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FAIT Rapport du Comité

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PRÉFACE

En décembre 2001, le Comité a publié un rapport préliminaire, Le Canada et le défi nord-américain — Gérer nos relations dans un contexte de sécurité accrue, fondé sur les témoignages recueillis au cours d’audiences tenues à la suite des attentats terroristes perpétrés le 11 septembre 2001 aux États-Unis. Son Sous-comité du commerce, des différends commerciaux et des investissements internationaux a pour sa part traité de manière précise des faiblesses décelées à la frontière canado-américaine dans un rapport intitulé Vers une frontière sûre et propice à l’efficacité commerciale, qu’il a présenté en novembre et dans lequel il faisait un certain nombre de recommandations auxquelles le gouvernement a répondu au printemps de 2002.

Plus d’un an après les attentats contre le World Trade Centre et le Pentagone, le Comité a encore des doutes sur la sécurité des frontières et du commerce. De plus, il est tout à fait conscient des effets qu’ont engendré ces attentats — en particulier le désir fort compréhensible des Américains de se prémunir autant que faire se peut contre d’autres attentats terroristes — et qui continuent de se répercuter sur les événements à l’échelle régionale et mondiale et surtout sur la politique et l’opinion publiques américaines. Par ailleurs, comme nous l’avons indiqué dans notre rapport de décembre 2001, c’est dans le contexte plus vaste de l’orientation que les Canadiens tiennent à imprimer à leurs relations avec le reste de l’Amérique du Nord qu’il faut considérer la façon dont le Canada a géré ces dossiers cruciaux. Quel grand cap stratégique le Canada devrait-il donner à ses interventions en matière de politique étrangère au cours des années qui viennent?

Avant le 11 septembre 2001, le Comité se proposait déjà de faire une étude des dossiers clés étroitement liés aux relations du Canada avec les États-Unis dans le contexte de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) et d’examiner l’avenir des liens du Canada avec le reste du continent, notamment avec le Mexique. Depuis, certains de ces dossiers sont devenus plus urgents, mais aucun ne s’est réglé. Dans notre rapport de décembre 2001, nous avons indiqué que les « intérêts nationaux du Canada dans le projet d’intégration nord-américain, quoi qu’il devienne, restent à définir ». Nous avons insisté sur le fait que la prochaine étape doit consister à découvrir ce que pensent les Canadiens partout au pays et à en informer les partenaires nord-américains du Canada. Le Canada doit établir lui-même les buts et les priorités que ses relations avec ces partenaires devront servir à l’avenir. Toutefois, il n’y parviendra vraisemblablement pas sans, au préalable, avoir évalué rigoureusement l’évolution de la situation aux États-Unis et au Mexique et d’autres facteurs qui influent sur le contexte de la politique nord-américaine.

Le Comité a poursuivi sur sa lancée au cours du premier semestre de 2002 en organisant un grand nombre d’audiences publiques et de tables rondes. En plus des 8 audiences qu’il a tenues à Ottawa, le Comité a entrepris une tournée d’audiences de 16 jours qui l’a mené dans 12 villes canadiennes. Une première ronde d’audiences régionales a eu lieu dans les provinces de l’Atlantique et au Québec à la fin de février. La seconde a amené le Comité dans les quatre provinces de l’Ouest et dans le sud de l’Ontario au début de mai. Par souci d’économie et d’efficience, le Comité a profité de chacune de ces audiences pour mener des consultations parallèles sur l’ordre du jour du Sommet du G8 de Kananaskis. Mais avant de procéder aux audiences, il avait affiché sur son site Web des notes et des questions élaborées au cours de discussions avec le personnel du Comité dans le but d’amener les Canadiens à donner leur avis sur diverses options stratégiques, une initiative dont il s’est félicité, car elle a suscité chez les témoins beaucoup de réactions et de recommandations.

En plus de tenir des audiences au Canada, le Comité a rencontré des représentants des gouvernements des États-Unis et du Mexique, des membres de leurs congrès respectifs et des experts du secteur privé des deux pays. Les rencontres qu’il a tenues en mars 2002, à Washington, D.C., ont coïncidé avec la cérémonie marquant les six mois écoulés depuis les événements du 11 septembre 2001. Le Comité s’est ensuite rendu à Mexico, où a eu lieu, le 13 mars, au Congrès mexicain, la première rencontre officielle des comités des affaires étrangères des deux parlements fédéraux. Cette rencontre a été suivie de quatre tables rondes au cours desquelles le Comité a entendu un certain nombre d’éminents spécialistes mexicains.

En somme, le Comité a bénéficié de plusieurs centaines de témoignages, tant oraux qu’écrits, et tient à remercier tous ceux qui ont participé à son étude d’en avoir pris le temps et d’avoir exprimé publiquement leurs opinions. Leurs témoignages ont enrichi ses délibérations plus qu’il ne saurait le dire, comme chaque page du présent rapport en fait foi. En fait, les propos mêmes des témoins témoignent de la diversité de ce que nous avons entendu.

Le présent rapport comporte trois parties et six chapitres. La partie I expose les principaux problèmes et facteurs dont il faudra tenir compte pour élaborer une politique canadienne clairvoyante. Le chapitre 1, intitulé « Donner une dimension stratégique nord-américaine à la politique étrangère du Canada », énonce diverses formes que pourrait prendre la politique nord-américaine du Canada et donne un aperçu des points de vue fort différents qu’avaient les témoins sur des questions et des choix cruciaux. Ces opinions trahissaient souvent des craintes à l’égard de la souveraineté du Canada et de la marge de manœuvre que pourrait avoir le Canada dans l’éventualité d’une intégration continentale. Ce chapitre porte aussi sur les effets que les attentats du 11 septembre ont encore aujourd’hui sur les options stratégiques dont le Canada dispose pour atteindre ses objectifs nord-américains et mondiaux. La fin du chapitre renferme une série de recommandations à suivre pour appliquer une stratégie canadienne proactive en ce qui a trait aux relations du Canada avec l’Amérique du Nord, une stratégie qui puisse garantir que le programme bilatéral et trilatéral nord-américain tiendra compte des priorités du Canada.

Le chapitre 2, qui clôt la partie I, s’intitule « Comprendre l’évolution de l’Amérique du Nord » et fait un examen plus poussé des changements qui s’opèrent dans la région de l’Amérique du Nord. Il décrit dans le détail les liens économiques de plus en plus forts qui se nouent sur le continent et les progrès de l’intégration et examine diverses tendances sociétales et variations importantes ainsi que certaines disparités qui persistent dans les trois pays et entre eux. Il relève aussi certaines constatations pertinentes qui ressortent de quelques recherches récentes sur le sentiment d’identité nationale et l’attitude des citoyens envers les questions relatives à l’Amérique du Nord. Interrogés sur la façon dont il y aurait lieu de considérer les relations nord-américaines dans le contexte des intérêts et des valeurs du Canada, les témoins ont mis en lumière non seulement des divergences tenaces sur l’approche à adopter, comme nous l’avons indiqué plus haut, mais aussi une connaissance insuffisante du sujet dans les trois pays. La forme que les relations nord-américaines devraient prendre n’est pas évidente; de plus, les enjeux clés sont mal compris, et il reste beaucoup à faire pour positionner les Canadiens de manière à ce qu’ils puissent relever les défis régionaux dans une Amérique du Nord en rapide métamorphose. Il faudra avoir ces réalités à l’esprit lorsqu’il s’agira de choisir les formes de partenariat nord-américain et les orientations stratégiques spécifiques qui sont le plus susceptibles de permettre au Canada d’atteindre ses objectifs.

La partie II du rapport renferme les trois chapitres les plus importants. Ils portent tous sur les priorités stratégiques du Canada dans le contexte nord-américain en général et sur celles que les événements du 11 septembre 2001 ont le plus chambardées en particulier. Le chapitre 3, qui a pour titre « L’avenir de la coopération en matière de sécurité et de défense en Amérique du Nord », porte surtout sur les questions de sécurité communes au Canada et aux États-Unis, surtout à leurs postes frontaliers aériens, terrestres et maritimes; il porte aussi sur les arrangements entre les deux pays en matière de défense. Il décrit également la façon dont le Mexique pourrait participer aux initiatives de coopération. Le Comité y traite aussi, entre autres points litigieux, de la façon dont le Canada devrait réagir à certains programmes d’envergure des Américains, tels leurs projets en matière de défense antimissile et leur décision de créer un commandement militaire pour le nord du continent.

Le chapitre 4, intitulé « Problèmes à régler pour gérer et améliorer les relations économiques nord-américaines », examine les façons d’accroître le flux des échanges commerciaux bilatéraux et trilatéraux, et les investissements entre les deux pays, y compris à la frontière. L’ALENA a beau être en vigueur depuis près de 10 ans, il laisse encore beaucoup à désirer, que ce soit à l’égard des recours commerciaux et des mécanismes de règlement des différends (notamment ceux du chapitre 11, relatif aux investissements), de l’environnement ou de la coopération en matière de main-d’œuvre ou de la possibilité de créer de nouvelles institutions. Entre autres pommes de discorde, on pense tout de suite au différend chronique qui oppose le Canada et les États-Unis sur le bois d’œuvre. Ce chapitre porte également sur le débat de plus en plus animé que suscite la question de savoir comment gérer les tendances plus généralisées visant à l’intégration économique. Il expose les vues des témoins et évalue les options de types « descendant » et « ascendant » qui pourraient être appliquées aux diverses propositions visant à resserrer et à approfondir l’intégration, comme une union douanière, un marché commun et une devise unique.

Le chapitre 5, intitulé « Marche à suivre pour améliorer les relations bilatérales et trilatérales du Canada en Amérique du Nord », traite des principaux éléments à examiner dans l’élaboration de stratégies politiques permettant au Canada de gérer efficacement ses relations en Amérique du Nord. Son introduction explique la nécessité de trouver la combinaison d’approches bilatérales et trilatérales qui est la plus susceptible de favoriser les intérêts du Canada à l’avenir. Sa première section fait ressortir l’importance cruciale de la relation que le Canada entretient avec les États-Unis et la difficulté d’élargir les voies, diplomatiques et autres, par lesquelles il puisse exercer une certaine influence. La section suivante confirme l’importance croissante des relations entre le Canada et le Mexique et énonce des façons de renforcer ce partenariat bilatéral et de surmonter les obstacles qui l’ont entravé jusqu’à maintenant. La recherche de formes de coopération trilatérale — et la possibilité de créer, un jour peut-être, une « communauté nord-américaine » — est un domaine dans lequel le Mexique tient à collaborer avec le Canada. La troisième section de ce chapitre passe en revue les opinions des témoins sur les avantages qu’il y aurait à favoriser le resserrement des relations nord-américaines du Canada par le trilatéralisme et les incidences que cela pourrait avoir sur sa gouvernance intérieure. On y expose et examine quelques formules trilatérales qui pourraient comporter la création de nouveaux arrangements institutionnels, une plus grande coopération intergouvernementale et parlementaire et la prise de mesures pratiques conjointes dans certains secteurs de la politique transfrontalière.

Compte tenu de la disparité flagrante d’influence et de moyens qui sépare les trois pays d’Amérique du Nord, sans compter leurs caractéristiques historiques, culturelles et autres attributs fort différents, il n’est pas surprenant que les témoins aient parfois divergé d’opinions quant au bien-fondé de certaines idées et formules. Le Comité croit que le Canada doit cultiver les partenariats nord-américains, mais qu’il doit se ménager la plus grande marge de manœuvre possible tout en favorisant les éléments de ce partenariat qui sont dans son meilleur intérêt à long terme et en permettant un débat public permanent sur les options possibles.

Le présent rapport se veut une contribution à ce nécessaire débat national, et non le tracé définitif et irrévocable des relations à venir du Canada avec ses voisins nord-américains. Le Comité est toutefois convaincu que le Canada a tout intérêt à commencer dès maintenant à définir une stratégie nord-américaine claire, concertée et cohérente. La conclusion du rapport, « La vision du Comité pour la concrétisation des objectifs du Canada en Amérique du Nord », résume les dossiers dans lesquels le gouvernement doit absolument prendre l’initiative, selon le Comité, pour promouvoir les intérêts et les valeurs du Canada en Amérique du Nord au cours du xxie siècle.

Les choses se sont précipitées au cours de la dernière année, et il n’est pas exclu que d’autres défis imprévisibles se posent, comme c’est arrivé après le 11 septembre 2001. Si le Canada élaborait une stratégie publique à l’égard de ses rapports avec ses voisins nord-américains et se donnait les moyens de la mettre en application, il serait mieux préparé et mieux positionné pour atteindre ses objectifs non seulement en Amérique du Nord, mais dans le monde entier. De l’avis du Comité, entretenir en Amérique du Nord un partenariat respectueux de la souveraineté du Canada et au sein duquel le Canada est considéré comme égal, servirait au mieux les intérêts des Canadiens tout en nous assurant attention et respect tant sur le continent nord-américain qu’ailleurs dans le monde.