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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 059

TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 13 février 2003




1005
V     Privilège
V         Le Comité permanent des comptes publics
V         M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD)
V         Le Président

1010
V         Le comité spécial sur la consommation non médicale de drogues ou médicaments--Décision de la présidence
V         Le Président

1015
V         Le registre des armes à feu — Décision de la précidence
V         Le Président

1020

1025
V     Recours au Règlement
V         Les déclarations de ministres
V         M. John Cummins (Delta—South Richmond, Alliance canadienne)
V LA SANCTION ROYALE
V         Le Président
V AFFAIRES COURANTES
V     Réponse du gouvernement à des pétitions
V         M. Rodger Cuzner (secrétaire parlementaire du premier ministre, Lib.)
V     Délégations interparlementaires
V         M. John Williams (St. Albert, Alliance canadienne)
V     Déclaration canadienne des droits
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V         Le Président
V     Loi sur la modernisation de certains régimes d'avantages et d'obligations
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     Loi sur la médaille canadienne du maintien de la paix
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     Loi sur les normes nationales d'alphabétisation
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     Le Régime de pensions du Canada
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     Loi sur les modes substitutifs de règlement des différends
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     La Loi sur le divorce
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     La Loi sur la vérification interne des ministères
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     La Loi sur les normes environnementales nationales
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     La Loi visant les droits de l'enfant
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     La Loi de l'impôt sur le revenu
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     La Loi de l'impôt sur le revenu
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     Le Code criminel
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     La Loi de l'impôt sur le revenu
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     La Loi sur la conférence nationale sur le revenu annuel garanti
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     La Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     La Déclaration canadienne des droits
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     La Loi sur les normes d'éducation
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     La Déclaration canadienne des droits
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     Loi sur l'ombudsman du pétrole et du gaz
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     Loi sur l'utilisation d'un régulateur de vitesse maximale
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     La Loi sur la concurrence
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     La Loi sur les Archives nationales du Canada
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     Loi relative à l'information sur le crédit à la consommation
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     Le Code criminel
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     Loi interdisant les budgets déficitaires
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     Loi sur la définition d'un enfant
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     Loi sur la protection des renseignements personnels (numéros d'assurance sociale)
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     Loi canadienne sur les ceintures de sécurité
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     Loi de l'impôt sur le revenu
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     La Loi sur le registre des instruments médicaux
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     La Loi sur la Force nationale de protection civile
V         M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)
V         Adoption des motions; ,première lecture et impression du projet de loi
V     La Loi sur le mariage (degrés prohibés)
V         M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi

1030
V     Le Code criminel
V         M. Deepak Obhrai (Calgary-Est, Alliance canadienne)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     La Loi sur les banques
V         L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     Pétitions
V         La pornographie juvénile
V         M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Alliance canadienne)
V         Le projet de loi C-250
V         M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne)
V         La recherche sur les cellules souches
V         M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne)
V         La pornographie juvénile
V         M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne)
V         Les pêches
V         M. John Cummins (Delta—South Richmond, Alliance canadienne)
V         La pornographie juvénile
V         M. John Cummins (Delta—South Richmond, Alliance canadienne)
V         La Garde côtière
V         M. John Cummins (Delta—South Richmond, Alliance canadienne)

1035
V         Les personnes handicapées
V         Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Neigette-et-la Mitis, BQ)
V         L'agriculture
V         M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Alliance canadienne)
V         La pornographie juvénile
V         M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Alliance canadienne)
V         Postes Canada
V         M. Gurbax Malhi (Bramalea—Gore—Malton—Springdale, Lib.)
V         La pornographie juvénile
V         M. Larry Spencer (Regina—Lumsden—Lake Centre, Alliance canadienne)
V     Questions au Feuilleton
V         M. Rodger Cuzner (secrétaire parlementaire du premier ministre, Lib.)
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V INITIATIVES MINISTÉRIELLES
V     Les crédits
V         Jour désigné--La carte d'identité nationale
V         Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD)

1040

1045
V         M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Alliance canadienne)
V         Mme Libby Davies

1050
V         M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Alliance canadienne)
V         Mme Libby Davies
V         M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD)
V         Mme Libby Davies

1055
V         M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD)

1100

1105
V         M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ)
V         M. Bill Blaikie
V         M. Yvon Charbonneau (Anjou—Rivière-des-Prairies, Lib.)
V         M. Bill Blaikie
V         M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Alliance canadienne)

1110
V         M. Bill Blaikie
V         L'hon. Denis Coderre (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.)

1115

1120

1125
V         M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne)

1130
V         L'hon. Denis Coderre
V         M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne)
V         L'hon. Denis Coderre

1135
V         M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ)
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V         L'hon. Denis Coderre
V         M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Alliance canadienne)

1140

1145

1150

1155
V         M. Sarkis Assadourian (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.)

1200
V         M. Grant McNally
V         Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD)

1205
V         M. Grant McNally
V         M. Reg Alcock (Winnipeg-Sud, Lib.)
V         M. Grant McNally

1210
V         M. Bob Mills
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V         M. Antoine Dubé (Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, BQ)

1215

1220
V         M. Reg Alcock (Winnipeg-Sud, Lib.)
V         M. Antoine Dubé
V         M. Sarkis Assadourian (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.)

1225
V         M. Antoine Dubé
V     Les travaux de la Chambre
V         M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Alliance canadienne)
V         Le vice-président
V         Adoption de la motion
V     Les crédits
V         Jour désigné--Introduction d'une carte d'identité nationale
V         Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ)

1230

1235
V         M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.)

1240
V         Mme Francine Lalonde
V         M. Reg Alcock (Winnipeg-Sud, Lib.)
V         Mme Francine Lalonde
V         M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC)

1245
V         M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.)

1250
V         M. Bill Casey
V         M. Greg Thompson (Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, PC)
V         M. Bill Casey
V         M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC)

1255

1300
V         M. Reg Alcock (Winnipeg-Sud, Lib.)
V         M. Loyola Hearn

1305
V         M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.)
V         M. Loyola Hearn
V         M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD)

1310

1315
V         M. Sarkis Assadourian (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.)
V         M. Joe Comartin

1320
V         M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Alliance canadienne)
V         M. Sarkis Assadourian
V         M. Joe Comartin
V         M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD)

1325

1330
V         M. Reg Alcock (Winnipeg-Sud, Lib.)
V         M. Pat Martin
V         Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD)

1335
V         M. Pat Martin
V         M. Sarkis Assadourian (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.)
V         M. Pat Martin
V         M. Reg Alcock (Winnipeg-Sud, Lib.)

1340

1345
V         M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Alliance canadienne)

1350
V         M. Reg Alcock
V         Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD)
V         M. Reg Alcock

1355
V         Le vice-président
V         Mme Alexa McDonough
V         M. Reg Alcock
V         Le vice-président
V Déclarations de députés
V     Le Festival du voyageur
V         M. Raymond Simard (Saint-Boniface, Lib.)

1400
V     Le Bal de Neige
V         M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne)
V     La prévention du suicide
V         M. Gérard Binet (Frontenac—Mégantic, Lib.)
V     François Joseph
V         M. Marcel Proulx (Hull—Aylmer, Lib.)
V     Le curling
V         M. John O'Reilly (Haliburton—Victoria—Brock, Lib.)
V     Le registre des délinquants sexuels
V         M. Gary Lunn (Saanich—Gulf Islands, Alliance canadienne)

1405
V     Les Jeux d'hiver du Labrador
V         M. Lawrence O'Brien (Labrador, Lib.)
V     L'énergie renouvelable
V         M. Julian Reed (Halton, Lib.)
V     Le golf sur glace
V         Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Neigette-et-la Mitis, BQ)
V     Le député de LaSalle--Émard
V         Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Alliance canadienne)
V     Le drapeau canadien
V         Mme Yolande Thibeault (Saint-Lambert, Lib.)

1410
V     La délimitation des circonscriptions électorales fédérales
V         M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD)
V     L'Irak
V         M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ)
V     L'école publique de Churchill Heights
V         M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.)
V     Les anciens combattants
V         Mme Elsie Wayne (Saint John, PC)
V     Les personnes handicapées
V         M. Gurbax Malhi (Bramalea—Gore—Malton—Springdale, Lib.)

1415
V     Le drapeau canadien
V         M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster, Alliance canadienne)
V QUESTIONS ORALES
V     L'Irak
V         M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne)
V         L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.)
V         M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne)
V         L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.)
V         M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne)
V         L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.)
V     Le terrorisme
V         M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne)

1420
V         L'hon. Wayne Easter (solliciteur général du Canada, Lib.)
V         Le Président
V         M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne)
V         L'hon. Wayne Easter (solliciteur général du Canada, Lib.)
V     L'Irak
V         M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ)
V         L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.)
V         M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ)
V         L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.)

1425
V         Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ)
V         L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.)
V         Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ)
V         L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.)
V     La fiscalité
V         M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD)
V         L'hon. Elinor Caplan (ministre du Revenu national, Lib.)
V         M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD)
V         L'hon. Elinor Caplan (ministre du Revenu national, Lib.)
V     Le terrorisme
V         Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC)
V         L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.)

1430
V         Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC)
V         L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.)
V     Le registre des armes à feu
V         M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Alliance canadienne)
V         L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.)
V         M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Alliance canadienne)
V         L'hon. Martin Cauchon (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.)
V     L'Irak
V         M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ)
V         L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.)
V         M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ)
V         L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.)

1435
V     L'assurance-emploi
V         M. Charlie Penson (Peace River, Alliance canadienne)
V         M. Bryon Wilfert (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.)
V         M. Charlie Penson (Peace River, Alliance canadienne)
V         M. Bryon Wilfert (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.)
V     L'Irak
V         M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ)
V         L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.)
V         M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ)
V         L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.)
V     La sécurité aérienne
V         M. James Moore (Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam, Alliance canadienne)
V         M. Bryon Wilfert (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.)

1440
V         M. James Moore (Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam, Alliance canadienne)
V         M. Bryon Wilfert (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.)
V     La stratégie de réglementation intelligente
V         M. Peter Adams (Peterborough, Lib.)
V         L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.)
V     La fiscalité
V         M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD)
V         L'hon. Elinor Caplan (ministre du Revenu national, Lib.)
V     L'environnement
V         M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD)
V         L'hon. Herb Dhaliwal (ministre des Ressources naturelles, Lib.)

1445
V     La sécurité nationale
V         M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC)
V         L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.)
V         M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC)
V         L'hon. David Collenette (Don Valley-Est, Lib.)
V     Les prix de l'essence
V         Mme Carol Skelton (Saskatoon—Rosetown—Biggar, Alliance canadienne)
V         M. Bryon Wilfert (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.)
V         Mme Carol Skelton (Saskatoon—Rosetown—Biggar, Alliance canadienne)
V         M. Bryon Wilfert (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.)
V         M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ)
V         L'hon. Allan Rock (ministre de l'Industrie, Lib.)
V         M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ)

1450
V         L'hon. Allan Rock (ministre de l'Industrie, Lib.)
V     Les échanges commerciaux
V         M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne)
V         L'hon. Elinor Caplan (ministre du Revenu national, Lib.)
V         M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne)
V         L'hon. Elinor Caplan (ministre du Revenu national, Lib.)
V     La Journée internationale de la Francophonie
V         Mme Hélène Scherrer (Louis-Hébert, Lib.)
V         L'hon. Denis Paradis (secrétaire d'État (Amérique latine et Afrique) (Francophonie), Lib.)
V     Air India
V         M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Alliance canadienne)
V         L'hon. Wayne Easter (solliciteur général du Canada, Lib.)

1455
V     Le registre des armes à feu
V         M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne)
V         L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.)
V     La fiscalité
V         M. Gilles-A. Perron (Rivière-des-Mille-Îles, BQ)
V         L'hon. Elinor Caplan (ministre du Revenu national, Lib.)
V     Les affaires étrangères
V         M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Alliance canadienne)
V         L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.)
V         Le Président
V     Le Code canadien du travail
V         Mme Monique Guay (Laurentides, BQ)
V         L'hon. Claudette Bradshaw (ministre du Travail, Lib.)

1500
V     Les prix de l'essence
V         M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD)
V         Le Président
V         L'hon. Allan Rock (ministre de l'Industrie, Lib.)
V     La défense nationale
V         Mme Elsie Wayne (Saint John, PC)
V         L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.)
V     Les travaux de la Chambre
V         Le Président
V         M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Alliance canadienne)
V         L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.)
V         M. Bill Casey
V         Le Président

1505
V INITIATIVES MINISTÉRIELLES
V     Les crédits
V         Jour désigné--La carte d'identité nationale
V         M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Alliance canadienne)

1510

1515

1520
V         M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD)
V         M. John Reynolds
V         M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Alliance canadienne)
V         M. John Reynolds

1525
V         Mme Yolande Thibeault (Saint-Lambert, Lib.)

1530
V         Mme Hélène Scherrer (Louis-Hébert, Lib.)

1535
V         M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD)

1540
V         Mme Hélène Scherrer
V         M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD)
V         Mme Hélène Scherrer
V         M. Yvon Godin
V         Mme Hélène Scherrer
V         M. Bernard Bigras (Rosemont—Petite-Patrie, BQ)

1545

1550
V         M. Sarkis Assadourian (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.)

1555
V         M. Bernard Bigras
V         Mme Monique Guay (Laurentides, BQ)
V         M. Bernard Bigras
V         M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ)

1600

1605

1610
V         Mme Carole-Marie Allard (secrétaire parlementaire de la ministre du Patrimoine canadien, Lib.)
V         M. Paul Crête
V         M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD)

1615
V         M. Paul Crête
V         M. Bryon Wilfert (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.)

1620

1625
V         M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD)
V         M. Bryon Wilfert
V         M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Alliance canadienne)

1630
V         M. Bryon Wilfert
V         Le vice-président
V         M. Sarkis Assadourian (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.)

1635

1640
V         M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC)
V         M. Sarkis Assadourian
V         M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Alliance canadienne)
V         M. Sarkis Assadourian
V         M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD)
V         M. Sarkis Assadourian
V         M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD)

1645
V         M. Sarkis Assadourian
V         M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne)

1650

1655
V         M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD)

1700
V         M. James Rajotte
V         M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Alliance canadienne)
V         M. James Rajotte
V         M. Sarkis Assadourian (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.)

1705
V         M. James Rajotte
V         M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD)
V         M. James Rajotte
V         M. Yvon Godin
V         M. James Rajotte
V         M. Gerald Keddy (South Shore, PC)

1710

1715

1720

1725

1730
V         Le vice-président
V Initiatives parlementaires
V     Loi sur les refuges d'espèces en voie de disparition
V         M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Alliance canadienne)

1735

1740

1745
V         M. Alan Tonks (secrétaire parlementaire du ministre de l'Environnement, Lib.)

1750
V         M. Bernard Bigras (Rosemont—Petite-Patrie, BQ)

1755

1800
V         M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD)

1805

1810
V         M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC)

1815
V         M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Alliance canadienne)

1820
V         Le vice-président

1825
V MOTION D'AJOURNEMENT
V         L'environnement
V         M. Philip Mayfield (Cariboo—Chilcotin, Alliance canadienne)
V         M. Alan Tonks (secrétaire parlementaire du ministre de l'Environnement, Lib.)

1830
V         M. Philip Mayfield
V         M. Alan Tonks
V         Le bois d'oeuvre
V         Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Neigette-et-la Mitis, BQ)

1835
V         Mme Diane St-Jacques (secrétaire parlementaire de la ministre du Développement des ressources humaines, Lib.)
V         Mme Suzanne Tremblay

1840
V         Mme Diane St-Jacques
V         Le vice-président






CANADA

Débats de la Chambre des communes


VOLUME 138 
NUMÉRO 059 
2e SESSION 
37e LÉGISLATURE 

COMPTE RENDU OFFICIEL (HANSARD)

Le jeudi 13 février 2003

Présidence de l'honorable Peter Milliken

    La séance est ouverte à 10 heures.


Prière


*   *   *

  +(1005)  

[Traduction]

+Privilège

+Le Comité permanent des comptes publics

[Privilège]
+

    M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, j'invoque la question de privilège. Je suis heureux d'avoir l'occasion d'ajouter mon grain de sel au débat sur la question de privilège qui a été soulevée par le président du Comité des comptes publics, le lundi 10 février.

    À ce moment-là, on a fait des allégations selon lesquelles j'aurais porté atteinte au privilège des députés ou je me serais rendu coupable d'outrage au Parlement pour avoir divulgué des renseignements concernant l'ébauche d'un rapport qu'étudie le Comité des comptes publics, au sujet des scandales relatifs aux commandites de Groupaction.

    Je tiens à souligner que ces allégations ont plus à voir avec ma position en tant que porte-parole de l'opposition officielle qu'avec une atteinte au privilège parlementaire.

    Je voudrais faire remarquer qu'il est clair que quelqu'un a divulgué des renseignements relatifs à cette ébauche de rapport faisant l'objet d'une étude par le Comité des comptes publics parce que, le 31 janvier, le National Post a fait paraître un article assez exhaustif sur la teneur de ce rapport. Il est donc évident que quelqu'un a remis une copie de cette ébauche de rapport au National Post. Je le dis tout net, cette personne n'est pas moi.

    De plus, l'information qui a paru dans le National Post a été reprise par d'autres journaux par la suite. Je prétends qu'une fois que cette nouvelle a été imprimée dans le National Post, elle est devenue du domaine public. D'autres journaux qui faisaient partie de la même chaîne que le National Post ont commencé à utiliser cette information qui a été imprimée pour la première fois dans le National Post. Je ne croyais pas que les observations que j'avais faites au sujet de l'article paru dans le National Post violaient le privilège parlementaire.

    Je connais fort bien les règles de la Chambre des communes. Tous les jours que je siège dans cette enceinte, je suis tout à fait conscient de l'honneur que j'ai d'être ici et je ne voudrais jamais, en connaissance de cause, violer le Règlement de la Chambre des communes.

    Cela dit, je voudrais ajouter qu'un des points soulevés par le président du Comité des comptes publics dans ses critiques à mon endroit était fondé en quelque sorte, en ce sens que j'avais bien organisé pour le lundi 10 février une conférence de presse au cours de laquelle j'entendais parler de certaines des questions entourant l'affaire Groupaction. Certaines de ces questions figuraient déjà dans le National Post. Lorsque j'ai appris que la tenue d'une conférence de presse pour parler de ces sujets serait contraire à notre Règlement, j'ai annulé cette conférence de presse. Elle n'a jamais eu lieu. Je ne crois pas que quoi que ce soit que j'aie fait ou dit depuis cette journée viole d'une façon ou d'une autre le privilège parlementaire.

    Je suis heureux d'avoir cette occasion d'exprimer mon opinion et d'apporter ces éclaircissements. Je crois que la question est davantage un problème de concentration de la presse. En effet, lorsqu'un journal publie une nouvelle, les journaux de la même chaîne parlent aussi de la même nouvelle. Quelqu'un a divulgué ce rapport provisoire et, à l'instar du président du Comité des comptes publics, je crois que c'était répréhensible. Cependant, ce n'était pas moi. Sur ce, je remercie la Chambre de m'avoir accordé cette période pour m'expliquer.

+-

    Le Président: Je remercie le député de Winnipeg-Centre d'avoir clarifié les événements dont nous avons entendu longuement parler lundi. La présidence a pris la question en délibéré à ce moment-là. La question n'a pas encore été tranchée et je ferai part de ma décision à la Chambre en temps opportun.

*   *   *

  +-(1010)  

[Français]

+-Le comité spécial sur la consommation non médicale de drogues ou médicaments--Décision de la présidence

[Décision de la présidence]
+-

    Le Président: Je suis maintenant prêt à rendre ma décision sur la question de privilège soulevée par l'honorable député de Hochelaga—Maisonneuve le 12 décembre 2002 au sujet de la divulgation prématurée du rapport du Comité spécial sur la consommation non médicale de drogues ou médicaments.

    Je tiens à préciser que le retard inhabituel à rendre ma décision est lié, d'une part, à l'ajournement de la Chambre et, d'autre part, au fait que la présidence a voulu donner à tous les députés visés la possibilité d'intervenir à cet égard.

    J'aimerais remercier l'honorable député de Hochelaga—Maisonneuve d'avoir soulevé cette question, ainsi que l'honorable député de Brossard—La Prairie, l'honorable leader de l'opposition à la Chambre, l'honorable député de Langley—Abbotsford et l'honorable députée de Laval-Est pour leurs interventions.

    L'honorable député de Hochelaga—Maisonneuve soutient que les reportages publiés dans les journaux avant le dépôt du rapport final du comité spécial, le 12 décembre 2002, ont révélé prématurément des passages du rapport concernant les recommandations du Comité sur la décriminalisation de la marijuana. Il allègue que la divulgation prématurée de ces renseignements pourrait être imputable à l'honorable députée de Laval-Est et l'honorable député de Langley—Abbotsford.

    Comme l'honorable député de Hochelaga—Maisonneuve l'a mentionné avec raison, cela est contraire à nos usages et constitue une atteinte au privilège de la Chambre et des députés et, par ailleurs, les décisions rendues par les autres Présidents ont toujours fait valoir la nécessité de désigner la source de la fuite lorsqu'une accusation de ce genre est portée.

[Traduction]

    Cela est dit clairement dans La procédure et les usages de la Chambre des communes, aux pages 884 et 885:

    Des Présidents ont jugé que les questions de privilège relatives à des rapports ayant fait l’objet d’une fuite ne seraient pas prises en considération à moins qu’une accusation précise ne soit portée contre une personne, une organisation ou un groupe, cette accusation devant non seulement viser les personnes de l’extérieur de la Chambre qui ont rendu publics des documents étudiés à huis clos, mais encore désigner la source de la fuite au sein de la Chambre elle-même.

    L'honorable député de Langley—Abbotsford a admis avoir traité dans les médias de la question de la décriminalisation, mais il soutient qu’il ne l’a pas fait dans le contexte du rapport du comité spécial. Il a précisé que la décriminalisation est un sujet qui a suscité beaucoup d'attention dans le public ces derniers mois et que ses observations se rapportaient plutôt à la position du gouvernement, rendue publique par le ministre de la Justice.

[Français]

    L'honorable leader de l'opposition à la Chambre a fait valoir, en citant les pages 128 et 129 de La procédure et les usages de la Chambre des communes, que jusqu'à maintenant notre pratique a été de faire régler les questions de ce genre d'abord par le comité visé, de sorte que la Chambre ne soit saisie des cas de fuite que sur présentation d'un rapport du comité.

[Traduction]

    Je me pencherai d’abord sur ce dernier point. Bien qu’il soit vrai que les comités sont maîtres de leurs travaux et ont la responsabilité première de régler leurs propres rappels au Règlement, la situation est un peu plus complexe pour un comité spécial. Même si un comité spécial, à l’instar de tout autre comité de la Chambre, est censé régler les questions de procédure au fur et à mesure qu’elles se présentent, il lui est impossible de le faire une fois qu’il a déposé son rapport final.

    La règle est énoncée clairement dans La procédure et les usages de la Chambre des communes, à la page 812: «Les comités spéciaux cessent d’exister lorsqu’ils présentent leur rapport final.»

  +-(1015)  

[Français]

    Par conséquent, bien qu'en général il soit vrai que les comités sont responsables de leurs propres questions de procédure, le seul moyen dont dispose un comité spécial pour étudier la question dans un cas comme celui-ci est de recevoir un ordre de la Chambre qui le rétablit et l'investit du pouvoir de le faire. C'est donc par nécessité qu'il faut traiter de la question ici à la Chambre.

    J'aimerais assurer l'honorable député de Hochelaga—Maisonneuve que je prends cette question très au sérieux. En effet, la confidentialité des rapports de comité est une source de préoccupation constante, tant pour votre Président que pour la Chambre. Par conséquent, j'ai examiné avec une attention particulière tous les articles de journaux qui m'ont été remis. À leur face même, ils semblent démontrer qu'il y a eu atteinte à la confidentialité du rapport du Comité spécial sur la consommation non médicale de drogues ou médicaments. Je sais que tous les honorables députés partageront ma déception et ma frustration devant un tel constat.

[Traduction]

    Toutefois, quant aux accusations portées à l’encontre des honorables députés de Laval-Est et de Langley–Abbotsford, la situation est quelque peu différente. À l’intérêt général suscité par la question du statut de la marijuana s’ajoute un facteur qui vient compliquer la chose, soit le fait que, le 10 décembre 2002, l’honorable ministre de la Justice a fait des déclarations sur la position du gouvernement en matière de décriminalisation.

    Je fais remarquer d’autre part qu’il existe une grande similitude entre les points de vue exprimés par le ministre et ceux contenus dans le rapport du comité.

[Français]

    J'ai constaté, en examinant les reportages, que plusieurs députés ont fait des commentaires sur la décriminalisation de la marijuana. Or, aucun des commentaires cités par les médias ne constitue une divulgation directe du contenu du rapport du comité et aucun des reportages n'allègue qu'un membre du comité a fourni les renseignements qui s'y trouvent.

    Par conséquent, je ne suis pas enclin à accepter ces reportages comme preuve à première vue de la participation des honorables députés de Laval-Est et de Langley—Abbotsford à la divulgation prématurée du rapport du comité.

[Traduction]

    Toutefois, comme je l’ai déjà mentionné, il semble qu’au moins quelques passages du rapport aient été communiqués aux médias avant son dépôt en Chambre. J’exhorte donc tous les honorables députés à ne pas oublier leurs responsabilités à cet égard, tant envers leurs collègues qu’envers la Chambre.

*   *   *

+-Le registre des armes à feu — Décision de la précidence

+-

    Le Président: Je suis maintenant prêt à rendre ma décision sur la question de privilège soulevée par l'honorable député de Yorkton—Melville le 5 février 2003 au sujet des rapports qu’a déposés l'honorable ministre de la Justice le lundi 3 février 2003.

    Je tiens à remercier l'honorable député de Yorkton—Melville d’avoir soulevé cette question, ainsi que l'honorable leader du gouvernement à la Chambre et les honorables députés de Vancouver-Est, de St. John’s-Ouest et de Provencher pour leur contribution à cet égard.

    Dans son exposé, l'honorable député de Yorkton—Melville a déclaré que le ministre de la Justice avait omis de communiquer à la Chambre la version complète de l’un des deux rapports sur la gestion du registre des armes à feu qu’il a déposés. Aux dires du député, la partie qui aurait été omise contient des renseignements indispensables à l’exercice de ses fonctions de député.

    Accusant le ministre d’avoir trompé la Chambre, le député soutient qu’en omettant de communiquer des renseignements qu’il savait essentiels, le ministre n’a pas respecté l’engagement qu’il avait pris envers la Chambre le 12 décembre 2002. En conclusion, le député allègue que le ministre serait coupable d’outrage à la Chambre.

[Français]

    L'honorable leader du gouvernement à la Chambre a répondu en citant le paragraphe 32(2) du Règlement de la Chambre, qui se lit comme suit:

    Un ministre de la Couronne, ou un secrétaire parlementaire agissant au nom d'un ministre, peut, de son siège à la Chambre, déclarer qu'il se propose de déposer sur le Bureau de la Chambre, tout rapport ou autre document qui traite d'une question relevant des responsabilités administratives du gouvernement et, cela fait, le rapport ou autre document est réputé, à toutes fins, avoir été déposé à la Chambre.

[Traduction]

    Il a fait remarquer que, puisque le ministre de la Justice avait déposé les deux rapports à la Chambre le 3 février de son propre chef, il ne pouvait pas être blâmé d’avoir omis de présenter un rapport ou des renseignements différents.

  +-(1020)  

    À cet égard, l'honorable leader du gouvernement à la Chambre a tout à fait raison. Il est indiqué, à la page 359 des Journaux du 3 février 2003, que le ministre de la Justice a effectivement déposé les documents portant sur le registre des armes à feu conformément à cette disposition du Règlement.

    L'honorable leader du gouvernement à la Chambre a également fait valoir que le document supplémentaire auquel l'honorable député de Yorkton—Melville a fait allusion ne faisait pas réellement partie du rapport, mais était plutôt un document d’appui. L'honorable ministre de la Justice a fait la même affirmation, à la page 3179 des Débats, lorsqu’il a précisé que le document avait été fourni pour aider à la rédaction du rapport déposé par la suite.

    Je voudrais signaler aux honorables députés que les ministres ne sont tenus de déposer des documents que dans deux cas précis. Tout d’abord, un grand nombre de documents sont déposés en exécution d’une loi ou d’un ordre de la Chambre. Le Marleau et Montpetit précise, à la page 371, que l’un des principaux moyens dont dispose la Chambre pour obtenir des renseignements est le dépôt de rapports et d’états:

    Outre les documents administratifs que les ministres peuvent déposer à la Chambre, des lois, ordres de la Chambre, ou articles du Règlement exigent le dépôt, chaque année ou chaque session, de certains états, rapports et autres documents. Plusieurs lois précisent les conditions de dépôt; certaines obligent, par exemple, les ministres à déposer des rapports annuels des ministères, organismes et commissions qui relèvent de leur responsabilité administrative.

[Français]

    Le second cas dans lequel le dépôt d'un document est obligatoire est celui où un ministre cite un document, c'est-à-dire qu'il fait plus que simplement mentionner le document et cite directement des extraits du texte.

    Je me rapporte encore une fois à Marleau et Montpetit, à la page 518 qui indique, et je cite:

    Tout document cité par un ministre au cours d'un débat ou en réponse à une question posée pendant la Période des questions doit être déposé. En effet, un ministre n'est pas libre de lire une dépêche (message officiel sur les affaires du gouvernement) ni un autre gouvernement officiel, non plus que d'en citer des extraits, s'il n'est pas prêt à les déposer si cela peut être fait sans nuire à l'intérêt public.

[Traduction]

    Après examen des faits de l’affaire dont nous sommes saisis, il est évident qu’aucun des deux documents déposés par le ministre le lundi 3 février 2003 n’entre dans l’une ou l’autre des catégories de documents à dépôt obligatoire. Ces deux documents n’étaient pas exigés par une loi ou un ordre de la Chambre, ni n’ont été cités par le ministre. Quant aux renseignements en litige, ils figurent dans un troisième document tout à fait distinct qui donne des détails techniques sur lesquels sont fondées les recommandations contenues dans l’un des deux rapports déposés.

    Le ministre de la Justice n’était aucunement tenu de déposer ces documents. Or il a choisi, pour respecter l’engagement pris envers la Chambre le 12 décembre 2002, de déposer les deux rapports et non le document d’appui puisqu’il voulait, en conformité avec le paragraphe 32(2) du Règlement, fournir des renseignements supplémentaires aux députés sur des questions relevant de ses responsabilités administratives à titre de ministre de la Justice.

    Cela étant dit, la présidence est néanmoins préoccupée par le manque de communication qui semble s’être produit dans le cas présent. Plusieurs députés ont mentionné qu’ils n’étaient pas au courant de l’existence du document d’appui, même si l'honorable leader du gouvernement à la Chambre a affirmé que le document était accessible aux députés par divers moyens.

    On a mentionné que le communiqué de presse du ministère de la Justice donne un numéro de téléphone où les députés peuvent demander d’autres documents techniques se rapportant aux documents déposés à la Chambre. Malheureusement, bien que cela soit le cas, il demeure que la Chambre a reçu un ensemble de documents qui était moins complet que celui disponible à l’extérieur de la Chambre. La présidence tient à signaler que cette situation a été rectifiée le 12 février lorsque le ministre de la Justice a déposé le document d’appui à la Chambre.

    De toute évidence, il existe une divergence d’opinions entre les députés en ce qui concerne, d’une part, la nature des documents que l'honorable ministre de la Justice a initialement déposés à la Chambre et, d’autre part, l'étendue de l'engagement qu'il a pris en décembre lorsqu'il a accepté de fournir de plus amples renseignements sur le programme de contrôle des armes à feu. Au départ, la distribution inégale de documents à l’intérieur et à l’extérieur de la Chambre--cette dernière ayant de toute évidence reçu le jeu de documents le moins complet--n’a qu’exacerbé cette divergence d’opinions.

    Toutefois, au plan de la procédure, il demeure que le ministre n’avait au départ aucune obligation de déposer ces documents. Par conséquent, bien qu’il soit certes déplorable que la première distribution de documents ait été inégale, cela ne peut en soi être un motif suffisant pour que la présidence conclue qu’il y a matière à privilège dans le cas présent.

    Je remercie l'honorable député de Yorkton—Melville d’avoir porté cette question à l’attention de la présidence.

*   *   *

  +-(1025)  

+-Recours au Règlement

+-Les déclarations de ministres

[Recours au Règlement]
+-

    M. John Cummins (Delta—South Richmond, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement au sujet de déclarations qui ont été faites à la Chambre la semaine dernière, le 6 février.

    Il a été allégué que j'aurais été mêlé à la divulgation des notes d'une allocution d'un ministre concernant une annonce qu'il devait faire le 6 février.

    Je me suis entretenu avec le ministre et le leader du gouvernement à la Chambre et je les ai informés que ni moi ni mes collaborateurs n'étions responsables de cette fuite. Ce matin-là, mon bureau a été informé qu'il y aurait une déclaration ministérielle le lendemain, mais aucune indication n'a été donnée sur le contenu. Par contre, on a publié un avis à l'intention des journalistes disant que la déclaration porterait sur l'équipe de plongeurs.

    Quoi qu'il en soit, sans être au courant, mes collaborateurs ont communiqué avec la Garde côtière qui nous a prévenus que l'annonce porterait sur l'équipe de plongeurs, et ils ont demandé d'autres renseignements à ce sujet.

    Je n'étais pas au courant de la question, car je ne suis arrivé à Ottawa que plus tard en après-midi. Lorsqu'on m'a remis le document, dont j'ai pris connaissance, j'ai répondu aux questions d'un journaliste plus tard ce jour-là, en présumant qu'il était au courant de l'incident.

    Toutefois, je tiens à souligner de nouveau que ni moi ni mes collaborateurs n'avons rendu public des documents. Je regrette les irritations que l'incident a pu causer, et je donne au ministre de l'assurance que, à l'avenir, je serai encore plus prudent dans mes observations sur des questions comme celle-là.


+LA SANCTION ROYALE

[Sanction Royale]

*   *   *

[Traduction]

+-

    Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. J'ai l'honneur d'informer la Chambre que j'ai reçu le message suivant:

Résidence de la Gouverneure générale

Ottawa

Le 13 février 2003

Monsieur le Président,

    J'ai l'honneur de vous aviser que l'honorable John Major, juge puîné de la Cour suprême du Canada, en sa qualité de suppléant de la Gouverneure générale, a accordé la sanction royale par déclaration écrite au projet de loi mentionné à l'annexe de la présente lettre le 13 février 2003, à 8 h 50.

    Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'assurance de ma haute considération.

La secrétaire de la Gouverneure générale,

Barbara Uteck

    L'annexe dit que la sanction royale a été donnée au projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur la sécurité et la réglementation nucléaires, chapitre 1.


+-AFFAIRES COURANTES

[Affaires courantes]

*   *   *

[Traduction]

+-Réponse du gouvernement à des pétitions

+-

    M. Rodger Cuzner (secrétaire parlementaire du premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à douze pétitions.

*   *   *

+-Délégations interparlementaires

+-

    M. John Williams (St. Albert, Alliance canadienne): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 34(1) du Règlement, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le rapport de la délégation canadienne à la sixième réunion du comité exécutif du Forum interparlementaire des Amériques, qui a eu lieu, les 6 et 7 décembre 2002, à Panama, au Panama.

*   *   *

+-Déclaration canadienne des droits

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-360, Loi modifiant la Déclaration canadienne des droits (droit à l'éducation).

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

    M. Mac Harb: Monsieur le Président, serait-il possible d'avoir le consentement unanime de la Chambre pour présenter à nouveau une série de trente projets de loi, exception faite du projet de loi C-390, Loi prévoyant l'établissement et la tenue d'un registre national des instruments médicaux, et le projet de loi C-391, Loi portant création d'une Force nationale de protection civile, que je présenterai moi-même et au sujet desquels je prendrai la parole?

    Si la Chambre voulait bien donner son consentement unanime, nous n'aurions pas à passer les trente projets de loi un à un.

+-

    Le Président: D'accord?

    Des voix: D'accord.

    Le Président: La présidence pourrait-elle se dispenser de lire les titres des 30 projets de loi?

    Des voix: D'accord.

    Le Président: Par conséquent, l'autorisation de présenter les projets de loi est réputée accordée.

*   *   *

+-Loi sur la modernisation de certains régimes d'avantages et d'obligations

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-361, Loi modifiant la Loi sur la modernisation de certains régimes d'avantages et d'obligations.

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-Loi sur la médaille canadienne du maintien de la paix

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-362, Loi modifiant la Loi sur la médaille canadienne de maintien de la paix (Livre du Souvenir à la mémoire des soldats de la paix).

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-Loi sur les normes nationales d'alphabétisation

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-363, Loi visant à établir des normes nationales d'alphabétisation.

    (Les motions sont adoptées et le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-Le Régime de pensions du Canada

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-364, Loi modifiant le Régime de pensions du Canada.

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-Loi sur les modes substitutifs de règlement des différends

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-365, Loi sur les modes substitutifs de règlement des différences

    (Les motions sont réputées adoptées et le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-La Loi sur le divorce

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-366, modifiant la Loi sur le divorce (droits de garde ou d'accès auprès d'un enfant par les parents des époux).

    (Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-La Loi sur la vérification interne des ministères

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-367, Loi exigeant la vérification interne annuelle des sociétés d'État et des ministères fédéraux et la présentation de rapports au vérificateur général du Canada.

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-La Loi sur les normes environnementales nationales

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-368, Loi visant l'harmonisation des normes environnementales à l'échelle nationale.

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-La Loi visant les droits de l'enfant

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-369, Loi visant les droits de l'enfant.

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-La Loi de l'impôt sur le revenu

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-370, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu (crédit d'impôt pour déficience physique ou mentale).

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-La Loi de l'impôt sur le revenu

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-371, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu (dons aux banques d'alimentation).

    (Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-Le Code criminel

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-372, Loi modifiant le Code criminel (libelle diffamatoire).

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-La Loi de l'impôt sur le revenu

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-373, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu (déduction de frais funéraires).

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-La Loi sur la conférence nationale sur le revenu annuel garanti

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-374, Loi prévoyant la tenue de la conférence nationale sur le revenu annuel garanti.

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-La Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-375, Loi modifiant la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces (âge de scolarité obligatoire).

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-La Déclaration canadienne des droits

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-376, Loi modifiant la Déclaration canadienne des droits (droit au logement).

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-La Loi sur les normes d'éducation

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-377, Loi prévoyant l'établissement de normes nationales relativement à l'éducation assurée par les provinces.

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-La Déclaration canadienne des droits

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-378, Loi modifiant la Déclaration canadienne des droits (droit à l'alphabétisation).

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-Loi sur l'ombudsman du pétrole et du gaz

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-379, Loi constituant le Bureau de l'ombudsman du pétrole et du gaz chargé d'enquêter sur les plaintes relatives aux pratiques commerciales des fournisseurs de pétrole ou de gaz.

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-Loi sur l'utilisation d'un régulateur de vitesse maximale

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-380, Loi visant l'utilisation d'un régulateur de vitesse maximale lors de la conduite d'un véhicule automobile et interdisant la fabrication et la vente de véhicules automobiles non munis d'un régulateur de vitesse maximale.

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-La Loi sur la concurrence

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-381, Loi modifiant la Loi sur la concurrence (fournisseurs d'essence à intégration verticale).

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-La Loi sur les Archives nationales du Canada

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-382, Loi modifiant la Loi sur les Archives nationales du Canada et la Loi sur la statistique.

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-Loi relative à l'information sur le crédit à la consommation

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-383, Loi concernant la communication de renseignements relatifs au crédit.

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-Le Code criminel

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-384, Loi modifiant le Code criminel.

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-Loi interdisant les budgets déficitaires

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-385, Loi interdisant les budgets déficitaires.

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-Loi sur la définition d'un enfant

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-386, Loi modifiant certaines lois pour assurer l'harmonisation de la définition de «enfant» avec la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant.

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-Loi sur la protection des renseignements personnels (numéros d'assurance sociale)

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-387, Loi visant à favoriser la protection des renseignements personnels par la restriction de l'usage des numéros d'assurance sociale.

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-Loi canadienne sur les ceintures de sécurité

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-388, Loi concernant les ceintures de sécurité à bord des véhicules fédéraux et des autobus scolaires.

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-Loi de l'impôt sur le revenu

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-389, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu, la Loi sur les allocations de retraite des parlementaires, la Loi sur la pension de la fonction publique et la Loi sur la pension de retraite de la Gendarmerie royale du Canada (bénéficiaires à charge).

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-La Loi sur le registre des instruments médicaux

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-390, Loi prévoyant l'établissement et la tenue d'un registre national des instruments médicaux.

    --Monsieur le Président, le projet de loi reconnaît qu'il existe des milliers d'instruments médicaux au Canada, dont certains sont insérés dans le corps d'enfants ou d'adultes.

    Il est arrivé à quelques reprises que les fabricants de ces instruments déclarent faillite ou aient des problèmes avec certains de leurs produits. Dans le cas de problèmes avec ces instruments, il est essentiel que le ministère ou les responsables d'un registre national informent les patients visés que les instruments qui sont insérés dans leur corps présentent certains problèmes.

    De même, lorsqu'une entreprise cesse d'exister, il peut se produire des changements au niveau des produits.

    Compte tenu des progrès technologiques réalisés ici et ailleurs au monde, il est temps que nous puissions compter sur un mécanisme qui permettra enfin au gouvernement de savoir ce qui existe sur le marché et quels sont les problèmes auxquels on peut s'attendre.

    Le présent projet de loi vise la création d'un registre national.

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-La Loi sur la Force nationale de protection civile

+-

    M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-391, Loi portant création d'une Force nationale de protection civile.

    --Monsieur le Président, il suffit de penser à la tempête de verglas qui a touché la majeure partie de l'est du Canada pour se rendre compte de l'urgence de mettre sur pied un mécanisme national portant sur les situations de crise, tant au niveau provincial qu'interprovincial.

    Le projet de loi proposé porte sur la création d'une institution nationale qui coordonnerait les efforts en cas de crise, par exemple, une inondation, une catastrophe naturelle ou autre chose du genre. L'organisation se composerait de bénévoles de tous les coins du pays, qui seraient formés et dirigés dans le cadre d'un mécanisme quelconque.

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-La Loi sur le mariage (degrés prohibés)

+-

    M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD) demande à présenter le projet de loi C-392, Loi modifiant la Loi sur le mariage (degrés prohibés) et la Loi sur la modernisation de certains régimes d'avantages et d'obligations.

    --Monsieur le Président, j'ai l'honneur de déposer de nouveau ce projet de loi, qui vise à moderniser la définition du mariage pour y inclure les conjoints de même sexe, autrement dit pour permettre aux gais et lesbiennes qui choisissent d'épouser leur partenaire de pouvoir le faire.

    Ce projet de loi s'inscrit dans la foulée de récentes décisions judiciaires, en Ontario et au Québec, qui ont autorisé le mariage entre personnes de même sexe. Les tribunaux ont reconnu que, en vertu de la Charte des droits et libertés, la protection contre la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle inclut le droit des gais et lesbiennes de se marier.

    Ce projet de loi n'affaiblira en rien l'institution du mariage, mais aura plutôt pour effet de renforcer le mariage, en le rendant plus inclusif et plus représentatif de la diversité des familles canadiennes.

    Je tiens à remercier la députée de Vancouver-Est d'avoir appuyé, à la veille de la Saint-Valentin, cet important projet de loi qui permettra à toute les personnes vivant en couple, gais, lesbiennes et hétérosexuels, d'exprimer leur engagement et leur amour mutuel par le le mariage.

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

  +-(1030)  

+-Le Code criminel

+-

    M. Deepak Obhrai (Calgary-Est, Alliance canadienne) demande à présenter le projet de loi C-393, Loi modifiant le Code criminel (introduction par effraction).

    --Monsieur le Président, je suis heureux de présenter ce projet de loi. C'est la troisième fois.

    Le projet de loi propose d'imposer une peine d'emprisonnement minimale obligatoire de deux ans aux personnes qui commettent en récidive l'infraction d'introduction par effraction dans une résidence privée.

    L'introduction par effraction est beaucoup plus qu'une infraction contre les biens. C'est une infraction contre la personne, qui cause un préjudice psychologique, dans la mesure où les victimes ont l'impression d'avoir subi un viol et éprouvent un traumatisme.

    Les tribunaux imposent aux auteurs de ce type d'infraction des peines d'emprisonnement de six à huit mois, en moyenne. La plupart des auteurs d'introduction par effraction sont des récidivistes. La peine minimale de deux ans qui est proposée permettra de mettre les récidivistes à l'écart et de leur appliquer des mesures de réadaptation suffisantes pour leur permettre d'échapper au cycle de la criminalité. C'est pourquoi je suis heureux de présenter ce projet de loi.

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-La Loi sur les banques

+-

    L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD) demande à présenter le projet de loi C-394, Loi modifiant la Loi sur les banques (fusion de banques).

    --Monsieur le Président, le projet de loi présenté à la Chambre aujourd'hui a pour but d'empêcher les banques de se fusionner ou des organismes constitués en vertu d'une loi fédérale de créer une banque, à moins que le surintendant des institutions financières n'informe le ministre des Finances que la fusion est nécessaire afin d'éviter qu'au moins une des banques ne devienne insolvable, ou qu'il le prévienne qu'aucune des banques intéressées par une fusion n'est sur le point de devenir insolvable. Dans ce cas, la fusion devra être approuvée au moyen d'une résolution conjointe du Sénat et de la Chambre des communes. À l'heure actuelle les fusions sont approuvées par le ministre des Finances.

    Le projet de loi vise à démocratiser le processus d'approbation des fusions, en l'assujettissant à un vote à la Chambre des communes.

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-Pétitions

+-La pornographie juvénile

+-

    M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Alliance canadienne): Monsieur le Président, encore une fois, j'ai l'honneur de présenter, conformément à l'article 36 du Règlement, une pétition signée par des gens de ma circonscription et de toute la province, qui condamnent sévèrement la position prise par le gouvernement sur la question de la pornographie.

*   *   *

+-Le projet de loi C-250

+-

    M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai aujourd'hui quatre pétitions distintes, provenant toutes de la circonscription que je représente, Red Deer.

    Les deux premières pétitions portent les signatures de 128 personnes qui s'opposent à l'adoption du projet de loi C-250, sous quelque forme que ce soit.

*   *   *

+-La recherche sur les cellules souches

+-

    M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la troisième pétition est signée par 27 personnes qui prient le Parlement d'axer son soutien législatif autour de la recherche sur les cellules souches adultes en vue de découvrir les traitements et les thérapies nécessaires aux Canadiens souffrant de certaines maladies.

*   *   *

+-La pornographie juvénile

+-

    M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la troisième pétition, portant 209 signatures, prie le Parlement de prendre toutes les mesures nécessaires pour interdire tout matériel qui encourage la pédophilie et qui met en cause des enfants.

*   *   *

+-Les pêches

+-

    M. John Cummins (Delta—South Richmond, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai trois pétitions à présenter ce matin.

    La première est adressée à la Chambre par des pêcheurs de crevettes de la côte ouest. Ils sont inquiets du projet du gouvernement d'imposer des frais de gestion exorbitants directement aux pêcheurs actifs de crevettes. Ils soutiennent que les frais les acculeront essentiellement à la faillite. Leurs coûts seront quadruplés.

    Je comprends que le ministre examine la question, et je lui en sais gré, mais cette pétition devrait l'encourager à poursuivre ses efforts dans ce sens.

*   *   *

+-La pornographie juvénile

+-

    M. John Cummins (Delta—South Richmond, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la deuxième pétition concerne la pornographie juvénile.

    Les pétitionnaires font remarquer que le Parlement n'exprime pas les désirs de la population à cet égard. Ils demandent au Parlement de protéger nos enfants et d'adopter des lois en conséquence.

*   *   *

+-La Garde côtière

+-

    M. John Cummins (Delta—South Richmond, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la troisième pétition porte sur la Garde côtière.

    Les pétitionnaires font remarquer que la Garde côtière ne dispose plus des ressources suffisantes pour accomplir le travail que nous attendons d'elle. Il lui manque des aéroglisseurs sur la côte ouest. L'absence de financement de l'équipe de plongeurs nouvellement rétablie soulève également des préoccupations.

    Les pétitionnaires demandent à la Chambre d'ordonner au ministre d'accroître le financement de la Garde côtière.

*   *   *

  +-(1035)  

[Français]

+-Les personnes handicapées

+-

    Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Neigette-et-la Mitis, BQ): Monsieur le Président, au nom de la députée de Laval-Centre qui est porte-parole pour le Bloc québécois en matière de personnes handicapées, il me fait plaisir de déposer une pétition signée par près de 6 000 personnes qui demandent au Parlement de s'opposer à tout projet qui vise à restreindre l'accessibilité aux crédits d'impôt pour les personnes handicapées et de veiller à ce que le gouvernement s'abstienne de faire adopter par la Chambre quelque mesure que ce soit sans en avoir d'abord parlé et avoir consulté les organismes des personnes handicapées et les professionnels du domaine de la santé.

*   *   *

[Traduction]

+-L'agriculture

+-

    M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de présenter deux pétitions au nom de mes électeurs. La première a été signée par 66 personnes qui s'opposent à l'abattage de chevaux et à la vente de viande de cheval à des fins de consommation humaine.

*   *   *

+-La pornographie juvénile

+-

    M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la deuxième pétition est signée par plusieurs milliers de personnes de ma circonscription, qui s'opposent à la pornographie juvénile et demandent au Parlement de protéger nos enfants en prenant toutes les dispositions nécessaires pour interdire tout matériel qui encourage ou glorifie la pédophilie ou les activités sadomasochistes mettant en cause des enfants.

*   *   *

+-Postes Canada

+-

    M. Gurbax Malhi (Bramalea—Gore—Malton—Springdale, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36, j'ai l'honneur de déposer une pétition signée par de nombreux électeurs de la région du grand Toronto.

    Les signataires sont préoccupés par le fait que les facteurs des régions rurales touchent moins que le salaire minimum et que le paragraphe 13(5) de la Loi sur la Société canadienne des postes ne leur reconnaît pas le droit à la négociation collective. Les signataires prient le Parlement d'abroger ce paragraphe et de veiller à ce que ce droit fondamental soit reconnu à l'ensemble des facteurs ruraux.

*   *   *

+-La pornographie juvénile

+-

    M. Larry Spencer (Regina—Lumsden—Lake Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai deux pétitions à présenter ce matin. La première nous vient de l'est du Canada et l'autre, de l'ouest du Canada. Toutes deux demandent instamment au Parlement de mettre en place des lois interdisant toute forme de pornographie juvénile.

*   *   *

+-Questions au Feuilleton

+-

    M. Rodger Cuzner (secrétaire parlementaire du premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): Est-ce d'accord?

    Des voix: D'accord.


+-INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Les crédits]

*   *   *

[Traduction]

+-Les crédits

+-Jour désigné--La carte d'identité nationale

+-

    Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD) propose:

    Que, de l'avisde la Chambre, l'introduction d'une carte d'identité nationaleva à l'encontre du droit à la vie privée et des autres droits civilsque possèdent les Canadiens et les Canadiennes et que laChambre s'oppose donc à l'adoption de cette mesure.

    --Monsieur le Président, nous espérons que le débat d'aujourd'hui donnera à tous les députés l'occasion d'exprimer leur point de vue et leurs préoccupations au sujet de la carte d'identité nationale envisagée.

    Je voudrais commencer par citer M. George Radwanski, commissaire fédéral à la protection de la vie privée, qui a dit :

    Le droit d’être anonyme [...] est le noyau de la dignité, de l’autonomie et de la liberté humaines.

    Dans un discours qu'il a prononcé à l'Université Carleton à Ottawa, en mars dernier, M. Radwanski a ajouté:

    Nous devons faire de la perte de vie privée l'exception, et non la nouvelle façon de faire des affaires.

    Allant encore plus loin, il a déclaré:

    Le fardeau de la preuve doit toujours incomber à ceux qui disent qu'une nouvelle intrusion dans la vie privée est nécessaire pour répondre à un besoin social important.

    Le commissaire à la protection de la vie privée a poursuivi en exposant certains des critères à utiliser pour établir qu'il existe un besoin réel.

    Je voudrais signaler, monsieur le Président, que je partage mon temps de parole avec le député de Winnipeg—Transcona.

    Sur cette base, il incombe au gouvernement de montrer pourquoi une carte d'identité nationale est nécessaire.

    Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration a comparu la semaine dernière devant le comité permanent. J'étais présente lorsqu'il a pris la parole. Même s'il a dit que nous avons besoin d'un débat ouvert et que lui-même et le gouvernement sont disposés à écouter les idées du comité et des Canadiens, j'ai vraiment eu l'impression que le ministre est persuadé de la nécessité d'une carte d'identité nationale. Il a présenté son projet en soutenant qu'il y avait des problèmes de sécurité nationale et qu'il était nécessaire d'inscrire sur ces cartes des renseignements pouvant clairement identifier leur titulaire.

    Toutefois, il a également soulevé une autre question que j'ai trouvée très troublante. Au cours de la séance du comité, il a dit:

...le débat sur les cartes d'identité ne devrait pas être exclusivement centré sur des questions de sécurité nationale. Il y a en effet des questions de citoyenneté et de droit aux services qui sont de loin plus importantes.

    Il a ainsi poursuivi:

...il sera important de reconnaître que nous avons là plus qu'une occasion de discuter d'une carte d'identité. Nous essayons également de définir plus clairement ce qu'est un citoyen, un Canadien.[...] Le fait de pouvoir établir son identité correspond à l'essence même de ces questions.

    Ces propos sont troublants parce qu'ils suggèrent que, d'une certaine façon, l'État a le pouvoir non seulement de créer une carte d'identité nationale, peut-être à des fins de sécurité, mais aussi d'établir ce qu'est l'identité canadienne et l'identité de chacun. À mon avis, l'État n'a pas à se mêler de cela. Ce que nous sommes, comme Canadiens et Canadiennes, est quelque chose que nous avons individuellement le droit d'établir. Ce n'est pas un pouvoir qui peut ou doit être conféré à l'État.

    Quand on essaie de déterminer si une carte d'identité nationale est vraiment nécessaire, on suscite déjà un important débat. Certaines des situations très dangereuses qui peuvent découler d'une carte d'identité nationale sont connues. Nous sommes déjà engagés sur une pente très glissante.

    Il n'y a pas de doute qu'une telle carte peut être considérée comme une terrible invasion de la vie privée, comme l'a dit le commissaire à la protection de la vie privée. Une carte d'identité largement répandue permettrait en effet à l'État et à différents organismes de mise en vigueur de la loi, comme la police, de contrôler les déplacements des citoyens.

    Je suis certaine que le ministre nous dira aujourd'hui que la carte ne servira qu'à des fins particulières, qu'elle sera bien protégée tout comme notre vie privée, mais on s'engage ici sur un terrain glissant. C'est le début d'une toute nouvelle société où les renseignements personnels sur chacun de nous seront codés sur une carte, emmagasinés quelque part et utilisés de diverses manières.

  +-(1040)  

    C'est là une préoccupation fondamentale fondée sur une question de principe. Il y a aussi d'autres préoccupations. Ainsi, si la carte d'identité nationale existait, elle pourrait donner lieu à des abus. Certains disent que nous avons les raisons les plus honorables du monde d'instituer un système de cartes, mais une fois que le système est en place, il peut donner lieu à des abus de la part des policiers et d'autres autorités. De plus, on peut s'en servir pour harceler, par exemple, les membres de groupes minoritaires en leur demandant de produire leur carte d'identité lorsqu'ils sont interpellés.

    Nous avons d'autres pièces d'identité comme le permis de conduire ou le passeport, et elles servent à des fins particulières. Cependant, si tout est regroupé dans une carte et que quelqu'un ne produit pas cette pièce d'identité, cela ouvre la porte à des recherches plus intrusives et à un profilage racial, ce que nous avons déjà constaté après les événements du 11 septembre.

    Le Nouveau Parti démocratique s'est montré très vigilant en exhortant le gouvernement à justifier, par exemple, le recours à des méthodes de profilage racial aux frontières. Nous croyons que l'instauration d'une carte d'identité nationale nous plongera davantage dans ce genre de contexte où les minorités deviennent l'objet de harcèlement et d'abus de la part des autorités.

    Cette carte permettra de bien contrôler les renseignements. Les détenteurs de carte ne sauront pas à qui les renseignements les concernant seront communiqués. J'aimerais citer un constitutionnaliste, M. Morris Manning, qui a comparu devant le Comité de l'immigration le 10 février. Voici ce qu'il a dit:

    S'ils sont communiqués à la GRC, ils le seront certainement au FBI. S'ils sont communiqués au FBI, ils le seront certainement à Interpol et s'ils sont communiqués à Interpol, ils le seront au monde entier.

    C'était sa façon de nous mettre en garde contre l'orientation que prendrait la société canadienne si nous nous lancions dans cette aventure.

    On nous dit que les États-Unis resserreront énormément les règles et les exigences s'appliquant à leurs frontières. Une carte d'identité nationale pourrait être une façon de réagir à ce resserrement. Il est toutefois ironique que nous envisagions d'imposer une carte d'identité alors que, aux États-Unis, il n'en est pas question. On est en droit de se demander qui mène la barque. En tant que société, sommes-nous prêts à renoncer à la protection de la vie privée? Sommes-nous prêts à abandonner nos droits sous prétexte que le passeport canadien ne serait pas un document légitime pour franchir la frontière?

    Le NPD a de très sérieuses réserves au sujet de la carte d'identité. Nous invitons les députés à réfléchir à la direction dans laquelle nous mène cette proposition. Nous espérons que les députés vont étudier les raisons profondes, sur le plan du principe et du fond, pour lesquelles nous ne devrions nous engager dans cette voie qu'avec la plus grande prudence. Nous devrions le faire comprendre au ministre qui, d'après les échos qu'en donne la presse, n'a pas nécessairement l'appui du Cabinet. En fait, il y a probablement des gens en face que cette proposition inquiète beaucoup.

    Nous espérons que le débat d'aujourd'hui permettra aux gens d'exprimer leur opinion et leur position, et enverra le message au gouvernement que ce n'est pas la voie à suivre. Nous devrions protéger la vie privée et les droits des Canadiens. Nous ne devrions pas permettre que cette carte d'identité devienne un cheval de Troie. Nous ne devrions pas nous engager sur une pente dangereuse qui risque de nous mener vers une société différente dont je pense que personne ne veut au Canada.

  +-(1045)  

+-

    M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Alliance canadienne): Monsieur le Président, au cours d'un récent voyage en Europe, j'ai découvert qu'un certain nombre de pays avaient ces cartes, et cela, depuis déjà un certain temps. Les hauts fonctionnaires auprès desquels je me suis enquis de la carte lui trouvaient de nombreux avantages. Toutefois, d'autres fonctionnaires partageaient l'opinion de la députée. Il semble cependant que les gens ont pris l'habitude de la porter sur eux, comme nous portons notre permis de conduire sur nous.

    Pourquoi des pays d'Europe considèrent-ils la carte d'identité comme une bonne chose, alors que tout le monde la critique ici?

+-

    Mme Libby Davies: Monsieur le Président, je remercie le député pour ses observations. On a déjà parlé des avantages de la carte, notamment en cas de vol. On peut perdre ses cartes de crédit et d'autres cartes. Si cette carte était visée par des mesures de sécurité, cela n'arriverait plus.

    Paradoxalement, toutefois, une carte qui porte autant d'information devient d'autant plus précieuse pour les voleurs. Même au plan de sa valeur antivol, qui est censé être un de ses avantages, elle suscite de très sérieuses questions.

    Ce n'est pas parce que ces cartes existent ailleurs que nous sommes obligés d'en avoir une ici. La tradition veut au Canada que l'on respecte la vie privée et les droits individuels. Je pose à nouveau la question au député: que reproche-t-il à ce système? N'avons-nous pas suffisamment de documents d'identité pour voyager et conduire, notamment?

  +-(1050)  

+-

    M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis absolument contre l'idée gouvernementale d'imposer une carte d'identité à tous les Canadiens. Je vous rappelle que le gouvernement exige que tous les propriétaires d'arme à feu aient une carte d'identité.

    Le Commissaire à la protection de la vie privée a fait savoir très clairement que les questions posées dans le formulaire à remplir pour obtenir un permis d'armes à feu permettent au gouvernement de créer une énorme banque de données personnelles et cela, en contravention des droits à la protection des renseignements personnels des Canadiens. Cette question n'a pas été approfondie.

    Avec la motion qu'elle propose aujourd'hui, la députée veut-elle signifier que le gouvernement fédéral porte atteinte, en fait, au droit des Canadiens à la protection de leur vie privée et à leurs libertés civiles?

+-

    Mme Libby Davies: Monsieur le Président, je rappelle les commentaires du commissaire à la vie privée qui a affirmé très clairement que le fardeau de la preuve revient au gouvernement ou à l'organisme désireux de s'immiscer dans la vie privée d'un individu. Il doit être clairement établi que l'immixtion vise un objectif précis.

    Le député a fait mention du registre des armes à feu. La création d'une nouvelle carte ou d'un nouveau système d'enregistrement doit toujours correspondre à un besoin établi. Il nous incombe à tous de montrer que la politique publique s'avère nécessaire.

    L'idée d'une carte d'identité nationale unique ou multi-usages va bien plus loin que tout ce qui s'est fait auparavant en matière d'identification ou d'enregistrement des personnes. On peut discuter du registre des armes à feu, mais il faut admettre ouvertement que la carte d'identité nationale répondra bien mieux aux besoins établis, quels qu'ils soient.

[Français]

+-

    M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le Président, je m'oppose également à cette carte d'identité nationale.

    Par exemple, dernièrement, le disque dur d'un ordinateur appartenant à une compagnie oeuvrant dans le domaine des assurances et des coopératives a été volé à Regina. La compagnie a alors téléphoné à ses clients pour leur dire: «Vérifiez votre compte en banque, parce qu'il pourrait y manquer de l'argent.»

    Imaginez ce que ce serait si une carte contenait toute l'information personnelle sur un individu. Si la personne perdait sa carte, qu'est-ce qui pourrait arriver? Elle pourrait tomber entre les mains de gens qui, avec la technologie d'aujourd'hui, pourraient décoder toute l'information contenue sur cette carte. Cela irait à l'encontre du droit à la vie privée d'une personne.

    Que pense la députée de ce genre de carte contenant toute l'information personnelle de quelqu'un, d'un Canadien, et du droit à la vie privée d'une personne au Canada?

[Traduction]

+-

    Mme Libby Davies: Monsieur le Président, le député a donné un excellent exemple de ce qui se passe déjà et a indiqué comment il faut faire preuve de vigilance au sujet de la protection de l'information. C'est une situation qui existe déjà. Nous avons vu à la Chambre des cas où des ministères ont échangé de l'information. Cela a suscité une énorme polémique à DRHC.

    Encore une fois, l'idée d'une carte nationale et d'une sorte de banque de données centrale renforce les préoccupations car on se demande comment les choses se passeraient et quelle incidence le nouveau système aurait sur la vie privée des citoyens.

  +-(1055)  

+-

    M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, le député de Vancouver-Est a bien expliqué la raison pour laquelle on ne doit pas adopter une carte d'identité nationale, et j'espère être en mesure d'ajouter quelques éléments de réflexion à ce sujet. Toutefois, je veux tout d'abord réitérer les propos du député de Vancouver-Est, qui a dit que le NPD estime offrir aujourd'hui à la Chambre une occasion d'entendre ce que les gens ont à dire concernant ce nouvel enjeu. C'est un enjeu notamment parce que le ministre l'a voulu ainsi, celui-ci s'étant présenté en comité et ailleurs pour en parler. Il veut manifestement obtenir à ce sujet non seulement le point de vue des Canadiens mais aussi celui des autres députés, et c'est là l'objet du débat d'aujourd'hui.

    Je pense et j'espère que nous constaterons qu'il s'agit d'un enjeu que l'on ne peut facilement qualifier comme étant de droite ou de gauche, et que des préoccupations seront exprimées par des personnes appartenant à tous les volets de l'éventail politique. En tant que parti de gauche, le NPD entretient de toute évidence des préoccupations, mais je suppose que les personnes à la droite de l'éventail politique sont également préoccupées par cette question dans la mesure où elle amène notamment un accroissement du pouvoir de l'État. Pour autant que les libéraux aient des principes, peut-être pourraient-ils s'en inspirer pour présenter une analyse, mais je ne sais trop quels sont ces principes.

    Je vois que le ministre est ici et je suppose qu'il va intervenir dans le débat. Je le remercie d'être présent à la Chambre aujourd'hui. J'ai hâte d'entendre ce qu'il a à dire à ce sujet.

    Un des aspects qui me dérange le plus dans ce dossier, c'est que je vois ici une tendance qui se dessine. J'étais porte-parole en matière de justice au moment de la présentation du projet de loi C-36, c'est-à-dire la loi antiterroriste. Lorsque la ministre de la Justice de l'époque et désormais ministre de la Santé s'est exprimée en comité, j'éprouvais certes le sentiment à ce moment-là que nous n'agissions pas entièrement de notre propre chef, que nous n'adoptions pas cette mesure entièrement pour nos propres raisons.

    Souvent, lorsque j'écoutais la ministre, il me semble qu'elle utilisait un code pour dire «nous faisons cela», et dans ce cas précis le gouvernement faisait effectivement quelque chose. Dans la situation actuelle, le ministre ne fait que songer à intervenir, mais il y songe selon moi parce que quelqu'un d'autre le lui commande. Je pense ici à nos voisins situés au sud de la frontière.

    Je sais que certaines dispositions de la législation antiterroriste ont été adoptées pour plaire à Washington. Je me demande si ce que l'on propose aujourd'hui n'a pas le même objectif. Je note aussi que nous avons parfois tendance à aller plus loin que les Américains. Le projet de loi C-36 contenait des dispositions beaucoup plus rigoureuses, dans certains cas, que ce que l'on retrouve dans la législation antiterroriste aux États-Unis.

    Par exemple, je crois que les dispositions de caducité que l'on retrouve dans certains éléments de la législation américaine sont beaucoup mieux en réalité que les soi-disant dispositions de caducité du projet de loi C-36. C'est la même chose pour ce qui est de la carte d'identité nationale. On se demande si elle est vraiment nécessaire alors que les Américains ne se posent même pas la question.

    En fait, je crois savoir que le Congrès des États-Unis se méfie de cette idée au point d'avoir inscrit la disposition suivante dans le projet de loi créant le Bureau de la sécurité intérieure: «Aucune disposition de la présente loi ne doit être interprétée comme autorisant l'élaboration d'un système national d'identification ou d'une carte d'identité nationale.»

    Même si ce que j'avance est vrai, le ministre le niera, je suppose. Quant à savoir s'il me fera changer d'avis, c'est une autre histoire. Mais si effectivement j'ai raison de prétendre que nous ne faisons que nous plier à une exigence des Américains qui trouveraient, pour une raison ou une autre, que le passeport Canadien n'est plus acceptable pour franchir la frontière et que les Canadiens doivent présenter une carte d'identité nationale, ce ne serait pas la première fois que nous adopterions des mesures plus rigoureuses qu'eux dans le contexte de l'après 11 septembre 2001.

  +-(1100)  

    Je pense que le gouvernement a décidé une fois de plus de suivre cette voie. C'est du moins ce qui ressort du discours du ministre. Même si nous avons un débat et si le ministre veut entendre ce que les gens ont à dire, il me semble qu'il entend bien procéder ainsi. Une fois de plus, nous parvenons à un mauvais équilibre entre la liberté et la sécurité et nous mettons trop l'accent, selon moi, sur la prétendue sécurité.

    Je parle de la prétendue sécurité, car il me semble qu'il n'y a pas beaucoup de faits qui montrent qu'une carte d'identité nationale assurera davantage la sécurité des gens, empêchera les actes terroristes et constituera le type d'outil absolument nécessaire pour démasquer les terroristes ou le reste. Les terroristes savent comment fabriquer de fausses cartes d'identité. Ce sont les Canadiens ordinaires qui verront leur vie le plus bouleversée par cette mesure, si le gouvernement va de l'avant avec cette initiative. C'est pourquoi nous sommes vraiment contre cette idée.

    Le commissaire à la protection de la vie privée est très inquiet de cela et je pense que si nous nommons des gens comme M. Radwanski au poste de commissaire à la protection de la vie privée pour qu'ils réfléchissent longuement à ces questions, nous devrions porter attention à ce que ces personnes ont à dire sur toutes ces questions. Manifestement, le commissaire est très préoccupé par l'idée d'une carte d'identité nationale.

    Il s'inquiète également, et c'est un autre domaine où le gouvernement n'écoute pas M. Radwanski, de l'invasion de la vie privée que le gouvernement envisage par l'entremise du projet de loi qui permettra au gouvernement de recueillir des données sur les Canadiens qui voyagent, chaque fois qu'ils prennent l'avion, et de garder cette information jusqu'à six ans ou quelque chose du genre, si je ne m'abuse. À un moment donné, mais pas pour très longtemps s'il n'en tient qu'au gouvernement, on pourrait penser qu'on peut prendre l'avion, voyager partout au pays et ne pas voir les données en question être insérées dans une banque de données quelque part et être analysées pour un éventail de raisons, pas nécessairement toujours dans un but louable. Selon moi, l'existence de ce type de données est injustifiée.

    Je suppose que ce que j'essaie de dire, c'est qu'à la suite des événements du 11 septembre 2001, on constate une tendance, soit la transformation de tout notre mode de vie. Nous transformons nos notions de ce qui constitue un pouvoir approprié pour l'État. Nous transformons nos notions de respect de la vie privée et de liberté. Nous transformons nos notions de sécurité. Je pense que le gouvernement ne cesse de prendre les mauvaises mesures à cet égard et il va le faire une fois de plus, s'il va de l'avant avec la carte d'identité nationale.

    Enfin, on peut seulement imaginer quel sera le coût d'une telle mesure. À court terme, si tout se fait rapidement, elle sera mise en oeuvre par les libéraux. Compte tenu de l'ampleur de leur mauvaise gestion dans le cas du registre des armes à feu, ils seraient bien capables de mettre le pays en faillite avec cette mesure. Elle pourrait donner au registre des armes à feu l'allure d'une goutte d'eau par rapport à l'océan qu'ils pourront créer avec un projet de la sorte. Je ne sais pas à quelle entreprise amie des libéraux le contrat serait octroyé, mais...

    M. Sarkis Assadourian: Franchement; cette remarque est vraiment un coup bas.

    M. John Cannis: Nous n'aurions jamais cru que vous puissiez être aussi mesquin.

    M. Bill Blaikie: Oh, oh; je semble avoir touché un point sensible, monsieur le Président. Peut-être y-a-il un lien trop évident avec l'histoire récente ?

    De toute façon, nous devons tous nous intéresser de près au principe, mais aussi à l'aspect pratique de ce projet. On peut facilement imaginer quels pourraient être les dépassements de coûts dans ce dossier. Je ne sais pas si le ministre nous présentera des estimations de coûts aujourd'hui, mais nous devrons sans doute vérifier le compte rendu pour voir par quel coefficient il faudra multiplier ces chiffres pour obtenir le véritable coût final.

  +-(1105)  

    Et je ne plaisante qu'à moitié, parce que l'enregistrement des armes à feu a donné lieu à un très très sérieux dépassement de coûts. Je voulais simplement souligner ce facteur, mais, évidemment, l'objet principal de mon intervention est l'objection de principe à l'idée d'une carte d'identité nationale et à la violation de la vie privée que l'adoption d'une telle carte entraînerait. Cela s'inscrit dans un ensemble de mesures que le gouvernement a proposées au lendemain du 11 septembre. Je voudrais que le ministre songe très sérieusement non seulement aux arguments que nous avons fait valoir, mais encore à ceux des nombreuses autres personnes qui se demandent s'il est souhaitable d'adopter pareille carte.

[Français]

+-

    M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ): Monsieur le Président, on entend les représentants du gouvernement dire qu'ils sont à l'avant-garde en voulant créer une carte.

    Ne sont-ils pas justement à l'avant-garde pour détruire la démocratie et la liberté, celles du Québec et du Canada, en voulant introduire une carte qui contiendrait des renseignements incroyables sur la vie privée? Comment peut-on penser qu'on est à l'avant-garde si on veut détruire des choses aussi fondamentales que le droit à la vie privée dans un pays libre comme le nôtre? Je suis certain que chacun des députés, ayant une vie privée, ne veut pas l'étaler sur un plateau d'argent en donnant de l'information à l'État. Comment peut-on dire que c'est du progrès?

    J'aimerais entendre l'avis du député néo-démocrate sur cette question.

[Traduction]

+-

    M. Bill Blaikie: Certes, monsieur le Président, je conviens avec le député que nous ne savons pas exactement en ce moment quelles informations figureront sur cette carte. Peut-être qu'il y aura un code à barres sur cette carte et que ce code à barres renfermera toutes sortes d'informations personnelles. Quoi qu'il en soit, toutes les fois que l'on accédera à ce code ou si la carte est perdue, il s'ensuivra qu'une plus grande quantité de nos renseignements personnels seront accessibles d'une manière qui ne convient pas.

[Français]

+-

    M. Yvon Charbonneau (Anjou—Rivière-des-Prairies, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté l'argument soulevé par notre collègue du Nouveau parti démocratique. Il se prononce contre une carte d'identité, alors que la question devant nous aujourd'hui est d'avoir un débat sur ce sujet. Il doit soupçonner que le ministre est en faveur, mais ce n'est qu'un soupçon à ce moment-ci. Il dit qu'il est contre; il ne sait pas trop ce que la carte peut contenir, mais il est contre.

    Est-ce cela être partie prenante à un processus démocratique? Ne serait-il pas plus raisonnable d'accepter la tenue d'un débat, et s'il y a de bons arguments qui vont à l'encontre de ce projet, on pourrait les faire ressortir en ayant des témoignages et des travaux des parlementaires. Nous sommes sensibles à certaines préoccupations, de notre côté aussi. Des questions se posent au sein de tous les partis.

    Pourquoi n'accepterait-il pas la tenue d'un débat? S'il est si sûr de lui aujourd'hui, pourquoi la motion ne fait-elle pas l'objet d'un vote, puisque c'est un débat qui s'amorce?

[Traduction]

+-

    M. Bill Blaikie: Monsieur le Président, j'ai bien dit au début que je voulais qu'il y ait un débat et même si j'ai un point de vue qui m'est propre et que nous ayons une position commune au sein de notre caucus, nous écouterons très certainement ce que les autres députés ont à dire. Nous savons que la question ne sera pas tranchée aujourd'hui, de sorte que, dans l'esprit du conseil donné par le député, nous allons écouter avec un esprit ouvert, quoique néanmoins sceptique, ceux qui pensent que cette carte est une bonne idée.

+-

    M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Alliance canadienne): Monsieur le Président, fait intéressant, le député d'Anjou qui vient de parler a été cité à ce sujet lorsqu'on a commencé à en parler. Il avait dit qu'il ne croyait pas que le gouvernement avait une feuille de route exemplaire à cet égard, qu'il y avait des millions de cartes d'assurance sociale additionnelles en circulation, que des mots de passe avaient été volés dans des bureaux canadiens à l'étranger, et je pense qu'il avait même demandé si le gouvernement pouvait garantir que ce ne serait pas là un autre cauchemar bureaucratique. À la lumière de ce que le député vient de dire, comment mon collègue répondrait-il à notre autre collègue?

  +-(1110)  

+-

    M. Bill Blaikie: Monsieur le Président, j'espère que le député d'en face aura l'occasion de participer à ce débat et d'exprimer peut-être certaines des préoccupations qu'il a déjà exprimées au sujet de cette idée.

    Cela soulève un autre point. Pourquoi ne pas demander plutôt au gouvernement de voir à ce que les systèmes déjà en place fonctionnent bien? Les passeports, les cartes d'assurance sociale, et ainsi de suite, ce sont tous là des exemples de choses qui nous préoccupent. Si la carte d'identité nationale était aussi facile à obtenir que la carte d'assurance sociale, nous aurions un véritable problème, n'est-ce pas? Il me semble que le gouvernement devrait commencer par mettre de l'ordre dans ces dossiers avant d'envisager une initiative de ce genre.

[Français]

+-

    L'hon. Denis Coderre (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, dans un premier temps, vous me permettrez de remercier le Nouveau parti démocratique de présenter cette motion et de permettre un débat sur cette question.

    Moi qui ai beaucoup de respect pour le député de Winnipeg—Transcona, j'aurais aimé qu'il garde le débat à un niveau élevé.

[Traduction]

    C'est un coup bas politique, mais c'est son problème. C'est lui qui devra vivre avec ce souvenir. Nous souhaitons tous conserver notre crédibilité. Toutefois, je le remercie pour certains de ses travaux.

    Il est temps de s'interroger sur certaines questions fondamentales et d'en débattre entre nous en vue de définir l'approche canadienne, de prendre position et de protéger nos principes. Aujourd'hui, je ne parle pas uniquement comme ministre, mais également en tant que citoyen canadien inquiet de ce qui se passe dans le domaine aux niveaux international et national. Je crois que le monde dans lequel nous vivons a changé.

    Si le débat d'aujourd'hui ne devait s'appuyer que sur des insinuations et l'art de faire peur, ces mêmes personnes auraient probablement dans le passé cru que la Terre était plate. Il est temps de vraiment protéger notre approche.

    Il ne s'agit pas d'envahir la vie privée, mais bien de la protéger.

[Français]

    La semaine dernière, j'ai expliqué au Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration pourquoi je pense que nous devons tenir un débat public sur la question d'une carte d'identité. J'ai dit aux membres du comité que j'ai hâte d'entendre ce que les Canadiens oeuvrant dans tous les domaines, qu'ils soient ou non des experts en la matière, ont à dire à ce sujet.

    Je suis heureux que le comité ait jugé que cette question mérite une discussion approfondie et sérieuse. Les membres du comité vont mener des consultations dans l'ensemble du pays. Nul doute que l'information qu'ils vont recueillir nous aidera à dissiper les mythes et à voir clair dans ce dossier.

    Certains ont dénoncé à cor et à cri la carte d'identité nationale sans avoir écouté tous les arguments. Ils ferment la porte à la démocratie.

[Traduction]

    Quand j'entends le commissaire à la protection de la vie privée dire qu'il est contre le débat avant même d'avoir entendu les arguments, je me demande quel genre de démocratie nous avons. Pour moi, la démocratie consiste à tout mettre sur la table et à faire un débat. Il n'est pas question aujourd'hui de prendre une décision, mais d'avoir un débat.

    La question n'est pas tant la carte que d'avoir enfin une politique nationale sur l'identité. J'entends constamment des personnes parler du gouvernement qui sait tout, de l'État omniprésent dans nos vies. Qu'elles s'intéressent plutôt aux banques, aux numéros d'assurance sociale et à toutes les bases de données qui existent. Qu'elles voient ce que font les compagnies d'assurances, l'Internet et les ordinateurs. Nous sommes fichés partout. C'est pourquoi il faut vraiment débattre entre nous de la façon dont nous pouvons protéger notre identité et notre approche.

    Par contre, bien entendu, il existe une situation internationale. Il existe une situation à la frontière, non seulement à la frontière des États-Unis, mais en Europe également. Il faut que nous décidions entre nous des mesures que nous jugeons suffisantes pour protéger notre identité, de la façon dont nous allons nous y prendre pour demeurer nous-mêmes et protéger nos façons de faire. Voilà de quoi il s'agit.

    Je croyais que notre pays avait une charte des droits et libertés. Parler d'État policier, c'est répandre la peur inutilement. Restons calmes et prenons une décision. La question transcende les partis. Elle ne concerne pas uniquement le gouvernement, mais tout le Canada. C'est pourquoi je me félicite de cette motion. Tout le monde aura son mot à dire, et nous discuterons. Ce n'est pas le gouvernement qui va imposer une solution à la Chambre. Nous verrons tous ensemble ce que nous en pensons, et nous prendrons une décision.

    Je respecte le comité permanent. Il est si important de respecter les députés que j'ai demandé au Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration d'examiner la question, qui transcende les partis. Bien des députés d'en face soutiendront que c'est une bonne chose. Certains ont des inquiétudes, mais bien des gens donneront leur appui.

    Nous avons fait un sondage auprès de 3 000 personnes. Soixante-seize pour cent croient que le moment est venu de protéger notre identité et notre vie privée. S'il faut une carte de identité—tout dépend de ce que nous voulons y mettre, et je reviendrai là-dessus—alors soit. Nous prendrons la décision entre nous.

    Ce qui importe, c'est que nous ayons un débat national sur la carte d'identité nationale. Bien des questions restent sans réponse. C'est pourquoi nous devons décider, nous tous, de ce que nous voulons faire. Je le répète, le monde a changé.

  +-(1115)  

[Français]

    Il est sûr que l'attaque des terroristes aux États-Unis, le 11 septembre 2001, a fait en sorte que le monde a changé. L'Europe s'est regroupée. L'Europe des 15 grandit de plus en plus. Depuis les accords de Schengen, il y a un mouvement de protection entre eux. Ils sont protecteurs entre eux. Ils décident entre eux d'avoir un dénominateur commun au niveau de l'identité.

    Les cartes d'identité existent dans plus de 100 pays dans le monde. Il n'est pas question de dire qu'on réagit aux États-Unis, mais plutôt de dire que si tout le monde le demande, est-ce qu'il y a une situation qui va faire en sorte qu'on va pouvoir demeurer ce qu'on est?

    Il y a beaucoup de choses qui sont positives au niveau de l'identité. Il y a toute la question sur le plan international. Oui, cela va prévenir le terrorisme. Cela pourrait permettre d'utiliser la technologie d'une façon amicale, par la biométrie par exemple, pour que l'on puisse s'assurer que la personne qui est devant nous est vraiment la bonne personne.

[Traduction]

    La biométrie est un moyen que nous avons. J'ignore si Steven Spielberg a donné une suite à Minority Report ou s'il y aura un nouveau James Bond sur la question, mais les experts me disent que mes empreintes digitales et mon iris me sont exclusifs. Y a-t-il un moyen d'utiliser la biométrie de manière conviviale pour nous protéger?

    Nos collègues vont dans le monde entier. À l'aéroport d'Amsterdam, il existe un programme spécial appelé Privium, qui est une méthode de balayage oculaire. Ceux qui s'en servent pour plus d'efficacité ont une carte qu'ils insèrent dans un appareil. Ils regardent ensuite dans l'appareil, et un voyant rouge ou vert s'allume. C'est tout.

    Le vol d'identité constitue, selon moi, un problème très important. Depuis 2001, près de 12 000 personnes au Canada ont été victimes de la fraude liée à l'identité. Selon la Gendarmerie royale du Canada, la fraude liée à l'identité est le type de fraude qui connaît la croissance la plus rapide en Amérique du Nord. Parlant d'argent, quelles sont les sommes en jeu? Le Conseil canadien des bureaux d'éthique commerciale estime que le vol d'identité coût 2,5 milliards de dollars par année aux consommateurs, aux banques, aux compagnies qui émettent des cartes de crédit, aux commerces et à d'autres entreprises. C'est un montant ahurissant, et on estime qu'il va continuer d'augmenter. Cette forme de fraude, qui atteint les 2,5 milliards de dollars par année, n'est même pas sanctionnée par le Code criminel. Nous devons nous attaquer à ce problème.

    La question n'est pas uniquement de savoir si nous avons besoin ou non d'une carte d'identité. Étant donné toutes les bases de données qui existent dans ce pays, et compte tenu de tous les problèmes auxquels nous faisons face chez nous, nous devons cesser de jouer à l'autruche et tenir un débat sur une politique de la carte d'identité.

  +-(1120)  

[Français]

    La menace la plus importante à la vie privée d'une personne est le vol et l'utilisation de son identité par une autre personne.

    Nos citoyens ont toutes les raisons d'exiger des outils pour protéger ce bien qui leur est propre et unique, soit leur identité. Y a-t-il une façon de protéger nos personnes âgées? Y a-t-il une façon de protéger nos jeunes? Y a-t-il une façon d'utiliser des outils de prévention qui permettront une fois pour toutes de protéger le bien le plus précieux que nous avons, soit notre propre identité?

[Traduction]

    L'on s'attend de façon implicite, sinon explicite, à ce que les gouvernements examinent les pratiques et les systèmes actuels concernant l'établissement de l'identité et en évaluent l'efficacité. C'est là qu'un débat public sur la carte d'identité nationale devient nécessaire.

    J'ai proposé que nous examinions les avantages et les inconvénients d'une carte d'identité nationale. Le système sera-t-il de nature volontaire ou obligatoire? Quelles technologies, le cas échéant, peuvent nous aider à bien protéger l'identité? Ces technologies présentent-elles une menace à la vie privée que nous ne pouvons gérer, ou nous permettront-elles de mieux protéger les renseignements personnels? Comment les données d'identification biométrique devraient-elles être conservées?

    Qu'avons-nous appris récemment? À la lumière des événements récents, le moment semble bien choisi pour tenir un débat sur cette question.

    D'ici quelques années, peut-être même bien avant, la capacité des citoyens canadiens et des résidents permanents de franchir les frontières internationales dépendra de plus en plus de l'intégrité de leurs documents.

    Le monde dans lequel nous vivons évolue. Les États-Unis vont se doter d'un programme de contrôle des entrées et sorties. Mon secrétaire parlementaire en a lui-même été témoin et a dit qu'il s'était senti humilié de devoir donner ses empreintes digitales lorsqu'il s'est rendu aux États-Unis. Y a-t-il un moyen de prévenir l'établissement du profil racial? Y a-t-il une façon de protéger les citoyens canadiens? Y a-t-il un moyen de protéger nos résidents permanents, dont 80 p. 100 sont de futurs citoyens canadiens? Ce sont ces questions qui m'intéressent.

    Nous ne vivons pas en vase clos. Lorsque nous en sommes rendus au point où les gens qui se rendent aux États-Unis doivent fournir leurs empreintes digitales, ne croyez-vous pas que nous devrions discuter de la question entre nous et voir s'il serait possible de prévenir le profilage racial? Les empreintes digitales et l'iris n'ont ni race ni religion. Y a-t-il une façon de s'assurer que lorsque ces gens vont aux États-Unis ils ne sont pas soumis à un interrogatoire portant sur leur lieu de naissance et mis à l'écart tout simplement parce qu'ils sont nés en Syrie par exemple et qu'ils sont de ce fait inscrits sur une liste noire. Voilà de quoi il s'agit. Nous voulons protéger le fait que nous sommes différents, que nous voulons souligner cette différence et que nous voulons avoir le choix de ce que nous sommes. Nous voulons demeurer Canadiens, être fiers de l'être et nous assurer que personne ne touchera jamais à cela.

    Nous ne pouvons plus penser être acceptés sur présentation d'un simple permis de conduire aux fins d'identification. Ce permis peut bien porter une photo de vous, mais s'agit-il bien de vous? C'est pour cette raison que nous devons faire appel à la biométrie. Il y a plusieurs façons d'utiliser la biométrie de façon positive. Si nous décidons de créer une carte, c'est nous qui déciderons de ce qu'on y retrouvera. Nous avons parlé d'un code à barres. Je suis d'accord avec cela. Cela pourrait être un bon outil.

    Il existe deux systèmes: hors ligne et en ligne. Hors ligne signifie que nous n'avons qu'à reproduire un iris ou une empreinte digitale sur un code à barres. On n'utilise pas ce procédé pour donner accès à une base de données. On ne fait que confirmer l'identité du titulaire de la carte et l'exactitude des données inscrites sur la carte. La personne met son doigt sur l'appareil, et un voyant vert ou rouge s'allume. S'il est vert, tout va bien. Le procédé dure une quinzaine de secondes par personne. Qu'on imagine les possibilités. Certains pensaient autrefois que la technologie, que les ordinateurs étaient mauvais pour nous. Ils sont comme ceux qui pensaient que Galilée était dans l'erreur, mais c'est leur problème.

    Au cours du débat sur la carte d'identité nationale, la protection de la vie privée doit demeurer une considération primordiale. Nous devons également nous garder de juger trop rapidement. Dans ce débat, nous avons déjà pu constater qu'il y a des opinions très fortes dans les deux camps. Certains disent qu'il faut aller de l'avant et que c'est important. Je sais qu'au moins 70 p. 100 des Canadiens estiment que l'idée est bonne, mais ils veulent s'assurer que les risques sont inexistants. Que pouvons-nous faire? Ce dont nous avons besoin, c'est d'objectivité, d'un débat ouvert qui repose sur les faits et la raison, et non sur des insinuations et des mythes.

    En fait, d'autres pays étudient également cette question avec soin. Tous les pays d'Europe, sauf d'Irlande et le Royaume-Uni, utilisent la carte d'identité. En juillet dernier, le gouvernement du Royaume-Uni a tenu des consultations publiques sur l'introduction d'une carte d'identité. Au moment de la publication de son document de travail, le secrétaire de l'Intérieur, David Blunkett, a fait mention d'un élément particulièrement important:

...tout débat au sujet des cartes d'identité ne doit pas être axés exclusivement sur les questions de sécurité nationale. Les questions de citoyenneté et de droit aux services...

  +-(1125)  

[Français]

    La Belgique a récemment annoncé qu'elle allait utiliser la technologie des cartes intelligentes dans sa carte d'identité nationale—des «smart cards»—, pour protéger l'intégrité du document et pour mieux protéger les renseignements personnels.

[Traduction]

    La leçon que nous pouvons tirer de pays comme la Belgique, c'est que les technologies évoluées ont la capacité de mieux protéger la vie privée.

    La leçon a été bien apprise par certains. Pour un, le commissaire à la protection de la vie privée de l'Australie, M. Malcolm Crompton, a déclaré ce qui suit:

...la biométrie pourrait offrir de nombreux avantages aux particuliers et à la société, et elle pourrait même permettre une meilleure protection de la vie privée.

    Les députés aimeraient peut-être que je leur cite des défenseurs des droits civiques? Alan D. Dershowitz, le fameux professeur de droit de Harvard, a dit ceci:

...je suis d'accord avec l'utilisation d'une carte d'identité nationale munie d'une puce pouvant reconnaître l'identité du détenteur de la carte grâce à l'empreinte de son doigt. Ce pourrait être un moyen efficace de prévenir le terrorisme, d'atténuer le besoin de recourir à d'autres mécanismes d'application de la loi, [...]

    Voilà qui n'est pas mauvais.

dont l'établissement de profils raciaux et ethniques, encore plus menaçants pour nos libertés civiles.

    Il a aussi ajouté qu'on ne devrait pas mêler «vie privée et anonymat». Les gens parlent du droit à l'anonymat, mais je me demande s'ils ont envoyé leur déclaration d'impôt dernièrement. Dans le monde d'aujourd'hui, je pense que tout le monde se connaît. Le temps est venu de prendre position.

    Avant de décider de quoi que ce soit, j'aimerais entendre ce que chacun a à dire. Ma principale motivation est de servir les intérêts légitimes des Canadiens. Je n'ai pas encore pris de décision. J'aimerais que l'on ait un débat clair, juste et objectif sur la question. Je crois que nous sommes tous concernés. Je pense qu'il est mieux de prévenir que de guérir. Ensemble, nous devons décider de ce qui est bon pour le Canada. La question à l'étude dépasse les intérêts des partis.

    Je crois qu'il est dans l'intérêt des Canadiens que nous évitions de tirer des conclusions hâtives. Attendons de connaître les faits avant de nous prononcer. Il y a des questions importantes en jeu, et certaines de ces questions ne comportent pas de réponses simples ou toutes faites. La motion dont nous discutons aujourd'hui conteste le principe d'une carte d'identité nationale. Elle laisse croire qu'une telle carte serait incompatible avec l'exercice de nos droits civils. J'espère avoir démontré le contraire aujourd'hui. Je ne suis pas d'accord avec l'énoncé de la motion, et c'est justement pour cela que je demande la tenue d'un débat ouvert et éclairé sur la question.

    Avant de tirer des conclusions, je préfère donner l'occasion aux Canadiens d'entendre les faits et de mieux comprendre les enjeux. N'oublions pas, après tout, que nous vivons dans une société de l'information et que le débat que je propose vise à mieux servir la démocratie.

[Français]

    C'est un débat qui va nous définir comme Canadiens et qui va nous définir aussi comme Québécois. Il s'agit de voir une fois pour toutes ce qui se passe dans le monde. Il faut arrêter de jouer à Tartuffe et de dire: «Je ne vois pas et il n'y a rien qui se passe.» Il faut, ensemble, prendre une décision et faire de ce pays ce qu'il est, soit le plus beau pays du monde.

[Traduction]

+-

    M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je sais gré au ministre d'être venu à la chambre présenter sa stratégie relative à une carte d'identité nationale ou à tout le moins de consulter les Canadiens dans sa réflexion quant aux avantages et aux inconvénients d'une telle carte.

    Dans son rapport annuel, le commissaire à la protection de la vie privée a exprimé de sérieuses inquiétudes relativement à la création d'une carte d'identité nationale comportant un code d'identification biométrique tel un balayage de la rétine ou de la forme de la main. On a dit que le numéro d'assurance sociale pourrait servir de point de départ pour une telle carte. Comme nous le savons, le numéro d'assurance sociale a suscité certains problèmes il n'y a pas longtemps, car on a découvert qu'il y avait un plus grand nombre de ces numéros que de citoyens. En fait, nombre de personnes ont plus d'une carte d'assurance sociale.

    Une telle carte d'identité est-elle à toute épreuve? Comment en assurer la mise en place compte, tenu de l'importance unique qu'elle prendra? Comment aborder les questions de la protection de la vie privée, du vol, de l'utilisation frauduleuse ou de la contrefaçon de ces cartes et la question des données biométriques?

    D'aucuns sont très inquiets, et je sais que le ministre peut comprendre pourquoi. L'approche «dictateur» qui pourrait découler de la mise en place d'une telle carte fait frémir. On a aussi parlé de puces d'identité qui pourraient être implantées sous la peau. La plupart des Canadiens craignent certainement une telle chose. Le ministre peut-il nous fournir des éclaircissements?

  +-(1130)  

+-

    L'hon. Denis Coderre: Monsieur le Président, j'espère ne pas avoir à me faire implanter une puce dans la main ou quelque chose du genre.

    J'estime que le numéro d'assurance sociale n'est pas une pièce d'identité. Ce n'en est pas une. C'est un numéro. Il existe plusieurs types de bases de données, pas seulement au sein du gouvernement. Lorsque nous subissons un examen médical, que nous achetons de l'assurance, que nous achetons une voiture, que nous allons à une institution bancaire, les banques de données sont omniprésentes.

    Qui dit identité dit authenticité. Il s'agit d'un processus d'authentification. Nous voulons savoir qui est la personne en face de nous sans avoir à lui poser une foule de questions, un point c'est tout. Voilà pourquoi ce genre de carte d'identité est nécessaire.

    Avons-nous besoin de cela? Sommes-nous prêts à cela? C'est à nous d'en décider. Je suis ouvert à cela; lorsque je vois le vol d'identité, et les spécialistes peuvent l'expliquer à la Chambre mieux que moi, je constate que chacun peut voir sa carte contrefaite, à moins de s'appeler Q dans James Bond. On ne peut toutefois contrefaire nos empreintes digitales, car cela nécessite un calcul mathématique, pas simplement une reproduction. Il y a des considérations scientifiques qui entrent en ligne de compte. La même chose vaut pour l'iris de l'oeil. Par conséquent, à moins de vous couper le doigt et de l'utiliser, et je ne sais pas pendant combien de temps je pourrais m'en servir, je pense que, fondamentalement, la biométrie peut être employée de manière conviviale. Voilà pourquoi un débat s'impose. Il faut que tous ceux qui assurent notre sécurité nous disent si c'est la meilleure façon de fonctionner.

+-

    M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je n'ai pas entendu le ministre aborder cet aspect de la question. En Europe où pareille carte existe, celle-ci contient des renseignements médicaux. Pendant un séjour en Suisse, j'ai vu qu'on a utilisé cette carte lorsqu'un homme souffrant de douleurs thoraciques est arrivé à l'hôpital. Cette carte a été passée dans un lecteur et, en moins de six minutes, l'homme était admis et un chirurgien cardiaque s'occupait de lui. C'était une question de santé et de sécurité. Je me demande si le ministre envisage pareil scénario, parce que c'est certainement un aspect positif de ce genre de système. Cet homme a eu la vie sauve parce que sa médication, ses radiographies, tout figurait sur cette carte.

+-

    L'hon. Denis Coderre: Monsieur le Président, je remercie le député de sa question, qui illustre bien la nécessité d'un tel débat. Je partage l'avis de mon collègue de Winnipeg—Transcona: il s'agit d'une question culturelle et il reste à déterminer si nous sommes prêts.

[Français]

    Lorsqu'on a ce genre de débat, il ne faut pas parler avec la langue de bois, faire preuve de démagogie et avoir des formules toutes faites.

[Traduction]

    Il est bon de tenir un débat pour soupeser le pour et le contre et étudier les avantages qu'offrirait une politique nationale sur l'identité. Premièrement, nous devons décider entre nous si nous sommes prêts à accepter des cartes d'identité; deuxièmement, nous devons déterminer les renseignements qu'elle peut contenir. Je suis de ceux qui protègent jalousement leur vie privée. Biens des gens comme le patient dont nous a parlé le député auraient intérêt à posséder une carte intelligente en raison de leur état de santé.

    Au Québec, nous avons tenu un grand débat sur l'émission d'une carte santé munie d'une puce. Il y avait beaucoup d'avantages et d'inconvénients. J'estime toutefois que le monde a évolué et que le moment est bien choisi pour discuter entre nous de ce que nous voulons comme politique sur l'identité. Lorsque nous serons prêts à prendre une décision et si nous allons de l'avant, nous pourrons nous inspirer, je crois, des modèles intéressants que nous offrent l'Europe et d'autres pays. Ce serait, à mon avis, une bonne façon de procéder.

    Je n'ai pas d'idée arrêtées à ce sujet. Je ne suis pas ici pour dire aux députés qu'il nous faut, oui ou non, une carte et déterminer les renseignements qu'elle renfermera. Je veux simplement savoir si les députés pensent que nous avons besoin d'une telle carte.

  +-(1135)  

[Français]

+-

    M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir d'interpeller aujourd'hui à la Chambre mon ancien vis-à-vis au Sport amateur et maintenant ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration.

    Tout à l'heure, le ministre nous a dit qu'on était ici pour faire un débat. Par contre, on entend des commentaires à la Chambre nous disant: «Oui, mais il faut que vous fassiez vos devoirs.» On a des réactions comme celles-là. Je veux bien faire un débat, mais j'espère que les idées du ministre ne sont pas déjà arrêtées.

    Je trouve dangereux les informations et les renseignements qui seraient contenus sur ladite carte d'identité nationale. Sera-t-elle obligatoire ou facultative? Cela aussi, il est très important de le savoir.

    Pour quelles raisons, au Canada et au Québec, n'avions-nous pas de carte d'identité? On est rendus en 2003 et on n'a jamais eu besoin d'une carte d'identité parce que notre propre identité, que l'on soit Canadien ou Québécois, nous appartient. C'est l'anonymat et la liberté d'être qui on est.

    On essaie d'incorporer dans une carte des renseignements aussi futiles que des renseignements médicaux ou d'autres renseignements qu'on peut obtenir sur nous. Ce n'est pas seulement notre nom et notre adresse. On parle de biométrie et on dit même qu'on va se protéger, avec cette carte, contre le vol de diverses autres cartes. On dit qu'on va rendre la situation plus sécuritaire.

    Mais si l'empreinte digitale est déjà précisée sur une carte, elle est là non pas seulement pour protéger notre identité, mais aussi pour donner de l'information, que ce soit aux policiers ou au SCRS. Mon identité, c'est la mienne. Elle m'est propre et elle est libre. Mon empreinte digitale m'appartient. Maintenant, je vais la mettre entre les mains de l'État et de plusieurs autres qui pourront aller chercher des informations sur une carte.

    Je trouve qu'il faut...

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): L'honorable ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration a la parole.

+-

    L'hon. Denis Coderre: Monsieur le Président, mon collègue de Châteauguay sait pertinemment que, premièrement, je n'ai jamais dit qu'on allait avoir une carte avec de l'information sur le plan médical.

    J'ai dit qu'on devait avoir un débat qui permettrait effectivement de voir si, dans un premier temps, on est prêts à avoir une carte d'identité. J'ai expliqué en long et en large que la biométrie ne peut pas être considérée uniquement comme un accès en ligne, mais aussi comme un accès hors ligne. Dans le fond, cela signifie que c'est un processus d'authentification.

    La députée de Laval-Centre a souligné avoir vécu un événement regrettable où on s'était servi de sa carte de crédit. Elle va toujours faire le plein d'essence au même endroit. Elle s'est fait prendre son numéro de carte de crédit. Quelqu'un l'a reproduit et on lui a vidé sa carte. En parlant personnellement et non pas au nom du Bloc québécois, elle a dit: «Moi, je n'ai aucun problème et cela ne m'empêche pas de dormir.»

    Mais combien de M. et Mme Tout-le-Monde ont vécu ce genre de problèmes? Combien de personnes se font voler leur identité aux guichets automatiques? Combien de personnes se font voler leur identité quand elles vont au bureau de poste? Il y a plus de 12 000 personnes, et cela représente 2,5 milliards de dollars de pertes. Ce n'est pas seulement le gouvernement. Imaginez tout le problème que cela peut créer.

    Je dis que dans un processus d'authentification, il faut avoir ce débat et dire que c'est à nous de décider ce qu'on veut avoir comme carte d'identité. Mais je suis d'accord avec le député de Châteauguay, à savoir qu'il faut protéger notre identité.

    Je pense que le temps est venu de pouvoir avoir ce genre de débat parce que le monde a changé. Il faut arrêter d'avoir la tête dans le sable, parce que c'est un fléau auquel il faut s'attaquer une fois pour toutes.

[Traduction]

+-

    M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je participe aujourd'hui au débat. Je tiens à remercier le ministre d'avoir abordé ce sujet et de nous avoir livré ses pensées. Il a soulevé, au cours de son allocution, un certain nombre de questions auxquelles il aurait dû répondre, je crois. Il nous a laissés avec plus de questions que de réponses, en fait, sur toute la notion de carte d'identité nationale.

    Je tiens aussi à remercier mes collègues néo-démocrates pour leur motion. Je me serais attendu à ce qu'ils profitent aujourd'hui de leur journée de l'opposition pour parler du conflit en Irak, mais ils ont plutôt choisi ce sujet, dont nous débattrons certes volontiers.

    L'Alliance canadienne appuie la motion du NPD. Nous nourrissons de sérieuses réserves à l'endroit d'une carte d'identité nationale.

    J'examinerai tout d'abord les raisons du ministre pour présenter cette initiative. Il dit qu'il nous faut une preuve d'identité positive pour assurer notre sécurité, personnelle et collective, compte tenu des événements du 11 septembre 2001. Qu'on soit d'accord ou non avec lui là-dessus, il faut se demander si une carte d'identité nationale constitue vraiment la solution.

    Ensuite, le ministre dit que les voyages internationaux dépendront de plus en plus de l'intégrité des titres de voyage, que les États-Unis y songent et que les Canadiens ne peuvent plus traverser la frontière avec leur seul permis de conduire comme preuve d'identité. Cela se peut et il faut vraiment s'en inquiéter mais, je le répète, une carte d'identité nationale résoudra-t-elle ce problème?

    Enfin, le ministre veut une carte d'identité nationale parce que le gouvernement fédéral est chargé de délivrer des titres d'immigration et de citoyenneté. Comme les provinces délivrent le certificat de naissance qui sert à obtenir un passeport, un permis de conduire et une carte d'assurance-maladie et comme ces documents ne sont pas à l'épreuve des faussaires, le ministre estime qu'il nous faut une carte universelle fondée sur la biométrie. Il a fait valoir cette argumentation encore aujourd'hui à la Chambre.

    À l'encontre de cette prétention, je le demande: est-ce là la solution? La carte résoudra-t-elle ce problème?

    Le ministre a également déclaré que les entreprises canadiennes étaient à la fine pointe dans ces secteurs de la technologie. Lorsque mon collègue néo-démocrate de Winnipeg—Transcona a demandé au ministre quelles entreprises ayant fait des dons au Parti libéral pourraient participer à la fabrication de ces cartes, il s'est attiré la colère et la réprobation du ministre et des députés libéraux. Pourtant, c'était une question fort valable. Le ministre l'a néanmoins qualifiée de mesquinerie politique. Je rappelle donc au ministre et au gouvernement que c'est une question fort pertinente, compte tenu de l'inquiétude suscitée par les faveurs consenties aux amis du gouvernement qui ont bénéficié de programmes ou de marchés publics qui vont de pair avec la mise sur pied de tout nouveau programme.

    Je trouve également regrettable que le ministre déplore le commentaire de notre collègue du NPD, mais se livre au même genre d'exercice à l'égard des députés de l'Alliance canadienne.

    Le ministre a également déclaré que la nouvelle carte de résident permanent sera à la fine pointe de la technologie, qu'il faut faire preuve d'ouverture d'esprit et ne pas porter de jugement hâtif. Il a ajouté qu'il faut être objectif et tenir compte de ce qui se fait dans d'autres pays. Le ministre investit énormément d'espoir dans la biométrie et demande aux Canadiens de faire confiance les yeux fermés non seulement à son idée, mais aussi à son gouvernement et à la biométrie.

    Je voulais présenter une citation, mais je passe outre et je résume ce que le ministre a dit ce matin dans cette enceinte. Il a affirmé que le fait d'appliquer la biométrie à une puce intégrée ou à une carte serait une façon sûre d'assurer la protection des pièces d'identité des Canadiens. Or, à l'heure actuelle, il est impossible de prouver une telle affirmation, parce que la technologie ne permet pas encore de le vérifier.

  +-(1140)  

    En affirmant que c'est possible et en accordant autant d'importance à l'idée que les systèmes biométriques protègent notre identité, le ministre néglige un élément primordial, à savoir que le fait d'y croire revient à faire confiance à un système qui n'est pas encore tout à fait au point, du point de vue technologique.

    Compte tenu du bilan du gouvernement à ce jour et de ce dont nous avons été témoins dans le passé avec d'autres programmes, comme l'ont rappelé mes collègues ce matin, nous avons de sérieuses réserves. Il n'est pas nécessaire de remonter trop loin dans le temps pour voir que l'administration des programmes par l'actuel gouvernement a pu suscité de graves préoccupations. Voilà qu'aujourd'hui le ministre affirme qu'il mettra en place un programme national d'identité qui protégera concrètement l'identité des Canadiens et il nous demande de lui faire confiance ainsi qu'à son gouvernement. Je dis simplement que nous ne sommes pas prêts à le faire.

    Un certain nombre de préoccupations ont été soulevées, pas seulement aujourd'hui, mais dans le passé également. L'ancienne ministre de l'Immigration, l'actuelle ministre du Revenu national, a fait état de l'une des préoccupations majeures signalées. Quand le projet de carte d'identité nationale a été formé, elle a déclaré:

    Cela me rend nerveuse. Je ne crois pas que nous en ayons besoin. Ce qui m'inquiète, c'est la police--je n'apprécierais pas de me faire demander ma carte d'identité. Si vous marchez dans la rue, à vaquer à vos occupations, comme nous sommes dans une société libre et démocratique, vous ne vous attendez pas à ce que l'on vous arrête pour vous demander vos papiers.

    C'est ce qu'a dit à ce sujet l'ancienne ministre de l'Immigration et actuelle ministre du Revenu national. Elle a ajouté:

    Il est prématuré de dire que le Cabinet sanctionnerait une telle initiative. Nous n'en avons pas discuté. La question n'est pas à l'ordre du jour.

    Compte tenu de ce qui se passe au Cabinet depuis un certain temps, nous savons tous pertinemment quelle est la situation en ce qui concerne le premier ministre qui est sur le point de partir et celui qui est sur le point de le remplacer, en ce qui concerne les discussions qui se déroulent au caucus et le tumulte qui y règne. Il n'est donc pas étonnant que le Cabinet n'ait pas encore avalisé ce projet.

    J'aimerais bien savoir si ce dossier a été soumis au Cabinet et si les ministres eux-mêmes s'entendent à ce sujet. Si nos collègues du NPD présentaient une motion à mettre aux voix aujourd'hui, il serait fort intéressant de voir la position des députés, et celle des ministres, car ils ne semblent certainement pas être d'accord.

    Ce que le ministre a déclaré à la Chambre aujourd'hui, il y a quelques minutes, a soulevé toutes sortes de questions auxquelles il aurait pu répondre, mais il ne l'a pas fait. Je vais élaborer sur ce point un peu plus tard.

    Pour le moment, je vais me concentrer sur ce que d'autres députés ministériels ont dit au sujet de la carte d'identité nationale. Le député d'Anjou—Rivière-des-Prairies a affirmé que le bilan du gouvernement fédéral à cet égard n'était pas trop reluisant. J'en ai d'ailleurs parlé un peu plus tôt. Il a dit que des millions de cartes d'assurance sociale excédentaires étaient en circulation, que des passeports avaient été volés dans des bureaux canadiens à l'étranger et que le registre des armes à feu entraînait des dépassements de coûts. Il a ensuite demandé au ministre s'il pouvait garantir que cette mesure ne se solderait pas par un cauchemar bureaucratique. C'est un député ministériel qui a posé la question. Il n'est d'ailleurs pas surprenant que la mesure l'inquiète.

    J'ai été étonné, il y a quelques minutes, d'entendre le ministre de l'Immigration dire à la Chambre et à tous les Canadiens qu'il ne croyait pas que la carte d'assurance sociale était une pièce d'identité. Quelle révélation surprenante. Une carte d'assurance sociale est un document important. Il n'y a pas si longtemps, on a créé toutes sortes de bases de données à partir des cartes d'assurance sociale et des numéros d'assurance sociale. Toutes sortes d'informations ont été recueillies et enregistrées dans des bases de données sans que personne n'en soit informé. Lorsque ce fait a été mis au jour, le gouvernement a dû faire marche arrière et tenter d'expliquer pourquoi il compilait des informations au sujet de nos numéros d'assurance sociale. Voilà donc une remarque très intéressante de la part du ministre.

    Mais je m'éloigne de mon sujet; revenons donc aux observations fort importantes de mes collègues libéraux dans ce dossier.

  +-(1145)  

    Le député de Saint-Léonard—Saint-Michel a dit que cette carte d'identité lui causait des difficultés tant du point de vue moral que de celui de la vie privée. Le député de Haliburton—Victoria—Brock a dit quant à lui que son objection concernait l'aspect orwélien de la chose. Il a noté que tant le Commissaire à l'information que le Commissaire à la protection de la vie privée avaient exprimé de sérieuses réserves au sujet de la carte d'identité. Le député de London-Centre-Nord préside le Comité de l'Immigration. Un grand nombre de nos collègues sont en déplacement avec le comité et ne pourront donc participer au présent débat, ce qui est malheureux. Il a dit qu'il était honnêtement très sceptique.

    Certes ces préoccupations concernant l'omniprésence de l'État et la protection de la vie privée ont été exprimées par d'autres ici, tout comme nous l'avons fait, moi et mes collègues alliancistes. Sur une toile de fond marquée par l'incurie du gouvernement dans le traitement des renseignements sensibles concernant les Canadiens, le gouvernement nous demande de lui faire confiance. Par le passé, il nous a donné d'amples raisons de ne pas le faire. Le gouvernement s'est montré totalement incompétent dans l'administration d'importants programmes.

    Un témoin important a comparu devant le comité, M. Morris Manning, qui est l'un des constitutionnalistes les plus éminents du Canada. Il a prévenu le comité qu'une carte d'identité accroîtrait le profilage racial, ferait peu pour combattre le terrorisme ou le problème des fausses identités, et constituerait une invasion de la vie privée du fait qu'elle donnerait lieu à la création d' une immense base de données.

    Cette affirmation va à l'encontre de ce que le ministre a dit plus tôt à la Chambre. Il nous a dit que la carte d'identité nationale protégerait notre identité et diminuerait le profilage racial. Il y a des arguments pour et contre; il n'y a donc pas réellement de conclusion. Le ministre avance des choses sans en prouver la véracité.

    Je pourrais aborder bien d'autres sujets, mais je veux me limiter à réfuter certains des propos tenus à la Chambre ce matin par le ministre.

    Il a dit que le débat sur la carte d'identité nationale ne portait pas tant sur la carte elle-même que sur une politique en la matière. Il nous a demandé de prendre en considération les renseignements que les banques recueillent à notre sujet, notre numéro d'assurance sociale, dont il a dit que ce n'était pas un papier d'identité, ainsi que les ordinateurs, Internet et tous les renseignements qui s'y promènent

    C'est justement à cause de ce genre de technologies et des renseignements qu'elles véhiculent que les Canadiens s'inquiètent du caractère confidentiel des renseignements les concernant. Nous savons que la fraude existe quant à l'identité. Le ministre en a parlé. Les préoccupations de ce genre ne sont pas dissipées par la proposition de mettre en place une carte d'identité nationale. En fait, elles sont probablement magnifiées car nous avons vu de nombreux exemples où les renseignements concernant des Canadiens ont été utilisés de manière telle que cela leur a causé beaucoup de tort et d'immenses préoccupations.

    Le ministre a parlé de 12 000 personnes qui avaient été victimes de vol d'identité. Je crois que c'est ce qu'il a dit. Ce n'est pas difficile pour nous de considérer qu'il s'agit là d'un problème grave et d'une expérience que nous ne souhaitons pas vivre.

    Le ministre a dit que l'adoption d'une telle carte nous permettrait de rester nous-mêmes et de protéger notre différence. Je me demande toutefois comment les Canadiens peuvent rester eux-mêmes si leur identité n'est pas solidement protégée.

    Si nous décidons de faire confiance à ce système et qu'il ne livre pas la marchandise, qu'aurons-nous gagné? Rien. Qu'aurons-nous perdu? Beaucoup.

    Le ministre a parlé d'un sondage au cours duquel 76 p. 100 des Canadiens ont affirmé vouloir que leur identité soit protégée. C'est beaucoup de monde. Environ 3 000 personnes avaient répondu à ce sondage. Le ministre a extrapolé et affirmé que ces gens étaient d'avis que la carte d'identité nationale qu'il proposait correspondait à la meilleure façon de protéger leur identité. C'est illogique. Le ministre tire des conclusions d'un rapport préparé dans un tout autre but.

  +-(1150)  

    Il est vrai que 76 p. 100 des gens veulent que leur identité soit protégée, mais cela signifie-t-il pour autant qu'ils sont d'avis que la création d'une carte nationale d'identité est la solution? Pas du tout. À mon avis, il est tout à fait illogique de la part du ministre de tirer cette conclusion et il faudra en tenir compte en étudiant la question de la carte d'identité nationale.

    Le ministre a plusieurs autres priorités dont il pourrait s'occuper, et nous nous demandons vraiment pourquoi il a choisi de se pencher sur la carte d'identité nationale. Mon collègue de Winnipeg—Transcona l'a d'ailleurs mentionné plus tôt. Commençons par mettre de l'ordre dans les programmes existants avant d'en créer de nouveaux.

    Je pourrais consacrer une heure au système de détermination du statut de réfugié. Je suis persuadé que les députés seraient très heureux de m'entendre parler de ce sujet une heure durant. Il y a plusieurs années que j'étudie la question à titre de député. Ce système présente toutes sortes de problèmes. Il suffit de penser au formulaire IMM 1000, aux passeports et à la sécurité de certains documents d'identité très importants. Ces problèmes persistent. Pourquoi nous lancer dans un nouveau programme qui soulève tant de questions?

    Le ministre a aussi soulevé toutes sortes de questions. Cette technologie peut-elle se révéler utile? Comment seront emmagasinés les renseignements biométriques? Quels seront les coûts? Comment sera gérée cette information? Ce sont toutes des questions valables que nous désirons poser au ministre. Nous espérions qu'il allait répondre à ces questions, au lieu de les poser.

    S'il s'apprête à présenter cette idée, nous aurions espérer qu'il donne une estimation des coûts d'un tel programme, compte tenu du fiasco de l'enregistrement des armes à feu, un autre des gâchis du gouvernement ayant coûté des milliards de dollars, compte tenu aussi de ce qui s'est produit dans le cas de l'information de DRHC concernant nos numéros d'assurance-sociale, ce dont j'ai parlé plus tôt, et de tous les autres dossiers mal gérés par le gouvernement.

    Nous avons même assisté il y a peu de temps à la Chambre à un épisode renversant où des députés ministériels ont refusé d'approuver le budget des dépenses du registre des armes à feu. Cette question est de nouveau revenue sur le tapis hier à la Chambre lorsqu'il a été souligné que l'on consacre toujours de l'argent au registre des armes à feu. Où le ministre de la Justice puise-t-il cet argent alors que le budget a été rejeté par les députés, y compris des députés ministériels?

    J'avais espéré que le ministre propose au cours du débat d'aujourd'hui à tout le moins la tenue d'un projet pilote concernant l'adoption d'une carte d'identité nationale, le déroulement d'un quelconque programme volontaire à petite échelle dans le cadre duquel des personnes pourraient faire l'essai du modèle avant qu'il soit appliqué à grande échelle. Cette façon d'agir aurait certes été prudente. Selon moi, il se serait facilité la tâche s'il avait adopté à l'avance une mesure semblable. Il aurait alors pu offrir à la Chambre un exposé exact des coûts prévus ainsi que de l'information concernant les modalités de fonctionnement d'un projet pilote en ce qui concerne les données biométriques dont il a parlé, au lieu de nous demander de faire un immense acte de foi et de croire que cette carte servira à protéger notre identité nationale, alors qu'il ressort manifestement des propos d'un bon nombre de personnes que l'on n'a pas tenu compte de ces préoccupations.

    Le ministre s'est dit ravi que nous ayons la possibilité de tenir aujourd'hui ce débat. Toutefois, si cette idée est rendue aussi loin sans avoir fait l'objet d'un débat complet au Cabinet et sans que l'on réponde à ce genre de questions, je me demande s'il ne s'agit pas pour le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration de faire la publicité d'une mesure qui ne verra vraisemblablement pas le jour.

    Je remercie mes collègues du NPD d'avoir présenté aujourd'hui cette motion. J'ai hâte de voir ce que d'autres députés ont à dire à ce sujet. J'aurais aimé que l'on tienne un vote sur cette question, afin de voir de quel côté penchent les députés, car je ne crois pas qu'il y ait consensus. J'espère que ce débat permettra au ministre de comprendre que l'idée d'adopter une carte d'identité nationale soulève de sérieuses préoccupations, car cette idée n'a pas fait l'objet d'une réflexion claire de la part du gouvernement et, compte tenu des antécédents de ce dernier, nous ne pouvons lui donner carte blanche pour appliquer un tel programme.

  +-(1155)  

+-

    M. Sarkis Assadourian (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, la semaine dernière, lorsque le ministre a traité cette question au Comité de la citoyenneté et de l'immigration, il a dit que c'était aux fins de discussion seulement, qu'il n'y avait aucun engagement. J'ai félicité le ministre alors et je le félicite maintenant. Les députés d'arrière-ban se plaignent souvent du fait que tout vient d'en haut. Cette fois-ci, le ministre est parti de la base en nous demandant d'avoir un débat sur cette question et là encore, on le blâme.

    Notre collègue pourrait-il nous parler de la motion elle-même? Je sais que la motion est parrainée présentée par la députée néo-démocrate de Vancouver-Est, mais je pense que les faits sont faussés ici. La motion parle de «l'introduction d'une carte d'identité nationale». Or, on n'introduit pas une carte de ce genre; on ne fait qu'en discuter. J'invite le député à commenter la motion.

    Le député a également parlé de la rencontre que nous avons eue avec le ministre la semaine dernière et de la discussion du ministre aujourd'hui à la Chambre. Le ministre n'a pas encore pris de décision. Il ne fait que nous consulter. En fait, il va parcourir le pays pour obtenir le point de vue des Canadiens. Le député pourrait-il nous donner son point de vue là-dessus également?

  +-(1200)  

+-

    M. Grant McNally: Monsieur le Président, en ce qui concerne l'aspect technique de la motion elle-même, je crois que la motion a pour but de lancer un débat. Nos collègues néo-démocrates affirment qu'ils ne sont pas en faveur d'une carte d'identité nationale, que nous en soyons ou non à l'étape du débat. Je tiens à dire que l'Alliance est d'accord là-dessus. Je ne peux parler au nom des députés des autres partis, mais chose certaine, les questions que j'ai soulevées aujourd'hui disent dans une large mesure au ministre ce qu'il peut faire de son idée.

    Je suis heureux que le ministre n'ait pas pris de décision. C'est bien. Je m'étonne que le débat soit allé aussi loin sans qu'on se penche sur le genre de questions que j'ai posées plus tôt. J'espérais que le ministre nous présenterait une analyse des coûts de ce programme. J'espérais qu'il proposerait des essais volontaires relativement à ce programme. J'espérais qu'il aurait un plan très précis à nous présenter avant de nous soumettre cette idée et de nous demander ce que nous en pensons. Il y a un moment et un endroit pour cela.

    Le fait qu'il y consacre autant de temps et d'énergie indique que nous avons passé le stade de l'idée. Il y met beaucoup de temps et d'efforts. Il vient de dire qu'il veut jouer un rôle de premier plan. D'après moi, c'est plus qu'un sujet de débat; il tient à ce que son idée se réalise. Il dépense des énergies à solliciter des appuis pour son idée. Il a dit que, si jamais il constatait qu'il ne trouvait pas les appuis nécessaires, il abandonnerait son idée.

    Je dis tout simplement qu'il y a encore beaucoup de questions auxquelles il faudra répondre avant d'aller de l'avant. Si le ministre est intéressé à savoir ce que nous en pensons, nous pouvons le lui dire. Nous le lui dirons aujourd'hui. Nous le lui avons dit en comité. Les Canadiens le lui diront quand il voyagera dans les régions.

    Je le répète, le ministre devrait plutôt accorder priorité à améliorer les programmes qui laissent déjà à désirer, sur le plan de l'identification. Il pourrait consulter son collègue des Affaires étrangères au sujet de la question des passeports. Je sais qu'il a tenté d'introduire une nouvelle carte d'identité pour remplacer les formulaires IMM 1000. Cela ne règle pas pour autant le problème de la sécurité de nos documents.

    Qu'il s'agisse d'une carte d'identité nationale, d'une carte anthropométrique ou d'une combinaison des deux, il est impossible de garantir qu'il n'y aura pas de fraude si des personnes ont accès aux bases de données et qu'elles peuvent falsifier l'information dès le départ.

    J'invite mes collègues à écouter attentivement les propos du ministre parce qu'il y a d'importantes lacunes dans ce qu'il a proposé, ici à la Chambre et ailleurs au pays. La Chambre est l'endroit idéal où poser les questions.

    Je remercie mon collègue d'avoir posé la question parce qu'il m'a permis d'exposer mes arguments plus en détail.

+-

    Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD): Monsieur le Président, je tiens à remercier mon collègue de ses observations sur cet important sujet et à dire que je les approuve. Le NPD s'intéresse lui aussi aux préoccupations des Canadiens relativement à la perte et à la protection de leur identité. Quand un sondage révèle que 75 p. 100 des 3 000 personnes interrogées craignent de perdre leur identité, il faut prendre le problème au sérieux.

    Le fait qu'il y ait une fuite nous oblige à protéger cette identité en adoptant la carde d'identité nationale. Cette mesure ne règle toutefois pas les points qui préoccupent les gens.

    Récemment, des milliers de Canadiens ont reçu de leur compagnie d'assurances une lettre les informant qu'un disque dur volé à Regina contenait peut-être beaucoup de renseignements importants. On leur demandait donc de vérifier les transactions dans leurs comptes bancaires et ailleurs pour voir si quelqu'un n'y avait pas eu accès.

    Il est troublant pour les Canadiens d'apprendre subitement que des renseignements à leur sujet circulent et qu'ils peuvent être volés. En fin de compte, il semble que le disque dur ait été volé pour d'autres raisons, puisque l'information qu'il contenait n'a pas été utilisée.

    J'aimerais demander au député en quoi une carte d'identité nationale rassurerait les milliers de personnes qui viennent de se faire voler une partie de leur identité?

  +-(1205)  

+-

    M. Grant McNally: Monsieur le Président, je dirais que l'adoption d'une carte d'identité nationale ne dissiperait aucunement les craintes du vol d'identité. Il fut un temps, pas plus tard qu'il y a cinq ans, où aucun d'entre nous ne se préoccupait vraiment de cette question.

    Cependant, quand je navigue sur Internet, il m'arrive de me demander si quelqu'un est en train de sonder mon ordinateur à l'instant même, si mon ordinateur est équipé d'un bon pare-feu, bref je me demande si je suis bien protégé contre le vol d'identité.

    Certes, une telle carte ne garantit pas qu'il n'y aura plus de vols d'identité. On a tort de croire une telle chose. Le ministre nous demande de croire en un système, en une technologie qui n'a pas encore fait ses preuves. Il nous dit que c'est la solution, que cela mettra fin au vol d'identité, ce qu'il ne peut prouver.

    Il demande aux Canadiens de le croire sur parole. Pour ma part, j'estime qu'il faut examiner de très près la question. Réglons les problèmes que nous avons maintenant avant de créer autre chose qui pourrait être affligé des mêmes problèmes.

+-

    M. Reg Alcock (Winnipeg-Sud, Lib.): Monsieur le Président, j'aurai l'occasion d'aborder la question plus en profondeur lorsque je prendrai la parole à mon tour, mais j'ai été intrigué par l'allusion du député à l'exemple donné par l'ex-ministre de l'Immigration qui a dit, si je ne m'abuse, que si on avait une telle carte, la police pourrait, si elle nous arrêtait, nous demander de la produire.

    Le député peut-il m'expliquer cela? Qu'est-ce qui empêche maintenant la police d'arrêter des gens dans la rue et de leur demander leur permis de conduire ou de s'identifier? En quoi l'existence d'une autre pièce d'identité modifierait-elle les pouvoirs de la police?

+-

    M. Grant McNally: Monsieur le Président, j'ai certainement soulevé ce point. J'ai même cité l'ancienne ministre de l'Immigration simplement pour montrer que toute cette question soulève des préoccupations chez les députés ministériels. Le député devrait discuter avec la ministre pour savoir au juste à quoi elle songeait lorsqu'elle a tenu ces propos. Je ne peux répondre à sa place.

    Sur un point plus crucial, l'ancienne ministre de l'Immigration et actuelle ministre du Revenu national a dit ceci:

    Il est trop tôt pour dire que le Cabinet pourrait accepter cette mesure. Nous n'en avons pas discuté. La question n'est pas à l'étude.

    Il s'agit de toute la question de la carte d'identité nationale.

    Le fait d'avoir une autre carte empêcherait-il la police de la demander ? Je présume que non. Toutefois, je ne sais pas au juste à quoi la ministre voulait en venir lorsqu'elle a dit cela. Je sais seulement que, lorsqu'une ancienne ministre de l'Immigration exprime des préoccupations au sujet d'un programme proposé par un collègue du Cabinet, cela devrait nous alerter tous et nous faire comprendre qu'il n'y a pas unanimité au Cabinet, même sur l'idée, et que beaucoup de questions restent sans réponse. Lorsque des membres du Cabinet se posent des questions, nous devrions aussi nous les poser.

  +-(1210)  

+-

    M. Bob Mills: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je demande le consentement unanime au sujet d'une motion qui porte sur les initiatives parlementaires. Je propose que, nonobstant le paragraphe 87(2) du Règlement, le tirage au sort des affaires d'initiative parlementaire prévu pour aujourd'hui, à 13 h 15, soit remis au jeudi 27 février prochain, à 13 h 15.

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): Le député a-t-il le consentement unanime pour proposer la motion?

    Des voix: D'accord.

    Des voix: Non.

[Français]

+-

    M. Antoine Dubé (Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, BQ): Merci monsieur le Président. C'est avec plaisir que je prends mon droit de parole aujourd'hui pour parler de cette motion proposée par le Nouveau parti démocratique. C'est une motion qui ne fait pas l'objet d'un vote car elle est présentée dans le cadre d'une journée d'opposition et certaines motions font l'objet d'un vote et d'autres pas. La motion se lit comme suit:

    Que, de l'avis de la Chambre, l'introduction d'une carte d'identité nationale va à l'encontre du droit à la vie privée et des autres droits civils que possèdent les Canadiens et les Canadiennes et que la Chambre s'oppose donc à l'adoption de cette mesure.

    Avant tout, j'aimerais vous aviser que je vais partager mon temps de parole avec la députée de Mercier.

    Cette motion est présentée aujourd'hui parce que le ministre, en novembre dernier, lors d'une signature d'entente bilatérale entre le gouvernement fédéral et le Manitoba, avait fait part de cette idée publiquement. Voyant que les médias n'y avaient pas donné trop d'importance, il a relancé cette idée lors d'une entrevue. La semaine dernière, il l'a relancée à nouveau, mais cette fois, devant le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration.

    Le comité souhaitait que ses membres—qui voyagent actuellement à la grandeur du Canada pour étudier un projet de loi—consultent les citoyens canadiens. Je n'ai absolument rien contre le fait qu'un gouvernement veuille consulter. Le principe de consultation, je pense que c'est bon, on est en démocratie.

    Cependant, il y a longtemps, avant d'être député, j'ai étudié dans le domaine de la consultation, en animation. Donc, pour avoir une certaine expertise dans ce domaine, habituellement, lorsqu'on consulte, on soumet des hypothèses, on soumet une proposition. Parfois, dans certaines consultations, on propose une alternative.

    Par exemple au Québec, je me souviens d'avoir collaboré avec le ministre de l'Agriculture à des États généraux sur des questions économiques. Au préalable, le ministre ou le gouvernement, mandatait des fonctionnaires pour étudier une question. Lorsque les fonctionnaires n'avaient pas toute l'expertise requise pour certaines questions, habituellement, le gouvernement consultait des experts.

    Pourquoi est-ce que je parle des experts? C'est parce que la question de carte d'identité, à première vue—il en existe déjà plusieurs—, semble être un sujet inoffensif. Mais ici, le ministre parle d'une carte intelligente, une carte qui contiendrait une puce électronique qui regrouperait des renseignements personnels. Il n'en fixe pas les balises et il n'en dit pas l'étendue. Il soumet tout cela à des consultations, de façon improvisée, inhabituelle en tout cas pour un projet normalement jugé sérieux.

    Le principe d'une carte d'identité est un débat en soi. Mais quels renseignements personnels veut-on regrouper sur cette carte?

    Si c'est pour réagir au 11 septembre, on peut dire que c'est peut-être dans le but de se prévenir contre des terroristes. Mais croyez-vous sincèrement qu'il sera inscrit sur la carte d'un terroriste, lorsqu'il va la présenter: «Je suis terroriste.» On parle de données biométriques. Je sais bien que l'oeil est le miroir de l'âme, mais est-ce que dans l'oeil, on peut voir que quelqu'un est un terroriste? Quand même, on ne peut pas.

    Il y a d'autres aspects. À la limite, on pourrait même parler de l'ADN. Est-ce qu'on veut se rendre jusque là? Le ministre n'en parle pas. Je ne veux pas non plus exagérer et répéter des propos qu'il n'a pas dit. On parle également d'empreintes digitales, on parle de beaucoup de choses. Mais le ministre ne parle pas des coûts que cela va engendrer.

  +-(1215)  

    On sait ce qui se passe dans le cas du contrôle des armes à feu. Le Bloc québécois était d'accord avec le principe de l'enregistrement des armes à feu. Le problème se situe au niveau de la gestion et de l'administration. Il y avait une recherche de renseignements. On demandait par exemple: «Avez-vous une arme? De quelle arme s'agit-il? Mais on voit que cela coûte beaucoup plus cher que prévu; on dit même qu'il en coûtera un milliard de dollars, alors qu'au début on parlait de deux millions.

    Les gens disent qu'il ne faut pas toujours se méfier du gouvernement, mais on se souviendra que le vérificateur général, je crois que c'était en 1998, a établi qu'il y avait 3,8 millions de cartes d'assurance sociale de plus que le nombre de Canadiens et de Canadiennes. Ce n'est pas quelques centaines de mille, il s'agit de 3,8 millions. C'est un exemple.

    Il y a deux ans, le ministre des Finances de l'époque voulait faire un cadeau aux Canadiens pour contrer l'augmentation des coûts de chauffage. Il a envoyé des chèques à des personnes qui étaient décédées. On peut donc se poser des questions sur l'aspect administratif.

    Je suis sûr que la députée de Mercier, si elle en a le temps, abordera la question du projet de loi C-54 et le combat qu'elle a mené à l'époque. Tout comme elle, je faisais partie du Comité permanent de l'industrie. On se demandait qui allait gérer tel type de renseignements personnels et avec quoi ceux-ci seraient recoupés. On sait qu'aujourd'hui, avec les ordinateurs, si on recoupe des données avec d'autres, il y a peu de choses qu'un citoyen peut garder pour lui. Est-ce qu'on ira aussi loin que d'inclure des données médicales?

    Ce que je déplore, c'est que le ministre semble ouvert à la tenue de consultations, mais que c'est tellement large qu'il y a place pour beaucoup d'imprécisions. Dans mon comté, des gens m'ont demandé pourquoi cela se faisait maintenant.

    Avec le degré d'improvisation du ministre, on a l'impression qu'il agit sur commande. Avec les pressions du 11 septembre, on connaît les agissements du gouvernement relativement à la sécurité publique. Il y a un renforcement des mesures de sécurité. On voit qu'il y a un mouvement à cet égard. Les citoyens et les citoyennes se posent de sérieuses questions. Ils se demandent jusqu'où ira le gouvernement. On pourrait aussi se demander jusqu'où le gouvernement américain nous demandera d'aller et quels changements nous demandera-t-il d'apporter pour répondre à ses exigences.

    Je me rappelle d'une époque où on n'avait même pas besoin de passeport pour entrer aux États-Unis. Il suffisait de dire qu'on était citoyen canadien et on passait la frontière sans difficulté. On peut comprendre qu'il faille plus de mesures de contrôle, mais est-ce que cela doit s'étendre à une carte d'identité des citoyens? On peut se poser la question. Il faudrait que le besoin soit démontré, ce qui n'est pas certain pour le moment.

    On a trop d'exemples du gouvernement fédéral qui montrent que les citoyens ont raison de se méfier lorsqu'on veut accumuler ou regrouper des renseignements personnels. On ne sait pas trop bien pourquoi et à quoi cela servira. Contrairement au ministre, nous ne sommes pas certains que cela protégera notre identité.

    Comme le disait Réal Caouette: «Le gouvernement veut votre bien, il va finir par l'avoir.»

  +-(1220)  

[Traduction]

+-

    M. Reg Alcock (Winnipeg-Sud, Lib.): Monsieur le Président, j'ai trouvé les observations du député fort intéressantes. J'ai siégé en sa compagnie à d'autres comités et je sais qu'il prend ces questions très au sérieux.

    A-t-il eu l'occasion d'étudier les déclarations et la loi du Québec en ce qui concerne la protection des renseignements personnels et de la vie privée? J'ai eu la chance de rencontrer certains fonctionnaires du Québec qui s'occupent des questions relatives aux renseignements administratifs et de l'accroissement de l'efficacité dans ce domaine. Le Québec s'est doté d'une ferme politique de protection de la vie privée, mais il applique également un système qui parvient à concilier la protection de la vie privée avec l'utilisation d'outils, comme des identificateurs, visant à améliorer les services offerts aux citoyens.

    À mon avis, c'est l'essence même du débat d'aujourd'hui. Il n'est jamais facile de nous aventurer dans une nouvelle voie, surtout si cela nous oblige à remanier les pratiques du gouvernement. D'un côté, la peur pourrait nous inciter à opter pour le statu quo, à éviter tout changement. Le député a mentionné des facteurs qui entrent grandement en ligne de compte, comme la peur de l'État et de ses interventions. J'y reviendrai lorsque j'aborderai cette question plus en détail.

    Je signale toutefois que le gouvernement du Québec a procédé à des travaux assez intéressants et innovateurs. Le député a-t-il eu l'occasion de discuter avec des fonctionnaires québécois pour voir comment ils ont réussi à concilier l'accès à de meilleurs renseignements sur la santé, dans le but d'améliorer la planification et d'élaborer une meilleure politique sociale, avec la protection des renseignements personnels ou de la vie privée? Cela pose un problème épineux aux législateurs.

[Français]

+-

    M. Antoine Dubé: Monsieur le Président, en fait, j'aimerais répondre qu'il y a sûrement des fonctionnaires et des gens au gouvernement qui réfléchissent à cette question. Je dois répondre, tout en restant bref, que le ministre responsable des services aux citoyens, M. Rémy Trudel, s'est justement prononcé contre l'idée d'une carte d'identité obligatoire pour différentes raisons suite à des consultations auprès de ses fonctionnaires.

    Il faut dire aussi qu'au Québec, il y a eu des débats à ce sujet. Évidemment, il existe une série de cartes. Par exemple, on a la carte d'assurance-maladie. Je me souviens qu'il était question d'une carte à puce. Beaucoup de citoyens offraient une résistance farouche à cet égard.

    Lorsque les gens en savent plus et se rendent compte qu'il y a non pas seulement une carte d'identité, mais aussi la carte à puce intelligente, il y a beaucoup de résistance. On va s'en rendre compte lors de la consultation qui se fera.

    Évidemment, il manque toute la question des coûts qui, à ce moment-ci, n'a pas du tout été abordée. Cela suppose une étude approfondie qui n'est pas encore faite à ce moment-ci.

    Je veux remercier le député de sa question. Il y a eu une réflexion au Québec à ce sujet. Il y a des pour et des contre comme partout ailleurs, mais jusqu'à maintenant, les contre l'ont emporté pour ne pas qu'on aille plus loin dans ce dossier.

    Je n'ai pas eu le temps de le mentionner, mais il ne faudrait pas oublier la question des droits individuels et du respect de la vie privée. C'est un droit. Un droit ne se négocie pas. C'est impossible d'avoir un droit à moitié. Un droit est un droit. Je pense que le ministre devrait rechercher des avis juridiques à ce sujet.

    À ma connaissance, et d'après ce que j'ai vu et ce qu'on a entendu ce matin, le discours du ministre est à mon avis très perfectible à cet égard.

[Traduction]

+-

    M. Sarkis Assadourian (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté les observations du député du Bloc québécois. Il a demandé quels renseignements seraient inscrits sur la carte d'identité. Personne ne le sait, et c'est la raison pour laquelle nous tenons cette discussion.

    D'abord, il est totalement injuste de demander au ministre ou à quiconque, dès le premier jour du débat, quels renseignements seront inscrits sur la carte. Ce sera au ministre, à moi, à tous les députés et aux Canadiens de dire ce qu'ils veulent voir sur la carte, si nous venons à l'utiliser. Je voudrais qu'il fasse des observations à ce sujet.

    Ensuite, le comité s'est réuni la semaine dernière. La députée de Laval-Centre a donné un exemple, que le ministre a repris à la Chambre aujourd'hui. On a volé sa carte de crédit. Elle est peut-être une des victimes de 12 000 cas de fraude. On a ensuite utilisé sa carte à son insu et sans son approbation. Si la carte d'identité pouvait prévenir au moins la vaste majorité des fraudes de ce genre, et si nous pouvions prévenir, entre autres, 12 000 cas de fraude qui font perdre 2,5 milliards de dollars aux consommateurs, le jeu n'en vaudrait-il pas la chandelle?

  +-(1225)  

[Français]

+-

    M. Antoine Dubé: Monsieur le Président, évidemment, cette question mériterait qu'on y réponde avec beaucoup d'arguments. Il y a deux aspects à cette question.

    Je serai bref quant au premier aspect. C'est la même chose qu'en matière de recherche. Comment trouver ce que l'on cherche quand on ne sait pas ce que l'on cherche?

    C'est un peu le problème du ministre. On a l'impression qu'il va à gauche, à droite en disant: «Donnez-moi votre opinion.» Il est difficile de trouver quelque chose quand on ne sait pas ce qu'on veut.

    Deuxièmement, il y a la question de la carte. Quant à l'idée de montrer son identité pour prouver qui nous sommes, il existe beaucoup d'autres moyens: on a le passeport, le permis de conduire, et cetera. La carte d'assurance-maladie du Québec porte une photo. Les étudiants ont également des photos sur leur carte. Et si l'on va plus loin, il y a les empreintes digitales et l'iris.

    Il peut devenir très précieux pour des gens qui veulent justement frauder de souhaiter voler cette carte qui va devenir encore plus informative que les autres. Est-ce qu'on n'obtient pas le résultat contraire à ce que l'on recherche? Je pense que oui.

*   *   *

[Traduction]

+-Les travaux de la Chambre

[Travaux de la Chambre]
+-

    M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Alliance canadienne): Monsieur le Président, vous constaterez que la Chambre donnerait le consentement unanime à l'égard de la motion qui suit. Je propose:

    Que, nonobstant le paragraphe 87(2) du Règlement, le tirage au sort des affaires émanant des députés prévu pour aujourd'hui, à 13 h 15, soit remis au jeudi 27 février prochain, à 13 h 15.

+-

    Le vice-président: Le vice-président: La Chambre a entendu la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

    Des voix: D'accord.

    (La motion est adoptée.)

*   *   *

[Français]

+-Les crédits

+-Jour désigné--Introduction d'une carte d'identité nationale

[Les crédits]

    La Chambre reprend l'étude de la motion.

+-

    Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, ce débat sur la motion du NPD est important. Même si le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration n'a parlé que d'un débat exploratoire, avant de prendre une décision, il me semble que le changement proposé par l'idée d'une carte nationale obligatoire est un changement fondamental qui oblige à une réflexion sérieuse.

    Je ne peux m'empêcher de citer au point de départ les propos du commissaire à la protection de la vie privée, nommé par le gouvernement et dont la tâche est de préserver la vie privée. Cette citation est tirée de son rapport annuel daté du 29 janvier 2003.

    Il est de mon devoir, dans le présent rapport annuel, de lancer un avertissement formel et pressant à chaque député et à chaque sénateur et, de fait, à chaque Canadien et Canadienne:

    Le droit fondamental de la personne à la protection de la vie privée au Canada est, plus que jamais, gravement menacé. À moins que les parlementaires et l'opinion publique ne se mobilisent rapidement pour dissuader le gouvernement du Canada de poursuivre dans la même voie, nous risquons de perdre définitivement non seulement des droits à la vie privée que nous considérons comme acquis, mais aussi des aspects importants de la liberté que nous connaissons aujourd'hui.

    Je poursuis en citant toujours le commissaire à la protection de la vie privée, M. Radwanski.

    Nous courons ce risque à cause des conséquences, tant individuelles que cumulatives, d'une série de mesures que le gouvernement a prises ou qu'il se prépare à prendre. Ces mesures ont pour toile de fond les événements du 11 septembre et visent en principe à combattre le terrorisme. Toutefois, les aspects qui menacent le plus la vie privée n'ont aucun lien avec la lutte contre le terrorisme, ou n'offrent aucune promesse convaincante d'améliorer efficacement la sécurité.

     Finalement, le gouvernement utilise les événements du 11 septembre comme excuse pour justifier de nouvelles collectes et utilisations de renseignements personnels sur nous tous, les Canadiens et Canadiennes. Ces mesures ne peuvent justifier les besoins de la lutte contre le terrorisme et, par le fait même, n'ont pas leur place dans une société libre et démocratique.

    Ce sont ses propos, et il rappelle ce qu'il a déjà dit sur de nombreux projets de loi où la nécessité de telles mesures n'a nullement été démontrée.

    Parmi les mesures qu'il cite, il y a: la carte d'identité nationale comportant diverses informations dont possiblement des identificateurs biométriques.

    Comme le soulevait mon collègue de Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, j'ai travaillé sur la question de la protection de la vie privée. C'est un domaine extrêmement intéressant et pas suffisamment partagé, surtout dans la vie que nous menons maintenant, avec les instruments et la technologie disponible dont nous ignorons très souvent la puissance et les capacités.

    Il me semble que dans le témoignage de M. Radwanski, le principe qu'il met de l'avant, qu'il rappelle comme étant un des principes fondateurs de la société québécoise et canadienne, principe qui serait mis à mal par une carte d'identité obligatoire— c'est ce dont on parle, une carte nationale d'identité obligatoire—, c'est, et j'insiste, le droit à l'anonymat face à l'État. C'est un droit fondamental en matière de protection de la vie privée.

    Il existe des cartes en ce moment. Il y en a certaines au Québec avec la photo. Il y a eu débat à savoir s'il fallait, oui ou non, une photo.

  +-(1230)  

    Il y a des cartes, comme celle de l'assurance-maladie, que j'utilise quand je vais me faire soigner si je ne veux pas débourser un sou. Il y a celle qui est utilisée lorsque je conduis. Des entreprises et des banques vont parfois nous demander de nous identifier. Dans ce cas, j'ai le choix entre diverses cartes. À ce jour, personne n'a le droit de demander le numéro de la carte d'assurance sociale. On peut le donner si on le désire, mais on peut refuser de le donner.

    C'est le régime dans lequel nous vivons en ce moment. On voudrait nous faire passer à un régime où on posséderait une carte nationale d'identité obligatoire, une carte à puce, puisque le ministre a insisté là-dessus, pouvant comprendre un nombre important de données. Il a parlé d'empreintes digitales et de données biométriques.

    Une carte, c'est d'abord un changement fondamental, mais une carte de ce type, c'est un séisme sur le plan de la vie privée. Cela change le rapport entre le citoyen, la société et l'État.

    Quelles que soient les informations contenues sur une telle carte, plus elles sont importantes, plus c'est inquiétant. Une telle carte peut être demandée à n'importe qui, n'importe quand. Nous ne vivons pas sous ce régime. Il faudrait savoir pourquoi il faudrait vivre sous ce régime avant d'entendre parler d'une telle carte.

    Je ne peux m'empêcher de penser que le ministre, un homme plutôt pragmatique, pense à satisfaire des obligations pesantes venant de nos voisins. Ces obligations pesantes ne peuvent nous être imposées que lorsque nous traversons la frontière. Il y a alors d'autres moyens de répondre à ces besoins. Il y a d'autres moyens que de nous forcer, au Québec et au Canada, à un changement fondamental de notre rapport avec ce qui nous entoure. Le fait de se promener le soir dans un parc avec son chien et son chum n'oblige pas que vous ayez une carte d'identité. Cela suppose que vous ne serez pas obligé, si vous rencontrez quelqu'un, en uniforme ou pas, de donner cette carte.

    Il y a un changement fondamental et je félicite le Nouveau Parti démocratique d'avoir soulevé cette question aujourd'hui par le biais d'une motion. Comme l'a fait mon collègue de Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, je veux bien rappeler qu'au Québec, le ministre Trudel s'est insurgé contre cette idée pour les raisons que j'ai mentionnées. Conscient de la nécessité de répondre à des impératifs de sécurité, il a dit, et je cite: «Les aspects de sécurité ne doivent pas limiter l'exercice de la citoyenneté.»

    Certains diront: «Mais il faut faire la chasse aux terroristes.» On a prouvé à de multiples reprises que celles et ceux qui veulent tromper la sécurité ont d'astucieux moyens techniques de tous ordres pouvant leur permettre de passer outre la sécurité et de défier un instrument comme celui-ci. Il peut s'agir de le falsifier ou de le voler. Pensons au sacro-saint passeport canadien qui a été l'objet de multiples falsifications. On essaie maintenant de le rendre moins falsifiable.

    On ne change pas un principe fondamental comme celui dont nous parlons, au cas où, peut-être, on serait capables de mettre ainsi au défi d'éventuels terroristes qu'on a bien d'autres moyens de cerner, de pister et de découvrir.

  +-(1235)  

[Traduction]

+-

    M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je formulerai d'abord quelques observations puis terminerai par une question.

    La députée a cité abondamment le commissaire à la protection de la vie privée. Il se trouve que j'étais membre du comité chargé d'examiner la nomination du commissaire. Je lui ai alors posé la question suivante: «Étant donné que vous êtes journaliste et que l'on n'associe guère journalisme et protection de la vie privée, pouvez-vous me dire à quel moment exactement vous avez commencé à vous intéresser aux droits de la protection des renseignements personnels des Canadiens?» Il m'a répondu honnêtement. Il a dit: «Lorsqu'on m'a offert le poste.» Il ne faudrait donc pas penser que nous avons là un expert dans l'industrie de la protection de la vie privée.

    Je suis bien conscient que nous avons de sérieux problèmes relativement à l'usurpation d'identité, à l'utilisation de cartes d'assurance-maladie frauduleuses et aux vérifications de sûreté tant à la frontière canado-américaine qu'aux portes d'embarquement vers les vols internationaux dans les aéroports.

    L'usurpation d'identité coûte quelque 2,5 milliards de dollars. Par ailleurs, on estime à quelque 3 ou 4 milliards de dollars, voire plus, les coûts découlant de l'utilisation de cartes d'assurance-maladie frauduleuses. Et ce n'est pas tout, il y a beaucoup plus de numéros d'assurance sociale qu'il y a d'habitants au Canada. Autant de problèmes auxquels nous sommes confrontés.

    Il existe donc des domaines où les risques de pertes financières sont énormes ou des occasions ratées faute de pouvoir régler ces problèmes. Cette mesure nous fournit l'occasion de récupérer des pertes énormes.

    La députée est convaincue qu'il n'y a pas de lien entre le besoin de protéger la vie privée et la menace terroriste. La députée ne croit-elle pas que le fait de supprimer la vérification de sûreté des gens qui auraient des cartes intelligentes libérerait des ressources qui pourraient alors effectuer des contrôles sécuritaires plus complets et plus efficaces sur ceux qui n'ont pas cette carte?

  +-(1240)  

[Français]

+-

    Mme Francine Lalonde: Monsieur le Président, il y a des arguments qui sont faciles avant de faire une loi, mais qui s'avèrent, au moment de l'adoption, infiniment difficiles. Je ne ferai pas de comparaison oiseuse avec le registre des armes à feu, mais il faut quand même réfléchir.

    Je répondrai à mon collègue, avec lequel j'aime discuter, que sa première question sur M. Radwanski m'en suggère deux. Comment se fait-il qu'il ait été retenu par le gouvernement si ce n'est pas quelqu'un de fiable pour défendre la vie privée? Deuxièmement, je pense qu'il sait justement à quel point la vie privée est menacée.

    Vous savez qu'on a pris l'habitude, par exemple dans une compagnie Internet qui veut se défaire des «hackers», d'engager des «hackers», parce qu'eux savent comment faire.

    Je ne suis pas influencée. J'ai eu l'occasion de travailler avec lui sur le projet de loi C-54 et, au contraire, j'ai toujours beaucoup apprécié ses avis.

    Pour ce qui est des coûts, disons que certains sont intéressés à nous dire qu'effectivement, il y aurait une diminution formidable des coûts. J'aimerais que certains travaillent sérieusement là-dessus.

    Néanmoins, il restera toujours à évaluer une éventuelle diminution des coûts avec le changement fondamental dans notre rapport avec la société. Il faut toujours penser qu'on va passer d'un régime où on n'a pas besoin d'avoir une carte à montrer n'importe quand à quelqu'un, à un régime où on devrait toujours avoir une telle carte.

    En définitive, je vais avoir besoin d'avoir des assurances extrêmement sérieuses pour trouver que cela en vaut la peine, de même que des évaluations de coûts plus sérieuses que d'autres qu'on a déjà faites.

[Traduction]

+-

    M. Reg Alcock (Winnipeg-Sud, Lib.): Monsieur le Président, la députée a parlé de l'expérience du Québec relativement à la carte d'assurance-maladie. Je crois que la solution dans ce cas particulier, qui était une question litigieuse, a été un modèle pour le reste du pays. Le gouvernement du Québec a dit que, oui, il le ferait parce qu'il trouvait que c'était une bonne idée, mais que ce serait volontaire. Si les Québécois veulent ce service, ils acceptent la carte. Si cela ne leur plaît pas, ils peuvent dire non et seront quand même servis d'une autre façon.

    Est-ce que la députée aurait une opinion différente au sujet de cette carte si celle-ci était volontaire et non obligatoire?

[Français]

+-

    Mme Francine Lalonde: Monsieur le Président, je sais que c'est aussi quelque chose qui est envisagé. Cependant, je suggérerais à mes collègues de penser au fait d'une carte volontaire qui pourrait devenir tellement désirable qu'elle inciterait d'autres à la prendre. À mon avis, l'idée d'une carte volontaire, qui pourrait être le début d'un changement, devrait être étudiée suivant les mêmes critères qu'une carte obligatoire.

[Traduction]

+-

    M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec notre leader parlementaire, le député de St. John's-Ouest.

    Nous ne voyons pas la nécessité d'une carte d'identité. Nous avons des passeports, des certificats de naissance, des numéros d'assurance sociale, et ainsi de suite. Cette idée semble être un effort de la part des libéraux pour exercer un contrôle encore plus grand sur chacun des aspects de notre vie.

    Monsieur le Président, je sais que vous n'avez pas beaucoup de temps, mais si vous voulez vous amuser, allez consulter le site emplois.gc.ca. Je le consulte parce que je le trouve vraiment intéressant. Récemment, j'ai remarqué que 12 ministères et organismes offrent des postes d'analyste du renseignement. Ce sont le ministère de la Défense nationale, l'ADRC, Citoyenneté et Immigration—le ministère dont nous parlons aujourd'hui—, le ministère des Affaires étrangères, le ministère de l'Environnement, le ministère de la Justice, la GRC, le SCRS, le ministère des Transports, Parcs Canada et même le Conseil privé.

    Je ne sais pas pourquoi ils font cela ni pourquoi on a besoin d'agents de renseignements dans tous ces ministères, mais c'est un peu comme pour la carte d'identité. Ils veulent pouvoir nous identifier et connaître nos allées et venues. Il nous faudrait présenter cette carte chaque fois que nous passons dans un bureau de douanes, à un poste de péage ou quoi que ce soit. Ce serait juste pour un contrôle. Ce sont des maniaques des contrôles. Ils veulent tout contrôler. Ils veulent nous tenir en laisse, même s'il n'y a absolument aucune raison de le faire.

    Nous avons déjà des passeports. Si les libéraux prenaient des mesures pour qu'on ne puisse pas les voler, les forger, les reproduire et en abuser de différentes manières, ce seraient les seules pièces d'identité dont nous aurions vraiment besoin pour voyager en dehors du Canada. À l'intérieur du pays, nous avons toutes sortes d'autres pièces d'identité.

    J'ai une carte d'enregistrement d'armes à feu et un permis de conduire qui portent ma photo. J'ai aussi un certificat de naissance et un passeport. Pourquoi aurais-je besoin d'une autre carte et à quoi me servirait-elle? Je ne vois pas du tout l'utilité qu'elle pourrait avoir. Ce serait juste un autre moyen pour les libéraux de savoir où vont les gens, ce qu'ils font et les sommes qu'ils dépensent. Et qui sait avec quelles autorités et quels pays ils partageront cette information? Nous ne le saurons jamais parce qu'ils ne vont jamais nous le dire.

    Le commissaire à l'information soulève toutes sortes de réserves en ce qui concerne la protection de la vie privée. Il fait état de toutes sortes de situations où il pourrait y avoir utilisation abusive des données et atteinte à la protection de notre vie privée. Il dit que cela pourrait servir à surveiller nos activités. Pourquoi le gouvernement veut-il surveiller nos activités? Il n'a pas à faire cela. Mais je le répète, le gouvernement veut un autre document, un autre mécanisme de surveillance, un autre document qui pourra être contrefait et utilisé à mauvais escient, un document qui pourra donner lieu à des abus et qui sera très mal géré. En voilà un bel exemple de Big Brother! C'est comme avoir toute une famille de Big Brothers qui surveillent tout ce que l'on fait. C'est tout simplement inutile.

    Simplement penser qu'un système n'est pas nécessaire ne veut pas dire qu'il ne faut pas l'adopter. Par contre, comme pourrait le dire Jack Nicholson, «Vous ne pouvez pas vous occuper de cela.» Les libéraux ne pourraient pas s'occuper d'un tel système. Ils ont fait un fiasco complet d'un système d'enregistrement d'armes à feu qui sont fixes. Les armes ne peuvent ni se déplacer ni rien faire d'elles-mêmes. Or, il est question, en l'occurrence, de cartes d'identité pour 30 millions de personnes qui se déplacent et qui ont des activités. Si les libéraux ne peuvent rester maîtres d'un système d'enregistrement d'armes à feu fixes, comment diable vont-ils pouvoir surveiller les cartes d'identité des gens? Ils ont lamentablement échoué avec les armes à feu.

    Un homme de ma circonscription a fait enregistrer son arme à feu. Il a obtenu cinq certificats différents. Imaginez que j'envoie ma demande de carte d'identité. Je recevrais probablement cinq cartes d'identité différentes. Est-ce ce qui se produirait? Les responsables seraient les mêmes qui ont mis en place le système d'enregistrement des armes à feu.

    Un médecin de Springhill qui a fait enregistrer cinq armes à feu a obtenu trois certificats d'enregistrement. Je suppose que, pour une famille de cinq personnes, trois sur cinq ce n'est pas mauvais. Ce qu'il faut retenir, c'est que les libéraux ne peuvent s'occuper de pareil système. S'ils avaient à le faire, ils ne pourraient s'occuper d'un système de cartes d'identité, même si nous étions tous d'accord pour les laisser mettre en place un tel système. Ils ne pourraient le faire, ils l'ont déjà prouvé.

  +-(1245)  

+-

    M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je sais que le député aime bien s'amuser un peu à nos dépens, mais, en toute justice, il a déclaré détenir un passeport, un certificat de naissance, un numéro d'assurance-sociale, un permis de conduire et une carte santé, et ne pas voir l'utilité d'y ajouter encore une autre carte. Ce qui prouve qu'il n'a rien compris. Car il n'aura pas besoin d'une autre carte. Toutes ses cartes seraient remplacées par une seule. Son porte-feuille s'en trouverait, du coup, allégé de moitié.

    Le député de Winnipeg s'est demandé si la détention de cette carte serait volontaire ou obligatoire. Du point de vue pratique, si les cartes d'assurance sociale nous posent un problème, en ce sens qu'on en aurait émis un plus grand nombre qu'il ne le faudrait, ou que nous avons des problèmes de fraude avec la carte santé ou la carte d'identité, lesquels problèmes nous coûtent tous de l'argent, pourquoi ne pas nous inspirer du système Nexus mis en place au poste frontalier de Sarnia-Windsor? Les travailleurs qui doivent franchir la frontière se soumettent à des formalités, se font dédouaner et peuvent rapidement se rendre à leur destination. Ce processus réduit l'attente à la frontière et permet aux responsables des contrôles de sécurité de mieux s'acquitter de leurs tâches auprès des personnes qui ne voyagent pas souvent.

    Le député a demandé, pour la forme, pourquoi on chercherait à connaître à quels moments nous nous déplaçons. On a réuni des preuves accablantes contre ceux qui se sont rendus coupables d'actes de terrorisme un peu partout dans le monde. Leurs déplacements aériens et le nombre des visites qu'ils font à différentes destinations sont des indicateurs clairs d'un scénario à risque élevé.

    Je renvoie ses questions au député, en lui demandant de les considérer d'un point de vue pratique. Les possibilités sont énormes, sur le plan de l'économie des coûts et sur le plan de la sécurité. Si la détention de la carte est volontaire, la protection de la vie privée cesse d'être un enjeu. L'adoption de cette carte vise à nous faciliter la vie et s'avérera une décision judicieuse.

  +-(1250)  

+-

    M. Bill Casey: Monsieur le Président, le député dit que je ne comprends pas. Or, je ne veux pas comprendre et je n'en veux pas. Que ce soit clair.

    Il est intéressant que le député me pose des questions à cet égard. Il y a une minute, il a interrogé l'intervenant précédent au sujet de la validité du Commissaire à la protection de la vie privée. Il a dit que ce dernier n'y connaissait rien en la matière. C'est pourtant son parti qui l'a engagé. Pourquoi le gouvernement l'a-t-il engagé si ce n'était pas la bonne personne pour le poste? C'est bien ça qu'il vient de dire.

    Il a également répété ce que j'avais dit au sujet du fait d'avoir un passeport, un certificat de naissance et un permis de conduire. Il a dit qu'il ne saisissait pas, que cette carte remplacerait tous les autres documents. Cette carte remplacerait-elle mon passeport? Je ne le pense pas. Allons-nous voyager d'un pays à l'autre avec une carte d'identité alors que tout le monde a un passeport? Les Canadiens, eux, auront une carte en plastique? J'en doute. Je crois qu'il ne sait pas de quoi il parle.

    Par ailleurs, il vient de confirmer que les libéraux veulent contrôler nos allées et venues. Il vient de dire qu'il est important pour eux de savoir où vont les gens. Encore une fois, c'est orwélien. Ils veulent savoir où nous sommes, ce que nous faisons et où nous allons, et moi, je ne veux pas qu'ils le sachent.

+-

    M. Greg Thompson (Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, PC): Monsieur le Président, il y a une chose importante qu'il ne faut pas oublier dans ce débat et c'est que les Américains n'ont pas cette d'identité et qu'ils n'en veulent pas. La preuve réside dans le train de mesures qu'ils ont adopté pour assurer leur sécurité intérieure. Aux États-Unis, on fait grand cas de la sécurité, comme nous le savons fort bien. Les Américains se préoccupent de leur sécurité intérieure. La mesure législative qui a donné naissance à ce département précise que rien dans cette loi ne doit être interprété comme autorisant la mise en place d'un système ou d'une carte d'identité nationale. Les Américains s'y opposent. Pourquoi donc devrions-nous en avoir une? Il n'y a pas de raison logique.

    L'autre argument est que la carte existe dans 100 pays dans le monde, mais que cela ne fait pas de différence appréciable dans le degré de sécurité. Ça ne marche pas.

+-

    M. Bill Casey: Monsieur le Président, la raison est simple. Nous ne devrions pas avoir de carte d'identité. Nous n'avons pas besoin d'une carte d'identité. Nous avons un passeport qui est respecté et honoré dans le monde entier. C'est tout ce dont nous avons besoin pour voyager à l'étranger.

    Une fois de plus, c'est tout simplement une tentative de la part des libéraux de mettre leur nez dans tout ce que nous faisons. Le député d'en face a dit qu'il est important pour eux de savoir où se trouvent les gens et où ils vont, et ce, en tout temps.

+-

    M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC): Monsieur le Président, je remercie mon collègue de partager son temps de parole avec moi.

    Le député de Mississauga-Sud est si bon vendeur qu'il est dommage qu'il ne puisse participer de nouveau au débat. Nous avons tous vu à la télévision le remarquable message publicitaire de MasterCard. C'est ce qu'il nous rappelle: tout le reste coûte si cher, mais celle-ci n'a pas de prix. Selon le député, nous n'aurons pas besoin de carte d'assurance-maladie, de permis de conduire, de carte de soins dentaires, de carte de crédit ordinaire ou de carte Woolco. Tout ce dont nous aurons besoin, c'est de cette carte universelle, et nous n'aurons plus de problèmes.

    Le député dit ensuite que le gouvernement veut savoir où nous allons. C'est une nouvelle version du «Big Brother» des années 1970. L'information que le gouvernement obtiendrait serait nul doute partagée avec le SCRS, le FBI, la CIA et la KGB. Toute une carte sur le plan de la protection de notre vie privée.

    Le plus drôle, et croyez-moi c'est drôle, c'est que tout ce dossier tourne à la mascarade. Le débat d'aujourd'hui ressemble à une comédie. Ce n'est pourtant pas parce que l'enjeu n'est pas sérieux. La protection de notre identité et de notre vie privée revêt beaucoup d'importance, et il est important de bénéficier d'un accès pertinent et sûr.

    Pourquoi est-ce si drôle? Il y a diverses explications. Premièrement, permettez-moi de vous rappeler des observations qui ont été faites et des arguments qui ont été utilisés par les députés d'en face. Ils ont dit qu'il n'était plus aussi facile qu'auparavant d'entrer aux États-Unis.

    J'ai dernièrement été assez souvent aux États-Unis, comme cela a été le cas d'autres députés, et je n'ai même pas eu à montrer mon passeport. Si les conditions d'entrée sont légèrement resserrées, les Canadiens devront nul doute montrer un passeport, ce que tous possèdent ou peuvent facilement se procurer s'ils doivent voyager. Si je ne prévois pas voyager, pourquoi aurais-je besoin d'un passeport?

    Si 50 p. 100 ou 90 p. 100 des Canadiens ne voyagent pas, pourquoi alors ont-ils besoin de se procurer un document sûr aux frais des contribuables canadiens?

    Nous avons parlé de l'utilisation frauduleuse de cartes de crédit. Peut-être devrait-on insister davantage auprès des sociétés émettrices de cartes de crédit pour qu'elles veillent à ce que leurs cartes soient moins faciles à utiliser à mauvais escient. Si ces sociétés subissent des pertes parce que ce sont elles plutôt que les titulaires de la carte qui doivent régler la note, elles vont rapidement trouver une façon de se donner une carte qui protège leur argent.

    Revenons à l'enregistrement des armes à feu. C'est peut-être la raison pour laquelle ce débat s'avère tellement vain et pourquoi cela tourne maintenant au ridicule. Les Canadiens d'un peu partout, pas uniquement à la Chambre, constatent que les libéraux proposent l'introduction d'une nouvelle carte d'identité. Dorénavant, tous les Canadiens devront être enregistrés, pas uniquement les détenteurs d'armes à feu, et auront une carte d'identité spéciale.

    Cette carte servira à tout. D'après les libéraux, elle servira de carte d'assurance-maladie, de permis de conduire, de carte d'achat, de carte bancaire, de carte de voyage et de carte d'identité. Lorsque le registre des armes à feu a été mis en place, combien de criminels, en l'occurrence ceux que le gouvernement voulait coincer, ont vraiment enregistré leurs armes à feu? Est-ce que tous les criminels ont enregistré leurs armes à feu? Il va sans dire que la réponse est non. Le registre des armes à feu n'a pas donné les résultats escomptés.

    Jetons aussi un coup d'oeil sur notre passeport. Pourquoi le passeport nous pose-t-il des problèmes? Principalement à cause de l'incompétence du ministère responsable. C'est tout simplement de la mauvaise gestion. Une quantité considérable de passeports vierges ont été volés et le ministère ne peut pas donner d'autres détails au sujet de ces documents. Voilà pourquoi l'idée d'une carte d'identité s'avère si ridicule, particulièrement en ce qui concerne le contrôle des armes à feu.

    Il n'y a peut-être qu'un propriétaire d'armes à feu sur quinze qui se soit inscrit au registre. Cela ne pose pas de problème du tout, n'est-ce pas? À peine quelques Canadiens qui possèdent des armes les enregistreront et cela coûtera 2 millions de dollars aux contribuables.

  +-(1255)  

    Toute cette affaire est un vrai cafouillage et a coûté à ce jour plus de un milliard de dollars. Lundi, un projet de loi sera adopté à toute vapeur à la Chambre pour accorder un financement supplémentaire de 15 millions de dollars au gouvernement qui, selon les experts, doit élaborer un nouveau logiciel pour corriger les erreurs. Les libéraux croient que le projet est d'une telle complexité qu'il est irréalisable, mais ils dépenseront quand même 15 millions de dollars juste pour essayer. En outre, cela ne règle que l'aspect informatique de la question.

    Il faudra peut-être ensuite ajouter 100 ou 120 millions de dollars par année pendant un certain nombre d'années, et ce ne sont que des estimations, pour l'enregistrement des armes à feu. Or, s'il faut multiplier ce chiffre par 15, ajouter les programmes complexes que cette carte doit couvrir et laisser un tel projet dans les mains des mêmes incompétents, on imagine un peu ce qu'il pourrait en coûter aux contribuables canadiens.

    Beaucoup de Canadiens enregistrent leurs armes d'épaule parce qu'ils estiment devoir obéir à la loi. C'est la seule raison. Ce n'est pas parce qu'ils souscrivent au contrôle des armes à feu. Les armes de poing et autres utilisées pour commettre des actes criminels devraient être enregistrées et contrôlées. Je n'y vois aucun inconvénient. Pourquoi enregistrer les armes d'épaule qui ont toujours été utilisées pour la chasse? C'est idiot.

    Au lieu de régler le problème des armes utilisées par les criminels afin de nous protéger, les libéraux ont fait le contraire. Ils ont fait des criminels des citoyens respectueux des lois s'ils refusent d'enregistrer leurs armes. Mais ils ont été incapables de trouver une solution au problème posé par les criminels. Si c'est ce qui se produit lorsqu'un propriétaire d'armes à feu sur 15 s'inscrit, imaginez ce qui se produirait si tous les Canadiens devaient s'enregistrer. C'est tout simplement idiot.

    J'ai quelques points à préciser. Les spécialistes nous disent que nous aurons besoin d'une base de données gigantesque pour administrer le programme et que la tâche de la tenir à jour sera énorme. Si c'est tellement plus compliqué qu'un simple registre d'armes à feu, quel sera le sujet de nos délibérations, croyez-vous, à la même période l'année prochaine?

    C'est pourquoi nous ici à la Chambre et les Canadiens partout au pays croyons que c'est idiot. Les États-Unis ont dit qu'il n'était pas question d'imposer une carte d'identité, que ce serait beaucoup trop compliqué. C'est pourtant possible au Canada, parce que nous avons déjà un registre d'armes à feu. Regardez où cela nous a mené. Tout le monde devra s'enregistrer.

    D'un bout à l'autre du pays, les gens se tordent de rire et ce n'est pas parce qu'ils croient que l'idée d'assurer une certaine sécurité n'est pas sérieuse. C'est parce que le gouvernement a le culot, après ce qui s'est produit avec le registre des armes à feu, de proposer un autre projet de loi en vue d'enregistrer tous les Canadiens selon un programme beaucoup plus compliqué que le programme d'enregistrement des armes à feu.

    Je tenais à faire part de mes préoccupations. La question sera indubitablement tranchée rapidement, comme il se doit.

  +-(1300)  

+-

    M. Reg Alcock (Winnipeg-Sud, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté avec un certain intérêt ce que notre vis-à-vis avait à dire alors qu'il a rejeté toute réflexion, tout discours ou tout débat sur ce sujet. Je partage certaines de ses préoccupations face à la décision du gouvernement d'aller dans cette direction à ce stade-ci et j'en parlerai plus tard au cours du débat.

    Toute une série de changements ont eu lieu dans le monde dans lequel nous vivons avec nos électeurs, les gens que nous servons. Tout cela a diminué la protection de la vie privée, car la vie privée est largement un mythe à l'heure actuelle étant donné la nature envahissante des outils que nous utilisons dans nos vies. Nous avons tiré des avantages énormes de l'utilisation créative de la technologie dans d'autres domaines de notre vie, des avantages qui ne passent pas par le gouvernement.

    Le député est-il opposé à la nature même d'une carte d'identité nationale obligatoire, ou s'oppose-t-il simplement à ce que le gouvernement se lance dans un projet d'ordre technologique?

+-

    M. Loyola Hearn: Monsieur le Président, c'est une excellente question. C'est comme la vieille question qui est posée si souvent, lorsqu'on demande si on achèterait une voiture d'occasion d'une personne donnée. Accepteriez-vous n'importe quel type de carte d'enregistrement de la part de ce gouvernement? C'est ce qui explique en partie les réserves. Cela ne fait aucun doute.

    Cependant, suis-je en faveur de l'enregistrement obligatoire de tout le monde? Non. Personne ne devrait être en faveur de cela. Il incomberait aux gens eux-mêmes de décider si oui ou non ils ont le sentiment d'avoir besoin de la carte.

    Nous parlons de cette carte comme si c'était la chose qui allait nous permettre de garantir la protection de la vie privée et le secret. La carte d'assurance sociale était censée faire la même chose et nous avons au moins 1,5 million de cartes de trop dans le système, là encore peut-être à cause de l'incompétence du gouvernement, mais aussi du fait de l'expertise des éléments criminels qui finissent par tout contrefaire. Combien de fois a-t-on dit aux gens que leurs cartes de crédit et leurs cartes bancaires étaient sûres? Rien n'est sûr.

    Si le gouvernement élaborait une carte et nous montrait les coûts de cette carte qui nous assurerait le type de sécurité dont tout le monde parle, si nous savions dans quoi nous nous embarquons, alors ceux qui veulent se prévaloir de tels services pourraient le faire.

    Jusqu'à ce que cela arrive, jusqu'à ce que nous en voyions les produits, personne ne souscrira à ce programme. Je tiens à nouveau à répéter au député qu'une bonne partie du problème ne réside pas dans l'intention de permettre aux gens de se sentir en sécurité et de voir leur vie privée protégée, mais dans la façon incompétente dont toute cette question a été abordée, surtout par le gouvernement actuel.

  +-(1305)  

+-

    M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je crois qu'on a assez bien établi, pendant le débat, qu'une carte d'identité obligatoire menacerait davantage la vie privée qu'une carte facultative.

    La question que je pose au député est donc la suivante: en supposant que la carte soit facultative, et puisque la fraude dans le domaine de la santé se chiffre à quelque 3 à 5 milliards de dollars par année, le député croit-t-il qu'une carte où seront enregistrés le bilan de santé, un numéro d'identification et la photo d'une personne, et peut-être même d'autres données que la personne voudra bien y inscrire, par exemple son groupe sanguin, les allergies dont elle souffre, les proches à contacter en cas d'urgence et ainsi de suite, croit-il qu'une telle carte serait vraiment une bonne idée comme point de départ?

    Dans l'affirmative, le député est-il d'avis qu'il faudrait étendre le projet pour inclure d'autres informations d'identification personnelle qui pourraient, par exemple, être rapidement reconnues aux frontières ou lors des voyages internationaux en avion et qui serviraient ainsi à réduire le fardeau des contrôles de sécurité pour ceux qui obtiendraient un prédédouanement?

+-

    M. Loyola Hearn: Monsieur le Président, si j'ai bien compris, nous avons enlevé le casque, le bâton et le ruban adhésif et il ne reste plus que le chandail à payer par rapport à la MasterCard.

    Je répondrai au député que personne à la Chambre ne s'opposerait à l'instauration d'un système de sécurité qui protégerait à la fois notre vie privée et notre identité, si c'était possible. Cependant, lorsque le député parle des nombreuses possibilités de la carte, nous devons songer à la technologie extrêmement complexe qui serait nécessaire pour que quiconque ait accès à une telle carte.

    Lorsque nous étudions des propositions de la sorte, la première chose à faire, si nous voulons gérer l'argent des contribuables de manière responsable, est de procéder à une analyse coûts-avantages. Il est bien regrettable que nous ne l'ayons pas fait à l'égard du registre des armes à feu. Si nous procédons à cette analyse au sujet de la carte d'identité, et si le gouvernement peut nous proposer un projet valable, nous pourrons peut-être alors tenir un débat différent à la Chambre.

+-

    M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD): Monsieur le Président, je vais partager le temps qui me revient avec mon collègue de Winnipeg-Centre qui, j'en suis sûr, aura beaucoup de commentaires brillants à faire à ce sujet.

    J'avoue que je me lève aujourd'hui pour prendre la parole avec des sentiments mixtes. La ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration a demandé au pays de se lancer dans ce débat sur les cartes d'identité nationales. Il est malheureux, comme nous l'avons entendu dire dans le débat jusqu'ici, qu'il faille se perdre en conjectures quant à la forme que prendra cette carte. Serait-ce une mesure coercitive ou facultative? Faudrait-il que le particulier paie pour l'obtenir ou le gouvernement en assumerait-il le coût? Combien coûterait-elle? Ne comporterait-elle que la photo ou y trouverait-on également les empreintes digitales, ou encore tenterions-nous d'utiliser une technologie encore plus avancée? Il n'y a pas de fin aux questions que l'on se pose.

    Lundi dernier, une partie du Comité de la citoyenneté et de l'immigration s'est réunie à Toronto. J'ai pu assister à ces audiences. Un des points de discussion, un des thèmes, pour reprendre le terme proposé par le ministre, était l'utilisation de ces cartes, à savoir si elle était sensée. Nous avons entendu plusieurs membres du grand public témoigner, tant à titre personnel qu'en tant que porte-parole de groupes. Après l'exposé, j'ai demandé à chacun d'entre eux s'il pouvait me donner une bonne raison pour justifier la carte et, en fait, si nous devions aller de l'avant avec cette idée. Les trois représentants qui s'y trouvaient m'ont répondu par la négative. Ils n'estimaient pas que son utilisation était justifiée et ils ont catégoriquement rejeté l'idée d'aller de l'avant avec ce projet.

    Un des membres d'une délégation était Morris Manning, un criminaliste bien connu qui pratique à Toronto, mais qui est bien connu aux quatre coins du Canada après ses nombreuses années de pratique du droit. Il nous a remis un volumineux mémoire portant sur un grand nombre de questions et se concentrant sur certains points. Je tiens à lui en donner le crédit parce qu'un certain nombre de réponses, de suggestions et de questions que vous allez entendre de ma bouche aujourd'hui viennent des points qu'il a soulevés.

    Nous avons entendu le ministre dire que l'une des raisons de la création d'une carte d'identité nationale, c'est que, d'une certaine manière, cela réduirait l'établissement de profils racistes au Canada. Je ne comprends pas. J'ai beaucoup travaillé sur cette question dans ma circonscription parce que celle-ci se trouve à la frontière canado-américaine et que je constate fréquemment les conséquences de l'établissement de profils racistes du côté américain, d'abord officiellement, puis officieusement. Pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté, je dirai que l'établissement de profils racistes concerne surtout les gens qui viennent du Proche-Orient, de l'Afrique du Nord, du Pakistan et de l'Inde.

    L'existence d'une telle carte n'aura absolument aucun effet sur la question de l'établissement de profils racistes. La discrimination se poursuivra, de même que les abus et les humiliations. Les autochtones continueront de faire l'objet de discrimination dans les réserves. De même, pour les Afro-Canadiens du centre-ville de Toronto, l'adoption de cette carte n'aura aucun effet sur la discrimination dont ils font l'objet.

    La position du ministre ne tient pas. Je dirai même que la carte aura pour effet que le racisme se manifestera non seulement dans les rues et les aéroports, mais partout ailleurs, dans les conseils d'administration, dans les écrits et dans nos ordinateurs parce que les gens seront identifiés d'après leur nom comme faisant partie d'un groupe visé par la discrimination. Cette position ne tient vraiment pas.

  +-(1310)  

    On nous a dit, au cours des quelques dernières minutes, que cette carte pourrait servir à enrayer la fraude contre le consommateur. Il y a deux réponses à cela. Tout d'abord, le gouvernement n'a aucune responsabilité dans ce domaine. C'est un problème qui doit être réglé par ceux qui accordent le crédit. C'est à eux et non au gouvernement qu'incombe cette responsabilité. Ensuite, cela ne donnerait rien. Chaque fois qu'on adopte de nouvelles mesures, les criminels trouvent une façon de les contourner. Ce n'est donc pas une solution. De même, compte tenu des répercussions négatives possibles de l'adoption d'une telle carte, il devient très clair qu'il ne faudrait pas s'engager dans cette voie.

    Je ne peux que qualifier de ridicule la proposition selon laquelle la carte pourrait être utilisée au même titre que le passeport ou le remplacer. Pour ce qui est du système des passeports, nous sommes liés au reste du globe par un protocole international et des traités internationaux. C'est un système international. L'adoption d'une carte d'identité au Canada ne permettra certainement pas de remplacer le passeport. S'il arrivait que tous les pays se réunissent et songent à adopter une carte d'identité internationale qui remplacerait les passeports, nous pourrions peut-être alors nous pencher sur la question de remplacer le système, mais ce n'est pas du tout le cas à l'heure actuelle. La communauté internationale ne songe pas à changer le système et cet argument ne tient donc pas pour justifier l'adoption d'une carte d'identité nationale.

    Permettez-moi de poser la question autrement. Pourquoi ne devrions-nous pas avoir une telle carte? La réponse qui s'impose ici est liée aux droits et libertés fondamentaux dont nous jouissons au Canada. La Charte canadienne nous accorde le droit de nous déplacer et le droit de passer d'un endroit à l'autre dans notre société sans devoir présenter nos papiers à un représentant de l'autorité, qu'il s'agisse des policiers, de l'administration scolaire ou autre. C'est un système qui existe dans les états policiers, mais pas au Canada.

    Pourquoi ne devrions-nous pas avoir une telle carte? Encore une fois, nous entendons dire que la technologie est tellement perfectionnée que nous pouvons rendre le système infaillible. Plus précisément, nous entendons parler de reconnaissance rétinienne ou d'autres types de technologie biométrique. Les gens regardent trop la télévision et trop de science-fiction. Nous n'avons pas de tels systèmes. Ils n'existent pas. Il n'y a aucune technologie à ce moment-ci qui nous permette de faire cela. Ces cartes n'existent pas. Je répète, cette technologie n'existe pas. Elle n'existe ni au Canada ni ailleurs dans le monde.

    Une voix: C'est faux.

    M. Joe Comartin: C'est vrai, mais compte tenu des connaissances des députés d'en face, monsieur le Président, je ne devrais pas tenir compte de ce genre de remarque.

    Il y a un autre point que M. Manning a soulevé, et je veux lui rendre hommage pour son travail, qui, à mon avis, est très utile à ce débat. Il a regardé ce qui se faisait partout dans le monde. Il a examiné ce qui s'était passé dans certains pays où les tribunaux se sont penchés sur cette question. Plus précisément, même s'il a mentionné qu'ils n'étaient pas les seuls, il a attiré notre attention sur les Philippines et la Hongrie, qui ont porté la question d'une carte d'identité nationale devant leur cour suprême, leur tribunal de dernière instance. Dans les deux cas, ces cartes ont été jugées anticonstitutionnelles. J'ai demandé pourquoi nous ne devrions pas avoir une telle carte et c'est, je crois, qu'elle ne résisterait pas à une contestation en vertu de la Charte. Nous ne pouvons pas imposer ce fardeau à notre système.

    Mon dernier argument est que l'Angleterre et les États-Unis ont tous deux envisagé l'idée d'avoir une telle carte. L'Angleterre est en train de l'examiner et, comme c'est le cas à ce jour au Canada, l'idée suscite des réactions très négatives. Comme nous l'avons entendu dans un des discours précédents, les États-Unis ont en fait rejeté l'idée. Ils ont essayé il y a quelques années d'élargir leur système de permis de conduire pour délivrer des cartes d'identité nationale. L'idée a été rejetée par la vaste majorité des Américains. Les pays qui se rapprochent le plus de nous de par leur jurisprudence et leur législation ont rejeté ce concept ou sont sur le point de le faire.

  +-(1315)  

+-

    M. Sarkis Assadourian (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, le député a parlé du profilage racial des Canadiens d'origine arabe. J'ai vu le député à de nombreuses activités canado-arabes. Il conviendra sûrement avec moi que la plupart des Canadiens d'origine arabe sont indignés de la politique américaine qui les oblige, eux seuls, à donner leurs empreintes digitales. Je dois le faire aussi. Lorsque je traverse la frontière, je dois me soumettre à cette formalité même si je suis citoyen canadien depuis 35 ans et député fédéral, mais la loi m'oblige à le faire parce que je suis né dans un certain pays.

    Nous discutons d'une carte d'identité que nous pourrions avoir à l'avenir. Elle ne pourra pas prévenir le profilage racial des citoyens canadiens à la frontière.

    Le député s'insurgerait-il toujours contre le fait que je ne peux franchir la frontière comme le font les autres députés, sans me soumettre à la vérification de mes empreintes digitales à cause de mon lieu de naissance? Serait-il d'accord sur le principe voulant que je sois son égal lorsque je me présente à la frontière américaine, parce que nous aurions tous les deux une carte d'identité? Comme le ministre l'a dit, l'empreinte de mon pouce n'a ni couleur, ni religion. L'empreinte de mon pouce est à moi. Personne ne peut la contrefaire. C'est la même chose pour le député. Il pourrait franchir la frontière, tout comme moi, avec un contrôle de l'empreinte du pouce.

+-

    M. Joe Comartin: Monsieur le Président, cela ne fonctionnera pas. Les Américains ne reconnaîtront pas cela. Si un Canadien a un casier judiciaire et est gracié, les États-Unis ne reconnaîtront pas cette réalité. Ils ont déjà décidé de ne pas le faire.

    En outre, la carte ne protégerait personne contre l'établissement officieux d'un profil racial.

    À plusieurs occasions, à la Chambre, j'ai invité le ministre des Affaires étrangères à s'attaquer à ce problème, à se plaindre et à protester auprès des Américains, en raison de l'humiliation et du mauvais traitement dont étaient victimes certaines personnes qui désiraient traverser la frontière, surtout celles d'origine arabe ou musulmane. La plupart du temps, le ministre a fait la sourde oreille.

    Les États-Unis ont enfin entendu raison et ont fait marche arrière dans les programmes officiels, mais, officieusement, la discrimination et le profil racial ont toujours cours.

    Une de mes électrices, une femme au teint très clair et aux cheveux noirs qui a la citoyenneté canadienne depuis 12 ans et le statut de résidente depuis environ 16 ans, était constamment arrêtée à la frontière lorsqu'elle faisait quotidiennement la navette pour son travail aux États-Unis. Elle ne comprenait pas pourquoi. Finalement, elle s'est rendu compte que c'était parce qu'elle avait un accent du Proche-Orient. C'est par son accent que les douaniers l'identifiaient. Un jour qu'elle portait une chaînette munie d'une croix, car elle est chrétienne et non musulmane, elle n'a pas été arrêtée. À partir de ce jour-là, elle a décidé de porter sa chaînette lorsqu'elle traversait la frontière.

    Est-ce là ce que nous allons devoir faire? C'est l'autre solution à la carte d'identité pour éviter le problème. Voilà ce qui se passe à la frontière, et la carte d'identité n'y changera strictement rien.

  +-(1320)  

+-

    M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai des commentaires à formuler au sujet de certaines déclarations du député. Premièrement, je crois l'avoir entendu dire que la carte serait soit facultative soit obligatoire. Le député peut être certain qu'une carte nationale serait comme la carte d'assurance sociale et qu'elle devrait être obligatoire pour être efficace.

    Une déclaration m'a quelque peu secoué, si bien que j'aimerais avoir des explications de la part du ministre. Je crois avoir entendu le député dire que la fraude contre le consommateur n'était pas du ressort du gouvernement. Or, je croyais que le gouvernement devait protéger les citoyens et qu'il devait agir dans ce sens. Il importe plus que tout que les Canadiens soient protégés contre la fraude en matière de consommation. Ce type de fraude n'implique pas seulement les fraudeurs.

+-

    M. Sarkis Assadourian: Il n'est pas ministre.

+-

    M. Joe Comartin: Monsieur le Président, je ne suis pas ministre, c'est vrai, et je ne voudrais certainement pas être ministre au sein de ce gouvernement.

    Pour revenir à la question, le député a raison de dire que le gouvernement a un rôle à jouer. Toutefois, c'est le fournisseur de crédit qui est responsable au plan de la prévention. Le gouvernement ne peut intervenir efficacement à cet égard.

    Il est évident que le gouvernement a une responsabilité. La fraude contre le consommateur est un crime. Aux termes du Code criminel, c'est une infraction passible de sanctions devant les tribunaux.

    Je le répète, la prévention de la fraude contre le consommateur n'est pas une responsabilité du gouvernement, mais de l'entreprise qui consent le crédit.

+-

    M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole au sujet de la motion d'opposition du NPD, qui stipule:

    Que, de l'avis de la Chambre, l'introduction d'une carte d'identité nationale va à l'encontre du droit à la vie privée et des autres droits civils que possèdent les Canadiens et les Canadiennes et que la Chambre s'oppose donc à l'adoption de cette mesure.

    Je suis fier que le leader à la Chambre de notre parti, la députée de Vancouver-Est, ait présenté cette motion, avec l'appui du député de Winnipeg--Transcona. Mes deux collègues ont traité du sujet de façon très éloquente et ont expliqué clairement certaines des raisons pour lesquelles le NPD s'oppose à l'introduction d'une telle mesure.

    Je remercie le député de Windsor--St. Clair qui partage son temps de parole avec moi et qui vient de livrer un discours très éloquent.

    Comme l'ont fait d'autres députés, je vais d'abord citer le Commissaire à la protection de la vie privée du Canada, M. George Radwanski, parce que, en plus d'exposer clairement la question, il formule une opinion qui agace beaucoup les députés libéraux. Certains désapprouvent clairement M. Radwanski et trouvent ses commentaires irritants. C'est donc pour moi une excellente raison de m'y arrêter.

    En 2002, dans un discours qu'il prononçait au collège des affaires publiques Arthur Kroeger, M. Radwanski déclarait que, dans une société libre:

    L'atteinte au droit à la vie privée doit être l'exception et non pas la nouvelle norme. Nous devons adopter une nouvelle attitude qui reconnaît les menaces et leur impose des limites. Le fardeau de la preuve doit toujours être sur ceux qui disent qu'un nouvel empiétement sur la vie privée est nécessaire pour répondre à un besoin social important. Toute proposition en ce sens devrait être évaluée calmement et attentivement, selon sa valeur propre. Elle doit être évaluée à la lumière de quatre grands critères.

    Il est important de mettre ces critères en évidence aujourd'hui. Nous devons nous demander si l'introduction de la carte d'identité nationale est conforme à ces critères, pour déterminer si elle est vraiment nécessaire et justifiée.

    Le premier critère dont parle M. Radwanski est la nécessité démontrable de s'attaquer à un problème précis. Quel but, quel objectif poursuit le gouvernement libéral? Nous n'avons toujours pas entendu d'explication claire de la part des députés libéraux, à l'exception du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration qui a plaidé, dans le contexte restreint de l'immigration, en faveur de la carte d'identité.

    Deuxièmement, peut-on démontrer, selon toute probabilité, l'efficacité d'une telle carte pour régler ce problème? Nous avons entendu des députés, notamment celui de St. John's, qui doutent sérieusement que l'utilisation de la carte puisse même permettre d'atteindre les quelques objectifs dont le gouvernement fédéral a bien voulu nous faire part. On a aussi exprimé cette inquiétude très réelle au sujet du coût de lancement de cette carte, qui, selon les prévisions du gouvernement, atteindrait environ 3,6 milliards de dollars, pourvu que tout fonctionne parfaitement. Si on se fie à ce qu'on a connu dernièrement, dont le dossier désastreux du registre des armes à feu, on pourrait s'attendre à des dépassements de coûts de je ne sais combien.

    Il est certes improbable, à l'évidence, que la carte réussisse à régler même l'éventail limité des problèmes que le ministre de la Citoyenneté et l'Immigration a portés à notre attention.

    Troisièmement, les restrictions imposées à la protection de la vie privée sont-elles proportionnelles aux avantages? La plupart d'entre nous diront que, dans une société libre, la minimisation et la banalisation de la protection de la vie privée présentent plus d'inconvénients que d'avantages.

    Quatrièmement, n'y a-t-il pas une autre moyen moins intrusif pour parvenir aux mêmes fins? Autrement dit, a-t-on épuisé tous les autres moyens possibles pour atteindre les buts visés par l'utilisation d'une telle carte d'identité? À cette question, je réponds non.

    Un à un, les députés ont exprimé leur crainte qu'il y ait une diminution de la protection de la vie privée, une érosion de nos libertés personnelles et des choses mêmes à l'aide desquelles nous nous définissons en tant que Canadiens. Le gouvernement a été avare de commentaires au sujet de la nécessité de la carte. Il s'est contenté de dire qu'elle serait pratique, puisque toutes les autres pièces d'identité seraient réunies dans cette même carte.

  +-(1325)  

    Certains sont encore plus offusqués que moi. On m'a demandé dans l'antichambre pourquoi nous devrions nous arrêter à une carte d'identité nationale. Pourquoi ne pas nous munir d'une puce glissée sous la peau? Nous pourrions alors passer devant un genre d'écran et transmettre au gouvernement tous les renseignements dont il a besoin au sujet de nous tous. Un député encore plus cynique a proposé le tatouage d'un code à barres sur l'avant-bras. Il suffirait de passer le bras devant un lecteur approprié. Il serait peut-être plus utile de nous le faire tatouer sur le front, surtout dans le cas du député de Winnipeg-Sud. Cela cachera une partie de son front dégarni.

    Bien des gens font un rapprochement entre une carte d'identité nationale et l'utilisation d'une puce ou d'un code à barres. Il ressort clairement des interventions des députés que les Canadiens ne sont pas disposés à sacrifier une partie des libertés individuelles dont ils jouissent en tant que citoyens du Canada, étant donné surtout que personne n'a encore établi la nécessité d'une telle initiative. Il faut toujours user de prudence lorsque nous nous aventurons sur une pente glissante qui risque de miner les libertés individuelles au Canada. Faute d'arguments solides établissant la nécessité d'une carte d'identité nationale, nous suivrons probablement l'exemple d'autres pays comme l'Australie et le Royaume-Uni qui ont examiné la question, l'ont débattue, puis l'ont rejetée.

    En faisant porter notre motion d'opposition sur cette question, nous prenons les devants, pour ainsi dire. Nous espérons convaincre le parti au pouvoir que la grande majorité des Canadiens s'entendent pour dire qu'une telle mesure empiéterait sur leurs libertés individuelles, ce qu'ils ne toléreraient pas.

    D'autres intervenants avant moi ont cité des arguments valables d'un des plus grands constitutionnalistes au Canada, Morris Manning. Celui-ci s'est joint dernièrement à des immigrants et à des groupes multiculturels qui dénonçaient le projet d'une carte d'identité nationale. Il a dit que la Constitution de la Hongrie interdit pareille carte, celle-ci ayant aussi été déclarée illégale aux Philippines. Voilà deux pays qui ont envisagé l'adoption d'une telle carte. Comme je l'ai dit, le gouvernement de l'Australie a failli être renversé lorsqu'il a envisagé l'adoption d'une carte d'identité, il y a 15 ans. M. Manning a prévenu le président du Comité de l'immigration que la carte d'identité accroîtrait le profilage racial, qu'elle aurait peu d'effet sur la lutte contre le terrorisme ou l'usurpation d'identité et qu'elle constituerait une atteinte à la vie privée des Canadiens, sans compter qu'il faudrait créer une immense base de données de renseignements.

    À titre de Manitobain, je conçois fort bien comment la confidentialité des renseignements personnels peut être compromise. Lorsque le gouvernement conservateur de Gary Filmon était au pouvoir, il a privatisé et adjugé à contrat, ou vendu si vous préférez, les données sur la santé des Manitobains, les renseignements personnels sur leur santé. Le gouvernement a confié cela à contrat à une entreprise privée, malgré les vives protestations de nombreux Manitobains.

    Cette entreprise, comme cela arrive souvent, a ensuite fusionné et elle a été vendue à une autre société américaine. Maintenant, les renseignements personnels sur ma santé sont entre les mains d'une entreprise privée de Houston, au Texas. Je ne sais pas si cette entreprise va vendre les renseignements personnels sur ma santé à une société pharmaceutique susceptible de me solliciter et me pousser à acheter un certain produit, ou si elle va vendre la base de données à une entreprise d'abonnement à des magazines. Quand la situation prend cette ampleur, comment peut-on savoir si le système est vraiment sûr?

    Il n'existe aucun système de base de données parfaitement sûr qui soit impossible à compromettre. Plus il y aura de données importantes sur cette carte, plus elle intéressera ceux qui pourraient souhaiter avoir accès aux informations qu'elle contient afin de les utiliser à des fins odieuses. C'est une cible pour ceux qui ont les moyens de compromettre ces cartes.

  +-(1330)  

+-

    M. Reg Alcock (Winnipeg-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je succombe à la tentation de répondre aux questions concernant la santé et de signaler que la sécurité du dossier médical du député tient à la solidité de la serrure du conteneur à déchets situé derrière le bureau de son médecin, et je m'aventure dans le débat sur les libertés civiles.

    Je veux citer moi aussi un défenseur des libertés civiles. En effet, Alan Dershowitz, de la faculté de droit de Harvard, a dit ceci:

    Enfin, il y a la question du droit à l'anonymat. Je ne crois pas que nous ayons les moyens de reconnaître un tel droit en cette ère de terrorisme. Il n'est absolument pas question de ce droit dans la Constitution. Et, même si la Cour suprême a reconnu le droit à la protection de la vie privée, la vie privée et l'anonymat, ce n'est pas la même chose... Une carte d'identité nationale pourrait rehausser les libertés civiles, en fait, en réduisant le besoin d'un stéréotype racial et ethnique... Du point de vue des libertés civiles, je préfère un système qui enlève un peu de liberté à tout le monde à un système qui enlève beaucoup de liberté et de dignité à quelques-uns.

    Qu'est-ce que le député de Winnipeg-Centre répond à cela?

+-

    M. Pat Martin: Monsieur le Président, c'est justement la question que je me posais moi-même. En fait, les deux autorités concurrentes citées, soit Manning et celle que cite le député de Winnipeg-Sud, ne sont pas d'accord et se sont prises aux cheveux sur cette question. Elles représentent deux points de vue opposés.

    Je crois qu'il ne faut pas compromettre la liberté individuelle. Je crois que nous avons les moyens au Canada de respecter la liberté et la dignité. Nous n'avons pas besoin de les vendre ni de les compromettre pour accroître la sécurité de la collectivité. Je ne crois pas que nous ayons épuisé toutes les options pour protéger le système canadien contre le terrorisme et je ne souscris pas à l'argumentation voulant que la carte d'identité nationale améliore la sécurité nationale.

    Je n'approuve ni ne veux seulement entendre l'argumentation libérale selon laquelle le sacrifice de nos libertés individuelles permettra d'améliorer le moindrement notre sécurité. Si les libéraux avaient une argumentation convaincante, je serais peut-être prêt à reconnaître que nous pourrions sacrifier cela.

+-

    Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, j'ai pris note de la question que le député de Winnipeg-Sud a posée à mon collègue de Winnipeg-Centre. Bien que mon intention ne soit pas répondre à sa question, il convient de lui rappeler que le commissaire à la protection de la vie privée, George Radwanski, qui s'est longuement exprimé sur le sujet, a déclaré sans équivoque que le droit à l'anonymat est au coeur même de la dignité, de l'autonomie et de la liberté de l'homme et que nous devrions résister à l'idée que nos empreintes digitales soient fichées dans un registre national. Le programme peut démarrer de manière aussi bénigne qu'on voudra, mais nous risquons de devoir produire nos papiers à tout moment, de devoir produire un passeport interne en quelque sorte.

    Je voudrais interroger le député de Winnipeg-Centre au sujet de la position, telle que nous la percevons, prise par le Canada à l'égard de nos voisins, les États-Unis. On laisse entendre que nous pourrions fort bien finir par adopter cette mesure, car les États-Unis pourraient l'exiger de nous.

    Le député peut-il nous dire ce qu'il pense du fait que, d'après un article à ce sujet paru en page éditoriale du Globe and Mail un peu plus tôt cette semaine, les États-Unis se méfient tellement des conséquences que pourrait avoir une telle carte, que le Congrès américain a fait insérer dans le projet de loi créant le bureau américain de la sécurité intérieure la disposition suivante:

    Aucune des dispositions prévues dans la présente loi ne sera réputée autoriser la mise en place d'un système ou d'une carte d'identité nationale.

    Le député de Winnipeg-Centre pourrait-il nous donner son avis sur cet argument qu'invoquent souvent les libéraux ces jours-ci, à savoir que, comme nous finirons de toute façon par nous plier au diktat États-Unis, nous ferions mieux de cesser de nous y opposer?

  +-(1335)  

+-

    M. Pat Martin: Monsieur le Président, comme l'a indiqué la députée de Halifax, il semble y avoir une contradiction. Les Américains se considèrent comme de farouches individualistes, attachés à une école de pensée à la Ayn Rand d'après laquelle ils ne compromettraient jamais leur liberté et leur dignité de telle façon.

    En fait, si on proposait aux Américains l'idée de devoir se munir de leurs papiers d'identité pour aller acheter un journal au magasin du coin, ils seraient horrifiés. Pourtant, les Américains semblent exercer des pressions dans ce sens sur le Canada et veulent identifier les Canadiens de cette façon.

    La députée soulève un point important lorsqu'elle mentionne qu'un article de la loi américaine sur la sécurité publique prévoit ce qui suit:

    Aucune des dispositions prévues dans la présente loi ne sera réputée autoriser la mise en place d'un système ou d'une carte d'identité nationale.

    Pourtant, les Canadiens sentent des pressions. Dans l'éditorial du 11 février, publié dans le Globe and Mail, on admet que des sénateurs, notamment Hillary Clinton, ont ouvertement et publiquement déclaré qu'il faudrait pouvoir facilement identifier et repérer les Canadiens. Cela nous fait nous demander ce qui motive une telle initiative. Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration propose cette mesure alors qu'il ne peut invoquer ni cas ni argument pertinent pour en justifier la nécessité. Qu'est-ce qui le pousse donc à prendre cette initiative maintenant?

+-

    M. Sarkis Assadourian (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, la motion dont la Chambre est saisie se lit comme suit:

    Que, de l’avis de la Chambre, l’introduction d’une carte d’identité nationale va à l’encontre du droit à la vie privée et des autres droits civils que possèdent les Canadiens et les Canadiennes et que la Chambre s’oppose donc à l’adoption de cette mesure.

    Il n'est pas question de présenter un projet de loi, une motion ou une mesure d'initiative parlementaire. Le député pourrait convenir qu'il faudrait peut-être parler de «possibilité d'introduction» ou de «discussion portant sur une carte d'identité nationale», plutôt que de parler carrément de l’introduction d’une carte d’identité nationale alors que rien n'est encore introduit.

+-

    M. Pat Martin: Monsieur le Président, je ne pense pas que nous soyons intéressés, pour l'instant, à accueillir un tel amendement. Les négociations de ce genre se font généralement dans les coulisses.

+-

    M. Reg Alcock (Winnipeg-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je suis attristé, mais franchement pas surpris, par la teneur du débat d'aujourd'hui. Il est d'une importance incroyable. Je suppose que c'est un sujet sur lequel nous reviendrons fréquemment au cours des années à venir.

    Je dirais que, dans l'ensemble, je partage un grand nombre des craintes exprimées par les gens d'en face, et j'y reviendrai en détail. Je pense qu'elles sont au coeur du problème.

    La question des différentes formes d'identificateurs uniques et de l'utilisation de la technologie dans les endroits publics est d'une importance incroyable. C'est une question sur laquelle je fais des recherches et travaille très fort, tant aux États-Unis qu'au Canada.

    Je ne suis pas surpris que les gens aient peur. C'est très courant. J'ai un petit truc quand je parle de cette question devant un auditoire. Je demande aux gens d'imaginer qu'ils sont avec un groupe d'amis et qu'ils lancent la conversation sur l'utilisation que le gouvernement fait de la technologie de l'information. Combien de phrases seront prononcées avant que les mots «Big Brother» ou «George Orwell» n'arrivent sur la table? Cette image d'un gouvernement malveillant, omnipotent et destructeur est très puissante. Le problème est qu'il n'y a pas d'autre image pour la remplacer.

    L'idée que nous nous faisons du gouvernement n'a rien d'agréable, d'amical et de convivial. C'est une impossibilité. Quand les députés disent qu'ils ne font pas confiance au gouvernement dans ce dossier, je dois dire que je suis d'accord avec eux. Je crois que les gouvernements ne sont pas encore prêts. Quand les députés disent qu'ils ne pensent pas que les gouvernements aient les connaissances techniques nécessaires, et les exemples abondent, je suis d'accord avec eux. Je pense que ce sont de bons arguments.

    Malheureusement, le libellé de la motion fait qu'elle semble proposer pour le XXIe siècle l'équivalent d'un autodafé de livres. Nous disons qu'il ne faut pas en parler ni même y penser, parce que ce n'est pas correct, qu'il ne faut pas, qu'il faut faire marche arrière. Mais ça non plus, ce n'est pas correct.

    Cette attitude prend en partie racine dans la tendance humaine à craindre le changement, à craindre la différence, et à craindre d'avoir à réfléchir à la manière dont on pourrait faire les choses différemment. En partie, c'est la crainte de la technologie. La majorité des députés appartiennent à une cohorte d'âge qui a grandi sans cette technologie. Ils ne possèdent pas ce degré de confort que procure son utilisation quotidienne et que nos enfants sont en train d'acquérir.

    Dans ce contexte, si l'on pense à la toile mondiale, il est intéressant de constater que la dernière version d'Internet, et la plus connue, n'est entrée en fonction qu'après l'arrivée du gouvernement au pouvoir. Netscape, première interface graphique vraiment conviviale, a été lancée en novembre 1994. Voilà à quel point c'est récent. Notre capacité à accepter, à perfectionner et à intégrer tout ce que signifient ces changements et ces nouveaux pouvoirs est assez limitée.

    Je ne me préoccupe pas ou, plutôt, je ne m'attriste pas tant des craintes qui sont exprimées ici. À mon avis, elles ont des fondements.

    Je m'inquiète cependant de la nature du débat public. En tant que représentants des citoyens canadiens, comment pouvons-nous tenir une discussion sur un thème semblable sans que cela se résume à déterminer qui sont les bons et qui sont les méchants? Nous ne ferons que nous haranguer et recourir à de vieilles images correspondant à de vieux stéréotypes sans jamais nous arrêter pour dire qu'il existe peut-être des façons de faire les choses différemment pour améliorer le gouvernement, le rendre plus transparent et plus responsable.

    Je trouve franchement très étrange que deux députés aient dit que l'actuel Commissaire à la protection de la vie privée est une autorité en la matière. C'est le même Commissaire à la protection de la vie privée qui a réagi lorsque le Commissaire de l'accès à l'information a dit que, par souci d'imputabilité, les députés devraient être autorisés à voir le calendrier du premier ministre. Le Commissaire à la protection de la vie privée l'a vilipendé pour avoir tenu ces propos, alors que cela se fait dans d'autres pays.

    Le Commissaire à la protection de la vie privée, si l'on s'en remet aux propos des éditorialistes du pays, n'a pas la crédibilité nécessaire pour se porter garant d'une cause aussi importante que celle de la protection de la vie privée. Selon moi, le droit d'avoir une vie privée distincte du gouvernement est bien ce qu'il est, c'est-à-dire un droit. C'est un droit qui n'est pas inscrit dans notre Charte des droits et libertés, mais il devrait l'être. À mon avis, le droit à la protection de la vie privée est le droit d'agir indépendamment du gouvernement, sans que celui-ci exerce un contrôle et impose une orientation.

    Historiquement, cependant, ce droit a été confondu avec le droit à l'anonymat. Dans un passé qui n'est pas trop récent, mon droit de pratiquer ma religion dans certains contextes peut avoir exigé de moi un prix que je n'étais pas prêt à payer : l'incapacité d'obtenir un emploi ou, dans certains cas plus odieux de l'Allemagne d'avant-guerre, l'exposition à des conséquences beaucoup plus graves.

  +-(1340)  

    Le droit à la vie privée a souvent été confondu avec l'anonymat et le secret, et je crois que cela a créé des problèmes. Quel est l'un des plus grands problèmes qui minent la gestion publique actuellement? Quel est l'un des grands problèmes des relations entre le citoyen ou le législateur et le gouvernement? Je vais vous le dire: c'est la quasi-impénétrabilité du gouvernement. C'est la culture du secret qui règne dans notre fonction publique. C'est l'incapacité de savoir ce qui se passe au sein du gouvernement.

    Quelle réponse obtient-on chaque fois qu'on tente de mettre à jour de l'information? On nous répond que les renseignements ne peuvent être communiqués parce qu'on violerait ainsi le droit à la protection de la vie privée. Cette protection de la vie privée sert de prétexte, au sein d'un petit cercle, pour éviter d'assumer un véritable leadership démocratique et de faire une reddition de comptes publics digne de ce nom.

    Autre point important, la protection de la vie privée sous forme d'anonymat n'existe pas vraiment. Nous y renonçons tous les jours. Je suis de ceux qui trient les cartes qu'ils ont sur eux parce que je déteste avoir beaucoup de cartes sur moi. Je crois bien en avoir au moins 16 sur moi. J'ai ma carte d'assurance-maladie, une carde de crédit, une carte bancaire, une carte Air Miles et une carte Safeway, parce qu'elle me permet d'obtenir toutes sortes de rabais quand je fais l'épicerie pour la famille. Lorsque j'utilise ces cartes, je fournis une grande quantité de renseignements personnels concernant mes habitudes d'achat, de consommation et ainsi de suite. C'est là la raison d'être de ces cartes.

    Nous ne faisons que commencer à nous interroger sur l'effet qu'ont ces cartes sur nos droits d'exister en tant qu'êtres distincts des exigences et des souhaits de l'entreprise ou du gouvernement. La notion de vie privée que met de l'avant notre actuel commissaire à la protection de la vie privée et que j'entends souvent reprise de ce côté-ci de la Chambre n'existe tout simplement pas. Seuls le gouvernement et d'autres organismes en parlent au sein de certaines tribunes. On prétend que les sociétés émettrices de cartes de crédit en savent plus à notre sujet que quiconque parce qu'elles peuvent suivre les gens dans leurs déplacements et savoir ce qu'ils font de jour en jour.

    Du fait de notre réaction instantanée à la notion voulant que la protection de la vie privée soit une bonne chose mais le changement une mauvaise, nous n'avons pas pris le temps d'explorer comment le concept de la protection de la vie privée pourrait et doit, selon moi, être modifié pour offrir le droit à la protection de la vie privée à tous les citoyens et pour nous permettre en même temps d'accroître notre droit de demander des comptes à notre gouvernement. Je vois cette modification comme une amélioration de la démocratie et de nos droits en tant que citoyens.

    Lorsque nous examinons la question étroite de la carte d'identité, je suis d'accord. Je suis agnostique là-dessus. L'établissement d'un document d'identité unique qui m'est propre a un avantage énorme pour ce qui est des types de changements qui pourraient survenir pour nous faciliter la vie. J'aime le modèle québécois, qui était fondamentalement un modèle volontaire, alors que les gens pouvaient simplement adhérer s'ils le voulaient, mais n'avaient pas à le faire autrement. Les gens avaient le droit de refuser et de demeurer anonymes.

    Pour cela, j'applaudis le ministre. C'est un bon ami à moi, et je sais qu'il a longuement réfléchi à cette question. Il croit vraiment que ce n'est pas une façon détournée de faire passer une certaine forme de politique publique. Il affirme que c'est une question importante. Il voit une certaine valeur dans cette carte et il dit qu'il veut en discuter. Si le débat se limitait à passer quelques heures à dire que c'est une mauvaise chose et que nous ne devrions jamais en discuter à nouveau, je pense que nous raterions une chance extraordinaire. La Chambre devrait relever le défi et les députés de tous les côtés devraient passer un certain temps à examiner cette initiative.

    On me rappelle que je dois signaler à la Chambre que je partage mon temps de parole avec le secrétaire parlementaire du ministre des Finances.

    L'établissement d'une carte d'identité nationale unique est une amélioration importante dans la vie publique au Canada. Il y a quatre conditions préliminaires pour moi: premièrement, il faut prendre la réforme du gouvernement et la gestion publique au sérieux; deuxièmement, nous devons améliorer la responsabilité publique en réorganisant et en modifiant les lois et les structures régissant la façon dont nous conservons l'information publique; troisièmement, nous devons renforcer le leadership démocratique et la reddition de comptes de la fonction publique à notre institution; quatrièmement, nous devons contester la culture du secret qui existe à l'intérieur de la fonction publique et que nous accélérons. Nous avons une chance maintenant. Nous sommes saisis de nouvelles mesures sur l'accès à l'information. Nous avons la chance de revoir la législation sur la protection des renseignements personnels.

  +-(1345)  

    Je pense que nous devrions relever ce défi et examiner ces deux lois en vue de centrer ces importantes mesures législatives sur les droits des citoyens. Je pense qu'à l'intérieur de cela, nous nous apercevrons qu'avoir une façon unique d'identifier les citoyens permettra d'améliorer nettement l'efficacité et la qualité des services gouvernementaux dont nous jouissons à titre de Canadiens.

+-

    M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Alliance canadienne): Monsieur le Président, il va sans dire que je conteste le principe au nom duquel le député justifie cette carte d'identité nationale. Parmi toutes les cartes qu'il dit avoir dans son portefeuille, seule la carte de l'assurance sociale lui est imposée par le gouvernement, et son utilisation est limitée aux prestations sociales. On ne peut pas vraiment l'utiliser pour autre chose.

    La carte d'identité nationale a pour effet de créer une sorte d'État policier. À ce propos, le député a parlé de George Orwell et de Big Brother. Le gouvernement exigerait que chacun possède une carte d'identité nationale. La police aurait le droit de demander à quelqu'un qui se promène innocemment dans la rue de produire sa carte, sans aucune raison en dehors du fait que chacun devrait avoir une carte et que la police aurait le droit de l'exiger. Bien sûr, le contrevenant serait passible de sanctions. Il y aurait enquête et peut-être même arrestation, car il serait détenu le temps qu'on fasse toutes les vérifications. Si l'enquête révélait que le contrevenant ne possède pas de carte d'identité, il serait passible d'une amende ou d'une peine d'emprisonnement. Pour moi, c'est là l'équivalent d'un État policier, d'un Big Brother, d'une atteinte à nos libertés individuelles.

    Qu'en pense que le député? N'y aurait-il pas un mécanisme pour forcer les Canadiens à avoir cette carte et, s'ils ne l'avaient pas, ne seraient-ils pas emprisonnés?

  +-(1350)  

+-

    M. Reg Alcock: Monsieur le Président, 3 des 16 cartes qui se trouvent dans mon portefeuille sont effectivement des cartes du gouvernement. Par exemple, j'ai ma carte d'assurance-santé, mon certificat de naissance et mon permis de conduire. Personne n'oserait dire qu'on viole mon droit à la vie privée en m'obligeant à porter un permis de conduire que les policiers peuvent me demander de présenter à l'occasion.

    M. Howard Hilstrom: Vous n'êtes pas obligé d'avoir un permis de conduire.

    M. Reg Alcock: Mais je dois en posséder un si je veux exercer certaines activités.

    Le député a dit qu'il serait obligatoire de porter une carte d'identité nationale, d'en posséder une et de la présenter aux policiers à leur demande. Il affirme qu'on serait passible de peine et même d'emprisonnement si on refusait de se procurer la carte. Où a-t-il lu une telle chose? J'ai lu le discours et la déclaration du ministre, j'en ai discuté avec lui, et je n'ai vu cette obligation nulle part. Cette idée correspond peut-être à la vision de l'Alliance canadienne sur la façon de mettre en oeuvre ce genre de politique.

    Ce n'est pas du tout ce dont il est question maintenant. Il est question de reconnaître qu'il est temps d'arrêter de dire qu'on va régler les choses en ne changeant rien. Une telle attitude tient de l'entêtement et de la sottise. Les citoyens ont avantage à avoir un gouvernement qui agit adéquatement.

+-

    Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, je serai brève, mais je voudrais poursuivre sur la lancée du député de Winnipeg-Sud qui affirme que de trop nombreux Canadiens ne considèrent pas leur gouvernement comme leur ami, comme un allié. Je crois, comme le député, que c'est tout à fait déplorable.

    Le député n'est-il pas d'avis que cette situation découle du piètre bilan du gouvernement libéral, qui agit trop souvent en faveur d'intérêts privés et non dans l'intérêt public, ce qui est tout à fait contraire à la raison d'être d'un gouvernement?

    Je félicite le député d'avouer candidement qu'il ne ferait pas confiance au gouvernement actuel pour la gestion d'une telle carte d'identité. Il est donc contradictoire qu'il affirme du même souffle que nous devrions y voir la possibilité de responsabiliser davantage les gouvernements, et qu'il se dise prêt à accepter cette carte, à certaines conditions. Le député pourrait-il nous éclairer à ce sujet?

+-

    M. Reg Alcock: Monsieur le Président, c'est une excellente question. Je peux difficilement y répondre en quelques mots, malheureusement. Je vais quand même essayer.

    Je crois que nous sommes à la veille de vivre d'importants changements quant à la façon de gérer l'espace public et le gouvernement. Je crois que certains des problèmes auxquels sont confrontés les gouvernements, y compris celui-ci, sont issus de la manie du secret et de l'absence de reddition de compte; c'est aussi simple que ça. Je crois que la Chambre a un rôle réel à jouer en tant qu'endroit où se définissent les valeurs nationales, où sont débattues les véritables valeurs, ou bien où elles pourraient l'être, en vue de dégager un consensus, mais elle est de moins en moins pertinente en ce qui concerne la façon dont nous sommes administrés. À mon avis, c'est inacceptable.

    Nous devons nous demander ce que nous pouvons faire pour changer quelque chose d'aussi imposant, complexe et encombrant que le gouvernement. Une solution consiste à changer la façon dont nous gérons l'information en nous ouvrant à diverses possibilités, notamment à la possibilité de changer notre façon d'aborder la protection de la vie privée. Sinon la solution devient un outil pour maintenir un mauvais gouvernement en place.

    Nous ne pouvons nous contenter de dire «nous ne le ferons pas». Nous devons nous ouvrir au changement, un peu au moins. La protection de la vie privée est-elle importante? Oui, exceptionnellement importante. Mais est-il important d'abandonner la manie du secret et de nous doter des outils nécessaires pour nous permettre de vraiment gérer le gouvernement? Je le crois. En fait, je crois que c'est crucial et que ces deux choses ne s'excluent pas mutuellement.

  +-(1355)  

+-

    Le vice-président: La Chambre sait que la présidence est réfractaire, et je le suis, à l'idée de demander à un député de prendre la parole pendant deux minutes. Avec l'assentiment de la Chambre, je vais autoriser une autre question au député de Winnipeg-Sud. Une question supplémentaire de la députée de Halifax.

+-

    Mme Alexa McDonough: Monsieur le Président, j'ai bien écouté ce qui s'est dit et je sais que le député de Winnipeg-Sud s'est réellement intéressé à toute la question du recours à la technologie, se penchant sur la meilleure façon de tenir compte à la fois de l'intérêt public et des considérations privées et ainsi de suite. Je suis heureuse de sa participation dans ce dossier.

    J'aimerais néanmoins lui demander s'il ne craint pas un peu la possibilité que le gouvernement profite du fait que la sécurité préoccupe les gens au plus haut point pour lancer son projet de carte nationale d'identité et pour le faire adopter sans qu'on s'en rende trop compte? Par la suite, les gens se plaindront du fait qu'ils ne veulent pas renoncer à leur vie privée et qu'ils n'aiment pas beaucoup l'idée de la mise en place d'un quasi-apartheid, de sorte qu'ils seraient tenus de rendre compte de tous leurs faits et gestes, même quand ils ne feraient absolument rien qui puisse intéresser qui que ce soit, tout simplement à cause de la crainte et de l'insécurité qui règnent dans la société en général.

    J'irai plus loin. Ce n'est pas tant une question que j'ai à poser, mais une observation que j'aimerais formuler. Sauf erreur, le député a accusé le Nouveau Parti démocratique de ne pas vouloir discuter de la question. Or, il doit se rendre à l'évidence: si nous n'étions pas disposés à discuter de cette question, nous n'aurions pas utilisé notre journée désignée pour attirer l'attention du public et mettre la question au grand jour en en discutant au Parlement, car c'est pour cela que nous sommes ici.

+-

    M. Reg Alcock: Monsieur le Président, nous avons encore ici quelques questions très intéressantes. L'une des choses que j'ai dites c'est que si le gouvernement affirmait aujourd'hui qu'il comptait adopter une carte d'identité nationale, je m'y opposerais. Je m'y opposerais farouchement et je voterais en faveur d'une motion semblable à celle que le Nouveau Parti démocratique a déposée, et ce, exactement pour les raisons que la députée invoque. Compte tenu de la crainte du terrorisme qui règne en ce moment et de la nécessité de renforcer la sécurité, il y a un problème. Le problème, c'est que nous consentirons volontiers à nous départir de toute une gamme de libertés qui nous sont chères pour un avantage possible.

    En même temps, ce qui me préoccupe et que je recherche sans cesse, c'est une affirmation du genre: N'oublions pas que le recours à la technologie, l'établissement de liens entre les banques de données du gouvernement et autre chose du genre, tout cela peut être considéré excellent si cela se fait dans les bonnes conditions. Pour moi, une partie de ces conditions...

+-

    Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît. La présidence a fait preuve de générosité et j'apprécie la collaboration des députés, mais je dois maintenant passer aux déclarations de députés.


+-Déclarations de députés

[Article 31 du Règlement]

*   *   *

[Français]

+-Le Festival du voyageur

+-

    M. Raymond Simard (Saint-Boniface, Lib.): Monsieur le Président, dès demain, soit du 14 au 23 février, se déroulera, dans le quartier historique de Saint-Boniface, le Festival du voyageur, la plus grande fête hivernale de l'Ouest canadien.

    Le festival accueille annuellement plus de 150 000 visiteurs et a des retombées économiques annuelles de plus de 11 millions de dollars au Manitoba.

    S'étant mérité d'importants prix nationaux et internationaux, le Festival du voyageur attire de nombreux artistes de partout au Canada. Avec la tenue d'activités tels le Bal du gouverneur et le Festin du bourgeois, le festival rend hommage aux premiers arrivants canadiens dans l'Ouest qui ont joué un rôle indispensable dans la traite des fourrures de Montréal, jusqu'en Louisiane.

    À l'occasion du Festival du voyageur, le Fort Gibraltar, le Poste de la Rivière-Rouge et le Fort de la Reine vibreront au rythme des traditions francophones, métisses et autochtones de la colonie de la Rivière-Rouge au XIXe siècle.

    Fière de son patrimoine, la chaleureuse communauté franco-manitobaine vous invite à venir partager sa joie de vivre et réchauffer l'hiver au Manitoba.

*   *   *

  +-(1400)  

[Traduction]

+-Le Bal de Neige

+-

    M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la sixième édition du concours de sculptures sur neige du Bal de Neige d'Ottawa a eu lieu du 3 au 9 février.

    Je suis fier de dire que, cette année, l'équipe albertaine était composée d'électeurs de ma circonscription, Red Deer. Dawn Detarando, Will Truchon et le chef d'équipe Brian McArthur disposaient de 43 heures pour sculpter leur bloc de neige. Les oeuvres étaient jugées selon des critères de valeur technique et artistique.

    Le Bal de Neige se déroulait sous le thème «L'esprit canadien». La sculpture de Dawn, Will et Brian, intitulée «Le canot magique», traduisait cet esprit de manière fantaisiste en évoquant les voyageurs qui faisaient le commerce des fourrures au début de la colonie ainsi que d'autres personnages hauts en couleurs.

    Je saisis l'occasion qui m'est fournie de saluer l'équipe albertaine qui a été choisie pour participer à ce concours et de féliciter ses membres pour avoir remporté le deuxième prix. Je les remercie de leur contribution artistique que tous les Canadiens ont pu apprécier.

*   *   *

[Français]

+-La prévention du suicide

+-

    M. Gérard Binet (Frontenac—Mégantic, Lib.): Monsieur le Président, le suicide est un phénomène qui affecte tous les groupes d'âge et toutes les classes sociales, et il frappe même quelquefois très près de nous.

    Cette année, du 9 au 15 février se tient la 13e édition de la Semaine québécoise de la prévention du suicide. L'objectif principal est de convaincre les jeunes que le suicide n'est ni une solution ni un choix.

    La province de Québec a le plus haut taux de suicide au Canada. Le suicide est actuellement la première cause de décès chez les adolescents, suivi de près par les accidents.

    Nous devons reconnaître les efforts déployés par les professionnels pour prévenir ces tragédies. À cette fin, je tiens à souligner l'excellent travail de l'Ensoleillée, un centre de ressources communautaires en santé mentale de Lac-Mégantic et, plus particulièrement, M. Dany Couture pour son implication. Celui-ci lance une invitation à la population à mettre en évidence l'importance d'être personnellement engagé en prévention du suicide. Les soins et les traitements peuvent sauver des vies. La prévention du suicide, c'est l'affaire de tout le monde!

*   *   *

+-François Joseph

+-

    M. Marcel Proulx (Hull—Aylmer, Lib.): Monsieur le Président, cette année, le Programme des ordinateurs pour les écoles d'Industrie Canada célèbre son 10e anniversaire.

    Récemment, un commettant de mon comté était honoré. Il s'agit de M. François Joseph.

    M. Joseph, du Centre de technologie des ordinateurs pour les écoles à Hull, a été nommé un des bénévoles de l'année au Canada. Il donne de son temps, son énergie et son enthousiasme depuis plus de deux ans.

    M. Joseph a réparé environ 225 ordinateurs tout en aidant des étudiants.

    Ce programme aide les jeunes Canadiens à profiter d'un accès amélioré à la technologie informatique en milieu d'apprentissage.

    Bravo à M. François Joseph! Sans sa collaboration à titre de bénévole, le programme n'aurait jamais connu la croissance exponentielle qu'il a connue.

*   *   *

[Traduction]

+-Le curling

+-

    M. John O'Reilly (Haliburton—Victoria—Brock, Lib.): Monsieur le Président, lors du championnat provincial de curling dont l'enjeu était la coupe Nokia et qui s'est tenu récemment au centre Hershey, à Mississauga, deux équipes olympiques ont donné un aperçu de leurs talents lors d'un match hors concours.

    Je félicite les deux équipes, mais en particulier celle de Lindsay, en Ontario, composée du capitaine Tim Keenan, du troisième Dale Morgan, du deuxième Rob Bowins et du premier Jason Kilgannon.

    Les entraîneurs Finni Verbik, Elizabeth Crum, Susan Banks et Lorraine Mullen ont de quoi s'enorgueillir de leur équipe, les Hard Rockers.

*   *   *

+-Le registre des délinquants sexuels

+-

    M. Gary Lunn (Saanich—Gulf Islands, Alliance canadienne): Monsieur le Président, en mars 2001, le gouvernement a voté en faveur de l'établissement d'un registre des délinquants sexuels. Le Parlement a ordonné au gouvernement d'en terminer l'établissement au plus tard en janvier 2002. Deux ans plus tard, le gouvernement a finalement présenté un projet de loi qui ne règle pas le problème.

    D'abord, le projet de loi n'est pas rétroactif. Les délinquants sexuels présentent un taux de récidive de 40 p. 100. Cependant, pas un seul délinquant sexuel actuellement en prison ne figurera dans ce registre, et ils sont des milliers à purger leur peine en prison. Pis encore, après la condamnation d'un délinquant, il faut quand même faire une demande au moment de la détermination de la peine pour faire inscrire son nom sur la liste. Même alors, un délinquant peut demander que son nom ne figure pas sur la liste si cela cause plus de mal que cela ne sert l'intérêt public.

    Il ne faut surtout pas engorger nos tribunaux, qui sont déjà débordés, avec des appels de violeurs se plaignant de la violation de leur vie privée. Le projet de loi C-23 est un parfait exemple de la façon dont les libéraux élaborent les politiques. Ils élaborent des politiques faibles, sans orientation claire, et s'en remettent aux tribunaux, plutôt qu'au Parlement, pour prendre les décisions difficiles. Ils devraient avoir honte de ce projet de loi.

*   *   *

  +-(1405)  

+-Les Jeux d'hiver du Labrador

+-

    M. Lawrence O'Brien (Labrador, Lib.): Monsieur le Président, du 9 au 15 mars, la ville de Happy Valley-Goose Bay, au Labrador, sera l'hôte des huitièmes Jeux d'hiver du Labrador. Le Labrador célébrera cette année le 20e anniversaire de la tenue des premiers jeux, qui ont eu lieu en 1983.

    Les jeux d'hiver sont une importante activité au Labrador. Les athlètes venant de toutes les localités se mesurent les uns aux autres dans des compétitions amicales. Les jeux comprennent des sports d'hiver intérieurs et extérieurs, y compris une foule d'épreuves propres au Nord et au Labrador. Ils comprennent aussi un important volet culturel, mettant en scène des artistes de toutes les régions et de toutes les cultures du Labrador.

    Je félicite les organisateurs, les bénévoles, les athlètes et les autres participants aux Jeux d'hiver du Labrador de 2003. J'invite tous les habitants du Labrador et tous les Canadiens à prendre part à cette célébration unique de l'esprit communautaire du Labrador.

*   *   *

+-L'énergie renouvelable

+-

    M. Julian Reed (Halton, Lib.): Monsieur le Président, à quelques jours seulement de la présentation de son premier budget, je voudrais rappeler au ministre des Finances, et à la Chambre, le potentiel énorme des biocarburants.

    En investissant dans des biocarburants comme l'éthanol et le biodiésel, on pourrait créer des emplois, rehausser la sécurité énergétique, stimuler le développement rural, améliorer la santé de nos électeurs et réduire les émissions de gaz à effet de serre. Avec la nouvelle technologie et des coûts à la baisse, il faut agir dès maintenant pour en retirer les bénéfices.

    Nous avons fait les premiers pas, mais nous pouvons et devons faire plus. Des membres de notre caucus représentant des circonscriptions rurales ont demandé qu'on investisse 400 millions de dollars dans une stratégie nationale des carburants renouvelables afin de stimuler une production suffisante de biocarburants ici même, au Canada. J'espère que le budget nous réserve une bonne nouvelle à cet égard.

*   *   *

[Français]

+-Le golf sur glace

+-

    Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Neigette-et-la Mitis, BQ): Monsieur le Président, du 21 au 23 février prochains, un évènement spécial se déroulera dans ma circonscription de Rimouski—Neigette-et-la Mitis. Il s'agit d'un tournoi de golf sur la banquise du fleuve Saint-Laurent. La première édition de l'évènement prévue pour 2002 avait dû être reportée, faute de glace, mais cette année, la glace est manifestement au rendez-vous.

    La banquise comportera un terrain de neuf trous situé à Rimouski même, face à l'Île Saint-Barnabé. Hiver et glace obligeant, la distance habituelle entre les trous sera réduite de 30 p. 100. Les verts seront blancs et les balles seront obligatoirement de couleur.

    Cette idée originale attirera plus d'une centaine de joueuses et de joueurs de golf du Bas-Saint-Laurent, de la Gaspésie et du Québec. Ceux-ci pourront profiter du grand air en démontrant leur habileté à jouer sur une surface glacée.

    Je tiens à souligner cet évènement local et à féliciter les organisateurs et organisatrices de nous faire découvrir ce plaisir inusité de l'hiver québécois.

*   *   *

[Traduction]

+-Le député de LaSalle--Émard

+-

    Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Alliance canadienne): Il a été vu, monsieur le Président. Les électeurs de LaSalle--Émard ont vu leur député faire une apparition à la Chambre des communes pas plus tard que l'autre jour. Il marche, il parle, il vote, mais pas très souvent. C'est un grand pays que nous avons et il faut beaucoup de temps pour le parcourir. Grand Dieu, c'est à peine s'il a le temps de prendre position! Nous aimerions bien savoir, en fait, quelle est au juste sa position:

    Sur le registre des armes à feu: posez les yeux là-dessus, monsieur le Président. Il a approuvé les fonds pour ce scandale d'un milliard de dollars.

    Sur la crise des soins de santé: il a dit qu'il la réglerait. Non, attendez un peu! Il a signé tous les ordres pour en étouffer tellement le financement qu'il est dans un état critique.

    Sur la démocratie: oh oui, il est le grand défenseur. Non, attendez un peu, il est plutôt le grand prétendant.

    Sur l'Irak: le silence est d'or.

    Sur la défense: il a dit qu'il allait trouver de l'argent pour la défense. Oups, je suis persuadée que c'est lui qui a sabré sans merci le budget de la défense. Merci quand même!

    Mais, dans l'esprit de la saison, je me permets de lui dire ceci:

    

Les roses sont rouges,
Les violettes sont bleues.
Il nous faut un premier ministre
Mais pas toi, Grand Dieu!

*   *   *

[Français]

+-Le drapeau canadien

+-

    Mme Yolande Thibeault (Saint-Lambert, Lib.): Monsieur le Président, hissé pour la première fois le 15 février 1965, le drapeau unifolié rouge et blanc du Canada est célébré à chaque année pour commémorer cet événement.

    Ce jour tant attendu par les partisans d'un drapeau distinctif marque l'adoption officielle de l'emblème du Canada. La feuille d'érable rouge devient donc le symbole par lequel le Canada se fait reconnaître à travers le monde.

    Les paroles qu'a prononcées le président du Sénat, Maurice Bourget, en ce jour du 15 février 1965, donnent un sens encore plus symbolique à notre drapeau, et je cite:

    Le drapeau est le symbole de l'unité de la nation, car il représente sans l'ombre d'un doute tous les citoyens du Canada, sans distinction de race, de langue, de croyance ou d'opinion.

    Alors soyons fiers de notre drapeau canadien.

*   *   *

  +-(1410)  

+-La délimitation des circonscriptions électorales fédérales

+-

    M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le Président, hier, la Commission de délimitation des circonscriptions pour la province du Nouveau-Brunswick a déposé son rapport à la Chambre.

    Il est regrettable de constater que les préoccupations des intervenants et de la population de ma circonscription n'ont pas été considérées.

    D'ailleurs, dès la nomination des membres de cette commission, je m'étais objecté à la façon dont celle-ci avait été faite. Trois individus du sud de la province et grands supporteurs du Parti libéral se sont retrouvés à siéger au sein de cette commission.

    De plus, j'aimerais spécifier que la candidature de ces membres avait été soumise par la ministre du Travail et ministre responsable du Nouveau-Brunswick. Comme je l'ai toujours déclaré, il y avait et il y a toujours un conflit d'intérêts au sein de cette commission.

    Le résultat de ce processus antidémocratique est le suivant: des paroisses francophones seront en quelque sorte déportées dans une communauté à grande majorité anglophone. C'est une autre déportation, une autre claque à la face des francophones du Nouveau-Brunswick.

*   *   *

+-L'Irak

+-

    M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Monsieur le Président, dans un article du journal Le Nouvelliste, publié à Trois-Rivières le 11 février, on nous rapporte que les opposants à la guerre en Irak avaient dorénavant un nouvel allié, soit Shawinigan, la ville natale du premier ministre.

    En effet, le conseil municipal de Shawinigan a adopté une résolution par laquelle la ville, et je cite:

s'oppose à la participation du Canada à toute action militaire contre l'Irak sans que cette action n'ait été autorisée par une résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies et par les lois canadiennes.

    Quand on sait que plusieurs villes, tant au Québec, au Canada et aux États Unis, ont déjà adopté des résolutions s'opposant à toute déclaration de guerre qui n'aurait pas reçu l'aval de l'ONU, il est à espérer que le premier ministre emboîtera finalement le pas, sachant que ses propres commettants de Shawinigan ont joint leur voix à celles qui, par millions, s'élèvent partout dans le monde.

    Le premier ministre doit savoir que cette guerre est évitable et qu'il a un rôle à jouer afin de faire échec à toute action militaire illégitime.

*   *   *

[Traduction]

+-L'école publique de Churchill Heights

+-

    M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais profiter de cette occasion pour souhaiter la bienvenue à Ottawa aujourd'hui aux élèves de 8e année de l'école publique de Churchill Heights. Partis de ma circonscription, Scarborough-Centre, ces jeunes sont venus dans la capitale pour visiter les édifices du Parlement et mieux comprendre le fonctionnement du gouvernement. J'aurai l'occasion de les rencontrer plus tard cet après-midi.

    Il est très important que tous les élèves aient la possibilité de visiter le Parlement afin de voir sur place comment fonctionne le processus législatif. J'invite donc tous mes concitoyens à faire comme les élèves de Churchill Heights et à visiter Ottawa dans un avenir rapproché.

    Encore une fois, je dis bienvenue aux élèves et au personnel de Churchill Heights et je les remercie d'être venus nous rendre visite aujourd'hui. Je suis convaincu qu'à leur sortie du Parlement, ils seront enthousiastes et fiers d'être Canadiens.

*   *   *

+-Les anciens combattants

+-

    Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, depuis plusieurs mois maintenant, je pose des questions au sujet des anciens combattants canadiens qui ont été soumis à des tests avec le gaz moutarde pendant la Seconde Guerre mondiale. Les États-Unis viennent d'annoncer qu'ils verseraient des indemnités à leurs anciens combattants ayant participé à des tests semblables.

    La semaine dernière, le secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale a indiqué qu'il étudiait l'initiative américaine.

    Je suis heureuse de voir le gouvernement agir enfin, mais pourquoi faut-il attendre et étudier la décision des Américains? La réponse du secrétaire parlementaire signifie-t-elle que, si les Américains n'avaient pas pris cette décision, le gouvernement canadien n'aurait rien fait? Ne sommes-nous pas assez grands pour nous tenir sur nos deux pieds, admettre nos erreurs et les corriger, sans avoir à attendre l'exemple des Américains? Pourquoi ne pas prendre nos propres décisions et laisser les Américains les étudier par la suite?

    Après 58 ans de frustrations, n'est-il pas temps d'indemniser ces anciens combattants qui ont tant donné pour le pays pendant cette période sombre de la Seconde Guerre mondiale? Compte tenu de ce qu'ils ont fait pour le Canada, ce serait bien la moindre des choses.

*   *   *

+-Les personnes handicapées

+-

    M. Gurbax Malhi (Bramalea—Gore—Malton—Springdale, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais attirer l'attention de la Chambre sur l'urgence, pour les services de transport en commun, d'améliorer les services de transport porte-à-porte des personnes ayant des problèmes de mobilité.

    Récemment, dans la circonscription de Bramalea—Gore—Malton—Springdale, les conseillers de la région de Peel se sont dits très préoccupés par le service Peel Transhelp offert par les transports en commun de Brampton, car beaucoup de voyageurs n'ont pas pu se rendre à d'importants rendez-vous, même s'ils avaient réservé une place plusieurs jours d'avance. À Peel, le nombre de personnes handicapées qui comptent sur ce service est passé de 3 700 à 7 224 par année depuis 1998.

    J'encourage tous les niveaux de gouvernement à collaborer avec les services de transport en commun pour qu'ils trouvent ensemble des moyens d'améliorer ce service essentiel sur lequel comptent un grand nombre de Canadiens.

*   *   *

  +-(1415)  

+-Le drapeau canadien

+-

    M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster, Alliance canadienne): Monsieur le Président, dans les années 70, il y avait une comédie britannique intitulée Don't Raise the Bridge, Lower the River. Nous avons maintenant une farce canadienne, réalisée par Travaux publics, qui s'intitule «Ne hissez pas le drapeau, abaissez les normes de qualité».

    Il y a quelques années, les Canadiens ont été embêtés par la grande distribution de drapeaux de la candidate au poste de premier ministre, la ministre du Patrimoine canadien. Les coûts ont été scandaleux, et les Canadiens qui vendaient des drapeaux se sont fait couper l'herbe sous le pied. Le patriotisme des Canadiens qui achetaient fièrement eux-mêmes leur drapeau en a pris pour son rhume. Rien n'avilit plus rapidement un symbole que le donner pour rien.

    Bien sûr, la valeur a toujours été une notion inconnue des députés d'en face. Dans sa hâte malencontreuse, Travaux publics a abaissé les normes de qualité du drapeau canadien et s'est assuré que les électeurs seraient déçus du drapeau qu'ils recevraient.

    Les Canadiens devraient peut-être s'inspirer de l'ancien ministre des Finances et hisser le pavillon panaméen. Il semble que cela ait aidé le député de LaSalle—Émard à dissimuler ses impôts à ses insatiables collègues du Cabinet.


+-QUESTIONS ORALES

[Questions orales]

*   *   *

[Traduction]

+-L'Irak

+-

    M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la crise irakienne s'est encore aggravée aujourd'hui. Il semble que les inspecteurs en désarmement croient maintenant que les violations des résolutions de l'ONU par l'Irak vont bien au-delà de ce qu'on soupçonnait.

    Les troupes alliées se massent dans le golfe Persique et, dans un discours prononcé aujourd'hui, le président Bush a clairement mis ses forces armées en état d'alerte pour une guerre contre l'Irak.

    En réponse à cela, notre ministre de la Défense a annoncé que des soldats canadiens seraient envoyés en Afghanistan.

    Le gouvernement comprend-il ce qui se passe? Est-il engagé dans la crise irakienne et, si oui, comment?

+-

    L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, bien sûr que nous sommes engagés dans la crise irakienne, et nous le sommes d'une façon qui répond aux attentes des Canadiens, d'une façon qui nous assure les meilleures chances possibles d'arriver à une solution pacifique. Nous appuyons nos alliés américains par l'entremise de nos institutions multilatérales, nous discutons avec les Américains, nous collaborons avec eux tout en respectant le processus des Nations Unies, et c'est là la meilleure façon d'assurer leur sécurité, celle du monde et celle des Canadiens.

+-

    M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je crois que ce que le ministre dit vraiment, c'est que son gouvernement lit les sondages et organise des groupes de discussion.

    Le monde entier est également en état d'alerte à cause de la possibilité d'attentats terroristes. Des chars d'assaut ont été déployés à l'aéroport d'Heathrow, à Londres. La cote d'alerte aux États-Unis a été haussée à orange pour l'ensemble du pays. On nous dit que des Nord-Américains bien en vue pourraient se faire assassiner. En réponse à cela, le gouvernement nous dit qu'il a enfin décidé d'interdire des groupes qui étaient illégaux depuis très longtemps ailleurs.

    Le gouvernement comprend-il la situation? Met-il le Canada en état d'alerte et, si oui, à quel niveau?

+-

    L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement est très inquiet de ce qui se passe au Royaume-Uni et aux États-Unis. Nous sommes en liaison avec d'autres pays, avec qui nous échangeons des renseignements. Nous n'avons pas d'information... L'opposition devrait écouter ce que je vais dire parce que nous nous préoccupons de ce que les Canadiens entendent, et ils doivent entendre la vérité.

    Nous n'avons pas d'information indiquant que le Canada pourrait être victime d'une attaque, mais nous prenons toutes les précautions nécessaires.

+-

    M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suppose que notre crainte est que le gouvernement serait le dernier à le savoir.

    À mesure que la crise s'aggrave, l'inquiétude règne sur les marchés financiers partout dans le monde. Ici, en Amérique du Nord, nous voyons déjà des retards à la frontière.

    Ce n'est qu'aujourd'hui, après des mois de passivité, que notre premier ministre doit se rendre aux États-Unis. Comme le Canada ne fait pas partie de la coalition des alliés, le gouvernement peut-il assurer à la Chambre que les activités liées à la guerre ou au maintien de la sécurité n'auront aucun effet néfaste sur le commerce canadien et n'entraîneront pas des pertes d'emplois dans notre pays?

+-

    L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je suis surpris que le député ait la témérité de poser cette question. La situation est très grave.

    Le fait est que les Canadiens ont besoin d'être rassurés. Nous n'avons pas besoin d'entendre ce genre de propos alarmistes de la part de l'opposition. Nous sommes tous inquiets, et le premier ministre exprimera les préoccupations des Canadiens lorsqu'il prononcera son discours ce soir à Chicago.

    Les Canadiens doivent savoir que nous avons fait beaucoup d'efforts, depuis le 11 septembre 2001, pour accroître la sécurité dans notre pays, et nous continuerons d'en faire davantage.

*   *   *

+-Le terrorisme

+-

    M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne): Monsieur le Président, alors que la menace d'une guerre s'intensifie, il en est de même de la menace de représailles terroristes. Pendant que le reste du monde prend des mesures contre les organisations terroristes connues, le Canada accuse un sérieux retard.

    Jusqu'à maintenant, seulement 19 entités terroristes figurent sur notre liste, alors qu'il y en a près de 200 sur celle des Nations Unies.

    Le groupe terroriste de l'Asie du Sud-Est Jemaah Islamiah a été à l'origine de l'attentat à Bali qui a fait plus de 200 morts, dont deux Canadiens, mais malgré cela, cette organisation terroriste bien connue ne figure toujours pas sur la liste du Canada. Pourquoi?

  +-(1420)  

+-

    L'hon. Wayne Easter (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, nous faisons les choses différemment dans notre pays. À mon avis, nous agissons avec plus de prudence et de circonspection.

    Notre façon de procéder est assortie de restrictions qui ont été imposées par la Chambre. Nous devons respecter de graves restrictions lorsque nous inscrivons des entités sur la liste des groupes terroristes, conformément au projet de loi C-36. Nous continuons de travailler sur cette liste. Nous avons désigné trois nouvelles entités hier. Qu'une organisation figure ou non sur la liste, nos services du renseignement de sécurité, nos services chargés de l'application de la loi...

+-

    Le Président: Le député de Crowfoot a la parole.

+-

    M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne): C'est exact, monsieur le Président, nous faisons les choses très différemment. Alors que le monde entier réagit rapidement, nous réagissons lentement. Le solliciteur général devrait avoir honte!

    Les forces armées révolutionnaires de la Colombie sont considérées comme l'organisation terroriste la plus dangereuse de l'hémisphère occidental. Le front de libération islamique Moro a menacé l'ambassade du Canada l'an dernier et, en décembre 2002, il a tué 13 personnes à l'étranger dans un camion appartenant à une société minière canadienne; apparemment, ce groupe essaie aussi d'extorquer de l'argent à une entreprise minière canadienne.

    Aucune de ces organisations terroristes ne figure sur la liste du Canada. Pourquoi n'y figurent-elles pas?

+-

    L'hon. Wayne Easter (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je vais expliquer à la Chambre comment l'opposition officielle fonctionne. Les députés d'en face s'emploient à semer la peur. Nous n'accepterons pas cela de ce côté-ci de la Chambre.

    Nous faisons notre travail lorsqu'il s'agit de dresser la liste des entités. Nos services du renseignement de sécurité font leur travail. Nous faisons notre travail en collaborant avec les autres services du monde entier dans la lutte contre le terrorisme, sans essayer de faire la une des journaux.

*   *   *

[Français]

+-L'Irak

+-

    M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, à la veille de la présentation du rapport des inspecteurs, le secrétaire d'État américain a servi un ultimatum au Conseil de sécurité. Colin Powell a en effet déclaré, et je le cite: «Si l'ONU n'agit pas et démontre son inutilité», les États-Unis «sont prêts à agir avec une coalition de pays volontaires.»

    Alors que le premier ministre prendra la parole à Chicago, aujourd'hui, le ministre des Affaires étrangères peut-il nous dire, ici, en cette Chambre, que d'aucune façon, le Canada ne fera partie d'une coalition de pays volontaires sans l'aval des Nations Unies?

+-

    L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, le message que le premier ministre va livrer à Chicago ce soir sera le même qu'il a livré dans cette Chambre, tout le temps. Il favorise une approche axée sur le Conseil de sécurité des Nations Unies. Cela a toujours été notre approche.

    Nous avons la résolution 1441. Nous avons établi un processus. M. Blix a établi que ce processus est sérieux et digne de crédibilité. Nous sommes engagés dans ce processus et nous y resterons.

+-

    M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, à ce moment-là, si tel est le cas, si le Canada a décidé de ne participer d'aucune façon à une coalition de pays volontaires sans l'aval du Conseil de sécurité, est-ce que le ministre des Affaires étrangères a fait savoir à Colin Powell que d'aucune façon nous ne ferions partie d'une telle coalition, la coalition qu'il évoque? Car il a dit clairement que si les Nations Unies ne veulent pas, nous irons avec des alliés et des pays volontaires qui nous accompagneront. Est-ce que le ministre des Affaires étrangères lui a dit: «Ne comptez pas sur nous»? C'est cela qui serait clair.

+-

    L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je suis fier du fait que lorsque j'étais à Washington, il y a peu de temps, avec le secrétaire d'État Powell, je lui ai dit que nous sommes un pays souverain, nous prenons nos propres décisions dans nos intérêts, dans l'intérêt des Canadiens et surtout dans l'intérêt de la préservation de la paix dans le monde.

    Dans ce contexte, je lui ai clairement expliqué que le Canada considère que les États-Unis seront mieux servis de rester dans le cadre des Nations Unies, pour leur propre sécurité et pour le processus de la sécurité du monde entier.

  +-(1425)  

+-

    Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, le Mexique et un partenaire commercial très près des États-Unis et comme le Canada, c'est un voisin de frontière. Pourtant, cette situation n'a pas empêché le président Fox de dire hier, clairement, non à l'unilatéralisme, non à la guerre et oui à la paix, oui au désarmement de l'Irak et oui au renforcement des Nations Unies.

    Le premier ministre qui se dit pour la paix mais qui pose des gestes de guerre, ne pourrait-il pas montrer le même courage que le président Fox et lever l'équivoque dans laquelle baigne la position canadienne?

+-

    L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, dans cette Chambre et dans le monde entier, on a regardé les actes du Canada depuis que le premier ministre a parlé au président Bush, il y a longtemps, en lui expliquant que le Canada considère que la meilleure façon d'agir ici, et la seule façon de garantir à la fois les institutions internationales qui sont importantes et la paix éventuelle dans le monde, c'est de rester dans le cadre des Nations Unies.

    Donc, nous sommes là, nous avons toujours été là et nous sommes fiers de notre approche. Elle est gagnante pour le moment. Restons dans les traces de notre approche qui est la meilleure pour tout le monde.

+-

    Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, nous avons entendu le premier ministre dire ici que la résolution 1441 était suffisante. Demain, il y aura une importante réunion du Conseil de sécurité. Ce soir, le premier ministre prononcera une allocution à Chicago.

    Ne serait-il pas temps pour lui de prendre exemple sur le président du Mexique et dire clairement à tout le monde quelle est la position canadienne? La résolution 1441 est-elle suffisante pour aller avec les États-Unis ou est-ce que cela prend une deuxième résolution du Conseil de sécurité? Quand cessera-t-il d'être un suiveux?

+-

    L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, ce soir, notre premier ministre va prendre la parole à Chicago. Il va dire à notre proche allié américain quelles sont la position et l'approche canadiennes.

    Il n'est pas nécessaire de copier les Mexicains, comme le veut le Bloc; il n'est pas nécessaire de copier les Français, comme le veut le Bloc; il n'est pas nécessaire de copier les Allemands, comme le veut le Bloc. On est canadiens, on veut adopter notre politique pour nous.

*   *   *

[Traduction]

+-La fiscalité

+-

    M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, le gouvernement a tellement patiné autour de la question de l'Irak ces derniers temps que j'ai pensé qu'il serait bon de changer de sujet et de parler de hockey.

    Le gouvernement peut-il nous dire s'il approuve l'utilisation d'une somme de 60 millions de dollars, puisée à même l'argent des contribuables, pour sauver le club de hockey des Sénateurs d'Ottawa?

+-

    L'hon. Elinor Caplan (ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, les règles de confidentialité m'interdisent et interdisent à l'ADRC de confirmer ou d'infirmer qu'une demande d'avis a été présentée. Tout contribuable ou toute entreprise peut demander un avis, mais la divulgation de renseignements au sujet d'un contribuable est contraire au Code criminel de notre pays.

+-

    M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, je ne veux pas obtenir de renseignements confidentiels, à moins que la ministre ne croie qu'il y a quelque chose de confidentiel dans l'utilisation des fonds publics pour renflouer un club de hockey. Je demande à la ministre si le gouvernement approuve, oui ou non, l'utilisation de l'argent des contribuables à cette fin.

    Dans le budget, au lieu d'une stratégie de sauvegarde d'un club de hockey dans la capitale nationale, pourquoi ne pas prévoir, pour faire changement, une mesure dont ont vraiment besoin les Canadiens, comme une stratégie nationale de logement?

+-

    L'hon. Elinor Caplan (ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, maintenant que le député d'en face a précisé qu'il ne cherchait pas à obtenir des renseignements sur une décision qu'aurait prise l'ADRC, je tiens à l'aviser que le budget sera déposé la semaine prochaine, le mardi 18 février, à 16 heures.

*   *   *

+-Le terrorisme

+-

    Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, en juin 2001, trois mois avant les attaques du réseau Al-Qaïda, le SCRS a averti le gouvernement que les Canadiens étaient plus que jamais des victimes potentielles et que le Canada pourrait être la cible d'attentats terroristes. Le gouvernement n'a pas donné suite à cet avertissement.

    On apprend maintenant que le SCRS a des renseignements voulant que le réseau Al-Qaïda prépare des frappes contre l'Amérique du Nord, y compris le Canada.

    Ces nouvelles sont-elles fondées? Le SCRS dit-il qu'il n'y a pas de menaces pour le Canada équivalentes à la menace qui a mobilisé la Grande-Bretagne et les États-Unis?

+-

    L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, j'ai répondu à cette question plus tôt. Nous n'avons aucune information concrète nous permettant d'affirmer que le Canada est la cible d'une telle attaque. Je pense que nous devrions tous essayer de garder notre calme, car la situation est extrêmement difficile, pas simplement aux États-Unis, mais en Europe et au Proche-Orient. Nous devons garantir aux Canadiens que nous faisons tout ce que nous pouvons sur le plan de la sécurité pour les protéger ainsi que leurs intérêts.

  +-(1430)  

+-

    Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, c'est une déclaration incroyable étant donné le fait que, en fonction de ses renseignements de sécurité, le Royaume-Uni a envoyé des chars à l'aéroport d'Heathrow. Les États-Unis ont installé des armes antiaériennes dans les rues de Washington. Dès juin 1998, le directeur du Service de renseignement du Canada a averti:

    Il y a plus de groupes terroristes internationaux actifs au Canada que dans tout autre pays au monde, à la seule exception peut-être des États-Unis.

    Qu'est-ce qui amène le gouvernement à croire que les menaces qui sont considérées comme tout à fait sérieuses en Grande-Bretagne et aux États-Unis, n'exigent pas des mesures spéciales pour protéger les Canadiens?

+-

    L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je suis scandalisé de voir un ancien premier ministre tenir des propos aussi alarmistes à ce stade-ci.

    J'ai répondu à la question. Nous n'avons aucune information concrète voulant qu'il y ait une menace imminente à la sécurité au Canada. Cela ne nous empêche pas de prendre toutes les précautions nécessaires. Nous avons accru la sécurité depuis le 11 septembre 2001 et nous continuerons d'être vigilants.

*   *   *

+-Le registre des armes à feu

+-

    M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Alliance canadienne): Monsieur le Président, un peu plus tôt cette semaine, le ministre de la Justice a parlé de «gestion de trésorerie» à propos du financement du registre des armes à feu. Pourtant, le 5 décembre, par décision unanime, le Parlement a supprimé le financement du Centre canadien des armes à feu.

    Pourquoi le ministre de la Justice a-t-il maintenu le financement du registre des armes à feu en dépit de la volonté exprimée par la Chambre de l'interrompre?

+-

    L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, si je ne m'abuse, cette affaire fait l'objet d'une question de privilège sur laquelle vous serez amené à vous prononcer. L'avis objectif que vous nous donnerez, monsieur le Président, m'inspire bien plus confiance que les diatribes des députés d'en face.

+-

    M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je voudrais que l'on réponde à ma question. De toute évidence, ces gens cherchent à se défiler.

    Certains ministériels conviennent avec l'Alliance canadienne que le gouvernement a gaspillé un milliard de dollars avec le registre des armes à feu. Les députés de la Chambre se sont exprimés d'une seule voix quand ils ont plafonné les dépenses de ce programme. Pourtant, le ministre continue de le financer à partir de sources non identifiées.

    Pourquoi le ministre se croit-il au-dessus d'une décision prise par vote au Parlement?

+-

    L'hon. Martin Cauchon (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, premièrement, il ne s'agit pas d'un milliard de dollars, et le député le sait pertinemment.

    Deuxièmement, parlons des avantages de ce programme. Quelque 1,9 million de propriétaires d'armes à feu ont obtenu leur permis. Six millions d'armes à feu ont été enregistrées. La police consulte ce registre 2 000 fois par jour. Quelque 9 000 permis ont été révoqués ou refusés.

    Ce programme est utile. Il s'inscrit dans le droit fil des valeurs canadiennes. Il favorise la sécurité publique. Nous avançons dans la bonne voie et nous poursuivrons ce programme.

*   *   *

[Français]

+-L'Irak

+-

    M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, on apprend que des soldats américains seraient déjà en territoire irakien, occupés entre autres à la construction de pistes d'atterrissage pouvant servir lors d'un conflit militaire contre l'Irak.

    Le ministre de la Défense peut-il nous dire si le Canada participe à une telle activité illégale?

+-

    L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, non seulement nos soldats ne sont pas présentement en Irak, mais on n'a pas pris de décisions à savoir si, dans le cas d'une guerre, ils y seront.

    Comme on l'a dit plusieurs fois, presque mille fois, la question est hypothétique. On est avec les Nations Unies. Le gouvernement prendra plus tard la décision nécessaire.

+-

    M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, j'ai une question, et elle n'est pas hypothétique. On sait que des officiers canadiens sont actuellement au Qatar et qu'ils collaborent à la planification d'une guerre éventuelle en Irak avec des officiers américains dans ce qu'on appelle un «joint command».

    Comment le Canada peut-il participer au commandement conjoint au Qatar et ne pas, de ce fait, être actuellement complice de la construction illégale de pistes d'atterrissage en Irak?

+-

    L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, depuis des mois, on a eu des représentants militaires en Floride pour obtenir des informations des Américains. Ces mêmes officiers sont au Qatar pour obtenir des informations.

    Le gouvernement n'a pris aucune décision. On espère qu'il n'y aura pas de guerre. Toutefois, s'il y en a une, le gouvernement prendra sa décision au moment approprié.

*   *   *

  +-(1435)  

[Traduction]

+-L'assurance-emploi

+-

    M. Charlie Penson (Peace River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, l'ancien ministre des Finances a réussi à accumuler un excédent de 45 milliards de dollars dans la caisse de l'assurance-emploi, au détriment de nos travailleurs et de nos entreprises. Or, nombre de Canadiens ne savent pas qu'en pratique cet excédent n'existe pas. Au lieu de laisser cet argent s'accumuler au fil des ans, les libéraux l'ont dépensé. Ainsi, il y a belle lurette que l'excédent s'est envolé.

    Je demande à l'actuel ministre des Finances de mettre un terme à cette ponction fiscale. Le gouvernement cessera-t-il enfin de faire payer des cotisations trop élevées aux travailleurs et aux entreprises?

+-

    M. Bryon Wilfert (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, premièrement, je signale que le présent gouvernement a réduit pendant neuf années consécutives les cotisations d'assurance-emploi.

    Je constate que le député d'en face ne suit pas toujours les choses attentivement car le gouvernement a effectivement réduit les cotisations et s'est engagé à continuer de le faire. J'ose espérer que le député se montrera plus attentif une fois que nous aurons présenté le prochain budget.

+-

    M. Charlie Penson (Peace River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, selon la vérificatrice générale, un excédent de 15 milliards de dollars s'avérerait plus que suffisant pour faire face à un ralentissement de l'économie. Toutefois, pendant des années, l'ancien ministre des Finances a dépossédé les travailleurs canadiens de plusieurs milliards de dollars pour améliorer son bilan.

    L'actuel ministre des Finances abandonnera-t-il ces pratiques comptables à la Enron, rectifiera-t-il le tir et cessera-t-il d'exiger des cotisations d'assurance-emploi trop élevées?

+-

    M. Bryon Wilfert (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je ne suis pas habitué à la nouvelle façon de calculer de l'Alliance canadienne, mais la réalité c'est que si nous réduisons les cotisations chaque année, elles diminuent. Par conséquent, cette diminution représente une économie considérable pour les travailleurs et les employeurs canadiens, soit plus de 860 millions de dollars pour l'an dernier seulement.

    Je crois que c'est ce que veulent les Canadiens et c'est ce que le gouvernement s'est engagé à leur donner.

*   *   *

[Français]

+-L'Irak

+-

    M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Monsieur le Président, hier, le ministre des Affaires étrangères s'est dit étonné que Donald Rumsfeld ait déclaré que les États-Unis avaient jonglé avec l'idée d'utiliser des armes chimiques en Irak. Je lui lis la déposition du secrétaire à la Défense devant un comité de la Chambre des représentants: «Il y a des occasions où l'usage d'agents non mortels pour le contrôle d'émeutes est parfaitement indiqué», alors qu'une convention internationale précise pourtant le contraire.

    Est-ce que le ministre va continuer de soutenir que les propos du secrétaire à la Défense sont le fruit de l'imagination?

+-

    L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, le secrétaire américain à la Défense a exploré devant un comité du Congrès la possibilité d'employer des produits anti-émeutes non mortels. Il a aussi clairement indiqué qu'il examinait cela dans le contexte du droit international. Je suis convaincu que notre allié, qui est un des promoteurs du droit international dans le monde, va toujours respecter ses obligations internationales.

+-

    M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Monsieur le Président, il faut que le ministre aille beaucoup plus loin. Le secrétaire américain à la Défense a aussi déclaré qu'une dérogation du président américain pourrait être utilisée pour passer outre aux termes du traité qui interdit l'usage d'armes chimiques.

    Maintenant que le ministre est au courant des propos du secrétaire américain à la Défense, est-ce que le Canada, qui est partie signataire à ce traité, est prêt à dénoncer les propos tenus par Donald Rumsfeld?

+-

    L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, il y a deux choses. Contrairement à ce qu'a indiqué le député d'en face, il faut savoir clairement que le secrétaire américain à la Défense n'a pas parlé d'utiliser des armes chimiques. Il a parlé d'utiliser des produits anti-émeutes non mortels, ce qui est très important et très différent.

    Le Canada a toujours indiqué aux États-Unis et à toute partie signataire de la convention de respecter leurs obligations aux termes de la convention

*   *   *

[Traduction]

+-La sécurité aérienne

+-

    M. James Moore (Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam, Alliance canadienne): Monsieur le Président, Air Canada et WestJet ont fait état d'une baisse du nombre de voyageurs en janvier 2003 par rapport à la même époque l'an dernier. Cela confirme les craintes des analystes, à savoir que ce sont les taxes plutôt que le terrorisme qui sont responsables de la diminution du nombre de gens qui prennent l'avion au Canada.

    La taxe de 24 $ sur le transport aérien représente la plus forte augmentation fiscale dans le dernier budget de l'ex-ministre des Finances. L'actuel ministre des Finances admettra-t-il que cette taxe imposée par son prédécesseur était une grave erreur et acceptera-t-il de la supprimer mardi prochain, oui ou non?

+-

    M. Bryon Wilfert (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, comme le député d'en face le sait, le 8 novembre dernier, le ministre a annoncé qu'il réexaminerait la question de la taxe sur la sûreté aérienne. Plus de 300 mémoires lui ont été adressés. Je puis dire au député que la question est à l'étude.

    Comme le sait le député, le budget sera présenté le 18 février, comme il a été dit plus tôt. J'espère que le député applaudira au budget que présentera le gouvernement.

  +-(1440)  

[Français]

+-

    M. James Moore (Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam, Alliance canadienne): Monsieur le Président, jamais je n'applaudirai une taxe comme celle-ci.

    Air Canada et WestJet nous ont informés que les coefficients d'occupation ont connu une réduction de janvier 2002 à janvier 2003. Il est clair que ce ne sont pas les terroristes qui découragent les Canadiens à voyager, mais la taxe qui coûte 24 $.

    Ma question est claire: est-ce que, oui ou non, le ministre des Finances est prêt à éliminer la taxe de sécurité de 24 $, qui est une erreur de son prédécesseur? Est-ce qu'il va couper la taxe, oui ou non?

[Traduction]

+-

    M. Bryon Wilfert (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, je voudrais rappeler au député qu'il y a eu un examen. Plus de 300 mémoires ont été présentés, y compris par WestJet et Air Canada.

    Si le député prenait la peine d'écouter, et il semble qu'il ne s'intéresse pas à la réponse, mais uniquement à sa question, il saurait que cela fait actuellement l'objet d'un examen. Le budget sera présenté le 18 février. Nous prenons cette question très au sérieux. Restez à l'écoute.

*   *   *

+-La stratégie de réglementation intelligente

+-

    M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au leader du gouvernement à la Chambre des communes.

    J'aimerais savoir où en sont les progrès par rapport à un engagement formulé dans le discours du Trône. Le comité consultatif externe sur la réglementation intelligente a-t-il été créé?

+-

    L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux d'annoncer à la Chambre que le premier ministre a tenu un autre engagement énoncé dans le discours du Trône.

    En fait, dans sa sagesse, le premier ministre a récemment annoncé la nomination de M. Hugh MacDiarmid au poste de président du Comité consultatif externe sur la réglementation intelligente.

    Le gouvernement s'est engagé à moderniser le processus de réglementation pour que les entreprises canadiennes et les différents secteurs canadiens fonctionnent encore mieux qu'ils ne le font maintenant.

*   *   *

[Français]

+-La fiscalité

+-

    M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le Président, le ministre des Finances n'a pas eu de difficulté à contacter le président d'une banque afin de sauver les Sénateurs d'Ottawa, mais sans résultat.

    Le ministre préfère laisser les Sénateurs s'en sortir eux-mêmes en leur accordant une réduction de taxes de 60 millions de dollars. Cet argent va malheureusement être pigé dans le surplus de l'assurance-emploi. C'est inacceptable que des hockeyeurs millionnaires reçoivent cet argent.

    Avec les 43 milliards de dollars de surplus, le ministre des Finances va-t-il téléphoner à la ministre du Développement des ressources humaines afin de faire modifier les critères de l'accessibilité à l'assurance-emploi?

[Traduction]

+-

    L'hon. Elinor Caplan (ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, le député d'en face pose une question qui pourrait m'entraîner à commettre une infraction criminelle si je répondais. Monsieur le Président, je sais que vous ne voulez pas que je sois emprisonnée, alors je m'abstiendrai de répondre à cette question.

    Je peux assurer au député d'en face, et à tous les autres députés, qu'il n'y a jamais eu, qu'il n'y a pas maintenant, et qu'il n'y aura jamais d'ingérence politique dans les décisions de l'ADRC. Ces décisions sont prises par des professionnels et les tribunaux ont toujours le loisir de revoir ces décisions.

*   *   *

+-L'environnement

+-

    M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Ressources naturelles.

    Je crois savoir que, la semaine prochaine, le ministre des Finances tentera de trouver de l'argent pour établir son budget. Je peux donner à la Chambre une idée de l'endroit où il pourrait trouver 3,2 milliards de dollars. Il n'a qu'à supprimer les encouragements fiscaux accordés aux industries des combustibles fossiles et du nucléaire.

    Le gouvernement annoncera-t-il cette mesure la semaine prochaine et commencera-t-il à remplacer ces encouragements par un programme de primes à l'efficacité, et la conservation énergétiques par des encouragements fiscaux à l'industrie des énergies renouvelables?

+-

    L'hon. Herb Dhaliwal (ministre des Ressources naturelles, Lib.): Monsieur le Président, nous faisons déjà beaucoup pour promouvoir l'utilisation d'énergies renouvelables.

    Le député devrait féliciter le gouvernement de consacrer 260 millions de dollars à la promotion de l'énergie éolienne et de veiller à ce que nous examinions toutes sortes d'énergies renouvelables. Notre fonds de 1,6 milliard pour lutter contre les changements climatiques est exactement le genre d'initiative dont parle le député.

    Je remercie le député de son appui. Nous continuerons de travailler sur ce dossier pour veiller à exploiter toutes les énergies renouvelables et à protéger notre climat.

*   *   *

  +-(1445)  

+-La sécurité nationale

+-

    M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Monsieur le Président, le ministère des Transports a récemment affiché sur le site Web du gouvernement une offre d'emploi dans le domaine de l'analyse du renseignement de sécurité. Il y a maintenant environ une douzaine de ministères et d'agences qui engagent des agents du renseignements. C'est notamment le cas de Revenu Canada, des ministères de l'Immigration, des Affaires étrangères, de l'Industrie, de l'Environnement, de la Justice et des Transports, du Conseil privé, de Parcs Canada, de la Défense nationale, de la GRC et du SCRS.

    Qui est responsable de ce méli-mélo et à quel rythme ces gens se rencontrent-ils pour comparer leurs notes?

+-

    L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, j'aurais aimé que le député félicite le gouvernement d'avoir accru ses efforts en matière de renseignement dans tous les ministères.

    Depuis le 11 septembre, le vice-premier ministre préside un comité du Cabinet qui est chargé de revoir les questions de sécurité. Chaque ministère a des besoins particuliers en matière de renseignement et on en tient compte dans les exigences relatives à l'embauche.

+-

    M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Monsieur le Président, pour ce qui est du renseignement de sécurité, l'annonce publiée par le ministère des Transports faisait mention d'un certain nombre de postes permanents d'agent de renseignement à pourvoir. Ce travail exige une connaissance du transport multimodal qui vise principalement les conteneurs et les porte-conteneurs dans les ports.

    Le plus étrange, c'est que les gens qui vivent dans une région portuaire ne peuvent pas présenter leur candidature. Une personne qui vit ou qui travaille à Vancouver ne peut présenter sa candidature. Les gens de Toronto, de Montréal, de Halifax ou de Saint John de peuvent poser leur candidature. Seuls les gens qui vivent dans le grand port d'Ottawa peuvent le faire.

    Le ministre est-il d'avis que seul les gens d'Ottawa ont la compétence nécessaire? Pourquoi ne pas donner une chance aux gens de Vancouver, de Toronto ou de Halifax?

+-

    L'hon. David Collenette (Don Valley-Est, Lib.): Monsieur le Président, tous les Canadiens sont égaux. D'où qu'ils soient au pays, leur candidature sera étudiée pour quelque poste que ce soit.

*   *   *

+-Les prix de l'essence

+-

    Mme Carol Skelton (Saskatoon—Rosetown—Biggar, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le coût l'essence est un élément essentiel du budget de nombreuses familles du Canada, surtout dans les régions rurales et en banlieue. Les prix qu'atteignent le mazout et l'essence aujourd'hui risquent de les empêcher de chauffer leurs foyers et de conduire leurs enfants à leurs activités.

    Pourquoi le gouvernement impose-t-il des taxes excessives sur l'essence aux familles canadiennes qui croulent déjà sous le poids des impôts?

+-

    M. Bryon Wilfert (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, comme nous le savons, les taxes sur l'essence participent aux recettes générales. Si les députés s'inquiètent du prix de l'essence, ils doivent regarder du côté des provinces. En 1975, le gouvernement de Bill Davis, au lieu d'augmenter immédiatement de 5 cents le prix du gallon d'essence, a gelé les prix pendant 90 jours. Il s'agit donc, au plan constitutionnel, d'une responsabilité provinciale. Si la députée a des inquiétudes à exprimer, elle devrait téléphoner au premier ministre de sa province.

+-

    Mme Carol Skelton (Saskatoon—Rosetown—Biggar, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la TPS est pourtant une taxe fédérale.

    Les familles canadiennes paient plus de taxes que jamais auparavant. Les coûts de transport et de chauffage atteignent de nouveaux sommets. Les taxes sur l'essence et le mazout sont trop élevées pour les familles canadiennes.

    Quand le gouvernement réduira-t-il ces taxes afin que les Canadiens puissent vaquer à leurs occupations et tenir leurs familles au chaud?

+-

    M. Bryon Wilfert (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement n'a pas de leçons à recevoir des députés d'en face au chapitre de la réduction des impôts. Il continue à réduire les impôts des particuliers et des sociétés, et je signale encore une fois qu'une grande partie des taxes sont perçues par les provinces. Si les députés souhaitent voir imposer un gel des prix de l'essence, ils n'ont qu'à s'adresser à leurs premiers ministres provinciaux.

[Français]

+-

    M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, on assiste effectivement à une hausse intolérable des prix de l'essence et de l'huile à chauffage.

    Les provinces, on le sait, sont responsables des prix au détail et la concurrence relève du gouvernement fédéral. Ce que la population attend, c'est que chacun agisse dans son champ de compétence.

    Est-ce que le ministre de l'Industrie va prendre ses responsabilités, comme son collègue libéral qui dénonce comme nous l'odeur de collusion qui plane autour des pétrolières, et compte-t-il faire enquête plutôt que de faire le «smart» à la Chambre?

+-

    L'hon. Allan Rock (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, le Bureau de la concurrence surveille continuellement les activités des compagnies à cet égard.

    Je ne peux pas accepter la proposition du Bloc, à savoir qu'il faut avoir une ingérence dans une juridiction exclusivement provinciale. Selon la Constitution du Canada, il est clair que seules les provinces peuvent réglementer le prix de l'essence au détail.

    Je n'accepte pas la proposition du Bloc. Il faut laisser les provinces exercer leurs pouvoirs.

+-

    M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, si le ministre s'occupait correctement de ce dossier, il saurait que c'est avant la vente au détail, soit au stade du raffinage, que la concurrence ne joue pas.

    Toutes les marges de profits se prennent par un petit groupe de compagnies pétrolières qui s'entendent pour prendre la même marge au même moment.

    Le ministre admettra-t-il que ça, ça dépend de lui?

  +-(1450)  

+-

    L'hon. Allan Rock (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, dans le passé, le Bureau de la concurrence a examiné étroitement toutes ces circonstances. Nous continuons de surveiller la situation à cet égard.

    Toutefois, la réglementation des prix de l'essence au détail est exclusivement une juridiction provinciale. Je refuse de centraliser tous les pouvoirs ici à Ottawa. C'est inacceptable. Il faut laisser aux provinces leur propre rôle dans la fédération. C'est de responsabilité provinciale.

*   *   *

[Traduction]

+-Les échanges commerciaux

+-

    M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le renforcement de la sécurité et le préavis obligatoire de 24 heures qui sera bientôt imposé menacent de détruire les entreprises, l'industrie et, en particulier, l'industrie automobile.

    Hier, le gouvernement de l'Ontario a dit que les sociétés mères américaines du secteur de l'automobile allaient commencer à rapatrier aux États-Unis leurs filiales ontariennes et arrêteraient de construire de nouvelles usines au Canada à moins que les marchandises ne continuent à circuler librement à la frontière.

    Le gouvernement a-t-il reçu une exemption de ce préavis de 24 heures? Oui ou non?

+-

    L'hon. Elinor Caplan (ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, comme le sait pertinemment le député d'en face, il y a un certain nombre de propositions sur la table, les discussions continuent et rien n'a encore été décidé.

    Ce qui a été décidé toutefois, c'est que le président des États-Unis et le premier ministre du Canada sont unanimes dans leur déclaration qu'ils ne permettront pas aux terroristes de gagner la bataille en immobilisant nos économies. C'est leur objectif, et le nôtre est d'unir nos efforts pour rendre notre frontière la plus intelligente qui soit de manière que les économies de nos deux pays puissent continuer à prospérer.

+-

    M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je dois conclure de cette non-réponse que c'est non.

    Le gouvernement n'a plus qu'à apposer un panneau sur le 49e parallèle indiquant que le pays est en faillite. En Ontario seulement, jusqu'à un million d'emplois dépendent des échanges transfrontaliers. Le gouvernement américain a dit clairement qu'il exigerait un préavis. Le gouvernement doit convaincre notre principal partenaire commercial que le Canada n'est pas un risque pour la sécurité.

    Que fait le gouvernement pour s'assurer qu'un système de préavis sera en place avant que les menaces à la sécurité ne ferment notre frontière et ne nuisent à nos industries et à nos emplois?

+-

    L'hon. Elinor Caplan (ministre du Revenu national, Lib.): Je vais vous dire ce que je ne ferai pas, monsieur le Président, je ne me laisserai pas faire la leçon par le député d'en face.

    En fait, depuis le 11 septembre 2001, nous savons tous que le monde a changé et, de ce côté-ci de la Chambre, nous travaillons d'arrache-pied pour que notre frontière, qui est une priorité, fonctionne de manière aussi intelligente et efficace que possible. Il y a des gens qui passent leur temps à lire les coupures de presse dans le but de faire croire l'inverse.

    Toutefois, avec nos partenaires américains, nous sommes déterminés, même en ces temps difficiles pendant lesquels il peut y avoir certains retards temporaires, à ce que la frontière fonctionne aussi bien que possible.

*   *   *

[Français]

+-La Journée internationale de la Francophonie

+-

    Mme Hélène Scherrer (Louis-Hébert, Lib.): Monsieur le Président, le Canada fêtera, le 20 mars prochain, la Journée internationale de la Francophonie.

    Le secrétaire d'État responsable de la Francophonie pourrait-il nous dire ce qu'il nous réserve à l'agenda pour fêter de façon particulière cette grande journée?

+-

    L'hon. Denis Paradis (secrétaire d'État (Amérique latine et Afrique) (Francophonie), Lib.): Monsieur le Président, effectivement, le Canada va recevoir l'ex-secrétaire général de l'Organisation internationale de la Francophonie, ex-secrétaire général des Nations Unies, Son Excellence Boutros Boutros-Ghali, qui sera parmi nous pour célébrer la journée du 20 mars, Journée internationale de la Francophonie.

    J'invite tous les parlementaires à se joindre à nous pour célébrer cette grande journée. J'ajoute que le Canada tient à célébrer l'un des plus éminents personnages de la diplomatie contemporaine et à souligner son action soutenue en faveur de la promotion des principes et des valeurs des Canadiens: la promotion de la paix, la démocratie et les droits de la personne.

*   *   *

[Traduction]

+-Air India

+-

    M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Alliance canadienne): Monsieur le Président, Inderjit Singh Reyat a reconnu cette semaine sa culpabilité pour le rôle qu'il a joué en 1985 dans l'attentat contre le vol d'Air India, la pire tuerie de l'histoire canadienne. Le fait qu'on ne lui ai infligé qu'une peine de cinq ans est une insulte aux familles des 329 personnes qu'il a tuées.

    On nous apprend maintenant qu'il doit être transféré dans ma circonscription, à l'établissement pénitentiaire ouvert de Ferndale, connu sous le nom de «Club Fed». Non seulement va-t-il bénéficier de conditions de détention clémentes pour ce crime haineux, mais il va aussi être admissible à une libération conditionnelle dans 10 mois.

    Comment le ministre de la Justice peut-il défendre un système qui pourrait, dès l'an prochain, rendre à la liberté cet auteur d'un massacre?

+-

    L'hon. Wayne Easter (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, il y a deux aspects où le député est carrément dans l'erreur.

    Il parle d'un «Club Fed»; il n'existe pas de «Club Fed» au sein du système. Je sais que les députés d'en face aiment croire aux contes de fées, mais la vérité, c'est qu'il n'y a pas de tel club.

    Par ailleurs, l'admissibilité à la libération conditionnelle n'est pas synonyme de mise en liberté conditionnelle. C'est une date à laquelle la Commission des libérations conditionnelles est tenue par la loi de se réunir pour étudier le dossier. La décision sera prise par la Commission des libérations conditionnelles.

*   *   *

  +-(1455)  

+-Le registre des armes à feu

+-

    M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, nous ne croyons ni aux contes de fée ni aux lapins de Pâques.

    Plus tôt au cours de la période des questions, le ministre de la Justice se vantait de son registre des armes à feu d'un milliard de dollars qui est inachevé et porté à l'erreur. Comment a-t-il pu justifier l'injection discrète de millions de dollars supplémentaires dans ce système, alors que ses propres collègues disent que c'est un outrage à la Chambre?

+-

    L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, cette question a été prise en délibéré par la présidence, qui rendra une décision. De ce côté-ci de la Chambre, nous soutenons qu'il n'y a eu aucun manquement.

    Le député soutient maintenant qu'il y a eu manquement. Cette discussion a eu lieu hier. Nous allons attendre la décision de la présidence et nous la respecterons. Je ne peux qu'espérer que lui-même et ses collègues feront de même.

*   *   *

[Français]

+-La fiscalité

+-

    M. Gilles-A. Perron (Rivière-des-Mille-Îles, BQ): Monsieur le Président, la ministre du Revenu national vient de déclarer en cette Chambre qu'elle ne pouvait confirmer ou infirmer qu'un plan de rabais de taxes pouvant atteindre 60 millions de dollars était prévu pour sauver l'équipe de hockey des Sénateurs d'Ottawa.

    La ministre est-elle en train de nous dire que son gouvernement pourrait faire un cadeau de 60 millions de dollars aux Sénateurs sans que personne n'en sache rien? Est-ce cela qu'elle nous prépare en cachette en se réfugiant derrière le secret de l'impôt?

[Traduction]

+-

    L'hon. Elinor Caplan (ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, l'ADRC a depuis très longtemps la réputation de faire preuve d'intégrité et de respect des dispositions concernant la confidentialité lorsqu'il est question de l'information relative aux contribuables. Toute information concernant des décisions demandées par un contribuable est confidentielle. Je ne peux même pas dire à la Chambre si une décision a été demandée par un contribuable.

    Je peux cependant dire au député d'en face, comme je l'ai déjà mentionné et comme je vais le répéter parce que c'est très important, qu'il n'y a pas d'ingérence politique. En ma qualité de ministre, je ne m'immisce pas dans ces décisions. Ce sont des décisions rendues par des professionnels, et ils appliquent la loi.

*   *   *

+-Les affaires étrangères

+-

    M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Alliance canadienne): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères. Quand les Canadiens peuvent-ils espérer voir le ministère respecter la règle des 45 jours relative au traitement des demandes de passeport?

    Certaines personnes veulent savoir pourquoi elles doivent attendre 60 jours pour obtenir leur passeport. Quand les Canadiens pourront-ils de nouveau avoir la garantie que le ministère traitera leur demande dans les 45 jours?

+-

    L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, j'ai tenté de répondre à la question hier. Je prends bonne note des préoccupations du député et des Canadiens au sujet du service que nous nous efforçons de leur fournir au bureau des passeports.

    Comme je le disais à la Chambre hier, l'accroissement des mesures de sécurité et le nombre imprévu des demandes font problème. J'ai accru le personnel, afin de réduire les arriérés. J'ai fait parvenir à tous les députés une note du ministère sur la façon de réduire les arriérés. Je prévois et j'espère que la période d'attente pourra être réduite à au moins un mois d'ici un mois, mais il est très difficile de régler ce problème, compte tenu de sa complexité et de sa nature.

    Je m'excuse auprès des députés. Nous nous efforçons...

+-

    Le Président: La députée de Laurentides a la parole.

*   *   *

[Français]

+-Le Code canadien du travail

+-

    Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Monsieur le Président, alors que les conflits de travail à la Cargill, à Vidéotron et à Radio-Nord appauvrissent des centaines de familles, le gouvernement fédéral continue d'appuyer l'utilisation de briseurs de grève. Mais il y a pire encore. La ministre du Travail prétend que les employés ne veulent pas de mesures antibriseurs de grève dans le Code canadien du travail, ce qui est totalement faux.

    Comment la ministre du Travail peut-elle tenir de tels propos, alors que dans un mémoire déposé le 20 novembre 1995, dans le cadre de la révision de la partie I du Code canadien du travail, la FTQ prend quatre pages pour démontrer l'absolue nécessité d'avoir des dispositions antibriseurs de grève?

+-

    L'hon. Claudette Bradshaw (ministre du Travail, Lib.): Monsieur le Président, lorsqu'on regarde la Cargill et Vidéotron, je suis heureuse de dire que les deux parties sont maintenant en négociations .

    Pour ce qui est des travailleurs de remplacement, lorsqu'on a fait la partie I du Code du canadien du travail, les employés voulaient une chose, les employeurs voulaient autre chose, et il y a eu un compromis. Le compromis en place satisfait les deux parties, mais c'est un compromis.

*   *   *

  +-(1500)  

[Traduction]

+-Les prix de l'essence

+-

    M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, dans une décision qui ne peut être qualifiée que de suicidaire, le premier ministre libéral de la Colombie-Britannique a haussé les taxes sur l'essence de 3,5¢. Pendant que le NPD fait des propositions utiles pour stabiliser les prix du carburant, la clique allianciste-libérale aide les Canadiens en haussant les taxes.

    Les Canadiens savent d'instinct que la hausse du prix du carburant est une escroquerie. Or, le ministre de l'Industrie a déclaré que cette question ne relève pas du gouvernement fédéral. En vertu de la Loi sur la concurrence, une plainte au tribunal devrait être renvoyée à une commission de l'énergie possédant des compétences spéciales.

    Le ministre reconnaît-il que...

+-

    Le Président: Le ministre de l'Industrie a la parole.

+-

    L'hon. Allan Rock (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, le Bureau de la concurrence s'est souvent penché sur les activités du secteur énergétique et il est à l'affût de tout indice de collusion ou d'abus. C'est un aspect de la question.

    L'autre aspect est le contrôle des prix, qui relève exclusivement des provinces. C'est pourquoi je dis que la question concerne les provinces. La concurrence relève du gouvernement fédéral, mais le contrôle des prix est de compétence provinciale. Certaines provinces exercent déjà ce pouvoir. Il leur appartient de prendre la décision.

*   *   *

+-La défense nationale

+-

    Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, la semaine dernière, le ministre de la Défense nationale a déclaré que des modifications seraient apportées au Régime d'assurance-revenu militaire, ce régime déficient qui est proposé aux hommes et femmes de nos forces armées. La nouvelle est réconfortante pour ceux qui sont toujours en service actif, mais qu'adviendra-t-il des anciens soldats blessés qui n'auront toujours droit à aucune indemnité pour leurs blessures, puisque la décision est sans effet rétroactif?

    Le ministre de la Défense nationale expliquerait-il à la Chambre aujourd'hui quels sont les plans en place pour indemniser les anciens soldats qui ont été blessés et ne touchent aucune prestation du RARM? Je pense à ceux qui ont perdu leurs deux jambes, leurs deux bras, l'ouïe et la vue.

    Voudrait-il nous dire aujourd'hui ce qu'il entend faire?

+-

    L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, je suis très reconnaissant au major Henwood qui, lorsque je suis devenu ministre de la Défense nationale, a porté à mon attention, par médias interposés, le problème des soldats qui ont perdu leurs jambes.

    J'ai travaillé sur cette question et c'est avec un grand plaisir que j'ai annoncé l'autre jour que, désormais, ces prestations ne seront pas réservées aux colonels ou aux généraux, mais qu'elles seront accordées également aux membres des Forces canadiennes de tous les grades. C'est un grand progrès, et je travaille toujours sur la question de la rétroactivité.

*   *   *

+-Les travaux de la Chambre

[Travaux de la Chambre]
+-

    Le Président: Comme il est jeudi, je sais que le leader parlementaire de l'opposition voudra me poser une question particulière.

+-

    M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le leader du gouvernement à la Chambre des communes pourrait-il nous préciser les travaux pour le reste de la journée, pour demain et la semaine prochaine?

    De plus, pour que nous soyons tous au courant, car tous les députés voudront certes être présents pour voter, pourrait-il nous préciser si lundi, on appliquera l'attribution de temps ou la clôture au projet de loi C-10A?

+-

    L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, cet après-midi nous continuerons le débat sur la motion de l'opposition. Vendredi, nous entamerons l'étude du projet de loi C-25, Loi sur la modernisation de la fonction publique.

    Lundi prochain, nous allons étudier le projet de loi qui va réduire le coût du contrôle des armes à feu, c'est-à-dire le projet de loi C-10A, les modifications au Code criminel, parce que nous voulons réduire les coûts du contrôle des armes à feu. Mardi, nous continuerons l'étude du projet de loi C-24, concernant le financement politique, jusqu'à 16 heures, puis le ministre des Finances présentera à la Chambre son budget qui sera sans aucun doute excellent.

    Le reste de la semaine, c'est-à-dire mercredi, jeudi et vendredi de la semaine prochaine, sera réservé à l'étude du budget.

+-

    M. Bill Casey: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Étant donné que j'ai déjà été vendeur d'automobiles, vous pouvez comprendre pourquoi ma crédibilité est importante pour moi. Or, dans sa réponse à l'une de mes questions, le ministre des Transports a laissé entendre que ma déclaration n'était pas crédible. Je voudrais déposer un document pour prouver que toutes les villes ne sont pas traitées de la même façon dans le cadre de son programme d'annonce des postes disponibles.

+-

    Le Président: Le député a-t-il le consentement de la Chambre pour déposer le document?

    Des voix: D'accord.

    Des voix: Non.


+-INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Les crédits]

*   *   *

  +-(1505)  

[Traduction]

+-Les crédits

+-Jour désigné--La carte d'identité nationale

    La Chambre reprend l'étude de la motion.

+-

    M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est certainement un plaisir pour moi d'aborder ce sujet très intéressant ainsi que la proposition présentée aujourd'hui par les néo-démocrates.

    Permettez-moi de dire dès le départ que la proposition du ministre relative à une carte d'identité nationale est extrêmement irréfléchie. Ne serait-ce que sur le plan de la procédure, elle ne mérite pas un grand débat. Les arguments initiaux semblent particulièrement faibles au chapitre des titres de voyage. Le passeport canadien et la carte Nexus constituent des papiers d'identité très adéquats.

    S'il y a des doutes au sujet de l'intégrité des passeports canadiens, le ministre devrait corriger les passeports plutôt que de créer un autre document d'identité. Par exemple, le gouvernement pourrait envisager un moyen d'identification biométrique sur le passeport canadien. Le gouvernement s'est déjà engagé à inclure un tel moyen sur la carte à feuille d'érable des résidents permanents.

    Je dois ajouter en outre qu'un gouvernement incapable d'inscrire 5 millions d'armes à feu ne devrait vraiment pas essayer d'inscrire 30 millions de citoyens. S'il faut se baser sur l'expérience du registre des armes à feu, le programme de la carte d'identité nationale nous coûtera 6 milliards de dollars sans fonctionner correctement pour autant.

    Dans leurs exposés, mes collègues ont soulevé ou soulèveront toutes ces objections pratiques à la carte d'identité nationale. Pendant la période dont je dispose, je veux aborder les conséquences générales de la proposition du ministre dans le domaine de la sécurité.

    Je crois que la proposition relative à une carte d'identité nationale est en réalité un aveu de la part du gouvernement qu'il a trop d'orthodoxie politique pour agir efficacement contre le terrorisme au Canada.

    Les événements du 11 septembre ont incité les Canadiens et les Américains à repenser leurs choix dans le prétendu compromis entre la liberté et la sécurité, compromis qui consiste à accepter, pour lutter contre le terrorisme, de céder une partie de leur vie privée et de leurs garanties juridiques aux organismes de sécurité, pour renforcer leur efficacité.

    Je pose et mon parti pose également la question: l'équilibre entre la sécurité et la liberté doit-il nécessairement aboutir à une somme nulle? Autrement dit, une augmentation de l'un implique-t-elle nécessairement une diminution de l'autre? Est-ce qu'une plus grande sécurité nationale impose vraiment de réduire les libertés individuelles? Ou bien y a-t-il des moyens de renforcer les deux à la fois? Si nous avons des choix, quels sont-ils?

    La recherche d'une réponse nous impose de revenir à la définition même de la sécurité et de la liberté ainsi qu'au rapport entre les deux. La sécurité n'implique pas l'absence de menaces.

    Le fait que certaines personnes cherchent à nuire à d'autres est universel. C'est un aspect de la nature humaine auquel nous ne pouvons pas échapper. La sécurité existe pour donner des moyens de se défendre contre les attaques. Ces moyens peuvent être matériels, comme une clôture dans la cour ou un mur entre deux pays. Ils peuvent aussi relever du domaine de l'information, comme un avertisseur antivol ou la collecte de renseignements.

    Dans un contexte général, la sécurité est une chose qui s'achète, que ce soit par des pays ou par des individus. Je peux engager un gardien et un pays peut lever une armée. Je peux acheter une matraque chimique Mace et un pays peut construire des armes perfectionnées. La sécurité est toujours relative dans sa portée et son degré, et varie selon la nature de la menace.

    Dans un pays donné, certaines personnes courront plus de risques que d'autres. Dans le cas des récentes menaces terroristes, les citadins étaient plus susceptibles d'être touchés que les ruraux. La nature de l'adversaire module également le degré de danger. Le Canada serait plus en danger dans un conflit avec l'Iran qu'avec l'Islande, par exemple.

    Je ne fais que répéter des évidences parce que celles-ci sont submergées face à l'assertion que le terrorisme a maintenant fait de l'insécurité une condition absolue, compte tenu de la nature purement aléatoire des attentats.

    Mais la menace du terrorisme est-elle vraiment aléatoire? Dans le cas des attentats du 11 septembre, si les actes eux-mêmes étaient effectivement aléatoires parce qu'imprévus, l'identité des auteurs n'a surpris personne. C'étaient des hommes en colère venant de trois pays au régime oppresseur et instable.

    Même s'il existe de nombreux moyens de commettre un attentat terroriste, il suffit, dans un avion, de brandir un petit couteau de 1,50 $ pour aboutir au même résultat qu'avec un plein camion de dynamite. Le bassin de recrutement des terroristes est relativement petit et assez connu.

    Sur le plan de la politique publique, les conséquences sont les suivantes. À cause de la nature relative de la sécurité, défendre tout le monde contre toutes les menaces est impossible, et tenter de le faire est une proposition au rendement très fortement décroissant.

  +-(1510)  

    Les 10 derniers milliards de dollars consacrés à l'antiterrorisme ne rehausseront probablement pas la sécurité autant que les 10 premiers. Non seulement les 10 derniers milliards de dollars ne rehausseront pas beaucoup la sécurité, mais ils risquent de pénaliser d'autres secteurs qui contribuent autant à la sécurité physique, telles les routes et la santé publique. Cela veut dire qu'il nous faut mener une analyse coûts-avantages des pouvoirs pour les services de renseignement de sécurité comme pour tout autre système réglementaire. Les problèmes inhérents à l'évaluation des coûts-avantages de la réglementation du contexte de terreur excéderaient, toutefois, ceux de la réglementation de la pollution de l'eau, voire de la criminalité en général.

    Une telle analyse est possible en principe, mais elle heurte la notion voulant que le gouvernement doive offrir la même protection à tous les citoyens. L'idée fondamentale d'établir des priorités pour les dépenses et les activités de lutte contre le terrorisme afin d'en arriver à un meilleur rapport coût-efficacité n'en mérite pas moins notre attention. Une façon d'y arriver serait de mettre davantage l'accent sur le «qui» que sur le «comment».

    Un spécialiste israélien à qui on demandait pourquoi la sécurité était plus efficace en Israël qu'aux États-Unis a répondu ceci: «Les Américains cherchent une arme alors que les Israéliens cherchent un terroriste.»

    En s'intéressant plus aux terroristes potentiels qu'aux armes possibles, on risque de scruter des gens plus que d'autres. On soutient que cela serait discriminatoire de la part du gouvernement et, par conséquent, une atteinte à la liberté de tout le monde.

    La raison pour laquelle cette argumentation est fausse découle de la nature même de la liberté et de l'État. Comme d'habitude, Milton Friedman nous donne une brève définition de la liberté politique comme étant l'absence de coercition de la part de ses compatriotes. Que ce soit absolument nécessaire ou pas, le rôle de l'État est de corriger la coercition et d'éviter le préjudice.

    Conformément à la primauté du droit, un gouvernement démocratique devrait suspendre la liberté en restreignant ceux qui contraignent les autres et leur font du tort et cela, après avoir évalué la nécessité de le faire et en appliquant seulement la force qu'il faut pour atteindre ce but.

    Conformément à cette définition, le gouvernement ne peut pas traiter tout le monde également à tous égards. Il doit faire des exceptions pour contrer des agents notoires et potentiels de préjudice. Il faut néanmoins que les exceptions soient justifiées, transparentes et efficaces plutôt que punitives.

    L'exercice constant, et fondé sur des principes établis, du pouvoir de l'État à l'égard de l'exception, des individus qui présentent une menace, ne diminue par la qualité générale de la liberté. Un gouvernement risque effectivement de nuire à la liberté lorsqu'il étend sa surveillance et son pouvoir à tous les citoyens simplement pour éviter qu'on le voie s'en prendre à un seul groupe identifiable.

    À nouveau, je cite Milton Friedman, selon qui une société qui sacrifie la liberté à l'égalité finit par perdre et l'une et l'autre. Il parlait d'égalité économique, mais le principe s'applique tout aussi bien à la façon dont un gouvernement traite ceux qui menacent la vie et la propriété.

    Les exceptions à l'égalité de tous peuvent se justifier lorsqu'on fait face à d'éventuels terroristes. En fin de compte, les mesures extraordinaires prises pour défendre le pays peuvent se justifier devant une cour de justice et devraient l'être. Il se peut que l'on commette des erreurs et que l'on cause des inconvénients. La justification réside non seulement dans leur raison d'être, soit de prévenir le terrorisme, mais également dans le fait qu'il est possible d'apporter les corrections qui s'imposent.

    Dans la pratique, la liberté et la sécurité pourraient toutes deux progresser si les gouvernements se concentraient sur les suspects les plus vraisemblables au moyen de leurs pouvoirs existants plutôt que de chercher à élargir leurs pouvoirs de portée générale. Le Canada a déjà à sa disposition de nombreuses ressources et le pouvoir législatif voulu pour lutter contre le terrorisme avec efficacité. Je me demande s'il les utilise bien. C'est la lutte au terrorisme qui devrait déterminer à quel point le Canada a besoin de plus de ressources et de plus de pouvoirs, plutôt que l'élargissement des pouvoirs de l'État à l'égard de tous les citoyens pour toutes sortes de raisons.

    C'est pourquoi moi et mon parti ne trouvons pas justifiée la proposition du gouvernement concernant une carte d'identité nationale. Je sais, pour avoir écouté les collègues d'en face et les ministres qui ne sont pas d'accord, que la proposition mourra probablement de sa belle mort.

    La raison pour laquelle je prends la parole aujourd'hui, c'est que notre porte-parole en matière d'immigration accompagne le Comité de l'immigration dans sa tournée. Elle m'a fait parvenir certaines observations que je tiens à vous communiquer officiellement parce qu'elles sont très bonnes.

    Ainsi, ma collègue députée de Calgary—Nose Hill s'est dit qu'une carte d'identité nationale n'empêcherait pas les terroristes d'entrer à nos frontières. Ce ne serait qu'une autre carte qu'on peut voler, ce qui serait bien plus dangereux. Elle pourrait servir de preuve concluante de l'identité.

    Ne laissez pas les bienveillantes assurances des libéraux vous berner au sujet de la sécurité de la carte, car nous avons vu comment leurs mesures de sécurité contre la fraude en matière de TPS sont efficaces, de même que celles qui ont été prises pour mettre fin aux emplois bidon créés par DRHC.

  +-(1515)  

    Y a-t-il un exemple plus éloquent que celui du gouvernement qui nous dit d'adopter la carte d'identité parce que cela sera bon pour le Canada, alors qu'il ne peut même pas administrer correctement le registre des armes à feu? La plupart des gens n'ont pas inscrit leurs armes, et ceux qui l'ont fait ne les ont pas inscrites correctement.

    Avec un certain nombre de députés des deux côtés de la Chambre, j'ai assisté hier à un souper de l'Association canadienne des restaurateurs. C'était un excellent souper et une soirée très agréable, l'association ayant annoncé qu'elle venait d'employer la millionième personne au Canada dans l'industrie de l'accueil. C'est l'une des plus grandes industries au Canada, plus grande que la plupart des autres réunies.

    Un des directeurs de l'association est venu me voir et m'a raconté son histoire. Il a dit qu'en bon citoyen respectueux des lois, il a fait enregistrer son arme à feu dès que le registre a été mis en place. On lui a alors renvoyé un formulaire en lui expliquant qu'il avait fait une erreur; il a donc envoyé un autre formulaire. Il dit qu'il a ensuite reçu tous les formulaires et son argent. On lui a fait parvenir un chèque au même montant que celui qu'il avait envoyé. Il pense que son arme est enregistrée et il a en main suffisamment de documents; par conséquent, si jamais on voulait l'arrêter, il produirait son reçu. Il dit qu'il n'a jamais compris pourquoi on lui avait renvoyé un chèque; il l'a toutefois encaissé et il a récupéré son argent.

    Une voix: Et il n'a jamais obtenu de permis.

    M. John Reynolds: Peu importe, c'est un beau gâchis. C'est la confusion totale.

    On peut imaginer ce qui se passerait si, demain, le gouvernement déclarait que tous les Canadiens auront une carte d'identité nationale. Les coûts d'une telle mesure ont de quoi faire frémir. Ne nous fions pas aux propos rassurants du ministre de l'Immigration à ce sujet.

    Je rappelle que les libéraux détestent l'idée d'une base de données génétiques pour les criminels, mais sont en faveur d'une carte d'identité pour chaque Canadien. Ils s'opposent à l'idée d'une base de données concernant les délinquants sexuels, mais ils sont en faveur d'une carte d'identité pour tous. Ils ne veulent rien entendre d'un système d'identification des prédateurs qui s'en prennent aux enfants. Ils refusent d'ajouter des données biométriques sur les cartes des résidents permanents. Pourquoi, dans ce cas, veulent-ils une carte d'identité pour chaque citoyen?

    Voici ce qu'aiment les libéraux. Ils aiment bien obliger les honnêtes propriétaires d'armes à feu à avoir des cartes d'identité. Voilà qui est plutôt étrange. Ils voudraient maintenant voir chaque citoyen canadien porter une carte d'identité personnelle. C'est étrange. Il y a quelques chose de très cynique de la part d'un parti, le Parti libéral, qui veut suivre à la trace tous les honnêtes citoyens du Canada, mais ne fait aucun effort pour contrôler les allées et venues des criminels.

    On sait qu'il y a des gens au pays qui s'opposent à ce projet, et notamment le commissaire à la protection de la vie privée. Je n'entrerai pas dans les détails, car d'autres députés en ont parlé à la Chambre.

    Notre porte-parole en matière d'immigration, la députée de Calgary--Nose Hill, se trouve aujourd'hui dans les Maritimes, où elle effectue une tournée de consultations sur l'immigration. Elle nous rapportera peut-être des suggestions brillantes concernant une nouvelle loi sur l'immigration. Dieu sait que nous en avons grandement besoin. Elle a recueilli des commentaires de la part de la commissaire à l'information et à la protection de la vie privée de l'Île-du-Prince-Édouard. La commissaire, Mme Karen Rose, s'oppose à la carte d'identité nationale, et en particulier une carte qui contiendrait des données biométriques.

    Parmi les réserves qu'elle a exprimées, la commissaire a dit qu'une carte d'identité nationale représenterait une atteinte sans précédent à la vie privée des Canadiens, parce qu'elle nécessiterait la mise en place d'une base de données nationale contenant des renseignements personnels, et parce que chaque Canadien serait obligé de s'identifier sur demande. Selon la commissaire, rien ne prouve qu'une carte d'identité nationale permettrait de réaliser les objectifs qui y seraient associés, à savoir la protection de la sécurité nationale, le contrôle des immigrants et l'élimination des vols d'identité. Troisièmement, la commissaire a fait valoir que l'existence même d'une carte d'identité pourrait ouvrir la porte à un accroissement radical des pouvoirs de la police et de la collecte de renseignements personnels sur chaque Canadien, ce qui aurait pour effet de modifier la nature de notre société libre.

    La société libre, voilà ce qui compte vraiment. Je n'ai rien contre les cartes qui déclinent mon identité. J'ai un passeport que je garde sur moi en voyage au cas où on me demanderait une preuve d'identité et je crois qu'il est légitime qu'on nous demande de présenter notre passeport lorsque nous allons dans un autre pays. J'ai aussi mon permis de conduire avec moi. Celui-ci affiche ma photo, si bien que c'est une autre carte d'identité. J'arbore aussi ma carte de la Chambre des communes, qui elle aussi affiche ma photo. J'ai un tas d'autres cartes comme des cartes de crédit, que j'ai voulu avoir, comme ma carte d'identité de la Chambre des communes d'ailleurs. Personne ne m'a tordu le bras puisque c'est mon choix. J'ai la clé de mon bureau et je peux y aller quand bon me semble. Personne ne m'oblige à le faire. Si je ne veux pas conduire de voiture, personne ne m'y oblige, si bien que je n'ai pas besoin de permis de conduire. Ce sont des choix.

    Des Canadiens veulent avoir ces libertés. C'est pour cela que certains vivent dans de très petits villages du Nord ou dans la forêt. Ils vont en ville de temps à autre et ils chassent pour gagner leur vie. Ils aiment leur liberté et ils aiment notre pays parce qu'ils s'y sentent libres. Dès que nous serons tenus d'avoir une carte d'identité, tout le monde saura qui nous sommes et ce que nous faisons. Il y a des gens qui ne veulent tout simplement pas cela.

  +-(1520)  

    Il pourrait aussi se glisser des erreurs. Combien de fois avons-nous lu dans les journaux des histoires de gens qui sont arrêtés parce qu'ils ont le même nom qu'une autre personne? Il y a plusieurs années, j'étais constamment intercepté à la frontière et interrogé au sujet d'une autre personne. J'ai fini par apprendre que je partageais mon nom avec cette personne, un avocat. Les douaniers voulaient lui parler pour une raison ou une autre et c'est moi qu'on amenait dans une pièce en vue de m'interroger. Ils se sont rendu compte que je n'étais pas la personne qu'ils recherchaient, mais ils avaient mon nom. Il est possible de s'imaginer les problèmes que nous risquons d'avoir avec ces cartes d'identité.

    N'oublions pas les faussaires. J'ignore combien de faux passeports au juste circulent dans le monde. Il y en a sûrement des milliers. Des centaines sont disparus ici même au Canada. Le gouvernement canadien se fait voler des passeports vierges, et cela s'est déjà produit, à cause de leur grande valeur. Les cartes seraient contrefaites et photographiées, et les empreintes digitales seraient changées. Il y a des gens qui savent comment s'y prendre. C'est très dangereux et cela aurait certainement une incidence sur nos libertés.

    Je ne m'oppose pas à ce que ce soit possible pour les gens d'en faire la demande, mais obliger tout le monde à s'enregistrer est une erreur dans un pays libre et démocratique. Ceux qui, parmi nous, veulent voyager ailleurs dans le monde peuvent obtenir les documents nécessaires. Il ne faut pas d'obliger les autres à le faire.

    Nous nous y opposerions. Le ministre a demandé aux députés d'en discuter avec leurs électeurs. Je l'ai fait. Ils sont contre. Le ministre devrait comprendre, d'après ce que nous lui disons ici, qu'il devrait laisser tomber cette idée. Il devrait l'oublier. Ainsi nous dormirions mieux la nuit.

+-

    M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, je dois admettre que je suis plutôt surpris d'entendre le NPD et l'Alliance parler d'une même voix au sujet de la carte d'identité nationale.

    Une voix: Ça ne durera pas.

    M. Peter Stoffer: Je sais que ça ne durera probablement pas sur tous les sujets, mais j'ai une question à poser. Il y a beaucoup de gens, surtout parmi les libéraux, qui craignent que si nous ne faisons pas quelque chose en ce sens, les États-Unis feront quelque chose à la frontière qui rendra plus difficiles les échanges de marchandises et de services.

    J'aimerais me faire l'avocat du diable pour une seconde. Au lieu d'une carte d'identité nationale, que proposerait le député pour garantir la rapidité des échanges commerciaux entre nos deux pays?

+-

    M. John Reynolds: Monsieur le Président, je tiens à remercier le député néo-démocrate de ses propos. Je sais que lui et moi serions probablement d'accord sur pas mal de choses et qu'il serait probablement à l'aise au sein de notre parti. Il serait à l'extrémité gauche de ce dernier, mais il s'y trouverait très à l'aise car il appartient à un parti très démocratique qui tient des votes au sein de son groupe parlementaire. Je tiens à le remercier de sa question. Je respecte son point de vue.

    Ce que nous avons actuellement satisfait pleinement les Américains. Quand nous traversons la frontière à titre individuel, ils acceptent nos passeports. Il n'y a aucun problème. Nous avons aussi les systèmes Canpass et Nexus. Nous pouvons nous présenter de notre plein gré aux autorités américaines, donner nos empreintes digitales et nous faire photographier. Elles nous donnent alors une carte et nous entrons facilement aux États-Unis.

    La même chose existe dans l'autre sens. Les gens qui vivent à Vancouver et qui se rendent souvent à Bellingham ou à Blaine, peuvent faire les démarches du côté canadien, remplir les formulaires voulus et se préenregistrer eux-mêmes. Ensuite, ils peuvent emprunter la voie rapide et ils n'ont pas à faire la queue avec toutes les autres voitures pour passer la frontière.

    Ces systèmes existent déjà. Ils sont excellents et je suis certain qu'ils s'amélioreront avec le temps. Je pense que nous n'avons pas besoin d'autre chose entre nos deux pays. Ça fonctionne très bien comme ça.

+-

    M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le moins que l'on puisse dire, c'est que c'était là un excellent discours de la part du leader à la Chambre de l'Alliance canadienne. Tous les aspects ont été abordés. Il convient d'en rajouter un peu au sujet du registre des armes à feu et de tous les problèmes qui l'assaillent. Il est maintenant question d'enregistrer non pas 7 millions, mais bien 33 millions de personnes. Quant aux 2 ou 3 milliards de dollars que coûterait l'enregistrement de tous les Canadiens, cet argent ne serait-il pas mieux utilisé s'il servait à appuyer davantage les militaires, la GRC, les forces policières et les services de renseignement pour qu'ils puissent effectivement s'occuper des terroristes susceptibles d'attaquer notre pays?

+-

    M. John Reynolds: Monsieur le Président, selon moi, la majorité des députés, y compris bon nombre de mes collègues libéraux, ne doutent pas que si le registre de contrôle des armes à feu peut le moindrement servir de barème, compte tenu du petit montant qui y a été consacré, alors qu'il a coûté un milliard de dollars et que le compteur continue de tourner, l'enregistrement de chaque Canadien coûterait probablement de 6 à 12 milliards de dollars.

    Je suis convaincu que, si l'on effectuait un sondage, tous les Canadiens diraient que le principal problème est celui de la santé et que les militaires ont besoin de plus d'argent. Tous les députés savent que les militaires ont besoin de plus d'argent, sauf le ministre des Finances, le premier ministre et le ministre de la Défense. Le Comité de la défense de la Chambre a recommandé d'accroître le budget du ministère de la Défense. L'ancien solliciteur général est ici et je suis sûr qu'il conviendrait avec moi que la GRC pourrait utiliser à bon escient plus d'argent, tout comme les forces policières du pays. Puis il y a ce montant d'un milliard de dollars que nous avons gaspillé pour le registre des armes à feu.

    Le gouvernement parle toujours de contrôle des armes à feu. Un contrôle a été exercé sur les fusils et les armes de poing pendant des années, à un coût très minime. Ce n'était pas un problème. Ce ne sont pas les chasseurs de canards et de chevreuils qui posent un problème au pays, et nous dépensons un milliard de dollars. Cet argent pourrait être affecté à la police qui patrouille les rues et visite les écoles. Je sais que, dans ma propre circonscription, certaines des visites effectuées par les policiers n'ont plus lieu. C'est un problème, car les services de police peuvent acquérir du respect lorsqu'ils visitent des écoles et se livrent à des activités semblables. Lorsqu'on réduit le budget de ces organismes pour injecter cet argent dans un registre des armes à feu bidon, ce n'est pas ce que veulent les contribuables canadiens.

    Je partage l'avis de mon collègue qui a dit que ce serait un gaspillage total d'argent et que ce n'est pas là la façon dont les contribuables aimeraient que nous dépensions leur argent.

  +-(1525)  

[Français]

+-

    Mme Yolande Thibeault (Saint-Lambert, Lib.): Monsieur le Président, je veux vous informer tout de suite que je partagerai mon temps avec mon honorable collègue de Louis-Hébert.

    Il me fait plaisir de prendre la parole car la question que nous débattons aujourd'hui me semble primordiale.

    Comme le soulignait ce matin le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, la menace la plus importante à la vie privée est le vol et l'utilisation de son identité par une autre personne. Lorsque vous avez des vols d'identité qui représentent pour la société canadienne des pertes de 2,5 milliards de dollars annuellement, je pense qu'il est important de se poser des questions à ce sujet.

    En novembre 2002, le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration a soumis une proposition. Sans présenter de projet de loi à la Chambre des communes, le ministre a souhaité ouvrir un débat sur la possibilité de créer une carte d'identité nationale.

    Depuis les attaques terroristes du 11 septembre 2001 aux États-Unis, l'identité d'une personne a pris une importance primordiale.

    En matière de citoyenneté et d'immigration, le gouvernement du Canada s'est engagé à assurer la sécurité et le bien-être des Canadiens et des Canadiennes. En plus d'une loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, qui est entrée en vigueur au cours de l'été 2002, nous avançons maintenant vers une meilleure sécurité aux frontières.

    Ce que propose le ministre, c'est de consulter les Canadiens et Canadiennes à propos d'un projet de carte d'identité nationale. Le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration va recueillir l'opinion des Canadiens et Canadiennes et reviendra à la Chambre avec le constat de ses travaux.

    Pour l'instant, le gouvernement souhaite entendre ce que les Canadiens et les Canadiennes ont à dire au sujet d'une telle carte d'identité nationale. Bref, il s'agit d'établir un bon dialogue entre le gouvernement et les citoyens canadiens. Quant à moi, je trouve qu'il est très sain d'avoir un tel débat. Cela démontre que c'est l'expression évidente du bon état dans lequel se trouve la démocratie canadienne.

    En abordant ce débat avec ouverture d'esprit, la protection de la vie privée doit demeurer une considération primordiale. Sur le plan international, le Canada continue de jouer un rôle de chef de file dans la promotion des droits de la personne, entre autres au sein des Nations Unies, du Commonwealth et de l'Organisation des États d'Amérique. Dans notre pays, la Charte canadienne des droits et libertés garantit à tous et à toutes la même protection et les mêmes bénéfices.

    Les libéraux ont toujours eu à coeur la protection de la vie privée et des droits et libertés. N'oublions pas que c'est grâce aux libéraux qu'il existe une Charte canadienne des droits et libertés.

    Plusieurs pays à travers le monde ont déjà une carte d'identité nationale. Ce n'est pas une invention du ministre. Je pense par exemple à la France, l'Allemagne, la Grèce, l'Italie, le Portugal et l'Espagne. Pour sa part, la Belgique vient d'annoncer récemment qu'elle allait utiliser la technologie des cartes dites «intelligentes» pour sa carte d'identité nationale pour protéger l'intégrité du document et pour mieux protéger les renseignements personnels.

    Les leçons que nous pouvons tirer de la démarche d'un pays comme la Belgique, c'est que les technologies évoluées, comme la biométrie, ont la capacité de mieux protéger la vie privée des Canadiens. Dans le monde d'aujourd'hui, les institutions et les idées connaissent des changements profonds.

  +-(1530)  

    Nous devons donc veiller à ce que les Canadiens ne soient pas dépassés par les événements. Les technologies qui seront appliquées, si c'est la volonté de la population, permettront d'utiliser des identificateurs biométriques uniques, telles que les empreintes digitales, la reconnaissance faciale et le balayage de l'iris pour contrôler l'identité des personnes. La précision et l'efficacité de ces nouvelles techniques sont fort prometteuses.

    Les mesures de sécurité déployées au moment de l'émission de telles cartes offriront un degré de certitude considérable. Alors, pourquoi ne pas utiliser nos technologies de pointe, telles que la biométrie, afin de garantir l'intégrité de ces documents tout en améliorant la protection de la vie privée?

    Il est important de dresser la liste des avantages et des inconvénients d'une telle carte d'identité nationale et il est important de prendre le pouls de la population. J'encourage donc tous mes collègues de la Chambre et tous les Canadiens et Canadiennes à réfléchir à cette question.

+-

    Mme Hélène Scherrer (Louis-Hébert, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec beaucoup d'intérêt que je suis ce débat sur la carte d'identité, d'autant plus que j'ai eu la chance d'être sensibilisée par certains entrepreneurs de ma région aux nouvelles technologies qui pourraient être utilisées dans tout le volet biométrique de la confection de cette carte d'identité.

    Je suis également très heureuse de savoir que le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration est actuellement en train de faire une tournée pancanadienne pour consulter les Canadiens et les Canadiennes à ce sujet.

    Dans notre pays, la responsabilité des documents d'identité est partagée. D'une part, le gouvernement fédéral, par l'entremise de Citoyenneté et Immigration Canada, est responsable de la délivrance des documents d'immigration et de citoyenneté. D'autre part, les gouvernements provinciaux s'occupent de la délivrance des certificats de naissance et des certificats de décès.

    Tous ces documents constituent ce qu'on appelle des documens de base. Ils servent à délivrer tous les autres documents, comme par exemple les passeports, les permis de conduire et les cartes d'assurance-maladie.

    Mais dans les faits, on sait très bien qu'aucun de ces documents n'est expressément un document d'identification. Toutefois, la plupart d'entre eux sont communément acceptés et utilisés comme pièce d'identité. Encore tout récemment, ma fille me soulignait que lors d'une participation à un tournoi de basket-ball aux États-Unis, elle n'avait eu qu'à produire sa carte d'assurance-maladie avec une photo ou son permis de conduire.

    Nous savons également que les caractéristiques de sécurité de ces documents varient considérablement et que certains d'entre eux sont faciles à reproduire. Conséquemment, on découvre leur utilisation frauduleuse à bien des endroits.

    Le vol ou l'usage frauduleux de ces documents peut représenter un danger pour la sécurité des Canadiens, pour l'intégrité des programmes gouvernementaux ou pour la prospérité de notre économie.

    Par exemple, si on parle des programmes gouvernementaux, des documents ont pu très facilement être contrefaits pour permettre à certaines personnes d'avoir accès à l'assurance-emploi, par exemple, ou même à l'aide sociale. Cette accessibilité fait en sorte qu'il en coûte des milliards de dollars, soit des montants faramineux, aux différents paliers de gouvernement.

    Dans notre pays comme dans le reste du monde, on constate une hausse stupéfiante des fraudes et des vols liés à l'identité. Malgré des technologies plus sophistiquées, le vol d'identité est en hausse dans tous les pays industrialisés. Il est d'ailleurs clair que plus la technologie est facile d'accès, plus à ce moment-là les documents sont faciles à reproduire et sont accessibles à tous.

    Ici, d'après le Conseil canadien des bureaux d'éthique commerciale, le vol d'identité et l'usage frauduleux des documents d'identité coûtent des milliards de dollars chaque année. Évidemment, ces crimes touchent les consommateurs et les entreprises et nuisent définitivement à notre économie.

    Dans le contexte actuel, avec la technologie mise à notre disposition, les Canadiens peuvent être mieux protégés contre ces vols et ces fraudes. En conséquence, on a demandé au ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration de coordonner les efforts du gouvernement du Canada pour renforcer l'intégrité des documents.

    Citoyenneté et Immigration Canada délivre des documents aux citoyens, aux résidents permanents, aux étudiants étrangers, aux demandeurs d'asile, aux travailleurs temporaires et aux visiteurs du Canada. Par conséquent, il faut absolument produire des documents à la fine pointe de la technologie.

    La nouvelle carte de résident permanent, par exemple, est un document extrêmement sûr qui peut comporter des éléments biométriques d'identification. La carte de résident permanent a été introduite l'année dernière. Déjà, Citoyenneté et Immigration Canada en a émis plus de 170 000.

    Cette carte a été bien accueillie tant par les clients que par les experts en matière de sécurité. En effet, l'Association internationale des fabricants de cartes a décerné deux prix à cette carte de résident permanent du Canada. Il y a même des experts américains qui ont mentionné qu'elle était la carte d'identité la plus sûre au monde.

    De fait, la carte de résident permanent du Canada peut être perfectionnée de manière à inclure la technologie de la biométrie. Il s'agit d'une nouvelle technologie qui utilise des éléments d'identification uniques, comme par exemple les empreintes digitales, la lecture faciale ou l'examen de l'iris. Ils permettent de vérifier l'identité d'un individu avec une exactitude sans pareille.

    Au Royaume-Uni, par exemple, des consultations sont actuellement menées au sujet de l'introduction d'une carte d'identité nationale délivrée cette fois sur une base volontaire.

  +-(1535)  

    Le gouvernement est tout à fait conscient de la préoccupation que constitue le respect de la vie privée, et c'est clair que ce sujet demeure un thème central de cette discussion.

    Respecter la vie privée est une considération primordiale. Au Canada, nous avons déjà la Charte canadienne des droits et libertés et la législation canadienne à la protection de la vie privée qui garantissent le respect de la vie privée des citoyens canadiens. Il va sans dire que toute carte d'identité nationale proposée devra être conforme aux politiques gouvernementales sur la protection des renseignements personnels, ainsi qu'à la Charte des droits et libertés.

    C'est un débat important qui touche à des questions cruciales et on se doit de prendre en considération les questions de sécurité, les questions de respect de la vie privée, et effectivement de citoyenneté, comme l'ont souligné presque tous mes collègues en cette Chambre, au cours de ce débat. Mais il est également nécessaire que, dans ce débat, nous conservions une objectivité correspondant à la gravité des questions examinées. Nous devons éviter tout sensationnalisme et examiner les avantages et les inconvénients d'une carte d'identité nationale calmement et de façon raisonnée.

    C'est ainsi que les Canadiens et les Canadiennes souhaiteraient que nous abordions ce sujet.

+-

    M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le Président, la députée parle entre autres de la vie privée d'une personne. Il faut se rappeler qu'il n'y a pas si longtemps, le gouvernement a gagné un procès pour que l'information reçue à la douane soit transférée à l'assurance-emploi, permettant ainsi de couper les prestations d'assurance-emploi à ceux qui vont passer une semaine aux États-Unis.

    Que fait-on de la vie privée des gens? Il y a toute l'information qui peut être échangée au sein du gouvernement. Je pense que dans son discours, la députée a fait erreur lorsqu'elle a dit qu'elle croyait qu'on allait respecter la vie privée des gens, comme si le gouvernement ne ferait pas circuler toute cette information d'un ministère à l'autre. La preuve en est que le gouvernement est allé en cour pour gagner une cause lui permettant de se moquer de la vie privée des gens.

  +-(1540)  

+-

    Mme Hélène Scherrer: Monsieur le Président, je pense que la raison de ce débat en Chambre est effectivement de permettre à nos collègues des deux côtés de la Chambre de s'exprimer sur le volet de sécurité qui est primordial dans la mise en application de cette carte.

    S'il y a des doutes, si des solutions doivent être apportées, s'il y a des irritants, je pense que le débat permettra de les connaître. Ce débat fera en sorte que ce que mon collègue souligne ne se reproduise plus. Les suggestions sont les bienvenues.

    Je remercie d'ailleurs l'opposition d'avoir choisi ce sujet aujourd'hui afin que l'on puisse parler de ces questions très importantes.

[Traduction]

+-

    M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, nonobstant les arguments très pertinents apportés par la députée de Louis-Hébert, arguments dont beaucoup me paraissent être des aspects légitimes d'un débat de plus grande portée, je voudrais savoir si, à son avis, la création d'une telle carte justifie ce qu'il en coûtera dans l'ensemble.

    En 2000, DRHC a envisagé de créer une carte d'identité nationale. Le Cabinet en a rejeté l'idée pour deux raisons: la protection de la vie privée et le coût projeté de 3,6 milliards de dollars.

    En dépit des arguments avancés par la députée en faveur du bien-fondé de cette initiative, estime-t-elle aussi crucial et indispensable pour le Canada de dépenser à l'aveuglette quelque 3,6 milliards de dollars? Nous ne savons même pas si l'objectif visé sera atteint.

[Français]

+-

    Mme Hélène Scherrer: Monsieur le Président, je remercie mon collègue de sa question. Dans mon discours, j'ai parlé de considérations économiques. Elles doivent être prises en considération, autant pour ce qui est du coût de la carte que pour ce que coûte actuellement la fraude et la contrefaçon de différents documents d'identité.

    Ce débat nous permettra de prendre en considération autant les coûts de mise en marché d'une carte que les coûts actuels dus aux faux documents mis en circulation, lesquels permettent actuellement d'avoir accès à des programmes gouvernementaux. Cela coûte à l'ensemble de l'économie, aux consommateurs, aux entreprises un montant faramineux.

+-

    M. Yvon Godin: Monsieur le Président, quand on regarde les systèmes mis en place par le gouvernement fédéral, on peut se rappeler que l'année dernière il avait donné une réduction pour le prix de l'huile à chauffage. On a envoyé de l'argent à des personnes décédées ou à des prisonniers. Est-ce que la députée fait confiance au gouvernement pour mettre en place encore un système sur lequel les Canadiens n'auront pas de contrôle?

+-

    Mme Hélène Scherrer: Monsieur le Président, d'entrée de jeu, je dois faire confiance à l'ensemble des Canadiens pour ne pas tenter de frauder le système. Il y aura toujours des gens qui tenteront de contourner le système, mais faisons confiance aux Canadiens. Effectivement, ceux-ci feront appel au système de façon honnête.

+-

    M. Bernard Bigras (Rosemont—Petite-Patrie, BQ): Monsieur le Président, c'est avec une grande joie que je prends la parole en cette journée réservée à l'opposition. Je tiens à vous indiquer que je partagerai mon temps avec le député de Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques.

    D'abord, je tiens à féliciter mes collègues du parti de gauche—, qui est à gauche, naturellement, toujours à gauche—, soit le NPD, pour la motion qui nous a été présentée. Celle-ci dit, et je prends la peine de la lire avant de débattre de cette question:

    Que, de l'avis de la Chambre, l'introduction d'une carte d'identité nationale va à l'encontre du droit à la vie privée et des autres droits civils que possèdent les Canadiens et les Canadiennes et que la Chambre s'oppose donc à l'adoption de cette mesure.

    Il est important, à mon avis, de débattre avant même qu'entre en vigueur ce type d'outils dont veut se doter le gouvernement pour identifier la population. D'abord, rappelons que le 13 novembre, le ministre de l'Immigration et de la Citoyenneté a lancé cette idée de créer cette carte d'identité nationale.

    Rappelons que c'est une carte que certains citoyens ont déjà en leur possession. Par exemple, les immigrants reçus ou les personnes ayant la résidence permanente ont déjà en leur possession ce type de carte. Toutefois, ce que souhaite faire le gouvernement par cette idée lancée pour un débat par le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, c'est d'étendre cette mesure, cet outil d'identification, et d'en créer une carte. C'est une carte dont on peut prévoir, et c'est la prétention de ce gouvernement, qu'elle sera électronique. C'est une carte à puce électronique, qui aurait pour but de renfermer un certain nombre d'informations—une carte à mémoire, rajouterais-je—, qui aurait pour but de renseigner et qui renfermerait des renseignements sur les citoyens.

    Prenons par exemple les empreintes digitales. Cette carte, par l'entremise d'une carte à puce électronique, contiendrait les empreintes digitales des citoyens. Il y a donc matière à s'interroger.

    Quel est le but véritable du gouvernement par cette mesure? C'est bien sûr, selon le gouvernement, de faciliter l'accès aux voyageurs aux États-Unis, afin d'éviter que les citoyens canadiens soient munis d'un visa pour pouvoir aller à l'étranger, mais plus particulièrement aux États-Unis.

    Cette mesure peut nous amener à réfléchir. Un certain nombre de questions doivent être soulevées par cette idée lancée par le gouvernement.

    Premièrement, quelle est cette définition que nous devons donner à l'identité? Deuxièmement, eu égard à la carte et à cette carte d'identité nationale, à qui doit-elle servir? Troisièmement, quelle est son importance?

    Rappelons un certain nombre de choses si cette carte doit exister. N'oublions pas le régime dans lequel nous sommes. Nous ne sommes pas, dans cette société moderne, dans un État policier. Bien au contraire, nous sommes dans un État de droit, dans une société de droit où le droit à l'anonymat, et plus particulièrement le droit à la vie privée, est reconnu. C'est un aspect reconnu dans des sociétés de droit, comme la société dans laquelle nous sommes.

    Donc, il y a un danger certain—je citerai un peu plus tard le commissaire à la protection de la vie privée—pour que nous passions d'un État de droit à un État policier. Je suis convaincu que ce n'est pas l'intention de ce gouvernement d'en face, car il faut protéger la vie privée des citoyens.

  +-(1545)  

    Je rappelle que le 1er novembre 2002, le Commissaire à la protection de la vie privée nous indiquait et il a d'ailleurs affirmé qu'au Canada, il est bien établi, et je cite:

[...] les citoyens n'ont pas à fournir leur identité à la police à moins d'être arrêtés ou d'exercer une activité nécessitant un permis, comme la conduite d'un véhicule.

    Et il rajoutait, et j'insiste, c'est justement l'aspect que j'abordais dans ma présentation plus tôt:

    Le droit à l'anonymat face à l'État est un droit fondamental en matière de protection de la vie privée.

    Donc, ce qui est fondamental dans une société de droit et dans un État de droit, c'est de protéger cette vie privée. Il est clair, à mon avis, que ce type de carte d'identité nationale pourrait faire en sorte que nous vivions un glissement important d'une société de droit vers une société policière, ce à quoi je ne suis pas intéressé en tant que citoyen.

    On se rappelle tous et toutes les méga-fichiers de DRHC, où on accumulait des informations sur des citoyens, ce qui avait fait l'ire la société québécoise et canadienne. Les pressions avaient été tellement fortes pour qu'on abolisse ce registre, ce fichier central. Il est important de rappeler que les citoyens se sont mobilisés sur cette question justement pour éviter d'avoir un fichier central, pour éviter d'avoir un État «big brother» présent dans une société dite démocratique. Donc, les citoyens québécois et canadiens considéraient que ce fichier central violait la vie privée.

    Le deuxième aspect important concerne les coûts. À mon avis, ils doivent être considérés dans la mise en place de ce type d'outil dont veut se doter l'État pour contrôler, pour centraliser l'information des citoyens.

    Il faut se rappeler les erreurs qu'a fait ce gouvernement par le passé. Rappelons-nous du programme d'enregistrement des armes à feu, un programme qui devait ne coûter que 2 millions de dollars selon les estimations du gouvernement. Mais, force est de constater que cela a été un dérapage total. Les estimations de 2 millions de dollars se sont révélées fausses. C'est plus d'un milliard de dollars qu'il en a coûté aux contribuables canadiens pour ce type de programme. C'est un programme qui s'adresse à un champ d'action bien particulier qui est celui de l'enregistrement des armes à feu.

    On peut donc s'inquiéter de l'estimation que serait appelé à nous présenter le gouvernement d'en face relativement à un programme de carte d'identité nationale.

    Il y a un autre aspect, c'est la question des coûts de falsification d'identité. Dire qu'il n'y aura pas de falsification de cette carte, c'est être dans l'erreur. Ce que l'on sait, c'est que le Conseil canadien des bureaux d'éthique commerciale a estimé à 2,5 milliards de dollars par année les coûts pour les consommateurs, pour les banques et pour les compagnies de cartes de crédit en ce qui concerne la falsification de ces cartes et les coûts conséquents.

    A notre avis, il y aura non seulement des coûts quant à la mise en oeuvre d'un tel programme, d'une telle mesure, mais il y aura aussi des coûts reliés à la falsification. Donc, je pense qu'il faut procéder à une évaluation importante sur la base des coûts.

    Le danger, c'est que cette carte ne soit pas restrictive. Le danger, c'est qu'il y ait encore une fois un dérapage et que d'un usage restrictif, le gouvernement en vienne à un usage multiple. Le danger, c'est d'avoir un gouvernement qui mettrait en place une mesure, non seulement sur l'identité du citoyen, mais qui pourrait, en bout de ligne, toucher l'identification, les dossiers médicaux et l'information bancaire. C'est ce que nous rejetons.

  +-(1550)  

    En terminant, je crois qu'il faut être prudents. La précaution et la prudence dans un dossier comme celui-là sont de bien meilleures conseillères que le fait de prendre des mesures trop rapides.

    En conséquence, nous émettons beaucoup de réserves. Dans mon cas, je suis totalement opposé à la création de ce type d'outil qui fera uniquement en sorte que l'État devienne, en bout de ligne, non pas un état de droite, mais il risquerait de devenir un état policier où «big brother» sera présent dans la vie privée de nos concitoyens.

[Traduction]

+-

    M. Sarkis Assadourian (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député et tous les collègues qui participent à ce débat. Je voudrais poser une question au député. Il s'est dit en total désaccord avec le principe de la création d'une carte d'identité. Il sait pertinemment que nous ne faisons qu'en discuter aujourd'hui. Rien n'a été décidé à ce sujet. Il n'y a ni projet de loi, ni motion à ce sujet.

    Aux fins de la discussion, je demande au député de tenir compte des éléments suivants.

    Premièrement, les objectifs que l'on visera avec cette carte d'identité seront fixés par les Canadiens. Comme le sait le député, le comité sillonne le pays pour entendre des témoins à ce sujet. Deuxièmement, les informations que portera la carte seront fournies par les Canadiens eux-mêmes. Nous y ferons apparaître les informations que nous voulons, et non pas des informations contre notre gré. C'est là-dessus que portent ces pourparlers. Troisièmement, cette carte a pour objet de rendre service aux Canadiens. Il convient d'en définir la finalité.

    Si ces trois éléments sont pris en compte dans le système, le député sera-t-il d'accord avec le principe de la création d'une carte d'identité ou bien persistera-t-il à s'opposer totalement à cette initiative au Canada?

  +-(1555)  

[Français]

+-

    M. Bernard Bigras: Monsieur le Président, comme je l'ai indiqué dans mon discours, il y a un véritable danger de dérapage. Le danger, c'est que d'une carte restrictive, on passe à une carte d'utilisation ou d'usage multiples.

    J'aimerais citer le commissaire à la vie privée qui avait ces mêmes inquiétudes. Il nous rappelait, il y a peu de temps, et je cite:

    Qu'il suffise de se rappeler que l'impôt sur le revenu était supposé être une mesure temporaire pour aider à financer la Deuxième guerre mondiale. Et que les numéros d'assurance sociale étaient supposés n'être utilisés que pour administrer le régime d'assurance sociale.

    Ainsi, nous devons être très prudents chaque fois que quelqu'un propose de limiter notre droit à la vie privée, juste pour un certain temps ou juste parce que les avantages seront très attrayants.

    Je rappelle aussi que le commissaire à la vie privée nous a dit, et je ne cite qu'un seul passage:

    Je ne peux trouver aucune justification pour l'établissement d'une carte d'identité nationale, surtout parce qu'elle est totalement inutile comme mesure de lutte contre le terrorisme.

    Là où il faut être prudent avec ce type de carte, c'est qu'il y a un danger certain de voir une carte à usage restrictif être utilisée pour des usages multiples. Je pense que la protection de la vie privée est la base fondamentale d'une société de droit à laquelle les citoyens canadiens et québécois adhèrent. Je pense qu'il y aurait un danger certain d'en venir à un glissement de terrain important sur le plan de l'atteinte à la vie privée.

    Je ne crois pas qu'un type de carte comme celle-là puisse faire en sorte de régler un certain nombre de problèmes qui sont présents, bien sûr, mais je suis convaincu que ce type d'outil n'est pas le moyen privilégié pour atteindre les objectifs que le gouvernement souhaite atteindre.

+-

    Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Monsieur le Président, je voudrais féliciter mon collègue pour son intervention. J'ai sensiblement la même opinion que lui quant à la protection de la vie privée.

    Je pense qu'il a élaboré largement sur ce point et aussi sur le point des coûts reliés à ce dossier. On n'a qu'à regarder l'enregistrement des armes à feu. Avec le cafouillis qu'on a vécu dans ce domaine, on peut s'imaginer qu'en créant un programme de cette importance et de cette ampleur, les coûts qui y seraient reliés seraient absolument aberrants.

    J'aurais une question à lui poser et j'aimerais connaître son opinion à ce sujet. Ne croit-il pas que cette carte, dans le fond, c'est peut-être simplement pour satisfaire nos voisins américains? Ils pourraient nous identifier facilement, en passant nos cartes dans un ordinateur, tout en ayant un certain contrôle sur le petit voisin et le petit cousin qui s'appelle le Canada.

+-

    M. Bernard Bigras: Monsieur le Président, il existe déjà des mécanismes permettant à un citoyen de demander un visa. Le danger concerne le partage d'informations.

    La souveraineté canadienne n'est pas quelque chose de virtuel. Il y a un danger certain. Comme ma collègue l'a rappelé, c'est une volonté du gouvernement plus au sud d'avoir un régime de fichiers central. Il y a un danger que ce fichier soit partagé. Je pense effectivement que ce n'est que pour répondre à un caprice américain. Nous pouvons nous passer de ce type de mesure, de ce type d'outil.

    Je le dis sans rire, il faut que le Canada puisse garder sa souveraineté vis-à-vis des États-Unis. Je pense qu'il y a un danger de glissement certain avec ce type de carte. Tous ceux qui font la promotion de la souveraineté canadienne devraient être prudents quant aux dangers que les Américains puissent obtenir certaines informations.

    Il y a un danger évident de falsification d'un dossier central. Ce n'est à mon avis que pour répondre aux caprices américains que le gouvernement privilégie ce type de mesure.

+-

    M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais féliciter le député de Rosemont—Petite-Patrie pour la qualité de son discours. Effectivement, on peut également féliciter le Nouveau Parti démocratique pour la proposition qui est présenté et qui dit ce qui suit:

    Que, de l'avis de la Chambre, l'introduction d'une carte d'identité nationale va à l'encontre du droit à la vie privée et des autres droits civils que possèdent les Canadiens et les Canadiennes et que la Chambre s'oppose donc à l'adoption de cette mesure.

    

  +-(1600)  

    

    Nous avons procédé à l'analyse de cette situation. Évidemment, nous savons au départ que la carte d'identité nationale n'est qu'à l'état de projet. Toutefois, souvenons-nous qu'il y a quelques mois, il y avait un projet dans un tout autre domaine, soit un avant-projet de loi pour resserrer le crédit d'impôt pour les personnes handicapées. C'est le type d'action qui est menée aujourd'hui qui a amené le gouvernement à reculer et à retirer ce projet de loi qui n'avait pas de bon sens.

    En effet, on s'était rendu compte qu'un juge avait décidé que des personnes handicapées devaient avoir droit au crédit. Plutôt que de respecter l'avis de la cour, le gouvernement cherchait à resserrer les normes. Une action a été menée dans le sens de la motion d'aujourd'hui. Jusqu'à maintenant, à moins de mauvaises surprises dans le budget, on devrait avoir réussi à protéger les personnes handicapées des intentions du gouvernement.

    Dans le même sens, le débat d'aujourd'hui m'apparaît important. Le Bloc québécois se positionne contre une carte d'identité nationale obligatoire. Je voudrais faire référence à une expérience que j'ai vécue personnellement.

    On sait qu'il y a quelques années, le Comité permanent du développement des ressources humaines s'est penché sur la carte d'assurance-sociale. On a fait l'historique de la situation. Ainsi, on s'est demandé pourquoi on en était arrivés à avoir des centaines de milliers de cartes qui, finalement, ne servaient à rien. Des cartes appartenant à des gens décédés étaient encore actives. Surtout que cette carte, qui avait initialement été créée pour des activités gouvernementales, comme les déclarations d'impôt ou d'assurance-emploi, étaient devenues la norme dans le secteur privé. On s'en servait dans tout le secteur bancaire, dans les enquêtes de crédit et dans toutes sortes de domaines, alors que ce n'était pas là l'objectif au départ. Parce qu'on n'a pas été assez prudent à l'origine, on est devant cette réalité.

    Donc, eu égard à la carte d'identité nationale dont on nous parle, il faudrait être certain qu'on en n'en arrivera jamais là. La meilleure façon de ne pas en arriver là, c'est de ne pas avoir ce type de carte parce que, finalement, on n'en a pas besoin. Ce n'est pas un outil essentiel, surtout si cette carte contient des informations comme le numéro d'assurance-sociale, le lieu de naissance ou, avec les moyens technologiques d'aujourd'hui, toutes sortes d'autres informations qui pourraient servir en bout de ligne à contrôler les individus et même des gens qui sont des citoyens ou des citoyennes complètement honnêtes et qui n'ont rien à se reprocher sur le plan légal.

    Toutefois, avec ce type de carte, on peut en venir à prendre le contrôle, à recueillir des informations et, finalement, à exiger d'un citoyen ou d'une citoyenne, d'avoir sur lui ou sur elle une carte qui n'est pas fondamentalement nécessaire. Il faut toujours être très prudent devant des demandes de ce type.

    Dans le passé, on a vécu l'histoire du méga-fichier de l'Agence des douanes et du revenu et de Développement des ressources humaines Canada. On a utilisé des informations qui, à l'origine, étaient colligées avec un objectif précis. On s'en est servi à toutes sortes d'autres fins. Ce ne serait pas pertinent d'ajouter à la situation qu'on vit aujourd'hui.

    Il faut se rappeler que cette idée a été lancée le 13 novembre dernier lors de la signature d'une entente entre Ottawa et le Manitoba en matière d'immigration. À ce moment-là, le ministre a émis l'idée qu'une carte d'identité semblable à celle dont disposent maintenant les immigrants reçus et les résidents permanents pourrait être utilisée par tous les Canadiens et évidemment par tous les Québécois.

    Le ministre aurait eu avantage à explorer son idée beaucoup plus à fond, à demander qu'on fasse des recherches au sein du ministère et à évaluer les conséquences d'un tel geste avant de lancer une idée semblable. Il y a présentement une levée de boucliers qui se traduit aujourd'hui par cette journée réservée à l'opposition où on veut montrer clairement et faire comprendre à la population le danger d'une telle mesure.

    L'éventuelle création d'une carte d'identité nationale soulève des questions. Présentement, au Canada, il n'existe pas de carte qui sert spécifiquement à l'identification personnelle. Les citoyens peuvent s'identifier à l'aide de leur permis de conduire, leur carte d'assurance-maladie, leur carte Feuille d'érable ou leur passeport. En fait, il n'existe pas un tel type de carte parce que nous vivons dans un État de droit et non pas dans un État policier.

  +-(1605)  

    Par exemple, un agent de la paix ne peut nous demander de nous identifier tout simplement parce qu'on marche dans un parc. Le droit à l'anonymat, surtout à la vie privée, est reconnu, et c'est ce qui nous distingue. On le voit au cinéma, on le voit dans la réalité vécue, dans les pays que l'on visite. Ici, l'individu se sent vraiment protégé; il se sent citoyen à part entière. Il ne se sent pas toujours surveillé ou dans l'obligation d'avoir des comportements pour faire plaisir à l'État.

    On comprend qu'aux États-Unis, il s'est développé un syndrome extraordinaire à cause des événements terribles du 11 septembre; on peut les comprendre. Il ne faudrait pas, quant aux moyens, en venir à dépasser les objectifs visés qui, de toute façon, ne seraient pas nécessaires.

    Il y a aussi toute la question de la facturation d'une telle carte. On a vu des exemples dans le dossier du contrôle des armes à feu. On se souvient du débat qu'il y a eu sur le principe du contrôle des armes à feu. Peut-être qu'il y a une leçon à tirer si on étudie les conséquences d'avoir une loi très contraignante comportant de nombreuses obligations. On ne sait jamais ce que l'instauration d'une telle carte nous apporterait comme obligations et les coûts additionnels dont on n'a pas besoin. La carte en soi n'est pas essentielle.

    La conception d'une carte d'identité nationale ferait qu'un système informatique contiendrait des informations. Si la carte comporte des données biométriques, il faut avoir un système qui puisse lire ces données, les comparer au fichier central d'enregistrement. Si seulement les nom, adresse, sexe et taille apparaissent sur la carte, cela ne pose pas trop de problèmes, mais ce sont des informations très peu utiles dans le cas d'une carte d'identité nationale et qui ne justifieraient pas que le gouvernement investisse des sommes importantes dans un tel programme.

    Si on veut faire une carte de ce type, c'est parce qu'elle a un objectif. Cet objectif n'est pas souhaitable. Il n'est pas viable; il n'est pas pertinent dans une démocratie comme la nôtre.

    À la base, les autorités n'évoqueront pas l'idée d'inclure sur une telle carte une tonne d'informations, ce qui risquerait d'effrayer les citoyens. Mais qu'en sera-t-il dans cinq ou dix ans, alors qu'on aura donné aux gens l'habitude de porter sur eux une carte nationale d'identité? Pourquoi ne pas y mettre des éléments additionnels?

    À ce sujet, le commissaire à la protection de la vie privée, M. Radwanski, qui est un peu le chien de garde du gouvernement sur les politiques de ce genre, nous met en garde. Il dit:

    Qu'il suffise de se rappeler que l'impôt sur le revenu était supposé être une mesure temporaire pour aider à financer la Seconde Guerre mondiale et que les numéros d'assurance sociale étaient supposés n'être utilisés que pour administrer le Régime d'assurance sociale.

    Ces deux exemples nous montrent à quel point il faudrait des balises très précises pour en venir à une carte qui, à la limite, pourrait être facultative. D'un côté, si la carte est émise, que rien n'apporte de l'information additionnelle pouvant être jugée nécessaire, pourquoi l'avoir; par contre, si on met ces informations dans notre système de loi, pourquoi produire une telle carte alors qu'on n'en a pas besoin?

    Le point de vue est assez équilibré dans l'ensemble des pays. Des pays ont des cartes nationales d'identité, tels que la Belgique, la France, l'Allemagne, la Grèce, le Brésil, le Guatemala, le Honduras, la Malaisie, Singapour, le Pakistan, le Kenya. D'un autre côté, des pays n'ont pas de carte nationale d'identité: l'Irlande, la Suède, le Royaume-Uni, le Mexique, les États-Unis, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, le Bangladesh, la Corée et Taiwan.

    D'un côté comme de l'autre, des pays sont identifiés comme étant des modèles de démocratie, d'autres peuvent l'être comme n'étant pas vraiment des modèles de démocratie. La carte comme telle n'a pas amené d'amélioration dans ce sens et peut devenir un outil dangereux en fin de compte.

    Je reviens au commissaire à la protection de la vie privée. Dans son rapport annuel de 2001-2002 il s'est clairement opposé à l'établissement d'une éventuelle carte nationale d'identité. Je le cite:

    Compte tenu du comportement actuel du gouvernement à l'égard des questions sur la protection de la vie privée, il est difficile d'éviter de craindre le pire en pensant qu'il souhaite introduire une telle carte.

    Il est très évident qu'il y a des craintes très importantes. Il ajoute plus loin:

    Je ne peux trouver aucune justification pour l'établissement d'une carte d'identité nationale, [...]

    Il ajoute encore:

    Au lieu de lancer un «débat» sur l'ingérence grave et inutile, le Canada a besoin d'une attestation claire de la part du gouvernement comme quoi le droit fondamental à la protection de la vie privée de l'anonymat, tel que nous le vivons chaque jour, est trop important pour être abrogé sans raison apparente.

    Je crois que l'ensemble de ces critiques devraient amener le ministre à remettre son projet dans ses cartons, à la limite à faire des études sur la pertinence, s'il le souhaite, d'aller voir ce qui se passe dans d'autres pays. Mais à mon avis, c'est une idée qui n'a pas assez mûri et qui, à la base, ne répond pas aux critères d'une démocratie dans une société telle que la nôtre.

  +-(1610)  

    C'est pourquoi le Bloc québécois souscrit à l'idée qu'effectivement, telle que la motion le dit:

[...] l'introduction d'une carte d'identité nationale va à l'encontre du droit à la vie privée et des autres droits civils que possèdent les Canadiens et les Canadiennes et que la Chambre s'oppose donc à l'adoption de cette mesure.

    C'est le point de vue du Bloc québécois dans ce débat.

+-

    Mme Carole-Marie Allard (secrétaire parlementaire de la ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je suis un peu déçue de voir que le Bloc québécois adopte une position aussi fermée devant une proposition du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration qui, je pense, mérite d'être débattue à fond.

    On sait que depuis les attaques terroristes du 11 septembre, dans un souci de sécurité, l'accent est mis sur des preuves d'identité formelles dans le monde entier, y compris au Canada.

    Dans un avenir proche, la possibilité pour les citoyens canadiens et les résidents permanents de franchir les frontières internationales dépendra de plus en plus de l'intégrité de leurs papiers d'identité et de leurs documents de voyage.

    Ne serait-il pas réaliste de penser que nous pourrions utiliser davantage nos technologies de pointe, telles que la biométrie, afin de garantir l'intégrité de ces documents tout en améliorant la protection de la vie privée?

    Je voudrais demander ceci au député de Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques. Ne craint-il pas que la position de fermeture que son parti et lui adoptent aujourd'hui ne vient pas justement mettre en péril la libre circulation des Canadiens dans la mesure où il existe une peur qui s'élève de l'autre côté de la frontière?

+-

    M. Paul Crête: Monsieur le Président, actuellement, il n'y a pas de carte et on circule librement. Je pense qu'il n'y a pas de problème qui se présente actuellement.

    Quant à la volonté des Américains, je pense qu'on n'est pas là pour toujours se plier à tous les caprices des Américains. Il faut être capable de se tenir debout. On n'a pas d'exemple en ce sens du gouvernement actuel en ce qui a trait à l'Irak, mais il devrait au moins, dans des dossiers comme celui-là, réussir à faire respecter cette volonté de souveraineté nationale.

    La députée m'interpelle, mais je vais donner la position du commissaire à la protection de la vie privée, M. Radwanski, telle qu'énoncée dans son rapport annuel. M. Radwanski n'est pas un bloquiste, mais quelqu'un qui a été nommé par le gouvernement. Je le cite rapidement:

    Compte tenu du comportement actuel du gouvernement à l'égard des questions sur la protection de la vie privée, il est difficile d'éviter de craindre le pire en pensant qu'il souhaite introduire une telle carte.

    Cela représenterait une autre décharge sur les droits à la protection de la vie privée. Au Canada, les personnes ne sont pas obligées d'avoir sur elles des pièces d'identité—encore moins de s'identifier sur demande—à moins de pratiquer une activité autorisée, telle que la conduite automobile. L'introduction d'une carte d'identification nationale, même «facultative» au début, nous pousserait vers une société où les agents de police pourraient arrêter n'importe qui sur les voies publiques et demander: «Vos papiers, s'il vous plaît.

    Le concept voulant que le gouvernement du Canada puisse obtenir les empreintes digitales et rétiniennes de tous les citoyens est d'autant plus déplorable, car il n'a que pour seul but celui d'établir une telle carte.

    Je vais conclure avec la dernière phrase:

    Je ne peux trouver aucune justification pour l'établissement d'une carte d'identité nationale [...]

    Ce n'est pas un bloquiste qui dit cela, ni un député du Nouveau Parti démocratique, ni un député de l'opposition, ni un député du parti gouvernemental, c'est le commissaire à la protection de la vie privée. Il a été nommé par ce gouvernement. Je pense que dans son rôle de chien de garde, il mérite d'être écouté.

+-

    M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le Président, j'aimerais aussi remercier mon collègue du Bloc québécois pour le discours qu'il a prononcé.

    Je trouve intéressant qu'il soit fermé vis-à-vis la carte d'identité, surtout qu'on a l'enregistrement des armes à feu et qu'on peut maintenant s'apercevoir qu'on a enregistré des malaxeurs et des tournevis. Quel sorte de système avons-nous? Ce système était censé coûter 2 millions de dollars et on est rendu à 1 milliard de dollars. Imaginez le prix qu'il en coûtera pour une carte d'identité au Canada.

    J'aimerais avoir la réponse du député à la question suivante. Pourquoi ce serait nous qui aurions une carte, alors que les Américains ne sont même pas prêts à avoir une carte d'identité? Pourquoi ne pouvons-nous pas avoir notre propre souveraineté canadienne et sommes-nous toujours obligés d'écouter, selon les libéraux, les Américains?

  +-(1615)  

+-

    M. Paul Crête: Monsieur le Président, je pense que le député de Acadie—Bathurst vient peut-être de mettre le doigt sur un problème important, c'est-à-dire que cette idée a été lancée par le ministre sans qu'il n'ait nécessairement fait de réflexion particulière.

    S'il avait réfléchi le moindrement, il se serait dit: «Si on en vient à vouloir avoir une carte, il faudra au moins qu'on ait la réciprocité du pays voisin pour lequel on pose ce geste.» Sinon, on a vraiment l'air de quelqu'un qui se met à plat ventre devant son voisin, alors que celui-ci ne lui a rien demandé et ne fait pas la même chose.

    C'est un peu comme si je décidais que même si j'ai une belle vue autour de ma maison, je vais mettre une clôture pour ne pas que cela fasse de la peine à mon voisin. Il faut au moins que le voisin l'ait demandé pour qu'on décide de faire une chose comme celle-là.

    Je vais conclure là-dessus. Je pense qu'il y a beaucoup d'improvisation du ministre dans ce projet. Toutefois, ce que veulent les citoyens et les citoyennes de ce pays, c'est la garantie que ce projet sera mis de côté et qu'on ne continuera pas pendant des années à réfléchir à cette question avec une épée de Damoclès qui nous pend au-dessus de la tête.

[Traduction]

+-

    M. Bryon Wilfert (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je vais partager mon temps de parole avec le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration.

    Premièrement, c'est une bonne occasion de discuter de cette question. Je suis quelque peu surpris par ce que le Nouveau Parti démocratique dit dans sa motion au sujet de l'introduction d'une carte d'identité nationale. Il n'y a eu ni discussions ni remarques concernant l'introduction d'une telle carte. Cette question a uniquement fait l'objet d'une discussion théorique. Je pense que c'est important. Si nous ne pouvons avoir de telles discussions à la Chambre, la situation est vraiment triste. Il est évident qu'il y a des discussions afin de savoir si les Canadiens seraient ou non intéressés à avoir une telle carte et pour quelles raisons.

    La première question qui nous vient à l'esprit est: Quelle serait l'utilité d'une carte d'identité nationale? Pourquoi aurions-nous une telle carte et, si nous en avions une, quels renseignements figureraient sur cette carte?

    M. Pat Martin: Bonnes questions.

    M. Bryon Wilfert: Le député d'en face dit que ce sont de bonnes questions. Oui, mais ce sont aussi des questions fondamentales, parce que nous vivons dans une société centrée sur l'information. Nous vivons dans une société où l'information circule de façon continue. Nous transportons toutes sortes de pièces d'identité, comme par exemple notre permis de conduire. Nous sommes au courant des utilisations frauduleuses des cartes d'assurance sociale. Je vois souvent des gens qui donnent un numéro d'assurance sociale pour signer un chèque. Tel n'est pas la raison d'être de ce numéro. Celui-ci est censé servir à l'application de politiques sociales et permettre au gouvernement de retracer des renseignements.

    Comme certains députés le savent, le Comité du développement des ressources humaines a examiné cette question il y a quelques années. C'était avant les événements du 11 septembre. Depuis le 11 septembre, il y a de plus en plus de discussions à ce sujet. Par exemple, nous nous sommes penchés sur la question des voyages effectués aux États-Unis par des citoyens canadiens. Certains membres de notre société choisis au hasard ont vu leur identité contestée. Ces cas soulèvent évidemment des questions importantes dans notre pays, notamment celle de savoir si nous devrions envisager de produire des renseignements clairs faisant appel à une technologie de pointe. Le ministre a d'ailleurs fait allusion à cette question.

    Nous voulons un système sécuritaire pour les Canadiens. Nous voulons que les Canadiens se sentent en sécurité, mais nous voulons également nous assurer que ce genre de situations ne se produise pas en traversant la frontière aux États-Unis ou ailleurs. C'est important.

    Nous avons déjà des cartes intelligentes dans une certaine mesure. Nous avons des cartes pour les personnes qui se rendent souvent au États-Unis par affaires. Leur carte leur permet d'entrer et de sortir, mais elle a un usage limité.

    Je suis personnellement très inquiet au sujet de la quantité d'information que nous communiquons au gouvernement sur divers sujets. Aux États-Unis, on dit que le gouvernement a de 15 à 20 dossiers actifs au sujet de chaque Américain. C'est vraiment inquiétant.

    Pour revenir à la question de la raison d'être de la carte d'identité, si nous en avions une, à quoi servirait-elle? Il faut présumer que nous voulons réduire les incidents de fraude. Nous voulons réduire les incidents de Canadiens qui se font harceler à la frontière. Nous voulons nous assurer que la carte elle-même servira à cette fin. Nous pourrions demander nous-mêmes la carte ou elle pourrait nous être imposée. Je répète, nous n'avons jamais eu une telle carte et nous n'en aurons peut-être jamais.

    Nous en sommes au stade de la discussion. Depuis les événements du 11 septembre, la sécurité est une source de préoccupation. Je suis inquiet au sujet du type d'information que contiendrait la carte. Des collègues nous ont dit aujourd'hui avoir déjà perdu leur portefeuille. Cela m'est arrivé. J'ai tout perdu. J'ai vu toute ma vie défiler devant moi tellement cela m'a perturbé. Monsieur le Président, je suis sûr que vous n'avez jamais perdu le vôtre, mais si cela vous est déjà arrivé, vous savez que vous devez contacter divers organismes pour obtenir un nouveau permis, une nouvelle carte santé, ainsi de suite. C'est manifestement un problème. Tout pourrait être inscrit sur une seule carte, mais pour cela il faut s'assurer de pouvoir compter sur une technologie capable d'en empêcher la manipulation.

    Le ministre a parlé de technologie de pointe. Il a parlé de trouver une solution au problème de la contrefaçon.

  +-(1620)  

    Le ministre a parlé de certains moyens auxquels d'autres pays ont envisagé d'avoir recours, comme des données d'identification biométrique, la reconnaissance rétinienne, les empreintes digitales et d'autres techniques qui pourraient être utilisées en divers endroits, comme les aéroports ou les postes frontaliers.

    Tous les pays font face à de nouveaux défis et prennent des mesures pour les relever. Le Royaume-Uni, par exemple, envisage l'utilisation de la carte d'admissibilité volontaire, à l'intention des citoyens qui se sentiraient plus en sécurité en possession de cette carte.

    Les États-Unis envisagent d'utiliser l'identification biométrique pour les documents de voyages, et l'application de normes uniformes concernant les permis de conduire des États. Mais je le répète, toutes ces mesures n'en sont qu'à l'étape des discussions.

    Dans un récent sondage effectué au Royaume-Uni, 60 p. 100 des répondants se sont dits très en faveur de l'utilisation d'une carte d'admissibilité qui comporterait des caractéristiques de pointe en matière d'information biométrique.

    Quel genre de technologie serait utilisé? Nous avons fait beaucoup de chemin depuis l'époque des documents en papier. Il faudrait évaluer les progrès que représente cette technologie et comment elle pourrait être appliquée.

    Il y a lieu de croire que les Canadiens de toutes les régions du pays sont préoccupés par la question de la sécurité. Je sais que mon collègue, le secrétaire parlementaire, en parlera probablement, mais je signale que Citoyenneté et Immigration Canada a commandé un sondage téléphonique pour connaître le point de vue des Canadiens sur l'utilisation d'une carte d'identité nationale qui comporterait des données biométriques.

    Le sens des responsabilités commande de sonder l'opinion publique sur cette question. Comme on pouvait s'y attendre, les personnes sondées ont exprimé une variété d'opinions sur le caractère obligatoire ou volontaire d'une carte d'identité nationale et sur l'opportunité d'y intégrer des données biométriques. Les résultats indiquent que sept Canadiens sur dix, peu importe leur groupe d'âge, leur sexe, leur niveau d'éducation ou de revenu, sont en faveur de la carte d'identité sous une forme ou une autre. L'identité a été perçue comme un problème, en particulier dans les provinces de l'Ontario et du Québec.

    Je reviens au type de renseignements que contiendrait une carte. Les gouvernements provinciaux en ont aussi parlé. La carte pourrait contenir, entre autres, la carte d'assurance-maladie et le permis de conduire. Les renseignements seraient bien protégés en raison de la nature de la technologie utilisée, mais que se passerait-il en cas de perte de la carte? Quelles mesures de sauvegarde seraient prévues? Ce sont autant d'aspects dont il faut discuter.

    Il m'apparaît important de tenir un débat de fond sur cette question. Je tiens toutefois à donner l'assurance aux députés que personne, et certainement pas de ce côté-ci de la Chambre, n'a indiqué qu'il y aurait une carte d'identité. Nous avons plutôt dit que, compte tenu des questions de sécurité soulevées par les attentats du 11 septembre, il était important de tenir un débat de fond sur la question. Ce débat a déjà cours en Grande-Bretagne, en Australie, aux États-Unis et dans d'autres pays.

    En ce qui concerne la biométrie, quatre Canadiens sur cinq croient que son utilisation compliquerait la tâche aux immigrants illégaux qui utilisent des documents falsifiés pour abuser de nos programmes sociaux comme l'assurance-emploi et les soins de santé. Voilà les observations que le ministère a entendues.

    Cela ne veut pas dire, bien sûr, que nous avons une foi inébranlable dans la technologie. Pour ma part, je ne crois pas qu'elle soit une panacée, mais je suis convaincu qu'il faut étudier les progrès technologiques et réfléchir à la façon de les utiliser.

    J'en reviens à ce que je disais tout à l'heure. Je suis très préoccupé par la quantité de renseignements que nous donnons. Si nous décidons d'adopter une carte d'identité, il faudrait que les renseignements à y inscrire soient très clairs et limités. La question est importante.

    J'ai constaté avec un certain malaise que le NPD refuse dans sa motion que nous parlions de l'introduction d'une carte. Il me semble juste que nous tenions un débat, au moins. Je félicite mes collègues d'en face de l'avoir provoqué, bien que je trouve étonnant qu'ils s'opposent à toute discussion sur l'adoption d'une carte. En dehors de cela, je suppose qu'on ne peut pas parler de grand-chose. Je crois pourtant qu'il faut en parler et que les préoccupations soulevées par les Canadiens valent un débat. Je suis heureux que nous discutions de la question aujourd'hui.

  +-(1625)  

+-

    M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le Président, je remercie le député d'en face de ses observations, mais n'est-il pas inquiet?

    Nous savons ce qu'il est advenu de l'enregistrement des armes à feu. Cela devait coûter 2 millions de dollars, mais la facture a plutôt été de 2 milliards de dollars. Le député a parlé de la technologie d'aujourd'hui. Ne s'inquiète-t-il pas de ce genre de carte, de la qualité de la technologie servant à la création d'une telle carte d'identité?

    Il est bon que nous ayons cette discussion et c'est pourquoi nous avons présenté cette motion à la Chambre des communes.

    Le député ne s'inquiète-t-il pas du fait qu'avec la technologie d'aujourd'hui, si quelqu'un perd son portefeuille ou sa carte, il y a des gens assez intelligents qui pourront décoder la carte et l'utiliser? La personne qui trouvera la carte disposera de tous les renseignements concernant le titulaire de la carte, et c'en sera fait de la protection des renseignements personnels de ce dernier. Il y a des milliers et des milliers de numéros d'assurance sociale que le gouvernement ne contrôle plus.

    Je ne tente pas de blâmer le gouvernement, mais telle est la réalité. Pouvons-nous nous permettre de commettre l'erreur de créer une carte renfermant une foule de renseignements qui pourraient tomber en de mauvaises mains? Pourquoi le gouvernement se laisse-t-il dicter sa conduite par les Américains? Ceux-ci ne sont pas prêts à créer une carte semblable, mais ils nous incitent à le faire. Qu'en est-il de notre souveraineté en tant que Canadiens? Voilà la question que nous devons nous poser? C'est pourquoi il est bon d'avoir cette discussion. Le député a-t-il quelque chose à dire là-dessus?

+-

    M. Bryon Wilfert: Monsieur le Président, je remercie mon collègue de sa question. D'abord, je crois et j'espère que la discussion n'a pas surgi parce que les États-Unis, ou un autre pays, laissent entendre que le Canada devrait instaurer la carte d'identité. La question doit être entièrement canadienne et la solution aussi. Les Australiens ont tenu le même débat il y a six ou sept ans et ils ont répondu non à l'époque.

    En ce qui concerne la technologie, je ne sais pas si une carte perdue pourrait être reproduite. Étant donné la technologie très pointue qui existe de nos jours, il faudrait bien s'assurer que ce ne soit pas possible. Comme les députés le savent, nous avons maintenant de nouveaux passeports qui sont censés être à 99,9 p. 100 à l'abri de toute reproduction. Dans ce cas aussi, à mesure que la technologie évoluera, nous devrons revoir la situation.

    Le député soulève un point fort important. La décision doit être totalement canadienne. Cependant, si nous adoptons un document d'identification, et nous devrions le faire, il faudra nous assurer que la valeur de ce document est absolument irréprochable, qu'il s'agisse d'un passeport ou de tout autre document d'identification.

+-

    M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai deux questions à poser à mon collègue du côté libéral.

    Premièrement, pourquoi le gouvernement croit-il qu'il est nécessaire de créer cette nouvelle base de données, ce nouveau programme de carte d'identité pour régler un problème de sécurité, alors que cette carte servirait avant tout aux citoyens respectueux des lois? Si la sécurité et le terrorisme posent un problème au gouvernement, celui-ci devrait concentrer ses efforts dans ce domaine au lieu de créer ce gigantesque programme d'enregistrement des citoyens par le truchement de la nouvelle carte d'identité nationale.

    Deuxièmement, le député n'est-il pas d'avis que le ministre devrait présenter certaines estimations des coûts éventuels et procéder à des essais, avec des volontaires, pour tester la technologie dont il est question? N'est-il pas d'avis que cela inciterait les gens à penser comme lui au sujet de la carte d'identité nationale?

  +-(1630)  

+-

    M. Bryon Wilfert: Monsieur le Président, tout ce qu'a fait le ministre, c'est demander un débat public. Il veut y faire participer les Canadiens tout comme nous y faisons participer les parlementaires. Aucune proposition n'a été faite. La question du député au sujet du coût serait plus opportune si nous avions conclu que la question méritait d'être approfondie.

    Je ferai remarquer au député que nous avons tenu un débat concernant le trop grand nombre de cartes d'assurance-sociale et la difficulté qui en découle, à savoir s'il fallait reproduire des cartes, utiliser le même genre de cartes, ce qui est discutable, ou adopter une nouvelle technologie. Nous en avons débattu il y a quelques années. Dans la foulée des événements du 11 septembre, nous avons un autre débat.

[Français]

+-

    Le vice-président: À l'ordre s'il vous plaît. Conformément à l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement, ce soir, à savoir: l'honorable député de Cariboo—Chilcotin, L'environnement; l'honorable députée de Rimouski-Neigette-et-la Mitis, Le bois d'oeuvre.

[Traduction]

+-

    M. Sarkis Assadourian (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, je remercie tous les députés qui ont pris part au débat d'aujourd'hui, car l'enjeu est de taille.

    J'aimerais aussi mentionner que c'est bien la toute première fois, depuis neuf ans que je suis au Parlement, qu'un ministre nous consulte avant de commencer à rédiger une loi. Voilà qui mérite d'être applaudi.

    La plupart des députés, surtout les députés d'arrière-ban, se plaignent de ne pas avoir voix au chapitre. Ils prétendent que tout se fait derrière des portes closes avec les fonctionnaires, qu'ils sont mis devant le fait accompli et qu'ils n'ont d'autre choix que de respecter la discipline du parti.

    Voici une nouvelle façon de faire. Le ministre a proposé un débat ouvert et franc avec les parlementaires. De plus, le comité se déplace un peu partout dans le pays pour recueillir l'opinion des Canadiens avant d'aller plus loin.

    La motion qui fait l'objet du débat porte sur l'adoption d'une carte d'identité nationale. Aucune mesure ne le propose pour l'instant. Nous demandons seulement qu'on en débatte, qu'on en discute, qu'on émette des idées quant à la façon de le faire, les données à inscrire sur la carte, si jamais il devait y en avoir une.

    La façon dont la députée du NPD a présenté la motion sur l'introduction d'une carte d'identité nationale est trompeuse, en mettant les choses au mieux. Nous devrions tenir compte du fait que rien n'est encore arrivé. Nous ne discutons que d'une proposition.

    Beaucoup de gens ont mentionné que les États-Unis ne demandent pas la carte d'identité. Alors, pourquoi en discuter? Fort bien. Si les États-Unis la demandaient, nous pourrions dire que nous cédons à la politique américaine. Comme les États-Unis ne la demandent pas, les gens veulent savoir pourquoi nous voulons en avoir une. D'une façon ou d'une autre, l'opposition cherche à nous reconnaître coupables, mais je doute que la tactique réussisse.

    Comme on l'a mentionné plus tôt, plus de 100 pays utilisent ces cartes. Onze des 15 pays membres de l'Union européenne en ont. Les gens les utilisent. La question est de savoir quels renseignements nous voudrions inscrire sur cette carte ou à quelles fins elle servirait. C'est la question clé à laquelle nous devons répondre.

    En octobre dernier, je crois, les États-Unis ont proposé de prendre les empreintes digitales de Canadiens nés en Iran, en Irak, en Syrie, au Soudan et au Yémen. Le Canada est un pays multiculturel. Des centaines de milliers de Canadiens sont nés dans ces pays. Lorsqu'ils ont voulu traverser la frontière américaine, on les a obligés à donner leurs empreintes digitales, sans aucune raison.

    Un homme d'affaires de la circonscription de Brampton-Centre voulait se rendre aux États-Unis. Il possède des usines au Connecticut, à Philadelphie et en Europe. Il voulait aller aux États-Unis avec ses employés, puis en Europe. On l'a arrêté à la frontière. On a voulu prendre ses empreintes digitales et sa photographie, comme s'il était un criminel de droit commun. C'est totalement inadmissible.

    Si nous introduisons des cartes d'identité, nous devrons voir à ce que tous les Canadiens en possèdent une, peu importe leur origine, leur lieu de naissance, la province où ils sont nés ou celle où ils habitent. Si nous décidons d'introduire ces cartes d'identité, tous les Canadiens devront en posséder une.

    J'ai rencontré l'ambassadeur des États-Unis, M. Cellucci, au sujet de la prise des empreintes digitales de Canadiens. Il était d'accord avec moi. Il m'a dit que c'était une mauvaise politique mais que les Américains étaient obligés de le faire. Ils ont fini par se rendre compte que c'était une erreur et ils ont changé leur fusil d'épaule. Ils ne prennent plus les empreintes digitales des gens en fonction de leur lieu de naissance. Ils se fondent plutôt sur ce que font les gens et sur ce qu'ils pourraient être capables de faire à l'avenir, s'ils se rendaient aux États-Unis.

    On a dit plus tôt qu'un sondage avait été fait à ce sujet. Il a révélé que 70 p. 100 des Canadiens étaient en faveur d'une carte d'identité volontaire. Bien qu'une telle initiative bénéficie d'un vaste appui, nous ignorons quel genre de renseignements devraient figurer sur cette carte. Si la carte ne servait qu'à traverser la frontière, seules les empreintes digitales devraient y être probablement. Si en passant la carte au scanner, les empreintes digitales correspondaient, il ne serait pas nécessaire de demander le nom du détenteur de la carte, l'endroit où il est né, son pays d'origine, sa religion, etc. Cela ne prendrait que 10 à 15 secondes et la personne en question pourrait passer la frontière. Elle franchirait la frontière librement.

  +-(1635)  

    Au comité, la semaine dernière, la députée de Laval-Centre a dit qu'elle s'était fait voler sa carte de crédit et que ça lui avait coûté très cher. La personne qui a volé sa carte s'en est servi et la députée en a été de sa poche de quelques milliers de dollars. Je vais raconter à la Chambre ce qui m'est arrivé.

    L'an dernier, j'ai reçu mon relevé de compte d'American Express. Il y figurait un débit de 729 $ pour un voyage entre Ottawa et Winnipeg. Je n'avais pas acheté ce billet. Je ne connaissais pas la personne qui l'avait acheté et je n'avais en fait jamais entendu parler d'une personne portant ce nom. Je devais payer 729 $ pour un voyage que je n'avais pas fait, pour un billet que je n'avais jamais acheté. Il m'a fallu six mois pour régler le problème. J'ai téléphoné à American Express et à Air Canada. J'ai dû engager les services d'un avocat. J'ai dû signer des documents déclarant que je n'avais jamais bénéficié de ce billet. Il m'a fallu six mois pour me disculper. C'est le genre d'ennui qui arrive aux gens qui perdent une pièce d'identité.

    La carte d'identité dont nous parlons aujourd'hui ne pourrait pas être imitée. Les empreintes digitales sont propres à chaque individu. Personne d'autre ne peut les reproduire. Du point de vue de la sécurité, c'est très important.

    Il y a quelque 12 000 cas de fraude chaque année. Les victimes de ces fraudes subissent des inconvénients et perdent de l'argent, sans parler des maux de tête qui les assaillent. Chaque année, ces fraudes coûtent 2,5 milliards de dollars aux contribuables canadiens. Si nous pouvons éviter aux Canadiens des ennuis financiers et des maux de tête, tout le monde sera content. Il est inutile de dire qu'il est impossible d'aller de l'avant parce que cette mesure portera atteinte aux droits de la personne. Tout dépend du but de la carte.

    Comme je l'ai dit plus tôt, il s'agit simplement d'une discussion aujourd'hui. Personne ne propose une mesure concrète. Nous voulons entendre le point de vue de tous les députés. Certains sont en faveur d'une carte d'identité, d'autres sont contre. C'est parfait. Toutefois, au bout du compte, la question est de savoir quel type de carte les gens aimeraient avoir, quels renseignements devraient y figurer et à quoi servirait cette carte.

    Au Canada, il y a 13 types de certificat de naissance et 13 types de permis de conduire différents, un dans chaque province et territoire. Cela occasionne bien des maux de tête aux gens qui passent d'une province à une autre. Après le 11 septembre de l'année dernière, les certificats de naissance du Québec ont suscité des problèmes. Le Bureau des passeports ne les reconnaissaient pas tous. Il y a une foule de problèmes de cet ordre.

    La carte d'identité pourrait être uniforme pour tous les Canadiens. Personne ne serait obligé de se la procurer. Ceux qui n'en voudraient pas seraient libres de ne pas la demander. Personnellement, j'en voudrais une, mais la décision m'appartient. Personne ne peut m'obliger à avoir une carte d'identité.

    Si cette carte d'identité devient nécessaire, j'espère que chacun voudra s'en procurer une. Voilà la façon de faire. La question est de savoir quels renseignements figureront sur cette carte et à quoi elle servira.

  +-(1640)  

+-

    M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Monsieur le Président, je ne vois pas le besoin d'avoir une carte d'identité. Je trouve stupéfiant que les libéraux osent même proposer ce projet grandiose sans même en évaluer le coût. Qui achèterait une maison ou une voiture sans en connaître le coût? J'ai vendu des voitures pendant 20 ans et personne ne m'en a acheté une sans d'abord en connaître le prix. Les choses ne fonctionnent pas de cette façon. Seuls les libéraux sont capables de nous proposer un plan semblable.

    Ce sont eux aussi qui ont inventé le registre des armes à feu en disant qu'il ne coûterait que 2 millions de dollars. D'aucuns croient maintenant que ce registre pourrait coûter à peine un milliard de dollars, tandis que d'autres pensent que ce sera beaucoup plus. Comment les libéraux peuvent-ils faire un sondage d'opinion sur ce projet sans même en établir le prix? S'ils sont incapables d'enregistrer des armes qui restent immobiles, comment feront-ils pour enregistrer les mouvements et les déplacements quotidiens de 30 millions de personnes qui bougent constamment? Comment arriveront-ils à suivre leur trace s'ils ne parviennent même pas à enregistrer des armes à feu?

+-

    M. Sarkis Assadourian: Monsieur le Président, le député sait que nous ne pouvons pas fournir de chiffres précis en l'absence de détails.

    Le but de la discussion aujourd'hui est de savoir ce que devrait contenir la carte, s'il devait y en avoir une un jour. Quand on saura au juste quels renseignements figureront sur cette carte et à quoi elle servira, il sera facile d'en prévoir le coût. Il est injuste de demander une évaluation du coût d'une carte si on ignore à quelles fins elle doit servir.

+-

    M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le député a parlé d'un sondage. Je n'ai pas saisi si 7 p. 100 ou 70 p. 100 des Canadiens sont en faveur d'une carte d'identité nationale. Je doute qu'un grand nombre de Canadiens y soient favorables.

    Au nom de tous les Canadiens, je tiens à dire qu'en l'occurrence, mes inquiétudes par rapport au gouvernement sont les mêmes que celles que m'inspirait le registre des armes à feu. Lorsque le gouvernement a débité ses statistiques judiciaires avant d'établir le registre, il les a employées abusivement et exagérément afin de fourbir ses arguments. Ces statistiques ont été rejetées par la Gendarmerie royale du Canada, et la vérificatrice générale a ensuite prouvé qu'elles étaient complètement erronées.

    Dans mon intérêt et dans l'intérêt de la Chambre, je prierais le député de revenir sur ce que révélait vraiment le sondage dont il a parlé.

+-

    M. Sarkis Assadourian: Monsieur le Président, environ 3 000 personnes ont été interrogées, et 70 p. 100 d'entre elles appuyaient l'idée d'une carte d'identité nationale.

+-

    M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, toujours en rapport avec ce sondage, je me demande ce que les personnes interrogées auraient répondu si on leur avait dit que la carte d'identité serait obligatoire et qu'il ne faudrait donc jamais quitter la maison sans elle. Si quelqu'un se faisait interpeller par la police en allant à l'épicerie acheter un journal et qu'il n'avait pas sa carte d'identité avec lui, la police pourrait avoir des motifs d'enquêter sur lui et le détenir pour la nuit. Si la question avait été formulée dans cette optique, je ne pense pas qu'un seul Canadien aurait souhaité un scénario où il serait «tenu de produire ses papiers».

    Je pense que le sondage dont parle le député est tendancieux. Il aurait fallu poser une question bien différente.

+-

    M. Sarkis Assadourian: Monsieur le Président, si le NPD ne croit pas aux résultats de ce sondage, il pourrait faire son propre sondage et en assumer les coûts avec ses fonds. Il constaterait que ce que j'ai dit est vrai.

    Nous n'avons aucune raison de tromper le public. Lorsque nous avons une discussion, nous aimons fournir aux députés tous les renseignements dont nous disposons, afin d'avoir une discussion éclairée et intelligente. Personne ne cherche à tromper qui que ce soit, ou à fournir des renseignements qui ne correspondent pas à la réalité.

[Français]

+-

    M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le Président, pour prendre un exemple, aujourd'hui, si on perd un passeport, il n'y a qu'une photographie et une adresse, et c'est un document formel du gouvernement. Sur une carte d'identité, avec la haute technologie d'aujourd'hui, il y a de l'information importante concernant la vie privée d'une personne qui peut tomber entre les mains de personnes dont on ne voudrait pas qu'ils la reçoivent.

  +-(1645)  

[Traduction]

+-

    M. Sarkis Assadourian: Monsieur le Président, comme je l'ai dit plus tôt, il est peut-être possible de falsifier les passeports, les permis de conduire, les certificats de naissance et les documents d'une personne arrivant au Canada, mais dans ce cas-ci l'identité est établie au moyen de l'iris et des empreintes digitales de la personne. Ces caractéristiques ne peuvent être falsifiées. Les empreintes digitales et l'iris du député sont uniques. Personne ne peut les reproduire. Elles appartiennent à lui seul en tant qu'être humain.

+-

    M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole relativement à la motion du Nouveau Parti démocratique. Permettez-moi d'abord de lire cette motion pour le bénéfice de la Chambre:

    Que, de l'avis de la Chambre, l'introduction d'une carte d'identité nationale va à l'encontre du droit à la vie privée et des autres droits civils que possèdent les Canadiens et les Canadiennes et que la Chambre s'oppose donc à l'adoption de cette mesure.

    Monsieur le Président, comme vous et les autres partis le savez, l'Alliance canadienne appuie cette motion. Autrement dit, nous nous opposons à l'introduction d'une carte d'identité.

    Cette question est intéressante, en particulier pour mon ami, le député de Winnipeg-Centre, qui est maintenant le porte-parole du Nouveau Parti démocratique. Celui-ci critique non seulement le gouvernement, mais aussi l'Alliance canadienne, puisqu'au cours de la période des questions orales d'aujourd'hui il a parlé d'une coalition de députés de l'Alliance et de députés du Parti libéral. Je me demande ce qu'il va dire à ses collègues du caucus néo-démocrate maintenant que l'Alliance et le NPD sont d'accord sur certaines questions. Je pense que cela montre que, à la Chambre, il y a des moments où nous pouvons mettre de côté l'esprit partisan et évaluer objectivement le bien-fondé d'une idée. C'est incontestablement ce que nous faisons dans ce cas-ci.

    Il y a deux raisons principales, déjà abordées par bon nombre de députés, qui expliquent pourquoi nous nous opposons à l'adoption d'une carte d'identité. L'une d'entre elles concerne manifestement toute la question de la protection de la vie privée. La deuxième est liée au fait que nous nous inquiétons de la façon dont le gouvernement a agi, en ce qui a trait à d'autres bases de données. Le troisième motif, qui n'est pas de l'ordre des préoccupations, a plutôt trait à ce qui est ressorti du débat, c'est-à-dire que le gouvernement est tout simplement incapable de répondre à certaines questions fondamentales. Avant de présenter une mesure aussi radicale que celle-là, les députés libéraux devraient faire leurs devoirs et être en mesure de répondre à ces questions.

    Il est intéressant que le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration ait proposé cette idée, mais que des députés de son propre caucus et des ministres aient exprimé leur opposition à l'adoption de la carte. La ministre du Revenu national a déclaré que cette idée la rend nerveuse et qu'elle ne pense pas que nous ayons besoin de cette carte. Les députés de son propre caucus, et notamment de London et d'autres circonscriptions, ont déclaré que c'est tout simplement une mauvaise idée et que nous devrions la laisser tomber.

    Le ministre a déclaré qu'il s'agit simplement d'une réaction à des préoccupations en matière de sécurité. Il y a beaucoup d'autres choses que pourrait faire en premier lieu le gouvernement pour corriger des problèmes de sécurité, notamment régler les problèmes à la frontière sans introduire une telle carte.

    Face à ces préoccupations, je vais en premier lieu aborder toute la question de la protection de la vie privée. Le commissaire à la protection de la vie privée, M. George Radwanski, a déclaré que la nouvelle carte témoigne d'une intrusion croissante du gouvernement dans la vie privée des Canadiens. Il a aussi critiqué cette proposition lorsqu'il a dit qu'une carte d'identité nationale a tendance à être liée en bout de piste à des données. Selon lui, elle a tendance à faciliter le rassemblement de données toujours plus nombreuses au sujet de tous les Canadiens. Puis, bien sûr, ces données font ensuite l'objet de toute sorte d'intrusions, pour ne rien dire du spectacle d'un gouvernement qui rendra cette mesure obligatoire; même si ces initiatives sont à l'origine volontaire, elles finissent pas devenir obligatoires.

    C'est vrai. Si cette mesure est au départ volontaire, et des députés ont dit qu'il devrait en être ainsi, il faut alors se demander pourquoi une personne ne voudrait pas se procurer cette carte d'identité nationale? Cette personne nous cache-t-elle quelque chose, ce qui fait qu'elle ne veut pas que l'on prélève ses empreintes digitales et rétiniennes? Les gens peuvent manifestement passer plus rapidement d'un pays à l'autre s'ils fournissent cette information, mais s'il existe un carte d'identité nationale et qu'une personne décide de ne pas se la procurer, il lui incombera alors de justifier pourquoi elle agit de la sorte.

    Cela est absolument fondamental, surtout pour ceux d'entre nous qui ont une tendance libertaire à l'égard du gouvernement en général. Nous croyons que chaque citoyen a droit à sa vie privée. Il doit avoir certains droits. Le gouvernement ne doit pas intervenir dans tous les aspects de sa vie. Une des choses qui me préoccupent le plus à propos du gouvernement, c'est qu'il présente des lois et des règlements qui régissent de plus en plus et sans raison notre vie quotidienne.

    Nous devrions revenir aux grands philosophes qui ont vraiment établi les principes parlementaires, des gens comme John Locke, par exemple. Nous devrions les écouter lorsqu'ils disent que le gouvernement s'immisce trop dans notre vie quotidienne.

  +-(1650)  

    Il y a le philosophe Thomas Hobbes et son Leviathan. Il était considéré comme un philosophe autoritaire, parce qu'il favorisait un souverain fort. Même lui disait qu'il fallait circonscrire les pouvoirs du souverain et qu'il y avait des choses auxquelles les particuliers ne devraient pas être soumis. C'est là quelque chose que le commissaire à la protection de la vie privée a maintes fois dit et répété et que nous devrions retenir.

    Si nous laissons le gouvernement empiéter de plus en plus sur nos droits en tant que citoyens, cela ne donnera pas une collectivité saine au bout du compte. Cela ne fera pas des citoyens, mais des sujets. C'est certes là une tendance que nous voulons réprimer.

    Nous, de l'Alliance canadienne, tenons certes compte des préoccupations du commissaire à la protection de la vie privée à l'égard de la carte d'identité. Le commissaire s'est dit aussi préoccupé à l'égard des problèmes technologiques que pose une telle carte. Au cours de la période des questions et des observations, aujourd'hui, on s'est aperçu que le gouvernement ne sait tout simplement pas à quoi servira au juste la carte. En outre, le gouvernement n'a vraiment résolu aucun problème technologique.

    Un intervenant a dit tout à l'heure que la carte ne posait aucun problème de sécurité, qu'elle était très sûre. À une époque où pullulent les pirates informatiques et où des banques de données éprouvent des problèmes, il est absurde de prétendre qu'un système est sûr à 100 p. 100 sans pouvoir en donner la preuve aux Canadiens. Compte tenu de toutes les banques de données qui ont mal tourné, pourquoi devrions-nous supposer que le gouvernement s'en sortira mieux avec celle-là?

    Avant que j'aborde la question de confiance, je désire parler des audiences d'aujourd'hui. La commissaire à l'information et à la vie privée de l'Île-du-Prince-Édouard, Mme Karen Rose, a témoigné devant le comité aujourd'hui. Mme Rose s'oppose à la création d'une carte d'identité nationale, particulièrement si elle contient des données biométriques. La commissaire a donné trois raisons pour expliquer sa position.

    Premièrement, Mme Rose a affirmé qu'une carte d'identité nationale constituerait une intrusion sans précédent dans la vie privée des Canadiens, parce qu'elle nécessiterait la création d'une base de données de nature personnelle et qu'elle exigerait que les Canadiens s'identifient sur demande.

    Deuxièmement, la commissaire a ajouté que rien ne montre qu'une carte d'identité nationale pourrait permettre d'atteindre les objectifs visés. Voilà la question que nous devons constamment nous poser. Aristote, qui était féru de philosophie, a toujours dit qu'il faut s'interroger sur le pourquoi des choses. Voilà la démarche la plus fondamentale. Il faut toujours voir les choses d'un point de vue téléologique. Il faut se demander quel est l'objectif visé, le pourquoi. Il faut se demander ce qu'on recherche. Il faut identifier l'objectif, puis voir si ce qu'on fait peut effectivement permettre d'atteindre l'objectif que l'on s'est fixé.

    Selon Mme Karen Rose, cette carte ne permettra pas d'atteindre l'objectif visé. De toute évidence, les députés de ce côté-ci de la Chambre ont affirmé que le gouvernement ne sait pas si cette carte va permettre d'atteindre l'objectif pour lequel elle serait créée ou même un autre objectif.

    Troisièmement, Mme Rose a dit que l'existence même de cette carte pourrait entraîner un renforcement considérable du pouvoir policier et la collecte de renseignements personnels sur tous les Canadiens. Cela changerait par conséquent la nature même de notre société, à l'heure actuelle, libre.

    Cet argument qui concerne la vie privée touche également un point de droit très fondamental et le recours aux forces policières. Il ne faudrait avoir recours à la police que de façon très limitée, mais très ciblée pour combattre efficacement les infractions à la loi.

    La loi devrait essentiellement viser la protection des personnes et de la propriété. De toute évidence, les individus qui s'en prennent à des personnes et à leur propriété doivent faire l'objet de poursuites et toute la rigueur de la loi doit leur être appliquée. Nous ne devons pas utiliser nos lois et nos ressources policières pour aller plus loin et créer une carte d'identité qui n'atteindrait pas le but recherché et constituerait essentiellement une intrusion dans la vie privée.

    Mais il n'y a pas que la question de la protection des renseignements personnels, il y a aussi celle de la compétence qui soit importante. Le fait est que la feuille de route du gouvernement est absolument lamentable en ce qui concerne l'administration d'importants programmes: pensons aux millions de dollars dépensés pour des programmes de commandite qui ont été inutiles ou fort peu utiles; au scandale des subventions et contributions au MDRH; au fiasco de l'enregistrement des armes à feu qui aura coûté plus de 1 milliard de dollars en 2004-2005, dépenses qui croîtront sans doute de façon exponentielle après cela; à la base de données à la Big Brother que le gouvernement a dû supprimer après qu'elle eut été découverte par hasard et que des milliers de Canadiens eurent demandé à leur député, par lettre ou téléphone, qu'elle soit supprimée.

  +-(1655)  

    Tout cela sert à convaincre les Canadiens que le gouvernement n'a pas la compétence ou l'intégrité voulues pour obliger tous les citoyens à avoir une carte d'identité renfermant une foule de données, y compris des données biométriques.

    Le fait est que les Canadiens ne se sont pas encore remis du fiasco de l'enregistrement des armes à feu. Un habitant de ma circonscription m'a téléphoné à mon bureau. Il a dit être un citoyen respectueux des lois et qu'il ne souscrivait pas à l'idée de l'établissement d'un registre des armes, mais il y a deux ans il s'est rendu au centre commercial Southgate pour remplir les formulaires, faire prendre sa photo et remettre le tout. Il a dit que deux ans plus tard, au mois de décembre 2002, il a appelé pour savoir où était sa carte. Il s'est fait répondre qu'il n'y avait pas de dossier à son nom. Il a dit qu'il avait pourtant rempli tous les formulaires, inscrit tous les renseignements au sujet de ses trois armes à feu, de sa maison et tout cela, y compris des photos de lui, et qu'il avait ensuite remis le tout à un fonctionnaire.

    Si le gouvernement n'est pas assez compétent pour verser tous ces renseignements dans une base de données et les protéger, tout cet exercice ne sert absolument à rien. Si le gouvernement perd les renseignements et si une personne mal intentionnée met la main dessus, celle-ci saura où habite mon électeur. Elle saura où sont entreposées les armes à feu. Elle pourrait entrer par effraction et perpétrer quelque crime abominable avec ces renseignements.

    Le ministre de la Justice est très réticent à parler de la situation qui prévaut à l'heure actuelle dans le dossier du registre des armes à feu. Tous les jours il prend la parole pour parler de la sécurité du public, comme si le seul fait de gaspiller un milliard de dollars pouvait d'une façon ou d'une autre améliorer notre sécurité et comme si le fait d'enlever des ressources à nos services de police pouvait permettre de protéger la sécurité du public.

    Je n'ai parlé que de DRHC et du registre des armes à feu, mais nous avons tous également entendu parler du dossier des cartes d'assurance sociale. Une dame de mon comté a un jour téléphoné à mon bureau. Elle avait perdu sa carte d'assurance sociale et avait communiqué avec DRHC pour en obtenir une autre. On lui a répondu qu'elle n'avait pas le droit d'en avoir une autre. C'est alors qu'elle a communiqué avec mon bureau pour savoir si c'était bien le cas. Nous avons vérifié auprès de DRHC où l'on nous a tout d'abord répondu que c'était exact, que la dame n'avait pas droit à une autre carte et qu'elle devrait s'inscrire à un programme de protection des témoins pour en obtenir une nouvelle. J'ai alors demandé ce qui arriverait si cette personne se servait de ses propres données pour obtenir une nouvelle carte. C'est tout à fait ridicule. Pour une raison ou pour une autre, la politique a changé et elle a maintenant droit à une nouvelle carte. Toutefois, le seul fait que le gouvernement ait perdu la trace d'un aussi grand nombre de cartes devrait nous faire hésiter lorsqu'on nous propose l'adoption d'une chose aussi fondamentale que l'attribution d'une nouvelle carte d'identité pour tous les Canadiens.

    J'aimerais dire quelques mots sur des observations qui ont été formulées par le professeur d'infotechnologie Andrew Clement de l'Université de Toronto. Ce dernier a étudié toute la question de la carte d'identité nationale. Il nous a avertis qu'un tel système autonome n'était pas très utile sur le plan de la sécurité puisqu'une personne pourrait obtenir, sous un faux nom, une carte qui porterait son empreinte digitale ou rétinienne sur le code à barres. À son avis, même avec une base de données centrale, une telle carte ne serait pas d'une grande utilité pour les terroristes. N'importe qui pourrait en obtenir une en présentant d'autres documents falsifiés, comme un certificat de naissance par exemple. La création d'une telle carte d'identité sécuritaire dépendrait de documents beaucoup moins fiables.

    Il me semble important de tenir compte de cela. C'est la raison pour laquelle les députés de notre parti et nos collègues de ce côté-ci de la Chambre s'opposent à la création d'une carte d'identité nationale et appuient la motion présentée par le NPD.

[Français]

+-

    M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le Président, on a souvent entendu dire aujourd'hui qu'il pourrait y avoir les empreintes digitales sur la carte d'identité. Cependant, s'il y avait des empreintes sur une carte d'identité nationale, il faut penser que même aujourd'hui, avec le respect de la vie privée de la personne, si un individu fait face à ces accusations, ses empreintes seront envoyées à la GRC. Par la suite, s'il comparaît en cour et s'il est trouvé non coupable, il faudra qu'ils renvoient ses empreintes à l'individu. Ce n'est pas quelque chose qui est donné gratuitement à n'importe qui.

    Et dans ce cas-ci, il y en a qui pensent déjà qu'on pourrait avoir une carte avec nos empreintes digitales ou bien les empreintes rétiniennes et qu'on pourrait se promener partout au pays ou dans le monde. Imaginez-vous le pouvoir qu'un gouvernement pourrait avoir!

    Je trouve drôle que les libéraux pensent à cela aujourd'hui, parce que cela ne veut pas dire qu'ils vont être là pour toujours et une bonne journée, ils seront des individus sur la rue, eux aussi. Ne sont-ils pas là pour protéger le citoyen et pas seulement pour donner le pouvoir à l'État?

  +-(1700)  

[Traduction]

+-

    M. James Rajotte: Monsieur le Président, je remercie mon collègue de sa question. Il a assurément soulevé un point extrêmement important. Si la carte contient des renseignements très précieux et extrêmement personnels à notre sujet, le gouvernement se retrouve avec énormément de pouvoir. La question des libertés civiles m'intéresse au plus haut point, d'où mes inquiétudes face à ce pouvoir entre les mains du gouvernement.

    Sa question nous amène également à nous demander ce qui arrive si quelqu'un perd sa carte. Qu'arrive-t-il à toute cette information, à mes empreintes rétiniennes, à mes empreintes digitales? C'est une faille du système car il ne peut empêcher que cela se produise. Combien de gens perdent leur carte d'assurance sociale ou leurs cartes de crédit? Cela arrive fréquemment. Que faire une fois cette information entre les mains d'un inconnu? Je présume qu'on peut y accéder au moyen d'un système informatique quelconque. Quelle sécurité offre le système dans ces cas-là?

    La réponse est simple: il n'y a aucune raison de confier de tels pouvoirs au gouvernement à ce moment-ci, ou par ailleurs à quelque gouvernement que ce soit. Peu importe son allégeance politique, il n'y aucune raison de confier ce type de pouvoir à un gouvernement.

+-

    M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je trouve incroyable que le secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration intervienne constamment pour dire que ce n'est qu'un débat, que nous ne devrions pas poser ces questions ou que nous ne devrions pas nous attendre à obtenir de réponses au sujet des coûts et de l'information que contiendra cette carte si nous décidons de nous en servir.

    Je lui demande s'il convient avec moi que le gouvernement devrait répondre à ces questions, que le ministre devrait avoir les réponses, que son représentant, le secrétaire parlementaire, devrait avoir les réponses concernant ce sujet très important, et que se présenter à la Chambre sans ces réponses est incroyable en fait. En convient-il?

+-

    M. James Rajotte: Absolument, monsieur le Président. Je suis tout à fait d'accord avec les brillants propos de mon collègue. Je suis seulement abasourdi. Lorsque le gouvernement propose une mesure aussi fondamentale qui changera la société canadienne, on s'attend à ce qu'il ait des réponses détaillées à ce genre de questions, c'est-à-dire: Quelle est le but de cette carte? À quoi servira-t-elle? Que remplacera-t-elle? Qu'adviendra-t-il des autres cartes que nous avons, comme les cartes d'assurance-maladie provinciales, et même les cartes Visa? Y aura-t-il un rapport entre cette carte et les autres cartes?

    Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration aurait avantage à réfléchir à ces questions avant de présenter un tel projet. Il devrait envisager toutes les possibilités et toutes les questions et préparer des réponses étoffées.

    Il me semble avoir remarqué cette tendance au sein du gouvernement. Que ce soit en rapport avec cette carte, avec Kyoto ou même avec l'Irak, on ne semble pas avoir une position claire et solide du début à la fin.

    Je conseillerais au gouvernement de prendre en considération le débat d'aujourd'hui à la Chambre. Son incapacité à fournir des réponses élémentaires à nos questions devrait le faire hésiter à se lancer dans un tel projet.

+-

    M. Sarkis Assadourian (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, l'intervenant précédent a fait une déclaration politique très mesquine en affirmant que nous ne connaissons pas les réponses aux questions. Les audiences sont justement faites pour cela. Pour autant que je sache, on envoie des comités un peu partout au pays pour savoir ce que les gens pensent. Si on leur dit ce que nous voulons, à quoi bon tenir des audiences?

    C'est la même chose ici. Nous tenons une audience, une discussion. Si nous avions l'intention de dire à tout le monde ce que nous voulons, il n'y aurait pas de discussion. Nous présenterions un projet de loi. Mais ce n'est pas ce que nous faisons; nous ne présentons pas de projet de loi. Nous avons simplement une discussion.

    Si le député n'est pas content qu'on s'adonne à un tel exercice, il n'a qu'à le dire.

  +-(1705)  

+-

    M. James Rajotte: Monsieur le Président, je comprends parfaitement que nous ne faisons que discuter. Je tiens à remercier le Nouveau Parti démocratique, qui nous a permis de tenir ce débat, car ce n'est certainement pas au gouvernement que nous le devons. Nous le devons à un parti de l'opposition qui a déclaré que le moment était venu d'en parler et d'en débattre.

+-

    M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, je sais que le député d'Edmonton-Sud-Ouest est un adepte du libertarianisme. Je crois qu'il préconise les théories de la célèbre femme écrivain Ayn Rand, dont le traité intitulé La vertu d'égoïsme est devenu la bible en quelque sorte de l'Alliance canadienne.

    Sa sensibilité de libertaire serait-elle atteinte si le député vivait dans un pays où il devait porter sur lui sa carte d'identité nationale, même s'il ce n'était que pour aller à l'épicerie du coin pour acheter son journal, et si, dans pareil régime, un policier devait l'interpeller et exiger de lui qu'il produise sa carte d'identité, qu'il produise ses papiers? Le député en serait-il offensé, compte tenu de sa tendance libertaire?

+-

    M. James Rajotte: Monsieur le Président, je remercie mon collègue de sa question, mais je dois apporter une rectification. Je ne suis pas un admirateur d'Ayn Rand et de ses travaux. Lorsque je songe à l'idéologie libertarienne, je pense à des gens comme John Locke, par exemple. Nous devrions lire les classiques. Je ne crois pas qu'Ayn Rand soit du nombre.

    Je suis certainement d'accord sur son évaluation et la teneur de sa question, soit que nous ne voulons pas du type de société dont il parle, une société où nous devrons produire une carte d'identité pour de simples transactions.

    On en revient à mon point de vue fondamental: la plupart des interactions entre les êtres humains peuvent se dérouler sans l'ingérence du gouvernement, et nous devrions le plus souvent possible nous en passer. Lorsque le gouvernement est nécessaire, il doit être là, mais son rôle demeure limité. Lorsqu'il n'est pas nécessaire, ne l'encourageons pas à intervenir. N'allons pas, d'une façon tout à fait gauche et incompétente, adopter une carte dont nous ne connaissons même pas la raison d'être.

+-

    M. Yvon Godin: Monsieur le Président, d'après mon collègue, combien de députés envisagent une carte d'identité qui ressemblerait à un permis de conduire? Comme nous le savons tous, pendant de longues années, les permis de conduire n'étaient que de petites cartes portant notre adresse. Il suffit d'y ajouter des photographies pour que personne d'autre ne puisse les utiliser. Les données montrent que le permis nous appartient. La seule information du permis, c'est l'adresse et une photographie.

    Par contre, pour une carte d'identité nationale, il faudrait les empreintes digitales et toutes sortes de renseignements. En perdant cette carte, nous livrerions de l'information sur presque toute notre vie à quelqu'un d'autre, ce que nous ne voulons certainement pas. Voilà ce qui doit préoccuper les Canadiens. Il faut dire aux Canadiens de s'en inquiéter et de refuser cette carte.

+-

    M. James Rajotte: Monsieur le Président, je remercie mon collègue d'avoir posé cette excellente question. Je ne vois pas comment je pourrais rajouter à ce qu'il a déjà dit, sauf pour lui donner raison. La mesure dont il est question va au-delà du genre de cartes qui existe déjà. Il n'est pas question d'une carte comme le permis de conduire, pour lequel il suffit de se présenter à un comptoir et de fournir quelques renseignements comme la couleur des yeux et le poids. La carte dont il est question va beaucoup plus loin.

    Du fait que le gouvernement aurait accès à cette information et, comme je l'ai dit tout à l'heure, que nous pourrions perdre cette carte et perdre l'information, je doute que nous voulions emprunter cette voie.

+-

    M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Monsieur le Président, c'est avec une certaine inquiétude que je me lance dans le débat d'aujourd'hui. Après avoir entendu mes collègues et certaines des questions posées, j'ose espérer qu'à ce stade-ci d'évolution de notre démocratie, nous ne tenterons pas de remettre à chaque Canadien une carte d'identité personnelle contenant toutes sortes d'informations biométriques. J'ose croire que nous n'en sommes pas encore là, car il n'y aurait alors plus de démocratie du tout.

    La première question que devraient se poser les Canadiens est de savoir qui va gérer le système. Seront-ce les mêmes personnes qui sont actuellement aux commandes? On a affirmé à de nombreuses reprises que l'enregistrement des armes à feu coûterait deux millions de dollars. Or, le coût atteint un milliard de dollars. Seront-ce les mêmes personnes qui n'arrivent même pas à gérer la carte d'assurance sociale, une carte que possèdent presque tous les Canadiens de plus de 18 ans? On ne peut pas dire que leur feuille de route est très reluisante.

    L'intégrité des numéros d'assurance sociale de DRHC a été mentionnée dans le rapport de 1998 du vérificateur général et, en octobre 2002, un communiqué nous apprenait que:

    La vérificatrice générale craint que pour la majorité des NAS attribués depuis 1998, l'identité et la citoyenneté des demandeurs n'aient pas fait l'objet d'une vérification en bonne et due forme.

    Depuis cinq ans, les libéraux n'ont pas réussi à contrôler efficacement les numéros d'assurance sociale et maintenant, ils veulent instaurer une carte nationale qui renfermera toutes sortes d'informations personnelles grâce auxquelles on pourra suivre chaque Canadien à la trace. Cette équipe n'a même pas su contrôler les stocks de morue et elle veut maintenant contrôler tous les citoyens du pays.

    Cette équipe compte dans ses rangs le ministre des Pêches qui a refusé l'installation de boîtes noires sur les 500 ou 600 chalutiers au large. Il avait refusé en alléguant qu'il ne pourrait pas en assurer le suivi et pourtant cette même équipe veut maintenant suivre à la trace 33 millions de Canadiens. J'en doute.

    La vérificatrice générale a ensuite affirmé que les politiques et les pratiques en vigueur à DRHC ne respectaient pas l'objectif de la Loi sur l'assurance-emploi et des règlements afférents, parce que le ministère ne prenait pas les mesures requises pour identifier adéquatement les demandeurs de numéros d'assurance sociale. Et il s'agit d'une seule carte d'identité.

    Le contrôle des numéros d'assurance sociale de la série 900 est tout à fait inadéquat; ces numéros sont attribués aux gens qui sont ni des Canadiens, ni des résidents permanents. Même si la plupart de ces gens sont censés être au Canada temporairement, ces NAS ne comportent pas de date d'expiration. Les libéraux ont été incapables de fixer une date d'expiration pour les numéros d'assurance sociale des résidents temporaires, mais ils veulent maintenant accoler une identification à chaque homme, femme et enfant du pays. Ils se croient capables de gérer un tel programme d'identification, mais ils n'ont même pas pu gérer une tentative partielle d'identification.

    Et ce n'est pas tout. L'intégrité des données dans le registre d'assurance sociale n'est pas encore assurée. Ce groupe de gestionnaires gouvernementaux a repéré un problème en 1998; il s'agit d'un problème colossal pour les Canadiens car on a constaté toutes sortes de fraudes liées aux numéros d'assurance sociale.

    En 2002, l'intégrité des renseignements contenus dans le registre d'assurance sociale posait toujours des problèmes. C'est ahurissant. Par exemple, le nombre de cartes d'assurance sociale utilisables par les Canadiens de plus de 20 ans dépasse de cinq millions la population faisant partie de ce groupe d'âge. Nous ne parlons pas de 10 000, 50 000 ou 500 000 cartes. Nous parlons d'environ cinq millions de cartes. Il y a en circulation cinq millions de cartes d'assurance sociale de plus que le nombre de personnes de ce groupe d'âge qui en ont reçues. Ces cartes valent leur pesant d'or. Nous pourrions ouvrir un compte de banque. Nous pourrions vérifier le compte de banque d'une autre personne. On peut trouver toutes sortes de renseignements avec un numéro d'assurance sociale. Si nous avions le numéro d'assurance sociale d'une autre personne, nous pourrions commettre toutes sortes de fraudes en empruntant son identité.

  +-(1710)  

    Le groupe qui a permis la mise en circulation de cinq millions de cartes d'assurance sociale supplémentaires, et qui n'a rien fait depuis 1998 pour mettre un terme à cette utilisation abusive, veut maintenant introduire une carte d'identité nationale. Il voudrait que les Canadiens aient leurs empreintes digitales ou rétiniennes sur la carte, peut-être même sur leur permis de conduire, et toutes sortes d'autres renseignements personnels, comme les dossiers médicaux.

    Des cartes d'assurance sociale sont utilisées frauduleusement et volées, quelque 12 000 Canadiens se font voler leur identité chaque année et, maintenant, nous voudrions inscrire tous ces renseignements sur une carte. Que vaudrait-elle pour les éléments criminels dans notre pays? Que vaudrait-elle pour les gens qui achètent et vendent quotidiennement ces renseignements et qui les utilisent à des fins illégales? Elle vaudrait beaucoup d'argent. Elle vaudrait plus que les numéros d'assurance sociale, les NAS que le gouvernement ne peut même pas surveiller.

    L'intégrité des données n'est pas assurée dans le système d'assurance sociale relativement aux numéros d'assurance sociale. L'intégrité des données n'est pas assurée dans le registre des armes à feu. L'intégrité des données n'est pas assurée dans n'importe quel système administré par ce gouvernement.

    Comment les libéraux appelleraient-ils cette carte? Un député a dit à la blague, il y a un instant, «la carte feuille d'érable», qui nous donnerait accès à la salle de repos à l'aéroport. Je crois tout de même que c'est un peu plus sérieux.

    Que je sache, je ne participe pas à un débat quant à savoir si les Canadiens seront marqués comme du bétail. Je ne crois pas que c'est la solution. Toutefois, je dois dire que n'importe quel groupe au Canada fait mieux pour retracer des données que le gouvernement. D'une manière ou d'une autre, nous avons tous perdu le sens commun.

    Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration désire une carte d'identité et des milliers de formulaires IMM 1000, des cartes indiquant le statut de réfugié, ont été volés. On vend ces formulaires sur le marché. Il y a quelque chose qui ne va pas du tout.

    M. George Radwanski, qui est censé protéger la vie privée des Canadiens a déclaré:

    Les renseignements personnels jouent un rôle primordial dans la protection de la vie privée. En effet, je définis la protection de la vie privée comme le droit de décider de l'accès à sa propre personne et aux renseignements qui nous concernent.

    Il est certain que les parlementaires ont le devoir de faire en sorte que l'accès aux renseignements personnels concernant les Canadiens soit substantiellement restreint.

    C'est une question de gestion. Les Canadiens doivent se demander s'ils veulent que ce gouvernement gère leurs renseignements personnels alors qu'il est incapable de gérer quoi que ce soit. Soyons honnêtes. Nous pouvons lire tous les sondages que nous voulons. Combien y a-t-il de Canadiens qui croient vraiment que les renseignements les concernant sont protégés? Qui dans cette Chambre ne connaît pas quelqu'un qui s'est fait voler son identité? Nous serions un petit cercle d'amis si nous ne connaissions pas quelqu'un qui s'est fait voler son identité. C'est une expérience atroce. Il a fallu des années à ces personnes pour retrouver leur identité.

  +-(1715)  

    Si nous voulons faire quelque chose pour aider les Canadiens, aidons les 12 000 dont les pièces d'identité sont volées à chaque année, dont les comptes bancaires sont vidés, dont les cartes Visa sont utilisées au maximum par des fraudeurs, dont les permis de conduire sont volés, et qui font l'objet de réclamations de la part de compagnies d'assurances sans qu'ils n'y soient pour rien. Ces personnes doivent se battre durant des années pour laver leur réputation. Aidons ces personnes. Trouvons une solution rapide à ce problème. Nous devrions prendre une petite initiative, parce que nous ne sommes pas prêts à prendre une grande initiative comme celle-ci.

    Les gens ne font pas confiance à l'Internet et ils ne font pas confiance au gouvernement en matière de renseignements. Ekos Research Associates a récemment constaté que seulement 32 p. 100 des usagers quotidiens de l'Internet, c'est-à-dire des personnes qui se disent très à l'aise avec cette technologie, sont prêts à fournir des renseignements personnels aux sites Internet qu'ils consultent. Chez les utilisateurs occasionnels, cette proportion chute à 11 p. 100.

    Personnellement, je n'hésite pas à faire des achats en ligne, mais je ne donne pas mon numéro de carte de crédit. Je le donne au téléphone, mais non en ligne. C'est comme ça.

    Si nous poussons l'analyse un peu plus loin, nous constatons que les craintes liées à la communication de renseignements personnels sur l'Internet ont des conséquences économiques réelles pour le commerce électronique. En effet, Ekos a constaté que seulement 22 p. 100 des Canadiens étaient disposés à donner leur numéro de carte de crédit en ligne. Chez ceux qui utilisent l'Internet de façon plus régulière, cette proportion ne grimpe qu'à 31 p. 100, tandis que dans le cas de ceux qui naviguent sur l'Internet à chaque jour, elle dépasse à peine 50 p. 100.

    Pourquoi avons-nous besoin d'une carte d'identité personnelle? Nous avons déjà plusieurs pièces d'identité. Je ne suis d'ailleurs pas convaincu que nous devrions remplacer toutes ces pièces par une seule carte. Je ne vois aucune raison d'agir de la sorte. On pourrait peut-être remplacer quelques pièces d'identité par une carte unique qui renfermerait plus de données. Cela pourrait être une étape raisonnable et responsable. On ne s'attend pas à cela du gouvernement d'en face, mais ce serait une mesure raisonnable et responsable.

    Les gens qui voyagent en dehors du pays doivent se procurer et utiliser un passeport. Ceux qui voyagent à l'intérieur du Canada n'ont pas besoin d'un passeport. Nous n'avons donc pas besoin d'une carte d'identité personnelle qui pourrait avoir une valeur fort appréciable sur le marché noir et contenir plus de renseignements que la majorité des Canadiens ne seraient prêts à en fournir.

    Mis à part les renseignements pertinents que je lui fournis, le bureau des véhicules automobiles de la Nouvelle-Écosse n'a pas à connaître les autres renseignements personnels à mon sujet. Il n'a absolument pas besoin de savoir cela. Les informations médicales me concernant, mon dossier médical, mes allergies et ce genre de choses n'ont pas à figurer sur mon permis de conduire.

    Je ne peux m'imaginer que nous ayons fait un tel saut dans l'inconnu avec ce gouvernement qui n'a été en mesure de gérer convenablement aucun des dossiers qu'il a touchés. Nous avons investi des milliards de dollars dans des fondations créées par le gouvernement et nous ne pouvons pas avoir accès à l'information.

    Si le gouvernement veut avoir des renseignements personnels sur les Canadiens, alors il doit ouvrir les dossiers des fondations qu'il a établies et nous permettre d'y jeter un coup d'oeil. Il devrait ouvrir ces dossiers à la vérificatrice générale, afin que l'on sache si les méthodes comptables appropriées ont été suivies. Il devrait les ouvrir au public afin que l'on sache qui siège au conseil d'administration, à part le ministre compétent.

    Pour que le Canada nous apparaisse vraiment comme une société ouverte, libre et démocratique, il y a toutes sortes de renseignements auxquels moi-même, ainsi que mes collègues, j'en suis sûr, aimerions avoir accès.

    Le gouvernement ne devrait pas prétendre qu'il y a plus de 22 ou 23 milliards de dollars dans les fondations, dont 10 ou 12 milliards sont venus s'ajouter dans les dernières années, sans qu'il soit disposé à nous fournir l'information demandée. Ce serait faire fi de la politique, de l'accès à l'information, de la vérificatrice générale et des pratiques comptables établies.

  +-(1720)  

    D'autre part, tous les détails sur un individu sont nécessaires. Je suis surpris que les libéraux n'aient pas commencé à brûler des livres. C'est généralement la voie que des pays suivent. C'est absolument scandaleux.

    Si le gouvernement entend suivre cette voie, il devra alors nous montrer un plan raisonnable et rationnel, par exemple, pour reprendre tous les numéros d'assurance sociale, car il y en a cinq millions de plus que de Canadiens. Le gouvernement veut reprendre tous ces numéros et émettre une nouvelle carte. Il veut inclure sur cette carte une ou deux choses de plus. Le gouvernement pourrait peut-être émettre un type de carte d'assurance-médicaments. Je suis persuadé que demain, le gouvernement établira un régime d'assurance-médicaments pour les Canadiens afin qu'ils puissent avoir les moyens d'acheter les médicaments dont ils ont besoin. Je suis sûr que l'information pourrait être transmise d'un ministère à un autre.

    On ne peut imaginer comment le gouvernement va gérer un système d'une seule carte d'identité pour chaque Canadien. J'ai dit au début de mon discours que le gouvernement ne pouvait suivre les morues, ce qui est tout à fait vrai. Il ne peut suivre le reste des stocks de poisson non plus. Nous avons proposé à la Chambre et au comité à un certain nombre de reprises que le gouvernement suive les bateaux de pêche. Aucune tentative n'a été faite en ce sens.

    Étant donné qu'on peut compter de nos jours sur le GPS et que tous les chalutiers au large sont équipés de ce système, nous saurions en un instant où sont situés tous les bateaux de pêche. Nous saurions où sont les chalutiers étrangers. Nous saurions s'ils étaient en train de pêcher dans la mauvaise zone. Nous saurions s'ils communiquent des renseignements incomplets. Si le gouvernement veut suivre quelque chose, ce devrait être cela.

    Le gouvernement devrait dire à l'Organisation des pêches de l'Atlantique Nord-Ouest qu'il devrait y avoir un GPS sur tous les chalutiers de pêche étrangers naviguant dans les eaux canadiennes et en haute mer dans les zones canadiennes. Ce serait une chose importante à surveiller. Le gouvernement saurait si les chalutiers pêchaient dans la zone 4X ou 3P. Il saurait s'ils étaient dans des zones comme le Bonnet flamant, le nez et la queue des Grands Bancs ou au large de Saint-Pierre-et-Miquelon. Le gouvernement saurait où sont les bateaux. Si des chalutiers disaient que leurs prises viennent d'une zone alors qu'elles proviennent plutôt d'une autre, le gouvernement saurait, c'est évident, que le poisson n'a pas été pris là.

    Le gouvernement refuse de suivre la trace de 200 chalutiers et il voudrait suivre celle de 33 millions de Canadiens. J'ai beau essayer, je ne comprends pas la logique.

    Si les libéraux veulent que nous leur accordions notre confiance—ce que les Canadiens ne feront sûrement plus jamais—ils devraient s'y prendre plus doucement. Y aller petit à petit. Corriger les fraudes relatives aux numéros d'assurance sociale. Des centaines de millions de dollars de prestations sont versés à des morts. Il y a cinq millions de cartes d'assurance sociale de trop en circulation. Le gouvernement devrait régler ce problème, s'y attaquer.

    Le gouvernement veut suivre des choses à la trace. S'il veut défendre la position du Canada dans le monde et protéger les stocks de poisson de la côte est et de la côte ouest, et retracer l'information, il devrait le faire.

    Les Canadiens appuieraient sûrement le gouvernement s'il voulait corriger le registre des armes à feu. Le gouvernement n'a seulement pas commencé à le faire. Il a immédiatement besoin de 15 millions de dollars. Ce qu'on n'a pas dit aux Canadiens, c'est que cela contribuera à financer la banque de données pendant trois, quatre ou cinq mois, après quoi on reviendra à la case de départ et à un gaspillage de un milliard de dollars.

  +-(1725)  

    Il y a un certain nombre de secteurs où le gouvernement pourrait améliorer la cueillette de renseignements et ce que les Canadiens reçoivent contre l'argent de leurs impôts. Il n'arrangera en rien les choses en imposant une carte d'identité nationale.

    Y a-t-il moyen de bonifier le passeport canadien? Peut-être. Prouvez-le moi! Montrez-moi qu'il manque quelque chose au passeport. La plupart des Canadiens seraient disposés à examiner la question, je crois. Toutefois, je ne vois aucune raison d'imposer une carte d'identité nationale. Comme pour le contrôle des armes à feu au début, on cherche à détourner l'attention de la population des vrais problèmes que sont l'incompétence et une piètre gestion.

  +-(1730)  

[Français]

+-

    Le vice-président: Comme il est 17 h 30, la Chambre abordera maintenant l'étude des affaires émanant des députés selon l'ordre indiqué au Feuilleton d'aujourd'hui.


+-Initiatives parlementaires

[Initiatives parlementaires]

*   *   *

[Traduction]

-Loi sur les refuges d'espèces en voie de disparition

+-

    M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Alliance canadienne) propose que le projet de loi C-232, Loi visant la création de refuges fauniques pour les espèces en voie de disparition, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

    --Monsieur le Président, je suis très reconnaissant au député de Dewdney—Alouette d'avoir appuyé le projet de loi C-232, visant la création de refuges fauniques pour les espèces en voie de disparition.

    On recense au Canada quelque 20 000 espèces dont 8 000 sont en péril et en voie de disparition. Depuis le début, le débat sur les espèces en péril s'enlise dans de grandes difficultés et tourne en rond. Nous n'avons guère amélioré la situation et les faits en témoignent.

    Avec les années, la situation des espèces en péril s'aggrave. Les espèces disparaissent de la surface de la planète à un rythme aujourd'hui de 100 à 1 000 fois supérieur au rythme normal qui était observé dans le passé. Dans l'état actuel des choses, on détruit quelque 240 hectares de terres d'heure en heure, du fait de l'expansion tentaculaire des villes, de l'agriculture et, surtout, de la destruction de l'habitat.

    Le projet de loi C-232 vise à combler certaines lacunes dans le projet de loi d'initiative ministérielle concernant l'environnement. Je vous en parle.

    La première lacune observée dans l'initiative ministérielle est attribuable à la décision qui a été prise à l'origine concernant les espèces et les habitats réputés en péril. Aujourd'hui, ces décisions politiques sont du ressort du ministre. En vertu de mon projet de loi, elles seront du ressort des scientifiques. Il appartiendra aux scientifiques faisant partie du Comité sur la situation des espèces en péril au Canada de prendre de telles décisions. Ils désigneront les espèces et les terres qui sont menacées de disparition en s'appuyant des données scientifiques.

    Le deuxième aspect de cette mesure est très important. La destruction de l'habitat est le facteur le plus important à contribuer à la destruction des espèces sur notre planète. Mon projet de loi obligera le gouvernement à collaborer avec les provinces et les propriétaires fonciers pour s'assurer de parvenir à une entente. En cas d'échec, le gouvernement sera habilité à exproprier une superficie minimum du terrain réputé habitat essentiel. Mon projet de loi obligera le gouvernement à rembourser le propriétaire de ce terrain de la perte de revenu tiré de cet habitat.

    Généralement, on trouve un terrain d'entente. De nombreux et excellents accords novateurs ont été conclus, notamment en Saskatchewan où l'on a fait un travail extraordinaire.

    Si l'on ne parvient pas à un accord, c'est la protection de l'habitat essentiel des espèces menacées qui doit primer. Mon projet de loi fait obligation au gouvernement de protéger l'habitat à tout prix, pour assurer la survie de l'espèce en cause.

    Quand on examine la question plus générale des espèces en voie de disparition et de leur destruction massive dans le monde entier, on constate qu'un certain nombre de facteurs interviennent. Comme je l'ai déjà dit, la destruction de l'habitat est le facteur le plus important. Le trafic et le commerce international des espèces en voie de disparition viennent au deuxième rang.

    Malheureusement, notre pays contribue largement au trafic des espèces en voie de disparition. Après les armes et la drogue, c'est le troisième produit en importance dont le commerce est illégal dans le monde. Ce commerce illégal est surtout le fait de bandes du crime organisé et de groupes terroristes qui en retirent de l'argent. Les répercussions sont énormes. Ce commerce rapporte des milliards de dollars.

    C'est triste à dire, mais le Canada est l'un des principaux points de transit de ce commerce dans le monde entier. Cela a des répercussions non seulement sur nos espèces indigènes comme les ours, d'autres mammifères grands et petits, des plantes et des papillons, mais aussi sur des espèces exotiques, par exemple de grands félins, les rhinocéros, certains oiseaux et bien d'autres espèces.

    Le braconnage est un autre problème grave. Des peines sont prévues pour le braconnage dans notre pays, mais elles ne sont malheureusement pas appliquées au maximum. Le braconnage n'est souvent pas considéré comme un problème si grave. Ce n'est pas considéré comme un crime grave.

    Ceux qui se livrent au braconnage le font souvent dans une optique commerciale et sont responsables de la mort de centaines, voire de milliers de spécimens appartenant à des espèces en voie de disparition. Souvent, les peines infligées aux personnes trouvées coupables n'équivalent même pas aux bénéfices qu'elles retirent d'une seule livraison de spécimens appartenant à une espèce en voie de disparition.

    La loi est peu appliquée, et il y a peu de mesures dissuasives pour amener les contrevenants à cesser leurs activités de braconnage. Ils savent pertinemment que les tribunaux ne leur infligeront pas la peine maximale. J'inviterais le gouvernement à au moins appliquer les peines minimales prévues pour sévir contre ce type d'activité.

  +-(1735)  

    Il faut aussi tenir compte des ressources à la disposition des agents de conservation. Le gouvernement a considérablement réduit la capacité des agents de protéger nos espaces sauvages. Il a réduit les ressources mises à leur disposition, leur effectif, et les a désarmés. Désarmer nos agents de conservation, comme le député de l'Alberta le sait bien, est une très mauvaise chose. On trouve de tout dans les bois. Il est rare que les agents doivent utiliser une carabine ou une arme de poing pour se protéger contre un animal agressif, mais ils peuvent avoir à se protéger contre une créature beaucoup plus dangereuse, l'être humain. Les braconniers ont des armes. Le gouvernement devra décider très rapidement de redonner des armes aux agents de conservation car, sans armes, ils sont vulnérables et, selon moi, ils risquent leur vie.

    CITES, la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction, est une mesure législative internationale remarquable, conçue pour protéger les espèces menacées. Malheureusement, notre pays ne s'est pas acquitté des obligations fondamentales que lui impose la convention, à laquelle nous avons adhéré et qui constitue la pièce maîtresse du régime de protection internationale des espèces menacées d'extinction.

    Nous devons aussi supprimer l'importante échappatoire qu'offrent les réserves, prévue dans le texte de la convention. Les réserves permettent à un pays signataire de la convention de s'y soustraire unilatéralement, parce qu'il estime avoir le droit de consommer certaines des espèces les plus menacées au monde. Le Japon, par exemple, l'a fait afin de pouvoir consommer certaines des espèces les plus menacées, dont des baleines et des tortues de mer. La consommation de ces espèces par les Japonais a des répercussions considérables sur l'environnement et sur les espèces en cause. Il est scandaleux que 20 000 tortues de mer, qui constituent une espèce menacée, soient tuées chaque année, uniquement pour satisfaire le marché de la consommation au Japon.

    Nous avons souvent parlé de la pollution. Elle fait peser une grave menace sur les mers, les océans et les continents. S'il y a une chose que le gouvernement peut faire, non seulement pour protéger la santé des espèces menacées mais également celle des humains, c'est de s'attaquer au problème de la pollution aquatique, atmosphérique et terrestre. Toutes ces formes de pollution sont nuisibles non seulement pour les espèces animales mais pour les humains aussi. Elles ont un impact considérable sur notre santé à tous.

    La surexploitation constitue un autre problème. Je vis en Colombie-Britannique. La surexploitation de nos ressources halieutiques sur la côte ouest a eu un effet dévastateur sur diverses espèces qui vivent dans nos océans, notamment sur les salmonidés. Le gouvernement fait de mauvais calculs et, depuis des années, il reste sourd aux mises en garde des agents des pêches. Le gouvernement n'applique pas les principes scientifiques appropriés pour établir les quotas de pêches et assurer la viabilité des ressources. Le gouvernement ne fait pas ce qui s'impose, au grand détriment des collectivités de la Colombie-Britannique et, sans doute, de celles de la côte atlantique. Il faut que le gouvernement change son fusil d'épaule.

    Il faut également examiner la notion de libre-échange. Le libre-échange peut effectivement contribuer à la protection des espèces menacées. Je m'explique. Il suffirait tout simplement de réduire les subventions dans les domaines des pêches et de l'agriculture. À l'heure actuelle, à l'échelle mondiale, les subventions dans le secteur des pêches s'élèvent à 22 milliards de dollars. Or, cela entraîne, une surexploitation mondiale des ressources halieutiques et provoque une diminution et la disparition de nombreuses espèces.

    J'aimerais maintenant parler d'un nouveau modèle de conservation. Je l'ai d'ailleurs présenté au gouvernement, il y a environ six ans. J'espère que le gouvernement l'adoptera parce qu'il peut servir de lien manquant entre la conservation et le développement.

    Historiquement, les protecteurs de l'environnement et les tenants du développement ont emprunté des voies parallèles qui étaient souvent fort différentes. C'est effectivement ce que nous avons vu après Rio, au Sommet de la Terre de Johannesburg, l'an dernier. Les environnementalistes ont à leurs propres dépens ignoré les développementalistes et vice versa. Les deux groupes doivent pourtant tenir compte l'un de l'autre, particulièrement dans les régions du monde où l'absence de conservation décime certains des habitats essentiels les plus importants. Je parle du monde en développement.

  +-(1740)  

    En Afrique du Sud, on a trouvé ce lien manquant. Je vais vous expliquer comment c'est arrivé. La conservation permet de recueillir des fonds. Ces derniers doivent être répartis entre la conservation et le développement primaire dans les régions rurales pour la santé, l'éducation et la création d'emplois. Quand des personnes vivant près d'un habitat essentiel tirent un avantage économique et personnel de ce dernier, elles sont incitées à le préserver et à le protéger. C'est là le coeur de la question. À moins que les humains ne puissent tirer un avantage direct de la conservation d'un habitat et d'un site donnés, à moins qu'ils n'en tirent cet avantage personnel, le territoire sera détruit. C'est ce qui se passe partout dans le monde.

    Toutefois, lorsque l'on réussit à établir un système dans le cadre duquel les humains, en particulièrement ceux qui vivent dans les régions en question, peuvent en tirer un avantage financier, cela donne des résultats. Je vais vous donner des exemples. Dans la province de Kwazoulou-Natal, en Afrique du Sud, ils ont très bien réussi à cet égard. Les gens là-bas disent qu'il y a de nombreuses années, soit vers la fin des années 1800, de nombreuses espèces essentielles, dont le rhinocéros blanc, étaient en voie d'extinction parce que l'on décimait et détruisait leur habitat. Ils ont dit qu'ils devaient protéger cet habitat et ils ont réussi à le faire. Mais ils ont aussi reconnu que les gens vivant dans les environs devaient en tirer un avantage, parce que la croissance de la population exercerait de pressions telles que le territoire finirait par être envahi, peu importe ce que choisirait de faire le gouvernement central. Ils sont donc intervenus avec beaucoup de succès.

    À l'heure actuelle, le Fonds mondial pour la nature reconnaît cette façon d'agir. Ce n'était pas le cas historiquement. Il a adopté la vision historique axée sur la préservation, qui consiste à dire que nous devons préserver cette région pour le plaisir de la préserver, sans tenir compte des besoins humains du secteur environnant. Ce faisant, ils n'ont pas tenu compte des besoins humains, privilégiant plutôt la conservation de ce secteur.

    Je demande au gouvernement d'adopter l'attitude ci-après, et je soutiens qu'il peut le faire. Par l'entremise de nos programmes officiels de développement et d'aide, par le biais de l'ACDI, il peut travailler non seulement avec d'autres pays, mais aussi avec nos propres groupes de conservation, réunissant les ONG et les gouvernements fédéral et provinciaux pour dire que les sites de conservation doivent produire des fonds qui peuvent et doivent profiter aux personnes habitant dans le secteur. De plus, ce sera aussi l'occasion de produire des fonds pour nos agents de la protection de la nature eux-mêmes, nos agents de conservation industrieux qui manquent cruellement de fonds pour améliorer leur situation.

    Il y a une initiative qui pourrait connaître du succès mais qui est controversée. Il s'agit de la chasse au gibier trophée. Je ne chasse pas, sauf avec une caméra, et je ne peux m'imaginer tuer quoi que ce soit. Toutefois, il est vrai que lorsqu'une espèce est trop nombreuse, elle exerce beaucoup trop de pression sur un habitat et elle en subit elle-même des préjudices.

    On pourrait désigner un certain nombre d'espèces pouvant être chassées, moyennant une importante somme d'argent. Cet argent devrait cependant être utilisé dans le cadre d'un programme de conservation à l'intention des agents de protection de la nature et des projets de conservation dans la région. Dans ce cas, l'argent recueilli servirait effectivement à la recherche et au développement dans le domaine de la conservation pour la protection de cette région en particulier et pour l'expansion d'autres habitats essentiels.

    Où que nous nous trouvions au Canada ou même à l'étranger, nous savons bien que le manque de ressources est l'un des principaux obstacles au financement des projets de conservation. Les gouvernements centraux ayant d'autres intérêts importants dans le domaine des soins de santé, de l'éducation et autres, le dossier de la conservation vient souvent au bas de la liste quand vient le temps d'établir les priorités d'un gouvernement central en matière de dépenses. Cela ne peut pas continuer. Je devrais plutôt dire que cela continuera, mais qu'on peut changer les choses en donnant à nos agents de protection de la nature les outils dont ils ont besoin pour faire leur travail. Ils pourront avoir accès à ces outils si nous pouvons recueillir les fonds nécessaires dans les régions en question.

    En terminant, je dirai que les espaces sauvages sont en train de disparaître. La pression exercée sur les habitats essentiels est la première cause de leur destruction. Ils seront détruits à jamais. Est-ce un fait accompli? Pas du tout. Mon projet de loi donnerait au gouvernement la possibilité de faire disparaître les échappatoires, permettant ainsi à notre gouvernement et à notre pays de protéger pour toujours nos espèces sauvages et nos espèces en péril. Il démontrera également au monde entier que les agents de la protection de la nature, le secteur privé, le gouvernement fédéral, les gouvernements provinciaux et les ONG peuvent travailler ensemble pour le bien de notre société.

  +-(1745)  

    Si nous n'agissons pas, nous continuerons de perdre des espèces et la biodiversité biologique disparaîtra, entraînant pour nous de nombreuses répercussions que nous ne pouvons pas comprendre aujourd'hui, mais qui ne manqueront pas de nous causer préjudice pour toujours.

+-

    M. Alan Tonks (secrétaire parlementaire du ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, au Canada, nous avons des histoires incroyables à raconter au sujet de nos réalisations dans le domaine de la protection de la faune et des endroits où nous le faisons.

    Nous avons récupéré le marais Oak Hammock, qui faisait partie de terres agricoles et qui sert maintenant d'habitat à des milliers de d'oiseaux terrestres et aquatiques au Manitoba. À la pointe Pelée, à l'extrémité du sud de l'Ontario, nous avons un sanctuaire qui attire des espèces uniques et leur fournit abri et aliments au cours de leur migration. Nous avons des écosystèmes d'importance internationale qui sont déclarés aux termes des traités de Ramsar.

    Nous avons également des ententes de conservation signées par des agriculteurs, des propriétaires de boisés, des propriétaires de zones riveraines et d'utilisateurs de ressources. Nous avons des fiducies foncières et des espaces verts. Nous avons des projets de gestion dans chaque province et territoire. Tout cet ensemble constitue un système qui protège les espèces là où elles vivent.

    Ce sont tous des sanctuaires pour certaines espèces, des sanctuaires que nous préservons pour les générations futures de Canadiens parce qu'ils protègent l'essence même de la biodiversité sans laquelle il n'y aurait pas de vie sur terre. Tous ces succès ont quelque chose d'essentiel en commun. Ils sont le fruit de partenariats fondés sur la coopération. Partenariats et coopération n'auraient pas été possibles sans la collaboration des provinces, des territoires du gouvernement du Canada, qui ont travaillé ensemble pendant des générations pour assurer la gestion de la faune et de son habitat.

    Nous sommes saisis du projet de loi C-232, Loi visant la création de refuges fauniques pour les espèces en voie de disparition. Le principe de cette mesure est très louable, et j'en complimente le parrain, mon collègue d'en face. Toutefois, pour plusieurs raisons fondamentales, le gouvernement du Canada ne peut pas appuyer le projet de loi.

    En effet, il demande au gouverneur en conseil de désigner comme espèces en voie de disparition des espèces qui, de l'avis du COSEPAC, risquent la disparition ou l'extinction. Jusqu'ici, je peux être d'accord. C'est d'ailleurs facile puisque que c'est un élément de base de la Loi sur les espèces en péril, qui a reçu la sanction royale en décembre et dont l'intention est du même ordre.

    Toutefois, le projet de loi C-232 dit ensuite que le ministre de l'Environnement doit conclure un accord visant l'établissement d'un sanctuaire avec le propriétaire--fédéral, provincial ou privé--du terrain qui, selon le COSEPAC, est nécessaire pour la protection et le rétablissement de l'espèce en voie de disparition. S'il est impossible de parvenir à une entente, l'expropriation ou des clauses restrictives sont envisageables, de même qu'une indemnité ou un transfert de terres fédérales ou de droits sur celles-ci.

[Français]

    Il n'y a pas de disposition dans cette proposition de politique pour la sorte de collaboration fédérale, provinciale et territoriale en matière de gestion des espèces sauvages qui a existé pendant des années.

    En fait, j'irais jusqu'à dire que la collaboration et le partenariat pourraient être sérieusement compromis si une telle approche est prise.

[Traduction]

    La raison, c'est que cela découragerait la protection des espèces et des habitats en péril sur les terres privées. L'approche volontaire qui a si bien réussi ne pourrait pas donner d'aussi bons résultats.

    Cela n'est pas nécessaire et ne fait qu'ajouter une couche de complexité dont nous n'avons pas besoin. Nous avons déjà des sanctuaires pour la faune. En vertu de la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs, le ministre de l'Environnement peut créer des sanctuaires pour les espèces en voie de disparition afin de leur permettre de se rétablir.

    Je dois signaler que le règlement d'application de la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs protège les populations en tenant compte des activités humaines susceptibles de leur nuire. Il est également possible, en vertu de la Loi sur les océans, de protéger l'habitat des espèces marines. De plus, la Loi sur les parcs nationaux constitue un outil de protection des espèces et des autres éléments de notre patrimoine national.

    N'oublions pas non plus qu'en vertu de la Loi sur les espèces sauvages au Canada, il est possible de créer, de gérer et de protéger des réserves nationales de faune pour les activités de recherche, de conservation et d'interprétation. Les réserves sont conçues pour préserver les habitats critiques pour les oiseaux migrateurs et les autres espèces sauvages, et surtout celles qui sont en voie de disparition. La réglementation de ces réserves interdit toute activité pouvant nuire aux espèces et à leur habitat, sauf si un permis mentionnant l'activité autorisée est délivré.

    Comme les députés sont en mesure de le constater, ce n'est pas comme si rien n'avait été fait. Au contraire, Environnement Canada gère maintenant 92 sanctuaires d'oiseaux migrateurs et 50 réserves d'espèces sauvages nationales s'étendant sur plus de 11,6 millions d'hectares dans tout le Canada. Nous n'avons pas besoin d'une loi pour nous dire d'en créer d'autres pour les espèces en péril. Nous avons déjà bien des moyens de le faire.

    Prenons le cas de la Loi sur les espèces en péril. Cette loi renferme une disposition prévoyant l'établissement d'une liste fondée sur les évaluations du COSEPAC et interdisant de tuer ou de blesser toute espèce disparue du pays, en voie de disparition ou menacée ou de détruire leur habitat critique ou leur résidence. La Loi sur les espèces en péril prévoit aussi un processus global pour la planification et la mise en oeuvre de mesures de rétablissement relatives à des espèces inscrites.

  +-(1750)  

[Français]

    Les aires protégées, les aires nationales de la faune, les sites Ramsar et les aires pour les oiseaux migrateurs constituent des refuges. Le statut de refuge est accordé aux aires qui représentent un habitat important pour les oiseaux migrateurs. Ces refuges aident à protéger les oiseaux de la chasse et de toute autre perturbation. Ils permettent aux populations d'oiseaux migrateurs en péril de se rétablir.

[Traduction]

    Nous ne voulons pas adopter une autre loi qui ne fera que jeter encore plus la confusion dans l'esprit des Canadiens. Nous avons besoin de plus d'actions sur le terrain, et non de plus de lois et de règlements qui feront double emploi avec ceux déjà en vigueur. Nous n'avons certainement pas besoin d'une autre exigence législative pour rendre les choses encore plus complexes.

    Ce que nous devons faire, c'est remplir nos obligations relativement à ce qui existe déjà. Nous devons établir des partenariats avec les provinces et les territoires. Nous devons tabler sur ce que nous avons fait avec les simples citoyens, la classe politique, les organismes, les entreprises, les écoliers et les peuples autochtones du Canada. Nous devons utiliser ce que nous avons déjà avec le concours de nos partenaires qui nous ont aidés et qui continueront de nous aider dans l'avenir. C'est comme cela que nous obtiendrons du succès et que nous créerons des sanctuaires, non pas seulement maintenant, mais pour les générations à venir.

[Français]

+-

    M. Bernard Bigras (Rosemont—Petite-Patrie, BQ): Monsieur le Président, c'est avec une grande joie que je participe aujourd'hui au débat sur le projet de loi C-232, déposé par mon collègue de l'Alliance canadienne que je félicite pour son initiative.

    Toutefois il m'est difficile de l'appuyer en bonne et due forme. Je ne rejette pas d'emblée le concept de refuge faunique, tel que présenté par ce projet de loi, mais il m'apparaît important de rappeler en cette Chambre que le Québec s'est doté, dès 1989, d'une Loi sur les espèces menacées et vulnérables. De plus, le Québec s'est doté d'une Loi sur la conservation de la faune. Le Québec s'est aussi doté de règlements sur la pêche, justement pour en venir à une meilleure protection des espèces.

    En plus, conformément à sa volonté de respecter la Convention sur la biodiversité, dès 1996, le Québec s'est doté d'une stratégie de mise en oeuvre dans le respect de la Convention sur la biodiversité. De plus, le Québec s'est doté d'une Stratégie québécoise sur les aires protégées. Cette stratégie permet de désigner de façon juridique 17 types de milieux permettant d'en venir à une protection des aires protégées, dont les refuges fauniques.

    La position du Québec a toujours été la suivante: nous demandons le respect des lois québécoises; nous estimons qu'une loi fédérale qui viendrait dédoubler une loi existant au Québec dans certaines matières ne peut être acceptable. C'est une position historique qui a cours depuis 1989.

    Au Québec, les aires protégées constituent l'élément fondamental pour le maintien de la biodiversité. Le Québec, dans sa stratégie, en est venu à une définition, laquelle dit:

    Qu’est-ce qu’une aire protégée? Une aire protégée est définie comme «une portion de terre, de milieu aquatique ou de milieu marin, géographiquement délimitée, vouée spécialement à la protection et au maintien de la diversité biologique, aux ressources naturelles et culturelles associées; pour ces fins, cet espace géographique doit être légalement désigné, réglementé et administré par des moyens efficaces, juridiques ou autres.

    Voilà la définition incluse dans la Stratégie québécoise sur les aires protégées. Cette définition a pour objectif la conservation des espèces, plus particulièrement de leur variabilité génétique.

    En vertu de cette stratégie, on compte plus de 1 100 sites naturels désignés selon la Loi sur les aires protégées. Il existe plus de 17 désignations juridiques différentes permettant de protéger les espèces et aussi leur habitat.

    Il faut comprendre qu'en matière de conservation, on ne peut et on ne pourra jamais protéger les espèces vulnérables ou menacées, si nous n'en venons pas à une protection convenable de leur habitat. C'est l'objectif même de la Loi québécoise sur les aires protégées.

    Dans ces 17 désignations, on inclut naturellement les habitats fauniques, les milieux marins protégés, les milieux naturels protégés, les parcs et lieux historiques nationaux, les parcs régionaux urbains et les refuges d'oiseaux migrateurs. Ce n'est pas en vertu de la loi fédérale, mais en vertu de la loi québécoise. Il y a aussi des réserves écologiques et des sites protégés par une charte d'organismes privés.

  +-(1755)  

    J'en ai oublié, bien sûr, mais j'insiste pour dire que la loi québécoise sur les aires protégées inclut les refuges fauniques, tel que cela est présenté dans la loi fédérale.

    Donc, que ferait cette loi fédérale? Elle ne ferait que dédoubler ce qui se fait déjà au Québec. Comme le secrétaire parlementaire l'a indiqué, cela mettrait fin à une collaboration qui doit être harmonieuse et souhaitable entre les provinces et le gouvernement fédéral.

    Ce qu'on viendrait malheureusement faire avec cette loi, c'est de nous assurer que le fédéral arrive avec une loi sur les refuges fauniques, comme il l'a fait avec le projet de loi C-5 sur les espèces menacées.

    Vous comprenez donc qu'il est difficile pour nous de souscrire non pas au concept de refuges fauniques, mais à l'objectif de la loi.

    De plus, je rappelle qu'en juin 2000, le Québec adoptait les principes et les orientations stratégiques en vue de créer sur son territoire un réseau d'aires protégées. Le Québec s'est donné comme objectif que 8 p. 100 de la superficie totale de son territoire puisse être désignée d'ici 2005 comme une aire protégée.

    Bien sûr, cela peut être un type de milieu autre qu'un refuge faunique. Il faut, à mon avis, adapter les désignations aux types de milieu auxquels on s'adresse. Toutefois, l'objectif est là. D'ici 2005, 8 p. 100 du territoire québécois devra être désigné comme étant une aire protégée.

    Je ne peux non plus qu'être en désaccord, particulièrement en ce qui a trait au paragraphe 6(1) du projet de loi de mon collègue, qui dit ce qui suit:

    

    Sur réception d'un rapport du COSEPAC qui fait état de la nécessité de créer un refuge pour assurer la protection et le rétablissement d'une espèce en voie de disparition et qui désigne les terres provinciales qui serviraient d'habitat convenable à celle-ci, le ministre peut conclure un accord avec la province qui est propriétaire des terres en vue d'y créer un refuge propre à assurer un habitat favorable au rétablissement de l'espèce au Canada.

    Il ajoute, au paragraphe 6(2), et c'est là où le bât blesse:

    

    Si le ministre ne parvient pas à conclure l'accord visé au paragraphe (1), le gouverneur en conseil peut, sur recommandation de ce dernier, déclarer que la création d'un refuge sur les terres provinciales est essentielle au rétablissement de l'espèce en voie de disparition et que le refuge constitue un ouvrage à l'avantage général du Canada, et ordonner à cette fin l'expropriation des terres ou des droits sur celles-ci ou leur assujettissement à une clause restrictive.

    Donc, par ce projet de loi, le gouvernement fédéral viendrait désigner une terre en territoire québécois, désigner un refuge faunique fédéral, alors que le Québec a son propre système et sa propre stratégie d'aires protégées.

    Ainsi, on ne peut qu'être en désaccord avec un projet de loi qui vient à l'encontre de la décision du gouvernement du Québec, qui a été prise il y a quelques années, à l'effet de ne pas signer l'accord d'harmonisation environnemental. Pourquoi le Québec a-t-il refusé de signer cet accord? C'est parce qu'on croyait que la législation fédérale viendrait carrément empiéter sur des lois québécoises et dédoubler celles-ci.

    Bien que l'approche privilégiée ici et la volonté de créer des refuges fauniques au Canada soient louables—et je ne rejette pas le principe même et le concept de refuges fauniques—, je crois qu'on doit être flexibles et viser une plus grande collaboration avec le gouvernement fédéral parce que c'est vers là qu'on peut en venir à une véritable protection des espèces. Mais pour en venir à une véritable protection, il faut d'abord protéger son habitat.

  +-(1800)  

[Traduction]

+-

    M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, pour commencer, je tiens à remercier mon collègue, le député d'Esquimalt—Juan de Fuca, qui habite dans l'une des plus belles régions du Canada, après la Nouvelle-Écosse bien sûr. Je remercie également le député et ses collaborateurs d'avoir préparé ce qui me semble être un projet de loi mûrement réfléchi. Ses intentions sont honorables, et les principes préconisés s'imposent.

    Il est assez paradoxal d'entendre le gouvernement soutenir qu'il n'a pas besoin de ce projet de loi et que tout va très bien. Il mène la vie de château, et tout ira très bien. Il prétend que les mesures législatives, le personnel, les ressources et l'argent sont là. Nous n'avons donc pas à nous inquiéter des espèces qui partagent la planète et notre pays avec nous. Le gouvernement libéral a l'impression d'avoir tout bien en main. Quelle sottise. Rien ne saurait être plus faux.

    Juste au large de la Nouvelle-Écosse, la morue, le saumon, le requin, la raie et un certain nombre d'autres espèces marines sont au bord de l'extinction. Pourtant, les libéraux prétendent que tout va bien, qu'ils maîtrisent la situation et qu'il n'y a pas lieu de s'inquiéter. Ce gouvernement a réduit les budgets affectés à l'environnement année après année. Il considère le COSEPAC comme un ennemi plutôt qu'un ami.

    Mon collègue du Bloc québécois dit que ses collègues ne peuvent appuyer le projet de loi parce qu'il risque d'empiéter sur les compétences des provinces. Les espèces en péril ne pigent rien aux compétences provinciales, surtout les espèces migratoires qui franchissent les frontières. Elles ne se soucient pas de ce que pensent les hommes et femmes politiques. Elles ont besoin d'endroits où se reposer, où se reproduire, où grandir et prospérer. J'appuie le projet de loi de tout coeur.

    S'il y a dans le projet de loi des éléments que le gouvernement et des députés de l'opposition ne peuvent approuver, acceptons qu'il fasse l'objet d'un vote. Qu'on renvoie le projet de loi au comité, qu'on entame un débat avec les Canadiens, qu'on remanie ou amende le projet de loi pour le rendre plus acceptable à tous. Il est exaspérant qu'un projet de loi comme celui-ci ne puisse faire l'objet d'un vote. Il y a déjà eu des projets de loi semblables sur lesquels nous n'avons pu voter, et il m'a semblé que c'était une perte de temps. Le député a parfaitement raison de soulever un problème comme celui-ci.

    Nous devons laisser un héritage aux enfants de nos enfants. Nous devons savoir que nos petits-enfants profiteront également des espèces que nous connaissons aujourd'hui. Nous ne pouvons le faire que si nous préservons l'habitat qui permettra à ces espèces de survivre. Peu importe s'il s'agit d'une petite plante du Québec, d'un arbre de la Colombie-Britannique ou d'un animal des Prairies. Nous devons préserver l'intégrité de ces espèces pour les générations à venir. J'estime que ce projet de loi répondrait à bon nombre de ces préoccupations.

    Un aspect qui a été négligé jusqu'ici, c'est la collaboration de nos autochtones. Les connaissances ancestrales que les autochtones peuvent apporter à ces discussions sont stupéfiantes. Ces peuples vivent de la terre depuis des milliers d'années. Ils ont assisté aux changements climatiques. Ils ont été témoins des changements dans les espèces migratoires. Ils ont vu les effets et les répercussions éventuelles de l'industrialisation ou de la pollution sur leurs terres. Nous devons les inviter à ces discussions. Je sais que le député n'y verrait pas d'inconvénient.

    Le plus important, c'est de mettre ce projet de loi aux voix, de sorte que les préoccupations qu'a abordées le secrétaire parlementaire puissent être débattues plus longuement en comité, comme il se doit. On ne peut pas tout simplement le rejeter du revers de la main et dire qu'il n'est pas acceptable, que tout est sous contrôle. Ce n'est pas ainsi qu'un débat a lieu.

    Un débat a lieu lorsque les gens discutent avec une ouverture d'esprit, expriment les opinions et les réflexions d'autres personnes, en tiennent compte et les font progresser pour tenter d'arriver à un compromis. Lorsque nous débattons une question à 17 h 30 à la Chambre des communes, et que notre décision est déjà prise, cela est bien triste et malheureux.

    Le gouvernement présente toujours des projets de loi. Nous les scrutons et tentons de les améliorer parce que nous avons le droit de le faire. Lorsque l'opposition présente un projet de loi et que nous considérons que c'est une bonne idée, qu'elle a du mérite ou offre des possibilités, nous encourageons le gouvernement à l'examiner pour déterminer si nous pourrions l'incorporer à une loi actuelle pour l'améliorer. On ne peut pas tout simplement se présenter à la Chambre et l'écraser comme une mouche.

  +-(1805)  

    Ce type de chose exaspère les députés de l'opposition ainsi que les députés d'arrière-ban lorsqu'ils ont une idée comme celle-ci, surtout lorsqu'elle touche notre environnement.

    Notre collègue a tout à fait raison. Si nous ne faisons pas une chose de cette nature, que disons-nous à nos enfants? Que disons-nous aux pages dans cette enceinte qui seront les dirigeants de demain? Que disons-nous aux Canadiens? Nous leur disons que lorsqu'il s'agit des espèces en voie de disparition, nous allons nous contenter de belles paroles, mais nous n'aurons pas de plan d'action. À l'heure actuelle, la législation gouvernementale ne fonctionne tout simplement pas.

    Je vais vous donner un exemple. Il y a juste à l'extérieur de ma circonscription une merveilleuse région appelée le refuge de gibier de Liscombe. Lorsque je suis arrivé en Nouvelle-Écosse, je pensais que c'était une aire de nature sauvage protégée contre la chasse ou l'industrialisation afin que les animaux et les espèces de toutes sortes puissent y vivre sans aucun problème. Or, lorsque je me suis rendu là, je me suis aperçu qu'on y coupait des arbres et maintenant, une superficie de près de 65 p. 100 a fait l'objet d'une exploitation forestière. Lorsque nous nous adressons au ministère des Ressources naturelles de la province, les fonctionnaires nous disent qu'ils sont responsables des animaux et non de leur habitat.

    Si c'est le genre d'attitude et de remarque désinvolte d'un fonctionnaire de la Nouvelle-Écosse, imaginez ce qui se passe dans tout le pays, lorsqu'il est question de s'occuper de pollution, de réchauffement de la planète et du manque de coordination.

    Le Fonds mondial pour la nature a fait campagne il y a des années pour protéger 12 p. 100 des terres dans tout le pays, du Yukon à Terre-Neuve, de Victoria à Halifax. Il s'agissait d'avoir un couloir du nord au sud et de l'est à l'ouest pour que les animaux qui ont besoin de grandes superficies, comme les loups, les grizzlis et le reste puissent avoir des aires de repos reliées entre elles où ils pouvaient survivre et se développer. C'était il y a des années et nous n'en sommes pas encore là.

    Un large pourcentage de notre pays n'est pas encore protégé. Voyez nos parcs. Ils sont menacés. On constate un manque de financement pour nos parcs. On peut espérer que dans le prochain budget, nous verrons quelque chose à cet égard. Cependant, ce n'est qu'un aspect de la question.

    L'intégrité écologique est un élément essentiel. Nous en avons besoin pour protéger les espèces en voie de disparition. Si nous avons cela, nous pourrons alors peut-être laisser quelque chose aux générations futures.

    Le projet de loi C-232 est un bon point de départ. Il faut féliciter le député, et non lui reprocher, d'en avoir saisi la Chambre. Personne ne lui a adressé de reproches, mais on s'est attaqué à son projet de loi en le rejetant ni plus ni moins. Sauf votre respect, je pense que ni les députés du Bloc et ni les députés libéraux ne l'ont lu. Le Parti libéral a l'habitude de préparer un genre de texte standard, et les députés n'ont qu'à le lire. Cela se fait couramment. Or, s'ils avaient écouté ce que le député a dit, ils auraient fort probablement compris quel objectif il vise.

    Je sais que le député comprend certaines des préoccupations. Comme ministériel, cependant, il se peut qu'il doive se soumettre à la discipline de parti. Voilà le problème, et cela me fruste. Les députés ministériels devraient intervenir à titre de simples députés, et non à titre de députés ministériels, lorsqu'ils prennent la parole au sujet d'initiatives parlementaires. Ils devraient laisser parler leur coeur et s'efforcer de comprendre l'objet du débat et ce que le député qui a présenté le projet de loi cherche à accomplir. Ainsi, la qualité des débats et le décorum à la Chambre s'en trouveraient améliorés et, en prime, je pense que nous arriverions à faire avancer les dossiers.

    Nous ne siégerons pas ici éternellement. Quand nos petits-enfants ou nos nièces ou neveux nous demanderont ce que nous avons fait à la Chambre des communes, j'espère que les députés aimeraient pouvoir mentionner au moins une chose qu'ils ont été fiers d'accomplir.

    Je sais que le député aimerait laisser sa marque grâce au projet de loi C-232. Je l'appuie entièrement dans ses efforts visant à faire adopter ce genre de mesure pour qu'on puisse assurer la protection des espaces et des espèces en danger, dans l'immédiat comme à l'avenir.

  +-(1810)  

+-

    M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Monsieur le Président, le dernier orateur a demandé ce que nous dirons à nos enfants lorsqu'ils nous demanderons ce que nous faisions ici. Je leur parlerai d'une réalisation dont je sais que je serai fier. Je leur parlerai d'une île, de cette île dont il est précisément question dans ce projet de loi. D'une part, le gouvernement devrait appuyer le projet de loi, à mon avis. D'autre part, le gouvernement a réalisé de belles choses dans ma circonscription.

    La baie de Fundy abrite une île de 2,5 km de longueur sur environ un kilomètre de largeur à une dizaine de kilomètres des côtes. Lorsque le brouillard se lève sur la baie, l'île prend un air absolument majestueux. Elle a conservé son état virginal. Elle est telle qu'elle était il y a 10 000 ans avec ses falaises de 300 pieds de hauteur. Ses environs sont fréquentés par des phoques, des oiseaux, des baleines et des marsouins. Toutes sortes d'histoires ciculent au sujet de son passé, notamment qu'elle a été un lieu de cérémonie pour les autochtones.

    Il y a quelques années, la revue Canadian Geographic a publié un article qui disait que cette île était à vendre. Propriété du gouvernement canadien, elle servait uniquement de base pour un phare. Le phare a été détruit par un incendie en 1957 et, depuis, l'île est demeurée une plate-forme vide. La Garde côtière a été propriétaire de l'île jusqu'à ce qu'elle la cède au Pêches, au moment de son départ. Je ne pouvais croire que, du jour au lendemain, l'île soit à vendre, mais la Garde côtière l'avait jugée excédentaire.

    J'ai communiqué avec le ministre de l'Environnement, et nous avons eu de longues discussions à ce sujet. Un jour, il s'est rendu là-bas en avion pour voir l'île. Il a reconnu qu'il s'agissait d'un endroit incroyablement majestueux. Sur le côté sud-est de l'île se trouve une haute falaise qui a la forme d'un amphithéâtre. Elle est parfaitement verticale. Le pépiement des oiseaux qui volent à proximité est tellement bruyant qu'il est à peine supportable. Les phoques, eux, sortent la tête de l'eau un peu partout en se demandant ce qui se passe. Je me rends à l'île tous les ans. Elle est inhabitée et son environnement est tout à fait virginal.

    Le ministre de l'Environnement a accepté d'en faire un refuge faunique. La propriété de l'île devait tout d'abord être cédée au ministère de l'Environnement, et je crois que le processus est actuellement en cours. La dernière étape consistera à désigner l'île refuge faunique.

    

  +-(1815)  

    

    Plus tard, lorsqu'un de mes enfants me demandera ce que j'ai fait ici, ce sera l'une des réalisations dont je serai le plus fier de leur parler. La chose n'aurait cependant pas été possible si l'île n'avait pas appartenu au gouvernement du Canada. Si elle n'avait pas été déclarée excédentaire, la propriété n'aurait pu en être transférée. Si l'île avait été une propriété privée, cela ne se serait jamais produit. Mais parce qu'elle appartenait au gouvernement canadien, elle a pu être transformée en refuge faunique.

    Mon plaidoyer sur l'île Haute illustre l'importance de ce type d'exercice, qui est en partie justifié par la présence d'espèces en voie de disparition. On ne compte que dix aires de nidification du faucon pèlerin dans l'ensemble des provinces maritimes, et l'île en compte une. Plusieurs espèces de rongeurs menacées vivent également dans l'île, ainsi que de nombreuses espèces florales et fauniques menacées. C'est l'une des raisons pour lesquelles le projet de refuge faunique a reçu un appui total.

    Le ministre et le secrétaire parlementaire ont travaillé activement sur ce dossier, et je les remercie de leur attitude et de leur coopération. J'ai hâte au jour où nous pourrons annoncer que c'est une réserve naturelle, et j'espère que ce jour-là n'est pas trop éloigné.

    Je partage le point de vue du député au sujet de la question de la protection de l'habitat de la faune. L'île est protégée parce qu'elle est l'habitat d'espèces en péril. Toutefois, c'est bien plus que cela. C'est un trésor. Sans cet habitat, elle n'aurait sans doute pas été préservée. Elle aurait probablement été vendue au plus offrant aux États-Unis, en Allemagne ou ailleurs et n'aurait sans doute plus jamais été foulée par la population de la région, par les touristes ou quiconque voudrait observer un coin de la Nouvelle-Écosse resté dans son état naturel. C'est une zone absolument vierge et parfaite.

    Je félicite le député de sa motion. Si elle pouvait faire l'objet d'un vote, nous voterions oui. Il y a bien quelques petites choses que nous modifierions, mais comme le député qui vient de parler l'a dit, nous pourrions arranger tout cela. Le projet de loi pourrait être renvoyé à un comité où nous pourrions en débattre et y apporter quelques modifications. Peut-être que grâce à lui, nous pourrions protéger d'autres précieux habitats comme celui de l'île Haute et d'autres endroits particuliers.

+-

    M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je remercie tous les députés qui ont participé à ce débat, et tout particulièrement mes amis du Parti progressiste-conservateur et du NPD de leurs observations.

    

  +-(1820)  

    

    Tout cela se résume en fin de compte à la protection des espèces en péril qui, comme l'a souligné mon collègue du NPD, ne connaissent pas de frontières. Le faucon pèlerin, les autres types d'oiseaux, les gros et les petits mammifères et même les plantes ne reconnaissent ni ne comprennent les frontières établies par les hommes.

    Notre pays est aux prises avec un méli-mélo de problèmes de partage des compétences qui nuisent à la protection de l'habitat essentiel. Le projet de loi C-232 permettrait de relâcher ce noeud gordien et aiderait à faire ce qu'il faut pour la protection des espèces en péril au Canada et ce, pour toujours.

    Mon collègue du Parti progressiste-conservateur a donné l'exemple de l'île Haute. L'île Haute est un bon exemple de ce que le gouvernement peut faire, et il a fait ce qu'il fallait dans ce cas. Il a réussi à protéger ce coin de terre parce qu'il relevait de la compétence du gouvernement fédéral. Ce n'est malheureusement pas le cas de la plupart des terres où l'habitat essentiel doit être protégé au pays et qui appartiennent à plusieurs intérêts, dont les provinces et des intérêts privés.

    C'est là où je veux en venir et c'est également l'essentiel du projet de loi. Ce projet de loi établit que la protection de l'habitat essentiel, cet habitat devant servir à la protection des espèces en péril, ne doit pas être assujettie à des problèmes de partage des compétences.

    Mon collègue, le député ministériel, a dit que le ministre allait préserver des parties d'habitat essentiel. Je crois que le ministre ne devrait pas être le seul à avoir la compétence de faire cela. Les ministres vont et viennent. Les gouvernements vont et viennent, mais les habitats essentiels restent. La désignation des habitats essentiels ne peut pas se faire au gré des caprices d'un gouvernement ou d'un parti politique. Elle doit reposer sur des données purement scientifiques.

    Le problème est grave. De 7 000 à 8 000 espèces sont aujourd'hui en péril au Canada. Leur nombre croît de façon géométrique. La principale raison en est la perte de l'habitat essentiel.

    Je le répète, il doit découler de cela une collaboration entre les écologistes, les expansionnistes et le gouvernement. Ils peuvent et doivent collaborer parce qu'ils ne l'ont jamais fait. Les promoteurs se concentrent sur les questions économiques. Les décideurs et les gouvernements cherchent à restreindre la croissance. Les écologistes s'en tiennent au coût et aux conséquences de la croissance pour la nature et l'environnement.

    Il n'y a pas vraiment eu de débat. Les trois groupes poursuivent le même but chacun de son côté et cela, aux dépens de notre habitat et de notre avenir. Bref, le programme public que nous avons ne peut pas être entièrement abandonné à des institutions publiques. Les possibilités de conservation ne peuvent pas être limitées par le système interétatique. Les organisations de la société civile en général contribueront davantage à un avenir durable si elles se concertent davantage.

    Le projet de loi ne fera pas l'objet d'un vote. Le Canada est le seul pays au monde où on laisse les représentants élus présenter des projets de loi, mais où l'on décide que ces mesures ne feront pas l'objet d'un vote et seront parfaitement inutiles. Je demande donc le consentement unanime de la Chambre pour que le projet de loi C-232 fasse l'objet d'un vote et, partant, puisse être renvoyé au comité où nous tous, députés de tous les partis, pourrons en faire une évaluation intelligente, le décortiquer et l'améliorer dans l'intérêt de tous les Canadiens.

+-

    Le vice-président: Le député d'Esquimalt—Juan de Fuca a-t-il le consentement de la Chambre pour demander que le projet de loi fasse l'objet d'un vote?

    

  +-(1825)  

    

    Des voix: D'accord.

    Des voix: Non.

    Le vice-président: Le temps prévu pour l'étude des initiatives parlementaires est maintenant expiré. La motion n'ayant pas été retenue pour faire l'objet d'un vote, l'article est rayé du Feuilleton.

-MOTION D'AJOURNEMENT

[Ajournement]

*   *   *

    L'ajournement de la Chambre est proposé d'office.

*   *   *

[Traduction]

+-L'environnement

+-

    M. Philip Mayfield (Cariboo—Chilcotin, Alliance canadienne): Monsieur le Président, vendredi dernier, j'ai interrogé le ministre de l'Environnement au sujet de cette grave question de l'attribution du code rouge à une harde de caribous du Nord dans les monts Itcha Ilgachuz, dans la partie ouest de ma circonscription.

    Cette harde robuste et florissante a été associée avec la harde en péril de la chaîne Cariboo, présente dans la partie est de ma circonscription, près du Parc provincial de Wells Grey, et cela, même si 500 kilomètres et le majestueux fleuve Fraser séparent les deux régions et s'il n'existe aucune migration croisée entre les deux espèces de caribous.

    Le problème ici, ce n'est pas la santé du caribou des monts Itcha Ilgachuz, mais la taille de l'écoprovince établie par le gouvernement fédéral, qui englobe des hardes viables et des hardes menacées, créant ainsi deux problèmes différents.

    Le premier problème est celui de l'interruption du projet de transfert de caribous des monts Itcha Ilgachuz pour former et fortifier des petites hardes dans l'est des Kootenays. Le deuxième problème est que, en raison du code rouge donné à la harde, les guides et les pourvoyeurs doivent penser à rembourser les clients qui ont déjà laissé un dépôt pour des expéditions de chasse l'automne prochain, avant l'attribution de ce code.

    En octobre 2002, une lettre du ministère britanno-colombien responsable de l'eau, des terres et de l'air et signée par Nancy Wilkins a été envoyée à Environnement Canada, à l'attention de Karen Brown; dans cette lettre, on demandait que les caribous nordiques des monts Itcha Ilgachuz soient exclus de la liste des espèces assorties d'un code rouge. Des fonctionnaires de la Colombie-Britannique me disent qu'en dépit de demandes répétées, ils n'ont pas encore reçu de réponse à cette lettre.

    Le gouvernement fédéral a décidé que le troupeau des monts Itcha Ilgachuz ne peut être chassé cette année, même s'il se porte bien et qu'il augmente. La chasse l'an prochain semble aussi douteuse. Cela aura des répercussions sociales et culturelles catastrophiques sur la région. Un électeur de ma circonscription qui a écrit au ministre de l'Environnement relativement à ce problème et m'a fait parvenir copie de sa lettre résume assez bien la situation:

    Certaines entreprises existent depuis 50 ans, et ce sont ces gens-là qui se sont occupés de la population de caribous pour faire en sorte que leurs clients ne rentrent pas bredouilles de la chasse. Certains de leurs clients ont réservé leur prochaine expédition de chasse des années à l'avance. Les guides dont les territoires se situent dans cette région doivent maintenant leur rembourser tout l'argent ainsi versé.

    Ce n'est pas une mince considération, notamment dans une région accablée par un taux de chômage dans les deux chiffres. De nombreuses associations de chasse ont écrit au ministre au sujet de cette situation, mais n'ont reçu à ce jour aucune réponse. À l'issue de plusieurs années de travail, des biologistes spécialistes de la faune locale ont établi une différence entre les troupeaux. Le gouvernement fédéral prétend qu'il faut soumettre une demande d'exemption, mais sauf le respect que je vous dois, cette exemption a été demandée, mais la demande est restée sans réponse.

    Je voudrais obtenir une réponse aux questions suivantes: Pourquoi la lettre de demande d'exemption du gouvernement de la Colombie-Britannique est-elle restée sans réponse? Pourquoi le troupeau de caribous de l'ouest qui est assorti d'un code bleu et qui se porte bien est-il placé dans le même groupe que le troupeau assorti d'un code rouge, pourquoi est-il classé dans l'écoprovince sud et pourquoi est-il inclus dans la liste des espèces menacées par le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada, alors que le code bleu dans la liste de la Colombie-Britannique est ainsi défini:

    Code bleu: Comprend toute espèce ou sous-espèce indigène considérée comme préoccupante en Colombie-Britannique... sans être une espèce ou une sous-espèce disparue, en voie de disparition ou menacée.

+-

    M. Alan Tonks (secrétaire parlementaire du ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais avant toutes choses remercier le député de Cariboo—Chilcotin pour avoir soulevé la question à la Chambre. Pour répondre aux deux questions, il serait utile de savoir en quoi consiste le projet de loi sur les espèces en péril, ou encore, et c'est le plus important, quelles seront les modalités de sa mise en oeuvre.

    Le projet de loi sur les espèces en péril préconise la mise en place d'un programme d'intendance modèle qui favorisera une coopération progressive entre les autorités provinciales, territoriales et fédérales en vue de protéger les espèces en péril. Il est fait appel à la mesure chaque fois que l'on recense une espèce en péril. Pour mener l'action la plus objective qui soit, il incombe à toutes les parties prenantes, les provinces, les territoires et le gouvernement fédéral, de prendre conseil auprès d'un organisme indépendant appelé le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada, le COSEPAC. Ce comité indépendant examine l'aspect scientifique de la question et décide s'il y a effectivement lieu de protéger l'espèce concernée.

    Dans le cas d'aujourd'hui, le député a parfaitement raison. Le caribou de montagne est présumé en péril et le gouvernement fédéral compte se prévaloir des pouvoirs que lui confère la loi pour y remédier.

    Cependant, le gouvernement fédéral agit à titre de filet de sécurité de dernier recours, lorsque le programme de rétablissement ou de réhabilitation du gouvernement provincial ou territorial n'est pas mis en oeuvre ou ne suffit pas, selon le COSEPAC et le gouvernement fédéral, pour assurer la protection de l'espèce. Dans la mesure où tout cela est nouveau, il est intéressant pour moi, et pour tous les députés je l'espère, de bien comprendre comment cette loi sera mise en application.

    

  +-(1830)  

    

    En ce qui concerne les deux questions du député, premièrement, j'ai bien assuré à mon collègue qu'on répondrait dans un très proche avenir à la correspondance de la province demandant une exemption. Deuxièmement, pour ce qui est de la classification des hardes de caribous, comme je l'ai indiqué, le COSEPAC est un organisme indépendant qui analyse les données scientifiques et fait des recommandations. C'est à partir de ces recommandations que la harde de caribous en cause a été dotée du code rouge.

    Je comprends les préoccupations du député et je continuerai à suivre ce dossier de très près.

+-

    M. Philip Mayfield: Monsieur le Président, je sais gré au secrétaire parlementaire de ses observations. Il est paradoxal que le modèle d'intendance dont il parle soit précisément celui qui a été adopté à l'égard des caribous dans l'ouest des chaînons Itcha-Ilgachuz.

    Même si j'ai demandé au ministre d'étudier sérieusement la demande de la Colombie-Britannique et d'y accéder, il est intéressant de noter que cette harde est en santé et qu'elle grossit. On estime qu'il y aurait entre 2 800 et 3 400 caribous répartis dans 15 hardes.

    Autre fait intéressant, ces bêtes ne semblent pas touchées par la maladie; le prédateur naturel du caribou est le loup. J'ai pu constater sur place comment les plans de coupe de bois ont été modifiés de façon à assurer la protection des caribous contre chasseurs et loups en faisant en sorte qu'ils ne soient pas trop faciles à repérer pendant qu'ils mangent. Il est également intéressant que le modèle d'intendance prévoie que les routes qui sont ouvertes pour le transport du bois soient fermées dès la coupe terminée, si bien qu'on n'a accès à la forêt qu'à pied ou à cheval.

    Je prie le ministre de s'intéresser sérieusement au dossier et je remercie le secrétaire parlementaire de son intervention.

+-

    M. Alan Tonks: Monsieur le Président, je voudrais simplement souligner un dernier point. En vertu de l'Accord pancanadien sur la protection des espèces en péril, les responsabilités sont évidemment réparties en fonction des compétences et, en ce sens, on peut parler de partenariat.

    Le député a mentionné certaines exceptions relativement à la harde qui se trouve séparée des autres hardes. Je ferais simplement remarquer que, même si la question relève pour le moment des autorités provinciales et que le mécanisme en vertu duquel le fédéral est appelé à intervenir n'a pas encore été mis en branle, nous continuons néanmoins à collaborer avec le gouvernement provincial et à l'encourager de notre mieux pour en arriver à la meilleure solution possible.

*   *   *

[Français]

-Le bois d'oeuvre

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    Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Neigette-et-la Mitis, BQ): Monsieur le Président, je suis vraiment heureuse de me lever ce soir et d'essayer d'échanger un peu avec la secrétaire parlementaire.

    

  +-(1835)  

    

    Après 10 ans dans cette Chambre, je suis toujours un peu déçue de constater que bien qu'on essaie tous et toutes d'améliorer la situation de nos compatriotes, quand on pose des questions, cela devient de plus en plus une enceinte théâtrale où chacun essaie de tirer le meilleur qu'il peut du «show», sans avoir aucun souci de répondre vraiment aux problèmes soulevés par nos questions.

    Je m'intéresse particulièrement à la question du bois d'oeuvre. Je considère que le gouvernement, qui savait depuis très longtemps que l'échéance arrivait le 31 mars 2002, n'a pas pris les moyens pour en arriver à faire respecter le libre-échange qu'on a signé avec les États-Unis.

    En conclusion, les États-Unis nous ont imposé une taxe de 27 p. 100 qui nous crée des ennuis et qui crée des ennuis à l'ensemble des travailleurs et des travailleuses qui sont impliqués dans ce domaine.

    Au Bloc québécois, nous avons entrepris une tournée des principales régions du Québec pour aller voir de visu quels étaient au juste les problèmes auxquels étaient confrontés ces personnes. Il faudrait qu'on en arrive à reconnaître, une fois pour toutes, qu'il y a certaines industries qui sont saisonnières. C'est leur lot. Elles ne peuvent pas penser faire autrement qu'être saisonnières. Donc, chaque année, il y a des travailleurs et des travailleuses liés à ces industries qui se trouvent à être victimes du travail saisonnier.

    Il y a eu la réforme de l'assurance-emploi. Encore la semaine dernière, la ministre me disait: «On a réformé l'assurance-emploi. Maintenant, chaque heure est comptabilisée, et ainsi de suite.» Elle oublie une chose, soit le fameux diviseur du nombre de semaines. Il ne s'agit pas seulement des heures, mais les semaines aussi sont comptabilisées.

    Nous avons des gens qui travaillent un certain temps et qui, chaque année, se retrouvent au chômage à la même période de l'année, ou à peu près. Compte tenu du nombre d'heures qu'ils ont travaillé, ils ont tant de semaines de prestation. Mais ils ont aussi ce qu'on appelle le fameux trou noir qui peut s'échelonner de cinq à 10 semaines durant lesquelles ils n'ont aucun revenu.

    Si on arrivait à reconnaître qu'il y a vraiment un problème avec le trou noir et le travail saisonnier, on arriverait à trouver une solution qui permettrait que ces travailleurs n'aient pas à faire face à la même difficulté d'année en année.

    En revoyant les territoires, on a fait en sorte, dans certains endroits, d'encourager la fraude. Si vous restez dans le village «X» qui est juste à côté du village «Y», vous n'êtes pas sur le même territoire. L'un a 420 heures, l'autre a 565 heures. Donc, vous donnez une adresse sur le territoire de 420 heures parce que vous travaillez pour le même employeur.

    Il y a vraiment une réforme qui a été faite, mais il faudrait faire la réforme de la réforme. Si le gouvernement était sérieux et prenait à coeur les intérêts de la population, c'est ce qu'il ferait.

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    Mme Diane St-Jacques (secrétaire parlementaire de la ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais remercier la député de Rimouski--Neigette-et-la Mitis de sa question, ce qui me permet de réitérer que le gouvernement est préoccupé par le sort de ces travailleurs.

    C'est pourquoi il a promis un soutien financier de plus de 246 millions de dollars, afin d'aider les collectivités, les entreprises et les travailleurs touchés par le conflit du bois d'oeuvre. Ce montant vient naturellement s'ajouter aux prestations d'assurance-d'emploi qui s'élèvent à 450 millions de dollars qui sont versées chaque année aux chômeurs de l'industrie forestière.

    Les mesures annoncées garantissent que les travailleurs possèdent les compétences dont ils ont besoin pour trouver un emploi et le garder, que ce soit dans une industrie du bois d'oeuvre renouvelée ou dans un autre secteur de l'économie.

    Ces initiatives tiennent compte du fait que les travailleurs des régions où le taux de chômage est élevé se heurtent à des obstacles uniques à la réintégration du marché du travail.

    Les régions où le taux de chômage se chiffre à au moins 10 p. 100 seront admissibles à ces programmes. En orientant les mesures d'aide prévues par le régime d'assurance-emploi vers les régions où le taux de chômage est élevé, le gouvernement s'assure que l'aide parvient aux travailleurs et aux collectivités qui en ont le plus besoin.

    Ces initiatives viennent s'ajouter aux mesures déjà en vigueur dans le cadre du régime d'assurance-emploi qui offre aux travailleurs mis à pied des prestations d'emploi et l'accès à des mesures actives d'aide à l'emploi. Le régime d'assurance-emploi vient en aide aux personnes quand elles en ont besoin, y compris celles qui risquent de perdre leur emploi ou qui ont été mises à pied à la suite du conflit dans l'industrie du bois d'oeuvre.

    Qui plus est, nous investissons également deux milliards de dollars, soit 600 millions de dollars dans la province de Québec, afin d'aider les Canadiens à trouver un emploi et à le garder. Cette somme permet au gouvernement provincial d'offrir des subventions salariales ciblées, ainsi que d'appuyer le travail autonome et le perfectionnement des compétences.

    Toutefois, l'assurance-emploi n'est pas la seule solution pour les travailleurs saisonniers.

    La création de nouveaux emplois est la solution véritable au chômage, et nous continuons de collaborer avec des intervenants clés pour étudier les possibilités d'accroître les débouchés.

    Dans le cadre de l'Initiative des projets pilote pour les travailleurs âgés, nous octroyons plus de 11 millions de dollars dans le but de mettre à l'essai des approches novatrices pour aider les travailleurs âgés du Québec à trouver un emploi et à le garder.

    Nous sommes là pour les Canadiens et nous continuerons d'être là pour eux.

+-

    Mme Suzanne Tremblay: Monsieur le Président, je suis presque tentée de dire: «Ce message commercial a été retenu et payé par le ministère des Ressources naturelles.»

    

  -(1840)  

    

    Cela n'a pas de bon sens de répondre des choses comme cela à un problème très sérieux. On nous radote toujours qu'on a investi 240 millions de dollars pour les travailleurs du bois d'oeuvre. C'est faux. On a investi 40 millions pour la bebite en Colombie-Britannique. On a investi 20 millions de dollars pour un centre de recherche à Trois-Rivière, et on a investi le reste pour venir en aide aux travailleurs qui, partout au Canada, avaient des problèmes de chômage—pas seulement ceux du bois d'oeuvre, mais bien n'importe quels travailleurs qui étaient en chômage.

    Ce n'est pas vrai de dire qu'on a un programme ciblé pour les travailleurs du bois d'oeuvre. C'est absolument faux. On est allé sur le terrain. On n'y a pas vu d'argent. Je voudrais bien que les gens de Baie-Trinité entendent le discours de Mme la députée de Shefford. Je voudrais bien qu'ils entendent son discours. Cela fait un an qu'ils ont perdu leur job à cause de l'incurie du gouvernement qui n'a pas réglé le problème du bois d'oeuvre.

    Maintenant, elle vient nous dire qu'on a quelque chose pour les aider? C'est faux. Il n'y a rien pour aider les travailleurs de Baie-Trinité. Il vont devenir prestataires d'aide sociale bientôt, parce qu'ils sont au bout de leurs ressources en termes de chômage. L'usine n'a rien pour reprendre son travail.

    On ne peut pas considérer que c'est vraiment un programme ciblé pour les gens qui souffrent du problème du conflit du bois d'oeuvre entre le Canada et les États-Unis.

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    Mme Diane St-Jacques: Monsieur le Président, j'aimerais répondre à la députée de Rimouski—Neigette-et-la Mitis en lui disant que ses affirmations sont fausses. Je répète encore que le gouvernement du Canada est préoccupé par le sort de ces travailleurs.

    Elle sait bien qu'on a investi 246 millions de dollars pour venir en aide aux travailleurs touchés par ce différend. Il y a toujours 450 millions de dollars en prestations d'assurance-emploi qui sont versées aux travailleurs de l'industrie forestière. De plus plus 600 millions sont versés à Québec dans le cadre d'une entente sur le développement du marché du travail, qui met en oeuvre des mesures actives qui aident les gens à trouver un emploi et à le conserver.

    Le gouvernement fédéral a versé plus de deux millions de dollars en contributions à la province de Québec pour des projets d'innovation réalisés dans les régions du Bas-Saint-Laurent, la Côte-Nord, de Charlevoix et du Saguenay--Lac-Saint-Jean.

    Entre autres, au Saguenay--Lac-Saint-Jean, par exemple, on a investi plus de un million de dollars pour prolonger la saison touristique. Cela a permis à plus de 120 travailleurs de travailler un peu plus longtemps.

    Je veux assurer cette Chambre que le gouvernement fédéral continuera encore de travailler avec tous les intervenants, afin de trouver des solutions à ces problèmes d'emploi.

-

    Le vice-président: La motion portant que la Chambre s'ajourne maintenant est réputée adoptée. La Chambre demeure donc ajournée jusqu'à demain, à 10 heures, conformément à l'article 24(1) du Règlement.

    (La séance est levée à 18 h 45.)