FOPO Rapport du Comité
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
OPINION COMPLÉMENTAIRE DU NOUVEAU PARTI DÉMOCRATIQUE
À titre de vice-président du Comité permanent des pêches et des océans, j’ai eu le plaisir de participer pleinement aux étapes qui ont mené à la rédaction de ce rapport.
Dans l’ensemble, je n’ai pas d’objection sur le fond, sur l’orientation et sur la structure du rapport. Cependant, plusieurs points nécessitent des précisions et certaines recommandations doivent être renforcées.
Participation communautaire
La recommandation 10 du rapport demande de favoriser :
L’intégration de l’aquaculture aux localités côtières, les décisions locales et les retombées de l’aquaculture pour les populations locales;.
Le fédéral devrait développer et mettre en œuvre un mécanisme pour obtenir le consentement des collectivités locales et des Premières nations au sujet de l’emplacement de toutes les piscicultures existantes et projetées. Les collectivités qui refusent une pisciculture ne devraient pas être forcées de l’accepter (comme Northwest Cove en Nouvelle-Écosse). Certaines communautés autochtones refusent les piscicultures dans les eaux situées dans leurs territoires traditionnels; ce refus doit être respecté.
Les collectivités qui expriment un intérêt pour des projets aquacoles devraient recevoir l’aide de l’État à cet égard (comme la région de Coast of Bays à Terre-Neuve-Labrador). Pour éviter les situations de conflit, il faut que la population locale soit réellement consultée et qu’elle participe aux décisions concernant un projet aquacole.
Emplacements des fermes
La recommandation 19 demande ce qui suit :
Que le MPO procède à une étude approfondie sur les effets de l’implantation de piscicultures utilisant des cages en filet le long des voies migratoires des saumons adultes et juvéniles de même qu’au-dessus des zones d’alevinage du poisson. Il faudrait en particulier déterminer les distances sûres et acceptables à maintenir entre les piscicultures et les zones interdites en tenant compte des données et normes des autres pays;
Que les instances qui délivrent les permis soient invitées de la manière la plus énergique possible à n’accorder d’autres permis de salmoniculture qu’avec la plus grande circonspection, d’ici à ce qu’une telle étude ait été réalisée.
Je propose que le MPO interdise la pisciculture dans les grandes rivières à saumon, les routes migratoires et les lieux d’alimentation des saumons, les zones riches en homards ou invertébrés marins, les autres habitats sensibles et à proximité de ces lieux. Fixer par directive une distance pour séparer les fermes d’élevage des rivières à saumon et des routes migratoires n’est souvent pas une mesure de précaution suffisante.
Le MPO doit collaborer avec les aquaculteurs pour fermer les piscicultures situées dans de tels lieux, en invoquant le principe de précaution. Cette politique de localisation préviendrait les interactions entre les saumons d’élevage et les saumons sauvages et la transmission de maladies. Dans un rapport de 1999, le MPO avait recommandé d’éviter de placer des cages d’aquaculture dans les rivières à saumon ou près de leur embouchure parce que l’isolement complet est irréaliste et que, même s’il est réalisé, il n’éliminerait pas le risque d’interaction écologique ou de transmission de maladies entre saumons d’élevage et sauvages.
Systèmes en circuit fermé
La partie III du rapport affirme ce qui suit :
La conversion aux systèmes terrestres en circuit fermé augmenterait les coûts de production, ce qui réduirait la compétitivité sur les marchés étrangers où la concurrence est très vive.
La recommandation 20 demande ensuite :
Que le gouvernement investisse dans des travaux de recherche sur les effets environnementaux des systèmes utilisant des cages en filet et sur l’amélioration des techniques de confinement. Ces nouveaux systèmes devraient être graduellement expérimentés.
J’exhorte le fédéral à collaborer avec les aquaculteurs au développement de systèmes en circuit fermé pour l’élevage des poissons. L’aquaculture en circuit fermé devrait être introduite graduellement et devenir le seul système permis au Canada. L’isolement en circuit fermé, sur terre ou en mer, remplace les cages en filet par des structures étanches et empêche les poissons d’élevage d’accéder au milieu marin. L’eau, les déchets et les autres éléments qui se trouvent au sein de la pisciculture sont alors retenus et non libérés dans l’environnement. Isoler les poissons d’élevage de cette manière réglerait bon nombre de problèmes environnementaux posés par l’aquaculture. Ces systèmes nécessitent davantage de capitaux, mais les coûts peuvent être compensés par des rendements accrus et des avantages économiques, car moins de poissons s’échapperont, la nourriture sera mieux utilisée, et les poissons auront un taux de survie plus élevé. Le fédéral doit se joindre au secteur pour appuyer la recherché-développement des systèmes aquacoles en circuit fermé.
Étant donné la diversité des opinions au sujet de l’aquaculture en Colombie-Britannique et la controverse qu’elle suscite, nous croyons qu’un moratoire sur l’expansion des piscicultures dans cette province doit demeurer jusqu’à ce que tous les grands intervenants en viennent à s’entendre sur leurs doléances et sur les problèmes.
Farine et huile de poisson
La recommandation 21 demande ce qui suit :
Que le gouvernement fédéral appuie l’industrie de l’aquaculture dans ses efforts visant à diversifier les espèces cultivées dans le but de réduire sa dépendance à l’égard de la farine et de l’huile de poisson importées;
Que le gouvernement fédéral favorise les travaux de recherche-développement portant sur des aliments à plus forte teneur en protéines et huile végétale.
Le gouvernement fédéral devrait fixe dès maintenant des objectifs de réduction visant à éliminer le recours aux poissons convenant à la consommation humaine (hareng, maquereau, sardine, anchois, etc.) comme principale nourriture pour le saumon d’élevage. Il devrait interdire également l’utilisation d’aliments dérivés d’organismes génétiquement modifiés. Le Nouveau Parti Démocratique fédéral n’est pas favorable à l’utilisation de poissons modifiés génétiquement ou autrement, à des fins aquacoles ou autres.
Réglementation
Les critiques de l’aquaculture se sont demandé si le MPO devait garder la responsabilité de l’aquaculture au niveau fédéral. Après mûre réflexion, j’estime que si. Cela dit, le MPO doit assurer en priorité la protection des stocks de poissons sauvages et de leur habitat et faire en sorte que le secteur aquacole respecte les dispositions de la Loi sur les pêches, de la Loi sur les eaux navigables; il faudrait également que la Loi canadienne sur la protection de l’environnement s’applique à toutes les fermes aquacoles, actuelles et futures.
Recours aux pesticides
La recommandation 15 demande ce qui suit :
Que le MPO et l’industrie favorisent le développement et l’application de meilleures méthodes de lutte contre le poux du poisson, y compris des recherches, de meilleures techniques d’élevage, la mise en jachère des piscicultures, le développement de souches de saumon résistantes aux poux et le recours à des méthodes de lutte non chimique;
Il faut interdire l’usage de pesticides qui n’ont pas été suffisamment testés pour leurs effets sur les organismes marins. En outre, même approuvés en vertu de la Loi sur les produits antiparasitaires, ils peuvent contrevenir à la Loi sur les pêches. Comme je l’ai déjà recommandé, le MPO doit faire primer la protection des stocks sauvages et de leur habitat. Les articles 35 et 36 de la Loi sur les pêches interdisent la détérioration, la destruction ou la perturbation de l’habitat du poisson ainsi que le dépôt de substances nocives dans les eaux fréquentées par le poisson. Le MPO doit s’assurer que tous les aspects de l’aquaculture, y compris l’usage des pesticides, respectent la Loi sur les pêches.
En outre, le gouvernement doit établir les plafonds de résidus pour tout pesticide utilisé chez les saumons d’élevage vendus au Canada. Ces plafonds n’ont pas été établis pour le benzoate d’émamectine et pour l’ivermectine, deux pesticides non encore approuvés pour le poisson. Cependant, ces produits sont prescrits et utilisés en salmoniculture au Canada grâce au programme des médicaments d’urgence de Santé Canada. Les plafonds de résidus visent à protéger la santé des consommateurs.
Autres recommandations
Outre les suggestions susmentionnées, voici quelques recommandations supplémentaires :
• | Le gouvernement fédéral devrait exiger par règlement un étiquetage propre aux poissons d’élevage. Les consommateurs doivent pouvoir faire un choix personnel éclairé entre les poissons sauvages et d’élevage. Le saumon d’élevage est étiqueté actuellement comme « saumon frais » ou « saumon de l’Atlantique » mais, pour beaucoup de consommateurs, la nuance à faire est entre « d’élevage ou sauvage ». |
• | Le gouvernement devrait interdire pour toujours la pêche au krill dans les eaux canadiennes et interdire l’importation de krill. Le krill est une grosse crevette planctonique que consomment les baleines et de nombreux poissons comme le hareng et le saumon. Il est très prisé en salmoniculture car c’est un stimulant alimentaire efficace. Les scientifiques craignent que la capture d’organismes au bas de la chaîne alimentaire (comme le krill et le hareng) ait un impact considérable sur la viabilité des populations de poisson. Ces petits organismes sont des éléments essentiels de l’écosystème marin et la nourriture des gros poissons. Leur récolte a un impact sur la quantité de nourriture disponible chez les poissons situés plus haut dans la chaîne alimentaire. |
Conclusion
Je tiens à remercier tous les membres du Comité et les témoins qui ont participé à cette étude. Je suis convaincu que vous accorderez toute l’attention qu’il faut à mes suggestions et je vous remercie d’avoir eu la chance de donner mon avis.
Veuillez agréer, Mesdames et Messieurs, l’expression de mes sentiments distingués.
Peter Stoffer
Député de Sackville-Musquodoboit Valley-Eastern Shore