire le complice du problème de la drogue qui existe au pays?
[Français]
M. Réal Ménard: Monsieur le Président, le seul commentaire que m'inspire cet exemple prendra la forme d'un souhait. Lorsqu'on est condamné, comme adolescent, je ne pense pas qu'en soi l'incarcération soit la solution.
On sait bien sûr le discours que l'on tient dans le dossier des jeunes contrevenants. Je ne crois pas que cela soit différent dans le dossier de la prostitution de rue.
J'ai parlé à plusieurs prostituées, et je l'ai fait souvent au cours des derniers mois. Quand on a 16 ans, qu'on se retrouve dans la rue pour des fins de prostitution, quelque chose doit nous interpeller socialement. Il y a bien sûr une question de responsabilité individuelle. Je ne crois pas qu'il faille escamoter la responsabilité des individus, mais je ne suis pas convaincu que la question de la répression, la question de l'incarcération et celle d'imposer aux gens des sentences plus lourdes soient des solutions aussi automatiques que certains parlementaires de cette Chambre peuvent le penser.
Cela étant dit, quand notre collègue donne des exemples de gens qui ont commis des méfaits à plusieurs reprises et pour lesquels la réhabilitation n'a manifestement pas joué, je crois qu'il y a certaines circonstances où il faut se rendre à l'évidence, et qu'il y a des gens qu'on doit incarcérer.
Le Bloc québécois ne tient pas le discours désincarné de dire qu'en toutes circonstances et sur un mode automatique, la réhabilitation doit jouer, mais nous ne voulons pas cacher notre parti pris, particulièrement pour des gens qui ont 14, 15, 16, 17 ou 18 ans, qu'il faut tenter, de manière très sérieuse, de réhabiliter.
[Traduction]
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je ne parlais pas nécessairement de peines de prison obligatoires pour ces personnes, mais je me demande si mon collègue peut nous dire ce qui pourrait être fait pour rompre le cycle de dépendance.
Lorsque les gens n'hésitent pas à voler ou dévaliser pour s'acheter une dose, surtout de l'héroïne ou d'autres drogues engendrant une dépendance, ne devons-nous pas à un moment donné les obliger à subir une désintoxication et une réadaptation pour qu'ils en finissent avec ce cycle?
[Français]
M. Réal Ménard: Monsieur le Président, la réponse est oui. Il faut apprécier les antécédents et un ensemble de variables, mais notre collègue a raison. Dans certains cas, il faut sortir les gens de ce cycle-là et il faut les emprisonner. Il y a des cas où il y a matière à sanction, il y a des cas où c'est effectivement envisageable.
AFFAIRES COURANTES
[Traduction]
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE
PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE
M. Grant Hill (Macleod, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. À l'issue de consultations, je demande le consentement unanime de la Chambre pour proposer la motion suivante. Je propose:
Que M. Harris et Mme Gallant prennent la place de MM. Strahl et McNally au sein du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.
Le président suppléant (M. Bélair): La Chambre a entendu l'énoncé de la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LES CRÉDITS
JOUR DÉSIGNÉ—LES DROGUES
La Chambre reprend l'étude de la motion et de l'amendement.
M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, je suis heureux, comme toujours quand j'ai l'occasion de prendre la parole à la Chambre, de participer au débat d'aujourd'hui.
La motion sur laquelle nous serons appelés à voter propose de former un comité spécial de la Chambre qui soit chargé d'examiner les facteurs sous-jacents ou parallèles à la consommation non médicale de drogues ou de médicaments, et de recommander au gouvernement des moyens qui lui permettront de réduire, seul ou avec le concours des autres paliers de gouvernement, l'ampleur du problème.
Ce débat vient à un moment opportun car nous observons dans les journaux et à la télévision un intérêt croissant à ce sujet. Un article publié hier dans un des quotidiens d'Ottawa exposait le pour et le contre de la décriminalisation. Hier soir, au réseau anglais de Radio-Canada, l'émission counterSpin était entièrement consacrée à un vigoureux débat, comme d'habitude, sur le pour et le contre de la décriminalisation de certaines des drogues douces, plus particulièrement la marijuana.
Je commencerai par présenter un résumé de ce que le Dr John Hoey, rédacteur en chef du Journal de l'Association médicale canadienne, a déclaré à cet égard. Il a dit que l'usage de certaines drogues à des fins récréatives s'était révélé assez inoffensif au fil des ans, mais il craint de plus en plus, tout comme bien des membres de l'Association médicale canadienne, je présume, que la simple possession et l'usage à des fins personnelles ne mènent à une infraction pour laquelle une personne possèderait un casier judiciaire jusqu'à la fin de ses jours.
Les médecins de l'AMC estiment que la possession à des fins personnelles devrait être dépénalisée. Selon le Dr Hoey, les conséquences négatives sont minimes, pour 1,5 million de Canadiens, selon les estimations, qui consomment de la marijuana à des fins récréatives. Selon lui, les vrais torts sont causés par les conséquences légales et sociales provenant des accusations pour possession à des fins récréatives. Il ajoute que 50 p. 100 des arrestations portent sur la simple possession de drogues.
Chose intéressante, les députés ont reçu récemment une petite brochure de Statistique Canada intitulée Un coup d'oeil sur le Canada. Elle a été envoyée dans le cadre de la journée du recensement, le 15 mai. Lorsque nous passons à l'application de la loi, il semble que les infractions au Code criminel n'aient jamais été aussi peu nombreuses depuis 20 ans. Dans toutes les catégories, sauf deux, et il en existe une douzaine, on enregistre des baisses, dont bon nombre sont importantes. Par exemple, le nombre de crimes contre la propriété a chuté de 14,7 p. 100 entre 1994 et 1999. Le nombre d'agressions sexuelles a diminué de près d'un quart pendant la même période.
Une des deux exceptions, c'est le nombre de vols de véhicules à moteur, qui a légèrement augmenté entre 1994 et 1999. Cette hausse est de 1,2 p. 100. En ce qui concerne les drogues, l'augmentation atteint un taux effarant de 32,8 p. 100, soit près d'un tiers. Le nombre de ces infractions s'élevait à un peu plus de 60 000 en 1994 et à un peu moins de 80 000 en 1999, la dernière année pour laquelle des statistiques sont disponibles.
Ce que disent Dr Hoey et d'autres, c'est qu'il y a un problème. S'il est exact que 50 p. 100 de ces cas, soit 40 000 environ, sont liés à la possession pour consommation personnelle, il y a un net problème et le Parlement devrait sérieusement s'y arrêter.
Je n'étais malheureusement pas à la Chambre des communes en 1996, mais il me semble regrettable que l'on ait raté une bonne occasion de charger un comité spécial mixte d'examiner la question. Une proposition en ce sens avait fait l'objet d'un vote et avait été rejetée pour une raison ou une autre. Je n'ai pas encore eu le temps de chercher l'explication, mais elle avait été rejetée.
C'est donc un comité spécial du Sénat qui étudie le dossier des drogues illicites. Il doit présenter son rapport en août. Cette échéance devance de plusieurs mois celle qui est proposée et amendée, soit novembre 2002. Il est regrettable en un sens de penser que nous reproduirions les travaux de l'autre endroit si nous adoptions cette motion. À ce que je comprends, tous les partis représentés à la Chambre sont favorables à cette motion parrainée par le député de Langley—Abbotsford.
Je devine que les mêmes experts voudront comparaître devant notre comité et, dans bien des cas, rencontreront les mêmes personnes. Étant donné que les Canadiens tiennent à ce qu'on dépense judicieusement leur argent, il est regrettable que nous n'ayons pas profité de l'occasion en 1996 pour former un seul comité parlementaire.
Le Comité spécial sur les drogues illicites de l'autre endroit a dressé une liste de renvois très exhaustive. Le comité se reporte à la Commission Le Dain, laquelle a entrepris ses travaux en 1969 et les a achevés en 1972. Presque 30 ans plus tard, nous en sommes encore à débattre de la question.
La Commission Le Dain, on s'en souvient, a mené de très sérieuses consultations sur les effets négatifs de la politique canadienne antidrogue, vers la fin des années 60 et le début des années 70. Elle s'est intéressée principalement à l'utilisation des drogues à des fins non médicales. Elle a conclu que des centaines de milliers de Canadiens inculpés pour possession de drogues interdites avaient vu leur liberté personnelle restreinte pour le reste de leurs jours pour la bonne raison qu'on leur avait constitué un casier judiciaire.
La commission a également conclu que les immenses ressources policières utilisées pour lutter contre le trafic et la consommation de drogues illicites visaient essentiellement les jeunes. Par conséquent, la Commission Le Dain a recommandé que les sanctions prises contre les consommateurs de drogues soient progressivement supprimées, que la consommation de marijuana soit décriminalisée et que des méthodes de lutte autres que les sanctions imposées par la justice pénale soient utilisées. Voilà essentiellement quelles avaient été les recommandations de la Commission Le Dain il y a 30 ans.
Plus récemment, l'Institut de médecine de la U.S. National Academy of Sciences a publié les résultats d'une étude commandée par le directeur de la politique antidrogue de la Maison blanche. L'étude portait sur la consommation de marijuana à des fins médicales, question dont je sais qu'elle n'est pas à l'ordre du jour d'aujourd'hui. Je ferai observer que, curieusement, en dépit des conclusions de cette étude faite par des universitaires, la Cour suprême des États-Unis a voté récemment à 8 contre 0 contre l'utilisation de la marijuana à des fins médicales. Je suis heureux de voir que le gouvernement d'en face n'a pas retenu cette position et que nous allons de l'avant. C'est tout à son honneur.
Il n'est pas question de décriminaliser la marijuana. Je précise, à l'intention du député de Langley—Abbotsford, que nous ne préconisons pas la légalisation de la consommation de drogues mais que nous voulons voir cette infraction rayée du Code criminel. Même l'Association canadienne des chefs de police reconnaît qu'il y aurait lieu de dépénaliser la possession de petites quantités de drogue, y compris l'héroïne, sans toutefois la légaliser. Voilà un des deux côtés de la médaille.
L'Ottawa Citizen a réservée la moitié de la page éditoriale à un article concernant le chef de police d'Ottawa qui déclare ne souhaiter aucunement s'engager dans la voie de la dépénalisation de la consommation personnelle de drogues douces telles que la marijuana. En tant que témoin quotidien des effets de l'abus de drogues, il ne peut que constater à quel point cela mine le tissu social.
Il affirme par ailleurs que la marijuana et d'autres produits du cannabis ont une concentration de THC beaucoup plus élevée que ce n'était le cas dans les années 60 et 70. Pour ma part, je ne saurais le dire. Un intervenant à l'émission counterSpin d'hier soir a soutenu avec véhémence que ce n'était pas le cas. Si la résolution était adoptée, cette question devrait certes être examinée par le comité spécial. Le Sénat s'y intéressera ou l'a peut-être déjà fait si je ne m'abuse.
Deux autres points méritent d'être soulignés. Puisque le Canada ne s'engage pas exactement dans la même voie que les États-Unis, quel degré de souplesse pourra-t-il se permettre?
Au cours de la dernière année, des services de police de la Colombie-Britannique se seraient inspirés de nos voisins dans des cas de consommation de petites quantités de drogues. Nous avons aussi entendu et lu des reportages sur la police américaine qui ne demande pas mieux que de poursuivre les présumés consommateurs de drogues hors de l'État de Washington pour qu'ils se réfugient en Colombie-Britannique et de forcer la main au gouvernement canadien pour qu'il adopte une position plus ferme à l'encontre des consommateurs de drogues.
Concernant les relations entre le Canada et les États-Unis, la une du Ottawa Citizen d'aujourd'hui rapporte que des espions militaires technologiques installés à Ottawa ont participé à la guerre anti-drogue américaine en espionnant les barons de la drogue sud-américains.
Avec la mondialisation et l'imbrication de nos deux pays, on se demande jusqu'à quel point le Canada sera effectivement libre d'agir dans des dossiers comme celui-ci. Nous savons que le président actuel des États-Unis, comme d'ailleurs la plupart de ses prédécesseurs, favorise la manière forte pour essayer d'éliminer l'importation de drogues aux États-Unis. On aurait du mal à s'imaginer que les États-Unis appliquent une politique moins stricte au nord du 49e parallèle que celle qu'ils ont adoptée envers le Mexique, les Caraïbes, l'Amérique centrale et l'Amérique du Sud. C'est une question qui mériterait une attention particulière de la part de tout sous-comité spécial qui serait créé.
J'aimerais également rappeler que ma collègue, la députée de Vancouver-Est, a souvent abordé le sujet des drogues et a dénoncé la situation de ses électeurs qui vivent au centre-ville de Vancouver. Elle fait campagne auprès du gouvernement pour qu'il réagisse face à la crise sanitaire que représentent la consommation et la surconsommation de drogues et les dangers que cela entraîne pour la sécurité des citoyens. En fait, elle s'est faite la championne de ce dossier depuis qu'elle est arrivée à la Chambre, en 1997.
Selon elle, il y a bien des spécialistes, y compris à Vancouver, mais elle déplore le manque de leadership et la lenteur avec laquelle les autorités réagissent depuis trop longtemps. Elle presse le ministre de la Santé d'adopter une approche incluant des essais de délivrance d'héroïne sur ordonnance dans plusieurs centres, des centres d'injection sans risque, ainsi que l'amélioration des logements et de l'aide sociale.
C'est à cela que faisait allusion le député de Langley—Abbosford dans sa question au député du Bloc quand il a parlé des endroits où vivent les drogués. Il a dit qu'on n'y mettrait même pas un chien. Je suis sûr que c'est absolument vrai et qu'il faut faire quelque chose. Nous devrions sans doute prendre des mesures progressistes de manière à éliminer en partie les conditions déplorables dans lesquelles vivent les gens, et à assurer la sécurité non seulement des drogués et des non drogués, mais également des sans-abris. Nous croyons, tout comme ma collègue de Vancouver-Est, que cela réduirait la criminalité. Nous en voyons des exemples en Europe et en Australie où les autorités sont un peu plus avant-gardistes que les politiciens canadiens.
En conclusion, je dirais que le Nouveau Parti démocratique est heureux de débattre de cette question. Nous appuierons la motion. Nous regrettons qu'un comité spécial des deux Chambres du Parlement n'ait pas été constitué en 1996 lorsque cette question s'est posée. Il me semble que le Sénat a déjà fait beaucoup de travail sur la question de l'utilisation légale ou illégale des drogues et de la décriminalisation de ces dernières. Nous allons nous-mêmes nous engager dans cette voie.
Ceci dit, nous ne pouvons pas revenir en 1996. Il est malheureux que nous n'ayons pas constitué un seul comité. Nous allons maintenant en avoir deux, mais nous appuierons quand même cette politique et cette motion.
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de l'approche très productive et non partisane que prennent les députés. Je félicite également le président sortant de ses commentaires. J'ai remarqué qu'il avait de nouveau fait mention du rapport Le Dain dont plusieurs d'entre nous se souviennent, surtout à cause de la recommandation extrêmement importante qu'il contenait. Malheureusement, ce rapport n'a pas été pris en compte.
La possibilité de réduire graduellement les peines liées à l'utilisation des drogues illicites suscite évidemment la controverse. Mon collègue a-t-il une position initiale au sujet de la non-criminalisation et de l'élimination des peines liées à l'utilisation de ces drogues? Je pose cette question à cause des commentaires que plusieurs d'entre nous ont reçus des électeurs. Dans mon cas, ces commentaires m'ont été transmis alors que je représentais une circonscription urbaine à titre de député provincial au Manitoba.
Dans l'ensemble, ces commentaires reviennent à dire que si toutes les drogues actuellement illégales étaient légalisées et que leur distribution était contrôlée adéquatement, il n'y aurait pas d'incitation à voler et à attaquer des citoyens respectueux de la loi. Ainsi, nous pourrions prendre des ressources présentement consacrées à l'application de la loi et les investir dans des services sociaux intensifs pour nous attaquer à la cause du problème. Mon collègue a-t-il des observations à ajouter à ce sujet?
M. Dick Proctor: Monsieur le Président, cette question comprend plusieurs volets. J'aimerais rajouter quelques commentaires sur la commission Le Dain.
Gerald Le Dain, qui présidait la commission, a tenu à la fin des années 1960 des consultations très importantes sur les répercussions négatives de la politique canadienne en matière de drogues qui portaient principalement sur l'usage non-médical des drogues. Comme le député le sait probablement, M. Le Dain a déjà été doyen de la Osgoode Hall Law School de l'Université de Toronto, et juge de la Cour suprême. Il était d'avis que c'étaient les politiciens qui étaient à blâmer dans ce dossier pour ne pas avoir pris d'initiatives au début des années 1970. En fait, dans une entrevue donnée il y a environ trois ans, M. Le Dain a déclaré:
C'était une situation très embarrassante pour tous et ils ne voulaient pas courir quelque risque que ce soit. Les politiciens ont donc décidé de ne rien faire. Nous nous sommes rendu compte au cours des audiences que les Canadiens étaient inquiets pour leurs enfants. Ils considéraient ces lois comme une grande injustice.
Je crois que tous les partis et tous les gouvernements partagent le blâme pour n'avoir rien fait. Il est malheureux que tout ce temps ait passé.
Je dois avouer que je suis loin d'être un expert dans le domaine de la décriminalisation de toutes les drogues. À mon avis, cela devrait faire part du mandat de cette étude. Je suis plutôt d'accord avec la décriminalisation de la marijuana. C'est d'ailleurs la politique de notre parti. Toutefois, je ne saurais dire si je suis d'accord pour qu'on décriminalise l'ecstasy, l'héroïne ou la cocaïne. Je crois que ce sont là des drogues qui causent beaucoup plus de dépendance, ou du moins c'est ce que je crois comprendre. C'est une question qu'un comité spécial de la Chambre devrait étudier et j'imagine que l'on se penche également sur la question à l'autre endroit.
L'hon. David Kilgour (secrétaire d'État (Amérique latine et Afrique), Lib.): Monsieur le Président, le député de Fraser Valley a parlé du problème de la drogue en Colombie-Britannique principalement.
Le député de Palliser pourrait-il nous renseigner au sujet des divers types de problèmes liés à la drogue dans sa province?
M. Dick Proctor: Monsieur le Président, je ne sais pas si je peux les retrouver, mais j'ai quelques données montrant que la consommation de drogues en Saskatchewan est tout juste en dessous de la moyenne nationale et de beaucoup inférieure à celle qu'on trouve en Colombie-Britannique, au Québec, voire dans un ou deux autres territoires ou provinces.
J'estime que, dans toutes les provinces et tous les territoires, les jeunes et les pauvres sont les plus susceptibles de consommer de la drogue. Parmi ceux-ci, on trouvera sans doute un pourcentage plus élevé d'autochtones et, peut-être, de nouveaux venus au Canada. Quel que soit le niveau de consommation dans une province ou un territoire, il y a sans doute un groupe très important de gens qui sont des plus vulnérables et des plus susceptibles de prendre de la drogue.
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Alliance canadienne): Monsieur le Président, il ne faut pas se leurrer. Le problème n'est pas restreint à un type de personne en particulier. Je connais des enfants de familles relativement à l'aise qui sont toxicomanes. Je connais des hommes et des femmes qui ont des enfants toxicomanes. Nul besoin de se lancer à la recherche d'un type de personne en particulier, qu'elle soit nouvellement arrivée au Canada ou qu'elle y soit depuis toujours.
Je parle de familles à revenu moyen et élevé. Je parle de leurs enfants qui se prostituent en ce moment même. Comme je l'ai déjà dit, ils se piquent entre les orteils parce qu'ils n'ont plus de place où se piquer sur les bras.
Le problème ne se résume pas à la simple légalisation de la marijuana. Le problème concerne l'usage de cocaïne, de MDA, de LSD et d'héroïne. Le problème concerne l'usage de drogues qui tuent et qui créent une accoutumance. Ce sont ces problèmes auxquels doit s'attaquer le comité.
Ma question s'adresse au député qui est intervenu avant moi. Peut-il expliquer, en ses propres mots, la notion de réadaptation et nous décrire le genre d'établissements nécessaires? En Colombie-Britannique, par exemple, il y a peu de centres de désintoxication. Il n'y a pas beaucoup de centres intermédiaires. Il y a peut-être un centre de réadaptation de longue durée pour toute la Colombie-Britannique, mais aussi bien dire qu'il n'y en a pas, vu qu'il y a plus de 8 000 héroïnomanes à Vancouver seulement.
D'après lui, quel genre de ressources doit-on prévoir pour répondre aux besoins de réadaptation? Je sais que c'est une question que nous devrons examiner dans le cadre de notre étude. Je ne sais pas combien de centres il y a dans sa province, mais je sais qu'il n'y en a pas beaucoup dans la mienne ou si peu qu'ils sont à toutes fins pratiques inexistants.
M. Dick Proctor: Monsieur le Président, avant de répondre à la dernière question, je tiens à préciser que je n'ai pas voulu laisser entendre qu'il n'y avait pas, dans toutes les couches de la société, des personnes qui ont un problème de consommation de drogues à usage récréatif, d'abus de drogues et de toxicomanie. Il y a peut-être ici un malentendu.
Ce que j'ai dit, c'est que le problème semble plus courant chez les membres les plus vulnérables de notre société. Je suis d'accord avec ce qu'il a dit. Ceux d'entre nous qui ont vu le film primé Trafic savent que ce problème frappe tous les secteurs de la société.
Pour ce qui est des centres de désintoxication, nous en avons effectivement en Saskatchewan. Je doute qu'il y en ait suffisamment, toutefois. Je suppose qu'on en manque dans toutes les provinces du Canada. J'ose espérer que toute étude que mènera la Chambre se penchera là-dessus.
Je dirai à cet égard que ce sont les provinces qui assurent les services de santé. Nous devons établir, en collaboration avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, les services qui sont disponibles à l'heure actuelle et les mesures que nous devons prendre collectivement pour régler toute pénurie de centres de désintoxication.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je participe à ce débat très important. Je félicite à nouveau le député de Langley—Abbotsford pour la diligence et la persévérance dont il a fait preuve dans la présentation de cette affaire.
Comme on l'a dit, la motion vise à demander à la Chambre d'examiner les facteurs sous-jacents ou parallèles à la consommation non médicale de drogues ou de médicaments, de présenter des recommandations et de charger un comité multipartite d'examiner la question et de faire rapport d'ici un an.
Nous conviendrons tous que ce n'est pas là une mince entreprise, mais c'est peut-être une des choses les plus fondamentales que nous puissions faire pour trouver une solution à un problème très complexe et polyvalent auquel sont confrontés de nombreux Canadiens.
Cette motion prévoit un mandat suffisamment large, mais je m'inquiète pour une autre motion et un autre comité qui se livre à l'heure actuelle à un exercice similaire. Ce comité en est un de l'autre endroit, sous la présidence du sénateur Nolin. On étudie donc ce problème à fond.
L'exercice mené à l'autre endroit ne se limite pas à la marijuana. Il est d'une très grande envergure. Cette étude, tout comme le propose la présente motion, porte sur tous les symptômes et toutes les causes. Elle prévoit de vastes consultations auprès des intervenants afin de déterminer les dommages et coûts indirects des drogues illicites au Canada.
Ces coûts excèdent de loin les coûts financiers directs lorsqu'on décortique tous les éléments en cause. Cette situation ressemble aux autres grands maux et vices de nos sociétés. Les drogues et l'alcool sont, dans bien des cas, des échappatoires. Les gens y ont recours pour tenter d'échapper aux aspects pénibles, banals et parfois horribles de leurs vies ou pour fuir un passé où ils ont peut-être subi des agressions sexuelles ou des incidents terribles de violence.
La toxicomanie et l'alcoolisme sont comme un cancer qui ronge la productivité au Canada. Les toxicomanes qui dépendent des drogues ou de l'alcool ne peuvent réaliser leur plein potentiel ou contribuer à la société. On peut dire, et c'est même un lieu commun, que l'impact de la toxicomanie est tel que ceux qui veulent s'attaquer au problème se demandent par où commencer. Le genre d'étude que nous amorcerions nous permettrait de déterminer justement quelle mesure prendre en premier, quelle orientation adopter et sur quel aspect de la question concentrer nos efforts.
Comme cela se produit souvent avec des problèmes de cette ampleur, il ne suffira pas d'investir des ressources dans les services existants ou d'essayer de résoudre le problème. Nous devons nous attacher très sérieusement à l'orientation que nous choisissons lorsque nous sommes en quête d'une stratégie.
Le mandat du comité de l'autre endroit qui étudie cette question depuis novembre 1998 dit que les préjudices les plus directs frappent les groupes à risque élevé comme les consommateurs de drogue injectable, les jeunes de la rue, les gens du centre-ville et les autochtones. C'est presque une vérité de La Palice.
Les Canadiens autochtones sont aux prises avec d'énormes problèmes dans leur collectivité. Leur accoutumance et leur dépendance à l'égard des drogues et de l'alcool ont des effets dévastateurs. Entre 65 et 80 p. 100 des autochtones ont des problèmes de drogues. La toxicomanie est une des principales causes de décès chez les Inuit et les amérindiens. Quand on examine les problèmes de toxicomanie et leurs coûts liés aux vies humaines, on constate que les blessures et les empoisonnements avec les cas de morts violentes sont trois à quatre fois plus élevés comparativement à la moyenne nationale. Nombreux sont ceux qui meurent de causes non naturelles alors qu'ils sont sous l'effet de l'alcool. La consommation d'alcool ou de drogue est la principale cause de mortalité et est cinq fois plus élevée chez les autochtones que chez les non-autochtones.
Le taux de suicide parmi les enfants autochtones des réserves de la Saskatchewan est 27 fois plus élevé que parmi les autres enfants canadiens. Les jeunes autochtones courent de deux à six fois plus de risque d'avoir des problèmes liés à l'alcool que leurs homologues du reste du Canada. Et je ne m'arrête même pas au problème colossal que constitue le syndrome d'alcoolisme foetal, lequel est aussi symptomatique de ce défi encore plus grand que nous devons relever en aidant nos autochtones du Canada.
Le problème des jeunes de la rue et des adolescents qui quittent le foyer familial pour échapper à la violence physique, émotive et sexuelle ou à la négligence est non seulement très aigu dans les métropoles, mais il commence aussi à se poser dans les petites localités rurales du Canada. Parfois, c'est un signe d'ennui ou simplement une habitude de jeunes qui cherchent un moyen de libérer leur énergie. Ils recherchent quelque chose qui peut stimuler leur imagination ou un moyen de se divertir parce que leur vie est ordinaire.
C'est pourquoi beaucoup de députés et beaucoup de Canadiens veulent que l'on mette davantage l'accent sur les programmes de sport, les loisirs, la musique et les arts, qui permettent aux jeunes de libérer leur énergie et d'exercer leur ingéniosité plutôt que de tomber dans la drogue et l'alcool pour se trouver des moyens d'évasion, ce qui est d'une grande tristesse.
C'est encore une fois avec courage que la Chambre étudie la question sans essayer de contourner l'épineuse question de la décriminalisation de la marijuana, qui revêt des aspects politiques embarrassants. Nous en sommes maintenant à un point où nous pouvons aller au-delà de cela. Nous voulons commencer à examiner le cas des drogues dures qui créent l'accoutumance et à étudier les effets qu'ils ont sur les jeunes et sur le reste de la société.
La décriminalisation et l'usage médical de la marijuana ne sont plus des sujets à scandale. Des chefs de police et des policiers reconnaissent que l'on consacre peut-être trop d'énergie à la lutte contre les drogues douces comparativement à des drogues dures comme l'héroïne, l'acide, le LSD et la cocaïne. Dans le comté de Pictou, ma collectivité, le dilaudid, une drogue chimique destructrice qui crée rapidement la dépendance, est facilement disponible. Ces drogues semblent tuer de plus en plus et entraîner toujours plus de problèmes de santé.
Ce phénomène est en grande partie lié au crime organisé, dont nous avons discuté au cours des derniers jours et des derniers mois. À cause de la demande et des profits intéressants qu'ils peuvent réaliser, le crime organisé exploite les faiblesses et l'accoutumance des toxicomanes. C'est sur ces deux aspects que les forces de l'ordre devraient concentrer leur action.
Je ne prétends pas qu'il s'agisse d'un problème simple. C'est un problème aux facettes multiples. On ne pourra pas le régler uniquement en donnant des outils et des ressources à la police. Il nécessitera un effort très concentré et de grande envergure, notamment des services de santé, des tribunaux, du système d'éducation et des services sociaux. Il faut sensibiliser les jeunes aux solutions de rechange à la toxicomanie et au style de vie sordide qui s'y rattache.
Il y a longtemps qu'on aurait dû avoir un débat sur l'usage des drogues à des fins non médicales. D'autres députés ont commenté le fait que diverses études et tentatives ont été faites dans le passé pour s'attaquer à ce très épineux problème. Une merveilleuse occasion s'offre à nous de faire abstraction de nos allégeances et d'appuyer cette motion, grâce à laquelle des spécialistes et des représentants compétents pourront venir participer au processus.
Je mettrais en garde encore une fois les intéressés contre le risque de dédoublement des efforts. Une grande partie du travail a commencé et se poursuit dans l'autre endroit. Il est malheureux qu'il n'y ait pas moyen de combiner nos efforts et de profiter de la recherche et du travail qui ont déjà été accomplis.
Le gouvernement a commencé à offrir des dispenses aux personnes gravement malades qui cultivent ou consomment de la marijuana. Environ 210 personnes auraient obtenu ce genre de dispenses. L'une d'elles, un certain James Wakeford, cherche maintenant à forcer le gouvernement fédéral à lui fournir une provision sûre et régulière de marijuana. Il croit qu'il devrait pouvoir acheter cette drogue du gouvernement parce que c'est plus sûr ainsi. Nous savons que des mesures ont été prises à cet effet.
La Saskatchewan est à l'avant-garde sous ce rapport. La Prairie Plant System de cette province a obtenu du gouvernement un marché de cinq ans, évalué à 5,7 millions de dollars, pour cultiver de la marijuana devant servir à des fins médicales et de recherche à compter de l'année prochaine.
Les répercussions réelles de la consommation de marijuana sont pour moi un sujet de préoccupation. Il semble que l'on manque de données sur les risques que cette drogue peut présenter pour la santé. La consommation de marijuana peut se traduire par des niveaux élevés de THC et un risque élevé de carcinogenèse.
Il existe une importante controverse à ce sujet chez nos voisins du Sud. Ils ont consacré à cette question des efforts et des ressources astronomiques par rapport à nous. Sur le seul plan de l'argent, auquel il faut ajouter la stratégie antidrogue et les efforts consentis par les agents d'application de la loi chez nos voisins américains, nous soutenons très mal la comparaison au Canada. On peut soutenir que nous avons adopté une orientation différente, qui cherche davantage à s'attaquer à la source du problème.
La Cour suprême des États-Unis s'est prononcée la semaine dernière contre la légalisation de la marijuana à des fins médicinales et a annulé les régimes en vigueur en Californie, en Arizona et dans une poignée d'autres États qui avaient tenu un référendum au sujet de la distribution. Cette attitude contraste nettement avec la tendance croissante observée au Canada, où le gouvernement a adopté des mesures orientées vers la légalisation.
Il est aussi intéressant de souligner que le Journal de l'Association médicale canadienne s'est prononcé en faveur de la décriminalisation de la marijuana. Il a déclaré clairement que c'était là sa position.
Nous savons qu'au cours des dernières années, les services de police se sont intéressés de plus près aux vrais criminels, ceux qui distribuent des drogues et qui exploitent les enfants qui ont tendance à utiliser tous les genres de drogues, et non uniquement la marijuana ou le hashish. C'est une question complexe.
À Vancouver, endroit qui a fait l'objet de la majeure partie des commentaires du motionnaire, les policiers eux-mêmes sont profondément divisés au sujet d'une politique de leur service voulant qu'on ne recommande pas que des accusations soient portées en rapport avec la culture de la marijuana. On privilégie désormais la fermeture de ces activités tout en permettant parfois aux exploitants de s'en tirer en toute impunité.
Il existe de vastes cultures hydroponiques sur la côte Ouest, et nous voyons celles-ci naître comme des champignons en d'autres endroits au pays. Il y a un énorme marché aux États-Unis. Selon les statistiques, la marijuana fait partie des trois ou quatre principaux produits exportés par la province de Colombie-Britannique.
En 2000, une équipe d'agents de Vancouver spécialement chargée de ce problème, Growbusters, n'a pas recommandé d'inculpations contre des suspects, même si elle a fait plus d'une centaine de descentes au cours de l'année. Elle a simplement saisi les plantes, le matériel de culture et parfois la maison, et demandé à des techniciens de la ville de couper l'électricité pour arrêter certaines de ces productions.
Les escouades antidrogues ordinaires continuent de recommander des inculpations. La controverse se situe donc au niveau des forces de police pour ce qui est de décider comment appliquer les lois en vigueur pour lutter contre ce problème de culture de drogue. Il y a lieu de se demander si c'est là une action efficace, s'il s'agit bien d'un problème législatif ou s'il ne vaut pas mieux aborder le problème dans une optique plus large, notamment celle de la santé.
Cela m'amène à un point auquel d'autres députés ont aussi songé. Devrions-nous faire porter nos efforts sur une incarcération dans des sortes de cliniques qui seraient semblables à des prisons dont les pensionnaires ne pourraient pas partir lorsqu'ils en ont envie? Ce serait un établissement de traitement et non un simple lieu de détention pour toxicomanes. Il arrive que des trafiquants soient eux-mêmes toxicomanes au dernier degré. Ils vendent pour pouvoir eux-mêmes consommer.
Faudrait-il insister davantage sur la réadaptation et sur le traitement de la maladie qu'est la toxicomanie, au lieu de sevrer les toxicomanes du jour au lendemain et de les parquer dans des prisons avec d'autres criminels? Il est vrai qu'il y a aussi le problème de la drogue dans les prisons.
C'est une question qui préoccupe beaucoup de Canadiens. La honte d'être toxicomane est parfois indissociable de celle d'être un criminel. Il y a toutefois une question de santé à considérer, ainsi que l'accoutumance provoquée par la consommation de marijuana et de beaucoup d'autres substances.
En 1999, à Vancouver, à peine 20 p. 100 des producteurs qui ont comparu devant les tribunaux ont été condamnés à une peine d'emprisonnement. La plupart n'ont reçu que des amendes. Dans le cas d'environ un tiers des mandats exécutés, des suspects ont été trouvés sur les lieux et pourtant ils ont été libérés sans qu'aucune accusation ne soit portée. Cela pose un certain problème au niveau de la communication de renseignements. Parfois, les corps policiers adoptent une attitude différente à l'égard de la façon dont ils vont traiter avec ceux qui participent au trafic de stupéfiants. À la défense du corps policier de Vancouver, il faut dire qu'il y aurait plus de 7 000 points de culture de la marijuana à Vancouver seulement. Il n'y a tout simplement pas suffisamment de policiers ou de ressources juridiques pour faire face au problème.
Étant donné qu'il y a des incohérences parmi les corps policiers cependant, il est évident que nous devons étudier cela sous tous les angles et élaborer un plan national réfléchi et cohérent qui établit un équilibre entre la loi et l'ordre d'une part et les questions de santé d'autre part, une stratégie qui sera pragmatique et réalisable. De nombreux experts dans le domaine ont les connaissances voulues. Nous devrions essayer de faire appel aux experts qui ont une connaissance précise de la toxicomanie et des aspects médicaux de ce problème.
Le Parti conservateur croit que la décriminalisation de l'utilisation de la marijuana à des fins médicales est un pas dans la bonne direction. La dépendance de nombreux membres de notre société à l'égard des drogues et des médicaments a un important coût socio-économique. Ni la légalisation ni des sanctions criminelles accrues ne vont permettre de vraiment faire face à la complexité du problème de l'abus des drogues et des médicaments.
Nous savons que les autres partis ont adopté une approche semblable. L'auteur de cette motion et l'Alliance canadienne sont également en faveur de la décriminalisation de l'utilisation de la marijuana à des fins médicales, même s'il est intéressant de noter que cela ne faisait pas partie du programme électoral des alliancistes. Leur programme parlait notamment d'une tolérance zéro à l'égard des stupéfiants dans les pénitenciers fédéraux, ce qui, selon moi, fait également partie de tout ce problème.
Dans leur troisième livre rouge, les libéraux ont promis que le nouveau gouvernement libéral établirait une stratégie nationale sur les stupéfiants pour réduire tant l'offre que la demande de stupéfiants. Voici l'occasion de le faire. C'est le point de départ. Nous espérons que cette déclaration sera un indice qu'il y aura une certaine cohérence, peut-être pour une fois, sur cette question et qu'on apportera le soutien voulu, notamment en appuyant cette motion.
Ces problèmes exigent qu'on prenne un éventail de mesures pour les résoudre. Ces mesures touchent notamment l'éducation, le traitement, la santé, la réadaptation et la réglementation gouvernementale. Il est clair que le gouvernement a la responsabilité de faire des lois et de modifier des lois dans certains cas.
Le problème de la marijuana a pris de l'ampleur ces dernières années. Il est impératif qu'on entreprenne des études approfondies afin de s'assurer que toute utilisation proposée de drogues n'entraîne pas une augmentation des problèmes de santé ou des problèmes sociaux ou ne rendra pas ces drogues plus accessibles aux mineurs. C'est un secteur où la réglementation gouvernementale sera nécessaire. Le statu quo ne suffira tout simplement pas.
La position du Parti progressiste-conservateur est très bien résumée dans une citation d'un ancien sénateur progressiste-conservateur, Duncan Jessiman, qui a dit ce qui suit:
Le fait que la possession simple et la consommation de drogues soient considérées comme des infractions criminelles n'a absolument pas réduit l'usage des drogues et la toxicomanie. Le système actuel engendre la criminalité. Il est urgent de trouver un nouveau concept. À mon avis, l'usage de drogues et la toxicomanie doivent être considérés comme des problèmes médicaux.
Néanmoins, il est évident qu'on ne peut pas aborder la question de l'utilisation de la marijuana à des fins médicales sans parler des problèmes liés à la consommation d'autres drogues illicites. À mon avis, nous devrions peut-être nous concentrer davantage sur les stupéfiants plus forts et plus dangereux qui créent une plus grande dépendance.
La consommation de drogues dans notre pays est extrêmement répandue. Je félicite encore une fois le député d'avoir soulevé cette question afin que nous ayons la chance de faire avancer ce dossier.
Comme je l'ai déjà mentionné, le comité du Sénat effectue une étude approfondie de cette question, et on peut même dire qu'il le fait dans un contexte moins partisan. Je crois que le comité de la Chambre pourrait travailler avec le comité du Sénat ou du moins voir à ce qu'il y ait coordination des efforts afin que nous puissions arriver ensemble aux solutions que nous cherchons tous. C'est une question qui mérite certainement qu'on y porte plus attention. Le Parti progressiste-conservateur espère certainement pouvoir participer à ce travail.
M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Madame la Présidente, j'ai écouté avec intérêt le député de Pictou—Antigonish—Guysborough. Je voudrais lui demander d'élaborer sur la question qu'il a soulevée, à savoir que nous semblons prendre une orientation légèrement différente de celle des Américains. Je suis tout à fait d'accord avec lui là-dessus.
Nous avons tous deux parlé dans nos discours du fait que la Cour suprême des États-Unis a adopté une position très différente au sujet de l'utilisation de la marijuana à des fins médicales. La semaine dernière, les juges de la Cour suprême l'ont rejeté à 8 contre 0. Le Canada a pris une position différente. Quelque 400 000 Canadiens ont été autorisés, je pense, à utiliser de la marijuana à des fins médicinales. La documentation scientifique qui leur est fournie laisse entendre que ce serait une bonne chose.
Sans vouloir faire de la politique, je dirai que, si le Canada entend en général s'écarter de la position américaine, le parti du député et le nôtre ne voient pas le libre-échange du même oeil. Je suis d'avis que la mondialisation et l'ALENA imposent aux Canadiens et à la législation canadienne beaucoup plus d'exigences américaines.
Si nous devions prendre une orientation légèrement différente de celle que les Américains semblent vouloir prendre—et rien ne nous indique qu'ils sont sur le point de décriminaliser la moindre utilisation des drogues douces—, je me demande quelle serait la marge de manoeuvre du Canada. Je serais curieux d'entendre le point de vue du député là-dessus.
M. Peter MacKay: Madame la Présidente, je remercie mon collègue pour sa question. C'est une chose à laquelle je n'avais tout simplement pas songé, car je ne vois pas la relation entre le trafic de drogues et le libre-échange, mais il y a sans doute des implications lorsqu'un pays comme le nôtre, qui commerce tellement avec les États-Unis, adopte une position de principe totalement différente. Il y a inévitablement des implications. Il y a des conséquences pour toutes sortes de questions, y compris le commerce.
La décision de la Cour suprême des États-Unis, le temps, les ressources et les efforts que consacrent les Américains à la lutte antidrogue montrent clairement que les États-Unis ne sont pas prêts à changer de position. D'après les statistiques, la lutte antidrogue coûte aux États-Unis, tous paliers de gouvernement confondus, plus de 30 milliards de dollars par an. C'est absolument atterrant quand on songe à ce que nous dépensons dans ce pays. Mais quels résultats les États-Unis atteignent-ils par rapport à nous?
La façon d'aborder le problème est importante. Je pense, et je crois que nous sommes nombreux à partager cette opinion et que mon collègue la partage également, que l'accent devrait être placé sur l'aspect santé, et non pas nécessairement sur les efforts en vue d'arrêter les personnes qui consomment de petites quantités de drogue et celles qui prennent des drogues douces. Il faut tirer une ligne de démarcation précise entre les fournisseurs de drogues et les personnes qui consomment des drogues très toxicomanogènes et très destructives qui peuvent complètement, voire irrémédiablement changer la vie d'une personne.
Je remercie le député pour sa question. Il est important de comparer ce qui se passe dans d'autres pays et d'examiner les conséquences de l'approche que nous pourrons adopter dans le futur.
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir dans le débat sur la motion de crédits que le député de Langley—Abbotsford a présentée au nom de l'Alliance canadienne.
D'entrée de jeu, je tiens à signaler qu'il ne semble faire aucun doute que l'approche canadienne au plan des drogues illicites au cours des dernières décennies s'est avérée un échec lamentable. Je crois sincèrement que nous devons commencer à rechercher objectivement et ouvertement de nouvelles approches qui nous permettront de venir à bout de ce problème à la fois grave et complexe.
Lorsque je parle de l'échec de notre politique sur les drogues, je ne vise aucune agence particulière ni même aucun parti politique. De par notre hésitation à faire de véritables efforts en vue d'améliorer et de modifier le système, nous avons tous grandement contribué à cet échec.
Avant de poursuivre, j'aimerais recommander aux députés la lecture d'un reportage spécial paru dans le Ottawa Citizen en septembre 2000. Ce reportage intitulé «Losing the War on Drugs» est signé Dan Gardner. Dans les premières lignes, l'auteur indique que la guerre contre les drogues illicites menée par les États-Unis depuis des décennies a donné des résultats catastrophiques. Il faut absolument lire le reportage pour comprendre certains des enjeux qui y sont abordés. Que l'on soit d'accord ou pas avec les conclusions de ce reportage, j'en recommande vivement la lecture.
Je déclare également qu'il faut nous rappeler que les toxicomanes sont des être humains. Qu'ils se soient eux-mêmes mis dans cette situation ou qu'ils aient été victimes, ils demeurent des êtres humains qui méritent le respect. Les toxicomanes viennent de tous les genres de milieu familial, de toutes les couches de la société et de tous les coins du pays.
La circonscription de Provencher que je représente est l'illustration d'un milieu conservateur, principalement rural. Dans nos collectivités, il n'y a pas de prostituées dans la rue. Les problèmes de drogues dures et bien sûr, de drogues douces sont, généralement parlant, passés sous silence et cachés. Néanmoins, j'estime que ce sont des menaces inquiétantes qui pèsent sur des régions rurales plutôt tranquilles du pays.
Je souligne la menace que présente la méthamphétamine, qui fait des ravages aux États-Unis et cause de plus en plus de problèmes au Canada. À titre de ministre de la Justice du Manitoba, j'ai eu l'occasion de collaborer avec des organismes américains d'application de la loi qui ont été aux prises avec l'horrible problème de la méthamphétamine. Dans certains des ateliers et des discussions auxquels j'ai participé, j'ai appris que dans l'État de la Californie 90 p. 100 des arrestations au titre de la protection de l'enfance étaient liées à des abus de méthamphétamines. Nombre de policiers et d'intervenants auprès des enfants, lorsqu'ils examinent ces cas, ne se rendent même pas compte que les méthamphétamines sont à la source du problème le plus immédiat.
Cette drogue extrêmement dangereuse fait son chemin non seulement aux États-Unis mais aussi au Canada. Pour ceux d'entre nous qui croient que l'héroïne, la cocaïne et d'autres toxicomanies sont généralement l'apanage des milieux urbains, des grandes villes, la méthamphétamine devrait donner le signal d'alarme aux forces policières dans les régions rurales. Il semble en effet que son utilisation augmente, surtout dans les circonscriptions rurales, chez les cols bleus et auprès des citoyens de race blanche.
Nous avons parfois tendance à croire que les problèmes de drogues sont réservés à d'autres groupes économiques ou raciaux. Il y a certainement des catégories très générales que l'on peut établir à ce sujet, mais il est important de se rappeler que les drogues dures et le problème qu'elles causent finissent par toucher tout le monde, quelle que soit la race, le groupe économique ou l'endroit du pays où les gens sont installés.
Dans un comté comme celui de Provencher, même s'il n'y a pas de prostitués dans les rues et que les problèmes de drogues sont en grande partie cachés, il ne faut pas oublier que même les enfants et les jeunes adultes peuvent commencer à se prostituer ou à consommer de la drogue. Ils se laissent entraîner vers les rues des grandes villes où ils disparaissent dans l'anonymat.
Les habitants des grands centres de nos villes souffrent de la présence de toxicomanes et de prostitués et les rues sont congestionnées en raison du nombre de clients qui déambulent, de la présence du crime organisé et de tous les autres facteurs qui contribuent au problème soulevé par les drogues. C'est plus évident dans les villes comme Vancouver, Toronto et Winnipeg.
Nous devrions également féliciter les travailleurs qui sont aux prises avec ce difficile combat sur une base quotidienne, soit les policiers, les travailleurs sociaux et les organismes bénévoles. Ils sont comme des anges qui se promènent dans une nuit très noire.
J'espère que le débat d'aujourd'hui nous permettra d'aller au-delà des craintes que cette question soulève et de soulever un dialogue productif et non partisan. Je sais que le Sénat mène également des audiences et des études à ce sujet. Toutefois, je crois qu'à titre de représentants élus, nous devons participer de façon très active à la discussion. Parce que nous sommes élus et parce que nous devons rendre des comptes à nos électeurs, nous devons nous engager très sérieusement dans ce processus. Il ne s'agit pas ici de faire double emploi, mais bien de participer. Nous devons aller au-delà de nos politiques actuelles et commencer à nous poser des questions beaucoup plus sérieuses sur ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas.
Si la motion est adoptée et mise en oeuvre, le Parlement pourra compter sur un comité spécial qui se penchera sur la meilleure façon pour lui de lutter contre les problèmes très vastes qui ont trait à l'usage non médical des drogues. Il serait difficile de nier la nécessité d'un tel comité.
Les recettes annuelles générées à l'échelle mondiale par l'industrie des drogues illicites se chiffrent à environ 400 milliards de dollars américains, ce qui représente environ 8 p. 100 de l'ensemble du commerce international.
Le Canada n'existe bien sûr pas dans le vide. Au Canada uniquement, le total des coûts économiques attribuables à la consommation de drogues illicites est évalué à 1,4 milliard de dollars par année, sans compter les milliards de dollars qui alimentent le crime organisé. D'après le rapport de 1999 de la GRC sur les drogues au Canada, le commerce des drogues illicites est une des principales sources de revenu pour la plupart des groupes criminels organisés. La situation est grave, et il n'existe pas de solutions faciles.
Compte tenu de tout cela, je voudrais porter à l'attention des députés une lettre qui remettait en question les méthodes utilisées habituellement pour combattre la consommation des drogues illicites.
Il y a près de trois ans, le secrétaire général des Nations Unies, Kofi Annan, a reçu une lettre signée par diverses personnalités du monde universitaire et du secteur public, dont un ancien secrétaire général des Nations Unies, un ancien secrétaire d'État américain, un ancien directeur du Service de santé publique des États-Unis, des lauréats du Prix Nobel, d'anciens présidents et ministres de pays d'Amérique latine, de même que plusieurs Canadiens éminents. Ce qui est remarquable, ce n'est pas tant les signataires que la teneur de la lettre. En voici un extrait:
Nous croyons que la guerre mondiale contre les drogues cause maintenant plus de dommages que la consommation de drogues elle-même.
C'est une déclaration extraordinaire. Si j'ai bien compris, les conséquences de la détérioration sociale attribuables aux drogues illicites ne sont pas autant dues à la consommation de drogues comme telle qu'à l'échec des politiques de lutte antidrogue.
Cette lettre met surtout l'accent sur le fait que la tendance, à l'échelle internationale, consiste essentiellement à recourir à des mesures punitives pour assurer le contrôle des stupéfiants, et que ces mesures n'ont fait qu'accroître le pouvoir des criminels, ont corrompu les gouvernements, miné la sécurité et nui aux efforts déployés en vue d'empêcher la propagation de maladies infectieuses comme le VIH et l'hépatite.
On souligne également que d'importantes ressources sont gaspillées sur des mesures de répression inefficaces et de plus en plus onéreuses et pas assez sur des mesures de réduction des crimes, des maladies et des décès liés à la drogue.
Je ne puis m'imaginer quelqu'un ici aujourd'hui qui nierait l'existence des méfaits substantiels et permanents causés par la consommation de drogues illicites par certains de nos citoyens. Toutefois, cette lettre ainsi que beaucoup de mémoires et autres documents en circulation font état d'un désaccord largement répandu au sujet de la meilleure façon de s'attaquer au problème.
C'est la raison pour laquelle nous proposons aujourd'hui de créer un comité qui serait chargé d'analyser ces questions le plus attentivement et le plus objectivement possible.
La stratégie actuelle au Canada ressemble étrangement à celle adoptée par le gouvernement conservateur il y a une quinzaine d'années. Par conséquent, je ne crois pas que jeter le blâme sur quelqu'un d'autre est la solution dans ce débat.
Les politiques du gouvernement conservateur et du parti encore aujourd'hui ont toujours clairement préconisé la mise en place de mécanismes de réduction des méfaits et des outils de réadaptation en sus des principes de poursuites criminelles et d'éducation pour combattre et prévenir l'abus de ces stupéfiants.
En réalité, ces stratégies semblent avoir échoué presque complètement.
La Fondation de la recherche sur la toxicomanie poursuit son enquête sur l'usage de drogues chez les étudiants en Ontario depuis 1977. Je voudrais aujourd'hui citer quelques-unes des conclusions de cette enquête.
Le pourcentage d'étudiants ayant fait usage de cannabis au cours des 12 derniers mois a atteint un plafond de 31,7 p. 100 en 1979 puis a baissé au cours des six années suivantes pour se chiffrer à 11,7 p. 100 en 1991. En 1993, il a augmenté légèrement pour passer à 12,7 p. 100. Depuis 1993, la consommation de cannabis a grimpé, jusqu'à 25 p. 100 en 1997. Le pourcentage d'utilisateurs est le plus élevé en onzième année, soit 42 p. 100. Ce chiffre est ahurissant lorsqu'on songe qu'il s'agit d'une drogue illégale et que 42 p. 100 des élèves de onzième année en Ontario en font usage.
L'inhalation de colles et de solvants a atteint son paroxysme en 1979. Elle a baissé considérablement jusqu'en 1991 pour remonter à nouveau par après et atteindre, en 1997, 1,8 p. 100 dans le cas de la colle et 2,6 p. 100 dans le cas des solvants. L'enquête de 1999 donne des chiffres notablement plus élevés, soit 3,6 p. 100 pour la colle et 7,1 p. 100 pour les solvants. L'inhalation de colles et de solvants cause un problème épouvantable dans le centre-ville de Winnipeg et d'autres villes des régions rurales des Prairies. Elle cause des torts importants aux enfants et aux adultes. Nous n'avons pas réussi à contenir la propagation de cette terrible dépendance.
La consommation de LSD a connu son apogée en 1981. Elle a atteint son point le plus bas en 1991, à 5,2 p. 100, et est ensuite remontée à 7 p. 100 environ. Dans l'ensemble, l'utilisation de LSD a grimpé au cours de la dernière décennie.
On observe la consommation de cocaïne depuis 1977. Quant à la cocaïne épurée, ou le crack comme on l'appelle, qui est habituellement associée aux ghettos urbains, surtout dans les villes américaines, on l'observe depuis 1987. L'utilisation de cocaïne a plafonné à 5,1 p. 100 en 1979 pour baisser par après, mais a remonté à nouveau. En fait, elle a connu une hausse marquée. L'utilisation de cocaïne se chiffrait à 3,7 p. 100 en 1999 et celle du crack à 2,4 p. 100.
En 1999, 36 p. 100 des étudiants ont dit que quelqu'un avait essayé de leur vendre des drogues au cours de l'année précédente. Trente-deux pour cent ont dit avoir vu quelqu'un vendre de la drogue.
Les statistiques sont claires, que ce soit en Ontario, au Manitoba, en Colombie-Britannique, dans les Maritimes ou au Québec. La consommation de drogues illicites, surtout chez les adolescents qui représentent l'avenir du pays, a augmenté constamment au cours de la dernière décennie.
De plus, dans les milieux de la drogue à Vancouver, il y a eu une énorme augmentation de la pureté de l'héroïne, et la cocaïne à bon marché et le crack ont fait leur apparition au début des années 90. Je ne peux jamais m'empêcher de faire remarquer qu'il est paradoxal de parler de pureté à propos de l'héroïne. Il est saisissant de constater qu'une substance démoniaque et horrible comme celle-là peut être considérée comme pure. Je comprends bien sûr qu'il s'agit du sens chimique du terme.
Le nombre de morts causées par une surdose de drogues illicites est en moyenne de 147 par année depuis sept ans. Beaucoup de ceux qui meurent d'une surdose ne sont pas de gros consommateurs. Les consommateurs occasionnels ne connaissent pas la force de l'héroïne qui se vend dans les rues.
De plus, le mélange de l'alcool et de l'héroïne multiplie les risques de surdose.
À Vancouver, au cours des cinq dernières années, l'expérimentation de la marijuana a augmenté de 50 p. 100, pour atteindre 58 p. 100 chez les jeunes de 17 ans qui ont été interviewés.
D'autres sujets d'inquiétude sont l'infection par le VIH et le virus de l'hépatite C, une plus forte consommation de drogues chez les jeunes, des services de traitement inadéquats et la relation entre crime et consommation de drogues.
En ce qui concerne les coûts économiques, il ne faut pas se borner au simple coût de l'application des lois sur les drogues. La consommation de drogues illicites contribue de façon non négligeable à toute une série de crimes: infractions contre la propriété, crimes avec violence, vol et prostitution. Cela ne tient même pas compte des groupes du crime organisé qui prospèrent grâce au narcotrafic et à l'argent qu'il rapporte.
À titre de représentants élus, nous devons participer de façon active et importante. Faire l'autruche et prétendre que notre circonscription ne sera pas touchée parce qu'il s'agit d'une circonscription rurale paisible et qu'il y a d'autres questions tout aussi préoccupantes, cela ne fera que retarder le problème. Un jour ou l'autre, le problème touchera même les circonscriptions qui nous semblent être à l'abri. Je félicite mon collègue d'avoir proposé cette motion, et j'invite les autres députés à l'appuyer.
M. John Maloney (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Madame la Présidente, le programme de l'Alliance en matière de drogues est une vague proposition de créer une stratégie nationale antidrogue et d'augmenter le financement des programmes de réinsertion et d'éducation.
Toutefois, lorsque le gouvernement a fait exactement ça en débloquant près de 2,5 millions de dollars pour un centre de recherche sur les toxicomanies, le député de Langley—Abbotsford a dit que c'était redondant. L'Alliance prend-elle vraiment ce problème au sérieux? Le député pourrait peut-être m'éclairer.
M. Vic Toews: Madame la Présidente, je sais gré au député de sa question. Je ne peux parler en détail des réserves qu'avait le député de Langley—Abbotsford au sujet de l'octroi de ces fonds. Dans le domaine de la toxicomanie et de la désintoxication, il est très important de s'assurer que l'argent est utilisé de manière efficace. J'ignore si les réserves du député avaient à voir avec le fait que l'argent n'était pas utilisé de manière efficace.
J'ai parlé au député qui a présenté la motion. Je sais que cette question le préoccupe très profondément. Il a passé beaucoup de temps dans la rue avec des agents de police à étudier la situation des drogués et des prostituées. Je ne pense pas qu'il mette cette question sur le tapis de manière frivole.
Si notre politique fait défaut de quelque manière que ce soit, en tant que député de l'Alliance canadienne, j'aimerais que les Canadiens nous le disent. Nous devons réagir à leur préoccupation à cet égard. Si nous devons dépenser davantage d'argent dans certains domaines, de manière efficace, afin de briser le cycle de la toxicomanie et de la dégradation de certains de nos centres urbains, je suis prêt à réexaminer notre politique.
J'aborde la question avec un esprit ouvert, reconnaissant que la politique précédente des gouvernements, tant conservateurs que libéraux, est un échec. J'ai dis en guise d'introduction que je ne visais personne en particulier. Je veux que tous les parlementaires contribuent à ce débat des plus importants, non seulement au Sénat, mais aussi à la Chambre des communes.
M. John Maloney: Madame la Présidente, comme le député d'en face le sait probablement, il existe un nouveau projet à Toronto, appelé le tribunal de traitement pour toxicomanie. Ce tribunal spécial a été créé pour s'occuper de délinquants toxicomanes qui acceptent de suivre une cure de désintoxication. Un autre projet semblable doit voir le jour à Vancouver.
Je sais que certains représentants de l'Alliance ont visité le tribunal de traitement pour toxicomanie, à Toronto. J'aimerais savoir si le député d'en face est au courant de l'existence de ce programme et, dans l'affirmative, ce qu'il en pense.
M. Vic Toews: Madame la Présidente, un collègue de Regina qui prendra la parole au sujet de la motion a eu l'occasion de se rendre visiter le tribunal de traitement pour toxicomanie de Toronto. De façon générale, je sais qu'il en est revenu avec des impressions favorables et il nous en parlera.
Je félicite ce député d'avoir fait preuve d'audace, de la façon dont nous avons traditionnellement abordé le problème. J'ai bon espoir que ses observations et l'expérience qu'il a acquise nous aideront non seulement dans nos délibérations aujourd'hui mais pourront également éclairer le comité.
En ce qui concerne la politique à l'égard des drogues, je suis conscient que cela soulèvera beaucoup de controverse. Il faut être très prudent avant de condamner ceux qui parlent de nouvelles méthodes. Nous devons analyser et évaluer sérieusement ces programmes. Nous ne pouvons pas nous contenter de les laisser se poursuivre et de prétendre qu'en créant de nouveaux programmes nous changeons les choses. Si la Chambre prend la décision de financer certains de ces programmes, elle doit en assumer la responsabilité. Nous devons évaluer les programmes, mais je refuse de condamner ceux qui, ayant constaté l'échec de la politique concernant les drogues au cours des trois dernières décennies, prônent maintenant d'autres solutions.
Le problème ne se résume pas à une opposition entre des travailleurs de la rue et des travailleurs sociaux d'une part, et la police d'autre part. Je pense que nous constaterions des divergences à l'intérieur de chacune de ces professions, mais que tous ceux qui en font partie essaient de venir en aide aux malheureux qui ont développé une dépendance à l'égard de drogues illicites.
Nous devons favoriser l'innovation, sans pour autant nous soustraire à la responsabilité d'évaluer l'évolution de la situation. Une partie du problème tient au fait que nous n'avons pas procédé à une évaluation de la situation. Mon collègue de Regina nous en dira plus à ce sujet.
M. Werner Schmidt (Kelowna, Alliance canadienne): Madame la Présidente, je félicite le député de Provencher de ses observations et je voudrais mentionner qu'il était ministre de la Justice, au Manitoba, avant d'être élu député fédéral. Il est certainement très au courant des difficultés que posent l'administration de la justice et le bon fonctionnement de notre système de justice.
Il a déclaré que la politique anti-drogue a été inefficace. Cette allégation est très sérieuse. Il faut donc se demander si la politique était mauvaise, si les personnes chargées de l'application ou de la mise en oeuvre de la politique ont fait fausse route, ou encore si c'est l'attitude de la société qui dit vouloir la politique, mais qui ne se soucie pas vraiment du problème, car elle n'est pas sûre qu'il soit grave. Après tout, il n'y a rien de mieux qu'une bonne ligne de cocaïne après un repas chez des amis du quartier.
Des parents disent à leurs enfants qu'ils ne doivent pas prendre de la cocaïne, mais, surprise, ces parents se rendent au salon, ouvrent un petit tiroir, en sortent de la cocaïne, la posent sur la table et la consomment. Selon le député, quel est le problème? Je suis sûr que, fort de son expérience antérieure, il sait fort bien quelles sont les conséquences de l'usage de drogues dans notre société.
M. Vic Toews: Madame la Présidente, en tant que politicien et ministre de la Justice du Manitoba, j'ai vu le problème d'en haut. Je n'ai pas vu vraiment ce qui se passait dans la rue ni pourquoi la situation périclitait, mais je suis d'avis que les politiciens aussi bien que les membres de la société en général hésitent à s'attaquer à ce problème.
Je situe mon intervention à l'extérieur de la circonscription urbaine de Winnipeg que j'ai déjà représentée et où le problème de la drogue était beaucoup plus manifeste. Je pense à la belle circonscription de Provencher dont je suis député aujourd'hui et j'y remarque une réticence parfois à s'attaquer de front à la question, du fait qu'elle ne semble pas y faire des ravages. Les problèmes d'alcool et de drogue surgissent dans des régions rurales. Les gens déménagent dans des circonscriptions urbaines où, sous le couvert de l'anonymat, ils ont plus facilement accès aux drogues.
Nous repoussons simplement le problème, mais il s'amplifie. Le plus frappant, c'est que des personnes qui ne se sont peut-être jamais inquiétées du problème de la drogue se rendent compte un jour que leur enfant, leur frère ou un autre membre de leur famille est drogué. C'est alors que la réalité et l'horreur de la toxicomanie frappent de plein fouet.
Nous avons vu le problème se répandre au Canada. Peu importe si nous l'avons causé nous-mêmes ou si nous en sommes victimes, nous devons tenter de le régler. Le cadre législatif, les politiques d'application et les politiques sociales ne font rien pour réduire le problème. Il est alimenté et nous devons y voir.
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Madame la Présidente, je tiens à dire tout d'abord que le député de Langley—Abbotsford, qui a présenté ce matin la motion, adopte à l'égard de la plupart des questions politiques une position que je désapprouve totalement. En fait, les différences de politique entre le député de Langley—Abbotsford et moi-même sont trop nombreuses pour être mentionnées.
Toutefois, en ce qui concerne le sujet à l'étude aujourd'hui, je crois que le député et moi-même avons beaucoup en commun. Il estime avec raison qu'il est temps pour la Chambre d'examiner les facteurs sous-jacents à la consommation non médicale de drogues ou de médicaments au Canada. Il estime avec raison qu'il est temps pour la Chambre d'examiner des moyens qui permettront au gouvernement de réduire, seul ou avec le concours des autres paliers de gouvernement, les causes profondes de la consommation non médicale de drogues ou de médicaments.
Il importe aussi que cet examen soit vraiment non partisan. C'est certes dans cet esprit que la motion est proposée et c'est dans cet esprit que j'entends l'appuyer.
Le député propose essentiellement qu'un comité de la Chambre examine ce que devrait être notre stratégie nationale à l'égard de la consommation non médicale de drogues ou de médicaments. Il propose que nous adoptions une attitude concertée et cohérente à l'égard de la consommation de drogues illégales au Canada. Je me permets de signaler que la motion est parfaitement conforme à la politique et à la démarche qu'appuie le gouvernement.
J'ai eu l'occasion de me pencher sur ce problème, à titre d'ex-ministre de la Justice et procureur général, et maintenant, à titre de ministre de la Santé. Je me souviens que, lorsque j'étais ministre de la Justice, j'ai demandé qu'on me laisse passer du temps avec des policiers de diverses régions du Canada. Dans neuf villes canadiennes, j'ai participé à la patrouille de nuit en compagnie de policiers qui devaient composer avec le problème de la criminalité et de la sécurité dans les rues de diverses villes.
Je me souviens très bien d'une soirée que j'ai passée avec des policiers de Vancouver. Nous avons stationné le véhicule et nous avons déambulé dans la partie est du centre-ville. Je me souviens d'être allé dans des ruelles derrière des commerces et des hôtels de la partie est du centre-ville de Vancouver et d'avoir enjambé des êtres qui étaient étendus face contre terre, avec une seringue plantée dans la cuisse. Ces gens-là s'injectaient des drogues illégales. Ils gisaient, impuissants, dans les ruelles.
Je me souviens d'avoir discuté avec des policiers du rôle que devait jouer le système de justice pénale à l'égard de ces êtres pathétiques et émouvants. Nous en étions tous arrivés à la conclusion suivante: le système de justice pénale n'était pas la solution idéale pour résoudre ce problème, à tout le moins lorsqu'il se présentait sous cette forme, car il s'agissait en fait d'un problème de santé.
Maintenant, à titre de ministre de la Santé, je crois qu'il est extrêmement important que je profite de l'occasion que nous offre le député d'en face pour rallier tous les députés à l'examen sérieux des mesures à prendre pour résoudre ce problème et à celui de l'utilisation optimale des ressources dont disposent tous les paliers de gouvernement en vue de régler ces questions épineuses.
Il ne sert pas à grand-chose d'arrêter ces personnes, de les traduire devant un tribunal pénal ou de les incarcérer. Certes, la meilleure solution à long terme consiste à les traiter, à les aider à vaincre leur toxicomanie et à les réinsérer dans la société. Certes, la meilleure solution à long terme consiste à prévenir les toxicomanies. Je voudrais parler de chacun des éléments de cette démarche dans les quelques instants qui me sont attribués ici aujourd'hui.
Au cours de la dernière campagne électorale, l'automne dernier, nous nous sommes, en tant que membres du Parti libéral, engagés à mettre en oeuvre une stratégie nationale de lutte contre la drogue visant à réduire l'offre et la demande et à démanteler les réseaux de trafic de stupéfiants du crime organisé au Canada. Durant la campagne, nous avons parlé de prévention, de traitement, de réhabilitation ainsi que d'application des lois et de contrôle.
Nous avons également parlé de cela comme étant un problème international. Nous avons parlé de la nécessité de la recherche pour mieux comprendre la nature du défi et d'une évaluation pour veiller à ce que les mesures prises par le gouvernement soient efficaces.
Je suis revenu hier soir de Genève où j'ai assisté à l'assemblée annuelle de l'Organisation mondiale de la santé. J'ai eu l'occasion, au cours des derniers jours, en compagnie de quatre ou cinq représentants d'autres partis, de parler à des ministres de la Santé d'autres pays. Sur la liste des sujets d'intérêt commun, il y avait la question de la collaboration relativement à la consommation et au trafic de drogues illégales.
Les ministres de la Santé de partout dans le monde, que ce soient ceux d'Égypte, d'Israël, des États-Unis, du Pays de Galles ou du Mexique, parlent tous du besoin de coopération internationale afin de partager des pratiques exemplaires et de chercher ensemble des moyens plus efficaces de s'attaquer à la toxicomanie et à l'usage illégal des drogues.
Au moment où le gouvernement cherche à établir une stratégie canadienne antidrogue afin de respecter l'engagement qu'il a pris pendant la campagne électorale, n'y a-t-il pas un meilleur moyen de garantir un juste équilibre entre les parties intrinsèques de cette stratégie que de soumettre la question à un comité de la Chambre et d'obtenir l'avis de députés de tous les partis sur la façon dont nous devrions procéder.
Nous nous sommes également engagés, au cours de la dernière campagne électorale, à consacrer quelque 420 millions de dollars à la stratégie canadienne antidrogue. Y a-t-il une meilleure façon de s'assurer que cet argent sera bien dépensé que de solliciter l'avis des députés de la Chambre des communes et de leur demander d'examiner les diverses options possibles.
Je me réjouis de cette motion et du fait que, de façon constructive et non partisane, elle offre à tous les députés de la Chambre la possibilité de s'assurer que nous allons agir efficacement.
La situation est urgente. J'ai des chiffres qui en témoignent. Ainsi, le Centre canadien de lutte contre l'alcoolisme et les toxicomanies indique que, chaque année, 804 décès sont attribuables à la consommation de drogues illégales au Canada. La ville de Vancouver revendique à elle seule 147 morts par surdose annuellement, principalement à cause des problèmes constatés dans la partie est du centre-ville.
Nous savons qu'en 1999, environ 80 000 condamnations ont été prononcées pour des infractions liées aux drogues visées par la Loi réglementant certaines drogues et autres substances. La drogue est un problème grandissant chez nos jeunes. Les études menées auprès de jeunes Canadiens de la 7e à la 13e année révèlent une tendance à la hausse en ce qui a trait à la consommation d'alcool, de cannabis, d'amphétamines, de MDMA et de cocaïne. C'est une tendance sur laquelle on ne peut pas fermer les yeux. Nous devons agir.
Il y a un coût qui se rattache à cela. À part le coût humain et la tragédie des vies gaspillées ou des possibilités gaspillées, on estime que, en 1992, la consommation abusive d'alcool et la consommation de drogues ont coûté plus de 9 milliards de dollars à l'économie canadienne.
Cette réalité troublante nous oblige à avoir une stratégie nationale efficace pour lutter contre la consommation de drogues à des fins non médicales. La stratégie qui est en place depuis 1997 comporte quatre éléments: la prévention, le traitement, l'application de la loi et la réduction des méfaits. Elle vise à la fois l'offre et la demande et elle s'attaque au problème de la toxicomanie de façon fondamentale du point de vue de la santé. Elle nécessite la participation de 11 ministères, dont ceux du Solliciteur général, de la Justice, des Affaires étrangères, du Revenu, du Patrimoine et des Transports. Chacun de ces ministères contribue à sa façon à cet effort commun. La stratégie compte également sur la participation des gouvernements provinciaux et des administrations municipales. Chaque niveau doit contribuer d'une certaine façon à la solution.
Je vais parler brièvement de chacun des quatre éléments pour donner à la Chambre une idée de ce que nous faisons dans le moment et des mesures que nous devons prendre si nous voulons que notre stratégie soit efficace.
Premièrement, sur le plan de la prévention, il faut avertir les jeunes, les informer, leur présenter les faits pour qu'ils puissent prendre des décisions sensées relativement à leur propre comportement et à leur propre conduite.
Il faut également faire de la recherche pour tenter de mieux comprendre ce qui motive la consommation de drogues illicites et ce qui pousse à l'accoutumance. Existe-t-il des facteurs sanitaires et sociaux qu'il faudrait étudier à fond afin de pouvoir élaborer des stratégies plus efficaces?
J'ai été heureux de voir tout juste l'an dernier le solliciteur général inaugurer un centre de recherche sur les toxicomanies à Montague, à l'Île-du-Prince-Édouard, afin que nous puissions répondre à quelques-unes de ces questions. Évidemment, on a demandé aux Instituts de recherche en santé du Canada et à l'Institut des neurosciences, de la santé mentale et des toxicomanies d'examiner les mêmes questions afin que nous comprenions mieux, sur une base individuelle, la nature du problème que nous voulons régler.
Le deuxième élément est le traitement. À ce sujet, j'attire l'attention de la Chambre sur le fait que, bien souvent, les traitements sont administrés plus efficacement à l'échelle régionale ou locale. C'est pour cela que, chaque année, mon ministère transfère 14,5 millions de dollars aux gouvernements provinciaux pour les services de traitement et de réadaptation des alcooliques et des toxicomanes. Cet argent s'ajoute aux fonds investis par les provinces pour fournir sur le terrain des services qui aident vraiment les gens. À côté de cela, Santé Canada finance des centres de traitement pour les premières nations et les Inuit de tout le Canada qui ont des problèmes d'alcoolisme et de toxicomanie.
Nous finançons également des projets locaux. Ainsi, Santé Canada a donné un million de dollars afin de permettre la création dans le quartier est de Vancouver d'un centre de ressources qui est un endroit où les gens qui vivent dans la rue peuvent chercher refuge, accéder aux services sociaux et de santé et prendre un répit étant donné tous les dangers qu'ils doivent affronter dans ce quartier parfois très dur.
Nous avons aussi apporté, par l'intermédiaire du ministère de la Justice, certaines innovations au système judiciaire en créant des tribunaux des drogues. À Toronto, des tribunaux spéciaux ont été créés pour s'occuper des personnes accusées d'infractions ayant trait à l'usage de drogue à des fins non médicales dans les cas où l'on pense qu'il est plus efficace d'intervenir pour encourager le traitement et la réadaptation que de condamner et d'incarcérer la personne. Je peux dire à la Chambre que, compte tenu de ce que nous avons appris à Toronto, nous étudions la possibilité d'étendre cette approche à d'autres régions du pays.
Le troisième élément, c'est l'exécution de la loi. Le solliciteur général et le ministère de la Justice ont mis au point des stratégies axées sur les trafiquants de drogue et qui font appel à la collaboration des Affaires étrangères afin d'identifier les sources du trafic de drogue et de déterminer s'il y a moyen de travailler avec d'autres nations au démantèlement de ces sources.
Le dernier élément, c'est la réduction des méfaits, où nous traitons bien sûr de l'aspect humain. Comment guérir la toxicomanie et en même temps punir le crime? Comment s'attaquer à certains problèmes sociaux et de santé sous-jacents liés à la toxicomanie? Le maire Owen, de Vancouver, a fait particulièrement preuve de leadership à cet égard.
Face à la situation tragique dans l'est du centre-ville, le maire Owen, a produit l'an dernier un document mûrement réfléchi et détaillé, dans lequel il décrit les mesures qui pourraient être prises pour exécuter la loi, prévenir la toxicomanie et réduire les méfaits. Il propose dans ce document de nouvelles idées auxquelles le conseil municipal vient tout juste l'autre soir de donner leur forme finale. J'ai l'intention de rencontrer le maire Owen prochainement pour discuter avec lui de certaines de ces idées. J'aimerais que les autres partis à la Chambre me fasse savoir si, selon eux, certaines idées proposées par le maire Owen dans son rapport pourraient être utiles.
Je voudrais rappeler certaines des dispositions prises par le solliciteur général dans les prisons où l'on a reconnu le problème posé par l'usage de drogues injectables. En collaboration avec l'administration pénitentiaire, le solliciteur général s'emploie à mettre en pratique les enseignements tirés d'ailleurs pour régler le problème.
Je me félicite de la motion et de l'initiative sous-jacente. L'on se plaint souvent de la nature partisane des échanges à la Chambre, mais je pense qu'il conviendrait de rappeler aux Canadiens que nos échanges portent également sur des questions comme celle-ci.
Il y a deux semaines, nous avons discuté de la reproduction humaine assistée, du clonage. Il y a aussi des questions comme la sécurité des femmes dans les centres de fertilité, les principes qui gouvernent la recherche quand il s'agit d'embryons, les dons d'organes, la consommation de drogues illicites, autant de questions qui amènent les députés sur un terrain commun d'entente. Nous craignons tous pour nos enfants et nos localités. Nous connaissons les torts que le trafic et la consommation des drogues illicites peuvent causer et nous sommes tous à la recherche de solutions efficaces.
J'ai écouté avec intérêt l'intervention du député de Pictou—Antigonish—Guysborough ce matin, quand il a parlé de l'approche américaine. Je partage son point de vue à l'effet que la guerre antidrogue à l'américaine menée selon une approche militaire ne s'avère pas aussi efficace qu'on ne l'aurait espéré et qu'il convient d'adopter une stratégie plus nuancée ayant une portée plus vaste. Selon moi, les éléments de la stratégie dont nous parlons s'inscrivent dans ce sens. Là encore, laissons à un comité de la Chambre le soin d'examiner comment emboîter ces éléments l'un dans l'autre en vue des meilleurs résultats possibles.
Les faits qui se sont déroulés aux États-Unis récemment concernant la consommation de marijuana à des fins médicales illustrent de belle façon les différences entre les deux pays. Les députés savent sans doute que la Cour suprême des États-Unis a statué l'autre jour que la consommation de marijuana à des fins médicales ne saurait être autorisée. Nous avons autorisé, il y a deux ans, la consommation de marijuana à des fins médicales. Avec l'aide des tribunaux, nous en sommes venus à mieux comprendre comment agir dans le respect des lois, de sorte que nous avons maintenant des projets de réglementation visant à officialiser le tout.
Premièrement, c'est ce qu'il convient de faire. Je crois que la population canadienne est derrière nous. En tout cas, voilà qui illustre peut-être certaines des différences entre les deux pays.
J'ai aussi écouté avec intérêt le député de Palliser parler ce matin du travail utile qui se faisait à l'autre endroit et regretter le chevauchement des efforts fournis. Bien que l'autre endroit se penche sur cette question, je ne vois pas pourquoi nous devrions rester les bras croisés. Nous pouvons miser sur le travail déjà accompli par les sénateurs. Nous pouvons peut-être concerter certains des efforts. Toutefois, la Chambre a le droit le plus légitime et le devoir d'accomplir ses propres travaux dans ce domaine.
Je dirai finalement que j'appuie la motion. Il me tarde de collaborer de façon constructive avec les députés de tous les partis représentés dans cette Chambre, de manière à assurer qu'un comité est saisi directement de la question et qu'il fera des recommandations qui nous mettront en position d'agir comme il se doit au nom des Canadiens.
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Alliance canadienne): Madame la Présidente, je partage à bien des égards l'opinion du ministre de la Santé, mais je suis en désaccord sur un point. Le ministre a mentionné que nous nous concentrions sur la situation. Ce n'est pas le cas.
L'hon. Elinor Caplan: Nous nous concentrons sur la situation.
M. Randy White: La discussion commence déjà; c'est ridicule.
La réalité, c'est qu'au Canada, il y a des projets pilotes en cours un peu partout. À Toronto, il y a des tribunaux de la drogue. D'autres régions cherchent aussi à établir ces tribunaux. On trouve des programmes de toutes sortes un peu partout. Il existe aussi des lieux d'injection sûrs.
Je ne critique pas injustement le gouvernement. Mes collègues ne devraient pas mal interpréter mes propos. J'affirme simplement que nous ne nous concentrons pas sur la question. C'est la raison pour laquelle, il faut qu'un comité spécial de la Chambre des communes essaie de se pencher sur ces questions. Si mes collègues d'en face ne peuvent même pas convenir de cela, il y a alors une mauvaise interprétation des difficultés qui affectent le Canada.
Il y a des lieux d'injection sûrs. À certains endroits, il y a même des dispensaires où l'on distribue des seringues. Certaines collectivités cherchent à établir ces dispensaires, mais ne savent pas à quoi s'en tenir. Elles ne sont pas certaines que cette pratique soit souhaitable. Les prisons constituent un bon exemple. Dans une prison donnée, il peut y avoir un projet, alors que dans l'autre, il n'y en a pas. Tout comme il y a des cartels de la drogue dans certaines prisons et pas dans d'autres.
À mon avis, le pays a besoin du genre de commission RITA dont a parlé le ministre, axée sur la réadaptation, l'intervention, le traitement et l'application de la loi. Ce type de commission existe déjà dans certaines provinces. Le gouvernement fédéral n'en a pas. Les autres provinces n'en ont plus. Certains disent qu'elles sont efficaces, d'autres disent le contraire.
Il ne s'agit pas ici de discuter de leur efficacité, mais bien de suivre les directives du ministre, c'est-à-dire de se concentrer sur ce qui se passe au pays pour pouvoir étudier toutes les ramifications et tous les projets en cours et en tirer toute conclusion utile pour offrir un leadership.
En fait, c'est exactement le sens de la proposition du maire Owen. Je connais cette proposition depuis au moins six à huit mois pour avoir traité avec des hommes d'affaires de l'est du centre-ville dans le but d'évaluer divers projets dans ce contexte.
J'aimerais que le ministre nous précise s'il est d'accord avec moi pour dire qu'il s'agit d'un problème d'orientation et qu'il n'y a pas nécessairement des choses qui ne fonctionnent pas ou qui ne sont pas faites. Diverses collectivités du pays font réellement tous les efforts possibles pour tenter de cerner le problème et elles ne savent pas réellement où elles vont.
J'aimerais beaucoup avoir le temps de discuter de cette question, mais je vais écouter les commentaires du ministre.
L'hon. Allan Rock: Madame la Présidente, je suis d'accord avec ce que notre collègue a dit, mais ce qu'il faut surmonter, c'est la tendance au Canada d'adopter une politique faite de bric et de broc à cause de la division des responsabilités entre les gouvernements fédéral et provinciaux.
Ce qui pourrait facilement se produire, c'est que le gouvernement du Canada ait des idées dans le domaine de la santé, où la prestation des services est de compétence provinciale, mais que les gouvernements provinciaux adoptent une approche différente, ce qui donne un ensemble de mesures disparates. C'est pourquoi nous avons des projets pilotes, parce que le gouvernement du Canada ne peut offrir des services de santé. Nous ne voudrions pas le faire de toute façon, puisqu'il s'agit d'une question de compétence provinciale. Au gouvernement, nous finançons parfois des projets pilotes en espérant pouvoir démontrer que certaines mesures fonctionnent et dans l'affirmative, nous communiquons ces renseignements aux provinces qui peuvent alors adopter ou non les mesures en question.
Notre collègue a raison de dire qu'à l'heure actuelle, on a un ensemble de mesures disparates. Il faut avoir une approche nationale coordonnée, faisant intervenir les provinces, pour parvenir à nous entendre sur les meilleurs moyens de prévenir, de traiter, d'appliquer la loi et de réduire les préjudices.
J'espère que le comité spécial que le député propose aujourd'hui pourra élaborer une stratégie pancanadienne uniforme et efficace, afin de ne pas abandonner à leur sort certains Canadiens.
M. Lynn Myers (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Madame la Présidente, je voudrais féliciter le ministre de la Santé d'avoir laissé tomber toute partisanerie dans son discours et d'avoir ainsi établi les bases d'un débat extrêmement important.
Toutefois, j'ai été quelque peu surpris par ce qu'a dit le député de Langley—Abbotsford, car je me rappelle qu'en décembre 1999, lorsque nous avons essayé d'implanter un établissement de recherche sur la toxicomanie à Charlottetown sous l'égide du Service correctionnel, il s'y est opposé. Il a trouvé cela tout à fait inacceptable. Pourtant, dans son programme électoral 2000, l'Alliance réformée a déclaré qu'il fallait accroître les fonds destinés à la réadaptation et à l'éducation et traiter les toxicomanes en leur donnant un accès immédiat à des établissements de réadaptation. Une fois de plus, on voit la position contradictoire que les alliancistes adoptent relativement à cette question extrêmement importante.
Ma question s'adresse au ministre de la Santé. Il a parlé de l'expérience de Toronto en matière de traitement et de réadaptation et dit que cela pouvait être un modèle pour d'autres centres. Je me demande s'il pourrait préciser sa pensée là-dessus, car il me semble que certains de ces établissements communautaires, où les gens du milieu jouent un rôle très utile, finissent parfois par élaborer des programmes qui pourraient être d'une importance nationale.
L'hon. Allan Rock: Madame la Présidente, je pense que l'expérience de Toronto peut aider. J'ai reçu des lettres de criminalistes de Toronto qui sont très enthousiastes à propos de ce que nous apprenons là-bas. Ils nous demandent tout d'abord de poursuivre l'expérience de Toronto afin de l'étendre ensuite à d'autres villes.
Comme je l'ai déjà dit, cette initiative vise à réunir plusieurs solutions à ce problème. J'ai pratiqué le droit durant une vingtaine d'années et bien que je ne me sois pas occupé de beaucoup de causes en matière pénale, je l'ai fait pendant mes premières années de pratique du droit. Je me rappelle avoir représenté des gens accusés d'infractions liées aux drogues qui étaient eux-mêmes des toxicomanes. Je ne puis imaginer de solution moins appropriée pour quelqu'un en proie à une toxicomanie que le système de justice pénale. Cela ne donne tout simplement pas de bons résultats. Ce dont un toxicomane a besoin, c'est un traitement, un soutien pour vaincre un problème de santé.
C'est ce que nous tâchons de montrer avec le Tribunal de traitement de la toxicomanie de Toronto. Je crois que nous apprendrons des leçons que nous pourrons appliquer dans d'autres parties du pays. Je sais que la ministre de la Justice est très intéressée à examiner ce que nous apprenons là-bas et, si possible, à en étendre l'application à d'autres parties du pays.
C'est un exemple de ce que nous pouvons apprendre. Cela montre où le gouvernement du Canada a un rôle à jouer, car nous intentons les poursuites en vertu de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances. Alors que les poursuites relèvent habituellement de la compétence provinciale, elles relèvent du fédéral pour les affaires de drogues. C'est un domaine où nous pouvons changer quelque chose, et nous espérons y réussir.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Madame la Présidente, dans la foulée des observations qu'a faites le ministre sur la création d'une synergie entre notre système de justice et notre système de santé, je serais très curieux d'entendre ses observations sur la possibilité pour le système judiciaire d'infliger des peines en vue de créer cette synergie.
Il s'agirait d'un prolongement logique de ce à quoi le ministre semble faire allusion, à savoir que les juges pourraient imposer une peine équivalente à un traitement obligatoire. Pour cela, il faudrait, bien sûr, investir massivement dans des installations, notamment des installations de traitement que le contrevenant serait obligé de fréquenter au lieu de croupir, la plupart du temps sans aucun traitement, dans le milieu carcéral traditionnel, où il ne ferait qu'attendre son heure. Le traitement obligatoire ferait partie de la peine à purger. Je soutiens que, en pareil cas, le contrevenant, tout comme la société, bénéficierait de ce traitement s'il était incorporé à la peine à purger.
Je ne veux pas suivre l'exemple du député d'en face, qui cherche à rendre le débat sectaire, car cette attitude porte atteinte au débat. Mais pourquoi attendons-nous? Qu'est-ce que les gouvernements attendent pour s'attaquer à ce problème?
Nous savons que l'autre endroit a entrepris des travaux excellents, mais le problème semble soulever des préoccupations pressantes, avoir pris beaucoup d'ampleur et être systémique dans toutes les régions du pays. Ne devrions-nous pas y porter notre attention immédiatement? Le comité serait un bon point de départ, mais pourquoi attendons-nous, si ce n'est à cause des questions épineuses, je présume, qui semblent découler de ce problème dans l'esprit des Canadiens? Nous devons commencer à agir avec beaucoup de diligence et d'empressement pour nous attaquer à ce problème.
L'hon. Allan Rock: Madame la Présidente, je signale brièvement que je travaille avec les ministères de la Justice et du Solliciteur général, entre autres, pour tenter de concrétiser notre promesse électorale de lutter contre les drogues. Nous devrions bientôt présenter une stratégie, du moins en proposer une. Je suis d'avis que le comité que l'on suggère de former aujourd'hui pourrait nous faciliter la tâche.
Deuxièmement, le député parle de traitement obligatoire. Je crois que le tribunal des drogues de Toronto a adopté une telle approche. L'idéal serait évidemment que tous les tribunaux puissent suivre cette approche chaque fois que les circonstances s'y prêtent. Mais les services sociaux nécessaires ne sont pas toujours en place, parfois à cause d'une question d'argent ou d'organisation.
Le député a raison et c'est l'idéal que nous devrions poursuivre. Si nous pouvions convaincre tous les gouvernements, réunir les fonds nécessaires et offrir un traitement professionnel, je pense que ce serait l'idéal. Je pense que c'est la meilleure manière de s'y prendre face à un toxicomane.
M. Larry Spencer (Regina—Lumsden—Lake Centre, Alliance canadienne): Madame la Présidente, j'ai le plaisir d'intervenir aujourd'hui sur cette question très importante. Je sais gré à mon collègue de Langley—Abbotsford d'avoir proposé la motion au caucus de l'Alliance canadienne et je suis reconnaissant envers les députés, qui ont compris l'importance de cette motion et qui ont décidé d'en débattre en ce jour d'opposition.
Je suis sincère et je veux réellement que nous progressions à ce chapitre. Je me réjouis d'entendre les députés du gouvernement faire des observations en faveur de cette motion. Je suis ravi de constater que nous pouvons collaborer et progresser sur certains dossiers.
Je suis entré dans l'arène politique au cours de la campagne électorale de l'automne dernier. Pendant ma campagne, j'ai notamment parlé de sécurité publique face à la criminalité, de jeunes contrevenants et d'autres choses semblables, de sorte que j'interviens à ce sujet pour donner suite aux préoccupations de mes électeurs de Régina—Lumsden—Lake Center.
J'aimerais vous conter quelques histoires, car lorsqu'il est question de drogues et d'utilisation de drogues illicites, il est aussi question de répercussions sur des vies humaines. Je pense à un ami de mon plus jeune fils. Les deux ont joué au sein des mêmes équipes sportives et étaient fort talentueux. Ce jeune homme a commencé à consommer de la drogue avant de terminer l'école secondaire. Cela a duré bon nombre d'années. Il est maintenant au début de la vingtaine, et il est à espérer qu'il commence à se libérer de son problème de drogues illicites. J'ai parlé avec ses parents. Ils étaient peinés de voir leur jeune fils vivre cette expérience.
Je pense à d'autres familles de ma ville avec lesquelles j'ai passé du temps, des familles avec des enfants de niveau secondaire qui demeurent au lit pendant des heures et des heures et refusent de se lever en raison des drogues qu'ils ont consommées. Je pense à un autre ami qui m'était très cher. J'ai eu le plaisir de présider à son mariage, de travailler avec sa famille et de le voir grandir. Toutefois, avec le temps, j'ai vu l'habitude de consommer de la drogue dont il ne pouvait se défaire détruire en bout de piste la famille. Il est un de ceux qui a abouti en prison parce qu'il ne pouvait s'empêcher d'entretenir sa toxicomanie.
Il y a maintenant près de 28 ans que la Commission d'enquête sur l'usage des drogues à des fins non médicales a déposé le rapport Le Dain. Ce dernier abordait bon nombre de questions judicieuses et comprenait beaucoup de bonnes recommandations, mais nous savons tous que les temps ont bien changé depuis 1973. Nul n'ignore combien les drogues prolifèrent dans notre société et combien il est facile de s'en procurer. Nous sommes à même de le constater partout où nous allons.
Récemment, l'Organe international de contrôle des stupéfiants de l'ONU a déposé son rapport annuel. Le rapport fait état d'une hausse troublante de la production et de l'abus des drogues synthétiques au Canada. Le rapport signale que la fabrication illégale de méthamphétamines a augmenté au cours de la dernière année et que les autorités de police ont découvert un nombre record de laboratoires de production dans tout le Canada.
Il est clair que nous avons besoin d'une stratégie moderne globale pour résoudre le problème important que nous avons aujourd'hui au Canada. Dans la motion qu'elle propose aujourd'hui, l'opposition demande au gouvernement de s'attaquer à ce problème très complexe en créant le comité. Je suis ravi, je le répète, que le gouvernement soit d'accord.
Peu de choses me fâchent, mais il est bon parfois de se fâcher. Les députés ont peut-être entendu dire qu'il est correct de se fâcher pour les bonnes ou les mauvaises choses à la condition de le faire de la bonne façon. Cela me fâche de voir les tragédies que vivent des familles canadiennes et dont j'ai parlé.
Cela me fâche que des gens gagnent leur vie en détruisant celle des autres parce qu'ils vendent de la drogue. Cela me fâche aussi de voir que, sciemment ou pour quelque raison inconnue, des gens se droguent tellement qu'ils sont devenus un fardeau pour notre société.
Cela me fâche que nous devions dépenser autant d'argent en mesures de prévention. Cela me fâche de voir que la société est obligée de faire cela pour un nombre relativement petit de personnes. Cela me fâche de devoir investir de l'argent dans l'application de règlements qui sont vraiment dans l'intérêt de ces personnes.
Cela me fâche de voir ce que coûtent la main-d'oeuvre, le temps et les installations que nécessitent les efforts de désintoxication. Mais lorsqu'une situation nous met en colère, il faut faire tout ce que nous pouvons pour y remédier.
En 1997-1998, les centres de traitement des toxicomanes et alcooliques de Regina—Lumsden—Lake Centre ont traité un peu moins de 4 000 personnes. Un rapport sur les abus d'alcool et de stupéfiants dans le district de santé de Regina a récemment été publié. Il indique que les drogues les plus couramment utilisées en Amérique du Nord sont facilement accessibles dans les rues du bon vieux Regina, en plein coeur des Prairies, où on croyait pouvoir vivre en sécurité. Les drogues les plus souvent utilisées sont une combinaison de Talwin et de Ritalin, qu'on appelle parfois l'héroïne des pauvres.
Le rapport révèle que la consommation de drogues intraveineuses est fréquente. On peut se procurer de la méthadone dans les rues. On estime également que la consommation de drogues illicites a une incidence considérable sur le nombre de crimes contre la propriété et d'actes criminels violents à Regina. Les chiffres pourraient être encore plus élevés si on y incluait les cas impliquant de jeunes contrevenants.
Voici un extrait d'un article paru en février dans le Leader Post de Regina qui dit ceci:
Un organisme des Nations Unies a récemment critiqué le Canada pour son laxisme à l'endroit des personnes qui cultivent illégalement du cannabis et pour l'absence de contrôle de la production illégale de drogues comme l'«ice» et l'«ecstasy».
Le rapport constate une augmentation inquiétante de la production et de la consommation de drogues synthétiques au Canada.
Selon le rapport, la production illégale de méthamphétamine, ou ice, est en hausse. Depuis un an, les organismes d'application de la loi ont mis au jour un nombre record de laboratoires clandestins.
Certains laboratoires où l'on fabriquait du MDMA, ou ecstasy, ont été découverts dans des quartiers de banlieues habités par la classe moyenne, notamment dans le centre du Canada. Les laboratoires étaient exploités par des personnes n'ayant aucun dossier criminel ni aucun lien avec la criminalité.
Dans son rapport annuel, Herbert Schaepe, le secrétaire de la commission, écrit: «La commission n'est pas satisfaite des mesures de contrôle mises en place au Canada. Le gouvernement canadien ne réussit toujours pas à contrôler, par exemple, l'un des principaux précurseurs des méthamphétamines, l'ice.»
Les précurseurs sont des substances utilisées dans la transformation ou la fabrication de narcotiques.
La commission demande au Canada de faire davantage pour honorer ses obligations en vertu de la Convention de 1998 des Nations Unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes, afin d'éviter que le territoire canadien ne serve au détournement de produits chimiques à des fins de fabrication illégale de narcotiques dans d'autres pays.
Le rapport des Nations Unies fait état d'une augmentation de l'importation illicite de cocaïne et d'héroïne au Canada, en provenance de pays comme le Mexique. L'an dernier, les organismes d'application de la loi au Canada ont saisi 156 kilogrammes d'héroïne.
Je suis heureux de prendre la parole au sujet de la motion de crédits présentée par l'Alliance. Le secrétaire parlementaire faisait référence, il y a quelques instants, à la politique de l'Alliance canadienne concernant les drogues et la criminalité.
Voici quelques éléments tirés de notre document de politique. Un prisonnier sur deux dans les pénitenciers fédéraux au Canada était sous l'influence de l'alcool ou de drogues lorsqu'il a commis le crime qui l'a mené à l'emprisonnement. Cinquante pour cent des gens qui commettent des crimes ont consommé de l'alcool ou des drogues.
Il faut lancer une stratégie nationale pour réduire la consommation de drogues, réalisée en partenariat avec les gouvernements provinciaux et municipaux et à laquelle s'ajouteraient des stratégies au niveau communautaire. Cette idée est tirée directement du document de politique de l'Alliance canadienne. L'Alliance favorise le partenariat avec les provinces pour l'élaboration et la mise en oeuvre d'une stratégie nationale sur les drogues qui donnera de bons résultats au niveau de la rue. C'est dans la rue qu'il y a beaucoup de travail à faire.
J'ai eu récemment le privilège d'entendre un chef de police des États-Unis décrire comment une collectivité s'engouffre dans une spirale vers la dégradation. Tout d'abord, un élément criminel ou une drogue arrive au sein de la collectivité et celle-ci le tolère, sans grand plaisir et contre son gré, mais elle tolère ce qui se passe. Après avoir toléré pendant un certain temps, elle a tendance à devenir apathique.
La tolérance est une chose, mais l'apathie est une étape de plus vers le bas, où les gens ne se préoccupent absolument plus de ce qui se passe. Ils commencent à faire confiance aux criminels autant qu'aux policiers. Ils deviennent indifférents aux événements qui surviennent autour d'eux.
La prochaine étape de la dégradation, c'est lorsque la collectivité commence à se porter à la défense de l'activité criminelle. Cela se produit souvent. La collectivité commence à défendre non seulement l'élément criminel, mais aussi la consommation de drogues proprement dite. Je crois que c'est un des aspects que le comité devra examiner afin de résoudre ce problème d'attitude des collectivités et de contribuer à créer un climat plus inhospitalier pour ceux qui consomment déjà des drogues dures et ceux qui en vendent à nos jeunes.
Le document de l'Alliance préconise aussi de travailler en partenariat avec les provinces afin de promouvoir le recours aux tribunaux spécialisés en matière de drogues. Un certain nombre de députés d'en face ont parlé d'un tribunal de cette nature qui a été mis sur pied à Toronto, et je vais revenir là-dessus dans un instant. Le Parlement doit toutefois régler ces problèmes.
Le tribunal de Toronto est le premier du genre au Canada. Je crois savoir qu'il s'inspire d'un certain nombre de tribunaux semblables qui existent aux États-Unis. Il s'agit d'un projet conjoint auquel participent la Cour de justice de l'Ontario, le ministère de la Justice, la Stratégie nationale sur la sécurité communautaire et la prévention du crime du gouvernement du Canada, le Centre de toxicomanie et de santé mentale, des représentants du système de justice pénale de Toronto, le service de police de Toronto, le bureau de la santé publique de Toronto de même que divers services et organismes municipaux et communautaires. Ce projet est financé dans le cadre de la Stratégie nationale sur la sécurité communautaire et la prévention du crime, à titre de projet pilote.
Cela n'a pas vraiment trait au comité dont nous discutons la création éventuelle, mais je tiens à dire que je me suis rendu à ce tribunal spécialisé en matière de drogues et qu'il semble être un projet couronné de succès. J'espère que le ministre de la Santé est au courant que le financement de ce projet tire à sa fin. Il faut prolonger son financement avant l'échéance sinon on devra réduire l'accès de nouveaux patients au programme ainsi offert.
Je suis donc en faveur d'une expansion du tribunal consacré en matière de drogues, parce que cela semble un programme très utile et attrayant. Un tel tribunal réunit divers éléments de la collectivité. J'ai été renversé d'apprendre, par le tribunal en question, le nombre d'organismes et de personnes qui lui ont apporté leur contribution.
Revenons maintenant à notre travail de députés. Il nous faut considérer le travail du comité comme quelque chose de très important. J'espère que ce dernier aura les coudées franches pour examiner tous les aspects de la question ainsi que les lois pertinentes. Nous hésitons parfois à agir et à faire les choses différemment, mais le comité a besoin d'un telle latitude. Il doit pouvoir examiner la stratégie et déterminer s'il existe de meilleures solutions.
Quelqu'un a mentionné il y a un moment que la lutte antidrogue aux États-Unis n'a pas très bien fonctionné. Il ne faut pas pour autant baisser les bras et tout légaliser. La réponse se trouve quelque part entre les deux extrêmes. J'espère que le comité proposé étudiera toutes les possibilités et qu'il trouvera de meilleur moyens pour appliquer les lois en matière de drogues ou les ajuster au besoin.
Il faut revoir les peines, les traitements et toutes ces choses de manière responsable et avec un sentiment d'urgence et un sens de la coopération.
En conclusion, je vais ajouter quelques mots au sujet du tribunal consacré en matière de drogues de Toronto. Je forme l'espoir, comme je l'ai mentionné plus tôt, que ce tribunal servira de modèle pour l'audition d'une plus vaste gamme de causes. Nous pourrions l'appliquer aux jeunes contrevenants et peut-être aux auteurs de certaines autres infractions au Code criminel.
Il y a quelques semaines, j'ai eu le privilège de participer à un cercle de guérison à Wilcox, en Saskatchewan. Dans ces cercles, ils appliquent ces idées aux jeunes contrevenants. Le jeune est mis en présence de ses pairs, de ses enseignants et des autorités locales, et chaque personne prend la parole pour expliquer quelles ont été pour elle les conséquences du crime. C'est une méthode très positive.
Je m'abstiendrai de décrire dans le détail le tribunal consacré aux affaires de drogue, mais je voudrais tout de même dire que, après avoir assisté aux audiences de ce tribunal, il y a environ deux semaines, j'ai constaté que l'on ne se sentait pas comme dans un tribunal ordinaire. La différence était la même que celle qu'il y a entre un mariage et des funérailles. C'était plutôt comme un mariage. Il y avait une véritable célébration. Une jeune femme jubilait d'avoir passé une semaine de plus sans succomber à la tentation de la drogue. Le juge l'a félicitée. Les autres contrevenants qui attendaient leur tour l'ont applaudie et encouragée. Il était vraiment réjouissant de célébrer cette victoire avec elle.
Puis, j'ai vu un jeune qui avait échoué. Il s'est présenté devant le juge et a admis son échec. Le juge devait le sanctionner. Il n'y avait pas de défi ou de colère lorsque ce jeune a reçu son avertissement. Il est sorti du tribunal déterminé à essayer à nouveau de faire ce qu'il fallait faire.
Je félicite le gouvernement pour ce genre de projets. Ce sont des solutions comme celles-là que le comité doit examiner et étendre dans toute la mesure du possible. Nous mettons trop de gens en prison qui en ressortent encore plus enragés qu'avant d'y entrer. J'aimerais beaucoup que le comité étudie ce genre de solutions.
M. Lynn Myers (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Madame la Présidente, il est rafraîchissant et éclairant d'entendre le député d'en face parler du beau travail du tribunal consacré aux drogues à Toronto. Je crois qu'il a parlé sagement. Il est évident qu'il a étudié la question, qu'il a écouté et qu'il comprend le problème. Je crois qu'il mérite d'être félicité pour avoir soulevé ce point de vue éclairé. C'est rare chez les députés de l'Alliance.
Je tiens également à le féliciter pour sa reconnaissance des méfaits de l'alcool et des drogues et de leurs conséquences sur le taux de criminalité. Cela souligne l'excellent travail accompli par le Service correctionnel du Canada dans ce domaine très important qu'est la réadaptation et le travail valable auprès des détenus. Cela souligne l'importance de s'assurer de bien utiliser les programmes en place et d'offrir aux intervenants la possibilité de changer le système, de l'améliorer et de faire ce qui doit être fait. Je dis au député d'en face que ses arguments ont été bien reçus.
J'ai deux questions à lui poser. La première, est-ce que le député a personnellement appuyé l'utilisation médicinale de la marijuana au Canada comme on l'a dit? La deuxième, a-t-il appuyé la proposition de la ville de Vancouver concernant les centres d'injection légale? Ce sont là deux questions assez directes et j'aimerais connaître les réponses du député.
M. Larry Spencer: Madame la Présidente, ce sont deux autres choses qui me mettent en colère car elles m'obligent à choisir le moindre de deux maux. J'ai mis du temps à rajuster ma façon de penser. Je suis parvenu à la conclusion que plusieurs drogues prescrites pour des raisons médicales créent également l'accoutumance et que si on en abuse, elles n'ont pas de place dans la vie d'une personne. Je ne suis pas un ardent défenseur du cannabis à des fins médicales, mais je peux en voir la sagesse et le bien-fondé, et je peux l'accepter.
Je suis désolé, mais j'ai oublié l'autre question.
M. Lynn Myers: Madame la Présidente, elle portait sur la création de centres d'injection légale à Vancouver.
M. Larry Spencer: Madame la Présidente, C'est une autre chose que j'ai dû mal à accepter. Là aussi c'est peut-être le moindre de deux maux, et j'essaie d'en comprendre les avantages. Je demande au député d'être patient avec moi.
M. Werner Schmidt (Kelowna, Alliance canadienne): Madame la Présidente, je félicite moi aussi le député des propos qu'il a tenus et de l'exposé qu'il a fait cet après-midi.
Il y a une autre chose que nous devons reconnaître. Ce matin, nous avons entendu le ministre de la Santé et d'autres députés dire que nous devons étudier ce problème. Plusieurs ont expliqué en détail à quel point le problème était grave. Le député qui vient de parler a énormément d'expérience dans le domaine des relations sociales, surtout au sens pastoral. Je crois que dans une autre vie, il en savait long sur toutes ces choses.
Se pourrait-il que l'on refuse de faire face à la réalité de la situation? Nous avons une politique antidrogue depuis 1987. Une nouvelle politique antidrogue est entrée en vigueur en 1996. Nous avons modifié nos lois et mis des programmes en place. Nous avons pris toutes sortes de mesures et pourtant la consommation de drogues illicites dans notre société est en hausse.
De toute évidence, nos programmes, nos politiques et nos lois sont inefficaces. Se pourrait-il qu'ils soient inefficaces parce qu'on ne veut pas qu'ils soient efficaces? Nous déplorons le fait que les familles soient détruites, que la vie des individus soit ruinée. Pourtant sommes-nous réellement déterminés à nous attaquer au problème?
Un comité de ce genre serait-il le moyen de sensibiliser la société et de l'amener enfin à admettre que nous avons un problème et que c'est son problème. Nous sommes parvenus au point où nous reconnaissons que c'est un problème, mais nous pensons que ce n'est pas notre problème. Je me demande si, en tant que parents, chefs de file de la communauté, pasteurs et enseignants, nous ne devons pas changer d'attitude. Qu'en pense le député?
M. Larry Spencer: Madame la Présidente, c'est exactement ce à quoi je songeais lorsque j'ai parlé du déclin dans une collectivité. On passe de la tolérance, à l'apathie, à la défense. On pourrait montrer, je crois, que cela est arrivé pour la consommation de drogues, pas de façon généralisée, mais de façon très circonscrite. Il y en a qui sont pour la défense, qui s'en fichent ou qui sont tolérants, mais j'estime que le comité devrait examiner la situation de très près pour nous donner l'heure juste sur les dangers de ces drogues.
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Alliance canadienne): Madame la Présidente, il y a un certain temps, le secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, qui est plutôt sectaire, ce qui n'est guère utile dans ce débat, a dit que j'étais contre l'établissement d'un centre de recherche sur les drogues à l'Île-du-Prince-Édouard.
La raison de mon opposition, c'est qu'on injecte des millions de dollars dans des travaux inutiles. On construit un immeuble, qui durerait 40 ans, pour faire une étude qui pourrait être menée dans nos universités, à la Chambre des communes ou ailleurs. Nous devrions nous préoccuper d'éducation, de réadaptation, de désintoxication, etc.
Selon le député de Regina—Lumsden—Lake Centre, qu'est-ce qui arrivera au rapport du comité après qu'il aura été déposé aux Communes? J'espère sincèrement que le rapport ne restera pas sur les tablettes à accumuler la poussière. Le problème est bien trop important. Pourrait-il nous dire quel sera l'intérêt de ce rapport?
M. Larry Spencer: Madame la Présidente, l'une des choses que j'aurais espéré tirer d'un tel rapport, c'est la possibilité pour nous de remédier à certaines des lacunes de la loi. En raison des contraintes de temps, je n'ai pu, dans mon intervention, donner la liste que m'avait remise le procureur de la Couronne au tribunal des stupéfiants de Toronto et qui énumérait les lacunes, selon lui, de la loi relativement au bon fonctionnement de pareil système judiciaire parallèle.
Il devrait y avoir une volonté de modifier la loi. J'espère que le rapport se traduira par des modifications à tous les niveaux. Ce rapport ne devra pas dormir sur des tablettes, pour devenir périmé après deux ou trois ans. J'espère qu'il incitera le Parlement à l'action.
M. Randy White: Madame la Présidente, j'ai eu affaire à tellement d'enfants qui ont besoin d'aide dès aujourd'hui dans notre pays.
Une jeune fille du nom d'Angel, qui devait être âgée d'environ 14 ans, a quitté la rue. Je pense qu'elle était passée dans 22 familles d'accueil avant d'être admise dans un centre en Colombie-Britannique. Le problème, c'est qu'elle ne peut pas rester dans ce centre plus de 14 semaines environ et que l'on devra l'envoyer à nouveau dans une famille d'accueil puisqu'il n'y a pas de centres de réadaptation à long terme.
Quelle est, selon le député, la solution au problème des jeunes sans-abri qui ont besoin de traitement? Où vont-ils pour être traités? De quelles ressources avons-nous besoin? Faut-il consacrer davantage de fonds au problème?
M. Larry Spencer: Madame la Présidente, il est évident que nous devrons engager des crédits. J'ai vu récemment une employée de la GRC sur le point de prendre sa retraite animer un groupe communautaire. Cela se passait à Wilcox, en Saskatchewan. On a fait entrer un jeune contrevenant et ses accompagnateurs. Les membres de la communauté pouvaient exercer des pressions sur le jeune. Voilà le type d'intervention dont nous avons besoin.
M. Lynn Myers (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Madame la Présidente, le débat que nous tenons est très important. Je dirai d'abord que la stratégie canadienne en matière de drogues reflète un équilibre très prudent. Je partagerai mon temps avec le député de Vancouver Kingsway.
Cet équilibre entre la réduction de l'offre et de la demande de drogues illicites est crucial. Au Canada, on reconnaît l'abus des drogues comme étant avant tout un enjeu de santé. Néanmoins, il faut aussi reconnaître l'importance de la lutte antidrogue.
On continue de voir la lutte antidrogue comme étant un aspect important de notre stratégie en matière de drogues, car les efforts visant à réduire les dommages causés par les drogues seraient anéantis dans un environnement où l'offre serait illimitée. Des études ont montré que l'abus des drogues chez les jeunes tient principalement à la disponibilité des drogues. La répression contribue donc, jusqu'à un certain point, à contrôler l'offre. La réduction de l'offre crée donc un environnement propice à la réussite des programmes de prévention.
Dans ce sens, il conviendrait de mettre l'accent sur la nature et l'importance de la répression au Canada. La police n'en est pas encore là. Les efforts de répression visent les criminels de haut rang qui fournissent les drogues illicites plutôt que les consommateurs de ces drogues qui, eux, font l'objet de programmes de prévention, de traitement et de réadaptation.
Au Canada, on voit l'aspect répressif comme complémentaire à la prévention, au traitement et à la réadaptation. Des efforts particuliers ont été déployés pour réunir ces éléments. Je songe notamment au réseau du Partenariat des secteurs de la santé et des services de police qui a été créé en 1994. Ce réseau réunit des représentants des milieux de la santé et du maintien de l'ordre pour favoriser la concertation des efforts visant à régler les problèmes posés par la toxicomanie.
Les services de police du Canada ont reconnu la nécessité d'une approche équilibrée. J'invite les députés a consulter le document intitulé «Stratégie canadienne antidrogue dans l'optique de la police nationale: Une demande équilibrée», que l'on trouve sur le site de la GRC.
Je prie également les députés de se reporter à la résolution concernant la politique antidrogue que l'Association canadienne des chefs de police a adoptée en 1999, dans laquelle l'association se déclare fermement opposée à la légalisation des drogues illicites et «favorise la mise en oeuvre d'une démarche équilibrée axée sur la prévention, la sensibilisation, l'application de la loi, le counseling, le traitement, la réadaptation et la déjudiciarisation pour résoudre les problèmes de drogues au Canada». C'est là une attitude avisée qui s'inscrit dans le droit fil des valeurs canadiennes et des valeurs du gouvernement pour ce qui concerne la façon dont nous souhaitons nous attaquer à cet horrible problème.
Toujours à propos des forces de l'ordre et des services de police, je rappelle que nous organisons souvent des opérations policières conjointes de lutte antidrogue, auxquelles participent différentes autorités policières du Canada et d'ailleurs. Récemment, de telles opérations ont été menées avec grand succès. Il y a lieu de féliciter tous ceux qui y ont participé, surtout nos services de police qui ont fait de l'excellent travail.
La police participe aux activités de prévention organisées dans le cadre de la lutte antidrogue. Je signale en particulier le Service de sensibilisation aux drogues de la GRC qui offre un leadership, de la formation, des programmes et de la coordination en matière de lutte aux toxicomanies dans les localités canadiennes. Les efforts de répression menés au Canada ciblent les milieux des narcotrafiquants de grande envergure.
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
[Français]
LES RANGERS CANADIENS
M. Jean-Guy Carignan (Québec-Est, Lib.): Monsieur le Président, je veux profiter de la tenue de la Semaine des autochtones, qui se déroulera du 21 au 25 mai prochains, afin de souligner une contribution singulière et trop souvent ignorée, soit celle des autochtones, par le biais du Programme des Rangers canadiens.
En effet, créé en 1942, le Programme des Rangers permet actuellement à près de 3 000 autochtones de maintenir une présence militaire dans les régions éloignées du pays.
En plus d'affirmer la souveraineté canadienne, les Rangers demeurent toujours disponibles afin de fournir une précieuse assistance en cas de catastrophes.
En tant que membres actifs de leur communauté, les participants au programme sont par ailleurs souvent considérés comme des modèles par les jeunes autochtones.
Les Forces canadiennes ont une longue et fière histoire de réalisations dans le Grand Nord canadien. Sans la collaboration des Rangers, il serait difficile pour notre personnel militaire de dispenser des secours humanitaires aux citoyens des régions nordiques peu peuplées.
Les Rangers sont non seulement les yeux et les oreilles de la collectivité, mais aussi des membres vitaux des Forces canadiennes.
* * *
[Traduction]
L'AGRICULTURE
M. David Anderson (Cypress Hills—Grasslands, Alliance canadienne): Monsieur le Président, les producteurs de l'Alberta et de l'ouest de la Saskatchewan risquent de devoir faire face à une période de sécheresse qui pourrait bien réduire à néant tout espoir de produire une récolte cet été. Dans certaines régions, notamment dans l'est de l'Alberta, le manque d'humidité dure depuis bien plus d'un an.
Les éleveurs nous disent déjà qu'il devront vendre du bétail à cause du manque d'eau souterraine. Hier, le vent a soufflé comme il le fait depuis ces dernières semaines. Il a soufflé au point de provoquer des tourbillons de poussière qui rappelaient les tempêtes d'hiver. Dans certaines régions, la visibilité était réduite à 100 mètres.
Selon les prévisions météorologiques, cette sécheresse généralisée pourrait être la pire que notre pays ait connue depuis un siècle.
Étant donné que le gouvernement libéral a toujours été lent à réagir aux problèmes agricoles, j'aimerais lui poser les questions suivantes: Est-il au courant de cette crise potentielle? Le ministère de l'Agriculture a-t-il prévu un plan d'action pour aider les fermiers touchés par la sécheresse? Le gouvernement attendra-t-il qu'il soit trop tard avant de prendre des mesures?
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LE GOUVERNEMENT DE COLOMBIE-BRITANNIQUE
M. John Harvard (Charleswood St. James—Assiniboia, Lib.): Monsieur le Président, au nom du gouvernement du Canada, je félicite le nouveau premier ministre de la Colombie-Britannique, M. Gordon Campbell, ainsi que son caucus.
L'éclatante victoire qu'il a remportée aux élections confère un mandat solide au nouveau gouvernement. Nous assistons au début d'une nouvelle ère en Colombie-Britannique.
C'est la première fois en 49 ans que le Parti libéral est au pouvoir en Colombie-Britannique. Nous adressons au nouveau gouvernement tous nos voeux de succès et comptons bien travailler avec lui.
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LES JEUX OLYMPIQUES
M. Irwin Cotler (Mont-Royal, Lib.): Monsieur le Président, les Canadiens ont appris avec plaisir que la ville de Toronto figure, avec Paris et Beijing, parmi les trois villes encore en lice pour la tenue des Jeux olympiques de 2008. Il est regrettable, cependant, que la question des droits de la personne ne semble pas être prise en compte dans le choix de la ville hôte des Jeux olympiques.
La décision qui a été prise, au moment où la Chine se livre aux violations des droits de la personne les plus persistantes et les plus généralisées depuis les événements de la Place Tienanmen, envoie un message faussé aux défenseurs de la protection de la paix et de la dignité humaine, qui constitue pourtant un objectif de la Charte olympique elle-même.
Autrement dit, le fait d'accorder les Jeux olympiques à la Chine annule les efforts de ceux qui luttent pour les droits de la personne. Ce serait non seulement absoudre la Chine des pires violations des droits de la personne, mais ce serait également conférer à ces violations une légitimité rétrospective. Ce serait envoyer un message troublant selon lequel des pays peuvent non seulement violer impunément les droits de la personne, mais être récompensés pour l'avoir fait. Pareille décision ne peut qu'engendrer le cynisme dans un monde qui manifeste déjà trop d'indifférence et trop peu de courage moral.
Beijing pourrait être un bon choix, mais pas maintenant, et pas tant que la Chine ne se conformera pas aux principes fondamentaux de la Charte olympique concernant la protection de la sécurité humaine. Je crois que Toronto serait un meilleur choix pour les jeux de 2008.
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LE GOUVERNEMENT DU NOUVEAU-BRUNSWICK
M. Andy Savoy (Tobique—Mactaquac, Lib.): Monsieur le Président, le Conference Board du Canada publiait, il y a deux jours, sa publication intitulée Provincial Outlook.
Le Conference Board y indique que la faiblesse persistante de l'industrie de la construction ralentit la croissance réelle au Nouveau-Brunswick. Dans son édition d'hier, le Globe and Mail va même jusqu'à qualifier le Nouveau-Brunswick de «traînard» économique. Selon le journal:
Durant les deux années, le Nouveau-Brunswick sera la province qui traînera le plus de l'arrière. Pour une troisième année de suite, le déclin de la construction nuit à la capacité de la province de prendre son élan.
Bien que j'approuve pleinement la détermination du gouvernement du Nouveau-Brunswick de gérer ses finances de façon responsable, j'invite le premier ministre de cette province à affecter une partie du fonds de réserve de 100 millions de dollars à l'amélioration du réseau routier, afin d'aider le Nouveau-Brunswick à faire face à la conjoncture économique difficile qui s'annonce.
La construction de nouvelles routes permettra de créer des emplois nécessaires. Elle aidera le Nouveau-Brunswick à faire face aux difficultés économiques, mais elle contribuera surtout à sauver des vies.
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LE GOUVERNEMENT DE LA COLOMBIE-BRITANNIQUE
Mme Betty Hinton (Kamloops, Thompson and Highland Valleys, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est un grand plaisir pour moi de prendre la parole à la Chambre aujourd'hui pour féliciter deux de mes électeurs qui ont été élus hier à l'assemblée législative de la Colombie-Britannique.
Kevin Krueger a facilement été réélu dans la circonscription de Kamloops—North Thompson, et Claude Richmond, ancien ministre du cabinet créditiste, est le nouveau député de Kamloops. Je suis persuadée que ces deux messieurs sauront bien représenter mes électeurs et ma circonscription et je serai heureuse de travailler avec eux.
Pour la première fois depuis une décennie, ma province de la Colombie-Britannique sera dirigée par un parti qui épouse les principes de la libre entreprise préconisés par l'Alliance canadienne. Des impôts moins élevés, un gouvernement moins interventionniste et plus responsable, des votes libres et des élections à date fixe, voilà tous des principes qui seront bientôt adoptés en Colombie-Britannique.
Le gouvernement d'en face devrait tenir compte de l'imposante majorité des électeurs de la Colombie-Britannique qui ont appuyé un gouvernement du bon sens.
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LES SCIENCES ET LA TECHNOLOGIE
M. Larry McCormick (Hastings—Frontenac—Lennox and Addington, Lib.): Monsieur le Président, l'Expo-sciences pancanadienne est une exposition nationale annuelle des projets remarquables dans le domaine des sciences et de la technologie mis au point par des jeunes Canadiens de la septième année jusqu'au niveau préuniversitaire et elle constitue l'événement le plus important de la Fondations sciences jeunesse du Canada.
L'exposition de cette année, qui est présentée sous le thème «L'Odyssée scientifique dans les Mille-îles», se tiendra du 12 au 20 mai à l'Université Queen's de Kingston.
Les élèves ont consacré de nombreuses heures à la conception et à la mise au point de leurs projets. Cet événement leur donne une chance merveilleuse de présenter leur travail tout en explorant bon nombre de domaines passionnants de la science et de la technologie.
Les participants ont déjà remporté des concours locaux, régionaux et provinciaux, réalisations qui démontrent clairement une réelle compréhension de leurs projets et de l'importance scientifique qu'ils revêtent.
Je suis persuadé que tous les participants à l'expo-sciences pancanadienne vivront une expérience mémorable à Kingston et je sais que le député de Kingston et les Îles sera d'accord avec moi à ce sujet.
J'aimerais féliciter les organisateurs de cette exposition et souhaiter la meilleure des chances à tous les participants. J'espère que les députés rendront visite aux jeunes de leur circonscription à Kingston.
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[Français]
BERNADETTE RENAUD
M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Monsieur le Président, dans le cadre de la Quinzaine du livre de Contrecoeur, les autorités municipales de cette ville, située dans la circonscription que j'ai le plaisir et l'honneur de représenter à la Chambre, ont récemment souligné les 25 années de carrière pour le moins prolifiques de Bernadette Renaud, écrivaine et scénariste.
L'impressionnante carrière de Bernadette Renaud, récipiendaire de nombreux prix prestigieux, fut ponctuée par la publication de livres pour la jeunesse, d'ouvrages scolaires, de pièces de théâtre pour enfants, sans compter plusieurs scénarios rédigés pour le cinéma et la télévision. Bach et Bottine et Watatatow, par exemple, ne sont que quelques-unes des très nombreuses oeuvres auxquelles elle aura été associée à titre de scénariste.
Je ne sais pas s'il s'agit du résultat du hasard, mais sa décision de s'installer à Contrecoeur, il y a 25 ans, a coïncidé avec le début de sa brillante carrière d'écrivaine. Depuis, l'auteure de la trilogie Un homme comme tant d'autres fait la fierté des Contrecoeuroises et Contrecoeurois.
Madame Renaud, pour la qualité de ces oeuvres impérissables que vous nous avez offertes jusqu'ici, de même que pour celles à venir que nous languissons de découvrir, félicitations et merci!
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[Traduction]
SPIELO GAMING INTERNATIONAL
M. Dominic LeBlanc (Beauséjour—Petitcodiac, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole pour féliciter M. Jon Manship, le PDG de la société Spielo Gaming International, de Moncton, au Nouveau-Brunswick, qui a été nommé parmi les 40 personnalités canadiennes de moins de 40 ans.
Ce prestigieux palmarès honore les réalisations d'une nouvelle génération de chefs de file dans le monde des affaires, dans les professions libérales, dans le monde universitaire et dans la fonction publique.
M. Manship mérite bien cette distinction. Il a bâti à Moncton une entreprise impressionnante du secteur de la nouvelle économie qui emploie des centaines de personnes et exporte ses produits et sa technologie partout dans le monde.
Ma collègue, la ministre du Travail, a beaucoup contribué à appuyer cette entreprise importante dans le sud-est du Nouveau-Brunswick et elle se joint à moi pour féliciter M. Manship et son équipe de la société Spielo Gaming International.
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JESSICA KOOPMANS
M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Monsieur le Président, en tant que grand-père de quatre petits-enfants, dont Kayla, âgée de cinq ans, je trouve bouleversant ce qui est arrivé à Jessica Koopmans, de Lethbridge. Cette petite fille se rendait innocemment chez une amie lorsqu'elle a été enlevée et brutalement assassinée.
Comment quelqu'un a-t-il pu s'attaquer avec tant de violence à une petite fille? C'est absolument incompréhensible. Il faut vraiment être malade pour faire cela.
Tandis que le gouvernement fédéral se traîne les pieds pour établir un registre des délinquants sexuels et des agresseurs d'enfants, les gouvernements provinciaux vont de l'avant et établissent leur propre registre. Cependant, il vaudrait beaucoup mieux avoir un registre national car cela permettrait de retracer les délinquants partout au Canada plutôt que dans leur province seulement. L'Alberta accélère l'établissement de ce genre de registre, en suivant l'exemple de l'Ontario et de la Colombie-Britannique.
Je ne puis comprendre pourquoi le gouvernement fédéral ne fait rien pour établir un registre national afin de protéger nos enfants. Cela aurait beaucoup plus de bon sens que d'enregistrer les carabines des honnêtes citoyens qui vont à la chasse l'automne.
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LES TUMEURS CÉRÉBRALES
M. Joseph Volpe (Eglinton—Lawrence, Lib.): Monsieur le Président, chaque année on décèle chez environ 10 000 Canadiens une tumeur cérébrale primitive ou métastatique.
Les représentants de la Canadian Alliance of Brain Tumour Organizations se trouvent à Ottawa cette semaine pour sensibiliser la population aux répercussions de cette maladie débilitante qui est trop souvent mortelle. Les tumeurs cérébrales frappent autant les jeunes que les gens plus âgés. Bien entendu, un diagnostic précoce est essentiel au traitement et pourtant l'incidence de cette maladie et le taux de mortalité chez les personnes atteintes ont augmenté de façon marquée depuis 1960.
Malheureusement, il n'existe pas de renseignements fiables et coordonnés au sujet des tumeurs cérébrales. Il est ainsi difficile de procéder aux bonnes évaluations ou de préparer des propositions de recherche, alors que la recherche s'impose. Selon certaines estimations, on diagnostiquerait chaque année chez plus de 5 000 personnes des tumeurs cérébrales primaires.
Santé Canada et la Société canadienne du cancer doivent mettre de côté des ressources pour établir un système efficace de collecte de données. De plus, j'encourage Santé Canada et le Conseil de recherches médicales du Canada ainsi que d'autres organismes de financement, à affecter de l'argent à la recherche pour combattre ces maladies débilitantes et mortelles.
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LES HABITANTS DU CAP-BRETON
M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, il est vrai que les néo-démocrates de tout le pays sont très tristes aujourd'hui pour les braves gens du Cap-Breton suite à l'annonce, hier, par le ministre des Ressources naturelles de la fermeture de la dernière mine en activité, la mine Prince. Cette fermeture va jeter à la rue 440 travailleurs laborieux et leurs familles.
Les conservateurs provinciaux s'en sont pris à eux dans l'affaire de la société Sydney Steel. Les libéraux fédéraux leur ont laissé le pire site toxique dans tout le Canada, avec les taux de cancer les plus élevés dans tout le pays, et ils ne vont même pas déménager ces gens dans des endroits plus sûrs. Maintenant, ils jettent à nouveau à la rue les gens laborieux du Cap-Breton.
Ce qui est pire, c'est qu'au cours des dernières élections, tous les libéraux ont dit aux gens du Cap-Breton que s'ils votaient pour le Parti libéral, on s'occuperait d'eux. C'est vraiment trompeur. Les libéraux fédéraux ont induit en erreur les braves gens du Canada.
Je veux dire aux braves gens du Cap-Breton maintenant qu'ils peuvent toujours compter sur les néo-démocrates provinciaux et fédéraux pour défendre leurs intérêts une fois pour toutes.
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[Français]
LE PRIX RECONNAISSANCE JEAN-BESRÉ
M. Serge Cardin (Sherbrooke, BQ): Monsieur le Président, le 14 mars dernier, la ville de Sherbrooke, la région de l'Estrie et le Québec tout entier perdaient un de leurs fils émérites, Jean Besré.
Comédien de renom et grand humaniste, il s'est engagé dans toutes sortes d'organisations, notamment les Petits Frères des pauvres et le téléthon de la Fondation du CHUS à Sherbrooke.
En mémoire de ce grand bénévole, la Fondation du CHUS a créé le Prix reconnaissance Jean-Besré. Ce prix vient d'être attribué à l'animatrice de télévision, France Beaudoin, native de l'Estrie, qui a animé le téléthon pendant plusieurs années. Elle a d'ailleurs souligné qu'elle partageait cette récompense avec tous ceux et celles qui ont travaillé dans l'ombre à la production de cet événement.
Mme Beaudoin est à l'image de Jean Besré qui a démontré, tout au long de sa vie, une grande générosité envers sa communauté, et ce, dans la plus grande simplicité.
Au nom de tous mes collègues du Bloc québécois, je tiens à vous offrir, madame Beaudoin, mes sincères félicitations.
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[Traduction]
L'ÉCONOMIE
M. John McCallum (Markham, Lib.): Monsieur le Président, j'ai quelques mots à dire au sujet de la demande de budget anticipé qu'a présentée l'Alliance canadienne. Au moins à l'extérieur de la colline du Parlement, les gens se soucient davantage des mesures concrètes que des paroles. Il est on ne peut plus clair que les mesures prises en octobre dernier, y compris la plus forte réduction d'impôts de l'histoire du Canada, ont constitué une maxi-intervention ou un maxi-budget.
Nous pourrions dire que ces mesures budgétaires constituaient un énoncé économique ou un minibudget, si cela nous plaît. Nous pourrions même dire qu'il s'agissait d'un hippopotame ou d'un stockwell day, et j'utilise cette expression...
Le Président: Cela ressemblait beaucoup au nom d'une personne. Je présume que le député sait qu'il fait allusion au chef de l'opposition.
M. John McCallum: Monsieur le Président, j'utilisais cette expression au sens générique, sans la majuscule. Quoi qu'il en soit, je veux souligner que les paroles importent peu. La seule chose qui importe vraiment, c'est que ces mesures budgétaires étaient une maxi-intervention qui nous aidera pendant une autre année.
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LES RÉGIMES DE PENSION
M. Norman Doyle (St. John's-Est, PC): Monsieur le Président, les policiers et les pompiers du pays, qui servent la population, courent quotidiennement des dangers qui risquent d'avoir de lourdes conséquences pour leur vie et pour leur famille. Compte tenu de cela, les policiers, les pompiers et d'autres agents chargés de la sécurité publique peuvent prendre une retraite anticipée. Cependant, cela signifie que bon nombre d'entre eux reçoivent une pension inférieure à 70 p. 100 de leur salaire.
Dans un effort pour corriger le problème, les pompiers et les policiers ont demandé au gouvernement de modifier le règlement de l'impôt sur le revenu pour qu'ils puissent obtenir un taux d'approbation de pension de 2,33 p. 100 au lieu du taux habituel de 2 p. 100.
Je demande au ministre des Finances d'apporter cette modification au règlement afin de reconnaître pleinement et équitablement le service que nos pompiers et nos policiers rendent aux Canadiens en général.
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L'EMPLOI
Mme Sophia Leung (Vancouver Kingsway, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse d'annoncer que plus de 70 emplois pour étudiants seront créés dans la circonscription de Vancouver Kingsway, par l'entremise du Programme d'emplois d'été pour étudiants de DRHC.
Avec la participation de plus de 26 employeurs dans ma circonscription, ce programme aidera les nombreux groupes communautaires à combler leurs besoins en personnel pour l'été, tout en offrant une expérience de travail utile aux jeunes de Vancouver Kingsway. Sans l'aide du gouvernement fédéral, ces emplois n'existeraient pas.
Je félicite DRHC de continuer de financer ce programme important. Nous souhaitons tous du succès aux étudiants et aux groupes communautaires qui participeront au programme cet été.
QUESTIONS ORALES
[Traduction]
L'ÉCONOMIE
M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, ce matin, le ministre des Finances a présenté des prévisions et des cibles d'inflation pour cinq ans. Je m'empresserai de dire que c'était la bonne chose à faire. Toutefois, il n'a pas présenté de projections pour cinq ans en ce qui a trait aux impôts et aux dépenses.
Compte tenu du fait que certains économistes disent que nous pourrions être en situation de déficit d'ici trois ans, le ministre des Finances retournera-t-il à la bonne habitude qu'il venait de prendre, soit celle de présenter des projections pour cinq ans?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, j'ai dit très clairement à la réunion de ce matin que nous ne nous dirigions pas vers un déficit. Nous avons un bon coussin pour nous protéger contre toute éventualité. Cependant, j'aimerais citer les paroles d'un éminent économiste, qui a dit ce qui suit:
On devrait accorder plus d'importance aux prévisions sur l'horizon budgétaire de deux ans que sur l'horizon de planification de cinq ans. Non seulement la reddition de comptes est plus immédiate, mais les prévisions économiques et financières sont plus fiables.
C'est ce qu'il a dit. Fait intéressant, c'est quelqu'un de WEFA.
M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de voir que le ministre lit nos documents. Ce sont des documents intéressants. On y dit ensuite que nous encourageons le ministre à retourner à un précédent qu'il a établi, soit des prévisions pour cinq ans.
Les chiffres qui viennent d'être rendus publics montrent que les dépenses ont augmenté de 8 p. 100. C'est le même taux d'augmentation des dépenses que lorsque le premier ministre était ministre des Finances sous M. Trudeau, et nous savons où cela nous a conduits. Que peut nous dire le ministre des Finances sur la façon dont il s'y prendra pour contenir cette dangereuse augmentation des dépenses?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, premièrement, les chiffres du député sont inexacts. Deuxièmement, j'aimerais citer une ou deux choses.
Qui était trésorier de l'Alberta lorsque les dépenses de programmes se sont accrues de 28,6 p. 100 en trois ans? Quel trésorier de l'Alberta a permis la plus importante augmentation annuelle des dépenses de programmes dans cette province depuis 1985-1986? Et ce n'est pas tout, monsieur le Président.
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Il est très difficile d'entendre la question. Le chef de l'opposition a la parole et il a une autre question à poser.
M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, compte tenu de l'excédent de dépenses de 15,5 milliards de dollars au cours des quatre dernières années, je vais simplement demander au ministre des Finances qui était trésorier de l'Alberta lorsqu'il y a eu une hausse des dépenses en même temps que l'élimination de la dette nette et que l'établissement d'un taux d'imposition unique?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): M. Dinning.
Des voix: Bravo!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Maintenant nous voulons entendre la réponse.
L'hon. Paul Martin: Je me demande, monsieur le Président, si c'est la même personne qui a fait des dépenses de programmes non prévues dans le budget totalisant 2,3 milliards de dollars durant ses trois années en tant que ministre des Finances de l'Alberta.
Quel trésorier de l'Alberta a fait plus de dépenses non prévues dans le budget que tout autre ministre des Finances de cette province depuis 1986?
M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est sous ce ministre des Finances que l'excédent budgétaire a fondu, passant de 20 milliards de dollars à 15 milliards de dollars parce qu'il a dépensé 5 milliards de plus que prévu. Au cours des quatre dernières années, le ministre des Finances a dépensé 15 milliards de plus que prévu et il va continuer à dépenser plus que prévu s'il ne résiste pas aux demandes de ses collègues du Cabinet.
Va-t-il admettre que chaque dollar supplémentaire qu'il consacre à de nouvelles dépenses est un dollar d'allégement fiscal de moins qu'il n'accordera pas aux travailleurs et dont il grèvera notre avenir économique puisqu'il ne le consacrera pas au remboursement de la dette? Est-ce qu'il va un jour savoir quelles devraient être ses priorités?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, voyons où se situe le gros des augmentations: dans les dépenses en santé, à la suite de la plus grosse augmentation des transferts aux provinces jamais consentie; dans les paiements de péréquation aux provinces les moins riches à la suite de l'augmentation la plus importante de ces derniers de l'histoire du Canada; et dans la pension de vieillesse et les services aux personnes âgées.
Le porte-parole en matière de finances pourrait-il tout simplement me dire ce qu'il éliminerait?
M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le ministre des Finances ne comprend pas qu'il est possible d'endiguer les dépenses au lieu de dépenser autant que le premier ministre lorsqu'il était ministre des Finances, mettant le pays en déficit.
De nombreux économistes d'expérience prédisent que, dans quatre ans, nous serons dans une situation déficitaire. Le ministre des Finances ne nous a pas donné de réponse satisfaisante. Peut-il garantir à la Chambre aujourd'hui que nous ne nous retrouverons pas en déficit et que nous ne serons pas obligés de puiser dans nos excédents, je veux dire nos réserves d'urgence? Peut-il nous donner maintenant l'assurance que nous n'allons pas nous retrouver en déficit et que nous n'allons pas puiser dans les réserves d'urgence?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, si on regarde les projections faites l'an dernier, si on regarde les coussins, et si on regarde la protection de la réserve pour éventualités, il est manifeste pour quiconque veut bien comprendre les chiffres que les coussins sont toujours là.
Permettez-moi de dire tout simplement au député qui parle des dépenses effectuées sous le premier ministre actuel que, lorsque nous sommes arrivés au pouvoir en 1993, les dépenses de programmes s'élevaient à 120 milliards de dollars. Aujourd'hui, huit ans plus tard, elles sont toujours de 120 milliards de dollars.
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[Français]
LES LANGUES OFFICIELLES
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, à l'avenir, au Québec, c'est la langue maternelle de la majorité des citoyens, soit le français ou l'anglais, qui déterminera si les arrondissements de Montréal qui ne le sont pas déjà pourront devenir bilingues ou non.
La commissaire aux langues officielles, appuyée par le ministre des Affaires intergouvernementales, propose plutôt d'utiliser le critère de la langue d'usage, ce qui aurait pour effet de modifier l'équilibre linguistique au détriment des francophones du Québec.
Le ministre des Affaires intergouvernementales reconnaît-il qu'en cautionnant la requête de Dyane Adam, il contribue à freiner le développement du fait français au Québec?
L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, je ne cautionne rien du tout. C'est peut-être difficile pour le chef du Bloc de le comprendre, mais le Canada est un État de droit.
Lorsque la commissaire aux langues officielles a demandé à se faire entendre par la cour, c'était au juge de déterminer s'il allait l'entendre. Il a décidé qu'il allait l'entendre. Quant à la valeur juridique de ce qu'elle a à dire, ce sera à lui à en décider, ni au chef du Bloc, ni à moi.
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, avant l'adoption de la Loi 171, les Québécois qui n'avaient pas le français comme langue d'usage étaient automatiquement considérés comme anglophones, et ce, même s'ils ne l'étaient pas. Le gouvernement du Québec a simplement légiféré pour éliminer cette distorsion, sans jamais toucher aux acquis de la communauté anglophone.
Le ministre des Affaires intergouvernementales admet-il qu'en se faisant l'apôtre du statu quo, il préconise que l'offre de services municipaux en anglais ne correspond plus à la réalité linguistique du Québec?
L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, puisqu'on parle de l'État de droit, la Cour suprême a reconnu qu'il était légitime de vouloir faire la promotion et la défense du français au Québec.
Mais il est aussi légitime de tenir compte des droits des anglophones du Québec. Les Québécois francophones comme anglophones, en tant que Canadiens, ont droit à la protection de la Charte canadienne des droits et libertés. Ce sera au juge de déterminer si les arguments de la commissaire aux langues officielles sont valides ou non sur le plan juridique.
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, voyons très concrètement la situation. Si nous devions retenir le critère de la langue parlée à la maison ou la langue d'usage, nous nous retrouverions devant la situation absurde où un Québécois dont la langue d'usage est le portugais serait considéré comme un anglophone pour l'établissement des niveaux de services offerts aux citoyens.
Le ministre est-il prêt à reconnaître qu'en retenant le critère de la langue d'usage plutôt que celui de la langue maternelle, on en arrive dans les faits à considérer comme anglophone toute personne dont la langue maternelle n'est ni le français, ni l'anglais? Il est le ministre responsable de cette question et il devrait nous répondre à ce sujet.
L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Encore une fois, monsieur le Président, quand le premier ministre du Québec est intervenu hier, ce n'était pas pour dire qu'il était en désaccord avec la commissaire aux langues officielles, c'était pour dire qu'elle n'avait pas le droit d'intervenir au Québec, sous prétexte que le Québec serait une nation.
Moi, je dis que s'il faut faire du concept de nation une espèce de mur qui nous séparerait, nous, les Québécois, des autres Canadiens, eh bien, c'est dénaturer le sens du mot nation, en français comme en anglais.
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, plutôt que de voir des murs où il n'y en a pas, le ministre devrait considérer qu'il existe au Québec, quant aux droits linguistiques des anglophones et quant au statut du français comme langue commune, une situation très respectueuse des uns et des autres.
Le ministre des Affaires intergouvernementales écrivait, en 1992, et je cite, «que la meilleure solution serait une dévolution unilatérale des pouvoirs sur la langue uniquement à la législature du Québec et appliquée uniquement sur le territoire québécois.»
Reconnaît-il que le Québec agit en parfaite logique avec ce que lui-même soutenait en 1992?
L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, sauf que depuis, il y a un ancien juge en chef de la Cour suprême, le juge Dickson, l'ancien juge en chef de la Cour suprême, le juge Lamer, et l'actuelle juge en chef qui ont dit que le Québec était une société distincte et reconnue en droit comme tel dans les jugements de la Cour suprême.
Sur ce plan-là, nous savons que ce qui fait le caractère distinct de la société québécoise, c'est que tout le monde est une minorité au Québec. Les anglophones sont une minorité au Québec, mais sont majoritaires ailleurs au Canada et sur l'ensemble du continent. Les francophones, bien que majoritaires au Québec, sont minoritaires au Canada et sur l'ensemble du continent, de telle sorte que les deux communautés ont droit à une protection juridique et linguistique, et il faut en tenir compte.
* * *
[Traduction]
L'ÉCONOMIE
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, les budgets sont une question de choix et de priorités, tout comme les énoncés économiques. Quand le ministre des Finances choisit d'affecter tout l'excédent boni au remboursement de la dette et de ne rien consacrer à la dette environnementale et aux écarts de revenus qui croissent chaque jour, il fait les mauvais choix.
Le ministre se vante de la santé des finances du pays, mais comment justifie-t-il le fait de fermer les yeux sur l'état de santé des vraies personnes et des vraies collectivités qui se détériore?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, si la députée prend la peine de se reporter au budget de l'an 2000, elle constatera que des sommes énormes ont été engagées pour le compte du ministre de l'Environnement et du ministre des Ressources naturelles dans les dossiers du changement climatique et de l'environnement. Ce sont des dépenses récurrentes, et non pas des dépenses uniques.
Il ne fait aucun doute que l'environnement vient au premier rang des priorités du gouvernement. Il ne fait aucun doute qu'il existe des liens entre l'environnement et la santé, l'air pur et l'eau saine. C'est ce que nous avons fait dans le budget de l'an 2000 et c'est ce que nous continuerons de faire.
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, pour un politicien qui avait l'habitude de parler de justice sociale et de responsabilité environnementale, le ministre des Finances a une vision étroite à vous couper le souffle et, pour bien des gens, à vous briser le coeur.
Le ministre a décidé de ne pas tenir compte de la détérioration de notre environnement. Il a choisi de faire fi de l'érosion de services vitaux. Il a choisi ne pas tenir compte de l'écart croissant entre riches et pauvres. Comment se fait-il que ces priorités fondamentales n'ont pas au moins une part raisonnable du gros excédent boni?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, en fait, nous avons bien sûr tenu compte de ces priorités. Une grande partie des 750 millions de dollars affectés à la Fondation canadienne pour l'innovation sera consacrée à l'environnement. Le gros des fonds versés à Génome Canada sera axé sur la santé des Canadiens. Tout cet argent vient de l'excédent de fin d'exercice.
Je rappelle à la députée qu'en raison de la diminution de 33 milliards de dollars de la dette, un montant de 2 milliards de dollars par année échoira aux Canadiens, et ils pourront l'investir dans les soins de santé, l'éducation et l'environnement.
Je rappelle aussi à la députée que c'est Tommy Douglas qui a dit que l'État ne devrait pas être redevable aux détenteurs d'obligations, et elle devrait relire ce que Tommy Douglas avait à dire.
M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Monsieur le Président, les conseillers du ministre des Finances affirment qu'il appuie la réforme parlementaire. Aucun aspect de cette réforme n'est plus important que le contrôle du Parlement sur la politique des dépenses publiques et sur la politique budgétaire du gouvernement.
Pourquoi le ministre ne manifeste-t-il pas son respect envers le Parlement, les députés et la population du Canada en déposant un budget à la Chambre des communes?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, si l'on pense à toutes les dépenses qui ont été annoncées et engagées, on se rend compte qu'elles étaient soit prévues dans une loi particulière adoptée par la Chambre, et que le député et les autres députés ont certainement pu débattre, ou dans le Budget principal des dépenses ou le Budget supplémentaire des dépenses.
À un moment ou à un autre, tout poste de dépense peut être examiné par le Parlement.
M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Monsieur le Président, plus tôt aujourd'hui, le ministre a justifié sa décision de ne pas déposer un budget en disant qu'un groupe d'économistes triés sur le volet lui avait recommandé de ne pas se donner cette peine.
Pourquoi le ministre respecte-t-il davantage le point de vue d'économistes réputés et de lobbyistes plutôt que celui des députés?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, dans l'énoncé d'octobre nous annoncions l'injection de plus de 24 milliards de dollars pour stimuler l'économie canadienne. On y prévoyait aussi la plus grosse réduction de la dette jusqu'à maintenant, ainsi que des investissements massifs dans la santé et dans un vaste éventail de dossiers sociaux.
Voilà les mesures que nous avons prises et nous sommes d'avis qu'il est important de laisser ces mesures agir sur l'économie. Les effets vont se manifester.
Finalement, aux élections de novembre dernier, la population canadienne s'est prononcée en faveur du budget et de l'énoncé.
* * *
LA JUSTICE
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne): Monsieur le Président, témoignant devant le comité la semaine dernière, le commissaire de la GRC a confirmé que le système fédéral du CIPC était incapable de remplir la fonction de registre national des délinquants sexuels. Il faut légiférer et débloquer des fonds.
Le solliciteur général est-il prêt à s'engager aujourd'hui à déposer un projet de loi, comme première étape en vue de la création d'un registre national efficace des délinquants sexuels?
L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, nous avons dit bien des fois à la Chambre que nous avions un excellent système, l'une des banques de données électroniques les plus avancées du monde.
Nous collaborons avec les provinces et les territoires pour apporter au système toutes les améliorations voulues. Si les provinces veulent que des adresses soient données, elles seront ajoutées dans le système du CIPC.
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le commissaire et lui ne sont pas d'accord. Hier, la ministre de la Justice a eu le courage d'admettre que l'actuel registre du CIPC ne protégeait pas efficacement les Canadiens contre les prédateurs sexuels.
Au nom de ceux qui pourraient être victimes de ces criminels, le solliciteur général se ralliera-t-il aujourd'hui à la ministre de la Justice pour prendre toutes les mesures nécessaires à la création d'un registre efficace des délinquants sexuels?
L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je suis persuadé que mon collègue ne veut pas interpréter faussement les propos de la ministre de la Justice. Elle n'a pas dit que nous avions besoin d'une nouvelle loi. Elle a plutôt dit que nous collaborerions avec les provinces et les territoires pour améliorer le système par tous les moyens possibles.
* * *
[Français]
LES LANGUES OFFICIELLES
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, l'utilisation du critère de la langue d'usage défendu par le ministre aurait non seulement des effets négatifs pour les francophones du Québec, mais aussi pour les Acadiens et les francophones du Canada.
Le ministre ne comprend-il pas que l'application du critère de la langue d'usage ailleurs au Canada aurait un effet dévastateur auprès des communautés francophones et acadienne, réduisant grandement leur nombre et, de ce fait, les services qui leur sont donnés?
L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, il est intéressant que la députée mentionne les autres provinces, parce que la commissaire aux langues officielles intervient aussi dans les autres provinces. Pourquoi est-ce qu'elle ne pourrait pas intervenir au Québec? C'est la seule question qui se pose aujourd'hui.
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, le ministre ne voit-il pas qu'en défendant le critère de la langue d'usage, il ouvre la porte à certaines provinces qui pourraient l'utiliser pour justifier une coupure importante dans les services offerts aux francophones, sous le prétexte que leur langue d'usage est l'anglais?
L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, la question précise que demande la députée est devant la cour. Le gouvernement du Canada est un observateur.
Le gouvernement du Canada intervient dans l'affaire Montfort, parce qu'on est en deuxième instance. Mais là, pour le moment, c'est devant la cour. La commissaire aux langues officielles a des arguments à faire valoir. Le gouvernement du Québec a des arguments à faire valoir. Ce sera au juge à décider, ni à la députée, ni à moi.
* * *
[Traduction]
LA JUSTICE
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Alliance canadienne): Monsieur le Président, presque toutes les forces policières du pays sont en désaccord avec le gouvernement et affirment qu'il faut une loi pour instaurer un registre des délinquants sexuels.
En Ontario, la loi de Christopher est la mesure législative qui autorise et prescrit l'enregistrement des changements pour permettre l'élaboration d'un registre des délinquants sexuels.
Le solliciteur général peut-il reconnaître qu'un registre des délinquants sexuels ne peut être créé uniquement par un logiciel informatique et qu'il faut une loi habilitante pour ordonner les changements?
L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, nous devons aussi obtenir l'appui des provinces.
Comme je l'ai indiqué, nous avons dépensé 115 millions de dollars pour nous assurer d'avoir le meilleur système informatique de base de données au monde, lequel fait d'ailleurs l'envie de toutes les forces policières. Nous avons aussi indiqué que nous accepterons les adresses des provinces si elles veulent aussi les insérer dans le système.
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Alliance canadienne): Monsieur le Président, ce monsieur parle comme un vendeur de logiciels, non pas comme un solliciteur général. Ce qu'il nous faut, c'est une loi qui obligera les délinquants sexuels à signaler leurs changements de nom, d'adresse et de numéro de téléphone. En outre, il faut aussi stipuler que les délinquants sexuels seront punis s'ils ne signalent pas ces changements.
Le vendeur de logiciels accepterait-il de dire à la Chambre qu'il faut une mesure législative pour mettre en place un registre des délinquants sexuels?
L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je ne parlerais jamais de mon collègue en des termes semblables à ceux qu'il emploie à mon égard, mais je lui dirai que le changement de nom d'une personne est de compétence provinciale. Il en va de même pour les adresses. C'est de compétence provinciale.
* * *
[Français]
LES LANGUES OFFICIELLES
M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Monsieur le Président, alors que le ministre veut se positionner comme le grand défenseur des langues officielles, un rapport dévastateur du Conseil du Trésor trace un portrait peu reluisant des réalisations de son gouvernement dans ce domaine.
Comment le ministre peut-il expliquer des coupures de plus de cent millions de dollars en dix ans dans les budgets des programmes de langues officielles, les ramenant au niveau de 1977-1978, soit un retour en arrière de plus de 25 ans?
L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement a recommencé à investir dans les programmes de langues officielles. Dans le budget de 1999, on a ajouté 70 millions par année.
Ce que je veux dire, c'est que la commissaire aux langues officielles a effectivement critiqué durement le gouvernement. C'est son rôle de critiquer. Elle n'est pas facile pour nous et il semble qu'elle ne soit pas facile pour M. Landry non plus.
M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Monsieur le Président, on va espérer une réponse un jour.
En plus d'amputer les budgets des programmes de plus de 100 millions de dollars, de voir le poids relatif des sous-ministres francophones fondre, cette même étude révèle que le nombre d'employés affectés aux langues officielles a chuté de 50 p. 100 en cinq ans.
Le ministre ne croit-il pas qu'il devrait s'occuper de ses affaires et corriger le tir dans son gouvernement avant de donner des leçons?
L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, c'est sûr que le gouvernement du Canada doit donner l'exemple en matière de langues officielles, et on va améliorer nos programmes, c'est sûr et certain.
Mais en même temps, tout ce qui se passe au Canada est de mes affaires, et tout ce qui se passe au Québec est de mes affaires.
* * *
[Traduction]
L'IMMIGRATION
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la ministre de l'Immigration a déclaré que les Sklarzyk étaient des resquilleurs, alors que l'expulsion de cette famille a été ordonnée en raison d'une erreur administrative. Entre-temps, Rudy Pacificador, un individu soupçonné de meurtre, a été autorisé à rester au Canada pendant 14 ans et n'a toujours pas été expulsé.
Où est la justice et l'équité dans les valeurs de la ministre si elle permet à un individu soupçonné de meurtre d'être mieux traité qu'une famille qui a un comportement exemplaire?
L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, il est souvent, et je dirais même toujours, difficile de dire à des gens qu'ils doivent quitter le Canada. Ce n'est jamais facile à faire. Cependant, je dois dire au député que, l'an dernier, 8 600 personnes ont été expulsées du Canada.
La première priorité est l'expulsion des criminels. Viennent ensuite les faux revendicateurs du statut de réfugié et ceux qui sont restés plus longtemps que leur permet leur visa de séjour.
Je peux dire une chose au député: j'ai examiné le dossier et je n'y ai vu aucune erreur administrative. Il est difficile de dire aux gens qu'il est temps pour eux de partir.
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, qu'en est-il des 15 000 personnes dont on a perdu la trace? Le ministère de l'Immigration a décidé d'expulser la famille Sklarzyk en raison d'une erreur administrative, mais la ministre prétend qu'elle ne peux pas expulser un assassin en raison de problèmes administratifs. Où est la logique et la compassion dans cela?
La ministre essaiera-t-elle de défendre un système qui permet l'expulsion d'une famille qui a eu un comportement exemplaire, mais ne permet pas d'expulser, après 14 ans, un individu accusé de meurtre?
L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, lorsqu'il est question de vies humaines, il est tout à fait déplacé de faire du théâtre à la Chambre.
Le député et d'autres aussi me soumettent des cas individuels et, en l'occurrence, le député ne s'est jamais adressé à moi, il ne m'a jamais demandé de faits, mais a pris la parole à la Chambre et a blessé des gens. Je trouve cela tout à fait déplacé.
Au Canada, nous appliquons la loi de façon régulière. Avant que quelqu'un soit expulsé, cette personne a droit à l'application régulière de la loi. Je peux affirmer au député que personne n'est expulsé s'il y a une erreur administrative. Les priorités des expulsions sont claires: les criminels, les faux revendicateurs du statut de réfugié et les personnes dont le visa de séjour est expiré. Le député n'a jamais pris le temps...
Le Président: La députée de Hamilton Mountain a la parole.
* * *
LA SANTÉ
Mme Beth Phinney (Hamilton Mountain, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Santé. L'hépatite constitue un énorme fardeau pour les gens qui en sont atteints et pour leurs proches. Le ministre pourrait-il dire à la Chambre ce que Santé Canada fait pour sensibiliser les citoyens à l'hépatite?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, Santé Canada a désigné le mois de mai comme Mois de la sensibilisation à l'égard de l'hépatite au Canada. Je remercie mes collègues de la Chambre de nous appuyer à prendre cette mesure.
La semaine dernière, Santé Canada a organisé et financé une conférence nationale sur l'hépatite C, dans le but de permettre à des chercheurs de se regrouper, d'échanger de l'information et d'accroître tant la compréhension du public que les découvertes scientifiques en matière de traitement de l'hépatite.
Nous nous efforçons d'appuyer les intervenants de la collectivité qui travaillent dans ce domaine et nous venons en aide aux scientifiques qui, d'un océan à l'autre, élaborent de nouveaux traitements et un jour, espérons-le, vaincront cette maladie.
* * *
L'ENVIRONNEMENT
L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances. L'un des plus grands échecs du gouvernement libéral, c'est le fait qu'il ne porte aucunement attention à l'environnement. En fait, l'Université de Victoria a réalisé récemment une étude dans laquelle il est dit que le Canada présente l'un des pires dossiers du monde industrialisé dans le domaine de l'environnement, se classant à l'avant-dernier rang des 29 pays de l'OCDE relativement à 25 indicateurs environnementaux.
Le ministre a choisi d'affecter 15 milliards de dollars au paiement de la dette nationale. Il savait qu'il disposerait d'un énorme excédent. Pourquoi n'a-t-il pas consacré une partie de cet argent à l'environnement? Il avait cette option. Pourquoi a-t-il choisi uniquement la dette nationale et n'a-t-il pas pensé à l'environnement?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, la priorité que les Canadiens et le gouvernement accordent à l'environnement ne fait aucun doute. C'est pourquoi nous consacrerons 1,1 milliard de dollars aux changements climatiques au cours des cinq années à venir. C'est pourquoi le gouvernement a décidé d'affecter, au minimum, la moitié du budget de 2 milliards de dollars du programme d'infrastructure municipale aux infrastructures municipales vertes, soit essentiellement les projets de traitement des eaux usées et de distribution d'eau potable.
Ces investissements ont déjà été annoncés dans la province du député, la Saskatchewan, à Terre-Neuve et au Nouveau-Brunswick, et nous avons l'intention de poursuivre ces efforts.
* * *
LA PAUVRETÉ
L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, un autre échec cuisant du gouvernement libéral, c'est le fait que l'écart se creuse entre les riches et les pauvres. Après huit longues années du règne libéral, selon Statistique Canada, les riches sont de plus en plus riches, et les pauvres, de plus en pauvres. Or, le ministre n'a même pas parlé d'égalité ou de pauvreté dans son discours d'aujourd'hui.
Pourquoi le ministre ne s'est-il pas servi d'une partie de l'argent qu'il a affecté au remboursement de la dette pour réduire l'écart entre les riches et les pauvres? Pourquoi le ministre ne consacre-t-il pas plus d'argent à la lutte contre la pauvreté au lieu d'affecter 15 milliards de dollars au remboursement de la dette?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, c'est exactement ce qu'a fait le gouvernement. Le député ne l'a peut-être pas remarqué, mais 900 millions de dollars seront affectés à la prestation fiscale pour enfants à compter du 1er juillet. Cette mesure vise surtout les familles à faible revenu avec enfants.
Il suffit d'examiner nos réductions d'impôt pour constater qu'elles visent tout spécialement les Canadiens à revenus bas et moyens. Si l'on examine tous les fonds que nous consacrons à la santé et à l'éducation pour venir en aide aux Canadiens à bas revenu, si l'on examine ces chiffres-là, on constate que, si l'écart entre les riches et les pauvres—et personne ne devrait en être fier—se creuse avant impôts, il diminue après impôts.
* * *
L'IMMIGRATION
M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Monsieur le Président, hier, la ministre de l'Immigration a dit que personne n'est expulsé pour une erreur administrative de 50 $; comment se fait-il alors qu'à cause d'un dossier d'immigration qui s'est égaré dans le système, un demandeur ait été traduit devant un tribunal pour une question de 50 $?
La ministre dira-t-elle à la Chambre si les membres de la famille Sklarzyk peuvent demeurer au Canada jusqu'à leur entrevue concernant leur demande de statut de réfugié pour des considérations humanitaires? Allons-nous nous garder de les expulser? Peuvent-ils au moins avoir leur entrevue concernant leur demande de statut de réfugié pour des motifs humanitaires?
L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, hier, le député a posé une question concernant un problème administratif au sein du ministère. Aujourd'hui, il a changé de rengaine.
Il fait de la politicaillerie sur le dos des gens. Il n'est pas venu me rencontrer. À titre de député, il a le droit de connaître tous les faits relatifs à cette affaire. Il ne m'a pas posé une seule question en privé, alors qu'il l'a fait en d'autres occasions.
Je lui répondrai qu'il est très difficile de dire à des gens qu'ils doivent quitter le Canada. C'est encore plus difficile de le faire lorsque, de manière injustifiée, des députés jouent pour la galerie à la Chambre.
* * *
LA DÉFENSE NATIONALE
M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Monsieur le Président, le MDN vient de modifier son processus d'adjudication des contrats et il pourra ainsi éviter de faire des appels d'offre et se soustraire à la transparence et à l'obligation de rendre compte que les Canadiens sont en droit d'attendre.
En fait, le dernier appel d'offres visant à rapatrier nos soldats de l'Érythrée a été envoyé en Europe bien avant que les entreprises canadiennes n'en soient informées. Pourquoi le ministre a-t-il changé le processus d'adjudication des contrats au profit d'une entreprise?
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, il est ici question de l'octroi d'un contrat privé devant permettre le transport maritime de notre matériel et son rapatriement chez nous. Comme la Chambre le sait, nous avons eu des problèmes avec un navire l'an dernier et nous avons donc modifié notre processus et resserré nos exigences.
Ainsi, nous avons adjugé le marché à une entreprise qui est la seule à avoir les connaissances spécialisées nécessaires pour respecter les nouvelles conditions. Nous avons donc attribué le marché à cette entreprise qui, à son tour, nous fournira une liste des différents navires qui sont disponibles et parmi lesquels le ministère fera son choix.
Nous estimons que c'est là la meilleure façon de protéger les intérêts des Canadiens et d'épargner l'argent des contribuables.
* * *
LE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES
M. John Williams (St. Albert, Alliance canadienne): Monsieur le Président, en juillet dernier, la ministre du Développement des ressources humaines a affirmé qu'aucune prime ne serait versée aux cadres de son ministère pour réparer le gâchis d'un million de dollars. Qu'est-ce qu'on constate?
On constate que 226 cadres du ministère ont reçu 685 000 $ au total en primes de rendement pour avoir atteint leurs principaux objectifs de rendement. Pourquoi versons-nous des primes de rendement à des cadres qui doivent réparer leurs erreurs?
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, les hommes et les femmes du ministère du Développement des ressources humaines méritent des louanges pour le travail qu'ils ont accompli au cours de la dernière année en vue d'améliorer la gestion des subventions et des contributions.
Le vérificateur général a dit que le ministère avait tout fait pour relever cet important défi. Nous continuerons de nous assurer que la gestion des subventions et des contributions se fasse de façon tout à fait correcte.
* * *
LE CONSEIL DU TRÉSOR
M. John Williams (St. Albert, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est plus que des louanges, c'est tout simplement leur donner de l'argent.
La prime de rendement devait être versée aux hauts fonctionnaires pour un rendement supérieur. Aujourd'hui, on nous dit qu'à peu près tous les cadres du gouvernement y ont droit. C'est tout simplement une autre façon de leur accorder une augmentation de salaire.
Ma question s'adresse au président du Conseil du Trésor. Est-ce que les critères d'approbation des primes de rendement sont si peu exigeants maintenant que mêmes les cadres incompétents ont droit à une augmentation?
[Français]
L'hon. Lucienne Robillard (présidente du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, le paiement de performance n'est pas un paiement automatique accordé à l'ensemble des hauts fonctionnaires.
C'est une nouvelle façon de rémunérer les hauts fonctionnaires quand ils ont des objectifs très précis à rencontrer. C'est maintenant une nouvelle approche qui est utilisée dans la rémunération des hauts fonctionnaires.
Même dans le Rapport Strong, on disait qu'il était prématuré de poser un jugement présentement sur l'application, parce qu'on commence à le faire. L'année prochaine, ou l'année suivante, on sera en mesure de savoir si exactement les objectifs sont rencontrés.
* * *
LES CONGÉS PARENTAUX
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, l'article 69 de la Loi sur l'assurance-emploi prévoit que lorsqu'une province désire offrir un programme plus complet que ce qui existe déjà, le gouvernement fédéral s'engage à transférer les sommes nécessaires.
Pourquoi faut-il encore nous battre avec le gouvernement fédéral pour obtenir ce qui nous appartient de droit, alors que la Loi sur l'assurance-emploi prévoit le transfert d'argent vers les gouvernements provinciaux et que les Québécois et Québécoises veulent se donner un véritable programme de congé parental?
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, j'ai eu le plaisir de discuter de ce sujet en comité la semaine dernière. J'ai également eu l'occasion d'en discuter avec ma collègue de Québec, Mme Goupil, plus tôt cette semaine.
Comme je l'ai affirmé, notre priorité est de mettre en place un programme qui répondra aux besoins de tous les Canadiens, y compris les Québécois.
Nous offrons, depuis le 31 décembre dernier, des congés parentaux pour un an et nous l'avons fait sans frais additionnels pour les Canadiens.
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, le programme de congé parental que le gouvernement du Québec veut mettre en place est également appuyé par le chef de l'opposition officielle à l'Assemblée nationale du Québec, M. Jean Charest, et je le cite: «Le gouvernement fédéral doit négocier avec celui du Québec.»
Est-ce que, oui ou non, le gouvernement fédéral va accepter de s'asseoir et de négocier avec le gouvernement du Québec avant qu'il ne mette le programme sur pied, étant donné que c'est le bien des jeunes familles qui est en cause?
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, rien n'empêche le gouvernement du Québec de bonifier notre programme, s'il le veut.
* * *
[Traduction]
LA COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Alliance canadienne): Monsieur le Président, un rapport interne nous apprend que le chaos s'est installé au sein de la Commission canadienne des droits de la personne, dont 40 p. 100 des membres viennent de démissionner et un autre 37 p. 100 s'apprêteraient à le faire à leur tour. Même John Hucker, le numéro deux à la commission, a déclaré que celle-ci ne pouvait plus continuer comme cela.
Je demande à la ministre responsable d'expliquer pourquoi les hauts dirigeants de la Commission canadienne des droits de la personne reçoivent des primes de rendement pour un rendement aussi déplorable.
M. John Maloney (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, nous prenons très au sérieux la question des droits de la personne. La Commission canadienne des droits de la personne a reconnu qu'elle avait un problème de gestion et je la félicite d'avoir entrepris un sondage interne afin de corriger les erreurs qui auraient été commises.
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Alliance canadienne): Pendant ce temps-là, monsieur le Président, la présidente de la commission se promène en Asie du Sud-Est. On se demande donc pourquoi la direction de la commission se voit récompensée pour un rendement aussi navrant.
Mon autre question est pour la ministre responsable. Est-ce que ce sont ces niveaux de rendement que les membres de la direction doivent atteindre pour recevoir une prime au rendement?
M. John Maloney (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement a chargé en 1999 un groupe d'experts, sous la direction de l'honorable Gérard La Forest, d'examiner la Loi canadienne sur les droits de la personne, ainsi que les mandats de la commission et du tribunal des droits de la personne.
Le groupe a présenté des recommandations importantes concernant ces différentes questions, recommandations que nous sommes en train d'étudier.
* * *
LA SÉCURITÉ NAUTIQUE
Mme Aileen Carroll (Barrie—Simcoe—Bradford, Lib.): Monsieur le Président, le long week-end de la fête de Victoria est arrivé. C'est la période où, traditionnellement, les Canadiens vont au lac et ouvrent leur chalet. C'est aussi le début de la Semaine de la sécurité nautique et le temps de rappeler aux Canadiens d'être prudents cet été.
Le ministre des Pêches et Océans peut-il nous dire quelles mesures il a prises pour assurer la sécurité de nos eaux navigables cet été?
L'hon. Herb Dhaliwal (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, je remercie la députée de sa question. Comme les députés le savent, cette semaine est celle de la sécurité nautique, qui dure du 19 au 25 mai. Il est extrêmement important de sensibiliser les Canadiens à la sécurité nautique. La Garde côtière et ses partenaires dans tout le pays s'emploient à le faire.
L'an dernier, nous avons introduit un test de navigation que nous demandons à tous les plaisanciers de passer. Ce test permet de prévenir chaque année un grand nombre d'accidents sur les lacs et les rivières. Nous demandons aux Canadiens de prendre part à la Semaine de la sécurité nautique.
* * *
LES AFFAIRES AUTOCHTONES
M. Reed Elley (Nanaïmo—Cowichan, Alliance canadienne): Monsieur le Président, les bureaux de trois bandes indiennes de l'ouest du Canada ont déjà été occupés cette semaine par des autochtones de la base. Les bureaux de la bande de Sagkeeng au Manitoba, de la bande de Tsuu T'ina en Alberta et de la bande de Penticton en Colombie-Britannique ont tous été occupés par des membres de bande frustrés.
Le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien peut-il nous dire pourquoi des événements de ce genre se produisent sous son nez?
L'hon. Robert Nault (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, il est bien évident que, au Canada, tout groupe de personnes peut faire valoir son point de vue en tenant une manifestation. Il en a parfaitement le droit et c'est parfaitement normal en démocratie.
M. Reed Elley (Nanaïmo—Cowichan, Alliance canadienne): Monsieur le Président, cette réponse montre bien que le ministre ne sait absolument rien de ce qui se passe dans son ministère. Je vais lui dire de quoi se plaignent ces autochtones.
Ils se plaignent de la situation sociale dans les réserves où des logements inhabitables, des taux de chômage faramineux, le manque de bons soins médicaux et une très piètre gestion financière leur gâchent tout simplement la vie.
Qu'entend faire le ministre des Affaires indiennes pour résoudre ces problèmes et aider les autochtones du Canada à avoir un certain avenir dans notre pays?
L'hon. Robert Nault (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, si le député se tenait au courant, il saurait que notre ministère s'est lancé l'an dernier dans une entreprise de développement économique. En collaboration avec nos partenaires des provinces, du secteur privé et des premières nations, nous cherchons à développer une économie autochtone.
La meilleure façon de supprimer la pauvreté, c'est de trouver des emplois aux gens. Tel est notre mandat. C'est ce que nous nous efforçons de faire ensemble.
* * *
[Français]
LES JEUNES CONTREVENANTS
Mme Caroline St-Hilaire (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, notre collègue de Berthier—Montcalm fait actuellement une tournée au Québec sur le projet de loi sur les jeunes contrevenants.
De façon unanime, les gens sont scandalisés de voir qu'il en coûtera plus cher au Québec pour appliquer une loi dont personne ne veut et qui, en plus, ne tient nullement compte de ses choix de société dans le traitement de la délinquance.
Est-ce que la ministre de la Justice ne trouve pas absurde que le Québec soit obligé de se battre contre le gouvernement fédéral pour conserver une loi qui fait l'unanimité dans la population québécoise et qu'en plus, il soit obligé de payer davantage pour une loi dont personne ne veut?
[Traduction]
M. John Maloney (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, il est certain que la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents sera assortie de crédits pour le Québec. Un montant global de 206 millions de dollars sera consacré à l'étape du lancement. En outre, un milliard de dollars environ sera distribué aux provinces.
Au cours des cinq prochaines années, le Québec recevra environ 191 millions de dollars aux fins de la mise en oeuvre et du soutien de ses services de justice pénale pour les adolescents.
* * *
LA JUSTICE
M. Stephen Owen (Vancouver Quadra, Lib.): Monsieur le Président, j'ai une autre question à poser au secrétaire parlementaire de la ministre de la Justice. Nous savons tous que le taux de criminalité pour la plupart des catégories de crime a baissé régulièrement dans la majorité des régions du pays au cours des dix dernières années. Pourtant, les criminels frappent chaque jour et font de nouvelles victimes.
Est-ce que le secrétaire parlementaire peut nous expliquer ce que le gouvernement fait afin de prévenir et de réduire davantage la criminalité dans nos collectivités?
M. John Maloney (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le taux de criminalité diminue au Canada, mais le coût de chaque crime est trop élevé. C'est pour cela que le gouvernement libéral a lancé la stratégie nationale de prévention du crime. Cette stratégie a soutenu plus de 1 600 projets d'un bout à l'autre du pays.
La ministre de la Justice annoncera aujourd'hui dans la région de Niagara, d'où je viens, le dégagement de crédits pour 156 autres projets en Ontario. Ces projets, qui s'attachent à la cause fondamentale de la criminalité, fourniront des solutions locales à des problèmes locaux.
La stratégie nationale témoigne de l'engagement primordial du gouvernement libéral à l'égard de la prévention de la criminalité.
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne): Monsieur le Président, nous avons un autre projet pour le ministre. Le solliciteur général a dit à la Chambre qu'un registre national des délinquants sexuels était une question de compétence provinciale.
Or, le commissaire de la GRC et maintenant, la ministre de la Justice ont reconnu que le gouvernement fédéral devait agir. Le solliciteur général va-t-il présenter le projet de loi fédéral nécessaire pour protéger tous les Canadiens contre les prédateurs sexuels, peu importe où ils vivent dans notre merveilleux pays?
L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, ce que j'ai dit, c'est que nous avons offert de laisser les provinces inscrire les adresses de tout délinquant dans le Centre d'information de la police canadienne.
Nous avons eu des entretiens avec les ministres provinciaux et territoriaux. Certaines provinces ont dit vouloir mettre sur pied un registre. Les ministres provinciaux de la Justice reconnaissent que nous devrions évaluer la situation, pour éviter le double emploi et le gaspillage d'argent et pour être certains que nous faisons ce qui s'impose.
Cependant, nous avons l'un des meilleurs systèmes du monde, qui fait l'envie de tous les corps policiers de la planète.
* * *
L'INDUSTRIE MINIÈRE
M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, jamais dans l'histoire du pays un gouvernement fédéral n'a eu autant de mépris pour les gens du Cap-Breton que nos-à-vis.
La journée d'hier va être un jour de deuil pour les gens du Cap-Breton. Le ministre des Ressources naturelles devrait démissionner aujourd'hui pour la façon dont il traite ces gens, en détruisant les espoirs et les aspirations de 440 mineurs et de leurs familles.
Ma question s'adresse au gouvernement. Pourquoi avez-vous autant de mépris pour les gens du Cap-Breton après toutes les promesses que vous leur avez faites au cours des dernières élections lorsque vous leur avez dit que s'ils vous élisaient, vous vous occuperiez...
Le Président: Le député doit s'adresser à la présidence.
L'hon. Ralph Goodale (ministre des Ressources naturelles et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.): Monsieur le Président, le député ne devrait pas se fier à son collègue néo-démocrate, M. Corbett, pour ce qui est des faits, car il sera dans l'erreur à tout coup.
Nous avons invité la Devco à négocier avec le syndicat un programme d'indemnisation approprié pour les travailleurs. De plus, nous avons ajouté 28 millions de dollars au Fonds de développement économique et nous avons donc versé au total 108 millions de dollars pour défendre le Cap-Breton, quoiqu'en dise le NPD.
* * *
PRÉSENCE À LA TRIBUNE
Le Président: Je signale aux députés la présence à notre tribune de l'honorable Sue Edelman, ministre du Tourisme du gouvernement du Yukon.
Des voix: Bravo!
* * *
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je voudrais adresser la question habituelle du jeudi au leader adjoint du gouvernement à la Chambre. Le leader aurait-il l'obligeance de dire à la Chambre quels sont les travaux prévus pour le reste de la semaine et la semaine suivante, c'est-à-dire au retour de la semaine de relâche bien méritée au cours de laquelle nous pourrons rentrer dans nos circonscriptions et passer un peu de temps avec nos électeurs.
À quoi pouvons-nous nous attendre à notre retour, lorsque nous aurons la chance de nous pencher sur le rapport de la commission sur les services et le salaire que nous devrions recevoir sous peu? Pouvez-vous nous dire quels travaux nous attendront?
[Français]
L'hon. Alfonso Gagliano (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, nous continuerons cet après-midi le débat sur la motion de l'opposition.
Demain, nous entamerons la deuxième lecture du projet de loi S-24, la loi sur Kanesatake et ensuite, nous retournerons à l'étude du projet de loi C-27, la Loi sur les déchets de combustible nucléaire.
[Traduction]
Lorsque nous reviendrons, le 28 mai, nous terminerons l'étude du projet de loi C-7, c'est-à-dire le projet de loi concernant le système de justice pénale pour les adolescents. Je discuterai avec les députés d'en face de la possibilité de mettre un terme à ce débat. Si nous en avons le temps, nous pourrons aussi nous pencher sur le projet de loi C-27 au besoin, et sur le projet C-19, sur l'environnement.
Vers le milieu de la semaine, nous espérons être en mesure d'amorcer l'étude à l'étape du rapport du projet de loi C-11 qui porte sur l'immigration.
Le jeudi 31 mai sera une journée de l'opposition.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, j'interviens sur la question du jeudi. J'aimerais profiter de cette occasion pour faire savoir à la Chambre, et en particulier au chef de l'opposition, que notre parti aimerait que le leader de l'opposition ait recours aux pouvoirs qui lui sont conférés en vertu de l'article 81(4)(a) du Règlement pour poursuivre l'étude en comité du budget principal du ministère de l'Industrie.
Des réponses devront être fournies à la Chambre sur d'importantes questions avant que ce budget puisse être adopté. Nous devons prendre des mesures pour faciliter cette étude et cela n'a pas toujours été le cas par le passé. Si le chef de l'opposition n'est pas prêt à désigner un ministère, il y a d'autres députés, particulièrement au sein de notre parti, qui sont prêts à le faire.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LES CRÉDITS
JOUR DÉSIGNÉ—LES DROGUES
La Chambre reprend l'étude de la motion et de l'amendement.
M. Lynn Myers (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, comme je le faisais remarquer avant la période des questions, le gouvernement du Canada fait surtout porter ses efforts de répression pénale contre les fournisseurs de drogues et les narcotrafiquants de grande envergure plutôt que contre les simples consommateurs. Cela est conforme à la priorité du gouvernement en matière de répression pénale contre le crime organisé.
Les groupes criminels organisés contrôlent une très forte proportion du commerce de la drogue au Canada. Ce commerce constitue par ailleurs une importante source de profits pour ces groupes. Au fil des dernières années, le gouvernement a pris des mesures pour combattre le crime organisé. Je vais exposer certaines des mesures que nous avons prises dans ce domaine très important.
Le gouvernement a prévu de fortes augmentations du budget de la GRC pour l'année 2000-2001 afin de soutenir ses efforts dans la lutte contre le crime organisé et la répression pénale à cet égard. Nous avons également créé 13 unités mixtes des produits de la criminalité qui sont à l'oeuvre d'un bout à l'autre du pays pour enlever aux groupes criminels leurs profits et leurs propriétés.
Nous avons également apporté des modifications à la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition pour veiller à ce que les gens trouvés coupables d'infractions liées au crime organisé ne soient plus admissibles à la procédure d'examen expéditif en vue de la libération conditionnelle. De plus, une nouvelle loi sur le blanchiment d'argent a créé des mesures prévoyant le signalement des transactions financières suspectes et les mouvements transfrontaliers de gros montants en devises. Des modifications apportées en 1997 au Code criminel s'attaquent précisément aux infractions liées aux organisations criminelles. Ces mesures contre le crime organisé seront renforcées par le projet de loi C-24 dont la Chambre est déjà saisie.
Ce sont là des exemples des mesures que le gouvernement du Canada a prises dans le passé et qu'il continuera d'adopter dans le cadre d'efforts mesurés. Nous savons que c'est un très grave problème.
Nous reconnaissons qu'en dépit de ces efforts, il sera probablement impossible d'éviter complètement tout trafic de drogues au Canada. L'élimination complète du trafic serait l'idéal, mais c'est fort improbable et irréaliste. Néanmoins, l'application de la loi peut nous aider à éviter que les efforts en matière de prévention, de traitement et de réadaptation ne deviennent inutiles dans un contexte d'accès libre à des drogues illicites.
Nous reconnaissons aussi que l'on peut en faire plus en ce qui concerne la Stratégie canadienne antidrogue. Le moment est mal choisi pour le Canada de se réjouir de ses réalisations, aussi nombreuses qu'elles puissent être; c'est plutôt le temps d'adopter d'autres mesures afin de faire fond sur les acquis.
Les pays de toute la planète sont aux prises avec les problèmes liés à la toxicomanie. Le Canada, malheureusement, ne fait pas exception à la règle. Le gouvernement est clairement acquis à l'idée de lutter contre le problème et d'adopter d'autres mesures. À cet égard, il convient parfaitement que nous analysions les problèmes liés à la toxicomanie.
Je n'hésite donc pas à appuyer la motion. Elle représente le genre d'idée progressiste dont nous avons besoin comme gouvernement ainsi que de tous les côtés de la Chambre pour prévenir le genre de situation ayant présentement cours à cet égard.
Au nom des électeurs de ma circonscription et de tous les Canadiens, nous devons faire front commun dans ce très important dossier. Il nous incombe à tous d'unir nos efforts afin de chercher à déterminer s'il y a des solutions. Ce faisant, nous devons nous rappeler que les mots traitement, prévention et réadaptation sont des mots clé dans ce contexte. En particulier lorsqu'il s'agit de nos jeunes, peu importe l'endroit où ils vivent dans ce grand pays, je pense que les Canadiens veulent que nous les empêchions d'emprunter cette voie car, en dernière analyse, elle ne mène qu'à des problèmes.
Je peux dire par expérience personnelle que tous les Canadiens reconnaissent le problème. Nous en sommes certes conscient comme gouvernement. Nous devons travailler de façon efficiente et efficace afin de veiller à ce que les mesures que nous adoptons dans cet important domaine produisent en bout de piste des résultats. À mon avis, cela va dans le sens des grandes valeurs du pays et des Canadiens.
La motion arrive à point nommé. Selon moi, c'est une motion que nous pouvons appuyer et que nous appuierons comme gouvernement. Elle mérite d'être prise en bonne note par tous les Canadiens.
Mme Sophia Leung (Vancouver Kingsway, Lib.): Monsieur le Président, je profite de l'occasion pour appuyer cette importante initiative de mon collègue. L'Agence des douanes et du revenu du Canada a notamment pour mission d'empêcher la drogue d'atteindre la rue et de nuire à nos enfants. L'ADRC prend manifestement au sérieux son rôle de protection des frontières canadiennes. Personnellement, je suis fier de son travail. C'est une lutte de tous les instants que de vouloir protéger les Canadiens des effets néfastes des drogues illicites. L'Agence des douanes et du revenu du Canada, à mon avis, a fait ses preuves et montré qu'elle était à la hauteur du combat à mener.
Le crime n'a pas de frontières pour les trafiquants de drogues. Comme Canadienne, je suis à la fois réconfortée et rassurée par la présence à nos frontières d'hommes et de femmes d'un dévouement exemplaire qui redoublent d'efforts pour empêcher l'entrée au pays de drogues illégales néfastes. Jour et nuit, quelque 3 500 douaniers travaillent vaillamment pour empêcher l'entrée au pays de marchandises illégales et de personnes inadmissibles. Nos douaniers sont aux premières lignes de la lutte contre l'entrée de drogues illégales au Canada et ils font un travail remarquable.
Je vais donner quelques statistiques. L'an dernier, c'est à près de 900 millions de dollars que s'élevait la valeur des drogues illégales saisies à la frontière par nos douaniers. C'est donc quelque 900 millions de dollars de drogue qui n'a pas atteint la rue, nos écoles et nos enfants. Nous avons trouvé de la drogue à des endroits pour le moins inusités. Les douaniers ont trouvé de la drogue cachée dans des cargaisons de poissons, dans des souliers, dans des statues, dans des machines, dans des cadres, dans des jouets et même dans des ananas.
Comment l'ADRC s'y est-elle prise pour saisir près de 900 millions de dollars de drogues illégales? Elle utilise divers moyens pour empêcher l'entrée des drogues illégales au Canada. Avec le matériel à sa disposition, elle peut détecter la drogue cachée dans divers types de substances tels le plastique, le café et les vêtements. L'utilisation de chiens détecteurs et de matériel de détection permet aux douaniers d'effectuer des inspections discrètes et efficaces et permet à l'ADRC de concentrer ses efforts sur les personnes et les marchandises à risque élevé.
Au cours des dernières années, l'ADRC a investi près de 12 millions de dollars dans la technologie de la détection de la contrebande utilisée aux divers points d'entrée au Canada. Du matériel comme les «Ionscans», les trousses de détection de contrebande, les télémètres laser et l'équipement de vision de nuit permet aux douaniers de détecter de la drogue dans des vêtements, des bagages, des véhicules et des conteneurs maritimes.
Il ne faut surtout pas oublier les chiens détecteurs. L'an dernier, plus de 1 000 saisies d'armes et de drogues ont pu être faites grâce aux 40 équipes canines réparties aux points stratégiques du pays. Les chiens détecteurs jouent depuis 22 ans un rôle de premier plan pour empêcher l'entrée de stupéfiants au Canada et aider l'ADRC à respecter son engagement d'accroître l'efficience et l'efficacité de ses initiatives anticontrebande.
L'ADRC a établi des partenariats importants avec d'autres organismes d'application de la loi pour empêcher l'entrée des marchandises illégales au Canada. En unissant leurs efforts, la GRC et l'ADRC ont fait échouer de nombreux stratagèmes ingénieux pour faire passer de la drogue en contrebande. Cette semaine encore, grâce à une coopération interministérielle, il y a eu une saisie de 179 kilos de cocaïne ayant une valeur de revente de 17 millions de dollars. Voilà un bel exemple de la collaboration dont les organismes d'application de la loi font preuve pour combattre la criminalité.
De tels partenariats s'étendent à l'échelle internationale. Dans le cadre de l'Organisation mondiale des douanes, de l'Accord du Canada et des États-Unis sur leur frontière commune, de la Conférence douanière inter-Caraïbes et du Forum canado-américain sur la criminalité transfrontalière, le présent gouvernement contribue concrètement à la protection des Canadiens.
De plus, l'ADRC collabore étroitement avec le secteur privé dans la lutte contre le trafic de stupéfiants.
Le programme des Partenaires en protection est un partenariat bilatéral en vertu duquel l'ADRC et une société de transport maritime ou une société commerciale signent un protocole d'entente précisant les modes de collaboration pour empêcher les activités illégales. L'ADRC donne des conseils sur la façon de détecter une activité illégale et l'importateur, en contrepartie, communique à l'agence les renseignements qu'il possède sur l'activité en question. C'est avec joie que je constate les relations proactives établies par l'ADRC avec ces sociétés.
Empêcher l'entrée de drogues illégales au Canada ne constitue qu'un des nombreux moyens par lesquels ces initiatives communes rendent nos collectivités plus sûres. Une collectivité plus sûre est une collectivité plus saine et plus prospère.
Ces partenariats permettent à l'ADRC de remplir sa mission de protection de la frontière. Ils montrent que le gouvernement a à coeur d'améliorer la qualité de vie de tous les Canadiens.
En conclusion, dans le cadre de nos efforts pour créer une société saine, il est essentiel d'arrêter la propagation de la drogue au Canada. Comme l'expérience l'a démontré, le problème de la drogue est vraiment pris au sérieux par l'ADRC et le gouvernement.
L'ADRC est résolue à appliquer les lois canadiennes à la frontière, à empêcher l'entrée de drogues illégales au Canada et à protéger les citoyens de notre pays.
M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec le député le Nanaïmo—Cowichan.
Je suis ravi de prendre part au débat sur la motion de l'Alliance canadienne, le parti de l'opposition officielle du Canada.
L'année dernière, j'ai demandé à accompagner la police de Vancouver pour voir de mes propres yeux les quartiers infestés par la drogue dans l'est de la ville. J'ai accompagné une patrouille de nuit pendant quelques heures jusqu'à ce que je ne puisse plus supporter le spectacle et je suis rentré chez moi. J'ai vécu ce jour-là une expérience effroyable et terriblement choquante.
Beaucoup de jeunes et de gens âgés s'injectaient de la drogue dans de sombres ruelles jonchées de seringues et de préservatifs. Les hôtels et les dortoirs dénués de l'hygiène la plus élémentaire étaient peuplés de toxicomanes assis ou couchés à même le sol.
Des soi-disant réfugiés âgés d'une vingtaine d'années, originaires pour la plupart du Honduras, y vendaient de l'héroïne et de la cocaïne. Presque tous avaient sur eux, en argent liquide, l'équivalent d'environ 200 $ en diverses coupures, leur carte d'identité de réfugié et la carte d'affaire d'un seul et même avocat. Ils portaient des vêtements de marque et des bijoux et avaient une mini chaîne stéréophonique.
Dès qu'ils apercevaient les voitures de police et les policiers en civil, ils donnaient des coups de sifflet pour prévenir leurs camarades. Dès que les policiers les ont arrêtés, ils ont tiré la langue, étendu les bras et les mains, et se sont préparés à une inspection.
Certains ont tenté d'avaler les drogues qu'ils avaient enveloppées dans du plastique. Beaucoup ont essayé de sauter dans l'aérotrain pour s'enfuir et vendre des drogues ailleurs. Leurs fournisseurs étaient cachés dans des restaurants situés près de là. Dans le secteur où l'on vend des drogues illicites, il y a des bureaux de prêteurs sur gage où les toxicomanes peuvent facilement vendre, entre autres, des articles comme des téléviseurs, des chaînes stéréo et des ordinateurs. Les cours arrière des restaurants et d'autres établissements ainsi que les ruelles sont comme des supermarchés pour ces toxicomanes.
Le gouvernement et la collectivité font preuve d'une négligence totale. C'était la loi de la jungle à Vancouver. Les trois niveaux de gouvernement ont trop parlé et trop mené d'études. Ils ont parlé sans agir, et sans élaborer de plans efficaces. L'avenir paraît sombre pour ces gens. C'est déplorable. Ce n'est certes pas le Canada dont j'avais rêvé avant d'immigrer.
J'ai également visité le port de Vancouver, où il n'existe aucune mesure de contrôle efficace contre les drogues. On n'arrive même pas à minimiser les importations de drogues, encore moins à les stopper. Moins de 3 p. 100 des conteneurs de marchandises qui arrivent au port sont inspectés. On trouve des drogues dans bon nombre de ceux qui sont examinés. Le gouvernement a supprimé le service de police du port de Vancouver. Il aurait dû renforcer et soutenir ce service à l'aide d'agents de la garde côtière et d'autres organismes d'application de la loi, mais il a choisi de l'abandonner.
Il n'est guère étonnant que le Lower Mainland de la Colombie-Britannique ait le taux d'échange de seringues le plus élevé en Amérique du Nord. Nos organismes d'application de la loi sont dépouillés des ressources destinées à lutter contre les drogues illicites et le crime. Nos lois n'ont aucun mordant. Le gouvernement n'a aucune vision, aucun plan, aucune priorité établie et aucun point de convergence. Des drogues illicites sont même accessibles dans nos prisons d'État, où les criminels sont censés être punis, et non se divertir.
J'ai visité des écoles dans ma circonscription. Les étudiants me disent qu'ils peuvent acheter de la drogue en moins de temps qu'il n'en faut pour faire livrer une pizza. Dans un sondage effectué en 1999, 53 p. 100 des étudiants déclaraient qu'il était facile ou très facile de se procurer du cannabis. Ce pourcentage avait presque doublé depuis 1981, alors qu'il n'était que de 28 p. 100. Dans le sondage de 1999, 36 p. 100 des étudiants ont répondu que quelqu'un avait tenté de leur vendre de la drogue au cours de l'année qui s'était écoulée et 32 p. 100 ont affirmé avoir vu quelqu'un vendre de la drogue à l'école.
Il n'est pas étonnant que le Parti marijuana ait récolté 3,5 p. 100 des voix aux élections d'hier soir en Colombie-Britannique. Ce parti a recueilli l'appui de quelque 100 000 électeurs. C'est très révélateur. Les plantations de marijuana pullulent. Il s'agit d'une activité très lucrative. La marijuana est échangée à poids égal contre de l'héroïne au sud de la frontière.
Les bandes de motards étendent leurs activités. D'autres membres de groupes criminalisés prospèrent. Ils ont des maisons luxueuses, des voitures, des bateaux, des avions, du matériel et des appareils à la fine pointe de la technologie. Le gouvernement leur délivre des passeports. Au lieu de passer du temps en prison, ces individus partent en croisière et en vacances dans des lieux exotiques. Les simples contribuables, eux, ont beaucoup de difficulté à en faire autant.
Les produits de la criminalité empochés par les trafiquants de drogues et les membres de groupes criminels organisés ne leur sont pas confisqués, parce que nous n'avons pas de loi qui ait assez de mordant pour pouvoir le faire. L'appât du gain motive les criminels, mais aucune peine suffisamment lourde ne les dissuade.
J'ai eu l'occasion de visiter, à Surrey, deux cliniques de désintoxication qui sont administrées professionnellement par le docteur Anna-Marie Maguire. Le nombre élevé de patients que j'y ai vus m'a déçu, mais le nombre de cas couronnés de réussites m'a encouragé. Un patient m'a dit qu'il avait pris de la drogue pendant 15 ans, que pendant tout ce temps il n'était jamais allé chez lui pour voir sa famille, mais que le traitement l'avait complètement changé. Il a rencontré sa fille pour la première fois en 15 ans. Cet homme avait des larmes de regret et de joie dans les yeux en me faisant ce récit.
Une autre personne avait pris de la drogue pendant de nombreuses années et avait volé leurs bourses à des femmes et des appareils stéréos dans des véhicules pour pouvoir se procurer sa coûteuse drogue. Il s'était lui aussi repenti et complètement transformé.
À ma surprise, la ville de Surrey s'est montrée peu disposée à renouveler les permis d'exploitation des cliniques. Je n'ai pas remarqué d'appui pour les cliniques de la part de la collectivité ou de tout autre ordre de gouvernement. Je comprends qu'il peut y avoir des problèmes, mais il doit y avoir une solution également. On ne doit pas faire fi de la gravité de la question.
Le programme Bon départ va permettre la détection précoce des enfants qui sont susceptibles d'abuser des drogues et de l'alcool et même d'avoir d'autres comportements anti-sociaux. Ce programme peut offrir un traitement plus efficace. Après l'adoption à l'unanimité d'une motion à la Chambre, le gouvernement libéral n'a pris aucune mesure. Il manque de vision et de volonté politique.
Il faudrait affecter plus de ressources à la détection des drogues autres que l'alcool qui entraînent aussi la conduite avec facultés affaiblies. Les ivressomètres peuvent très bien montrer que la personne en cause n'a pas consommé d'alcool, mais le conducteur pourrait très bien être sous l'influence de drogues illicites.
Les drogues illicites sont non seulement non réglementées mais également létales, dans bien des cas. La pureté croissante de l'héroïne et d'autres drogues entraînent des morts. À Vancouver, il y a, en moyenne, 147 décès par année attribuables à des surdoses de drogues illicites.
En 1998, l'objectif à long terme de la Stratégie canadienne antidrogue était de réduire les torts causés par l'alcool et d'autres drogues aux particuliers, aux familles et aux collectivités. La stratégie part du principe qu'il est impossible de faire disparaître le problème, et que nous devons simplement apprendre à vivre avec ce dernier.
Dans toute stratégie, il est toujours question de limitation des dégâts, de réduction des préjudices, de traitement, d'intervention, d'échanges de seringues, ainsi de suite, mais jamais de mesures préventives. La solution consiste pour nous à empêcher que des drogues illicites soient fabriquées et importées au Canada. Nous devons protéger nos frontières. Nous avons besoin d'inspections régulières à nos frontières et dans nos ports. Il faut que la Garde côtière, les avions de surveillance, les autorités portuaires, les corps policiers locaux et d'autres organisations unissent leurs efforts et puissent compter sur les outils et les ressources nécessaires.
Il faut mettre en place une stratégie nationale antidrogue fondée sur un partenariat entre les gouvernements fédéral, provinciaux et municipaux qui serait appliquée au niveau communautaire pour réduire l'usage des drogues.
Il faut infiltrer les bandes et les organisations criminelles. La GRC et les autres organismes d'application de la loi ont du mal à obtenir la permission d'utiliser l'écoute électronique et d'autres moyens de surveillance. Il faut environ 1 500 pages de demandes pour obtenir la permission de procéder à la surveillance d'un individu et cette surveillance est limitée à 90 jours. Il faut recommencer tout le processus après ce délai. L'enquête en souffre entre-temps.
Pendant le processus, il faudra contourner les codes, traduire les enregistrements de surveillance et faire d'autres interventions pour compléter les enquêtes. Nos organismes d'application de la loi ont besoin des outils de haute technologie. Toutefois, ce sont les criminels qui disposent des ressources financières et de la technologie de pointe alors que nos forces policières font de leur mieux pour entretenir une technologie qui date de 20 ans.
Le gain économique constitue la motivation des activités criminelles. L'argent et les biens provenant de ces activités devraient être confisqués et confiés aux organismes d'application de la loi pour lutter contre le crime. Il nous faut non seulement élaborer des lois plus musclées, mais aussi les mettre en application. La sanction doit correspondre au crime.
Cela permettrait de mettre en oeuvre des mesures de dissuasion efficaces au lieu d'encourager le crime au moyen des mesures législatives laxistes et des sentences trop légères qu'acceptent les libéraux. Nous voyons ici un gouvernement libéral qui ne montre aucune volonté de régler ces questions. Il manque de vision et est à la source du problème depuis bien des années.
Le temps est venu de constituer un comité chargé d'examiner ces questions pour que des mesures efficaces soient prises. Je suis heureux d'intervenir et j'ose espérer que tous les députés appuieront la motion allianciste de former un comité sur l'utilisation non médicale des drogues.
M. Reed Elley (Nanaïmo—Cowichan, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole sur la motion de l'opposition d'aujourd'hui. Je remercie d'abord mon collègue de Langley—Abbotsford d'avoir soulevé cette question à la Chambre.
La motion qui nous occupe est très grave et elle touche un problème très réel dans notre société. L'un des plus gros problèmes chez nos jeunes de nos jours est l'usage de drogues à des fins non médicales. Au cours des dernières années, la prévalence et le niveau d'accessibilité des drogues non médicales ont été incroyablement élevés. Les jeunes sont soumis à une pression énorme dans le monde d'aujourd'hui. La pression constante exercée par les pairs les incite à se conformer à la norme du milieu et à faire usage de drogues.
Des entreprises sont entièrement tributaires de l'usage de drogues à des fins non médicales. On peut citer des cas au Canada et à l'étranger. Ma province, la Colombie-Britannique, est réputée dans les milieux de la drogue pour sa soi-disant marihuana locale, ainsi que pour d'autres drogues non médicales.
Mes estimés collègues ont déjà fourni plusieurs statistiques concernant l'usage de drogues non médicales. En ma qualité de porte-parole de l'Alliance canadienne en matière d'affaires autochtones, je m'inquiète particulièrement des problèmes de toxicomanie chez les autochtones. Je vais vous présenter quelques statistiques qui n'ont pas encore été mentionnées dans le débat.
Dans son survol de 1999 de la situation au Canada, le Centre canadien de lutte contre l'alcoolisme et les autres toxicomanies indique que les Canadiens d'origine autochtone sont particulièrement vulnérables aux problèmes de toxicomanie. La majorité des jeunes autochtones courent de deux à six fois plus de risques d'avoir des problèmes d'alcool que les autres Canadiens. Les autochtones du Canada présentent des taux relativement élevés de consommation de drogues illicites.
J'invite les députés à réfléchir aux les chiffres qui suivent. Selon la Revue canadienne de santé publique, plus de 73 p. 100 des autochtones consomment de la marijuana, 37 p. 100 respirent de la colle, 6 p. 100 respirent des vapeurs de solvants, 5,5 p. 100 consomment de l'héroïne, près de 10 p. 100 consomment des amphétamines, 14 p. 100 prennent du LSD, près de 5 p. 100 prennent de la cocaïne et 8 p. 100 consomment du crack. Le plus troublant dans toutes ces statistiques est que ces taux sont dans certains cas jusqu'à quatre fois plus élevés que dans la population non autochtone. C'est totalement inacceptable.
Nos autochtones comptent parmi ceux qui sont les plus susceptibles de développer l'accoutumance aux stupéfiants, ce que les statistiques semblent confirmer. J'ai travaillé comme conseiller auprès d'autochtones et ma femme et moi sommes des parents adoptifs depuis plus de 25 ans. J'ai été témoin des dégâts que peuvent faire ces problèmes et ils sont cruels.
Il est ahurissant de voir des individus, des familles et parfois même des collectivités dévastés par la consommation et l'abus d'alcool et de stupéfiants. Cela ne devrait même pas exister, mais cela se produit malheureusement. Comme parlementaires et comme Canadiens, nous devons prendre de véritables mesures pour corriger la situation.
Comme je l'ai mentionné plus tôt, ma province est bien connue dans l'univers des drogues illicites. Malheureusement, le long de cette côte splendide et rocailleuse qui s'étend sur des milliers de milles, il y a une multitude d'anses et d'endroits isolés qui facilitent l'importation par voie maritime de drogues illicites.
L'isolement des îles du golfe et de nombreuses régions intérieures de la Colombie-Britannique favorise, outre la culture hydroponique, celle de la marihuana. La GRC cherche et trouve les endroits où s'effectuent ces activités, mais étant donné que ses ressources sont limitées, que le territoire est si vaste et que les méthodes utilisées sont très perfectionnées, on trouve et détruit seulement un faible pourcentage des drogues.
Nanaïmo est la plus grande ville de ma circonscription. De nombreux touristes la qualifient de grand centre urbain. Mais elle est également connue comme la capitale de l'héroïne au Canada. C'est un titre bien regrettable à donner à une si belle ville.
Mes collègues on parlé des problèmes que cause la toxicomanie dans le centre-ville est de Vancouver et ils avaient bien raison de le faire. Ce quartier connaît de graves problèmes. Je rappelle à la Chambre qu'il existe des problèmes tout aussi importants et dévastateurs dans des villes comme Nanaïmo et des milliers d'autres villes et municipalités partout au pays.
Nous connaissons tous la situation. Nous devrions commencer à agir. Jusqu'à maintenant, nos interventions n'ont pas été malavisées. Nous avions de bonnes intentions, cependant, nous ne semblons pas obtenir les résultats recherchés et nous assistons à une escalade, à une épidémie croissante d'utilisation de drogues illicites au pays.
Il y a bien d'autres conséquences au-delà de l'utilisation des drogues à des fins non médicales. Les drogues ne sont pas gratuites et les profits motivent les revendeurs, tant les petits revendeurs locaux que les grands joueurs internationaux sur la scène de la drogue. Une autre conséquence est que les toxicomanes s'adonnent à des crimes, grands et petits. Il y a aussi la prostitution, y compris celle des très jeunes. Je suis déchiré lorsque je vois des jeunes de 13 ou 14 ans prisonniers de la rue. Ce sont des enfants. Ils représentent notre avenir et leur vie est gaspillée à cause de la toxicomanie.
En 1996, le Centre canadien de lutte contre l'alcoolisme et les toxicomanies a évalué que l'impact des drogues illégales coûtait 1,37 milliard de dollars, soit 48 $ par habitant. Le coût le plus important, soit 823 millions de dollars, découle de la perte de productivité due à la maladie et au décès prématuré. L'application de la loi coûte la jolie somme de 400 millions de dollars. Les coûts de santé liés directement à l'utilisation de drogues illicites sont estimés à 88 millions de dollars. Il y a aussi le coût social des familles détruites par la mort, la maladie ou le retrait total de la société.
Combien de grands esprits en puissance le pays a-t-il perdus à cause de l'utilisation de drogues illicites ou non médicales? Peut-on se payer le luxe, sur le plan financier ou sur tout autre plan, de laisser se poursuivre cette misère humaine? Pouvons-nous en toute conscience ne rien faire et laisser ces problèmes se perpétuer? Je ne le crois pas.
Je crois que George Eliot avait bien raison quand elle a écrit:
L'échec après avoir persévéré longtemps est plus noble que de ne pas avoir fait des efforts suffisants pour qu'on puisse les qualifier d'échec.
Qu'il ne soit pas dit que nous avons échoué parce que nous n'avons pas essayé.
L'un des sujets qui ressort du débat d'aujourd'hui est l'utilisation de la marijuana à des fins médicales. Nous reconnaissons tous que c'est une question qui prête à controverse. Quand nous pensons à la marijuana, nous l'associons à des éléments criminels et au fait qu'elle mène souvent à la consommation d'autres drogues. C'est un fait que, personnellement, je ne réfute pas, mais je crois que la question de la recherche sur l'utilisation de la marijuana à des fins médicales, particulièrement sous des formes non fumables, dont les pilules et les inhalateurs, a sa place dans le présent débat. Par ailleurs, la marijuana devrait être traitée comme n'importe quelle autre drogue qui doit être approuvée et réglementée par les autorités canadiennes. Les conclusions de la recherche médicale tendent à démontrer que la marijuana peut être très bénéfique dans le cas de certaines maladies.
Nous devrions faire la différence entre l'utilisation de la marijuana à des fins médicales et son utilisation à des fins récréatives, ou illicite. Si elle présente des avantages sur le plan médical, nous ne devrions pas fermer la porte à ce genre de remède.
J'ai parlé plus tôt des bénéfices comme étant un facteur de motivation du monde de la drogue. D'un point de vue personnel, je pense que nous devons repenser la manière dont nous abordons le problème de la drogue. Les éléments criminels de notre société ne s'intéressent qu'à une chose, les bénéfices, pas juste des petits bénéfices, mais des bénéfices obscènes sans égard au gaspillage de vies humaines et aux souffrances incessantes qui y sont associées. En termes simplistes, si nous pouvions supprimer l'élément bénéfices, nous pourrions réduire, voire même éliminer de nombreuses formes d'utilisation des drogues à des fins non médicales.
Comment faire? Comment vendre sans bénéfices? Je n'ai pas de réponse et c'est pourquoi un comité de ce genre est nécessaire. Il pourra peut-être trouver une manière novatrice d'éliminer les profits comme moteur du scandale de la drogue.
C'est avec plaisir que je prends part au débat d'aujourd'hui. J'espère que la motion recevra l'appui des députés sans égard à leur appartenance politique et qu'elle aura pour résultat que l'on fasse enfin quelque chose au sujet du problème le plus urgent qui touche les jeunes d'aujourd'hui, à savoir la consommation de drogues illicites.
M. Grant Hill (Macleod, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je remercie mon collègue de son intervention. Il a parlé de l'utilisation médicale de la marijuana. Un point qui se discute, à ce propos-là, c'est le message que nous risquons d'envoyer aux jeunes. Ils pourraient se dire que, si la marijuana est acceptable pour des fins médicales, il serait peut-être bien qu'ils en fument pour le plaisir.
Comment mon collègue empêcherait-il que ces jeunes ne tirent de mauvaises conclusions de l'utilisation médicale de la marijuana?
M. Reed Elley: Monsieur le Président, notre société doit faire la distinction, surtout lorsque nous faisons des efforts de sensibilisation au problème des drogues auprès des jeunes.
Pour ma part, je ne crois pas qu'il devrait être légal au Canada de consommer de la marijuana pour le plaisir. Des études ont montré que la consommation constante de marijuana, surtout en grande quantité, a des conséquences sur le plan physiologique: manque de concentration ou lésions au cerveau qui risquent de priver la personne d'une grande partie de son efficacité.
Par contre, nous devons nous dire aussi, et c'est un principe de base, que tout ce qui a été créé a sa raison d'être et que c'est ainsi que le créateur l'a voulu. Nous devons tirer bénéfice de la marijuana à des fins médicales, mais il faut faire comprendre aux jeunes très clairement que l'utilisation constante de la marijuana pour le plaisir est très nocive.
M. Werner Schmidt (Kelowna, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis ravi que le député de Nanaïmo—Cowichan participe au débat, car il sait d'expérience ce que donne l'abus de drogues illégales.
Il faut demander aux gens d'expérience comme lui pourquoi ils s'intéressent tellement au présent débat. Ce n'est pas par hasard que nous parlons de charger un comité spécial d'étudier ce sujet. Le problème existe tout autour de nous. Je me demande si le député pourrait expliquer un peu plus en détail ce que nous pourrions faire pour vraiment changer quelque chose dans sa famille ou dans celle de ses amis à l'égard de l'utilisation des drogues illégales.
M. Reed Elley: Monsieur le Président, je remercie à nouveau mon collègue pour sa question. Il est vrai que, avant de devenir député, j'ai eu beaucoup affaire avec des toxicomanes. C'est un travail très prenant. Il s'agit d'approcher des gens qui vivent des situations critiques et de leur donner, avant tout, de bonnes raisons de vivre. Dans bien des cas, les gens ne veulent tout simplement pas vivre. Il faut leur donner une raison de vivre.
Il faut s'adresser à la personne dans toutes ses dimensions, physique, spirituelle et émotionnelle. J'ai beaucoup travaillé à aider des gens à trouver le moyen de ne pas dépendre d'une substance chimique pour avoir une raison de vivre.
En outre, en tant que parents nourriciers d'enfants autochtones, nous connaissons très bien le syndrome d'alcoolisme foetal et ce qui arrive à de petits êtres dont la mère a consommé beaucoup de boissons alcoolisées pendant la grossesse et qui, sans qu'ils y soient pour rien, sont marqués pour toujours.
Il faut trouver le moyen de changer les mentalités au premier niveau pour que les gens sachent que la vie vaut la peine d'être vécue. C'est souvent parce qu'ils n'y croient pas que les gens abusent des drogues.
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai suivi attentivement le débat et je félicite le député de Nanaïmo—Cowichan de ses propos éclairés.
À la fin, le député a parlé de la consommation de marijuana à des fins thérapeutiques, et je dois dire que c'est une partie infiniment petite de l'ensemble du problème. Dans l'ensemble du débat d'aujourd'hui, la marijuana est très peu prioritaire. Personnellement, je ne comprends même pas pourquoi cela crée une commotion. Quoi qu'il en soit, d'après nos lois actuelles, c'est une substance illégale. Attachons-nous plutôt à la situation globale.
Nous connaissons tous les coûts de la consommation de drogues illicites. Ces coûts sont énormes sur le plan humain, en ce qui concerne l'application de la loi, les poursuites devant les tribunaux, les peines purgées dans nos établissements, l'incarcération, la réadaptation, les traitements médicaux, le vol de biens, les introductions par effraction dans les domiciles, les vols d'automobiles, de magnétoscopes, de bijoux. Au cours de la dernière année, combien de grands-mères se sont fait voler leurs bagues par des toxicomanes qui voulaient ainsi payer leur drogue? C'est une épidémie.
Il y a aussi des coûts liés à la corruption. Certains de nos quartiers sont minés par la corruption absolue du crime organisé qui dirige le commerce des drogues illégales. Si nous n'intervenons pas, cela ruinera notre société, comme d'autres sociétés dans le monde ont été ruinées. C'est un phénomène insidieux et, jusqu'à maintenant, nous avons eu de la chance, mais nous ne devrions pas tenir cette chance pour acquise.
Les coûts du partage des seringues sont énormes. J'ai ici un chiffre qui englobe l'utilisation de drogues injectables et tous les préjudices que cela occasionne, comme les overdoses, le VIH, l'hépatite et d'autres agents pathogènes transmissibles, les suicides, les abcès, les infections, la malnutrition et l'endocardite.
On estime à 8,7 milliards de dollars sur une période de six ans les coûts directs et indirects de l'utilisation des drogues injectables seulement. Ces coûts sont surtout liés au traitement du VIH et du SIDA. On s'attend à ce que le traitement de l'hépatite C découlant de la consommation de drogues injectables finisse par dépasser les coûts du traitement du VIH et du SIDA.
Ce sont des coûts très élevés que notre société doit absorber ou est sur le point de devoir absorber. Je crois que personne n'a vraiment fait les calculs. Y a-t-il un ministre à la Chambre dont les responsabilités incluent le calcul des coûts associés à la consommation de drogues illégales? Le ministre de la Santé doit avoir un point de vue, le solliciteur général aussi, l'Agence des douanes et du revenu également. Il y a beaucoup de points de vue sur la question.
Les contribuables de ma circonscription n'ont pas d'idée du coût total, mais il savent qu'il est énorme. Je suis convaincu que la plupart des députés à la Chambre en sont conscients. Nous ignorons ce que cela nous coûte. Quel prix attribuons-nous à la vie d'un jeune gâchée par la consommation de drogues illégales?
Je soutiens que nous devons changer radicalement notre perception de l'usage des drogues illégales. Nous devons changer radicalement parce que les méthodes que nous utilisons maintenant pour régler le problème sont pratiquement les mêmes depuis 75 ou 100 ans. Fondamentalement, elles consistent à criminaliser l'usage de certaines drogues.
Changer de façon de faire soulèvera de fortes résistances. Je sais cela et la plupart des députés le savent aussi. Je suis convaincu que, à la fin du débat, peut-être à la fin de mon intervention, mon bureau de circonscription recevra des appels téléphoniques. C'est possible. Je dis toutefois que nous devons changer radicalement notre façon de voir le problème si nous voulons faire progresser notre société. Peut-être avons-nous peur du changement. Certains ont peur de changer, d'autres pas, mais je crois que nous sommes nombreux à avoir peur de changer la façon dont nous percevons la drogue.
C'est une autre contrainte. En tant que pays, nous sommes liés par certains traités internationaux qui nous obligent à criminaliser la possession ou la consommation de certaines drogues. En tant que pays, nous sommes de bons scouts. Nous criminalisons la possession ou la consommation de ces drogues, nous poursuivons les délinquants en justice et nous emboîtons le pas aux autres pays parties de ces conventions internationales. Cela ne nous laisse guère de liberté. Nous devons être audacieux et prendre l'initiative. Nous ne devons pas rejeter les traités. Ce que nous devons faire, c'est trouver de nouvelles approches.
Notre voisin du Sud, les États-Unis, est—croyez-le ou non—une contrainte. Les États-Unis n'ont pas changé leur approche à l'égard de cette question depuis 75 ou 100 ans. Leur politique est axée sur la lutte et l'interdiction. Cette politique ne donne aucun résultat. Elle ne donne aucun résultat chez eux et elle n'en donne aucun chez nous. Nous l'importons de la même façon que beaucoup d'autres choses. Je ne parle pas des drogues. Je parle de la politique, de la méthode de lutte.
Il est difficile pour nous de faire les choses d'une manière totalement différente de celle dont le font nos collègues des services médicaux et de la police aux États-Unis. Pourtant, nous devons trouver un moyen de le faire.
Finalement, nous devons examiner notre propre attitude à l'égard de ces drogues. Pourquoi criminaliser certaines drogues? Parce qu'elles ôtent quelque chose à la sobriété? Parce les individus s'éclatent un peu lorsqu'ils fument de la marijuana? Parce que c'est mauvais? Pourtant, ça fait peut-être la même chose que l'alcool. Nous ne criminalisons pas l'alcool.
Le faisons-nous parce que certaines drogues sont toxicomanogènes? Est-ce mauvais à cause de cela? Peut-être, mais la cigarette est aussi toxicomanogène. Elle l'est tout autant que peut l'être une drogue. La consommation de tabac n'est pas considérée comme un acte criminel, mais nous savons que c'est une drogue qui engendre une dépendance et pourtant on en vend dans tous les dépanneurs.
Ce n'est donc pas intrinsèquement la sobriété ou la dépendance qui permet de décider si l'on criminalise ou non. Je ne crois pas que nous sachions pourquoi certaines drogues sont criminalisées, mais c'est prévu dans la loi et nous ne pouvons rien y changer. Nous devons toutefois trouver un moyen de faire disparaître ce paradigme. Si nous ne le faisons pas, nous ne trouverons jamais de nouvelles solutions et nous resterons sur la voie que nous suivons depuis l'époque de la prohibition.
Je préconise un changement important. Il n'est toutefois pas nécessaire de pêcher par excès de zèle. Il faudra maintenir des lois sévères et faire appliquer la loi de façon stricte. Nous continuerons de nous montrer fermes envers les gens qui distribuent les drogues ou qui les créent et ceux qui enfreignent la loi. Il ne faut pas oublier que nous avons affaire au crime organisé. Le crime organisé contrôle virtuellement toute la gamme des drogues illicites.
Il ne faut pas oublier cette dynamique. Ce n'est pas que les gens, individuellement, cherchent à s'adonner aux drogues qui créent une dépendance. Le problème, c'est plutôt qu'un homme d'affaires, un criminel, vient leur offrir cette drogue. C'est là la plus importante partie du problème.
Suis-je en train de proposer qu'on légalise les drogues? Pas du tout.
Monsieur le Président, je remarque que vous soulignez que le temps passe. Je n'ai pas l'intention de partager mon temps de parole. J'aimerais poursuivre et s'il reste un peu de temps, peut-être mon collègue pourra-t-il s'en prévaloir.
Le vice-président: Le secrétaire parlementaire ayant soulevé la possibilité qu'il ne partagera pas son temps de parole, je suis un peu embêté. Soit qu'il partage son temps de parole, et il lui reste donc très peu de temps, ou bien il ne le partage pas et, lorsqu'il aura terminé son intervention, je devrai donner la parole à un député d'en face, si quelqu'un demande à intervenir.
M. Derek Lee: Monsieur le Président, je vais continuer à parler.
Si j'ai décidé de poursuivre, c'est que c'est une question qui m'intéresse depuis mon arrivée à la Chambre, en 1988. C'est la première fois aujourd'hui que je peux, en ma qualité de député, traiter de tous les aspects de la consommation de drogues illicites, et cela grâce à la motion qui a été présentée aujourd'hui. J'ai attendu longtemps cette occasion.
Quand j'ai été élu la toute première fois, il faut dire que le contexte politique au Canada n'était pas propice aux nouvelles approches. Des obstacles politiques de taille se dressaient chaque fois que de nouvelles approches étaient proposées. Les gens étaient pleins de bonne volonté, mais, il y a 12 ou 15 ans, nous ne saisissions peut-être pas l'importance réelle des maux et des coûts impliqués.
La société canadienne a évolué et les Canadiens sont peut-être prêts. Nous n'en sommes pas sûrs. Je m'abstiendrai par conséquent de proposer la légalisation de quoi que ce soit. Nous n'avons pas à légaliser la consommation de toutes les drogues illicites. Je ne propose même pas la décriminalisation.
Le problème est beaucoup plus grave et ne saurait être réglé par la légalisation ou la décriminalisation à elles seules. Le problème bien plus complexe, car nous avons affaire au crime organisé. Quelle que soit l'initiative que prendra la société, le crime organisé prendra une contre-initiative. Si nous légalisons l'usage de la drogue, ou le décriminalisons, il s'y adaptera.
De la façon dont je vois le problème, j'estime que nous devrions conserver des lois rigoureuses et réprimer énergiquement la commercialisation illicite, au marché noir, des drogues, leur importation et les conspirations pour les importer. Je ne préconise aucun changement à cet égard.
Je préconise cependant ce que j'appelle la médicalisation, pas la légalisation ni la décriminalisation, mais la médicalisation. Le principal objectif est de priver le crime organisé d'un client potentiel. Ce faisant, la société en obtiendra plus pour son argent.
La principale façon dont nous pouvons y arriver consiste à reconnaître que, dès que quelqu'un devient toxicomane et acquiert une dépendance à l'égard de drogues illicites et dès qu'il entre en contact avec notre système judiciaire ou une de nos institutions, médicale ou autre, il faut le détourner vers un programme à surveillance médicale. Je ne propose pas de paramètres ni de conditions précises à cet égard. Ce que je dis, c'est que lorsque quelqu'un est devenu toxicomane et a acquis une dépendance à l'égard d'une drogue, on devrait la lui fournir sous surveillance médicale. En même temps, il devrait également avoir accès aux programmes disponibles pour le décrocher de cette drogue et lui rendre sa vie d'autrefois. Il doit cependant avoir accès à la drogue. Dans certains cas, s'il n'en obtient pas, il peut en mourir ou n'ira pas bien loin. Il s'agit d'une période difficile. Je vais faire une comparaison.
C'est le Canadien moyen qui paie les coûts de la consommation de drogues illicites. Ce sont les coûts associés aux introductions par effraction, au vol de voitures, les coûts médicaux découlant de l'utilisation d'aiguilles usagées, de la propagation du VIH/sida et de l'hépatite. Et cela sans parler de la peine que causent le vol et la tricherie, indissociables de la dépendance aux drogues illicites. Nous pourrions leur vendre la drogue 5 $, alors qu'elle leur en coûte 1 000 ou 2 000 $. Autrement dit, leur en procurer par le truchement du système médical.
Un ami à moi aux États-Unis avait une vision plus libérale des choses. Il disait qu'il leur donnerait un baril de drogues, et qu'ainsi les gens seraient satisfaits. Ce n'est pas suffisant. Nous devons réaliser qu'un toxicomane est une personne malade. Un toxicomane a besoin de soins médicaux continus.
La solution que je propose, du moins j'espère que c'en est une, est que nous rendions les drogues facilement disponibles sous supervision médicale de manière à ce que les toxicomanes ne s'approvisionnent pas auprès des criminels. Le médecin pourrait peut-être substituer une drogue à une autre, mais tout en satisfaisant la dépendance du toxicomane il aurait comme but d'aider celui-ci à s'en sortir.
Nous connaissons tous l'existence de programmes de traitement à la méthadone. Ils donnent parfois des résultats, parfois non. Il existe cependant d'autres façons d'aider les toxicomanes à sortir de leur dépendance. Nous en sommes encore au stade expérimental. Le fédéral utilise l'argent des contribuables pour financer des projets pilotes. Les gouvernements provinciaux consacrent des sommes énormes à des programmes de ce genre. Comme je l'ai déjà dit, je ne suis pas sûr que nous ayons comptabilisé toutes les sommes ainsi engagées, mais cela se fait dans toute la société canadienne.
Nous devons arracher le client aux organisations criminelles. Nous pouvons calculer les coûts sociaux que représente chaque toxicomane qui utilise des drogues illicites; je dirais que ces coûts s'élèvent à 10 000 $, 50 000 $ ou 100 000 $ par année. Ils sont énormes. Il suffirait de médicaliser la dépendance du toxicomane pour qu'il cesse d'acheter de la drogue auprès d'organisations criminelles. Nous réduirions ainsi énormément les coûts directs et indirects de cette dépendance. Je souligne que, dans bien des cas, une médicalisation est possible de toute façon, mais elle serait utilisée d'une manière beaucoup plus ciblée.
Je vais répéter le terme que j'ai utilisé: médicalisation. Il est absolument indispensable que les Canadiens, par l'entremise de leur gouvernement, fassent la lutte au crime organisé, cette sale engeance, afin de le priver de sa clientèle, et faire disparaître ses profits. Cela réduirait les coûts sociaux de la toxicomanie.
M. Werner Schmidt (Kelowna, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je voudrais poser au député deux ou trois questions sur la médicalisation et le traitement des drogués. Les suggestions qu'il a faites ont du bon.
Cependant, l'hypothèse qui sous-tend le traitement de drogués et la médicalisation des drogues commence quelque part. Si l'on aide ces gens à se désintoxiquer, c'est très utile. Mais pourquoi ne crée-t-on pas un programme qui les empêche de commencer à se droguer? Il me semble qu'il est question ici d'un symptôme d'un problème plus profond. Qu'en pense le député?
M. Derek Lee: Monsieur le Président, le député a parfaitement raison. La prévention est nettement plus facile et moins coûteuse que la guérison. Des programmes d'information sur les drogues sont appliqués dans les écoles et dans divers autres milieux partout au Canada. On affecte maintenant des fonds publics à ces programmes. Mais, c'est un échec. Cela ne fonctionne pas.
Le député n'aurait pas tout à fait tort de dire qu'il faudrait y consacrer plus de fonds et plus de ressources. Je suis totalement d'accord avec le député. Plus de ressources aux programmes de sensibilisation aux toxicomanies et une campagne de prévention faciliteraient beaucoup les choses.
Les programmes d'information sur les drogues existaient déjà quand j'étais à l'école primaire, mais il est possible de faire davantage. Mais nous échouons et je ne veux plus d'échec.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, j'ai bien aimé entendre les propos du secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre. Je sais que, comme lui, tous les députés prennent cette question très au sérieux.
La question que je pose au secrétaire parlementaire porte toutefois sur les priorités. Il a parlé de son propre point de vue sur ce dossier en disant que celui-ci requiert l'attention du gouvernement et de tous les intervenants, tant ceux de la santé et de la justice que ceux d'autres secteurs.
Je ne voudrais pas avoir l'air trop partisan, mais pourquoi a-t-il fallu une motion de l'opposition pour que le gouvernement reconnaisse certaines de ces priorités? Qu'il s'agisse de la fièvre aphteuse, des questions agricoles, de la salubrité de l'eau ou des dossiers concernant la justice, pourquoi faut-il une intervention de l'opposition pour que le gouvernement prenne l'initiative de se pencher sur certains de ces problèmes qui semblent pourtant si criants, si évidents? Bienvenue à bord du train en marche.
Pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas déjà pris une initiative à l'égard d'une situation comme celle-ci? C'est ce qui se fait à l'autre endroit, mais il semble que l'opposition soit la seule capable de soulever ces questions à la Chambre des communes avec assez de vigueur pour que le gouvernement y porte attention et, surtout, pour qu'il agisse.
M. Derek Lee: Monsieur le Président, je félicite le député de l'opposition qui a proposé cette motion. Je félicite les députés de tous les partis d'avoir participé au débat. Des députés du parti ministériel parleront de cette question de différents points de vue.
À titre de député du parti ministériel, je dois reconnaître que les gouvernements ont tendance à s'enliser dans le statu quo. J'ai parlé tout à l'heure des obstacles qui se posent quand on veut changer les attitudes par rapport à la lutte contre le problème des drogues illégales. Le gouvernement est prisonnier de traités et des mesures de lutte antidrogue actuelles. La situation évolue. Le gouvernement s'emploie à résoudre le problème.
Qui, au sein du parti ministériel ou à la Chambre, a été chargé de relever le défi consistant à trouver une nouvelle façon de s'attaquer au problème? Qui reconnaîtra que nous échouons? Cela ne se produit pas souvent. Nous avons peu de chances de trouver un ministre qui prendra la parole à la Chambre ou n'importe où ailleurs pour reconnaître l'échec du gouvernement dans un domaine. Nous affichons un piètre bilan et nous pouvons faire mieux. J'ai bon espoir que nous ferons davantage.
Je suis à la Chambre depuis douze ans, et c'est la première fois que j'ai l'occasion de discuter de ce problème d'une manière aussi exhaustive. J'ai fait partie de l'opposition pendant cinq de ces douze années.
Ce n'est pas seulement un député, un parti de l'opposition ni nécessairement le parti ministériel, mais bien la Chambre au grand complet qui pourra se prononcer sur cette question par le biais d'un vote. Cela pourrait être l'occasion de faire avancer les choses plus que jamais nous n'y sommes parvenus auparavant. Je suis reconnaissant de cette occasion qui nous est offerte.
M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je remercie le député de ses observations. Je sais que la question lui tient à coeur.
Il a dit que le problème de la marijuana ne représentait qu'un aspect infinitésimal et insignifiant de l'ensemble de la question. Je ne suis pas sûr s'il faisait référence à l'utilisation de la marijuana à des fins médicales ou à des fins de loisirs.
S'il venait dans mon coin de pays, sur la côte ouest, il pourrait jeter un coup d'oeil aux plantations de marijuana. On en trouve tous les jours de nouvelles dans ma seule ville, Surrey. Chaque livre de marijuana qui franchit la frontière nous revient sous la forme d'une livre de cocaïne. La marijuana pose un problème monstrueux, à cause de l'implication de la criminalité organisée. Les profits du trafic de la marijuana financent les activités de la criminalité organisée. Lorsqu'on en arrive là, le problème n'a rien d'insignifiant.
Mon collègue pourrait-il clarifier ses propos?
M. Derek Lee: Monsieur le Président, je ne minimise nullement l'importance des sommes impliquées dans la culture et le trafic illégal de la marijuana. Quoi qu'il en soit, on ne peut pas transformer de la marijuana en cocaïne.
J'ai bien saisi l'analogie employée par le député lorsqu'il a parlé de l'échange de marijuana contre de la cocaïne, mais les personnes qui consomment de la marijuana ne prennent pas de drogues injectables. La consommation de marijuana à laquelle nous pensons, dans ce cas-ci, n'entraîne pas de dépendance et ne comporte pas l'utilisation de drogues injectables.
Mon hypothèse est audacieuse, mais je présume que si la marijuana est consommée à des fins de loisirs et qu'elle n'engendre pas de dépendance, les gens peuvent se la procurer à un coût modique, sur le marché noir. Quoi qu'il en soit, ces personnes ne volent pas pour pouvoir se procurer de la marijuana qu'ils consomment pour leurs loisirs. Mais je ne suis pas en mesure de confirmer mes dires.
Quand je parle des coûts reliés à la consommation illégale de drogues, je pense aux milliards de dollars de coûts directs et indirects. La culture et la vente de marijuana sur le marché noir entrent peut-être dans les activités d'ensemble de la criminalité organisée, mais elles ne représentent, selon moi, qu'une petite partie de cet ensemble.
Nous en apprendrons peut-être plus si le comité est constitué. J'en apprendrai peut-être beaucoup. Je respecte le point de vue qu'a exprimé le député, à savoir que l'élément de criminalité organisée lié à la marijuana est considérable parce que cette drogue est illégale et criminalisée. Si nous décriminalisions la consommation de la marijuana, si elle n'engendrait pas de dépendance, si elle était traitée comme du tabac, elle ne serait même pas criminalisée, elle ne créerait pas de commotion, elle constituerait une culture commerciale.
Je m'arrête ici, de peur d'en dire trop. Comme je le disais, je risque d'avoir des appels à mon bureau.
M. Werner Schmidt (Kelowna, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est un honneur pour moi de participer à ce débat parce que c'est un sujet très important. J'estime que l'honneur vient d'avoir l'appui du ministre de la Santé et du secrétaire, en plus de constater que presque tous les députés partagent un même avis sur cette question. Je trouve cela très encourageant et très significatif.
Parallèlement, toutefois, il est assez intéressant de voir que ce problème fait l'objet de discussions depuis 1986 au moins, alors qu'un ensemble de politiques avaient été élaborées par le gouvernement conservateur. D'autres politiques ont vu le jour par la suite, sous l'administration libérale. Ainsi, nous parlons de cette question depuis 15 ou 20 ans et rien ne semble avoir été fait. Il faudrait peut-être aborder la question un peu différemment et nous demander pourquoi ne pas aller de l'avant.
Mon collègue du Parti progressiste-conservateur vient de soulever la question. Comment se fait-il que, pour qu'un peu de lumière soit faite sur un problème de cette envergure, il faille que l'opposition présente une motion dans le cadre d'une journée qui lui est réservée? Si la question s'avère si importante, pourquoi est-ce le cas?
Il semble y avoir plusieurs raisons. En premier lieu, je pense qu'en tant que société, il nous faut reconnaître que pour véritablement faire face au problème, nous devons examiner la dynamique des changements sociaux. En fait, nous nous trouvons ici face à un changement social, un changement de style de vie.
Mon collègue de Surrey-Nord vient de parler de la marijuana et a affirmé qu'il s'agit d'une fraction infinitésimale du narcotrafic. Ce n'est pas le cas. C'est une portion importante. En Colombie-Britannique, nous cultivons bien sûr de la marijuana de très haute qualité. En fait, la qualité est si bonne qu'une livre de notre marijuana expédiée aux États-Unis est échangée là-bas pour exactement une livre de cocaïne. La cocaïne est beaucoup plus toxicomanogène que la marijuana, mais ainsi va la vie.
Je ne préconise pas la consommation de drogues, un point c'est tout. Je méprise même le tabac. C'est une terrible habitude que nous avons, mais elle existe. Pour y changer quelque chose, il faut changer notre société. Il était autrefois socialement acceptable de fumer, mais ce n'est plus le cas, et nous l'avons admis. Ce n'est pas un crime de fumer du tabac, mais c'en est un de fumer de la marijuana.
Il me semble que notre société doit décider ce qui est criminel ou ne l'est pas. Il y a trois faits à considérer ici. Tout d'abord, nous devons prendre conscience du problème de la consommation de drogues. En quoi consiste ce problème? Il me semble que cela a été abondamment démontré. Des jeunes en consomment. Des adultes en consomment. La consommation de drogues augmente. Voilà le problème. Pourquoi est-ce un problème? De toute évidence, certains ne veulent pas que les gens se droguent. Si nous voulions tous qu'ils prennent de la drogue, ce ne serait pas un problème. Nous n'en parlerions même pas. De toute évidence, nous y voyons un problème.
Ensuite, si c'est un problème, c'est le problème de qui? Est-ce le vôtre, monsieur le Président? Celui du premier ministre? Du gouvernement? Est-ce le nôtre? Celui des parents? Des jeunes? Des enseignants?
Une chose est certaine. Si ce n'est le problème de personne, personne n'y fera quoi que ce soit. Si nous passons notre temps à dire que c'est le problème des autres et que c'est à eux d'agir, que se passera-t-il? Nous n'allons rien faire. Tant que nous en resterons là, rien ne changera.
Il me semble qu'il faut d'abord reconnaître le problème et reconnaître ensuite à qui il appartient. Ce n'est qu'à cette condition que nous pourrons comprendre et finalement accepter la situation. Nous ne ferons rien tant que nous n'aurons pas fait cela. Nous en parlerons indéfiniment.
L'opposition officielle a attiré aujourd'hui l'attention de la Chambre sur une motion voulant que nous chargions un comité spécial d'examiner sérieusement le problème de la drogue et tout ce qu'il comprend. Ce ne sera pas facile.
Tout récemment, j'ai participé ici, à Ottawa, à la conférence Civitas, une espèce de laboratoire de pensée qui s'est notamment penché sur la question de savoir s'il faut continuer à criminaliser l'usage des drogues ou s'il faut le décriminaliser. On a présenté d'excellents arguments d'un côté comme de l'autre.
Il est ressorti du débat la reconnaissance que nous avons tous besoin d'être beaucoup mieux informés sur les vrais enjeux dans cette affaire. Il y a certes un élément de criminalité. Le crime organisé est impliqué là-dedans. En outre, il est naturel de rechercher le plaisir et de faire tout en son pouvoir pour exploiter la tendance hédoniste qui se trouve en chacun de nous. Il faut bien comprendre quelles sont les répercussions.
Je crois que le député a mentionné au cours de son allocution qu'il se donne dans les écoles une éducation antidrogue. Oui, on a dit tout ce que les drogues feront à ces enfants. Qu'est-ce que cela a donné? Cela n'a diminué en rien la consommation de drogue. Bien au contraire.
Je me rappelle que lorsque j'étais directeur d'école, il y a longtemps, on m'avait demandé de participer à un projet pilote sur l'éducation antidrogue. Je me suis rapidement renseigné auprès des écoles où une telle éducation était donnée. J'ai comparé les écoles où le programme avait été mis en oeuvre à celles où cela n'avait pas été le cas, en ce qui concerne le recours à des drogues. Devinez quoi? Le nombre de cas est directement lié à la mesure dans laquelle le programme de lutte contre les drogues a été mis en oeuvre à l'école. On notait une croissance directe.
On a renseigné davantage les enfants au sujet des drogues, alors que pensez-vous qu'ils ont fait? Ils ont consommé. Leur curiosité a été stimulée et ils se sont dits «si cela est si plaisant, peut-être devrions-nous en faire l'essai». Ils sont loin de s'être rendu compte que ces drogues créent une très grande dépendance, en particulier certaines drogues dures. Il y a aussi bien sûr d'autres genres d'abus. Par exemple, ils versent une drogue quelconque dans une bouteille de Coke et se rendent mutuellement fous. Ils agissent de la sorte. Ils se jouent des tours, qui ont parfois pour conséquences d'indisposer et de terroriser grandement la victime.
La sensibilisation aux dangers de la drogue, ou l'éducation en matière de drogues, à proprement parler, ne constitue manifestement pas la réponse. Cela ne donne rien.
Si nous songeons sérieusement à apporter un changement, il nous faut tout d'abord savoir à quoi nous faisons face. Qu'est-ce que le phénomène de la drogue auquel les gens s'assujettissent? En deuxième lieu, nous devons comprendre les effets des drogues sur les gens, la mesure dans laquelle elles créent une dépendance et ce qui peut être fait pour les combattre. Enfin, les gens doivent se dire «Je comprends ce que c'est. Je reconnais que c'est mon problème, et que je dois prendre une décision.»
À mon avis, le député reconnaît qu'il est probablement plus important d'avoir des programmes de prévention que des programmes de réadaptation et de traitement. Personne ne devient toxicomane sans avoir choisi de prendre des drogues. C'est le premier choix qui doit être fait. C'est une question de choix, et si c'est le cas, nous savons également que nous parlons de morale et de moralité. Les choix reposent sur notre structure de valeurs. Si nous entreprenons ce genre de débat, peut-on s'imaginer jusqu'où il va nous mener? Je ne suis pas étonné que le gouvernement libéral semble en premier lieu vouloir tâter le pouls pour ensuite décider quelle est la valeur à défendre, au lieu d'arrêter dès le départ quels sont ses principes.
Nous devons reconnaître que c'est essentiellement un choix moral. Nous devons ensuite partir de là. Certains prétendront qu'il suffit d'avoir de bonnes lois pour que tout aille bien. Je ne connais pas une seule loi qui ait rendu les gens bons, mais je connais une foule de bonnes lois qui ont été faites par de bonnes personnes. Il y a une différence fondamentale. Ne nous faisons pas d'illusions. Ce n'est pas en créant de bonnes lois que nous rendrons les gens bons.
Cependant, si nous avons des lois—et nous en avons—, nous ferions mieux de nous assurer qu'on les observe et que ceux qui les enfreignent seront traités de façon juste, équitable et convenable. Les conséquences d'une contravention à ces lois doivent être plus importantes que les profits que l'on peut tirer de cet acte, ce qui n'est pas le cas à l'heure actuelle.
Je connais, par exemple, des policiers de la GRC qui s'attaquent aux cultivateurs de marijuana qui pullulent dans la région de Kelowna. En plus de produire une drogue illégale, ces gens enfreignent aussi d'autres lois, dont les lois sur les services publics. Ils reçoivent pour cela des amendes de 2 500 $. Pour une entreprise qui génère des revenus de 200 000 $ à 500 000 $ par année, une somme de 2 500 $ est un coût dérisoire pour faire des affaires. Une telle pénalité ne va pas enrayer la culture de la marijuana. Ce n'est pas une conséquence suffisamment grave.
En n'imposant pas de peines plus sévères, c'est comme si on disait aux criminels qu'ils peuvent continuer d'enfreindre la loi parce que, après tout, c'est comme ça que les choses fonctionnent et la société ne s'en formalise pas trop.
Ce qui m'effraie plus que tout, c'est cette notion qui prend forme et suivant laquelle est bien tout ce qui est légal. Une chose peut être légale, mais extrêmement fausse et immorale. On a un exemple de cela dans l'affaire Feeney. Les députés s'en souviennent sûrement. Cet individu a commis un meurtre et a laissé des traces de sang. Les policiers ont suivi ces traces de sang jusqu'à une maison mobile. Ils sont entrés et ont demandé à l'individu s'il avait tué cet homme. Il a répondu oui et leur a montré la barre qu'il avait utilisée. Les policiers l'ont emmené au poste et l'ont accusé de meurtre. Au tribunal, le juge a demandé si les policiers avaient obtenu un mandat de perquisition, ce à quoi le policier a répondu non. Le juge a alors dit que l'individu n'avait pas commis le crime et qu'il ne pouvait donc pas être condamné. Quelle erreur judiciaire!
Je vais citer les paroles d'un de nos distingués juges ici, au Canada, madame le juge L'Heureux-Dubé. Lors du 26e Congrès canadien de justice pénale tenu à Ottawa, en 1997, elle a dit que la recherche de la vérité était le but même de la justice pénale.
Dans l'affaire Feeney, la vérité était totalement liée à la procédure judiciaire. Cela n'avait rien à voir avec la justice. C'est le genre de chose qui se passe dans la lutte antidrogue et dans d'autres cas aussi.
Il y a une autre affaire, une affaire de drogue, qui est extrêmement importante à cet égard. En Ontario, en 1997, un juge a décidé qu'un directeur d'école était autorisé à fouiller des élèves soupçonnés d'apporter de la drogue à l'école. Toutefois, semblant soudainement perdre toute notion du bon sens, il a ajouté que cela ne s'appliquait pas si le directeur demandait l'aide d'un policier. Le bon juge se prononçait sur une affaire où, grâce à une information communiquée dans le cadre du programme Échec au crime, la police avait appris qu'un élève avait caché de la drogue dans la poche de son blouson rouge pour l'apporter clandestinement à son école secondaire. Un agent est allé voir le directeur et, ensemble, ils ont vérifié dans la case de l'élève, mais il n'y avait pas de blouson rouge. Les deux hommes se sont ensuite rendus au gymnase, où ils ont vu le blouson rouge. Ils ont parlé à l'élève qui, sachant qu'il venait de se faire prendre, leur a dit qu'ils trouveraient ce qu'ils cherchaient dans la poche de son blouson. Ils ont effectivement trouvé la drogue.
Toutefois la simple présence d'un policier a déplu au juge. Qui plus est, on n'avait pas informé l'étudiant de ses droits. On ne lui avait pas dit qu'il avait droit à un avocat, ainsi de suite. Tous les éléments de preuve relatifs aux déclarations et à la présence de drogues ont été supprimés, et l'étudiant a été acquitté.
Où est la vérité? Où est la décence et la justice? Les jeunes et les parents le savent. Les enseignants et le directeur le savent. Voilà les situations auxquelles nous sommes confrontés. Il ne s'agit pas d'une question de droit, mais du choix d'aller dans une certaine direction.
Un directeur d'école secondaire peut intervenir moyennant un simple soupçon, mais non un policier. Nous payons les policiers pour appliquer les lois, puis nous leur mettons plus de bâtons dans les roues qu'à celui que nous payons pour diriger un lieu d'apprentissage. Quant aux drogues, sans mentionner les armes blanches dans nos écoles, c'est très inquiétant et c'est de plus en plus courant.
Il n'y a pas longtemps, en fait il y a exactement 20 ans, au Victoria Composite High School, à Edmonton, un étudiant, dans le corridor, a sorti un couteau de la jambe de son pantalon et a poignardé un autre étudiant. Qu'est-ce qui se passe?
J'ai un autre exemple. Deux parents bienveillants, leur fils George de 14 ans, l'accusé, John, un adolescent de 15 ans en fugue et un juge qui en sait plus qu'assez en matière de droit relatif à la Charte. John avait été généreusement accueilli par les parents de George. En 1996, George et John, portant un masque et armés de poignards, ont cambriolé un dépanneur à Etobicoke en Ontario. En fuyant, George a perdu son portefeuille près du magasin. Cela a amené les agents à téléphoner à ses parents. La mère de George s'est assurée que le policier qui avait trouvé le portefeuille aurait une conversation avec son fils. George a reconnu être l'auteur du vol et a dénoncé John.
On a interrogé John. Sachant que George l'avait dénoncé, John a raconté au policier que ce n'étaient pas des passe-montagnes mais des bas qu'ils portaient. Cette confession, filmée sur vidéo, a été ressortie des mois plus tard. Poussé à négocier un plaidoyer, John avait aussi accepté de témoigner contre George. Il a été condamné à 18 mois de probation.
En 1997, George s'est retrouvé devant le tribunal après que deux accusations eurent été portées contre lui. Le juge a alors rejeté sa confession sous prétexte qu'il avait été intimidé par les policiers. Il a ensuite rejeté le témoignage de John contre George, disant qu'il s'agissait d'une vengeance personnelle et qu'il n'aurait pas témoigné contre son copain si George ne les avait pas mis tous les deux dans le pétrin. George a été libéré.
Je reviens à la mère de George, qui avait fait en sorte que son fils collabore avec la police. Croyait-elle qu'il aurait mieux valu que son fils fasse face à la musique, paie sa dette envers la société et continue sa vie ou pensait-elle qu'il n'y avait rien de mieux que la charte?
Je ne suis pas l'auteur de ce livre. C'est Alex MacDonald, ancien procureur général de la Colombie-Britannique, qui l'a écrit. Il l'a intitulé Outrage: Canada's Justice System on Trial. Selon lui, le Canada n'a pas de système de justice, il a un système judiciaire. Il parle de la justice prodigue, disant que le système de justice, le système judiciaire, s'étire à l'infini afin de consommer temps et argent. Où est la vérité?
Ce genre de chose me terrorise. Voilà ce qui explique pour une grande part ma présence ici. Nous devons finir par reconnaître que les êtres humains prennent des décisions. En tant qu'êtres humains, nous prenons des décisions et nous faisons des choix. Je crains fort que nous nous préoccupions davantage de déterminer si nous appartenons au groupe des libéraux, des conservateurs, des néo-démocrates ou autres plutôt que de nous rendre compte que le temps est venu de partager un ensemble de valeurs communes, notamment le sens moral qui fait que les gens peuvent clairement faire la distinction entre le bien et le mal et ainsi faire preuve de courage et ne pas reculer devant le devoir.
Combien de fois devons-nous songer ici à la Chambre au devoir que nous avons de siéger à un comité ou d'être présent à la Chambre pour la tenue d'un vote, ou pour toute autre raison?
C'est presque comme si on nous y obligeait. Le whip doit nous fouetter pour nous faire prendre le rang. Ce ne devrait pas être nécessaire. Nous sommes ici pour représenter nos électeurs. Des 30 millions de personnes vivant au Canada, nous faisons partie des 301 personnes qui sont chargées de défendre leurs intérêts, de combattre le mal et de voir à ce qu'il y ait une loi pour permettre aux gens de se sentir en sécurité, de marcher sans crainte dans les rues.
Les Canadiens comptent sur nous. C'est notre devoir d'agir et nous devrions avoir le courage de dénoncer certaines choses. Il y a des choses qui ne vont pas du tout lorsqu'on valorise davantage le crime organisé que le respect des lois en place. C'est ce qui se passe à l'heure actuelle. Nous offrons une meilleure protection aux criminels qu'aux victimes. Nous allons dans le mauvais sens et tant que nous continuerons d'agir ainsi, nous n'arriverons pas à résoudre le problème.
J'exhorte tous les députés à reconnaître que nous devons mettre ce comité spécial sur pied et lui donner les pouvoirs nécessaires pour qu'il obtienne les ressources dont il a besoin pour nous permettre d'analyser le problème et d'avoir le courage de prendre les mesures qui s'imposent puisque c'est notre devoir de le faire.
Mme Aileen Carroll (Barrie—Simcoe—Bradford, Lib.): Monsieur le Président, la stratégie canadienne antidrogue vise à réduire à la fois l'offre et la demande de drogues. Les drogues sont un problème dans tous les pays. Les difficultés liées à la consommation abusive d'alcool et d'autres drogues, à la production de drogues illicites et au trafic de drogues sont néfastes sur le plan individuel, familial et collectif. Ce n'est que par des efforts concertés au niveau national et international que nous pourrons réduire la demande, l'approvisionnement illicite et le trafic de drogues.
La stratégie canadienne antidrogue fait appel à la collaboration d'onze ministères fédéraux, des gouvernements provinciaux et territoriaux, des organismes gouvernementaux de lutte contre l'alcoolisme et la toxicomanie, des organisations non gouvernementales, des associations professionnelles, des organismes d'application de la loi, du secteur privé et des groupes communautaires. Il s'agit d'efforts concertés visant à réduire les méfaits associés à la consommation abusive de drogues, d'alcool et d'autres substances. La stratégie repose sur quatre éléments, à savoir la prévention, l'exécution et le contrôle, le traitement et la réadaptation, et la réduction des méfaits.
Par la prévention, nous voulons empêcher les gens de devenir des toxicomanes. Par l'exécution et le contrôle, nous voulons faire en sorte que ces substances ne tombent pas dans les mauvaises mains. Par le traitement et la réadaptation, nous voulons aider les personnes touchées à surmonter leur toxicomanie. Et enfin, par la réduction des méfaits, nous voulons prévenir les maladies et les problèmes communautaires qui sont liés à la consommation abusive d'alcool et de drogues.
Les méfaits liés à la consommation abusive d'alcool et de drogues peuvent être physiques, psychologiques, sociaux ou économiques. La consommation abusive d'alcool et d'autres drogues est d'abord une question de santé, non seulement une question d'application de la loi. La réduction des méfaits constitue une intervention réaliste, pragmatique et humaine, par opposition à des efforts ne visant que la réduction de la consommation de drogues.
Le gouvernement du Canada croit que la réduction des méfaits peut se faire de diverses manières: premièrement, en favorisant la compréhension des risques liés à la consommation de drogues illicites, notamment chez les jeunes; deuxièmement, en réduisant la consommation à haut risque d'alcool et d'autres drogues; et troisièmement, en cherchant à déterminer les meilleures pratiques dans le domaine de la prévention, de la sensibilisation, du traitement et de la réadaptation, et à en faire la promotion.
Nous voulons réduire l'importation illégale de drogues illicites. Nous comptons réduire la disponibilité de drogues illicites au niveau de la rue. Nous restreignons la capacité des trafiquants de profiter des bénéfices qu'ils tirent de leurs activités illégales.
Ce n'est pas une stratégie simple, car elle fait appel à la participation d'onze ministères. Nous nous attaquons au problème sur tous les fronts. Le cadre législatif constitue l'âme de notre stratégie antidrogue. Trois conventions internationales servent de guide à l'élaboration et à l'application des lois ainsi qu'au contrôle au Canada. Ce sont: la Convention unique sur les stupéfiants de 1961 et son protocole de 1972, la Convention de 1971 sur les substances psychotropes et la Convention de 1988 contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes.
Les lois canadiennes s'appliquent à l'importation, à la production, à l'exportation, à la distribution, à la possession et à la consommation de substances psychotropes qui peuvent causer des méfaits lorsqu'elles sont distribuées ou utilisées sans contrôle. Les lois prévoient aussi des mécanismes qui assurent que l'exportation, l'importation, la production, la distribution, la possession et la consommation de substances réglementées au niveau international ne servent qu'à des fins médicales, scientifiques et industrielles.
En 1997, le Canada a promulgué la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, qui met à jour et renforce les lois existantes et met à la disposition des corps policiers des outils supplémentaires pour combattre les activités liées aux drogues illicites.
Le programme de traitement et de réadaptation en matière d'alcoolisme et de toxicomanie (TRAT) est un autre élément qui appuie les efforts du gouvernement du Canada visant à réduire les méfaits liés à l'alcool et aux autres drogues sur le plan individuel, familial et collectif. Grâce à ce programme, les gouvernements provinciaux et territoriaux ont accès à des fonds leur permettant d'améliorer l'accès aux programmes et aux services efficaces de traitement et de réadaptation en matière d'alcoolisme et de toxicomanie. Les jeunes et les femmes sont des groupes cibles privilégiés en ce qui concerne les services financés en vertu du TRAT.
[Français]
Le Canada considère comme très importante la coopération internationale et favorise une approche équilibrée quant au problème global des drogues.
La coopération internationale, par l'entremise du Programme des Nations Unies pour le contrôle international des drogues, le PNUCID, et la Commission interaméricaine de lutte contre l'abus des drogues, la CICAD, sont les principaux éléments des activités internationales du Canada en matière de contrôle des drogues.
Le Canada contribue annuellement une somme de 1,5 million de dollars au PNUCID et 600 000 $ à la CICAD. Nos activités à l'échelle internationale reflètent l'approche équilibrée adoptée au Canada.
Le Canada a assumé un rôle de premier plan relativement à l'élaboration d'un mécanisme d'évaluation multilatéral, ou le MEM, comme on l'appelle communément, qui a été adopté en septembre 1999 au cours d'une réunion, à Ottawa, d'un groupe de travail présidé par l'ancien sous-solliciteur général, Jean Fournier.
La première phase de mise en oeuvre du MEM a été entreprise peu de temps après. Les premiers rapports du MEM ont été présentés aux dirigeants lors du Sommet des Amériques qui a eu lieu à Québec, en 2001, et ont été bien accueillis.
[Traduction]
La croissance de la consommation abusive de drogues dans de nombreux pays et les conséquences du trafic et de la criminalité connexe ont exercé beaucoup de pression sur les ressources de bon nombre de pays de l'hémisphère qui recherchent le soutien et une formation technique en vue de mettre sur pied l'infrastructure nécessaire du point de vue de la santé, de la société et de l'application de la loi pour régler le problème. Le Canada offre son aide aux pays de la région par le truchement de programmes bilatéraux en collaboration avec la GRC, l'ACDR, Santé Canada, le MAECI et le ministère de la Justice. Le Canada surveille et examine aussi les expériences et les innovations des autres pays afin d'évaluer la possibilité d'appliquer de nouvelles stratégies ici.
La stratégie canadienne antidrogue est en constante évolution. Les types et la nature des problèmes liés à la consommation abusive d'alcool et d'autres substances changent constamment, à l'instar de l'environnement national et international. Les interventions relatives aux problèmes d'alcoolisme et de toxicomanie au Canada ainsi que nos efforts axés sur la réduction de l'offre et de la demande sont régulièrement réévalués afin d'en assurer la pertinence et l'à-propos.
M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Alliance canadienne): Monsieur le Président, avant d'entamer mon intervention, je voudrais dire quelque chose à propos de ce qui est en train de se produire dans ma famille en ce moment. Ma belle-fille, Lainy, et mon fils, Dan, sont en train de donner naissance à un enfant. Ce sera notre cinquième petit-enfant et j'ai le sentiment que c'est Lainy qui fait presque tout le travail. Je suis très excité et j'attends un coup de fil pour savoir comment les choses se passent.
Compte tenu de cette préoccupation, je trouve que le sujet d'aujourd'hui concerne mes petits-enfants et peut-être ceux des autres députés. La question à l'étude concerne l'avenir des enfants canadiens.
Je voudrais réprimander brièvement et gentiment le gouvernement. J'ai suivi un échange il y a quelques instants entre le député conservateur de Pictou—Antigonish—Guysborough et le député libéral de Scarborough—Rouge River. Le député conservateur avait absolument raison de faire remarquer qu'il ne s'agissait pas d'une initiative libérale. C'est regrettable car il s'agit d'un grave problème et le gouvernement a peut-être besoin de se faire secouer. Le gouvernement devrait se préoccuper davantage de l'avenir de nos enfants. Je félicite le député de Langley—Abbotsford, qui a déployé des efforts inlassables dans ce dossier.
La motion à l'étude propose qu'un comité spécial de la Chambre soit chargé d'examiner les facteurs sous-jacents ou parallèles à la consommation non médicale de drogues ou de médicaments, et de recommander au gouvernement des moyens qui lui permettront de réduire, seul ou avec le concours des autres paliers de gouvernement, l'ampleur du problème que ce phénomène constitue. C'est une plaie et un problème extrêmement grave pour notre société.
La consommation de drogues illicites contribue à plusieurs égards à la criminalité et aux coûts du maintien de l'ordre. Elle détruit le tissu de notre société.
En ce qui concerne les coûts, il y a premièrement le coût de l'application des lois anti-drogue. Deuxièmement, la consommation chronique ou la dépendance à l'égard des drogues dites dures comme l'héroïne, la cocaïne, le crack, les amphétamines, le LSD et autres hallucinogènes puissants est souvent une cause accessoire dans les crimes contre les biens, particulièrement les vols et les cambriolages. Troisièmement, la consommation de drogues contribue aux actes criminels violents. Voies de faits, homicides et autres actes de violence sont le résultat de guerres territoriales sur le marché des drogues illicites. Les consommateurs de drogues illicites constituent un nombre disproportionné des personnes impliquées dans les cas de violence conjugale et de mauvais traitements envers les enfants. Même le cannabis est une cause accessoire dans les infractions relatives à la conduite avec facultés affaiblies.
Le taux de drogués parmi les criminels est disproportionné par rapport au reste de la population. Jusqu'à 80 p. 100 des contrevenants reconnaissent avoir consommé des drogues illicites à un moment de leur vie. Ce chiffre est important. Il y a un lien. Nous ne pouvons l'ignorer. Dans 50 à 75 p. 100 des cas, les analyses d'urine révèlent des traces de drogue au moment de l'arrestation et près de 30 p. 100 des prévenus étaient sous l'influence de drogues lorsqu'ils ont commis le crime dont ils sont accusés.
Les drogués qui sont obligés de suivre une cure de désintoxication ont souvent un casier judiciaire. Il y a clairement un lien entre la consommation de drogues illicites et la criminalité, mais ce n'est pas toujours un lien de cause à effet. Le fait qu'un acte criminel soit commis par une personne qui consomme des drogues illicites ne signifie pas nécessairement qu'elle ait commis cet acte parce qu'elle avait consommé de la drogue. Il existe toutefois plusieurs liens de cause à effet plausibles entre la drogue et la criminalité.
Tout d'abord il y a les effets pharmacologiques des drogues. Chaque drogue laisse sa propre marque, sa propre empreinte et a sa propre manière d'influencer le drogué. Dans le cas de certaines drogues illicites, il y a un lien entre consommation et violence. La cocaïne, d'autres stimulants et le PCP peuvent rendre le sujet violent car elles causent la perte de contrôle du moi, la détérioration du jugement, l'irritabilité et l'impulsivité et des pensées paranoïaques.
Deuxièmement, les toxicomanes commettent des crimes pour s'acheter de la drogue. Certains disent que cela fait partie de la culture de l'univers des toxicomanes, mais lorsqu'un individu devient dépendant de l'héroïne ou de la cocaïne, il se fiche éperdument du prix qu'il lui en coûte. Il ne peut pas s'empêcher de commettre des vols par effraction ou d'autres crimes contre la propriété, ou même des crimes violents.
Troisièmement, le toxicomane adopte un mode de vie déviant qui explique à la fois sa toxicomanie et son comportement criminel. Comme je l'ai déjà mentionné, il existe un lien entre les deux.
Quatrièmement, le crime est le fruit de la violence systémique inhérente au trafic illicite de la drogue. Nous savons que différentes guerres de territoire sont livrées à l'occasion. Nous savons également que, dans beaucoup de communautés ethniques prospères établies au Canada, des personnes venues ici à la recherche d'une vie meilleure pour eux et pour leurs enfants sont souvent la proie d'individus issus de la même communauté, d'individus qui s'adonnent au trafic de la drogue. Le problème est très grave pour les citoyens respectueux de la loi, quelle que soit leur origine.
Suivent les coûts des services de l'ordre. D'après les chiffres que j'ai sous les yeux, en 1992, dans le cas des drogues illicites, on a estimé à 208,3 millions de dollars le coût des interventions policières et quelque 168 millions de dollars ont été dépensés pour l'application comme telle des lois antidrogue.
Viennent ensuite les coûts des tribunaux et des services correctionnels, car les auteurs de crimes contre la propriété et d'autres infractions doivent être jugés et punis.
Enfin, il y a la question des coûts des services des douanes et de l'accise. De toute évidence, nous devons avoir des frontières qui, au meilleur de notre capacité, pourront prévenir l'importation et l'exportation de drogues.
À propos d'importation et d'exportation, je vais vous lire un paragraphe d'un article du centre de prévention de la toxicomanie de Toronto, article qui vise à dire la vérité au sujet de la marijuana. Voici:
Selon des sondages menés auprès de la population, en 1999, le taux d'usage de cannabis chez les adultes torontois est demeuré relativement stable, se situant à environ 10 p. 100. Chez les élèves torontois, ce taux est passé de 9 p. 100 en 1993 à 18 p. 100 en 1995, se stabilisant à 19 p. 100 en 1997. Le sondage mené en 1999 a révélé que 26 p. 100 des élèves des écoles secondaires de premier et de deuxième cycles de Toronto avaient déjà consommé du cannabis, ce qui représente le plus haut taux signalé depuis le début des sondages, en 1994.
En 1998, près d'un consommateur sur cinq à avoir été traité pour toxicomanie, soit 18 p. 100, a déclaré que le cannabis était une substance qui lui avait causé des problèmes.
La vérité à propos de la marijuana, c'est qu'elle n'est pas une substance inoffensive comme celle qu'ont connue bon nombre de jeunes de la génération hippie. La vérité au sujet de la marijuana, c'est qu'elle est cultivée et a une puissance qu'on n'aurait jamais imaginée auparavant. La vérité au sujet du cannabis, c'est qu'il risque de créer des problèmes sociaux énormes et graves.
Permettez-moi de conclure sur cette déclaration. Souvent, les jeunes usagers viennent de milieux pauvres, où ils sont victimes de violence physique et sexuelle et abusent de substances, notamment de l'alcool. Avant même d'être influencés par leurs pairs, ils risquent fort d'avoir des problèmes d'alcoolisme et de toxicomanie. L'expérimentation de drogues et d'états de conscience altérés peut débuter innocemment et, souvent, ne cause aucun tort. Cependant, les jeunes peuvent acquérir une grave dépendance aux drogues et être soudainement forcés de naviguer dans un milieu criminel complexe pour se procurer la substance dont ils sont dépendants et qui leur permettront de survivre jusqu'au lendemain.
Je suis sûr que la motion du député de Langley—Abbotsford sera appuyée par tous les députés, car c'est avec les jeunes du Canada, avec le fondement même de la société canadienne, que nous devons nous attaquer à ces problèmes, et cette responsabilité nous incombe.
Le vice-président: Avant de demander s'il y a des questions et des commentaires, en conformité de l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement ce soir, à savoir: le député de Rosedale, L'industrie du bois d'oeuvre.
M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir pour appuyer la motion.
Comme l'a indiqué mon collègue de Kootenay—Columbia, nous avons pris connaissance de beaucoup de statistiques, d'études et de commentaires qui ont à juste titre leur place dans le débat. Ces données nous fournissent une indication de l'envergure du problème en termes de chiffres. Malheureusement, les chiffres ont tendance à rendre la réalité froide et impersonnelle. Les statistiques réduisent des vies humaines à des chiffres. Dans le débat, nous ne devons jamais perdre de vue l'élément humain.
J'aimerais brièvement parler de certaines de mes expériences concernant ces questions.
Je me souviens du 4 novembre 1992, alors que je regardais le bulletin des nouvelles du soir de la Colombie-Britannique, on a annoncé qu'un double homicide était survenu à Cloverdale, localité voisine de ma ville de résidence, en l'occurrence Surrey. Le compte rendu télévisé du drame nous apprenait que deux femmes avaient été assassinées. De nouvelles données se sont greffées à l'affaire dans les jours suivants. Deux jours plus tard, j'ai vu aux nouvelles télévisées un homme bouleversé, dont les yeux étaient rougis. Il pleurait en parlant. C'était le père d'une des victimes.
Malheureusement, à cette époque, ma famille et moi-même nous remettions d'un incident particulièrement traumatisant survenu dans la famille à peine deux semaines plus tôt. J'ai pris l'initiative de retrouver cet homme, car je connaissais son nom, et de l'appeler pour lui dire de me le laisser savoir si jamais il voulait me parler. C'est une façon terrible de faire connaissance, mais Bob et Pat comptent maintenant parmi mes amis les plus intimes.
Les deux femmes, que je ne nommerai pas, partageaient une maison à Cloverdale. L'une d'elles habitait au sous-sol avec ses trois enfants et l'autre seule, au rez-de-chaussée. La locataire du rez-de-chaussée a reçu un ami chez elle. Il y a eu une altercation et elle a été poignardée. Celle qui habitait au sous-sol, voulant savoir d'où venait le chahut, est montée et s'est aussi fait poignarder par l'homme en fuite. La locataire du rez-de-chaussée est morte sur le coup. Celle du sous-sol a réussi à se traîner jusque dans la rue.
L'autre élément dans cette histoire est que cette femme avait trois enfants. Deux de ces enfants étaient à l'école ce jour-là et c'est là qu'on leur a annoncé la nouvelle. L'enfant de quatre ans qui était à la maison a tout vu.
L'incident est relié au débat étant donné que l'enquête et le procès ont révélé que l'homme était en plein délire de cocaïne. En guise de défense, il a invoqué la psychose due à la cocaïne. En d'autres termes, il a perdu le nord, ne savait plus ce qu'il faisait, puis deux minutes plus tard deux femmes mouraient tandis qu'il s'enfuyait.
Mon ami parlait de notre génération. Je me souviens d'une chanson des années soixante dont le titre était I Got Stoned and I Missed It. Je ne souscris pas à ce genre d'excuse. Nous pourrions débattre longtemps de la question de savoir s'il convient ou s'il est acceptable d'invoquer pour sa défense, quand on a tué quelqu'un, le fait d'avoir agi sous l'influence de la cocaïne ou de l'alcool, mais ce sera pour une autre fois.
L'idée, c'est que deux femmes sont mortes, trois enfants n'ont plus de mère et l'un d'entre eux restera profondément marqué pour la vie parce qu'à l'âge de quatre ans, il a vu sa mère poignardée à mort. Quelle est la cause de tout cela? La cocaïne, une drogue illicite. Cela fait partie de l'être humain.
Les députés m'entendent souvent dire à quel point j'aime accompagner les policiers de la GRC qui travaillent dans ma collectivité de Surrey. J'invite tous les députés à faire de même, pas seulement prendre un café et jaser, mais s'asseoir dans l'auto de patrouille et passer 12 ou 14 heures un vendredi ou un samedi soir. Ces soirées sont habituellement excellentes pour découvrir ce qui se passe dans la rue. J'essaie de le faire tous les deux mois avec mon détachement.
J'ai deux ou trois expériences dont je pourrais parler. La plupart du temps, c'est le train-train habituel, mais il y a parfois des incidents qui sortent de l'ordinaire. Il y a un an et demi environ, très tôt dans la soirée, nous avons reçu un appel par suite d'un vol à l'étalage dans un supermarché. Quand nous sommes arrivés sur les lieux, le garde de sécurité retenait une femme d'environ 35 ans, sans papier, qui avait volé trois boîtes de préparation lactée Enfalac, une marionnette à main et quelques petits articles.
Nous avons interrogé cette femme et découvert qu'elle n'avait pas reçu son chèque d'aide sociale et qu'elle n'avait plus de nourriture pour son bébé. Quand l'agent a introduit le nom de la femme dans l'ordinateur, il a découvert dans les registres de la police qu'elle était sous probation et qu'elle ne devait pas s'approcher à moins de 100 mètres du magasin. Elle avait manqué aux conditions de la probation.
Que pouvait faire l'agent? Où était le bébé? Il se trouvait au centre de désintoxication pour drogués où habitait sa mère depuis neuf mois. Le mari de cette femme s'occupait du bébé. Il avait le droit de leur rendre visite durant les week-ends car il habitait un autre centre de désintoxication.
Que pouvions-nous faire? Le policier l'a-t-il arrêtée sur-le-champ? Non. Il a essayé de l'aider et de lui donner une chance. La jeune femme a été ramenée à la maison où le père du bébé, lui aussi un toxicomane en cure, attendait avec le bébé de six mois.
Le policier a fait un constat et a exigé que la jeune femme promette de se présenter au poste de police le lendemain matin et de comparaître devant le tribunal un mois plus tard. Il lui a fait la morale. Je lui ai aussi donné ma façon de penser et lui ai dit qu'elle ne rendait pas service à son bébé en agissant de la sorte. Je lui ai dit qu'on essayait de lui rendre service. Le policier aurait pu l'arrêter sur-le-champ, mais il ne l'a pas fait.
Je suis revenu à Ottawa. Environ un mois plus tard, j'ai reçu un appel téléphonique du policier en question. La jeune femme ne s'était jamais présentée au poste de police et au tribunal. Un double mandat d'arrêt a été émis. Qu'adviendra-t-il du bébé? Voilà ce qui m'inquiète. C'est un autre bébé qui sera placé en famille d'accueil à titre de pupille de l'État et le cercle vicieux se répétera, tout cela à cause des drogues.
Que devrions-nous faire? Je pourrais adopter la ligne dure à l'égard de la mère et dire qu'il vaudrait mieux ne pas aider des gens comme ça. Je pourrais dire que nous pourrions leur donner toute l'aide possible, mais qu'ils ne veulent pas en profiter et qu'à un moment donné, il faut savoir reconnaître que c'est assez. Le bébé m'inquiète bien davantage car, avec lui, c'est tout le cercle vicieux qui s'enclenche à nouveau.
C'est facile de porter de tels jugements quand on n'est jamais allé voir comment ça se passe dans la rue. Les députés devraient voir ce qui se passe dans le centre-ville est de Vancouver ou dans le coeur du quartier Whalley à Surrey. Ils devraient voir les toxicomanes. On les appelle junkies et ratés. Je peux dire aux députés que ce ne sont pas des ratés, ce sont des gens qui ont des problèmes.
Un soir, c'était encore une fois lors d'une patrouille, nous nous sommes rendus à la maison d'un homme qui avait appelé la police parce qu'il avait trouvé son frère mort sur le plancher de la cuisine, une seringue à ses côtés. La victime était dans un état terrible. L'individu était maigre, décharné, sale. J'étais debout et je le regardais. Je me disais que cet homme était le fils de quelqu'un. C'est son frère qui nous avait appelés. Ne perdons jamais cela de vue. Nous n'avons pas affaire à des ratés. Nous avons affaire à des gens qui ont des problèmes et nous devons faire tout notre possible pour les aider. Certains veulent de l'aide et en recevront. D'autres n'en veulent pas, mais nous devons nous occuper d'eux aussi. Ce sont tous les enfants de quelqu'un.
J'ai moi-même des enfants. Le meurtre de mon fils a été l'expérience la plus traumatisante qu'il m'ait été donné de vivre. Ce crime avait un rapport avec la drogue. Mon fils ne prenait pas de drogue, mais les six personnes qui les ont attaqués ce soir-là, lui et ses amis, étaient droguées. Elles avaient consommé de la drogue toute la journée. C'est là le volet humain du problème.
Je sens que les personnes ici présentes sont tout à fait disposées à coopérer pour faire quelque chose à ce sujet. Nous avons tous nos petites idées sur ce qui devrait être fait, nos philosophies et façons de procéder. Toutefois, il est grand temps que nous exposions nos points de vue différents, que nous en discutions et que nous fassions quelque chose. Notre pays ne peut plus tolérer cette situation.
M. Grant Hill (Macleod, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de cette occasion qui m'est donnée de parler d'un sujet énormément controversé au pays. Je félicite le député de Langley—Abbotsford, qui a passé beaucoup de temps sur cette question et en a saisi la Chambre aujourd'hui. Pour les téléspectateurs qui viennent de se joindre à nous, je précise qu'il s'agit d'une motion visant l'examen des lois canadiennes en matière de drogues.
Je vais donner le point de vue de quelqu'un qui s'est promené avec un stéthoscope autour du cou pendant une bonne partie de sa vie.
Je vais aussi aborder l'aspect humain, comme l'a fait mon collègue. Je vais parler de quelques expériences que j'ai eues en traitant des problèmes de drogues et expliquer pourquoi, à mon avis, il faut jeter un regard nouveau sur ce que fait le Canada avec les lois sur les drogues.
Je vais commencer par parler d'une question de compétence, qui rend compte du point de vue différent que l'on a ici au Canada, par rapport à notre voisin du sud. J'ai noté cette semaine que la Cour suprême des États-Unis a pris fermement position sur la question de l'usage de la marijuana à des fins médicales. Elle n'a reconnu aucune valeur à la marijuana au plan médical.
Au Canada, nous avons adopté une approche différente. Au Canada, nous avons adopté une autre approche. Nous essayons de voir quelles maladies la marijuana peut soulager. Notre approche est très différente. En tant que médecin, je pouvais prescrire aux malades les analgésiques les plus puissants, surtout aux malades souffrant du cancer ou d'autres maladies graves à l'étape des soins palliatifs. Je pouvais prescrire de l'héroïne. Cela était acceptable car cela servait un but précis.
Selon moi, il est acceptable de prescrire de la marijuana si c'est le seul moyen de soulager un grand malade en phase terminale. Je ne crois cependant pas que le fait de fumer la marijuana soit la solution idéale. On a fait des recherches afin d'isoler les éléments actifs de la marijuana et d'en faire des comprimés ou des timbres comme la Nicorette. Je crois cela acceptable. Pour les malades en phase terminale, pour les soins palliatifs, pour les maladies graves où aucun autre médicament ne donne de résultat, je crois que la marijuana a sa place.
Mais que se produira-t-il si notre voisin du Sud piétine? Que feront les États-Unis? Que feront les Américains atteints d'une maladie grave qui vivent à deux pas de la frontière s'ils estiment que la marijuana est leur dernier recours? Ils pourraient fort bien traverser la frontière et venir au Canada. Ils pourraient fort bien exercer des pressions sur notre système de santé.
Je soulève cette question parce que je la trouve très importante au plan du partage des compétences. N'oublions pas ce qui se passe chez le voisin. Nous pourrions avoir des surprises.
J'ai participé au débat, écoutant les arguments des parties. Certains affirment qu'il vaudrait mieux imposer des sanctions plus légères pour les infractions relatives aux drogues. Dans certains cas, c'est un argument probant, car selon moi une personne intelligente qui examinerait les progrès que nous avons faits au Canada dans ce domaine dirait que nous avons beaucoup de chemin à faire. Je me reporte un peu à ce que le débat devrait à mon avis être en comité.
Que penser de l'argument voulant qu'il y ait avantage à avoir des lois moins sévères en matière de drogue? Pour avoir une idée de la réponse, je regarde ce qui s'est passé dans d'autres pays où on a essayé de le faire. Il est possible de voir ce qui se passe dans d'autres pays. Dans certains pays d'Europe, les pénalités pour usage de drogue sont sensiblement différentes.
Il y a un endroit, tout près de chez nous, qui nous donne une bonne idée de ce qui pourrait arriver. En Alaska, le pays de la liberté, le pays où l'on ne dicte pas aux gens ce qu'ils doivent faire, les autorités ont décidé de n'imposer pratiquement aucune pénalité aux adultes pour usage de marijuana. Aucune pénalité, aucune amende, rien. Il n'y a pas si longtemps, une personne adulte en Alaska qui voulait fumer de la marijuana pouvait le faire. C'est l'esprit pionnier des contrées éloignées, n'est-ce pas? Prenons maintenant le Yukon, un territoire qui a beaucoup de similarités avec l'Alaska, assez isolé comme ce dernier et avec une population similaire. Une comparaison de la situation au Yukon et de celle en Alaska faite 10 ans plus tard a révélé que la consommation de marijuana parmi les adolescents avait doublé en Alaska par rapport au Yukon, ce qui montre l'inefficacité de la politique appliquée en Alaska. J'ai entendu des gens soutenir qu'il s'agissait de pures statistiques. D'après mon point de vue, rendre simplement plus facile aux jeunes d'obtenir une drogue illicite ne constitue pas la réponse, du moins dans cet endroit. Je ne suis pas convaincu que ce soit la solution.
Je vais donner un autre exemple précis que je tire de mon expérience. Dans ma petite trousse noire, j'avais l'habitude d'avoir un médicament appelé Demerol. J'en avais toujours de petits flacons dans ma trousse. La véritable appellation chimique est Meperidine. J'en apportais lors de mes visites à domicile. Si quelqu'un s'était fracturé la jambe, par exemple, je lui faisais une injection de Demerol et le transport en ambulance se faisait plus confortablement. C'était une chose qu'il me semblait juste et raisonnable de faire. Le Demerol ne coûte pas cher du tout. J'avais besoin d'une ordonnance en triple exemplaire pour m'approvisionner et je la gardais toujours avec moi.
Il s'agit d'un narcotique puissant et bon marché. Combien vaut dans la rue un gros flacon de Demerol qui ne coûte même pas 10 $? Cela vaut plus ou moins 1 000 $. Pourquoi cela? On ne peut pas se le procurer dans la rue. C'est un puissant narcotique. Comme ses effets ressemblent beaucoup à ceux de l'héroïne, c'est un produit très populaire.
La seule façon d'obtenir du Demerol dans la rue, c'est de cambrioler une pharmacie, de le piquer dans la trousse d'un médecin ou de l'obtenir du fabricant. Il y a d'autres façons. Il y a des gens portant le sarrau de médecin qui en distribuent. C'est ainsi qu'il finit par se vendre dans la rue.
Je me sers de cet exemple car il s'agit d'un médicament peu coûteux, utilisé à des fins légitimes, mais qui devient très précieux sur le marché illégal. On commet des cambriolages pour s'en procurer. On commet des agressions pour en obtenir. On cause des dommages aux gens pour obtenir cette drogue. Les utilisateurs de cette drogue se livrent à des activités illicites afin de pouvoir s'en procurer.
Que se passerait-il alors si nous rendions toutes les drogues aussi disponibles que celle-là l'a été pour moi? Cet exemple me porte à croire que ce ne serait pas là la solution idéale non plus.
Qu'en est-il de ceux qui sont d'avis que nous devrions consacrer toutes nos ressources au traitement? C'est également là une question qui mérite discussion. On ne prévoirait cependant rien pour faire face à ceux qui tentent de passer les drogues. Nous laisserions tout simplement les gens faire ce qu'ils veulent. Il n'y aurait aucune pénalité pour le patient, puisque le toxicomane serait maintenant devenu le patient. Nous mettrions les drogues sur le marché, prévoirions des endroits munis d'une licence pour les distribuer et imposerions même des taxes. Elles deviendraient des ressources publiques et seraient très légales. Elles ne seraient plus illicites ni illégales, puisque la source d'approvisionnement serait reconnue par le gouvernement. À quoi cela ressemble-t-il? Cela ressemble tout à fait à la façon dont nous traitons déjà une autre drogue importante, l'alcool.
J'ai eu l'occasion au cours de ma carrière de m'entretenir avec un certain nombre de toxicomanes. J'aimerais faire savoir à la Chambre ce que d'ex-toxicomanes ont eu à dire à ce sujet. Lorsque d'ex-toxicomanes se demandent pourquoi ils ont commencé à consommer de la drogue, les principales raisons qu'ils donnent en général ont trait à une famille éclatée, à la pression des pairs, à la solitude ou au fait qu'ils aient été bernés par des revendeurs. Pourquoi ont-ils décidé de se désintoxiquer? Certains d'entre eux avaient touché le fond. D'autres s'étaient lancés dans la religion. D'autres encore ont eu l'aide d'un ami ou d'un conseiller en réhabilitation formidable.
Le débat porte sur ce que la société devrait faire. Mon collègue qui a proposé la motion suggère que nous nous penchions sur la question et que nous en discutions sérieusement. Je suis d'accord avec lui et j'espère que nos collègues d'en face le seront également.
[Français]
Le vice-président: Comme il est 17 h 15, il est de mon devoir d'interrompre les délibérations et de mettre aux voix sur-le-champ toute question nécessaire à l'expédition des travaux des subsides.
[Traduction]
Le vote porte sur l'amendement. Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement?
Des voix: D'accord.
(L'amendement est adopté.)
Le vice-président: Le prochain vote porte sur la motion principale modifiée. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
(La motion modifiée est adoptée.)
Le vice-président: Comme il est 17 h 30, la Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.
INITIATIVES PARLEMENTAIRES
[Français]
LA LOI MARITIME DU CANADA
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ) propose: Que le projet de loi C-253, Loi modifiant la Loi maritime du Canada, soit maintenant lu une deuxième fois et renvoyé à un comité.
—Monsieur le Président, je suis très heureux de saisir la Chambre de ce projet de loi que j'ai déposé et qui, finalement, vise à rendre la Loi maritime du Canada conforme à la réalité des ports régionaux.
Au départ, je vais donner un bref historique de la raison pour laquelle ce projet de loi a dû être présenté.
En 1995, le gouvernement du Canada a décidé de mettre en place une politique de dessaisissement des ports régionaux. Certains ports étaient inactifs, d'autres étaient en fonction, certains n'étaient pas rentables, pendant que d'autres l'étaient. Le gouvernement fédéral a alors décidé d'instaurer une politique qui permettrait aux milieux locaux, possiblement, d'acquérir ces installations portuaires.
Dans ma circonscription, le port de Cacouna était touché par cette situation. Une corporation de développement du port s'y est intéressée et a fait des études approfondies. Je dirais qu'elle a appris beaucoup sur tout l'aspect de la gestion d'un port commercial comme celui de Cacouna.
La règle s'est aussi généralisée dans tous les ports le long du Saint-Laurent—qui sont des ports régionaux—et l'analyse a prouvé qu'à moyen terme, il était impossible que, localement, les gens puissent devenir propriétaires, que la communauté devienne propriétaire, parce que c'était trop coûteux, étant donné les investissements à long terme. On a fait des propositions au gouvernement fédéral, il y a eu des contre-propositions, mais on n'en arrive jamais à des résultats, parce qu'effectivement, les infrastructures sont trop coûteuses.
Devant cet état de fait, j'ai examiné la Loi maritime du Canada et je me suis rendu compte que le gouvernement fédéral avait mis en place, pour les autorités portuaires canadiennes qui sont les grands ports canadiens, une structure qui permet au gouvernement d'en demeurer propriétaire, alors que la gestion courante du port est confiée aux milieux locaux.
Cela permet en même temps d'éviter de payer des taxes municipales se chiffrant à des montants astronomiques et d'établir une certaine compétition entre les ports, ayant pour résultat de mettre les ports en valeur et d'en faire la commercialisation.
Cependant, on n'a pas mené la même opération pour les ports régionaux où le gouvernement fédéral se contentait, je pense, de faire une espèce de ménage dans les installations existantes, de fermer celles qui n'étaient absolument pas opérationnelles pour permettre—je pense que les gens étaient quand même de bonne foi—aux milieux locaux d'acquérir des installations. Mais, comme je le disais, la pratique a démontré que c'était absolument impossible que cela puisse être pris en main par le milieu.
Suite à cette situation, l'ensemble des gens des ports régionaux ont réfléchi et j'ai tiré moi-même mes propres conclusions de cette réflexion.
Dans le projet de loi, je propose qu'un port régional puisse demeurer la propriété d'un gouvernement. Cela pourrait être le gouvernement fédéral, mais cela pourrait également être le gouvernement du Québec. La gestion du port serait confiée à des intérêts locaux.
Depuis la présentation de ce projet de loi, le gouvernement du Québec a posé un geste dynamique très positif. Il est intervenu auprès du gouvernement fédéral pour dire qu'il serait intéressé à mener une négociation pour acquérir un ensemble de ports, des ports, par exemple, du type de celui de Baie-Comeau, de Matane, de Rimouski, de Cacouna et peut-être le port de Gaspé, qui était déjà en négociation avec le fédéral et qui était très avancé dans celle-ci.
L'ensemble de cette proposition du gouvernement du Québec serait intéressante parce que cela répondrait exactement au même objectif que celui contenu dans le projet de loi que j'ai déposé. Le projet de loi permettrait également la mise en place de telles transactions parce que j'ai bien prévu que le gouvernement provincial, en l'occurrence celui du Québec, pourrait devenir propriétaire des installations et en confier la gestion à des instances locales.
Cette situation s'inscrit dans ce que je qualifierais de l'abandon de toute la question de la politique maritime au Canada. Pendant des années et des décennies, nous avons vu que le gouvernement fédéral, même s'il avait la responsabilité constitutionnelle des questions maritimes, a laissé aller plein de choses.
Le député de Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière le sait mieux que quiconque. Il a mené une guerre extraordinaire pour permettre que, en ce qui concerne la construction maritime, nous puissions enfin avoir une politique, mais nous ne l'avons toujours pas. Malgré ses attaques répétées, ses propositions et les actions qu'il a menées, nous attendons toujours ce que le gouvernement fédéral va faire.
La même chose s'est produite en ce qui concerne le réseau portuaire. Dans la Constitution, cette responsabilité appartenait au fédéral. Toutefois, pendant des années, le gouvernement a tout simplement fait, je dirais, des travaux de bouts de chandelles. Quand la pression était trop forte dans un milieu, quand la pression politique partisane était importante, le gouvernement faisait l'équivalent d'un petit bout d'asphalte. On en mettait un peu pour calmer l'opinion publique, pour pouvoir gagner une élection, mais il n'y avait pas de stratégie intégrée de développement, comme il n'y avait pas de stratégie intégrée de gestion du fleuve, entre autres, du Saint-Laurent.
Je pense que nous devons faire beaucoup d'efforts de ce côté. La proposition du gouvernement du Québec pour négocier en vue de l'acquisition les ports va être un mouvement dans le bon sens d'autant plus qu'il se prépare à déposer une politique maritime. Dans les prochaines semaines, pour la première fois depuis la Confédération, il va vraiment y avoir une politique maritime pour développer le fleuve Saint-Laurent, pour faire en sorte de mettre en valeur cette magnifique autoroute qui permet le transport dans les meilleures conditions en matière environnementale. Cela coûte beaucoup moins cher en termes de coûts à long terme. Cela permet un développement durable, cela permet également d'accroître les communications tout le long du fleuve et de mettre en contact la rive sud et la rive nord.
On pourrait réinventer beaucoup de choses en ce qui concerne, entre autres, le cabotage et permettre qu'il y ait des types de traversiers spécialisés dans le transport des matières premières, des matières transportées par cargo. D'autres traversiers pourraient faire le transport des véhicules réguliers et des citoyens, soit des piétons qui veulent se rendre l'autre côté. Il y a toutes sortes de choses possibles.
Cependant, étant donné que le gouvernement fédéral a renoncé à ses responsabilités en la matière, le gouvernement du Québec, sous l'inspiration de M. Jacques Baril, le ministre délégué aux Transports et responsable de ce dossier, un homme très réaliste et très concret, a vu là une fantastique opportunité.
Il s'est rendu au port de Cacouna, où on a analysé des projets qui pourraient être mis sur pied en matière de transport entre les côtes, le tout relié à l'immense développement économique que l'on voit sur la Côte-Nord dans des entreprises importantes.
Cette volonté du gouvernement du Québec va se traduire par une politique maritime qui sera présentée au cours des prochaines semaines. Elle est le fruit d'une consultation avec tous les intervenants de ce milieu. C'est très important.
Les gens dont je parlais plus tôt, qui ont travaillé dans les différentes corporations de développement portuaire, font partie de cette consultation, de même que les arrimeurs du Québec et les transporteurs maritimes propriétaires de bateaux.
Le résultat sera traduit dans la politique maritime qui sera annoncée. À mon avis, ce sera un moment historique pour l'utilisation du fleuve, une relance extraordinaire pour permettre au fleuve Saint-Laurent de redevenir ce qu'il était à l'origine, une occasion fantastique de contacts avec les autres continents.
Cette semaine, nous avons eu une journée de lobby avec des gens de l'industrie maritime du Canada. On nous a expliqué, entre autres, qu'à l'intérieur des Amériques, beaucoup de transport se fait par camion, mais que pour ce qui est du commerce du Québec et du reste du Canada avec tous les autres pays du monde, c'est vraiment le transport maritime qui est utilisé. On sait aujourd'hui à quel point les infrastructures de transport sont importantes.
En bout de ligne, c'est souvent ce qui détermine si, oui ou non, ou pourra vendre un produit à l'extérieur. Quand on peut couper une partie des coûts de transport, on décroche des contrats. Il y a une dynamique importante en jeu, soit de savoir par où les bateaux passeront. Est-ce que, effectivement, on n'a pas intérêt à ce que le fleuve Saint-Laurent soit utilisé à bon escient et qu'on puisse entrer jusqu'à Montréal, se servir ensuite de l'intermodalité, notamment du chemin de fer, ou du transport par camion, de façon à maximiser l'impact que cette industrie peut avoir?
S'il était adopté, le projet de loi dont nous débattons aujourd'hui permettrait d'obtenir une nouvelle forme de propriété et de participation de la communauté dans les installations portuaires. Cela permettrait en même temps la flexibilité pour qu'un gouvernement provincial puisse acquérir un certain nombre d'installations et en confier la gestion aux instances locales.
Je pense que c'est un modèle qui est un peu le résultat du consensus, du mûrissement que l'on a vu au cours des dernières années. Je souhaite que le gouvernement fédéral applique à cette question la même sensibilité que celle qu'il avait eue dans le cadre de la consultation sur la Loi maritime du Canada où, initialement, les autorités portuaires canadiennes étaient censées devenir propriétés locales et être soumises à toutes les lois municipales, notamment la taxation.
Suite à des consultations partout au Canada, on a corrigé la situation. Le gouvernement fédéral est demeuré propriétaire mais a confié la gestion à des instances locales. Cela donne des résultats intéressants. On voit que c'est un modèle qui fait son chemin. De l'autre côté, pour les ports régionaux, on avait oublié de permettre cette situation.
Je pense que le projet de loi que je propose serait un amendement intéressant, une mise à jour de la Loi maritime du Canada. Il permettrait de concrétiser ces situations et donnerait aux ports régionaux la chance d'aider les régions à se développer.
Dans une région comme la mienne, le port de Cacouna est une infrastructure importante. Il y a la construction du gazoduc qui vient de l'île de Sable et qui, à moyen terme, passera dans la région de Rivière-du-Loup et pourrait, par le port, servir à l'exportation. C'est aussi un port qui offre des possibilités d'exportation comme, par exemple, le lait en poudre qui est produit à Saint-Alexandre de Kamouraska et vendu dans les pays d'Afrique du Nord.
On peut aussi redévelopper toute la question de l'exportation du bois et mettre en place un réseau de cabotage. Ainsi, la communication avec la Côte-Nord enlèvera de la pression sur le transport routier de la Côte-Nord et évitera des problèmes, notamment pour l'industrie touristique.
Il faut donc voir avec un oeil nouveau toute la question du transport fluvial pour en faire un des éléments d'une politique intégrée de transport, ce qui, selon moi, aurait été fait depuis longtemps s'il n'y avait qu'un seul gouvernement responsable de la question des transports.
Regardons ce qui s'est produit dans le passé. Le gouvernement provincial, étant responsable des routes, a dépensé de ce côté. Il a investi pour que cela fonctionne correctement. Le gouvernement fédéral, lui, était responsable d'autres domaines. Dans certains secteurs, il était tellement loin de la réalité, qu'il n'a pas nécessairement fait les investissements pertinents.
S'il n'y avait eu qu'un seul gouvernement, il aurait pu s'assurer que sa politique permette l'intermodalité des moyens de transport, les mette en commun, fasse que cela puisse être utilisé correctement, maximiser l'utilisation du fleuve Saint-Laurent. On aurait pu maximiser l'impact des ports, comme celui de Cacouna, où il y a une bonne profondeur d'eau. Ainsi, on aurait eu un point de contact vers le nord-est américain. On pourrait, de cette façon, permettre un développement économique plus grand que celui que l'on connaît présentement.
En conclusion, je voudrais dire que ce projet de loi se veut une contribution positive à une meilleure utilisation des infrastructures portuaires qui existent au Canada. Je sais que les régions sont prêtes à assumer la gestion de ces installations portuaires.
Je crois que les gouvernements, comme celui du Québec, auraient les reins assez solides pour avoir un réseau intégré. On pourrait utiliser tous les ports en communauté d'action, ce qui maximiserait leurs avantages et permettrait de faire un marketing international intéressant.
Je souhaite avoir l'écoute de la Chambre pour qu'un tel projet de loi puisse modifier la Loi maritime du Canada. Ce serait à l'avantage de l'économie de toutes les régions du Québec et du Canada.
[Traduction]
M. Brent St. Denis (secrétaire parlementaire du ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je remercie mon collègue pour son travail au sujet du projet de loi C-253.
La Loi maritime du Canada, que le député souhaite voir modifier, doit faire l'objet d'un examen législatif en juin 2003. Compte tenu que de nombreux autres éléments devront aussi faire l'objet d'un examen dans le cadre de l'examen de la Loi maritime du Canada, nous estimons qu'il est préférable d'attendre à juin 2003 pour examiner les propositions soumises par le député.
Permettez-moi de donner quelques explications au sujet de la Loi maritime du Canada et des raisons de notre position, nonobstant le bon travail que le député a accompli et qu'il continuera certainement de faire.
La Loi maritime du Canada a été adoptée en 1998. La loi avait pour objet et permet effectivement d'aider le système portuaire canadien à devenir plus efficace, plus concurrentiel et davantage axé sur le commerce, afin de commercialiser les activités de la voie maritime du Saint-Laurent et des services de traversiers, et pour améliorer les activités des administrations de pilotage. Ce projet de loi a marqué le premier effort intensif en vue d'accroître la compétitivité et de réduire les coûts du secteur maritime. En faisant en sorte que les ports puissent fonctionner plus aisément selon les principes d'entreprise, la loi contribuera à rendre le secteur maritime encore plus compétitif qu'il ne l'est actuellement.
Les bienfaits de la loi sont substantiels. Les ports bénéficient d'un allégement de la paperasserie et d'une liberté accrue de passer des contrats et des baux et d'établir des tarifs et droits et, puisque le financement ne sera plus assuré par le Trésor fédéral, les ports seront plus libres de solliciter les capitaux privés pour financer leurs projets.
La Loi maritime du Canada a été adoptée à la suite d'un processus d'examen long et exhaustif. En 1994, le ministre des Transports a demandé au Comité permanent des transports de la Chambre des communes d'entreprendre une vaste étude du secteur maritime, ayant reconnu le besoin inhérent de moderniser le système maritime canadien, de sorte que les principaux ports et autres infrastructures maritimes soient en mesure de bien répondre aux exigences du commerce international, qui est indispensable à la croissance économique du Canada.
Autrement dit, il nous fallait un système portuaire qui puisse servir efficacement les expéditeurs canadiens et étrangers, un système qui soit à la fois non seulement fiable et compétitif, mais qui puisse aussi concurrencer les meilleurs systèmes portuaires au monde.
Le comité permanent a publié son rapport en 1995, après avoir recueilli les points de vue des gouvernements provinciaux, des municipalités, des organismes syndicaux, des expéditeurs et d'autres parties prenantes de l'industrie maritime.
En décembre 1995, à l'issue d'une nouvelle ronde de consultations, nous avons annoncé notre politique maritime nationale et notre intention de présenter un projet de loi qui apporterait des changements considérables aux ports, à la voie maritime, aux services de traversiers et aux administrations de pilotage de l'industrie maritime.
La Loi maritime du Canada a reçu la sanction royale le 11 juin 1998.
Il s'agit d'une réussite. Les principaux ports commerciaux du Canada sont maintenant en mesure, pour la première fois, de livrer concurrence à armes égales. Ils ont les outils nécessaires pour soutenir la concurrence en ce début du XXIe siècle.
La Voie maritime du Saint-Laurent, qui passe à côté de la circonscription de notre président, a été commercialisée, ce qui signifie que le contrôle de cette organisation a été confié à une société sans but lucratif contrôlée par les usagers du système, qui réalisent des économies. Les services de traversier ont également été commercialisés, tandis que des changements ont été mis en oeuvre dans le régime de pilotage.
La Loi maritime du Canada prévoyait la dissolution de la Société canadienne des ports, qui a eu lieu le 1er novembre 2000. Récemment, le fonctionnement des ports du Canada était assujetti à un processus décisionnel centralisé au sein du gouvernement, ce qui comprenait le rôle de la Société canadienne des ports.
Pour être en mesure de soutenir la concurrence des ports américains, les ports du Canada devaient accélérer leurs opérations et réduire leurs frais généraux pour être à même de prendre des décisions locales éclairées sur une base commerciale. Les nouvelles administrations portuaires sont une réussite parce que le contrôle des ports a été confié à ceux qui sont le mieux placés pour s'adapter à la concurrence et introduire des gains d'efficacité dans le secteur maritime.
Le secteur maritime est d'une importance cruciale pour la compétitivité du Canada sur les marchés mondiaux. Il nous procure un avantage stratégique marquant pour le transport des produits essentiels à des industries importantes comme celles de l'acier et du trafic conteneurisé. Il est également devenu évident que le mode du transport maritime est en mesure non seulement de profiter de la croissance de l'industrie touristique mondiale, mais également d'y jouer un rôle.
Le secteur des croisières au Canada connaît une croissance spectaculaire, à en juger par le nombre d'escales annuelles dans les ports canadiens situés sur la côte du Pacifique et de l'Atlantique et par sa contribution à l'économie canadienne. On prévoit que l'industrie canadienne des croisières continuera de se développer pendant encore un certain temps.
À noter toutefois que la société se tourne vers le transport maritime pour qu'il joue un rôle d'orientation et établisse la norme pour un mode de fonctionnement sûr et écologique. Il est évident que l'importance de ce mode de transport n'est pas seulement de nature économique. L'adoption de la Loi maritime du Canada a eu des effets sur d'autres aspects de notre bien-être.
La Loi maritime du Canada visait à réduire l'importante participation fédérale aux activités portuaires, d'instaurer un processus décisionnel hautement commercial, de favoriser l'autonomie financière et de réduire les inefficiences et la surcapacité. Selon moi, nous sommes sur la bonne voie.
En outre, dans le cadre de l'ancien régime, nous estimons que le contribuable canadien n'obtenait pas un rendement suffisant sur les fonds accordés à de nombreux projets d'aménagement portuaire. Jusqu'à maintenant, nous avons créé 18 administrations portuaires au Canada, et ce nombre sera bientôt porté à 19, avec la mise en place de l'administration du port de Hamilton.
Les administrations portuaires canadiennes sont définies comme des sociétés constituées en vertu d'une loi fédérale, sans capital-actions et sans but lucratif, dont les pouvoirs et les responsabilités sont semblables à ceux des sociétés établies en vertu de la Loi sur les sociétés par actions. Dans le cadre de ce régime, qui a retenu divers aspects de l'ancien système, la Loi maritime du Canada accorde aux administrations portuaires du Canada l'autonomie et la souplesse nécessaires pour exercer leurs activités selon des principes commerciaux et prendre des décisions en matière d'investissement dans leur intérêt général.
Les modifications proposées dans le projet de loi C-253 prévoient la création d'une troisième classe de ports qui recevront automatiquement des fonds fédéraux. Ces ports rivaliseront directement avec les administrations portuaires canadiennes à qui il est interdit de recevoir des crédits autres que ceux d'un programme d'application générale.
En vertu de la Loi maritime canadienne, les administrations portuaires canadiennes exercent davantage leurs activités selon des principes commerciaux qu'elles ne le faisaient sous l'ancien régime. Comme les administrations portuaires ne sont pas admissibles à des fonds fédéraux, elles sont tenues de s'adresser aux marchés privés pour obtenir du financement. Cette situation permet aux administrations portuaires de prendre des décisions en manière d'investissement dans leur intérêt, sans l'approbation préalable du gouvernement. Par conséquent, elles sont plus à même de réagir comme il se doit aux changements incessants qui surviennent dans le contexte commercial d'aujourd'hui.
De plus, la Loi maritime du Canada habilite les administrations portuaires à établir leurs propres règlements de fonctionnement et leurs droits portuaires sans l'autorisation préalable du gouverneur en conseil. En aidant les ports à exercer leur activité en fonction de principes commerciaux, en réduisant les formalités administratives ainsi que les frais généraux, la loi aide les administrations portuaires à répondre à leurs propres besoins et à ceux de leurs clients. De même, les administrations aéroportuaires sont maintenant habilitées à louer des terrains et à déterminer les priorités au chapitre des dépenses d'immobilisations.
La création d'une nouvelle classe de ports à qui des subventions seraient versées aurait pour effet de compromettre les règles du jeu financières uniformes et les pouvoirs qui ont été créés pour les ports dans tout le Canada. Le gouvernement estime que le projet de loi est inutile et signifierait le retour des inefficacités et de la surcapacité qui existaient avant l'adoption de la Loi maritime du Canada.
Un autre grand objectif de la Loi maritime du Canada consistait à concentrer les activités du gouvernement canadien sur les ports jouant un rôle capital dans le commerce intérieur et international. Ces ports sont devenus ou deviendront des administrations portuaires canadiennes. Tous les autres ports, sauf ceux situés en régions éloignées, doivent être cédés à des intérêts locaux ou régionaux.
Je crois que ce sont les usagers locaux qui sont les mieux placés pour déterminer le niveau de service dont ils ont besoin dans ces ports et que le gouvernement du Canada est prêt à négocier des conditions justes et raisonnables de financement pour aider à la viabilité à long terme de ces installations.
À cet égard, le gouvernement a également mis sur pied un fonds de cession de 125 millions de dollars. Les objectifs du fonds sont multiples: procéder à la cession des ports en conformité avec une norme minimale de sécurité ou d'exploitation; assumer une partie des coûts du cessionnaire appelé à se conformer aux dispositions réglementaires ou à des exigences en matière d'assurance; verser un montant global pour faciliter la prise de possession du port; aider un groupe de collectivités ou d'autres intérêts à prendre possession d'un groupe de ports et réaliser des économies par la rationalisation de l'infrastructure.
Bref, il s'agit de faciliter les cessions de ports et d'effectuer une contribution spéciale à la viabilité à long terme du port.
Le gouvernement a fait du bon travail avec la Loi maritime du Canada. Son examen quinquennal est prévu pour juin 2003. J'invite le député d'en face à discuter de ses idées avec les autres intervenants de l'industrie maritime et à veiller à ce qu'elles soient retenues lors de cet examen. Nous lui souhaitons quand même bonne chance dans son travail au nom de ses électeurs.
M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD): Monsieur le Président, je suis heureux d'appuyer le projet de loi. Mes observations porteront principalement sur l'expérience que nous avons connue dans ma localité, une expérience n'a pas été agréable, malgré ce qu'a dit le gouvernement au cours des dernières minutes.
Je suis très intéressé par l'approche du député du Bloc. Il recommande que ce projet de loi confère le pouvoir de transférer la gestion et le contrôle de ces ports à la province. Nous voudrions, en dernière analyse, que ces aspects soient transférés à la municipalité, en raison de l'expérience que nous avons connue à Windsor.
Cependant, comme je l'ai dit, nous sommes tout disposés à appuyer ce projet de loi, car je crois que, inévitablement, du moins en Ontario, la province finira pas céder aux municipalités la gestion et le contrôle de ces ports ainsi que de la circulation dans ces derniers.
Je suis tout à fait d'accord avec mon collègue du Bloc québecois au sujet de la nécessité de mettre en place une politique intégrée pour les transports. Toutefois, j'ajoute que nous avons également besoin d'un programme intégré qui permette aux municipalités de procéder à la planification nécessaire au bon fonctionnement d'une grande ville.
Il convient aussi de rappeler que, du fait de la nature même de certaines terres gérées par l'Administration portuaire de Windsor, la question de la conservation entre en jeu.
L'expérience de Windsor n'a pas été agréable. Des nombreux différends ont opposé l'Administration portuaire aux autorités municipales au sujet de la gestion des transports et du transport des marchandises, de la planification municipale en particulier, et de certaines terres détenues par l'Administration portuaire. La ville envisageait des projets précis non seulement pour les terres qui lui appartenaient en propre, mais aussi pour certaines terres voisines.
Il y a eu dans certains cas de graves frictions au sujet du rôle de l'administration municipale et des macroprojets que celle-ci contemple pour ces terres. La municipalité s'est butée à différentes occasions à l'Administration portuaire. En fait, j'ai déposé à la Chambre, il y a environ une semaine de cela, une pétition à ce sujet. Cette pétition concerne une certaine propriété en bordure de la rivière Detroit, qui pourrait servir de voie d'accès à une importante zone de conservation dans la ville de Windsor, mais qui est aujourd'hui gérée par l'Administration portuaire. Les autorités portuaires voudraient développer à des fins commerciales ce terrain qui servirait de barrière pour le gibier à plume qui utilise la rivière Détroit comme base et se déplace dans cette autre région. Le terrain en question sert de pont. À Windsor, un groupe environnementaliste local a demandé que ce terrain soit désigné un parc, mais sa démarche n'a pas obtenu le moindre appui des autorités portuaires.
Il y a eu d'autres projets dans la ville, dont on aurait souhaité la réalisation, mais ils ont également échoué pour une raison quelconque à cause des autorités portuaires qui veillent à leurs propres intérêts.
J'ai un autre argument à présenter concernant l'histoire du projet de loi dont nous sommes maintenant saisis. Le député du gouvernement a parlé de l'étude faite au milieu des années 1990 qui avait abouti à une loi adoptée en 1998. La ville de Windsor avait alors envoyé une délégation à Ottawa pour faire valoir diverses propositions sur la manière dont la loi devrait prévoir l'utilisation et la gestion du terrain, mais ces propositions n'avaient nullement été prises en compte.
Les modifications proposées dans ce projet de loi d'initiative parlementaire seraient beaucoup plus conformes à la position défendue à l'époque par Windsor.
Je suis heureux de souligner que mon parti appuie ce projet de loi d'initiative parlementaire. Dans l'hypothèse où il ne serait pas adopté, et je suppose que ce sera le cas à cause de la position défendue par le gouvernement, la question sera de nouveau soulevée à la fin du délai de cinq ans lors de la révision. Le gouvernement et le député bloquiste peuvent avoir l'assurance qu'à ce moment une délégation de Windsor se présentera ici de nouveau pour proposer divers moyens de mieux utiliser ce terrain.
M. Norman Doyle (St. John's-Est, PC): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir parler un peu du projet de loi C-253, Loi modifiant la Loi maritime du Canada.
Dans le résumé au début du projet de loi d'initiative parlementaire, on explique que cette mesure législative créerait une nouvelle catégorie de ports exploités sous l'appellation de «conseils portuaires locaux». On précise ensuite:
Les ports régionaux et locaux qui deviennent des conseils portuaires locaux n'ont pas à être autonomes financièrement lors de leur constitution et qu'ils peuvent bénéficier d'une aide financière fédérale.
On ajoute ensuite:
Lorsque l'autonomie financière est atteinte, certains aspects d'un conseil portuaire local peuvent être cédés à l'autorité provinciale où est situé le port opérant comme conseil portuaire local.
Comme il s'agit d'un projet de loi d'initiative parlementaire, je suppose que le parrain de la mesure législative à l'étude a, dans sa région ou sa circonscription, un ou des ports qui sont visés par le projet de loi. Au fil des ans, de nombreux ports qui étaient exploités directement par le gouvernement fédéral ont été confiés à des administrations portuaires locales.
Il est intéressant de voir ce qui s'est produit dans certaines provinces de l'est du Canada, notamment dans ma province, celle de Terre-Neuve. La négligence dont le gouvernement fédéral a fait preuve dans ses rapports avec les petites localités qui ont des quais de ce genre. Ces petits quais et ces ports locaux ont été aménagés dans le cadre du programme Canada au travail ou grâce à des subventions du Programme d'initiatives locales. Or, depuis qu'il a été porté au pouvoir il y a dix ans, le gouvernement actuel a complètement abandonné ces petites localités et les a laissées aller à la dérive.
Lorsque les localités cherchent à obtenir des fonds pour réparer ces petits quais locaux, on leur chante la même vieille rengaine et on leur dit qu'il n'est plus rentable de garder en exploitation ces quais et ces ports. Par conséquent, ils se détériorent. Le gouvernement fédéral leur dit adieu et il refuse de donner des fonds parce qu'il dit que ces installations sont devenues dangereuses et qu'elles constituent un risque pour la navigation.
Par conséquent, pour les ports qui ont suffisamment de trafic et qui possèdent déjà une infrastructure appropriée, ça va. Ces ports sont en mesure de se tirer assez bien d'affaire. Leur situation financière est viable et ils montrent une souplesse et une réceptivité que seule une administration locale indépendante peut avoir. Toutefois, dans le cas des petites collectivités, la viabilité des ports et des havres ne peut être assurée sans l'engagement du gouvernement fédéral.
Le problème vient du fait que le port local a des utilisateurs locaux fidèles ou s'avère vital pour l'économie locale, mais n'est pas pour autant viable d'un point de financier. Le gouvernement semble vouloir abandonner l'exploitation de ces installations qui constituent un service public.
Par exemple, le ministère des Pêches et des Océans se départit actuellement de 325 ports à l'échelle nationale. C'est un dur coup pour ces collectivités. En tout, 42 p. 100 de ces ports sont situés à Terre-Neuve. Je dirais à mon collègue que bon nombre des ports visés se trouvent en Nouvelle-Écosse, dans le comté de Guysborough, et au Nouveau-Brunswick. Cependant, 42 p. 100 se trouvent à Terre-Neuve.
Compte tenu de la situation de l'économie rurale de la province, dans plusieurs cas, personne ne proposera l'établissement d'une administration portuaire locale. Il y a peut-être, sur la liste, de nombreux autres ports dans d'autres provinces qui ne sont pas financièrement viables. Qu'adviendra-t-il de ces ports?
Auparavant, bon nombre des quais, des hangars et des digues portuaires étaient offerts en vente au mieux-disant pour être démontés ou démolis, mais le mot d'ordre du gouvernement fédéral ces jours-ci est la viabilité ou la mort. Si ce n'est pas financièrement viable, ça doit disparaître. Le secrétaire parlementaire prend la parole à la Chambre et présente des rapports flatteurs sur le gouvernement fédéral et sa façon de gérer ce dossier, mais ce n'est tout simplement pas vrai.
Je l'invite à se rendre dans le Canada atlantique. Il devrait sortir du Canada central et aller visiter l'arrière-pays. Il devrait venir dans le Canada atlantique pour voir ce qui se passe dans les petites collectivités. Je suis convaincu que le secrétaire parlementaire et le ministre des Transports verraient d'un angle bien différent ce qu'ils font à ces petites communautés. Le mot d'ordre du gouvernement est la viabilité ou la mort pour les ports.
Au fait, la même chose s'applique aussi aux aéroports. De nombreux aéroports du Canada rural sont soumis à l'autorité d'administrations aéroportuaires locales et doivent lutter pour survivre. Ces aéroports sont parfois essentiels pour la population et l'économie locales, mais le nombre de vols n'est pas suffisant pour assurer leur viabilité économique. Ce qui attend bon nombre de ces ports et aéroports est la fermeture, à moins que le gouvernement n'accepte de les subventionner.
Le projet de loi C-253 ne traite pas directement de la question de principe, à savoir si le gouvernement fédéral devrait soutenir directement les ports non viables financièrement parce qu'ils constituent un service public. Toutefois, le député qui propose le projet de loi offre au gouvernement fédéral une voie indirecte pour maintenir des ports non viables en activité en créant une nouvelle entité appelée conseils portuaires locaux.
Ce projet de loi offre au gouvernement un véhicule pour continuer à subventionner des ports financièrement non viables. Le secrétaire parlementaire et le ministre des Transports feraient bien d'écouter le député qui propose le projet de loi.
Je note que le libellé du projet de loi dit que le ministre peut approuver la création d'un conseil portuaire local. Le ministre peut offrir une aide financière audit conseil portuaire local. Le ministre peut céder au gouvernement provincial une partie ou la totalité des installations une fois le port financièrement viable.
Les gens d'une région pourraient très bien être en faveur de la création d'un conseil portuaire local pour sauver un port financièrement non viable, mais ils dépendraient de la bonne volonté du ministre pour que tout cela devienne réalité.
Pour être plus crédible, un projet de loi tel que celui-ci devrait établir des critères objectifs de la viabilité des ports. Si un port répond aux critères, le projet de loi pourrait dire que le ministre devra offrir une aide financière tant qu'il n'est pas viable. Le problème est que je ne suis pas certain que le ministre aimerait être lié par un tel libellé.
Le gouvernement semble se retirer de tout un tas de services qui ne sont pas financièrement viables. Si des entités locales ne peuvent pas gérer des services en autonomie financière, nous pouvons nous attendre à la fermeture ou à l'élimination de ces derniers. Comme je le disais il y a un instant, depuis sept ou huit ans, le slogan du gouvernement est viabilité ou mort.
Le projet de loi du député a au moins le mérite d'attirer l'attention sur une réalité de plus en plus évidente: l'élimination totale des services fédéraux dans les régions rurales du Canada. Le bureau de poste se trouve maintenant dans la pharmacie locale. Les embranchements ferroviaires ont disparu. Les aéroports locaux ferment. Les ports sont abandonnés ou démantelés.
Le député de Pictou—Antigonish—Guysborough a dit que le gouvernement fédéral avait hâte de se retirer de toute une gamme de services. Les banques sont sur sa liste. Il y a tout un tas de choses sur sa liste. Comme je le disais, viabilité ou mort, tel est le slogan du gouvernement.
Si le projet de loi du député aide à attirer l'attention sur un port potentiellement viable dans sa région, et s'il braque le projecteur sur les problèmes que nous vivons dans les régions rurales du Canada atlantique, alors il aura valu la peine. Je tiens à féliciter le député pour avoir présenté ce projet de loi. Nous ne manquerons pas de l'appuyer.
[Français]
M. Antoine Dubé (Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, BQ): Monsieur le Président, les députés comprendront que connaissant mon intérêt pour le domaine maritime et spécialement la construction navale, c'est avec plaisir et enthousiasme que j'ai accepté l'invitation de mon collègue de Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques à prendre la parole au sujet de son projet de loi.
J'ai également une deuxième raison pour avoir accepté son invitation. C'est parce que, à mon avis—il n'aimera pas cela parce que je ne l'ai pas averti—, ce député et collègue est un modèle de député dans le sens qu'il est soucieux de l'intérêt de son coin de pays et de sa circonscription. C'est quelqu'un de très actif à la Chambre et qu'on ne peut pas accuser d'être négatif. Le projet de loi qu'il a préparé de longue date et dont nous discutons aujourd'hui est une proposition que le gouvernement semble avoir considérée.
J'ai entendu les propos de mon collègue libéral dont j'oublie malheureusement le nom du comté qu'il représente.
Une voix: Le comté d'Algoma—Manitoulin.
M. Antoine Dubé: J'ai entendu mon collègue libéral du comté d'Algoma—Manitoulin et il s'est montré très réceptif à l'idée. C'est agréable de constater des attitudes semblables de temps à autre de la part des députés de l'autre côté de la Chambre. Il a probablement constaté lui aussi l'intérêt d'une chose semblable, soit une politique qui concerne les ports.
J'ai également une troisième raison de m'intéresser à ce débat. Bien que je sois député de Lévis-et-Chute-de-la-Chaudière, je suis né dans la circonscription de mon collègue du Bloc québécois. J'étais plus particulièrement dans cette partie du comté qui regroupe Rivière-du-Loup. Lorsque j'étais jeune, même si je ne suis pas encore très vieux, l'avenir du port de Cacouna, de Gros-Cacouna, comme on dit chez nous, avait fait l'objet de plusieurs campagnes électorales.
Je me souviens d'un député libéral de l'époque, maintenant décédé, qui était, il faut le dire, l'ancien maire de Rivière-du-Loup. Il avait sans doute la cote puisqu'il a été réélu sept fois. À ce sujet, il s'était passé quelque chose d'assez spécial. Le député avait promis, presque à chaque élection, qu'il obtiendrait le port. C'était un modèle de persévérance. Toutefois, lorsqu'il a réussi à obtenir le port de Cacouna, il s'est présenté à l'élection et s'est fait battre.
Ce sont peut-être des leçons comme celle-là que le premier ministre actuel a retenues en disant qu'il valait mieux promettre que réaliser. J'espère que ce n'est pas ça. Enfin, c'est un cas typique, et tout le monde, dans l'est du Québec, connaît cette situation.
Sans vouloir minimiser les autres ports du reste du golfe, c'était et c'est encore le port le plus important de la rive sud, après celui de Québec. Pour la région, c'est une infrastructure très importante. La solution que propose mon collègue est pertinente, parce que cette infrastructure ne peut pas, du jour au lendemain, devenir autosuffisante dans l'état actuel des choses.
Le port est encore la propriété du gouvernement fédéral qui voulait que le milieu se l'approprie. Le projet de loi que présente mon collègue est un peu un compromis; c'est un peu le principe que le milieu s'approprie une infrastructure de cette importance, tout en disant: «Écoutez, on veut être réalistes. On n'est pas capables de le faire, comme ça, d'un coup sec, immédiatement.»
Il s'agit donc de modifier la Loi maritime du Canada de façon à permettre à ce milieu, qui a une volonté réelle de s'approprier ce port mais qui, en même temps, n'a pas la capacité, dans l'état actuel des choses, de le développer comme il conviendrait.
Bien sûr, j'appuie le projet de loi de mon collègue, mais il y a un projet qui est encore plus long à développer que le port de Cacouna. Il a fallu encore plus d'élections que celle-ci, et je parle de la fameuse politique de marine marchande.
On parle de cela depuis aussi longtemps que je me souvienne, et je me suis intéressé à la politique très tôt. On a toujours parlé de cela, depuis l'après-guerre. Le Canada avait, au moment de la guerre, l'une des flottes marchandes, des flottes de guerre la plus importante au monde.
Avec trois océans, avec la voie maritime navigable la plus longue au monde et la proximité du plus grand marché au monde, les États-Unis, comment se fait-il qu'on soit encore obligés de quémander une politique de marine marchande, une politique de développement de transport?
Le domaine du transport maritime est le système le plus avantageux sur le plan économique, le moins dangereux sur le plan écologique, et il est quand même utilisé pour transporter 80 p. 100 des marchandises dans le monde entier.
On va faire un peu d'histoire: un général à la retraite me parlait du dossier des anciens combattants. Il me donnait son point de vue sur ce qui s'est produit pour que le Canada change de cap, tout d'un coup, après la guerre. Il y avait des milliers de personnes qui travaillaient dans la marine, dans les ports. Il y avait une activité de cabotage extraordinaire. Qu'est-ce qui est arrivé?
Je vais décrire rapidement ce qui est arrivé: il y a eu des situations où on a dû faire face au phénomène des paradis fiscaux dans le domaine maritime. Les gens utilisent légalement—on ne dit pas que c'est illégal—tous les moyens pour payer moins cher les gens qui travaillent sur les bateaux, pour éviter de payer des impôts, pour éviter aux entreprises de payer des impôts, etc.
À l'origine, c'était un phénomène de syndicalisation. Dans le temps, les gens n'en voulaient pas. Le gouvernement s'est montré collaborateur à cet égard. C'est de la vieille histoire. Cela a permis la syndicalisation par un syndicat américain. Finalement, c'est devenu—je pense que le mot «bordel» n'est peut-être pas acceptable—bordélique.
On parle de cette question depuis des années. Si nous avions disposé d'une semaine de plus l'an dernier, mon projet de loi sur la construction navale aurait été adopté. Jusqu'à présent, je n'ai pas présenté un nouveau projet de loi relatif à la construction navale sur la même base, parce qu'il y a eu une coalition.
Le ministre a accepté de former un comité formé de représentants syndicaux et de la partie patronale, ainsi qu'un de ses représentants, lequel comité devait lui présenter un rapport. Il a ce rapport entre les mains depuis déjà près de deux mois, et il a promis qu'il ferait quelque chose, mais cela prend du temps. Si mon projet de loi avait été adopté, ce serait déjà réglé. Les situations dans les chantiers seraient réglées.
Heureusement, il y a un gouvernement à Québec qui est préoccupé par cette question, possiblement à cause du ministre lui-même, Jacques Baril, le ministre délégué aux Transports. Il présentera bientôt une politique maritime dans le cadre des juridictions du Québec.
Cela va permettre de remettre à l'ordre du jour le cabotage entre les ports du fleuve Saint-Laurent. Dans cette optique, à mon avis, le port de Cacouna a un avenir encore plus prometteur, puisqu'il a une infrastructure importante, solide, bien aménagée et bien située. Les communications entre les ports, pour une activité maritime à l'intérieur du Saint-Laurent, au Québec, c'est un argument de plus en faveur du projet de loi, en faveur d'une politique fédérale intégrée.
Le commerce interprovincial et international est de juridiction fédérale. Encore une fois, j'ai été impressionné de voir cette semaine tous les gens concernés par cette question: les pilotes, les exportateurs, les transporteurs, les armateurs, les constructeurs. En même temps, un des problèmes dont on ne parlera jamais assez, c'est qu'il faut avoir une approche globale, parce que, à ma connaissance, au moins 12 ministères sont concernés.
J'ai apprécié les propos de notre collègue d'en face, ainsi que ceux des autres partis sur cette question. Je vois que le débat évolue. Je pense au député Rosaire Gendron qui, autrefois, représentait la circonscription de mon collègue de Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques. Avec patience et persévérance, il avait fait construire le port de Cacouna.
J'espère que le projet de loi de mon collègue finira par aboutir pour que l'on ait une véritable politique de développement des ports, des petits ports au Canada, et au Québec bien sûr.
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, je dois dire que je suis assez heureux de l'accueil favorable que le député de Algoma—Manitoulin a fait à mon projet de loi. Je ne sais pas si je peux présumer qu'il parlait au nom du gouvernement, mais il est intéressant de voir qu'il considère que cela devrait être intégré dans la révision de la Loi maritime du Canada.
Le problème c'est que cette révision ne se fera pas avant 2003. Effectivement, la fin du programme de dessaisissement des ports est prévue pour 2002. Il y a donc une période de flottement qui n'est pas à l'avantage du développement économique des régions. Je suis très heureux de l'accueil favorable qu'on a accordé à ce projet de loi, mais je le serais encore plus si le gouvernement avait accepté qu'il soit adopté le plus rapidement possible.
Effectivement, il y a un éveil à l'importance du transport maritime, à la nécessité d'avoir une stratégie intégrée de développement dans ce secteur. Je crois que le gouvernement du Québec, sur cette question, a pris une longueur d'avance. Il va annoncer sa stratégie prochainement et ce sera intéressant de voir de quelle façon ce sera reçu par l'industrie. Je pense que les consultations menées montrent que ce sera un projet commun de l'industrie et du gouvernement.
Il serait bon que le gouvernement fédéral soit à l'écoute des arguments de tous les députés que nous avons entendus ici pour faire suite à la journée de sensibilisation que nous avons eue sur le sujet, cette semaine. Il faut qu'il y ait une stratégie maritime qui soit mise en place et adoptée le plus rapidement possible afin d'intégrer des éléments comme la question de la marine marchande, la construction maritime, le transport intermodal et les protections environnementales.
À ce sujet, je n'ai voulu faire qu'une proposition constructive pour permettre aux ports régionaux de reprendre leur envol, de pouvoir assumer leur développement, et pour permettre à la communauté locale d'assumer sa part dans ce développement et, en même temps, de ne pas lui mettre sur le dos un poids trop lourd qu'est le coût de ces infrastructures qui monte rapidement pour atteindre des dizaines et même des centaines de millions de dollars. C'est donc dans ce sens-là que ma contribution a été faite.
Je suis heureux de la réception générale qu'on a accordée à mon projet de loi. Si le gouvernement considère que c'est effectivement un projet de loi intéressant, je demande le consentement unanime de la Chambre pour qu'il puisse faire l'objet d'un vote.
Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime de la Chambre?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
M. Paul Crête: Monsieur le Président, je n'ai pas obtenu le consentement unanime de la Chambre, mais je veux tout simplement conclure en disant que le contenu du projet de loi a été bien reçu. Je vais acheminer les propositions, de telle façon que le ministère des Transports puisse les considérer. Il verra ce qui est recevable de son côté, et il en débattra.
Cependant, il faut éviter que des années de délai conduisent à une situation où on ne permettra pas aux ports régionaux d'avoir vraiment l'outil de développement adéquat. C'est ma préoccupation première dans ce projet de loi.
Le vice-président: La période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés est maintenant expirée. Puisque la motion n'a pas été choisie pour faire l'objet d'un vote, l'ordre est rayé du Feuilleton.
MOTION D'AJOURNEMENT
[Traduction]
L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.
L'INDUSTRIE DU BOIS D'OEUVRE
M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Monsieur le Président, j'ai posé une question il y a quelque temps sur le bois d'oeuvre. Si j'ai posé cette question, c'est que le Parti progressiste-conservateur était d'avis que le gouvernement n'avait pas de plan particulier pour faire face à la crise totale ayant éclaté dans le secteur du bois d'oeuvre. Nous avions l'impression que le gouvernement n'avait pas ni plan ni orientation et qu'il ne cherchait qu'à gagner du temps sans s'attaquer à la très importante question intéressant les Canadiens d'un océan à l'autre.
Les habitants du Canada rural sont tributaires du secteur du bois d'oeuvre à titre de principal fournisseur d'emplois. Ce secteur représente un pourcentage élevé du produit intérieur brut du Canada. C'est un enjeu important.
Je voudrais que le secrétaire parlementaire me réponde sur un autre point. Le gouvernement persiste à dire que le secteur du bois d'oeuvre est assujetti au libre-échange. Qu'a-t-il fait à cet égard? Combien de délégations avons-nous envoyées là-bas, e quand avons-nous commencé à envoyer des gens parler d'homologue à homologue, de ministre à ministre? Le ministre de l'Industrie dit une chose pendant que le ministre du Commerce international en dit une autre. Le premier ministre ne dit rien du tout.
Six provinces pratiquaient le libre-échange avec les États-Unis. L'accord de l'Atlantique a maintenu le Canada atlantique à l'écart de l'accord sur le bois d'oeuvre. Cela a donné le libre-échange au Canada atlantique. Ce dernier a une longue tradition de libre-échange qui remonte aux années 1800 entre le Nouveau-Brunswick et le Maine. Le Manitoba et la Saskatchewan profitent également du libre-échange.
Seulement quatre provinces ne profitaient pas du libre-échange avec les États-Unis: la Colombie-Britannique, l'Alberta, l'Ontario et le Québec. Ces quatre provinces doivent de toute évidence profiter de l'accord de libre-échange, mais aucune distinction n'est faite entre les provinces. Comme tous l'avaient prédit, les Américains ont maintenant sorti l'artillerie lourde en imposant des droits compensateurs et des droits antidumping aux dix provinces canadiennes.
Les droits compensateurs ne posent pas de problème. Nous avons déjà réussi à les faire lever, surtout dans l'Est du Canada. Nous devrions réussir encore une fois. Les droits antidumping sont devenus un problème beaucoup plus grave, parce qu'ils s'appliquent automatiquement à toutes les provinces et qu'il n'y a pas de clause de non-participation.
Nous avons une longue liste d'erreurs commises par le gouvernement. Il n'a pas commencé à négocier la question du bois d'oeuvre avec les Américains il y a deux ou trois ans. Il n'avait aucun plan, aucune ligne directrice, et il n'a pas pris l'initiative dans ce dossier extrêmement important.
Certaines scieries dans ma circonscription de South Shore ont dû fermer les portes et cesser leurs exportations parce que les propriétaires ne savent pas ce qui les attend. Ils ne peuvent se placer dans une situation précaire où ils risquent de se faire imposer des droits antidumping ou des droits compensateurs, ce que nous croyons pouvoir éviter, mais sait-on jamais? Lorsqu'un dossier comme celui-là se retrouve devant un tribunal international, la situation devient précaire.
J'aimerais que le gouvernement nous dise ce qu'il a fait au sujet de l'entente sur le bois d'oeuvre et quand il s'attend à ce que le dossier soit réglé.
M. Pat O'Brien (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, il est incroyable d'entendre le député soulever ces points. Je suis stupéfait qu'il puisse être aussi mal informé au sujet des mesures adoptées par le gouvernement. Je ne sais s'il croit que le gouvernement n'a rien fait ou s'il ne fait que se livrer à une envolée oratoire. Permettez-moi de rappeler à mon collègue ce que le gouvernement a fait pour le Canada Atlantique et tous les Canadiens.
Premièrement, cette question a été soulevée aux plus hauts niveaux par le premier ministre du Canada, celui-ci en ayant discuté à plusieurs reprises avec le président Bush. Elle a été abordée maintes et maintes fois par le ministre du Commerce international avec son homologue américain, Bob Zoellick. Lorsque nous nous sommes rendus à Québec pour le sommet, le ministre et moi avons eu tous deux l'occasion d'aborder la question avec le secrétaire au commerce Don Evans.
La question a été soulevée à maintes et maintes reprises. Des consultations à grande échelle ont été menées auprès de l'industrie. Le député doit sûrement savoir cela. Il y a eu des rencontres hebdomadaires, parfois même quotidiennes, avec différents intervenants dans le Canada atlantique en particulier, mais aussi dans tout le pays.
Le ministre continue de proposer l'utilisation d'un émissaire, ce qui serait une façon plus sensée d'essayer de régler le différend. Apparemment, cette proposition présentait très peu d'intérêt pour les Américains jusqu'à tout récemment. M. Zoellick a maintenant abordé la question avec le ministre du Commerce international. Peut-être que les Américains commencent finalement à se rendre compte que l'affrontement qu'ils ont causé n'était pas nécessaire.
La position du gouvernement est très claire. Je sais que le député représente une circonscription du Canada atlantique, mais le gouvernement a la responsabilité de défendre les intérêts de tous les intervenants, d'un bout à l'autre du pays.
Il ne s'agit pas d'une compétition entre l'est et l'ouest du Canada. Ce ne devrait pas être cela. J'invite le député et tous les autres députés à ne pas affaiblir notre position en utilisant ce genre d'argument qui sème la discorde et qui n'est pas du tout constructif.
La partie se joue sur un axe nord-sud. Ce sont les États-Unis qui ont dit qu'ils n'allaient pas exempter les provinces atlantiques. Nous avons appuyé la demande d'exemption de ces provinces, comme nous appuierons toute province estimant avoir le droit à une exemption.
Je vais conclure en disant qu'il existe une stratégie nationale claire et qu'une énorme quantité de travail a été accomplie. Je prie mon collègue de mettre un peu de côté son esprit de parti et d'appuyer le gouvernement dans ses efforts pour faire avancer un dossier national.
Le vice-président: La motion d'ajournement étant adoptée d'office, la Chambre s'ajourne jusqu'à demain, à 10 heures, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.
(La séance est levée à 18 h 19.)