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AGRI Rapport du Comité

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Marchés intérieur et d’exportation pour le bœuf et les bovins du Canada (1987-2002)

Depuis la fin des années 1980, le secteur canadien du bœuf et des bovins est passé à près de 7,7 milliards de dollars en ventes annuelles. Cette expansion résulte avant tout des exportations aux États-Unis, favorisées par des politiques de libre-échange (grâce à la mise en œuvre de l’ALE et de l’ALENA) et le déclin de la valeur d’échange de la devise canadienne. Par ailleurs, la consommation nationale de produits du bœuf est demeurée stable ou a diminué pendant la période (voir le graphique 1.1).

Graphique 1.1
Consommation de viande par personne au Canada
1970-2002

Graphique 1.1 Consommation de viande par personne au Canada 1970-2002

Source : Canfax et le George Morris Centre


En effet, les exportations totales de bœuf et de bovins se sont chiffrées à 4 milliards de dollars en 2002, ce qui équivaut à 11 millions de dollars par jour (voir le graphique 1.2). Ces exportations se composent de 1,8 milliard de dollars en bovins et en veaux et de 2,2 milliards de dollars en produits du bœuf. Le Canada a exporté environ 60 % de sa production nationale en 2002, les États-Unis ayant compté pour 80 % de ses exportations de bœuf et pour près de 100 % de ses exportations de bovins sur pied.

Graphique 1.2
Exportations canadiennes de bœuf et de bovins — 1982-2003

Graphique 1.2 Exportations canadiennes de bœuf et de bovins — 1982-2003

Source : Canfax, et le George Morris Centre

Le marché de l’exportation a connu une croissance phénoménale depuis la fin des années 1980. Au début, la valeur des exportations canadiennes de bœuf et de bovins ne dépassait guère la barre des 500 millions de dollars. Dans les 15 années suivant la mise en œuvre de l’ALE, en 1988, elles ont augmenté de huit fois, ce qui équivaut à un taux de croissance composé de 16,3 % par an. L’ALE a de toute évidence été le principal moteur de ce rendement supérieur, mais le déclin du huard par rapport au dollar américain — il est passé de 85 ¢US en 1990 à 64 ¢US en 2002, soit une baisse d’environ 25 % sur la période — a également joué un rôle prépondérant.

Les marchés du bœuf et des bovins après l’ESB

Le secteur canadien du bœuf et des bovins battait des records de demande en 2003. Toutefois, le marché des exportations, qui avait entamé l’année en force, a commencé à montrer des signes de faiblesse à la fin de mars et au début d’avril, sous l’effet peut-être de la hausse du dollar canadien. Les choses sont allées de mal en pis le 20 mai 2003, date où l’on a découvert un cas unique d’ESB en Alberta. Suivant l’annonce de cette découverte, le monde industrialisé a immédiatement fermé ses frontières aux bovins et aux produits du bœuf d’origine canadienne. Les exportations de bœuf se sont alors pratiquement interrompues en juin, juillet et août, avant de remonter graduellement la pente en septembre et octobre, une fois levé l’embargo américain sur les coupes de bœuf désossé provenant de vaches âgées au maximum de 30 mois. En novembre 2003, le niveau des exportations de bœuf ressemblait à celui d’avant la crise (voir le graphique 1.3), ce qui est un peu étonnant étant donné l’appréciation de 20 % du dollar canadien par rapport au dollar américain durant cette période. Cette performance supérieure des exportations ne peut être attribuée qu’à l’avantage comparatif conféré aux abattoirs canadiens sur les abattoirs américains par la baisse du prix des bovins canadiens nécessaire pour éponger l’offre excédentaire créée par l’embargo américain sur le bœuf canadien. Néanmoins, en raison des pertes de ventes encourues pendant l’été, les exportations de produits du bœuf en 2003 ont été de beaucoup inférieures à celles de 2002. En fait, de janvier à novembre de l’an passé, les exploitants canadiens ont exporté pour 1,3 milliard de dollars de produits du bœuf, une baisse de 36 % par rapport aux 2 milliards engendrés au cours de la même période de 11 mois en 2002.

Graphique 1.3
Exportations canadiennes de produits du bœuf — 2002-2003

Graphique 1.3 Exportations canadiennes de produits du bœuf — 2002-2003

 

 Source : Statistique Canada, La maladie de la vache folle et le commerce du bœuf : une mise à jour, catalogue no 11-621-MIF-010, p. 2


Graphique 1.4
Exportations canadiennes de bovins — 1984-2003

Graphique 1.4 Exportations canadiennes de bovins — 1984-2003

Source : Canfax et le George Morris Centre

Malheureusement, les exportations de bovins demeurent assujetties à l’embargo des États-Unis. C’est pourquoi les 512 353 bovins canadiens vendus avant le 20 mai 2003 représenteront l’ensemble des exportations de l’année, ce qui équivaut, sur une base annuelle, à une baisse d’au moins 70 % par rapport à 2002. Alors que l’année semblait si prometteuse, les recettes totales des exportations pour 2003 font état du pire rendement jamais enregistré en 15 ans.

Prix du bétail (2002-2004)

Le prix des bovins sur pied est établi au moyen d’enchères ouvertes ou d’enchères scellées. Les compagnies de vente aux enchères sont indépendantes de ceux qui vendent et achètent des bovins à leurs enchères et reçoivent, en échange de leurs efforts, un pourcentage du produit des ventes. D’après les données de Canfax, au cours des neuf premières semaines de 2004, les bovins d’engraissement de l’Alberta (600 à 700 livres) se sont vendus en moyenne 83,22 $/q (les cent livres). Au cours de la même période en 2003, ils se vendaient en moyenne 126,33 $/q, mais leur prix moyen pour l’année s’est établi à 119,77 $/q. C’est donc dire que le prix des bovins d’engraissement de l’Alberta, après la découverte d’un cas d’ESB, a diminué d’environ 34 % par comparaison à un an plus tôt. Pour les éleveurs albertains, le prix a baissé de 758 $ le bovin d’engraissement de 600 livres au début de 2003 à 499 $ au début de 2004.

Graphique 1.5
Prix hebdomadaires des bouvillons finis – 2002-2004

Graphique 1.5 Prix hebdomadaires des bouvillons finis – 2002-2004

Source : Canfax, tableaux statistiques, et le George Morris Centre

Toujours d’après les données de Canfax et comme le montre le graphique 1.5, les prix payés en 2002 pour les bovins engraissés de l’Alberta ont varié entre 90,25 $ et 114,22 $/q. Le prix moyen pour 2002 a été de 98,82 $/q. Si on multiplie ce prix par le poids d’abattage moyen de 1 300 livres, on constate qu’un bovin engraissé est allé chercher, en moyenne, 1 284 $ en 2002. Entre le 1er janvier et le 20 mai 2003, le prix des bovins engraissés de l’Alberta a varié entre 105,08 $ et 117,52 $/q pour s’établir en moyenne à 111,38 $/q, ce qui donne un prix moyen de 1 448 $. Donc, le marché des bovins était en plein essor à en juger par les prix versés aux parcs d’engraissement avant la crise de l’ESB. Entre le 20 mai et la fin de 2003, le prix des bovins engraissés de l’Alberta a varié entre 35,06 $ et 89,36 $/q et s’est établi à 65,96 $/q en moyenne, d’où un prix moyen de 857 $ par tête de bétail. Résultat, dans la foulée de l’ESB, les exploitants de parc d’engraissement de l’Alberta ont enregistré une baisse du prix du bovin de 33 % par rapport à 2002 et de 40 % par rapport au début de l’année 2003.

Les données de Canfax indiquent que le prix des vaches laitières de l’Alberta (D1 et D2) était encourageant avant la crise de l’ESB, puisqu’il était passé en moyenne de 57,04 $/q en 2002 à 58,49 $/q pour les cinq premiers mois de 2003, ce qui représente une augmentation de 2,5 % (ou de 6 % par année). Or, le prix enregistré en 2003 après l’ESB a été en moyenne de 21,71 $/q, soit une baisse de 63 % par rapport aux cinq premiers mois de 2003.

Même s’ils se situent encore bien en deçà des prix payés avant l’ESB, les prix des bovins se sont quelque peu rétablis en 2004. Le prix moyen payé pour les bovins engraissés de l’Alberta a été de 82,29 $/q au cours des deux premiers mois de 2004, ce qui représente une augmentation de 25 % par rapport au prix moyen de 2003, après l’ESB. Le prix moyen payé pour les vaches laitières de l’Alberta (D1 et D2) au cours des deux premiers mois de 2004 a été de 23,72 $/q, ce qui représente une augmentation de 9,3 % par comparaison au prix moyen de 2003, après l’ESB.

Prix de gros du bœuf (2002-2004)

Le prix de gros des différentes coupes de bœuf — que reçoivent les abattoirs et les transformateurs de second cycle — varie énormément d’une coupe ou d’un produit à l’autre. Le prix des différentes coupes de boeuf ne donne toutefois qu’un très mince aperçu des revenus des abattoirs et de la valeur reçue. Avant le déclenchement de la crise de l’ESB, une vache de boucherie de 1 387 livres donnait environ 625 livres de viande consommable, 580 livres de sous-produits (cuir, abats, farine d’os, etc.) et 182 livres de déchets1. Après la découverte de l’ESB au Canada, les changements en faveur de la sécurité apportés aux pratiques de transformation conjugués à l’embargo international sur les produits canadiens du boeuf ont entraîné une baisse du ratio moyen de déchets par vache de boucherie. En outre, étant donné que le prix des différentes coupes de boeuf peut en tout temps fluctuer dans des directions opposées, une trop grande concentration sur ce prix peut être trompeuse (et le sera vraisemblablement) en l’absence de certaines données sur le rendement boucher. Un prix composite, ou une valeur qui englobe toutes les coupes de boeuf, pondérée en fonction de leur rendement, et les sous-produits peut donner une bien meilleure idée de la situation.

À cette fin, le George Morris Centre a construit un modèle composite de la valeur de gros des produits du boeuf. Le modèle fournit une valeur «  bouchère  » ou rendement à l’abattage (voir le graphique 1.6), c’est-à-dire la valeur totale, au niveau de l’abattoir/du gros, des coupes et produits différents provenant d’une carcasse de boeuf. On la calcule en combinant la valeur ou le prix de chaque coupe de boeuf, pondérée en fonction du rendement type des différentes coupes primaires (c’est-à-dire cuisse, longe, bloc d’épaule et côte). La combinaison du prix des coupes et de leur rendement correspond à la valeur bouchère du boeuf. Le rendement est fondé sur les spécifications canadiennes de coupe types ou normalisées. Le prix des coupes est fondé sur l’information provenant de l’industrie du boeuf et sur les listes de prix des abattoirs. Les prix sont recueillis dans l’ensemble du Canada et la valeur bouchère calculée sur la base du sud de l’Alberta.

Le graphique 1.6 montre la valeur moyenne reçue par les abattoirs pour la découpe de boeuf de catégorie AAA de la première semaine de 2002 à la huitième semaine de 2004. Le graphique indique que les abattoirs s’en sont mieux tirés en 2003, jusqu’à la découverte de l’ESB le 20 mai, qu’en 2002. La valeur bouchère du bœuf de catégorie AAA a fluctué entre 180 $ et 215 $/q au cours de la première partie de 2003. Elle a cependant diminué au cours des mois de l’été 2003 pour se stabiliser à 140 $/q, ce qui représente une baisse de 27 % par rapport à la tendance précédente de 190 $/q. À l’automne 2003, la valeur bouchère du boeuf de catégorie AAA sur le marché de gros était revenue aux niveaux de 2002, soit environ 190 $/q, mais la valeur reçue par les abattoirs a diminué une fois de plus au cours des deux premiers mois de 2004.

Graphique 1.6
Valeurs hebdomadaires du rendement à l’abattage au Canada
Cat. AAA — 600-750 lbs

Graphique 1.6 Valeurs hebdomadaires du rendement à l’abattage au Canada Cat. AAA — 600-750 lbs

Source : George Morris Centre, Le rapport sur le commerce du bœuf en boîtes carton

Prix de détail du boeuf (2002-2004)

Les prix de détail des produits du boeuf ont plus ou moins suivi la tendance des prix de gros tout au long de 2003 et jusqu’à maintenant en 2004. Même si les fluctuations des prix de gros du filet, du contrefilet et du haut de surlonge ont été plus légères que celles des prix des bovins tout au long de 2003, les fluctuations des prix de détail l’ont été encore plus. Comme le montre le graphique 1.7, les prix de détail des produits du bœuf ont baissé de 14 % entre mai et septembre 2003, mais affichent une tendance à la hausse depuis. En septembre 2003, les prix du bœuf étaient à leur plus bas niveau depuis janvier 2001.

Graphique 1.7
Indice des prix de détail des produits du boeuf au Canada — 2002-2004

Graphique 1.7 Indice des prix de détail des produits du boeuf au Canada — 2002-2004

 

Source : Statistique Canada, La maladie de la vache folle et le commerce du bœuf : une mise à jour, catalogue 11-621-MIF-010, p. 6

Écart entre le prix de détail, le prix de gros et le prix à la production

La différence entre les prix que reçoivent l’abattoir et l’éleveur correspond à l’écart entre le prix de gros et le prix à la production. Cet écart reflète généralement les coûts unitaires pour l’abattoir de l’habillage, du désossage, de la freinte, des pertes à la coupe, de l’emballage et du transport et constitue, à plus long terme, une marge de profit en dédommagement des risques. La différence entre les prix que reçoivent le détaillant et l’abattoir correspond à l’écart entre les prix de détail et de gros. Cet écart reflète généralement les coûts unitaires pour le détaillant de l’habillage, du désossage, de l’emballage, du transport, des frais généraux du magasin, de la freinte et des pertes à la coupe et constitue, à plus long terme, une marge de profit en dédommagement des risques. À court terme, cependant, rien ne garantit un profit ni aux abattoirs ni aux détaillants, et ces écarts de prix peuvent entraîner des profits ou des pertes.

Comme il est indiqué ci-dessus, les prix de détail ont légèrement diminué depuis le début de la crise de l’ESB. Les prix de gros, représentés par les valeurs bouchères composites du boeuf de catégorie AAA, ont diminué de 27 % dans la foulée immédiate de la crise de l’ESB, mais se sont rétablis depuis. Le prix des bovins engraissés de l’Alberta a diminué d’environ 40 % au cours de l’été 2003, mais il a enregistré une hausse d’environ 20 % depuis. Ces données laissent entrevoir une augmentation de l’écart entre les prix de détail et les prix de gros et entre les prix de gros et les prix à la production. Le premier tableau du graphique 1.8 confirme ces deux tendances. L’écart entre le prix de gros et le prix à la production est passé d’environ 70 $/q en janvier 1999 à plus de 100 $/q en décembre 2003, alors que l’écart entre le prix de détail et le prix de gros est passé d’environ 220 $/q à plus de 320 $/q au cours de la même période.

Graphique 1.8

Fourchettes de prix de gros et détail
pour les bouvillons finis vivants
Prix des bouvillons finis par
rapport aux prix de détail

Graphique 1.8 Fourchettes de prix de gros et détail pour les bouvillons finis vivants/Prix des bouvillons finis par rapport aux prix de détail

Source :     Canfax et le George Morris Centre

Le deuxième graphique montre une diminution du prix à la ferme des bovins en tant que pourcentage du prix de détail du boeuf — une simple conséquence mathématique de l’augmentation des écarts entre les prix mentionnés ci-dessus. Le prix des bœufs engraissés de l’Alberta, qui représentait 25 % du prix de détail du boeuf en janvier 1999, ne représentait plus que 15 % de ce prix en décembre 2003. Au plus haut point de la crise de l’ESB, le prix des bovins engraissés a chuté à 7 % du prix de détail. Cependant, même si les deux graphiques mettent en lumière la situation critique des éleveurs par comparaison aux abattoirs et aux détaillants depuis le déclenchement de la crise de l’ESB — et confirment ce que de nombreux Canadiens pensaient — le deuxième graphique montre également que la tendance s’était amorcée il y a plus de quatre ans déjà — bien avant même la découverte d’un cas unique d’ESB au Canada.


1Gouvernement de l’Alberta, Agriculture, Food and Rural Development, Backgrounder — How the cattle and beef industry works, http://www.gov.ab.ca/acn/200403/16064.html