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37e LÉGISLATURE, 3e SESSION
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 023
TABLE DES MATIÈRES
Le mercredi 10 mars 2004
1400 |
Le Président |
1405 |
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS |
Ernest George Cottreau |
L'hon. Robert Thibault (Ouest Nova, Lib.) |
Les Forces canadiennes |
Mme Elsie Wayne (Saint John, PCC) |
La Journée internationale de la femme |
Mme Sophia Leung (Vancouver Kingsway, Lib.) |
Le prix d'action humanitaire des Yorktown Family Services |
Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.) |
1410 |
Le développement international |
L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.) |
Le projet de centrale électrique Sumas 2 |
M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, PCC) |
RAI International |
L'hon Yvon Charbonneau (Anjou—Rivière-des-Prairies, Lib.) |
Atkins et Frères |
M. Jean-Yves Roy (Matapédia—Matane, BQ) |
La station de télévision CKCO |
L'hon. Andrew Telegdi (Kitchener—Waterloo, Lib.) |
1415 |
Le centre de ressources pour l'emploi de Pictou |
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PCC) |
La situation de la femme |
L'hon. Gurbax Malhi (Bramalea—Gore—Malton—Springdale, Lib.) |
Le Canadien National |
L'hon. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD) |
Le hockey |
Mme Caroline St-Hilaire (Longueuil, BQ) |
La réussite scolaire |
Mme Diane St-Jacques (Shefford, Lib.) |
1420 |
Les courses de rue |
M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, PCC) |
QUESTIONS ORALES |
Le programme de commandites |
L'hon. Grant Hill (chef de l'opposition, PCC) |
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.) |
L'hon. Grant Hill (chef de l'opposition, PCC) |
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.) |
L'hon. Grant Hill (chef de l'opposition, PCC) |
L'hon. Reg Alcock (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.) |
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PCC) |
1425 |
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.) |
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PCC) |
Le Président |
M. Peter MacKay |
Le Président |
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.) |
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ) |
Le Président |
L'hon. Stephen Owen (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ) |
1430 |
L'hon. Stephen Owen (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ) |
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.) |
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ) |
L'hon. Stephen Owen (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
L'hon. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD) |
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.) |
La fonction publique |
L'hon. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD) |
Le programme de commandites |
M. Leon Benoit (Lakeland, PCC) |
1435 |
L'hon. Stephen Owen (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
Le Président |
M. Leon Benoit (Lakeland, PCC) |
L'hon. Stephen Owen (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, PCC) |
L'hon. Stephen Owen (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, PCC) |
L'hon. Stephen Owen (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
Le bois d'oeuvre |
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ) |
1440 |
L'hon. John Harvard (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.) |
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ) |
L'hon. John Harvard (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.) |
Le Canadien National |
Mme Monique Guay (Laurentides, BQ) |
L'hon. Joseph Volpe (ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, Lib.) |
Mme Monique Guay (Laurentides, BQ) |
L'hon. Joseph Volpe (ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, Lib.) |
La défense nationale |
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, PCC) |
L'hon. David Pratt (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, PCC) |
1445 |
L'hon. David Pratt (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, PCC) |
L'hon. David Pratt (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, PCC) |
L'hon. David Pratt (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
Le transport en commun |
M. Christian Jobin (Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, Lib.) |
L'hon. Tony Valeri (ministre des Transports, Lib.) |
Le Président |
La fiscalité |
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD) |
L'hon. John McKay (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.) |
1450 |
La péréquation |
L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD) |
L'hon. John McKay (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.) |
Le programme de commandites |
M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, PCC) |
L'hon. Stephen Owen (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
Le Président |
L'hon. Stephen Owen |
Le Président |
M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, PCC) |
L'hon. Stephen Owen (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
Le premier ministre |
M. Monte Solberg (Medicine Hat, PCC) |
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.) |
1455 |
M. Monte Solberg (Medicine Hat, PCC) |
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.) |
Le Président |
Le très hon. Paul Martin |
L'immigration |
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ) |
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.) |
Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ) |
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.) |
Le bois d'oeuvre |
M. Andy Burton (Skeena, PCC) |
L'hon. Rey Pagtakhan (ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.) |
M. Andy Burton (Skeena, PCC) |
L'hon. Rey Pagtakhan (ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.) |
1500 |
L'Agence canadienne de développement international |
L'hon. Elinor Caplan (Thornhill, Lib.) |
L'hon. Aileen Carroll (ministre de la Coopération internationale, Lib.) |
Le Président |
L'industrie |
M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster, PCC) |
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.) |
M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster, PCC) |
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.) |
Le programme des commandites |
M. Odina Desrochers (Lotbinière—L'Érable, BQ) |
L'hon. Stan Keyes (ministre du Revenu national et ministre d'État (Sport), Lib.) |
La situation de la femme |
Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.) |
L'hon. Jean Augustine (ministre d'État (Multiculturalisme et Situation de la femme), Lib.) |
1505 |
La santé |
Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC) |
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre de la Santé, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre responsable des langues officielles, Lib.) |
Les travaux de la Chambre |
Le Président |
Privilège |
Le Budget principal des dépenses |
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PCC) |
1510 |
1515 |
Le Président |
L'hon. Reg Alcock (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.) |
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PCC) |
Le Président |
M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, PCC) |
1520 |
Le Président |
Recours au Règlement |
Nominations par décret |
Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC) |
1525 |
L'hon. Jacques Saada (leader du gouvernement à la Chambre des communes et ministre responsable de la réforme démocratique, Lib.) |
Le très hon. Joe Clark |
Le Président |
L'hon. Jacques Saada |
Le Président |
AFFAIRES COURANTES |
Les langues officielles |
L'hon. Hélène Scherrer (ministre du Patrimoine canadien, Lib.) |
1530 |
La Loi sur la gestion financière et statistique des premières nations |
L'hon. Andy Mitchell (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.) |
Adoptions des motions; première lecture et impression du projet de loi |
Le Président |
Deuxième lecture du projet de loi; étude en comité; rapport |
PÉTITIONS |
Les affaires étrangères |
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ) |
Le mariage |
M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, PCC) |
La justice |
L'hon. Brenda Chamberlain (Guelph—Wellington, Lib.) |
Le mariage |
M. Darrel Stinson (Okanagan—Shuswap, PCC) |
M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.) |
1535 |
M. Kevin Sorenson (Crowfoot, PCC) |
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD) |
L'étiquetage des boissons alcoolisées |
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD) |
Le mariage |
M. Reed Elley (Nanaimo—Cowichan, PCC) |
M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, PCC) |
M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD) |
M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, PCC) |
Les radiobalises de détresse |
M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, PCC) |
Les parcs nationaux |
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, PCC) |
1540 |
L'agriculture |
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, PCC) |
Le mariage |
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, PCC) |
Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD) |
M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, PCC) |
M. Scott Reid (Lanark—Carleton, PCC) |
Mme Paddy Torsney |
Le Président |
Les délégations interparlementaires |
Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.) |
Questions au Feuilleton |
L'hon. Joe Jordan (secrétaire parlementaire du président du Conseil du Trésor, Lib.) |
Le Président |
Demandes de documents |
L'hon. Joe Jordan (secrétaire parlementaire du président du Conseil du Trésor, Lib.) |
Le Président |
1545 |
INITIATIVES PARLEMENTAIRES |
Le peuple acadien |
Le Président |
1555 |
(Division 22) |
Le Président |
M. Réginald Bélair |
Le Président |
Les pêches |
M. Tom Wappel (Scarborough-Sud-Ouest, Lib.) |
1600 |
1605 |
M. Andy Burton (Skeena, PCC) |
1610 |
1615 |
M. Roy Cullen |
1620 |
Le vice-président |
AFFAIRES COURANTES |
Les comités de la Chambre |
Finances |
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.) |
Le vice-président |
Initiatives parlementaires |
Les pêches |
Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Neigette-et-la Mitis, BQ) |
1625 |
1630 |
M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD) |
1635 |
1640 |
L'hon. Scott Brison (secrétaire parlementaire du premier ministre (Canada-États-Unis), Lib.) |
1645 |
M. Norman Doyle (St. John's-Est, PCC) |
1650 |
Le vice-président |
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PCC) |
1655 |
Le vice-président |
1700 |
Initiatives ministérielles |
Haïti |
Étude de l'initiative ministérielle no 4 par la Chambre, en comité plénier, sous la présidence de M. Kilger |
L'hon. Bill Graham |
1705 |
1710 |
Le président |
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, PCC) |
L'hon. Bill Graham |
Le président |
1715 |
Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ) |
L'hon. Bill Graham |
M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD) |
L'hon. Bill Graham |
1720 |
M. Jay Hill |
L'hon. Bill Graham |
M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, PCC) |
1725 |
1730 |
L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.) |
M. Stockwell Day |
1735 |
M. Stockwell Day |
1740 |
Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ) |
M. Stockwell Day |
Le président |
Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ) |
1745 |
1750 |
Le vice-président |
1755 |
Mme Francine Lalonde |
1800 |
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, PCC) |
Mme Francine Lalonde |
M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD) |
1805 |
1810 |
1815 |
M. Joe Comartin |
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, PCC) |
M. Joe Comartin |
M. Jay Hill |
1820 |
M. Joe Comartin |
L'hon. Denis Coderre |
M. Joe Comartin |
Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ) |
Le vice-président-adjoint (M. Réginald Bélair, Lib.) |
M. Joe Comartin |
1825 |
L'hon. David Pratt (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
1830 |
M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ) |
1835 |
L'hon. David Pratt |
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, PCC) |
L'hon. David Pratt |
1840 |
Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC) |
1845 |
1850 |
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.) |
Le très hon. Joe Clark |
1855 |
Le très hon. Joe Clark |
Mme Elsie Wayne (Saint John, PCC) |
1900 |
1905 |
L'hon. David Kilgour (Edmonton-Sud-Est, Lib.) |
1910 |
1915 |
M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD) |
L'hon. David Kilgour |
M. Svend Robinson |
1920 |
L'hon. David Kilgour |
M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ) |
1925 |
1930 |
L'hon. Scott Brison (secrétaire parlementaire du premier ministre (Canada-États-Unis), Lib.) |
1935 |
M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD) |
1940 |
L'hon. Scott Brison |
1945 |
M. Svend Robinson |
L'hon. Scott Brison |
M. Svend Robinson |
L'hon. Scott Brison |
1950 |
M. Bob Mills (Red Deer, PCC) |
1955 |
2000 |
M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD) |
M. Bob Mills |
M. Svend Robinson |
2005 |
M. Bob Mills |
M. Svend Robinson |
M. Bob Mills |
2010 |
M. Robert Lanctôt (Châteauguay, Lib.) |
2015 |
2020 |
M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD) |
2025 |
2030 |
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.) |
2035 |
M. Leon Benoit (Lakeland, PCC) |
2040 |
2045 |
L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.) |
2050 |
M. Leon Benoit |
L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.) |
M. Leon Benoit |
L'hon. Larry Bagnell |
2055 |
M. Leon Benoit |
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ) |
2100 |
2105 |
L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.) |
Le président |
L'hon. Bill Graham |
2110 |
M. Réal Ménard |
L'hon. Jean Augustine (ministre d'État (Multiculturalisme et Situation de la femme), Lib.) |
2115 |
2120 |
L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.) |
L'hon. Jean Augustine |
2125 |
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, PCC) |
2130 |
2135 |
L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.) |
2140 |
2145 |
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, PCC) |
L'hon. Larry Bagnell |
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.) |
2150 |
L'hon. Larry Bagnell |
M. Jay Hill |
2155 |
L'hon. Larry Bagnell |
L'hon. Aileen Carroll (ministre de la Coopération internationale, Lib.) |
L'hon. Larry Bagnell |
Le président |
Le vice-président |
CANADA
Débats de la Chambre des communes |
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COMPTE RENDU OFFICIEL (HANSARD)
Le mercredi 10 mars 2004
Présidence de l'honorable Peter Milliken
La séance est ouverte à 14 heures.
Prière
[Article 31 du Règlement]
* * *
[Traduction]
Le Président: Comme nous avons l'habitude de le faire le mercredi, nous allons maintenant chanter Ô Canada, qui sera entonné par la députée de Saint John.
[Note de la rédaction: Les députés chantent l'hymne national.]
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
[Article 31 du Règlement]
* * *
[Traduction]
Ernest George Cottreau
L'hon. Robert Thibault (Ouest Nova, Lib.): Monsieur le Président, le 7 mars, la circonscription de Ouest Nova et le Canada ont perdu un père de famille, un concitoyen et un parlementaire fort respecté.
Natif de Wedgeport, en Nouvelle-Écosse, Ernest George Cottreau a mené une brillante carrière en éducation, en affaires et en politique.
Parmi ses nombreuses réalisations, M. Cottreau a été propriétaire-exploitant de la société Baker Motors, directeur de l'école régionale de Sainte-Anne-du-Ruisseau et membre actif de la collectivité de Yarmouth pendant de nombreuses années.
Militant libéral de longue date, M. Cottreau s'est vivement intéressé à la politique et s'est énormément dévoué, tant à l'échelon local que provincial, siégeant à divers comités et participant à de nombreuses associations.
En 1974, Ernest Cottreau était nommé au Sénat du Canada où il a gagné le respect de ses collègues de tous les partis.
C'est avec admiration que nous nous rappelons de la vie et des réalisations de ce grand Canadien. Adieu, sénateur Cottreau.
* * *
Les Forces canadiennes
Mme Elsie Wayne (Saint John, PCC): Monsieur le Président, plus tôt cette semaine, l'ombudsman des Forces canadiennes a fait savoir que le gouvernement avait insisté pour que dix soldats remboursent près de 30 000 $ qui leur avaient été versés à titre d'indemnités de repas.
Nous apprenons maintenant que le ministère de la Défense nationale a été la cible d'une arnaque de 90 millions de dollars, reposant sur des factures fictives. Une enquête est présentement en cours, mais certaines sources laissent entendre que le ministère de la Défense nationale a versé cet argent au titre d'un contrat d'informatique, pour des biens et services qu'il n'a jamais reçus.
Cette arnaque de 90 millions de dollars représente une perte presque équivalente aux 100 millions de dollars engloutis dans le scandale des commandites mis au jour par la vérificatrice générale.
Comment est-il possible que le gouvernement fasse le grippe-sous en ce qui concerne des indemnités de repas versées à des soldats, mais qu'il n'arrive pas à retracer le détail de services informatiques totalisant 90 millions de dollars? Comment une somme de 90 millions de dollars peut-elle s'évaporer dans un trou noir, alors que notre secteur militaire tire le diable par la queue?
Comment ce gouvernement peut-il justifier le fait qu'il se montre intraitable à l'égard de ses soldats pour récupérer 30 000 $, mais qu'il ne semble pas en mesure d'obtenir les 90 millions de dollars versés à des entrepreneurs qui n'ont rien fourni au ministère de la Défense nationale?
* * *
La Journée internationale de la femme
Mme Sophia Leung (Vancouver Kingsway, Lib.): Monsieur le Président, le 8 mars dernier, les Canadiennes et les Canadiens ont célébré la Journée internationale de la femme. Cette journée a été instituée par les Nations Unies en 1977 pour reconnaître les réalisations des femmes.
Le thème choisi cette année par le gouvernement du Canada est: «C'est elle qui m'inspire». Le gouvernement encourage la population à participer aux activités qui se dérouleront pendant une semaine entière pour célébrer le leadership des femmes, de Vancouver à St. John's. Cette semaine importante offre aux Canadiens l'occasion de reconnaître les réalisations des femmes et leur leadership partout au pays.
Nous avons toutefois appris, dans un récent rapport publié par le Conseil canadien de développement social, que 10,5 p. 100 des immigrantes des minorités visibles ont subi de mauvais traitements d'ordre affectif ou financier au Canada. Souvent, ces victimes ne bénéficient d'aucun soutien personnel ou social dans leur nouveau pays.
* * *
Le prix d'action humanitaire des Yorktown Family Services
Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour rendre hommage à Charlie Coffey qui a reçu le prix d'action humanitaire des Yorktown Family Services le 2 mars 2004 à Toronto. Ce prix reconnaît et souligne le dévouement et les contributions exceptionnelles à l'amélioration de la vie des gens de la communauté.
Charlie Coffey, qui est responsable des relations avec les gouvernements et des affaires communautaires à RBC Groupe Financier, a fait de la question communautaire une priorité durant sa carrière. Il aime particulièrement interagir avec les jeunes, les entrepreneurs et les peuples autochtones.
Il occupe notamment les fonctions de co-président de la commission Early Learning and Child Care de la ville de Toronto, de co-président des Champions, de gouverneur du Canadian Council to Promote Equality and Respect et de vice-président du Conseil national de développement économique des Autochtones.
Dans le passé, Charlie a été nommé chef honoraire en reconnaissance de son soutien aux premières nations. Par ailleurs, on lui a décerné un prix, soit le Canadian Women's International Business Initiative Award.
J'invite donc tous les députés à se joindre à moi pour féliciter M. Coffey.
* * *
[Français]
Le développement international
L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.): Monsieur le Président, hier, le secrétaire général des Nations Unies, Son Excellence Monsieur Kofi Annan, prononçait un discours devant ce Parlement dans lequel il nous rappelait la part importante qu'a joué le Canada et que joue toujours notre pays au sein de l'ONU.
Il nous a rappelé les objectifs du millénaire voulant réduire la pauvreté considérablement par l'an 2015, ainsi que le NPDA, initiative canadienne adoptée au sommet du G-8 de Kananaskis. Nous devons toutefois, disait-il, accélérer le pas dans le domaine du développement international. Il donnait comme exemple le besoin de venir en aide davantage aux pays les plus pauvres, notamment Haïti.
En ma qualité de président de la section canadienne du Forum interparlementaire des Amériques, FIPA, je m'associe pleinement aux commentaires du secrétaire général en voulant que le Canada, déjà sur la bonne voie, accompagne davantage le peuple haïtien dans ces moments des plus difficiles.
* * *
[Traduction]
Le projet de centrale électrique Sumas 2
M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, PCC): Monsieur le Président, les habitants de la vallée du Fraser en Colombie-Britannique ont remporté une victoire la semaine dernière. L'Office national de l'énergie a annoncé qu'il n'autoriserait pas l'installation des lignes d'énergie électrique requises pour la centrale Sumas 2 qu'on propose de construire juste au sud de la frontière canadienne.
À titre d'intervenant contre la centrale de Sumas Energy 2 Inc., j'ai reçu l'opinion de milliers d'électeurs de ma circonscription qui s'opposent à ce projet qui déverserait 2,5 tonnes de polluants par jour dans le bassin d'air déjà surchargé de la vallée du Fraser.
Malgré des années et des années de demandes de la part du public, d'interventions personnelles et de questions posées à la Chambre, le ministre de l'Environnement ne comprend pas encore à quel point la centrale de SE2 serait dévastatrice pour les habitants de la vallée du Fraser. Il n'a rien fait pour s'opposer aux plans de SE2. En fait, les gens de SE2 ont utilisé ses observations pour appuyer leur projet de centrale polluante.
Grâce à mes collègues conservateurs et aux milliers de Britanno-Colombiens qui ont lutté contre cette implantation depuis des années, nous avons remporté la bataille en faveur de l'air pur dans la vallée du Fraser.
* * *
[Français]
RAI International
L'hon Yvon Charbonneau (Anjou—Rivière-des-Prairies, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais refléter les attentes de la communauté italophone de mon comté et de plusieurs autres régions du Québec, qui regroupe une population d'environ 250 000 personnes, face à l'accès à la télévision italienne, communément appelée RAI International.
Cette télévision est accessible dans toutes les régions du monde, mais non au Canada, en raison d'une entente avec une société de Toronto appelée Telelatino qui a, semble-t-il, des droits de diffuser quelques heures de la programmation de RAI International. La communauté italophone est furieuse, avec raison, de cette situation qui est présentement à l'étude devant le CRTC.
Dans le cadre du processus de consultation du CRTC, cette demande a reçu plus de 344 commentaires favorables. Les présentations en faveur de RAI International incluent entre autres une campagne de lettres et une pétition monstre contenant plus de 100 000 signatures.
J'espère que le bon sens prévaudra dans cette affaire. J'appuie totalement, comme c'est le cas depuis plusieurs mois, cette demande légitime de la communauté italophone.
* * *
Atkins et Frères
M. Jean-Yves Roy (Matapédia—Matane, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais rendre hommage à une entreprise de ma région, Atkins et Frères, qui a récemment remporté le prix national Renaud-Cyr, dans la catégorie Artisan.
Le Renaud-Cyr est attribué à une entreprise ayant grandement contribué au rayonnement de la culture gastronomique québécoise. Ce prix a été remporté dans le cadre du Mérite national de la restauration et de l'alimentation, l'un des cinq grands événements du bioalimentaire québécois.
Atkins et Frères, une entreprise de Mont-Louis, renommée pour ses produits de la mer et pour sa fumaison traditionnelle, se veut une référence dans le positionnement de la Gaspésie et du Bas-Saint-Laurent dans l'échiquier gastronomique et alimentaire national.
Ce prix nous démontre que la région Gaspésie—Bas-Saint-Laurent est dotée d'une richesse gastronomique abondante qui a avantage à être connue.
Je tiens donc à féliciter Atkins et Frères pour son prix et pour sa contribution à la découverte des richesses de notre région.
* * *
[Traduction]
La station de télévision CKCO
L'hon. Andrew Telegdi (Kitchener—Waterloo, Lib.): Monsieur le Président, en ma qualité de député de Kitchener—Waterloo, je suis très heureux de souligner le 50e anniversaire de la station CKCO, notre station locale du réseau CTV.
Véritable pionnier de la télévision canadienne, CKCO a diffusé des émissions pour la première fois le 1er mars 1954. C'était la troisième station de télévision privée à diffuser au Canada. À l'époque, il n'y avait que 3 000 téléviseurs environ pour les 65 000 habitants de Kitchener—Waterloo.
Depuis ces premiers jours assez mouvementés de programmation en direct, CKCO a grandi. Cette station joue maintenant un rôle déterminant sur la scène de l'information et du divertissement au sein de notre collectivité.
CKCO procure à la région de Waterloo de l'information à jour sur les sports, les services et les événements culturels, religieux et communautaires. C'est le noyau médiatique local pour tout ce qui est important et pertinent dans nos vies.
Je félicite donc CKCO à l'occasion de ce cinquantième anniversaire et je lui offre mes meilleurs voeux.
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Le centre de ressources pour l'emploi de Pictou
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PCC): Monsieur le Président, je demande au gouvernement fédéral de reconsidérer sa décision de permettre la fermeture du centre de ressources pour l'emploi de Pictou à la fin du mois.
C'est une grave erreur de jugement que de fermer le centre de ressources pour l'emploi de Pictou, une ressource critique qui aide les électeurs à trouver un emploi bien rémunéré.
Ces services sont retirés à une région qui s'est placée parmi les 39 premiers centres pour les affaires au Canada. Et pourtant, les travailleurs de la circonscription de Pictou sont privés de services qui pourraient les aider à profiter de cet environnement d'affaires dynamique.
Les services et les ressources offerts par le centre sont d'une grande importance car ils encouragent les gens à être proactifs dans leurs démarches de recherche d'emploi et favorisent le développement d'une économie dynamique dans la région.
Le centre offre une large gamme de services de préparation à l'emploi: aide à la rédaction d'un curriculum vitae et d'une lettre de présentation; stratégies efficaces pour les entrevues d'emploi; et utilisation de l'ordinateur et des banques d'emploi en ligne.
Les priver de ces ressources et du personnel indispensable qui en assure la prestation est un dur coup porté au développement de l'économie et des compétences dans le comté de Pictou.
Le centre de ressources pour l'emploi devrait rester ouvert. Je demande au ministre des Ressources humaines de revoir et d'annuler ces plans de fermeture.
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La situation de la femme
L'hon. Gurbax Malhi (Bramalea—Gore—Malton—Springdale, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement du Canada a entrepris de nombreuses initiatives au cours des dernières années pour s'occuper des aspects sociaux, économiques et médicaux de la femme en tant que personne, travailleuse rémunérée et parent, ce qui démontre son engagement en matière d'égalité des sexes.
Sur le plan économique, en 2004, le gouvernement du Canada a porté à 9 milliards de dollars son investissement en prestations fiscales pour enfants. Dans le domaine de la santé, il a lancé la stratégie pour la santé des femmes de Santé Canada. Pour faire face aux problèmes reliés à la violence, le gouvernement a engagé 32 millions de dollars par année dans une initiative nationale de prévention du crime et 7 millions de dollars par année à l'Initiative de lutte contre la violence familiale.
Il reste encore beaucoup de travail à faire. Cependant, il est bon de savoir que, sous ce gouvernement, nous réalisons des progrès substantiels, au niveau fédéral, en matière d'égalité des femmes, de droits de la personne pour les femmes, de problèmes de violence contre les femmes et de bien-être économique des femmes.
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Le Canadien National
L'hon. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, la grève au Canadien National est liée à de nombreux problèmes, mais le problème principal, c'est l'attitude d'une équipe de gestion américaine qui méprise ses propres travailleurs et les valeurs canadiennes. Ce manque de respect vient de prendre une tournure fâcheuse pour la collectivité de Transcona où le CN justifie maintenant la fermeture de l'allée ou de la rue qui traverse les ateliers du CN, et qui est utilisée par le grand public depuis 1909, en raison de la grève.
On m'a dit qu'hier un jeune homme avait été arrêté, menotté et accusé d'avoir emprunté l'allée. Honte au CN et honte au gouvernement pour son indifférence face à la manière dont Hunter Harrison et ses gestionnaires paramilitaires traitent les cheminots, utilisent des briseurs de grève américains et malmènent maintenant la population de Transcona.
Un véritable gouvernement canadien interviendrait et dirait au CN de faire preuve de plus de respect, de rouvrir l'allée, de renvoyer les briseurs de grève américains chez eux et de retourner à la table de négociation avec une nouvelle proposition décente.
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[Français]
Le hockey
Mme Caroline St-Hilaire (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, l'attaque sauvage survenue lundi soir dernier dans la Ligue nationale de hockey est condamnable et démontre qu'une culture de violence semble bien installée au sein du hockey professionnel. Les mises en échec sont de plus en plus brutales et ne font que ternir davantage l'image du hockey.
Toutefois, le pire, ce sont les répercussions que cela peut avoir sur nos jeunes joueurs amateurs. Comment voulez-vous qu'ils ne s'identifient pas à leurs idoles et ne commettent pas ce même genre d'attaque injustifiée?
Bien que le joueur assaillant, Todd Bertuzzi, ait été suspendu indéfiniment et qu'il pourrait faire face à la justice, il n'en demeure pas moins que les hauts dirigeants de la Ligue nationale de hockey devront prendre les moyens nécessaires pour changer cette culture de violence, une culture gratuite et revancharde qui n'a pas sa place sur la patinoire, comme nulle part ailleurs. La gravité de ses gestes mérite une sanction exemplaire, pour qu'un signal clair soit donné, et que cette culture de violence cesse avant que des accidents encore plus dramatiques ne surviennent.
Le hockey doit redevenir du vrai hockey, avec un véritable code d'honneur.
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La réussite scolaire
Mme Diane St-Jacques (Shefford, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec une grande fierté que je vous présente un site Internet tout à fait exceptionnel et créé par des personnes du comté de Shefford. Jereussis.com est un portail éducatif virtuel.
Les concepteurs reconnaissent que chaque élève est unique et, avec ce site, ils leur offrent la chance de se réaliser pleinement. Leur mission est de favoriser la réussite scolaire des jeunes du secondaire au Canada français, en permettant une meilleure interaction entre élèves et professeurs.
Leur mandat: optimiser l'approche pédagogique grâce à un concept innovateur permettant de recevoir de l'aide pédagogique par un contact tant virtuel que réel. Le projet a été rendu possible grâce à une contribution financière du programme Rescole d'Industrie Canada.
Bravo à Mme Micheline Émond, présidente, et à toute l'équipe de Jereussis.com qui ont compris que réussir apporte confiance et estime de soi, et que réussir à l'école, c'est aussi accrocher et sourire à la vie!
* * *
[Traduction]
Les courses de rue
M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, PCC): Monsieur le Président, le sujet est de nouveau d'actualité. À Surrey, en Colombie-Britannique, peu avant l'heure de pointe de la fin de journée d'hier, un jeune homme de 18 ans a perdu la maîtrise de sa puissante voiture roulant à près de 140 kilomètres-heure. Il a démoli un abribus, blessant grièvement une dame âgée de 71 ans. Un autre véhicule a été aperçu quittant les lieux, confirmant ainsi à toutes les personnes concernées qu'il s'agissait encore une fois des conséquences d'une autre course de rue.
Comme les beaux jours approchent, les accidents liés aux courses de rue augmenteront vraisemblablement et les conducteurs sont convaincus qu'ils ne seront pas incarcérés une seule journée même s'ils blessent ou tuent des gens. À l'échelle nationale, les demandes de règlement à la suite de courses de rue ont plus que doublé entre 2000 et 2002. Il faut aviser les tribunaux de traiter ces crimes de manière plus sérieuse.
Je demande instamment à tous les députés d'appuyer le projet de loi C-338, adopté à l'étape de la deuxième lecture et renvoyé au Comité de la justice. Ce projet de loi fera en sorte que les courses de rue constituent un facteur aggravant lors de la détermination de la peine. Si nous voulons véritablement prévenir ces activités irresponsables, le projet de loi C-338 doit être adopté avant la fin de la présente législature.
QUESTIONS ORALES
[Questions orales]
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[Traduction]
Le programme de commandites
L'hon. Grant Hill (chef de l'opposition, PCC): Monsieur le Président, hier, le premier ministre a soigneusement évité de répondre à certaines questions simples, alors je vais essayer de les poser encore aujourd'hui.
En 1998, des membres de son Cabinet ont rencontré des représentants de Groupaction pour discuter de la combine libérale des contrats de publicité. Ma question est fort simple. Quels ministres faisant partie de son Cabinet actuel étaient présents à cette réunion?
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement a déjà indiqué que, dès l'adoption d'une motion à cet égard par le comité compétent, tous ces documents et tous les renseignements que le député demande seront fournis.
L'hon. Grant Hill (chef de l'opposition, PCC): Monsieur le Président, ce n'était pas si difficile de répondre à la question. Je pourrais la poser de nouveau, mais je suppose que serait une perte de temps à la période des questions. Je vais essayer de l'aborder sous un autre angle.
Le premier ministre a nommé des personnes à son Cabinet il n'y a pas si longtemps, en fait c'était en décembre. Était-il au courant du fait que certaines de ces personnes étaient présentes à cette réunion présidée par M. Gagliano?
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, si le député veut savoir si j'ai demandé récemment aux membres du Cabinet s'ils ont assisté aux 300 réunions qui ont pu avoir lieu, la réponse est non.
Ce que j'ai fait, c'est poser des questions à chacun des membres potentiels du Cabinet. Un groupe indépendant a demandé aux membres du Cabinet, au moment de leur nomination, s'ils avaient quelque chose à déclarer concernant leurs antécédents. J'ai ensuite posé la question à l'ensemble du Cabinet. J'ai fait cela cette année. Dans les deux cas, je suis ravi de dire que le Cabinet a répondu de façon satisfaisante.
L'hon. Grant Hill (chef de l'opposition, PCC): Encore une fois, monsieur le Président, je n'obtiens pas de réponse à une question pourtant fort simple. Essayons de nouveau.
En 1996, l'actuelle vice-première ministre a assisté à une réunion du Conseil du Trésor où l'on a discuté du précurseur du programme de commandites. Une vérification avait déjà révélé des abus. Elle a approuvé un programme qui faisait augmenter le budget tout en supprimant toute obligation de rendre compte. Encore une fois, le premier ministre était-il au courant de cela lorsqu'il l'a nommée à son Cabinet?
L'hon. Reg Alcock (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.): Monsieur le Président, on a beaucoup discuté de cette question et des changements qui se sont produits au fil des ans au Conseil du Trésor en ce qui a trait à la surveillance et aux politiques. Certains de ces changements ont entraîné une réduction de la fonction de contrôle, et c'est d'ailleurs une des raisons qui font que le premier ministre insiste tellement sur la nécessité de mettre en place une fonction de contrôle moderne. C'est là une des responsabilités qu'il m'a confiées.
Si le député veut faire une allégation précise au sujet de quelqu'un qui aurait commis un acte criminel ou un méfait quelconque, qu'il le fasse.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PCC): Monsieur le Président, la vice-première ministre a, dès les tout débuts, participé activement aux travaux des divers comités du Cabinet associés au scandale des commandites. Elle était au courant et bien au fait de la situation. En 1995, elle a siégé au comité de l'unité; en 1998, elle a été membre du comité spécial sur les communications gouvernementales; et en 2001, elle est devenue membre officiel du comité des communications.
La vice-première ministre admettra-t-elle non seulement qu'elle était au courant de l'affaire mais qu'elle fut le dénominateur commun dans tous les efforts déployés pour éliminer les contrôles et les garanties et pour favoriser la dépense dans la combine des contrats de publicité?
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le député tombe plus bas que jamais. Ses propos sont ridicules et insensés.
Me demande-t-on si la vice-première ministre a été une remarquable ministre de l'Énergie? La réponse est oui. A-t-elle été une remarquable ministre de la Justice? Oui. A-t-elle été une remarquable ministre de la Santé? Oui. Est-elle une remarquable vice-première ministre? Oui.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PCC): Monsieur le Président, le premier ministre cherchait-il à éviter la question? Oui. La vice-première ministre était-elle impliquée dans le scandale des commandites? Oui.
Des voix: Oh, oh!
Le Président: C'est mercredi et les députés débordent d'enthousiasme, mais le député de Pictou—Antigonish—Guysborough tentait de poser une question. Je n'ai pas entendu un seul mot de ce que disait le député qui a pourtant une voix forte.
Nous avons besoin d'un peu de calme pour pouvoir entendre la question que le député veut poser.
M. Peter MacKay: Rappelons la chronologie des faits, monsieur le Président.
En 1996, en tant que membre du comité du Cabinet responsable du Conseil du Trésor, la vice-première ministre a approuvé l'annulation des exigences relatives à la déclaration des contrats. En 1998, elle a assisté à une réunion avec Groupaction. De 1998 à 2003, elle a siégé au comité des communications. On peut dire que le sous-chef a mis la main à la pâte et préparé des plats au goût plutôt amer.
Le premier ministre avait-il l'intention...
Le Président: Le très honorable premier ministre a la parole.
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, les députés de l'opposition doivent être vraiment désespérés puisqu'ils se contentent de demander si un ministre a assisté à une réunion avant de sauter à toutes sortes de conclusions et de faire des allégations non fondées.
En passant, c'est ce que le député a fait à son parti qui a laissé un goût amer.
[Français]
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, sur les ondes de RDI, Alfonso Gagliano a expliqué que l'argent qui a servi à financer tout le scandale des commandites venait, et je cite: «[...] de l'enveloppe Unité nationale dans le budget du premier ministre».
Puisque le fonds Unité nationale relève du premier ministre, est-ce que le premier ministre actuel admettra que dans le scandale des commandites, la direction qu'il évoquait et qui a permis les pires abus—je le demande au premier ministre puisque je reprends ses paroles—que cette direction politique a été donnée directement...
Le Président: L'honorable ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux a la parole.
[Traduction]
L'hon. Stephen Owen (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, nous avons établi à la Chambre et ailleurs que nombre des activités financées à même le fonds pour l'unité par l'intermédiaire du Programme de commandites étaient des événements communautaires très importants.
Nous avons également établi que de nombreux députés des deux côtés de la Chambre ont recommandé des fêtes, des festivals et des activités dans leurs circonscriptions respectives qui revêtaient de l'importance et qui avaient besoin d'être financés.
Pour ce qui est des dérapages, ils font l'objet des diverses enquêtes que nous avons lancées, tout comme du mandat du conseiller spécial que je viens de rendre public dans un communiqué de presse, juste avant le début des travaux de la Chambre.
[Français]
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, à une demande d'accès à l'information, le ministère des Finances nous dit que le Fonds Unité nationale ne relève pas de ce ministère. L'ex-secrétaire du Conseil du Trésor vient de déclarer au Comité permanent des comptes publics que ce n'est pas chez lui non plus. Mais Alfonso Gagliano, lui, est catégorique: l'argent provenait de l'enveloppe Unité nationale et cela relève du premier ministre.
Est-ce que le premier ministre, qui nous parle toujours de transparence, va vraiment se lever, être clair et admettre que le pourvoyeur de fonds publics dans le scandale des commandites, c'était Jean Chrétien?
[Traduction]
L'hon. Stephen Owen (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, tout ce que je peux répéter, c'est que des activités valables ont été financées dans l'ensemble du pays dans la totalité ou la majorité de nos diverses circonscriptions. Nous savons également que des députés des deux côtés de la Chambre ont demandé du financement pour des activités tenues dans leur collectivité.
Ce que nous savons également, c'est que de l'argent s'est volatilisé dans le cadre du processus utilisé par le gouvernement pour le transmettre à ces activités. Voilà ce qu'examine le conseiller spécial. Les 721 dossiers font l'objet d'un examen dans le but d'établir si des fonds ont été dissipés et, dans l'affirmative, de les recouvrer.
[Français]
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, son prédécesseur, Alfonso Gagliano, a admis, c'est sa défense, que le fonds du premier ministre lui échappait complètement. Cela doit être la même chose pour ce ministre.
Le fonds Unité nationale du premier ministre existe toujours et pourrait, sur simple décision du premier ministre, être utilisé à nouveau pour des fins semblables, et surtout de la même façon.
Je demande au premier ministre s'il peut nous dire quel usage il a fait du fonds Unité nationale depuis qu'il est premier ministre?
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, d'abord la réponse à la question c'est: aucune utilisation.
En ce qui concerne l'autre question, je suis très fier de dire que Jean Chrétien a toujours travaillé pour l'unité canadienne.
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, les citoyens qui nous écoutent et les députés de cette Chambre comprendront que le premier ministre évolue. Voilà quelques semaines, il condamnait ce qui avait été fait et voilà maintenant qu'il l'approuve.
Le premier ministre a dit qu'il était prêt à rendre publics tous les documents qui pourraient permettre d'éclaircir cette ténébreuse affaire.
Est-ce que le premier ministre acceptera de rendre publics les documents qui attestent de l'utilisation du fonds Unité nationale du premier ministre depuis 1993? La clé de l'énigme, elle est là.
[Traduction]
L'hon. Stephen Owen (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre a adopté une position claire et, d'ailleurs, les activités du gouvernement ont suivi, puisque les documents demandés par une résolution particulière du Comité des comptes publics ont été produits.
Le premier ministre a également déclaré que le Comité des comptes publics et la Commission d'enquête publique pourraient consulter tous les documents liés au rapport de la vérificatrice générale. Ces documents seront mis à leur disposition conformément à un processus établi. Il ne suffit pas que les médias ou un député de l'opposition posent une question pour que l'on rende publics les documents du Conseil privé.
L'hon. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, les députés se préoccuperaient peut-être moins de cette question si l'enquête publique demandée par le premier ministre était en cours, ce qui n'est pas le cas. Cela fait plus d'un mois qu'il en est question, mais cette enquête publique n'est toujours pas commencée.
Ma question s'adresse au premier ministre. On nous a fait savoir que le juge Gomery était en vacances depuis trois ou quatre semaines. Est-ce vrai? Et, en ce cas, pourquoi le gouvernement ne s'est-il pas adressé à quelqu'un qui pourrait se mettre immédiatement au travail?
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le juge Gomery a déjà tout mis en branle. Le député comprendra qu'une énorme quantité de travail préparatoire doit être réalisée par les avocats affectés à l'enquête. Tout ce travail est en train de se faire.
Je suppose d'ailleurs que cette enquête pourra démarrer et suivre son cours plus rapidement qu'à peu près n'importe quelle autre que nous avons pu voir.
* * *
La fonction publique
L'hon. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, la Chambre prendra note que personne ne conteste ce que je viens de dire. Je peux difficilement comprendre pourquoi le gouvernement n'a pu trouver quelqu'un qui était disposé à mener le dossier sans délai.
Le projet de loi sur la protection des dénonciateurs est une autre question en suspens; s'il était mis de l'avant, il nous permettrait de montrer plus d'assurance. Le gouvernement n'a pas encore présenté de projet de loi sur ce sujet qui permettrait aux personnes qui sont disposées à intervenir de le faire avec l'assurance que le gouvernement s'est engagé à agir.
Quand cela se produira-t-il?
[Français]
L'hon. Denis Coderre (président du Conseil Privé de la Reine pour le Canada, interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, ministre responsable de la Francophonie et ministre responsable du Bureau sur le règlement des questions des pensionnats autochtones, Lib.): Monsieur le Président, non seulement notre gouvernement est engagé en ce qui a trait à la loi sur la dénonciation, mais nous sommes présentement à l'étape du processus du Cabinet. Nous nous attendons à mettre de l'avant une législation le plus rapidement possible. Nous nous sommes déjà engagés à la déposer d'ici le 31 mars prochain.
* * *
[Traduction]
Le programme de commandites
M. Leon Benoit (Lakeland, PCC): Monsieur le Président, le premier ministre a renié sa promesse de faire disparaître Communication Canada, qui était chargé de ce programme de commandites corrompu. Au lieu de faire disparaître ce service, il l'a déplacé. Discrètement, il l'a ramené au Conseil privé, plus près de lui encore. Le premier ministre a trahi la confiance des Canadiens.
Pourquoi le premier ministre a-t-il rompu sa promesse de faire disparaître Communication Canada?
L'hon. Stephen Owen (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre et le gouvernement tenaient à faire disparaître Communication Canada au plus tard le 31 mars. Le programme de commandites, qui représentait une grande partie de Communication Canada, a été annulé immédiatement.
Ce qui existe maintenant, c'est un plan visant à reprendre les divers éléments de Communication Canada qui sont importants pour les Canadiens, comme la ligne 1-800 O-Canada, qui est très utilisée, le site Web du Canada, qui est respecté dans le monde entier, et les activités régionales de Communication Canada...
Le Président: Je donne la parole au député de Lakeland.
M. Leon Benoit (Lakeland, PCC): Non, monsieur le Président. En réalité, le premier ministre a dit aux Canadiens que le programme de commandites n'existait plus, puis il l'a confié à Patrimoine canadien. Ensuite, il a dit aux Canadiens que Communication Canada disparaissait, et il l'a rattaché au Bureau du Conseil privé. Quelle sournoiserie.
Le premier ministre ne fait pas ce qu'il dit. Pourquoi a-t-il confié au Conseil privé l'argent du programme de commandites?
L'hon. Stephen Owen (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, le député réduit la vérité à la portion congrue. Le premier ministre a dit que Communication Canada disparaîtrait au plus tard le 31 mars, et c'est ce qui se produira.
Le 13 décembre, le premier ministre a dit que le programme de commandites serait annulé immédiatement, et il l'a été. La responsabilité du financement de manifestations locales relevait autrefois de Patrimoine canadien, qui conservera ce rôle, avec le même budget.
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, PCC): Monsieur le Président, des documents du Cabinet montrent que le président du Conseil privé a essayé d'obtenir des fonds de publicité sans aucun contrat, sans aucun document, en affirmant simplement qu'il fallait verser cet argent à ces gens car il le leur avait promis. Le ministre savait qu'il violait ainsi les règles tendant à protéger les deniers publics. Or, à l'insu des Canadiens, le premier ministre a transféré le programme de publicité au Bureau du Conseil privé.
Pourquoi le premier ministre a-t-il donné le contrôle de tout cet argent à une personne qui viole les règles, si on en croit les documents?
L'hon. Stephen Owen (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, la députée est dans l'erreur.
Tout ce qui touche à la publicité reste à Travaux publics et Services gouvernementaux Canada. Nous avons maintenant lancé un nouveau concours, qui va aboutir d'ici quelques semaines, pour choisir une nouvelle agence qui sera chargée de s'occuper de toute la publicité directement par l'entremise de Travaux publics, sans passer par Communication Canada. On ne met pas fin à ce programme.
Manifestement, les députés vont tous comprendre que les projets du gouvernement menés dans l'intérêt des Canadiens devraient être signalés comme il se doit aux Canadiens. C'est ce à quoi sert la publicité.
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, PCC): Monsieur le Président, le jeu de la chaise musicale ne trompe personne.
Le premier ministre a dit à la Chambre qu'aucun des membres de son Cabinet n'était au courant d'activités inappropriées dans le cadre du programme de commandites, mais maintenant, les documents du Cabinet montrent que le président du Conseil privé a essayé d'obtenir de l'argent des commandites d'une façon contraire aux règles. N'est-ce pas inapproprié?
Le premier ministre confie ensuite à ce ministre à la réputation entachée la responsabilité du programme que le premier ministre a promis d'annuler. Le premier ministre veut-il nous dire que c'est la façon libérale de faire le ménage?
L'hon. Stephen Owen (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, la députée mentionne un certain nombre de personnes et de postes. J'ignore exactement de qui elle parle.
Si elle fait allusion à la publicité faite par le gouvernement du Canada afin que les Canadiens soient bien informés au sujet des services gouvernementaux auxquels ils ont droit, la responsabilité pour cette publicité revient au ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux.
On a apporté tous les correctifs nécessaires en tenant compte de toutes les observations de la vérificatrice générale. Le programme fonctionne bien. Une nouvelle agence attitrée du gouvernement sera choisie d'ici quelques semaines.
* * *
[Français]
Le bois d'oeuvre
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, pendant que le ministre du Commerce international demande au Québec et aux provinces de faire des concessions aux Américains dans le dossier du bois d'oeuvre, le président de Tembec, fort des nombreuses décisions rendues en faveur du Canada, invite au contraire à continuer la lutte pour obtenir le retour au libre-échange.
Le gouvernement réalise-t-il que les producteurs de bois d'oeuvre doivent être soutenus concrètement dans cette lutte, plutôt que de le voir se plier servilement devant les Américains?
[Traduction]
L'hon. John Harvard (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais rappeler au député que le règlement du conflit sur le bois d'oeuvre est la principale priorité du ministre. Je dirais même que c'est sa principale préoccupation. Après tout, il a beaucoup d'estime pour tous les intervenants dans cette industrie, y compris les travailleurs et les collectivités.
Nous tenons à ce que les députés sachent que le ministre poursuit une politique à deux volets qui prévoit des poursuites dans le cadre de l'OMC et de l'ALENA ainsi que des négociations. Le but ultime de tout cela est d'assurer le libre-échange. Après tout, les consommateurs américains veulent notre bois d'oeuvre.
[Français]
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, qu'attend alors le ministre pour lancer un véritable plan d'aide qui prévoit des garanties de prêts aux entreprises et l'ouverture de l'assurance-emploi aux travailleurs touchés par la crise, comme le propose le Bloc québécois depuis des mois?
[Traduction]
L'hon. John Harvard (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, le député devrait savoir que nous avons fourni de l'aide. La dernière fois que j'ai vérifié, plus de 350 millions de dollars avaient été versés.
J'aimerais également rappeler au député que le ministre se préoccupe de cette question depuis qu'il a été nommé à ce poste en décembre dernier. Il a parcouru tout le pays et a tenu des rencontres avec tous les intéressés. C'est sa principale priorité. Il a pris des engagements à cet égard et nous tentons d'obtenir un règlement le plus rapidement possible.
* * *
[Français]
Le Canadien National
Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Monsieur le Président, les quelque 5 000 employés du Canadien National, qui en sont aujourd'hui à leur 20e jour de grève, viennent s'ajouter aux très nombreuses victimes du Code canadien du travail, qui ne protège pas les travailleurs contre l'embauche de scabs.
Est-ce que le gouvernement trouve correct que le CN utilise toutes sortes de stratégies, incluant, selon le syndicat, l'embauche de travailleurs américains pour contrer la grève des travailleurs?
L'hon. Joseph Volpe (ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, Lib.): Monsieur le Président, il ne s'agit pas de voir des scabs qui enlèvent des emplois à des travailleurs qui se trouvent en grève.
Oui, il y a d'autres travailleurs qui ont été utilisés pour continuer de fournir le service aux clients, mais ce sont des dirigeants de la société. Jusqu'à maintenant, il n'y a aucune preuve qui appuie l'accusation et les allégations de la députée.
Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Monsieur le Président, est-ce que le premier ministre ne considère pas l'exemple du CN comme une autre raison pour changer le Code canadien du travail et mieux protéger les travailleurs en incluant des dispositions antibriseurs de grève, comme nous le faisons déjà au Québec?
L'hon. Joseph Volpe (ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, Lib.): Monsieur le Président, il y a un processus en place. Donc, on s'attend à ce que ce processus résolve des choses selon les indications déjà vues dans le passé. C'est-à-dire que la direction et les syndicats se mettent à la table pour discuter les différends et trouver une solution à long terme.
* * *
[Traduction]
La défense nationale
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, PCC): Monsieur le Président, chaque jour amène son scandale. Environ 100 millions de dollars sont disparus. Cette fois, l'argent des contribuables est disparu des caisses des Forces canadiennes, à court de liquidités et, encore là, il semble qu'il y ait eu des factures factices.
Le premier ministre était ministre des Finances lorsque cette escroquerie dans la facturation de matériel informatique au ministère de la Défense nationale a eu lieu. Depuis combien de temps était-il au courant de ce vol de l'argent des contribuables?
L'hon. David Pratt (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, ces renseignements sont du domaine public depuis très longtemps. En fait, le ministère de la Défense nationale a pris des mesures pour régler le problème. Un employé a été congédié. Une vérification judiciaire est en cours. On a fait appel à la GRC et les paiements dus à l'entreprise ont été retenus.
J'ajouterai que nous avons une stratégie vigoureuse pour récupérer les fonds du gouvernement. L'entreprise en question, Hewlett-Packard, a accepté de collaborer.
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, PCC): Monsieur le Président, si ces renseignements sont connus depuis longtemps, nous aurions pensé que le ministère aurait multiplié les mesures pour régler le problème.
Les Canadiens se rendent maintenant compte que le scandale des commandites n'est que la pointe de l'iceberg, et que le premier ministre est le capitaine du Titanic libéral.
Le ministère de la Défense nationale a été victime d'une fraude de quelque 90 millions de dollars. Le premier ministre ne cesse de parler de transparence. Au lieu d'attendre que le scandale de l'heure ne soit rendu public, va-t-il nous dire franchement combien d'autres ministères ont été escroqués pendant qu'il était ministre des Finances?
L'hon. David Pratt (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, nous ne confirmons aucun chiffre au sujet de ce qui s'est passé avec ces contrats, car la vérification judiciaire est toujours en cours. Comme je l'ai dit plus tôt, la GRC mène son enquête.
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, PCC): Monsieur le Président, ils sont occupés les gens d'en face, c'est sûr. Les sujets d'enquête s'accumulent.
Le premier ministre a eu trois mois pour raconter aux Canadiens ce qui s'est passé du temps où il était ministre des Finances. Or, ce n'est que lorsque ses gens apprennent qu'ils se sont fait prendre et que les médias sont sur le point de faire des révélations qu'ils prennent la peine de reconnaître qu'il y a eu vol.
J'aimerais demander au premier ministre comment il a laissé nos militaires se faire escroquer d'une somme de presque 100 millions de dollars?
L'hon. David Pratt (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, il est important de ne pas perdre de vue le fait que les systèmes de gestion et de vérification en place ont fonctionné.
Les irrégularités concernant le contrat en question ont été découvertes grâce aux processus en place. Nous sommes en train de prendre les mesures qui s'imposent. Je suis convaincu que nous récupérerons jusqu'au dernier sou des sommes dues aux contribuables canadiens.
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, PCC): Monsieur le Président, c'est amusant. Pour sûr, plusieurs milliers de dollars ont été détournés dans ce dernier scandale, pas juste quelques sous.
C'est incroyable. Quand on regarde les faits dans le détail, chaque ministère est touché. Des centaines de millions de dollars ont été portés disparus au ministère de la Défense à l'époque où le premier ministre était ministre des Finances. Nous n'avons aucune idée si ce que nous avons découvert dans ce ministère est la fin ou le début du scandale des ordinateurs. Je pense que ce n'est que la pointe de l'iceberg.
J'aimerais que le premier ministre dise maintenant aux Canadiens combien ont coûté ces nouveaux cas de mauvaise gestion de leur argent et combien de ministères sont en cause.
L'hon. David Pratt (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, il est très clair que, en l'occurrence, le ministère de la Défense nationale a géré le problème comme il se doit, en collaboration avec nos collègues du ministère des Travaux publics. Ces irrégularités sont un sujet de préoccupation. Je suis certain, étant donné les mesures prises jusqu'à maintenant, que nous récupérerons l'argent des contribuables.
* * *
[Français]
Le transport en commun
M. Christian Jobin (Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, Lib.): Monsieur le Président, le transport en commun en milieu urbain est le moyen de transport le plus bénéfique pour l'environnement. Malheureusement, les deux paliers de gouvernement, soit provincial et fédéral, se désintéressent tranquillement de ce moyen de transport et laissent cette industrie se débrouiller seule.
J'aimerais que le ministre des Transports dise en cette Chambre, en quelques mots, comment il envisage d'assurer le développement de ce moyen de transport en milieu urbain, et avec quel plan d'action, pour les années à venir, il entend maintenir le transport en milieu urbain.
L'hon. Tony Valeri (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de sa question.
[Traduction]
Le gouvernement investit dans les transports en commun. À ce jour, une somme de 735 millions de dollars a été annoncée et on s'attend à d'autres annonces.
Dans le cadre du Fonds canadien sur l'infrastructure stratégique, Transports Canada, en collaboration avec nos collègues d'Infrastructure Canada, négocie les conditions avec les provinces et les municipalités. Nous sommes responsables de la mise en oeuvre: plus d'un milliard de dollars de fonds fédéraux destinés à l'infrastructure des transports en commun et au réseau routier en milieu urbain dans l'ensemble du pays pour un total de près de 4 milliards de dollars. Ceci confirme notre engagement à...
Le Président: La députée de Winnipeg-Centre-Nord a la parole.
* * *
La fiscalité
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre, sous la direction duquel le gouvernement a choisi de gaspiller 10,3 milliards de dollars en réductions d'impôt aux sociétés depuis l'an 2000. Ses amis du milieu des affaires ont empoché 10 milliards de dollars. Or, on apprend maintenant que les grandes entreprises amies des libéraux s'apprêtent à obtenir un autre allégement fiscal.
Pour quelle raison le premier ministre choisit-il de donner davantage aux entreprises amies des libéraux quand il y a une longue liste de problèmes sociaux et environnementaux causés par ses propres choix conservateurs? Combien d'argent faudra-t-il encore donner?
L'hon. John McKay (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, la députée se souviendra que dans le contexte de ces réductions d'impôt, environ 25 p. 100 étaient destinées aux sociétés et 75 p. 100 aux particuliers. Il faut garder à l'esprit la nécessité de maintenir un environnement fiscal concurrentiel, une notion que ne comprend vraiment pas la députée dans le coin. Si on n'offre pas d'environnement fiscal concurrentiel, on ne génère pas de richesses au pays, et dans un tel cas, il ne reste rien à taxer.
* * *
La péréquation
L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.
En vertu de la perverse formule de péréquation, le gouvernement fédéral récupère maintenant plus de 100 p. 100 des revenus énergétiques de la Saskatchewan, jusqu'à 1,25 dollar par dollar récolté par le gouvernement provincial. De ce fait, les familles de la Saskatchewan constatent que leur assiette fiscale provinciale est davantage sollicitée.
Le premier ministre garantira-t-il que la Saskatchewan ne se fera pas rouler et qu'elle sera traitée exactement de la même façon que Terre-Neuve et la Nouvelle-Écosse en ce qui concerne les revenus énergétiques et la formule de péréquation? C'est une question très importante pour la population de la Saskatchewan.
L'hon. John McKay (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le député soulève une question valide. Comme les députés le savent, la formule de péréquation est une formule extraordinairement complexe qui prend en compte 33 sources de recettes. Parmi ces recettes, la formule provoque nécessairement des anomalies. Le député en a fait ressortir une. Je peux lui donner l'assurance que le ministre des Finances est très au fait de cette question.
* * *
Le programme de commandites
M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, PCC): Monsieur le Président, le ministre des Travaux publics a finalement admis, hier, qu'il n'avait aucune idée du nombre d'enquêtes policières en cours au sujet de la combine des contrats de publicité. Il a dit qu'il était plutôt difficile d'être au courant de toutes les enquêtes.
Combien y a-t-il actuellement d'enquêtes policières sur le scandale des commandites?
L'hon. Stephen Owen (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, comme je le disais hier, je crois que 18...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je parviens difficilement à entendre le ministre, bien que son fauteuil se trouve tout près du mien. Je ne vois pas comment le député d'Edmonton—Strathcona pourra poser une question complémentaire s'il n'entend pas la réponse. Il faut entendre les réponses pour pouvoir poser des questions complémentaires intelligentes. Le ministre des Travaux publics fait de son mieux pour répondre. Nous devons pouvoir l'entendre.
L'hon. Stephen Owen: Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir répondre à la question du député.
Comme je le disais hier, 18 accusations ont été portées contre une personne à la suite des enquêtes policières concernant le programme de commandites. Il y a au moins 12 ou 13 enquêtes en cours. J'ai dit que la section des enquêtes de la GRC tient ses propres enquêtes. Elle rend publique l'information qu'elle juge opportun de divulguer, de façon à ne pas nuire au déroulement des enquêtes. Nous ne tenons pas une comptabilité, de ce côté-ci de la Chambre, afin d'annoncer au public, au nom de...
Le Président: Le député d'Edmonton—Strathcona a la parole.
M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, PCC): Monsieur le Président, la réponse du ministre montre bien que le gouvernement n'a aucune idée de ce qui se passe.
[Français]
Le ministre prétend maintenant qu'il entreprend l'examen de 721 programmes de commandites, ce qui aurait dû se faire il y a des années. Si le gouvernement avait fait cet examen, il se serait rendu compte que l'argent destiné à des organisations, comme la fiducie Bluenose, avait été détourné.
Parmi ces 721 dossiers, combien seront remis à la police?
[Traduction]
L'hon. Stephen Owen (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, juste avant la période des questions d'aujourd'hui, j'ai rendu public le mandat de l'avocat-conseil chargé du recouvrement des fonds. J'invite le député à en prendre connaissance; il verra qu'un examen très intensif est en cours.
En fait, ces dossiers ont déjà fait l'objet de vérifications judiciaires menées à la fois par le bureau du vérificateur général et par le ministère avec le concours de vérificateurs indépendants. Comme je l'ai mentionné, il y a aussi des enquêtes policières. Je rappelle, comme le disait le député, que l'avocat-conseil spécial examinera en détail 721 dossiers du programme de commandites, afin de récupérer les fonds qui pourraient avoir fait l'objet de fausses factures ou de paiements injustifiés.
* * *
Le premier ministre
M. Monte Solberg (Medicine Hat, PCC): Monsieur le Président, depuis janvier, le premier ministre a accumulé des dépenses de 300 000 $ en utilisant un appareil Challenger pour sillonner le pays afin de dire aux Canadiens à quel point il compatit à leur douleur.
Nous savons que le Parti libéral a escroqué les Canadiens dans l'arnaque des commandites. Pourquoi les Canadiens devraient-il payer la campagne électorale du premier ministre à la place du Parti libéral?
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, une des choses que nous disent les Canadiens d'un océan à l'autre, et notamment ceux de l'Ouest, c'est qu'ils veulent voir des représentants du gouvernement chez eux. Ils veulent voir chez eux le premier ministre et des ministres.
Je suis de ceux qui croient qu'il incombe au premier ministre de se rendre dans toutes les régions du Canada et je vais continuer à le faire.
M. Monte Solberg (Medicine Hat, PCC): Monsieur le Président, je suis sûr qu'il y a beaucoup de Canadiens qui demandent au premier ministre de récupérer leur argent.
Je suis assez certain que le premier ministre ne négociait pas un nouveau projet de loi sur la péréquation lorsqu'il s'est rendu à un centre commercial de Saint-Bruno, au Québec. Il est évident qu'il fait campagne. Pendant les 100 premiers jours au pouvoir du premier ministre, pas un seul projet de loi original n'a été présenté.
Le premier ministre a passé 13 ans à essayer d'écarter Jean Chrétien. Pourquoi s'est-il donné tout ce mal si le mieux qu'il puisse faire, c'est d'adopter intégralement le menu législatif de Jean Chrétien?
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, dans la vision qu'il a de notre pays, le député pense peut-être que les représentants du gouvernement devraient rester ici à Ottawa, qu'ils ne devraient pas se rendre à l'étranger, que le premier ministre ne devrait pas aller rencontrer les Canadiens. Cela ne cadre certainement pas avec ma vision du Canada. Permettez-moi simplement de dire...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Nous devons pouvoir entendre les questions et les réponses à la Chambre. Je n'arrive pas à entendre le premier ministre, à cause du tout le chahut, et il est important que les députés à qui l'on donne la parole puissent s'exprimer. Le très honorable premier ministre a la parole. Nous allons l'écouter.
Le très hon. Paul Martin: Monsieur le Président, le député veut savoir pourquoi je me suis rendu dans un centre commercial de Saint-Bruno, au Québec. Je vis au Québec.
* * *
[Français]
L'immigration
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, à la suite de l'arrestation de Mohamed Cherfi dans une église de Québec, la vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile s'est défendue hier, en jetant le blâme sur la police de Québec. Or, c'est l'Agence des services frontaliers qui a procédé à l'expulsion de M. Cherfi vers les États-Unis, et non la police de Québec, et cette agence relève du fédéral, donc de la ministre.
La ministre peut-elle rendre compte de l'empressement des autorités fédérales à déporter M. Cherfi?
[Traduction]
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.): Monsieur le Président, toutes les voies régulières ont été suivies dans ce cas. Comme je l'ai dit hier, c'est la police de Québec qui a investi l'église en question pour en déloger M. Cherfi. En fait, M. Cherfi faisait l'objet d'un mandat de l'immigration. Les policiers ont exécuté ce mandat, puis on a procédé au renvoi de M. Cherfi dans le respect des règles.
[Français]
Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Monsieur le Président, il est clair qu'en privilégiant l'approche bureaucratique, le gouvernement met au rancart ses engagements internationaux au chapitre des droits de la personne.
Comment le gouvernement peut-il déporter des réfugiés vers l'Algérie, quand il déconseille à ses propres citoyens de s'y rendre, et comment peut-il justifier le refus de trouver une solution humanitaire à la situation de Mohamed Cherfi?
[Traduction]
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.): Monsieur le Président, la situation en Algérie a fait l'objet d'un examen, récemment. Cet examen a été fait en consultation avec des représentants du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration du Canada. Je le répète, nous avons respecté l'application régulière de la loi dans le cas qui nous occupe.
* * *
Le bois d'oeuvre
M. Andy Burton (Skeena, PCC): Monsieur le Président, le 15 mai l'année dernière, lorsqu'on lui a demandé pourquoi les fonds promis dans le cadre du programme d'aide pour les travailleurs du bois d'oeuvre n'avaient pas été versés aux collectivités de la Colombie-Britannique qui en avaient un urgent besoin, le ministre de la Diversification économique de l'Ouest canadien de l'époque a répondu, et je cite: «...pour assurer que les propositions sont réalistes et dûment vérifiées.»
Le 8 mars cette année, soit il y a deux jours, l'actuel ministre a dit, et je cite: «Nous accordons l'attention voulue à la question». Dix mois après, toujours la même réponse: pas de fonds. Que se passe-t-il?
L'hon. Rey Pagtakhan (ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, le député aurait dû écouter attentivement les réponses fournies antérieurement. J'ai bien précisé que nous avions fait preuve de toute la diligence raisonnable et, en fait, mon prédécesseur est allé au-delà de la diligence raisonnable. Oui, des fonds sont versés.
M. Andy Burton (Skeena, PCC): Monsieur le Président, 450 jours se sont écoulés depuis le lancement de l'initiative d'adaptation économique de l'industrie et des collectivités touchées par le différend sur le bois d'oeuvre, soit près d'une année et demie. En Colombie-Britannique, les leaders des collectivités ont presque baissé les bras par dépit devant des bureaucrates fédéraux qui se chamaillaient sur la façon de distribuer les dollars qui auraient dû aider les collectivités il y a de cela plusieurs mois.
Trop c'est trop. Quand enverra-t-on aux collectivités les chèques qu'elles méritent pour les projets communautaires approuvés? Quand ces collectivités verront-elles un chèque?
L'hon. Rey Pagtakhan (ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, 32 millions de dollars et 83 projets, voilà où nous en sommes. Les fonds ont commencé à être versés. J'ai dit hier à un député de l'opposition, un député de l'Alliance, que les fonds sont versés pour les projets. L'argent circule.
* * *
L'Agence canadienne de développement international
L'hon. Elinor Caplan (Thornhill, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre responsable de l'Agence canadienne de développement international. La ministre peut-elle donner l'assurance à mes électeurs et à tous les Canadiens que les fonds destinés à l'aide au développement et à l'aide humanitaire versés par le Canada dans le but d'améliorer la vie des Palestiniens par le financement de l'Administration des Nations Unies pour les secours et la reconstruction ne sont pas détournés vers l'Autorité palestinienne à des fins non autorisées qui ne soutiennent pas la paix?
L'hon. Aileen Carroll (ministre de la Coopération internationale, Lib.): Monsieur le Président, comme la députée le sait, la principale priorité du gouvernement du Canada est d'assurer la paix et la sécurité au Proche-Orient. L'aide canadienne au peuple palestinien passe donc par les agences et les organismes internationaux canadiens, qui disposent de mécanismes comptables reconnus, ou nous administrons l'aide directement par l'entremise de nos missions dans la région.
L'ACDI choisit soigneusement ses partenaires en conjonction avec les ministères et les organismes fédéraux, ainsi qu'avec d'autres donateurs internationaux. J'assure au député que l'aide parvient à la population...
Le Président: Le député de Battlefords—Lloydminster a la parole.
* * *
L'industrie
M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster, PCC): Monsieur le Président, la priorité absolue pour l'industrie canadienne est le rétablissement de nos bonnes relations avec notre plus important partenaire économique au sud. Les Canadiens ont besoin que le premier ministre fasse le travail pour lequel ils le paient.
Le premier ministre va-t-il mettre de côté les intérêts du Parti libéral liés à une réélection, cesser de se cacher du président Bush, traiter directement avec lui et faire son travail?
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, il y a un mois, à Monterrey, le président et moi avons eu une rencontre très fructueuse. J'ai hâte de rencontrer le président de nouveau. En fait, des représentants des deux pays sont en train de travailler à l'élaboration d'un programme. Une rencontre n'a pas simplement pour but de se réunir; elle vise fondamentalement à prendre de bonnes mesures pour nos deux pays, et c'est ce que nous comptons faire.
M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster, PCC): Monsieur le Président, y aller ou ne pas y aller, tel est le dilemme du premier ministre. Il semble que la situation de l'industrie du bois d'oeuvre et des éleveurs de bétail ne soit pas encore une priorité pour le gouvernement. Le premier ministre tergiverse. Pourquoi accorde-t-il plus d'importance à ses espoirs de plus en plus minces de réélection qu'à la survie de nos éleveurs de bétail et de l'industrie du bois d'oeuvre? Pourquoi?
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, c'est de la foutaise. En fait, lors de ma rencontre d'il y a un mois avec le président, les deux principales questions abordées, exception faite de certains autres dossiers, étaient celles de la vache folle et du bois d'oeuvre. Ce sont les questions sur lesquelles nous travaillons à l'heure actuelle.
Le député ne semble pas comprendre que si l'on veut que ces rencontres soient fructueuses, il faut y travailler. Nous ne pouvons nous contenter de nous lever à la Chambre des communes et de tenir des discours vides de sens comme le fait le député.
* * *
[Français]
Le programme des commandites
M. Odina Desrochers (Lotbinière—L'Érable, BQ): Monsieur le Président, la firme comptable retenue par le gouvernement pour enquêter sur le rôle joué par Postes Canada dans le scandale des commandites est la firme Deloitte & Touche. Pourtant, cette firme assure la vérification comptable des livres de Postes Canada depuis 1995.
Comme Deloitte & Touche enquête sur elle-même, alors que son mandat était de s'assurer que rien ne clochait dans les livres comptables de Postes Canada, est-ce que le gouvernement ne devrait pas lui retirer immédiatement le mandat pour le confier à quelqu'un d'autre qui n'est pas impliqué?
[Traduction]
L'hon. Stan Keyes (ministre du Revenu national et ministre d'État (Sport), Lib.): Monsieur le Président, j'ose croire que le député n'est pas en train d'insinuer que le premier cabinet de vérification comptable au Canada, qui est en train de faire enquête et d'effectuer une vérification à Postes Canada, ainsi qu'une vérification de la gestion interne à cet endroit, ne s'acquitte pas de sa tâche d'une manière professionnelle.
* * *
La situation de la femme
Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre d'État au Multiculturalisme et à la Situation de la femme.
La Commission de la condition de la femme des Nations Unies tient sa 48e session à son siège de New-York, du 1er au 12 mars de l'année en cours. La ministre peut-elle dire à la Chambre si le Canada participe à cette session?
L'hon. Jean Augustine (ministre d'État (Multiculturalisme et Situation de la femme), Lib.): Monsieur le Président, j'ai eu le plaisir et l'honneur de représenter le Canada, en compagnie de la délégation de notre pays, et de prendre la parole devant la Commission de la condition de la femme à sa 48e session. Celle-ci a mis l'accent sur la participation des femmes à la prévention des conflits, à la gestion et au règlement des conflits; elle a mis l'accent aussi sur le rôle des hommes et des garçons comme partenaires en vue de la réalisation de l'égalité entre les sexes. Notre gouvernement est attaché à l'égalité entre les sexes et nous agissons dans l'intérêt des Canadiens, et en association avec eux.
* * *
La santé
Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre et elle concerne le financement de la lutte contre le VIH-sida au Canada.
Le 19 juin dernier, la ministre de la Santé de l'époque, qui est maintenant vice-première ministre, a dit à la Société canadienne du sida:
Comme cela a été soulevé... toutes les parties... s'entendent pour dire qu'il est important d'au moins doubler le financement annuel... tout ce que j'ai à faire, c'est convaincre... le Cabinet... qu'il devrait accorder 100 millions de dollars. |
Ma question d'aujourd'hui ne porte pas sur le montant de l'aide comme tel. Elle porte sur le principe. Le premier ministre confirmera-t-il que le financement annuel de la lutte contre le VIH-sida sera à tout le moins doublé?
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre de la Santé, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre responsable des langues officielles, Lib.): Monsieur le Président, je remercie certes le député de sa question. Nous avons effectivement rencontré des groupes militant pour la lutte contre le VIH-sida, et cela est une priorité pour le gouvernement. Grâce à eux, une bonne masse d'excellent travail a pu être accompli ces dernières années. J'aimerais que mon collègue, le ministre des Finances, soit présent aujourd'hui pour m'aider à répondre à cette question. Nous devrons attendre le budget. Je puis dire à la Chambre que c'est certainement une bonne cause et que ces groupes ont apporté une extraordinaire contribution à la santé des Canadiens et à notre société ces dernières années.
* * *
Les travaux de la Chambre
Le Président: Je dois informer la Chambre que, conformément au paragraphe 81(14) du Règlement, la motion relative aux crédits qui doit être étudiée demain est la suivante:
[Français]
Puisque la participation du gouvernement fédéral au financement des dépenses en santé, qui est de 16 p. 100, est nettement insuffisante, que la Chambre enjoigne le gouvernement d'investir, au-delà des 2 milliards de dollars déjà engagés, au moins la moitié des surplus de l'année en cours dans le financement des soins de santé afin d'atteindre le plus rapidement possible un financement stable de 25 p. 100 de la part du gouvernement fédéral comme le réclament le Québec et les provinces. |
Cette motion, inscrite au nom de l'honorable député de Joliette, fera l'objet d'un vote.
[Traduction]
Des copies de la motion se trouvent sur le Bureau.
La présidence a reçu avis d'une question de privilège du député de St. John's-Ouest.
* * *
Privilège
Le Budget principal des dépenses
[Privilège]
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PCC): Monsieur le Président, permettez-moi de citer tout d'abord l'ouvrage de Marleau et Monpetit, à la page 697:
Il a été dit du contrôle direct des finances nationales qu’il s’agissait de la «grande tâche du gouvernement parlementaire moderne». |
À la page 728, on lit ceci:
Le Budget principal des dépenses fournit une ventilation, par ministère et organisme, des dépenses gouvernementales prévues pour l’exercice qui vient. |
Les Journaux des Communes du 24 février signalent que le président du Conseil du Trésor vous a remis, monsieur le Président, un message de la gouverneure générale dont vous avez donné lecture à la Chambre:
Son Excellence la Gouverneure générale transmet à la Chambre des communes le Budget principal des dépenses des sommes requises pour le service public du Canada pour l'exercice se terminant le 31 mars 2005 et, conformément à l'article 54 de la Loi constitutionnelle de 1867, recommande ledit Budget à la Chambre des communes. |
...(président du Conseil du Trésor) dépose sur le Bureau, Document intitulé «Budget des dépenses 2004-2005». --Document parlementaire no 8520-373-02. |
Conformément à l'article 81(4) du Règlement, le Budget principal des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2005 est réputé renvoyé aux différents comités permanents de la Chambre, comme suit: |
Inutile de lire la liste.
La transmission du Budget principal des dépenses à la Chambre des communes est au coeur de notre régime constitutionnel. Il s'agit des plans de dépenses du gouvernement pour l'exercice à venir, et le budget est l'élément central de la demande d'autorisation de dépenser présentée par le gouvernement.
Le gouvernement appuie ces propositions de dépenses, sans quoi il ne les aurait pas transmises à la gouverneure générale en lui demandant de les recommander à la Chambre, conformément à la Loi constitutionnelle. C'est du moins ce que la Chambre des communes est en droit de croire.
Or, nous constatons maintenant qu'il s'agit d'une imposture, que le gouvernement ne soutient pas ces prévisions budgétaires, qu'il induit les Communes en erreur, que, une fois de plus, il a manqué à son devoir de transparence.
Je cite le communiqué de presse du 24 février:
L'honorable [...], président du Conseil du Trésor et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, a déposé aujourd'hui à la Chambre des communes le Budget principal des dépenses de 2004-2005. |
«L'une des grandes priorités du gouvernement consiste à optimiser ses ressources», a déclaré le ministre. «Plus que jamais, le gouvernement du Canada est résolu à améliorer l'imputabilité et à fournir au Parlement l'information dont il a besoin pour exercer une surveillance de l'utilisation des fonds publics.» |
Le Budget principal des dépenses sert à étayer la requête que le gouvernement présente au Parlement chaque année afin de lui permettre de dépenser des fonds publics. En outre, il fournit au Parlement des renseignements sur les rajustements apportés aux dépenses législatives projetées qui avaient été autorisées préalablement. Les dépenses exposées dans le Budget principal des dépenses de 2004-2005 se chiffrent à 186,1 milliards de dollars, dont 2,8 milliards de dollars en dépenses non budgétaires (prêts, placements, etc.) et 183,3 milliards de dollars en dépenses budgétaires.
Les parties I et II du Budget principal des dépenses, déposé aujourd'hui, s'inscrivent dans le cadre des dépenses énoncées dans la Mise à jour économique et financière de novembre 2003. De plus, le Budget principal des dépenses contient des chiffres estimatifs concernant les organisations nouvelles ou restructurées issues des changements de l'appareil public annoncés en décembre 2003. Au cours du prochain mois, le Parlement étudiera un projet de loi de crédits en vue d'autoriser des dépenses provisoires pour l'exercice 2004-2005, en se fondant sur le Budget principal.
Dans le même communiqué de presse du 24 février 2004, le gouvernement a écrit:
En raison de l'ampleur des modifications de l'appareil public annoncées en décembre 2003, le gouvernement prévoit déposer une version révisée du Budget principal des dépenses plus tard dans l'exercice 2004-2005, ce qui permettra aux organisations nouvelles ou restructurées de disposer de suffisamment de temps pour achever les discussions portant sur les ressources, ainsi que pour élaborer leurs plans et priorités de manière à ce que le Parlement puisse étudier les projets de loi de crédits et autoriser les dépenses définitives. De même, cela permettra au gouvernement de solliciter d'autres autorisations de dépenses qui n'étaient pas encore suffisamment définies pour être inscrites au Budget principal; ces requêtes sont habituellement présentées au Parlement par le truchement du Budget supplémentaire des dépenses, qui est déposé à une date subséquente de l'exercice. |
Fondamentalement, le président du Conseil du Trésor disait que ce qu'il avait soumis au départ à la Chambre des communes était invalide. Le gouvernement n'a jamais signalé à la Chambre que ces prévisions budgétaires étaient non valides, qu'elles ne tenaient plus.
Au lieu de cela, le gouvernement a immédiatement renvoyé les prévisions budgétaires aux comités de la Chambre et il leur a souhaité bonne chance alors que lui seul savait qu'ils allaient avancer à l'aveuglette.
Les comités ne pourront pas examiner le Budget des dépenses et obtenir des réponses au sujet des dépenses publiques, parce qu'il n'y a pas un seul ministre ni un seul fonctionnaire qui puisse honnêtement se porter garant des faussetés qu'il contient.
Ce Budget des dépenses est celui de Jean Chrétien, d'un gouvernement mort; ce qui ne veut pas dire que le gouvernement actuel soit vraiment vivant, soit dit en passant. Tout ce que les comités ont devant eux, c'est un budget qui porte la lourde marque de Jean Chrétien. Or, la gouverneure générale a annoncé à la Chambre des communes qu'il s'agissait des projets de dépenses du gouvernement du Canada et, conformément à la doctrine du gouvernement responsable, le gouvernement actuel joue son va-tout sur l'adoption de ce budget.
Le gouvernement semble vouloir utiliser ces données fictives pour obtenir des crédits provisoires et, une fois ces crédits assurés, il pourra avoir recours à des ordonnances internes pour réaffecter les fonds à d'autres fins. Le registre des armes à feu, par exemple?
Monsieur le Président, l'examen des crédits est au coeur même du gouvernement responsable. Vous-même, en 1997, avez consacré des mois d'étude à l'importance de l'examen des crédits à la Chambre des communes. La Chambre doit pouvoir se fier au contenu du Budget des dépenses.
Je me permets de renvoyer le président aux pages 1 à 8 de l'introduction de la Partie II. Je cite:
Le Budget des dépenses a pour objet de fournir au Parlement des renseignements sur les autorisations des dépenses budgétaires et des dépenses non budgétaires par le biais de projets de loi de crédits. |
Monsieur le Président, leur temps viendra, soyez-en sûr. Dans son communiqué, le ministre affirme que ce n'est pas vrai. Au moment du dépôt du Budget des dépenses certains ont dit, à la Chambre, qu'il était inhabituel que le gouvernement dépose le Budget des dépenses sans préavis. La raison en est maintenant claire: le gouvernement n'a pas de Budget des dépenses.
Le gouvernement a sciemment déposé à la Chambre un document frauduleux. Il l'a fait pour lancer l'examen des crédits et faire en sorte que, à l'échéance de juin, il puisse utiliser à son gré les crédits, l'argent des Canadiens, sans informer le Parlement ou la population de la façon dont il dépensera l'argent. Les représentants élus de la population canadienne approuveraient des crédits de 183 milliards de dollars sans savoir à quoi cet argent devrait servir et sans pouvoir interroger le gouvernement au sujet de ses plans de dépenses, ni les remettre en question.
C'est un grave outrage aux Canadiens, une tentative arrogante de saper la démocratie et un déni total du gouvernement responsable.
Une fois de plus, le premier ministre essaie de truquer les questions financières. Il s'est présenté au Parlement sans être prêt à gouverner. Il n'a aucun programme et il refuse...
Le Président: Le député semble avoir épuisé tout le volet de son argument portant sur la procédure et nous aurons peut-être droit à une réponse de la part du président du Conseil du Trésor à cet égard.
L'hon. Reg Alcock (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.): Monsieur le Président, je vais essayer de formuler une réponse en deux ou trois parties.
Si j'ai bien compris le député, il prétend tout d'abord que nous avions indiqué dans le communiqué de presse que nous déposions le Budget principal des dépenses, mais que nous avions un plan secret selon lequel nous présenterions un deuxième budget. Or, le plan secret était inclus dans les documents d'information accompagnant le communiqué de presse; nous n'avons donc pas essayé de faire quoi que ce soit en secret.
Je dois expliquer au député qu'en plus de lire le Marleau et Montpetit, il devrait peut-être lire aussi le Règlement de la Chambre des communes, car celui-ci oblige le gouvernement à présenter le Budget principal des dépenses avant la fin de février. À cette date, nous n'avions pas terminé, et nous ne terminerons pas avant un bon moment, les réaffectations et les nouvelles répartitions requises à cause des changements. Par exemple, la loi de restructuration des ministères n'a pas encore été adoptée à la Chambre.
Nous avons satisfait à notre obligation de déposer le Budget principal des dépenses, mais étant donné le travail effectué par le Président dans une vie antérieure à la Chambre, par l'ancien whip de notre parti et par le président actuel du Comité permanent des comptes publics, nous souhaitions faire davantage, au nom de la transparence.
En plus de déposer le Budget principal des dépenses comme nous l'avons toujours fait, c'est-à-dire un document qui reflète la position financière actuelle pour la Chambre, puisque nous savions que les biens et responsabilités seraient répartis à nouveau entre les ministères une fois la loi adoptée à la Chambre, nous avons dit que nous présenterions un autre budget à la Chambre pour faire état de ces changements, dans l'intérêt de la plus grande transparence et afin que les députés disposent d'informations absolument exactes. Ce geste enrichit la responsabilité démocratique, il ne la réduit pas.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PCC): Monsieur le Président, le président du Conseil du Trésor est intervenu à la Chambre et nous a dit qu'il s'agissait du budget principal des dépenses. Il a ensuite autorisé une déclaration à l'extérieur de la Chambre disant l'inverse.
Le Président: Inutile de ressasser. Le document a été lu dans sa totalité par le député de St. John's-Ouest. Je ne veux pas revenir là-dessus.
Si vous avez d'autres arguments à me présenter, je les entendrai, mais je ne suis pas disposé à écouter de multiples discours.
M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, PCC): Monsieur le Président, j'aimerais revenir sur ce que le président du Conseil du Trésor vient de dire. En fait, ses propos aggravent encore davantage l'atteinte portée à nos privilèges. J'aimerais expliquer pourquoi.
L'alinéa 81(4) a) du Règlement dit que:
au plus tard le 1er mai, le chef de l'Opposition peut, après consultation des chefs des autres partis d'opposition et au moment précisé à l'article 54 du Règlement, donner avis d'une motion tendant à renvoyer aux comités pléniers l'étude du budget principal des dépenses d'au plus deux ministères ou organismes en particulier; ladite motion est alors réputée adoptée et l'étude desdits budgets est réputée retirée du comité permanent auquel elle avait été confiée. |
La réponse que le ministre vient de vous donner, monsieur le Président, fait qu'il est impossible au chef de l'Opposition de prendre une décision éclairée en la matière car le même problème se pose au sujet de l'alinéa b), qui se lit comme suit:
au plus tard le troisième jour de séance avant le 31 mai, le chef de l'Opposition peut, au moment précisé à l'article 54 du Règlement, donner avis d'une motion tendant à prolonger l'étude du budget principal des dépenses d'un ministère ou d'un organisme en particulier, et ladite motion est réputée adoptée, lorsqu'elle est appelée à l'appel des «Motions» le dernier jour de séance avant le 31 mai. |
En conclusion, le mardi 9 mars, la représentante du Conseil du Trésor, comparaissant devant le Comité sénatorial des finances nationales, a donné le 27 mai comme étant la date à laquelle les rapports sur les plans et priorités seraient déposés. La Chambre serait alors en possession de renseignements importants après la date à laquelle les comités pourraient les étudier, après la date limite à laquelle le chef de l'opposition pourrait saisir un comité plénier d'une affaire et après la date limite à laquelle le chef de l'opposition pourrait prolonger l'étude d'un crédit par un comité.
Par conséquent, ce que fait le gouvernement revient à contourner le processus budgétaire dans son ensemble et entrave les droits du chef de l'opposition et, par conséquent, de tous les autres députés.
Le Président: Je suis certain d'avoir entendu les arguments invoqués.
Je pense qu'il y a déjà eu des restructurations du gouvernement dans le passé. Cela semble être le cas, d'après les remarques du député de St. John's-Ouest lorsqu'il a cité l'annexe au communiqué de presse déposé, présenté ou rendu public par la présidente du Conseil du Trésor, portant que la restructuration du gouvernement allait entraîner des changements dans le budget des dépenses, ce qui est compréhensible.
Je vais étudier la question afin de voir s'il y a eu des irrégularités au niveau de la procédure.
Il me semble que ce genre de situation doit s'être produit auparavant; en fait, je suis sûr que cela s'est produit au Parlement. Nous allons regarder comment la situation a été traitée.
M. Peter MacKay: Monsieur le Président, cette situation est sans précédent.
Le Président: Le député de Pictou—Antigonish—Guysborough dit que la situation est sans précédent. Il y a eu des restructurations du gouvernement lorsque des ministères ont été déplacés ou que les responsabilités de divers ministères ont été transférées d'un ministre à un autre. Cette situation n'est pas rare.
Nous allons examiner comment la question a été traitée dans les budgets de dépenses antérieurs et, lorsque ces budgets en faisaient état, si c'était au moyen de budgets supplémentaires, de budgets modifiés ou d'une autre façon. Je vais rendre une décision en temps utile à la Chambre relativement à la question soulevée par le député de St. John's-Ouest.
Je suis convaincu que la Chambre va examiner cette question d'une manière approfondie et appropriée.
* * *
Recours au Règlement
[Recours au Règlement]
Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, j'aimerais attirer l'attention sur une modification qui me semble importante et peut-être même inquiétante qui a été apportée au hansard.
Hier, le leader du gouvernement à la Chambre a répondu à une question de privilège que j'avais soulevée. Il a admis que le gouvernement avait manqué à son devoir en ne déposant pas certains décrets tel que le prévoit le paragraphe 110(1) du Règlement.
Je l'ai clairement entendu dire que cette erreur était une «erreur administrative». Je crois que ceux qui ont écouté la traduction ont dû entendre les mots «an administrative error».
[Français]
La version française du hansard d'hier ne fait aucune référence aux mots «une erreur administrative». Dans le compte rendu officiel des débats, il n'y a aucune explication quant aux manquements du gouvernement de respecter les instructions formelles de la Chambre. C'est la même chose en anglais.
[Traduction]
La version anglaise du hansard ne fait aucunement référence à une erreur administrative.
Il y a deux choses qui me préoccupent dans tout cela. Tout d'abord, il semble que quelqu'un ait modifié sensiblement le texte du hansard qui rapporte ce qui a été dit à la Chambre. Il ne s'agissait pas d'une simple modification grammaticale. La substance même des propos a été modifiée. Cela portait sur les raisons que le gouvernement a invoquées pour ne pas avoir respecté les règles.
Ce qui a été dit, c'est que cela était dû à une erreur administrative. Toutefois, le compte rendu, qui servira à la consultation, ne donne aucune explication.
Cela me mène à ma deuxième préoccupation. Selon les pratiques propres à la Chambre, nous devons accepter la parole de nos collègues. Lorsque le leader du gouvernement à la Chambre a parlé d'une «erreur administrative», j'ai accepté cette explication. Toutefois, cette explication a maintenant disparu. Pourquoi a-t-elle disparu? S'agit-il d'une nouvelle erreur administrative, ou ces propos ont-ils été délibérément radiés parce qu'ils étaient soit incomplets, soit imprécis? Y a-t-il une autre raison pour laquelle l'ordre du Parlement n'a pas été respecté?
J'avais demandé que la présidence songe à déclarer le gouvernement coupable d'outrage parce qu'il n'avait pas respecté une obligation claire. Le Président a plutôt décidé de prolonger la période prévue pour l'étude de ces décrets par le comité.
Il est dangereux de vouloir interpréter les intentions de la présidence, mais j'avais présumé que dans ce cas, le Président avait pris sa décision en se basant sur la référence délibérée par le ministre à une «erreur administrative».
Les motifs ayant poussé le gouvernement à enfreindre le Règlement avaient-ils tout simplement trait à de l'indifférence, ou y avait-il quelque chose de plus fondamental. Le Président peut bien en être arrivé à une conclusion différente. Il est bien certain que dans l'avenir, toute personne qui tenterait de trouver des précédents au non-respect d'un ordre de la Chambre par le gouvernement trouvera dans le compte-rendu officiel qu'est le hansard une explication ministérielle sensiblement différente qui permet une interprétation beaucoup plus large des faits pouvant être invoqués à titre de précédent.
Je serai heureux d'entendre ce que le ministre a à dire à cet égard et par la suite de voir le Président étudier la question. Ce nouveau gouvernement se définit de plus en plus par les erreurs administratives qu'il commet. J'espère qu'il n'y a rien de plus.
[Français]
L'hon. Jacques Saada (leader du gouvernement à la Chambre des communes et ministre responsable de la réforme démocratique, Lib.): Monsieur le Président, le très honorable collègue fait référence à une manipulation du hansard, si je comprends bien. C'est une allégation que je réfute absolument clairement et sans équivoque.
En ce qui concerne les détails de son allégation, je n'ai pas entendu le début. Je me réserve quand même le droit de regarder cela en détail dans le hansard pour lui répondre.
Quoi qu'il en soit, il y a une chose qui est certaine: personne de mon côté n'a essayé de changer quoi que ce soit dans le texte du hansard. C'est une allégation absolument ridicule.
[Traduction]
Le très hon. Joe Clark: Monsieur le Président, le ministre peut qualifier cela d'allégation ridicule. Il ne peut balayer du revers de la main les deux faits suivants. Premièrement, à la Chambre, il a affirmé que les règles n'avaient pas été suivies en raison «d'une erreur administrative». Dans le hansard, qui rend compte des délibérations de la Chambre, on ne retrouve pas cette phrase. C'est une différence importante.
Maintenant, il peut nous dire que ça a été fait par une fée, ou par Groupaction ou par quelqu'un d'autre. La vérité, c'est que quelqu'un a modifié la teneur du hansard.
Le Président: Le très honorable député de Calgary—Centre a soulevé la question. Je suis tout disposé à l'examiner pour établir ce qui a vraiment été dit à la Chambre, parce que nous avons, bien sûr, la bande vidéo de cela. Je vais consulter les bleus et déterminer l'origine du changement, et j'en reparlerai à la Chambre au besoin.
Le très honorable député a soulevé ce point et il n'est que raisonnable que la présidence se penche là-dessus. Si le leader du gouvernement à la Chambre souhaite ajouter quelque chose pour éclaircir la situation, d'accord. Sinon, je vais simplement étudier la question et je ferai rapport à la Chambre.
[Français]
L'hon. Jacques Saada: Monsieur le Président, je relis rapidement le hansard et je me souviens très bien avoir dit effectivement la phrase qui est ici et qui est très claire. J'ai dit: «Je regrette que l'obligation n'ait pas été remplie [...]» Je ne cite pas correctement, mais je cite maintenant:
Je tiens à rappeler cependant que les renseignements ont tous été publiés dans la Gazette du Canada. Je tiens d'ailleurs à informer la Chambre que la procédure de suivi interne a été resserrée pour éviter qu'une telle situation ne se reproduise. |
Ce sont les paroles que j'ai prononcées et je ne vois vraiment pas où on cherche la petite bête, ni dans quel intérêt?
[Traduction]
Le Président: Je vais examiner la question et je ferai rapport à la Chambre le moment venu.
AFFAIRES COURANTES
[Affaires courantes]
* * *
[Français]
Les langues officielles
L'hon. Hélène Scherrer (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 32(2) du Règlement et à l'article 44 de la Loi sur les langues officielles, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport annuel sur les langues officielles pour l'exercice financier 2002-2003.
* * *
[Traduction]
La Loi sur la gestion financière et statistique des premières nations
L'hon. Andy Mitchell (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-23, Loi prévoyant les pouvoirs en matière d'imposition foncière des premières nations, constituant la Commission de la fiscalité des premières nations, le Conseil de gestion financière des premières nations, l'Administration financière des premières nations ainsi que l'Institut de la statistique des premières nations et apportant des modifications corrélatives à certaines lois.
--Monsieur le Président, conformément à l'ordre spécial déjà adopté, j'informe la Chambre que ce projet de loi est identique au projet de loi C-19 tel qu'il se présentait au moment de la prorogation de la session précédente.
(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
Le Président: La présidence reconnaît que cette mesure législative est identique au projet de loi C-19 tel qu'il se présentait au moment de la prorogation de la deuxième session de la 37e législature.
[Français]
En conséquence, conformément à l'ordre adopté le mardi 10 février 2004, le projet de loi est réputé lu une deuxième fois, étudié par le Comité permanent des affaires autochtones, du développement du Grand Nord et des ressources naturelles et avoir fait l'objet d'un rapport.
[Traduction]
Par conséquent, le projet de loi est inscrit au Feuilleton à l'étape du rapport moyennant un délai de préavis conforme au paragraphe 76.1(1) du Règlement.
(Le projet de loi est lu pour la deuxième fois et étudié en comité; rapport est fait du projet de loi.)
* * *
[Français]
PÉTITIONS
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, je dépose une pétition de citoyens de la région de Québec qui demandent d'intervenir publiquement auprès du gouvernement des États-Unis afin d'obtenir la libération de cinq Cubains. On sait qu'un comité a été mis sur pied qui demande et qui réclame, à travers le monde, la tenue d'un nouveau procès pour ces citoyens. J'invite donc le gouvernement à réfléchir sur cette condamnation de cinq citoyens cubains qui ont été incarcérés injustement.
* * *
[Traduction]
M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, PCC): Monsieur le Président, je dépose une pétition signée par des centaines de Canadiens.
Les signataires prient le Parlement de tenir un nouveau débat sur la définition du mariage et de réaffirmer, comme cela a été fait en juin 1999 en réponse à une motion de l'opposition officielle, son engagement à adopter toutes les mesures nécessaires afin de préserver le mariage comme étant l'union d'un homme et d'une femme à l'exclusion de tout autre type d'union.
* * *
L'hon. Brenda Chamberlain (Guelph—Wellington, Lib.): Monsieur le Président, je présente une pétition de 944 noms en faveur de Steven Truscott.
Le 29 novembre 2001, 690 signatures avaient déjà été présentées. Le 24 janvier 2002, le juge Kaufman a été désigné pour entendre la cause de Steven Truscott.
Cette pétition très importante, tout comme celles qui portent 8 000 autres signatures, prie le juge Kaufman de comprendre que nous devons mettre fin rapidement à cette situation. Steven Truscott a attendu longtemps que justice soit faite. Les signataires demandent au juge Kaufman de mener à terme son instruction de l'affaire.
* * *
M. Darrel Stinson (Okanagan—Shuswap, PCC): Monsieur le Président, je suis heureux de présenter aujourd'hui à la Chambre quatre pétitions qui demandent au gouvernement du Canada de tenir un référendum national exécutoire au cours des prochaines élections pour répondre à la question suivante: Le gouvernement du Canada doit-il continuer de définir le mariage comme étant l'union d'un homme et d'une femme à l'exclusion de toute autre forme d'union, oui ou non?
M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.): Monsieur le Président, j'ai reçu quelque 25 000 signatures d'habitants de London, en Ontario, ainsi que de la région immédiatement voisine. Je suis heureux de présenter aujourd'hui les 1 500 dernières signatures, qui ont été dûment vérifiées.
Les pétitionnaires demandent au gouvernement du Canada de maintenir la définition du mariage qui est en usage dans ce pays depuis la Confédération, à savoir l'union d'un homme et d'une femme à l'exclusion de toute autre forme d'union.
Les pétitionnaires remarquent que le gouvernement s'est contredit lui-même sur cette question au cours des dernières années. Ils demandent que le gouvernement en revienne à un énoncé net et distinct de la définition du mariage et qu'il prenne toutes les mesures nécessaires pour défendre cette définition.
M. Kevin Sorenson (Crowfoot, PCC): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai aujourd'hui l'honneur de présenter une pétition comportant près de 600 noms. Des milliers de mes électeurs ont signé des pétitions comme celle-ci. Dans le cas présent, les pétitionnaires proviennent des localités d'Oyen, Cereal, Killam, Sedgewick, Hanna, Drumheller, Stettler et Camrose
Les pétitionnaires exhortent le gouvernement à adopter une loi pour reconnaître l'institution du mariage dans le droit fédéral comme étant l'union d'un homme et d'une femme à l'exclusion de toute autre forme d'union.
Je suis très fier et honoré de présenter cette pétition à la Chambre.
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, je suis heureuse de présenter deux pétitions. La première porte la signature de 60 Manitobains qui se préoccupent également de l'institution du mariage.
Les pétitionnaires exhortent le gouvernement à adopter une loi pour reconnaître l'institution du mariage dans le droit fédéral comme étant l'union d'un homme et d'une femme à l'exclusion de toute autre forme d'union.
* * *
L'étiquetage des boissons alcoolisées
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): La deuxième pétition, monsieur le Président, est signée par des centaines de Canadiens qui s'inquiètent de l'inaction du gouvernement relativement à l'apposition de mises en garde sur les boissons alcoolisées.
Les pétitionnaires reconnaissent que le Parlement a adopté une loi prévoyant l'apposition de telles étiquettes il y a trois ans, et qu'il n'y a pas donné suite. Ils demandent au gouvernement de prendre immédiatement des mesures conformes à la volonté du Parlement et aux souhaits exprimés par la population du pays.
* * *
M. Reed Elley (Nanaimo—Cowichan, PCC): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir au nom de centaines de personnes de tout le pays, dont 600 personnes de la province de Québec et près de 400 du reste du Canada. Ces personnes se joignent à des milliers et des milliers d'autres au pays qui prient instamment le Parlement, en tant que représentants élus de la population, d'adopter une loi consacrant dans la législation la définition traditionnelle du mariage, soit l'union d'un homme et d'une femme à l'exclusion de toute autre forme d'union.
M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, PCC): Monsieur le Président, j'interviens au nom d'électeurs qui me demandent de présenter une pétition priant le Parlement de reconnaître l'institution du mariage dans le droit fédéral comme étant l'union permanente d'un homme et d'une femme à l'exclusion de toute autre forme d'union.
Les pétitionnaires se joignent à des milliers d'autres de la circonscription et à une majorité de Canadiens qui souhaitent que le Parlement prenne des mesures appropriées à ce sujet.
M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le Président, j'ai une pétition portant sur le même sujet que celle présentée par le député d'Okanagan—Coquihalla, c'est-à-dire la reconnaissance des liens amoureux solides qui unissent des conjoints de même sexe.
Les pétitionnaires soulignent que les conjoints de même sexe, même s'ils sont unis par des liens amoureux solides, ne peuvent consacrer ces liens dans le mariage. Ils font observer que la protection des véritables valeurs familiales exige que toutes les familles soient respectées également. Ils estiment que le fait de refuser aux couples de même sexe le droit de se marier accentue l'intolérance et la discrimination et est incompatible avec les valeurs d'égalité, de dignité et de respect qui animent les Canadiens.
Les pétitionnaires de ma circonscription, celle de Burnaby—Douglas, et des milliers d'autres de la circonscription d'Okanagan—Coquihalla prient le Parlement d'adopter une loi assurant aux couples de même sexe le droit égal au mariage.
M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, PCC): Monsieur le Président, j'ai une pétition qui est signée par des électeurs de ma circonscription et qui porte sur le même sujet.
Les pétitionnaires estiment que le mariage est la meilleure assise sur laquelle fonder une famille et élever des enfants et ils disent que la définition du mariage, c'est-à-dire l'union d'un homme et d'une femme, est contestée. Les pétitionnaires demandent au Parlement d'adopter une loi pour réaffirmer la définition du mariage comme étant l'union d'un homme et d'une femme à l'exclusion de toute autre forme d'union.
* * *
M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, PCC): Monsieur le Président, j'ai une deuxième pétition à présenter à propos d'un sujet plutôt intéressant, celui des signaux de radiobalise de détresse.
Cette pétition est signée par 63 habitants de ma circonscription. Les pétitionnaires soulignent qu'il incombe au ministère des Transports d'agir rapidement à cet égard. On économiserait des millions de dollars en services de recherche d'avions privés qui se sont écrasés.
* * *
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, PCC): Monsieur le Président, c'est pour moi un honneur que de présenter trois pétitions au nom des bonnes gens de Dauphin—Swan River.
Dans la première pétition, on demande au gouvernement de réduire les droits d'entrée et de camping dans les parcs nationaux.
* * *
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, PCC): Monsieur le Président, la deuxième pétition porte sur la tragédie qui se produit aujourd'hui dans l'ouest du Canada au sujet de l'industrie du boeuf.
Les pétitionnaires demandent que le Parlement prenne immédiatement des mesures en vue d'élaborer des protocoles reconnus internationalement pour rétablir la confiance envers les produits du boeuf canadien et ouvrir les marchés internationaux du boeuf aux producteurs canadiens.
* * *
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, PCC): Monsieur le Président, la dernière pétition est signée par des milliers de Canadiens qui demandent au Parlement de tenir immédiatement un nouveau débat sur la définition du mariage et de réaffirmer, comme il l'a fait en 1999, son engagement à prendre toutes les mesures qui s'imposent pour préserver le mariage en tant qu'union d'un homme et d'une femme, à l'exclusion de toutes les autres formes d'union.
Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Monsieur le Président, j'ai une pétition signée par un certain nombre de personnes qui désirent que le mariage demeure l'union d'un homme et d'une femme, conformément à un vote tenu à la Chambre des communes en 1999.
M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, PCC): Monsieur le Président, j'ai également une pétition signée par quelques centaines d'habitants de la région d'Edmonton.
Les pétitionnaires demandent au Parlement d'adopter des dispositions législatives reconnaissant dans la loi fédérale l'institution du mariage comme l'union permanente d'un homme et d'une femme, à l'exclusion de toute autre forme d'union.
M. Scott Reid (Lanark—Carleton, PCC): Monsieur le Président, je veux également présenter aujourd'hui une pétition sur le même sujet.
Les pétitionnaires exhortent la Chambre des communes à reconnaître l'institution du mariage comme étant l'union entre un homme et une femme. Ils demandent au Parlement de reconnaître l'institution du mariage dans le droit fédéral comme étant l'union permanente d'un homme et d'une femme.
Mme Paddy Torsney: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement.
Les rappels au Règlement semblent avoir semé la confusion chez certains d'entre nous en ce qui a trait à l'ordre des travaux. Avec la permission de la Chambre, je voudrais revenir à la présentation de rapports afin de pouvoir déposer un rapport.
Le Président: Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: D'accord.
* * *
[Français]
Les délégations interparlementaires
Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 34(1) du Règlement, j'ai l'honneur de présenter à la Chambre, dans les deux langues officielles, le rapport de la délégation du groupe canadien de l'Union interparlementaire concernant sa participation à la 109e conférence et aux rencontres connexes de l'Union interparlementaire, tenues à Genève, en Suisse, du 28 septembre au 3 octobre 2003.
[Traduction]
Parmi les sujets débattus mentionnons le rôle des parlementaires dans l'aide à fournir aux organisations multilatérales afin d'assurer la paix et la sécurité et de créer une coalition internationale pour la paix; les biens publics au niveau mondial et la contribution des nouvelles technologies d'information et de communication à la saine gestion publique; l'amélioration de la démocratie parlementaire; et la gestion de la mondialisation.
Comme d'habitude, nos collègues de tous les partis représentés à la Chambre ont formé une équipe de travail incroyablement efficace.
* * *
Questions au Feuilleton
L'hon. Joe Jordan (secrétaire parlementaire du président du Conseil du Trésor, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.
Le Président: Est-ce d'accord?
Des voix: D'accord.
* * *
Demandes de documents
L'hon. Joe Jordan (secrétaire parlementaire du président du Conseil du Trésor, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les motions portant production de documents soient reportées.
Le Président: Est-ce d'accord?
Des voix: D'accord.
INITIATIVES PARLEMENTAIRES
[Initiatives parlementaires]
* * *
[Traduction]
Le peuple acadien
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 9 mars, de la motion.
Le Président: Comme il est 15 h 44, conformément à l'ordre adopté le lundi 8 mars, la Chambre passe maintenant au vote par appel nominal différé sur la motion no 382, dans le cadre des initiatives parlementaires.
[Français]
Convoquez les députés.
* * *
(La motion, mise aux voix, est rejetée par le vote suivant:)
(Vote no 22)
|
Le Président: Je déclare la motion rejetée.
M. Réginald Bélair: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'ai raté l'occasion qui m'était donnée de voter en faveur de la motion, alors je demande le consentement unanime pour que mon vote soit enregistré en faveur de la motion.
Le Président: Y a-t-il consentement unanime de la Chambre pour permettre à l'honorable député de voter en faveur de la motion?
Des voix: D'accord.
Le Président: D'accord, son vote sera enregistré.
[Traduction]
Comme il est 15 h 58, la Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.
* * *
Les pêches
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 4 février, de la motion.
M. Tom Wappel (Scarborough-Sud-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir prendre part à cette discussion pendant le temps réservé aux initiatives parlementaires. Je souhaite rappeler à la Chambre que nous parlons de la motion proposée par le député de St. John's-Ouest:
Que, de l'avis de la Chambre,le gouvernement devrait prendre des mesures immédiates pour assurer la gestion de garde du nez et de la queue des Grands Bancs et du Bonnet flamand. |
La raison pour laquelle je prends la parole sur cette question aujourd'hui tient à ma participation au Comité des pêches et océans de la Chambre. Cette question en particulier suscite un grand intérêt au sein du comité depuis plus de deux ans.
Le 5 juin 2002, le Comité des pêches et des océans a déposé un rapport intitulé «La surpêche étrangère: impacts et solutions--La conservation sur le Nez et la Queue des Grands Bancs et le Bonnet Flamand», sous la direction compétente du député de Malpeque.
Ce rapport était le fruit du travail considérable réalisé par le comité. Je siégeais à ce comité. Nous sommes allés à Terre-Neuve-et-Labrador pour écouter les gens de cette province parler des difficultés qu'ils avaient eues avec l'Organisation des pêches de l'Atlantique Nord-Ouest et ce qu'elle faisait et ne faisait pas.
C'est un long rapport dans la mesure où on y expose en détails nombre de problèmes, mais j'attire l'attention de la Chambre sur le fait que le comité a recommandé à l'unanimité la prise de certaines mesures. C'est un élément important, parce qu'à l'époque, les cinq partis avaient des représentants au comité et ce rapport est un rapport unanime.
Qu'est-ce qu'on y recommande? Le comité a recommandé la gestion axée sur la conservation. À la page 18, il est dit:
Dans le cadre d’un tel régime, le Canada assumerait l’unique responsabilité de la gestion et de la conservation des zones de notre plate-forme continentale qui se trouvent au-delà de la limite des 200 milles: le nez et la queue des Grands Bancs et le Bonnet flamand. Cependant, les intérêts de pêche étrangers ne seraient pas éliminés pour autant; l’accès et les allocations historiques seraient respectés. |
En vertu de ce régime, le Canada ferait lui-même les travaux de recherche, fixerait les TAC et mettrait en œuvre et administrerait un régime de gestion axé sur la conservation qui comprendrait des mesures de contrôle et d’application des règlements. |
Le Comité croit qu’imposer un régime de gestion axé sur la conservation est nécessaire et raisonnable étant donné l’incapacité de l’OPANO à corriger les problèmes actuels et à discipliner ses membres. |
Des recommandations ont été faites en conséquence. Presque immédiatement, le ministre d'alors des Pêches et des Océans a rejeté du revers de la main les recommandations du comité. C'est malheureux, puisqu'il n'a pas indiqué s'il y avait eu étude sérieuse des recommandations du comité ni des motifs pour lesquels le comité était unanimement parvenu à ses conclusions.
Par la suite, le député de Malpèque a été nommé solliciteur général et un nouveau comité a été constitué. J'ai été nommé président de ce comité. Celui-ci a réexaminé la question après avoir reçu la réponse officielle du gouvernement qui, de l'avis du comité, était totalement inadéquate. Nous avons réexaminé la question et, à l'unanimité encore, les cinq partis sont parvenus aux mêmes conclusions qu'auparavant.
Nous avons déposé ce rapport en mars 2003. Nous avons précisé davantage nos allégations. Nous avons même formulé de nouvelles échéances que nous avons jugées appropriées. Je n'entends pas en expliquer en détail le bien-fondé. Je souligne seulement que rien dans la réponse du gouvernement n'a impressionné les députés qui ont siégé au comité. Voilà pourquoi le comité, une deuxième fois à l'unanimité, a souhaité que le gouvernement adopte un régime de gestion axée sur la conservation.
La deuxième recommandation du comité a été la suivante:
Que le gouvernement du Canada informe l'OPANO et ses parties contractantes qu'il se retirera de l'Organisation et qu'il mettra en oeuvre la gestion axée sur la conservation sur le nez et la queue des Grands Bancs de Terre-Neuve et sur le Bonnet flamand, au plus tard le 31 décembre 2004, conformément à l'Article XXIV de la Convention de l'OPANO. |
Pour ce qui est du deuxième rapport unanime, le gouvernement l'a rejeté aussi en donnant la réponse bureaucratique standard du ministère des Pêches et des Océans, qui est avant tout celle du ministère des Affaires étrangères, c'est-à-dire que le droit international nous interdisait d'aller dans ce sens.
Or, le droit international n'a pas été façonné par des faibles, mais par des audacieux. Il n'a pas été façonné par des peureux, mais par des gens qui avaient de l'aplomb. Dans le cas qui nous occupe, soit que nous regardions mourir les Grands Bancs, les pêches, Terre-Neuve-et-Labrador, soit que nous prenions les mesures qui s'imposent.
Dans les commentaires qu'il a formulés plus tôt, le député qui a proposé la motion s'est dit d'avis que le gouvernement du Canada n'avait pas le courage d'agir. Bien sûr, on ne peut mettre la faute sur un gouvernement précis étant donné que c'est le gouvernement du Canada qui est enfermé dans cette position.
Dans une entrevue qu'il a accordée au Moncton Times and Transcript le 20 février, celui qui deviendra probablement le chef du Parti conservateur du Canada a dit ceci:
Les autorités fédérales en matière de pêches devraient veiller à ce que l'équité soit garantie dans les conventions internationales. Je vais m'employer à moderniser de façon importante l'Organisation des pêches de l'Atlantique nord-ouest de manière à ce que les stocks de poissons du Canada soient mieux protégés et je me réserverai le droit d'agir unilatéralement en vue de les protéger si ces conventions internationales ne le font pas. |
Cela ressemble plutôt à la politique en vigueur. Toutefois, il est temps que le gouvernement du Canada fasse preuve de fermeté. Nous devons nous imposer et faire valoir le constat que nous faisons, à savoir que les stocks sont sérieusement menacés et que l'OPANO n'a pas de mécanisme d'exécution efficace.
On peut arrêter les pêcheurs. On peut avoir des observateurs. Ceux-ci peuvent faire rapport et dire que des poissons trop petits ont été capturés, que de la surpêche a été faite ou que des espèces interdites ont été pêchées, mais il n'en demeure pas moins que les pêcheurs fautifs seront renvoyés dans leur pays où, conformément aux lois en vigueur chez eux, ils se verront, moins souvent qu'autrement, imposer des infractions pour la violation des quotas établis par l'Organisation des pêches de l'Atlantique Nord-Ouest. L'OPANO a un mécanisme d'exécution tout à fait inefficace.
Lorsque le Comité des pêches s'est rendu en Europe pour parler aux pays membres de l'OPANO, cette réalité a été clairement reconnue par tous ceux à qui nous avons parlé en Norvège, à Bruxelles et en Islande. Partout où nous sommes allés, il était très clair que l'OPANO n'a guère de moyens. L'OPANO ne s'acquitte absolument pas de la responsabilité de protéger les pêches. Je pense qu'il est juste de dire que le gouvernement du Canada est conscient de cette situation.
Je note que, le 5 mars, le ministre des Pêches et des Océans et le ministre de la Défense nationale ont annoncé que leurs ministères allaient collaborer relativement aux initiatives touchant la sécurité maritime. Les deux ministres ont dit, entre autres, et je cite le communiqué de presse:
...ils prévoient améliorer la présence de patrouilles sur le nez et la queue des Grands Bancs. D'une façon plus précise, [les ministres des Pêches et des Océans et de la Défense nationale] ont annoncé que leurs ministères travaillent activement à l'élaboration d'une stratégie visant à assurer la présence continue, dans un avenir rapproché, de patrouilles sur le nez et la queue des Grands Bancs. |
Il est grand temps que cela se fasse. L'une des raisons probables pour laquelle les ministres en sont venus à cette décision, qui est une bonne décision, est la pression exercée sur eux par le Comité permanent des pêches et des océans de la Chambre des communes. Le comité a reconnu le problème et il s'est déplacé à l'étranger pour le signaler aux nations qui s'adonnent à la pêche et pour leur souligner l'impact économique très grave de la pénurie de poisson pour la province de Terre-Neuve-et-Labrador.
Je tiens à féliciter le ministre des Pêches et des Océans et celui de la Défense nationale d'avoir proposé cette initiative. Cela démontre que s'ils jugent nécessaire d'avoir la présence d'une patrouille sur le nez et la queue des Grands Bancs, c'est que de toute évidence l'OPANO n'est pas efficace. Si elle l'était, nous n'aurions pas à envoyer des patrouilleurs et à demander à deux ministres d'en faire l'annonce avec éclat. L'OPANO présente une grave lacune: elle ne comporte pas de mécanisme d'exécution.
La seule façon de veiller à sauver les stocks de poisson dans cette région, non seulement pour nous, mais aussi pour les générations futures, c'est d'y assurer la gestion axée sur la conservation. Tous les beaux discours et toutes les politesses diplomatiques ne régleront pas le problème. Si l'OPANO est incapable de le faire, nous serons forcés d'agir de façon unilatérale, non pas dans notre propre intérêt, mais dans celui des pays pêcheurs. Les droits des pays historiquement centrés sur la pêche seront protégés.
Le ministère des Affaires étrangères ne cesse de répéter que nous ne pouvons pas faire ceci ou cela. À une époque, la zone de contrôle internationale était de trois milles, ce qui correspondait à la distance de tir des boulets de canon. Si la technologie avait existé à cette époque et que les canons avaient pu tirer à une distance de 200 milles nautiques, la zone de contrôle serait aujourd'hui de 200 milles nautiques.
J'appuie la motion. Je recommande qu'on y donne suite en respectant les dates prévues dans le plus récent rapport unanime du Comité permanent des pêches et des océans.
M. Andy Burton (Skeena, PCC): Monsieur le Président, je voudrais moi aussi féliciter notre collègue de St. John's-Ouest de nous avoir saisis de cette motion. Je voudrais vous la lire une fois de plus pour qu'elle soit claire pour ceux qui pourraient nous écouter. La motion dit ceci:
Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait prendre des mesures immédiates pour assurer la gestion de garde du nez et de la queue des Grands Bancs et du Bonnet flamand. |
Pour ceux qui l'ignorent peut-être, ces secteurs sont situés à l'extérieur de la limite des 200 milles dans laquelle nous patrouillons à l'heure actuelle, et dont nous nous occupons en ce qui concerne les ressources halieutiques. Ces secteurs sont très riches en ressources halieutiques. On y retrouve des flottes du monde entier.
Je vais vous faire un petit historique. Lorsque Terre-Neuve s'est jointe à la Confédération en 1949, elle apportait avec elle une ressource remarquable. Elle est très mal gérée. Cette ressource dans l'Atlantique Nord-Ouest était l'une des ressources naturelles les plus riches du monde. Elle assurait la survie des flottes de pêche non seulement de l'Amérique du Nord, mais de l'Europe, de l'Espagne, du Portugal, de la Russie et d'autres pays.
De 1989 à de nos jours, la biomasse reproductrice de la morue du Nord a chuté pour n'être plus que de 1 p. 100 de son niveau précédent. Les stocks d'autres poissons de fond subissent le même sort. Cela soulève beaucoup de préoccupations non seulement pour les gens de Terre-Neuve-et-Labrador et d'autres sur la côte est, mais pour tout le Canada. C'est une ressource extrêmement utile.
L'effondrement des stocks de poissons de fond a été attribué à un certain nombre de questions, notamment des problèmes environnementaux, la surpêche par toutes les flottes, de mauvais rapports, de mauvais conseils scientifiques et un certain nombre d'autres facteurs. Cependant, le Canada a fait sa part pour essayer de contrôler, limiter et gérer ses stocks au mieux de ses capacités.
Le problème réside dans le fait qu'à l'extérieur de la limite des 200 milles, les stocks chevauchants, les stocks qui vont d'un côté et de l'autre de la limite car les poissons ne connaissent pas de frontières, ne peuvent être contrôlés adéquatement. L'OPANO est censée gérer cette ressource, mais elle a malheureusement échoué complètement.
Je vais aborder le coeur de la question, la demande d'une gestion axée sur la conservation, un peu plus tard, mais nous devons nous pencher sur la gestion des écosystèmes, car c'est vraiment essentiel dans toute cette affaire.
Il existe divers moyens qui pourraient nous aider à régler le problème aussi bien que la gestion axée sur la conservation, notamment la gestion de l'écosystème. Nous devons songer aux autres espèces qui habitent nos océans en plus des poissons. Il y a les phoques, les baleines, les mammifères marins et ainsi de suite. Nous sommes devenus des prédateurs par rapport à cette ressource. Nous devons gérer l'écosystème dans son ensemble et non une espèce en particulier.
Nous avons essayé de gérer le poisson. Nous avons lamentablement échoué. Nous devons donc chercher d'autres façons de procéder.
J'ai eu la chance de voyager avec le groupe du Comité des pêches qui s'est rendu sur la côte est il y a deux ans. Nous avons vu et entendu les gens nous dire à quel point la situation était difficile et à quel point le déclin des stocks de poissons affectait les collectivités de Terre-Neuve et du Labrador.
Certaines collectivités sont au bord de l'éclatement. Il est très triste de voir une telle situation. Depuis des centaines d'années, ces collectivités survivent grâce à cette ressource, mais ce n'est plus possible et il faut que les choses changent.
L'Organisation des pêches de l'Atlantique Nord-Ouest est censée contrôler ces pêches. Cette situation présente de nombreux problèmes intrinsèques. Je vais expliquer pourquoi elle ne fonctionne pas.
La raison pour laquelle les choses ne fonctionnent pas, c'est que la mise en application est laissée aux soins des États membres. Autrement dit, le loup est responsable de la bergerie. On peut enfreindre les règles. Sans surveillance appropriée et sans application adéquate, les règles ne changent rien. Elles ne permettent pas de contrôler la situation.
Voilà le problème de l'OPANO. La situation est ingérable et hors de contrôle car pas tous, mais certains pays violent de façon flagrante les règles inhérentes au privilège de pouvoir pêcher au large de nos côtes, même au-delà de la limite des 200 milles. Voilà une source de grave inquiétude et on ne prend pas les mesures adéquates à cet égard.
Certains des effets de la surpêche au large de Terre-Neuve-et-Labrador ont été énoncés par Richard Cashin, président d'un groupe de travail sur le revenu et l'adaptation dans les pêches de l'Atlantique. Il a dit:
Nous assistons ici à une famine d’envergure biblique—une destruction considérable. Les conséquences économiques et sociales de cette destruction constituent un véritable défi à surmonter et un fardeau que doit porter le pays, et non seulement ceux qui en sont les victimes. |
Ce constat est très réel. Il date de 1993, et il est encore plus pertinent aujourd'hui.
Il est très difficile de saisir l'étendue du désastre, non seulement dans le Canada atlantique et au Québec, mais surtout dans les coins isolés de Terre-Neuve-et-Labrador, désastre qui a été causé par la perte des stocks de morue du Nord et de presque tous les autres stocks de poisson de fond. Nous devons en prendre conscience.
Ce que nous faisons ne donne rien. Quand nos efforts ne donnent pas de résultats, il faut trouver autre chose. Il est temps que le gouvernement fasse preuve de leadership, comme mon vis-à-vis vient de le dire. J'ai siégé au Comité des pêches avec lui. Il est maintenant président de ce comité et il accomplit de l'excellent travail. Il était avec nous quand nous sommes allés sur la côte est. Il a constaté par lui-même quels étaient les problèmes.
Si nous adoptions un mode de gestion axée sur la conservation, nous ne dirions pas aux autres pays qu'ils ne peuvent venir pêcher dans nos eaux. Nous leur dirions simplement que nous voulons gérer la ressource d'une manière plus responsable et durable.
Le Canada se chargerait des faire les études scientifiques, d'établir les prises annuelles totales et de mettre en oeuvre un système de gestion axée sur la conservation qui comprendrait des mesures de contrôle et d'application. Cela entraînerait certes des coûts, mais, de façon générale, le recouvrement de la ressource et des pêches les compenserait à court terme.
Il devrait être dit clairement aux autres membres de l'OPANO que le Canada considérerait cela comme une mesure de dernier recours en cas d'échec de l'OPANO. C'est ce que disait le rapport du comité. Franchement, je pense que l'OPANO a échoué et qu'elle continue d'échouer. Il est vraiment temps de corriger la situation, et de le faire d'une manière plus équitable.
Lorsque le comité a déposé son rapport en juin 2002, le ministre a malheureusement choisi de l'ignorer totalement. C'était là vraiment manquer de prévoyance. Nous avons aujourd'hui un nouveau ministre. Sauf le respect que je dois au ministre précédent, je demande instamment au nouveau ministre d'examiner très sérieusement cette question. Le comité a recommandé la gestion axée sur la conservation dans le cas du nez et de la queue des Grands Bancs et du Bonnet flamand. Il est de la plus haute importance que cette question soit réglée avec fermeté. Les patrouilles qui ont été annoncées récemment ont élargi les mesures de contrôle et cela ne peut pas nuire.
Compte tenu des contraintes budgétaires, le ministère des Pêches et des Océans se retrouve toujours en difficulté lorsqu'il est question de budget et de coupures. Nous ne pouvons nous occuper adéquatement de cette question en ne faisant qu'ajouter quelques patrouilles. Même avec des patrouilles insuffisantes, on me dit que pendant les 10 dernières années, quelques 300 infractions ont été documentées et enregistrées. Dans le cas de ces 300 infractions, on ne sait pas trop quelles sanctions ont été appliquées.
Pendant que j'étais en Islande, l'année dernière, avec le Comité des pêches, le Olga, un bateau de pêche a été pris à pêcher de la morue sous moratoire et a été amené au port, à St. John's je crois. Il a été relâché et il a disparu. Nous ignorons quelles sanctions, s'il y a lieu, ont été imposées au navire, à son équipage et à son capitaine. Cette situation est monnaie courante
Bref, le Canada doit finalement prendre le contrôle de ces secteurs. Je demande instamment aux gouvernement d'étudier la question, d'agir énergiquement et de la régler. Je pense qu'il bénéficie de l'appui nécessaire.
C'est une question importante pour tous les Canadiens, et pas seulement ceux de la côte est. C'est une question qui doit préoccuper tous les Canadiens. C'est notre souveraineté qui est en jeu. On peut compter sur mon appui.
M. Roy Cullen: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Il y a eu des entretiens entre les partis, et vous constaterez, je crois, qu'il y a consentement pour revenir au dépôt de rapports de comité pour que je puisse déposer le rapport du Comité permanent des finances sur le projet de loi C-21.
Le vice-président: D'accord?
Des voix: D'accord.
AFFAIRES COURANTES
[Affaires courantes]
* * *
[Français]
Les comités de la Chambre
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le deuxième rapport du Comité permanent des finances sur le projet de loi C-21, Loi modifiant le tarif des douanes. Il a été convenu, le mardi 9 mars 2004, d'en faire rapport sans amendement.
Le vice-président: Je remercie la Chambre de sa coopération.
La députée de Rimouski—Neigette-et-la Mitis a la parole.
Initiatives parlementaires
[Initiatives parlementaires]
* * *
[Français]
Les pêches
La Chambre reprend l'étude de la motion.
Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Neigette-et-la Mitis, BQ): Monsieur le Président, je suis vraiment très heureuse de prendre la parole dans ce débat et de rappeler avec beaucoup de plaisir que le Bloc québécois appuiera cette motion sans aucune difficulté.
Pour le bénéfice de celles et ceux qui liront un jour cette belle prose, je voudrais rappeler la motion C-136, pour que le texte soit complet:
Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait prendre des mesures immédiates pour assurer la gestion de garde du nez et de la queue des Grands Bancs et du Bonnet flamand. |
Quand mon collègue de Matapédia—Matane était intervenu le 30 octobre 2003, il avait souligné à la Chambre que cela n'avait aucun sens que l'on ait traduit en français «gestion de garde». On avait demandé que la motion soit corrigée, mais cela n'a pas été fait.
Je tiens à aider la Chambre à écrire comme il faut le texte de la motion en français, parce que c'est assez blessant de faire des interventions pour que notre langue ne soit pas massacrée et de voir qu'il y a un manque de volonté politique de nous donner satisfaction sur une affaire aussi insignifiante que le fait d'écrire la langue comme il faut.
Le premier rapport, qui a été déposé par le Comité permanent des pêches et des océans, s'intitule: «La surpêche étrangère—Impacts et Solutions: la conservation sur le Nez et la Queue du Grand Banc et le Bonnet Flamand.»
Le deuxième rapport, qui a été déposé en mars 2003, s'intitule: «Gestion axée sur la conservation au-delà de la zone des 200 milles du Canada.»
Il n'est jamais question, comme cela été traduit dans cette motion, de «gestion de garde». Cela ne tombe pas sous le sens. J'espère que cette fois, on aura gain de cause pour une affaire qui a son importance, malgré tout, et que le texte sera écrit comme il faut.
Je vous remercie de m'avoir permis d'ouvrir cette parenthèse. Je vais donc maintenant passer au discours comme tel.
Ce qui est important, c'est peut-être d'informer un peu plus les gens qui nous écoutent. Il y en a toujours un peu. Cela semble un peu drôle de parler des Grands Bancs de Terre-Neuve. Au sujet de ces Grands Bancs de Terre-Neuve, je me rappelle que, lorsqu'on était jeunes, on faisait des blagues avec cela. Les gens demandaient de quelle couleur on les avait peints? Toutefois, on ne savait pas trop de quoi on parlait. À mon avis, c'est important d'expliquer ce qu'on entend par le nez et la queue des Grands Bancs et le Bonnet flamand.
On a d'abord eu nos limites. On était habitués, quand j'étais jeune, à dire que c'était trois milles au large des côtes. Après cela, c'est passé à 12 milles et ensuite à 200 milles. Donc, de notre côte jusqu'aux 200 milles, c'est considéré comme le territoire canadien.
Dans deux secteurs situés au large des côtes de Terre-Neuve, le plateau continental s'étend au-delà de la zone économique des 200 milles et pousse deux pointes tout juste à l'extérieur de cette zone. On appelle ces deux pointes le nez et la queue des Grands Bancs, parce qu'ils sont situés dans les pêcheries historiques qu'on appelle les Grands Bancs de Terre-Neuve. Il est extrêmement important qu'on sache cela.
Ensuite, l'autre chose à souligner, c'est le Bonnet flamand. D'une certaine façon, c'est une île sous-marine débordant les limites de la zone des 200 milles. Elle est située à la fois à l'intérieur et à l'extérieur du plateau continental.
Il y a donc trois secteurs où le Canada affirme ne pas pouvoir intervenir et où des pays de toutes les régions du monde abusent de façon flagrante des ressources halieutiques qui nagent dans les eaux canadiennes.
Je me rappelle, ayant déjà été membre du Comité permanent des pêches et des océans, avoir discuté de cette question avant que le rapport soit complété. J'étais étonnée de voir ce qu'on nous servait comme médecine. On nous disait: «Ah, on n'a pas le droit de faire quelque chose au-delà des 200 milles.»
Par la suite, on a créé un organisme qui s'appelle l'OPANO, qui est censé gérer les choses ensemble.
Toutefois, le Canada devient frileux quand il s'agit de prendre ses responsabilités ce qui se manifeste dans beaucoup de secteurs d'activité. Par exemple, en ce qui concerne les subventions à l'agriculture, le Canada a été le premier et le seul pays à les couper. Ce n'est pas compliqué, on accordait 5 milliards de dollars en subventions aux agriculteurs, et on a dit qu'à cause de l'OMC il fallait tout couper. Cela n'a pas été le cas aux États-Unis ni en Europe. On dirait que le gouvernement prend prétexte d'ententes censées nous permettre de gérer pour ne rien faire par la suite.
Mon collègue qui est intervenu précédemment soulignait que lorsque Terre-Neuve est entrée dans la Confédération, cette province a amené avec elle un potentiel absolument extraordinaire. Je lisais, dans un des discours qui ont été prononcés au mois d'octobre lorsque la motion a été débattue une première fois, qu'on estimait aujourd'hui à environ 3 milliards de dollars les revenus que Terre-Neuve pourrait tirer de la pêche si on l'avait bien gérée.
Autour de Terre-Neuve, il y avait beaucoup de poisson, énormément de poisson. On sait, par la mouvance des poissons, que ce qui se trouve au large de Terre-Neuve finit par entrer dans le golfe. Finalement, cela avait une incidence heureuse également dans les zones côtières des Maritimes, et se rendait jusque dans le golfe du Saint-Laurent.
Quand on s'est rendu compte qu'il n'y avait plus de poisson à Terre-Neuve, plus de morue et plus de sole, et qu'on a été obligés d'instaurer des moratoires, c'est bien évident qu'il n'y avait plus de morue dans le golfe du Saint-Laurent non plus. On sait que ces poissons partaient de Terre-Neuve et venaient dans le golfe.
Quand on a mal géré, on arrive à des résultats catastrophiques. Il y a quelques années, le gouvernement avait injecté 3 milliards de dollars dans le budget pour réorienter l'activité économique des régions. C'est bien beau de dire qu'on permettra aux pêcheurs de faire autre chose, mais que fait-on des bateaux qu'on possède, de la formation que les gens n'ont pas forcément, et du désir que les jeunes ne manifestent pas?
J'habite au bord de la mer. Vous ne me feriez pas un très grand plaisir de me faire déménager sur l'asphalte, en plein coeur d'une ville. J'étoufferais probablement, parce que je suis habituée de vivre au bord de la mer, avec l'air du large.
Quand on se rend compte qu'un gouvernement a laissé se détruire ainsi une région, c'est très inquiétant pour l'avenir du Canada. Le gouvernement est supposé apporter du changement. Ce serait un énorme changement si le nouveau ministre des Pêches prenait le temps de lire les deux rapports unanimes. Le Bloc québécois et tous les autres partis ont été unanimes avec les recommandations que ces rapports contiennent. J'invite donc le nouveau ministre des Pêches à les lire et à y donner suite pour le mieux-être du Canada.
M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le Président, j'aimerais féliciter les membres du comité, surtout mon collègue de St. John's-Ouest qui a présenté cette motion à la Chambre des communes.
Cette motion est d'une importance qu'on ne peut même pas imaginer. Elle vise à allonger la côte de 200 milles pour se rendre au Bonnet flamand ainsi qu'au nez et à la queue des Grands Bancs. C'est un jargon que tous les pêcheurs connaissent ainsi que les gens de l'industrie de la pêche, surtout à Terre-Neuve-et-Labrador.
Ce n'est pas d'hier qu'on parle de cela. Cela n'a pas commencé en 1995. Quand j'étais représentant du syndicat, en 1988, on parlait déjà de protéger les côtes de 200 milles. On disait déjà, en ce temps-là, qu'une erreur avait été commise. Ce n'est pas la communauté internationale qui surveille les environs des 200 milles où il y a une possibilité de sauver nos stocks de poissons.
Cela n'a pas seulement affecté Terre-Neuve-et-Labrador mais également la Nouvelle-Écosse, le Québec et le Nouveau-Brunswick. Comme la députée de Rimouski--Neigette-et-la Mitis le disait, le poisson nage, il change de place et entre dans le golfe. Ce n'est pas pour rien qu'aujourd'hui on a une telle diminution de stock.
C'est pour cela que la motion du député de St. John's-Ouest est importante. Il demande au gouvernement de protéger ces eaux.
Comment la communauté internationale pourrait-elle être contre la préservation et pour le bien-être de toutes les communautés? Le gouvernement a cette responsabilité. C'est triste de voir que les comités parlementaires ont fait des recommandations à maintes reprises et que le gouvernement ne les a jamais appuyées.
Je me rappelle, lorsque George Baker était président du Comité permanent des Pêches et des Océans, que tous les partis politiques avaient fait des recommandations sur les pêches. Par la suite, c'était triste de voir que George Baker ne s'est même pas présenté à la Chambre la journée où le vote a eu lieu, parce qu'il n'a pu avoir l'appui de son gouvernement, le gouvernement libéral, pour protéger les stocks de poissons.
Cela a fait mal à des communautés.
[Traduction]
Cela nuit à la population, aux pêcheurs et aux collectivités. Les localités ont souffert parce que des gens ont dû quitter leur maison de Terre-Neuve-et-Labrador pour aller trouver un emploi ailleurs. Dans le secteur de la pêche, les pertes d'emploi ont été inimaginables.
Les Terre-Neuviens ont tiré leur subsistance de la pêche pendant très longtemps. Leur province a été accueillie à bras ouverts, lorsqu'elle s'est jointe au reste du Canada. Le Canada a-t-il invité Terre-Neuve parce qu'il voulait qu'elle se joigne à lui ou pour mettre la main sur ses stocks de poisson? Maintenant que le Canada en a pris possession, on dirait qu'il ne se soucie plus de la province. Voilà ce qui est regrettable.
Notre pays pourrait agir collectivement pour modifier les règles afin de protéger nos stocks de poisson. Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond, lorsque le comité parlementaire doit revenir sans cesse à la charge avec les mêmes recommandations.
En 1988, lorsque j'étais représentant syndical, nous avions un problème de pêche. Nous avons alors parlé de la limite des 200 milles, du nez et de la queue des Grands Bancs. Nous avons parlé de protéger nos stocks de poisson. Cette protection n'a pas commencé en 1995, ni en 1999, ni en 2004 non plus, assurément.
Nous avons alors formulé des demandes. Nous nous sommes adressés au gouvernement conservateur de l'époque. Il suffirait de vérifier ce qui s'est passé pour s'apercevoir que les habitants de Terre-Neuve-et-Labrador ont demandé de l'aide pour sauver l'industrie de la pêche. On n'a toujours rien fait.
[Français]
C'est regrettable quand on voit tous les efforts du comité parlementaire, qui a voyagé partout le long de la côte atlantique pour rencontrer les travailleurs et les travailleuses de l'industrie de même que toutes les personnes qu'il avait besoin de rencontrer. Ce Parlement l'a autorisé à voyager dans la région atlantique pour aller rencontrer les personnes responsables et être capable de discuter avec elles. Le comité devait revenir ici, au Parlement, avec des recommandations à formuler au gouvernement fédéral. Le gouvernement fédéral demeure silencieux sur le sujet. Je retire mes propos; ce n'est pas qu'il est silencieux, mais il n'appuie pas clairement ces motions à la Chambre des communes. Il vote contre les motions et les projets de loi qui pourraient aider les pêcheurs et les employés d'usine. En définitive, il y a aussi des employés d'usine qui travaillent et qui ont été affectés par cela.
Vous savez, la pêche n'est pas un secteur facile. Ce n'est pas facile quand on habite dans des communautés qui vivent de la pêche. Je l'ai dit à maintes reprises. Partout au Canada, on est content lorsqu'on commande une assiette avec une belle morue ou bien un beau homard ou de la plie. On est content de l'avoir. Cela provient de chez nous, de Terre-Neuve-et-Labrador, du Québec, de la Nouvelle-Écosse et de l'Île-du-Prince-Édouard, tout autant que de la Colombie-Britannique.
Il faut être capable d'aider et d'accepter des recommandations de personnes qui travaillent si durement pour venir à la Chambre et émettre des recommandations de la sorte.
Ce que le gouvernement décide plutôt de faire, surtout le nouveau gouvernement que nous avons depuis le mois de décembre, c'est de lancer une annonce dans la communauté disant qu'on mettra à la porte 600 travailleurs du ministère des Pêches et des Océans. C'est inacceptable.
Alors qu'on éprouve de la difficulté dans les pêches, que les stocks de poisson sont à leur plus bas, qu'il faut protéger et être capable de faire revenir les stocks à leur niveau normal, c'est à ce moment qu'on a besoin de plus de gens pour être capables d'y parvenir. En même temps, il faudrait avoir plus de scientifiques capables de travailler avec les pêcheurs.
Au lieu de cela, le gouvernement dit que là où un groupe éprouve de la difficulté, on les coupera. C'est ce qu'on fera. On ne leur fournira pas l'aide dont ils ont besoin. C'est honteux de voir de telles décisions du gouvernement. Je suis certain que les communautés vivant de la pêche ne sont pas d'accord avec cela.
Il faudrait plutôt être capable de s'unir et d'étudier les recommandations des comités. Le gouvernement actuel, avec le nouveau premier ministre du Canada en tête, a dit qu'il sera plus ouvert, qu'il donnera davantage l'occasion aux comités de travailler ensemble et d'accomplir le travail pour apporter plus de démocratie dans notre Parlement. Quand le comité arrive avec des recommandations, le parti ministériel est le premier à voter contre celles-ci. Ce n'est pourtant pas un comité au sein duquel on observait des divisions.
Je me rappelle que lorsque George Baker était le président du comité, il ne s'est pas présenté à la Chambre pour voter. Je me rappelle qu'un autre député qui siégeait au comité, qui avait voté unanimement pour la recommandation, est venu à la Chambre et a voté contre sa propre recommandation. Il a fait cela parce que son vote a été dicté par le gouvernement.
J'ai hâte de voir, au sujet de la motion du député de St. John's-Ouest, dans la nouvelle ère du premier ministre, si ce dernier indiquera à ses députés de voter sur la recommandation de la motion pour être capable d'établir les stocks dont on a besoin dans le Grand Banc, de les protéger et de les ramener à leur niveau initial, et non laisser tout cela dans les eaux internationales, où l'on perdra et continuera de perdre cette industrie si importante pour les communautés, autant du Nouveau-Brunswick que de l'Île-du-Prince-Édouard, de la Nouvelle-Écosse, de St. John's, Terre-Neuve, ou du Québec.
Le NPD sera favorable à la motion du député de St. John's-Ouest, et il est à souhaiter que le gouvernement le sera aussi.
[Traduction]
L'hon. Scott Brison (secrétaire parlementaire du premier ministre (Canada-États-Unis), Lib.): Monsieur le Président, en tant que Canadien de la région atlantique et en tant que secrétaire parlementaire du premier ministre chargé des relations canado-américaines, j'accueille favorablement cette occasion d'intervenir à la Chambre dans cet important dossier. C'est une question de gestion des ressources, de multilatéralisme et de coopération internationale.
Je répète que le gouvernement est déterminé à apporter des améliorations durables à la manière dont les pêches sont gérées au-delà de la limite de 200 milles.
J'aimerais remercier le député de St. John's-Ouest pour l'intérêt soutenu qu'il porte à la question. Je tiens en outre à remercier le Comité permanent des pêches et des océans pour ses récents rapports et ses récentes recommandations que le gouvernement a soigneusement étudiés.
La motion dont la Chambre est saisie aujourd'hui demande que le gouvernement du Canada prenne des mesures immédiates pour assurer une gestion axée sur la conservation dans la région du nez et de la queue des Grands Bancs.
Le premier ministre et le gouvernement du Canada reconnaissent que la surpêche étrangère des stocks chevauchants dans la région du nez et de la queue des Grands Bancs et du Bonnet flamand constitue un grave problème qui exige une intervention immédiate. C'est pourquoi le gouvernement, en collaboration avec nos partenaires internationaux, tente de résoudre le problème. Nous sommes déterminés à travailler en coopération avec les autres pays pour gérer nos océans et nos pêches.
Cette approche a en fait reçu l'appui de l'ancien chef de l'Alliance. Le candidat actuel à la direction du Parti conservateur, le député de Calgary-Sud-Ouest écrivait pas plus tard que le mois dernier dans le Times and Transcript de Moncton qu'il entreprendrait une réforme importante de l'Organisation des pêches de l'Atlantique Nord afin de mieux protéger les stocks de poisson du Canada et qu'il se réserverait le droit d'agir unilatéralement afin de les protéger si les ententes internationales ne le faisaient pas.
Que ce soit clair pour nos collègues présents aujourd'hui, l'ancien chef de l'Alliance canadienne, qui sera peut-être le chef du Parti conservateur, approuve entièrement la position du gouvernement, à savoir que nous devons d'abord voir à ce que fonctionne l'approche multilatérale que représente l'OPANO avant d'agir unilatéralement.
Les Canadiens veulent que leur gouvernement soit un avocat efficace de la conservation et de l'exploitation durable. Pour ce faire, nous devons siéger à la table où se prennent les décisions. Ce n'est que de cette manière que nous assurerons un avenir plus souriant et durable aux localités qui vivent de la pêche.
Le Canada poursuit les consultations bilatérales avec ses partenaires de l'OPANO afin de les convaincre qu'il est urgent que les bateaux respectent les règles établies par l'OPANO et que les gouvernements interviennent lorsque ces dernières sont violées.
En novembre, le Canada a ratifié la convention des Nations Unies sur le droit de la mer, geste qui nous permettra de revendiquer à l'échelle internationale la reconnaissance des limites de notre plateau continental.
Le Canada n'est pas seul à vouloir modifier le mode de gestion des stocks de poisson en haute mer. En décembre, l'Union européenne a ratifié l'Accord de pêche des Nations Unies. Nous sommes confiants de rendre plus efficace l'OPANO et nous estimons qu'un changement est imminent avec la mise en application de l'Accord de pêche des Nations Unies.
Nous devons continuer à oeuvrer avec nos partenaires des autres pays en vue d'instaurer un changement réel et durable. Mais nous allons rechercher à obtenir des résultats et toutes les options seront envisagées à cette fin.
En janvier, le premier ministre a débattu de la question de la surpêche dans les eaux internationales au Forum économique mondial de Davos. Le gouvernement a fermement indiqué à ses partenaires de l'OPANO qu'il fallait, de toute urgence, que les navires respectent les règles de l'OPANO et que les gouvernements assument leur responsabilité et rendent des comptes lorsque ces règles sont violées.
Tous les partenaires de l'OPANO sont solidairement responsables de veiller à ce que les règles en matière de pêche soient respectées. En même temps, nous avons la responsabilité de veiller à ce que ceux qui ne suivent pas les règles soient sanctionnés et de faire du développement durable notre grande priorité à l'avenir.
Les dirigeants actuels dans le monde sont favorables à la conservation et au développement durable des stocks de poisson en haute mer. Or, en agissant de façon unilatérale, comme le laisse entendre cette motion, nous risquons de compromettre nos alliances internationales et notre réputation comme chef de file dans la gestion coopérative des pêches.
J'ai consulté des représentants de l'industrie des pêches qui sont d'accord avec mon analyse. Le Canada, avec le temps, a acquis une réputation enviable dans les affaires internationales. Cette proposition, si elle était mise en oeuvre, pourrait d'une seule foulée menacer notre réputation. Nous devons être réalistes au sujet d'un geste qui pourrait être considéré par la communauté internationale comme étant contraire au droit coutumier international et auquel résisteraient fermement les pays qui pêchent en dehors de la limite de 200 milles.
Il nous faudrait des années pour assurer la gestion axée sur la conservation, et l'établissement du contrôle de l'autorité à l'égard des zones contestées pourrait même prendre encore plus de temps. Entre-temps, l'influence que nous exerçons et notre capacité à atteindre nos objectifs dans l'OPANO ainsi que dans d'autres organismes internationaux pourraient être sérieusement réduites.
Le gouvernement reconnaît que la conservation et la protection des stocks de poisson est une question très importante. C'est une initiative qui devrait être entreprise d'une façon permettant d'améliorer plutôt que de ternir la réputation enviable dont jouit le Canada à l'échelle internationale en tant que pays respectant le multilatéralisme et travaillant de concert avec les organismes multilatéraux pour défendre les intérêts du Canada.
Le ministère des Pêches et des Océans est à mettre sur pied une nouvelle orientation stratégique qui vise à apporter des modifications importantes et à donner au Canada toutes les chances possibles d'influencer l'OPANO. Un groupe de travail a été mis sur pied avec les conseillers des gouvernements fédéral et provinciaux et de l'industrie en vue d'examiner les diverses options et d'établir une orientation stratégique.
J'ai confiance que la nouvelle stratégie de mise en application donnera au Canada les outils dont il a besoin pour réduire de façon importante la surpêche étrangère au-delà de la zone de 200 milles. Fort de cette stratégie, le Canada réagira avec force sans miner ses relations internationales ou abandonner son appui à l'OPANO.
Je peux garantir aux députés que le gouvernement du Canada est prêt à faire ce qu'il faudra pour tenter de régler le grave problème de la surpêche étrangère. Nous devons tout d'abord prendre appui sur certains changements apportés récemment qui permettraient au Canada de promouvoir ses intérêts dans le cadre de l'OPANO.
De plus, notre gouvernement met sur pied une stratégie qui permettra de faire face au problème de la surpêche étrangère, une stratégie qui ira bien au-delà de la motion du député qui porte sur la gestion axée sur la conservation. Je crois que le député sera heureux des résultats et je voudrais encore une fois le féliciter de l'intérêt qu'il porte à cette question.
J'aimerais souligner tout particulièrement que nous avons majoritairement reconnu à la Chambre l'appui du Canada à l'égard des méthodes de coopération multilatérales dans le but de défendre les intérêts du Canada, au moment de la visite du Secrétaire général des Nations Unies à la Chambre alors que tous les partis ont fait part de leur appui à l'égard de cette approche multilatérale. Il est important que nous considérions cette cohérence pour que le Canada puisse continuer d'être considéré comme un pays qui poursuit ses objectifs nationaux et internationaux de façon multilatérale à l'égard de l'adoption de politiques visant à protéger ses pêches. Il est clair que l'appui des principes de l'OPANO et les négociations qui y ont cours sont compatibles avec cet objectif alors que nous tentons de défendre les intérêts du Canada dans le secteur des pêches.
M. Norman Doyle (St. John's-Est, PCC): Monsieur le Président, je suis heureux de dire quelques mots sur cette motion qui appelle le Canada à assurer une gestion axée sur la conservation dans le cas du nez et de la queue des Grands Bancs et du Bonnet flamand. Le vrai problème tourne autour du fait que les poissons se déplacent sur la totalité du plateau continental, dont la forme est irrégulière, tandis que le droit international régissant les pêches ne s'applique que sur 200 milles.
Le nez et la queue des Grands Bancs et du Bonnet flamand se situent à l'extérieur de la limite de 200 milles et sont assujettis aux lois de l'OPANO. À l'extérieur de cette limite de 200 milles, nous sommes censés laisser les pêcheurs contrevenants se faire juger par leurs propres tribunaux. Les tribunaux étrangers ont affiché un laxisme notoire pour ce qui est de châtier leurs ressortissants pour avoir violé des règles au large de nos côtes, à un océan de distance.
La pêche de fond dans le nord-ouest de l'Atlantique était la plus grande pêcherie du monde. Pendant un certain temps, elle a nourri le monde. Nous avons intégré cette zone de pêche dans la Confédération en 1949. La conjugaison de la négligence de la part d'Ottawa et de la surpêche étrangère incessante a conduit à la diminution des stocks. Non seulement ces stocks diminuent, mais on est également en train de les dévaster.
La morue du Nord est maintenant au bord de l'extinction. Cela a eu des effets dévastateurs pour les économies de nombreuses collectivités côtières de Terre-Neuve-et-Labrador, en particulier, et de nos provinces de l'Atlantique, en général. Cela est davantage qu'un problème local; c'est un problème national. Ces zones de pêche sont une très importante source de nourriture pour le monde que certains pays et intérêts de pêche ont presque détruit. Le Canada a le devoir, non seulement pour son propre peuple, mais pour la population du monde, d'intervenir avant qu'il ne soit trop tard.
J'ai déclaré plus tôt que l'effondrement des pêcheries de la morue du Nord avait dévasté de nombreuses collectivités côtières. Cela et certains changements apportés au système de l'assurance-emploi ont été responsables, en fait, de ce qu'environ 50 000 personnes ont quitté ma province depuis environ une décennie. Cela a eu des conséquences très négatives pour nous. Si le Canada n'avait pas gaspillé nos pêcheries, bon nombre de ces personnes n'auraient pas eu à quitter les nombreux petits ports isolés de Terre-Neuve-et-Labrador et à s'établir dans d'autres régions du Canada, à savoir à Fort McMurray et dans de nombreux autres endroits.
Lorsqu'on dit que le Canada devrait assurer la gestion axée sur la conservation au-delà de la zone de 200 milles, cela ne veut pas dire que nous sommes satisfaits de la gestion effectuée à l'intérieur de la zone de 200 milles, car elle a été fort boiteuse. Ottawa n'a jamais pris au sérieux la pêche pratiquée à Terre-Neuve-et-Labrador. Il n'a jamais pris au sérieux la pêche pratiquée au Canada atlantique. Il accepte volontiers d'échanger des quotas de pêche contre l'accès à certains marchés pour les grandes industries manufacturières du centre du Canada. La gestion des pêches ne figure même pas sur la liste des priorités d'Ottawa.
Il est vrai que nous avons maintenant notre mot à dire dans la gestion de nos ressources pétrolières et gazières en haute mer, des ressources non renouvelables. Nous en sommes ravis, mais nous n'avons reçu jusqu'à maintenant que très peu de redevances. Le gouvernement fédéral gère très mal la pêche. Il s'est en général très mal occupé de la gestion des recettes provenant de nos ressources pétrolières et gazières en haute mer, recettes auxquelles notre province a pleinement droit.
La mauvaise gestion des pêches passera à l'histoire comme l'une des graves injustices commises à l'endroit de la population de Terre-Neuve-et-Labrador.
Je sais que mon temps de parole est écoulé et je vous remercie, monsieur le Président, de m'avoir donné l'occasion d'exprimer brièvement mon point de vue.
Le vice-président: Je remercie le député de St. John's-Est de sa coopération car la présidence voudrait réserver les cinq dernières minutes à l'auteur de la motion, le député de St. John's-Ouest, qui a le droit de réplique.
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PCC): Monsieur le Président, je remercie mes collègues, le député de St. John's-Est, le député de Skeena et le député de Scarborough-Sud-Ouest, le président du Comité des pêches et des océans qui a dirigé le comité de main de maître et qui a fait un travail extraordinaire.
[Français]
Permettez-moi aussi de dire merci à ma bonne amie, la députée de Rimouski--Neigette-et-la Mitis, ainsi qu'à mon ami de Acadie—Bathurst.
[Traduction]
Aujourd'hui, ils ont montré qu'ils comprenaient et appuyaient nos réclamations, à savoir que le Canada doit faire preuve de leadership, pour une fois, qu'il doit prendre le contrôle de la gestion d'une ressource qui nous appartient véritablement, une ressource qui nage au large du plateau continental canadien et qui est surexploitée depuis des années.
Je n'oublie pas le secrétaire parlementaire, mon ami de Kings—Hants, qui voit peut-être les choses un peu différemment depuis qu'il est de l'autre côté, à la Chambre. C'est incroyable comment la vision qu'on peut avoir de la coopération internationale peut changer lorsqu'on traverse en face. Le député nous a appuyés vigoureusement, mais nous entendons déjà la rengaine habituelle du gouvernement: «Nous allons nous pencher sur cette question.»
J'aime la musique country et la musique western. Un de mes chanteurs préférés s'appelle Johnny Horton, ayez pitié de lui. Il chantait ceci: «C'est la même rengaine que m'a criée le corbeau, loin là-bas sous le vieux bouleau.»
J'entends cela depuis des années, «nous allons nous pencher sur la question». Je mets le député et tous les autres députés au défi de lire la correspondance qui a été échangée et d'examiner les initiatives qui ont été prises conjointement par le ministère des Pêches et des Océans, le gouvernement en général et l'OPANO relativement à la surpêche. Ils constateraient plus ou moins la même activité que ce que nous voyons en ce qui concerne les mesures prises à l'égard des bateaux qui ont reçu des contraventions.
En conclusion, je vais présenter certaines raisons pour expliquer pourquoi il est nécessaire de prendre des mesures afin d'exercer une surveillance sur le nez et la queue des Grands Bancs et le Bonnet flamand.
L'Olga a été arraisonné et conduit dans un port de Terre-Neuve. On a découvert dans la cale de ce navire des tonnes de morue, une espèce visée par un moratoire. Le navire a été renvoyé dans son pays d'origine. Quelqu'un était censé s'occuper de ce cas. Lorsqu'ils se sont rendus en Norvège et en Islande, l'an dernier, les membres du comité permanent ont vu le navire accosté en Islande. Quand on a demandé au gouvernement quelles mesures avaient été prises à l'égard du navire, de son capitaine et de l'entreprise, voici ce qu'il a répondu: «Nous ne savons pas. Nous avons fait des recherches. Nous ne savons pas quelles mesures ont été prises.» L'Olga a aussi été accusé de polluer nos eaux.
Les tribunaux seront saisis de cette affaire. Des millions de dollars seront peut-être dépensés, et qu'allons-nous obtenir? Rien, parce que l'entreprise a déclaré faillite et que le bateau est à vendre, mais, bien entendu, nos eaux sont polluées et on nous a pris notre poisson.
L'autre navire, c'est le Santa Mafalda. À quatre occasions, depuis deux ans, ce navire a reçu des contraventions. Il en a reçu une pour avoir pêché à l'intérieur de notre zone de 200 milles, non pas sur le nez et la queue des Grands Bancs, mais à l'intérieur de la limite de 200 milles. Que s'est-il passé? Le navire a été renvoyé dans son pays d'origine, et un mandat d'arrestation a été émis à l'égard de son capitaine. À la suite de cet incident survenu dans nos eaux, le navire a été arraisonné une autre fois et une contravention a été émise. Il a été impossible de procéder à l'arrestation du capitaine parce que, même si l'infraction originale avait été commise des mois auparavant, les tribunaux n'avaient pas encore été saisis des documents. Quatre infractions, quatre contraventions, et rien n'a été fait. Le navire continue de pêcher dans nos eaux.
Trois cents contraventions ont été émises en 10 ans, l'équivalent de 30 par année, et rien n'a été fait. Pourquoi demandons-nous au Canada d'intervenir? Parce que rien n'a été fait. Le gouvernement n'a pas l'intention de faire quoi que ce soit à moins que nous ne l'y obligions. Voilà le fond de l'histoire.
Il y a les rapports unanimes du comité permanent et le rapport unanime du comité multipartite. Tout le monde dit qu'il faut faire quelque chose, sauf quelques personnes clés du gouvernement. Évidemment, ce sont ces personnes qui prendront la décision, mais permettez-moi de leur rappeler que les Canadiens vont peut-être prendre la décision pour eux.
[Français]
Le vice-président: Comme il est 16 h 58, la période réservée pour l'étude des affaires émanant des députés est expirée.
[Traduction]
Le vote porte sur la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le vice-président: Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le vice-président: À mon avis, les non l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
Le vice-président: Conformément à l'article 93 du Règlement, le vote est reporté au mercredi 24 mars 2004, immédiatement avant l'heure réservée aux initiatives parlementaires.
Conformément à l'ordre adopté le lundi 8 mars, la Chambre se forme maintenant en comité plénier pour étudier l'initiative ministérielle no 4. Je quitte maintenant le fauteuil pour que la Chambre se forme en comité plénier.
Initiatives ministérielles
[Initiatives ministérielles]
* * *
[Traduction]
Haïti
(La Chambre se forme en comité plénier pour étudier l'initiative ministérielle no 4, sous la présidence de M. Kilger).
L'hon. Bill Graham (pour le leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes) propose:
Que le comité prenne note de la situation en Haïti. |
--Monsieur le président, en cette période très difficile que vit le peuple haïtien, les Canadiens ont suivi avec inquiétude l'évolution de la situation en Haïti, tout en partageant l'anxiété de l'importante minorité haïtienne qui vit chez nous. C'est pourquoi il était essentiel de tenir un débat sur ces questions ce soir à la Chambre.
Un premier ministre a été nommé hier en Haïti, et la situation s'y stabilise, mais elle demeure néanmoins fragile. En définitive, il appartiendra aux Haïtiens eux-mêmes de déterminer la voie à suivre et d'unir leurs efforts pour rétablir un gouvernement démocratique et la primauté du droit, et assurer la protection des droits et libertés de la personne.
Le peuple haïtien n'aura pas à relever seul le défi au cours des mois et des années qui viennent. Comme le premier ministre l'a affirmé, le Canada entend oeuvrer avec la communauté internationale afin d'aider Haïti à rétablir l'ordre public et, à long terme, à se doter d'institutions démocratiques et à assurer un développement durable sur son territoire.
Les récents événements survenus en Haïti n'étaient souhaités ni par le Canada ni par aucun autre pays. Le Canada a collaboré activement avec la communauté internationale afin de désamorcer la crise.
Au sommet spécial des Amériques qui s'est tenu à Monterrey, le premier ministre et moi-même avons rencontré les dirigeants des pays de la CARICOM et nous avons discuté de la situation en Haïti. Le premier ministre leur avait alors promis l'aide du Canada pour aider le peuple haïtien à se sortir de sa situation désespérée.
Au cours des semaines qui ont suivi, alors que la crise s'intensifiait, je me suis très fréquemment entretenu avec les ministres des Affaires étrangères de la CARICOM, ainsi qu'avec Colin Powell, Dominique de Villepin et César Gaviria. Le premier ministre a également entretenu des contacts soutenus avec ses homologues de la région.
Nos amis de la CARICOM ont travaillé intensément à l'élaboration d'un plan de règlement politique. Ce plan a été approuvé par le Canada, par l'OEA, puis par les pays de la Francophonie grâce aux bons offices de mon collègue, le ministre responsable de la Francophonie et président du Conseil privé, par la présidence de l'Assemblée générale des Nations Unies et par les États-Unis.
Toutefois, toutes les parties intéressées en Haïti ont malheureusement rejeté le plan et, lorsque le président Aristide a été renversé, il a été impossible de parvenir au règlement politique négocié envisagé par la CARICOM.
Nous avons suivi les événements de près. Nous n'avons ménagé aucun effort diplomatique pour faire valoir le plan de la CARICOM. Après l'échec du plan, certains ont demandé une intervention militaire. Toutefois, toutes les parties intéressées ont reconnu qu'une intervention en Haïti nécessiterait une vaste coalition de forces ayant la capacité nécessaire et possédant une légitimité internationale.
Aucun pays doté d'une capacité militaire n'était disposé à intervenir ou, je vous le soumets, monsieur le président, n'aurait dû intervenir, en l'absence de conditions politiques en Haïti qui auraient, d'une part, assuré la réussite de la mission et, d'autre part, réduit les risques qui auraient pesé sur les braves de nos forces armées.
Aujourd'hui, en rétrospective, certaines voix parlent des circonstances entourant le départ de M. Aristide et prétendent qu'il s'agit d'une sorte de coup d'État. Évidemment, la décision de M. Aristide résulte de la détérioration de la situation en Haïti au chapitre de la sécurité et a été motivée, comme il en fait mention dans sa lettre de démission, par son désir d'éviter une guerre civile sanglante. Cette lettre indique clairement que M. Aristide avait lui-même décidé de partir et, ce qui est tout à son honneur, c'est une décision qui a épargné la pire violence à son pays et, certes, une catastrophe humanitaire.
Le secrétaire général Kofi Annan a répondu à une question ici hier au sujet des circonstances entourant le départ de M. Aristide. Il a dit:
...lorsque le Conseil de sécurité s'est réuni, il avait déjà reçu une lettre indiquant que M. Aristide avait démissionné... Par conséquent, le Conseil de sécurité a réagi à une lettre de démission et au transfert du pouvoir au juge en chef et a établi que, compte tenu du caractère explosif de la situation, il y avait lieu d'envoyer une force multinationale pour stabiliser la situation... Je crois que personne à cette réunion n'appuyait un coup d'État. |
Cette décision n'est pas un coup d'État. C'est le Conseil de sécurité des Nations Unies qui, investi du plus haut pouvoir en vertu sa charte, a décidé de rétablir l'ordre dans la région.
Aujourd'hui, on accueille favorablement la nouvelle détermination de la communauté internationale de collaborer avec les Haïtiens pour développer le potentiel d'Haïti.
Lorsque la situation s'est détériorée un peu partout dans l'île, au pire moment de la crise, les diplomates et le personnel militaire canadiens ont aidé les Canadiens et les civils d'autres pays à quitter Haïti. Plus de 100 membres des Forces canadiennes et quatre avions Hercule CC-130 ont évacué environ 350 personnes, au nombre desquelles se trouvaient 235 citoyens canadiens.
Aujourd'hui, environ 450 de nos soldats se joignent à la force autorisée par le Conseil de sécurité pour ramener l'ordre dans l'île. Nous félicitons nos troupes de la bravoure dont ils font preuve et de leur réussite à ce jour et nous leur souhaitons bonne chance dans leur collaboration avec les autres militaires pour rétablir l'ordre à Haïti. Nous avons hâte d'entendre ce que le ministre de la Défense nationale va nous dire ce soir, au cours du débat, au sujet des importantes interventions de nos troupes dans ce pays.
[Français]
En ce moment, dans une période très difficile dans l'histoire de ce pays, permettez-moi de répéter que le Canada conservera à long terme son soutien à Haïti, pour aider à sa reconstruction. Étant donné la coopération qui lie depuis longtemps le Canada à Haïti, la responsabilité qui nous incombe dans notre propre hémisphère, nos liens avec Haïti dans le cadre de la Francophonie et l'existence d'une forte communauté haïtienne ici, au Canada, je suis certain que tous les députés ici présents veulent que le Canada joue un rôle de chef de file pour dénouer la crise actuelle et faciliter la transition vers la démocratie.
Permettez-moi de vous rappeler tout ce que notre pays a déjà fait pour Haïti. Depuis plus de 50 ans, le Canada coopère avec Haïti par l'intermédiaire de communautés religieuses et d'organisations non gouvernementales, par son programme d'aide publique à l'étranger et par ses efforts pour développer les secteurs de la sécurité et de la justice. Nous sommes aussi intervenus résolument au sein de l'Organisation des États américains pour résoudre la crise politique et établir les conditions nécessaires à la bonne gouvernance démocratique dans l'île.
Permettez-moi de signaler aussi que durant la récente crise, le Canada s'est sérieusement préoccupé du bien-être des gens, notamment des civils, en Haïti. Nous avons fourni près de 2 millions de dollars en aide humanitaire et alimentaire par l'intermédiaire d'institutions de l'ONU, du Comité international de la Croix-Rouge et de l'Organisation panaméricaine de la santé. Les Forces canadiennes ont aussi aidé la Croix-Rouge à livrer des fournitures médicales de Saint-Domingue à Port-au-Prince. Hier encore, nous avons annoncé l'octroi d'un montant de 5 millions de dollars à titre d'aide humanitaire.
Le Canada va également jouer un rôle appréciable dans la force de stabilisation que le Conseil de sécurité doit constituer dans trois mois pour remplacer la force multinationale actuelle. Il va aussi continuer de soutenir l'Organisation des États américains dans sa mission spéciale pour Haïti et la CARICOM, dans son action pour un avenir pacifique et démocratique dans ce pays. J'assure à la Chambre et à tous les Canadiens et Canadiennes que nous allons venir en aide au peuple haïtien en travaillant avec nos partenaires des Caraïbes, des Amériques, de la Francophonie, des Nations Unies et avec les institutions financières internationales.
De plus, nous allons être présents sur place pour aider à la formation d'un gouvernement provisoire viable et à l'organisation d'élections honnêtes qui auront lieu par la suite. Nous allons être présents pour veiller au respect des droits humains et à la reconstruction d'un système judiciaire et pénal équitable et efficace. Nous allons être présents pour aider à la reconstruction de médias libres et d'une société civile démocratique. Bien sûr, nous serons présents pour répondre aux besoins humains fondamentaux en matière de vivres, de soins de santé et d'éducation. Il faut promouvoir à long terme l'agriculture, le secteur énergétique, les systèmes financiers et les autres facteurs du développement économique.
Bien sûr, mes collègues, la route ne sera pas facile. Comme l'a montré notamment l'action du Canada en Bosnie et en Afghanistan, il n'existe pas de remède instantané pour les États en déroute ou sur le plan de l'aide. Il n'y a pas d'autre solution pour les Haïtiens eux-mêmes que de renoncer à la violence en faveur de la coopération politique et démocratique. Il n'y a pas d'autre solution pour la communauté internationale que de s'engager à long terme à reconstruire les institutions d'une société civile pacifique et efficace. Nous, Canadiens, savons à quel point il est essentiel de réussir cette fois-ci. Et nous allons tout faire pour que le peuple haïtien ait la possibilité de bâtir le pays démocratique et prospère qu'il mérite et que les Canadiens et les Canadiennes veulent voir dans notre hémisphère si cher.
[Traduction]
Le président: Je rappelle aux députés qui participent à ce débat que cette formule leur permet de prendre place où ils le désirent. La présidence donnera la parole à tous les députés, qu'ils occupent ou non leur place habituelle à la Chambre.
Une période de 10 minutes sera maintenant consacrée aux questions et aux commentaires. Plus les questions et les réponses seront brèves, plus nombreux seront les députés qui pourront contribuer à ce dialogue important.
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, PCC): Monsieur le président, j'apprécie les remarques du ministre des Affaires étrangères. Ma question sera brève, par respect pour les autres députés. Je suis convaincu qu'ils aimeraient également lui poser des questions.
Le ministre a rapidement effleuré l'une de mes préoccupations à la fin de ses remarques, à savoir la nécessité d'un engagement à plus long terme. Je crois avoir compris que, conformément à ce que le gouvernement a déclaré, le déploiement de nos militaires dans le cadre de l'aide consentie aux Haïtiens durera 90 jours, soit un déploiement de trois mois.
Compte tenu de ses remarques, je me demande ce que le ministre prévoit, d'un point de vue militaire, au-delà de ces 90 jours. Je me demande également s'il pourrait préciser les demandes qui ont été faites au Canada par les Haïtiens ou les Américains ou les Français se trouvant là-bas. Le Secrétaire général des Nations Unies était justement en visite ici et il a fort bien pu suggérer à notre gouvernement ou au premier ministre des attentes précises pour la période qui suivra ces 90 jours.
Si le ministre ne dispose pas de toutes ces informations, je pense qu'il lui incombe assurément d'éclairer les Canadiens, en particulier les hommes et les femmes de nos forces armées, sur cet engagement probable au-delà de ces trois mois initiaux.
L'hon. Bill Graham: Monsieur le président, je voudrais remercier le député de Prince George--Peace River de son excellente question. C'est certainement une question que nous avons examinée. D'ailleurs, ce matin, j'en ai discuté avec le secrétaire d'État des États-Unis. Le premier ministre, le ministre de la Défense nationale et moi avons eu une longue conversation avec le secrétaire général des Nations Unies hier. Nous nous préoccupons tous précisément de ces questions.
Les députés se souviendront que le Canada a été en Haïti pendant un bon bout de temps la dernière fois. Cela a pris plusieurs années. Il est clair que ce mandat des Nations Unies est de trois mois. Je ne doute pas que le ministre de la Défense pourrait en parler plus longuement, mais je crois savoir que la communauté internationale s'attend à ce que nous passions à une autorisation en vertu du chapitre 6 en vue de l'envoi d'une force de remplacement, ou à ce que le secrétaire général a appelé une force de retrait, après la fin de la période de trois mois. Cette force sera chargée de davantage de fonctions policières civiles et aura moins de tâches militaires.
Je pense que les chances sont bonnes pour qu'elle réussisse cette fois-ci, car les députés auront sans doute remarqué que le colonel des forces américaines aurait dit ce matin avoir reçu l'ordre de désarmer la population. L'un des problèmes la dernière fois, c'est que de vastes stocks d'armes ont pu se constituer là-bas. Je pense que la communauté internationale va tenter de désarmer la population.
Ce ne sera pas tout, comme le député le comprendra. Dans mon discours, j'ai parlé non seulement de la dimension militaire et de maintien de la paix de notre mission, mais encore de la création d'institutions en Haïti. Le problème, c'est qu'il n'y a plus d'institutions démocratiques. Il est clair qu'il va falloir déployer beaucoup d'efforts pour la reconstitution des institutions démocratiques et judiciaires. Nous avons l'intention de le faire en travaillant de concert avec nos collègues de la CARICOM. Comme ils sont voisins, ce sont eux qui connaissent le mieux la situation politique.
Cette question a deux dimensions. Il y a l'aspect relatif à la paix et à la sécurité, c'est-à-dire une mission de trois mois en vertu du chapitre 7...
Le président: Je suis désolé d'interrompre le ministre, mais nous sommes pressés par le temps.
[Français]
Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le président, je suis heureuse d'entendre les paroles de monsieur le ministre qui prévoit un engagement à long terme de la part du Canada. Toutefois je voudrais que vous vous compromettiez un peu sur le niveau et l'importance de cet engagement.
Vous avez des informations particulières, mais j'ai lu les journaux et j'ai eu d'autres informations par la suite. Vous savez donc comme moi que le Canada, en 2003-2004, a diminué son aide à Haïti qui est passée, par rapport à l'année précédente, de 22 millions de dollars à 17 millions de dollars. C'est donc 10 millions de dollars de moins qu'en 2000-2001.
Je pense qu'il est très important de faire un effort considérable. Je vais m'employer à parler de cela. En ce moment, en plus d'être le peuple le plus pauvre de notre hémisphère, les Haïtiens viennent de subir des pillages qui ont détruit quelques-une de leurs infrastructures collectives.
Donc, il va falloir faire un effort bien géré naturellement, bien administré, mais un effort considérable et qui s'annonce pour durer. Le secrétaire général des Nations Unies a invité les pays qui le pouvaient, les pays riches, à cet investissement.
L'hon. Bill Graham: Monsieur le Président, je crois que c'est normal. La députée de Mercier connaît très bien les conditions dont on parle. Je crois qu'elle comprend le fait que le Canada a réduit légèrement son aide à Haïti dans les dernières années, parce qu'il n'y avait pas de capacité d'absorber cette aide dans ce pays. C'était un problème de gouvernance.
Par exemple, nous avons essayé de former la police. Nous avons trouvé que l'argent dépensé pour la police n'allait pas à la police. Donc, il y avait une question concernant la manière de dépenser dans ces circonstances.
Nous avons soutenu des ONG et d'autres instances. Le fait est que Haïti a été notre priorité numéro un dans l'hémisphère. Cela dit, il est évident qu'il est maintenant difficile de prédire exactement ce qu'il faut faire. C'est pour cela que nous avons parlé avec le secrétaire général hier, avec M. Powell ce matin et avec d'autres pour savoir quoi faire. Je suis certain que nous nous entretiendrons avec les institutions financières. Ma collègue pourra peut-être en parler encore en détail.
En fait, s'il y a des conditions propices en Haïti, s'il y a des conditions de gouvernance qui permettent l'aide qui parviendra au peuple et qui reconstruira la société, ainsi que je l'ai mentionné dans mon discours, la société internationale est prête à agir. M. Iglesias est prêt à agir pour le Fonds interaméricain. Les Américains sont prêts à agir.
Toutefois, pour dépenser l'argent de nos contribuables, il faut que nous ayons des conditions propices, et c'est là notre priorité actuelle.
[Traduction]
M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD): Monsieur le président, le ministre a parlé d'essayer de coopérer avec la CARICOM qui, hier ou pendant le week-end, je pense, a demandé, comme d'ailleurs le gouvernement de l'Afrique du Sud, qu'une enquête internationale étudie dans quelles circonstances, selon quelle méthodologie et de quelle manière le président Aristide avait été renversé.
Bien que j'aie entendu le ministre parler ce soir de la démission du président, la controverse fait rage quant à savoir comment elle s'est produite. Je me demande si le ministre pourrait nous dire si le Canada serait prêt à encourager ce type d'enquête internationale sur la manière dont le président Aristide a été amené à renoncer au pouvoir.
L'hon. Bill Graham: Monsieur le président, ce matin, j'ai discuté de cette question avec mon collègue de la Jamaïque, K.D. Knight. C'est une préoccupation pour beaucoup de pays, mais je dois dire franchement au député que pour nous, en ce moment-ci, notre préoccupation est de reconstruire Haïti. Je ne suis pas convaincu que s'attarder longuement sur les problèmes du passé, sur la question de savoir qui a fait quoi, va nous faire avancer dans ce que nous devons accomplir en Haïti, à savoir rétablir un climat politique favorable à la reconstruction du pays.
La démocratie y est fragile. C'est une démocratie qui fonctionne avec beaucoup de difficulté. Il est clair qu'il va y avoir des partisans du président Aristide et des partisans de ceux qui ont pris les armes contre lui. En encourageant le débat en Haïti, nous désirons éviter de reproduire les conditions qui ont conduit au départ de M. Aristide. Nos efforts vont consister à dire au peuple haïtien: «Oubliez vos querelles du passé. Reconstruisons Haïti. Tournons-nous vers l'avenir pour le bien des enfants et dans l'espoir d'édifier une société décente où vivre décemment.»
Si nous nous attardons sur les querelles du passé, nous n'irons pas de l'avant vers l'avenir. Je comprends que le député soit préoccupé par cette question, mais je pense que nous devrions nous tourner vers l'avenir plutôt que de revenir sur le passé. Il y a là-bas des problèmes immenses auxquels la communauté internationale dans son ensemble et nous-mêmes devons nous attaquer. Si nous nous attardons sur le passé, si nous nous laissons embourber dans le passé, il se pourrait que la communauté internationale ne soit pas prête à fournir de l'argent ou à l'investir dans une situation dont elle pense qu'elle n'évolue pas de manière positive. Personnellement, c'est l'approche que je recommanderais au gouvernement de suivre.
M. Jay Hill: Monsieur le président, j'ai seulement une petite question complémentaire pour le ministre. Il est évident qu'une des grandes préoccupations du Parti conservateur concerne nos militaires qui sont déjà débordés, surtout compte tenu de leur budget. Le ministre pourra peut-être répondre à ma question: quoi qu'il en coûte aux contribuables canadiens pour aider Haïti, particulièrement pour le contingent militaire des 90 prochains jours, va-t-on prendre cet argent au budget actuel du ministère de la Défense nationale ou d'un autre fonds du gouvernement?
L'hon. Bill Graham: Monsieur le président, avec la permission du député, je pourrais suggérer que le ministre de la Défense nationale, qui prendra la parole plus tard, pourra mieux répondre à sa question en ce qui a trait au budget actuel des forces. J'apprécie qu'il se préoccupe de la provenance des fonds qui seront utilisés. Je suis tout à fait d'accord que nous devons examiner cette question. Nous sommes très fiers de ce que nous allons faire là-bas, mais nous devons aussi examiner la façon de le faire dans le contexte de nos ressources.
M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, PCC): Monsieur le président, j'ai d'abord des observations importantes à faire au sujet de la situation en Haïti et de quelques aspects sur lesquels nous devrions nous concentrer. Je voudrais ensuite exprimer quelques préoccupations. J'ai quelques questions, dont certaines sont purement rhétoriques. À mon avis, ce conflit soulève des questions à propos de la politique étrangère canadienne et de la façon dont elle est conçue et mise en oeuvre.
D'abord, nous convenons et affirmons de tout coeur que nous voulons que la situation en Haïti se règle pacifiquement, comme nous le voulons partout où il y a des conflits. Si nous pouvons contribuer à un règlement pacifique, ce serait très bien.
En outre, nous voulons souligner la présence de nos soldats sur place. Comme d'habitude, chaque fois que des soldats canadiens sont déployés dans d'autres pays, ils se démarquent par leur courage, leur bravoure, leur compétence et leur conduite. Ils sont les ambassadeurs du Canada dans des situations fort dangereuses. Nous voulons donc souligner la présence de nos soldats et nous engager à les soutenir par tous les moyens possibles.
Nous reconnaissons également les avantages pour le Canada de participer au processus diplomatique afin de tenter de régler le conflit dans cette région.
Nous reconnaissons l'importance de protéger les Canadiens qui sont en Haïti, le grand nombre d'entre eux qui se trouvent encore sur place et ceux qui doivent être évacués en toute sécurité.
Je voudrais également exprimer les préoccupations, non seulement des Canadiens d'un peu partout, mais même de ceux de ma circonscription, au sujet des enfants qui sont actuellement dans des orphelinats en Haïti. Il y a des familles dont les formalités d'adoption ont déjà été réglées et approuvées, mais il semble y avoir des difficultés. Ces enfants sont dans une situation dangereuse. Les formalités d'adoption ont été approuvées, mais ces enfants attendent encore leur passeport. Nous devrions trouver un moyen, par l'entremise de nos forces armées ou de notre corps diplomatique, de reconnaître le danger qui existe. Y a-t-il une façon dont ces enfants pourraient être retirés en toute sécurité d'un pays dont la situation est précaire et réunis avec leurs futurs parents adoptifs? Il s'agit des enfants pour lesquels les formalités ont été réglées et approuvées.
Ce sont là quelques-unes de mes observations importantes.
La situation en Haïti témoigne encore une fois des conséquences de plus de 10 années de réduction des ressources de nos forces armées. Bien que le niveau d'engagement et d'entraînement de nos forces soit le plus élevé au monde, à mon avis, leurs activités sur un autre théâtre d'opérations et la durée de leur engagement sont limitées.
Nous soulevons la question sans cesse à la Chambre. Nous l'avons encore fait aujourd'hui. Le gouvernement doit commencer à remplacer du matériel et à réinvestir. Depuis plus de dix ans, nos forces sont soumises à des réductions radicales de leurs ressources. Je dirai même que le gouvernement précédent avait amorcé le mouvement. Je ne cède donc pas à l'esprit de parti, et je n'accuse pas que le gouvernement actuel, mais il faut s'attaquer au problème. La durée des affectations est compromise. Nos effectifs sont éparpillés. Nous avons déjà un engagement très lourd en Afghanistan, et il est normal que nous soyons là-bas. Tout le problème du sous-financement est exacerbé chaque fois qu'un conflit éclate. Il faut y voir.
Ce conflit a fait surgir une question fascinante au sujet de la participation du Canada, celles des critères que nous utilisons pour décider d'envoyer ou non des forces armées, des forces qui sont prêtes à utiliser leurs armes. Le ministre a déjà dit qu'il peut arriver que nous devions littéralement désarmer des gens dans un autre pays. Nous avons décidé d'envoyer des troupes, mais sur la base de quels critères?
Revenons sur l'histoire internationale récente. Il s'agit d'un autre pays et d'un autre dirigeant, Milosevic, qui a lancé une campagne de nettoyage ethnique. Quelque 8 000 personnes ont été massacrées sous ses ordres. Le Canada et d'autres pays ont décidé, sans l'aval du Conseil de sécurité de l'ONU, d'intervenir militairement pour mettre fin à ce massacre.
Plus récemment, dans la situation tragique en Irak, notre gouvernement s'est montré déterminé à ne pas intervenir sur le théâtre des opérations dans ce pays, disant que nous étions opposés au changement de régime. J'ai peut-être une autre opinion à ce sujet, mais je comprends que le gouvernement était opposé à un changement de régime en Irak, un pays où un chef d'État non élu était en train de battre tous les records de carnage de masse, de violence défiant toute description, d'attaques contre d'autres pays et d'attaques aux gaz asphyxiants contre des milliers de ses compatriotes. Les forces de la coalition et le Croissant-Rouge ont découvert des charniers de milliers voire de centaines de milliers de morts.
Il y a eu Saddam Hussein, un monstre non élu aux proportions indicibles, en Irak. Notre gouvernement a déclaré que nous étions opposés à tout changement de régime. D'accord, j'accepte cette position. Je ne sais toujours pas quels critères ont été utilisés, mais j'accepte cette position.
Il y a maintenant un chef d'État élu, Aristide. Nous n'aurions peut-être pas voté pour lui. Il n'est peut-être pas le type de chef pour qui nous aurions voté. Toutefois, le gouvernement décide qu'il devrait y avoir un changement de régime dans ce pays.
Voilà une question sérieuse qui mérite d'être abordée. Sur quels critères était fondée cette décision? Nous devons en discuter.
Cela m'amène à mon deuxième point. Chaque fois qu'il est question du déploiement de forces autrement que dans le cadre d'un plan d'action d'urgence où le temps manque pour convoquer le Parlement, il est essentiel que les députés débattent de la question, l'étudient et parviennent à dégager un consensus. Quand intervenons-nous dans un pays, quand participons-nous à un changement de régime, ce que nous faisons maintenant en Haïti, et quel sera le degré de notre engagement? Voilà les questions qui nécessitent des réponses dans toute cette opération.
Cela dit, je crois que nous devions déployer des forces là-bas. Nous devions protéger des Canadiens, nous devions les évacuer. Il n'en demeure pas moins que nous avons appuyé activement un changement de régime dirigé par un président élu.
Certes, il y a eu des morts, mais peu en comparaison des carnages qu'il y a eus sous le règne de Milosevic ou de Saddam Hussein.
Cela nous amène à la question de savoir quelle influence le Canada exerce vraiment et quelle d'influence il peut exercer. Le Secrétaire général Kofi Annan a abordé la question ici même, pressant le Canada d'en faire davantage.
Un budget de fonctionnement de base de deux ans d'un contingent des Nations Unies s'élève à environ 3,1 milliards de dollars, à près de 4 milliards de dollars américains. Notre contribution atteint quelque 53 millions de dollars, environ 1 p. 100. La contribution du Canada a représenté environ 2,2 p. 100 des coûts des activités de maintien de la paix qui se sont déroulées au cours de la dernière année.
Je pense que nous pouvons exercer une influence si nous sommes disposés à établir certains principes. Lors de son passage ici, le Secrétaire général a dit que le Canada devait faire davantage. Il a notamment parlé de la pauvreté. Il y a de la pauvreté en Haïti. Il y a de la pauvreté, c'est regrettable et tragique, dans de nombreuses parties du monde. Nous contentons-nous de faire davantage? Cela signifie-t-il que nous devons seulement verser plus d'argent? Est-ce à dire que nous versons davantage d'argent des contribuables canadiens dans des circonstances où, souvent, et c'est peut-être le cas en l'occurrence, le dirigeant prend la fuite avec ces fonds, les place en Suisse ou les utilise, si bien que l'argent ne parvient jamais à ceux qui en ont vraiment besoin?
Nous sommes en faveur des mesures prises en réponse aux besoins humanitaires urgents. Nous appuyons le recours aux ONG, l'argent ayant ainsi de meilleures chances de parvenir à ceux qui en ont vraiment besoin.
Je pense que le Canada pourrait être très efficace aux Nations Unies et dans le cadre de ces discussions, si nous parlons des principes qui mènent à un pays favorisé ou à un pays démuni.
Les nations nanties ne deviennent pas riches du jour au lendemain et les nations démunies ne s'appauvrissent pas sans raison. Au cours du dernier siècle, nous avons eu des exemples classiques de pays qui sont devenus des nations nanties en respectant certains principes. Ces principes sont les libertés individuelles, la liberté d'expression, la liberté de religion, la liberté de mener des affaires et le droit à la propriété privée.
Combien de fois aux Nations Unies, ou dans le cadre de discussions avec le secrétaire général ou d'autres pays, avons-nous insisté pour faire pression sur des régimes, des pays, des leaders élitistes qui ne voulaient pas mettre en application ces principes?
Il suffit d'examiner les événements du dernier siècle pour se rendre compte que ces principes fonctionnent. La Corée du Nord et la Corée du Sud nous en donnent un bel exemple. Ces deux pays ont une population identique sur les plans génétique et ethnique qui partage des milliers d'années d'histoire. L'un a mis sur pied un régime non démocratique qui ne prône pas ces principes, l'autre a fait le contraire. Qu'est-il advenu? En général, les habitants du deuxième pays jouissent d'un meilleur niveau de vie.
On peut établir la même comparaison entre l'Allemagne de l'Est et l'Allemagne de l'Ouest, entre Taïwan et la Chine continentale, ou encore entre la nation israélienne démocratique et ses voisins non démocratiques. Le peuple d'Israël jouit d'un assez bon niveau de vie, mais est entouré de nations riches en pétrole dont la population sombre dans la pauvreté.
J'exhorte le ministre et notre gouvernement à profiter de chaque occasion qui lui est donnée aux Nations Unies pour cesser de tergiverser et sommer les pays qui ne respectent pas les libertés individuelles de changer d'attitude. Leur attitude est la principale cause des crises provoquées par la pauvreté. Pour éviter à moyen et à long termes de telles crises, ces pays n'ont qu'à adopter ces principes avec tout l'encouragement que peut leur procurer le Canada. Voilà comment le Canada peut exercer une nette influence aux Nations Unies.
L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le président, je remercie chaleureusement le député pour ses propos.
J'en retiens qu'il s'est trouvé d'accord avec notre prémisse que Haïti, du point de vue de notre hémisphère, se trouvait en grave situation de crise et que le Canada ne pouvait pas s'en laver les mains et ne pas intervenir en collaboration avec d'autres parties qui étaient en mesure de le faire.
Pour ce qui est des principes justifiant notre action, il est ici clair que nous étions disposés à intervenir. Nous n'étions prêts à intervenir que si d'autres qui étaient en mesure de le faire voulaient également être de la partie. Nous n'avons pas voulu intervenir seuls. Par ailleurs, nous n'avons voulu intervenir qu'en toute légitimité sur le plan international.
Comme je l'ai dit dans mon intervention, cette légitimité se fonde sur la résolution du Conseil de sécurité. Je n'accepte pas le point de vue du député qu'il s'est agi d'un changement de régime, tout comme je n'ai pas accepté son point de vue sur la question de Bagdad.
Si le député avait clairement affirmé, au moment de l'affaire de Bagdad, que son parti était en faveur d'un changement de régime, le débat aurait sans doute pu être différent. Cependant, les députés se rappelleront que ce débat se déroulait sous le signe de la terreur des armes de destruction massive qui menaçaient de venir nous détruire tous à n'importe quel moment. Personne ne discutait alors de la légitimité d'un changement de régime et il ne s'agissait pas d'un changement de régime.
M. Aristide a démissionné. Le nouveau président, le juge en chef, a prêté serment conformément à la Constitution et le Conseil de sécurité a agi sur cette base.
Je n'accepte pas ses propos. Je n'accepte pas le point de vue du député à l'effet que nous devons intervenir aux Nations Unies en faveur de démocratie et de la mise en place de la démocratie. En dernière analyse, les pays ne survivront pas et Haïti ne survivra pas si nous ne pouvons pas instaurer la démocratie en Haïti. Voilà ce que nous serons tous appelés à faire. Il s'agira d'un processus très exigeant. Sur ce point, je suis d'accord avec le député.
M. Stockwell Day: Monsieur le président, j'essaie de décortiquer la question à partir de ces observations.
Je répondrai par une observation et une question. Le ministre a dit que c'était uniquement parce qu'il y avait une sorte que d'accord international que nous avons envoyé des troupes en Haïti. Le ministre affirme-t-il que nous ne serions pas intervenus dans le pays pour protéger les Canadiens si d'autres pays n'avaient pas dit que nous pouvions le faire?
Ce qui est en cause, ici, c'est que le Canada ne devrait jamais renoncer à sa souveraineté en faveur d'un autre pays ou d'un organisme international. Dans la mesure du possible, il faut bien sûr travailler de concert avec les organismes internationaux, notamment les Nations Unies. Certes, cherchons toujours le moyen de faire les choses dans un cadre multilatéral.
Le ministre dit-il que, si d'autres pays n'avaient pas approuvé la chose, nous n'aurions peut-être pas envoyé de soldats en Haïti pour tirer les Canadiens d'une situation difficile? Dit-il que nous aurions dû attendre, par exemple, que la Finlande ou la Thaïlande dise que c'est une bonne chose avant de nous décider à aller sur place pour protéger les Canadiens? C'est précisément sur ces questions que nous avons besoin d'éclaircissements.
Je pense que nous avons clairement assisté à un changement de régime. Nous voyons que M. Aristide, maintenant dans un autre pays, encourage ses partisans au soulèvement pour soutenir sa présidence. Oui, il y a bien eu un changement de régime. Et, qu'il nous plaise ou non de l'admettre, nous y avons participé.
Cela corrobore ce que j'affirme: nous avons besoin de critères précis. Quand convient-il que nous envoyions nos forces armées dans un autre pays pour, éventuellement, y intervenir, désarmer des groupes belligérants, prendre part à des combats et protéger nos citoyens? On ne répond pas à ces questions.
[Français]
L'hon. Denis Coderre (président du Conseil Privé de la Reine pour le Canada, interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, ministre responsable de la Francophonie et ministre responsable du Bureau sur le règlement des questions des pensionnats autochtones, Lib.): Monsieur le président, j'aurais aimé entendre les commentaires de notre collègue d'en face sur l'avenir de Haïti comme tel. On peut faire beaucoup d'esclandres, beaucoup de concepts et de rhétorique, mais je pense que mon collègue, le ministre des Affaires étrangères a été extrêmement clair à l'effet qu'il faut distinguer l'approche multilatérale et le fait que nous avons des responsabilités à prendre à cause de la situation de Haïti dans notre hémisphère.
J'ai rencontré la diaspora qui est extrêmement présente au Canada, notamment au Québec. Sur les 150 000 Haïtiens, près de 120 000 sont à Montréal. Ils nous demandaient premièrement d'agir, c'est-à-dire de désarmer. Je ne veux pas parler de régime, je veux parler de la population, du peuple haïtien. Lorsque cette diaspora regarde la télévision, elle vit la douleur en direct parce des membres de leur famille se font tuer.
J'aimerais entendre ce que les députés de l'opposition officielle ont à proposer pour nous assurer que tout en remplissant nos obligations, on peut sauver Haïti à long terme. Est-ce que le député croit qu'on doit investir davantage dans les réformes des institutions, dans l'éducation pour préparer les jeunes générations? L'un des problèmes, c'est que s'il y a des «chimères», c'est qu'il y a de la pauvreté, de la violence.
Si on travaille sur la culture même de la démocratie, sur l'éducation, la formation et la dignité avec un retour du travail, est-ce qu'à ce moment-là, le député de l'opposition officielle serait d'accord pour qu'on investisse davantage, après avoir stabilisé la situation, pour sauver la population haïtienne?
M. Stockwell Day: Monsieur le président, il est important de reconnaître que ce n'est pas seulement une question de rhétorique pour les soldats ou pour les familles de nos soldats. Ce n'est pas une question de rhétorique, c'est une question sérieuse.
Nous n'avons pas ici, au Parlement, de liste des normes à suivre lors qu'il s'agit d'intervenir dans un autre pays. Ce n'est pas une question de rhétorique. Nous n'avons pas de liste à cet effet et c'est dangereux, parce que cela peut donner au gouvernement la possibilité d'agir un jour d'une façon ou autrement un autre jour, sans raison.
Il est aussi important de parler des principes que j'ai suggérés, soit la liberté, l'économie, le droit de maintenir la propriété. Il est très important que notre gouvernement déclare au sein des Nations Unies que ce sont des principes fondamentaux, tout comme l'éducation bien sûr. Toutefois, nous n'avons pas l'occasion d'influencer le processus d'éducation si nous ne sommes pas là pour promouvoir les autres principes qui sont fondamentaux. Il y a l'éducation bien sûr, mais aussi la santé.
Par exemple à l'Organisation des Nations Unies, il est rare d'entendre le Canada déclarer les principes de liberté d'une manière telle que cela va forcer les dictateurs et les dirigeants d'autres régimes d'écouter et d'être influencés.
Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le président, j'aimerais discuter avec mon collègue du Comité permanent des affaires étrangères, avec qui j'ai même voyagé dans des pays où la situation politique n'est pas facile, mais où nous n'avons pas rencontré de situation analogue à ce qui se passait en Haïti quand il y a eu l'intervention des forces de l'ONU. C'est de cela que je voudrais discuter avec lui et lui poser une question.
Est-ce que ce n'est pas dans un moment comme celui qu'on a vécu, et qu'on vit encore, que l'on a besoin d'une organisation comme le Conseil de sécurité de l'ONU? On peut dire qu'il faut le réformer, que des pays comme le Brésil ou l'Inde devraient pouvoir faire le contrepoids aux cinq grands, je suis d'accord. Toutefois, on a besoin d'une organisation qui, elle, a des principes éprouvés.
J'aimerais aussi lui rappeler—et avoir son commentaire à cet égard—qu'en 1994, l'ONU avait autorisé des soldats, soit 20 000 soldats américains, pour rétablir le président Aristide dans ses fonctions.
Est-ce que ce n'est pas dans ces occasions qu'on veut participer aux travaux de l'ONU et qu'on a besoin de cette organisation?
M. Stockwell Day: Monsieur le président, nous avons besoin d'une telle organisation, avec laquelle il nous faut collaborer, bien sûr. Toutefois, il faut aussi que nous reconnaissions que l'ONU, ce n'est pas une organisation parfaite.
Par exemple, au Rwanda, le général Dallaire avait demandé à Kofi Annan d'envoyer des forces armées pour prévenir les massacres. Et l'ONU n'a pas acquiescé à sa demande.
Bien sûr, il nous faut collaborer avec des organisations comme celle-là. De plus, il faut que nous ayons des suggestions à apporter afin d'améliorer ladite organisation. Toutefois, notre souveraineté est très importante. C'est pourquoi il est primordial de reconnaître que si besoin est de protéger les Canadiens, par exemple en Haïti, il faut avoir les critères pour agir en conséquence. Alors, bien sûr, il faut collaborer, mais il faut reconnaître tout le temps que l'ONU n'est pas une organisation...
Le président: L'honorable députée de Mercier a la parole.
Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le président, d'abord, mes premiers mots de ce bref discours seront des mots de solidarité pour la population haïtienne en Haïti et pour la communauté haïtienne de Montréal, ainsi que le reste de la communauté qui vit, qui participe et qui a participé, comme je l'ai dit à quelques reprises, à la construction du Québec.
Il faut convenir que même si la situation semble s'être un peu stabilisée, les échos que nous avons des ONG et des médias qui sont là-bas sont à l'effet que la situation est encore extrêmement difficile. Il y a eu des pillages et la mort d'hommes, de femmes et d'enfants. Encore maintenant, la sécurité n'est pas parfaitement rétablie. La situation est même fragile.
Haïti fêtait cette année son 200e anniversaire d'indépendance. C'est un bien triste événement qui se déroule pendant ce temps.
Je dois dire d'emblée que le Bloc québécois a non seulement accepté, mais a été heureux du travail de l'ONU dans cette situation difficile. J'aimerais lire quelques extraits de cette résolution adoptée le 29 février. L'ONU a fait vite; le Conseil de sécurité s'est réuni quelques heures après le départ du président Aristide. J'aimerais dire que, dans les attendus, on lit ce qui suit:
Soulignant la nécessité de créer un environnement sûr en Haïti et dans la région, qui favorise le respect des droits de l’homme, y compris le bien-être des civils, et facilite la mission des travailleurs humanitaires, [...] |
Prenant note de la démission de Jean-Bertrand Aristide comme Président d’Haïti et de la prestation de serment du Président Boniface Alexandre en tant que Président provisoire d’Haïti, conformément à la Constitution d’Haïti, |
Prenant acte du fait que le nouveau Président d’Haïti appelle la communauté internationale à lui apporter d’urgence son soutien pour l’aider à rétablir la paix et la sécurité en Haïti et à promouvoir le processus politique constitutionnel en cours, [...] |
Considérant que la situation en Haïti constitue une menace pour la paix et la sécurité internationales et pour la stabilité dans les Caraïbes, notamment parce qu’elle pourrait provoquer un exode vers d’autres États de la sous-région, |
Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, [...] |
C'est pour cette raison qu'on a des militaires en armes là-bas. Toutes les intentions suivent. Je ne les lirai pas, mais c'est un texte extrêmement intéressant à lire. À partir de ce texte, on pourrait fonder une action de la communauté internationale, y compris du Canada.
J'en profite pour répondre à une des questions que le ministre des Affaires étrangères a posée tantôt, à savoir si l'on ne voudrait pas que le Canada soit un leader. Je dis tout de suite que j'aimerais bien que le Canada soit un leader. Toutefois, j'entends le pays prononcer seulement des paroles de leader. Quand on n'est pas là ou quand on n'investit pas suffisamment, cela m'amène à continuer de lui demander d'être un leader et de le lui rappeler quand il ne fait qu'être un leader en paroles, mais non en gestes.
Cela me semble important dans ce débat que l'ex-président Aristide soulève. Cela ne peut pas faire autrement que de troubler beaucoup de gens en Haïti, mais pas seulement des Haïtiens, puisque c'est également le cas ici et en Amérique du Sud. On sait qu'il y a des régimes qui n'ont pas nécessairement l'appui de la superpuissance américaine. Je pense bien sûr à l'Argentine. Ces déclarations et ces appels de l'ex-président Aristide, si je me fie à la résolution de l'ONU, sont très troublants.
Je dois dire que si c'était ce qui s'est passé, s'il y avait eu le kidnapping, comme il le prétend, cela aurait été inacceptable.
Je prends pour acquis qu'il avait démissionné, compte tenu de ce que j'ai lu et entendu dans les premières heures après son départ d'Haïti. D'ailleurs, j'ai émis un communiqué pour le remercier d'avoir pris cette décision qui m'apparaissait la plus courageuse et la plus adéquate afin que son pays puisse s'en sortir.
Le ministre des Affaires étrangères nous invitait à ne pas entrer dans le passé, toutefois il faut parler un peu du passé récent. Comme mon collègue d'en face, j'ai été sollicité par des membres de la communauté, surtout à partir du mois de décembre dernier, quand il y a eu vraiment une escalade dans le non-respect des droits humains en Haïti.
Les ONG qui sont au Québec et qui ont des membres en Haïti étaient parfaitement inquiètes pour la vie même des gens qui travaillent pour eux et avec eux là-bas. Le non-respect des droits s'est déclaré d'une façon éclatante et troublante pour bien des gens à l'occasion de la manifestation à l'université le 5 décembre. Le recteur de l'université s'est fait casser les jambes par les partisans du président Aristide, qu'on appelle «les chimères» sous l'oeil bienveillant de la police. Ensuite l'escalade a continué.
Je suivais la situation de près et à cette occasion, je pressais le gouvernement canadien d'être plus ferme avec le président Aristide. Or le Canada a mis bien du temps avant de dénoncer les événements de l'université. En fait, les États-Unis, la France et d'autres pays l'ont fait bien avant le Canada.
Sans s'attarder sur cette situation, il faut se rappeler qu'il y a eu une escalade, dénoncée encore récemment par la table de concertation. En ce moment, le problème majeur est celui de la présence en Haïti d'armes nombreuses. Je sais que mon collègue de Saint-Jean va en parler. Il ne s'agit pas seulement d'armes de petits calibres, mais de gros calibres. Aristide lui-même avait armé ses partisans. On sait que ce sont eux qui se sont retournés aux Gonaïves. Il y a les rebelles qui sont arrivés avec des armes, il y a différents groupes. On n'a pas parlé qu'il y a du brigandage et puis il y a toutes ces polices de sécurité privée.
Je dis que le ministre de la Défense nationale doit nous rassurer là-dessus. Il faut qu'il y ait désarmement. Autrement, il n'y aura pas de sécurité et il ne pourra même pas y avoir de travail humanitaire. En effet, on ne pourra pas rejoindre les régions qui étaient coupées. On nous dit que ce n'est pas rétabli partout.
On travaille encore dans l'urgence. Heureusement qu'il y a cette force internationale. Cependant, elle travaille dans des conditions extrêmement difficiles. On l'a vu à l'occasion de la manifestation dimanche et de ce qui s'est produit près du palais.
Les Haïtiens et les Haïtiennes ont besoin d'entendre cela. Ce sont eux qui vont rebâtir Haïti, en se donnant des institutions démocratiques. Toutefois, ils doivent pouvoir compter sur la communauté internationale. Tout d'abord, celle-ci a une responsabilité dans les événements des dernières années.
Quand, en 1994, l'ONU a autorisé—on pourrait ressortir la résolution mais on n'a pas le temps de la lire— les forces internationales à ramener Aristide, il y avait aussi tout un programme, tout un plan. Or, on s'est retiré rapidement. Ce n'est pas pour rien que M. Kofi Annan nous a dit qu'il faudra être patient. Il a dit qu'il faudrait au moins 10 ans. Donc la communauté internationale a une responsabilité en se retirant.
J'avais entendu parler de ce qui est arrivé, mais je l'ai lu dans le rapport qui a été préparé pour l'ACDI concernant la formation des policiers. On a constaté que l'ex-président Aristide a politisé tous les postes de direction de la police. À partir de ce moment, la police n'était plus cette institution qui doit être indépendante, autonome et qui peut assurer tous les citoyens que leurs droits seront défendus et respectés. On a vu les abus auxquels cela a mené. Il va donc nous falloir nous engager à aider...
Le vice-président: Je regrette d'interrompre l'honorable députée, mais son temps de parole est écoulé. L'honorable président du Conseil privé de la Reine a la parole.
L'hon. Denis Coderre (président du Conseil Privé de la Reine pour le Canada, interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, ministre responsable de la Francophonie et ministre responsable du Bureau sur le règlement des questions des pensionnats autochtones, Lib.): Monsieur le président, je veux remercier ma collègue de participer à ce débat. Je ne voudrais pas la reprendre, mais seulement l'informer qu'après ce qui s'est passé le 5 décembre, une rencontre importante a eu lieu, soit la Conférence ministérielle de la Francophonie à Paris. À la demande du Canada, nous avons proposé une résolution qui condamnait. Donc, le Canada a aussi répondu.
J'aimerais revenir sur la question de l'avenir, parce qu'on ne refera pas le passé. Lors des rencontres que nous avons eues avec la diaspora, mais aussi lorsque je me suis rendu à Port-au-Prince, nous avons discuté avec plusieurs partenaires, dont l'opposition, et une réalité demeure: c'est qu'il faut empêcher l'éternel recommencement. Haïti a vécu 34 coups d'État en 200 ans. Il faut donc trouver une solution viable et durable à cela.
J'aimerais peut-être que la députée me parle un peu du rôle de la communauté internationale. Des erreurs ont été faites en 1994. Tout le monde est d'accord avec cela. On parle beaucoup de réformes sur le plan institutionnel en matière d'éducation. J'ai parlé tout à l'heure d'aider les jeunes générations. Mon collègue a parlé de la réforme de l'agriculture. L'ACDI a fait son travail à cet égard, et je pense qu'il faut continuer.
Toutefois, parce que je suis ministre responsable de la Francophonie, comment, par exemple, voit-elle le rôle de certaines organisations internationales, comme la Francophonie, et qu'en même temps le Canada joue pleinement son rôle, de façon bilatérale, avec Haïti?
J'aimerais peut-être qu'elle nous dise un peu plus comment elle voit l'avenir et quel rôle la Francophonie ou d'autres organisations peuvent-elles jouer tout en respectant le fait que le peuple haïtien veut son gouvernement, veut des élections le plus rapidement possible et veut avoir ses propres institutions? Et comment fixer une limite entre la gouvernance de ce peuple, pour qu'il se prenne lui-même en main, et notre rôle, sans parler d'ingérence en Haïti?
Mme Francine Lalonde: Monsieur le président, je réponds au ministre que c'est une question pour laquelle il faudrait au moins un sommet.
Je veux commencer par renvoyer la question au ministre, mais ce n'est pas une vraie question. Je voudrais lui demander si, à l'occasion de cette fin de semaine si troublante du 28 et 29 février, il a entendu Dany Laferrière, dont on peut dire le nom parce qu'il est un romancier, un poète et un artiste. C'est un Haïtien qui, même s'il ne vit plus là depuis un moment, est profondément engagé et amoureux de son peuple. C'était extraordinaire la façon dont il nous l'a expliqué. Il nous a dit qu'il y a effectivement eu 34 coups d'État. Toutefois, il dit que le peuple haïtien est un peuple d'esclaves qui sont devenus indépendants il y a 200 ans, mais qu'ils ont résisté.
J'avais l'occasion d'être avec lui sur un plateau, à RDI, et je disais à M. Drainville que la communauté haïtienne d'ici a aidé à construire le Québec, alors il faut qu'on les aide à construire Haïti. Je citais Louis Joinet, de l'ONU, qui disait qu'il voyait de l'espoir à cause de tous les gens qui s'étaient tenus debout dans des conditions difficiles, y compris les magistrats.
À ce sujet, Dany Laferrière a dit que la population est extraordinaire et qu'il faut qu'elle ait des moyens, et elle s'en est donné dans des conditions difficiles. Toutefois, il ne faut pas oublier qu'il y a plus de 60 p. 100 d'analphabètes. Ce n'est pas pour rien qu'il n'y a pas beaucoup de journaux, mais que la radio est très présente là-bas.
Pour répondre à la question, je dirais qu'il y a deux grands pans. Un des pans, ce sont les besoins qui sont énormes. Je me dis que cela prendra plus que des investissements de 25 millions de dollars par année. Il y a des besoins en éducation et en infrastructures. Je m'excuse de le dire, mais cela prend des égouts. C'est essentiel, autrement, sur le plan de la santé, c'est grave. On parle de la reconstruction des infrastructures, mais dans bien des cas, il s'agit d'une construction.
Il y a des problèmes d'environnement. On m'a dit que le couvert forestier est seulement de 1 ou 3 p. 100. À cet égard aussi, il y a une responsabilité de la communauté internationale, mais on n'entrera pas dans ce sujet.
Il y a des investissements de base à faire. Il faut que les plans soient faits par les Haïtiens avec l'aide des experts, mais il faudra qu'il y ait des investissements importants.
L'autre pan, c'est la collaboration de la communauté internationale. C'est la collaboration entre les pays. Un des drames de l'aide internationale, c'est que chacun fait son bout. Il y a de l'argent qui n'agit pas en synergie et qui finit peut-être par ne pas être aussi efficace, sinon par se perdre.
Il faudra être intelligent, mais avoir une volonté politique. Nous comptons sur le gouvernement et nous le rappellerons à cette obligation.
[Traduction]
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, PCC): Monsieur le président, une chose qui m'a franchement déçu, c'est lorsque le premier ministre est allé prononcé un discours aux Nations Unies et a profité de l'occasion pour annoncer que le Canada participerait à une mission d'aide en Haïti. J'ai dit à ce moment-là que je croyais sûrement que tous les Canadiens, y compris le Parti conservateur du Canada, voulaient aider le peuple haïtien à traverser cette période difficile.
Cela étant dit, j'ai été absolument consterné lorsqu'il a tenu une conférence de presse à New York et qu'il ne pouvait répondre aux questions, à mon avis très légitimes, que lui posaient les journalistes. Il ne savait absolument pas ce à quoi il engageait notre pays et les jeunes hommes et femmes membres de nos forces armées. Il ne savait pas combien de soldats seraient envoyés, d'où ils viendraient, de qui ils relèveraient, quelles seraient les règles d'engagement, combien cela coûterait et d'où viendrait l'argent. Franchement, il ne savait rien. Il engageait notre pays à participer à cette mission sans en connaître la nature exacte et sans savoir comment elle se déroulerait et qui la dirigerait.
J'ai été tout aussi consterné lorsque j'ai posé une question au ministre des Affaires étrangères au début de ce débat, après son discours. Il ne pouvait pas dire si les fonds nécessaires pour financer la mission de nos forces armées en Haïti viendraient des ressources existantes, et limitées, du ministère de la Défense nationale ou encore d'un fonds supplémentaire spécial approuvé par le Cabinet à cette fin précise.
Il me semble que le gouvernement navigue à l'aveuglette dans ce dossier, comme il le fait souvent lorsqu'il s'agit des affaires étrangères et des engagements à l'étranger. Je me demande si la députée partage les mêmes préoccupations quant à la façon dont le premier ministre semble suivre les traces de son prédécesseur, façonnant notre politique étrangère devant les caméras de télévision.
[Français]
Mme Francine Lalonde: Monsieur le président, je remercie mon collègue de sa question. Bien sûr, ce qu'il dit est un objet de préoccupation. Toutefois, ma préoccupation était qu'on a entendu le premier ministre dire que le Canada serait un leader, mais qu'il ne savait pas combien de soldats seraient envoyés, ni quand ils seraient là-bas.
Vendredi dernier, j'ai eu un briefing—que vous avez dû avoir—et j'ai demandé quand nous saurions le moment où les soldats partiront et combien seront envoyés. Ce n'était pas n'importe qui que j'avais au bout du fil, mais il m'a dit: «Je ne peux pas encore vous le dire».
Je disais tantôt au ministre des Affaires étrangères que je veux bien que le Canada dise qu'il est le leader, mais il faut qu'il le soit. Pour l'être, il me semble qu'il va falloir qu'il se réorganise drôlement. Dans le cas présent, à part de le dire, on ne l'a pas fait. J'ai écrit dans un communiqué que si les Haïtiens avaient attendu l'armée canadienne pour être défendus, cela aurait été problématique. Ce n'est pas de la démagogie, c'est la vérité.
Heureusement, maintenant, ils sont là. Quand ils sont là, ils sont bons. On va en profiter et on va surtout compter sur le fait qu'ils puissent aider au désarment. Vous allez être d'accord avec moi pour dire que sans désarmement, tout le reste ne pourra rien donner et on se retrouvera rapidement dans une situation peut-être pire.
M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD): Monsieur le président, je voudrais commencer par poser une question. Pour quelle raison est-il nécessaire que le Canada s'occupe de Haïti. Je peux répondre simplement que nous avons beaucoup de raisons. Premièrement, c'est le seul autre pays de cet hémisphère qui est francophone. C'est le pays le plus pauvre de cet hémisphère.
Comme mon collègue du Bloc l'a mentionné, on a une très grande communauté haïtienne à Montréal. Ils vivent ici au Canada. Ce sont des citoyens.
[Traduction]
J'ai un lien particulier, car l'un des orphelinats en Haïti est financé dans une large mesure par la collectivité du comté de Windsor-Essex. Je pense que cela s'applique à un certain nombre de collectivités du pays. En tant que pays et à titre individuel dans les petites localités, nous avons tendu la main à Haïti.
[Français]
Vous avez aussi entendu dire par les autres députés qu'il y a eu maintenant 34 coups d'État dans ce pays depuis qu'ils ont eu leur indépendance, il y a deux siècles. C'est le deuxième coup d'État contre le président Aristide.
[Traduction]
J'ai été troublé par la façon dont le ministre des Affaires étrangères a répondu à ma question, et je pense qu'il a répété cela à une autre occasion dans le cadre de ses réponses. Il a dit que nous devrions simplement oublier l'histoire, que nous ne voulons pas revenir en arrière.
La réalité, c'est que les autres pays de la CARICOM dans toutes les Caraïbes et l'Amérique centrale et du Sud ne sont pas du tout heureux du rôle du Canada. Je ne pense pas exagérer en disant qu'un grand nombre de ces pays croient que le Canada, la France et les États-Unis font partie d'une force d'occupation. Nous avons grandement détérioré nos relations à long terme avec ces pays.
J'ai été particulièrement inquiet lorsque j'ai entendu le ministre dire qu'il s'agissait d'une démocratie fragile. C'était peut-être un euphémisme ou une excuse, mais cela ressemblait trop à l'argument du président Bush et de son administration voulant qu'ils ne ressentent aucune responsabilité à l'égard de mauvais dirigeants élus. Ce sont eux qui décident qui est un mauvais dirigeant élu. Si nous suivons cette voie avec les Américains, nous menaçons alors grandement nos relations avec la CARICOM.
On a beaucoup parlé dans les médias et, dans une certaine mesure, dans cette enceinte, ce soir, d'élections en Haïti. Lorsque nous revenons en arrière et regardons l'histoire, il n'y a eu aucune plainte au moment des élections de 2000 lorsque le président Aristide a été alors réélu avec une écrasante majorité. Le déroulement du scrutin n'a été contesté qu'après coup par les États-Unis et l'OEA, mais pas avant. Cela n'a servi que de prétexte.
Il est intéressant d'entendre les observations de notre collègue conservateur qui a parlé d'un changement de régime. C'est vraiment ce qui s'est passé. On joue avec les mots lorsqu'on laisse entendre que le président Aristide a démissionné volontairement, alors qu'il avait une arme pointée sur la tête, métaphoriquement parlant bien entendu. Tous les députés se sont inquiétés du fait que nous ayons pu trouver les moyens nécessaires pour envoyer les troupes là-bas dès son départ, mais que nous n'ayons rien pu faire pour aider à protéger la démocratie qui existait avant l'attaque des rebelles. Je ne vise pas en l'occurrence le Canada, mais la France et les États-Unis. Je partage cette préoccupation également.
J'ai parlé plus tôt d'une collectivité de ma région qui avait généreusement appuyé un orphelinat haïtien. L'un de nos prêtre se trouve actuellement en Haïti et il a refusé de quitter le pays. Il était certainement en danger.
Nous savions qu'il y avait de la violence dans ce pays. Toutefois, ce n'est pas en chassant le président que l'on pouvait régler le problème. Il aurait fallu une force d'intervention multilatérale à l'échelle internationale qui aurait appuyé le gouvernement et la démocratie. Ce que nous avons dit en fait à tout l'hémisphère, c'est que, si nous étions témoins de suffisamment d'actes de violence, nous verrions à ce que le gouvernement en place soit anéanti et que nous aiderions par la suite à en former un nouveau. C'est le message que nous envoyons à l'heure actuelle.
Je voudrais aussi aborder certains aspects historiques de la question et je suis très préoccupé de voir que le ministre semble vouloir l'oublier. Haïti est de loin le pays le plus pauvre de notre hémisphère. Les États-Unis contrôlaient une importante somme d'argent dont Haïti n'a pas pu profiter et qui aurait pu aider grandement à solutionner certains des problèmes économiques de ce pays.
Je parle de 650 millions de dollars qui n'ont servi à rien depuis deux ans et demi et auxquels les Haïtiens n'ont pas eu accès. Nous n'avons rien fait pour nous assurer qu'ils reçoivent cet argent.
[Français]
La position du Nouveau Parti démocratique est à l'effet qu'il est inacceptable qu'on ait déployé notre armée et qu'on ait permis le retrait du président d'Haïti, M. Aristide, mettant ainsi fin à sa présidence. Ce n'est pas acceptable.
Nous avons des demandes et des suggestions. D'abord, nous voulons le remplacement des forces américaines par l'envoi d'une mission de maintien de la paix sous l'égide des Nations Unies et ce, le plus tôt possible.
Nous voulons l'envoi d'une force internationale, encore une fois sous l'égide des Nations Unies. Cette dernière aurait pour mandat de désarmer la population, de trouver et de détruire les nombreuses caches d'armes qui sont en Haïti.
Il est nécessaire d'avoir une solution viable à long terme aux problèmes d'Haïti sur les plans politique et économique, y compris des réparations. Cette solution devrait être conçue principalement par les Haïtiens.
Il est nécessaire d'avoir l'appui et la participation du Canada à des élections transparentes et honnêtes en Haïti.
Nous demandons un retour de la démocratie pleine et entière en Haïti, qui serait suivi immédiatement par le déblocage d'une somme de 650 millions de dollars en aide économique et médicale. Cette somme que les États-Unis retiennent maintenant devrait être remise au gouvernement haïtien.
Nous demandons aussi une aide canadienne et internationale à long terme sur le plan financier et pour la formation d'une force policière professionnelle en Haïti.
Finalement, nous demandons une enquête sur les circonstances entourant la démission forcée de M. Aristide.
[Traduction]
Sur ce dernier point, j'aimerais à nouveau demander au ministre, comme je l'ai fait dans la question que je lui ai posée, s'il songe sérieusement à demander au nom du Canada la poursuite de cette enquête pour que nous puissions déterminer si le président Aristide a volontairement quitté le pays ou s'il en a été chassé.
L'hon. Denis Coderre (président du Conseil Privé de la Reine pour le Canada, interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, ministre responsable de la Francophonie et ministre responsable du Bureau sur le règlement des questions des pensionnats autochtones, Lib.): Monsieur le président, j'essaie de saisir et de comprendre ce que le député nous dit, car j'ai fait partie d'une délégation internationale. Ce pour quoi nous avons exercé des pressions, c'était le respect du plan de la CARICOM. Ce plan devait être inclusif dans le sens où nous aurions pu avoir un gouvernement d'union nationale, et l'opposition et le président Aristide auraient pu cohabiter.
Le problème, par le passé, et ça a été une discussion assez musclée, c'est que le président Aristide a donné sa parole, mais ne l'a pas respectée. Néanmoins, nous estimions que nous devions respecter le fait qu'il avait été élu, mais il aurait dû accepter le plan de la CARICOM. Lorsque nous avons parlé à des Haïtiens, la plupart d'entre eux ont dit penser que le président Aristide aurait dû démissionner.
Tout d'abord, je crois comprendre que, d'après le député, nous aurions dû envoyer des troupes là-bas quand il y était. Donc, nous aurions été du côté du président, ce qui était contraire au plan de la CARICOM, en un sens. Nous ne voulions pas prendre position, mais nous voulions rétablir l'harmonie entre les gens. Nous aurions alors pu les désarmer.
Deuxièmement, le député croit-il que la seule façon d'agir, ce que nous disons maintenant, était de faire exactement ce que nous voulions faire, c'est-à-dire respecter le plan de la CARICOM?
M. Joe Comartin: Monsieur le président, il s'agit là de deux questions. Je dois dire que mon collègue d'en face récrit quelque peu l'histoire. La réalité, c'est que le président Aristide a fini par accepter le plan. Ce sont les rebelles qui s'y sont opposés. À ce moment-là...
L'hon. Denis Coderre: Opposition.
M. Joe Comartin: Non, c'est ce qui s'est réellement passé. C'est à ce moment-là que la communauté internationale aurait dû dire qu'elle intervenait pour appuyer le gouvernement élu.
Je voudrais aborder une deuxième question qui fait référence à ce dit le ministre au sujet de l'évaluation du degré d'appui en faveur du président Aristide. D'après tout ce que j'ai entendu, il semble que le pays soit extrêmement divisé. Toutefois, à la lumière des faits connus, il serait inexact de laisser entendre que la vaste majorité des Haïtiens étaient en faveur du départ du président.
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, PCC): Monsieur le président, je voudrais que le député énonce très clairement sa position sur la destitution du président Aristide. Est-il en train de dire qu'il croit l'histoire du président Aristide, qui a fait surface depuis son départ pour l'Afrique, à savoir qu'il ne s'est pas désisté volontairement pour le bien de son pays et pour éviter les bains de sang, mais plutôt qu'il été kidnappé par les Américains qui l'ont expulsé du pays?
Nous n'avons aucune preuve en ce sens, autre que la parole du président Aristide. Donc, si c'est ce que pense le député et qu'il peut fournir des preuves de ce qu'il avance, ce serait une bonne chose qu'il en fasse part aux députés de tous les partis qui participent au débat de ce soir.
M. Joe Comartin: Monsieur le président, je pense que personne d'entre nous ne le sait. J'ai indiqué, dans mon intervention ce soir, ce que demande le Nouveau Parti démocratique, en l'occurrence la tenue d'une enquête internationale, pour établir si c'est la version du président Aristide ou si c'est celle des Américains qui est exacte. C'est la seule chose que nous demandons.
Je ne pense pas qu'il soit possible pour qui que ce soit de savoir ce qu'il en est à distance. Je n'étais pas sur place, le député n'y était pas non plus et personne du gouvernement n'y était. On ne peut pas savoir ce qui s'est effectivement passé les 28 et 29 février quand le président Aristide a signé ce document avant de quitter Haïti. Toutefois, une enquête internationale permettrait d'obtenir des explications.
M. Jay Hill: Monsieur le président, suite à cela, comme le député semble avoir l'intention de mettre de l'avant l'idée d'une enquête internationale, j'aimerais savoir exactement ce qu'il espère accomplir par là et s'il croit que le président Aristide a été mis en cause, lorsqu'il était au pouvoir, dans des violations absolument incroyables des droits de la personne contre son peuple. Le cas échéant, pourquoi serait-il en faveur d'une enquête? Je ne vois pas quel est l'objet d'une enquête à moins qu'elle ne vise, en quelque sorte, à rétablir le président Aristide au pouvoir en Haïti.
Compte tenu de ce que j'ai vu du bilan de M. Aristide au chapitre des violations des droits de la personne, je ne sais pas pourquoi le Canada, à titre de nation, voudrait appuyer son retour au pouvoir. Je ne pense pas que ce soit une réponse à long terme pour faire cesser l'incroyable agitation, les troubles et le bain de sang qui affligent Haïti.
M. Joe Comartin: Monsieur le président, je ne suis pas le seul à demander cette enquête. Le CARICOM l'a demandée et le gouvernement d'Afrique du Sud l'a demandée. Le fait est que le Canada a adhéré à un principe démocratique lorsqu'il a signé, en 2000, je crois, la Charte démocratique interaméricaine. Nous l'avons signée. Nous avons dit que nous respecterions les démocraties.
Pourrons-nous donc dire que nous avons le droit d'intervenir chaque fois qu'il y violation des droits de la personne? J'ignore si tel a été le cas. Je dois le dire à mon collègue. Je n'ai pas participé à une enquête en Haïti. Je n'ai pas été sur place.
Je dis au député que notre pays a la responsabilité de respecter la démocratie. Autant que je sache, rien ne me dit que le président a été élu de façon irrégulière.
Je vois que les Américains commencent la reconstruction. Allons-nous dire que nous avons le droit de déterminer quels dirigeants élus devraient être évincés et lesquels devraient être autorisés à demeurer en poste? Je ne suis pas en faveur de cela.
[Français]
L'hon. Denis Coderre: Monsieur le président, le député se débat comme un diable dans l'eau bénite, mais la réalité est tout autre. La réalité, c'est que le président Aristide a remis sa lettre de démission et a dit que, pour empêcher un bain de sang, il s'en allait, mais il peut faire de la politique par la suite.
J'aimerais savoir ceci de la part de mon collègue, lui qui est rapide sur la gâchette. Est-ce que cela veut dire que, le 5 décembre dernier, lorsque le recteur de l'université s'est fait casser les deux jambes, lorsque la police laissait les «chimères» tuer les étudiants, il trouvait cela acceptable? Est-ce que, à ce moment-là, on doit comprendre qu'il appuyait sans réserve tout ce que le président Aristide a fait? Au lieu de penser continuellement à mener des enquêtes parce qu'on pense que le président a quitté, ne faudrait-il pas plutôt penser à reconstruire Haïti, s'assurer qu'on désarme les rebelles et les insurgés de tous côtés, et s'assurer également qu'on puisse enfin, d'abord et avant tout, respecter et protéger la population haïtienne?
[Traduction]
M. Joe Comartin: Monsieur le président, j'ai deux réponses à cela. Premièrement, il revient au peuple d'Haïti de prendre cette décision. Deuxièmement, si nous étions si préoccupés par la sécurité dans ce pays, pourquoi avons-nous réduit les fonds que nous lui accordions? Pourquoi avons-nous retiré les forces policières que nous avions déployées là-bas? Nous tentions d'aider à constituer une force policière solide.
Nous aurions des reproches à nous faire à cet égard. Quoi qu'il en soit, qui doit prendre ces décisions? Ce ne devrait pas être un pays étranger. Ce devrait être les Haïtiens.
[Français]
Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le président, je n'ai pas pu entendre toute l'intervention de mon collègue. Toutefois, je tenais à dire que si le président a été kidnappé et déporté, c'est inacceptable. Cependant, ce que je sais, de même que la lecture de la résolution des Nations Unies, me font dire que ce n'est pas cela.
Donc, qu'il demande une enquête et qu'elle soit faite, c'est très bien. Ils peuvent la faire en Haïti, c'est une chose. Cependant, on ne peut pas en ce moment se concentrer là-dessus. Les Haïtiens pourront décider de faire la lumière à cet égard. Toutefois, en ce moment, l'ONU a reconnu à l'unanimité le nouveau président. Il y a un nouveau président et un nouveau premier ministre. Il y a la paix à établir et des institutions démocratiques...
Le vice-président-adjoint (M. Réginald Bélair, Lib.): Je regrette d'interrompre l'honorable députée, mais le temps est expiré L'honorable député de Windsor—St. Clair a une minute pour répondre.
[Traduction]
M. Joe Comartin: Monsieur le président, ce qui m'ennuie au sujet de la réaction rapide de l'ONU, c'est qu'elle a été prise du jour au lendemain. Le président a démissionné et l'ONU a adopté une résolution en moins de 24 heures. Lorsqu'elle a adopté cette résolution, elle n'avait pas eu de nouvelles du président Aristide. Tout ce qu'elle savait, c'est qu'il avait signé une lettre de démission. Je ne crois pas que nous puissions tirer de grandes conclusions à partir de la position adoptée par l'ONU, puisqu'elle ne connaissait pas celle que le président a maintenant adoptée.
L'hon. David Pratt (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le président, je suis très heureux de participer à ce débat sur la situation en Haïti. Je suis surtout heureux de pouvoir souligner l'importante contribution du Canada à la stabilisation et à la reconstruction de cette nation, une contribution dont tous les Canadiens devraient être fiers.
Vendredi dernier, j'ai annoncé le déploiement d'environ 450 membres des Forces canadiennes en Haïti pour une période de 90 jours.
[Français]
Cette décision est fidèle à l'engagement de longue date du Canada envers la promotion de la sécurité et de la stabilité dans l'hémisphère occidental. Elle reflète également le lien étroit qui nous unit à Haïti et notre préoccupation pour son avenir.
[Traduction]
Les troupes canadiennes se rendent en Haïti dans le cadre d'une force multinationale intérimaire sous mandat du Conseil de sécurité des Nations Unies, pour établir et maintenir un environnement stable et sûr en Haïti. Nous joignons nos forces à celles d'autres pays, dont les États-Unis, la France et le Chili, pour appuyer le processus politique en cours. Nous voulons aider à instaurer la paix et à trouver une solution à cette crise.
Dans le cadre de cette force multinationale intérimaire, les membres des Forces canadiennes aideront à restaurer la stabilité, à livrer l'aide humanitaire et à soutenir les efforts des policiers du pays. Je suis absolument convaincu que l'expérience, le dévouement et le professionnalisme de nos hommes et de nos femmes leur permettront d'apporter une contribution importante aux efforts de la coalition et de faire une différence dans la vie des Haïtiens.
Certains ici ont déclaré que le gouvernement n'aurait pas dû engager les Forces canadiennes dans cette dernière mission car nos militaires sont déjà employés au-delà de leurs capacités et ils ont besoin de répit. À ces députés et à tous les Canadiens, je dis que le gouvernement ne prend jamais facilement la décision de déployer les Forces canadiennes à l'étranger. Il doit toujours tenir compte des exigences opérationnelles existant déjà, de la qualité de vie des hommes et des femmes en uniforme, de leur formation, de leur état de préparation et des risques qu'ils affronteront.
Pour décider de déployer du personnel à l'étranger, le gouvernement tient compte des renseignements les plus à jour et les plus pertinents, de renseignements et de conseils que bien des gens étrangers au domaine de la défense ne peuvent pas consulter.
Je peux donner à la Chambre l'assurance que nous n'avons pas pris cette décision à la légère. Nous avons tenu compte avec soin de plusieurs facteurs importants, comme les unités disponibles, leur niveau de formation, le moment de leur dernier déploiement à l'étranger. Tout d'abord, le déploiement solliciterait-il nos forces de façon excessive? Deuxièmement, aurait-il des conséquences importantes pour nos opérations actuelles ou à venir?
Après avoir examiné les renseignements les plus récents et les plus pertinents et avoir tenu compte des conseils du chef de l'état-major de la défense, le gouvernement a décidé que le déploiement d'effectifs d'environ 450 personnes en Haïti pendant 90 jours ne solliciterait pas nos forces de façon excessive. Nous avons conclu également qu'il n'aurait pas d'effets important sur nos engagements internationaux actuels, car le groupe de compagnie d'infanterie qui est déployé en Haïti était déjà en attente d'une mission à court préavis comme celle-ci.
Il importe également de signaler que ce déploiement n'aura pas d'effet important sur les efforts de récupération de l'armée et de l'aviation, car nous réduirons bientôt notre contribution à d'autres opérations. Par exemple, nous réduirons notre présence en Bosnie en avril. Nos effectifs seront de 600 plutôt que de 1 200. En août, notre contribution à la mission en Afghanistan sera ramenée de 2 000 à environ 500 soldats. Autrement dit, nous rapatrierons un bon nombre de soldats. Comme le déploiement en Haïti sera de durée relativement brève, nos forces terrestres et aériennes pourront obtenir le repos qui avait été prévu pour eux à l'automne. Ces soldats pourront se reposer, s'entraîner et s'intéresser à d'autres priorités.
Le gouvernement reconnaît clairement que les Forces canadiennes sont très sollicitées. Depuis dix ans, nous demandons beaucoup à ces hommes et à ces femmes en uniforme. À titre de ministre de la Défense nationale, je suis très sensible aux effets que notre rythme opérationnel élevé a eus sur nos soldats, nos marins et le personnel de notre aviation.
Si je peux me permettre, en tant que membre du Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants, j'ai assisté aux audiences sur la qualité de vie tenues il y a quelques années. La question du rythme opérationnel accéléré préoccupait grandement nos militaires.
Les membres des Forces canadiennes sont notre plus importante ressource et nous avons le devoir de prendre soin d'eux. Mais l'essentiel, c'est que le chef d'état-major de la Défense n'aurait pas recommandé la participation à cette mission, et que le premier ministre et moi-même n'aurions pas donné notre accord, à moins d'avoir l'assurance que les Forces canadiennes pouvaient y participer. Nous n'aurions pas accepté si nous avions cru que cela aurait un effet négatif sur les hommes et les femmes membres des Forces canadiennes, sur les opérations actuelles ou futures, ou sur nos efforts de régénération.
J'ajouterais que tout indique que les hommes et les femmes déployés en Haïti souhaitent s'y rendre. Ils sont enthousiastes à l'idée de participer à cette mission et d'avoir l'occasion de faire une différence dans la vie du peuple haïtien. Je sais que les Canadiens éprouvent les mêmes sentiments. Ils comprennent l'importance de la mission pour Haïti et sa population. Ils comprennent qu'il faut faire quelque chose pour les aider. Ils savent que le Canada est un pays riche et que nous avons le devoir d'aider les autres.
Évidemment, le déploiement des Forces canadiennes n'est qu'un volet de la stratégie globale du gouvernement pour venir en aide à Haïti. Le premier ministre a dit à de nombreuses reprises que le Canada jouerait un rôle de leader dans la reconstruction d'Haïti et que nous ferions ce qu'il faut pour restaurer la paix, l'ordre et la bonne gouvernance dans ce pays et pour donner de l'espoir au peuple haïtien.
À cet égard, la stratégie du gouvernement pour aider Haïti couvrira de nombreux aspects et des efforts seront déployés dans le domaine de la politique, de la sécurité, de l'aide humanitaire et de la reconstruction à long terme. À titre d'exemple, le Canada est activement engagé dans le domaine politique. Le ministre des Affaires étrangères est régulièrement en communication avec ses homologues américain, français et antillais. Nous travaillons également en étroite collaboration avec les États-Unis, l'Organisation des États américains et la CARICOM. En ce qui concerne le développement, l'ACDI collaborera à une série de projets à long terme visant la reconstruction et l'aide humanitaire.
Cette stratégie globale pour Haïti illustre une fois de plus la démarche en trois D du gouvernement en matière d'affaires internationales: défense, diplomatie et développement. Nous avons déjà appliqué cette démarche en Afghanistan et, comme j'ai pu le constater lors de mon passage à Kaboul le mois dernier, elle donne des résultats très encourageants.
[Français]
Nous sommes confiants que notre approche permettra au gouvernement d'atteindre ces objectifs, non seulement en matière de sécurité mais également dans le domaine politique et dans celui du développement.
[Traduction]
Quand il a pris la parole à la Chambre hier, le secrétaire général des Nations Unies, M. Kofi Annan, a parlé de façon très convaincante au sujet d'un engagement à long terme en Haïti. Il a aussi reconnu que le Canada avait fait sa part pour assurer la paix et la stabilité dans le monde.
Le déploiement de 450 militaires canadiens et notre démarche en trois D auront un effet déterminant sur la vie des Haïtiens, maintenant et à long terme. Je crois certainement dans la capacité des Forces canadiennes de remplir leur mission. Les Canadiens devraient être fiers de la contribution qu'apporteront encore nos militaires à un pays qui en a besoin.
[Français]
M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le président, d'abord, permettez-moi de féliciter le ministre pour la qualité de son français. On voit que cela évolue beaucoup. Je me rappelle qu'il avait de la difficulté en français, mais maintenant sa prononciation est très bonne. Alors je le félicite.
Je tiens à lui poser une question sur le désarmement, parce qu'il n'en a pas beaucoup parlé. Aujourd'hui, dans le New York Times, on nous apprend que les Américains ont maintenant reçu le mandat—même si la résolution de l'ONU n'y fait pas référence directement—, de désarmer les factions. Il y a un général ou un colonel qui a dit: «Active and reactive disarmament.» On voit donc que les Américains ont l'intention d'enlever du paysage le plus d'armements possible.
Je me demande si le ministre est en mesure de nous dire, à cette heure, si les forces canadiennes ont eu un peu la même approche que les Américains. C'est-à-dire que maintenant, ce n'est plus le temps de parler du départ d'Aristide, à savoir si c'est un coup d'État ou non. Il n'est plus là. Il y a beaucoup de factions armées actuellement. Est-ce que les soldats de l'armée canadienne ont reçu la mission de désarmer les factions de toutes ces armes illégales.
[Traduction]
L'hon. David Pratt: Monsieur le président, je remercie le député de ses observations relatives à ma prononciation française, mais je ne m'aventurerai pas davantage en français.
Je dirai que le rôle des Forces canadiennes en Haïti en ce moment se limitera à faire de la patrouille. Elles patrouilleront les rues des villes et villages haïtiens. Elles prendront part à la protection d'institutions clés ainsi que de certaines personnes, comme les travailleurs de l'aide humanitaire, les travailleurs des Nations Unies, notamment.
En ce qui concerne le désarmement, il s'agit clairement là d'un des objectifs des Nations Unies parce que, si nous ne désarmons pas les factions qui se font la lutte actuellement en Haïti, nous ne pourrons y établir la paix durable que nous recherchons. Je considère le processus de désarmement comme un projet à plus long terme. Je pense qu'au début de la mission nous devons tenter de rétablir la sécurité et la stabilité, après quoi nous pourrons passer au désarmement.
Nous pourrions en arriver au cours des prochains mois à mettre en oeuvre un programme complet de désarmement, de démobilisation et de réintégration, programme qui a fait la renommée des Nations Unies sur les divers théâtres de conflits.
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, PCC): Monsieur le président, j'ai apprécié les observations du ministre de la Défense nationale. J'ai un certain nombre de questions et je voudrais les poser assez rapidement au cas où d'autres voudraient poser des questions au ministre également.
Tout d'abord, je voudrais commencer par sa prémisse voulant que ce déploiement de 450 militaires en Haïti ne sollicite pas nos forces armées de façon excessive. Il a parlé un petit peu du rythme opérationnel élevé. Je vois une contradiction dans tout cela.
Il est évident que même le déploiement durant une courte période d'un nombre relativement peu élevé de militaires va ajouter à ce rythme opérationnel élevé que nos forces armées vivent depuis un certain temps déjà. Je tiens à dire au ministre que malgré les assurances qu'il a données à nos militaires, cela va accroître énormément les pressions auxquelles seront soumis notamment ces 450 militaires que nous envoyons là-bas et leur famille. Je voudrais également dire une évidence, soit que nos militaires vont toujours au-delà de ce qu'exige leur devoir et de ce qu'on attend d'eux. C'est la première question que je vais poser.
Les deuxième et troisième questions sont celles que j'ai adressées à son collègue, le ministre des Affaires étrangères, lorsqu'il a ouvert le débat ce soir. Avons-nous une estimation du coût du déploiement pendant trois mois? Va-t-il pouvoir entrer, du moins pour ce qui est de l'aspect militaire, dans le budget actuel du ministère de la Défense nationale ou d'autres fonds vont-ils être débloqués maintenant ou dans le prochain budget qui sera présenté dans deux semaines?
Enfin, si, comme le ministre l'a dit dans son discours, le chef d'état-major a recommandé l'envoi de 450 militaires avant l'annonce que le premier ministre a faite à New York, aux Nations Unies, pourquoi alors le premier ministre n'a-t-il pu répondre à des questions que les journalistes lui ont posées cette journée-là au sujet de la taille du contingent, de la provenance des militaires et des règles d'engagement et n'a-t-il pu préciser sous quel commandement ils seraient placés? Il n'a pu répondre à aucune de ces questions et pourtant, le ministre voudrait maintenant nous faire croire que le chef d'état-major a fait cette recommandation au premier ministre. Je suis heureux que le premier ministre soit ici ce soir pour assister à ce débat.
L'hon. David Pratt: Monsieur le Président, je suis heureux de répondre à ces questions.
Le député devrait savoir que nous avons, dans chaque région du pays, des unités d'intervention immédiate prévues pour les urgences. Elles interviennent en cas de catastrophes naturelles dans tout autre genre de situation qui nécessite l'aide des Forces canadiennes. Ces unités ont la taille d'une compagnie. On en compte quatre au pays: une dans l'Ouest, une en Ontario, une au Québec et une dans le Canada atlantique.
En ce qui concerne le 2e bataillon du Royal Canadian Regiment, qui est basé à Gagetown, il se trouvait que les troupes avaient déjà reçu la formation sur l'évacuation des non-combattants et qu'elles étaient préparées pour effectuer ce genre d'opération.
Autre fait intéressant à noter, nos militaires n'avaient pas participé à un déploiement depuis un certain temps. Le moment est opportun : ils sont prêts et en mesure de prendre part à cette mission. Je ne me suis pas entretenu directement avec les officiers, mais d'après ce que j'ai pu lire dans les journaux, ils sont très enthousiastes à l'idée de participer à cette mission et ils ont très hâte de se rendre en Haïti.
Pour l'instant, nous estimons que la mission coûtera environ 38 millions de dollars pour un déploiement de trois mois. Comme je l'ai indiqué au cours de la conférence de presse que nous avons eue lors de cette annonce, il y a une certaine souplesse quant à la durée de la mission de nos troupes. Elles seront entièrement opérationnelles et seront toutes sur le théâtre des opérations dès le 21 mars. Néanmoins, il faut se rappeler que l'horloge s'est mise en marche dès le 29 février pour la Force intérimaire et que d'autres de nos soldats doivent encore arriver sur le théâtre des opérations. Nous sommes aujourd'hui le 10 mars et des soldats canadiens arriveront sur les lieux au cours des sept à dix prochains jours environ et plus tard, en fonction des besoins de soutien national et des décisions du commandement national.
Pour ce qui est du chef d'état-major de la défense et de sa recommandation, et compte tenu de ce qui est survenu en Haïti, notamment de la décision du président Aristide de quitter son pays, nous savions que, dans les jours subséquents, un sérieux travail de planification et des exercices nous attendaient. La première réunion de planification, qui a été très brève, s'est tenue à Miami, mercredi, et a été suivie d'une réunion plus vaste, à laquelle ont notamment participé des représentants français, américains, chiliens en plus de nous. Je pense qu'il y avait peut-être des représentants d'autres pays.
En conclusion, nous disposions, au terme de cette réunion de planification de quatre ou cinq heures, de toutes les informations dont nous avions besoin. Nous avons désigné une force, constituée d'éléments du 2e Bataillon du Royal Canadian Regiment et du 430e Escadron tactique d'hélicoptères. Nous avons ensuite été en mesure de présenter cela immédiatement au groupe de planification et d'en faire l'annonce vendredi dernier.
Nous avons réagi très rapidement à cette situation. Comme je l'ai indiqué dans mon intervention, je suis tout à fait confiant que cela ne causera aucune pression sur le déploiement actuel, les déploiements à venir ou sur la reconstruction de l'armée.
Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le président, je voudrais tout d'abord faire écho à ce que disait le député de Prince George—Peace River, qui signalait la présence du premier ministre à ce débat exploratoire. Ce n'est pas très fréquent. J'espère que le premier ministre continuera de participer à ce genre de débats tant qu'il sera en poste. Je tiens, en tant que député, à le féliciter de sa présence.
L'une des choses qui rend préoccupante la situation en Haïti, c'est qu'elle n'est pas sans précédent. De nombreux députés ont tenté d'aider la population haïtienne à surmonter des problèmes qui semblent de plus en plus endémiques et de plus en plus difficiles à régler.
Je me suis occupé de ces questions lorsque j'ai eu l'honneur d'être secrétaire d'État aux Affaires étrangères, puis dans le cadre de ma participation au centre Carter, lorsque le président Carter s'efforçait de jouer un rôle constructif dans la région.
Évidemment, il est important de savoir ce qui est arrivé au président Aristide et comment cela s'est produit, mais il est encore plus important de savoir ce que deviendra Haïti dans l'immédiat. Comment faire pour trouver une solution qui résiste à l'épreuve du temps, au lieu de se contenter d'une intervention qui, dans trois ou quatre ans, se révélera, en rétrospective, un autre échec?
Si le Canada a joué un rôle répréhensible ou s'il peut en être soupçonné par certains pays de la région sur lesquels nous devons compter, qu'on le dise ouvertement. C'est important à tous égards, mais particulièrement pour que nous puissions travailler avec nos alliés et nos amis traditionnels de cette région du monde.
Loin de moi l'intention de sous-estimer l'importance de ce qui a été dit à la Chambre au sujet de ces questions. C'est seulement qu'elles ne me semblent pas être les plus urgentes pour l'instant.
Il y a un mois, le ministre de la Défense nationale m'a fait l'honneur de m'inviter à aller à Kaboul, en Afghanistan, où des troupes canadiennes sont déployées. Une fois de plus, j'ai été impressionné par l'excellence de nos troupes, surtout qu'elles sont utilisées presque à la limite de leur capacité. Nos militaires en sont conscients, le ministre le sait et tous les députés aussi.
La question de notre capacité militaire est évidemment en cause. Pour ma part, je suis prêt à laisser ces décisions aux experts militaires. Je formule cependant une observation. Les militaires canadiens que j'ai rencontrés à Kaboul sont on ne peut plus dévoués à leur pays. Ils veulent servir le Canada. Ils veulent en défendre les intérêts. Je ne pense pas que nous les entendions exprimer une inquiétude démesurée parce qu'ils ont à effectuer une nouvelle mission, particulièrement si cette mission se révèle constructive et produit un résultat durable.
Par contre, s'il est question de notre puissance militaire et des circonstances du départ du président Aristide d'Haïti, ces questions passent au second plan. La véritable question est celle de l'avenir d'Haïti. La situation y est tragique et ce qui la rend encore plus tragique, c'est qu'elle est récurrente et, franchement, si nous examinons les circonstances actuelles dans le contexte de toute cette incertitude, personne n'est très confiant de pouvoir faire quoi que ce soit pour l'empêcher de se reproduire dans l'avenir.
Voilà à quoi nous sommes confrontés comme Canadiens, puisque, dans un autre sens, la question qui se pose est celle du Canada. Quelle est notre position dans le monde? Quel est notre rapport dans le monde? Quand décidons-nous d'agir et quand décidons-nous de ne rien faire? Je sais que nos ressources sont limitées et je sais également, si cela peut réconforter le gouvernement, qu'elles sont encore plus restreintes aujourd'hui qu'à l'époque où j'avais l'honneur de siéger dans la première rangée des banquettes ministérielles.
Il y a de réelles contraintes quant à ce qu'un gouvernement canadien peut faire, mais nous éprouvons le sentiment que nos ressources sont toujours limitées et que, par conséquent, si nous voulons intervenir, s'il faut faire quelque chose, et si, en particulier, nous sommes les seuls à pouvoir intervenir, cela jette une lumière différente sur les ressources dont nous disposons.
Je ne veux pas revenir indûment sur le passé, mais j'ai eu l'expérience de telles situations. Il y a plusieurs décennies, j'ai connu l'époque où des milliers de personnes dérivaient en mer de Chine; le Canada aurait pu se croiser les bras, mais il ne l'a pas fait. Nous avons accueilli un plus grand nombre de réfugiés de la mer que tout autre pays, je crois, à l'exception peut-être de l'Australie.
Je me rappelle l'époque des grandes famines en Éthiopie, un pays bien loin de nous et de notre hémisphère, alors que le Canada aurait pu faire marche arrière, mais ne l'a pas fait. Il n'y a pas seulement ce gouvernement qui a réagi. Dans ces deux cas, c'est le gouvernement du peuple canadien qui a répondu à l'appel de manière novatrice et plutôt extraordinaire.
J'ai eu l'honneur de participer aux activités du Canada dans le cadre de l'apartheid. Cette fois encore, le Canada aurait pu faire marche arrière, mais il ne l'a pas fait.
Si, dans l'un ou l'autre cas, nous nous étions retirés, il n'y avait aucune garantie qu'un autre pays aurait pris la relève. Si personne d'autre n'avait pris la relève, le Rwanda et le Burundi ne figureraient pas de manière aussi exceptionnelle qu'aujourd'hui dans le bilan mondial.
Des pays doivent parfois s'engager lorsqu'on s'adresse particulièrement à eux en raison de leurs capacités et de leur réputation.
La situation en Haïti est extrêmement difficile. Notre problème n'est pas véritablement de savoir si nous devons envoyer un certain nombre de militaires pendant un certain nombre de jours, ce qui est une question importante. Notre problème fondamental est de savoir si nous nous engagerons sérieusement dans ce problème. Devons-nous présumer que nous devrions essayer encore une fois d'avoir recours aux processus et aux conventions habituels ou devons-nous tenter de faire quelque chose de nouveau et de différent?
Dans chacun des cas que je viens de citer, le Canada était prêt à faire quelque chose de nouveau et de différent. Parce que nous sommes prêts à élargir nos horizons, à essayer d'envisager certains changements, nous sommes en mesure d'apporter certaines petites contributions pour faire une différence.
Nous devons poser des questions fondamentales. Je partage le profond respect que tout le monde à la Chambre ressent pour la souveraineté des nations, mais posons-nous une question: C'est quoi la souveraineté pour Haïti? Il y a une question plus large: C'est quoi la souveraineté pour la majorité des États défaillants? Dans le cas de Haïti, que signifie la souveraineté pour le peuple haïtien et son futur immédiat? Allons-nous permettre que soit adoptée une définition selon laquelle notre grande préoccupation pour la souveraineté signifie que les pays et les particuliers qui pourraient intervenir trouveront une excuse pour ne pas le faire? Si c'est la définition que nous appliquons à ce concept, alors nous desservons et le concept et le peuple haïtien.
Nous devons envisager plusieurs possibilités. Le mot tutelle, utilisé dans le contexte des Nations Unies, a une triste histoire. Ce n'est pas un mot que les gens adoptent normalement. Par ailleurs, il est accompagné d'une histoire précise qui s'applique à la transition des anciennes colonies. Il pose pour principe que, dans des circonstances inhabituelles, un organisme international peut non seulement favoriser l'enclenchement du processus démocratique mais aussi établir certains mécanismes provisoires permettant le développement d'autres améliorations sociales.
Ceux d'entre nous qui encouragent le développement de la démocratie savent que très souvent on peut mettre en place un régime démocratique et tenir des élections. C'est ce qui s'est produit en Haïti. Parfois, cela ne conduit pas au genre de changement profond que nous recherchions.
Les excellents diplomates canadiens et nos excellentes autorités juridiques devraient étudier la question de savoir s'il est possible d'appliquer à nouveau certains de la vaste gamme d'instruments à la disposition des Nations Unies.
Cela me rappelle le Timor oriental et l'Australie où une intervention a eu lieu avec l'autorisation des Nations Unies, dans des circonstances tout à fait extraordinaires, circonstances dans lesquelles les procédures normales avaient échoué et la violence avait éclaté. Il fallait intervenir et on a trouvé une solution grâce aux Nations Unies.
Je n'ai pas de solution à proposer mais si jamais il fut un temps où l'imagination et l'engagement des Canadiens étaient essentiels, c'est maintenant. C'est notre hémisphère. C'est notre langue. Dans bien des cas, c'est notre famille, très précisément, ce qui est le cas pour plusieurs personnes ici. Actuellement, le risque est grand que les pays en fassent suffisamment pour être présents mais pas suffisamment pour freiner le tragique déclin qui est devenu le lot de Haïti. C'est un dossier dans lequel le Canada pourrait bien être le seul pays capable de faire véritablement une différence. J'espère que le gouvernement se servira de son imagination pour trouver des manières de le faire.
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le président, si je peux me permettre, je ferai une brève observation, puis je voudrais tirer parti de la vaste expérience de l'ancien premier ministre pour lui poser une question.
Voici mes observations au sujet du départ de M. Aristide. Je crois savoir que, s'il a dit qu'il resterait, puis, très peu de temps après, a décidé de partir, c'est que, apparemment, sa propre force de sécurité qui l'entourait avait disparu. C'est du moins ce qu'on cherche à nous faire comprendre. De toute évidence, le Canada n'était pas directement au courant de ce qui se passait, mais c'est ce qu'on nous a fait comprendre.
Je pense que l'exemple du Timor oriental est très bon. Comme le député le sait, après un an et demi environ, la population voulait que les dirigeants partent, ce qui est probablement la meilleure solution, soit de ne pas demeurer trop longtemps dans les circonstances.
Je veux cependant poser au député la question suivante. Étant donné son expérience, croit-il que, si le Canada mettait à profit et coordonnait son énorme savoir-faire en matière de création d'institutions, qu'il s'agisse d'un organe judiciaire, d'une force policière ou d'une démocratie, telle qu'elle devrait fonctionner, notre pays devrait investir beaucoup plus dans ces secteurs, dans le cadre de l'ensemble de son aide à l'étranger? Certains pays ont échoué; nous avons vu ce qui s'est passé au Libéria. Croit-il qu'il existe vraiment un créneau où le Canada peut jouer un rôle très important si nous pouvons coordonner les compétences que nous possédons?
Le très hon. Joe Clark: Monsieur le président, je crois réellement que c'est le cas. Je crois qu'il y a tout un éventail de nouvelles aptitudes canadiennes dont certaines de nos estimables institutions, comme le ministère des Affaires étrangères, n'ont pas tenu compte comme elles auraient dû le faire, aussi compétent le ministre ait-il pu être à l'époque. Nos aptitudes en matière de création d'institutions s'inscrivent clairement dans ce cadre.
C'est avec plaisir que j'ai entendu le premier ministre parler, dans sa réponse au discours du Trône, du recours à la haute technologie et à la biotechnologie canadienne, tout particulièrement dans l'optique du développement international. Je crois que cela fait partie de la nouvelle façon de penser qui devrait être adoptée, et il me semble évident que c'est pertinent ici.
L'avertissement que je voudrais soulever à ce point-ci est le suivant. Je ne crois pas que nous devions nous contenter de tenter de trouver un secteur dans lequel nous pourrions jouer un rôle, bien que je comprenne que le premier ministre a placé tout cela dans un contexte plus large. Ce qui m'inquiète surtout, c'est que si le Canada n'est pas prêt à composer ce contexte plus large et à fournir le leadership nécessaire, cela ne se produira pas et alors nous apporterons notre participation à une entreprise perdue d'avance.
À mon avis, la situation actuelle confère des chances et des responsabilités inhabituelles pour le Canada que les autres pays n'ont pas et que notre pays n'a pas souvent, mais ce pourrait bien être le cas ici.
[Français]
L'hon. Denis Coderre (président du Conseil Privé de la Reine pour le Canada, interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, ministre responsable de la Francophonie et ministre responsable du Bureau sur le règlement des questions des pensionnats autochtones, Lib.): Monsieur le président, je pense qu'on peut bénéficier de l'expérience de l'ex-premier ministre. En fait, je voudrais aller beaucoup plus loin concernant le rôle du leadership comme tel.
Je pense qu'il est important d'être respectueux, de travailler en complémentarité, par exemple, avec le CARICOM. Comment voit-il cette notion de leadership, tout en respectant effectivement cette complémentarité? Ce qui est important aussi, c'est de bâtir un État en Haïti, c'est de travailler directement avec eux. Est-ce que cela implique de travailler de façon bilatérale avec le gouvernement provisoire, ou est-ce que c'est vraiment de continuer à travailler en vertu du plan du CARICOM qui, en fait, touche l'ensemble des points qu'il a mentionnés tantôt?
Le très hon. Joe Clark: Monsieur le président, je crois que le rôle du Canada repose précisément sur notre capacité de travailler avec plusieurs groupes. Ce qui manque, c'est le leadership et la détermination d'avoir un leadership qui durera et qui ne sera pas là uniquement pour une période limitée.
Bien sûr, on doit travailler avec les autorités en place. Bien sûr, on doit travailler avec nos partenaires, comme CARICOM ou les autres. Toutefois, ce n'est pas la France qui peut prendre le leadership, ni les États-Unis, ni un autre membre du CARICOM. Il n'y a pas d'autre pays sauf le Canada.
[Traduction]
Mme Elsie Wayne (Saint John, PCC): Monsieur le président, c'est pour moi un honneur et un privilège de pouvoir parler ce soir de la très grave situation qui règne actuellement en Haïti.
Je dirai d'abord que les pensées et les prières de tous les Canadiens vont à la courageuse population de ce pays en difficulté. Nous lui souhaitons la même paix, la même sécurité et la même stabilité qui ont toujours connues au Canada. C'est pour cela que nous avons envoyé nos plus courageux citoyens protéger la population haïtienne à l'heure où elle en avait besoin.
Au début de la semaine, j'ai eu l'honneur et le privilège de prendre la parole au Camp Gagetown. J'ai également eu l'honeur d'y croiser certains de nos soldats qui se préparaient à partir pour Haïti. Je tiens à préciser que nos soldats de Petawawa se trouvaient également au Camp Gagetown, dont les effectifs ne suffisaient pas à eux seuls à former le contingent que nous voulions envoyer à Haïti.
À l'époque où j'étais maire de Saint John, au Nouveau-Brunswick, la présidente de la Dominique a participé un soir à la réunion de notre conseil municipal. Elle m'a demandé si j'aimerais aller en Dominique pour voir si je pourrais mettre sur pied localement un gouvernement de type démocratique. J'ai été honoré par ce privilège. Lorsque j'entends parler de ce qui arrive en Haïti, je me souviens que c'était comme cela en Dominique.
J'ai pris l'avion jusqu'en Dominique avec mon directeur municipal. Nous avons alors rencontré le maire. Les jeunes ne recevaient pas d'éducation, comme en Haïti. Des gens se promenaient dans les rues avec des fusils. On nous a dit de rester à l'hôtel et de ne pas descendre dans la rue même sur la distance d'un pâté de maisons.
J'ai été vraiment consternée de voir comment les choses se passaient en Dominique. Avant de quitter le pays--et il a fallu plusieurs semaines de travail en collaboration avec le gouvernement local et certaines églises pour atteindre ce résultat--nous avons été en mesure de ramener les enfants dans les écoles. J'ai été tout à fait enchantée. Aujourd'hui, la Dominique fonctionne remarquablement bien, oui, vraiment bien. C'est tout un honneur pour moi que d'avoir pu contribuer à ce résultat.
Il y a quelques semaines, on interrogeait à la télévision le secrétaire général Kofi Annan sur le Canada. On lui a demandé si le Canada devrait affecter plus de gens et d'argent à ses forces armées. Il a souri et répondu que oui.
J'ai aussi eu l'occasion de me rendre à Saint-Pétersbourg en Russie, avec le ministre des Affaires étrangères. Lord Robertson s'est adressé à nous sur grand écran. Environ 54 pays étaient représentés. Il a dit qu'il voulait parler à tous ceux qui représentaient le Canada. Il a alors déclaré que notre pays avait déjà fait partie des trois premiers pays pour ce qui est des militaires et du financement et que nous étions maintenant parmi les derniers. Il nous a dit de retourner au Canada et de demander à notre premier ministre et à notre gouvernement d'accorder la toute première priorité aux militaires. Voilà ce qu'a déclaré lord Robertson.
Cette semaine, j'ai écouté, avec l'esprit ouvert et le coeur gros, les propos du secrétaire général des Nations Unies en cette Chambre. Il a demandé au Canada de viser plus haut, de jouer un plus grand rôle sur la scène internationale toujours en expansion car il voyait ce qui se passait en Haïti. Il a vu la même chose se produire dans d'autres pays. Il a invoqué notre riche histoire en matière de maintien de la paix et de reconstruction de nations comme preuve du rôle constructif qu'on peut et qu'on doit jouer. Il nous a demandé de faire plus parce que le sort du monde est en jeu.
La demande du secrétaire général n'est pas tombée dans l'oreille d'un sourd. Nous, à la Chambre, savons que le Canada n'est jamais neutre dans le conflit entre le bien et le mal. Nous ne tournons jamais le dos à la justice. Nous n'acceptons pas que des innocents meurent. Nous ne restons pas cois devant la souffrance. Ce ne serait tout simplement pas conforme aux valeurs canadiennes.
Le Canada a toujours occupé une place spéciale à l'ONU, une place que nous avons méritée par des générations d'efforts inlassables et de grands sacrifices. Depuis sa création, l'ONU a compté sur le Canada pour représenter le meilleur de l'humanité à la pire des époques. C'est pourquoi lord Robertson nous a dit d'investir davantage dans nos forces armées et de reprendre notre place dans les trois premiers.
Dans un article publié récemment dans le National Post, le général Lew MacKenzie a soutenu que la mission en Haïti était le type même de mission qu'il serait demandé au Canada de mener dans le contexte de l'après-guerre froide. Il note que les guerres massives du XXe siècle sont maintenant choses du passé et qu'à l'avenir les affrontements seront de moindre envergure, plus circonscrits, souvent entre peuples d'une région ou entre nations divisées.
Je tirerais ma révérence à l'expertise du général et j'appuierais vivement ses conclusions, mais en réalité tout débat sur ce que le Canada devrait faire est nécessairement un débat sur ce que le Canada est capable de faire. Au cours des dix dernières années, j'ai pris et repris la parole à la Chambre pour demander un meilleur financement des forces armées.
Pendant l'exercice 1993-1994, notre budget de la défense était de 12 milliards de dollars, mais, quatre ans plus tard, il n'était plus que de 9,4 millions de dollars, soit 22 p. 100 de moins, malgré le fait que pendant la même période le rythme opérationnel de nos forces armées déployées dans des missions est passé de 6 p. 100 à 23 p. 100, une augmentation de quelque 400 p. 100. Nous connaissons l'impact de ce rythme sur les familles lorsque les papas ou les mamans doivent partir pour six mois et que les enfants sont à la maison. C'est un impact très négatif.
Bref, pendant près de 10 ans, nous avons demandé aux hommes et aux femmes de nos forces armées de faire beaucoup plus avec beaucoup moins. Au cours des dernières années, le gouvernement s'est préparé à revoir sa politique étrangère et sa politique de défense, mais aucun examen n'a encore été entrepris.
En tant qu'ancien vice-président du Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants et porte-parole du Parti conservateur, j'étais constamment appelé à préparer des mémoires pour des examens qui n'ont jamais abouti en raison de changements de direction et de nouvelles nominations ministérielles.
Sans une politique de défense globale, il nous est impossible de préparer nos forces armées au rôle crucial qu'elles joueront en matière de politique étrangère. Sans une politique étrangère globale, nos forces armées ne disposeront pas du cadre nécessaire pour faire des achats d'équipement et pour préparer la formation du personnel.
Le Canada n'est tout simplement pas en mesure de prendre des engagements au petit bonheur chaque fois qu'une crise éclate. Nos soldats et leurs familles sont mentalement et physiquement épuisés. On leur a demandé de s'engager envers toute une gamme de missions, chacune plus compliquée et plus exigeante que la précédente. On leur demande d'accepter les plus dangereuses affectations sur notre planète avec de l'équipement qui n'est pas fiable ou dont ils ne disposent pas. En bref, on leur demande l'impossible.
Je suis d'avis qu'un examen conjoint de la politique étrangère et de la politique de défense doit être une priorité capitale du gouvernement. Un examen d'ensemble est un premier pas essentiel afin de préparer nos forces armées pour le XXIe siècle, mais ce n'est pas le seul pas, ni même le plus grand.
J'ai déjà parlé de la nécessité d'accroître le budget de la défense. J'ajouterais que la troisième priorité consiste à augmenter les effectifs de nos forces armées. Les fardeaux de notre bienveillance ont été placés sur les épaules de moins en moins de soldats. De ce fait, on demande à ces braves Canadiens d'accepter plus de missions, et plus fréquemment. Comme je l'ai dit, ils sont séparés de leurs familles plus longtemps qu'ils ne le devraient. On peut leur demander de retourner au même théâtre d'opérations--ou un autre, d'ailleurs--, quelques mois à peine après leur retour à la maison.
Les pénuries de personnel auxquelles nos forces armées sont confrontées sont tout aussi graves que les pénuries d'équipement, et elles sont tout aussi néfastes que l'insuffisance des budgets. Nous devons appuyer, chacun de nous, des deux côtés de la Chambre, une initiative de recrutement visant à intégrer des milliers de recrues, sans quoi nous risquons de perdre des milliers de ceux qui sont en uniforme aujourd'hui.
Les hommes et les femmes des Forces armées canadiennes s'engagent par serment devant nous et nous avons un devoir envers eux. Nous avons le devoir de mettre à leur disposition le meilleur équipement possible. Nous avant le devoir de faire en sorte qu'ils soient bien préparés aux missions que nous lançons en leur nom. Nous leur devons de ne pas engager leurs vies à des entreprises stériles où les risques l'emportent de loin sur les retombées potentielles.
Habituellement, nous attendons qu'une crise éclate avant de planifier notre réaction. Au mieux, c'est inefficace et au pire, c'est irresponsable.
Même dans un monde qui évolue très vite, avec l'émergence de nouvelles menaces pour la paix et la sécurité, nous pouvons prédire un grand nombre des défis auxquels nous serons confrontés dans les prochaines années. C'est le moment maintenant de préparer nos militaires à ces défis. C'est le moment aussi d'acquérir le matériel, de recruter les soldats et d'établir les alliances dont nous aurons besoin pour les conflits du siècle actuel.
Nous avons un rôle à jouer dans le monde, un rôle qui a défini clairement notre histoire et nos valeurs. Notre mission en Haïti n'est pas différente des missions que nous avons accomplies dans d'innombrables régions du monde. Pourtant, on dirait qu'il faut tout bousculer pour trouver les effectifs et le matériel nécessaires à ces missions. On a toujours l'air de déplacer des hommes, des femmes et des machines d'un endroit à l'autre comme des pièces sur un échiquier.
Cela n'est pas nécessaire. J'ai indiqué ce soir une série de mesures qui me semblent essentielles pour notre avenir : une politique de défense globale; un plus gros budget de la défense; une initiative de recrutement ciblé; et des achats stratégiques de matériel. En nous engageant dans ces actions aujourd'hui, nous serons prêts pour les défis de demain.
En terminant, je tiens à exprimer du fond du coeur mes meilleurs souhaits aux hommes et aux femmes des Forces armées canadiennes qui servent en Haïti et partout dans le monde. Nous prions pour qu'ils réussissent et qu'ils rentrent au pays sains et saufs.
L'hon. David Kilgour (Edmonton-Sud-Est, Lib.): Monsieur le président, je tiens à dire immédiatement que je me joins au député de Saint John pour souhaiter à nos militaires tout le succès possible en Haïti.
En fait, les Haïtiens ont de quoi être fiers. Haïti est la seule république au monde à être dirigée par des gens d'ascendance africaine et la première nation caraïbe à avoir obtenu son indépendance en 1804. Malheureusement, le peuple d'Haïti a enduré de longues périodes de dictature parsemées de lueurs d'espoir pour la démocratie, comme lors des élections présidentielles de 1990.
Comme tous le savent, les récents événements qui ont eu lieu en Haïti n'ont servi qu'à souligner encore davantage une situation politique précaire et instable.
[Français]
J'ai eu l'occasion de visiter Haïti au début des années 1990, afin de discuter des rôles des comités parlementaires avec les députés nouvellement élus. Les Haïtiens m'ont accueilli à bras ouverts et ont été chaleureux et hospitaliers. Ce qui frappait le plus était le lourd héritage de violence et de tourmente politique. Vingt-neuf des quarante-deux chefs d'État du pays ont été assassinés ou renversés. La culture de la corruption est répandue. Les dictatures, les carnages et les tentatives infructueuses en vue d'instaurer la paix ont marqué son histoire.
[Traduction]
Comme le Secrétaire général Kofi Annan l'a déclaré dans cette Chambre de façon très éloquente, hier:
Ce qui s’est passé à Haïti montre que la pauvreté, l’instabilité et la violence se perpétuent les unes les autres et que la situation qui en résulte a des répercussions sur le plan régional. |
Il a pressé la communauté internationale d'aider les Haïtiens à rétablir la paix et l'harmonie et à s'engager durablement dans la région.
Trop souvent, les membres de la communauté internationale font des demi-tentatives en vue de redresser ce qui va de travers. En tant que Canadiens et citoyens de l'hémisphère occidental, nous avons le devoir de faire en sorte que toute la région jouisse d'une stabilité politique durable.
[Français]
La démocratie exige de la stabilité et une infrastructure appropriée; elle doit reposer sur une culture qui puisse la soutenir. Nous ne devons pas nous imaginer, comme nous l'avons fait dans le cas de la reconstruction de l'Irak et de l'Afghanistan, que l'envoi des troupes pendant 90 jours suffira pour restaurer la démocratie à Haïti.
Nous avons besoin d'un engagement international pour améliorer la situation et nous devons aider les Haïtiens à construire des écoles, à créer des corps policiers et instituer un système judiciaire, à faire fonctionner une assemblée législative et mettre en place un appareil bureaucratique transparent.
Il existe une impasse terrible dans un régime où les plus pauvres sont punis simplement parce qu'ils existent. De nombreux pays ont choisi de retirer leur aide après la réélection franchement suspecte de Jean-Bertrand Aristide en 2000. Ils soupçonnaient, à juste titre peut-être, que plus de 70 p. 100 de l'argent accordé servait à des fins illégales et était empoché par des fonctionnaires corrompus. Au bout du compte, toutefois, ce sont 80 p. 100 des Haïtiens vivant sous le seuil de pauvreté qui ont écopé le plus par suite de ces décisions.
[Traduction]
Les Haïtiens ont besoin d'aide pour s'attaquer à leurs problèmes de santé de base, notamment les taux élevés d'infection au VIH-sida et de tuberculose, aux profondes iniquités sociales et au manque d'infrastructures les plus élémentaires.
La démocratie est une chose merveilleuse. L'autodétermination peut tirer de la misère les gens les plus opprimés, mais il est difficile de participer lorsqu'on vit dans le dénuement et qu'on ne peut pas satisfaire ses besoins fondamentaux.
De simples élections ne suffiront pas à régler les problèmes en Haïti. Un engagement soutenu est nécessaire, un engagement qui contribuera à instaurer la paix et la sécurité qui seront garantes de la primauté du droit. D'abord et avant tout, le Canada pourrait peut-être exporter la primauté du droit.
Avant la relâche de mars, j'ai demandé au ministre des Affaires étrangères quel rôle le Canada pouvait jouer dans une possible intervention humanitaire en Haïti.
Les Canadiens ont beaucoup à apprendre de l'expérience du général Roméo Dallaire au Rwanda. Nous devons intervenir au besoin et nous devons le faire avec célérité et de façon multilatérale.
C'est pourquoi je suis ravi d'apprendre que 450 militaires canadiens se joindront aux forces américaines en Haïti cette semaine. Toutefois, il y a beaucoup plus à faire. Les reportages en provenance d'Haïti hier indiquaient que la présence de forces étrangères n'avait pas vraiment réussi à prévenir la violence.
Le pays éprouve un manque total d'infrastructures et le chef de police Léon Charles a reconnu récemment qu'il avait quelque 3 500 policiers pour couvrir un pays de huit millions d'habitants.
Jean-Bertrand Aristide, maintenant en exil, presse ses partisans d'organiser une résistance pacifique pour rétablir l'ordre constitutionnel. On espère sincèrement que les partisans d'Aristide n'interpréteront pas ce message comme une incitation à la violence, mais il est difficile d'en être sûr.
En outre, les partis d'opposition, en Haïti, ne sont pas liés aux combattants rebelles et ils ne contrôlent guère leur action. C'est dramatique, mais Haïti est maintenant un État en déchéance qui est en proie à l'anarchie et au chaos, et où la primauté du droit ne tient pas.
Hier, notre ministre de la Coopération internationale a annoncé une aide de 5 millions de dollars pour secourir Haïti. Ce montant s'ajoute au 1,9 million déjà accordé à la Croix-Rouge et aux 5 millions versés à l'Organisation des États américains.
Depuis 40 ans, le Canada a donné à Haïti plus de 600 millions de dollars. L'argent était là; l'engagement n'a peut-être pas suivi. De toute évidence, l'argent seul n'est pas une solution.
Nous devons honorer nos accords internationaux et nos promesses. En 2001, au Sommet de Québec, le Canada et les autres pays se sont engagés à faire de leur mieux pour soutenir un régime constitutionnel dans tous les pays des Amériques. Les Haïtiens méritent que nous fassions de notre mieux pour honorer cette promesse.
Cette année, Haïti célèbre le 200e anniversaire de son indépendance. Quelle meilleure façon de célébrer que de bâtir un pays meilleur pour tous les citoyens? Quel présent ce serait que le Canada s'engage vraiment et durablement à régler la situation?
M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le président, permettez-moi de poser une question au député d'Edmonton.
Le député se souvient sûrement qu'à la fin de janvier 2003 l'ex-secrétaire d'État responsable de l'Amérique latine et de l'Afrique a tenu, ici, à Ottawa, un sommet de la Francophonie. Ont participé à ce sommet des représentants de la France, de l'Union européenne et des États-Unis. Le sommet avait pour thème la crise haïtienne. Le Canada n'avait pas invité Haïti à ce sommet.
Les séances du Sommet ont eu lieu à huis clos. Après le Sommet, des renseignements confidentiels ont été transmis à L'Actualité. Selon ces renseignements, on envisageait de placer Haïti sous la tutelle de l'ONU, un peu comme on l'avait fait avec le Kosovo.
Le député est-il au courant de la tenue de ce congrès? Peut-il dire à la Chambre si, à ce congrès organisé par le Canada, la question d'un changement de régime, autrement dit, du remplacement du président Aristide en Haïti avait été abordée un an avant de se concrétiser?
L'hon. David Kilgour: Monsieur le président, le député n'est pas sans savoir que je n'occupais plus les fonctions de secrétaire d'État responsable de l'Amérique latine à cette époque-là. Je n'ai pas assisté au sommet. J'ai lu l'article que mentionne le député.
Je ne sais pas si ce qu'il allègue s'est vraiment produit, car je n'y étais pas. Le poste de secrétaire d'État responsable de l'Amérique latine et de l'Afrique n'existe plus. Il m'est donc impossible de répondre à la question. Le député comprendra que je ne tenterai pas de répondre à une question à laquelle je n'ai pas de réponse.
M. Svend Robinson: Monsieur le président, je comprends que le député n'était pas secrétaire d'État à l'époque. Néanmoins, compte tenu du fait que ce poste n'existe plus et qu'il était, si je ne m'abuse, le prédécesseur à ce poste, j'ai pensé qu'il avait vraisemblablement participé au congrès, mais il affirme que ce n'est pas le cas.
J'aimerais savoir ce que pense le député des sérieuses questions que suscitent les circonstances entourant le départ du président Aristide d'Haïti, notamment les allégations et les graves craintes qu'il puisse s'agir d'un coup d'État. Si c'était le cas, Haïti en serait probablement au 33e coup d'État de son histoire.
Compte tenu des très sérieuses questions qui ont été soulevées et des déclarations du président Aristide lui-même qui a affirmé avoir été kidnappé et démis de force de ses fonctions par les États-Unis, est-ce que le député convient qu'il est essentiel de répondre positivement aux demandes pressantes du CARICOM à l'égard de la tenue d'une enquête indépendante sur les circonstances entourant le départ du président Aristide d'Haïti?
L'hon. David Kilgour: Monsieur le président, le député soulève un point extrêmement important. Le CARICOM est l'organisme représentant les nations des Caraïbes. C'est effectivement le CARICOM qui a réclamé la tenue d'une enquête indépendante pour établir si M. Aristide a été destitué ou a quitté Haïti volontairement. Une telle enquête ne peut s'avérer qu'avantageuse et ne nous fait absolument rien perdre. Je partage l'avis de mon collègue à ce sujet.
[Français]
M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le président, je suis très heureux de prendre la parole ce soir lors du débat exploratoire au sujet de la situation en Haïti.
Je commencerai en disant que je suis un peu peiné de voir dans quelle situation se retrouve ce peuple depuis maintenant des dizaines et des dizaines d'années. Les dictateurs se sont succédé. Tellement d'espoirs ont été fondés sur le président Aristide au moment de sa prise de pouvoir pour enfin donner libre cours à la démocratie. La tournure des événements nous laisse un peu un goût amer dans la bouche.
Je n'ai que de bonnes paroles pour le peuple haïtien qui, à mon avis, est souvent persécuté et victime de tous ces coups d'État. D'ailleurs, cela provoque un certain nombre de drames dans le pays même.
Je ne peux m'empêcher de parler brièvement d'une femme de chez nous qui est venue me voir. Elle s'appelle Cassandra Duvert. Il y a quelques années, elle est venue au Canada avec son ami, qui était un des avocats d'Aristide. Elle avait avec elle un de ses deux enfants; l'un était resté en Haïti alors que l'autre avait accompagné ses parents au Canada. L'avocat est retourné en Haïti avec l'enfant et a laissé cette dame seule ici. À partir de ce moment-là, elle n'avait plus de trace de ses enfants, ou presque. Il n'était pas question, naturellement, d'accorder une garde légale à la dame. Du jour au lendemain, son mari lui a téléphoné, à la suite du changement de régime, pour lui dire qu'il fallait qu'elle reprenne les enfants, parce qu'on venait de perpétrer un attentat contre sa vie. Les enfants étaient avec lui dans la voiture, ce qui le faisait craindre pour leur sécurité.
On peut s'imaginer l'ensemble des drames provoqués actuellement par le changement de régime. D'ailleurs, je suis en discussion avec le ministre des Affaires étrangères pour essayer de faire sortir ces enfants du drame dans lequel ils se trouvent.
Tout cela pour s'interroger à savoir si le départ d'Aristide constitue ou non un coup d'État. On peut en discuter longuement. Je n'ai rien contre le fait qu'il y ait un panel international pour examiner la question.
Par contre, si l'on veut vraiment donner une chance à la démocratie en Haïti, il faudra aussi qu'on s'arrête sur le fait qu'il y a tellement d'armes illégales au pays et que les factions en place sont tellement armées que ce n'est plus la démocratie qui peut s'exprimer, mais le pouvoir des armes. À cet égard, il y a un bout de chemin très important à faire.
Ma collègue de Mercier et moi-même avons également dénoncé un peu le gouvernement sur le fait qu'il a réagi tardivement. Il me semble qu'on aurait pu réagir avant. Je ne suis même pas sûr si les troupes sont déjà sur le terrain, puisqu'on disait qu'il y avait un peu de retard dans les opérations. Nous trouvons que cela a pris du temps avant que le Canada dise qu'il allait envoyer 450 soldats.
Je sais aussi que cela crée un stress dans le processus de rotation des troupes canadiennes. Je suis incapable de le nier, même que je suis un des premiers à le reconnaître. Toutefois, quand la situation est urgente à ce point, quand un bain de sang surgira, il me semble que la communauté internationale, et le Canada au premier chef, a la responsabilité de s'interposer et de s'assurer qu'on retrouvera un peu de sécurité dans un pays déchiré comme celui-là.
Je veux quand même louer les efforts des Forces canadiennes qui seront sur place probablement dans les prochaines heures. Les gens du RCR de Gagetown sont là. J'ai eu le plaisir de les rencontrer en Érythrée, lorsque j'ai visité des camps canadiens. Cette présence des forces canadiennes existait en vertu du chapitre VII de l'ONU pour le maintien de la paix. Il y avait une démarcation entre l'Érythrée et l'Éthiopie, comme on s'en souvient. J'ai eu la chance de rencontrer là-bas les gens du RCR.
Il y a aussi le Groupe des opérations interarmées, qui se trouve actuellement en Haïti, et il y a le 430e Escadron de Valcartier. Ce sont les pilotes d'hélicoptère que j'ai eu le plaisir de rencontrer lors de mon entraînement à Valcartier. Je dois vous dire que ces pilotes sont très impressionnants dans les manoeuvres qu'ils peuvent exécuter. Je suis sûr qu'ils pourront accomplir beaucoup de choses en Haïti, particulièrement dans le domaine humanitaire.
Il y a donc effectivement un stress. Nous avons des soldats encore présents en Bosnie et en Afghanistan. Comme on nous le disait tantôt, nous avons environ 3 700 soldats à travers le monde dans des missions comme celle-là. En rajouter 450, pour l'instant, c'est difficile. Il faut comprendre aussi que la mission actuelle est une mission de rétablissement de la paix, ce qui est beaucoup plus difficile qu'une mission de maintien de la paix. Le climat social est très instable. Beaucoup d'armes sont en circulation et c'est là que des drames peuvent survenir. Ces gens ne sont pas en vacances et ne font pas de tourisme là-bas. Ce sont des gens dont on a besoin pour assurer une certaine sécurité qui n'existe pas actuellement.
Tout à l'heure, j'ai entendu le ministre des Affaires étrangères nous dire qu'il voudrait, dans trois mois, appliquer le Chapitre VII, c'est-à-dire le maintien de la paix, ce qui est beaucoup moins difficile au fond.
J'ai été en mesure de témoigner à cet égard, parce que je suis allé visiter les camps canadiens en Bosnie, lors de la rotation numéro 9. C'était vraiment une mission de maintien de la paix. On voit qu'à ce moment-là, il y a beaucoup moins de danger pour les troupes comme telles. Toutefois, cela demande quand même à ces troupes de se déplacer, d'aller là et d'y passer du temps. On sait que c'est très difficile parce qu'il y a actuellement un important nombre de missions.
Je reviens au désarmement. Il me semble que c'est ce sur quoi on devrait insister. D'ailleurs, pas plus tard qu'aujourd'hui, dans le New York Times—et c'était l'objet d'une des questions que j'ai posées au ministre tout à l'heure—on a pu lire que les Américains ont commencé à dire qu'il fallait maintenant procéder au désarmement.
Si on veut vraiment donner une chance à la démocratie, aux entreprises publiques et privées de reprendre du poil de la bête, de vraiment s'élancer pour essayer de créer un contexte le plus normal possible, il va falloir qu'on fasse en sorte que le pouvoir des armes n'existe plus.
D'ailleurs, je vous fais part exactement de ce que le colonel Charles Gurganus disait aujourd'hui à propos des marines américains. Il a dit que ce serait un désarmement «active and reactive.» Les Américains prennent donc conscience de cela.
Par conséquent, je demande au ministre ce soir que, dorénavant, si les troupes ne sont pas encore arrivées sur le terrain, aussitôt qu'elles arriveront, elles se joignent aux Américains afin de désarmer ces factions, car il y a toujours des factions, et elles sont toujours actives.
Il y a entre autres, les «chimères» qui sont toujours fidèles à M. Aristide qui est parti. Ces gens continuent donc de régner à Port-au-Prince en semant la terreur avec leurs armes, justement. Il n'est pas rare de voir encore des scènes de pillage, des tueries et des viols, tout cela, à bout d'armes. Il est donc important que les armes soient rapatriées et confisquées.
Le problème avec Aristide, c'est qu'en 1994, il a complètement démobilisé l'armée. Il a retourné les soldats chez eux sans leur dire: «Déposez les armes et allez-vous en chez vous.» Alors, les gens sont partis chez eux avec les armes. Ce faisant, il y a plein d'armes en circulation. C'est sans parler de la proximité de la République dominicaine qui passe aussi des armes d'une frontière à l'autre, parce qu'on sait que cette frontière est assez perméable. Il n'y a personne qui patrouille la frontière. Il y a donc des marchands qui trafiquent des armes à l'intérieur d'Haïti et qui font en sorte que les factions s'opposent à coups de fusil.
Il n'y a pas que les «chimères»; il y a aussi les «chimères» dissidents qui forment la fameuse armée cannibale des Gonaïves. Ce sont d'autres gens qui ont des armes et qui ont leur propre intérêt et leur propre ligne d'action, et ce, toujours à bout d'arme.
Il y a également le fameux Guy Philippe qui s'était proclamé, si vous vous en rappelez bien, chef de l'armée et des milices, alors que deux ou trois jours plus tard, cela ne fonctionnait plus. Les gens qui sont avec lui sont des repris de justice et ils sont tous armés.
Il faut donc désarmer ces factions. J'implore le ministre de la Défense nationale de donner des ordres tout de suite. Je n'ai pas vu les règles d'engagement. Je n'ai pas vu la mission exacte, à part le fait qu'elle soit sous le chapitre 6 de l'ONU qui, d'ailleurs, est une résolution assez élaborée. Même si elle n'est pas précise, selon nous, il y a suffisamment de dispositions dans la résolution actuellement pour justement permettre un désarmement. Il faut qu'on aille dans cette veine avec les Américains.
Je souhaite donc qu'on en arrive à un désarmement. Je souhaite que le peuple d'Haïti retrouve une vraie démocratie. Il y a assez longtemps que ce peuple est privé d'une vraie démocratie; il y a assez longtemps que ce peuple est privé d'une fonction fédérale active et d'un secteur public actif. Enfin, il y a assez longtemps que l'entreprise privée est mise de côté. Personne ne veut, dans un contexte d'insécurité comme celui-là, investir des sommes d'argent.
Pour que la situation revienne à la normale, pour donner une chance à la démocratie et à l'économie d'Haïti, il faudra désarmer ces factions. Les Américains l'ont compris. Maintenant, j'aimerais bien que le ministre de la Défense nationale du Canada le comprenne également et qu'il donne les ordres en conséquence pour faire en sorte de retrouver cette démocratie.
[Traduction]
L'hon. Scott Brison (secrétaire parlementaire du premier ministre (Canada-États-Unis), Lib.): Monsieur le président, comme l'a déjà souligné mon collègue, le ministre des Affaires étrangères, la situation politique actuelle en Haïti, ponctuée par les événements des dernières semaines, trouve son origine dans les élections législatives et municipales de mai 2000 qui laissaient sérieusement à désirer. La polarisation subséquente du gouvernement et de l'opposition, à laquelle se sont ajoutés la faiblesse des institutions et les difficiles défis économiques et sociaux du pays, ont mené à la situation dont nous sommes témoins aujourd'hui, situation où une forte participation de la communauté internationale est nécessaire pour aider Haïti à changer de cap et à se tourner vers un avenir plus positif.
Le Canada entretient des liens étroits avec Haïti depuis de nombreuses années, ces liens étant peut-être plus profonds depuis 1994, lorsque nous avons commencé à appuyer la mise en place et la formation de la police nationale haïtienne constituée depuis peu. Depuis ce temps, les 45 millions de dollars d'aide au développement que le Canada a versés en Haïti ont surtout servi au secteur de la sécurité, notamment pour les services de police et autres activités connexes.
Notre engagement envers Haïti a été une de nos plus importantes missions internationales, un total de 685 policiers ayant été déployés à différents moments, d'octobre 1993 jusqu'à la fin de mars 2001. Le personnel canadien a participé en Haïti à diverses missions de l'ONU qui visaient les activités policières, à titre de membre de la police civile et en offrant de la formation à l'école de police. Le Canada a aussi offert un soutien bilatéral pour aider la police nationale haïtienne.
Malgré notre engagement continu envers Haïti, le Canada a décidé, en mars 2001, de mettre un terme à nos activités policières dans ce pays, en raison de l'insécurité politique grandissante et généralisée, directement attribuable à la politisation, à la corruption, au manque d'expérience de la police nationale haïtienne et à ses compétences laissant à désirer sur les plans de l'administration et de la gestion. Quoi qu'il en soit, nous avons poursuivi nos efforts à l'échelle internationale afin d'assurer un avenir meilleur à Haïti.
Le Canada poursuit son aide au développement à l'égard d'Haïti, mais il est aussi devenu le plus important participant de l'OEA à la mission spéciale en Haïti, mission sous la direction du Canadien David Lee, qui est sur place depuis deux ans. Notre pays a acquis de l'expérience et des compétences pour ce qui est de soutenir une démarche de renforcement de la démocratie en Haïti.
Après les événements du mois dernier, Haïti entre dans une nouvelle ère et peut repartir à neuf. Les défis sont gigantesques et, cette fois, nous ne devons pas sous-estimer l'engagement requis pour les relever. Le Canada est déjà venu en aide à Haïti et il le fera volontiers dans l'avenir.
Le Canada croit qu'il est essentiel que les efforts de la communauté internationale en Haïti soient efficacement coordonnés. Nous pouvons jouer un rôle important à titre de défenseur des intérêts en veillant à ce que les efforts de tous les organismes, surtout les Nations Unies et l'OEA, soient complémentaires et bien coordonnés.
La mission spéciale de l'OEA peut contribuer largement à réduire le niveau de tension en Haïti, à dégager un consensus social et à appuyer les efforts de bonne gouvernance. Sa contribution est précieuse et il faut l'encourager au moment où nous cherchons à instaurer une démocratie viable dans ce pays. Le Canada peut exercer un certain leadership et aider la mission à dégager un consensus, à surveiller le respect des droits, à renforcer le système de justice et à améliorer le maintien de l'ordre. Voilà pourquoi le Canada s'est récemment engagé à verser 5 millions de dollars à la mission spéciale de l'OEA, en plus du soutien qu'il avait fourni antérieurement.
Tous les pays de la communauté internationale, dont le Canada, sont prêts à apporter leur appui. Il appartiendra ultimement au peuple d'Haïti de trouver la façon d'avancer. Les mesures prises antérieurement par la CARICOM et l'OEA serviront de base aux présents efforts de reconstruction des institutions qui assureront un meilleur avenir à Haïti. Le processus de la réforme politique est déjà amorcé, selon les étapes décrites dans le plan de transition initialement proposé par la CARICOM, qui demeure valable. Pour que ce plan réussisse, le nouveau gouvernement intérimaire doit s'engager fermement envers la réforme.
La première étape, après la démission de l'ancien président Aristide, fut évidemment l'assermentation du nouveau président en conformité avec la Constitution haïtienne. Bien que cette Constitution stipule clairement que le juge en chef de la Cour suprême est le prochain dans l'ordre des candidats au poste de président, elle ne dit pas comment on peut confirmer sa nomination sans assemblée nationale qui puisse siéger. Cependant, la question est à l'étude au nouveau conseil tripartite composé de trois personnes représentant le gouvernement, l'opposition et la communauté internationale. Ce conseil a maintenant créé un conseil des sages regroupant sept membres qui s'occupera de nommer un nouveau premier ministre qui, à son tour, créera un cabinet chargé de l'unité nationale.
Accompagné par la communauté internationale, un conseil électoral provisoire cherchera à organiser des élections avant la fin de 2004, espère-t-on, pour garantir un retour harmonieux et rapide à une vraie démocratie.
La tâche qui nous attend est colossale. Pour que le processus politique se remette en marche, la communauté internationale est déterminée à assurer la sécurité dans l'immédiat et à travailler avec la police nationale haïtienne au rétablissement de l'ordre. La force internationale intérimaire de l'ONU, qui englobe la participation canadienne, aide à instaurer la stabilité et la sécurité en Haïti.
À moyen terme, il sera essentiel, pour aider Haïti à poursuivre sa marche, d'assurer une présence militaire soutenue, doublée d'une aide humanitaire et d'une mission civile pour aider à rebâtir les institutions démocratiques, dont la police civile.
La planification d'une force onusienne de stabilisation qui remplacera la force intérimaire dans trois mois est déjà amorcée. Son rôle et son mandat n'ont pas encore été définis, et ils doivent recevoir l'approbation du Conseil de sécurité, mais cette force jouera un rôle crucial dans le rétablissement d'institutions essentielles de gestion et de sécurité, et de la primauté du droit. Elle préparera aussi le terrain pour des programmes de développement à long terme.
Haïti a maintenant l'occasion de devenir vraiment démocratique. Il est essentiel de s'attaquer au problème central de l'impunité, si on veut rétablir la primauté du droit en démocratie. Nos objectifs communs doivent être d'assurer un avenir plus radieux à tous les Haïtiens, un avenir qui leur permettra de reconstruire leur vie et de réaliser leurs rêves dans un cadre sûr.
La gouvernance est essentielle, mais on ne peut pas édifier des institutions solides et créer une culture démocratique du jour au lendemain. Ce qu'il est nécessaire de faire en Haïti, c'est de mettre en place, à long terme, les institutions du pays, c'est-à-dire les systèmes judiciaire, policier, parlementaire, agricole et les systèmes d'éducation et de santé. Nous avons déjà tiré des leçons sur l'efficacité de notre aide lorsque le cadre de gouvernance est imparfait. Comme l'a répété à plusieurs reprises le premier ministre, nous ne commettrons plus cette erreur.
Nous devons évaluer la situation de façon rationnelle, déterminer les besoins et les priorités et répondre aux besoins du peuple haïtien. Il faut toutefois que nos attentes soient réalistes. Il s'agit d'un projet à long terme qui nécessitera le soutien à long terme de donateurs internationaux.
Il est important de noter que la crise actuelle en Haïti a entraîné le resserrement des liens entre le Canada et les États-Unis. Il est également important de souligner notre partenariat avec les États-Unis se réalise sous les auspices de l'OEA et des Nations Unies.
Nous avons collaboré étroitement avec ces institutions multilatérales, ainsi qu'avec les États-Unis et nos partenaires de la CARICOM pour trouver des solutions à la crise politique en Haïti. Le Canada fera sa part pour aider à façonner un nouvel et meilleur avenir pour tous les Haïtiens. Je crois que les Canadiens seront fiers du rôle important que joue le Canada pour bâtir un monde meilleur et pour défendre non seulement les intérêts des Canadiens, mais aussi les valeurs d'égalité, de démocratie et de respect de la primauté du droit qui caractérisent le Canada.
M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): CARICOM Monsieur le président, le député de Kings--Hants a parlé de l'étroite collaboration entre le Canada et les États-Unis en Haïti. Compte tenu du fait que ce qui semble s'être produit en Haïti est en fait un coup d'État, le 33e de l'histoire d'Haïti, provoqué par les Américains avec le soutien actif de la France, je pense que nombre de Canadiens se préoccupent vivement de l'étendue de la collaboration canadienne avec les États-Unis, comme le député l'a souligné.
Je voudrais poser une question particulière au député. Celui-ci a parlé de l'importance de travailler étroitement avec la CARICOM et nos partenaires au sein de cette dernière. Le député sait qu'une proposition de partage du pouvoir a été faite par l'OEA et la CARICOM. Cette proposition a été faite dans les jours qui ont précédé le renversement du président Aristide.
Le président Aristide a accepté cette proposition, laquelle toutefois a été rejetée par les brutes sanguinaires et les rebelles qui étaient déterminés à le renverser, même s'il avait été élu démocratiquement avec le soutien de quelque 90 p. 100 de la population d'Haïti en 2000. Ces brutes et ces rebelles l'ont rejetée.
Or le Canada n'a rien fait pour appuyer le président Aristide, qui avait été élu démocratiquement, et la population haïtienne dans ces heures très difficiles. Les Américains l'ont abandonné et laissé sans défense. Ils ont laissé clairement entendre qu'ils ne feraient rien pour empêcher son renversement. Les Français, qui cherchaient à plaire aux Américains après avoir pris nettement position contre eux sur la guerre en Irak, ont également pressé l'opposition de renverser le président Aristide.
Nos partenaires de la CARICOM demandent maintenant la tenue d'une enquête internationale indépendante sur les circonstances qui ont conduit à la destitution du président Aristide.
J'ai demandé tout à l'heure au député d'Edmonton s'il appuyait cette demande faite par la CARICOM pour la tenue d'une enquête internationale sur toutes les circonstances de la destitution du président Aristide. Il a dit oui, il a dit qu'il était d'accord là-dessus.
Je pose maintenant la même question au secrétaire parlementaire responsable des relations canado-américaines. Le secrétaire parlementaire est-il d'accord avec son collègue et de nombreux Canadiens pour dire qu'il doit y avoir une enquête internationale indépendante pour déterminer les circonstances qui ont mené au renversement du président Aristide?
L'hon. Scott Brison: Monsieur le président, premièrement, nous assumons que M. Aristide a démissionné volontairement. Sa décision aurait été prise en partie en raison de l'effondrement de ses propres forces de sécurité, ce qui n'était pas une situation à laquelle le Canada a contribué. Ce n'est pas une situation à laquelle nous avons participé directement. Je comprends donc que ses propres forces de sécurité se sont affaiblies au point qu'il était disposé à démissionner volontairement et qu'il ne s'agissait certainement pas là d'un coup d'État planifié par les États-Unis ou quelqu'un d'autre.
En ce qui concerne les élections de 2000, comme les députés en sont conscients, les résultats ont eu beau être écrasants, des questions ont été soulevées à l'époque quant à leur légitimité. Une partie du problème auquel nous avons été confrontés depuis découle de certaines des questions soulevées par ces élections.
J'ai pensé qu'il était bizarre que le député mentionne que la France avait manoeuvré pour amadouer les Américains. Ce serait bien l'une des premières fois que la France se serait empressée d'amadouer les Américains pour une question de politique étrangère. Je serais très surpris si la France avait agi en Haïti, un pays avec qui nous partageons un intérêt commun en tant que membre de la francophonie, de façon à amadouer les Américains. Cela n'aurait aucun sens compte tenu de ce que je crois comprendre de la politique étrangère traditionnelle de la France.
Ce qui compte ici ce n'est pas nécessairement de nous concentrer sur ce qui, dans les derniers jours et les dernières semaines, a causé la situation actuelle mais plutôt sur la démocratisation, la stabilisation et la reconstruction de Haïti. Le peuple haïtien le mérite. Si nous voulons que notre politique étrangère reflète les valeurs canadiennes, en l'occurrence la démocratie, la règle du droit et l'égalité, il y va de notre intérêt de travailler à réaliser ces objectifs.
Il reste beaucoup de travail à faire. En collaborant avec l'OEA, le CARICOM et les autres dans un cadre multilatéral, nous pouvons faire beaucoup. L'objectif réel dans les jours, les semaines, les mois et en fait les années qui viennent doit être une approche avant-gardiste visant à faire naître un Haïti plus stable, pacifique et démocratique.
M. Svend Robinson: Monsieur le Président, je remarque que le député laisse entendre que le président Aristide aurait, selon ce qu'il a dit, démissionné de son propre gré. En fait, le président Aristide a lui-même précisé très clairement que bien loin d'avoir démissionné de son propre gré, il avait été chassé par la France et les États-Unis. En fait, son avocat américain, Brian Concannon, a dit aujourd'hui après avoir rencontré Aristide qui est en exil en République centrafricaine:
Les ambassadeurs de la France et des États-Unis lui ont dit que s'il ne quittait pas immédiatement le pays, lui-même, les membres de sa famille et ses partisans seraient tués. |
Il ne s'agit pas là d'un départ volontaire, mais bien d'un coup d'État.
J'aimerais à nouveau demander à mon collègue de répondre à la question que je lui ai d'abord posée. Appuie-t-il , oui ou non, l'appel de la CARICOM qui demande la tenue d'une enquête internationale indépendante sur les circonstances qui ont mené au renversement du président Aristide?
L'hon. Scott Brison: Monsieur le président, tout d'abord, je peux dire au député que je ne crois rien des allégations quasi grotesques voulant que les gouvernements de la France et des États-Unis aient dit au président Aristide que lui et sa famille seraient exécutés s'il ne donnait pas volontairement sa démission. Je ne crois rien de tout cela. C'est peut-être bien ce qu'il a dit, mais je ne crois pas du tout que les gouvernements de la France et des États-Unis pourraient avoir participé à ce genre de brutalité.
Je crois comprendre que M. Aristide avait des problèmes avec ses propres forces de sécurité qui se sont volatilisées et il n'était pas en mesure de se protéger contre son peuple. Lorsque la démocratie échoue ou chancelle comme ce fut le cas en Haïti, il est essentiel que le dirigeant puisse compter sur une protection physique qui n'existait pas dans ce cas pour pouvoir conserver le pouvoir. C'est ce qui d'après moi a contribué à lui faire dire que sa famille et lui étaient en danger, mais rien de cela n'a été provoqué par les États-Unis ou par la France.
Dans cette optique, je rejette la prémisse de la question qui tend à faire croire que le président Aristide aurait subi des menaces de la part de la France et des États-Unis et que ce sont ces menaces qui l'auraient forcé à démissionner parce que je ne crois pas à l'existence de ces menaces.
M. Svend Robinson: Monsieur le président, la question posée est la suivante, appuie-t-il ou non une enquête internationale indépendante sur les circonstances qui ont forcé le président Aristide à quitter Haïti?
L'hon. Scott Brison: Monsieur le président, j'apprécie l'insistance du député sur ce point, mais je crois qu'il devrait, comme tout député de la Chambre d'ailleurs, se concentrer sur la démocratisation, la stabilisation et la reconstruction de la vie des Haïtiens et aller de l'avant. En tant que pays et dans le cadre de notre aide multilatérale, nous devons investir le maximum d'efforts et de ressources dans ce projet.
Je ne crois vraiment pas que ce soit utile ou constructif de concentrer nos efforts sur des activités d'enquête alors qu'en fait, des gens meurent et d'autres ont la vie brisée. Nous pouvons faire partie de la solution au lieu de nous regarder le nombril et d'essayer de trouver l'origine de problèmes comme c'est le cas depuis plusieurs semaines. En fait, nous pouvons faire partie d'un meilleur avenir, d'un avenir plus démocratique et plus stable pour le peuple haïtien.
Je sais que le député partage ces valeurs canadiennes de démocratie, de primauté du droit et d'égalité. Puisqu'il partage ces valeurs et leur accorde une grande importance comme Canadien, il devrait, à titre de législateur canadien, s'efforcer d'aider les Haïtiens pour qu'ils puissent eux aussi prendre de façon générale ces valeurs fondamentales pour acquises. J'ai confiance qu'il pourra appuyer les efforts du gouvernement canadien qui essaie de travailler avec d'autres pays partageant ces valeurs pour aider les Haïtiens à atteindre la stabilité et la démocratie.
M. Bob Mills (Red Deer, PCC): Monsieur le président, c'est pour moi un honneur de participer à ce débat.
Je parlerai de trois choses, qui sont quelque peu différentes de ce dont les autres orateurs ont parlé.
Je parlerai premièrement, brièvement, des débats exploratoires; deuxièmement, de mon expérience d'Haïti; et troisièmement, des enfants adoptés qui sont en Haïti. J'ai travaillé avec de très nombreuses personnes, dans le centre de l'Alberta et ailleurs dans la province, pour accélérer le départ d'Haïti de ces enfants adoptés. Je pense que ces trois sujets méritent que j'y consacre quelques minutes, au lieu de parler des militaires et d'autres questions.
Je suis arrivé ici il y a 11 ans. Peu après mon entrée en fonctions en tant que porte-parole en matière d'affaires étrangères, nous avons tenu un débat exploratoire à la Chambre. Le nombre de participants au débat était comparable à ce qu'il est aujourd'hui. J'étais plutôt renversé, car je croyais venir ici pour exposer un point de vue, débattre un sujet et parler de ce que voulaient mes électeurs. Je m'attendais à ce qu'il y ait des gens pour écouter, répondre et réagir à ce qui allait se dire à la Chambre.
Je me suis plutôt rendu compte que les débats exploratoires ne sont précisément que cela. Nous nous parlons à nous-mêmes, peut-être aussi aux téléspectateurs, parmi lesquels il se trouve peut-être quelqu'un pour nous écouter. Je pense que c'est très frustrant et que c'est une piètre façon de faire les choses.
À l'époque, j'avais eu une idée. Pourquoi ne pas tenir de véritables débats exploratoires dont le premier tiers serait consacré à faire venir des spécialistes qui nous expliqueraient les détails du sujet? Pendant le tiers suivant du débat, les porte-parole de chaque parti, disons deux chacun, présenteraient leur point de vue. La troisième partie du débat serait réservée à la tenue de votes libres sur des aspects vraiment pertinents du sujet à l'étude. Ça me semblait une façon vraiment démocratique de procéder et un moyen de donner un véritable sens aux débats exploratoires.
Au lieu de cela, des députés de tous les partis font des déclarations, du reste sincères, et expliquent leur point de vue, mais je me demande vraiment dans quelle mesure on les écoute et si on accorde de l'importance à leurs propos.
Je propose de nouveau mon idée, dans l'espoir que le nouveau premier ministre, lorsqu'il examinera la question du déficit démocratique, fasse en sorte que les débats exploratoires acquièrent une véritable utilité.
Le deuxième sujet que je veux aborder, c'est Haïti en soi. En tant que porte-parole de mon parti pour les questions relatives aux affaires étrangères, je suis allé en Haïti avec M. Axworthy, alors ministre des Affaires étrangères, lors de la dernière révolte et j'ai eu l'occasion de visiter presque tout le pays. Ce que j'ai vu m'a atterré. La pauvreté m'a aberré. L'absence d'eau propre, de soins de santé et de ressources pour satisfaire aux besoins essentiels humains m'ont atterré.
J'ai participé à une patrouille avec nos militaires. Je n'oublierai probablement jamais le dévouement des policiers et des militaires qui étaient là, des jeunes femmes et des jeunes hommes formidables, mais ce que j'ai vu m'a atterré. Nous descendions une allée et nous avons eu soudainement l'impression d'être surveillés, nous savions que quelque chose nous surveillait. Bien sûr, les militaires se sont empressés d'allumer leurs lampes et nous avons alors vu une multitude de rats debout sur leurs pattes arrières, littéralement prêts à sauter sur nous. J'ai compris à quel point la situation était atroce dans ce pays pauvre. J'ai pensé que nous devons faire davantage.
Nous nous sommes entretenus avec des parlementaires. Une de leurs principales préoccupations était le type de nouveau parlement qu'ils pourraient construire. Pourtant, les rues, la nuit, sont peuplées de bêtes comme celles que nous avons vues.
En même temps, étant donné mes antécédents dans l'industrie du tourisme, je vois que ce pays a tout pour lui. Certes, il a été déboisé, mais il a les plages, le climat et la température. Il a un potentiel énorme. Bien sûr, ce triste pays a aussi l'instabilité politique, une tradition d'absence de loi et d'ordre, et la destruction y a fait son oeuvre.
À ce moment-là, j'ai été très impressionné par le fait que le Canada participait à la formation des policiers par l'entremise de corps policiers de tout le pays. Nous avions une école pour les juges où nous tentions d'enseigner la primauté du droit. Nous avions des enseignants et des professeurs qui essayaient de montrer aux Haïtiens comment mettre sur pied un système d'éducation. En outre, nous avions des professionnels de la santé qui essayaient d'établir un semblant de système de santé normal.
Je dois me demander ce qui s'est passé, car nous sommes revenus à la case départ ou même pire à la suite des événements que nous avons vus à la télévision.
Lorsque nous parlons d'Haïti et d'endroits de ce genre, nous ne pouvons tout simplement dire que nous allons envoyer des militaires qui seront là pour trois mois. Il faut voir comment nous pouvons rebâtir un pays de ce genre afin qu'il puisse être viable pour que nous n'ayons pas à retourner à la case départ chaque fois.
Cela devient une question importante pour les parlementaires canadiens. Nous sommes très bien placés pour aider Haïti. La langue parlée dans le pays est le français et cela nous donne un avantage dans cette région.
La troisième question porte sur les orphelins qui ont été adoptés par de nombreux parents canadiens. Je connais 28 de ces parents et beaucoup d'entre eux, j'en suis persuadé, suivent le débat de ce soir.
Les représentants des ministères des Affaires étrangères et de l'Immigration ont apporté une collaboration remarquable. Ils m'ont téléphoné à 7 heures du matin. Ils m'ont téléphoné un dimanche soir. Ils ont fait plus que leur devoir. J'apprécie certes cela et je les en félicite à la Chambre. J'espère qu'ils pourront lire le hansard pour constater qu'on les a félicités. Je ne donnerai pas de nom, mais il y a deux personnes remarquables qui se reconnaîtront qui travaillent à Citoyenneté et Immigration Canada qui nous ont aidés et nous ont tenus informés.
Mon travail consiste à informer ces parents. J'ai des lettres de parents typiques de ma circonscription de Red Deer et là encore, je n'utiliserai pas leur nom sans leur permission. Ils ont adopté un bébé en Haïti et ils ont un numéro d'adoption. Toutes les formalités ont été faites et il ne manque plus que l'attestation du gouvernement haïtien. Certains attendent depuis des mois et d'autres depuis encore plus longtemps pour obtenir ce document signé.
Je comprends parfaitement pourquoi le gouvernement canadien ne peut sortir ces enfants de l'orphelinat pour les amener ici. Cependant, j'implore le gouvernement de faire tout en son pouvoir pour obtenir la signature de ces documents afin que les enfants puissent sortir du pays et être remis à ces parents qui les attendent.
C'est une question dont je crois que personne d'autre n'a parlé, mais elle est très importante. Un grand nombre de ces parents adoptifs se trouvent au Québec. Je connais 28 d'entre eux et, dans ma circonscription, il y en a sept avec lesquels je travaille sur cette question.
Nos soldats se rendent là-bas pour stabiliser une situation difficile. Je leur recommande vivement, et je sais que ce sera l'une de leurs priorités, d'aider ces parents à faire sortir ces très jeunes bébés du pays pour qu'ils puissent venir au Canada et y recommencer une nouvelle vie.
En conclusion, je remercie le gouvernement de ce qu'il fait à cet égard. Je me réjouis que nous nous engagions dans cette voie, mais cherchons également à voir ce qu'il est possible de faire à long terme.
Ensuite, considérons la possibilité de tenir des débats exploratoires parce que je suis du même avis que le premier ministre dans ce domaine. Je crois que, en effet, les députés ont le droit de faire entendre leur voix. Le Parlement devrait à être le centre des débats nationaux sur les politiques. J'aimerais que cela ait lieu ici pour qu'il soit effectivement possible de voter sur la question de savoir si nous devons envoyer des soldats à tel ou tel endroit, et d'exprimer les autres préoccupations de ce genre qui existent au Canada.
M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le président, j'ai pour le député une question semblable à celle que j'ai posée au député de Kings-Hants.
Vu les graves questions soulevées sur les circonstances ayant conduit au départ du président Aristide d'Haïti, le député est-il d'accord avec l'appel lancé par la CARICOM, notamment par la voix de son président, P.J. Patterson, premier ministre de la Jamaïque, qui demande qu'une enquête internationale indépendante fasse la lumière sur les circonstances ayant mené à la destitution du président Aristide?
M. Bob Mills: Monsieur le président, je suis un peu embêté pour répondre à votre question. En ce moment, je ne suis pas le porte-parole en matière d'affaires étrangères; je le suis en environnement. Je ne suis pas en mesure d'énoncer la position de mon parti; par contre, je peux formuler la mienne à titre de député de Red Deer.
M'étant trouvé à Haïti dans des circonstances difficiles, je n'ai pas été très impressionné par M. Aristide et son gouvernement. Je n'estime pas que Duvalier père ait fourni un gouvernement extraordinaire. Je n'estime pas que Duvalier fils ait fait beaucoup mieux. Je crois que ce pauvre pays a été assujetti à des dictateurs et a beaucoup souffert d'un manque de démocratie.
Il ne me déplaît pas que Français et Américains aient tenté d'y instaurer une stabilité de la meilleure façon possible. Il me semble, encore une fois vu de l'extérieur, que la seule façon de stabiliser ce pays consistait, en fait, à destituer M. Aristide.
Je crois que sa destitution l'a servi ainsi que sa famille. Car je ne crois pas qu'il aurait survécu s'il était demeuré en poste.
Que cela ait été fait, comme l'a dit le député, par la force ou de façon volontaire, je me fie aux autorités qui s'en sont chargées. Cela a été fait dans les intérêts supérieurs des Haïtiens. À présent, la situation est stabilisée et la stabilité augmente sans cesse. Je ne vois pas comment une enquête, une autre attaque contre la France ou les États-Unis apporteraient quoi que ce soit aux Haïtiens, jeunes ou adultes.
Stabilisons le pays. Remettons-le sur pied et enseignons à sa population la démocratie ainsi que la loi et l'ordre et aidons-la à améliorer son système judiciaire. Cela vaudra beaucoup mieux que de gaspiller de l'argent pour une enquête au cours de laquelle pourraient s'exprimer bien des points de vue différents et qui pourrait apparaître comme une simple attaque contre les États-Unis d'Amérique.
M. Svend Robinson: Monsieur le président, il est intéressant de voir que le Parti libéral au pouvoir et le Parti conservateur s'entendent pour dire qu'il faut une enquête internationale indépendante pour découvrir la vérité.
J'ai trouvé extraordinaire que le député conservateur dise maintenant qu'il était absolument essentiel de déloger Aristide pour instaurer une certaine stabilité en Haïti. Tant pis pour la démocratie.
En fait, le président Aristide a été démocratiquement élu par plus de 80 p. 100 de la population du pays en l'an 2000. Quand les États-Unis, la France et le Canada ont-ils jugé bon de s'arroger le pouvoir de décider quel leader démocratiquement élu devrait être renversé? Quels sont les critères? Le critère déterminant est-il le respect pour les droits fondamentaux de la personne? Le Canada veut-il dire que nous devrions renverser des régimes répressifs dans certains pays comme la Colombie, dans notre hémisphère, ou la Turquie?
De quel droit les États-Unis ont-ils décidé que le président Aristide n'était plus utile et qu'il devait être délogé? Le député est-il d'avis qu'il convenait tout à fait que la France, les États-Unis et probablement le Canada prennent les mesures pour que soit renversé le président démocratiquement élu d'Haïti?
M. Bob Mills: Monsieur le président, si nous demandions aux Américains ou aux Français, je suis prêt à parier que le dernier endroit où ils voudraient être c'est Haïti. Je pense que c'est strictement à cause de la détérioration de la situation. Les Nations Unies ont établi que la situation était critique parce qu'il y avait des tueries. Nous pourrions examiner cette détérioration. D'après certaines personnes à qui j'ai parlé, nous devrions-nous demander si, en 2000, il s'agissait d'une véritable démocratie. Je ne pense pas que bien des gens conviendraient qu'il s'agissait, en 2004, d'une véritable démocratie. C'était un appel de la communauté internationale.
Les parents que je représente et dont je parle ici ont demandé que quelqu'un se rende sur place pour faire cesser les fusillades et les tueries autour des orphelinats. Des bandes de coupe-jarrets, dont certains sont partisans de M. Aristide, tirent sur les gens et les tuent. Dans la plupart des cas, ces parents étaient assez heureux d'apprendre que les marines américains sont le long des côtes, qu'ils débarquent et interviennent, de façon très démocratique, pour stabiliser la situation. Il n'est pas aisé d'être la police du monde entier; c'est une position difficile à assumer. Bien des gens avec lesquels je me suis entretenu m'ont affirmé être très heureux de voir que les marines sont sur place.
Évidemment, comme je l'ai dit, le Canada a une position unique, particulièrement à cause de la langue et de l'histoire et du fait qu'il y a au Canada de nombreux Haïtiens, surtout à Montréal et à Calgary. Ces gens nous demandent de stabiliser la situation dans leur pays d'origine et de ramener l'ordre pour qu'ils puissent rendre visite à leurs parents en toute sécurité. Contrairement au député, je ne perçois pas cette intervention comme négative. Je considère plutôt qu'il s'agit d'un effort, très bien accueilli je le signale, de la part des Américains, des Français et maintenant des Canadiens, pour stabiliser la situation.
M. Svend Robinson: Monsieur le président, nous avons entendu le même argument à propos de la stabilité, bien sûr, lorsque Pinochet a renversé le gouvernement démocratiquement élu de Salvador Allende, au Chili, et nous entendons maintenant des arguments similaires en ce qui concerne le Venezuela, ce qui est très dangereux.
J'ai une brève question pour mon collègue. Il a parlé de l'importance de venir en aide aux pauvres, particulièrement aux enfants, en Haïti. Pourtant, depuis 2002, la CARICOM plaide auprès des États-Unis pour qu'ils lèvent leur embargo économique dévastateur contre Haïti. Les États-Unis bloquaient systématiquement des prêts à Haïti approuvés antérieurement à Haïti et les ministres des Affaires étrangères de la CARICOM demandaient instamment aux États-Unis de libérer ces fonds. Voici un extrait de leur plaidoyer: «Ils ont souligné que la prompte libération de ces fonds était cruciale si on voulait éviter une catastrophe dans ce pays.»
Où était le député? Où était son parti quand il fallait réclamer la libération de ces ressources dont on avait désespérément besoin pour venir en aide à la population haïtienne, ressources que bloquaient les États-Unis, même si la CARICOM, dans la région, demandait avec insistance qu'ils soient débloqués? Cela a davantage contribué à la pauvreté et à l'injustice, ce qui a touché des enfants et d'autres personnes en Haïti, que n'importe quoi d'autre qui s'est passé dans ce pays depuis de nombreuses, nombreuses années.
M. Bob Mills: Monsieur le président, c'est en quelque sorte du déjà vu, car je me souviens d'avoir débattu des mêmes questions avec le même député il y a dix ans. Pour l'essentiel, il connaît mes positions sur les embargos et sait qu'ils ne fonctionnent pas très bien. Particulièrement dans des régions comme celle-là, ils ne fonctionnent pas du tout. Nous n'avons tout simplement pas assez de navires et de moyens de contrôle.
Un embargo à l'égard d'un endroit comme Haïti n'explique pas le problème qui se pose aujourd'hui. Le problème aujourd'hui est lié à la dégradation du tissu social même du pays et c'est, je l'espère, ce que nous sommes déterminés à rétablir. J'espère, dans ce débat de ce soir, que le premier ministre--s'il l'écoute--entendra que nous voulons restaurer cette stabilité sociale, la primauté du droit, la sécurité des citoyens, l'éducation et tous ces facteurs. Nous ne devons pas oublier non plus de ramener ces orphelins à leurs parents canadiens dès que possible.
Pourquoi parler de ce qu'on aurait dû faire et de ce qui aurait pu être fait? Personne n'a toujours raison ou toujours tort dans ce genre de dossier. Je suis persuadé que les Américains ont fait des erreurs et qu'Aristide a fait des erreurs, mais je ne crois pas que nous soyons ici ce soir pour régler leur compte.
[Français]
M. Robert Lanctôt (Châteauguay, Lib.): Monsieur le président, vous savez que la situation politique en Haïti fait la une des médias depuis déjà plusieurs semaines. En tant que Canadiens et Québécois, nous avons tous suivi le déroulement avec attention. En tant que parlementaire, j'y ai porté un intérêt d'autant plus grand.
Le gouvernement du Canada est très sensible aux questions qui touchent à cet autre pays francophone des Amériques et ne croit pas que l'on puisse s'isoler de ce qui advient à l'intérieur de ses frontières. Nous participons à plusieurs organisations internationales avec Haïti, dont la Francophonie, l'Organisation des États américains et l'Organisation des Nations Unies.
De plus, une importante population d'origine haïtienne habite au Canada, plus particulièrement à Montréal et dans ses environs. Le gouvernement canadien veut l'appuyer et a un intérêt tout particulier pour ce qui se passe en Haïti. Le Canada, en tant que membre actif de la communauté internationale, est conscient du fait que les problèmes en cours dans ce pays font courir un grand risque à ses citoyens. C'est pourquoi nous avons répondu avec détermination aux demandes d'intervention.
Je crois que tous mes collègues seront d'accord pour dire que le gouvernement canadien ne pouvait pas ignorer ces appels afin de rétablir la paix en Haïti. Je suis très fier des initiatives prises par le gouvernement du Canada en ce sens. Celles-ci visent d'abord à rétablir le calme et l'ordre dans la capitale, Port-au-Prince, et dans tout le pays, par notre participation à la Force multinationale intérimaire des Nations Unies.
L'engagement qu'a pris le Canada dépasse les simples mesures d'urgence, car nous voulons assurer que les conditions sont en place afin de permettre à une véritable culture démocratique d'éclore en Haïti. L'instauration d'une démocratie réelle est un processus de longue durée et nécessitera une présence internationale soutenue.
L'engagement pris par le gouvernement canadien est sérieux et responsable, car nous voulons assurer que le nouveau régime sera stable et que nous n'assisterons pas à une nouvelle succession de coups d'État et de régimes autocratiques en Haïti. Nous travaillerons de concert avec la communauté internationale et la population locale, afin que cette triste page d'histoire politique haïtienne soit véritablement terminée et qu'une nouvelle page écrite avec une prose démocratique s'entame dès aujourd'hui.
Ainsi, le 5 mars dernier, le ministre de la Défense nationale a annoncé que les forces armées canadiennes déploieraient environ 450 militaires en Haïti. Ces soldats participeront activement au sein de la Force multinationale intérimaire des Nations Unies. Le contingent canadien sera appuyé par l'envoi de six hélicoptères afin de mener à bien sa mission.
Les forces armées canadiennes sont déjà très actives partout dans le monde, notamment en Afghanistan, mais le chef d'État-major de la Défense a affirmé que les Forces canadiennes peuvent jouer un rôle important en Haïti, sans compromettre les autres engagements et obligations, au Canada et ailleurs.
Le mandat de la force intérimaire est de rétablir un cadre de vie sécuritaire en Haïti. Elle devra rétablir l'ordre au sein de la société des forces policières et du gouvernement intérimaire. Cette garantie de sûreté pour tous est la pierre angulaire qui permettra d'entamer un processus constitutionnel visant à rétablir un gouvernement démocratique en Haïti.
Si les habitants de ce pays craignent constamment pour leur sécurité, ils ne pourront pas participer en tant que citoyens à créer un nouveau régime politique. Tous et toutes doivent avoir une voix dans ces débats, car les principes d'égalité et d'universalité sont au coeur des valeurs démocratiques.
Les troupes canadiennes serviront, avec leurs homologues de divers pays, pour s'assurer que nul ne soit exclu forcément de ce processus en raison de la peur, de l'intimidation ou de l'insécurité.
Le Canada a également contribué financièrement à rétablir la situation dans ce pays des Antilles. Le 20 février dernier, le Canada a annoncé qu'il consacrerait 5 millions de dollars additionnels à la mission spéciale de l'Organisation des États américains en Haïti. Pas plus tard qu'hier, la ministre de la Coopération internationale a annoncé que le Canada s'engageait à verser 5 millions de dollars supplémentaires pour soutenir les mesures prises par l'Organisation des Nations Unies en faveur de l'aide humanitaire, de la reconstruction et de la transition en Haïti. Ces fonds s'ajoutent au 1,95 million de dollars déjà annoncé pour l'aide humanitaire depuis le début de la récente crise.
Le Canada a répondu à l'appel lancé par la population haïtienne et par la communauté internationale avec vigueur.
Le mandat de la Force multinationale intérimaire des Nations Unies en Haïti est d'une durée d'environ trois mois. Toutefois, le Canada réalise que ce court délai ne permettra pas de mettre en place une démocratie représentative et fonctionnelle dans ce pays secoué par plusieurs années d'instabilité politique, économique et sociale, qui ne s'est qu'intensifiée dans les dernières semaines. Un engagement à long terme est nécessaire. Ici encore, le Canada s'acquitte de ses responsabilités.
Le secrétariat de l'ONU s'est vu accorder un délai d'au moins un mois afin de définir les options pour les forces de remplacement. Celles-ci seront en place au terme du mandat de trois mois entrepris par la force intérimaire.
Le Canada jouera un rôle de leadership dans cette mission de suivi. Nous ne nous contenterons pas de rester timidement en marge pendant que d'autres prendront des décisions. Nous serons des acteurs de premier plan. La capacité du Canada à agir en situation de crise est reconnue internationalement, notamment grâce aux interventions en Afghanistan, dans les Balkans ou en Afrique. Nous apporterons notre expérience et notre efficacité à la table afin d'aider la population haïtienne en ces temps de bouleversement.
Depuis le début de la crise, le Canada s'est montré favorable à l'émergence d'un accord politique qui serait la manifestation d'un vaste consensus au sein des représentants du gouvernement haïtien, des partis politiques d'opposition et de la société civile. Nos actions au cours des mois à venir chercheront à créer et maintenir des conditions nécessaires pour l'articulation et l'implantation d'un tel consensus dans les structures politiques et sociales de ce pays.
Les Canadiennes et Canadiens, les Québécois et les Québécoises seront sur place afin de permettre à une démocratie stable d'éclore en Haïti. Nos soldats ne quitteront pas le pays à la première occasion qui se présente, mais resteront jusqu'à ce que ce mandat soit complété de façon satisfaisante. Le premier ministre a clairement fait savoir que le Canada jouera un rôle important dans la mission de suivi.
Le Canada tient à agir de façon multilatérale en Haïti. Nous travaillerons de pair avec l'Organisation des Nations Unies, l'Organisation des États américains et la Communauté du bassin des Caraïbes, CARICOM, pour aider le peuple haïtien dans la recherche de solutions durables à la récente crise.
Cet esprit de coopération que nous voyons au sein de la communauté internationale en ce temps de grand besoin chez un de nos membres traduit bien notre engagement aux valeurs démocratiques. Le multilatéralisme fonctionne lorsque la participation de chacun est reconnue et utile. C'est ce message d'inclusion que nous espérons qui se développe au sein de la société haïtienne et dans les institutions politiques.
Depuis longtemps, notre pays agit de façon multilatérale en Haïti. Nous avons participé activement, en 1994, à la force multinationale dirigée par les États-Unis et, par la suite, à la Mission des Nations Unies en Haïti. De 1993 à 2001, le Canada a envoyé des agents de police pour aider le peuple haïtien à rétablir chez lui la démocratie, la stabilité et l'État de droit.
Nos activités à l'étranger, en Haïti comme ailleurs, visent toujours à promouvoir un système judiciaire fiable, la pleine reconnaissance des droits humains, le développement économique et l'institution d'une société civile.
Hier, Son Excellence Kofi Annan, secrétaire général des Nations Unies, a livré une importante allocution dans cette Chambre des communes. Il nous a rappelé que: «La communauté internationale devra faire une contribution importante afin de soutenir les institutions démocratiques d'Haïti.» Il a dit que: «Seul un engagement à long terme pour aider le pays permettra d'assurer sa stabilité et sa prospérité. Les efforts timides du passé ont été insuffisants. Nous ne pouvons pas nous permettre d'échouer cette fois-ci.» Le Canada, par les actions récemment annoncées, répond à cet appel.
Les défis que doit affronter la population haïtienne sont énormes. Haïti demeure l'un des pays les plus pauvres des Amériques.
Le gouvernement canadien reconnaît, depuis bien avant la récente crise, que le maintien de la paix et le développement démocratique ne pourront pas se faire sans un développement économique durable et équitable dans ce pays. À ce titre, en 2002-2003, l'aide publique au développement que nous avons consacrée à Haïti totalisait 23,85 millions de dollars. Ce programme d'aide est le plus important offert à un pays des Amériques. Nous avons également contribué pour 3,25 millions de dollars à la mission spéciale de l'Organisation des États américains depuis son lancement en mars 2002, dont 500 000 $ qui ont été offerts à l'Agence intergouvernementale de la Francophonie.
Je réitère mon soutien pour toutes les actions prises par le gouvernement canadien en Haïti en réponse à la récente crise. Ces mesures sont là pour continuer un engagement pris depuis plusieurs années dans ce pays des Antilles afin d'y promouvoir la démocratie et le développement durable. Cet engagement s'est vu renforcer par les évènements des dernières semaines.
Nous sommes présentement dans un temps critique de l'histoire d'Haïti. Les troupes canadiennes aideront, dans l'immédiat, à restaurer l'ordre afin qu'un régime démocratique puisse réellement y être implanté. Notre engagement à long terme, de concert avec nos partenaires sur la scène internationale, sera le gage de succès de ces initiatives.
Je suis fier que le gouvernement du Canada assume ses responsabilités de façon multilatérale, informé de la situation présente et avec le regard tourné vers l'avenir. Ce sera la clé d'un dénouement heureux en Haïti et le Canada pourra dire fièrement qu'il y a contribué de façon marquée et qu'il a agi avec un leadership qui lui va très bien, dans les circonstances.
M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le président, ce qui s'est passé en Haïti est une tragédie. C'est une tragédie pour la démocratie, pour le peuple haïtien et pour le président Aristide. Ce qui s'est passé, c'est un coup d'État, le 33e coup d'État dans l'histoire triste de ce pays, le pays le plus pauvre de cet hémisphère.
En effet, le président élu, Jean-Bertrand Aristide, a quitté le pouvoir. Il y a été forcé par la France et par les États-Unis d'une façon tout à fait antidémocratique, injuste et illégale. Les pays du CARICOM, les pays des Caraïbes ont demandé une enquête indépendante et internationale au sujet de toutes les circonstances relatives à l'enlèvement du président Aristide. Au NPD, nous appuyons fortement cette demande du CARICOM.
[Traduction]
Ce qui s'est produit en Haïti est révoltant. On a foulé aux pieds la démocratie et le droit international. On a fait la sourde oreille aux appels de la CARICOM, de l'OEA et du président Aristide lui-même, qui demandaient de l'aide pour résister aux assauts de ceux qui tentent de renverser le régime depuis qu'Aristide a été élu la première fois, en 1991, à savoir les restants des tontons-macoute, les brutes paramilitaires et les trafiquants de narcotiques, notamment.
Au lieu de répondre à cet appel à l'aide du président démocratiquement élu d'Haïti, M. Aristide, le Canada est resté silencieux pendant qu'il était renversé, et s'est même fait complice de ce renversement.
Qu'il soit clair que la CARICOM et l'OEA ont, quelques jours avant le renversement du président Aristide, présenté à ce dernier et aux rebelles un plan prévoyant le partage du pouvoir. Ce plan a été accepté par le président Aristide, mais rejeté du revers de la main par les rebelles. Ce qui s'est produit est une honte. Les Américains et les Français ont effectivement abandonné le président Aristide.
Nous voulons donc savoir quelle était la position du Canada dans les journées qui ont précédé le renversement du président Aristide. De plus, ce qui est tout aussi important, quelle était la position du Canada avant cela?
Par exemple, à la fin du mois de janvier 2003, la personne qui occupait alors le poste de secrétaire d'État pour l'Amérique latine et l'Afrique a été l'hôte du Sommet de la francophonie à Ottawa. Sont venus des représentants de la France, de l'Union européenne et des États-Unis pour étudier la crise en Haïti, lequel n'a même pas été invité à ce sommet.
Nous avons par la suite appris, grâce à des fuites orchestrées par le ministre, qu'on avait alors envisagé un changement de régime, le renversement du président Aristide, un an avant qu'il se soit produit.
Je demande aujourd'hui que soit déposé au Comité des affaires étrangères le compte rendu de ce sommet pour que les Canadiens sachent exactement quel rôle leur gouvernement a joué au sommet et dans quelle mesure nous avons en fait participé, avec les États-Unis et la France, à la préparation du renversement du président Aristide.
Qu'il soit clair aussi que l'opposition au président démocratiquement élu d'Haïti était largement financée par les États-Unis, ainsi que l'ont très clairement fait valoir un certain nombre de membres du Congrès américain et des groupes de protection des droits de la personne comme MADRE.
Ce qui a peut-être eu le plus de poids sur le plan de la grande pauvreté du peuple haïtien est le fait que, depuis 2002, la CARICOM demande aux États-Unis de lever l'embargo sur l'aide économique et les prêts approuvés auparavant. En fait, les ministres des Affaires étrangères de la CARICOM ont indiqué très clairement que ce serait la catastrophe pour Haïti si l'embargo n'était pas levé. En 2002, ils ont déclaré que les mesures prises à l'époque par le président Aristide étaient un pas dans la bonne direction et que le déblocage de fonds pourrait aider. Ils ont affirmé que la situation pourrait se détériorer dans le cas contraire. Les États-Unis ont refusé. Ils ont maintenu cet embargo économique dévastateur qui a eu un tel impact destructeur sur la pauvreté du peuple haïtien, sur les plus pauvres d'entre tous, tout comme, bien sûr, ils ont maintenu un embargo illégal, un embargo inhumain à l'endroit du peuple cubain.
C'est un point très important en tout cas, parce que le Canada a déclaré qu'il appuyait une résolution politique conforme au plan d'action de la CARICOM et de l'OEA. Cependant, appuyons-nous maintenant la demande d'enquête internationale indépendante sur les circonstances qui ont conduit à la destitution du président Aristide, demande présentée par la CARICOM? Quelle est la position du Canada à ce sujet? J'ai posé la question à un ancien ministre libéral, le député d'Edmonton. Il a dit qu'il appuyait la demande. Le secrétaire parlementaire du premier ministre chargé des relations Canada-États-Unis a dit qu'il n'appuyait pas cette demande.
Quelle est la position du gouvernement libéral au sujet de la demande d'enquête internationale indépendante sur les circonstances qui ont conduit à la destitution du président Aristide?
[Français]
J'espère que le Bloc québécois appuie la demande pour une enquête internationale dans toutes les circonstances de l'enlèvement illégal à Haïti du président Aristide. Je n'ai pas encore entendu la position du Bloc sur cette question très importante.
Toutefois, ce qui est très clair, c'est que le président Aristide insiste pour dire qu'il n'a pas démissionné volontairement. Le président Aristide a été forcé de quitter le pouvoir par la France et les États-Unis.
[Traduction]
En tant que néo-démocrates, nous condamnons aussi la position américaine sur le rapatriement des réfugiés, qui viole clairement la convention relative au statut des réfugiés de 1952. Ce qui est arrivé en Haïti est une tragédie. C'est aussi illégal, et nous savons que les États-Unis ont déjà participé à des événements semblables au Venezuela.
[Français]
En conclusion, le NPD demande le remplacement des forces américaines par l'envoi d'une mission de maintien de la paix sous l'égide des Nations Unies; aussitôt que cela sera réalisable, l'envoi d'une force internationale qui aurait pour mandat de désarmer la guérilla et de trouver et détruire les nombreuses caches d'armes; une solution à long terme, viable sur les plans politique et économique aux problèmes d'Haïti, y compris réparations. L'auteur Noam Chomsky a écrit éloquemment quant à cette question de réparations et de leur importance, surtout par la France.
Nous demandons aussi l'appui et la participation du Canada à des élections transparentes et honnêtes en Haïti; un retour de la démocratie pleine et entière en Haïti qui serait suivi immédiatement par le déblocage d'une somme de 650 millions de dollars en aide économique et médicale, qui devrait être remise au gouvernement haïtien et que les États-Unis continuent de bloquer; une aide canadienne et internationale à long terme sur le plan financier, au titre de la formation d'une force policière professionnelle en Haïti, et comme je l'ai dit plus tôt, une enquête internationale sur les circonstances entourant la démission forcée de M. Aristide.
Ce coup d'État doit être condamné par les Canadiens, par le gouvernement canadien, et nous voulons savoir exactement quel a été le rôle du gouvernement canadien dans ce coup d'État illégal.
[Traduction]
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Monsieur le président, je suis heureux d'avoir l'occasion de participer à ce débat très important ce soir.
Comme le ministre de la Défense nationale l'a souligné, cette question revêt une importance cruciale pour Haïti et pour la communauté internationale. C'est une question que nous ne pouvons pas nous permettre d'ignorer ou de rejeter et ce n'est pas là l'intention de notre gouvernement. Nous prenons les mesures qui s'imposent.
[Français]
Durant les 50 dernières années, les Forces canadiennes ont participé à un grand nombre et à une grande variété d'opérations de maintien de la paix. Leur expérience, leur habileté et leur professionnalisme sont inégalés et reconnus partout dans le monde.
[Traduction]
Dans le discours qu'il a prononcé au Parlement hier, le Secrétaire général des Nations Unies Kofi Annan a félicité le Canada de l'appui constant qu'il offre aux Nations Unies et de sa participation aux opérations de maintien de la paix des Nations Unies. Il n'est pas étonnant de voir que la communauté internationale s'attend à ce que le Canada participe à la force multinationale intérimaire dirigée par les Nations Unies pour aider à ramener la paix et la stabilité en Haïti.
Le Canada a toujours maintenu des liens très serrés avec Haïti et cela se poursuit aujourd'hui. Nous avons donc un grand sens des responsabilités qui nous pousse à faire notre part pour venir en aide à ce pays. De plus, nous avons l'expérience dont nous avons besoin pour pouvoir apporter une contribution positive. Les faits parlent d'eux-mêmes. Les Forces canadiennes ont participé à des missions militaires partout au monde, des missions qui les ont menées à remplir toutes sortes de fonctions, de l'observation et du maintien de la paix à des opérations actives plus robustes. Au cours des dernières années, les Forces canadiennes ont été envoyées dans plusieurs points chauds des Balkans, du Rwanda, de la République centrafricaine, de l'Angola et du Timor-Oriental, pour ne nommer que ceux-là.
Plus récemment encore, des membres des Forces canadiennes ont été envoyés en Afghanistan et dans la région du golfe Persique pour lutter contre le terrorisme aux côtés de nos alliés. Aujourd'hui à Kaboul, c'est un Canadien, le lieutenant-général Rick Hillier, qui est responsable de la Force internationale d'assistance à la sécurité, mieux connue sous le sigle FIAS, dirigée par les Nations Unies. Il est à la tête de troupes comptant 6 000 membres.
C'est un poste de haut niveau qui lui confère d'énormes responsabilités. La nomination du général Hillier à ce poste témoigne de l'immense respect que les hommes et les femmes des Forces canadiennes ont gagné au sein de la communauté internationale, un respect qu'ils méritent entièrement.
Ce n'est là qu'un bref résumé de certaines des expériences que les Forces canadiennes apportent à cette mission, mais ce qui importe encore davantage dans le cadre du présent débat, c'est que nous devons nous pencher sur leur expérience en Haïti.
Depuis le début des années 90, le Canada a participé aux efforts visant à établir et à rétablir la démocratie en Haïti. Nous avons en effet participé à plusieurs missions de l'ONU dans ce pays.
Ainsi, nous avons fait partie du premier groupe d'observateurs des Nations Unies qui ont surveillé les élections en Haïti, en 1990-1991. De 1993 à 1994, nous avons envoyé un contingent naval pour mettre en application l'embargo contre Haïti. Quelque 500 militaires ont participé à la mission des Nations Unies en Haïti de 1993 à 1996, contribuant à maintenir un climat sûr et stable. Entre 1996 et 1997, nous avons envoyé environ 750 membres des Forces canadiennes pour qu'ils participent à la mission d'appui des Nations Unies en Haïti. En 1997, nous avons envoyé un contingent militaire d'environ 650 personnes pour participer à la mission de transition des Nations Unies en Haïti. Cela a été notre dernier déploiement militaire en Haïti, mais le ministère de la Défense nationale a aussi aidé à la mission des Nations Unies concernant la police civile en Haïti, de 1997 à 2000.
Je pense que le Canada a montré son engagement envers Haïti, et nous le faisons encore aujourd'hui. Comme l'a souligné notre premier ministre, nous voulons aider à la reconstruction d'Haïti. Il a dit clairement que la communauté internationale ne peut se permettre de faire l'erreur de se retirer prématurément de ce pays en crise.
[Français]
Hier, le secrétaire général des Nations Unies a également déclaré que l'ensemble de la communauté internationale se devait de contribuer à aider ce pays en difficulté. Il soulignait que seule une assistance sérieuse et à long terme permettrait d'assurer la stabilité et la prospérité future d'Haïti.
Le déploiement par le Canada d'environ 450 soldats pour une durée de 90 jours vient à point et fait partie de la stratégie globale du gouvernement pour trouver une solution durable au problème d'Haïti et pour y réétablir la paix et la sécurité.
[Traduction]
Comme l'a dit hier Kofi Annan, «Les efforts que nous avons déployés jusqu’ici sans trop de conviction n’ont pas suffi. À présent, nous n’avons plus droit à l’échec.» J'appuie sincèrement cette déclaration. Je sais que les Canadiens pensent aussi que nous devons sérieusement prendre nos responsabilités afin d'aider à la recherche d'une solution durable et pacifique en Haïti.
Le gouvernement reconnaît qu'une paix durable ne dépend pas seulement de l'envoi de militaires. Elle dépend d'un mélange de diplomatie, de développement et de défense, les trois D qui sont indispensables à la reconstruction à long terme d'Haïti et de nombreux autres pays en crise. Nous prenons maintenant des mesures sur ces trois plans et nous nous sommes engagés à continuer de le faire. Les Forces canadiennes joueront un rôle capital par rapport à l'approche fondée sur les trois D.
Je me joins au ministre de la Défense nationale pour exprimer ma confiance dans la capacité des Forces canadiennes de s'acquitter de cette importante mission. Je sais que ses membres seront encore une fois à la hauteur de leur réputation bien méritée, celle de militaires parmi les plus compétents, professionnels et dévoués du monde entier. Ils aideront à rétablir la stabilité. Ils aideront à acheminer l'aide humanitaire. Ils soutiendront les efforts déployés par la police locale et, ce faisant, ils assureront un avenir meilleur à la population haïtienne.
M. Leon Benoit (Lakeland, PCC): Monsieur le président, j'interviens aujourd'hui, malheureusement, pour parler d'une situation qui est moins que désirable, à savoir un autre violent coup d'État en Haïti. Il y en a eu plus d'une trentaine qui se sont produits depuis 200 ans qu'existe ce pays. C'est difficile à imaginer. Nous les Canadiens n'avons jamais vécu ce genre de situation. Nous devrions en être très reconnaissants.
Et une fois de plus le Canada envoie des troupes à l'étranger. Cette fois-ci, nous envoyons 450 soldats en Haïti. Les Canadiens pensent que c'est important. Les Canadiens veulent que le Canada soit un pays qui puisse intervenir dans des situations telles que le renversement d'un régime démocratique comme celui d'Aristide en Haïti. Il est important aux yeux des Canadiens que nous ayons la capacité de venir en aide dans de telles situations.
Malheureusement, notre capacité de le faire diminue sans cesse. En fait, cet engagement sent l'improvisation. Nous n'avons plus de politique étrangère cohérente. Notre dernier livre blanc sur la politique étrangère est vieux de 10 ans. Il y a un manque de leadership de la part du premier ministre et du gouvernement. Il est inimaginable que le gouvernement n'ait pas de plan en place pour faire face à des situations comme que celle-ci.
C'est comme ça que, une fois de plus, un engagement a été pris du jour au lendemain, sans consultations appropriées. Et cela, deux mois seulement après que le chef de l'armée ait dit que nous ne pouvions tout simplement plus envoyer de troupes à l'étranger. Le chef des forces armées a dit que nous ne pouvions pas nous permettre un nouveau déploiement en Afghanistan, que nous mènerons à bien les engagements pris jusqu'à maintenant, mais que nous ne pouvions pas maintenir au même niveau les effectifs qui sont actuellement en Afghanistan. Il a dit que nous ne pouvions tout simplement pas accepter d'autres missions. Oui, les forces armées doivent faire ce qu'on leur dit. Le gouvernement les a portés volontaires pour une nouvelle mission, qu'elles en aient les moyens ou non.
Qui en paie le prix? Les hommes et les femmes qui servent dans les Forces canadiennes. Ce n'est pas une manière de diriger un pays. Un bateau sans capitaine et sans équipage est l'image qu'on se fait du gouvernement pour ce qui est de sa politique étrangère, de nos forces armées et, en fait, de presque tout. Le gouvernement est trop occupé à répondre aux questions sur les scandales dans lesquels il est impliqué. Nous en découvrons un nouveau presque chaque jour.
Quel sera le rôle du Canada lorsqu'une nouvelle situation surviendra? Nous nous sommes engagés à envoyer 450 militaires en Haïti. À quoi le Canada s'engagera-t-il la prochaine fois? Nous savons qu'une autre situation l'exigera. Nous vivons dans un monde plus instable que jamais auparavant.
Lorsque nous posons cette question au gouvernement, nous n'obtenons pas de réponse. Et cela, parce que le gouvernement n'a pas de politique étrangère. Cela est tout à fait inacceptable. Les Canadiens s'attendent à mieux.
Les militaires canadiens en font à nouveau les frais. Dans le passé, nous avons engagé un contingent très nombreux dans le golfe Persique et pour la guerre en Irak. Même chose en Afghanistan. Certaines de nos troupes se trouvent encore dans les Balkans. Nous sommes présents à de nombreux autres endroits dans le monde. Je crois que nous assumons quelque 21 engagements dans le monde.
Nos troupes sont suremployées. On leur demande à répétition d'intervenir dans des situations de ce genre sans l'équipement adéquat. Cela n'est tout simplement pas acceptable. Le gouvernement devrait admettre que cela est inacceptable.
Cela me dérange d'entendre des députés, comme cela a été le cas ce soir, dire que le Canada doit faire quelque chose. Ils affirment que le Canada doit apporter une assistance. Nous devons affronter une situation dans laquelle un gouvernement démocratique a été renversé. Néanmoins, ces mêmes députés affirment que nous ne devons pas investir dans nos militaires. J'aimerais savoir comment le Canada peut apporter de l'aide dans de telles situations si nos militaires ne disposent pas des ressources nécessaires.
Les libéraux ont réduit de plus de 30 p. 100 les fonds consacrés à nos forces armées au cours des dix années durant lesquelles ils ont été au pouvoir. Le premier ministre actuel était ministre des Finances pendant la période où le budget militaire a été réduit de 30 p. 100. Nous demandons à nos militaires de faire davantage que nous ne leur avons demandé de le faire depuis avant la Seconde Guerre mondiale. Nous leur demandons de faire davantage avec moins de moyens. Nous leur demandons de faire davantage avec moins d'argent. Nous leur demandons de faire davantage avec moins de soldats.
Nous avions 80 000 militaires lorsque le gouvernement actuel est entré en fonctions en 1993, mais ils ne sont aujourd'hui que 55 000. C'est une situation inacceptable. Les forces armées ont acheté du nouveau matériel, mais, de façon générale, il est en moins bon état qu'il ne l'était lors de l'arrivée du gouvernement. À quoi faut-il s'attendre quand on sait que le budget de la défense a été réduit de 30 p. 100? C'est tout simplement inacceptable. Or, nos forces armées font face à des exigences sans cesse croissantes. elles ont atteint un point de rupture qui risque de les plonger dans une crise.
Nos forces armées constituent une formidable ressource. Elles comptent des hommes et des femmes bien entraînés, qui sont tout aussi compétents que les forces armées d'autres pays, mais elles sont près du point de rupture. Elles ne peuvent tout simplement pas continuer de remplir mission sur mission comme le leur demande le gouvernement.
Si le gouvernement s'engageait à injecter les fonds nécessaires pour reconstituer et équiper les forces armées, à rétablir leurs effectifs à 80 000 et à se doter d'une politique étrangère, nous serions en mesure d'intervenir de façon très efficace dans des situations comme celle-ci. Nous pourrions contribuer à rétablir la démocratie. Nous pourrions prendre des engagements sur de longues périodes envers des pays comme Haïti et, peut-être, aider à trouver une solution à long terme au problème, de façon à éviter les coups d'État à répétition. Mais étant donné les ressources dont elles disposent, nous ne pouvons tout simplement pas continuer de faire ce que nous faisons.
L'utilité du Canada, lorsque des situations semblables se produisent un peu partout dans le monde, a été considérablement réduite, et notre réputation ternie.
M. Kofi Annan déclarait hier à la Chambre des communes que le Canada joue un rôle important. Il devait certainement parler du Canada d'il y a dix ans. Très franchement, le Canada n'a pas, à l'heure actuelle, les moyens de tenir les engagements qu'il devrait pouvoir tenir dans des situations comme celle dont nous sommes actuellement témoins en Haïti. C'est une véritable honte. Les Canadiens en sont mécontents. Le gouvernement doit le comprendre et s'engager à reconstituer nos forces armées, qui jouent un rôle clé dans notre politique étrangère.
Nous ne pouvons pas intervenir pour rétablir les démocraties renversées si nous ne pouvons pas compter sur des forces armées aptes au combat, capables de stabiliser la situation et d'en préserver la stabilité, en vue d'assurer le rétablissement de régimes démocratiques. C'est d'une telle importance, mais il nous reste si peu de ressources pour le faire. Et le fait que nous n'ayons pas de politique étrangère rend les choses encore plus difficiles.
Je pense que les Canadiens désapprouvent généralement le fait que le budget des forces armées ait subi une coupe sombre de 30 p. 100, que les effectifs des forces armées aient été réduits de 80 000 à 55 000 et que nos troupes soient envoyées à l'étranger sans avoir de matériel adéquat.
Et pourtant, dans tout cela, que constatons-nous? Nous voyons un gouvernement qui dépense 100 millions de dollars sur des avions Challenger afin que le premier ministre et les membres de son Cabinet puissent voyager dans le luxe, alors que nos forces armées sont privées des ressources dont elles ont besoin pour réagir à des situations comme celle d'Haïti.
Un nouveau scandale a été mis au jour aujourd'hui: 90 millions de dollars en dépenses militaires ont disparu. Ce nouveau scandale de corruption a arraché 90 millions de dollars à des forces armées qui cherchent désespérément les ressources dont elles ont besoin pour réagir à une situation comme celle en Haïti. Voici le plus récent des scandales quotidiens auxquels le gouvernement est maintenant confronté. Cela ne se fait pas.
Les contribuables canadiens sont fâchés devant le manque de responsabilité dans la dépense de leur argent. Ils sont fâchés devant la corruption totale dans laquelle le gouvernement est mêlé en permanence, et il l'est depuis plus de dix ans. Une partie sans cesse croissante de cette corruption fait surface, mais, franchement, cela ne nous aide pas à agir dans des situations où nous devrions prodiguer notre aide, comme la situation en Haïti.
Ce qu'il nous faut, c'est un nouveau gouvernement dans notre pays. Il nous faut un nouveau gouvernement qui prendra les engagements nécessaires envers les forces armées canadiennes, qui mettra en place une politique étrangère de manière à ce que nous sachions à l'avance ce que nous ferons face à la prochaine situation comme celle en Haïti, car il y aura d'autres situations comme celle-là.
L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le président, le député pourrait-il nous dire ce qu'il sait d'un document intitulé «Le volet nordique de la politique étrangère du Canada»?
M. Leon Benoit: Monsieur le président, il y a dix ans que le Canada a publié un livre blanc sur les affaires étrangères. C'est trop long. Le dernier document est dépassé. L'armée est loin d'être dans la position qui était la sienne en 1994, à l'époque du dernier énoncé sur les affaires étrangères.
Je ne veux pas parler de rafistolage, comme le document dont le député vient de parler, mais d'un tout nouveau livre blanc sur les affaires étrangères. En d'autres termes, un livre blanc doit dire ce que le Canada ferait dans telle ou telle situation. Le gouvernement doit prévoir les ressources nécessaires, surtout pour l'armée, parfois les forces policières, et notre service extérieur, etc.
Notre politique étrangère est totalement dépassée, et elle n'a rien de neuf à offrir sinon quelques documents de rafistolage comme celui auquel le député a fait allusion.
L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le président, j'ai écouté avec intérêt les observations du député. J'ai écouté plus tôt un de ses collègues parler du changement de régime en Haïti et déplorer le fait que le Canada n'ait pas participé au changement de régime la dernière fois.
J'ai trouvé intéressants les propos vibrants du député qui a expliqué ce que son parti ferait s'il pouvait compter sur davantage de membres de nos forces armées. Quelle est la théorie de son parti à ce sujet? Allons-nous nous mêler d'un changement de régime de notre propre chef? Allons-nous décider de faire cela nous-mêmes? Le député pourrait-il nous éclairer là-dessus? Quelle est la position de son parti? Croit-il que nous avons besoin des Nations Unies pour conférer une légitimité à ce que nous faisons, ou pense-t-il simplement que le Canada et d'autres pays peuvent envoyer des militaires là-bas et utiliser ceux-ci comme bon leur semble, n'importe quand?
Étant donné que le député semble impatient d'avoir des forces armées adéquates et qu'il semble penser que le gouvernement n'a pas de politique en matière d'affaires étrangères, ce contre quoi je m'inscris en faux, en quoi la politique du parti d'en face est-elle cohérente par rapport à ces questions?
M. Leon Benoit: Monsieur le président, je suis consterné de voir que le ministre des Affaires étrangères puisse dire que nous n'avons pas besoin d'une force solide pour nous aider à conduire notre politique étrangère. C'est une position absurde de la part d'un ministre des Affaires étrangères. Honnêtement, je suis déçu de cela parce que toute politique étrangère doit comporter un volet prévoyant une contribution à la stabilisation de situations comme celle qui ont cours en Haïti et en Afghanistan. Je crois que le ministre était le ministre des Affaires étrangères lorsque nos militaires ont été déployés en Afghanistan. Qu'il puisse être d'avis que les forces n'ont pas un rôle important à jouer dans la conduite de notre politique étrangère me déçoit au plus haut point.
Par ailleurs, nous avons notre propre énoncé de politique étrangère parce que nous avons des idées sur ce que nous devrions faire. Nous avons un plan. Le chef de l'ancienne Alliance canadienne, maintenant membre du nouveau Parti conservateur, moi-même en tant que porte-parole de mon parti pour les questions relatives à la défense, ainsi que mon parti avons préparé un document important sur les Forces canadiennes et ce qu'elles devraient être. Les militaires devraient certainement pouvoir jouer un rôle important en Haïti. Ils devraient certainement pouvoir respecter nos engagements comme le font nos militaires en Afghanistan. Ils devraient certainement pouvoir respecter les engagements pris dans la guerre contre l'Irak dans le golfe Persique. Ils devraient certainement continuer de respecter nos engagements dans les Balkans et ailleurs, dans d'autres situations semblables.
Il est absurde de penser que nous ne pourrions plus rien faire de tout cela et que nous pourrions avoir une pertinence quelconque si nous n'avions pas de forces pour contribuer à stabiliser la situation de manière à ce qu'un régime démocratique puisse être mis en place. Selon moi, le changement de régime est très important. Lorsqu'un gouvernement démocratique est renversé, il est essentiel de le remplacer soit par le même gouvernement démocratique, soit par un autre gouvernement démocratique, afin de stabiliser à tout le moins la situation. C'est le type de changement de régime qui est productif et le type de changement de régime que le ministre des Affaires étrangères appuierait sans nul doute.
L'hon. Larry Bagnell: Monsieur le président, je crois que c'était en quelque sorte une insulte à l'endroit du Secrétaire général des Nations Unies de dire qu'il n'a pas parlé du Canada aujourd'hui et d'affirmer qu'il est factuellement erroné de sa part de prétendre que nous ne possédons pas les ressources nécessaires en matière de défense pour faire quoi que ce soit.
Le général Leslie qui était dans la tribune l'autre jour a reçu des applaudissements chaleureux et bien nourris. On ne peut pas dire que c'était pour n'avoir rien fait. Ces applaudissements visaient à saluer la contribution remarquable du Canada en Afghanistan. Je suis allé là-bas. Nous y avons environ 2 000 soldats alors que bien d'autres pays n'ont que 10, 20 ou 30 soldats dans cette région particulière. Nous jouons un rôle de premier plan en matière de maintien de la paix. Le général a déclaré que nous sauvons des milliers de vies. Or, j'estime qu'on ne peut considérer que le fait de sauver des milliers de vie équivaut à ne rien faire.
J'aimerais que le député explique sa politique. Nous avons un budget presque équilibré. Nous ne disposons que de peu de fonds non affectés. Le Canada est encore aux prises avec énormément de pauvreté chez les enfants. Certaines régions du Canada sont plus démunies que d'autres et ont besoin d'aide financière. Nous créons de nouveaux programmes pour les personnes handicapées. Chez les populations autochtones, le niveau de vie est inférieur à celui des autres Canadiens et on compte davantage de décès à la naissance.
Dans quels programmes le député puiserait-il les fonds pour financer ces augmentations considérables au chapitre de la défense? Le député n'a pas expliqué au ministre des Affaires étrangères à quoi il appliquerait ces augmentations dans les niveaux de défense.
M. Leon Benoit: Monsieur le président, comme tous mes collègues, je suis fier de ce que peuvent accomplir les militaires canadiens. Et ils le font parce que ce sont des hommes et des femmes de compassion. Souvent, ils accomplissent beaucoup avec si peu. Nous devrions être fiers du général Hillier qui dirige nos troupes en Afghanistan. Il s'agit de quelqu'un de très bien qui a reçu une bonne formation. Malgré le manque de financement de la part du gouvernement et en dépit de l'équipement désuet que les troupes sont obligées d'utiliser, les militaires accomplissent du bon travail parce que ce sont des gens bien et qu'ils ont été bien formés. Je suis fier d'eux.
J'en veux au gouvernement. Le député a demandé d'où viendra l'argent. Que dire des 100 millions de dollars qui ont servi à acheter des nouveaux jets de luxe à des ministres? Que dire des 90 millions de dollars, qui comme nous l'avons appris aujourd'hui, ont été perdus dans les marchés passés par le ministère de la Défense nationale? Que dire du programme de commandites dans le cadre duquel, au moins 100 millions de dollars, à ce qu'on sache, ont été versés aux amis des libéraux.
C'est là qu'il faut aller puiser l'argent. On cesse de verser de l'argent aux amis des libéraux. Nous avons vu accumuler les scandales mettant en cause le gouvernement.
[Français]
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Monsieur le président, j'ai le plaisir d'intervenir dans ce débat exploratoire, en soulignant, évidemment, que c'est toujours une bonne idée que les parlementaires soient associés aux questions d'intervention extérieure, aux ratifications des traités et aux choses de cette nature pour lesquelles, évidemment, le Bloc a toujours souhaité que ce ne soit pas seulement la prérogative de l'exécutif, mais que le pouvoir législatif et parlementaire puissent donc y être associés.
Comme l'ensemble de nos concitoyens, et comme l'a rappelé ma collègue, la députée de Mercier, de même que mon collègue de Saint-Jean, nous avons tous été extrêmement peinés, consternés et inquiets à la vue des scènes d'horreur qui ont fait la trame de notre quotidien depuis au moins les trois derniers mois.
J'ai suivi avec intérêt la situation en Haïti, parce que je partage ma vie avec une personne qui est elle-même haïtienne et qui a de la parenté dans une petite ville—pas si petite que cela quand on la compare à d'autres—, soit la ville des Cayes.
Je n'oublie certainement pas que la population haïtienne, comme la population québécoise et la population canadienne, rêve, aspire et demande aux dirigeants haïtiens et à l'ensemble de la communauté internationale de travailler pour que des conditions de paix, de prospérité et certainement de développement puissent être mises en oeuvre en Haïti.
C'est certainement un moment privilégié pour parler de cette question, puisque nous avons tous écouté avec grand intérêt le discours de Son Excellence, le secrétaire général des Nations Unies, M. Kofi Annan. Pour la première fois de l'histoire des Nations Unies, c'est un homme qui a accédé aux plus hautes fonctions des Nations Unies en étant lui-même issu à l'interne de la vie des Nations Unies, puisqu'il a longtemps été à Genève à l'Organisation mondial de la santé.
Tout en suivant cette histoire d'horreur qu'a constitué le fil quotidien des Haïtiens au cours des derniers mois, j'ai été, comme plusieurs Québécois et plusieurs Canadiens, un peu déçu de la position canadienne. Je sais que les valeurs de paix font partie de nos valeurs comme Canadiens et comme Québécois. Je sais aussi qu'en 1945, alors qu'à San Francisco se réunissaient 49 délégations, il y avait au sein de la délégation canadienne, bien sûr, le premier ministre William Lyon Mackenzie King, mais il y avait aussi deux futurs premiers ministres.
La ministre du Patrimoine va se rappeler—non pas pour avoir été présente en raison de sa jeunesse, mais pour connaître l'histoire—, que Louis St-Laurent était membre de la délégation. Il y avait William Lyon Mackenzie King et également M. Pearson, deux premiers ministres qui allaient jouer un rôle extrêmement important dans cette idée des Casques bleus.
Le discours de Kofi Annan devant les parlementaires nous rappelait bien combien on fonde de l'espoir sur le Québec et le Canada dans cet objectif de maintien de la paix. L'histoire d'Haïti se confond malheureusement avec une période trop longue de dictature, puisque, vous le savez, de 1971 à 1990, c'est une dictature qui s'est abattue sur le peuple haïtien.
En 1991, pour la première fois, le président Aristide a été élu. Il a été renversé. Il est revenu en fonction en 1994-1995. Néanmoins, tout cela nous donne à penser et doit nous faire réfléchir, à savoir combien la démocratie est fragile dans certaines parties du monde, non pas qu'elle ne soit pas désirée par le peuple haïtien. C'est une nuance importante qu'il faut faire.
La question qu'on peut se poser et ce sur quoi on peut réfléchir, c'est que le président Aristide a quitté le 29 février. Une semaine après, on ne connaissait toujours pas l'ampleur de la participation du gouvernement canadien aux forces de maintien de la paix.
Vous savez qu'on dit du Conseil de sécurité qu'il est un peu l'organe exécutif des Nations Unies. J'espère qu'il y aura d'ailleurs un débat exploratoire—et je suis sûr que ma collègue de Mercier l'appelle de tous ses voeux—sur la réforme des Nations Unies.
On a beaucoup à dire. On doit réfléchir. Nous croyons aux Nations Unies mais a une réforme est nécessaire.
Je suis moi-même étudiant à l'Université d'Ottawa à temps partiel où je suis présentement un cours en droit public international; la moitié du cours porte sur le droit public international et le rôle de l'ONU. Je peux vous dire que c'est extrêmement important que, comme parlementaires, nous puissions réfléchir à ces questions.
J'inviterai ultérieurement le ministre des Affaires étrangères, qui est avec nous, à nous expliquer un peu comment il se fait qu'il se soit écoulé une semaine entre le départ du président Aristide et la détermination de l'ampleur de la participation canadienne à cette première force intérimaire. Cela a été adopté dans la nuit de samedi à dimanche par le Conseil de sécurité. Il y a 450 Canadiens maintenant impliqués dans cette force ainsi qu'un support logistique de six hélicoptères. Je comprends bien que cette force multinationale intérimaire, conformément au Chapitre VII de la Charte de l'ONU, sera suivie d'une force de stabilisation qui devrait, nous l'espérons, mener à des assises solides de maintien de la paix.
Je pense qu'il faut aussi se rappeler que l'aide publique au développement pour laquelle le Bloc québécois a évidemment posé beaucoup de questions, n'est certainement pas à la hauteur de nos capacités, de nos aspirations, de notre générosité, ni des besoins. On me corrigera si je me trompe, mais les chiffres que j'ai lus donnent à penser qu'il y a eu une certaine régression du rôle du Canada. On donne moins en 2004 que ce que l'on donnait il y a 10 ans. S'agissant de Haïti en particulier, j'ai lu qu'en 2002-2003, c'est 28,85 millions de dollars qui ont été acheminés vers Haïti. Bien sûr, c'est une contribution réelle, mais est-ce que ce n'est pas notre devoir, comme parlementaires, de faire davantage?
Je lisais une lettre qui a été acheminée par un organisme qui est dans Hochelaga—Maisonneuve, le comté que je représente ici aux Communes. C'est l'organisme Développement et Paix qui a été fondé par la Conférence des évêques en 1967. Il est situé à côté de l'école Marguerite-De Lajemmerais. Cet organisme faisait parvenir une lettre à notre premier ministre, au ministre responsable de la Francophonie et au ministre des Affaires étrangères qui a certainement pu prendre connaissance de cette missive.
Cette lettre est importante car elle nous rappelle que le premier devoir de cette force intérimaire, présentement en Haïti, est celle du désarmement. Il n'y a pas de paix possible, on ne peut pas forger de plans pour l'avenir si les différentes factions en présence ne désarment pas. On connaît évidemment l'expertise de l'organisme Développement et Paix, fondé depuis 1967, qui est présent dans une quarantaine de pays.
Cet organisme-là nous parlait de tous les groupes en présence. On parle bien sûr des «chimères», les anciennes milices qui ont été malheureusement fidèles au président déchu, on parle des «chimères» dissidents, qui sont regroupés au sein d'une armée qu'on appelait l'armée cannibale, qui était surtout localisée dans la région des Gonaïves, et bien sûr les factions liées à Guy Philippe et à Louis-Jodel Champlain.
Je crois qu'il faut qu'il soit très clair que le mandat confié à la force intérimaire, comme le mandat qui sera confié une fois les trois mois expirés à la force de stabilisation de la paix, doivent bien sûr être centrés sur le désarmement. C'est le premier objectif à rencontrer. Après le désarmement, il y aura bien sûr toute la question de la reconstruction en lien avec la société civile. Il y aura aussi toute la question de l'éducation, de la nourriture, de l'approvisionnement, de la salubrité. Ces questions feront partie des différents objectifs pour ceux qui veulent s'investir dans l'aide au développement international, l'aide publique au développement. Voilà des missions qui seront très importantes pour tous ceux qui croient en l'avenir pour Haïti.
Je crois qu'il faut, comme Québécois et comme Canadiens, dire clairement que ce n'est pas la fin de notre implication, c'est le début. Ce n'est pas la fin sur le plan financier, puisqu'il faudra faire plus, et ce n'est pas la fin sur le plan logistique non plus.
J'ai vu que, dans la deuxième phase de l'opération envisagée, il y aura 5 000 Casques bleus. Je vois que le Brésil demande le leadership dans le commandement. Sauf erreur, on ne sait pas trop quelle sera l'implication du gouvernement canadien pour cette deuxième phase.
Mon temps est écoulé. Monsieur le président, vous avez été tellement discret que j'ai pensé que votre générosité serait aussi discrète. On procédera donc aux questions.
L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le président, j'espère que vous allez me permettre de répondre à une question que le député m'a posée pendant son discours. Il m'a demandé comment on peut expliquer le...
Le président: La question doit venir du côté du ministre, et la réponse, de l'autre. S'il y a une question, vous pourrez répondre et poser une autre question. On se comprend très bien. Le ministre a la parole.
L'hon. Bill Graham: Monsieur le président, j'ai bien compris le jeu. Comme le député de l'opposition m'a posé une question, je vais lui reposer une question en lui demandant une réponse à la question qu'il m'a posée, et comme cela, tout le monde sera bien content. On peut procéder de cette façon.
La question est très importante. Il m'a demandé pourquoi il a fallu une semaine pour connaître l'ampleur de la contribution du Canada à la force autorisée par l'ONU. Je lui suggère, et je demande la réponse du député à cela, que c'était tout à fait raisonnable.
De premier plan, le Canada a envoyé des troupes pour sauver des vies. On a fait une contribution humanitaire. Les forces armées étaient là pour sortir les Canadiens et les autres étrangers de l'île et sauver des vies.
Subséquemment, il a fallu une intervention internationale et multilatérale. Pour cela, il a fallu de la planification. Le Canada joue son rôle. J'espère que le député sera d'accord avec moi pour dire que nous jouons un rôle important dans cela, un rôle qui est approprié de notre part et qui est proportionnel aux demandes qui nous sont formulées par nos collègues, puisque c'est une force multilatérale à laquelle participent des Américains, des Français et nous-mêmes, principalement, ainsi que d'autres.
J'espère que le député de Hochelaga—Maisonneuve est d'accord avec moi pour dire que ce qui est important dans cette affaire, c'est que le Canada agit dans une force multilatérale, et non pas de manière unilatérale. Pour moi, au moins, cela explique la raison pour laquelle il a fallu planifier cette force de façon à bien reconnaître la situation politique et les forces en question.
M. Réal Ménard: Monsieur le président, je suis d'accord avec le ministre pour dire que l'intervention efficace à laquelle il fallait songer dans ce conflit devait être multilatérale. Personne ne pense que le Canada devait s'engager là-dedans sur une base isolée.
Je lui soumets respectueusement qu'on aurait été en droit de s'attendre à un peu plus de célérité de la part du ministre, d'autant plus que, sous d'autres tribunes, il aurait dit sur un ton assez déterminé que le Canada était prêt. Cependant, et il me corrigera si je me trompe, le fait est que, chronologiquement, entre le moment du départ du président Aristide le 29 février et le moment où l'on a déterminé l'ampleur de la participation chiffrée à quelque 450 militaires et six hélicoptères CH-146, il s'est quand même écoulé une semaine.
Compte tenu de l'urgence de la situation, le ministre ne doit pas le prendre du point de vue personnel, mais sur le plan des politiques publiques, sur le plan de l'action du Canada à l'étranger, le délai n'est pas raisonnable et il est trop long. Cela n'empêche pas que la contribution canadienne est appréciable. On est dans le domaine de la considération humanitaire. Je sais qu'une délégation, dont faisait partie le ministre responsable de la Francophonie, s'est rendue en Haïti. On a espéré la paix jusqu'à la dernière minute. Je comprends tout à fait cette situation.
Par contre, quand on parle de leadership, il faut que cela s'accompagne d'une certaine célérité. Sans vouloir être partisan, vous savez que j'en suis cruellement incapable, une semaine représente un délai trop long, compte tenu de l'urgence de la situation et de l'espoir qu'avait laissé naître le ministre par certaines déclarations qu'il avait faites sous un certain nombre de tribunes.
[Traduction]
L'hon. Jean Augustine (ministre d'État (Multiculturalisme et Situation de la femme), Lib.): Monsieur le président, je suis très heureuse d'avoir l'occasion de participer au débat sur Haïti.
Permettez-moi de dire au départ que les Canadiens ont été vraiment touchés par les récents événements en Haïti. En tant que députée née dans la région des Caraïbes, je suis doublement touchée par la situation.
Notre premier ministre a précisé clairement que le Canada est bien décidé à jouer un rôle dans les efforts multinationaux pour établir la paix et la sécurité en Haïti. Ce ne sont pas que de simples paroles. Le Canada a notamment pour objectif de renforcer la démocratie, de mettre un terme au conflit et de favoriser les droits de la personne dans les Amériques.
Haïti est un pays important pour la stabilité de toute la région. La CARICOM continue d'aider à trouver une solution pacifique en Haïti. Nous appuyons les travaux déjà entrepris par la CARICOM et l'Organisation des États américains qui servent de fondement aux efforts actuels pour rétablir les institutions démocratiques d'Haïti afin d'assurer un avenir meilleur à toutes les nations.
Le Canada appuie pleinement la mission spéciale de l'OEA en Haïti. Le 20 février, nous avons annoncé des fonds supplémentaires de cinq millions de dollars destinés à la mission.
En tant que voisin dans l'hémisphère, en tant que pays où on retrouve de nombreux Haïtiens et en tant que pays membre de la Francophonie et de l'Organisation des États américains, le Canada continuera d'aider les Haïtiens à bâtir une société pacifique et démocratique.
À la suite de récentes discussions avec le secrétaire général des Nations Unies, Kofi Annan, le premier ministre s'est engagé à envoyer 450 militaires canadiens pour participer aux efforts de maintien de la paix en Haïti. Encore hier, le premier ministre s'est engagé à verser cinq millions de dollars de plus en aide.
À long terme, un contingent d'agents de la GRC formeront les policiers haïtiens. Nous fournissons également une aide alimentaire et humanitaire surtout par l'entremise de l'ACDI, l'Agence canadienne de développement international.
Le Canada joue depuis longtemps un rôle pour améliorer les conditions socio-économiques et politiques en Haïti. Je pense que nous le savons tous. Tous ces efforts soulignent les liens étroits entre le Canada et Haïti. Nous avons notamment envoyé des troupes de maintien de la paix au début des années 90. De plus, le Canada apporte un soutien continu, notamment par l'entremise de contributions à la mission spéciale de l'Organisation d'États américains et d'une aide au développement importante, ainsi que de projets à court terme reliés à la création d'emplois et à l'aide alimentaire.
Nous savons que nous avons pris un engagement et il y a beaucoup plus sur le plan des efforts désintéressés que nous avons tous déployés au fil des ans, des efforts désintéressés de nombreux Canadiens dévoués qui sont allés en Haïti à titre individuel ou avec des ONG, des organisations non gouvernementales. De nombreuses personnes font vraiment une différence dans la vie des Haïtiens grâce à leur travail bénévole dans le pays.
Comme Haïti est un pays d'une grande beauté et riche de promesses non réalisées, un pays qui ne manque jamais de laisser une impression profonde et durable sur ceux qui le visitent. Au milieu des troubles actuels, n'oublions pas la dignité et la force du peuple haïtien qui a inspiré les Canadiens, entre autres, par son art, son ingéniosité et son humanité durable, face à des défis gigantesques.
Ici au Canada, les Haïtiens et les Canadiens d'origine haïtienne apportent une contribution inestimable à notre société dans beaucoup de domaines d'activité, des gens comme Bruny Surin, un membre de l'équipe de relais masculine qui a remporté la médaille d'or aux Jeux olympiques d'été de 1996, ou encore Michaelle Jean, de Radio-Canada.
Il y a des milliers de gens d'origine haïtienne au Canada qui sont inquiets et troublés par la situation en Haïti. Ils sont impatients de contribuer à rétablir une société démocratique et prospère en Haïti en se basant sur l'expérience qu'ils ont acquise au Canada. Les immigrants de Haïti ne se sont pas seulement ajoutés au riche mélange multiculturel du Canada, ils ont apporté avec eux des compétences et une expérience dont peuvent bénéficier nos localités, notre économie et notre société.
Le Canada, l'un des pays les plus multiculturels et les plus multiethniques du monde, accorde une grande valeur à ses rapports avec le monde à l'extérieur de ses frontières. Pourquoi en est-il ainsi? C'est parce que nous accueillons à notre porte des nouveaux venus de tous les coins du globe. Nous sommes fiers de notre diversité culturelle et nous encourageons les nouveaux arrivants à conserver leur identité culturelle. Comptant plus de 200 ethnies différentes, le Canada est un microcosme du monde.
Pour reconnaître cette réalité, il y a 33 ans, le gouvernement du Canada a adopté une politique multiculturelle destinée à créer une société dans laquelle l'héritage culturel serait valorisé et où tous les Canadiens, indépendamment de leurs origines raciales, ethniques ou religieuses, pourraient s'exprimer et participer pleinement. Tous les Canadiens sont égaux devant la loi et ont le droit de participer pleinement à notre société. Ce droit est tellement important pour les Canadiens qu'il est consacré par une loi, à savoir la Loi sur le multiculturalisme canadien.
Les politiques et les lois sont importantes, mais c'est la valeur que les Canadiens accordent au respect qui assurera la pleine participation de tous. À titre de particuliers, de collectivités, d'institutions et de gouvernements, nous devons pratiquer le respect quotidiennement au travail, dans notre voisinage, dans nos écoles et dans nos foyers avec nos familles. Bien entendu, tout cela a un impact direct sur nos collectivités, nos institutions et notre société. Cela a aussi une incidence directe sur notre façon de juger de la place que nous occupons dans le monde et de l'opinion des autres à l'égard du Canada.
Voici un extrait du plus récent discours du Trône. On y disait:
...la liberté et la paix, les droits de la personne et la règle de droit, la diversité, le respect et la démocratie, voilà les valeurs qui constituent la fondation de l'expérience canadienne et de notre succès. En vérité, elles sont sans doute notre bien exportable le plus précieux. |
Le Canada s'intéresse profondément à ses voisins de l'hémisphère. Nous sommes profondément préoccupés par la paix et le droit de chaque personne à vivre dans la dignité et la sécurité. À titre de société multiculturelle fière de l'être, nous nous intéressons aux espoirs et aux rêves de tous les gens de la Terre qui cherchent un avenir plus prospère, paisible et sûr pour leurs enfants et pour eux-mêmes.
Ce n'est pas qu'une vision. C'est une question d'engagement authentique de la part du gouvernement du Canada. Notre vision, notre engagement, notre attachement durable aux valeurs et aux idéaux chers à notre pays amènent les Canadiens à sympathiser sincèrement avec le peuple haïtien. C'est pourquoi nous sommes déterminés à redoubler d'efforts pour accompagner les Haïtiens dans leur édification d'une société stable, prospère et démocratique. C'est dans cet esprit que nous parlons ce soir des aspirations du peuple haïtien.
L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le président, qu'on me permette d'utiliser le temps de la Chambre pour faire appel aux compétences de la ministre.
La ministre est originaire des Antilles, où se trouvent toujours des membres de sa famille. Elle a vécu là-bas. Elle a des liens solides avec la communauté antillaise de Toronto. Le gouvernement a essayé de collaborer étroitement avec la CARICOM pour bien montrer que ce sont les Antillais eux-mêmes qui sont le mieux placés pour aider les Haïtiens à faire mieux fonctionner leur régime politique.
La question est complexe, car il y a là-bas un mélange de traditions britanniques, françaises et antillaises. La ministre en a parlé de façon émouvante. Pourrait-elle puiser dans son expérience pour nous dire comment, selon elle, nous pourrions travailler avec les pays de la CARICOM pour aider Haïti à se donner une culture politique qui nous permettra de régler ses problèmes?
L'hon. Jean Augustine: Monsieur le président, en guise de réponse, je me servirai d'un exemple qui est assez proche de nous. Quand des choses se produisent autour de nous, cela a des incidences sur nous. Haïti est entourée de bien des pays de la CARICOM et elle fait donc partie de la famille de la CARICOM .
De par mon travail et mes intérêts et à la suite de conversations que j'ai eues avec des gens de ma région, notamment de Toronto, j'ai appris qu'il y a beaucoup de peine et beaucoup d'espoir au sujet de l'initiative de la CARICOM. Il y a des attentes par rapport à certaines solutions qui auraient pu être adoptées. En ce moment, ces pays ont besoin d'avoir des nouvelles du Canada, ils ont besoin que nous soyons à leurs côtés alors qu'ils font face à la situation actuelle. C'est quelque chose qui s'est produit dans leur voisinage. La paix et un règlement du conflit sont dans l'intérêt de toute la région de la CARICOM .
Les Nations Unies ont déclaré que cette année était celle de la libération de l'esclavage. L'histoire d'Haïti est intéressante. Elle est très intéressante à découvrir pour ceux d'entre nous qui n'ont pas lu au sujet des luttes qui s'y sont déroulées. Le peuple haïtien a été très éprouvé depuis un certain nombre d'années.
Tout ce que le Canada peut faire et les engagements que nous avons pris jusqu'à maintenant sont très importants. Nous devons aller de l'avant. Le ministre des Affaires étrangères a une responsabilité envers tous les membres de la Caricom, celle de poursuivre le dialogue avec eux, de leur tendre la main en toute amitié et de leur donner l'assurance que'il les soutient en cette période de tension pour tous les États membres de la CARICOM.
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, PCC): Monsieur le président, malgré l'heure tardive, c'est un plaisir pour moi de dire quelques mots sur Haïti, plus particulièrement en ma qualité de porte-parole en matière de défense nationale de l'opposition officielle, le Parti conservateur du Canada.
Un certain nombre de mes collègues du Parti conservateur se sont exprimés sur cette motion ce soir. Au nom du parti, ils ont bien sûr appuyé le fait que, en tant que pays, nous fassions ce que nous pouvons pour aider le peuple haïtien, en ces temps de conflit, de désordre, d'agitation et, malheureusement, de carnage.
Depuis environ une semaine, j'ai répété plusieurs fois au cours d'entrevues que cette situation faisait désormais les grands titres des journaux au Canada. Je crois que tous les Canadiens ont beaucoup d'empathie pour le peuple haïtien et qu'ils sont entièrement solidaires de ceux qui, indépendamment de leur volonté, ne peuvent assurer leur propre protection et se retrouvent dans un pays déchiré par la guerre civile.
Nous ne pouvons pas oublier que la plupart des gens se retrouvent pris au beau milieu de cette situation. Pour la plupart, ce sont des gens innocents qui n'attendent probablement rien de mieux de la vie que le Canadien moyen qui veut simplement un lieu de travail paisible, un emploi décent et un revenu suffisant pour pouvoir bien vivre, avec son conjoint et les membres de sa famille. Je suppose qu'il en va de même pour la plupart des Haïtiens. Malheureusement pour eux, dans leur pays, ils se retrouvent au beau milieu de tous ces troubles politiques. Nous sommes de tout coeur avec le peuple haïtien, comme l'ont dit, quel que soit le parti, tous ceux qui se sont exprimés à la Chambre des communes au cours du débat de ce soir.
En tant que porte-parole en matière de défense, j'aimerais également parler au nom des jeunes hommes et des jeunes femmes de nos forces armées parce que je m'en préoccupe beaucoup. Je suis entièrement solidaire avec eux lorsque, à l'instar du peuple haïtien, je les vois se retrouver dans une situation qu'ils n'ont pas voulue. Mais le gouvernement a pris un engagement et leur a demandé de risquer leur vie pour le tenir.
Nombre de personnes peuvent dire qu'elles étaient au courant quand elles se sont engagées dans les forces armées. C'est vrai et les membres de nos forces armées partent en mission de bon gré. Ils reconnaissent que cela fait partie de leur travail, partie du service qu'il se sont engagés à effecteur au nom du Canada et, dans bien des cas, au nom d'autres pays. Nos militaires vont où le Canada les envoie et, à toutes fins pratiques, ils partent sans rechigner et avec les maigres ressources qui leur sont fournies. Ils partent à l'étranger et font un travail exemplaire. Quelles que soient les allégeances politiques, je crois que tous les députés reconnaissent la remarquable contribution que nos militaires ne cessent de faire dans les points chauds où ils interviennent un peu partout dans le monde.
Je suis préoccupé de la situation de nos troupes. Nombre d'entre nous, pas uniquement les députés qui siègent ici, mais je crois que bien des Canadiens, d'un océan à l'autre, ont l'impression que le gouvernement prend des engagements sans expliquer aux citoyens sur quels critères ces engagements reposent. C'est ce que nous constatons encore une fois à l'occasion de ce nouveau déploiement de quelque 450 soldats en Haïti.
Lorsqu'il est intervenu au sujet de la motion, plus tôt ce soir, notre ministre des Affaires étrangères a fait mention de cela. Il a demandé au gouvernement d'expliquer sur quels critères il se base pour déterminer qu'il y a des troubles à l'étranger et qu'il faut envoyer de jeunes Canadiens risquer leur vie dans ces points chauds du globe, notamment la Bosnie, le plateau du Golan, la Sierra Leone, en Afrique, l'Afghanistan et, aujourd'hui, Haïti. Évidemment, avant les interventions dans ces pays, nous avons participé à d'innombrables missions à l'étranger, depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.
Je crois que les Canadiens voudraient que leur gouvernement leur indique clairement sur quel genre de politique étrangère ces décisions sont fondées. Comme je l'ai dit au début de mes observations, ce n'est pas que le Canadien moyen n'a pas de sympathie pour les habitants des pays déchirés par la guerre, qui vivent dans des situations dangereuses. Tous les députés entendent leurs électeurs affirmer qu'ils ont beaucoup de sympathie pour ces autres peuples. Ils veulent aider et ils veulent que nos forces armées se rendent sur place pour aider.
Plus tôt ce soir, durant les échanges et les discussions dans le contexte de ce débat, j'ai parlé du budget. Une autre de mes inquiétudes a aussi été clairement nommée, non seulement par le Parti conservateur du Canada, mais aussi par les propres députés du gouvernement qui siègent au Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants de la Chambre des communes et au comité de l'autre endroit. Il a été affirmé hors de tout doute, au Parlement et par de nombreuses organisations de l'extérieur qui ont fait des études récemment à ce sujet, que nos forces armées sont sous-financées.
Voilà pourquoi le Parti conservateur du Canada est déterminé à augmenter les fonds réservés aux Forces canadiennes; c'est l'une des recommandations et des promesses que nous faisons à la population canadienne à la veille de la prochaine campagne électorale. Nous nous engageons à augmenter considérablement le financement des Forces canadiennes. Le premier ministre a pris un engagement semblable depuis son arrivée au pouvoir, mais nous n'avons pas vu cette promesse se matérialiser. Espérons qu'elle se réalisera lors du dépôt du budget en cette Chambre dans deux semaines environ.
J'ai trouvé cela intéressant quand j'ai posé des questions au ministre de la Défense nationale plus tôt ce soir dans le cours du débat. Quand je lui ai demandé d'où viendrait l'argent, il a évalué à 38 millions de dollars ce qu'il en coûterait de déployer quelque 450 soldats pendant 90 jours. De toute évidence, nous respectons tous le fait que ce n'est qu'une évaluation. Espérons qu'elle est plus proche de la réalité que celle qu'a faite ce même gouvernement libéral de ce que le registre des armes à feu coûterait aux contribuables.
Quoi qu'il en soit, il faut comprendre que cela va coûter de l'argent. Ma préoccupation, en tant que porte-parole en matière de défense qui essaie de défendre les intérêts des hommes et des femmes qui servent dans les forces armées est que cet argent ne provienne pas du budget actuel des Forces canadiennes, qui est déjà étiré au maximum. C'est un fait qui a été répété à maintes reprises ce soir et sur lequel ont insisté de nombreuses études menées au cours des deux dernières années. Les Forces canadiennes ont besoin de beaucoup plus d'argent, pas de moins. J'espère que, quel que soit le coût de ce déploiement, l'argent nécessaire sera prévu ailleurs que dans le budget du ministère de la Défense quand le gouvernement déposera son budget dans les semaines à venir.
Je terminerai là-dessus. Il y a une autre promesse dont j'espère que le premier ministre a l'intention de la tenir. Il a dit à maintes reprises ces derniers mois qu'il n'avait pas l'intention, contrairement à son prédécesseur Jean Chrétien, d'exposer nos jeunes au danger sans qu'ils soient équipés du meilleur matériel possible. Ce sont ses propres mots. De ce côté-ci de la Chambre, nous appuyons cette idée, mais nous ne l'avons pas encore vu joindre le geste à la parole. C'est ce que nous attendons dans le budget.
Excusez-moi si je suis un petit peu cynique, mais nous parlons du même homme qui, du temps où il était ministre des Finances, a progressivement amputé le budget du ministère de la Défense de quelque 20 milliards de dollars au cours de la dernière décennie. Il dit maintenant qu'il veut rétablir une partie de ce financement afin que nos forces armées puissent avoir le meilleur équipement possible. Je suis tout à fait en faveur de cela. De nombreux députés, des deux côtés de la Chambre, le sont eux aussi. Espérons que le gouvernement libéral est sérieux et qu'il tiendra ses promesses à cet égard.
L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le président, je crois que le député qui m'a précédé a livré un discours réfléchi qui a contribué utilement au débat de ce soir.
Je voudrais donner mon opinion au sujet des réductions du budget de la défense, ayant été président du caucus de la défense pendant un certain temps. Je suis un grand partisan de la défense. Nos forces armées devraient être bien équipées et pouvoir compter sur un budget adéquat. Par ailleurs, je ne pouvais pas rester sans réagir pendant que le paiement de l'intérêt sur la dette réduisait notre capacité de financer adéquatement nos forces armées. L'imposition d'une discipline à la grandeur de l'appareil gouvernemental, ce qui nous a permis de surmonter le déficit et d'accroître nos contributions à la défense, à l'éducation et aux soins de santé, était une étape nécessaire.
Je voudrais également parler de ma circonscription. Un de mes électeurs, en particulier, était préoccupé par le fait que le président Aristide n'a peut-être pas quitté son poste volontairement. J'ai donc entendu avec plaisir le secrétaire général des Nations Unis, M. Kofi Annan déclarer, lorsqu'il a fait un survol de la situation, que le président avait démissionné et qu'il avait été remplacé normalement, conformément à la Constitution.
Je suis également très heureux de l'envoi de troupes et de l'aide accordée par notre pays.
L'un des trois piliers de la philosophie du nouveau premier ministre est de faire en sorte que le Canada joue pleinement son rôle dans le monde. Notre pays est respecté et peut jouer de nombreux rôles. J'ai constaté avec plaisir que la façon dont nous avons réagi à cette crise constituait un pas dans cette direction. J'ignorais que nous disposions des très importantes ressources que nous avons mises à contribution sous forme de troupes et d'aide accrue, une aide qui s'est d'ailleurs accrue graduellement ces dernières années. J'ai regardé avec satisfaction notre pays intervenir rapidement pour venir en aide à Haïti. Je crois qu'on nous admire pour le rôle que nous jouons sur la scène internationale, et je pense que le monde attend cela de nous. J'espère que nous pourrons continuer de faire en sorte que l'aide destinée à d'autres pays ne soit pas détournée, sur place, à d'autres fins.
Haïti est le pays le plus pauvre de notre hémisphère. Le Canada a travaillé et continuera de travailler avec les Haïtiens pour relever ce défi. Nous épaulerons le peuple d'Haïti. Les Haïtiens peuvent compter sur le Canada. Hier, en réponse à l'appel du secrétaire général, Kofi Annan, en faveur d'une aide accrue à Haïti, le Canada a immédiatement promis cinq millions de dollars.
Le Canada se préoccupe vivement du manque de sécurité, de stabilité et de démocratie en Haïti. Le Canada entretient des relations de longue date avec Haïti et il s'est engagé à long terme à aider les Haïtiens à susciter un climat favorable au développement durable, c'est-à-dire un développement social, politique, économique et écologiquement durable qui assurera une paix et une prospérité durables.
C'est une entreprise complexe. Créer des conditions propices à la gouvernance, à la démocratie et à la sécurité n'est pas aussi simple que construire une école ou un hôpital. Cela prend du temps. Cela requiert de la persévérance. Cela exige un engagement à des changements à long terme et l'apprentissage, en cours de route, des solutions qui donneront des résultats à long terme.
[Français]
Il est essentiel de pouvoir compter sur des partenaires solides pour s'attaquer aux problèmes complexes liés au développement d'Haïti. Le gouvernement sait pertinemment que nous devons travailler en étroite collaboration en sol canadien, au sein de la communauté internationale et avec les pays en développement pour obtenir des changements durables et contribuer à un monde meilleur.
L'Agence canadienne de développement international, l'ACDI, travaille en étroite collaboration avec les ministères de la Défense nationale et des Affaires étrangères pour aider à surmonter la crise humanitaire actuelle et pour renforcer la sécurité, les droits de la personne, la démocratie et la bonne gouvernance de ce pays.
Comme le ministre de la Défense nationale vient de l'expliquer, le Canada déploiera 450 autres soldats afin d'aider à rétablir la paix en sol haïtien dans le cadre de la force internationale.
Comme le ministre des Affaires étrangères l'a affirmé, le Canada collabore étroitement avec ses partenaires internationaux par l'entremise des Nations Unies et avec d'autres États aux vues similaires, dont nos partenaires de l'Organisation des États américains, l'OEA, et du CARICOM, le Marché commun des Caraïbes.
Maintenant que l'ordre constitutionnel est en voie d'être rétabli en Haïti, le gouvernement du Canada travaillera en étroite collaboration avec le président et le premier ministre par intérim. L'engagement des dirigeants haïtiens envers une véritable réforme sera l'élément moteur du changement, de l'instauration d'un climat de sécurité durable, de la stabilité et du développement durable dans le pays.
Cela dit, la sécurité ne pourra apporter à elle seule la paix et la prospérité à long terme.
[Traduction]
Le peuple haïtien ne peut pas se sentir en sécurité s'il ne connaît que la pauvreté et n'a pas accès à des services de santé, à l'éducation, à des emplois, et s'il vit dans un environnement qui se dégrade.
Le rôle de l'ACDI consiste à aider les gens à accéder aux moyens leur permettant d'améliorer leur sort, celui de leur famille et de leur collectivité.
Cet accès doit être distribué équitablement, sinon les iniquités donneront lieu à d'autres rivalités, à d'autres haines et à d'autres conflits. Les efforts visant le développement durable doivent aussi être axés sur le respect et l'équité, la justice et la démocratie et un accès équitable aux ressources.
Des pays en crise comme Haïti ont besoin du soutien de la communauté internationale dans la gestion du processus de développement. Dans cette période de transition, il sera essentiel qu'une division coordonnée et équitable du travail se fasse entre les Nations Unies et l'OEA, chacun des organismes assumant la responsabilité des domaines répondant le mieux à ses forces et à ses capacité.
[Français]
Le Canada a recours à de nouvelles directives internationales pour accomplir des progrès à court terme en matière de développement, tout en outillant le gouvernement pour lui permettre de remplir cette responsabilité essentielle à long terme.
Il s'agit d'une approche fondée sur la souplesse et le dialogue franc, qui vise à cerner les intervenants qui sauront amener le changement ainsi que d'autres partenaires de la société civile, du secteur privé et des différents ordres de gouvernement.
À court terme, nous visons à rétablir la sécurité et à satisfaire les besoins fondamentaux.
À long terme, le Canada concentrera ses efforts sur six priorités: l'éducation de base, la santé, le développement économique, les droits de la personne, la justice et la sécurité.
Le Canada doit respecter son engagement à rétablir la paix, la sécurité, la stabilité et la prospérité en Haïti. Nous ne pouvons fermer les yeux sur ce qui se passe dans notre voisinage, dans les Amériques, et nous devons traduire nos bonnes intentions en gestes concrets.
[Traduction]
Le ministre a parlé de l'importance, pour toute la région, de la stabilité en Haïti. Je voudrais rappeler les conséquences d'une instabilité chronique pour les Haïtiens et peut-être pour d'autres, si le problème s'étendait à d'autres pays.
En Haïti, les personnes de mon âge ont déjà dépassé leur espérance de vie. Un plus grand nombre de personnes, et surtout des enfants, deviendront malades et mourront parce qu'ils boivent de l'eau impropre à la consommation. Un plus grand nombre de parents sont incapables de nourrir leurs enfants convenablement.
Les Canadiens veulent avoir une action marquante dans le monde. Nous avons cette influence en Haïti. Ces quelques dernières années, des milliers de Canadiens y ont travaillé.
Depuis le milieu des années 90, grâce à l'aide du Canada, plus de 3 millions d'enfants ont été vaccinés et quelque 5 000 femmes ont reçu un soutien en planification familiale et en santé génésique ainsi que sur le plan des droits de la personne et de la vie politique. Les 35 000 habitants de Jacmel vivent dans la seule ville haïtienne qui, grâce à l'aide du Canada, a l'électricité 24 heures par jour.
Il y a encore beaucoup à faire avant qu'Haïti ne s'arrache à la crise actuelle et ne s'engage dans la voie du développement durable et de la prospérité. Nous devons poursuivre notre important travail dans ce pays et renforcer nos partenariats avec tous les partenaires en Haïti, au Canada et ailleurs dans le monde qui visent les mêmes objectifs.
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, PCC): Monsieur le président, j'aimerais remercier mon collègue du Yukon de son discours réfléchi. Je tiens toutefois à m'opposer à une remarque qu'il a faite au tout début de son discours.
Je crois qu'il a donné l'impression aux téléspectateurs qui nous regardent ce soir que le premier ministre, à l'époque où il était ministre des Finances, et le gouvernement libéral étaient forcés de faire les compressions dont je parlais dans mes remarques à propos des budgets militaires. Je crois qu'il a dit quelque chose qui signifiait que ces compressions étaient nécessaires pour pouvoir équilibrer le budget et commencer à accumuler des surplus en vue de réduire notre dette et de pouvoir prendre les engagements que les Canadiens attendent dans les secteurs de la santé, de l'éducation et autres.
Nous y tenons bien sûr résolument, mais en l'écoutant, je n'ai pas pu m'empêcher de penser à quelque chose que j'ai souvent répété à mes enfants. J'ai trois enfants, deux filles de 25 et 23 ans et un fils de 21 ans. Depuis qu'ils sont tout petits, j'ai toujours essayé de leur faire comprendre que nous avons tous des choix à faire dans la vie, et ce dès que nous sortons du lit le matin. À notre réveil, nous pouvons décider de sourire et de garder le sourire pour la journée ou encore de nous mettre à bougonner, ce qui donnera sans aucun doute le ton à la journée.
Nous faisons tous des choix. À mon avis, le gouvernement ainsi que le premier ministre, en sa capacité de ministre des Finances, ont fait certains choix. Ils ont décidé de dépenser, et les chiffres dépassent maintenant les 2 milliards de dollars, pour créer un registre des armes à feu qui permet d'enregistrer les armes des chasseurs de canards. Les libéraux ont choisi de dépenser de grosses sommes d'argent pour financer les programmes de commandites ou les cafouillis bureaucratiques de DRHC.
Je dirais qu'au cours des dix dernières années, depuis que je suis ici et qu'il est au pouvoir, le gouvernement a fait certains mauvais choix. J'espère que notre collègue s'en rend compte aussi. J'espère par exemple que nous ne serons pas témoins de certains de ces mauvais choix lorsque nous prendrons connaissance des dispositions du budget dans une semaine ou deux. J'espère que nous constaterons que le gouvernement tient à affecter l'argent non seulement à nos militaires, mais aussi à l'appui de missions comme celle que nous avons maintenant entrepris en Haïti pour que nous puissions faire le travail que tous les Canadiens veulent que nous fassions.
L'hon. Larry Bagnell: Monsieur le président, évidemment, comme le sait le député, nous sommes en désaccord sur la ventilation des dépenses; mais, il a raison, le gouvernement a fait des choix.
Par exemple, en augmentant très substantiellement ses investissements dans le soins de santé, la grande priorité des Canadiens. Par exemple, en créant les bourses du millénaire, le plus gros programme du genre dans l'histoire de notre pays. Les Canadiens prisent tellement l'éducation.
Par exemple, en investissant énormément plus en recherche et développement, afin que le Canada conserve une économie du savoir. Par exemple, en se dotant du programme social le plus vaste et le plus important de son histoire, la prestation fiscale pour enfants, et en l'augmentant.
Par exemple, en réduisant notre dette et en appliquant le plus important allégement fiscal de notre histoire. Grâce à tous ces choix, les entreprises canadiennes peuvent concurrencer d'autres pays et croître suffisamment pour embaucher des employés, de sorte que nous soyons en mesure de contribuer aux soins de santé, à l'éducation et à notre défense.
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Monsieur le président, je voudrais remercier le député du Yukon de ses observations et commenter les échanges entre lui et le député de Prince George—Peace River.
Les gouvernements font effectivement des choix, c'est absolument vrai. Certes, nous sommes tous, à la Chambre, troublés par les difficultés récentes observées dans le programme de commandites, mais je me demande si nous n'oublions pas parfois la performance budgétaire du gouvernement depuis dix ans.
Nous avons éliminé un déficit de 42 milliards de dollars. En fait, les pays étrangers nous considèrent comme étant un miracle budgétaire, car nous avons éliminé un déficit de 42 milliards de dollars en trois ans, en plus de remboursant 46 milliards de dollars de notre dette. Cela épargne aux contribuables 3 milliards de dollars par année, ce qui nous procure une rente à perpétuité. Nous avons le meilleur bilan au sein du G-7 pour ce qui concerne la création d'emplois. Nous enregistrons constamment une performance supérieure à celle de l'économie américaine en matière de création d'emplois. Les prix sont restés stables et l'inflation, faible.
Les gouvernements font effectivement des choix. Notre gouvernement a décidé en 1993 qu'il remettrait de l'ordre dans ses finances. C'est ce que le gouvernement a entrepris de faire et c'est exactement ce qu'il a fait. Cela, bien évidemment, ne justifie jamais la mauvaise gestion de l'argent des contribuables qui s'est produite de temps à autre. Notre gouvernement a résolu lui-même de s'attaquer à ces problèmes.
Je suis persuadé, en raison des mesures que nous avons prises par le passé, que nous pourrons redéployer des ressources vers la défense nationale. Nous arriverons à établir une meilleure corrélation entre nos ressources et nos objectifs stratégiques en matière de défense et de politique étrangère, au fur et à mesure que cet examen avancera et s'étoffera.
Le député du Yukon a posé une question plus tôt au sujet des défenses dans le nord. Je me demande ce que les résidents de sa région au Yukon pensent d'un programme de défense antimissile.
L'hon. Larry Bagnell: Monsieur le président, j'aborde la question d'abord et je commenterai les observations ensuite.
Dans ma région, les avis sont partagés sur la défense antimissile. Je l'ai dit dans plusieurs discours sur la défense antimissile. Les habitants de ma région ont des points de vue partagés sur une foule de choses et j'essaie de présenter les deux côtés. Certains ne veulent absolument pas de participation à la défense antimissile. Nous sommes la circonscription la plus proche. D'autres réalisent que les missiles terrestres du projet se trouvent à quelques secondes de distance. D'autres veulent une participation, pas au point de faire de grandes dépenses, mais pour s'assurer de savoir ce qui se passe et, ainsi, pouvoir influencer et exercer des pressions plus efficaces pour éviter la présence de missiles dans l'espace.
Quant aux observations du député sur les dépenses, je dois l'admettre. Nous avons fait d'autres choix. Tout en épongeant le déficit, nous avons mis assez d'argent de côté pour régler des revendications territoriales permettant d'amener les Canadiens sur un pied d'égalité, pour faire un bon nombre d'opérations de dépollution et pour établir un bureau de l'énergie dans ma circonscription. Nous avons augmenté continuellement l'aide financière étrangère. Nous avons acheté du nouveau matériel pour les militaires. Quand je suis allé en Afghanistan, les soldats étaient contents de leur équipement. De nouveaux véhicules venaient d'arriver.
Nous avons investi dans l'alphabétisation. Nous avons investi dans la formation en milieu de travail. Nous avons investi dans des programmes comme le programme Bon départ, qui est destiné aux citoyens les plus jeunes et les plus pauvres afin de les aider à bien partir dans la vie et à grandir avec des chances égales.
M. Jay Hill: Monsieur le président, je dois intervenir parce que je ne peux pas supporter de voir les libéraux se donner mutuellement des signes d'admiration en se tapant chacun dans le dos à 22 heures au moment où nous terminons le débat.
Je signale aux Canadiens, s'il y en a qui écoutent le débat ce soir, que contrairement à l'impression qu'on veut donner, ce n'est pas le premier ministre, lorsqu'il était le ministre des Finances, et ce ne sont certainement pas les libéraux qui ont réussi à équilibrer le budget et à commencer à rembourser la dette. Ce sont les contribuables canadiens.
Avant de commencer à trop se vanter de leurs prouesses budgétaires, les libéraux devraient peut-être réfléchir au fait que, peu importe comment on fait le calcul, les Canadiens ont le plus lourd fardeau fiscal du monde occidental. La situation continue malgré les réductions d'impôt que les libéraux ne cessent de se vanter d'avoir accordées. Je n'ai pas encore rencontré un seul Canadien qui ait vu le résultat de ces réductions d'impôt sur son chèque de paie.
L'hon. Larry Bagnell: Monsieur le président, le député devrait parler à davantage de Canadiens parce que nous avons accordé la plus grande réduction d'impôt dans l'histoire.
Dans certaines catégories, nos impôts sont plus bas que ne le sont ceux des pays du G-7. Nous avons les impôts les plus élevés dans certains domaines, et c'est le choix des Canadiens parce qu'ils estiment que nous avons de meilleurs services, notamment en ce qui concerne les questions autochtones, les soins de santé et l'éducation. Ce sont là les aspects dont les Canadiens sont fiers.
Je ne crois pas que les Canadiens rechignent, car peu importe leur situation, quand ils sont malades ou blessés, ils peuvent tous se faire traiter gratuitement à l'hôpital et recevoir des soins des qualités. Ces impôts leur en donnent pour leur argent.
L'hon. Aileen Carroll (ministre de la Coopération internationale, Lib.): Monsieur le président, je prends la parole pour poser une question à mon collègue du Yukon. Je pense que son discours à la fin de la soirée a contribué à l'excellence de ce débat des deux côtés de la Chambre.
Nous devons, en tant que gouvernement et peuple, nous engager à résoudre la crise et les horreurs qui constituent actuellement la réalité en Haïti mais le député conviendrait-il avec moi que ce gouvernement doit trouver des solutions à des problèmes pour la solution desquels nous n'avons pas eu beaucoup de succès dans le passé? S'il est d'accord avec moi, peut-être pourrait-il faire une suggestion à cet égard.
L'hon. Larry Bagnell: Monsieur le président, voilà la question parfaite pour terminer le débat.
Je dirai d'abord que de tous les députés de la Chambre, il n'y en a aucun que j'admire davantage que celle qui m'a posé cette question, en raison de son travail consciencieux à la Chambre.
Comme le nouveau premier ministre, je pense que les nouvelles occasions nous enseignent de nouveaux devoirs. Le monde a changé. C'est un monde réseauté plein de problèmes et d'occasions. Nous devons envisager de nouveaux moyens multilatéraux et de nouveaux regroupements de nations et de partenaires pour régler ces nouveaux problèmes.
C'est une nouvelle direction passionnante dans laquelle le gouvernement s'est engagé avec notre premier ministre et notre ministre des Affaires étrangères pour aborder des questions d'aide et de défense et faire face à des problèmes complexes qui nécessitent des solutions complexes.
Le monde a les yeux tournés vers le Canada, qui tire son potentiel de la diversité de ses cultures. Ces réponses émaneront de cultures du monde entier. La question c'est de savoir travailler ensemble pour régler des problèmes internationaux et complexes aux multiples composantes.
[Français]
Le président: Comme il n'y a plus de député pour prendre la parole, conformément à l'ordre adopté le lundi 8 mars 2004, le comité s'ajourne et je quitte le fauteuil.
Le vice-président: Comme il est 22 heures, la Chambre demeure ajournée jusqu'à demain, à 10 heures, conformément à l'article 24(1) du Règlement.
(La séance est levée à 22 heures.)