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HERI Rapport du Comité

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ÉTAT DU SYSTÈME

Chapitre 6
Le radiodiffuseur public national

 

La radiodiffusion devient de plus en plus un service public et, étant donné son importance en tant que moyen de promouvoir l'unité nationale, il nous semble raisonnable de croire qu'une partie des dépenses du système provienne des fonds publics.

Commission royale de la radiodiffusion, 1929

C'est donc le devoir du Parlement de la sauvegarder de façon que l'ensemble de la population bénéficie de ses services.

Premier ministre R.B. Bennett, 1932

La radiodiffusion est le moyen le plus puissant par lequel les pays et les citoyens d'aujourd'hui partagent leur expérience, acquièrent un sentiment d'identité nationale, comprennent leur culture et apprennent à se connaître.

A.W. Johnson, président de la SRC, cité dans le Rapport du Comité d'étude de la politique culturelle fédérale, 1981

La Société Radio-Canada, l'Office national du film et Téléfilm Canada ont été créés par le Parlement pour doter les Canadiens d'une voix puissante dans leur propre pays. Depuis leur création, le monde a beaucoup changé, mais le projet public reste valable.

Faire entendre nos voix : le cinéma et la télévision au XXIe siècle, 1996.

Le concept d'un radiodiffuseur public national ayant pour mission de protéger l'intérêt public dans la radiodiffusion canadienne n'est pas nouveau. Comme il est expliqué au chapitre 2, l'intérêt public et national a été une préoccupation du Parlement tout au long des quelque 70 ans de l'évolution de la politique de radiodiffusion. Cela transparaît dans la Loi sur la radiodiffusion la plus récente (1991) qui précise que notre système « offre, par sa programmation, un service public essentiel pour le maintien et la valorisation de l'identité nationale et de la souveraineté culturelle ».

Parallèlement à cette volonté bien ancrée de protéger l'intérêt public dans la radiodiffusion, il a été constamment reconnu qu'un radiodiffuseur public national doit servir à informer, à éduquer et à divertir les gens. C'est pourquoi un radiodiffuseur public canadien a été créé en 1932, et tout examen de la radiodiffusion canadienne depuis cette époque fait ressortir la nécessité d'un radiodiffuseur public solide.

Le présent chapitre porte sur la situation du radiodiffuseur public du Canada et sur son avenir. La partie A examine des points de vue internationaux sur la radiodiffusion publique. La partie B relate ce que les témoins ont dit au sujet de la Société Radio-Canada. La partie C traite de la difficulté de définir la place qu'occupe la radiodiffusion publique dans un contexte où les choix sont de plus en plus nombreux.

A. Perspectives internationales

Avec le temps, de nombreux pays — particulièrement les démocraties occidentales — ont établi des idéaux semblables de radiodiffusion publique. Par exemple, au Royaume-Uni, le mandat de la British Broadcasting Corporation (BBC) a toujours été d'éduquer, d'informer et de divertir. Aux États-Unis, le Public Broadcasting System (PBS) met l'accent sur l'information et sur l'éducation. De même, les réseaux Arbeitsge-meinschaft der Offentlich-rechtlichen Rundfunkanstalten des Bundersrepublik Deutschland (ARD) et Zweites Deutsches Fernsehen (ZDF) ont toujours mis l'accent sur l'information et sur le divertissement de haute qualité. De plus, en Australie, la Charter for the Australian Broadcasting Corporation (ABC) stipule que la Corporation doit contribuer à donner un sens d'identité nationale et à informer et à divertir et qu'elle doit diffuser des émissions de nature éducative1.

Toutefois, au-delà des similitudes dans les mandats, il devient rapidement difficile de comparer les divers radiodiffuseurs publics. Les raisons les plus importantes ont probablement trait aux diverses structures de gestion, aux modalités de financement, aux langues et aux contextes sur le plan concurrentiel. En outre, les définitions conventionnelles de la radiodiffusion publique (p. ex. de grands radiodiffuseurs publics recevant des fonds publics importants2) ont tendance à exclure les petits services spécialisés sans but lucratif ou recevant des subventions gouvernementales3. En fait, des centaines de millions de dollars sont dépensés chaque année par les administrations fédérale et provinciales et par certains radiodiffuseurs Canadiens qui, selon toute définition raisonnable — devraient être considérés comme des services de radiodiffusion publics.

Nonobstant ces contraintes, les observateurs essaient souvent de comparer la Société Radio-Canada avec les radiodiffuseurs publics d'autres pays, particulièrement la BBC. Mais cette comparaison n'est pas juste. Le Royaume-Uni est un pays extrêmement petit et en grande partie unilingue établi sur un archipel situé au large de la côte de l'Europe4. Ses voisins européens n'utilisent pas l'anglais dans leur radiodiffusion quotidienne et il est pratiquement impossible de recevoir les signaux hertziens provenant de l'Europe continentale au Royaume-Uni (sauf les ondes courtes). De plus, la BBC reçoit un droit de licence d'une population qui est plus que le double de celle du Canada pour financer ses activités5.

La conjugaison des facteurs susmentionnés est un autre aspect propre à la réalité canadienne. La plupart des radiodiffuseurs publics se sont vus accorder un statut de monopole ou de quasi-monopole pour empêcher que les ondes ne soient surchargées par des réseaux commerciaux ou spécialisés. Toutefois, les pionniers de la radiodiffusion publique canadienne ont dû faire face à un autre facteur : plus de 80 % des Canadiens peuvent recevoir des signaux hertziens des États-Unis. Autrement dit, contrairement à ses pendants étrangers, le radiodiffuseur public national du Canada a dû dès le départ soutenir la concurrence du meilleur producteur de divertissement populaire du monde occidental.

Pour sa part, la BBC détenait un monopole jusqu'à ce que la déréglementation limitée autorise la création d'un réseau privé, ITV, en 1954; elle n'a pas dû composer avec la prolifération des chaînes avant les années 1980. Comme Peter Humphreys l'a expliqué, en une semaine en 1980, les téléspectateurs britanniques pouvaient choisir parmi 300 heures de télévision offertes par trois chaînes (BBC1, BBC2 et ITV). Aujourd'hui, les ménages du Royaume-Uni ayant une télévision à canaux multiples ont le choix de 40 000 heures d'émissions présentées par plus de 250 chaînes6. En effet, l'arrivée de la concurrence entre le câble et le satellite est un phénomène que tous les radiodiffuseurs publics sont forcés d'accepter et d'affronter par les temps qui courent.

Il y a eu diverses réactions jusqu'à présent face à l'augmentation de la concurrence du secteur privé. Dans de nombreux pays, les radiodiffuseurs publics ont lancé de nouveaux services de télévision. Ici au Canada, la SRC exploite deux services d'information continue, un service spécialisé et deux autres services spécialisés, en collaboration avec des partenaires du secteur privé. Au R.-U., la BBC a lancé de nouvelles chaînes, notamment BBC News, BBC Choice, BBC Parliament et une chaîne d'apprentissage. En Allemagne, ARD et ZDF ont lancé des services parlementaires, historiques et destinés aux enfants.

La BBC a commandé plusieurs études sur la façon dont les radiodiffuseurs publics se sont adaptés au changement. Par exemple, dans le cadre d'une étude effectuée par McKinsey & Company, vingt radiodiffuseurs publics sur quatre continents ont été examinés. D'après le rapport, les radiodiffuseurs de service public se réadaptent de trois façons : en mettant l'accent sur le caractère distinct plutôt que sur la part du marché (p. ex. PBS aux États-Unis); en insistant sur la part du marché plutôt que sur leur caractère distinct (p. ex. RAI en Italie); ou en trouvant un équilibre entre la part du marché et le caractère distinct (p. ex. SATV en Afrique du Sud)7.

McKinsey a également trouvé que les radiodiffuseurs publics ont contribué à « élever la norme » en exerçant des pressions sur les radiodiffuseurs privés pour produire certains types d'émissions de haute qualité. Les auteurs notent par exemple que la production par la BBC de Pride and Prejudice a encouragé ITV à créer Moll Flanders. De même, les chaînes ARD et ZDF en Allemagne — grâce à la grande part de l'auditoire qu'elles retiennent — ont (peut-être par défaut) obligé les radiodiffuseurs à produire une programmation de plus grande qualité pour rester concurrentiels.

Enfin, et il fallait bien s'y attendre, une relation étroite a été constatée entre les niveaux et sources de financement du radiodiffuseur public (c.-à-d. les droits des licences, les subventions gouvernementales, la publicité, les commandites, etc.) et la capacité d'un radiodiffuseur public à maintenir sa part de l'auditoire. Par exemple, dans les contextes où les radiodiffuseurs publics ont été forcés de chercher à accroître leur part du marché (p. ex. en Espagne et au Portugal), on a constaté que les normes générales du marché ont rapidement chuté au plus bas dénominateur commun8. En outre, dans les pays où le radiodiffuseur public était obligé d'avoir recours davantage aux recettes provenant des annonces publicitaires, une grille plus populiste et moins distinctive en a résulté9.

La figure 6.1 permet de comparer les fonds publics affectés à la radiodiffusion publique au Canada avec ceux d'autres pays de l'OCDE. Elle indique qu'en 1999, le Canada s'est classé beaucoup plus bas que la moyenne des pays de l'OCDE et tout juste au-dessus du Portugal et de la Pologne pour ce qui est des dépenses engagées dans la radiodiffusion publique nationale, dépenses qui sont présentées sous forme de pourcentage du PIB. Pour leur part, la Finlande, le Danemark, la Norvège et le Royaume-Uni ont occupé les quatre premiers rangs; leurs dépenses étaient de trois ou quatre fois supérieures au financement attribué à la SRC au Canada.

Cela étant dit, même si ces données sont utiles à des fins de comparaison, le Comité reconnaît qu'elles ne représentent nullement une mesure complète des dépenses publiques relatives à la radiodiffusion dans chacun de ces pays. En ce qui concerne le Canada, par exemple, les données n'englobent pas l'aide fédérale et provinciale au secteur canadien de la production, les crédits d'impôt fédéraux et provinciaux, ni les fonds publics directs et indirects qui appuient les radiodiffuseurs privés, sans but lucratif et éducatifs du pays. De plus, les radiodiffuseurs publics ont des fonctions considérablement différentes d'un pays à l'autre. Certains, comme l'Australian Broadcasting Corporation (ABC), jouent un rôle semblable à celui de la SRC et exploitent plusieurs réseaux nationaux de radio et de télévision. D'autres tels que le Public Broadcasting System (PBS) et le National Public Radio (NPR) des États-Unis sont moins polyvalents.

Il est difficile de comparer les grands radiodiffuseurs publics, mais il l'est moins de démontrer la raison pour laquelle les radiodiffuseurs publics continuent d'avoir leur place. Jeannette Steemers a notamment fait remarquer ce qui suit dans un document publié récemment :

Historiquement, le radiodiffuseur public se justifiait pour des raisons techniques (le manque de fréquences) et à cause de la philosophie sous-jacente quant aux valeurs normatives intangibles liées à la démocratie de style occidental, comme la diversité, le pluralisme, le service universel, le maintien de l'identité culturelle et, plus récemment, la promotion d'une culture commune, qui comprend et reconnaît divers groupes dans la société plutôt que simplement une croyance en un mode de vie en particulier. Ces valeurs forment également la base de l'argument en faveur de l'extension de la radiodiffusion publique à l'ère des nouvelles technologies10.

Autrement dit, à mesure que nous progressons dans une période où les pays partageront facilement et volontairement toutes les formes de perspectives culturelles, la radiodiffusion publique pourrait bien apparaître comme une source importante d'expression distincte et précise de cultures et de valeurs nationales. Le reste du chapitre sera consacré à la situation actuelle et aux perspectives d'avenir du radiodiffuseur public national, la SRC.

Figure 6.1 - Financement public des radiodiffuseurs publics dans les pays de l'OCDE selon le pourcentage du PIB (1999)

B. Société Radio-Canada

Mandat

Comme il est indiqué au chapitre 2, la Loi canadienne de la radiodiffusion de 1932 a créé la Commission canadienne de radio-diffusion, le premier organisme public de radiodiffusion et de réglementation du Canada. Moins de quatre ans plus tard, en 1936, une nouvelle loi a remplacé la CCRD par la Société Radio-Canada (SRC).

La Loi canadienne de la radiodiffusion de 1936 a donné plus d'indépendance à la SRC que la loi précédente, mais elle apportait peu de précisions quant aux attentes du Parlement à l'égard du service de radiodiffusion public national du Canada. Ainsi, de 1936 à 1957, la SRC a élaboré et exploité ses services de radiodiffusion en français et en anglais comme elle l'entendait.

En 1958, la SRC a été dépouillée de ses responsabilités de réglementation à la suite de l'adoption de la nouvelle Loi sur la radiodiffusion et de la création d'un nouvel organisme de réglementation, le Bureau des gouverneurs de la radiodiffusion (BGR). Toutefois, le mandat de la Société restait nébuleux et seul un bref libellé indiquait que la SRC avait pour objet d'exploiter un service national de radiodiffusion. En conséquence, le BGR et la SRC étaient souvent en désaccord quant à la place de cette dernière dans le système canadien de radiodiffusion.

Dix ans plus tard, la SRC a reçu son premier mandat, avec l'adoption de la Loi sur la radiodiffusion de 1968 et elle a été officiellement reconnue comme étant le service de radiodiffusion national du Canada.

Mandat de la SRC en vertu de la Loi sur la radiodiffusion de 1968

g)   le service national de radiodiffusion devrait :

   (i)   être un service équilibré qui renseigne, éclaire et divertisse des personnes de tous âges, aux intérêts et aux goûts divers, et qui offre une répartition équitable de toute la gamme de la programmation,

f)    ... a une teneur et une nature principalement canadiennes;

   (ii)   être étendu à toutes les régions du Canada, au fur et à mesure que des fonds publics deviennent disponibles,

   (iii)   être de langue anglaise et de langue française, répondre aux besoins particuliers des diverses régions et contribuer activement à la fourniture et à l'échange d'information et de divertissement d'ordre culturel et régional,

   (iv)   contribuer au développement de l'unité nationale et exprimer constamment la réalité canadienne.   

Vingt-trois ans plus tard, soit en 1991, la Loi et le mandat de la Société ont été modifiés. En résumé, depuis 1991, la Société doit : contribuer au partage d'une conscience et d'une identité nationale; être offerte de la manière la plus adéquate et efficace, au fur et à mesure de la disponibilité des moyens; être typiquement canadienne; être de qualité équivalente en français et en anglais; refléter la situation et les besoins particuliers des deux collectivités de langue officielle, y compris ceux des minorités de l'une ou l'autre langue; refléter le caractère multiculturel et multiracial du Canada; refléter la globalité canadienne et rendre compte de la diversité régionale du pays11,12.

Mandat de la SRC en vertu de la Loi sur la radiodiffusion de 1991

l)   la Société Radio-Canada, à titre de radiodiffuseur public national, devrait offrir des services de radio et de télévision qui comportent une très large programmation qui renseigne, éclaire et divertit;

m)   la programmation de la Société devrait à la fois :

   (v)   être principalement et typiquement canadienne,

   (vi)   refléter la globalité canadienne et rendre compte de la diversité régionale du pays, tant au plan national qu'au niveau régional, tout en répondant aux besoins particuliers des régions,

   (vii)   contribuer activement à l'expression culturelle et à l'échange des diverses formes qu'elle peut prendre,

   (viii)   être offerte en français et en anglais, de manière à refléter la situation et les besoins particuliers des deux collectivités de langue officielle, y compris ceux des minorités de l'une ou l'autre langue,

   (ix)   chercher à être de qualité équivalente en français et en anglais,

   (x)   contribuer au partage d'une conscience et d'une identité nationales,

   (xi)   être offerte partout au Canada de la manière la plus adéquate et efficace, au fur et à mesure de la disponibilité des moyens,

   (xii)   refléter le caractère multiculturel et multiracial du Canada.

Depuis l'adoption de la Loi de 1991, la SRC se trouve dans un environnement en constante évolution. De nombreux nouveaux services spécialisés et services de télévision hertzienne ont été autorisés, les auditoires se sont fragmentés rapidement et Internet a suscité l'intérêt général. Parallèlement, le budget de la SRC n'a pas été indexé pour tenir compte de l'inflation, mais il a plutôt subi des compressions périodiques.

Pour faire face à ses difficultés, la SRC a parfois été contrainte de prendre des décisions qui ont été mal accueillies. Par exemple, elle ne diffuse plus autant d'émissions locales de nouvelles et d'affaires publiques, et elle a réduit le nombre d'émissions locales et régionales autres que des nouvelles qu'elle produit et achète.

En 2000, la SRC a déployé une stratégie de transformation d'entreprise pour orienter ses activités dans le milieu concurrentiel des communications d'aujourd'hui. Plus particulièrement, et compte tenu de son mandat de service public énoncé dans la Loi, la SRC s'est fixé les priorités suivantes :

présenter des émissions canadiennes particulières et de grande qualité;

utiliser tous les actifs disponibles afin de réinvestir dans la programmation canadienne et de l'appuyer;

maximiser les partenariats et les alliances stratégiques afin d'atteindre les objectifs de programmation de la SRC et d'appuyer les initiatives à cet égard.

Le Comité tient à féliciter la SRC pour les efforts qu'elle déploie afin de se repositionner comme source d'émissions canadiennes de qualité qui reflètent les cultures et les valeurs du Canada.

Profil des services

La SRC fait rapport annuellement au Parlement par l'intermédiaire du ministre du Patrimoine canadien. Elle exploite quatre réseaux radiophoniques sans publicité et deux réseaux de télévision qui diffusent des émissions en français et en anglais d'un océan à l'autre. Elle offre également :

des services radiophoniques et télévisuels dans le Nord du Canada;

deux services de télévision d'information et de nouvelles 24 heures sur 24 (CBC Newsworld et le Réseau de l'information);

trois services de télévision spécialisée : Country Canada, ARTV et le Canadian Documentary Channel13;

des services Internet en anglais et en français;

des services de programmation par Internet s'adressant aux jeunes francophones et anglophones;

Galaxie, un service audionumérique payant offrant 30 chaînes de musique.

Dans les sections suivantes, nous présentons des données sommaires sur la radio et la télévision de la SRC.

Radio

Les services radiophoniques de langues française et anglaise de la SRC présentent des émissions informatives, culturelles et musicales. Ces services sont disponibles en direct sur les bandes AM et FM, à la radio numérique et dans Internet. La figure 6.2 porte sur la présence radiophonique francophone et anglophone de la SRC au Canada.

   

Figure 6.2 - Nombre total de stations de radio de la CBC et de la SRC, stations affiliées et radiodiffuseurs, 2002

Dans l'ensemble, Radio One est offert à 98 % des Canadiens anglophones, tandis que Radio Two est diffusé à 75 % de ceux-ci. En ce qui concerne la radio francophone, la Première chaîne et la Chaîne culturelle sont offertes à 98 % et 83 % des Canadiens francophones respectivement14. La figure 6.3 montre les parts d'auditoire de la radio anglophone et de la radio francophone de 1999 à 2002. Elle permet de constater que Radio-Canada a connu une forte croissance au cours de cette période, tandis que les services de langue anglaise ont enregistré de légères augmentations de leurs parts d'auditoire15.

   

Figure 6.3 - Parts d'écoute de la radio de la CBC et de celle de la SRC, 1999-2002

Dans l'ensemble, le Comité est satisfait du rendement des services radiophoniques de langues française et anglaise de la SRC. Il signale que le CRTC a récemment attribué 20 licences à la SRC afin qu'elle termine son réseau radiophonique de langue française, La Chaîne culturelle, et que la SRC s'est engagée à commencer l'exploitation de ces services au plus tard au début de 2004. Le Comité attend avec impatience l'inauguration des nouvelles stations.

Télévision

Les services télévisés conventionnels en anglais et en français de la SRC sont offerts aux Canadiens en direct, par câblodistribution ou par satellite. Dans l'ensemble, 97 % des Canadiens anglais sont en mesure de capter les émissions de télévision du service de langue anglaise de la SRC et près de 99 % des Canadiens français ont accès à Radio-Canada.

Dans la figure 6.4, les stations en direct de la SRC sont ventilées par propriétaire. Il est particulièrement intéressant de constater que la Société ne possède que la moitié de ses stations (c.-à-d. 24) tandis que les autres appartiennent à des stations privées affiliées qui diffusent tout ou partie de la programmation de la SRC.

Compte tenu des compressions budgétaires, de l'augmentation de la concurrence et de la fragmentation du public, la part d'auditoire de la SRC a diminué de façon marquée au cours des 20 dernières années. La figure 6.5 montre que le réseau anglais de la SRC comptait en moyenne une part d'auditoire de 16,4 % (entre 6 h et 2 h) en 1985-1986, tandis que le service en français de Radio-Canada retenait plus de 30 % des téléspectateurs du Québec.

Figure 6.5 - Parts d'écoute pour la CBC (téléspectateurs anglophones) et la SRC (téléspectateurs francophones), incluant les stations affiliées, années sélectionnées 1985-2002

La figure précédente démontre clairement la mesure dans laquelle la part d'auditoire des réseaux anglais et français de la SRC a diminué à la suite de l'augmentation du choix de chaînes depuis 1984. Comme nous le verrons au chapitre 4, la fragmentation de l'auditoire est un phénomène auquel tous les radiodiffuseurs canadiens et américains, tant publics que privés, sont confrontés depuis quelques années.

La figure ci-dessus montre également que, malgré le fait que la part d'auditoire globale du réseau de télévision de langue anglaise de la SRC ait diminué de plus de la moitié par rapport au niveau de 1985-1986, elle s'est accrue d'environ 12 % entre 1999-2000 et 2000-2001. Cela indique que le projet de transformation de la télévision de langue anglaise de la SRC, qui a présenté une nouvelle image et une nouvelle grille-horaire à l'automne 2000, fonctionne bien.

En ce qui concerne la télévision de langue française, on peut constater que la part d'auditoire de la SRC qui a diminué d'environ 54 % par rapport au niveau de 1984 pourrait bien continuer de s'éroder, compte tenu de la gamme de services spécialisés de langue française nouvellement autorisés qui gagnent en popularité sur le marché québécois16.

Données sur l'écoute et l'offre d'émissions

Comme il est indiqué au chapitre 2, la SRC (radio et télévision, en anglais et en français) n'a jamais eu de difficulté à répondre aux exigences en matière de contenu canadien. En fait, ses services de télévision ont régulièrement dépassé les attentes du CRTC à cet égard, et la SRC est de loin le plus important fournisseur d'émissions canadiennes pendant les heures de grande écoute.

Par exemple, au cours des heures de grande écoute en soirée, entre octobre 2000 et mars 2001, 94 % de toutes les émissions présentées à la télévision anglaise de la SRC étaient canadiennes (l'exigence est de 80 %). La figure 6.6 indique comment se sont comportés les réseaux anglais et français de la télévision de la SRC à cet égard entre septembre 2000 et août 2001.

Une façon pratique d'examiner les données relatives à l'offre d'émissions consiste à les comparer avec avec les statistiques sur l'écoute17. La figure 6.7 présente les données sur l'écoute en anglais et en français pendant les heures de grande écoute (dans ce cas, entre 19 h et 23 h) de septembre 2000 à août 2001. Comme on peut le constater, les réseaux de télévision conventionnelle de langues française et anglaise de la SRC attirent un auditoire aux émissions canadiennes aux heures de grande écoute à des taux qui dépassent l'offre existante. Par exemple, la télévision anglaise de la SRC a présenté un contenu canadien à 90 % durant les heures de grande écoute en 2000-2001, et 93 % de l'auditoire de la SRC a écouté du contenu canadien. Par contre, Global avait un contenu canadien d'environ 24 % aux heures de grande écoute, mais seulement 11 % des téléspectateurs de Global ont choisi la programmation canadienne.

 

La révolution de la radio de la SRC

À la fin des années 1960, la société canadienne, comme toutes les démocraties occidentales, était en ébullition. Alors que les enfants de l'après-guerre atteignaient la majorité, leurs objectifs de justice sociale dans tous les domaines prenaient une place de plus en plus importante. Dans ce contexte, le réseau radiophonique de langue anglaise de la SRC a entamé un long processus de transformation connu comme la révolution de la radio d'information.

Même si, au départ, les objectifs des nouveaux journalistes de la SRC n'étaient pas clairement définis, ils se sont précisés dans la pratique : présenter aux Canadiens l'information nécessaire pour tenir des débats publics, exprimer l'opinion des gens ordinaires et engager les dirigeants à rendre compte de leurs actes. En se fixant ces objectifs, la radio de langue anglaise de la SRC s'est taillé une place dans le cœur des Canadiens, comme l'a démontré trente ans plus tard la vague d'émotions qui a suivi le décès des grands journalistes de la révolution de la radio, Barbara Frum et Peter Gzowski.

Les transformations ont commencé dès mai 1965, lorsque la première tribune téléphonique du Canada, Cross Country Checkup, a permis aux auditeurs d'entendre en direct l'opinion de Canadiens de toutes les régions du pays. En 1968, l'instantanéité du téléphone est devenue l'essence de l'émission hebdomadaire As It Happens, qui faisait des entrevues téléphoniques en direct dans le monde concernant des questions d'actualité.

Il s'agissait également d'une révolution locale. Le Winnipeg Experiment a créé le modèle des émissions locales du matin à la SRC, soit un bloc de trois heures laissant tomber la musique au profit d'entrevues et de discussions sur les principaux enjeux locaux. De nombreuses émissions ont adopté la nouvelle approche consistant à sortir du studio grâce à des appareils légers, à enregistrer les commentaires de Canadiens ordinaires de tous les milieux et à présenter ces enregistrement dans le cadre du débat national.

En 1969, la majeure partie de la grille de la radio était toutefois encore composée du genre d'émissions de 15 minutes qui existait avant l'arrivée de la télévision en 1952. Pour atteindre son plein potentiel, la révolution de la radio devait avoir un point de convergence qu'elle a trouvé lorsque le conseil d'administration de la SRC a commandé un rapport à deux de ses jeunes journalistes, Peter Meggs et Doug Ward.

Dans leur rapport de mai 1970, MM. Meggs et Ward ont résumé les idées recueillies dans le cadre de consultations pancanadiennes auprès du personnel de stations de radio et formulé une série de recommandations de portée générale visant à rendre la radio intéressante. Résultat : une évolution continue. As It Happens est devenu une émission quotidienne diffusée en soirée; la formule de la radio d'information locale s'est répandue au pays; This Country in the Morning, animée par Peter Gzowski, a vu le jour; la SRC a entrepris le processus de consolidation de l'information en Radio One et celui de création d'un réseau FM qui en est le pendant dans le domaine du spectacle.

Bien sûr, ces mesures se sont heurtées à une résistance. La direction de la SRC a commencé par rejeter une politique de diffusion radiophonique sans publicité pour ensuite appliquer une telle politique en 1974. Le CRTC a rejeté la proposition relative à l'exploitation de deux réseaux, puis, des années plus tard, il a approuvé la demande d'exploitation d'un réseau FM. Le malaise de la direction à l'égard de l'approche axée sur la confrontation des jeunes journalistes s'est dissipée au fil des ans; un des principaux producteurs radio de l'époque, Mark Starowicz, a fini par produire l'émission The Journal (avec Barbara Frum) et la série Le Canada – Une histoire populaire.

Fondamentalement, toutefois, la révolution de la radio peut être considérée dès ses débuts comme une réussite de la radiodiffusion; le remaniement de la radio de la SRC, à l'ère de la télévision, en a fait une tribune essentielle des débats publics et des échanges culturels du Canada.

Figure 6.6 - Contenu canadien présenté aux heures de grands écoute (19h à 23h) par les réseaux conventionnels canadiens de langue anglaise et française, septembre 2000 à août 2001

Figure 6.7 - Contenu canadien écouté aux heures de grande écoute (19h à 23h) par l'auditoire des réseaux conventionnels canadiens de langue anglaise et française, septembre 2000 à août 2001

Figure 6.8 - Les 20 séries dramatiques et humoristiques canadiennes de langue anglaise les plus populiares diffusées par les réseaux conventionnels canadiens en 2001-2002 (excluant le Québec)

Part d'auditoire

Une comparaison entre la programmation américaine offerte par les radiodiffuseurs conventionnels privés du Canada et la programmation du réseau de télévision de langue anglaise de la SRC démontre que celle-ci est régulièrement et facilement dépassée par ses concurrents18. Si nous examinons isolément les données sur les parts d'auditoire moyen de la programmation canadienne de CBC, nous constatons qu'elles sont beaucoup plus modestes que celles de la télévision de langue française (voir les figures 6.10 et 6.11), mais qu'elles sont quand même supérieures aux données concernant CTV et Global, principaux concurrents de la télévision hertzienne de CBC. La figure 6.8 présente les 20 séries dramatiques et humoristiques canadiennes de langue anglaise les plus populaires diffusées en 2001-2002. Elle montre que 7 des 10 (et 11 des 20) séries dramatiques et humoristiques canadiennes de langue anglaise les plus populaires ont été diffusées sur les ondes de CBC en 2001-2002.

La figure 6.9 présente les principales émissions spéciales canadiennes de langue anglaise diffusées en 2001-2002. Ensemble, ces données sur l'auditoire sont bien en deçà des auditoires moyens que CBC et d'autres réseaux avaient dans un marché moins fragmenté, mais elles révèlent que le service de télévision de langue anglaise de la SRC reste une source importante d'émissions typiquement canadienne, notamment d'émissions spéciales de sport comme celles qui sont diffusées à l'occasion des Jeux olympiques.

Figure 6.9 - Les 15 émissions spéciales canadiennes de langue anglaise les plus populaires diffusées par les réseaux conventionnels canadiens en 2001-2002 (excluant le Québec)

Les données relatives à la télévision de langue française sont bien différentes. La figure 6.10 présente les 20 principales séries dramatiques et humoristiques canadiennes qui ont été diffusées à la télévision de langue française en 2001-2002. La figure présente des données impressionnantes sur l'auditoire du marché canadien de langue française en 2001-2002. Dans l'ensemble 15 des 20 émissions avaient un auditoire moyen de plus d'un million de téléspectateurs. De plus (et malgré un auditoire éventuel équivalant à près du tiers de celui du marché anglophone), ces 15 émissions ont obtenu des parts d'auditoire moyen plus élevées que celle de la série canadienne de langue anglaise la plus écoutée, soit la Royal Canadian Air Farce. Quant au rendement de Radio-Canada sur le marché francophone en 2001-2002, six des 20 principales séries dramatiques et humoristiques canadiennes ont été diffusées par la SRC, bien qu'une seule se soit placée dans les dix premières. Pour sa part, TVA, le principal concurrent de la SRC dans le domaine de la télévision conventionnelle, a présenté 13 des 20 principales émissions.

Figure 6.10 - Les 20 séries dramatiques et humoristiques canadiennes de langue française les plus populaires diffusées par les réseaux conventionnels canadiens en 2001-2002 (Québec seulement)

La figure 6.11 contient la liste des principales émissions spéciales canadiennes de langue française diffusées en 2001-2002. Ensemble, les figures 6.10 et 6.11 font ressortir davantage la vive concurrence que se livrent Radio-Canada et TVA dans le marché francophone afin d'attirer les téléspectateurs aux émissions spéciales de divertissement canadiennes. Ils montrent également que les réseaux anglais et français de Radio-Canada ont une formule gagnante en ce qui a trait à leur couverture des Jeux olympiques.

Figure 6.11 - Les 15 émissions spéciales canadiennes de langues française les plus populaires diffusées par les réseaux conventionnels canadiens en 2001-2002 (Québec seulement)

Bref, les figures ci-dessus permettent d'affirmer ce qui suit :

Les émissions canadiennes de langues anglaise et française, et plus particulièrement celles de CBC/SRC, attirent de vastes auditoires.

À la télévision de langue anglaise, les émissions canadiennes de CBC sont en concurrence avec celles de CTV et de Global et leur dame souvent le pion. CBC semble donc jouer un rôle déterminant pour ce qui est de présenter des émissions canadiennes aux auditoires canadiens. Toutefois, très peu des émissions canadiennes les plus populaires (y compris celles de CBC) sont des séries dramatiques.

À la télévision de langue française, les auditoires des émissions canadiennes sont, en nombres absolus, plus importants que ceux des émissions de langue anglaise, mais la SRC semble moins touchée par cette réussite (que ne l'est CBC dans le secteur anglophone) en raison de la vigueur du secteur privé et plus particulièrement de TVA.

Le Comité est encouragé par le rendement de CBC et de Radio-Canada et il fait remarquer que les parts importantes d'auditoire qu'obtiennent les émissions à contenu canadien témoignent de la pertinence continue et de la valeur persistante de la radiodiffusion publique dans un environnement médiatique fragmenté.

Recettes et dépenses de fonctionnement

La figure 6.12 montre les crédits parlementaires de la SRC en dollars courants et constants pour la période de 1990-1991 à 2001-2002. Elle indique que les crédits parlementaires de la SRC pour dépenses de fonctionnement (la SRC reçoit également des crédits parlementaires pour les immobilisations et le fonds de roulement) ont atteint un sommet de 950 millions de dollars en 1992-1993. L'augmentation des crédits était principalement liée à des majorations de traitements et de salaires accordées conformément aux lignes directrices fédérales de l'époque touchant tous les ministères et organismes fédéraux. Ce n'est qu'à partir de l'annonce de compressions dans le budget fédéral de 1993 et l'examen des programmes qui a suivi en 1995 que les crédits ont commencé à diminuer radicalement. Toutefois, de 2000 à 2002, la tendance s'est inversée en partie. En dépit des récentes augmentations annuelles, le financement de la SRC a connu une baisse pour l'ensemble de la période. De 1990-1991 à 2001-2002, cette baisse était de 4,5 %; toutefois, en dollars réels, elle équivaut à 20,5 %19.

   

Figure 6.12 - Crédits parlementaires affectés à la SRC en dollars courants et constants, 1990-2002

En plus d'obtenir des crédits parlementaires, la SRC tire des recettes de la publicité, des droits d'abonnement à la câblodistribution (pour ses services spécialisés) et des ventes. La figure 6.13 présente les revenus de la SRC pour ses principales chaînes au cours des six dernières années financières. Elle montre que les crédits parlementaires de la SRC accusent une baisse d'environ 100 millions de dollars par rapport à ce qu'ils représentaient en 1996-199720. De plus, en 2000-2001, environ 60 % de tout le financement (à l'exception des recettes générées par les services spécialisés) provenaient des crédits parlementaires21.

   

Figure 6.13 - Revenus de la SRC, à l'exception des services spécialisés, 1996-2002

La figure 6.14 présente une ventilation des dépenses de fonctionnement de la SRC pour 2001-2002, y compris celles des services spécialisés. Elle indique que près de 75 % des dépenses de la SRC sont consacrées au fonctionnement de ses principaux réseaux et seulement 1,2 % lui permet de dispenser une partie de ces services et d'autres services de programmation au moyen des technologies des nouveaux médias (c.-à-d. Internet)22.

C. Ce que les témoins ont dit

Comme il est indiqué au chapitre 2, la SRC a toujours dû composer avec des attentes élevées et de vives critiques au moindre faux pas. Ce phénomène est à l'origine de la remarque faite par le Groupe de travail sur la radiodiffusion canadienne en 1986 :

Figure 6.14 - Sépenses de fonctionnement de la SRC, 2001-2002

Au fil des ans, la Société Radio-Canada a été passée au crible par tout un chacun. Elle déchaîne les passions de ses partisans et détracteurs. Nous avons pu le constater lors de nos rencontres publiques et privées d'un bout à l'autre du pays23.

Depuis, les importantes compressions dans les crédits parlementaires accordés à la SRC (particulièrement depuis le début des années 1990), conjuguées à la lutte constante de la Société pour se repositionner dans le système canadien de radiodiffusion, n'ont fait qu'intensifier l'examen public. Pour se justifier, la Société a fait remarquer ce qui suit dans son rapport annuel de 1993 :

La question fondamentale pour la SRC, dans un contexte d'impartition des ressources, d'accroissement des exigences et d'intensification de la concurrence, a été de trouver une façon de maintenir notre capacité de nous acquitter de notre mandat pour faire en sorte que les Canadiens et leur identité collective continuent de trouver une voix24.

Un an plus tard, le président de la SRC a expliqué :

Nous avons été en mesure d'atténuer une partie des effets délétères de l'incertitude budgétaire, de restaurer un certain optimisme dans notre travail et d'axer nos efforts sur l'objet premier de la SRC — présenter aux Canadiens une image d'eux-mêmes et de leur pays qu'ils ne peuvent obtenir nulle part ailleurs25.

Plus récemment, le président actuel de la SRC, M. Robert Rabinovitch, a déclaré :

 

La SRC et les Jeux olympiques

Concept révolutionnaire de la SRC, la couverture continue des Jeux olympiques a exercé sur les Canadiens une fascination sous laquelle ils sont toujours.

Bien avant leur ouverture, les Jeux olympiques de Montréal de 1976 pouvaient être considérés comme un événement formateur. C'était la première fois que les Jeux avaient lieu au Canada. Il s'agissait des premiers Jeux olympiques à se dérouler après ceux de Munich (1972), où l'assassinat d'athlètes israéliens a clairement démontré que le sport n'était plus un domaine à l'abri du terrorisme. Il s'agissait aussi des premiers Jeux olympiques à se tenir après le lancement du satellite Anik, faisant du Canada le premier pays du monde à être doté d'un système de satellite national permettant une communication instantanée à tous les Canadiens où qu'ils vivent.

Gordon Craig, qui avait déjà assuré la couverture en direct des Jeux olympiques de Munich, de Mexico et de Grenoble, a décidé que le moment était venu d'y mettre le paquet. Il a convaincu la direction de la CBC et de Radio-Canada qu'à titre de radiodiffuseur hôte pour le monde entier, la SRC devrait offrir aux Canadiens la couverture intégrale des Jeux comme une émission de nouvelles et de sport se déroulant en direct.

Il n'a cessé de répéter : « Au moment de l'ouverture des Jeux, il y aura au pays un engouement qui ne s'était pas manifesté depuis Expo 67. Tous les Canadiens voudront regarder les Jeux. Si nous ne leur montrons pas, nous n'aurons pas réussi à remplir notre mandat de radiodiffuseur public. »

C'est ainsi que la population canadienne a pu voir près de 170 heures d'émissions, pour la plupart en direct, et qu'elle a eu le sentiment d'assister aux Jeux, et non pas seulement de regarder les habituelles mini-dramatiques préparées à l'avance par les réseaux américains. En conséquence, 92 % des Canadiens, soit 18 millions de personnes, ont été rivés au petit écran pendant 15 jours. Comme ce fut le cas lors d'Expo 67, nous avons grandi en tant que nation, lorsque nous avons vu nos athlètes compétitionner et triompher. La formule révolutionnaire a uni les Canadiens comme jamais auparavant et elle est depuis devenue la norme en matière de couverture des Jeux olympiques.

Pour grandir toutefois, il ne suffit pas de célébrer les réussites communes, il faut aussi rester unis dans l'adversité. Tard dans la nuit, nous avons regardé Ben Johnson gagner le 100 mètres à Séoul (Corée) en 1988; puis quelques jours plus tard, nous avons appris avec tristesse la nouvelle de son test antidopage positif, un événement qui a donné lieu à un examen introspectif national sur le sens de l'athlétisme, de la compétition et de la fierté nationale. La médaille d'or de Donovan Bailey au 100 mètres à Atlanta, en 1996, suivie par la victoire des hommes au relais 4 x 100 mètres, a peut-être suscité autant d'émoi parce qu'elle mettait un point final à cette période difficile.

Toutefois, sur le plan de l'intérêt pur et simple, rien n'égale celui qu'a inspiré la performance des athlètes canadiens aux Jeux olympiques d'hiver de Salt Lake City en 2002. Les partenaire CBC et TSN ont présenté 400 heures de couverture, et CBC a obtenu un auditoire de 1,5 millions de Canadiens en deux semaines. La médaille d'or qu'ont remportée tant l'équipe masculine nationale de hockey que l'équipe féminine a attiré une foule de téléspectateurs : le match décisif chez les hommes a attiré 9 millions de téléspectateurs, du jamais vu au Canada. Fait intéressant, les auditoires ont été les plus nombreux au moment de la célébration d'après-match, alors que 10 461 000 Canadiens ont voulu vivre l'expérience pour célébrer la victoire de leurs athlètes et manifester leur sentiment de fierté nationale.

En tant que radiodiffuseur public national, CBC/Radio-Canada est tenue d'offrir aux Canadiens une programmation originale de grande qualité... Notre but est de nous démarquer en tant que radiodiffuseur de service public... Étant donné la précarité de nos ressources et un environnement de plus en plus concurrentiel, la Société a établi ... des priorités pour 1) faire la preuve que CBC/Radio-Canada est une entreprise bien gérée; 2) présenter une programmation distincte de grande qualité; 3) favoriser l'émergence d'un débat sur le financement de CBC/Radio-Canada; 4) assurer la viabilité de nos grilles canadiennes; 5) mieux remplir son mandat grâce à une sélection judicieuse d'alliances et de partenariats; 6) faire en sorte que CBC/Radio-Canada fonctionne davantage comme un conglomérat intégré26.

Les citations précédentes exposent deux questions fondamentales que le Comité s'est employé à traiter et à éclaircir. Ce sont : 1) le rôle, le mandat et la structure qu'il convient de donner à la SRC; 2) ses sources de financement.

Ce n'est pas une mince entreprise toutefois que d'arriver à comprendre ces questions. Tout au long de ses audiences et de ses déplacements, le Comité a entendu un grand nombre de témoins parler des points forts et des points faibles de la SRC. Certains témoins ont été élogieux tandis que d'autres avaient des critiques à formuler. Certains se posaient des questions quant à la représentation locale et régionale, tandis que d'autres mettaient l'accent sur la présentation d'un contenu d'émissions nationales. Certains craignaient que les publics minoritaires soient laissés pour compte tandis que d'autres se préoccupaient de la faible part d'auditoire. Pourtant, si l'on y regarde de plus près, la plupart des questions soulevées par les témoins avaient tendance à se rattacher au débat de longue date concernant le rôle, le mandat et la structure de financement de la SRC.

Dans cette optique, la présente section traite des témoignages présentés au Comité (en personne ou par écrit) au sujet de la SRC. Malgré les nombreux recoupements des enjeux et des préoccupations, les points de vue des témoins sont divisés en plusieurs catégories: points de vue généraux; programmation locale et régionale; rôle de la SRC; questions relatives au financement.

Points de vue généraux

Lorsque la SRC a comparu devant le Comité, sa présidente, Mme Carole Taylor a déclaré :

À un moment où se dressent de grands défis pour la radiodiffusion provenant de la diversité des plates-formes technologiques et du choix quasiment illimité de chaînes, il est vital que le Canada en tant que nation se dote de politiques et prenne des mesures en vue de réserver une place à la radiodiffusion publique canadienne indépendante. Je sens monter une nouvelle flambée de fierté au pays. Sur cette toile de fond, CBC/Radio-Canada se dresse comme une institution nationale vouée à défendre nos valeurs, nos athlètes, nos artistes et nos interprètes, et jusqu'à notre identité propre en tant que Canadiens. Ainsi, Radio-Canada demeure-t-elle importante pour le Canada? À notre avis, Radio-Canada est plus importante aujourd'hui que jamais auparavant27.

Peu après, le président de la Société, M. Robert Rabinovitch, a déclaré au Comité :

Il est nécessaire plus que jamais de pouvoir compter sur une voix canadienne distinctive. Le rôle de Radio-Canada au sein du système canadien de radiodiffusion doit être confirmé et il faut lui donner les outils et la marge de manœuvre dont elle a besoin pour s'acquitter de son mandat et servir de manière appropriée le système canadien de radiodiffusion et la population canadienne28.

Les citations précédentes présentent un éclairage utile sur la façon dont la SRC aimerait se positionner dans le système en évolution d'aujourd'hui en tant que radiodiffuseur public national du Canada. Elles témoignent de sa détermination à offrir un service de radiodiffusion public à tous les Canadiens, pour tous les Canadiens — un service qui s'appuie sur les moyens et le mandat nécessaires pour transmettre et partager le caractère unique du Canada et de ses citoyens.

De nombreux témoins qui ont comparu devant le Comité partageaient ce point de vue. Par exemple, M. Armand Dubois a fait valoir que la SRC :

... est la fondation immuable qui soutient le reste de la structure et qui doit continuer de le faire. La SRC doit demeurer résolument une organisation publique indépendante du gouvernement et non définie par des critères commerciaux29.

Avec une passion semblable, M. Brian Pollard a déclaré ce qui suit :

À cause de l'existence de ce très large fossé culturel [entre les régions du Canada], et parce que personne n'a fait la moindre tentative pour expliquer les différences entre vous et moi au reste du pays, ce malentendu persiste. C'est pourquoi la radiodiffusion publique est tellement essentielle. Nous sommes une communauté de minorités. Nous avons besoin d'un bon réseau de radiodiffusion publique. C'est essentiel.30.

Le Conseil provincial du secteur des communications du Syndicat canadien de la fonction publique a déclaré au Comité :

Au Québec, nous avons pu constater que la présence d'une télévision publique de qualité, forte et compétitive a très souvent contribué à rehausser la qualité de la programmation offerte par le secteur privé. D'ailleurs, le chemin parcouru dans le domaine de l'information ou des dramatiques, par exemple, illustre bien cette dynamique31.

De telles remarques ont été entendues fréquemment. En effet, les mémoires présentés au Comité dans le cadre de son étude faisaient régulièrement ressortir le rôle essentiel de la SRC et de la radiodiffusion publique en général. Par exemple :

La SRC est une force vitale et doit être maintenue32.

Nous recommandons que la Loi dispose que la SRC doit demeurer une présence fondamentale et importante du système de radiodiffusion canadien à mesure qu'il évolue33.

La SRC est un pilier fondamental de notre patrimoine culturel34.

La mission de Radio-Canada est aussi essentielle aujourd'hui qu'elle l'était lors de sa création il y a plus de soixante ans35.

Pour nous, il est évident que le mandat pancanadien de Radio-Canada, qui porte sur des dossiers d'intérêt pour l'ensemble des Canadiens et des Canadiennes, est un mandat primordial qui est nécessaire pour la souveraineté du pays36.

La SRC est excellente. N'y touchez pas. Faites tout ce que vous pouvez pour la soutenir. S'il n'y avait pas la radio de la SRC, je pense que je ne serais probablement pas informé37.

À mon avis, la SRC est le radiodiffuseur le plus important du Canada. Aucun élément de notre société et de notre culture n'unit le pays comme le fait la radio de la SRC38.

Vous pouvez nous aider en faisant en sorte que la SRC reste importante pour vous-mêmes et pour tous les Canadiens et qu'elle soit préservée et consolidée39.

Naturellement, la même passion qui a animé l'expression de soutien à l'égard de la radiodiffusion publique a également inspiré le témoignage de personnes qui avaient une vaste gamme de préoccupations à verbaliser sur la SRC et sa programmation, notamment, le déclin de la programmation locale et régionale, l'élimination à toutes fins utiles de la production interne et la qualité des émissions en général. Voici des exemples de ce que le Comité a entendu sur ces trois points :

Dans les années 1960, 1970 et 1980, la Société Radio-Canada témoignait d'une vigueur et d'un dynamisme extraordinaire à Terre-Neuve. De nos jours, elle se meurt, et il y a bien des Terre-Neuviens — voire beaucoup de Canadiens de l'Atlantique — qui sont convaincus que le réseau de télévision de la SRC est déjà mort40.

CBC trouve une formule d'émissions qui marche et elle s'y accroche au maximum au lieu de mettre continuellement sur pied de nouvelles formules stimulantes41.

La SRC doit s'efforcer d'offrir aux téléspectateurs des émissions a contenu canadien qui ont tendance à être sous-représentées dans les grilles-horaires des autres télédiffuseurs canadiens, notamment les dramatiques, les émissions de musique, les émissions pour enfants et les documentaires. Tout cela doit cependant se faire de manière à ne pas provoquer une désertion des auditeurs de la télévision publique42.

Les documentaires trouvent naturellement leur place auprès de tous les radiodiffuseurs publics et en fait, cet espace public doit être élargi. Toutefois, je tiens à dire qu'en ce qui concerne les documentaires à la SRC, un des points sensibles, pour nous, c'est par exemple, la série documentaire appelée Witness. Si vous savez ce qui est présenté cette semaine, vous êtes plus renseigné que moi, parce que cette série n'est jamais publiée et ceci est attribuable en partie à des règles de promotion internes43.

Le Comité a également entendu beaucoup d'hypothèses quant aux causes premières des questions présentées ci-dessus. Mentionnons notamment : une gestion médiocre; l'absence de priorités claires; un financement insuffisant; des problèmes de gestion publique et une reddition de comptes déficiente. Par exemple :

Radio-Canada est engluée par la bureaucratie44.

Or, à la télévision, j'ignore ce que l'on a fait à la radio, la Société Radio-Canada a succombé à toutes les faiblesses institutionnelles possibles en développant une gestion intermédiaire vraiment pléthorique. Elle a perdu des gens inspirés au sommet et à la base, et il y a eu beaucoup moins de talents diffusés sur les ondes45.

On se rend compte que depuis 1990, les crédits parlementaires alloués à Radio-Canada ont fondu comme neige au soleil. Ce qui a eu un impact direct sur les emplois, la programmation et la quantité de publicité diffusée à l'antenne de notre télévision publique46.

Cependant, il s'agit d'un problème de gestion et d'orientation à la CBC. S'oriente-t-elle dans la même direction que celle que souhaitent les Canadiens en matière de programmation régionale? Je ne suis pas certain que si l'on accordait des fonds supplémentaires à la CBC, elle ferait nécessairement davantage d'émissions locales. Je ne sais pas si c'est ce qu'elle ferait avec des crédits supplémentaires47.

Je ne sais pas si mépris est le mot juste, mais je ne pense pas que la SRC ait beaucoup de respect pour son auditoire. Ou peut-être que la SRC ne veut pas savoir qui sont ses auditeurs. Pour ce qui est
de la télévision que les gens regardent quotidiennement, je pense qu'il y a un gaspillage éhonté de ressources à la Société Radio-Canada. Je ne pense pas que ce soit une question de financement. C'est plutôt une question de priorité, d'incompréhension de la qualité et du contenu48.

La tragédie, c'est que quelqu'un qui prend des décisions à Radio-Canada a tiré un trait sur les régions pour des considérations économiques. Et plus rien ne marche49.

Bref, les points de vue sur la SRC étaient aussi diversifiés que passionnés. L'acteur et comédien bien connu Rick Mercer est peut-être celui qui a le mieux résumé la situation dans un enregistrement vidéo qui a été présenté au Comité lors de sa visite des installations de la SRC à Halifax :

Maintenant, je dois vous dire que j'aime la SRC. — Je voulais que vous le sachiez — et pendant que nous y sommes, je hais la SRC. Pourquoi? Parce que je suis Canadien et c'est ce que les Canadiens font. Nous aimons la SRC et nous haïssons la SRC. Pourquoi? Parce que la SRC est à la radiodiffusion ce que les légumes sont à l'alimentation — pas les gens qui dirigent la SRC, mais la SRC elle-même — pourquoi? Parce que la SRC nous fait du bien. Elle nous fait du bien comme nation et elle exerce une bonne influence sur tout le système de radiodiffusion. En fait, la SRC établit les normes de qualité. De temps en temps, il arrive que des radiodiffuseurs et des réalisateurs dépassent ces normes. Mais en réalité, c'est la SRC qui établit les normes50.

Programmation locale et régionale

Lors des déplacements du Comité dans diverses régions du Canada, il est devenu évident que la question de la programmation locale, régionale et nationale soulève des passions, plus particulièrement à l'extérieur de Toronto et de Montréal. Plus précisément, la réduction des émissions locales de la SRC — qui a commencé au début des années 1990 — a soulevé de nombreuses questions concernant le rôle et le mandat du radiodiffuseur public national.

Le Comité signale que le Comité d'examen des mandats avait prévu le problème en 1996 lorsqu'il a rédigé ce qui suit :

Certains disent que, pour réduire ses frais, la SRC devrait se transformer en réseau strictement national... Nous sommes en profond désaccord... Notre avis, c'est que la SRC ne pourra pas « contribuer au partage d'une conscience et d'une identité nationales » si les habitants des diverses parties du pays ne s'entendent pas sur ses ondes et ne se voient pas sur ses écrans51.

Comme il est indiqué au chapitre 2, la Loi sur la radiodiffusion de 1991 établit à l'alinéa 3(1)m) que la programmation de la Société doit : « refléter la globalité canadienne et rendre compte de la diversité régionale du pays, tant au plan national qu'au niveau régional, tout en répondant aux besoins particuliers des régions ». Toutefois, la Loi ne précise pas que les auditoires locaux doivent être ciblés de façon précise; elle n'insiste pas non plus pour que des niveaux particuliers de programmation soient offerts à l'échelon régional ou local. Bref, le mandat de la SRC en ce qui concerne les auditoires locaux et régionaux prête à interprétation.

C'est sur cela que s'appuyait Mme Carole Taylor pour expliquer l'accent régional de la SRC lorsqu'elle a témoigné devant le Comité :

La notion de régional ne consiste pas uniquement à couvrir les nouvelles et les événements locaux bien que cela en fasse évidemment partie. Et dans ce domaine, nous n'avons pas à concurrencer les chaînes privées, nous pouvons plutôt offrir un service local de nature différente. Est-il vraiment nécessaire de suivre toutes les ambulances et de rendre compte de tous les crimes commis qui souvent aboutissent chez les diffuseurs privés?... Mais, à la base de toute question d'intérêt local, se trouvent des idées qu'il faut discuter et examiner. Voilà donc à mes yeux le rôle que la radiotélévision publique de la SRC devrait monter en épingle et se réserver, de sorte que si vous souhaitez porter un regard différent ou plus scrutateur sur ces questions régionales ou locales, c'est elle que vous choisiriez52.

M. Robert Rabinovitch a ajouté ce qui suit sur la question :

Nous devons refléter les régions dans nos programmes nationaux. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous avons ouvert d'autres bureaux de nouvelles dans tout le pays, ainsi que des «bureaux de poche», comme nous les appelons. Ceci nous permet d'obtenir davantage de nouvelles de tous les coins du pays. Cet ensemble, c'est ce que nous appelons le journal télévisé national. Si vous le regardez, vous verrez beaucoup plus qu'auparavant un nombre croissant de reportages en provenance de toutes sortes d'endroits. S'il y a un problème dans un hôpital de Toronto, vous le verrez, mais s'il y en a un à Saskatoon, nous aimerions vous le montrer également. Je pense donc que, si vous examinez l'organisation de nos journaux télévisés, vous constaterez que nous avons changé radicalement53.

Cherchant à obtenir des éclaircissements, un membre du Comité a demandé si la Loi sur la radiodiffusion devait être modifiée pour préciser le rôle de la SRC dans la programmation locale, ce à quoi M. Rabinovitch a répondu :

Je crois que vous devez examiner la question très attentivement, mais, si vous ajoutez le local et non pas le régional... Quant à moi, la Loi actuelle me satisfait pleinement. Nous avons la lourde responsabilité de refléter la région et d'y produire des programmes, mais, comme le faisait remarquer Carole, le local ne se limite pas aux nouvelles locales. Il nous faut trouver différentes façons de remplir ce mandat. Vous souhaiterez probablement examiner ce point. Vous ne voudrez peut-être pas confier cette responsabilité à la radiotélévision publique54.

L'émission d'information de l'heure du dîner de la télévision de langue anglaise, Canada Now, est l'exemple le mieux connu de la façon dont la SRC s'est efforcé de réinventer sa représentation locale, régionale et nationale, à une époque de restrictions budgétaires et de concurrence féroce. Les membres du Comité ont vu l'émission produite à Vancouver (où le segment national est produit) et à Regina (où les éditions régionales sont réalisées et diffusées).

Canada Now s'efforce de présenter un ensemble de reportages nationaux, régionaux et locaux. En se servant des segments provenant des journalistes de la SRC de toutes les régions du Canada, la Société produit un bulletin de nouvelles nationales de trente minutes et le réassemble à cinq reprises tous les soirs pour cinq fuseaux horaires. Un autre segment d'une demi-heure de nouvelles régionales est également produit dans les stations de la SRC de tout le Canada. Dans certaines régions, l'élément national a préséance, tandis que dans d'autres régions, c'est l'élément régional qui prime. Toutefois, peu importe la région, la tentative Canada Now, d'attirer un auditoire important a échoué55. M. Robert Rabinovich admet que logiquement l'émission devrait être un succès, mais que la logique ne détermine pas la part de l'auditoire56.

Le professeur Bruce Wark croit que le réassemblage des nouvelles de l'heure du dîner remodelées de la SRC est malhonnête pour le public et contrevient aux obligations régionales imposées par la Loi sur la radiodiffusion et à la licence même de la Société. Il a déclaré au Comité ce qui suit :

La Loi stipule que la programmation assurée par la Société doit refléter le Canada et ses régions pour les auditoires national et régionaux tout en servant les besoins spéciaux de ces régions. Le réseau de CBC tente aujourd'hui de servir ces besoins spéciaux avec une demi-heure de nouvelles de la Nouvelle-Écosse chaque jour de la semaine ... le réseau CBC n'est plus que l'ombre de ce qu'il était autrefois57.

De nombreux témoins ont également fait des commentaires sur l'importance de maintenir la programmation locale. Par exemple, M. Brian Staples a déclaré au Comité qu'on ne met pas suffisamment l'accent sur les questions locales à la SRC et que la télévision devrait être plus « participative » et encourager les discussions publiques éclairées chez les Canadiens58. La Guilde canadienne des médias et la Guilde des employés de journaux du Canada sont d'avis que la SRC n'adopte pas une approche adéquate à l'égard de la programmation locale, même si fondamentalement les gens souhaitent un contenu local59. La Music Industry Association of Newfoundland and Labrador ajoute même que
« le sous-financement de la SRC enlève leur voix à ces régions, de même qu'aux artistes moins commerciaux »60.

Le Comité a également entendu des citoyens qui étaient en faveur de la nouvelle orientation de la programmation de la Société. Par exemple, Mme Jocelyn A. Millard de Winnipeg a écrit pour indiquer au Comité qu'elle :

... croit fermement que la radio et la télévision de la SRC ont un rôle important à jouer pour inspirer un sentiment d'identité nationale aux Canadiens d'un océan à l'autre en les informant sur ce qui se produit dans différentes régions de leur pays. Une certaine programmation régionale est certainement importante et nécessaire, mais il faut mettre l'accent sur le véritable aspect national par l'entremise d'un organe national comme la SRC61.

De même, un syndicat québécois a déclaré au Comité :

Radio-Canada doit demeurer une télévision généraliste, qui ne se définit pas par la rentabilité économique et indépendante du pouvoir politique62.

De plus, M. Wes MacAleer, député provincial de l'Île-du-Prince-Édouard a avancé ce qui suit :

Le premier rôle de la radiodiffusion publique au Canada est de faire la promotion du Canada auprès des Canadiens et aussi de la communauté internationale. Le rôle du radiodiffuseur public canadien est multidimensionnel. En tant qu'institution canadienne fondamentale, Radio-Canada devrait jouer un rôle central dans la vie publique canadienne. La Société a la responsabilité de servir de lieu de convergence nationale, aidant les Canadiens à se comprendre les uns les autres et à comprendre leurs valeurs63.

En fait, à l'Île-du-Prince-Édouard, la SRC a reçu un appui sans réserve de la part de tous les témoins :

Par conséquent, je dirais que la radio locale est bien. [...] nous avons tous ce sentiment d'appartenance à la région Atlantique du Canada, plus particulièrement les Maritimes et tout ce qui se passe ici suscite de l'intérêt64.

J'ai l'impression qu'en fait, la SRC fait un travail acceptable pour ce qui est de couvrir l'actualité locale65.

À l'Île-du-Prince-Édouard, la radiodiffusion publique peut se résumer en un seul mot : communautaire. Le CBC à l'Île-du-Prince-Édouard fait partie de ce que l'on appelle « le mode de vie insulaire »66.

En plus d'être critiqué pour son retrait de la production locale, on a également reproché à la SRC de fermer ses installations de production interne en faveur d'installations centralisées à Toronto et à Montréal. À St. John's, le président de la Newfoundland and Labrador Film Development Corporation a déclaré ce qui suit au Comité :

La disparition de la production interne à CBC a eu un effet marquant ici. Le studio de CBC était à une certaine époque, [...] une pépinière qui donnait aux gens de Terre-Neuve et du Labrador l'occasion de mettre en œuvre des projets qui pouvaient ensuite être présentés à l'échelle nationale. Il n'en est plus ainsi aujourd'hui. [...] Tout vient de Toronto maintenant67.

Des points de vue semblables ont été exprimés par d'autres témoins au cours des déplacements du Comité. Par exemple, M. Georges Arès, président de la Fédération des communautés francophones et acadiennes du Canada, a déclaré aux membres du Comité que les services en français de la SRC étaient beaucoup trop axés sur Montréal :

Radio-Montréal, comme on l'appelle parfois dans nos communautés et dans certaines régions du Québec, doit continuer à changer pour mieux refléter la réalité des francophones de tout le pays68.

Les témoins ont également soulevé des questions concernant l'engagement de la SRC à l'égard des auditoires francophones locaux et régionaux — particulièrement ceux qui vivent en situation minoritaire. À l'Île-du-Prince-Édouard, un représentant de la Société Saint-Thomas-d'Aquin, a indiqué au Comité ce qui suit :

Pour assurer notre survivance, il est essentiel que nous ayons accès à des outils de communication qui contribuent à faire connaître et apprécier notre richesse culturelle et sociale. [...] Nous sommes satisfaits de l'émission du matin de la Société Radio-Canada, L'Acadie c'matin, la seule émission francophone produite ici même, au studio de Charlottetown. [...] Elle contribue à l'épanouissement de la francophonie insulaire.

[Mais] nous nous devons de répéter qu'à l'exception de cette émission, le produit que diffuse la société d'État est malheureusement trop souvent fait par et pour la population québécoise. Afin que cette radio reflète aussi les couleurs de l'Acadie, nous souhaitons qu'une plus grande place soit accordée aux productions locales. Les Québécois et Québécoises sont souvent ignorants de l'existence d'une population francophone ailleurs que dans leur province. Les Québécois et Québécoises, autant que les Acadiens et les Acadiennes insulaires, gagneraient à voir et à entendre davantage l'Acadie au niveau national69.

Dans l'Ouest du Canada, M. Denis Desgagné a fait valoir bon nombre de ces points de vue. Il a également ajouté ce qui suit :

Nous sommes inquiets face à l'érosion de la programmation produite en Saskatchewan au cours de la dernière décennie, faute de financement. [...] Quand on coupe à Radio-Canada, c'est une coupure directe dans les ressources de la communauté francophone, dans notre espoir de conserver la langue et la culture francophones en Saskatchewan70.

Ainsi, malgré toute l'appréciation à l'égard des services de langue française de la SRC et quelques frustrations quant à ses priorités, on peut constater que la réduction des émissions locales de la Société a été particulièrement difficile pour les communautés minoritaires de langue française à l'extérieur du Québec.

Les préoccupations relatives aux services destinés aux francophones dans les régions ne sont pas limitées aux communautés minoritaires. À Halifax par exemple, un témoin a fait valoir que la radio de la SRC n'est pas assez diversifiée et que le service local aux régions de la Nouvelle-Écosse est au mieux médiocre. Il a expliqué ce qui suit :

Les budgets de la radio de Radio-Canada ont été saccagés et la radio de Radio-Canada consacre de ce fait le gros de son temps à diffuser la couverture des événements dans Halifax et Sydney et les environs dans le reste de la province. [...] D'autre part, le manque de concurrence, ce qui n'est jamais sain dans le monde du journalisme, a plongé la radio de la Société dans la complaisance. Comme l'a récemment souligné un critique, Halifax est une ville de plus en plus intéressante et cosmopolite, mais vous ne le sauriez jamais en écoutant l'émission locale du matin de CBC71.

D'autres témoins ont mentionné que la concentration des ressources de la SRC dans les grands centres était injuste pour leur collectivité, notamment parce que les grands centres sont déjà bien servis par les médias privés. Plus particulièrement, les témoins ont indiqué de façon répétée au Comité que les Canadiens de l'Atlantique regardent, écoutent et apprécient le diffuseur public, mais que la faible densité de la population dans cette région les empêche de recevoir un meilleur service. Dans le même ordre d'idées, dans l'Ouest du Canada, l'importance de la SRC a été soulignée régulièrement et de nombreux témoins ont exprimé leur souhait de la voir présente de nouveau aux niveaux local et régional.

Rôle et mandat de la SRC

Presque tous les témoins ont donné leur opinion sur ce que le rôle et le mandat de notre radiodiffuseur public national devraient être dans le contexte complexe et en évolution constante qui prévaut aujourd'hui. Et les questions se posent clairement — Comment peut-on définir la place que doit occuper la télévision publique à une époque où le choix augmente et où les auditoires sont fragmentés? Quel est son rôle? Quel devrait être son mandat? Qu'est-ce qu'elle devrait faire? Est-elle toujours justifiée? Comment devrait-elle être financée?

Peu de témoins voulaient que la SRC soit dissoute. Toutefois, certains s'opposaient à l'utilisation des fonds publics. Par exemple, un témoin a déclaré que :

... si les gens ne veulent pas regarder Radio-Canada, ils changeront de poste. Mais le contribuable ne devrait pas payer pour la SRC. La SRC nous divise. Qui a confiance dans la SRC? Qui regarde la SRC? Cessez de la financer. Sortez de là72.

Mais ce point de vue était l'exception plutôt que la règle. L'Association canadienne des radiodiffuseurs a avancé que l'on ne devrait pas mesurer les succès de la SRC par rapport aux objectifs commerciaux ou aux indicateurs de rendement et que celle-ci ne devrait pas se contenter de reproduire le type de programmation qui est offert par le secteur privé73.

En fait, les radiodiffuseurs privés ont répété au Comité que la programmation de la SRC devait être complémentaire plutôt que de ne constituer qu'un autre facteur de concurrence; de plus, les cotes d'écoute devraient être secondaires. Après tout, le PDG de Global Television, M. Leonard Asper, a déclaré au Comité : « Malheureusement, c'est ainsi que les choses se passent. Qu'on soit en Australie, en Allemagne ou en Irlande, X-Files, Friends et Survivor sont des émissions qui viennent en tête de liste de la grillehoraire des radiodiffuseurs partout au monde »74.

La présidente du conseil d'administration de la SRC est allée encore plus loin en rappelant au Comité que la Société était toujours un lieu de formation important et qu'à cet égard, elle attirait les talents canadiens, autant devant la caméra qu'en coulisse. Elle a fait remarquer ce qui suit :

Au cours de votre récente tournée dans l'Ouest du pays, certains d'entre vous ont rencontré Chris Haynes, ingénieur à l'enregistrement. C'est un homme qui possède beaucoup de talent, qui, après des études aux États-Unis, est revenu au pays pour se trouver un emploi à Radio-Canada, à Regina, où il savait qu'il allait pouvoir travailler à des productions à la fine pointe de la technologie75.

Dans le même ordre d'idées, le Comité a rencontré à la SRC de Halifax une jeune chanteuse qui enregistrait sa musique pour la première fois et plus tard, il a suivi la production de MacKinnon's Brook Suite par Scott MacMillan, qui raconte le voyage d'une famille de colons qui a quitté l'Écosse pour venir s'installer en Nouvelle-Écosse.

Questions relatives au financement

Les crédits parlementaires actuels de la SRC contribuent à financer ses six réseaux, 102 stations sources et 26 stations privées affiliées ainsi que la distribution de ses signaux conventionnels et ses initiatives néomédiatiques76. Toutefois, la Société n'a jamais été financée entièrement à même les fonds publics et on ne s'est jamais pleinement entendu sur la combinaison appropriée des sources de financement. Par exemple, en 1929, la Commission Aird a indiqué ce qui suit :

Si le public appartenait en totalité à la classe des auditeurs, rien n'empêcherait de rencontrer le coût total d'un service de radiodiffusion au moyen d'une appropriation faite sur les fonds publics en vertu d'un vote du Parlement77.

Par contre, en 1957, la Commission Fowler a conclu ce qui suit :

La publicité contribue de façon positive au niveau de vie et à l'activité économique et ne devrait pas être considérée comme regrettable. Lorsque la SRC s'engage dans des activités commerciales, elle devrait le faire de façon dynamique en ayant pour objectif de tirer le maximum de recettes de ces activités78.

Le renouvellement annuel des crédits de la SRC par le Parlement a compliqué les choses; la situation a toujours soulevé des inquiétudes quant à l'autonomie de la SRC par rapport au gouvernement. En effet, il y a plus de 50 ans, il était mentionné dans le rapport Massey :

Il y a des objections sérieuses à l'octroi d'une subvention annuelle par le Parlement. Bien que d'autres services administratifs essentiels dépendent de crédits votés annuellement, il est à ce point important de soustraire la radio nationale à la possibilité de toute ingérence politique, qu'elle ne devrait pas dépendre, pour ses revenus, d'une intervention annuelle directe de la part du gouvernement au pouvoir. L'attribution d'une allocation statutaire nous semble bien la méthode la plus satisfaisante, puisqu'elle permettrait à Radio-Canada d'élaborer des projets à assez longue échéance, en se fondant sur l'assurance que son revenu ne sera pas comprimé pour une certaine période d'années79.

L'instabilité budgétaire perturbe les projets de la SRC pour l'année en cours et cause des problèmes les années qui suivent. Cela s'explique par le fait que le cycle de production d'émissions, particulièrement à la télévision, dure souvent plusieurs saisons. Comme M. Rabinovitch a indiqué aux membres du Comité :

Il est renversant de constater qu'il s'écoule environ trois ans avant qu'une émission passe de l'étape de la conception à celle de la réalisation et de la diffusion, et si on ne peut avoir l'assurance d'obtenir du financement durant une certaine période de temps, il est très difficile de prendre des engagements qui devraient déboucher sur la mise en ondes de nouvelles émissions80.

Dans ces circonstances, on peut comprendre pourquoi les recettes provenant de la publicité continuent d'être si importantes pour la SRC. Plusieurs témoins ont mentionné au Comité que les recettes provenant de la publicité permettent à la SRC d'être prudente sur le plan financier et que le retrait de la publicité minerait la saine concurrence dans le milieu de la publicité81. Dans un document préparé pour le Comité, le consultant Peter Desbarats a expliqué : « les compressions dans les sommes accordées par le Parlement à la SRC ont forcé cette dernière à se tourner davantage vers la publicité, occultant ainsi une des distinctions essentielles entre les diffuseurs publics et privés »82. De plus, l'étude de 1999 de McKinsey & Company a révélé une corrélation négative entre la dépendance du radiodiffuseur privé à l'égard de la publicité et les dépenses consacrées à la production d'émissions originales83.

Pour sa part, le président de la SRC a expliqué que :

... la question des messages publicitaires est délicate depuis longtemps. Parfois, une partie du secteur privé voudrait que nous quittions le domaine de la publicité, en raison de l'espace qui se créerait ainsi pour eux. Or nous ne pouvons survivre sans les messages publicitaires dans notre formule de financement actuelle, mais au cours des trois dernières années, nous avons essayé d'examiner nos divers genres d'émissions et nous nous sommes demandé s'il devait y avoir des messages publicitaires dans ce genre-ci et si nous pouvons nous permettre d'abandonner les messages publicitaires dans ce domaine. .... Mais nous sommes allés aussi loin que nous pouvons en ce qui a trait à l'abandon des messages publicitaires84.

L'insuffisance budgétaire de la SRC permet également d'expliquer pourquoi elle a toujours compté sur des partenaires du secteur privé et, plus récemment, sur des partenaires internationaux85. L'Alliance of Canadian Cinema, Television and Radio Artists croit qu'il ne devrait pas y avoir d'alliance commerciale formelle entre la SRC et toute entreprise privée, parce qu'une telle alliance affaiblit la volonté de maintenir des normes élevées86. Toutefois, M. Rabinovich a expliqué ce qui suit au Comité :

J'ai accepté dans le cadre de mon mandat, et mon conseil d'administration a approuvé ce mandat, que nous devrions gérer Radio-Canada sur une base aussi commerciale que possible. Et dans la mesure où nous possédons des actifs, je pense qu'il est de notre responsabilité de générer des recettes avec ces actifs, et non de couper l'herbe sous le pied du secteur privé87.

La SRC a également soulevé un thème familier : un financement stable, à long terme. Les exemples de témoignages à cet égard sont nombreux :

Nous avons besoin de financements appropriés, efficaces et à long terme et ça n'a pas été le cas88.

... si le gouvernement impose au radiodiffuseur national des exigences en matière de contenu canadien et de diversité culturelle visant à présenter le Canada aux Canadiens (comme le CRTC l'a fait), le gouvernement doit donner à CBC et à Radio-Canada les moyens d'atteindre ces buts89.

... La CBC/SRC doit disposer de ressources financières accrues pour jouer un rôle central dans le monde de la radiodiffusion d'aujourd'hui et de demain en continuant de produire des émissions canadiennes90.

Pour ce qui est de la télévision de la CBC, je dirais qu'il faudrait lui accorder beaucoup plus d'argent et supprimer la publicité91.

D. Solutions proposées

Le président de la SRC a fait une des déclarations les plus importantes de l'étude du Comité lorsqu'il a rappelé aux membres que : « La seule chose qui importe vraiment en matière de radiodiffusion, c'est le contenu : tout le reste n'est que gestion courante »92. Il citait le rapport Fowler de 1965; ces paroles sont au moins aussi importantes aujourd'hui qu'elles ne l'étaient alors.

Bien que les émissions visant des communautés, des citoyens et des intérêts publics particuliers occupent un créneau important d'un secteur offrant de multiples chaînes, le Comité reconnaît qu'il sera plus difficile pour les radiodiffuseurs publics ayant un large mandat général de se réadapter. Toutefois, avant de discuter de la question, il convient de se rappeler que le monde dans lequel évoluent les radiodiffuseurs publics d'aujourd'hui est très différent de celui où ils ont vu le jour.

Dans les années 1920 et 1930 (période où la SRC a été proposée et mise sur pied), la plupart des adultes ne détenaient pas un diplôme d'études secondaires et les diplômés universitaires représentaient moins de 10 % de la population adulte. Même si l'apprentissage est un processus de toute une vie, on pourrait facilement avancer que le rôle d'information et d'éducation qu'avaient envisagée les pionniers de la politique de radiodiffusion canadienne est moins pertinent aujourd'hui, surtout si l'on tient compte du fait que le Canada et la plupart des pays développés ont des niveaux d'alphabétisation et de scolarité beaucoup plus élevés et des établissements d'enseignement plus riches (p. ex. des établissements d'enseignement supérieur, des collèges spécialisés et des instituts de formation) qu'autrefois. Toutefois, on pourrait tout aussi facilement déclarer que le rôle d'information et d'éducation est plus important que jamais.

Il convient également de tenir compte des nombreux choix qui s'offrent actuellement à la plupart des citoyens. En 2002, plus de huit millions de ménages canadiens avaient accès à au moins 50 chaînes de télévision, presque tous les ménages avaient la radio et plus de 50 % d'entre eux avaient accès à Internet. La situation est bien différente de celle des années 1930, alors qu'il n'y avait pas de télévision et que la plupart des ménages ne recevaient que quelques stations de radio. Les journaux étaient moins volumineux et les revues, moins nombreuses, et la seule façon de communiquer sur de grandes distances était le courrier ou — pour ceux qui pouvaient se le permettre — le téléphone. De plus, les librairies qui comptent des dizaines de milliers de titres comme celles que l'on retrouve dans la plupart des grandes villes aujourd'hui n'existaient tout simplement pas.

Toutefois, l'intérêt des choix offerts par les médias d'aujourd'hui est une tout autre histoire. Le Comité a entendu, notamment pendant ses audiences sur la propriété des médias, plusieurs témoignages selon lesquels le secteur des nouveaux médias confirment la nécessité d'un radiodiffuseur public fort et distinct comme la SRC.

Peu importe le point de vue, il est indéniable que la transformation des pratiques de communications a contribué à la diminution de l'auditoire et à l'augmentation de la fragmentation de l'auditoire, même pendant que le Comité tenait des audiences et rédigeait le présent rapport93. Il est vrai que plus de 1,8 million de Canadiens ont suivi la série Trudeau, mais cela restera l'exception et non la règle, à moins que des sommes importantes ne soient affectées à la production d'émissions originales canadiennes. Comme il est mentionné au chapitre 4, même la période de grande écoute a été gravement touchée par la profusion de chaînes, Internet et l'avènement des enregistreurs vidéo personnel (PVR).

Les nombreux choix offerts posent donc des défis particuliers aux radiodiffuseurs publics. Comme il a déjà été mentionné, la Commission Aird a suggéré qu'il n'était pas déraisonnable d'imaginer le coût du radiodiffuseur public payé à même les fonds gouvernementaux si le gros de la population regarde ses émissions. Toutefois, que survient-il si la majorité de la population ne choisit pas les émissions du radiodiffuseur public national? Dans un contexte de radiodiffusion comptant plus de 200 chaînes, toute émission attirant 2 ou 3 % de l'auditoire est — à bien des égards — une réussite. Mais c'est un mince réconfort pour un radiodiffuseur public qui compte sur des crédits parlementaires. Deux problèmes se posent : celui de la légitimité et celui de l'exécution des mandats relatifs au service public.

Le principe selon lequel le radiodiffuseur peut améliorer la cohésion sociale en créant des émissions d'intérêt général de haute qualité sous-tend le rôle d'information et d'éducation du radiodiffuseur public94. McKinsey & Company fait valoir que le radiodiffuseur public d'intérêt général devra recourir à :

... une approche d'inscription à l'horaire fondée sur des types d'émissions d'intérêt général (respectant des normes de qualité appropriées) pour attirer les auditoires et « obtenir le droit » de la part des téléspectateurs de les exposer à une plus grande diversité de genres — particulièrement dans les domaines de l'éducation et de l'information95.

Toutefois, il sera très difficile de mettre en œuvre cette stratégie dans un univers multichaîne, où les citoyens ont à leur disposition des télécommandes, des magnétoscopes, des DVD, des décodeurs et des RVP.

Ce qui rend la situation encore plus difficile pour le radiodiffuseur public d'aujourd'hui, c'est que la stratégie de réseau traditionnelle qui consiste à attirer un auditoire à une émission — pour le retenir pendant des heures par la suite — ne fonctionne plus lorsqu'il y a un aussi grand choix d'émissions. Le Comité d'examen des mandats de 1996 a reconnu ce problème lorsqu'il a fait observer ce qui suit :

La concurrence de la SRC [vient] des nouvelles chaînes haut de gamme distribuées par le câble et des autres télévisions publiques. Citons Arts & Entertainment (A&E), le Discovery Channel, le Learning Channel, le Canal D et Bravo!, de même que PBS, Radio-Québec, TVOntario et le Knowledge Network, dont les émissions se comparent jusqu'à un certain point à celles de la SRC96.

C'est pourquoi il a suggéré que la SRC élabore plus de matériel d'intérêt général :

Notre modèle pour la SRC n'est pas un créneau étroit. C'est un modèle beaucoup plus pluraliste qu'élitiste. En d'autres mots, la nouvelle SRC doit être un « substitut de haute qualité », mais elle doit aussi prendre au sérieux son obligation de répondre à un vaste éventail de goûts et de besoins. Nous reconnaissons que c'est une tâche redoutable dans l'univers à canaux multiples, mais nous croyons que c'est la seule façon dont la SRC peut survivre97.

Depuis ce temps toutefois, beaucoup d'autres chaînes spécialisées ont vu le jour (ou ont été offertes) et l'auditoire de la SRC a continué de fondre comme neige au soleil. Mais la SRC est loin d'être seule à devoir composer avec ce phénomène; en effet, de nombreux radiodiffuseurs publics européens ont également connu une baisse de leur auditoire au cours des années 1990. Qui plus est, aux États-Unis, même les réseaux privés bien établis (ABC, CBS et NBC) ont dû lutter pour conserver leurs parts d'auditoire dans un marché de plus en plus fragmenté comportant un nombre sans cesse croissant de chaînes.

Peut-être est-il inévitable alors que l'absence d'un vaste auditoire n'entraîne avec le temps une lente érosion de la prétention d'un radiodiffuseur public d'intérêt général à des fonds publics. Pour cette seule raison, les radiodiffuseurs publics d'intérêt général continueront de subir des pressions financières et l'examen attentif du monde politique, simplement parce que leur mandat initial semble moins légitime ou réaliste.

Compte tenu de ce qui précède, le Comité présente les observations et les recommandations suivantes afin d'aider la SRC à se repositionner dans le secteur de la radiodiffusion qui évolue rapidement.

Financement stable à long terme

Comme il a été mentionnée à plusieurs reprises, la SRC lutte depuis un certain temps pour rester viable financièrement. Il faut signaler que le Comité a fait des recommandations visant un financement stable dans son rapport de juin 1999 sur la politique culturelle intitulé Appartenance et identité :

Que la Société Radio-Canada bénéficie d'un financement continu et stable afin de pouvoir demeurer une société publique sans but lucratif dans l'intérêt commun.

Que la radio de la SRC bénéficie de niveaux de financement stables et soutenus de façon à ne pas avoir à recourir à des commandites privées ou à la publicité commerciale ou non commerciale.

Que la télévision de la SRC bénéficie de niveaux de financement stables et soutenus de façon que le recours à la publicité puisse être réduit au minimum98.

Un an plus tard, le vérificateur général a déclaré dans son Rapport d'examen spécial sur la SRC :

La SRC ne peut fonctionner de manière optimale si elle ne se dote pas d'une stratégie qui établit un équilibre entre les résultats escomptés, les attentes en ce qui a trait à la portée de la programmation et l'affectation optimale à cette fin des ressources disponibles. [...] La SRC doit disposer d'un processus qui lui permet, ainsi qu'à ses principales parties intéressées, de discuter périodiquement du rôle et du financement du radiodiffuseur public et de mesurer son succès99.

Compte tenu des témoignages que le Comité a entendus au cours des deux dernières années, il ne voit aucune raison pour s'éloigner des recommandations qu'il a faites en 1999. Il craint toutefois que la Société ait besoin plus qu'une assurance de financement stable pour répondre à ses besoins à long terme. Il salue toutefois la promesse du gouvernement faite en février 2003 par l'entremise du ministère du Patrimoine canadien « de veiller à ce que le nouveau cadre financier prévoie effectivement de nouveaux fonds [60 millions de dollars] pour la SRC »100. Par ailleurs, face à la baisse globale des crédits parlementaires de la SRC depuis une décennie, le Comité est d'avis que des fonds additionnels sont justifiés. Les paragraphes qui suivent traitent d'aspects se rapportant à la SRC qui, selon le Comité, mériteraient des fonds additionnels. Entre-temps :

RECOMMANDATION 6.1 :

Le Comité recommande que le Parlement accorde à la SRC un financement pluriannuel stable (3 à 5 ans) afin de lui permettre de remplir son mandat tel qu'il est énoncé dans la Loi sur la radiodiffusion.

Programmation locale et régionale

Comme il a déjà été mentionné, le Comité craint que les compressions budgétaires — qui ont incité la SRC à mettre l'accent sur son rôle de radiodiffuseur public national — n'aient provoqué une diminution du reflet local dans de nombreuses régions du Canada où très peu de choix sont offerts. Même si le Comité comprend l'importance de la programmation nationale, il constate avec inquiétude qu'un grand nombre d'intervenants croient que la culture locale est moins mise en valeur depuis que la SRC a réduit ses services. Par extension, ces mesures ont ébranlé le rôle important que joue la SRC en tant qu'incubateur culturel.

Les Canadiens cherchent depuis un certain temps déjà à déterminer la façon dont la SRC devrait équilibrer la prestation de services aux collectivités locales et régionales. Comme il a été mentionné, le mandat de la SRC prévoit que : « la programmation de la Société devrait [...] refléter la globalité canadienne et rendre compte de la diversité régionale du pays, tant au plan national qu'au niveau régional, tout en répondant aux besoins particuliers des régions » [c'est nous qui soulignons]. La responsabilité de répondre aux besoins particuliers des régions faisant déjà partie du mandat de la SRC, le Comité ne voit pas pourquoi il recommanderait l'ajout d'une modification qui reflète cette exigence.

Quant à la prestation de services locaux, le Comité fait remarquer que le sous-alinéa 3(1)i)(ii) de la Loi dispose que : « la programmation offerte par le système canadien de radiodiffusion devrait [...] puiser aux sources locales, régionales, nationales et internationales ». C'est pourquoi le Comité est d'avis qu'il incombe à la SRC d'offrir aux auditoires une certaine programmation locale — établie en fonction des besoins.

Le Comité fait remarquer qu'en 1980, le président de la SRC, M. A.W. Johnson, a déclaré au Comité d'étude de la politique culturelle fédérale (Comité Applebaum-Hébert) qu'une « partie raisonnable des émissions canadiennes devaient être des émissions locales et régionales destinées à des auditoires locaux et régionaux. Si nous ne veillons pas à ce qu'il en soit ainsi, nous trahissons notre mandat »101.

Le Comité estime toutefois que la SRC ne peut être tenue de mettre l'accent sur une partie de son mandat, en plus de s'acquitter de ses autres responsabilités, sans être assurée de disposer de ressources suffisantes. Elle ne devrait pas non plus être le seul radiodiffuseur ayant des obligations envers les régions du Canada. C'est pourquoi au chapitre 9 du présent rapport, le Comité recommande la création d'un programme de radiodiffusion locale auquel tous les radiodiffuseurs, y compris la SRC, seraient admissibles; le fonds favoriserait les partenariats entre les radiodiffuseurs locaux et des parties intéressées dans le but de créer des services de programmation répondant aux besoins particuliers de certaines régions.

La SRC pourrait offrir des services asymétriques. Dans un pays aussi vaste et hétérogène que le Canada, le radiodiffuseur public peut être appelé à adapter sa présence et à assumer des responsabilités différentes selon la région visée. À Toronto, par exemple, la SRC n'est qu'une voix parmi d'autres dans un marché très concurrentiel. Son rôle consiste à offrir une programmation différente de celle que fournissent les radiodiffuseurs privés. Par contre, dans des régions rurales de la Saskatchewan ou du Québec, ou encore à Terre-Neuve, elle est peut-être la seule voix forte. Elle peut alors représenter l'un des éléments fondamentaux de la vie de la collectivité. Il est clair que la SRC ne peut plus donner satisfaction à tous par une programmation uniforme.

Programmation canadienne

L'établissement d'un plan stratégique pour assurer la prestation de services locaux et régionaux n'est que l'une des mesures à prendre pour insuffler un nouveau dynamisme à la SRC. En effet, les témoins ont clairement indiqué que les ressources limitées dont dispose la SRC l'empêchent de présenter un éventail suffisamment large d'émissions de télévision typiquement canadienne de grande qualité. Pourtant, le nombre d'auditeurs qu'ont attirés de récentes séries comme Le Canada — Une histoire populaire, Trudeau, Music-hall et Le dernier chapitre démontre que les Canadiens ont le goût de voir des émissions canadiennes de grande qualité. Compte tenu de ce qui précède, le Comité est convaincu que le conseil d'administration de la SRC devrait également élaborer un plan concernant les objectifs de programmation canadienne à long terme de l'organisme.

Conquête de nouveaux auditoires

Lorsqu'il a visité les installations de la SRC dans diverses régions du Canada, le Comité a été très impressionné par la portée, la qualité et la quantité des services de nouveaux médias mis au point par la SRC. Il est clair que des initiatives telles que Radio 3, Bandeapart et ZedTV sont le résultat d'une utilisation efficace et rentable des fonds de la SRC qui permettent de joindre un auditoire plus jeune et plus vaste. De plus, ce que le Comité a vu et entendu au cours de son étude l'a persuadé que l'avenir des communications, au Canada et dans le monde, repose sur des stratégies multiplateformes faisant appel à du contenu en ligne pour compléter la programmation radiophonique et télévisuelle. Par conséquent, étant donné la croissance rapide de l'Internet comme nouveau protocole utilisé par les Canadiens pour les télécommunications :

RECOMMANDATION 6.2 :

Le Comité recommande que, pour plus de précision, la Loi sur la radiodiffusion soit modifiée de manière à reconnaître la valeur des services néomédiatiques comme élément complémentaire de la stratégie de programmation globale de la SRC.

Planification stratégique

De l'analyse qui précède, le Comité conclut qu'il est plus essentiel que jamais que la SRC indique clairement aux Canadiens comment elle entend s'acquitter de son mandat pour continuer de servir leurs besoins dans les années à venir. Le Comité est d'avis que le conseil d'administration de la Société a un rôle actif et important à jouer dans la formulation et le raffinement de l'orientation à donner à la fonction de la Société en matière de rayonnement local et régional dans les régions mal servies, de programmation canadienne et de programmation des nouveaux médias. Cela dit :

RECOMMANDATION 6.3 :

Le Comité recommande que la SRC présente au Parlement, un an après le dépôt du présent rapport, un plan stratégique, accompagné d'une estimation des ressources nécessaires, sur les mesures qu'elle entend prendre pour remplir son mandat de radiodiffuseur public et :

(a)   offrir une programmation locale et régionale

(b)   atteindre ses objectifs en matière de programmation canadienne

(c)   présenter une programmation des nouveaux médias.

Gestion et responsabilité

Les chapitres 18 et 19 portent sur une série de questions qui ont une incidence sur le fonctionnement futur de la SRC, notamment les nominations au conseil d'administration, les conflits d'intérêts, la gestion et la responsabilité. Ils mentionnent également que les cibles, objectifs et sous-objectifs de certains instruments de politique publique, notamment la SRC, sont mal définis, voire inexistants, et que l'évaluation des résultats et les rapports de ces organismes à cet égard ont tendance à mettre l'accent sur les extrants plutôt que sur les résultats. Compte tenu de ce qui précède, le Comité croit important que les plans stratégiques susmentionnés soient conçus de manière à permettre — si ces plans sont mis en œuvre — l'évaluation des résultats et la production de rapports périodiques à ce sujet au cours des années à venir.

RECOMMANDATION 6.4 :

Le Comité recommande que les incidences et les résultats des plans stratégiques de la SRC (relatifs à la présentation d'émissions locales et régionales, d'émissions canadiennes et d'initiatives de nouveaux médias multiplateformes) fassent l'objet d'un rapport annuel et d'une évaluation bisannuelle. Les évaluations devraient respecter les normes d'évaluation des programmes du gouvernement du Canada.

Marge de manœuvre opérationnelle

Lorsqu'elle a comparu devant le Comité, la SRC a demandé que plusieurs aspects clés de la Loi sur la radiodiffusion soient modifiés afin de lui donner une plus grande marge de manœuvre. Le Comité reconnaît que l'approbation de plusieurs de ces demandes aiderait probablement la SRC à mener ses activités. Toutefois, comme ces recommandations particulières portent sur des aspects précis de la Loi sur la gestion des finances publiques et des exigences du Conseil du Trésor, elles débordent le cadre du mandat du Comité. Celui-ci estime malgré tout que la question mérite d'être étudiée plus avant par le gouvernement.

Le Comité reconnaît que la SRC pourrait avoir besoin de financement ponctuel particulier pour effectuer la transition des technologies analogiques aux technologies numériques (voir le chapitre 12). En conséquence :

RECOMMANDATION 6.5 :

Le Comité recommande que la SRC présente au Parlement un plan expliquant ses besoins relatifs à la transition aux technologies numériques et qu'elle reçoive une aide financière ponctuelle pour répondre à ces besoins.

Place de la SRC dans le système canadien de radiodiffusion

La radiodiffusion au Canada s'est transformée radicalement depuis la création de la SRC en 1936. Après avoir longuement débattu de la question, le Comité reste convaincu que la SRC continue d'être un important instrument de politique publique qui favorise et met en valeur les cultures dynamiques et variées du Canada. C'est pourquoi le Comité est d'avis qu'il est grand temps — et entièrement possible — de donner un nouvel élan au radiodiffuseur public du Canada en lui confiant un nouveau mandat qui recevrait un accueil généralement favorable de la part des Canadiens.

RECOMMANDATION 6.6 :

Le Comité réaffirme l'importance de la radiodiffusion publique en tant qu'instrument essentiel à la promotion, à la préservation et au développement de la culture, et il recommande que le gouvernement ordonne au CRTC d'interpréter la Loi sur la radiodiffusion en conséquence.

À cette dernière recommandation se rattache une grave préoccupation du Comité : depuis un certain temps, le CRTC se prête à une microgestion des activités quotidiennes de la SRC en lui imposant des conditions de licence qui comportent des attentes quant au choix d'émissions, au nombre d'émissions d'un certain type qui devraient être diffusées et à l'affectation des fonds de la SRC. Le Comité traite de cette question au chapitre 19.

Notes en fin de chapitre

1Australian Broadcasting Corporation Act (1983), article 6.
2McKinsey & Company. Public Service Broadcasters Around the World: A McKinsey Report for the BBC, Londres,1999.
3Par exemple, une étude récente de la télévision publique, menée par le Centre d'études sur les médias (Portrait de la télévision publique dans dix pays, dont le Canada, 2001) ne mentionne nullement les radiodiffuseurs éducatifs ou sans but lucratif du Canada. Dans le même ordre d'idées, l'étude de 1999 des radiodiffuseurs publics de Mckinsey & Company met l'accent exclusivement sur les radiodiffuseurs généralistes recevant un financement gouvernemental important.
4Le gaélique est parlé en Écosse, au Pays de Galles et en Irlande.
5Comme un témoin l'a fait remarquer : « La population de la Grande-Bretagne est à peu près le double de la nôtre et sa superficie équivaut à environ la moitié de l'île de Terre-Neuve, à l'exclusion du Labrador. Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 29 avril 2002.
6Peter Humphreys. Regulatory Policy and National Content : The UK Case. Department of Government, Université de Manchester, Angleterre, 2002, p. 1.
7McKinsey & Company.
8Ibid., p. 28.
9Ibid., p. 29.
10Jeanette Steemers. Public Service Broadcasting Is Not Dead Yet — Survival Strategies In The 21st Century, Document présenté à la conférence RIPE@, Finlande, 17-19 janvier 2002, p. 4.
11Les principaux éléments qui ont été retirés du mandat de la Société en 1991 incluaient : contribuer à l'unité nationale canadienne; dispenser un service qui équilibre les types de programmation offerts; servir un public de divers groupes d'âge, intérêts et goûts; offrir la gamme complète des émissions disponibles; compter exclusivement sur les fonds publics ou offrir un divertissement régional en particulier.
12Depuis les débuts de la SRC, le rôle et le mandat de l'organisme font régulièrement l'objet d'un examen. À titre de référence, l'annexe 10 présente une liste de ces examens.
13ARTV et le Documentary Channel sont exploités en collaboration avec des partenaires du secteur privé.
14Recherche de la SRC, février 2002.
15Le résumé le plus récent sur les auditeurs de la radio canadienne publié par Statistique Canada (Le Quotidien, 21 octobre 2002. Catalogue 11-001-XIE) démontre que les services radio de la SRC (en anglais et en français) ont récolté environ 7,1 % de tous les auditeurs de l'automne 2001. Ces données sont considérablement plus modestes que celles présentées à la figure 4.2 parce que Statistique Canada calcule le temps d'écoute moyenne d'après le nombre total d'heures d'écoute divisé par le nombre total de personnes ayant écouté ou non la radio. La différence dans ce qui est évalué se rattache à une distinction importante relative aux intérêts des annonceurs et des décideurs qui est examinée au chapitre 4.
16Pour en savoir plus sur les choix accrus de chaînes de télévision de langue française et de langue anglaise sur le marché canadien, voir le chapitre 4.
17Dans sa recherche, la SRC compare en général sa part d'auditoire et les données sur l'écoute avec celles des radiodiffuseurs hertziens conventionnels. Les chapitres 4 et 8 présentent ces données dans le contexte plus large de toute la programmation présentée au Canada.
18Ces auditoires sont peu nombreux si on les compare avec ceux de toutes les émissions américaines regardées par les Canadiens durant les heures de grande écoute. Un examen plus approfondi de la part d'auditoire de la programmation canadienne et étrangère est présenté au chapitre 4.
19De plus, les crédits parlementaires de la SRC ont diminué de près de 300 millions de dollars par rapport à ceux dont elle disposait au milieu des années 1980.
20En 2001-2002, la SRC a reçu du Parlement 840,4 millions de dollars, dont 60 millions sous forme de versement ponctuel; les crédits initiaux étaient donc de 780 millions de dollars avant le supplément.
21Il convient de noter que la seule source de recettes publicitaires de la SRC provient de la télévision.
22La SRC transmet la programmation de ses principaux réseaux radiophoniques (y compris les signaux locaux) par l'intermédiaire d'Internet et y présente des clips vidéo (en grande partie des nouvelles et de l'information) provenant de ses réseaux de télévision.
23Rapport du Groupe de travail de la politique sur la radiodiffusion (Caplan-Sauvageau), Ottawa, Ministre des Approvisionnements et services. 1986. p. 289.
24M. Gérard Veilleux, président de la SRC, Rapport annuel de la SRC 1992-1993, « Rapport du président », p. 10.
25Rapport annuel de la SRC 1993-1994.
26Rapport annuel de la SRC 2000-2001.
27Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 21 mars 2002.
28Ibid.
29M. Armand Dubois (journaliste du réseau TVA à Montréal, Conseil provincial pour le secteur des communications, Syndicat canadien de la fonction publique). Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 21 mai 2002.
30Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 1er mai 2002.
31Conseil provincial du secteur des communications du Syndicat canadien de la fonction publique. Mémoire, septembre 2001, annexe G, p. 8-9.
32Canadian Independent Record Production Association. Mémoire, p. 3.
33Guilde canadienne des médias et Guilde des employés de journaux. Mémoire, p. 30.
34Writers Guild of Canada. Mémoire, p. 5.
35Conseil provincial du secteur des communications du Syndicat canadien de la fonction publique, p. 5.
36Serge Paquin, secrétaire général, Alliance des radios communautaires du Canada. Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 19 mars 2002.
37Allan S. Taylor. Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 28 février 2002.
38Lettre de Ken Schykuiski au Comité permanent du patrimoine canadien, 2 mars 2002.
39Thor Bishopric, président, Alliance of Canadian Cinema, Television and Radio Artists (ACTRA). Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 9 mai 2002.
40Leo Furey, président, Newfoundland and Labrador Film Development Corporation. Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 29 avril 2002.
41Katie Nicholson, St. John's International Women's Film and Video Festival. Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 29 avril 2002.
42Fédération nationale des communications. Mémoire, p. 16.
43Barri Cohen, présidente nationale, Caucus canadien de la vidéo et du cinéma indépendants. Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 9 mai 2002.
44Thor Bishopric, président, Alliance of Canadian Cinema, Television and Radio Artists (ACTRA). Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 9 mai 2002.
45Greg Malone. Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 29 avril 2002.
46Fédération nationale des communications. Mémoire, p. 15.
47Patrick Flanagan. Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 9 mai 2002.
48Brian Pollard. Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 9 mai 2002.
49Leo Furey. Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 29 avril 2002.
50Rick Mercer. Bande vidéo présentée au Comité à Halifax (Nouvelle-Écosse), 30 avril 2002.
51Faire entendre nos voix : le cinéma et la télévision au XXIe siècle Rapport du Comité d'examen des mandats, Ottawa, ministère du Patrimoine canadien, 1996, p. 45.
52Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 14 mars 2002.
53Ibid.
54Ibid.
55La question de la concurrence pour l'auditoire est traitée au chapitre 4.
56Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 14 mars 2002.
57Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 30 avril 2002.
58Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 27 février 2002.
59Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 11 avril 2002.
60Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 29 avril 2002.
61Lettre au Comité permanent du patrimoine canadien, 14 février 2002.
62Conseil provincial du secteur des communications du Syndicat canadien de la fonction publique, p. 5.
63Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 1er mai 2002.
64George Park. Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 1er mai 2002.
65David Helwig. Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 1er mai 2002.
66Steve Stapleton. Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 1er mai 2002.
67Leo Furey. Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 29 avril 2002.
68Ibid.
69Maria Bernard. Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 1er mai 2002.
70Denis Desgagné, directeur exécutif, Assemblée communautaire fransaskoise, 28 février 2002.
71Bruce Wark, professeur agrégé de journalisme, University of King's College. Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 30 avril 2002.
72Gwendolyn Landolt, vice-présidente nationale, REAL Women of Canada. Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 4 décembre 2001.
73Association canadienne des radiodiffuseurs. Mémoire, p. 12.
74Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 1er mars 2002.
75Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 14 mars 2002.
76Les services spécialisés de la SRC (CBC Newsworld, RDI et Galaxie) se financent par le truchement des droits des abonnés, tandis que Radio Canada International reçoit des crédits parlementaires distincts. Toutefois, il convient de noter que ces services ne seraient pas autonomes sans l'infrastructure du réseau.
77Rapport de la Commission royale de la radiodiffusion (Commission Aird), Ottawa, F.A. Acland, 1989, p. 9.
78Warner Troyer. The Sound & the Fury: an Anecdotal History of Canadian Broadcasting, Toronto, Personal Library, 1982, p. 172.
79Rapport de la Commission royal d'enquête sur l'avancement des arts, des lettres et des sciences au Canada : 1949-1951 (Commission Massey), Ottawa, Imprimeur de la Reine, 1951, p. 294.
80Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 14 mars 2002.
81Un témoin a même été jusqu'à suggérer que la radio de la SRC devrait présenter des spots publicitaires. (Robert Reaume, vice-président, Médias et recherche, Association canadienne des annonceurs, réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 18 avril 2002.) Toutefois, plusieurs autres témoins étaient d'avis que les réseaux radiophoniques de la SRC devaient demeurer sans publicité.
82Peter Desbarats. L'avenir de la radiodiffusion publique — Distinction ou disparition. Document de discussion rédigé à l'intention du Comité permanent du patrimoine canadien de la Chambre des communes.
83McKinsey & Company.
84Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 14 mars 2002.
85Les stations privées affiliées à la SRC ont assuré la radiodiffusion publique aux communautés comme Dawson Creek (Colombie-Britannique); Brandon (Manitoba); Rouyn (Québec) depuis la Grande Dépression des années 1930.
86Alliance of Canadian Cinema, Television and Radio Artists. Mémoire, p. 15.
87Ibid.
88Brian Staples. Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 27 février 2002.
89Alliance de la vidéo et du cinéma indépendants. Mémoire, p. 4.
90Mémoire de la Writers Guild, p. 2.
91Alan Taylor. Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 28 février 2002.
92Réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, 14 mars 2002.
93En fait, plus de quarante nouveaux services de télévision numérique ont été lancés à l'automne 2001. Il s'agissait du plus important lancement de l'histoire des services télévisés au Canada.
94McKinsey & Company. p. 35.
95Ibid., p. 38.
96Comité d'examen des mandats, p. 107.
97Ibid., p. 107.
98Appartenance et identité : L'évolution du rôle du gouvernement fédéral pour soutenir la culture au Canada. Rapport du Comité permanent du patrimoine canadien, Ottawa, Chambre des communes, 1999, recommandation 26, p. 98.
99Rapport d'examen spécial, Société Radio-Canada. Bureau du vérificateur général du Canada, juin 2000.
100Hansard (37e législature, 2e session), 19 février 2003.
101Comité d'étude de la politique culturelle fédérale. Résumé des mémoires et des audiences (Applebaum-Hébert), Ottawa, Approvisionnements et Services Canada, 1982.