SVET Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Sous-comité des anciens combattants du Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mercredi 19 mars 2003
¹ | 1535 |
Le président (M. Bob Wood (Nipissing, Lib.)) |
Mme Evelyn Shapiro (professeur et chercheur principal, Département des sciences de la santé communautaire, Faculté de médecine, Université du Manitoba) |
¹ | 1540 |
¹ | 1545 |
Le président |
M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Alliance canadienne) |
Mme Evelyn Shapiro |
¹ | 1550 |
M. Roy Bailey |
Le président |
M. Louis Plamondon (Bas-Richelieu—Nicolet—Bécancour, BQ) |
¹ | 1555 |
Mme Evelyn Shapiro |
M. Louis Plamondon |
Mme Evelyn Shapiro |
M. Louis Plamondon |
Mme Evelyn Shapiro |
º | 1600 |
M. Louis Plamondon |
Le président |
Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.) |
Mme Evelyn Shapiro |
Mme Rose-Marie Ur |
Mme Evelyn Shapiro |
Mme Rose-Marie Ur |
Mme Evelyn Shapiro |
Mme Rose-Marie Ur |
Mme Evelyn Shapiro |
Mme Rose-Marie Ur |
Mme Evelyn Shapiro |
º | 1605 |
Mme Rose-Marie Ur |
Le président |
Mme Elsie Wayne |
M. Louis Plamondon |
Mme Elsie Wayne |
Mme Evelyn Shapiro |
Mme Elsie Wayne |
º | 1610 |
Mme Evelyn Shapiro |
º | 1615 |
Le président |
Le président |
Mme Evelyn Shapiro |
Le président |
Mme Evelyn Shapiro |
Mme Elsie Wayne |
Mme Evelyn Shapiro |
Mme Elsie Wayne |
Le président |
M. Roy Bailey |
º | 1620 |
Mme Evelyn Shapiro |
M. Roy Bailey |
Mme Evelyn Shapiro |
M. Roy Bailey |
Mme Evelyn Shapiro |
M. Roy Bailey |
Mme Evelyn Shapiro |
M. Roy Bailey |
Le président |
M. Ivan Grose (Oshawa, Lib.) |
Mme Evelyn Shapiro |
º | 1625 |
Le président |
M. Ivan Grose |
Mme Evelyn Shapiro |
M. Ivan Grose |
Mme Evelyn Shapiro |
Le président |
Mme Elsie Wayne |
Mme Evelyn Shapiro |
Mme Elsie Wayne |
Mme Evelyn Shapiro |
Mme Elsie Wayne |
Le président |
º | 1630 |
Mme Evelyn Shapiro |
Le président |
Mme Evelyn Shapiro |
Le président |
Mme Evelyn Shapiro |
º | 1635 |
Le président |
Mme Evelyn Shapiro |
Le président |
Mme Evelyn Shapiro |
Le président |
Mme Evelyn Shapiro |
º | 1640 |
Le président |
Mme Evelyn Shapiro |
Le président |
M. Ivan Grose |
Mme Evelyn Shapiro |
M. Ivan Grose |
Mme Evelyn Shapiro |
º | 1645 |
M. Ivan Grose |
Mme Evelyn Shapiro |
Le président |
M. Roy Bailey |
Mme Evelyn Shapiro |
Le président |
Mme Evelyn Shapiro |
Le président |
Mme Evelyn Shapiro |
º | 1650 |
Le président |
Mme Evelyn Shapiro |
Le président |
Mme Evelyn Shapiro |
Le président |
CANADA
Sous-comité des anciens combattants du Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le mercredi 19 mars 2003
[Enregistrement électronique]
¹ (1535)
[Traduction]
Le président (M. Bob Wood (Nipissing, Lib.)): Silence, s'il vous plaît.
Je veux tout d'abord souhaiter la bienvenue aux étudiants du Forum des jeunes Canadiens qui sont à Ottawa cette semaine. Nous vous invitons à cette audience de notre comité pendant laquelle nous étudierons les effets du vieillissement des anciens combattants.
Notre invité ce matin est Mme Evelyn Shapiro, éminente professeure de réputation internationale et spécialiste de la politique nationale en matière de santé. Elle siège également au Conseil consultatif de gérontologie.
Créé en 1997, le Conseil se compose d'environ 14 membres, dont des universitaires et des représentants de groupes d'anciens combattants qui sont des autorités dans les domaines du vieillissement, et des questions relatives aux anciens combattants et aux personnes âgées. Il conseille le ministère des Anciens combattants sur les politiques, les programmes, les services et les tendances qui ont une incidence sur les anciens combattants du Canada.
Nous sommes très heureux de vous accueillir, madame Shapiro. Nous avons que vous arrivez de Winnipeg et que vous devrez partir avant 17 h pour aller prendre l'avion. Vous avez la parole.
Mme Evelyn Shapiro (professeur et chercheur principal, Département des sciences de la santé communautaire, Faculté de médecine, Université du Manitoba): Je m'en tiendrai à l'essentiel parce que d'après mes entretiens avec Diane Deschamps et les messages écrits que j'ai reçus, je pense que vous voulez poser les questions sur des sujets qui vous intéressent particulièrement. Je veux vous laisser le plus de temps possible pour le faire.
Je vais passer en revue certains programmes tout à fait spéciaux que le ministère des Affaires des anciens combattants a conçus pour les personnes âgées. Je décrirai plus particulièrement le Programme pour l'autonomie des anciens combattants, ou PAAC, parce que c'est un excellent programme, à plusieurs égards. Le PAAC a un rapport avec ce que vous faites, même si vous ne le voyez pas a priori parce que vous étudiez surtout les soins de longue durée dispensés dans les établissements. Il importe cependant de comprendre que le PAAC vise à aider les gens à rester chez eux.
Je dirai tout d'abord que ce programme a été lancé au moment où il n'existait pas d'autre projet de ce genre. Non seulement offrait-il des soins à domicile, mais en outre c'était ce qu'on appelle en langage moderne un programme autogéré, dans ce sens qu'on évaluait les besoins de chaque personne et qu'on obtenait les fonds nécessaires pour y répondre. Les gestionnaires du programme pouvaient recruter qui ils voulaient et déterminer ce qu'ils feraient. De tels projets ont maintenant un nom officiel au Canada et plusieurs provinces se sont dotées de ce type de programme. Il faut cependant rappeler que le ministère des Affaires des anciens combattants a fait oeuvre de pionnier dans ce domaine en laissant les gens décider de l'endroit où ils obtiendraient le service et de la façon dont ils les utiliseraient.
Par ailleurs, le programme a vu le jour à une époque très intéressante parce que, les unes après les autres, les provinces commençaient à offrir des programmes de soins à domicile. Par conséquent, le PAAC était la seule initiative du genre dans certaines provinces, mais dans d'autres, il a permis aux anciens combattants de bénéficier de services qui n'étaient pas offerts par les programmes provinciaux, comme la possibilité de vieillir dans un endroit entouré d'un jardin, ce qui n'est pas encore possible ailleurs. Ainsi, en plus d'être le premier et parfois l'unique programme du genre dans certaines provinces, le PAAC a permis de compléter les services offerts à cette clientèle dans d'autres provinces.
J'ai été frappée par l'empressement du personnel. Le Conseil consultatif de gérontologie n'existe que depuis quelques années, mais il est extraordinaire de voir l'enthousiasme avec lequel il s'efforce de donner suite aux conseils qu'il reçoit, afin de pouvoir améliorer ses programmes.
Voilà les trois choses que je voulais vous dire, parce que j'ai constaté beaucoup d'ouverture et une volonté réelle d'améliorer les services. J'ai cependant certaines réserves, dont quelques-unes concernent le ministère proprement dit, et pas nécessairement les programmes de soins de longue durée. même s'ils ont effet significatif.
D'abord, il y a beaucoup de catégories d'anciens combattants et il y a parfois des rivalités. Par exemple, certains anciens combattants ont droit à des services particuliers en raison de leurs besoins financiers. Il faut en tenir compte lorsqu'on aborde certains sujets. Il faut aussi savoir que certains anciens combattants ne sont pas admissibles au PAAC. Ils n'y ont pas droit, et pourtant de tels programmes sont le seul moyen pour eux d'éviter d'être placés dans un centre d'hébergement et de soins de longue durée. Comme ils peuvent être placés dans de tels centres s'ils ont vraiment besoin d'aide, on les pousse à aller vivre dans un centre de ce genre, même s'ils n'en ont pas besoin. Ils pourraient vivre chez eux, mais ils sont obligés d'aller vivre dans un centre d'hébergement. Ils n'ont pas le choix. Le comité devrait se demander si les catégories n'incitent pas les gens à opter pour les services les plus coûteux.
Par ailleurs, je suis très préoccupée par les personnes qui prennent soin des anciens combattants, qui sont parfois âgées. Ma préoccupation s'explique peut-être par le fait que je suis une femme et que j'ai pris soin de mon mari pendant de nombreuses années jusqu'à sa mort. Je pense que vous ne renseignez pas assez les soignants. Ces personnes sont oubliées, laissées pour compte. Elles prennent soin de leur conjoint depuis cinq ou dix ans, et maintenant ce sera depuis vingt ans dans le cas des anciens combattants toujours vivants. Si ces anciens combattants ont pu continuer à vivre chez eux, c'est qu'il y avait quelqu'un pour prendre soin d'eux à la maison. Ce n'est pas simplement parce qu'ils pouvaient avoir accès aux services. En réalité, c'est parce qu'il y avait quelqu'un à la maison. Comme leur femme était généralement un peu plus jeune, leur état de santé était meilleur.
¹ (1540)
Il y maintenant une règle, qu'il n'a pas été facile d'obtenir, selon laquelle la soignante continue au moins à avoir droit aux services pendant un an après la mort de son mari. Mais si l'on pense à toutes ces années que ces femmes ont consacrées à leur mari malade, je crois que c'est absolument injuste. De plus, au moment où leur état de santé commence à se détériorer, elles peuvent ne pas avoir droit aux services dont elles auraient besoin.
Non seulement sont-elles laissées pour compte après la mort de leur mari, mais pendant la période où elles prennent soin de lui, elles sont également négligées. Le programme est axé sur les anciens combattants. Les personnes qui prennent soin d'eux n'ont pas et n'ont pas eu accès nécessairement aux services que d'autres programmes offrent aux soignants; ainsi, on leur explique quoi donner à la personne malade et comment en prendre soin, on leur donne de la documentation pertinente, et ainsi de suite. C'est comme si vous ne vous occupiez que d'une seule personne, et vous le faites très bien. Je pense cependant qu'il faudrait aussi aider les soignantes, car elles s'en porteraient mieux, et on pourrait également leur offrir des services de relève pour leur permettre de se reposer. Voilà ma deuxième préoccupation.
Ma troisième va peut-être vous surprendre, parce que je suis tout à fait d'accord avec le rapport Romanow. C'est ce qui va se passer maintenant dans le domaine des soins à domicile. À l'issue de la dernière réunion fédérale-provinciale, les premiers ministres ont annoncé qu'ils allaient y consacrer plus de fonds—parce que c'est le gouvernement fédéral qui les fournira. Je suppose, sans toutefois pouvoir en être sûre, que les provinces vont continuer à offrir les services qu'elles donnent déjà mais que ce sera uniquement dans le domaine des soins de courte durée. Sauf dans le cas de la santé mentale, cet argent servira à financer les soins actifs post-hospitaliers ainsi que les soins palliatifs d'une durée de moins de soixante jours. Or, l'argent versé à ces deux types de service n'apportera rien aux anciens combattants qui ont besoin de soins de longue durée.
Par surcroît, tous les programmes provinciaux de soins à domicile éprouvent déjà des difficultés. Comme les séjours à l'hôpital sont écourtés et que les patients reçoivent leur congé plus rapidement, une bonne partie de l'argent qui devait au départ servir à financer les soins de longue durée est dépensé pour les soins actifs. Les deux types de services étaient financés à même un budget commun. À présent, les soins actifs prennent la part du lion et on ne va pas donner plus d'argent pour les soins de longue durée. Les provinces auront moins d'argent pour offrir les soins qu'elles doivent donner aux anciens combattants. Dans certaines provinces, vous ne faites que combler le déficit en soins.
Vous allez peut-être devoir maintenant réfléchir sérieusement à ce que cela vous coûtera, parce que beaucoup de provinces ont commencé à refuser les services aux personnes qui n'ont pas besoin de services médicaux ou qui ont besoin d'aide seulement un matin par semaine, par exemple. Les provinces ne leur offrent plus aucun service parce qu'elles n'ont pas l'argent. Ou plutôt disons qu'elles n'ont pas l'argent parce que l'on ne leur en donne pas.
On accorde de plus en plus d'attention au remplacement des lits d'hôpitaux, mais ce n'est pas de cela que les anciens combattants ont besoin. C'est une clientèle vieillissante qui peut à l'occasion avoir besoin d'être hospitalisée pour quelques semaines, mais cela ne suffit pas. Les provinces ont jusqu'ici financé l'essentiel des soins à domicile, ce qui a contribué à réduire vos coûts. Sauf dans les Maritimes, il existe depuis des années des programmes complets de soins à domicile. Ces programmes ont vraiment aidé les anciens combattants, de même que les autres citoyens.
Voilà en gros ce que je voulais vous dire.
Quand j'ai parlé à Diane, je n'ai malheureusement pas compris ou enfin je n'ai pas réalisé que votre étude portait sur les soins de longue durée. Je lui ai demandé si vous étiez préoccupés par la qualité ou plutôt par la disponibilité ou l'accessibilité de lits pour les anciens combattants dans des établissements de soins de longue durée. Je pense qu'il faut rappeler que les lits ne sont que des lits. Ce n'est là qu'un des éléments du vaste domaine des soins de longue durée, dont tous les éléments sont reliés entre eux. Si l'on fait quelque chose dans un secteur, cela a des répercussions sur un autre secteur, alors il faut être très prudent.
¹ (1545)
Dans ma province, au Manitoba, j'ai mis sur pied le programme provincial de soins à domicile. Il y avait 1 450 personnes qui étaient en attente d'une place dans un centre de soins de longue durée au Manitoba. En trois mois, nous avons informé tous les intervenants que les personnes qui étaient sur les listes d'attente pouvaient recevoir des soins à domicile si elles le souhaitaient. En un rien de temps, le nombre de gens qui attendaient un lit dans un centre d'hébergement de longue durée est passé de 1 450 à 500.
Les catégories ne permettent pas... Vous avez lancé un projet pilote et les résultats ont été exactement les mêmes. Dans ce projet pilote, on a dit aux anciens combattants de faire abstraction de la catégorie dans laquelle on les avait classés. On leur a demandé s'ils préféreraient continuer à habiter chez eux ou être placés dans un centre d'hébergement, parce que leur nom figurait sur une liste d'attente pour un tel établissement. Environ la moitié des personnes interrogées ont retiré leur nom de la liste.
Il faut comprendre que ces deux éléments sont reliés entre eux. Ils ne sont pas dissociables, sauf si on les sépare par catégorie, en déterminant quelle catégorie de personnes ont droit à quel genre de service.
C'est tout ce que je voulais vous dire.
Le président: Vos commentaires sont intéressants et nous vous en remercions. Je sais que les membres du comité sont nombreux à être d'accord sur les faits que vous présentez et il sera intéressant de voir comment vont s'orienter les questions. Mes collègues en ont de nombreuses à vous poser.
Nous allons commencer avec M. Bailey de l'Alliance canadienne, pour sept minutes.
M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Alliance canadienne): Madame Shapiro, vos propos sont très inspirants, puisque vous vous êtes vous-même occupée de donner des soins à domicile. Comme le dirait ma femme, il est déjà très méritoire de s'occuper d'un homme; ça mérite la Croix de Victoria, etc. J'ai été malade à quelques reprises, et je sais que je ne suis pas un très bon patient.
Je viens de Saskatchewan, et je sais ce dont vous parlez. J'ai vu moi-même à l'oeuvre ceux qui donnent des soins à domicile, et j'ai vu l'expansion de ce champs d'activités. Vous avez raison de dire que les anciens combattants et les personnes âgées préfèrent rester chez eux s'ils en ont la possibilité. Le problème, c'est que parfois, ils y restent trop longtemps, mais ce n'est pas le cas de la majorité.
J'ai signalé tout à l'heure à mes collègues que si l'on combine le PAAC avec les soins à domicile provinciaux du programme du ministère des Anciens combattants, on peut prolonger le séjour à domicile, car le programme pour l'autonomie des anciens combattants comprend des activités d'entretien extérieur; de déneigement, etc. J' ai donc hâte que ce comité termine son voyage et que nous puissions parler de l'application combinée de ces deux programmes. Par ailleurs, c'est beaucoup plus économique pour les provinces. Si elles devaient assumer elles-mêmes la prise en charge des bénéficiaires, elles n'auraient pas toutes les établissements médicaux nécessaires.
J'aimerais revenir sur le cas de l'épouse ou de la fille qui assure les soins d'un ancien combattant. Il me semble que ce dont elles ont besoin—et vous en avez parlé—c'est une formation supplémentaire, et je suis d'accord avec vous. Elles ont également besoin de répit, une journée de congé de temps en temps. C'est ce que j'ai constaté dans ma région en m'entretenant avec elles; elles ont besoin d'aide. Ne pensez-vous pas que si l'on veut garantir la santé de ces soignants, il faudrait leur accorder une pause de deux jours, dans la mesure où des lits sont disponibles? Il faut leur accorder leur fin de semaine. C'est essentiel, car les soignants n'en peuvent plus, c'est la fin de tout.
Mme Evelyn Shapiro: Vous parlez d'un répit, et c'est très intéressant. J'y ai fait référence, mais un problème se pose à cet égard. Au Manitoba, nous avons suffisamment de lits pour accorder ces répits. Certaines personnes s'en prévalent. Parfois, certains voudraient quitter la ville pour un mariage et ne peuvent pas le faire. Si leur fille se marie, ils ne peuvent assister au mariage que s'ils ont tout organisé auparavant. Mais il est possible d'obtenir des répits à domicile, et il existe des programmes de journée de prise en charge à cette fin. Il existe toute une gamme de services.
Ce qui me semble intéressant, c'est que certaines provinces sont très en avance sur les autres à cet égard et elles supposent que les services sont disponibles partout, alors que ce n'est pas le cas. En un sens, il faut vraiment considérer de très près l'inventaire des services disponibles dans une province, la façon dont les programmes ont évolué dans le temps, car il faut un certain temps pour qu'un programme évolue et parvienne à maturité.
Les programmes provinciaux de soins à domicile comportent un élément auquel les anciens combattants devraient réfléchir. Si l'ancien combattant est disposé à s'éloigner de son soignant, ce dernier n'est plus le seul en cause. Comme vous le savez peut-être il existe maintenant en Saskatchewan et dans toutes les provinces—je m'empresse de signaler que le Manitoba a fait figure de pionnier dans ce domaine—un programme à entrée unique. On s'inscrit non pas uniquement aux soins à domicile, mais à un programme de soins continus—ou quelque chose du genre. On décide à un moment donné qu'il n'est plus possible de rester chez-soi et qu'on a besoin d'entrer dans un foyer de soins infirmiers. Mais lorsqu'on inscrit quelqu'un dans une catégorie qui nous le permet pas vraiment, c'est là que se pose le problème.
Je tenais à vous le signaler, car c'est toujours plus facile quand on sait exactement vers où il faut s'orienter. Un ancien combattant ne devrait jamais se retrouver dans un foyer de soins infirmiers si le responsable du programme local de soins à domicile estime qu'il peut rester chez-lui, sous réserve d'une aide supplémentaire du MAAC ou de quelque autre organisme.
En un sens, il est vrai qu'on pourrait demander à chacun s'il préfère rester chez-lui en bénéficiant de soins à domicile. C'est très bien, car c'est une expérience positive au départ. Mais dans presque toutes les provinces—du moins dans neuf des dix provinces—il existe maintenant une procédure qui s'applique automatiquement. Il n'y a plus de décision à prendre. Il s'agit essentiellement d'éviter tous risques une fois que la décision est prise.
¹ (1550)
M. Roy Bailey: Vous avez raison de dire que dans l'ensemble des provinces, le coût des services de santé a augmenté alors que la population canadienne vieillissait. Ces deux facteurs combinés ont exercé une pression considérable sur le besoin en soins actifs immédiats. Sur le plan politique, on a reproché à certaines provinces, les interminables files d'attente, etc. Plusieurs provinces ont proposé des soins à domicile, mais au passage, elles ont laissé de côté les soins à long terme. Je pense que maintenant, monsieur le président, on s'en occupe, et je remercie notre invitée d'y avoir fait allusion, car c'est une réalité dans le contexte canadien actuel.
[Français]
Le président: Monsieur Plamondon, vous avez la parole pour sept minutes.
M. Louis Plamondon (Bas-Richelieu—Nicolet—Bécancour, BQ): Excusez mon retard, madame. J'avais été avisé qu'on siégeait à la salle 362 de l'édifice de l'Est et je m'y suis rendu pour me rendre compte que le comité avait changé de place. Voilà ce qui explique mon retard.
Je n'ai pas eu l'honneur d'entendre toute votre présentation, mais j'aimerais avoir votre opinion sur un programme qui existe au Québec et qui pourrait peut-être s'appliquer dans le cas des anciens combattants. Il s'agit d'un programme pour les aidants naturels qui, à compter du budget de cette année, sera financé en partie par le gouvernement du gouvernement du Québec. Les aidants naturels sont des gens qui ont un lien de parenté avec la personne; ce sont des fils, des filles, des femmes ou des hommes qui consentent à ne travailler qu'à temps partiel pour demeurer auprès d'un membre de leur famille qui est âgé ou malade et lui apporter les soins nécessaires, plutôt que de le placer dans un foyer ou dans une institution publique.
Il existe maintenant un regroupement de ces gens dans chaque région du Québec, et ces regroupements se sont formé une fédération qui a obtenu 60 millions de dollars, je crois, du gouvernement du Québec. Je ne suis pas certain du chiffre. Ceci va faire en sorte que les aidants vont pouvoir recevoir, à titre d'appui, un montant qui se situera entre 600 $ et 1 000 $ par année. Il est vrai que ce montant n'est pas très élevé, mais c'est un début et il deviendra plus important avec le temps. Tranquillement, on fait cette expérience qui, en plus de décharger le système public, permet de rendre des services beaucoup plus humains aux malades, de garder l'atmosphère du foyer, etc.
Souvent, on essaie de parquer les anciens combattants quelque part. En réalité, ils ont plutôt besoin d'une aide à la maison, et c'est d'ailleurs ce qu'ils réclament. Dans des situations plus particulières, ils ont peut-être besoin d'une aide de leur propre famille qui, elle, a besoin d'une aide du gouvernement. Quel est votre point de vue là-dessus?
¹ (1555)
[Traduction]
Mme Evelyn Shapiro: C'est très intéressant, car Roy Romanow a fait une proposition légèrement différente. Je ne sais si vous avez lu ce qui figure dans son rapport à propos des soins à domicile et des soignants. Il adopte une perspective tout à fait différente. Je ne sais pas si les provinces en parlent entre elles, et ce n'est même pas nécessaire. En fait, il s'agit d'assurance-emploi. On ferait appel à l'assurance-emploi pour rétribuer les soignants, c'est-à-dire qu'on leur donnerait accès à l'assurance-emploi. Vous devriez lire cette partie là du rapport.
Les anciens combattants forment désormais une population très âgée. Il s'agit essentiellement de personnes de 75 ans ou plus. Sauf erreur de ma part, les statistiques sur les anciens combattants sont très intéressantes, car ils sont mariés dans une proportion supérieure à l'ensemble de la population. Leur situation est assez enviable, car leurs épouses sont en général plus jeunes. La plupart d'entre eux ont donc quelqu'un à la maison, avec qui ils ont des liens affectifs très forts.
Pour l'épouse, la question principale n'est pas la rémunération. C'est plutôt le répit et l'aide. On peut effectivement se demander s'il y a lieu de rémunérer la conjointe, mais pour la plupart de ces femmes, ce n'est pas l'argent qui pose problème, c'est l'épuisement. Elles sont épuisées. Elles sont ce qu'on appelle désormais les soignants familiers, c'est-à-dire des membres de la famille, des nièces, des neveux et des épouses. C'est bien ce dont vous parlez, n'est-ce pas?
[Français]
M. Louis Plamondon: Oui, c'est cela que je voulais dire.
[Traduction]
Mme Evelyn Shapiro: Oui, et la formule québécoise ne me pose aucun problème. Je la trouve excellente. Mais je ne suis pas certaine qu'elle convienne... ce sont des conjointes âgées qui s'occupent de leurs conjoints âgés. Ces gens-là, normalement, ne seraient pas au travail; voyez-vous ce que je veux dire? D'autres devraient renoncer à leur emploi, à des promotions et donner de leur temps. La conjointe donne aussi de son temps, mais elle ne renonce pas à un emploi, car ce n'est plus de son âge.
[Français]
M. Louis Plamondon: Je comprends très bien votre point de vue. Admettons que la dame et l'homme sont âgés, mais il y a aussi les enfants, ou peut-être même une nièce ou quelqu'un d'autre de la famille qui pourrait venir les aider deux ou trois fois par semaine. Toutefois, ces gens-là ne peuvent être payés parce qu'ils n'ont pas de diplôme officiel, parce qu'ils ne sont pas désignés officiellement par l'État, parce qu'ils ne sont pas à l'intérieur d'un système. C'est ce que j'appelle un aidant naturel. Les soins qu'ils apportent sont souvent beaucoup plus appropriés, parce qu'il y alors l'aspect familial, l'aspect humain. Je ne sais pas si on a pu évaluer cette forme d'aide et la façon dont on pourrait rémunérer ces personnes. Est-ce que ça pourrait être simplement par un crédit d'impôt ou quelque chose de ce genre?
[Traduction]
Mme Evelyn Shapiro: Ce serait plus facile de passer par le ministère des Affaires des anciens combattants, puisqu'il verse déjà l'argent qui permet aux anciens combattants d'acheter le service. Si la conjointe fait l'entretien extérieur et que son conjoint la rémunère au lieu de donner un contrat à quelqu'un d'autre, le problème est résolu. Mais je ne suis pas certaine que la conjointe soit capable de tondre la pelouse.
Ce que je veux dire, c'est qu'il existe déjà un programme autogéré. N'oublions pas qu'en plus de ce qu'ils obtiennent du programme provincial de soins à domicile, les anciens combattants obtiennent de l'argent pour acheter le service. C'est ce que nous appelons un programme autogéré. Si on pouvait dire aux anciens combattants qu'ils peuvent engager leur femme, leur nièce ou leur neveu, il n'y aurait aucun problème. Je ne sais pas si c'est véritablement ce que l'on souhaite, mais c'est une possibilité. On pourrait les autoriser à engager n'importe quel membre de la famille.
º (1600)
[Français]
M. Louis Plamondon: Merci beaucoup.
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup, monsieur Plamondon.
Passons maintenant au côté ministériel avec Mme Ur, pour sept minutes.
Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.): Je vous remercie de votre exposé, qui correspond tout à fait à mon expérience personnelle, car je suis non seulement député, mais je suis aussi soignante. Mon mari a fait un grave ACV il y a deux ans et il a quelqu'un pour s'occuper de lui lorsque je suis ici. Je connais donc bien le problème du répit.
Vous dites que c'est sans doute la question essentielle pour le conjoint d'un soignant. Je pense non seulement au répit, mais également au coût. On souhaiterait que la famille soit alentour , mais elle est souvent disséminée, et chacun est très occupé. Nous parlons ici de soins à long terme, et non pas d'une situation exceptionnelle, et quels que soient les liens affectifs qui vous unissent à celui qui a besoin d'aide, ce serait trop demander que d'exiger ce genre d'aide continue; il est donc important que l'e soignant ait aussi droit à un répit. En Ontario, ce service est disponible grâce aux foyers de soins infirmiers, moyennant la somme modique d'environ 35 $ par jour.
Pour le soignant, qu'il passe par Para-Med ou une autre institution du même genre, les coûts sont souvent prohibitifs, et je ne sais pas si le PAAC dispose de fonds suffisants pour couvrir des frais de ce genre. Je voudrais donc vous demander s'il existe une différence dans le soutien accordé à nos anciens combattants selon qu'ils sont en zone rurale ou urbaine. La liste d'attente est-elle plus longue dans certaines régions du pays? Avez-vous de l'information à ce sujet?
Mme Evelyn Shapiro: Est-ce que vous parlez de lits, d'aide à domicile ou des deux?
Mme Rose-Marie Ur: Des deux.
Mme Evelyn Shapiro: Si vous parlez de choses qui n'ont rien à voir avec le ministère des Anciens combattants, je ne crois pas qu'il y ait de problème en ce moment au niveau des soins de longue durée. Je sais qu'il y a des gens sur une liste d'attente en Ontario, mais c'est parce qu'on utilise les crédits pour les soins actifs et qu'on ne leur donne pas un sou de plus. En effet, il y a un problème de ce côté-là.
Donc, dans certaines provinces, il y a un problème, mais dans d'autres provinces, tout dépend où vous vivez. Mais cela ne veut pas nécessairement dire qu'il y a un fossé entre le secteur rural et le secteur urbain. Par exemple, en Colombie-Britannique, une étude a été faite il y a environ un an On a régionalisé les services à l'échelle de presque toute la province, et les régions décident comment elles vont utiliser leurs fonds. Ce qui c'est passé dans une province comme la Colombie-Britannique, si l'on en croit cette étude récente, c'est que dans certaines régions, on a commencé à dire que si vous n'aviez besoin que d'un peu d'aide, on ne pouvait rien faire pour vous parce que tout est réservé aux soins de longue durée. Si vous avez besoin de beaucoup d'aide et que cette aide vous permettra de rester chez vous, ça va. Mais si vous avez besoin de quelqu'un qui viendra chez vous deux fois par semaine pendant trois heures pour vous aider à vous débrouiller, vous ne pourrez pas obtenir ce service-là. D'autres régions ont décidé de procéder différemment.
C'est intéressant, parce que dans les deux régions qui ont décidé de couper les services, cette décision a fini par leur coûter davantage parce que les gens étaient hospitalisés de façon répétée. Dans les deux régions qui ont décidé de maintenir les services, il en a coûté beaucoup moins sur une période de trois ans que dans les régions où on avait coupé les services. Les programmes régionaux trouvent donc que la suppression des services est parfois coûteuse et qu'on n'économise pas un sou.
Je pense qu'il faut être très prudent. On parle aujourd'hui d'un programme qui est cumulatif parce qu'il est axé sur le long terme. Cela veut dire, dans un sens, que le programme s'étale sur plusieurs années. Très souvent, les soins de relève deviennent bien sûr extrêmement importants. Je m'inquiète aussi de savoir, comme je l'ai dit, si on ne doit pas quelque chose à ces gens après 10 années ou davantage. On leur doit quelque chose pour la période qui suivra après. Cela m'a toujours déplu. C'est ce que je pense personnellement.
Mme Rose-Marie Ur: En ce qui concerne le service PAAC, lorsque les anciens combattants profitent aujourd'hui de ce programme, est-ce qu'il peut s'agir simplement de quelqu'un en dehors de la famille qu'on engage pour laver les vitres ou ratisser les feuilles, etc.?
Mme Evelyn Shapiro: Je crois que oui, mais je n'en suis pas sûre. Je crois que c'est quelque chose que vous devrez examiner. Je sais que la plupart des provinces ont une règle comme celle-là. Si vous êtes en soins autogérés, vous ne pouvez pas payer la personne s'il s'agit d'un membre de votre famille.
Mme Rose-Marie Ur: Le comité devrait examiner cela, parce qu'il est sûr qu'il pourrait...
Mme Evelyn Shapiro: Je pense qu'il est très important de fixer une norme.
Mme Rose-Marie Ur: Exactement. Un membre de la famille pourrait toucher un tarif fixe pour des travaux quelconques.
Mme Evelyn Shapiro: Vous devrez être extrêmement prudent parce que je sais que le gros problème qui s'est posé lorsque nous avons lancé ce programme, surtout dans les toutes petites localités, c'était que presque tout le monde était parent.
Le problème consiste à distinguer les soins de longue durée des soins de courte durée parce que les familles ne disposent pas vraiment de l'expérience cumulative qu'il faut. Si une personne a eu une maladie quelconque et qu'elle rentre chez elle et se rétablit au bout de quatre semaines et que la famille donne un coup de main, ce n'est pas la même chose si elle dispense des soins d'une année sur l'autre.
L'autre chose, c'est qu'il y a toujours cette idée que la famille a une responsabilité. Votre famille est votre famille, après tout. L'amour intervient ici, la proximité également, et il y a des soins que l'on se doit les uns aux autres. Mais il y a toujours eu cette distinction à faire entre ce que les membres d'une même famille se doivent les uns aux autres du fait qu'ils forment une famille, et ce dont les familles ont besoin en matière d'aide. Cette question a toujours fait problème et n'a jamais été résolue à la satisfaction de tous.
º (1605)
Mme Rose-Marie Ur: Ce que vous dites est tout à fait vrai., mais à notre époque... Je pense que c'était comme ça il y a fort longtemps. Ce qui ne veut pas dire que nos jeunes, nos enfants, sont comme ça, mais la société a changé à cet égard. Les enfants déménagent et ne sont plus aussi près de leurs mamans, de leurs papas ou de leurs grands-parents, ou ils ne sont pas aussi accessibles.
Autre chose, vous disiez que les soignants ne reçoivent pas les informations nécessaires ou qu'on ne leur montre pas comment donner les soins voulus. J'ai la grande chance de vivre près de London, en Ontario, où se trouve l'hôpital Parkwood. Cet hôpital a des tas de programmes. On pourrait vous y garder jour et nuit et vous faire suivre des programmes pour soignants où on vous apprendrait à donner les soins voulus. Je pense que c'est très important, et c'est peut-être une chose que nous pourrions examiner aussi à l'échelle du pays.
Je vous remercie pour votre témoignage.
Monsieur Wood, j'ai terminé.
Le président: Madame Wayne, vous avez la parole, sept minutes.
Mme Elsie Wayne: Je tiens à vous souhaiter la bienvenue, madame Shapiro. Il y a maintenant 10 ans que je suis sur la Colline, et j'en ai consacré plusieurs à la question des anciens combattants.
Chez nous, à Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick, nous avions l'hôpital du ministère des Anciens combattants. Vous savez probablement qu'on l'a démoli et qu'on en a bâti un tout petit. C'est très regrettable parce que, comme vous le savez, tous nos anciens combattants vieillissent, et ne rajeunissent pas, et il nous faut plus de lits, et non moins. Quand c'est arrivé, ça m'a vraiment fendu le coeur.
Mon beau-père a 95 ans, et il est à l'hôpital des anciens combattants à Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick. C'est un homme qui ne se plaint jamais. Mais il ne pouvait plus rester chez lui. Il possédait sa propre maison, mais ma belle-mère est décédée alors qu'elle avait à peine 75 ans, donc il est resté seul jusqu'à ce que son état de santé se détériore.
Il y a une chose qui m'inquiète beaucoup. Nous avons été à Montréal et à Québec où nous avons inspecté les hôpitaux. Nous avons également inspecté l'hôpital des anciens combattants de Toronto, même si on ne l'appelle plus l'hôpital des anciens combattants, ce qui me dérange. Dans l'ouest aussi, comme vous savez, on a constaté des problèmes. Je dois vous dire franchement que je crois du fond de mon coeur que le seul hôpital qui reste aujourd'hui et qui relève du gouvernement fédéral est celui du Québec.
M. Louis Plamondon: À Sainte-Anne.
Mme Elsie Wayne: Oui, et c'est un hôpital magnifique. Leurs programmes sont extraordinaires. Mais tous nos hôpitaux du ministère des Anciens combattants devraient relever du gouvernement fédéral. Cela n'aurait pas dû changer parce que c'était tous des anciens combattants, d'un océan à l'autre, madame Shapiro. C'était des anciens combattants, et ils le restent toujours.
Mme Evelyn Shapiro: C'est très... Je ne veux pas vous interrompre. Excusez-moi.
Mme Elsie Wayne: Non, ça va. Mais ça me fait vraiment mal au coeur. Ils ont beaucoup de mal à obtenir les fonds qu'il leur faut.
À l'hôpital de chez nous, on a ajouté un pavillon il y a deux ans, et c'est pour les anciens combattants atteints de l'Alzheimer. Mais nous avons aujourd'hui une longue liste d'anciens combattants qui doivent être hospitalisés, et nous n'avons pas assez de lits. Nous allons en obtenir, mais lorsqu'il s'agit des programmes qui s'adressent à eux... Nous avions auparavant des gens qui allaient à l'hôpital et offraient des programmes. Eh bien, à cause des compressions, il a fallu supprimer ces programmes, et nous comptons maintenant sur un grand nombre de bénévoles.
Je dois vous dire que si vous aviez été là lundi et au cours de la fin de semaine, vous auriez cru que tout le monde à l'hôpital était d'origine irlandaise le jour de la Saint-Patrick. Les gens qui sont là et qui y travaillent font un boulot formidable.
Une dame m'a remis une lettre, et elle est infirmière à temps partiel depuis 10 ans. Elle aimerait devenir infirmière à temps plein pour obtenir les avantages sociaux comme tout le monde, mais cela n'a pas été possible à cause du manque de financement.
Je crois que nos anciens combattants devraient être la priorité numéro un au niveau du financement et que nous ne devrions même pas discuter de cela aujourd'hui. Sans eux, nous ne serions pas sur la Colline aujourd'hui, madame. Il faut se souvenir de ça.
º (1610)
Mme Evelyn Shapiro: Cela est certainement vrai. Je ne dirais pas le contraire.
Permettez-moi de mentionner quelques points, car il y a des mythes qui circulent dans cette pièce et ce sont vraiment des mythes, non pas la réalité. D'abord,un coup d'oeil aux provinces—et nous avons fait deux études différentes, d'abord pour examiner la situation sur une période de 13 ans, ensuite au cours des 10 dernières années—montre qu'il y a une tendance à la baisse pour ce qui est de l'utilisation des établissements par les personnes âgées. Au cours des 10 dernières années, il y a eu une baisse de 15 p. 100 au Manitoba.
En d'autres termes, si elles ont le choix, certaines personnes iront de toute façon dans ces établissements pour diverses raisons, mais surtout lorsqu'ils n'ont pas le soutien social et qui requièrent des soins trop lourds, en ce sens qu'ils ont besoin de soins 24 heures sur 24.
Le fait est que la tendance est à la baisse, et c'est surtout parce que les «plus jeunes personnes âgées»... Les personnes âgées se divisent maintenant en trois catégories d'âge. Il y a les «jeunes personnes âgées», les «personnes âgées moyennement âgées» et les «vieilles personnes âgées», car il y a maintenant des gens qui vivent jusqu'à 90 et même 100 ans. Le taux de survie est tout simplement extraordinaire.
Ce que je dis, c'est que nous ne parlons même pas des personnes âgées de 65 à 74 ans. En un sens, ces personnes n'utilisent pas beaucoup les hôpitaux, tandis qu'auparavant elles les utilisaient assez régulièrement. C'est beaucoup moins le cas à l'heure actuelle. En fait, les personnes âgées de 75 ans et plus sont dans des hôpitaux tandis que les personnes de 85 ans et plus sont dans des foyers pour personnes âgées. La plupart des gens qui vont vivre dans des foyers ont plus de 85 ans. Naturellement, cependant, on a peut-être besoin d'une salle commune pour les personnes atteintes de démence, bien qu'on ait de la chance en ce qui concerne les anciens combattants, car les hommes ne souffrent pas aussi souvent de démence que les femmes. Il y a là un léger écart entre les hommes et les femmes à cet égard.
Il existe cependant un autre mythe, à savoir que les coûts vont augmenter parce que la population vieillit. J'ai examiné toutes les études très en détail, et ce qui ressort, c'est que ce n'est pas du tout le cas. Même avec la génération du baby-boom qui est en train de vieillir, au fait—pour que vous le sachiez—le coût additionnel sera de 1 p. 100 par an, car ils ne vont pas tous avoir 85 ans en même temps. En fait, il y aura une augmentation de 1 p. 100. Ce qui coûte vraiment cher à l'heure actuelle, ce sont les médicaments et le matériel de haute technologie. Ces deux éléments grugent énormément les fonds, car tout le monde veut avoir le plus récent gadget ou le tout nouveau médicament. C'est là où passe une bonne partie des fonds. Et en passant, je dois vous dire que les personnes âgées n'utilisent pas beaucoup ces choses.
Vos anciens combattants ne tirent pas avantage de tous les fonds qui sont investis. Ce sont les soins à long terme qui sont négligés. Cela ne fait aucun doute, tant en ce qui concerne les foyers que la collectivité. Le Nouveau-Brunswick a toujours eu un drôle de programme de soins à domicile. Ce programme remplaçait en quelque sorte l'hospitalisation, et ensuite il fallait répondre à certaines exigences des services sociaux car il fallait avoir de l'argent. Tant qu'une personne n'avait pas d'argent, cela pouvait aller, mais si elle avait de l'argent, il y avait un problème. En fait, les anciens combattants dans cette province ont davantage profité des programmes que ceux qui se trouvaient dans d'autres provinces, surtout parce que cela faisait partie du programme ce qui n'était pas le cas dans l'ouest.
Donc, en fait, vous avez raison. Je pense qu'il sera peut-être nécessaire d'ajouter des lits, mais la tendance à l'heure actuelle est de faire quelque chose de très différent car on n'utilise moins les foyers pour personnes âgées. Il ne sert à rien d'ajouter des lits dans les foyers si les gens ne veulent pas y aller. On estime qu'à l'avenir les personnes âgées voudront encore moins aller vivre dans des foyers.
La tendance est de vouloir organiser ce qu'on appelle l'aide à la vie autonome. Ça ne veut pas dire que les gens seront là éternellement, mais il y a une façon de mettre les gens en contact. Auparavant, on construisait des logements pour personnes âgées. Les anciens combattants n'ont pas été obligés d'utiliser ces logements surtout parce qu'ils avaient de l'aide pour des tâches comme le jardinage. Par contre, d'autres personnes estimaient nécessaire d'aller vivre dans des logements pour personnes âgées, soit parce qu'elles n'avaient pas beaucoup d'argent, soit parce qu'elles ne pouvaient pas faire toutes ces choses. Qu'il s'agisse de logements subventionnés ou de logements de haute qualité, c'est devenu la tendance.
Aujourd'hui, la tendance est vraiment de modifier ce concept—c'est ce que nous faisons lorsque nous construisons de nouveaux immeubles, car certains commencent à se délabrer—et de fournir de l'aide à domicile aux gens qui en ont besoin, mais qui n'ont pas de personnes soignantes, et de leur fournir ces services de façon permanente. Cela devient la tendance aujourd'hui, plutôt que le foyer pour personnes âgées.
º (1615)
Le président: Je vais faire une petite pause de 30 secondes, car je sais que nos invités du Forum des jeunes Canadiens sont en train de partir.
Merci d'être restés, et je vous souhaite une excellente semaine.
Des voix: Merci.
Le président: M. Bailey sera le premier intervenant pour le deuxième tour de table.
Mme Evelyn Shapiro: Puis-je vous poser une question avant de continuer?
Le président: Absolument, je croyais que vous aviez terminé, madame Shapiro.
Mme Evelyn Shapiro: C'est à la suite de ce qu'a dit Mme Wayne, mais sur un autre sujet. Je voulais dire quelque chose d'autre au sujet des hôpitaux pour anciens combattants.
Je pense que tout le monde a droit aux meilleurs soins possible. Je dois dire que ce n'est pas parce que j'ai moins ou plus d'estime pour les anciens combattants, mais je pense que tous les hôpitaux, toutes les résidences pour personnes âgées, et tous les programmes de soins à domicile devraient être les meilleurs possible.
En fait, j'ai enseigné à Deer Lodge lorsqu'il se trouvait toujours dans un hôpital pour anciens combattants. Je ne suis pas sûre qu'aujourd'hui un grand nombre d'anciens combattants choisiraient d'aller résider dans un établissement pour anciens combattants. En d'autres termes, peut-être que toute la collectivité dans laquelle cette personne vivait comprenait en fait d'autres anciens combattants et qu'il y avait là toute une communauté de gens qui se connaissaient bien, car le Nouveau-Brunswick n'est pas une si grande province.
Lorsque j'ai travaillé là-bas dans les années 1980, il m'a certes paru clair que les anciens combattants qui étaient là ne s'étaient pas vraiment identifié à la collectivité. C'était plutôt des gens solitaires qui n'avaient pas de contacts avec leur collectivité. La plupart des autres anciens combattants voulaient soit être près de certains membres de leurs familles, soit être au centre-ville, de sorte que l'hôpital pour anciens combattants ne desservait pas un grand nombre d'anciens combattants. L'hôpital avait un service de soins actifs et aussi un merveilleux programme de soins de jour pour adultes pour les anciens combattants qui étaient prêts à y participer, mais ce ne sont pas tous les anciens combattants qui étaient intéressés.
N'oubliez pas qu'il n'y avait pas d'assurance-maladie ni d'assurance hospitalisation lorsque ces hôpitaux ont été construits. Il faut tenir compte de ce qui existait à l'époque. Les anciens combattants étaient privilégiés car ils pouvaient obtenir des services qui n'étaient pas offerts à qui que ce soit d'autre. Aujourd'hui, il y a des gens qui sont des anciens combattants depuis de nombreuses années mais qui n'envisageraient pas d'aller dans un tel endroit car leurs amis se trouvent ailleurs, dans une autre maison de soins à long terme. C'est donc une chose dont il faut tenir compte.
Mme Elsie Wayne: Mais il y a une longue liste d'anciens combattants qui veulent y aller, car on a maintenant un scénario différent. Le divertissement est là, et tous ceux qui y résident forment une famille.
Mme Evelyn Shapiro: Donc vous dites que c'est un genre de culture.
Mme Elsie Wayne: C'est une famille, oui.
Le président: Monsieur Bailey, vous avez la parole pour cinq minutes.
M. Roy Bailey: Ma collègue Rose-Marie a fait allusion à quelque chose, et je voulais tout simplement faire une observation à ce sujet. De mon propre chef, j'ai visité Parkwood, à London. J'étais là avec un ami. Si j'ai bonne mémoire—reprenez-moi si je me trompe—c'est un hôpital qui a été transformé en hôpital pour anciens combattants. Mais c'est plus qu'un hôpital pour anciens combattants. Ils ont un programme que tout le monde devrait voir. Il y a de la menuiserie—il y a... C'est incroyable, et il y a trois ou quatre étages pour cela. C'est l'un des meilleurs établissements.
Et nous ne l'avons pas vu, au fait, chers collègues. Nous devrions nous y rendre un de ces jours.
Quoi qu'il en soit, Madame Shapiro, je n'ai pas trouvé un ancien combattant ou une ancienne combattante—puisqu'il y a également des femmes—qui tienne vraiment à être avec d'autres anciens combattants, pourvu qu'il ou elle soit avec des amis ou des personnes de son âge. C'est ce que j'ai constaté lorsque j'ai demandé à de nombreuses personnes à London si elles préféreraient être à part, c'est-à-dire tous les anciens combattants étant ensemble dans un même service. Ils ont répondu non, qu'ils avaient leurs amis, qu'ils vivaient ensemble et qu'ils avaient toutes sortes d'activités, que ce soit du tissage, de la menuiserie ou de la peinture. C'était une expérience merveilleuse. À mon avis, c'est la formule à préconiser pour la prochaine décennie où nous n'aurons pas suffisamment d'anciens combattants. Leur âge moyen est actuellement de 82 ans, environ. Est-ce que quelqu'un connaît leur âge moyen?
º (1620)
Mme Evelyn Shapiro: C'est environ ça.
M. Roy Bailey: Il y aura donc moins d'anciens combattants. Par conséquent, si nous voulons préserver toutes les installations, il faudra combiner les services, comme on l'a fait à l'hôpital Parkwood, à London. C'est magnifique.
Il faudra y songer, monsieur le président, alors que nous terminons nos visites.
Mme Evelyn Shapiro: Je suis presque convaincue de l'avoir visité. C'est un grand bâtiment, où sont offerts toutes sortes de programmes de physiothérapie d'ergothérapie. On y offre même des soins de jour pour les personnes qui viennent de l'extérieur. Ce n'est pas réservé aux anciens combattants.
M. Roy Bailey: Je pense que c'est ainsi que les choses se passeront à l'avenir.
Mme Evelyn Shapiro: Il y a une chose qui m'a déplu. Ce sont les corridors que j'ai trouvés trop sombres. C'est le souvenir que j'en garde.
M. Roy Bailey: Je voulais simplement faire cette observation parce ce que c'est ce à quoi il va falloir songer à l'avenir.
Mme Evelyn Shapiro: Nous parlons des programmes, pas des bâtiments.
M. Roy Bailey: Oui, effectivement.
C'est tout pour moi, monsieur le président.
Le président: Monsieur Grose, vous avez cinq minutes.
M. Ivan Grose (Oshawa, Lib.): Votre commentaire sur le vieillissement de la population m'a intéressé. Dans ma circonscription, il y a trois hospices pour personnes âgées et je me suis dit que ce serait peut-être une bonne idée de dresser une liste, tous les mois, des personnes de plus de 75 ans. Évidemment, on aurait des sous-groupes, à savoir les octogénaires, nonagénaires et centenaires, conformément à la distinction faite par la Reine et la gouverneure générale, entre autres. C'était une bonne idée et maintenant, je reçois des piles de lettres toutes les semaines que je dois signer. Aujourd'hui, il n'est plus rare d'avoir cent ans. À un moment, je me suis même demandé si tous les centenaires ne s'étaient pas établis à Oshawa. Apparemment, ils habitent tous à Oshawa.
Dans une des lettres que j'ai reçue récemment, il était question d'un quatrième anniversaire de mariage. J'ai dit qu'on ne s'occupait pas de ce genre de choses, mais mon assistante perspicace m'a fait remarquer qu'on s'en préoccupait lorsque les personnes en question avaient plus de 85 ans. Il y avait deux couples de plus de 85 ans qui étaient mariés depuis quatre ans.
Il y a une question qui m'a frappé. Si une personne âgée, qu'elle soit ancien combattant ou pas, tombe et se casse une jambe, par exemple, puis se rétablit à l'hôpital qui dispense des soins actifs, elle peut ainsi en théorie quitter ces soins actifs, car elle n'en a plus besoin,mais elle ne peut pas aller ailleurs par manque de lits de convalescence dans les hôpitaux. Les lits pour personnes âgées sont rares—il est possible que vous en ayez au Manitoba, mais ça n'est certainement pas le cas dans le sud de l'Ontario—et, par conséquent, cette personne occupera un lit aux soins actifs. Je dirais qu'il s'agit de mauvaise gestion. Je soulève ce problème chaque fois que nous discutons des soins de santé. Un lit aux soins actifs coûte cher. Un lit pour personne convalescente ou dans un hospice est bien moins coûteux.
Soit dit en passant, Elsie, vous n'auriez pas été très impressionnée par l'hôpital des anciens combattants à Toronto, avant qu'on ne se mette à utiliser Sunnybrook. Je l'ai connu dans ma jeunesse, il y a très longtemps, avant la Seconde Guerre mondiale. Mon oncle et mon grand-oncle y étaient tous les deux, et c'était un endroit épouvantable à l'époque. Je pense qu'on l'a rasé depuis. On y a construit des condominiums à la place, entreprise très rentable.
Je pense que c'est préférable pour les anciens combattants qu' ils soient en compagnie de gens qui n'en sont pas. Autrement, si vous mettez des anciens combattants de plus de 85 ans dans une chambre, ils ne parleront que de guerre, etc. Je ne pense pas que ce soit une bonne idée à long terme. Qu'en pensez-vous?
Mme Evelyn Shapiro: Ça dépend beaucoup de l'endroit où on a vécu et des gens qu'on a fréquentés. Dans le cas d'un ancien combattant qui, par exemple, a toujours des liens étroits avec la Légion parce que c'est là où se trouvent ses amis et c'est là où il aime aller prendre une bière le samedi soir, et c'est ce qu'il a fait pendant des années, eh bien du fait qu'il est membre actif de la Légion, ses amis sont des anciens combattants. Il voudra donc se retrouver dans la même résidence pour personnes âgées qu'eux. Au Nouveau-Brunswick, par exemple, dans certaines petites localités maritimes, il se peut que la Légion ait été le centre de toutes les activités lorsqu'ils étaient plus jeunes tout comme maintenant, alors qu'ils sont plus âgés. En un sens, alors, ce sont là leurs amis et c'est dans ces endroits qu'ils veulent vivre.
Dans les grandes villes, on est plus anonyme. Ce qui arrive,c'est qu'on devient amis avec bien d'autres personnes. On ne va pas nécessairement seulement à la Légion, ou on ne fréquente tout simplement pas la Légion. On se fait des amis selon sa propre classe sociale, et on a tout un réseau social différent. Pour ces gens, le fait d'être dans un hôpital pour anciens combattants n'a pas particulièrement d'avantages à moins que l'hôpital n'offre des programmes qui sont particulièrement bons. Par exemple, Deer Lodge avait un programme pour adultes, particulièrement pour les gens qui vivaient à l'extérieur et qui venaient participer aux programmes de soins de jour pour adultes. Les gens venaient d'un peu partout pour participer à ces programmes, non pas parce que c'était un hôpital pour anciens combattants, mais parce que c'était un excellent programme. Je pense que les gens voulaient y venir et c'est ce qu'ils faisaient.
Naturellement, j'ai peut-être la mauvaise attitude, mais j'estime qu'il faut avoir d'excellents programmes lesquels sont utiles non seulement aux anciens combattants mais aussi aux autres personnes âgées. Il ne devrait pas y avoir de mauvais endroits ou de mauvais programmes.
º (1625)
Le président: Il vous reste encore une minute environ.
M. Ivan Grose: Je viens d'une ville assez grande qui a, je pense, la deuxième plus grande Légion au Canada. En fait, la Légion a construit des logements pour personnes âgées juste derrière son propre édifice, et cela a eu pas mal de succès.
Mme Evelyn Shapiro: Oui, ils ont fait cela à de nombreux endroits.
M. Ivan Grose: N'ayant pas été hospitalisé depuis très longtemps—je déteste les hôpitaux—je me demandais quel serait le meilleur endroit pour un ancien combattant. À Sunnybrook, à Toronto, ils ont une aile pour anciens combattants, qui est pratiquement distincte du reste de l'hôpital.
Mme Evelyn Shapiro: Elle est presque entièrement distincte.
Mais je suis inquiète. Il y a une chose que vous avez dite et que tout le monde doit bien savoir. S'il y a une chose qui est claire dans mon esprit, c'est que, lorsque vous avez affaire à une population âgée, vous devez avoir les ressources voulues pour la réadaptation. Cela ne s'applique pas seulement aux soins post-hospitaliers. Par exemple, il est vrai que si vous vous êtes cassé la hanche, vous aurez besoin de soins de réadaptation.
Mais le fait est qu'à Deer Lodge, il y a une chose que j'ai apprise, et c'est que les gens—en l'occurrence les anciens combattants—qui vieillissent se rouillent aussi. Ils ne se déplacent plus autant parce qu'ils ont une jambe qui ne répond plus tout à fait. Mais le fait est qu'ils peuvent apprendre comment mieux utiliser leurs autres membres, mais personne ne leur montre comment faire.
On ne prévoit rien non plus de ce côté dans les provinces. Nous avons des lits qui sont réservés à un usage particulier. L'Ontario a toute une série de lits voués à la réadaptation. On les trouve dans les hôpitaux pour soins chroniques, il y a des ailes réservées à la réadaptation et ainsi de suite. Ce n'est pas qu'on ne dispose pas des lits voulus, le problème, c'est que lorsqu'on a une population âgée, ce dont on a vraiment besoin, ce sont des programmes qui vous permettent de faire de l'ergothérapie ou de la physiothérapie tous les jours pendant une heure parce que les gens ne peuvent pas en faire plus à cet âge. Ce qu'il faut, ce sont des unités de réadaptation à plus long terme qui sont en fait des unités de réadaptation gériatrique. Elles sont très difficiles à trouver, et dans un sens, le plus important, c'est de remettre ces gens sur pied.
Le président: Madame Wayne.
Mme Elsie Wayne: Je n'ai qu'une question, madame Shapiro. Vous avez parlé plus tôt des conjointes. J'ai reçu un très grand nombre de lettres concernant les conjointes. Chose certaine, comme vous le savez, elles reçoivent en effet de l'aide pendant une année, mais ensuite plus rien.
Je ne comprends pas comment on peut s'imaginer que ces conjointes vont pouvoir continuer. Ces femmes sont aussi vieilles que leurs maris. Elles ont dans les 80 ans, certaines dans les 90 ans, et on leur dit qu'on va les aider pendant une année, après quoi on ne les aide plus du tout.
Mme Evelyn Shapiro: Et pas seulement cela, parfois cela veut dire que si elles sont 85 ou 90 ans, elles sont en vie en partie parce que leur mari a reçu une aide directe.
Mme Elsie Wayne: C'est tout à fait vrai.
Mme Evelyn Shapiro: En fait, elles ne peuvent même plus continuer de vivre chez elles parce qu'elles ne peuvent plus s'occuper de leurs maris, et elles n'ont pas d'argent pour cela non plus.
Il me semble qu'il devrait y avoir quelques mesures raisonnables... Cela ne fait aucun doute, tant pour les aider un peu elles-mêmes, mais aussi pour ce qui est des choses ordinaires qu'on donne aux anciens combattants quand l'épouse est encore là.
J'ai mentionné cela au début de mon témoignage. Je le crois très sincèrement.
Mme Elsie Wayne: Moi aussi, je crois que la plupart d'entre nous ici présents le croient aussi, madame.
Le président: J'ai quelques questions, madame Shapiro.
Au début de votre témoignage, vous avez fait état de certaines inquiétudes que vous avez, surtout en ce qui concerne le ministère des Anciens combattants. Je crois que vous avez dit qu'il y a un tas de secteurs qui se font concurrence. Pouvez-vous nous en parler plus longuement? Je me demande si on ne pourrait pas mieux cerner le problème pour que nous puissions peut-être faire des recommandations visant à regrouper certains services pour qu'on en finisse avec ces facteurs désincitatifs.
º (1630)
Mme Evelyn Shapiro: Je peux songer à un projet pilote qui vraiment a fait ses preuves. Aux anciens combattants admissibles à cause de leur situation financière, on a offert la possibilité d'éviter d'aller dans des centres d'hébergement même s'ils nécessitaient beaucoup de soins. On leur a offert la possibilité de bénéficier du programme pour l'autonomie des anciens combattants, le PAAC. Il ne s'agissait que d'un projet pilote pour voir quels en seraient les résultats et cela a permis de couper du tiers ou de la moitié la liste de ceux qui attendaient une place dans des centres d'hébergement.
Voici où je veux en venir : les soins prodigués aux anciens combattants qui ne sont pas admissibles au PAAC, parce qu'ils appartiennent à une catégorie différente d'anciens combattants, coûtent plus chers inutilement. D'une certaine façon, on fait fausse route. Les centres d'hébergement ne sont pas particulièrement bénéfiques pour les anciens combattants et en outre, ils ne sont pas très intéressants sur le plan financier.
Le président: Cet après-midi, nous avons parlé essentiellement des anciens combattants qui vivent dans des grands centres urbains. Qu'en est-il des soins à domicile? Vous avez déclaré que ce programme'était pas doté de fonds suffisants, qu'il était sous-estimé et qu'on le poussait à la limite. Si vous le pouvez, décrivez-nous la situation d'un ancien combattant qui vit dans une région rurale, qui est isolé et qui nécessite des soins à domicile pour pouvoir rester chez lui? Connaissez-vous cette situation?
Mme Evelyn Shapiro: On a fait deux études qui ne cessent de répéter la même chose. J'entends cela constamment. La première a été faite par Peter Coyt, en Ontario. Il a découvert qu'il n'y avait pas nécessairement d'opposition entre un milieu urbain et un milieu rural, mais que dans certaines régions de l'Ontario, il semble que plus de gens ont un meilleur accès et de meilleurs services que dans d'autres régions. Il ne sait comment l'expliquer. Il donne des chiffres. Il faut bien dire cependant que ce n'est pas uniquement l'opposition rurale-urbaine.
En Alberta, on a fait une étude qui démontre que la population rurale n'a pas un aussi bon accès à quantité de services offerts dans les régions urbaines. Au Manitoba, nous venons de terminer une étude pour voir combien de gens sont admissibles à des soins à domicile et combien en reçoivent effectivement, et nous avons constaté que l'accès à l'échelle de la province était presque identique. Peu importe le milieu, rural ou urbain, le même pourcentage de gens bénéficiaient du programme de soins à domicile.
Ainsi, j'en conclus que cela varie selon la province. Il est difficile de vous donner une réponse ferme. Les gens qui vivent en milieu rural se sentent mal servis. C'est toujours le cas. C'est comme nous, qui vivons dans l'ouest, nous envions toujours le triangle d'or, Toronto-Montréal-Ottawa, n'est-ce pas? Nous avons ces sentiments très négatifs contre... Je suis de Montréal mais j'ai découvert que j'étais devenue une citoyenne de l'ouest quand j'ai commencé à détester le triangle d'or. Je pense que la même mentalité vaut pour l'opposition, rurale-urbaine. Les gens qui vivent en milieu rural ont toujours l'impression d'être lésés et ce, parce qu'il existe une plus grande variété de services dans les régions urbaines qui offrent, par conséquent, plus de choix. Toutefois, cela ne signifie pas que si l'on habite dans une région rurale on n'obtient pas une valeur équivalente au niveau des services. Donc, je ne le sais pas, mais je vous ai cité trois études dont je connais l'existence et auxquelles vous pourrez vous référer.
Le président: Pensez-vous que le nombre d'anciens combattants au Canada qui nécessiteront des soins à temps plein va atteindre un maximum d'ici 5, 10 ou 15 ans? Quand éventuellement?
Mme Evelyn Shapiro: Tout d'abord, il est très important de définir clairement ce que nous entendons par soins infirmiers parce que les gens qui souffrent de démence n'ont pas nécessairement besoin de soins infirmiers importants, ils ont besoin de beaucoup de surveillance. Pour cela, il n'est pas nécessaire de faire appel à une infirmière mais à quelqu'un qui surveillera la personne, qui sera vigilant et s'assurera qu'elle est en sécurité.
Vous parlez de soins, donc utilisons l'expression générale de « soins ». Les chiffres semblent indiquer que plus vous êtes vieux, plus vite vous mourez. Est-ce que vous comprenez ce que je veux dire? Les gens sur le point de mourir meurent plus vite. Si vous êtes en bonne santé jusqu'à l'âge de 101 ans, par exemple, une fois que votre santé se détériore vous mourez très vite.
Par contre, on constate que parmi les personnes vieillissantes, il y en a beaucoup plus qui ont un plus grand nombre de maladies chroniques. Certaines de ces maladies ont un effet débilitant. Certaines rendent les personnes dysfonctionnelles. Certaines causent la démence. Ces personnes ne sont pas vraiment fonctionnelles. Donc, si vous êtes en bonne santé jusqu'à ce que vous soyez vieux, si vous tombez malade pour la suite, vous aurez la chance de mourir très vite.
Il ne fait aucun doute qu'il y aura un plus grand nombre de cas de maladies chroniques, mais cela commence à un âge avancé. C'est ce que les spécialistes appellent la morbidité comprimée. Cela signifie que vous êtes en bonne santé pendant une période de temps plus longue, de sorte que lorsque vous commencez vraiment à avoir des problèmes de santé par la suite, la période qui précède votre décès est comprimée. C'est la théorie la plus récente qui a été avancée.
º (1635)
Le président: Quels sont les besoins que vous envisagez pour la future génération d'anciens combattants? Nous devons aussi examiner cet aspect à cause de la guerre du Golfe, à cause de l'Afghanistan, et en raison des différentes missions de maintien de la paix auxquelles le Canada participe. Croyez-vous que le Canada est prêt à s'occuper de cette future génération d'anciens combattants?
Mme Evelyn Shapiro: Les problèmes qu'ils présenteront seront tout à fait différents parce que leur expérience aura été différente. Il ne faut pas oublier que ce n'est pas la même situation que des gens qui vont se battre pendant quatre ans et qui ont été témoins de beaucoup de morts. La première guerre mondiale a fait d'innombrables victimes. Ces soldats sont ensuite revenus mais ils avaient tous partagé le même type d'expériences.
Je viens de lire leur document et j'ai également parlé au président du comité consultatif des plus jeunes anciens combattants. J'ai l'impression que leurs expériences sont différentes. Les expériences qu'ils ont eues sur le plan culturel diffèrent d'un pays à l'autre. Ces expériences semblent avoir été éprouvantes sur le plan psychologique, même davantage que sur le plan physique. J'ignore qu'elle en est la raison, mais ils auront les mêmes problèmes. Ils risquent même d'avoir un plus grand nombre de problèmes si, par exemple, ces divers troubles de stress entraînent un plus grand nombre de divorces, entre autres. Ils sont plus susceptibles de se retrouver seuls, et une fois qu'ils seront seuls, cela aggravera leur problème, sans aucun doute. Non seulement n'auront-ils personne pour s'occuper d'eux, mais pour les soutenir sur le plan émotionnel. Je suis donc très préoccupée par leur situation.
Et je constate également qu'ils ne bénéficieront pas du même genre de soutien qui leur permet de garder bon moral, c'est-à-dire le soutien de la population. Ce soutien semble être diffus. Je ne crois pas que la population du Canada soit mécontente des forces armées ou de la force navale ou autre, mais je ne crois pas qu'il y ait un enthousiasme généralisé pour ces militaires lorsqu'ils partent en mission et lorsqu'ils reviennent. Leur famille est heureuse de les accueillir à leur retour, mais les villes et les villages ne leur réservent pas un accueil enthousiaste ni n'organisent de défilé à leur retour. Je constate que ce genre d'accueil n'existe pas.
Le président: Dans bien des cas, je crois que nous faisons aussi appel aux réservistes et aux forces régulières. Dans bien des cas, lorsqu'ils reviennent ils n'ont personne à qui raconter leur histoire, tout comme vous venez de le dire.
Mme Evelyn Shapiro: Tout à fait, mais ce n'est pas tout. Ceux qui sont revenus de la Seconde Guerre mondiale—puisque ce sont mes contemporains qui sont allés se battre—ont bénéficié de toutes sortes d'initiatives spéciales. Il y avait des fonds d'études et bien d'autres mesures, et ils étaient accueillis comme des héros. Tout le monde considérait que c'était des héros.
Aujourd'hui, il n'y a plus personne qui les considère comme des héros et je crois que cela a beaucoup d'incidence sur la suite de leur vie. Leur situation me préoccupe donc beaucoup puisqu'ils ne reçoivent pas, à mon avis, ce genre de soutien. Mais je me trompe peut-être.
Le président: Non, je crois que vous avez raison.
J'aimerais vous poser une autre question. Croyez-vous que le Conseil consultatif de gérontologie fonctionne? Je sais qu'il a connu certains ratés il y a quelques années, mais il semble être revenu sur la bonne voie. Que pensez-vous du Conseil?
Mme Evelyn Shapiro: Je vais vous le dire.
Au début, le Conseil n'était pas très sûr de son rôle. Mais par la suite, la seule difficulté qu'il a connue... après environ la troisième réunion, nous nous sommes vraiment organisés ou c'est peut-être le ministère des Affaires des anciens combattants qui s'est organisé, parce qu'ils n'étaient pas vraiment sûrs de leur rôle. Ils considéraient que ce pourrait être une bonne idée, mais ils n'étaient pas vraiment sûrs du rôle à confier au Conseil.
Après la troisième réunion, les choses se sont bien passées. Il y a eu une période au cours de laquelle certaines organisations d'anciens combattants étaient furieuses que le gouvernement refuse de collaborer avec le Conseil consultatif, et elles ont refusé de participer aux réunions et les ont boycottées. Mais je crois que maintenant la situation a été réglée.
Les deux ou trois derniers projets pilotes mis sur pied par les anciens combattants témoignent du travail du Conseil consultatif. Les changements apportés sont vraiment attribuables au travail du Conseil consultatif de gérontologie, et je considère que nous avons vraiment apporté une contribution. Je crois que nous avons amélioré les choses. Bien entendu, si nous n'avions pas bénéficié d'un groupe qui nous a accueillis et qui était réceptif...
Je crois qu'ils nous considèrent remarquables parce que non seulement nous les incitons à agir, mais aussi parce qu'ils obtiennent l'aide de certains de leurs collègues et parce que nous leur conseillons certaines mesures qu'ils devraient vraiment prendre. Ils peuvent alors dire que le Conseil consultatif considérait qu'il s'agissait d'une bonne idée et je crois que cela leur procure un certain appui. Donc je crois que le Conseil a vraiment fait du bon travail.
Je dois toutefois vous dire que je viens de lire la publication du ministère des Affaires des anciens combattants intitulée Salut, et j'y ai lu un article qui m'a légèrement préoccupée car je crois que parfois on peut aller trop loin. Je constate qu'il existe un nouveau programme de télésanté—et je ne sais pas si vous en avez pris connaissance. Même si j'ai le coeur tendre, je ne crois pas qu'il faille dépenser de l'argent à moins que ce soit une très bonne idée. Dans la publication Salut, on indique que le programme de télésanté permettra de prendre la pression sanguine par téléphone, de sorte que l'ancien combattant aura chez lui l'équipement nécessaire. Je crois que les anciens combattants vont adorer ce programme parce qu'il leur donne accès à de l'équipement, que les gens leur prêtent attention et qu'ils peuvent téléphoner directement à une infirmière.
J'ai fait un examen de cinq projets pilotes de télésanté. Leur objectif était de réduire le recours aux hôpitaux et aux foyers pour personnes âgées mais surtout aux soins hospitaliers et aux salles d'urgence. Mais cela ne les a absolument pas aidés. L'idée était bonne, tout le monde était enthousiasmé, autant ceux qui offraient ce programme que ceux qui en bénéficiaient, mais je ne crois pas que cela ait vraiment donné des résultats.
J'étais supposée faire une synthèse de toutes les expériences qui s'étaient déroulées au niveau des soins à domicile, financées par le gouvernement fédéral et aucune de ces expériences ne s'est avérée efficace. Et ce n'est pas parce que j'ai dit qu'elles n'étaient pas efficaces. Ces expériences ont permis de constater que cela n'avait modifié en rien le recours aux hôpitaux ou aux salles d'urgence.
Si on veut lancer un projet pilote pour déterminer s'il est efficace... dans la publication Salut, on indique qu'il s'agit d'une méthode qui est censée être sûre, fiable et efficace. J'ignore ce que l'on entend par «efficace». Efficace par comparaison à quoi?
º (1640)
Le président: Il n'y a pas beaucoup de gens non plus ici qui le savent.
Mme Evelyn Shapiro: Lorsque l'on parle d'efficacité ou de rentabilité, cela comporte une comparaison entre A et B. Cela ne s'appuie sur aucune structure théorique. Bien entendu, je ne veux pas dire qu'il peut s'agir d'un programme qui n'est ni sûr ni fiable, parce qu'il y aura quelqu'un en amont et en aval. Mais je ne suis pas sûre des résultats qui en découleront. J'attendrai peut-être la prochaine réunion—qui je crois aura lieu en juin—pour indiquer que nous devrions peut-être établir des objectifs et déterminer s'ils sont atteints. Mais cela me préoccupe un peu.
Le président: Y a-t-il d'autres questions pour Mme Shapiro?
M. Ivan Grose: Oui, monsieur le président.
Si vous me le permettez. Je suis ici depuis pratiquement dix ans et je crois que vous êtes le premier témoin qui dit ne pas aimer dépenser de l'argent.
Mme Evelyn Shapiro: Oh, j'adore dépenser de l'argent à bon escient. Je crois que c'est le cas lorsque l'on parle de qualité. C'est un aspect qui me préoccupe beaucoup. J'ai fait des études, d'autres personnes sont en train de faire des études, et il y a de nombreuses études américaines—je crois que je suis la seule à avoir fait une étude canadienne—qui comparent la qualité des soins dans des foyers pour personnes âgées à but lucratif et à but non lucratif, par exemple. C'est un facteur qui a une grande influence. Il a une grande influence aux États-Unis. Il a certainement une grande influence au Manitoba. En Colombie-Britannique, on cherche maintenant à obtenir des fonds pour faire une étude similaire.
À mon avis, la qualité est d'une importance primordiale. Qu'il s'agisse d'une organisation à but non lucratif ou non, l'important est d'assurer un service d'une grande qualité. Je considère que les anciens combattants et en fait tout le monde devraient recevoir des services de qualité. Selon moi, il vaut la peine de payer pour la qualité, et pas n'importe laquelle.
M. Ivan Grose: Il y a un aspect qui me paraît assez bizarre. Lorsqu'un ancien combattant meurt, disons qu'il avait 90 ans et que sa femme avait peut-être 85 ans et qu'elle s'était occupée de lui d'une façon ou d'une autre pendant 30 ans. Lorsqu'il meurt, nous devrions lui offrir une pension parce qu'elle a travaillé pour rien pendant 30 ans. S'il bénéficiait du Programme pour l'autonomie des anciens combattants, de toute évidence c'est parce qu'elle n'était pas capable de tondre la pelouse. Je sais, j'ai entendu les arguments à propos des coûts que cela comporterait. Mais je trouve assez étrange qu'on ne les considère pas comme un couple.
Mme Evelyn Shapiro: Il faudra le faire avec les anciens combattants plus jeunes, parce que certaines femmes assument un énorme fardeau, non seulement physiquement, mais aussi émotionnellement. Il s'agit en fait d'un groupe tout à fait différent qui ne se contentera pas d'attendre. Elles décideront entre autres de partir et il n'y aura plus personne.
º (1645)
M. Ivan Grose: C'est là où je voulais en venir.
Mme Evelyn Shapiro: Il faut se rendre compte qu'il ne s'agit pas uniquement de leur verser de l'argent mais en fait de leur prêter attention. Je crois que c'est effectivement le cas. Et je ne veux pas laisser entendre qu'il ne faut pas leur verser de l'argent parce que je trouve qu'il est vraiment injuste qu'une femme doive abandonner sa maison un an après le décès de son mari et qu'ils recevaient de l'argent pour les soins du ménage. Il doit sûrement exister une meilleure solution mais j'ignore en quoi elle consiste. Mais je ne crois pas que dans tous les cas, un budget accru soit forcément la solution.
Le président: Monsieur Bailey.
M. Roy Bailey: J'ai simplement une observation à faire puisque je me suis occupé de mes parents des deux côtés. Chaque province offre différentes catégories de soins. Dans ma province, ce sont les soins du niveau I, II, III ou IV. Si je revois la situation au cours des 25 dernières années ou plus, la plus grande erreur que j'ai constatée—et pas seulement en ce qui concerne les anciens combattants mais aussi dans ma propre famille—c'est de placer quelqu'un à un niveau qui ne lui convient pas. Si vous placez un patient du niveau II dans un environnement de niveau IV vous risquez de signer son arrêt de mort. C'est une question qui me préoccupe beaucoup parce que j'ai dû intervenir à maintes reprises. Avez-vous constaté ce genre de choses?
Mme Evelyn Shapiro: Il faut que les familles interviennent. Il faut qu'il y ait des gens qui s'intéressent suffisamment à leur situation—la famille, les amis et ainsi de suite—et qui doivent veiller à ce que l'on offre des services de qualité. Parfois, les règles dans les foyers pour personnes âgées sont telles que par exemple tout le monde doit souper à quatre heures de l'après-midi parce que c'est pratique pour le personnel.
Il faut que les gens soient prêts à exercer une surveillance de façon collective, parce que les familles craignent de dire quoi que ce soit de crainte que cela nuise à leurs proches qui se trouvent dans un foyer. Comme elles hésitent beaucoup à se plaindre, il faut qu'il y ait un groupe qui exerce une surveillance. C'est le rôle que les provinces sont censées jouer. Elles sont censées surveiller la situation. Les gens peuvent donc déposer des plaintes, faire appel afin que les gens sachent de quoi il retourne. Je crois que la plupart des provinces s'occupent assez bien des cas qui leur sont soumis si quelqu'un leur téléphone et leur dit qu'il y a du méli-mélo, que les gens ne sont pas au bon endroit, et qu'ils sont avec des gens avec qui ils ne devraient pas être. Mais il n'y a pas suffisamment de gens qui...
Il existait un groupe en Ontario qui s'occupait de ce genre de choses. Je ne me souviens pas de son nom. Ce groupe avait l'habitude d'aller dans des foyers pour personnes âgées et de faire du bruit s'il considérait que les soins laissaient à désirer, que les gens n'étaient pas au bon endroit, si certaines choses n'étaient pas nettes.
Le président: C'est ce que nous tâchons de faire, du moins nous l'espérons, pour les anciens combattants.
Mme Evelyn Shapiro: Précisément, et je considère que c'est vraiment important. Je crois qu'il doit y avoir quelqu'un qui surveille la qualité. Et cela ne s'applique pas uniquement aux hôpitaux pour anciens combattants. Si vous avez un endroit qui compte un assez bon nombre d'anciens combattants, si vous savez qu'ils se trouvent en majeure partie dans un tel établissement, je crois alors qu'il faut y prêter attention.
Le président: Est-ce que tout le monde est satisfait...?
Je sais que vous devez prendre l'avion sous peu. Je tiens à vous remercier de votre excellent témoignage. Vous nous avez fourni des renseignements très utiles et je crois que tous mes collègues du comité conviendront avec moi que nous avons été très heureux cet après-midi d'avoir l'occasion de faire appel à vos remarquables connaissances à propos des anciens combattants et aussi du vieillissement en général. Votre témoignage a été d'une grande utilité pour le comité cet après-midi, et nous vous en sommes très reconnaissants. Je vous remercie d'avoir comparu devant nous.
Mme Evelyn Shapiro: Je vous en prie, mais j'aimerais avoir le dernier mot.
º (1650)
Le président: Je suis habitué à ce que les femmes aient le dernier mot avec moi, donc allez-y.
Mme Evelyn Shapiro: C'est parce que quelqu'un de ce côté-ci a mentionné quelque chose dont j'ai toujours voulu parler.
Je venais tout juste de mettre sur pied le programme de soins à domicile lorsque le bureau a reçu un appel téléphonique d'un homme qui voulait voir un de nos employés. Elle est donc allée le voir. C'était un homme de 101 ans, petit et noueux qui vivait seul, faisait lui-même ses courses et s'occupait lui-même de l'entretien de sa maison. Il s'occupait de tout lui-même. Elle lui a dit, «Vous savez, je suis très heureuse de vous avoir rencontré, mais avez-vous besoin de quoi que ce soit?» Il a répondu, «Non, je n'ai besoin de rien mais voyez-vous, j'ai 101 ans. Ma fille, qui a 79 ans, avec qui j'ai toujours gardé le contact, et qui venait me rendre visite et ainsi de suite, est tombée très malade et risque de ne pas vraiment se rétablir. Nous nous parlons par téléphone, mais elle ne peut pas venir me voir. Donc, je me suis dit qu'il faudrait que quelqu'un d'autre sache que je suis ici, c'est pourquoi j'ai décidé de vous téléphoner simplement pour que vous sachiez que je suis ici».
Elle a répondu, «Aimeriez-vous alors que quelqu'un vous téléphone chaque jour ou chaque semaine simplement pour voir comment vous allez?» Il a dit, «Non, ma fille s'en occupe. Je veux simplement que quelqu'un sache que je suis ici». Elle lui a alors répondu, «Très bien, vous aimeriez sans doute savoir aussi que je suis là. Je vais vous laisser ma carte, et si vous avez besoin de quelque chose, vous n'avez qu'à me téléphoner». Il a dit, «C'est exactement ce que je voulais,» et il était tout content.
Donc quand on parle des gens, il est tout simplement stupéfiant de constater le nombre de plus en plus grand de centenaires. C'est tout simplement incroyable. Tous les deux jours, il y a quelqu'un qui célèbre ses 100 ans.
Le président: Merci encore.
Mme Evelyn Shapiro: Tout le plaisir a été pour moi.
Le président: La séance est levée.