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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 105
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 31 mai 2005
1000 |
La commissaire aux langues officielles |
Le vice-président |
1005 |
Affaires courantes |
La Fondation du Canada pour l'appui technologique au développement durable. |
L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Ressources naturelles, Lib.) |
Les comités de la Chambre |
Affaires étrangères et commerce international |
M. Bernard Patry (Pierrefonds—Dollard, Lib.) |
Santé |
Mme Bonnie Brown (Oakville, Lib.) |
Opérations gouvernementales et prévisions budgétaires |
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.) |
Pétitions |
Les affaires étrangères |
M. Navdeep Bains (Mississauga—Brampton-Sud, Lib.) |
Le mariage |
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.) |
Questions au Feuilleton |
L'hon. Dominic LeBlanc (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) |
Le vice-président |
1010 |
Initiatives ministérielles |
Les crédits |
Motion de l'opposition--La Commission Gomery |
M. Gary Lunn (Saanich—Gulf Islands, PCC) |
1015 |
M. Paul Szabo |
1020 |
Le vice-président |
M. Paul Szabo |
Le vice-président |
M. Gary Lunn |
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.) |
1025 |
M. Gary Lunn |
M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster, PCC) |
1030 |
1035 |
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.) |
1040 |
M. Gerry Ritz |
AFFAIRES COURANTES |
Les comités de la Chambre |
Affaires autochtones et développement du Grand Nord |
L'hon. Dominic LeBlanc (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) |
Le vice-président |
Adoption de la motion |
Initiatives ministérielles |
Les crédits |
Motion de l'opposition — La Commission Gomery |
M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD) |
M. Gerry Ritz |
1045 |
L'hon. Scott Brison (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
1050 |
1055 |
1100 |
Le vice-président |
M. Brian Fitzpatrick (Prince Albert, PCC) |
1105 |
L'hon. Scott Brison |
M. Gary Lunn (Saanich—Gulf Islands, PCC) |
L'hon. Scott Brison |
1110 |
M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam, PCC) |
L'hon. Scott Brison |
Les crédits |
L'hon. Dominic LeBlanc (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) |
Le vice-président |
Adoption de la motion |
Les crédits |
Motion de l'opposition--La Commission Gomery |
M. Garry Breitkreuz |
1115 |
Le vice-président |
M. Michel Guimond (Montmorency—Charlevoix—Haute-Côte-Nord, BQ) |
1120 |
1125 |
1130 |
1135 |
L'hon. Dominic LeBlanc (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) |
M. Michel Guimond |
1140 |
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.) |
M. Michel Guimond |
1145 |
M. Joe Comartin (Windsor—Tecumseh, NPD) |
1150 |
1155 |
1200 |
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, PCC) |
1205 |
M. Joe Comartin |
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.) |
1210 |
M. Joe Comartin |
1215 |
M. Peter Julian |
Le vice-président |
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, PCC) |
1220 |
1225 |
Mme Jean Crowder (Nanaimo—Cowichan, NPD) |
Mme Diane Ablonczy |
M. Pierre Poilievre (Nepean—Carleton, PCC) |
1230 |
Mme Diane Ablonczy |
M. Dean Allison (Niagara-Ouest—Glanbrook, PCC) |
1235 |
1240 |
L'hon. Walt Lastewka (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
M. Dean Allison |
1245 |
M. Pierre Poilievre (Nepean—Carleton, PCC) |
M. Dean Allison |
L'hon. Irwin Cotler (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.) |
1250 |
1255 |
1300 |
M. Jim Gouk (Colombie-Britannique-Southern Interior, PCC) |
1305 |
L'hon. Irwin Cotler |
M. Brian Fitzpatrick (Prince Albert, PCC) |
1310 |
L'hon. Irwin Cotler |
L'hon. Keith Martin (secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale, Lib.) |
L'hon. Irwin Cotler |
1315 |
M. Jim Prentice (Calgary-Centre-Nord, PCC) |
1320 |
1325 |
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.) |
M. Jim Prentice |
1330 |
L'hon. Keith Martin (secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale, Lib.) |
M. Jim Prentice |
Le président suppléant (M. Marcel Proulx) |
M. Jim Prentice |
Mme Rona Ambrose (Edmonton—Spruce Grove, PCC) |
1335 |
1340 |
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.) |
1345 |
Mme Rona Ambrose |
L'hon. Walt Lastewka (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
Mme Rona Ambrose |
1350 |
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ) |
1355 |
1400 |
Le président suppléant (M. Marcel Proulx) |
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS |
Le Centre commémoratif de Peterborough |
L'hon. Peter Adams (Peterborough, Lib.) |
La Société canadienne des postes |
Mme Diane Finley (Haldimand—Norfolk, PCC) |
Le tournoi de hockey de la Coupe Mémorial |
M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.) |
Guy Tardif |
M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les Patriotes, BQ) |
Le Programme de stages Canada-Ukraine |
Mme Yasmin Ratansi (Don Valley-Est, Lib.) |
1405 |
Le programme de hockey junior |
M. Brian Fitzpatrick (Prince Albert, PCC) |
Le conseil canadien des métiers du bâtiment |
M. Russ Powers (Ancaster—Dundas—Flamborough—Westdale, Lib.) |
Le Centre d'action bénévole Les p'tits bonheurs |
Mme Carole Lavallée (Saint-Bruno—Saint-Hubert, BQ) |
B. Fernand Nadeau |
M. Jean-Claude D'Amours (Madawaska—Restigouche, Lib.) |
Martin Donald Jones |
M. Peter Goldring (Edmonton-Est, PCC) |
1410 |
Le budget |
M. Navdeep Bains (Mississauga—Brampton-Sud, Lib.) |
La Journée nationale de lutte contre l'homophobie |
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD) |
La justice |
M. Russ Hiebert (Surrey-Sud—White Rock—Cloverdale, PCC) |
Le budget |
M. Guy Côté (Portneuf—Jacques-Cartier, BQ) |
Le Nouveau Parti démocratique |
M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, PCC) |
1415 |
Les garderies |
M. David McGuinty (Ottawa-Sud, Lib.) |
QUESTIONS ORALES |
Le député de Newton—Delta-Nord |
L'hon. Stephen Harper (chef de l'opposition, PCC) |
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.) |
L'hon. Stephen Harper (chef de l'opposition, PCC) |
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.) |
Le Président |
Le très hon. Paul Martin |
L'hon. Stephen Harper (chef de l'opposition, PCC) |
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.) |
1420 |
Le Programme de commandites |
M. Peter MacKay (Nova-Centre, PCC) |
Le Président |
M. Peter MacKay |
L'hon. Scott Brison (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
Le Président |
M. Peter MacKay (Nova-Centre, PCC) |
L'hon. Scott Brison (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
Le député de Newton—Delta-Nord |
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ) |
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.) |
1425 |
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ) |
Le Président |
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.) |
M. Michel Guimond (Montmorency—Charlevoix—Haute-Côte-Nord, BQ) |
L'hon. Tony Valeri (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) |
M. Michel Guimond (Montmorency—Charlevoix—Haute-Côte-Nord, BQ) |
L'hon. Tony Valeri (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) |
L'hon. Jack Layton (Toronto—Danforth, NPD) |
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.) |
1430 |
L'hon. Jack Layton (Toronto—Danforth, NPD) |
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.) |
Le Programme de commandites |
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, PCC) |
L'hon. Scott Brison (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, PCC) |
L'hon. Scott Brison (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, PCC) |
L'hon. Scott Brison (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, PCC) |
1435 |
L'hon. Scott Brison (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
Le premier ministre |
M. Michel Gauthier (Roberval—Lac-Saint-Jean, BQ) |
L'hon. Tony Valeri (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) |
M. Michel Gauthier (Roberval—Lac-Saint-Jean, BQ) |
L'hon. Tony Valeri (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) |
L'assurance-emploi |
M. Yves Lessard (Chambly—Borduas, BQ) |
L'hon. Belinda Stronach (ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences et ministre responsable du renouveau démocratique, Lib.) |
M. Yves Lessard (Chambly—Borduas, BQ) |
1440 |
L'hon. Belinda Stronach (ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences et ministre responsable du renouveau démocratique, Lib.) |
La santé |
M. Steven Fletcher (Charleswood—St. James—Assiniboia, PCC) |
L'hon. Carolyn Bennett (ministre d'État (Santé publique), Lib.) |
M. Steven Fletcher (Charleswood—St. James—Assiniboia, PCC) |
L'hon. Ujjal Dosanjh (ministre de la Santé, Lib.) |
Le Président |
L'hon. Ujjal Dosanjh |
Les affaires autochtones |
M. Jim Prentice (Calgary-Centre-Nord, PCC) |
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.) |
M. Jim Prentice (Calgary-Centre-Nord, PCC) |
1445 |
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.) |
Le Président |
L'environnement |
M. David Smith (Pontiac, Lib.) |
L'hon. Stéphane Dion (ministre de l'Environnement, Lib.) |
La frontière canado-américaine |
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD) |
L'hon. Jean Lapierre (ministre des Transports, Lib.) |
La réforme démocratique |
L'hon. Ed Broadbent (Ottawa-Centre, NPD) |
L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.) |
La défense nationale |
M. Dave MacKenzie (Oxford, PCC) |
1450 |
L'hon. Bill Graham (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
M. Dave MacKenzie (Oxford, PCC) |
L'hon. Bill Graham (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
L'emploi |
M. Peter Van Loan (York—Simcoe, PCC) |
L'hon. Belinda Stronach (ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences et ministre responsable du renouveau démocratique, Lib.) |
M. Peter Van Loan (York—Simcoe, PCC) |
L'hon. Belinda Stronach (ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences et ministre responsable du renouveau démocratique, Lib.) |
Les garderies |
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ) |
L'hon. Ken Dryden (ministre du Développement social, Lib.) |
L'infrastructure |
M. Mario Laframboise (Argenteuil—Papineau—Mirabel, BQ) |
1455 |
L'hon. John Godfrey (ministre d'État (Infrastructure et Collectivités), Lib.) |
Le Service correctionnel du Canada |
Mme Lynne Yelich (Blackstrap, PCC) |
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.) |
Le Président |
Mme Lynne Yelich (Blackstrap, PCC) |
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.) |
Le Président |
La défense nationale |
M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.) |
L'hon. Bill Graham (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
Les affaires étrangères |
M. Peter Goldring (Edmonton-Est, PCC) |
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre des Affaires étrangères, Lib.) |
1500 |
M. Peter Goldring (Edmonton-Est, PCC) |
Hon. Pierre Pettigrew (Minister of Foreign Affairs, Lib.) |
L'industrie du meuble |
M. André Bellavance (Richmond—Arthabaska, BQ) |
L'hon. Jacques Saada (ministre de l'Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec et ministre responsable de la Francophonie, Lib.) |
Les affaires étrangères |
M. Mario Silva (Davenport, Lib.) |
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre des Affaires étrangères, Lib.) |
Présence à la tribune |
Le Président |
1505 |
Privilège |
Le Comité permanent de la procédure et des Affaires de la Chambre |
M. Scott Reid (Lanark—Frontenac—Lennox and Addington, PCC) |
1510 |
L'hon. Ed Broadbent (Ottawa-Centre, NPD) |
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, PCC) |
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD) |
Le Président |
M. Scott Reid |
Le Président |
Le Président |
Blocage de la ligne téléphonique de députés |
L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.) |
1515 |
1520 |
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Haute-Saint-Charles, BQ) |
M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, PCC) |
1525 |
L'hon. Don Boudria |
1530 |
M. Jim Gouk (Colombie-Britannique-Southern Interior, PCC) |
L'hon. Don Boudria |
M. Gary Goodyear (Cambridge, PCC) |
M. Brian Fitzpatrick (Prince Albert, PCC) |
L'hon. Don Boudria |
1535 |
Le Président |
Initiatives ministérielles |
Les crédits |
Motion de l'opposition — La Commission Gomery |
Le Président |
M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ) |
1540 |
1545 |
M. Peter MacKay (Nova-Centre, PCC) |
M. Benoît Sauvageau |
1550 |
M. Peter MacKay (Nova-Centre, PCC) |
1555 |
1600 |
L'hon. Shawn Murphy (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.) |
1605 |
Le vice-président |
L'hon. Shawn Murphy |
Le vice-président |
L'hon. Shawn Murphy |
M. Peter MacKay |
M. Merv Tweed (Brandon—Souris, PCC) |
1610 |
1615 |
M. Steven Fletcher (Charleswood—St. James—Assiniboia, PCC) |
1620 |
M. Merv Tweed |
M. Peter MacKay (Nova-Centre, PCC) |
M. Merv Tweed |
Le vice-président |
L'hon. Shawn Murphy (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.) |
1625 |
1630 |
1635 |
1640 |
M. Peter MacKay (Nova-Centre, PCC) |
Le vice-président |
M. Peter MacKay |
L'hon. Shawn Murphy |
1645 |
M. Deepak Obhrai (Calgary-Est, PCC) |
L'hon. Shawn Murphy |
M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.) |
1650 |
L'hon. Shawn Murphy |
Le vice-président |
Les travaux de la Chambre |
L'hon. Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.) |
Le vice-président |
AFFAIRES COURANTES |
Les comités de la Chambres |
Finances |
L'hon. Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.) |
Le vice-président |
Adoption de la motion |
1655 |
Initiatives ministérielles |
Les crédits |
Motion de l'opposition--La Commission Gomery |
M. Deepak Obhrai (Calgary-Est, PCC) |
1700 |
L'hon. Walt Lastewka (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
1705 |
M. Deepak Obhrai |
Le vice-président |
M. Deepak Obhrai |
M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, PCC) |
1710 |
1715 |
Le vice-président |
Le vice-président |
L'hon. Dominic LeBlanc |
Le vice-président |
INITIATIVES PARLEMENTAIRES |
La Loi de l'impôt sur le revenu |
Mme Caroline St-Hilaire (Longueuil—Pierre-Boucher, BQ) |
1720 |
1725 |
1730 |
M. Bernard Bigras (Rosemont—La Petite-Patrie, BQ) |
Mme Caroline St-Hilaire |
M. Massimo Pacetti (Saint-Léonard—Saint-Michel, Lib.) |
1735 |
1740 |
M. Bob Mills (Red Deer, PCC) |
1745 |
1750 |
Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD) |
1755 |
1800 |
M. Robert Bouchard (Chicoutimi—Le Fjord, BQ) |
1805 |
1810 |
L'hon. John McKay (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.) |
1815 |
Le Président |
MOTION D'AJOURNEMENT |
[------] |
L'Iran |
M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, PCC) |
1820 |
L'hon. Dan McTeague (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.) |
1825 |
M. Stockwell Day |
L'hon. Dan McTeague |
Le développement social |
M. Tony Martin (Sault Ste. Marie, NPD) |
1830 |
Hon. Eleni Bakopanos (Parliamentary Secretary to the Minister of Social Development (Social Economy), Lib.) |
M. Tony Martin |
1835 |
Le vice-président |
L'hon. Eleni Bakopanos |
Le vice-président |
Initiatives ministérielles |
Les crédits |
Développement des ressources humaines (Développement social) — Le Budget principal des dépenses de 2005-2006 |
Étude en comité plénier de tous les crédits au titre de Développement des ressources humaines (Développement social) dans le Budget principal des dépenses, M. Strahl au fauteuil |
Le président |
1840 |
Mme Carol Skelton (Saskatoon—Rosetown—Biggar, PCC) |
L'hon. Ken Dryden (ministre du Développement social, Lib.) |
Mme Carol Skelton |
1845 |
L'hon. Ken Dryden |
Mme Carol Skelton |
L'hon. Ken Dryden |
Mme Helena Guergis (Simcoe—Grey, PCC) |
L'hon. Ken Dryden |
Mme Helena Guergis |
1850 |
L'hon. Ken Dryden |
Mme Helena Guergis |
L'hon. Ken Dryden |
Mme Helena Guergis |
L'hon. Tony Ianno (ministre d'État (Famille et Aidants naturels), Lib.) |
1855 |
Mme Helena Guergis |
L'hon. Tony Ianno |
Mme Carol Skelton |
L'hon. Ken Dryden |
L'hon. Ken Dryden (ministre du Développement social, Lib.) |
1900 |
1905 |
1910 |
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ) |
1915 |
1920 |
L'hon. Ken Dryden |
1925 |
Mme Christiane Gagnon |
Le président |
Mme Christiane Gagnon |
Le président |
L'hon. Ken Dryden |
M. Tony Martin (Sault Ste. Marie, NPD) |
1930 |
1935 |
1940 |
Le président |
L'hon. Ken Dryden |
M. Michael Savage (Dartmouth—Cole Harbour, Lib.) |
1945 |
1950 |
L'hon. Tony Ianno (ministre d'État (Famille et Aidants naturels), Lib.) |
1955 |
Mme Rona Ambrose (Edmonton—Spruce Grove, PCC) |
2000 |
L'hon. Ken Dryden |
Mme Rona Ambrose |
2005 |
Le président |
L'hon. Ken Dryden |
M. Barry Devolin (Haliburton—Kawartha Lakes—Brock, PCC) |
L'hon. Ken Dryden |
2010 |
M. Barry Devolin |
L'hon. Ken Dryden |
L'hon. Eleni Bakopanos (secrétaire parlementaire du ministre du Développement social (économie sociale), Lib.) |
2015 |
2020 |
2025 |
M. Marcel Gagnon (Saint-Maurice—Champlain, BQ) |
2030 |
L'hon. Ken Dryden |
2035 |
Le président |
L'hon. Tony Ianno |
M. Marcel Gagnon |
Le président |
M. Marcel Gagnon |
2040 |
L'hon. Tony Ianno |
M. Marcel Gagnon |
Le président |
L'hon. Tony Ianno |
L'hon. Maria Minna (Beaches—East York, Lib.) |
2045 |
2050 |
L'hon. Ken Dryden |
2055 |
L'hon. Maria Minna |
L'hon. Ken Dryden |
M. Jeff Watson (Essex, PCC) |
2100 |
L'hon. Ken Dryden |
M. Jeff Watson |
L'hon. Ken Dryden |
M. Jeff Watson |
L'hon. Ken Dryden |
M. Jeff Watson |
L'hon. Ken Dryden |
2105 |
M. Jeff Watson |
L'hon. Ken Dryden |
M. Jeff Watson |
L'hon. Ken Dryden |
Mme Bev Oda (Durham, PCC) |
L'hon. Ken Dryden |
2110 |
Mme Bev Oda |
L'hon. Ken Dryden |
Mme Bev Oda |
2115 |
L'hon. Ken Dryden |
L'hon. Judy Sgro (York-Ouest, Lib.) |
2120 |
L'hon. Tony Ianno (ministre d'État (Famille et Aidants naturels), Lib.) |
2125 |
L'hon. Judy Sgro (York-Ouest, Lib.) |
2130 |
L'hon. Tony Ianno |
M. Tony Martin (Sault Ste. Marie, NPD) |
2135 |
2140 |
L'hon. Ken Dryden |
2145 |
M. Tony Martin |
L'hon. Ken Dryden |
L'hon. Tony Ianno |
M. Ken Boshcoff (Thunder Bay—Rainy River, Lib.) |
2150 |
2155 |
2200 |
L'hon. Ken Dryden |
M. Andrew Scheer (Regina—Qu'Appelle, PCC) |
2205 |
L'hon. Ken Dryden |
M. Andrew Scheer |
L'hon. Ken Dryden |
M. Andrew Scheer |
L'hon. Ken Dryden |
2210 |
M. Andrew Scheer |
L'hon. Ken Dryden |
M. Pierre Poilievre (Nepean—Carleton, PCC) |
L'hon. Ken Dryden |
2215 |
M. Pierre Poilievre |
L'hon. Ken Dryden |
M. Pierre Poilievre |
L'hon. Ken Dryden |
M. Pierre Poilievre |
2220 |
L'hon. Ken Dryden |
Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.) |
2225 |
2230 |
L'hon. Ken Dryden |
2235 |
Le vice-président |
Report de tous les votes sur le Développement des ressources humaines (Développement social) |
Le président suppléant (M. Marcel Proulx) |
CANADA
Débats de la Chambre des communes |
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COMPTE RENDU OFFICIEL (HANSARD)
Le mardi 31 mai 2005
Présidence de l'honorable Peter Milliken
La séance est ouverte à 10 heures.
Prière
* * *
[Traduction]
La commissaire aux langues officielles
Le vice-président: Conformément à l'article 66 de la Loi sur les langues officielles, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport annuel de la commissaire aux langues officielles pour la période allant du 1er avril 2004 au 31 mars 2005.
[Français]
Conformément à l'alinéa 108(3)f) du Règlement, ce rapport est réputé renvoyé en permanence au Comité permanent des langues officielles.
Affaires courantes
[Affaires courantes ]
* * *
[Traduction]
La Fondation du Canada pour l'appui technologique au développement durable.
L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Ressources naturelles, Lib.): Monsieur le Président, au nom du ministre des Ressources naturelles et conformément au paragraphe 32(2) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le résumé du plan d'activité pour 2004 de la Fondation du Canada pour l'appui technologique au développement durable.
* * *
[Français]
Les comités de la Chambre
Affaires étrangères et commerce international
M. Bernard Patry (Pierrefonds—Dollard, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le 10e rapport du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international, au sujet de l'enquête sur le scandale du programme Pétrole contre nourriture des Nations Unies.
* * *
[Traduction]
Mme Bonnie Brown (Oakville, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le douzième rapport du Comité permanent de la santé. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le jeudi 19 mai 2005, votre comité recommande que Santé Canada prenne l'initiative d'une campagne visant à assurer le respect de la Loi sur le tabac.
* * *
Opérations gouvernementales et prévisions budgétaires
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le septième rapport du Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires. Le comité a étudié le budget supplémentaire des dépenses pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 2006 et a convenu d'en faire rapport sans amendement.
* * *
Pétitions
M. Navdeep Bains (Mississauga—Brampton-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui concernant une organisation qui s'appelle STAND Canada, Students Taking Action Now: Darfur. Entre le 16 mars et le 7 avril, les intéressés ont recueilli des signatures dans les universités du pays et dans diverses écoles secondaires également. Les pétitionnaires demandent au gouvernement du Canada de jouer un rôle de chef de file au Darfour en élargissant le mandat de l'UA, en renforçant l'appui international à l'Union africaine, en faisant comparaître les criminels devant la Cour pénale internationale et en envisageant d'intervenir avec des États qui partagent la perspective canadienne.
* * *
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de présenter une pétition au nom d'un certain nombre de Canadiens, y compris des pétitionnaires de ma circonscription, Mississauga-Sud, au sujet du mariage. Les pétitionnaires souhaitent attirer l'attention de la Chambre sur le fait que la majorité des Canadiens estiment que les décisions relatives aux aspects fondamentaux de la politique sociale devraient être prises par les députés et non par des juges non élus.
Les pétitionnaires soulignent également que le Parlement doit veiller à ce que la définition du mariage reflète les souhaits des Canadiens. Ils exhortent donc le Parlement à avoir recours à toutes les mesures législatives et administratives possibles, ce qui inclut invoquer au besoin l'article 33 de la Charte, communément appelé disposition de dérogation, pour préserver et protéger la définition actuelle du mariage, soit l'union exclusive d'un homme et d'une femme.
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Questions au Feuilleton
L'hon. Dominic LeBlanc (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.
Le vice-président: D'accord?
Des voix: D'accord.
Initiatives ministérielles
[Les crédits]
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[Traduction]
Les crédits
Motion de l'opposition--La Commission Gomery
M. Gary Lunn (Saanich—Gulf Islands, PCC) propose:
Que la Chambre demande au gouvernement de modifier l’article k) du mandat de la Commission Gomery pour que le commissaire puisse donner des noms et assigner des responsabilités. |
--Monsieur le Président, je vais partager mon temps de parole avec le député de Battlefords—Lloydminster.
Je suis heureux d'intervenir aujourd'hui pour parler de la première motion de l'opposition présentée par le Parti conservateur depuis plus de deux mois. Nous aurions aimé pouvoir le faire plus tôt, mais je peux garantir à la Chambre que nous sommes ici pour travailler, pour veiller à ce que la démocratie soit respectée et pour poursuivre les travaux de la Chambre.
Je voudrais lire aux députés la motion qui modifierait l'alinéa k) du mandat de la Commission Gomery et qui dit ceci:
Que la Chambre demande au gouvernement de modifier l'article k) du mandat de la Commission Gomery pour que le commissaire puisse donner des noms et assigner des responsabilités. |
Pour la gouverne de ceux qui ne connaîtraient pas cette disposition du mandat de la Commission Gomery, le libellé actuel dit:
[...]que le commissaire reçoive instruction d'exercer ses fonctions en évitant de formuler toute conclusion ou recommandation à l'égard de la responsabilité civile ou criminelle de personnes ou d'organisations et de veiller à ce que l'enquête dont il est chargé ne compromette aucune autre enquête ou poursuite en matière criminelle en cours; |
À cause du libellé actuel, on ne sait pas au juste si le juge Gomery a la capacité de désigner des personnes ou des organisations comme responsables du scandale des commandites.
Nous voulons faire disparaître toute ambiguïté. Nous souhaitons nous assurer qu'il puisse remettre un rapport sur les lacunes du processus, mais surtout recommander des modifications et veiller également à ce que certaines personnes puissent, au besoin, faire l'objet d'enquêtes plus poussées. Il est essentiel qu'à la fin des travaux de la Commission Gomery, certaines personnes soient obligées de rendre des comptes et subissent les conséquences de leurs actes.
On s'inquiète de voir qu'aux termes du mandat actuel, le commissaire doit exercer ses fonctions « en évitant de formuler toute conclusion ou recommandation ». C'est ce qui nous préoccupe. Nous voulons que ce soit très clair. Je sais que le gouvernement répond à cela qu'aux termes du libellé actuel, le juge a la capacité d'assigner des responsabilités et de donner des noms. Si c'est le cas, les ministériels devraient souscrire à cette motion, car elle ne fait que confirmer cette réalité.
À pratiquement tous les égards, étant donné les sommes en jeu et toute la corruption entourant le scandale des commandites, et compte tenu de l'implication de personnes de premier plan, le scandale des commandites est le pire de notre histoire. Nous devons aux Canadiens d'utiliser tous les outils à notre disposition pour faire toute la lumière sur ce qui s'est produit et punir les responsables.
Les députés d'en face aiment bien répéter qu'on devrait laisser la commission faire son travail. Je suis d'accord. Sauf que les limites imposées par l'alinéa k) du mandat actuel de la Commission Gomery risquent d'empêcher le juge Gomery de mener à bien sa tâche. Le gouvernement pourrait, j'en conviens, soutenir que c'est déjà prévu dans le mandat. Si le gouvernement le croit vraiment, il appuiera volontiers notre motion, laquelle élimine toute ambiguïté.
Ce sont les libéraux qui ont mis sur pied un centre de crise au BCP, en y engloutissant 1 million de dollars appartenant aux contribuables, pour essayer de limiter les dégâts causés par les témoignages entendus quotidiennement à la Commission Gomery. Quand on voit comment le gouvernement se comporte et que celui-ci se dote d'un centre de crise pour se sortir de ce mauvais pas sans perdre trop de plumes et ce, aux frais des contribuables, force est de s'interroger sur ses motifs et sur ses intentions. Un parti politique met sur pied un centre de crise, pas un gouvernement.
Imaginez un peu, le premier ministre actuel se servant d'un million de dollars des contribuables pour mettre sur pied, quelques jours après le début des travaux de la commission, un centre de crise, un centre de contrôle des dommages, pour le Parti libéral. Cela va de mal en pis. Le libéraux sont incorrigibles. Il est tout à fait inacceptable que des partis politiques se servent de l'argent des contribuables pour présenter une situation sous un jour qui leur est favorable. C'est pourtant ce que font les libéraux en ce moment. Le parti d'en face n'a pas besoin de brosse d'acier. Ses députés ont besoin d'admettre enfin la vérité et de s'y tenir.
Voyons un peu ce qui s'est produit au cours des 10 dernières années. Nous avons maintenant des renseignements sur l'utilisation qui a été faite du programme, mais il ne s'est jamais rien produit, semble-t-il. Examinons certains faits.
En 1995, une note de service de Travaux publics a signalé que le programme comportait de graves lacunes, mais rien n'a été fait. En 1999, le Secrétariat du Conseil du Trésor a signalé que Groupaction exigeait des sommes exorbitantes pour du travail jamais accompli, mais le gouvernement n'a pas donné suite à cet avertissement.
En 2002, une vérification interne à Travaux publics a révélé que le Programme de commandites était mal aiguillé. Aucune mesure n'a été prise. Pire encore, on a créé, pour administrer le programme, une nouvelle agence disposant d'encore moins de mécanismes de surveillance financière.
En 2002, le premier ministre, qui était alors ministre des Finances, a reçu du président national (politiques) du Parti libéral une lettre faisant état de rumeurs persistantes et croissantes selon lesquelles des fonds du Programme de commandites étaient détournés à des fins sectaires.
Qu'a fait l'actuel premier ministre lorsqu'il a reçu cette lettre? Absolument rien. Nous n'avons vu rien d'autre que des retards de nature procédurière depuis que le scandale a été mis au jour en 2002.
Le gouvernement a d'abord déclaré que la vérificatrice générale réglerait le problème. Le ministre des Finances, qui était alors ministre des Travaux publics, a déclaré « pour ce qui concerne les problèmes de gestion, les questions d'optimisation des fonds dépensés, les questions de structure gouvernementale et les problèmes administratifs, les services de la vérificatrice générale demeurent la meilleure tribune qui soit. »
L'actuel ministre des Finances, qui était alors le ministre des Travaux publics, a dit que la vérificatrice générale examinerait la situation et réglerait les problèmes. Parallèlement à cela, des millions de dollars des contribuables ont toutefois été canalisés vers le Parti libéral pendant maintes années.
Il convient de souligner que le ministre a fait ces déclarations pour justifier son opposition à la tenue d'une enquête publique. Les libéraux refusaient à l'époque pareille enquête. Lorsque le rapport de la vérificatrice générale a été prêt en novembre 2003, a-t-il été déposé? Non. Que s'est-il passé? C'est le gouvernement qui a prorogé le Parlement, occasionnant ainsi de nouveaux délais. Que faisaient les libéraux? Ils essayaient de gagner du temps.
En février 2004, le rapport a été rendu public, mais les libéraux ont alors ordonné la tenue d'une enquête publique. En prenant cette décision, ils ont fait ce que l'opposition réclamait depuis plus de deux ans.
Cependant, les libéraux n'avaient pas fini de recourir à des moyens dilatoires. Ils avaient encore quelques tours dans leur sac. Premièrement, ils se sont servi de leur majorité pour clore les travaux du Comité des comptes publics avant que des témoins clés n'aient témoigné. Ils avaient déjà fait comparaître certains témoins, mais ils ont arrêté les travaux du comité avant que tous les témoins clés ne comparaissent. Il est important de souligner qu'il ne s'agissait pas d'un scandale gouvernemental mais bien d'un scandale au sein du Parti libéral. Par conséquent, il est évident qu'ils savaient quels témoins pouvaient leur nuire.
Aujourd'hui, on voit encore une préoccupation au sujet de l'alinéa k) du mandat de la commission d'enquête. Il importe de noter que l'alinéa k), dont j'ai fait mention plus tôt, dit:
que le commissaire reçoive instruction d'exercer ses fonctions en évitant de formuler toute conclusion ou recommandation à l'égard de la responsabilité civile ou criminelle de personnes ou d'organisations. [...] |
J'ai entendu le ministre des Travaux publics dire lors d'une conférence de presse que le commissaire n'a pas le pouvoir de donner des noms et d'imputer la responsabilité à qui que ce soit. Si c'est ce que croient les libéraux, ils devraient alors tout simplement appuyer la motion. Nous ne leur demandons pas de contrevenir aux récentes décisions de la Cour suprême du Canada concernant les enquêtes et la Loi sur les enquêtes. Nous voulons tout simplement éliminer toute ambigüité.
Les députés ont entendu parler à maintes et maintes reprises de l'implication du Parti libéral dans ce dossier. La Chambre a le devoir de veiller à ce que le public ait des réponses, à ce que la lumière soit faite sur cette affaire et à ce que les gens soient tenus de rendre des comptes.
Cette affaire révèle l'existence d'une corruption incroyablement profonde. Les contribuables se sont fait voler des millions de dollars. Plus de la moitié de l'argent a servi à acheter des votes, l'autre moitié a servi à payer les agences de publicité qui favorisaient les libéraux et des millions de dollars de plus ont été redirigés vers le Parti libéral. C'est la pire corruption de toute l'histoire politique canadienne; plusieurs millions de dollars ont été redirigés vers le Parti libéral. Nous avons entendu tous les témoins, l'un après l'autre, impliquer...
M. Paul Szabo: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Il serait peut-être utile à la Chambre de régler cette question dès le début du débat. Laisser entendre que toutes ces activités que vient d'énumérer le député, soit d'acheter des votes et de détourner des millions de dollars, sont le fait du gouvernement... Comme vous le savez, monsieur le Président, tous ces gestes sont illégaux, mais aucun tribunal n'a établi qu'ils ont été commis.
Monsieur le Président, à mon avis, il est inapproprié de faire de telles allégations. La présidence doit décider si elle acceptera ou non qu'on affirme catégoriquement à la Chambre qu'il y a corruption. Il faut préciser qu'il s'agit d'allégations ou d'affirmations faites dans le cadre d'un témoignage. Ces affirmations ne respectent pas la règle de droit suivant laquelle une personne est innocente jusqu'à preuve du contraire.
Le vice-président: Je remercie le député de Mississauga-Sud. Au cours du débat, les députés devront veiller, cela va de soi, à ne pas attribuer à d'autres députés des actes ou des motifs inappropriés ou illégaux. Cependant, dans un débat comme celui-ci, nous allons probablement tenir des discussions au sujet des partis politiques ainsi que de leur participation ou de leur absence de participation ou encore de leur innocence et de leur culpabilité, et cela au sujet de tous les partis représentés à la Chambre. Dans la circonstance présente, nous allons autoriser de telles affirmations.
Toutefois, nous ne devrions pas et nous n'allons pas accepter que des accusations soient portées contre des députés particuliers. Je n'en ai pas entendu jusqu'à présent. J'ai entendu des accusations portées contre des partis, entre autres, mais pas contre des députés. À mon avis, nous devons accepter cela.
M. Paul Szabo: Monsieur le Président, la présidence a constamment statué que la seule chose qu'elle jugerait irrecevable, à cet égard, c'est qu'un député particulier soit accusé d'avoir commis un acte criminel. Que peut-on imaginer de pire que d'accuser tous les députés libéraux d'être corrompus et d'avoir commis des actes illégaux?
Le vice-président: Je pensais avoir été clair, mais je vais répéter. Je n'ai entendu aucune accusation portée contre des députés libéraux ni contre d'autres députés. Nous sommes tous députés. J'ai entendu porter des accusations contre un parti politique. Nous allons autoriser ce genre de propos parce que, selon moi, ils feront partie de nos débats d'aujourd'hui.
Encore une fois, ce ne sont pas des accusations suivant lesquelles des députés se seraient livrés à des activités illégales ou inappropriées. Personne n'a formulé de telles accusations et nous n'en autoriserons pas; par contre, nous autoriserons que l'on discute des activités des partis politiques, et cela vaudra pour les deux côtés de la Chambre tout au long de la journée.
Je prie les députés de veiller à bien distinguer entre les activités des partis politiques et celles des députés.
M. Gary Lunn: Monsieur le Président, depuis des mois, la commission entend des témoignages. Il faut reconnaître qu'il y a des témoignages contradictoires, mais quelle que soit la version qu'on choisisse, il n'y a rien de bon là dedans. Pas un seul témoin n'a eu quelque chose de bon à dire au sujet du Parti libéral.
Qui plus est, les documents présentés en preuve sont impossibles à réfuter. Les vérificateurs judiciaires ont retracé des écrits confirmant les propos de Jean Brault, le président de Groupaction, qui a affirmé que des enveloppes et des mallettes remplies d'argent avaient été remises au Parti libéral .
Tous les députés se doivent d'appuyer cette motion, de manière à établir clairement que le commissaire peut donner des noms et assigner des responsabilités.
Cette commission ne ressemble en rien aux autres commissions que nous avons connues. Les autres, qu'il s'agisse de la Commission Krever ou de la Commission d'enquête sur la Somalie, étaient associées à la politique publique. C'est la première fois qu'une commission fait enquête sur des millions de dollars empochés par le Parti libéral au pouvoir. Il est donc essentiel que des noms soient donnés et des responsabilités assignées.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je saurais gré au député de clarifier ses propos pour tous ceux qui écoutent les débats. Selon moi, l'expression « donner des noms et assigner des responsabilités », qui signifie aussi désigner des coupables d'actes criminels ou de délits, est lourde de sens. Les mots ont été choisis avec soin et je tiens à m'assurer que tous en comprennent bien le sens.
Si le député veut laisser entendre que le fait de donner des noms et d'assigner des responsabilités revient à désigner des coupables et à donner leurs noms, il devrait peut-être présenter des excuses à la Chambre, car les personnes trouvées coupables d'actes criminels ou de délits ont droit à l'application régulière de la loi et peuvent appeler des témoins à leur défense. Ces personnes doivent d'abord être accusées dans le cadre du processus établi. Cela n'a rien à voir avec le fait d'assigner des responsabilités. On ne saurait désigner des coupables d'actes criminels dans le cadre de cette enquête.
J'invite le député à expliquer dans les termes les plus clairs possibles si, pour lui, assigner des responsabilités c'est aussi désigner des coupables.
M. Gary Lunn: Monsieur le Président, il est absolument ridicule de dire une telle chose. Seuls les tribunaux peuvent établir la culpabilité à l'égard d'une infraction criminelle et cette culpabilité doit être prouvée hors de tout doute raisonnable. Ce n'est pas ce que nous proposons. Certaines personnes font face à des accusations criminelles, comme nous le savons, et il pourrait y en avoir davantage.
Ce que nous préconisons, c'est que le juge Gomery puisse donner des noms et assigner des responsabilités. Si des poursuites en découlent, qu'il en soit ainsi, mais c'est ce qui doit se produire. Les gens doivent être tenus responsables, dans le cadre d'une poursuite civile en vertu de la prépondérance des probabilités ou dans le cadre d'une poursuite criminelle avec preuve hors de tout doute raisonnable.
Nous voulons faire ressortir le fait que les représentants élus doivent respecter une norme beaucoup plus élevée. Les députés ont un devoir de diligence. À mon avis, d'après les nombreux témoignages et la preuve présentés au juge Gomery, cette norme n'a pas été respectée. J'estime que le juge Gomery doit impérativement donner des noms et assigner des responsabilités. Nous ne parlons pas de la responsabilité pénale. Cela ferait l'objet d'une poursuite distincte devant un tribunal. La même chose s'applique aux poursuites civiles.
La preuve que nous avons entendue n'a pas été réfutée. Personne ne nie que des millions de dollars ont été versés au Parti libéral. Je crois que des représentants élus ont été impliqués et bien des éléments de la preuve le suggèrent.
À mon avis, notre devoir de diligence est plus élevé puisque nous jouissons d'une plus grande confiance du public. Cela n'a pas été respecté et c'est ce dont nous parlons.
Nous demandons au gouvernement de modifier le mandat de la commission selon la motion suivante:
Que la Chambre demande au gouvernement de modifier l’article k) du mandat de la Commission Gomery pour que le commissaire puisse donner des noms et assigner des responsabilités. |
Des comptes doivent être rendus. Oui aux accusations criminelles hors de tout doute raisonnable et oui, des poursuites au civil fondées sur la prépondérance des probabilités, mais je ferai valoir que les élus ont un devoir de diligence plus élevé et que ce dernier n'a pas été respecté. Le juge Gomery a entendu de très nombreux témoignages. Oui, ces derniers comportent des contradictions, mais peu importe la version que nous choisissons, les témoignages sont uniformément déplorables. Les Canadiens ont parfaitement le droit d'être outrés et ils veulent aller au fond des choses.
M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster, PCC): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole en cette première journée de l'opposition que le gouvernement nous accorde depuis qu'il a commencé à user de manoeuvres dilatoires. Nous avons aujourd'hui une première occasion de nous remettre dans le bain. C'est un grand jour pour les Canadiens.
Pour appuyer l'excellent travail du juge Gomery, nous modifierons l'alinéa k) de son mandat. À l'heure actuelle, le juge Gomery est menotté en ce qui a trait à la production de son rapport final. Je sais que nous avons touché un point sensible, car j'ai vu ce matin les ministres de la Justice et des Travaux publics à la télévision expliquer à quel point cela nuirait aux travaux du juge Gomery, à quel point cela serait injuste sur le plan de la procédure et pour les témoins. Ils ont dit qu'il n'était pas question d'un tribunal, mais bien d'une commission d'enquête.
Or, si tel est le cas, pourquoi sont-ils si préoccupés par le fait que le juge Gomery puisse mentionner des noms? Tous les témoins ont comparu, sous serment, devant le juge Gomery. Il ne s'agit plus d'allégations. Il y a clairement des désaccords, puisqu'un groupe de libéraux pointe un autre groupe de libéraux du doigt, mais, en fin de compte, ce sont tous des libéraux. Cette crise concerne le Parti libéral, non l'ensemble du Canada. Ce ne devrait même pas être une crise gouvernementale. Les libéraux ont dépensé un autre million de dollars de fonds publics pour mettre sur pied un centre de crise afin de contrer les effets négatifs des rapports médiatiques sur la Commission Gomery.
À titre de porte-parole en matière de travaux publics, j'ai pris la question à coeur lorsque les révélations ont commencé il y a quelques années. Nous avons été inondés d'enveloppes brunes anonymes contenant des affirmations, mais manquant de preuves. Or, au cours des six ou huit derniers mois, les travaux de la Commission Gomery nous ont permis d'aller d'étonnement en étonnement. Les noms y sont. Les sommes d'argent y sont. Il est étonnant de voir jusqu'à quel point les enveloppes brunes disaient la vérité.
Nous ne pouvions utiliser cette information parce que n'avions pas les preuves nécessaires. Mais nous voyons les mêmes noms et les mêmes sommes d'argent apparaître dans les témoignages reçus par le juge Gomery. Manifestement, cette enquête donne des résultats tout à fait dignes de foi. Nous avions commencé à la réclamer des mois avant que le gouvernement finisse par l'ordonner.
On attribue au premier ministre un certain mérite pour avoir ordonné la tenue de l'enquête du juge Gomery, mais examinons la chronologie des événements qui ont précédé la création de la commission d'enquête. En novembre 2003, la vérificatrice générale fait une critique cinglante du Programme de commandites. Elle affirme que plus de 100 millions de dollars ont été dépensés sans que les contribuables n'obtiennent quoi que ce soit en retour. Mais personne n'a pu voir ce rapport.
Le gouvernement reçoit le rapport en novembre. Il proroge la Chambre en raison d'une petite course à la direction qui se passe là-bas. Mais en fait, la course avait commencé 10 années plus tôt et nous assistions au sprint final en novembre. Toujours est-il que le rapport n'est pas publié avant février, les libéraux s'étant employés pendant trois mois à le nettoyer et à l'épurer. Ils en publient leur propre version. Ce n'est qu'au printemps, peu de temps avant les élections, qu'on demande au juge Gomery de tenir une enquête.
La Commission Gomery n'a pas commencé ses travaux. Elle a en fait été mise en suspens jusqu'en septembre. Le juge Gomery devait prendre ses vacances. De plus, il travaillait alors sur quelques procédures juridiques qu'il devait d'abord mener à terme. Essentiellement, les libéraux ont gagné du temps. Ils ont repris le pouvoir avec un gouvernement minoritaire. De leur côté, les Canadiens ont pris ce scandale à coeur. Les sondages, à l'époque, montraient que 66 p. 100 des Canadiens pensaient que les politiciens étaient malhonnêtes.
Ce scandale nous éclabousse tous et le député de Saanich—Gulf Islands, qui vient de prendre la parole, a évoqué la confiance du public. C'est la raison pour laquelle il est tellement important de laisser le juge Gomery citer des noms, retracer l'argent et, en fait, préparer un rapport à cette fin. Sa démarche ne risque cependant pas d'aboutir, compte tenu de la façon dont il est menotté en vertu de l'alinéa k) et dont les libéraux ont organisé le tout.
Les ministre des Travaux publics est intervenu, un jour, pendant la période de questions. Il a affirmé que cet alinéa k) est la norme pour toutes les enquêtes. C'est peut-être le cas d'habitude, mais certainement pas lorsque l'argent des contribuables a fait l'objet de tels abus et d'utilisations aussi inappropriées. L'alinéa k) devient alors un obstacle qui nous empêchera d'aller au fond des choses.
Comme le juge Gomery a maintenant entendu pratiquement tous ses témoins et qu'il commence à penser à la rédaction de son rapport, nous avons le devoir de lui retirer ces menottes, de lui donner la possibilité d'aller au fond des choses et, en fait, de citer quelques noms et de les mentionner dans son rapport. Il n'établira pas pour autant la culpabilité des personnes visées. Il dira que ses allégations sont fondées sur le témoignage de ces personnes et sur ce qui aura été dit à leur sujet. Il doit être en mesure de procéder de cette façon.
Cette démarche ouvre la voie aux enquêtes criminelles qui feront suite au rapport Gomery. Les témoins auront à nouveau l'occasion de faire valoir leur point de vue. Leurs témoignages sous serment pourront être utilisés à nouveau. Le juge Gomery a pris beaucoup de précautions en ce qui concerne les ordonnances de non-publication relatives à plusieurs des fonctionnaires faisant l'objet d'accusations criminelles, mais dans le cas des bureaucrates, il y a toujours des dirigeants politiques derrière eux.
Il y a là un problème. Ou bien le ministre en poste — et les Travaux publics ont eu plusieurs titulaires — n'avait pas la moindre idée de ce que le ministère faisait, ce qui est de l'incompétence, ou bien il était impliqué au niveau politique, et nous avons là un tout nouveau problème.
Ces gens-là ont pris la question assez au sérieux pour rappeler Alfonso Gagliano du Danemark, où on l'avait envoyé en vertu du programme de protection des témoins. Toutefois, à son retour au Canada, il a été bavard comme une pie lorsqu'il a comparu devant la Commission Gomery.
Ces gens ont défilé devant le Comité des comptes publics, dont le premier ministre actuel a interrompu les travaux en disant que le juge Gomery prendrait le relais, alors que le comité faisait un excellent travail. J'ai assisté à certaines de ses séances. Des types comme Chuck Guité ont comparu devant le comité. Il n'avait rien vu ni entendu, et il ne savait rien. Je me demande vraiment pourquoi nous versions un salaire à ce type-là. S'il n'a rien fait et rien vu, s'il ne savait rien, pourquoi est-ce qu'il touchait un salaire?
Il se trouve que, à la Commission Gomery, pendant le contre-interrogatoire et le témoignage, nous avons appris que, dans cette affaire, ce gars-là était la cheville ouvrière, ou l'une des chevilles ouvrières. Mais il ne travaillait pas seul. Aucun bureaucrate ne peut mettre la main sur 355 millions de dollars et les distribuer comme cela s'est fait. C'est tout simplement exclus.
Puis, on a vu des gens venir témoigner que leur entreprise avait versé un salaire en liquide à des travailleurs du Parti libéral. Ils les payaient comptant pour qu'ils fassent du travail pour le Parti libéral au Québec. Cela constitue un usage tout à fait inapproprié des fonds publics.
Il y a eu un petit problème en Saskatchewan, il y a un certain nombre d'années, lorsque Grant Devine était premier ministre. Cent quatre-vingt mille dollars du budget de communications du parti, pas des fonds publics, avaient été illégalement dépensés. C'est bien peu à côté des millions de dollars des commandites. Mais il reste que ce mini-scandale a signé l'arrêt de mort du gouvernement. Pis encore, ce parti n'existe même plus en Saskatchewan.
Cependant, ces gens-là ne cherchent qu'à esquiver les coups parce qu'ils s'inquiètent vivement de l'avenir du Parti libéral, et ils ont bien raison de s'inquiéter, car ce scandale les hantera durant et après les prochaines élections.
Au cours des travaux de la Commission Gomery, nous avons appris que les libéraux ont fait trois campagnes électorales avec de l'argent sale. Ils affirment que cela ne devrait avoir aucune conséquence et que le juge Gomery ne devrait pas avoir le droit de nommer des noms. Ils veulent taire le nom des coupables et les envoyer tous au Danemark. Combien d'ambassadeurs peut-on nommer? Et cela continue. Ces gens-là veulent l'enquête publique uniquement pour pouvoir dire aux médias qu'ils ont agi. Par ailleurs, ils ont constitué un centre de crise au coût de 1 million de dollars de fonds publics pour contrer les conséquences néfastes de cette affaire.
Je pense que la Commission Gomery n'aurait jamais vu le jour si les libéraux avaient obtenu la majorité des sièges à la Chambre. Je crois que le juge Gomery n'aurait pas travaillé longtemps. En fait, il n'aurait jamais commencé. Toutefois, le gouvernement étant minoritaire, les libéraux n'avaient d'autre choix que de créer cette commission. Ils commencent maintenant à subir les foudres de l'opinion publique. Leur popularité tombe en chute libre à mesure que la population prend conscience de l'ampleur et de la nature du scandale de l'argent sale.
Kroll Lindquist Avey, la firme américaine qui fait enquête, est celle-là même qui a démêlé le scandale d'Enron et qui a retrouvé l'argent de Saddam Hussein. Maintenant, elle enquête au Canada. C'est dire toute l'ampleur du problème. Les employés de la firme affirment que les obstacles dressés par le gouvernement les ont menés à certaines impasses au moment de la rédaction de leur rapport. Des accusations criminelles ont été portées contre quelques personnes. Le gouvernement poursuit certaines agences de publicité pour un montant total de 41 millions de dollars, affirmant que cet argent a été versé sans qu'aucun travail ne soit effectué.
Nous en avons parlé il y a quelques années. Qui ne se souvient pas des trois séries de photocopies réalisées pour 500 000 $? Trois pages ont été photocopiées trois fois moyennant 1,5 million de dollars. À l'époque, les libéraux soutenaient que du travail avait été effectué en contrepartie de cet argent. Ils se cachaient derrière cet argument. Si nous nous reportions au hansard, nous verrions que le gouvernement tentait de justifier ce qui s'est passé. Aujourd'hui, il clame que tout cela s'est produit en marge, que c'est le fait de quelques personnes malhonnêtes qui ont profité des largesses du Parti libéral.
Les députés peuvent-ils concevoir que quelqu'un profite du Parti libéral et utilise les deniers publics à mauvais escient? Il n'y a pas de liens politiques? C'est ce que les libéraux voudraient nous faire croire.
Si c'est le cas, pourquoi avons-nous caché un ancien ministre des Travaux publics au Danemark? Pourquoi autant de personnes se sont-elles succédé au poste de ministre des Travaux publics? C'était un cadeau empoisonné que de se faire nommer à ce poste. Personne n'en voulait. Tout le monde sait de quel genre de cloaque il s'agissait.
Le juge Gomery doit disposer de tous les outils voulus lorsqu'il commencera à rédiger son rapport. Il doit être en mesure de citer des noms. Sans déclarer quiconque coupable, il devrait pouvoir citer des noms et les fournir à la GRC, pour qu'elle mène l'enquête appropriée.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je ne crois pas qu'il y ait un député ici, ou des gens parmi les téléspectateurs, qui se demandent si le juge Gomery va donner des noms. De toute évidence, après des travaux publics dont les journaux parlent depuis des mois, des noms vont être mentionnés dans le rapport. Je crois que ce que le député a en tête, ce sont des déclarations de culpabilité.
Je suis d'avis que le député va constater que le rapport Gomery va effectivement identifier les personnes qui ont fait telle ou telle allégation, et les personnes tenues de rendre compte de certains actes et activités, mais ne se prononcera pas sur la culpabilité ou l'innocence des personnes, car il faudrait pour cela assurer l'application régulière de la loi.
Le député a-t-il vérifié auprès d'un conseiller juridique pour établir si un changement du mandat du juge Gomery pourrait inciter certaines personnes concernées par cette enquête à faire valoir que, puisque le mandat a changé, il faut tout refaire? Ces particuliers réclameront peut-être une occasion de se défendre, parce que les choses se passeraient différemment maintenant de ce qu'on leur a dit au départ. Le député a-t-il vérifié cela? Au fond, est-il absolument sûr que cela ne compromettra pas l'enquête Gomery?
M. Gerry Ritz: Monsieur le Président, nos collègues d'en face ne peuvent jouer sur les deux tableaux. Ils prétendent que puisqu'il ne s'agit pas d'un tribunal, la Commission n'a pas force exécutoire et nous ne pouvons donner de noms. Puis, ils se cachent derrière le fait qu'il ne s'agit que d'une commission d'enquête et que nous ne pouvons donc pas donner de noms. Le député d'en face demande si cela pourrait entraver les travaux du juge Gomery. Bien sûr que non. Tout figurera dans son rapport. Il ne déterminera pas les fautes, mais il pourra donner des noms. Permettez-moi de relire l'alinéa k):
que le commissaire reçoive instruction d'exercer ses fonctions en évitant de formuler toute conclusion ou recommandation à l'égard de la responsabilité civile ou criminelle de personnes ou d'organisations et de veiller à ce que l'enquête dont il est chargé ne compromette aucune autre enquête ou poursuite en matière criminelle en cours; |
Tout ce que nous disons, c'est que nous devrions retirer l'expression « en évitant de formuler toute conclusion ». Le juge Gomery doit être en mesure de suivre la piste de l'argent comme tout le monde. Il doit pouvoir lier les éléments entre eux. Dans notre pays, nous sommes tous innocents jusqu'à preuve du contraire. Personne ne sera envoyé en prison dès que le juge Gomery déposera son rapport, mais ce rapport servira de base.
Il a fait le travail de base. La GRC n'aura pas à réinventer la roue. Il pourra poursuivre à partir de là. Cela donnera en fait plus de poids au rapport du juge Gomery et ne l'affaiblira certainement pas. Les députés d'en face aimeraient beaucoup pouvoir affirmer que cela risque d'entraver les travaux du juge Gomery.
Le ministre des Travaux publics a annoncé aujourd'hui qu'il déposerait sa propre motion. Si c'est le cas, pourquoi cela n'a-t-il pas été fait il y a six mois? Pourquoi avoir inclus l'alinéa k)? Pourquoi avons-nous compromis les résultats de la Commission Gomery en menottant le juge Gomery?
AFFAIRES COURANTES
[Affaires courantes]
* * *
[Traduction]
Les comités de la Chambre
Affaires autochtones et développement du Grand Nord
L'hon. Dominic LeBlanc (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Des discussions ont eu lieu entre tous les partis au sujet du débat prévu plus tard aujourd'hui sur une motion du député de Nunavut concernant l'adoption du troisième rapport du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord. Je crois que vous constaterez qu'il y a consentement unanime à l'égard de la motion qui suit. Je propose donc:
Que le débat d'aujourd'hui sur la motion de la députée de Nunavut et sur l'amendement de la députée de Kitchener-Centre portant adoption du troisième rapport du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord soit réputé avoir eu lieu, toute question nécessaire pour disposer de la motion soit réputée mise aux voix et le vote par appel nominal soit réputé demandé et différé jusqu'au mercredi 8 juin, à la fin de la période prévue pour les Ordres émanant du gouvernement. |
Le vice-président: La Chambre a entendu la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
Initiatives ministérielles
[Les crédits]
* * *
[Traduction]
Les crédits
Motion de l'opposition — La Commission Gomery
La Chambre reprend l'étude de la motion.
M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, je reconnais que l'opposition officielle peut présenter toute motion qu'elle souhaite pour un débat. Pendant la semaine passée dans ma circonscription, beaucoup de gens m'ont parlé d'autre chose que de la Commission Gomery. Ils m'ont parlé des difficultés que vivent les personnes âgées, les agriculteurs et les travailleurs de l'industrie forestière. Ils m'ont parlé des pêcheurs, des mineurs et des autres travailleurs qui ne peuvent pas déduire les dépenses qu'ils encourent lorsqu'ils doivent aller travailler ailleurs au pays.
Je respecte ce que font les députés de l'opposition, et ils ont raison de le faire, mais, au bout du compte, il reste que les libéraux seront jugés par la Commission Gomery. Leur jour viendra.
Compte tenu de toutes les difficultés auxquelles les Canadiens sont confrontés, qu'ils soient agriculteurs, étudiants ou n'importe quoi d'autre ou qu'ils soient jeunes ou vieux, je me demande pourquoi les députés de l'opposition officielle ont jugé que le sujet qu'ils nous proposent aujourd'hui était le plus important. La commission d'enquête n'a pas terminé ses travaux et il semble que tous les autres dossiers sont mis de côté. J'aimerais que le député commente ce point de vue.
M. Gerry Ritz: Monsieur le Président, le Nouveau Parti démocratique a également une journée de l'opposition qui s'en vient et je suis persuadé que les députés néo-démocrates vont aborder le fatras de questions dont parle le député.
Il y a certainement d'autres questions à soulever. Cela ne fait aucun doute. Toutefois, cette affaire concerne essentiellement la confiance du public. Les libéraux ne considèrent plus la Chambre comme pertinente et tant que nous n'irons pas au fond des choses, tant que nous ne mettrons pas de l'ordre là dedans et tant que nous ne rétablirons pas les bases de cette confiance, rien ne fonctionnera.
Permettez-moi de parler brièvement de la liste de souhaits du Nouveau Parti démocratique. Parlons un peu de ce budget magique rempli de cadeaux que les néo-démocrates ont greffé à la proposition initiale. Ce budget ne fait aucune mention des problèmes de financement liés à la formule de péréquation. Contrairement à l'Accord atlantique, cette question concerne toutes les provinces, d'un océan à l'autre, particulièrement la Saskatchewan, d'où je viens. Il ne parle absolument pas de l'agriculture dans l'ensemble du pays. Le Nouveau Parti démocratique n'a rien ajouté dans ce budget au chapitre de l'agriculture. Je n'ai pas de leçon à recevoir de ce député pour ce qui est des priorités de la Chambre.
L'hon. Scott Brison (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir aujourd'hui au sujet de la motion d'opposition concernant la Commission Gomery.
Je dirai d'entrée de jeu que la Commission Gomery accomplit un travail très important. Je sais que le député d'en face vient de dire que le premier ministre méritait des félicitations pour avoir mis cette commission sur pied, et c'est vrai.
[Français]
Je suis fier que le premier ministre ait eu le courage de mettre sur pied la Commission Gomery et de lui donner toutes les ressources nécessaires pour établir la vérité.
[Traduction]
Décidément, il semble que les conservateurs cherchent maintenant à dénigrer le travail qu'accomplit le juge Gomery en tentant de mettre en doute le mandat très ferme et très important qui lui a été conféré.
La motion d'opposition donne à penser que, dans les derniers jours des témoignages, il faudrait modifier le mandat de la Commission Gomery pour qu'elle puisse donner des noms et désigner des responsables.
La Commission et le juge Gomery ont déjà le pouvoir de donner des noms et de désigner des responsables.
Il semble que la motion soit redondante ou mal intentionnée. Je suis tenté de penser qu'elle pourrait être mal intentionnée. Elle témoigne soit du mépris incessant des conservateurs à l'égard du système et du processus judiciaires, soit de leur désir de dénigrer le travail qu'accomplit le juge Gomery en prévision de la présentation d'un rapport qui sera équilibré et qui déterminera d'une façon équitable et raisonnable que notre premier ministre s'est conduit honorablement.
Le 19 février 2004, l'enquête sur les commandites a été instituée par décret, en vertu de la partie I de la Loi sur les enquêtes, et le juge John Gomery a été nommé commissaire. On lui a demandé de faire enquête et de faire rapport sur les questions soulevées, directement ou indirectement, par les chapitres 3 et 4 du Rapport de la vérificatrice générale du Canada de novembre 2003.
Le Parti conservateur comprend mal l'alinéa k), qui dit:
que le commissaire reçoive instruction d'exercer ses fonctions en évitant de formuler toute conclusion ou recommandation à l'égard de la responsabilité civile ou criminelle de personnes ou d'organisations et de veiller à ce que l'enquête dont il est chargé ne compromette aucune autre enquête ou poursuite en matière criminelle en cours; |
Examinons cela.
[Français]
Tout d'abord, l'article k) est déjà existant selon d'autres exemples d'enquête.
[Traduction]
On trouve le même libellé dans le mandat du juge O'Connor chargé d'enquêter dans l'affaire Arar. L'énoncé figure également au paragraphe 3 du mandat de la commission d'enquête sur les événements d'Ipperwash instituée par le gouvernement conservateur de l'Ontario, de même que dans le mandat de la commission mise sur pied par ce même gouvernement pour enquêter sur l'affaire Walkerton. L'énoncé figure aussi dans l'ordre de renvoi de l'enquête de Stonechild, créée par le gouvernement néo-démocrate en Saskatchewan.
L'alinéa k) correspond également à l'avis des tribunaux au sujet des enquêtes et du système de justice pénale. Par exemple, la Cour fédérale du Canada a déclaré, au sujet de la Commission d'enquête sur la Somalie, qu'une enquête publique n'est pas l'équivalent d'un procès au civil ou au criminel.
Dans l'affaire du procureur général contre la Commission d'enquête sur le système d'approvisionnement en sang, la Cour suprême a statué que plusieurs principes de base sont applicables aux enquêtes. Elle a déclaré ce qui suit:
La commission d'enquête ne constitue pas une cour de justice ni un tribunal, et n'est aucunement habilitée à déterminer la responsabilité légale [...] Le commissaire devrait par conséquent s'efforcer de ne pas exprimer ses conclusions selon le libellé précis de la culpabilité criminelle ou de la responsabilité civile. |
Là encore, les conservateurs ne semblent pas comprendre ou respecter le processus et l'appareil judiciaires.
Il existe une différence évidente entre les enquêtes et les poursuites au criminel. Mais soyons clairs: le juge Gomery peut nommer des personnes et tirer des conclusions quant à la responsabilité ou à l'inconduite d'une personne ou d'une organisation.
Je rappelle ce que déclarait le juge Gomery lui-même dans l'introduction de son enquête, et je cite:
Selon l'art. 13 de la Loi sur les enquêtes, sur lequel je reviendrai dans un instant, j'aurai le droit de tirer des conclusions au sujet des fautes éventuellement commises et de leurs auteurs. |
Plus loin, le juge Gomery précise comment il établira la responsabilité et déterminera dans quelle mesure des personnes ont omis de s'acquitter de leurs responsabilités. Je cite encore une fois le juge Gomery:
[...] la question de savoir si les activités en question ont été influencées par des interventions politiques et, dans l'affirmative, par qui, dans quel but et avec quelles conséquences [...] la question de savoir si une personne ou une organisation du gouvernement du Canada a obtenu des avantages financiers, politiques ou autres grâce à ces activités et, dans l'affirmative, dans quel but et avec quelles conséquences; |
Il est curieux que le juge Gomery lui-même se croit autorisé, en vertu de son mandat, à dire expressément qu'il a le droit de nommer des personnes et d'imputer une responsabilité, et qu'il entend exercer ce droit. Cela satisfait le juge Gomery, mais apparemment pas les conservateurs.
Permettez-moi de rappeler ce que disait la Cour suprême dans l'affaire Krever:
Le commissaire a le pouvoir de tirer toutes les conclusions de fait pertinentes qui sont nécessaires pour expliquer ou appuyer les recommandations, même si ces conclusions peuvent nuire à la réputation de certaines personnes. De plus, le commissaire peut conclure à l'existence d'une faute sur la foi des conclusions de fait [...] |
[Français]
Les enquêtes sont un outil pour nous aider à trouver la vérité sur les agissements et la mauvaise conduite de l'administration du gouvernement.
[Traduction]
Il y a une autre raison pour laquelle une distinction doit être établie entre un procès criminel et une enquête publique. Les personnes ne peuvent participer librement, ouvertement et honnêtement à une enquête publique si elles craignent qu'au terme de l'enquête elle-même elles seront tenues criminellement responsables et risqueront de faire l'objet de poursuites au criminel.
L'alinéa k) vise simplement à protéger les personnes qui témoignent dans le cadre d'une enquête publique contre ce genre d'auto-incrimination. Il s'agit d'un droit garanti par la Charte des droits et libertés.
Je pense que c'est là un exemple de malentendu ou de mépris relativement à l'indépendance de la magistrature, à l'appareil judiciaire et à la Charte des droits et libertés.
N'oublions pas qu'il s'agit du parti dont un représentant, le député d'Abbotsford, a dit l'an dernier: « Au diable les tribunaux. Il existe de graves lacunes dans la Charte des droits et libertés ». Tout parti qui souhaite diriger les destinées de notre pays devrait au moins comprendre les lois du pays.
Le point à retenir est que, de par leur nature, les enquêtes publiques ne visent pas à remplacer les systèmes de justice pénale et civile, ni à avoir préséance sur ceux-ci. Encore une fois, les enquêtes publiques ne peuvent imputer la responsabilité d'un acte criminel à une personne, ni lui attribuer une responsabilité civile. De toute façon, des processus parallèles sont déjà en place, précisément à cette fin.
Des enquêtes criminelles sont en cours. Des accusations ont été portées contre plusieurs personnes qui attendent maintenant leur procès. Dix-neuf accusations ont été portées contre Paul Coffin, six contre Jean Brault et Chuck Guité, et une contre Jacques Paradis. En fait, je pense que, plus tôt aujourd'hui, Paul Coffin a plaidé coupable. Nous ne voulons pas gêner ces procédures au criminel et il faut absolument éviter de le faire.
Le député de Nova-Centre, qui a déjà été procureur de la Couronne, doit savoir à quel point il serait contrariant pour un procureur de la Couronne de voir sa cause compromise par une commission d'enquête qui essaierait d'imputer une responsabilité criminelle ou civile.
En tout cas, il comprenait ce principe il y a quelques mois. En effet, l'an dernier, le député de Nova-Centre a dit ce qui suit au Toronto Star, au sujet du mandat de la Commission Gomery:
Le mandat est certainement large. On ne peut pas nier que, d'après les premières indications, il permettra aux responsables de faire ce qu'ils ont à faire. |
Le député de Nova-Centre avait raison à ce moment-là, et c'est la raison pour laquelle le Parti conservateur a tort aujourd'hui.
De surcroît, le 11 mars, notre gouvernement a intenté une action civile contre 19 entreprises et particuliers devant la Cour supérieure du Québec dans le but de recouvrer 41 millions de dollars. Comme nous le disons depuis le début, cette action peut être modifiée afin de tenir compte de nouvelles allégations et de nouveaux défendeurs si de nouvelles preuves sont mises en lumière par la commission d'enquête.
Nous étudions les rapports de vérification comptable judiciaire de Kroll Lindquist. Non seulement ils confirment la validité de notre réclamation contre ces entreprises et particuliers, mais ils nous donnent aussi de fortes raisons d'envisager de modifier la demande introductive d'instance dans un proche avenir afin d'augmenter les montants réclamés.
[Français]
Il y a une autre raison importante pour laquelle on ne doit pas changer le mandat de la Commission Gomery, une raison qui touche l'équité et la justice.
[Traduction]
Si on change soudainement les règles, si on modifie le mandat d'une enquête judiciaire indépendante, cela signifie qu'il faut tout recommencer depuis le début et reprendre toutes les audiences. Après tout, les témoins ont déposé devant la Commission Gomery sous le régime de règles précises qui les mettent à l'abri contre toute déclaration de responsabilité criminelle ou toute poursuite criminelle découlant de leur déposition.
En effet, le moindre changement au mandat permettrait à ces témoins qui ont comparu de bonne foi devant la Commission Gomery de dire que leurs témoignages sont nuls et non avenus parce que les règles ont changé vers la fin des auditions de témoins. C'est un fait, la commission d'enquête et le gouvernement s'exposeraient à des poursuites judiciaires légitimes par ces témoins qui, de bonne foi, ont comparu devant le juge Gomery conformément au mandat de la commission d'enquête.
Il est insensé d'envisager de redéfinir le mandat dans les dernières semaines de la Commission Gomery. En mettant en péril l'excellent travail réalisé par le juge Gomery, on retarderait la justice. Or, justice différée est justice refusée. On dépenserait aussi plus d'argent des contribuables qui, eux, font confiance au juge Gomery et ont confiance en son mandat.
Les Canadiens comprennent que le juge Gomery a le droit de désigner des personnes et de leur imputer des responsabilités. En fait, notre gouvernement lui reconnaît ce droit, l'encourage à l'exercer et s'attend à ce qu'il le fasse. Des poursuites au criminel et au civil ont été intentées afin de recouvrer les fonds tandis que le juge Gomery est habilité à constater la commission d'actes fautifs par certaines personnes. Mieux encore, il peut recommander des mesures afin qu'un comportement inacceptable semblable ne survienne plus.
L'objectif est d'établir les faits, mieux, de tirer des leçons et de formuler des recommandations pour empêcher qu'une situation aussi déplorable ne survienne plus dans l'avenir. Nous entendons mettre à profit les recommandations du juge Gomery et mettre en application les préceptes qu'il énoncera afin de consolider la gouvernance de notre pays et d'en faire profiter les contribuables pour des générations à venir.
J'aimerais citer Kent Roach, professeur de droit à l'Université de Toronto: « Les enquêtes publiques jouent un rôle important, car elles nous aident à cerner les facteurs sociaux, politiques, économiques et organisationnels qui expliquent en partie des comportements fautifs et à les modifier dans le but de prévenir ce genre de comportement. » C'est exactement de cela dont il s'agit. Le juge Gomery va nous indiquer comment empêcher que ce type d'activité se reproduise.
Cette tentative de modifier l'alinéa k) est redondante, frivole, voire simplement mal intentionnée. Il s'agit uniquement d'une tentative concertée, durant les derniers jours de la Commission d'enquête Gomery, de semer le doute au sujet des travaux du juge et de discréditer l'importante tâche qu'il accomplit. Il est évident que les conservateurs se rendent maintenant compte que le juge Gomery peut présenter un rapport équilibré, équitable et ferme, mais qui ne contiendra pas le genre de récriminations générales que les conservateurs souhaiteraient y trouver. Le rapport Gomery va effectivement relever divers actes répréhensibles, et nous sommes confiants qu'il concluera que notre premier ministre a agi de façon honorable.
Voici ce qu'a dit récemment le Globe and Mail dans un éditorial: « En dépit des tentatives de l'opposition de l'impliquer dans le scandale des commandites, rien jusqu'à présent ne permet d'affirmer que le premier ministre a fait quoi que ce soit de répréhensible. » Le National Post, lui, a dit: « Le premier ministre semble tout au plus avoir joué dans le Programme de commandites un rôle marginal. »
[Français]
Les conservateurs veulent discréditer le travail du juge Gomery et discréditer son rapport, avant même qu'il soit déposé.
[Traduction]
Les conservateurs veulent jeter une ombre sur les travaux de cette commission. En fait, s'ils comprennent effectivement les lois du pays, ils réaliseront que le juge Gomery a déjà le droit de donner des noms et de désigner des responsables. En fait, d'ici à ce que le juge Gomery finisse son rapport, les tribunaux criminels pourraient bien avoir déjà rendu leur jugement sur la responsabilité criminelle de certains des principaux intéressés.
À mon avis, il faut laisser le juge Gomery terminer la tâche importante dont il s'est chargé au nom des Canadiens. J'aimerais présenter une motion que nous allons déposer aujourd'hui pour souligner notre confiance dans le mandat du juge Gomery. La motion est ainsi libellée: « Que la Chambre confirme, relativement à la Commission Gomery, que le commissaire a le pouvoir, en vertu des arrêts de la Cour suprême du Canada concernant la Loi sur les enquêtes et de son mandat actuel, de nommer des noms et de désigner des responsables. »
En réalité, si l'intention des conservateurs est de faire en sorte que le juge Gomery ait le pouvoir de nommer des noms et de désigner des responsables, tout en évitant de modifier son mandat et de l'empêcher de faire son travail, ils devraient collaborer avec nous et appuyer cette motion et réaffirmer ainsi, encore une fois, que le juge Gomery a bel et bien le pouvoir de nommer des noms et de désigner des responsables.
Les Canadiens veulent que nous fassions fonctionner le Parlement. Cette motion constructive a pour but de confirmer l'intention de la motion conservatrice sans pour autant compromettre les travaux de la Commission Gomery.
Le vice-président: Dans ses observations, le ministre a mentionné qu'il voudrait proposer une motion, mais nous discutons déjà d'une motion et le Règlement ne prévoit pas qu'on puisse en proposer une autre. Le ministre pourrait proposer un amendement avec le consentement du député de Saanich—Gulf Islands, mais sa motion n'était pas libellée comme un amendement et elle n'est donc pas recevable à ce stade-ci. Le ministre voudra peut-être parler à ses vis-à-vis.
M. Brian Fitzpatrick (Prince Albert, PCC): Monsieur le Président, je vais mentionner quelques noms. Ils sont peut-être en désaccord sur des détails, mais ces individus ont reconnu avoir eu des agissements très répréhensibles. Je veux parler de MM. Corriveau, Béliveau, Corbeil, Boulay, Lafleur, Gagliano, Renaud et bien d'autres.
Les gens du Québec qui suivent les travaux de cette commission très intensément savent deux choses. Ces individus ont reconnu avoir commis des actes très répréhensibles, en conspirant massivement pour frauder les contribuables du pays. D'autres individus ont avoué leurs crimes. Ils ne s'entendent peut-être pas sur les détails, mais ils ont au moins fait des aveux. Il ne s'agit pas de témoignages, mais d'aveux. L'autre chose que les Québécois comprennent, c'est que tous ces individus sont des libéraux. Il s'agit notamment de trois directeurs administratifs du Parti libéral au Québec.
Le ministre devrait savoir qu'il a tout à fait tort d'affirmer que le juge Gomery est libre de dire que les contribuables du pays ont été victimes d'une énorme fraude. Son mandat ne le lui permet pas. Les arguments techniques du ministre sont tout à fait futiles. Je sais que le ministre n'a aucune formation juridique, mais il essaie de faire croire aux gens qu'il est un grand juriste.
Il y a une grande différence entre ce qu'il dit et ce que le juge Gomery peut dire. À la fin de ses travaux, le juge Gomery devrait avoir la liberté de dire que les Canadiens ont été victimes d'une énorme fraude de la part du Parti libéral du Canada. Or, son mandat ne lui donne pas ce pouvoir. Je suis persuadé que s'il essayait même de s'avancer sur ce terrain, les membres du parti d'en face seraient les premiers à se présenter devant les tribunaux pour obtenir des injonctions, afin d'essayer de restreindre sa capacité de le faire.
Le ministre va-t-il me dire si le juge Gomery est libre de déterminer si le Parti libéral a participé à une énorme conspiration civile et criminelle tendant à frauder les contribuables canadiens? C'est une question directe.
L'hon. Scott Brison: Monsieur le Président, le député a raison de dire que je ne suis pas avocat. Il a dit que je n'avais pas l'esprit d'un juriste. Compte tenu de ce qu'il déclare, je dois me demander s'il a, lui, tout son esprit.
Une voix: Allons donc.
Une voix: Vous êtes vulgaire.
Une voix: Les coups volent bas.
L'hon. Scott Brison: Monsieur le Président, j'invite ceux d'en face à observer un certain décorum pour entendre en quels termes le juge Gomery commente son propre mandat. Il me semble que le savant juriste qu'est le juge Gomery est peut-être aussi intelligent que le député. Voici ce qu'il a dit:
[...] j'aurai le droit de tirer des conclusions au sujet des fautes éventuellement commises et de leurs auteurs... [par exemple] la question de savoir si les activités en question ont été influencées par des interventions politiques et, dans l'affirmative, par qui, dans quel but et avec quelles conséquences; la question de savoir si une personne ou une organisation du gouvernement du Canada a obtenu des avantages financiers, politiques ou autres grâce à ces activités et, dans l'affirmative, dans quel but et avec quelles conséquences. |
Voilà ce qu'a déclaré le juge Gomery. Le député est en train de dire que le juge Gomery a tort, que lui-même détient la vérité alors que le juge Gomery ne comprend pas les lois. J'ai bien l'impression pour ma part que les Canadiens vont se fier davantage au jugement du juge Gomery qu'à celui du député.
M. Gary Lunn (Saanich—Gulf Islands, PCC): Monsieur le Président, j'aimerais revenir sur certains commentaires du ministre. Il dit que le Parti conservateur essaie de discréditer le travail du juge Gomery. Il est très important que tout le monde sache que rien n'est plus faux, archifaux. Après avoir entendu sa réponse à un autre député, je demanderais au ministre d'atténuer ses observations. S'il veut civilité et décorum à la Chambre, qu'il demeure respectueux et s'en tienne aux faits.
Le ministre a aussi dit que le juge Gomery formulerait des recommandations pour éviter qu'une telle situation se reproduise. Je respecte le juge Gomery et le travail qu'il accomplit. Il peut bien formuler toutes sortes de règles et de recommandations — et je soupçonne qu'il y en aura beaucoup —, il reste que seuls les députés peuvent empêcher que l'histoire se répète.
N'oublions pas qu'il s'agit d'un scandale lié au Parti libéral, le parti au pouvoir. Des millions de dollars ont été détournés vers les coffres de ce parti. Les témoins se succèdent devant la commission. On a des preuves irréfutables que l'argent a été dispersé dans des circonscriptions au Québec. Cela renvoie à une question d'honnêteté et d'intégrité des députés. Voilà pourquoi nous devons aller au fond des choses.
Le ministre affirme que cette motion est redondante ou frivole. Notre motion dit simplement que le juge Gomery devrait être en mesure de donner des noms et de désigner des responsables, point à la ligne. C'est tout ce que nous demandons, qu'il puisse donner des noms et attribuer des responsabilités. Selon le ministre, le juge Gomery jouit déjà de ces pouvoirs. Si c'est le cas, le ministre n'a qu'à appuyer la motion, même si elle est redondante. Nous tâchons seulement de lever toute ambiguïté. Notre motion est légitime et authentique.
L'hon. Scott Brison: Monsieur le Président, d'abord, notre leader parlementaire a donné avis de la motion qui figurera, en fait, au Feuilleton de demain. Notre motion énonce simplement que la Chambre confirme que, relativement à la Commission Gomery, le commissaire a le pouvoir, en vertu de la jurisprudence de la Cour suprême du Canada concernant la Loi sur les enquêtes et de son mandat actuel, de nommer des noms et d'attribuer des responsabilités.
Si les conservateurs ne veulent que s'assurer que le juge Gomery a le droit de nommer des noms et d'attribuer des responsabilités, ils devraient reconnaître que la motion du gouvernement est beaucoup plus sensée parce qu'elle ne tente pas de modifier le mandat du juge, compromettant ainsi tout le travail de la Commission Gomery. Les conservateurs savent que tout changement apporté au mandat de la commission à la toute fin des témoignages compromettrait et paralyserait l'enquête judiciaire. S'ils ne le savent pas, ils montrent certainement aux Canadiens qu'ils ne comprennent pas le problème.
Encore une fois, je renvoie aux propres mots du juge Gomery quand il a dit: « [...] j'aurai le droit de tirer des conclusions au sujet des fautes éventuellement commises et de leurs auteurs. » Le juge Gomery s'est gagné le respect de tous au fil des décennies à titre de savant juriste au Canada. Il a gagné le respect des Canadiens pour son travail durant cette importante enquête. Je lui fais confiance quand il dit avoir le droit, en vertu de son mandat actuel, de nommer des noms et d'attribuer des responsabilités.
M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam, PCC): Monsieur le Président, j'ai entendu le ministre très clairement. Il a cité le juge Gomery. D'après ce que j'ai entendu, le juge Gomery serait sorti des sentiers battus et aurait élargi ses horizons pour avoir les coudées franches en dépit de l'alinéa k).
J'aimerais que le ministre déclare à la Chambre que, lorsque les temps difficiles arriveront, les libéraux appuieront les paroles qu'il vient de prononcer et ne feront pas marche arrière, c'est-à-dire qu'ils reconnaîtront que le juge Gomery contemple un plus vaste horizon et que le gouvernement ne le limitera pas par l'alinéa k), où on lit: « [...] exercer ses fonctions en évitant de formuler toute conclusion ou recommandation à l'égard de la responsabilité civile ou criminelle [...] ».
Tout d'abord, le juge Gomery a élargi cet élément et le ministre l'a cité. Par conséquent, je m'attends à ce que le ministre s'engage, au nom des libéraux, à défendre l'interprétation que le juge Gomery fait de son mandat plutôt qu'à défendre l'interprétation stricte de l'alinéa k).
Je m'attends aussi à ce que le ministre nous donne l'assurance que le Cabinet ne gardera pas pour lui seul le rapport du juge Gomery sous prétexte, par exemple, d'en discuter, mais que ce rapport sera remis aux médias pour que tout le monde puisse en prendre connaissance.
L'hon. Scott Brison: Monsieur le Président, encore une fois, je citerai le juge Gomery. Le juge ne demande pas d'élargir son mandat, comme le député voudrait malicieusement le laisser entendre. Le juge Gomery, qui comprend bien les lois du pays et son mandat, reconnaît qu'il a déjà tous les droits nécessaires. C'est pourquoi il déclare:
Selon l'art. 13 de la Loi sur les enquêtes, sur lequel je reviendrai dans un instant, j'aurai le droit de tirer des conclusions au sujet des fautes éventuellement commises et de leurs auteurs. |
Le juge Gomery, se reportant à l'article 13 de la Loi sur les enquêtes, déclare qu'il peut tirer des conclusions.
Le gouvernement et le premier ministre ont fait montre d'un courage peu commun en appuyant le juge Gomery pendant ce qui n'a pas été une période facile pour notre parti. Le premier ministre fait ce qu'il doit faire et fait passer le pays avant le parti, fait passer les principes avant la stratégie partisane, prend la défense des Canadiens et fait en sorte que l'on va au fond des choses pour que toute la vérité soit connue.
* * *
Les crédits
L'hon. Dominic LeBlanc (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, il y a eu des consultations entre les partis concernant le déroulement du débat en comité plénier de ce soir sur le Budget principal des dépenses, et vous constaterez que la Chambre donnerait son consentement unanime à l'égard de la motion qui suit. Ayant été président du comité plénier, vous constaterez que cette motion, relative au déroulement des travaux de ce soir, est semblable à celle qui a été adoptée il y a quelques semaines.
Je propose:
Que, nonobstant l'alinéa 81(4)a) du Règlement, à l'intérieur de chaque période de 15 minutes, chaque parti puisse allouer du temps à un ou plusieurs de ses députés pour des discours ou des questions et réponses, à condition que, dans le cas des questions et réponses, la durée de la réponse du ministre corresponde approximativement au temps pris par la question, et que, dans le cas des discours, les députés du parti auquel la période est consacrée parlent les uns après les autres. |
Le vice-président: La Chambre a entendu la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
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Les crédits
Motion de l'opposition--La Commission Gomery
La Chambre reprend l'étude de la motion.
M. Garry Breitkreuz: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Le ministre qui vient de répliquer à un député conservateur a formulé des commentaires très méprisants et j'aimerais qu'il les retire. Il parle de politesse à la Chambre des communes tout en taxant de stupidité les députés de ce côté-ci, de façon on ne peut plus méprisante. Je le prie de retirer ces paroles. Ce type de langage ne saurait être toléré à la Chambre.
Le vice-président: La politesse s'impose, mais j'ai considéré que ces paroles faisaient partie du débat. Cela se produira peut-être encore durant le débat.
[Français]
M. Michel Guimond (Montmorency—Charlevoix—Haute-Côte-Nord, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir d'intervenir au nom du Bloc québécois sur cette motion présentée par nos collègues du Parti conservateur. Je me devrai de décevoir mes collègues conservateurs en les informant que le Bloc québécois ne pourra souscrire à cette motion, telle que libellée.
Dès le départ, je dois souligner que l'intention est louable. Au terme des travaux de la Commission Gomery, les Québécois et les Canadiens, ainsi que tous les députés de cette chambre, sans exception, particulièrement les députés de l'opposition, talonnent ce gouvernement libéral dont les preuves qui sortent à la Commission Gomery démontrent de plus en plus qu'il s'agit d'un parti corrompu et d'un gouvernement qui, de toutes façons, n'a plus l'autorité morale pour gouverner.
Pour s'en convaincre, il s'agit de voir ce qui s'est déroulé il y a environ une dizaine de jours, à savoir toutes les tractations qui ont donné lieu à ce vote de non confiance sur le budget. Ce vote a été remporté à l'arraché par une voix prépondérante de la Chambre des communes. On a vu littéralement le parti du NPD se faire acheter au coût de 4,6 milliards de dollars. On a vu aussi certaines personnes essayer d'acheter les payeurs de taxes du Québec et du Canada au moyen de promesses électorales, au coût de un milliard de dollars par jour. Finalement, la cerise sur le gâteau, la consécration suprême fut lorsque l'on a acheté les ambitions et la fidélité de l'actuelle députée de Newmarket—Aurora qui est devenue ministre. On a acheté sa fidélité au moyen d'un poste de ministre.
On a vu aussi les tentatives du premier ministre pour acheter, avec succès dans un cas, le vote de notre collègue député indépendant de Surrey-Nord, en utilisant un discours très anti-Québec, disant que cela n'avait pas de bon sens de s'associer aux séparatistes et au Bloc québécois pour défaire le gouvernement. On a constaté que cet argument avait déjà été utilisé pour convaincre la députée de Newmarket—Aurora pour joindre les rangs du Parti conservateur.
Je dois répéter à mes collègues du Parti conservateur qu'à la base, nous sommes d'accord avec les principes à l'effet que le juge Gomery puisse, au terme de son enquête, déclarer ou rendre publics les noms des personnes fautives et d'assigner aussi des responsabilités. Cependant, force nous est de constater qu'il y a un problème dans le libellé même de cette motion.
On a tenté de bonne foi, dans des tractations informelles, de faire en sorte que le libellé soit modifié, car de souscrire à cette motion telle qu'elle est présentée devant la Chambre, reviendrait à réécrire le mandat de la Commission. Cela peut compromettre les témoignages qui ont déjà été versés devant le commissaire Gomery.
J'ai une formation d'avocat. Les personnes qui ont un peu de connaissance juridique comprendront facilement que ce n'est pas du tout les mêmes règles de preuve et les mêmes règles d'interrogatoire et de contre-interrogatoire si des poursuites civiles au criminel peuvent être engagées. Pour cette raison, le Bloc québécois ne pourra souscrire à cette motion.
Je peux vous dire que le Bloc québécois n'a pas commencé à s'intéresser aux travaux de la Commission Gomery depuis la semaine dernière ou depuis les témoignages un peu plus croustillants du volet montréalais. Depuis mai 2000 jusqu'à aujourd'hui — jusqu'à hier — au-delà de 700 questions ont été posées à la Chambre sur le scandale des commandites.
C'est une autre preuve que, n'eût été du travail des députés du Bloc québécois qui ont talonné le gouvernement, peut-être ce scandale des commandites aurait pu prendre une tournure totalement différente. Cela donne aussi des arguments à mes 53 collègues du Bloc québécois en réponse, lors de la prochaine campagne électorale — que l'on attend le plus rapidement possible —, à ceux qui se demanderont à quoi servent les députés du Bloc. C'est le Bloc québécois qui a brassé la cage dans le scandale des commandites. C'est nous qui avons questionné les trois rapports de Groupaction dont chaque photocopie a coûté 550 000 $, de même que tous les salons de plein air où des commissions ont été versées aux petits amis. Dès mai 2000, le Bloc québécois est arrivé avec la brique de questions. Nous n'avons pas attendu la formation de la Commission Gomery.
Il faut donc replacer les choses dans leur contexte. Il est nécessaire de savoir que la Commission Gomery a été instituée en vertu de la Loi sur les enquêtes, qui spécifie, à son article 2: « Le gouverneur en conseil peut, s'il l'estime utile, faire procéder à une enquête sur toute question touchant le bon gouvernement du Canada ou la gestion des affaires publiques. »
Ainsi, si le Parlement voulait modifier le mandat de la Commission Gomery pour que le commissaire puisse révéler des noms et désigner des responsables, il faudrait modifier la Loi sur les enquêtes, qui date de 1985. Comme je le disais tout à l'heure, nous estimons que de donner suite à cette motion présentée par le Parti conservateur, c'est-à-dire de changer le mandat à ce stade-ci de la commission, reviendrait à compromettre le travail du commissaire Gomery.
Pour s'en convaincre, il s'agit de se souvenir que, au nom de mon parti, j'ai eu l'occasion d'intervenir pour mentionner que nous étions heureux de la nomination du juge Gomery. C'est une personne que nous avons toujours considérée et que nous continuons à considérer comme étant intègre, professionnelle et minutieuse. C'est une personne qui cherche, en bout de ligne, à connaître la vérité sur ce qui s'est réellement passé dans le scandale des commandites. Le juge Gomery aura bientôt 73 ans; il n'attend aucune nomination politique du Parti libéral. Il continue à faire son travail de façon persévérante. Il s'agit d'entendre ses interventions à la commission qu'il préside pour constater qu'il transpire l'intégrité.
Cela m'a semblé drôle de voir, hier soir au bulletin de nouvelles, l'ancien premier ministre Chrétien annoncer qu'il songeait à reporter à plus tard sa demande pour que le juge Gomery se retire. Heureusement! Il faut toujours se demander à qui cela profite, de vouloir bâillonner ou faire taire le juge Gomery. C'est pour cette raison que sa crédibilité n'est pas mise en cause. Toutefois, si l'on modifiait son mandat en cours de séance, quelqu'un pourrait retourner devant la Cour fédérale et vicier tout le processus d'enquête. Ce n'est pas ce qu'on veut. On a hâte de connaître, le plus rapidement possible, ses conclusions.
Pour s'en convaincre, il s'agit de comprendre que le commissaire Gomery n'a pas mené ces interrogatoires dans le but de porter des accusations. En effet, ce n'était pas son mandat comme tel. On considère que les témoignages entendus seront certainement incomplets, afin de permettre au commissaire de désigner des responsables. En bout de ligne, je veux qu'il soit bien clair que l'opposition du Bloc québécois à cette motion ne doit pas être interprétée comme un manque d'intérêt à savoir quelles personnes se sont livrées à des actes illégaux.
Nous espérons que la Gendarmerie royale du Canada, la Sûreté du Québec et d'autres corps de police impliqués déposeront des accusations au fur et à mesure que les travaux progresseront.
Ce matin, M. Paul Coffin a plaidé coupable à 15 accusations de fraude qui pesaient contre lui. On va avoir l'occasion de faire ressortir quels sont les liens entre Paul Coffin et le Parti libéral du Canada.
Les travaux de la Commission Gomery reposent, dans une certaine mesure, sur un engagement. On invite les témoins à tout dévoiler, en échange de la promesse que le juge ne formulera pas de recommandation sur la responsabilité civile ou criminelle des individus. Donc, revenir sur ce principe en cours de route reviendrait à briser cette promesse et cet engagement.
Également, nous soumettons que les travaux de la Commission Gomery auraient été menés très différemment si le commissaire Gomery avait eu la possibilité de faire des recommandations à l'égard de la responsabilité civile ou criminelle des individus.
Au Bloc québécois, nous considérons que le mandat actuel de la Commission Gomery, quoique imparfait — il est sûr que le mandat aurait pu être rédigé différemment —, est assez large pour permettre d'avoir une idée des faits concernant le scandale des commandites. La priorité du Bloc québécois est à l'effet que le juge Gomery soumette son rapport le plus rapidement possible et qu'il ait toute latitude et toute quiétude d'esprit pour faire son travail en paix.
Par la suite, comme je le mentionnais, la GRC et le directeur des élections pourront intervenir. En effet, si de l'argent sale a servi à financer la campagne électorale des candidats libéraux en 2000 —Marc-Yvan Côté a avoué avoir distribué pour 120 000 $ d'argent sale aux candidats libéraux de l'est du Québec, ce qui veut dire qu'ils sont venus faire campagne contre nous, contre moi, député de la région de Québec —, j'espère que le commissaire aux élections fera enquête à ce sujet. Donc, cela ne veut pas dire qu'il n'y aura pas d'accusation. Le ministère du Revenu national pourrait aussi porter des accusations.
En bout de ligne, le Bloc québécois soutient que c'est à la population que revient le mandat de punir les responsables politiques de ce scandale qui sont de ce côté-là de la Chambre. Ce sont les dirigeants passés et actuels du Parti libéral. N'oubliez pas qu'il y a encore des personnes impliquées qui siègent de ce côté-là de la Chambre, des ministres même. Il y a même des chefs de cabinet de ministres actuels qui ont dû être suspendus parce qu'ils ont trempé dans le scandale des commandites.
Encore une fois, c'est un gain très partiel, mais suite aux pressions du Bloc québécois, nous avons obtenu que le Parti libéral crée une fiducie de l'argent sale. Nous continuons de dire que 750 000 $ dans cette fiducie, c'est totalement inacceptable et insuffisant.
Nous avons évalué à au moins 5,3 millions de dollars la somme que le Parti libéral devrait mettre dans la fiducie de l'argent sale. Et jusqu'à présent, cela n'a été contesté par personne. Nous sommes capables de détailler cela au cent près. Ce n'est pas du vent ni des voeux pieux. Nous sommes capables d'avancer ce chiffre, parce que ce montant de 5,3 millions de dollars n'a pas été cueilli dans un champ quelconque. Il découle directement des aveux et des témoignages faits à la Commission Gomery. Donc, que le gouvernement ne pense pas que nous sommes satisfaits des 750 000 $ déposés dans la fiducie de l'argent sale.
Dans les conditions actuelles, nous considérons que le commissaire Gomery, non seulement n'a pas le pouvoir d'intenter des poursuites en justice contre des gens impliqués, mais, techniquement, il ne peut pas désigner des coupables. Il faut rappeler que la Commission Gomery est une commission d'enquête, ce qui fait en sorte qu'elle ne peut que donner des recommandations et n'a pas de véritables pouvoirs judiciaires.
En effet, l'alinéa k) du mandat de la Commission Gomery, confié par le Conseil privé en vertu de la partie I de la Loi sur les enquêtes, stipule:
que le commissaire reçoive instruction d'exercer ses fonctions en évitant de formuler toute conclusion ou recommandation à l'égard de la responsabilité civile ou criminelle de personnes ou d'organisations et de veiller à ce que l'enquête dont il est chargé ne compromette aucune autre enquête ou poursuite en matière criminelle en cours. |
Je sais que mes collègues du Parti conservateur pourraient rétorquer que le libellé même de leur motion stipule qu'ils veulent modifier ce mandat décrit à l'alinéa k). Je le reconnais, mais, à ce stade-ci, c'est beaucoup trop tard. On n'a pas de machine pour remonter dans le temps. Une série de témoins ont déjà été entendus. Qu'en fait-on? Je pourrais citer Joe Morselli, qui s'est présenté la semaine dernière sans avocat. Si le mandat avait été différent, peut-être aurait-il eu avantage à agir autrement.
On a aussi été témoins du travail des procureurs de la commission, Mes Bernard Roy, Guy Cournoyer, Neil Finkelstein et Marie Cossette. L'approche des questions était parfois très suggestive. Ce n'est pas un blâme que je jette, mais c'est une constatation que je fais. Un procureur de la Couronne qui interroge dans une optique de poursuite criminelle n'utilise pas la même approche qu'un procureur dans une commission d'enquête. La différence est majeure.
Les travaux de la commission reposent sur une promesse: on invite les témoins à tout dévoiler, en échange de quoi le juge ne formulera pas de recommandations sur la responsabilité civile ou criminelle. D'accepter la recommandation du Parti conservateur reviendrait à compromettre cette promesse en cours de route.
Le 30 mai 2005, le juge Gomery lui-même a déclaré: « [...] nous ne sommes dans une cour de justice et je dois accepter toutes sortes de preuves de toutes les sources possibles [...] » Les règles relatives à l'interrogatoire et au contre-interrogatoire, à la preuve et à la représentation par un avocat ne sont pas les mêmes que celles dans une instance criminelle.
Comme mon temps de parole est presque expiré, je conclus ainsi: nous, du Bloc québécois, considérons que seule la population pourra juger de la responsabilité politique. Il a été clairement démontré qu'il y avait eu direction politique dans le scandale des commandites.
On constate que le mandat actuel de la Commission Gomery est suffisamment large pour qu'on ait une idée des faits. Nous voulons, au Bloc québécois, que le commissaire Gomery soumette son rapport le plus rapidement possible, d'autant plus que le dépôt de ce rapport sera sûrement suivi d'élections. En effet, dans son adresse solennelle à la nation, presque les larmes aux yeux, le premier ministre a reconnu qu'il avait manqué de fermeté et de contrôle. Il s'est engagé, s'il était prouvé que 1 $ d'argent sale avait aidé le Parti libéral, à ce qu'il soit immédiatement remboursé. C'est pour cette raison que nous lui disons qu'une fiducie de 750 000 $ n'est pas suffisante; elle devrait être de 5,3 millions de dollars. De plus, le premier ministre s'est engagé solennellement à déclencher des élections 30 jours après le dépôt du rapport Gomery, lequel est prévu le 15 décembre. Trente jours après, soit le 15 janvier, le premier ministre devrait déclencher des élections menant à un scrutin en février.
En bout de ligne, c'est la population, c'est le peuple du Québec et du Canada qui jugera de la responsabilité politique. Je suis persuadé que la population du Québec, qui était prête il y a une dizaine de jours, comme elle sera prête à l'automne ou en janvier, saura sanctionner ce gouvernement libéral qui n'a plus l'autorité morale pour gouverner.
L'hon. Dominic LeBlanc (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le whip en chef du Bloc québécois pour plusieurs de ses commentaires. Évidemment, nous ne partageons peut-être pas la même opinion sur tous les commentaires, mais je suis très sensible à plusieurs choses qu'il a dites dans son intervention. Je vois que cela est bien réfléchi et qu'une recherche a été faite.
J'aimerais lui demander s'il pourrait préciser davantage le commentaire qu'il a fait au début de son allocution quant au fait qu'une personne témoigne devant une commission d'enquête sous certaines conditions, ou suite à certains termes de référence en vertu de la Loi sur les enquêtes.
Admettons qu'une personne accepte de témoigner sous serment devant la commission d'enquête et qu'ensuite, après que 90 p. 100 des témoins aient été entendus, les termes de référence changent, comme le demande la motion des conservateurs aujourd'hui. Quel danger le député voit-il dans cette idée de changer les termes de référence post facto, après que la commission ait procédé pendant plusieurs mois? Quel effet cela peut-il avoir sur les droits des témoins qui ont accepté de témoigner, qui sont allés de bonne foi devant la commission?
Il pourrait peut-être y avoir une poursuite devant la Cour fédérale — comme il l'a mentionné je crois — qui aurait pour effet d'invalider le travail fait jusqu'à présent. C'est là, je pense, où nous partageons l'opinion que cela serait une situation regrettable si jamais cela se produisait.
M. Michel Guimond: Monsieur le Président, je suis un peu surpris par la question. J'espère qu'il n'y a personne parmi ceux qui nous écoutent qui pense qu'il s'agit d'une question « plantée », comme on les appelle, pour me permettre de faire du chemin sur ce sujet, surtout que cela provient de mon collègue libéral. Je peux vous dire qu'on n'a pas l'intention d'encenser le Parti libéral pour ce qui s'est passé avec le scandale des commandites. Toutefois, je suis obligé d'expliquer davantage.
Effectivement, notre interprétation est à l'effet qu'un témoin pourrait faire avorter, ou à tout le moins, suspendre les travaux du juge Gomery et empêcher la publication rapide de son rapport. Je vous ai donné l'exemple de Joe Morselli. Il pourrait arriver et dire qu'il aurait eu une préparation différente si, en bout de ligne, le juge Gomery avait pu intenter des poursuites criminelles contre lui.
Rien ne dit, par contre, que les corps policiers en parallèle, qui écoutent la preuve et qui vont l'analyser ne peuvent intenter des poursuites. En effet, certains sont déjà poursuivis au criminel. J'ai parlé de Coffin qui a plaidé coupable ce matin. Toutefois, les accusations criminelles ne viendront pas du juge Gomery.
Un témoin pourrait arriver et dire qu'il aurait témoigné différemment, que son degré de préparation et la présentation de sa preuve auraient été différents, que son avocat l'aurait contre-interrogé de façon différente. Quelqu'un venu sans avocat pourrait dire qu'il se serait fait représenter.
Donc, effectivement, si la commission n'avorte pas comme tel, il y a un risque que les travaux soient suspendus en raison de poursuites devant les tribunaux. On ne peut pas être d'accord avec cela. Nous voulons la vérité le plus rapidement possible.
[Traduction]
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, j'ai été décontenancé par l'exposé du député qui, en l'espace d'une minute, a démontré avec arguments à l'appui pourquoi cette motion était mauvaise, puisqu'elle contrevient aux règles établies dans la Loi sur la preuve au Canada.
Il est clair pour le député, pour son parti, pour le ministre et, selon moi, pour d'autres personnes que, compte tenu des avis juridiques, cette motion pourrait nuire aux travaux de la Commission Gomery, et même les invalider complètement.
Le ministre s'est dit d'avis que la motion pourrait être qualifiée de superflue ou de mal intentionnée. Pour ma part, je commence à me demander si ce n'est pas plutôt un geste d'incompétence, parce que les conservateurs ne semblent pas comprendre les lois de notre pays. Ils font preuve, semble-t-il, d'imprudence et d'un piètre sens des responsabilités puisque, si la motion était adoptée à la suite d'un vote, ce qui est tout à fait possible dans cette enceinte, elle pourrait mettre fin aux travaux de la Commission Gomery. Des gens auraient beau jeu de faire valoir devant la Cour fédérale que toutes les preuves auraient été recueillies dans un autre contexte.
J'aimerais connaître l'opinion du député. La motion présentée à la Chambre par le Parti conservateur est-elle dangereuse?
[Français]
M. Michel Guimond: Monsieur le Président, je dirais à mon collègue d'en face qu'il n'a pas à juger du caractère redondant, utile ou inutile de la motion présentée par le Parti conservateur. Par votre entremise, j'aurais envie de demander au député: qui est-il, lui, pour décider que c'est une motion redondante?
Ce gouvernement libéral est devenu à ce point arrogant qu'il en est rendu à s'en prendre aux journées d'opposition. En effet, en plus de nous avoir coupé unilatéralement les journées d'opposition — alors que le gouvernement tremblait littéralement de peur de se faire défaire relativement à une motion de non-confiance —, il a décidé, à 17 h 59, de couper la journée d'opposition des conservateurs et celle du NPD. Ainsi, il a bloqué toutes les journées d'opposition. C'est la première démonstration d'un gouvernement arrogant.
À présent, on pousse l'arrogance en redonnant la première journée d'opposition, mais en disant que la motion est redondante. Que le Parti libéral vote comme il le veut!
Le député a souligné que le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux a fait des commentaires disant que la motion était redondante. Je ne veux pas du tout m'associer à ce ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux. Le Bloc est contre la motion. Notre décision a été prise entre nous et notre réflexion s'est faite entre nous. Je n'ai rien à faire de ce que pense ledit ministre, dont les réponses sont une belle démonstration de l'arrogance. En effet, il nous donne de belles réponses toutes dactylographiées par la war room — au sujet de la Commission Gomery — , payée 1 million de dollars, et au service du Parti libéral. Ce chiffre a été dévoilé la semaine dernière dans l'Ottawa Citizen, sous la plume de Jack Aubry. Ce million de dollars que coûte la war room a été payé par les payeurs de taxes pour diriger les travaux et les réponses des ministres en Chambre, relatifs à ladite Commission Gomery.
Je n'ai rien à faire avec le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux. Nous avons forgé notre opinion et nous avons décidé — sans la qualifier de redondante ou d'inutile —, qu'ainsi libellée, en tant que parti, nous ne pourrons souscrire à cette motion. Nous allons donc voter contre celle-ci. Cependant, nous demeurons convaincus — nous sommes d'accord quant au fond de la vérité —, qu'il faut démasquer les personnes qui ont volé l'argent des contribuables.
M. Joe Comartin (Windsor—Tecumseh, NPD): Monsieur le Président, je voudrais commencer par saluer mes collègues du Bloc québécois qui ont décidé de s'opposer à cette motion aujourd'hui. À mon avis, ce n'est pas facile pour eux de dire...
Une voix: Oh, oh!
M. Joe Comartin: Je suis appuyé par le whip du Bloc. Je voulais donc saluer le Bloc de s'être opposé à cette motion et dire que ce n'était pas facile pour eux de le faire et que ce n'est pas vraiment facile pour nous.
[Traduction]
L'intention fondamentale de la motion, si nous devions ne la prendre qu'au premier degré, bien qu'il puisse y avoir d'autres objectifs dans ce cas-ci, est une intention que l'on nous demande de soutenir et, si nous étions disposés à le faire, nous pourrions ensuite formuler des réserves. Pour ce qui est d'exprimer notre dégoût envers les éléments entourant le scandale qui sape le gouvernement depuis un certain nombre d'années, c'est une occasion qui nous est donnée de le faire.
Comme le Bloc, le NPD veut respecter la loi du pays, le principe de l'application régulière de la loi, les libertés civiles et les droits civiques des témoins et des parties qui ont comparu devant la Commission Gomery. Pour ces motifs, nous, à l'instar du Bloc, ne sommes pas en mesure d'appuyer la motion. Si le proposeur et le Parti conservateur acceptaient d'être plus raisonnables, nous croyons qu'il y a peut-être des moyens d'amender la motion de manière à ce qu'elle recueille notre appui à nous et celui du Bloc.
J'exhorte le proposeur et le Parti conservateur à étudier les suggestions que nous avons faites, de manière à ce qu'au moins les partis d'opposition à la Chambre puissent exprimer leur dégoût à l'égard des éléments de ce scandale qui hantent le gouvernement depuis un certain temps.
J'aimerais mentionner certaines de nos préoccupations précises. La première tient au fait que la motion fait certaines hypothèses quant à la conduite de l'enquête par le juge Gomery qui ne sont probablement pas valides.
Dans sa déclaration liminaire, le juge Gomery a indiqué très clairement qu'il comprenait la portée de ses travaux en vertu de la Loi sur les enquêtes. Il comprenait les limitations qui lui étaient imposées par des décisions antérieures, tout particulièrement la décision prise dans le scandale du sang contaminé. Il s'agit d'une importante décision prise par la Cour suprême en 1997. Elle a été suivie à maintes reprises dans d'autres enquêtes, aux échelles fédérale et provinciale, qui se sont tenues depuis 1997. Elle énonce clairement le rôle du juge Gomery et de tout autre commissaire tenant une enquête en vertu de la Loi sur les enquêtes.
La motion dont la Chambre est saisie aujourd'hui violerait en fait, et dans une mesure importante, les protections établies dans cette affaire. Je crois qu'il est possible de remédier à ces problèmes si nous parvenons à modifier la motion.
Pour en revenir à la déclaration liminaire faite par le juge Gomery au début de l'enquête, le juge a dit très clairement qu'il savait qu'il avait le pouvoir, sur les constatations de fait, de formuler des recommandations donnant des indications sur les responsabilités, si je peux m'exprimer en termes vagues, de certaines personnes ou groupes de personnes. Je crois que le juge Gomery est conscient des limites qui lui sont imposées à cet égard.
La Cour suprême du Canada a dit très clairement que le commissaire, aux termes de la Loi sur les enquêtes, ne devait pas tirer de conclusions sur la culpabilité criminelle. Il devait s'en garder. Il devait aussi s'abstenir de propos précis qui constitueraient des conclusions sur la responsabilité civile.
La Cour suprême est allée plus loin. Cet élément est vraiment important, et le député conservateur qui a proposé la motion et le Parti conservateur en général devraient en tenir compte. La Cour suprême du Canada a ajouté qu'il fallait non seulement éviter des conclusions de « culpabilité criminelle ou de responsabilité civile », mais aussi éviter les conclusions qui risquent d'être perçues comme des déclarations de responsabilité.
Il s'agit là d'un critère très exigeant, mais le juge Gomery doit s'y soumettre, comme tout autre commissaire. Le libellé de la décision est très explicite, et il ne prête pas à des interprétations diverses. Impossible de solliciter le texte dans un sens ou dans l'autre, ou de contourner la décision. C'est une barrière étanche, me semble-t-il, qui impose des restrictions aux recommandations et aux conclusions du juge Gomery.
Malheureusement, la motion conservatrice à l'étude aujourd'hui demande que le juge Gomery fasse précisément les constatations que la Cour suprême du Canada lui interdit.
Étant donné nos règles de procédure, l'auteur de la motion, avec l'appui de son groupe parlementaire évidemment, peut proposer les amendements nécessaires. Quant à nous, nous ne pouvons présenter un amendement en bonne et due forme. Toutefois, nous proposons que le député et son parti considèrent que les recommandations faites au juge Gomery à ce stade-ci doivent tenir compte de la décision de la Cour suprême du Canada et des règles et lignes directrices qui en ont découlé. Bien entendu, je ne saurais parler au nom du Bloc québécois ni des libéraux, mais je dirai, au nom de mon parti, que si le député est prêt à agir de la sorte, nous sommes disposés à voter pour ce type de motion à la Chambre demain.
Si cette motion était présentée, cela nous donnerait la possibilité de dire au juge Gomery que nous nous attendons à ce qu'il fasse part de sa décision et de ses recommandations de la façon la plus claire possible, et de dire au gouvernement que nous nous attendons à ce qu'il applique ces recommandations de la façon la plus intégrale possible.
Permettez-moi de faire une brève digression. J'aimerais dire quelques mots sur certains rapports parus dans les journaux et entendus dans les médias au cours de la fin de semaine qui laissaient entendre que la motion d'aujourd'hui pourrait avoir des buts sous-jacents. Je ne voudrais pas laisser entendre que c'est le cas du motionnaire puisque je n'en sais rien. Je crois qu'il est bien intentionné. Toutefois, je crois que certains membres du Parti conservateur considèrent cette motion comme un élément qui pourrait leur servir au cours d'une prochaine élection ou d'ici la prochaine élection pour nous reprocher d'être liés de trop près au Parti libéral.
L'offre que j'ai faite ici au nom de mon parti est très sincère. Nous ne jouons pas de jeu. Nous tenons réellement à donner plus de poids à l'expression de dégoût des membres de cette Chambre à l'égard de tout ce scandale. Nous espérons bien en avoir la possibilité.
Si l'un des objectifs de cette motion est de nous accuser d'être liés de trop près aux libéraux, je dirais qu'il s'agit là d'une stratégie ou d'une tactique inacceptable de la part des conservateurs. Ils devraient repenser à la raison pour laquelle ils ont déposé cette motion. Les journées d'opposition doivent servir à soulever des questions d'importance pour le pays et à nous permettre de discuter de ces questions sous tous les angles.
Toutefois, si la motion d'aujourd'hui est utilisée à des fins purement politiques dans le but de mettre notre parti et les membres de notre caucus dans l'embarras au cours des prochaines élections ou d'ici la tenue des prochaines élections, cela n'est pas acceptable et ne s'inscrit pas dans les meilleures traditions de la Chambre. Si c'est ce qu'ils veulent faire, je leur demanderais d'y repenser à deux fois.
J'aimerais maintenant en revenir à la motion même et souligner certains risques que cette proposition pourrait entraîner si nous devions donner au juge Gomery le mandat tel que formulé et si le juge Gomery devait le respecter.
Avant d'être élu à la Chambre des communes, j'ai pratiqué le droit pendant de nombreuses années. Si j'avais pris connaissance d'un tel mandat dans le cadre d'une enquête comme celle-ci, je me serais immédiatement adressé à la cour fédérale pour présenter une motion visant à rejeter tout le travail accompli jusqu'ici par la commission d'enquête, en faisant valoir avec succès que mon client serait gravement lésé. Compte tenu de la décision de la Cour suprême du Canada et de plusieurs autres décisions rendues auparavant et par la suite, je serais convaincu de pouvoir mettre un terme à l'enquête menée par le juge Gomery et de recevoir instruction que l'enquête devrait être instituée de nouveau à partir du début.
Je ne suis pas extrémiste lorsque je fais cette analyse. À mon avis, presque tous les avocats qui ont plaidé devant les tribunaux du pays seraient d'accord sur cette appréciation, car la motion dit aux témoins et aux parties qui ont participé jusqu'ici à cette enquête que, malheureusement, les règles viennent d'être modifiées.
C'est très offensant pour notre tradition fondée sur la common law, pour le respect que nous avons à l'égard de l'application régulière de la loi et des droits conférés par la Charte. On ne peut pas changer les règles du jeu. On ne peut pas changer les règles de procédure. Au terme de la démarche, on ne peut pas modifier la conduite que le fonctionnaire judiciaire, dans ce cas-ci, est tenu d'adopter. On établit son mandat au début. Le commissaire, en l'occurrence le juge Gomery, respecte ce mandat. On ne peut pas le modifier au terme de la démarche.
Nous prévoyons que les témoignages seront probablement terminés d'ici une ou deux semaines. Tenter de justifier une modification du mandat à ce stade-ci, comme on cherche clairement à le faire, c'est profondément offensant pour les principes juridictionnels et juridiques du Canada, auxquels nous adhérons depuis longtemps, avant même l'insertion des droits dans la Charte, en 1982. C'est ce qui se produirait.
Il est ironique que la Chambre soit saisie de cette motion aujourd'hui, puisque hier les avocats de l'ancien premier ministre ont retiré, au nom de ce dernier, leur opposition à l'égard du juge Gomery. C'était, dans le processus judiciaire, la dernière manoeuvre en cours, si je peux m'exprimer ainsi, qui aurait pu mettre un terme à l'enquête du juge Gomery ou influencer considérablement les conclusions qu'il aurait pu tirer.
Cette opposition a maintenant été retirée. Si nous adoptons la motion à l'étude, nous pourrions relancer tout ce processus. Les avocats déjà retenus par différentes parties soumettraient des demandes. D'autres témoins pourraient faire intervenir des avocats pour déclarer: « Attendez un instant. Je ne savais pas que je m'exposais à ce risque. Je n'ai pas eu la chance de tout dire et de faire un exposé complet. Je veux avoir cette occasion. »
La liste des critiques potentielles à l'endroit du commissaire et de l'enquête est très longue. Il y a des parties à cette affaire auxquelles nous, députés, ne pensons même pas à ce point-ci, mais il y a très certainement de 50 à 100 parties et témoins potentiels, selon moi, qui subiraient ou pourraient subir des contrecoups à cause de cela.
N'oublions pas que la Cour suprême du Canada a été très claire dans sa décision. Elle ne voulait pas exposer, même dans la perception du public, le droit du commissaire à faire le genre de déterminations que cette motion entraînerait.
Le NPD se trouve coincé dans toute cette affaire. Comme je l'ai dit au début de mon discours, le Bloc québécois est lui-aussi coincé de la même façon. Nous avons été profondément outrés par tout ce qui entoure le scandale des commandites. Nous parlons en tant que députés, car ce scandale rejaillit sur nous tous.
Il est clair que ce scandale s'est produit au sein du Parti libéral et au sein de l'administration libérale, mais la population ne voit pas les choses aussi simplement. Nous entendons souvent: « Vous êtes tous pareils. » Nous sommes tous touchés quand une chose semblable se produit, c'est donc une offense personnelle. Même en ne tenant pas compte des répercussions sur la démocratie dans notre pays et sur notre réputation internationale, cela demeure une offense personnelle, car nous avons tous été atteints.
Je ne pense pas que nous puissions dire à la Chambre, peut-être dans des termes aussi clairs que nous le voudrions, à quel point nous nous sentons offensés, mais c'est la réalité à laquelle nous sommes confrontés. Il est, par conséquent, d'autant plus difficile pour un député de devoir déclarer à la Chambre que son parti, le Bloc québécois, ne peut appuyer la motion. Je ne suis pas tout à fait sûr du but recherché. Il y a peut-être des intentions cachées. Si c'est le cas, c'est vraiment regrettable.
S'il existait une alternative, si les conservateurs modifiaient leur motion, comme je le souhaite, de façon à reconnaître les limites que la Cour suprême du Canada a imposées au rôle du commissaire en vertu de la Loi sur les enquêtes, le débat d'aujourd'hui pourrait porter davantage sur le scandale lui-même.
Nous pourrions nous concentrer davantage sur les raisons qui nous poussent à demander au juge Gomery de tirer des conclusions de fait aussi claires que possible, afin que tous les Canadiens puissent s'inspirer du rapport pour se faire une opinion claire sur ce qui s'est véritablement passé et sur les mesures à prendre pour éviter que ce genre de situation ne se reproduise. Les Canadiens seraient ainsi en mesure de porter un jugement éclairé.
Il n'est guère douteux, selon moi, que nos concitoyens ont déjà tiré un certain nombre de conclusions très claires. Certaines ne sont peut-être pas fondées. Les Canadiens ressentent peut-être une colère exagérée à l'endroit du gouvernement à l'heure actuelle, mais il se peut aussi que ce soit le contraire et qu'ils devraient éprouver encore plus de ressentiment à son endroit.
Le rapport du juge Gomery et ses recommandations, à condition d'être le plus exhaustifs et le plus clairs possible, vont lui permettre de jouer un rôle déterminant. Malheureusement, la motion dont nous sommes actuellement saisis risque fort de l'en empêcher.
Je ne veux pas préjuger des paroles ou des décisions du juge Gomery, mais je crois que si son mandat correspondait à ce que propose la motion, il aurait de sérieuses réserves quant à sa capacité de poursuivre son travail. Il serait piégé, comme toute personne ayant une compréhension minimale de notre système juridique. Compte tenu de son expérience, il serait pris entre la Cour suprême du Canada qui lui interdirait de faire quelque chose, et la Chambre ou le gouvernement qui lui demanderait le contraire. Il m'est impossible de savoir comment réagirait le juge Gomery, mais je sais que nous devons éviter de le placer en pareille situation.
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, PCC): Monsieur le Président, je trouve offensant que mon collègue laisse entendre que ce scandale a sali tous les députés. Ce qu'il a sali, c'est notre démocratie. Naturellement, en tant que députés, nous sommes très attachés aux traditions démocratiques et aux valeurs démocratiques d'honnêteté, de responsabilité et d'obligation de rendre des comptes, lesquelles sont gravement menacées dans toute cette vilaine affaire de programme des commandites.
J'aurais deux questions à poser à mon collègue. Je m'étonne de l'entendre soutenir avec véhémence que le Parlement du Canada ne peut pas modifier les règles en cours de route. Son parti l'a pourtant fait à l'égard du budget, quand il a pactisé avec le gouvernement, lui offrant son appui en échange de la modification, justement, des règles budgétaires en cours de route. Comment explique-t-il cette contradiction? Son parti modifie des règles, mais soutient que le Parlement, lui, ne peut pas modifier les règles applicables à un autre aspect du jeu.
J'aimerais également qu'il me confirme quelque chose. Il a dit que M. Chrétien a retiré son opposition à l'égard du juge Gomery, mais je crois comprendre qu'il ne s'agit en fait que d'un report de la présentation d'objections. Même si M. Chrétien a décidé de ne pas en saisir la cour maintenant, il est libre de le faire n'importe quand. Il pourrait le faire juste avant le dépôt du rapport, ou encore après. Comment mon collègue peut-il affirmer que les objections ont été retirées et qu'il n'y a plus d'obstacle, alors qu'il ne s'agit en fait que d'un report et que M. Chrétien pourrait très bien décider de présenter des objections concernant le juge Gomery?
M. Joe Comartin: Monsieur le Président, je ne sais pas dans quel monde la députée vit, mais si elle n'a pas entendue ce que j'ai entendu, à savoir que la réputation de chacun d'entre nous est ternie par cet épisode, elle vit dans un monde différent du mien, parce que c'est la réalité.
En ce qui a trait à la première question, c'est comparer des pommes et des oranges que de laisser entendre que le processus que nous avons adopté pour traiter des dossiers financiers au pays, c'est-à-dire inclure ceux-ci dans une loi budgétaire, équivaut à changer les règles. Ce n'est tout simplement pas le cas. Il est parfaitement correct d'agir de cette façon. Les gouvernements le font constamment, que ce soit au moment du budget ou plus tard au cours de l'année. Je ne suis pas du tout d'accord avec la députée lorsqu'elle dit que le fait de s'occuper de questions urgentes pour notre pays entraîne une violation des règles.
En ce qui a trait à la question de la députée au sujet des tactiques auxquelles peut recourir l'ancien premier ministre, celui-ci a parfaitement le droit, comme toutes les parties et tous les membres du public qui peuvent être touchés par les constatations et recommandations du juge Gomery, de contester celles-ci par la suite. En vertu du système en place, l'ancien premier ministre a le droit de contester les conclusions finales du juge Gomery, s'il estime que celui-ci a fait preuve de partialité à son endroit.
Ce sont là des droits courants. La députée est avocate. Elle connaît ces droits. Nous pouvons invoquer l'application régulière de la loi et aussi nos droits en matière de procédure. Dans ma déclaration préliminaire, je n'ai pas laissé entendre que l'ancien premier ministre avait renoncé à tous ces droits, et je ne lui conseillerais pas non plus de le faire. Il a le droit de se protéger, comme tous les membres de notre société.
Cela dit, le fait qu'il ait retiré hier sa requête en récusation du juge Gomery pour cause de partialité constitue un fait marquant. Cette décision nous donne une plus grande certitude que le juge Gomery présentera son rapport dans un avenir relativement proche, soit, on l'espère, d'ici la fin de l'année, afin que les Canadiens puissent prendre connaissance de ses constatations et recommandations.
Quant à savoir si d'autres démarches seront faites, par M. Chrétien ou d'autres parties, il n'y a rien que nous puissions y faire, mais ce qui s'est produit hier est une bonne chose pour les Canadiens.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, nous connaissons maintenant les positions officielles des libéraux, des bloquistes et des néo-démocrates. Leurs positions sont identiques. En effet, ils croient tous que cette motion, si elle est adoptée, sonnera le glas de la Commission Gomery. Selon le juge Gomery lui-même, modifier le mandat de la commission en cours de route marquerait inévitablement la fin de l'enquête. Comme le député vient de le dire, en tant qu'avocat, il irait immédiatement devant le tribunal pour dire que les règles visant à le protéger ont été modifiées après coup.
Quel motif secret se cache derrière cette motion? Le député a commencé en disant qu'il a dû attendre longtemps pour avoir sa journée de l'opposition, qui a été retardée, et voilà qu'il présente une motion qui, essentiellement, est contraire à la Charte des droits et libertés, contraire à la primauté du droit et à la notion d'application régulière de la loi, contraire au principe selon lequel une personne est innocente jusqu'à preuve du contraire.
Je veux que le député confirme de nouveau, pour la Chambre et pour ceux qui nous regardent, que selon lui cette motion mènerait inévitablement à la dissolution de la Commission Gomery, avec tous les bouleversements et toutes les dépenses que cela occasionnerait, et que c'était peut-être en fait irresponsable de saisir la Chambre d'une telle motion puisqu'elle pourrait bien être adoptée. Avec la pleine lune, cette motion pourrait bien être adoptée, et ce serait désastreux pour le Canada. C'était là mon premier point.
Il y a un deuxième point sur lequel j'aimerais que le député revienne. Il a dit à la toute fin de ses remarques qu'il voulait que le rapport soit factuel à tous les égards afin que les Canadiens puissent prendre une décision informée, si je le cite correctement. Si le rapport Gomery est fondé sur les règles de la preuve et sur les lignes directrices de la Cour suprême en ce qui a trait au processus d'enquête, ce qui ne comprend pas le processus de contre-interrogatoire qui existe en droit pénal, comment ce rapport pourra-t-il satisfaire aux critères qui permettraient aux Canadiens de prendre une décision informée? Comment peuvent-ils prendre une décision informée s'ils ne connaissent pas tous les faits qu'une enquête criminelle aurait mis au jour?
M. Joe Comartin: Monsieur le Président, en réponse à la première question, comme je l'ai mentionné dans mon discours, en fin de semaine dernière, certains médias ont dit que le Parti conservateur voulait proposer cette motion afin de nuire au NPD, notamment dans les provinces de l'Ouest, et j'imagine, dans une certaine mesure, au Québec. Si c'est là l'objectif poursuivi, il faut le déplorer.
Depuis quelques mois, depuis les dernières élections fédérales en fait, mon parti dit que nous sommes ici pour veiller à ce que le Parlement fonctionne rondement. Nous sommes prêts à nous montrer coopératifs et à faire tout ce que nous pouvons à cette fin. Nous ne sommes pas ici pour nous livrer à des manigances. Si c'est effectivement le but visé, il ne sera pas atteint en ce qui concerne le Québec puisque le Bloc a vu lui aussi quelle était la voie à suivre.
Je félicite de tout coeur les députés du Bloc pour la position qu'ils ont prise. Ils auraient très facilement pu faire fi de la primauté du droit, de la Charte et de l'application régulière de la loi et appuyer la motion, étant donné la colère qu'ils ressentent envers le gouvernement libéral, colère que partagent leurs électeurs. Je tiens à les féliciter le plus sincèrement possible de n'avoir pas pris la solution de facilité. Dans tous les cas, si c'était l'intention du Parti conservateur, au moins elle n'aura pas porté fruits au Québec grâce aux principes du Bloc.
En ce qui concerne la deuxième partie de l'histoire, soit que les députés du NPD, en s'opposant à la motion, seront victimes de leur geste dans les provinces de l'Ouest, si c'est vraiment là la conséquence, une fois de plus, nous avons pris une position de principe. Cette motion ne convient pas. Telle que libellée, elle est inacceptable. Une fois de plus, nous appuierions la motion si le Parti conservateur était disposé à la modifier de manière à ce qu'elle tienne compte des restrictions légales que le juge Gomery doit respecter.
En ce qui concerne la deuxième question, qui porte sur une décision éclairée, les Canadiens veulent des réponses pour de nombreuses raisons. Certaines parties pourraient être poursuivies en justice. Certaines l'ont d'ailleurs déjà été. Des procès commencent en octobre. Les Canadiens voudraient peut-être que de l'argent soit recouvré. Des poursuites au civil devraient donc pouvoir être intentées. Peut-être estiment-ils, comme l'ont dit les trois partis de l'opposition, que le Parti libéral devrait être une des parties qui est obligée à rembourser de l'argent.
La troisième porte sur la conséquence politique. Il y a une responsabilité politique. Le juge Gomery peut formuler son rapport clairement mais il est incapable de déterminer qu'une personne devrait faire l'objet de poursuites criminelles, qu'une autre personne devrait être poursuivie et que, sur le plan politique, les libéraux devraient être mis à la porte. Cependant, en déterminant les faits et en formulant ses recommandations, il peut aider le public à prendre ses propres décisions dans chacun de ces domaines.
M. Peter Julian: Monsieur le Président, il ne semble pas y avoir quorum à la Chambre.
Et les députés ayant été comptés:
Le vice-président: Il a fallu quelques secondes pour compter tout le monde, mais il y a quorum.
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, PCC): Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec le député de Niagara-Ouest.
Aujourd'hui, nous débattons de la motion du Parti conservateur qui se lit comme suit:
Que la Chambre demande au gouvernement de modifier l’article k) du mandat de la Commission Gomery pour que le commissaire puisse donner des noms et assigner des responsabilités. |
Cette motion fait suite aux propos que le premier ministre a tenus à la télévision lorsqu'il s'est adressé aux Canadiens, le 21 avril. Dans ce message télévisé, le premier ministre a dit « Lui seul [Gomery] sera capable de nous dire ce qui est vraiment arrivé et qui est responsable ». Voilà, le premier ministre a dit aux Canadiens que seul le juge Gomery pourrait dire qui est responsable de tous les problèmes et de la mauvaise gestion, de la corruption et de l'utilisation inappropriée des deniers publics dans le cadre du Programme de commandites.
L'alinéa k) du mandat de la Commission Gomery dispose notamment:
que le commissaire reçoive instruction d'exercer ses fonctions en évitant de formuler toute conclusion ou recommandation à l'égard de la responsabilité civile ou criminelle de personnes ou d'organisations... |
Voilà un extrait clair du mandat de la Commission Gomery. Le juge ne peut tirer de conclusion ou faire des recommandations concernant la responsabilité de personnes ou d'organisations. Je tiens à ce qu'il soit clair que le juge Gomery lui-même comprend qu'il ne peut ni donner des noms ni assigner des responsabilités. En fait, dans sa déclaration liminaire, il a lu l'alinéa k) que je viens tout juste de lire et il a ajouté:
La Commission n'a pas le pouvoir d'imputer une responsabilité criminelle ou civile en dommages relativement à des sommes d'argent perdues ou gaspillées; elle n'en a ni la capacité ni l'intention de le faire. |
Voilà ce que le juge a dit. Même si le premier ministre a dit aux Canadiens que seul le juge Gomery serait capable de nous dire qui est responsable de l'activité organisée visant à extorquer des centaines de millions de dollars aux contribuables canadiens, il ressort très clairement, à la lecture du mandat de la commission et d'après l'interprétation que le juge lui-même fait de son mandat, qu'il n'est pas en mesure de désigner des coupables et de dire qui est responsable de ce qui s'est produit dans le Programme de commandites. Je lis de nouveau un extrait de l'alinéa k):
...en évitant de formuler toute conclusion ou recommandation à l'égard de la responsabilité civile ou criminelle de personnes ou d'organisations... |
Si seul le juge Gomery peut nous dire qui est responsable, mais que son mandat l'en empêche, nous avons un problème. Cette motion vise à régler ce problème et à faire en sorte que le juge Gomery, qui a consacré plusieurs mois et énormément d'argent à l'audition de nombreux témoins, puisse nous dire en fin de compte ce que lui seul, aux dires du premier ministre, peut nous dire: qui est responsable.
Pour qu'il puisse le faire, nous devons modifier son mandat. Nous devons supprimer l'interdiction contenue dans l'alinéa k), selon lequel il ne peut formuler de conclusion ou de recommandation à l'égard de la responsabilité de qui que ce soit. Sinon, quel serait la raison d'être de cette commission d'enquête? Les libéraux et nos amis du NPD disent que les règles du jeu ne peuvent être changées au milieu de la partie.
Nous formons le Parlement du Canada, la plus haute instance du pays en matière de lois, de procédure et de processus. Il est évident que nous pouvons changer le mandat du juge Gomery. Les libéraux ont tellement peur que le sol se dérobe sous leurs pieds qu'ils ont eux-mêmes proposé de présenter une autre motion demain. Ils ont tenté de le faire aujourd'hui. Ils veulent présenter une motion portant que la Chambre confirme que le commissaire a le pouvoir de mentionner des noms et d'assigner des responsabilités.
Je ne sais pas exactement comment la Chambre pourrait affirmer cela, étant donné que le mandat du juge Gomery stipule: « ...en évitant de formuler toute conclusion ou recommandation à l'égard de la responsabilité... »; pourtant, les libéraux veulent que nous adoptions demain une motion disant qu'il a ce pouvoir. C'est exactement ce que nous voulons faire aujourd'hui, alors je ne vois pas pourquoi ils se livrent à ces manigances. Soit M. Gomery a le droit de donner des noms et d'assigner des responsabilités, soit, comme il le dit lui-même, il n'a pas ce droit. Le juge Gomery a dit que la commission ne peut pas établir la responsabilité civile ou criminelle. Elle n'en a pas le pouvoir et ce n'est pas sa raison d'être.
Il y a quelque chose qui cloche ici, et nous devons réagir. Nous sommes dans une situation très particulière; en effet, pour la première fois, c'est le parti au pouvoir qui fait l'objet d'une enquête et qui est accusé d'avoir orchestré un plan afin de frauder les contribuables.
La suggestion du gouvernement voulant que la Cour suprême dise que nous ne pouvons agir ainsi est une ineptie. Le premier ministre du Canada a déclaré que seul le juge Gomery pouvait faire toute la lumière sur cette affaire. En fait, le premier ministre, la vice-première ministre et le ministre des Travaux publics ont répété à de multiples reprises qu'on ne ménageait aucun effort pour faire toute la lumière sur cette affaire et que le juge Gomery allait établir les faits. Or, nous nous apercevons ensuite qu'il n'en est rien. Il ne peut en fin de compte nous dire qui est responsable, non seulement sur le plan criminel, mais sur le plan civil. Le juge Gomery n'a pas ce pouvoir. Son mandat le lui interdit et le juge dit qu'il ne peut désigner des coupables.
Nous essayons de corriger la situation et de tenir la promesse du premier ministre qui s'est engagé à l'égard des Canadiens à ce que le juge Gomery nous dise ce qui s'est passé et qui est responsable. Tout à coup, il y a un grand tollé de la part des ministériels et de leurs amis néo-démocrates. Nous ne pouvons dire aux Canadiens qui est responsable. Le juge Gomery n'a pas ce pouvoir. Nous ne pouvons adopter une motion lui donnant ce pouvoir. C'est tout à fait inacceptable.
Nous savons que les libéraux sont inquiets, parce qu'ils essaient de présenter une autre motion qui va complètement à l'encontre du mandat du juge Gomery, de l'alinéa k) et de l'interprétation de son mandat par le juge Gomery lui-même. Quelle est la motion que les libéraux essaient de présenter? Va-t-elle modifier le mandat ou déclarer que le mandat dit une chose, alors qu'il n'en est rien manifestement? Pourquoi ne pas préciser clairement, comme nous le faisons dans notre motion aujourd'hui, que l'alinéa k) du mandat de la Commission Gomery sera modifié pour permettre au juge de donner des noms et d'assigner des responsabilités? Ou son mandat le lui permet ou non et le Parlement peut dire que c'est le cas ou non.
On laisse entendre que le juge Gomery verrait un problème là-dedans. Là encore, ce sont des inepties. Le juge Gomery a entendu des témoignages. Il a examiné les cassettes du vol de banque. Il sait que l'argent manque. Il sait qui l'a pris et qui conduisait la voiture utilisée pour s'enfuir, mais son mandat dit qu'il ne peut préciser qui s'est emparé de l'argent et qui a conduit la voiture utilisée par les voleurs. Ce que nous disons, c'est ce qu'il a ces renseignements et qu'il devrait les transmettre au Parlement.
J'exhorte la Chambre à souscrire à cette motion. Faisons connaître aux Canadiens toute la vérité sur cette affaire, comme ils le méritent.
Mme Jean Crowder (Nanaimo—Cowichan, NPD): Monsieur le Président, la question que je poserai à la députée porte sur le fait que les témoignages durent depuis plusieurs mois. Nous avons dépensé des millions de dollars des fonds publics pour le financement de la Commission Gomery. Nous avons la certitude que les Canadiens sont troublés et préoccupés par l'information révélée par celle-ci.
Je dois préciser que je ne suis pas juriste. Cependant, ce que j'ai compris des interventions précédentes, c'est que la Cour suprême a rendu un arrêt qui établit sans ambiguïté les paramètres de ce type d'enquête et que les responsabilités du commissaire ont été clairement définies.
Le député de Windsor—Tecumseh a dit que la motion irait à l'encontre de ce qu'a établi la Cour suprême. La députée pourrait-elle expliquer comment la motion serait perçue à la lumière des arrêts précédents de la Cour suprême?
Mme Diane Ablonczy: Premièrement, monsieur le Président, la Cour suprême du Canada n'empêche pas le Parlement de chercher à découvrir toute la vérité dans un cas aussi grave d'abus de l'argent des contribuables. Ce n'était pas le but de la Cour suprême lorsqu'elle a rendu sa décision.
Deuxièmement, c'est le Parlement qui a le dernier mot, car c'est lui qui légifère. Dans le cas qui nous occupe, le premier ministre du Canada lui-même a dit aux Canadiens que seul le juge Gomery est habilité à tirer des conclusions, à nous dire qui est responsable du scandale.
Troisièmement, le gouvernement lui-même, dans la motion qu'il a l'intention de présenter demain, après avoir tenté de la présenter aujourd'hui, déclare que la Chambre confirme que le commissaire a le pouvoir de nommer des noms et de désigner des responsables.
Je suis convaincue que le gouvernement ne présenterait pas une motion qui irait à l'encontre des décisions de la Cour suprême, ce qui n'est même pas le cas actuellement. En fait, c'est un argument purement bidon que de dire que le juge Gomery, malgré toute l'information dont il dispose, tout l'argent qu'il a dépensé, tout le temps qui a investi, n'aurait pas le pouvoir de prendre la dernière mesure qui s'impose, celle-là même que le premier ministre affirme que lui seul est habilité à prendre, et dire aux Canadiens qui sont les responsables du scandale.
M. Pierre Poilievre (Nepean—Carleton, PCC): Monsieur le Président, c'est avec le coeur lourd que nous discutons encore une fois aujourd'hui de la question de la fraude libérale, de la corruption libérale, du vol commis par le Parti libéral et, de façon générale, de la mauvaise gestion libérale.
Nous constatons aujourd'hui que les libéraux s'emploient à empêcher le public de savoir qui est à blâmer pour toute la corruption libérale et le vol de fonds publics par les libéraux.
En ce qui concerne la fraude libérale, je voudrais poser au député une question sur la fameuse disposition secrète, l' alinéa k), qui a été insérée dans le mandat. Le député a fait valoir que rien ne devrait empêcher le juge Gomery de désigner les coupables et d'exposer ceux qui ont profité de la fraude libérale.
Cependant, nous avons entendu le ministre nous dire que le juge Gomery avait déjà ce droit. Quelques instants plus tard, il a ajouté que si nous lui conférions ce droit, cela aurait pour effet de faire dérailler le processus tout entier de l'enquête Gomery.
Je vois là une contradiction. Si le juge Gomery a déjà le droit de désigner les coupables de la fraude et de la corruption libérales, comme le ministre l'a fait valoir, en quoi notre motion nuit-elle au travail du juge Gomery? Si notre motion ne fait que réaffirmer un droit dont dispose déjà le juge Gomery, selon le ministre, celui-ci ne devrait donc pas croire qu'elle nuira au travail du juge. Elle ne viendrait que renforcer le statu quo.
Le député convient-il qu'il y a une contradiction?
Mme Diane Ablonczy: Monsieur le Président, mon collègue a raison. Ou bien le juge Gomery est habilité en vertu de son mandat à dire aux Canadiens qui est responsable et il est libre de le faire, ou bien il ne l'est pas. Je signalerai simplement que le texte du mandat dit clairement qu'il ne l'est pas. Le juge Gomery lui-même a déclaré ce qui suit:
La Commission n'a pas le pouvoir d'imputer une responsabilité criminelle ou civile en dommages relativement à des sommes d'argent perdues ou gaspillées... |
Nous voulons que non seulement le juge Gomery, mais aussi tous les Canadiens comprennent bien qu'on s'attend à ce que le juge Gomery impute la responsabilité des événements à certaines personnes et à ce qu'il nous dise qui tenir responsable de cette trahison des valeurs de notre démocratie.
Nous cherchons, par notre motion, à rendre tout cela parfaitement clair. Je ne vois vraiment pas comment il pourrait se trouver un seul député en cette Chambre pour ne pas voter en faveur de la clarté et de la certitude que nous recherchons pour les Canadiens. Le premier ministre lui-même a promis clarté et certitude. Pourtant, son gouvernement est prêt à laisser subsister le doute, et cela est inacceptable.
M. Dean Allison (Niagara-Ouest—Glanbrook, PCC): Monsieur le Président, j'interviens dans le débat sur la motion suivante:
Que la Chambre demande au gouvernement de modifier l’article k) du mandat de la Commission Gomery pour que le commissaire puisse donner des noms et assigner des responsabilités. |
L'alinéa k) du texte du mandat de la Commission Gomery prévoit ce qui suit:
que le commissaire reçoive instruction d'exercer ses fonctions en évitant de formuler toute conclusion ou recommandation à l'égard de la responsabilité civile ou criminelle de personnes ou d'organisations et de veiller à ce que l'enquête dont il est chargé ne compromette aucune autre enquête ou poursuite en matière criminelle en cours; |
L'alinéa k) interdit formellement au juge Gomery d'attribuer quelque responsabilité que ce soit à l'égard du scandale des commandites à une personne ou à une organisation. Il est bien sûr important que le juge Gomery dépose son rapport, mais les Canadiens ont déjà entendu parler des abus qui se sont produits dans le cadre de ce programme et des vols éhontés commis par le Parti libéral.
Permettez-moi de prendre quelques minutes pour rappeler à mes collègues et aux Canadiens certains des faits pertinents.
Il est bien établi que le premier ministre a promis de faire toute la lumière sur le scandale des commandites. Il est également bien établi que le premier ministre prétend n'avoir jamais été mis au courant de quelque acte préjudiciable que ce soit. Par suite de bon nombre de témoignages et d'autres éléments de preuve, nous nous rendons compte jour après jour que cela n'est tout simplement pas le cas.
On a vu récemment le premier ministre implorer de façon pitoyable les téléspectateurs canadiens en leur demandant d'accepter la nécessité pour le juge Gomery de publier son rapport avant la tenue d'élections. Encore un bel exemple d'indécision et de volte-face. Nous en avons vu aussi un exemple lors du déclenchement des dernières élections fédérales pour juin 2004.
Il s'est octroyé le mérite d'avoir créé la Commission Gomery, mais c'est aussi lui qui a retiré le dossier des commandites des mains du Comité des comptes publics. C'est lui qui a prorogé la Chambre. Pourquoi a-t-il agi de la sorte?
Il a fait fi du processus parlementaire en ne laissant pas le Comité des comptes publics entendre tous les témoins et publier ses constatations concernant le scandale des commandites. Il a déclenché des élections surprises, avant que le juge Gomery ne puisse entende un seul témoin et encore moins rédiger un rapport qui aurait permis aux Canadiens de connaître la vérité. Il a dit aux Canadiens que ceux qui avaient quelque chose à voir avec le vol de l'argent durement gagné des contribuables seraient tenus responsables.
Or, en réalité, le premier ministre a menotté le juge Gomery avant même que son enquête ne commence.
Dans leur scepticisme, les Canadiens ont obligé le premier ministre à se contenter de fonctionner avec un gouvernement minoritaire. Il a donc été obligé de respecter son engagement de permettre au juge Gomery de poursuivre son enquête. Il a eu pour stratégie cependant de ne pas inclure dans le mandat de la commission le pouvoir de désigner des responsables et d'attribuer le blâme.
En prévoyant la disposition k), le premier ministre a privé le juge Gomery de la possibilité de citer des noms dans son rapport final. Les Canadiens seront ainsi privés de tout ce que leur a promis le premier ministre. Encore une fois, les libéraux auront fait une promesse qu'ils ne tiendront pas.
Ce scandale, le pire de l'histoire du Canada, n'est ni un scandale canadien, ni un scandale québécois. Il s'agit d'un scandale libéral. Des centaines de millions de dollars de deniers publics ont fait l'objet de malversations, de blanchiment, pour aboutir mystérieusement dans des goussets libéraux. Pire encore, la rapine libérale a attisé la flamme séparatiste au Québec.
Si le premier ministre n'a rien à cacher et s'il souhaite sincèrement aller au fond des choses, il devrait permettre sans réticence au juge Gomery de nommer les responsables.Toutefois, compte tenu de la difficulté qu'on lui connaît à tenir parole, je me permets de douter de sa sincérité.
Depuis que le scandale des commandites a éclaté, il ne se passe pas une semaine sans que l'ampleur de la corruption des libéraux nous renverse. La semaine dernière, par exemple, nous avons appris, à la suite d'une vérification judiciaire effectuée à la demande du juge Gomery, que 100 millions de dollars de plus ont été détournés dans le cadre du Programme de commandites. Le gouvernement libéral a donc dépensé 350 millions de dollars de manière louche, sans compter les millions que coûte la commission et qui ne serviront qu'à constater des évidences.
Des deniers publics ont été volés et se sont retrouvés dans les poches des libéraux et de leurs amis. Nous savons qu'un fonds distinct de 750 000 $ a été créé. Toutefois, les témoignages sous serment des dernières semaines devant la commission révèlent qu'il est question de 2,5 millions de dollars et ce chiffre continue de monter.
Voilà maintenant que le premier ministre juge nécessaire d'utiliser un million de dollars et plus appartenant aux contribuables pour mettre sur pied un centre de crise. Il veut que les Canadiens croient que le scandale n'a rien à voir avec le gouvernement libéral actuel. Les témoignages laissent entendre le contraire.
En juin 1999, le bureau du premier ministre actuel s'est adressé aux responsables du Programme de commandites pour obtenir de l'argent pour une entreprise en particulier. L'ancien ministre des Travaux publics et responsable du programme, Alfonso Gagliano, a affirmé que le premier ministre actuel connaissait bien le programme.
L'homme responsable de l'attribution des contrats de commandite, Chuck Guité, a dit que le premier ministre actuel intervenait dans le processus de passation de contrats. Claude Boulay, qui est au centre du scandale, a expliqué en détail sa relation avec le premier ministre. La femme de M. Boulay, Diane Deslauriers, la reine de la collecte de fonds au Québec pour le Parti libéral, a elle aussi décrit sa relation avec le premier ministre actuel.
Alain Renaud a déclaré sous serment que l'adjointe du premier ministre a exercé des pressions pour que Groupaction obtienne de l'argent du Programme de commandites. Jean Brault a admis avoir versé 1,1 million de dollars au Parti libéral. Il a aussi admis avoir eu des personnes travaillant à la campagne des libéraux sur sa liste de paye afin de cacher la source de leurs revenus.
Le directeur général du Parti libéral au Québec, Benoît Corbeil, a confirmé avoir reçu de l'argent de Jean Brault pour payer des personnes ayant travaillé à la campagne électorale de 2000. Daniel Dezainde a admis que M. Gagliano l'avait envoyé voir Joe Morselli et le chef du cabinet du premier ministre, Jean-Marc Bard, pour trouver de l'argent pour le parti. Jacques Corriveau a admis avoir reçu environ 8 millions de dollars en commissions sur les projets de commandite, sans avoir pratiquement levé le petit doigt. Les témoignages nous en apprennent beaucoup.
Toutefois, ces témoignages et de nombreux autres faits ne seront d'aucune utilité si le mandat du juge Gomery n'est pas élargi. Mais si c'est le cas, alors pourquoi le premier ministre a-t-il cédé aux pressions en créant une fiducie pour rembourser l'argent volé? Le premier ministre a pris à l'avance les dispositions nécessaires pour protéger ses intérêts en ne laissant pas la Commission Gomery faire enquête sur les contrats de sondage.
Lors d'une séance récente du Comité des comptes publics, lorsque j'ai interrogé Warren Kinsella, stratège libéral et ancien chef de cabinet du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, ainsi qu'Allan Cutler, le dénonciateur à l'origine du scandale des commandites, ils ont confirmé que le premier ministre était au courant des concours truqués ayant permis d'attribuer des contrats à une entreprise avec laquelle il entretient des liens étroits, c'est-à-dire Earnscliffe. Ces agissements n'auraient pas pu être mis en lumière par la Commission Gomery parce que, comme par hasard, le mandat de cette dernière ne comprend pas l'attribution des contrats de sondage. Toutefois, la vérificatrice générale a bien indiqué que l'attribution de ces contrats était entachée d'importantes irrégularités.
Les résultats de la vérification judiciaire obtenus la semaine dernière ont permis de faire la lumière sur les dessous de l'attribution des contrats de sondage. Néanmoins, cette information ne se retrouvera jamais dans le rapport final du juge Gomery, parce que le premier ministre ne veut pas qu'elle y soit. Ce n'est pas ce que le premier ministre a promis aux Canadiens lorsqu'il a créé la Commission Gomery. Ce n'est pas ce qu'il continue de promettre aux Canadiens. Les promesses du premier ministre ne sont rien que des paroles vides de sens.
Pratiquement chaque jour, le premier ministre et ses subordonnés disent à la Chambre que la population canadienne a besoin qu'on laisse la Commission Gomery aller au fond des choses avant de porter un jugement. Pourtant, ils ne laissent pas le juge Gomery désigner les coupables. Laissons donc la population prendre connaissance de tous les faits, plutôt qu'uniquement les faits qui ne placent pas le premier ministre dans l'embarras.
La vraie injustice serait que les Canadiens ne puissent pas savoir qui a volé leur argent, qui a permis que de telles choses se produisent et qui a fermé les yeux. Voilà pourquoi cette motion doit être adoptée.
L'hon. Walt Lastewka (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) Monsieur le Président, je veux poser deux questions au député et je lui souhaite à nouveau la bienvenue, après qu'il eut boycotté la Chambre et y eut fait de l'obstruction systématique. Cela me préoccupe que le député donne des informations trompeuses. Le juge Gomery lui-même a déclaré:
...j'aurai le droit de tirer des conclusions au sujet des fautes éventuellement commises et de leurs auteurs [...] la question de savoir si les activités en question ont été influencées par des interventions politiques et, dans l'affirmative, par qui, dans quel but et avec quelles conséquences; la question de savoir si une personne ou une organisation du gouvernement du Canada a obtenu des avantages financiers, politiques ou autres grâce à ces activités et, dans l'affirmative, dans quel but et avec quelles conséquences; |
Le député d'en face veut-il nous dire qu'il ne croit pas le juge Gomery et qu'il n'est pas d'accord avec lui? Si c'est le cas, le deuxième volet de ma question concerne l'alinéa k), qui a été utilisé dans l'affaire d'Ipperwash par le gouvernement conservateur de l'Ontario; dans l'affaire de Walkerton, par le gouvernement conservateur de l'Ontario; dans l'affaire Stonechild en Saskatchewan, par le gouvernement néo-démocrate; enfin, dans l'enquête Grange sur la mort de nourrissons à l'Hôpital pour enfants malades, par le gouvernement conservateur de l'Ontario.
Est-ce qu'il nous dit que ces gouvernements ont eu tort et qu'il ne croit pas ce que le juge Gomery a déclaré? Je lui demanderais de répondre à ces deux questions.
M. Dean Allison: Monsieur le Président, je ne suis député que depuis un an. Une chose que j'ai apprise du Comité des comptes publics, c'est que ce sont les détails qui posent problème.
Si nous avons ce problème, c'est en partie en raison de bien des choses qui sont dites ou non, ou encore, qui sont écrites ou non. Je trouve tout à fait stupéfiant que des centaines de millions de dollars aient pu être détournés, dépensés à mauvais escient, volés et envoyés au Parti libéral. Lorsque nous interrogeons des ministres et des sous-ministres, il semble que nous ayons énormément de mal à demander des comptes, à déterminer où s'arrête la responsabilité et où elle commence.
Je comprends certes l'opinion du député, à savoir que le juge Gomery devrait pouvoir tirer des conclusions. Ce qui me préoccupe, c'est que, comme son mandat dit qu'il n'est pas autorisé à formuler toute conclusion ou recommandation à l'égard de la responsabilité civile ou criminelle, que se passera-t-il s'il a une occasion de le faire? Que se passera-t-il? Quelqu'un criera-t-il à l'injustice? Quelqu'un dira-t-il: « Je ne peux pas croire qu'il n'était pas autorisé à le faire. Il contrevient au règlement. »
J'ai été témoin de suffisamment de choses depuis le peu de temps que je siège à la Chambre pour comprendre que, bien souvent, ce sont les détails qui posent problème lorsqu'il faut déterminer ce qu'on est autorisé ou non à faire.
Je répondrai au député de St. Catharines en disant que, si le juge Gomery est autorisé à donner des noms, les députés ne devraient pas avoir de mal à appuyer cette motion si c'est vraiment le cas. Cela confirmerait ce que nous pensons au sujet de ce qu'il devrait être autorisé à faire aux termes de l'alinéa k).
M. Pierre Poilievre (Nepean—Carleton, PCC): Monsieur le Président, je remercie le député de représenter les habitants de sa circonscription et de dénoncer la corruption, le vol, la subornation et l'extorsion qui caractérisent désormais les libéraux. Je le félicite d'avoir fait cela.
Ma question concerne un point particulier que le député a abordé dans son discours. Le député dit que si, comme les libéraux le laissent entendre, le juge Gomery est bel et bien autorisé à désigner des coupables et à nommer des noms, la motion à l'étude serait, au pire, redondante. Elle réaffirme simplement un droit que le commissaire Gomery a déjà, au dire du gouvernement. Le député pourrait-il expliquer ce qu'il en est?
M. Dean Allison: Monsieur le Président, c'est aussi une des questions que je me pose. On nous a répété à qui mieux mieux comment le juge Gomery peut tirer des conclusions et formuler sa réponse. Je pense qu'il y a donc lieu de se demander pourquoi le parti ministériel et d'autres partis de l'opposition ont autant de réserves par rapport au fait que le commissaire puisse nommer des noms et désigner des responsables.
Si le juge Gomery peut faire cela, je ne comprends pas pourquoi nous passons tout ce temps à débattre de cette motion aujourd'hui, à moins que, comme je le soupçonne et comme je l'ai déjà dit, le gouvernement entrevoie un moyen détourné de se sortir de cette situation dès que le commissaire commencera à nommer des noms et à désigner des responsables.
Je partage l'avis de mon collègue. Pourquoi ne pas adopter la motion afin de renforcer et d'étayer ce que le gouvernement dit aux Canadiens, c'est-à-dire que tout cela est déjà prévu dans le mandat du juge Gomery? Pourquoi ne pas laisser le juge Gomery nommer des noms? Pourquoi ne pas le laisser désigner des responsables si le gouvernement croit effectivement qu'il peut le faire?
[Français]
L'hon. Irwin Cotler (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir l'occasion de débattre de la motion présentée par l'honorable député de Saanich—Gulf Islands concernant l'article k) du mandat de la Commission d'enquête sur le programme de commandites et les activités publicitaires.
On nous demande, dans cette motion, de modifier l'article k) du mandat de la Commission Gomery pour que le commissaire, l'honorable juge John Gomery, puisse donner des noms et assigner des responsabilités.
Mon but aujourd'hui est de faire comprendre aux députés pourquoi la Chambre ne devrait pas demander de modifier l'article k) du mandat, mais s'y opposer, et ce, pour plusieurs raisons. La motion est inappropriée, non fondée, redondante et préjudiciable à l'indépendance et à la conduite de la commission.
Faut-il tout d'abord rappeler que le gouvernement a mis sur pied une commission en vertu de la partie I de la Loi sur les enquêtes? Autrement dit, il s'agit d'une commission d'enquête, et non d'une cour. On doit rappeler cette distinction et insister sur celle-ci.
Pourtant, les personnes qui regardent les audiences de la commission à la télé, qui suivent les interrogatoires et contre-interrogatoires d'innombrables témoins et qui savent que le commissaire est un juge de la Cour supérieure du Québec pourraient être portées à croire qu'il s'agit d'un procès.
Aussi, la confusion s'explique en partie par la Loi sur les enquêtes, qui donne aux commissaires des pouvoirs qu'ont les juges. Ils ont, en vertu de l'article 4, le pouvoir d'assigner devant eux des témoins et de leur enjoindre de déposer et de produire les documents et autres pièces. En vertu de l'article 5, ils ont, pour contraindre les témoins à comparaître et à déposer, les pouvoirs d'une cour d'archives en matière civile.
Cependant, aucun article de la Loi sur les enquêtes ne donne aux commissaires qui sont chargés d'une commission d'enquête publique le pouvoir de décider comme un juge. Le rôle de tels commissaires est plutôt un rôle d'enquêteur qui fournit des conseils ou de l'aide au gouvernement sur des questions touchant le bon gouvernement du Canada ou la gestion des affaires publiques.
C'est exactement le cas avec la Commission Gomery. Le gouvernement l'a mise sur pied afin de, et je cite:
[...] faire enquête et de faire rapport sur les questions soulevées [...] par les chapitres 3 et 4 du Rapport de la vérificatrice générale du Canada [...] concernant le programme de commandites et les activités publicitaires du gouvernement du Canada [...] [et] de formuler les recommandations qui lui semblent opportunes, d'après les faits révélés par l'enquête [...] en vue de prévenir la mauvaise gestion des futurs programmes de commandites ou activités publicitaires. |
Nous l'avons souligné à maintes reprises: notre gouvernement tient à ce que la Commission Gomery continue son enquête, formule ses recommandations et nous fasse rapport. Nous nous sommes engagés à donner suite aux recommandations que le juge Gomery présentera dans son rapport final.
Le gouvernement a agi en conformité avec une loi adoptée par ce Parlement, à savoir la Loi sur les enquêtes, et en connaissance de la jurisprudence pertinente lorsqu'il ne demande pas à la Commission Gomery de décider de la responsabilité civile ou criminelle de qui que ce soit. C'est pourquoi l'article k) du mandat de la Commission Gomery n'est pas unique; on le retrouve dans les mandats d'autres commissions d'enquête.
[Traduction]
Ainsi, l'alinéa k) du mandat dit:
que le commissaire reçoive instruction d'exercer ses fonctions en évitant de formuler toute conclusion ou recommandation à l'égard de la responsabilité civile ou criminelle de personnes ou d'organisations et de veiller à ce que l'enquête dont il est chargé ne compromette aucune autre enquête ou poursuite en matière criminelle en cours; |
Cependant, il peut incriminer des personnes en vertu de l'article 13 de la Loi sur les enquêtes, la loi habilitante, et c'est cette nuance essentielle que les députés de l'opposition ne semblent pas saisir.
Il est important de comprendre qu'une commission d'enquête n'est pas un tribunal. Elle n'est pas tenue de respecter le droit de la preuve ou de procédure comme le sont les tribunaux. Peu importe le soin avec lequel une commission d'enquête mène ses audiences, elle ne peut offrir les mêmes garanties qu'un procès en matière de preuve ou de procédure.
La Commission Gomery est une commission d'enquête typique: les règles de la preuve y ont été assouplies et les témoins sont convoqués par citation pour témoigner de leurs actes notamment. Il est important de se rappeler qu'une commission d'enquête dont le but serait d'établir la responsabilité civile ou criminelle des personnes dont elle a ordonné le témoignage violerait les droit fondamentaux de ces gens et courrait le risque d'être invalidée par les tribunaux, comme on peut le constater dans certains jugements de ces tribunaux
Par exemple, au Canada, dans l'affaire (Procureur général) c. Canada (Commission d'enquête sur le système d'approvisionnement en sang au Canada), la Cour suprême du Canada a décrété ce qui suit:
L'enquête publique n'est jamais instituée pour déterminer la responsabilité pénale ou civile. Peu importe le soin apporté à la conduite de ses audiences, jamais une enquête ne peut offrir les mêmes garanties qu'un procès en matière de preuve ou de procédure. En fait, l'assouplissement même des règles de preuve, si courant dans les enquêtes, indique de façon évidente non seulement que le commissaire ne devrait pas conclure à la responsabilité pénale ou civile, mais qu'il n'en a pas le pouvoir. |
J'ajouterais que les accusations collectives ou catégoriques de l'opposition au sujet de fraude et de vol de la part des libéraux, que ces accusations collectives incessantes minent les principes de base de la primauté du droit, qui sont fondés sur la responsabilité individuelle et non collective ainsi que sur la présomption d'innocence et non sur la présomption de culpabilité. En ce qui concerne plus particulièrement la Commission d'enquête Gomery, ces accusations collectives visent à court-circuiter la commission avant que celle-ci n'ait entendu tous les témoignages, avant que tous les arguments n'aient été énoncés et avant que la Commission n'ait tiré ses propres conclusions et n'ait formulé ses recommandations.
L'opposition et le gouvernement devraient laisser la Commission Gomery poursuivre ses audiences conformément au principe de la primauté du droit, faire les constatations appropriées et formuler les recommandations que commande l'intérêt public pour empêcher que de tels gestes déplacés ne soient jamais plus posés.
La Cour suprême du Canada, dans l'affaire Starr c. Houlden, a statué ce qui suit:
La commission d'enquête ne peut être utilisée pour contourner la procédure en matière criminelle prescrite par le Parlement. Il s'agit d'une procédure coercitive qui est tout à fait incompatible avec notre notion de justice dans la recherche d'un crime particulier et quant à la détermination de la responsabilité civile ou criminelle. |
Nous devons distinguer le rôle d'une commission d'enquête de celui d'un tribunal. Une commission d'enquête n'est pas un tribunal. Voilà une deuxième raison pour laquelle l'alinéa k) du mandat ne devrait pas être modifié dans le sens proposé par le député. En termes simples, cela compromettrait les enquêtes et les poursuites criminelles en cours, que l'opposition souhaite également voir suivre leur cours, je l'espère.
Il semble malheureusement que l'auteur de la motion a négligé cet aspect important de l'alinéa k). Le député n'est pas sans savoir que le gouvernement a déféré certaines matières à la GRC pour enquête, tout comme l'a fait la vérificatrice générale. La GRC a porté des accusations contre quatre personnes. Nous avons toutes raisons de croire qu'elle poursuit ses investigations pendant les audiences de la commission d'enquête.
L'alinéa k) du mandat de la Commission Gomery vise à empêcher que le chevauchement — déjà encadré par les tribunaux eux-mêmes — du processus pénal et de la commission d'enquête n'ait pas de conséquences négatives. Effectivement, les tribunaux se sont déjà prononcés sur un tel chevauchement.
Dans l'arrêt Nelles c. Grange, la Cour d'appel de l'Ontario a jugé que même si le commissaire avait reçu instruction de faire enquête et de faire rapport relativement à la façon dont les enfants étaient décédés, le décret restreignait expressément la compétence du commissaire en lui interdisant de tirer toute conclusion de droit concernant la responsabilité civile ou criminelle. Le décret précisait aussi que même si les constatations et les conclusions du commissaire n'auraient pas un caractère exécutoire, elles seraient perçues par le public comme étant une décision et pourraient causer un préjudice important à toute personne nommée dans des poursuites judiciaires ultérieures. Le même principe s'applique dans le cas présent.
Ce que la motion du député demande à la Chambre pourrait compromettre les efforts actuels et futurs visant à tenir des individus responsables dans le cadre de poursuites criminelles actuelles ou futures. En un mot, cette motion minerait la règle de droit, affecterait l'indépendance de la Commission Gomery et compromettrait des poursuites criminelles ultérieures.
[Français]
Je vais donner au député une troisième raison pour laquelle l'article k) du mandat ne doit pas être modifié, soit l'équité procédurale. La motion aurait pour effet de changer les règles du jeu pour toutes les personnes en cause à la Commission Gomery. Le plus important est qu'elle obligerait le gouvernement à modifier les règles non pas au début des audiences, mais alors que les témoignages tirent à leur fin.
Avec cette motion, le député cherche involontairement, si l'on peut dire, à exposer la commission et le gouvernement à des risques juridiques. On pourrait s'attendre à ce que les parties en cause devant la commission allèguent qu'il est injuste, sur le plan des procédures, de modifier le mandat de la commission après qu'elles ont témoigné. On pourrait également s'attendre à ce que de longues procédures de contrôle judiciaire en découlent.
Je suis convaincu que les députés de l'opposition sont aussi impatients que ceux qui se trouvent de ce côté-ci de la Chambre de lire le rapport final que le juge Gomery doit déposer en décembre.
[Traduction]
Si les députés de l'opposition attendent ce rapport avec autant d'impatience que nous, pourquoi voudraient-ils proposer une modification qui pourrait avoir pour effet, même si ce n'est pas voulu, de retarder, sinon de compromettre, la poursuite des travaux de la Commission Gomery elle-même?
[Français]
Je veux être clair, on ne peut changer les règles de façon à risquer de refuser l'équité procédurale et à retarder le dépôt du rapport de la Commission Gomery.
J'en arrive à la dernière raison pour laquelle les députés voudront rejeter cette motion: la modification pourrait être redondante. C'est-à-dire que dans la mesure où la motion vise simplement à permettre à la Commission Gomery de tirer des conclusions pour déterminer si des fautes ont été commises et qui semble en être responsable, la Commission Gomery est déjà chargée de cette tâche.
Sur ce point, je tiens à répéter aux députés ce que le juge Gomery a dit dans sa déclaration préliminaire, le 7 mai 2004.
[...] j'aurai le droit de tirer des conclusions au sujet des fautes éventuellement commises et de leurs auteurs. L'Enquête ne débouchera sur ce genre de conclusions que dans la mesure où cela sera nécessaire pour l'exécution de son mandat. |
La Cour suprême du Canada a utilisé des termes semblables:
Il se peut que le commissaire doive évaluer la crédibilité des témoins et en tirer des conclusions [...] |
Et:
[...] peut tirer les conclusions qui s'imposent sur l'existence ou non d'une faute et sur l'identité des personnes qui semblent en être responsables. |
Le libellé du paragraphe k) du mandat de la Commission Gomery est conforme aux lignes directrices données par les tribunaux, notamment la Cour suprême du Canada. D'une part, la commission doit éviter de formuler toute conclusion ou recommandation à l'égard de la responsabilité civile ou criminelle de personnes ou d'organisations. D'ailleurs, les tribunaux ont indiqué clairement que ce rôle ne revient pas à une commission d'enquête. D'autre part, rien n'empêche le commissaire de tirer des conclusions pertinentes relativement à une faute possible et de dire qui semble en être l'auteur. Cette distinction est très importante et cruciale pour comprendre ce processus d'enquête.
En fait, dans sa déclaration préliminaire, le juge Gomery a indiqué clairement qu'il comprend que cette possibilité lui est offerte:
Bien que la Commission ne veuille pas et ne puisse pas formuler de conclusions ou de recommandations sur la responsabilité civile ou criminelle de quiconque, elle devra, selon son mandat, évaluer la preuve et tirer des conclusions de fait, notamment au sujet de la crédibilité des témoins. Selon l'article 13 de la Loi sur les enquêtes, sur lequel je reviendrai dans un instant, j'aurai le droit de tirer des conclusions au sujet des fautes éventuellement commises et de leurs auteurs. L'Enquête ne débouchera sur ce genre de conclusions que dans la mesure où cela sera nécessaire pour l'exécution de son mandat. |
Il n'est pas nécessaire de rappeler aux députés que c'est le présent gouvernement qui a créé la Commission d'enquête Gomery, parce que nous souhaitons aller au fond de cette histoire. Nous avons hâte de prendre connaissance du rapport de la commission qui est attendu en décembre, et nous sommes déterminés à mettre en oeuvre les recommandations.
Dans la mesure où la motion déposée par le député, dans laquelle on demande que la Commission Gomery puisse donner des noms et assigner des responsabilités, permettrait à la commission de tirer des conclusions relatives à la responsabilité civile ou criminelle, je ne puis appuyer cette motion.
Si je le faisais, je ne tiendrais pas compte de la distinction qui existe entre le rôle des commissions d'enquête et celui des tribunaux. Je risquerais de mettre en péril les tentatives visant à tenir les personnes concernées responsables de leurs actes par la voie de poursuite au pénal. Je modifierais les règles, ce qui pourrait nuire au caractère équitable de la procédure et empêcher la publication du rapport de la commission. Je compromettrais la commission d'enquête même et sa capacité de présenter son rapport, créant la possibilité qu'elle soit abolie sous prétexte qu'elle viole les droits fondamentaux des personnes. Je ne tiendrais pas compte du fait que la Commission Gomery a déjà le pouvoir de tirer des conclusions pertinentes quant à savoir s'il y a eu faute et qui semble en être responsable.
Enfin, en qualité de ministre de la Justice et procureur général du Canada, je dois respecter au plus haut point la primauté du droit. Aussi tout appui accordé à la motion constituerait un mépris total des décisions prises par le plus haut tribunal du pays, la Cour suprême du Canada.
[Traduction]
Comme je l'ai mentionné, en vertu de l'article 13 de la Loi sur les enquêtes, le juge Gomery a déjà le pouvoir de conclure que des personnes ont eu une mauvaise conduite. Si tel est l'objectif du changement proposé, celui-ci est inutile. Par ailleurs, si, comme je j'ai dit, le changement proposé vise à imputer une responsabilité civile ou criminelle à des personnes, celui-ci pourrait compromettre l'enquête pour les raisons déjà mentionnées. D'une façon ou de l'autre, il est clair que cette modification devrait être rejetée.
[Français]
J'invite tous les députés à voter contre cette motion car elle est inappropriée, inutile, non fondée, redondante et préjudiciable à la Commission.
[Traduction]
M. Jim Gouk (Colombie-Britannique-Southern Interior, PCC): Monsieur le Président, j'ai écouté non seulement le ministre qui vient d'intervenir, mais aussi les autres libéraux qui ont pris la parole au sujet de cette motion aujourd'hui. Ils semblent aborder le même thème. D'une part, ils disent que le juge Gomery a déjà les pouvoirs que nous réclamons pour lui. D'autre part, ils disent qu'il serait inacceptable de lui conférer les pouvoirs que nous réclamons pour lui. De toute évidence, on dit que le juge Gomery ne peut pas recommander que des accusations soient portées.
Permettez-moi d'utiliser une analogie. Prenons une banque et appelons-la Banque du Canada. Disons qu'elle a été dévalisée plusieurs fois. Elle l'a été par des bandes, puis par d'autres groupes plus petits qui n'étaient pas associés aux premières bandes, et encore par des voleurs qui l'ont dévalisée à leur tour.
Les policiers mènent une enquête. Ils mettent la main au collet des personnes qu'ils croient être les coupables de l'un ou de plusieurs des vols. Ils disent tenir les personnes qu'ils croient être les coupables et ils portent des accusations contre elles. C'est à la Couronne, pas à la police, qu'il appartient ensuite de prouver si ces personnes sont coupables ou pas. Les policiers recommandent que des accusations soient portées à partir des éléments de preuve qu'ils ont réunis.
Nous ne demandons rien de plus en ce qui concerne le juge Gomery; nous demandons qu'il puisse recommander que des accusations soient portées contre des personnes, des sociétés et des organisations. Le mandat que lui a confié le Parti libéral ne lui donne pas ce pouvoir.
J'invite le député à nous dire pourquoi le juge Gomery ne devrait pas avoir le même pouvoir qu'ont les policiers, c'est-à-dire le pouvoir de recommander que des accusations soient portées contre des personnes, des groupes ou des organisations, sans s'immiscer dans des causes criminelles. Une fois que des accusations ont été portées, les policiers peuvent encore mettre la main au collet d'autres personnes et recommander que des accusations soient portées contre elles aussi.
Pourquoi le juge Gomery ne peut-il pas en faire autant? De quoi le Parti libéral a-t-il peur?
L'hon. Irwin Cotler: Monsieur le Président, je suis heureux de la question parce qu'elle me permet d'établir une distinction claire que les tenants de la motion semblent avoir perdue de vue. En vertu de l'article 13 de la Loi sur les enquêtes, dont, je le répète, s'inspire le mandat de la Commission Gomery, le juge Gomery a le pouvoir de tirer des conclusions quant à l'inconduite d'individus.
Il peut conclure que tel ou tel individu s'est rendu coupable d'inconduite. Par conséquent, si c'est l'objectif visé par la motion, elle est inutile. Quelle serait l'utilité de modifier un mandat en vue d'y inclure un pouvoir qui s'y trouve déjà? Cela n'aurait aucun sens et aurait des effets néfastes, car cela pourrait retarder le processus d'enquête en cours en entraînant des poursuites judiciaires ou d'autres procédures semblables parce que la modification arriverait à la fin des travaux de la commission d'enquête.
Par contre, si la motion vise à permettre que des personnes soient déclarées civilement ou criminellement responsables, cela est interdit par la loi, notamment parce que cela compromettrait l'enquête pour les raisons que j'ai mentionnées plus tôt. D'après ce que le député vient de dire au sujet de la possibilité de recommander que des accusations soient portées contre certaines personnes, il semble que c'est ce que vise la motion.
Le député ne peut pas l'emporter sur tous les tableaux. S'il veut modifier le mandat légalement confié au juge Gomery pour lui permettre de conclure que certains individus se sont rendus coupables d'inconduite, c'est inutile parce que ce pouvoir existe déjà. Proposer une telle modification n'est pas seulement inutile, c'est nuisible.
Si, d'après ce que l'on peut conclure des paroles du député, il veut transformer l'enquête de la Commission Gomery en enquête policière, cela est interdit par la loi. La Commission Gomery n'a pas le pouvoir de déclarer quelque individu que ce soit civilement ou criminellement responsable de quoi que ce soit. Si la motion vise à faire ce que le député vient de dire, elle risque de faire dérailler les travaux de la commission. Cela mettrait fin à toute poursuite au criminel. La motion porterait atteinte à notre objectif commun, qui est de connaître la vérité. Je respecte l'objectif du député, mais je dois franchement dire que cela donnerait le résultat contraire de ce qu'il souhaite, à savoir parvenir à la vérité dans le respect de la loi.
M. Brian Fitzpatrick (Prince Albert, PCC): Monsieur le Président, je ne veux pas me lancer dans un débat avec le ministre de la Justice en matière de jurisprudence, car il en sait probablement beaucoup plus que moi à ce sujet. Cependant, je veux faire une observation qui figurera au compte rendu pour le bénéfice de tous.
Lorsque le premier ministre a créé la Commission Gomery, il a dit qu'il était furieux. Il a dit aux Canadiens qu'il ferait tout en son pouvoir, par l'entremise de la Commission Gomery, pour s'assurer que les coupables subissent la pleine rigueur de la loi. Si je comprends bien ce qui se passe aujourd'hui et que les libéraux ne peuvent appuyer notre motion, je dirais que le premier ministre du Canada a bien failli sérieusement déformé ce que représente la Commission Gomery pour tous les Canadiens.
Dans son discours télévisé il y a quelques semaines, il a dit la même chose. Il nous a dit qu'il fallait attendre les résultats de la Commission Gomery, qu'il irait au fond des choses et que les coupables paieraient. Aujourd'hui, le ministre de la Justice a déclaré que le juge Gomery ne peut porter d'accusations, que les coupables ne peuvent être traduits en justice et que cela n'est pas dans le mandat de la Commission. Ce n'est pas exactement ce que le premier ministre a dit aux Canadiens.
L'hon. Irwin Cotler: Monsieur le Président, je respecte le souhait du député de faire la lumière sur cette affaire. D'ailleurs, c'est exactement le but qui visait le premier ministre en mettant sur pied la Commission d'enquête Gomery. C'est le député, non le premier ministre, qui fait une déclaration trompeuse en ce qui concerne le mandat de la commission. Le premier ministre comprenait bien qu'il faut respecter la Loi sur les enquêtes lorsqu'on met sur pied une commission d'enquête.
En vertu de l'article 13 de la Loi sur les enquêtes, la Commission Gomery a le pouvoir d'établir si certaines personnes peuvent être incriminées d'une faute, mais, en soi, elle n'a pas le pouvoir d'intenter des poursuites au criminel. Cela ne signifie pas pour autant qu'il ne peut y avoir de poursuites criminelles. En fait, quatre poursuites criminelles ont déjà été intentées. Cela n'exclut pas la possibilité d'imputer des responsabilités civiles. Des poursuites civiles sont déjà intentées à l'égard du recouvrement de biens pour un total de 41 millions de dollars.
Le député ne semble pas saisir la distinction cruciale qui existe entre la Commission Gomery et un tribunal. La Commission Gomery n'a pas le pouvoir d'imputer de responsabilité, ni sur le plan civil, ni sur le plan criminel. Seul un tribunal peut le faire. La Commission Gomery peut tirer des conclusions et faire des recommandations pour prévenir les actes répréhensibles; elle peut, dans le cas qui nous intéresse, établir l'inconduite et permettre, suite à la publication de ses conclusions et recommandations, que soient intentées des poursuites criminelles ou civiles, conformément à la règle de droit et aux principes juridiques.
On doit avoir au moins suffisamment de respect pour la Commission Gomery et pour les principes juridiques pour permettre que tous les témoignages soient entendus, que tous les arguments soient exposés et que toutes les conclusions soient tirées avant de chercher à tirer des conclusions de culpabilité, à porter des actes d'accusation collectifs et à court-circuiter la Commission Gomery, si ce n'est à compromettre son indépendance, son application et son efficacité.
L'hon. Keith Martin (secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais féliciter le ministre de la Justice pour son savant exposé sur la différence entre les mandats et les pouvoirs d'une commission d'enquête et d'un tribunal. Tous les députés et surtout le public veulent s'assurer que les personnes qui ont commis des actes répréhensibles seront traînées devant les tribunaux, reconnues coupables et poursuivies en justice.
Le ministre de la Justice pourrait-il expliquer au public ce qui pourrait être fait pour que les personnes qui ont commis des crimes, aux termes actuels du Code criminel, soient poursuivies en justice?
L'hon. Irwin Cotler: Monsieur le Président, conformément aux principes fondamentaux de la primauté du droit, s'il y a lieu de croire qu'un crime a été commis, une poursuite au criminel peut être intentée. Comme je l'ai dit, dans le cas qui nous occupe, quatre poursuites au criminel, ainsi que des procès en responsabilité civile, ont déjà été intentés.
L'élément crucial est que le mandat de la Commission Gomery ne lui permet pas d'intenter ou de recommander des poursuites au criminel ou des procès en responsabilité civile, ni de se prononcer sur la responsabilité criminelle ou civile. Seuls les tribunaux ont ce pouvoir.
Par contre, la Commission Gomery peut présenter des constatations des faits. Ces constatations des faits peuvent mener à la détermination d'actions fautives, qui peut ensuite mener à la mention de noms. Elle peut faire des recommandations relatives aux objectifs généraux et au mandat de l'enquête. Cependant, les mécanismes normaux de poursuite et de procès de notre pays doivent pouvoir s'exercer. La Commission Gomery ne peut intenter de procès. Elle ne peut qu'en venir à la conclusion qu'il y a eu des actions fautives. Les poursuites ne peuvent être intentées que par l'entremise du processus criminel normal.
La Commission Gomery est chargée de faire la lumière sur les gestes posés dans le cadre du Programme de commandites et de nous permettre de constater enfin ce qui s'est réellement passé, quels sont les faits, les circonstances, le contexte et ainsi de suite. Cela permettra de procéder selon le principe de la primauté du droit.
M. Jim Prentice (Calgary-Centre-Nord, PCC): Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec la députée d'Edmonton—Spruce Grove.
J'ai écouté avec intérêt le ministre de la Justice et procureur général du Canada, et je trouve ses propos très offensants.
D'abord, j'ai moi-même été commissaire du gouvernement fédéral. J'ai dirigé plus de 25 enquêtes publiques, au nom du gouvernement du Canada, dans le dossier des revendications territoriales autochtones. J'ai donc une bonne connaissance du cadre législatif qui régit les commissaires.
J'estime que, dans le cas de la Commission Gomery, le gouvernement du Canada tente très clairement d'abroger les règles qui régissent normalement les enquêtes publiques et les commissaires, afin de lier les mains du juge Gomery et l'empêcher de s'acquitter de sa responsabilité, notamment donner des noms et assigner des responsabilités.
J'ai l'intention de défendre cet argument, et je citerai certaines autorités auxquelles le ministre de la Justice s'est lui-même reporté.
Permettez-moi tout d'abord de citer de façon précise la motion à l'étude:
Que la Chambre demande au gouvernement de modifier l'article k) du mandat de la Commission Gomery pour que le commissaire puisse donner des noms et assigner des responsabilités. |
L'alinéa k) du mandat du juge Gomery stipule:
[...] que le commissaire reçoive instruction d'exercer ses fonctions en évitant de formuler toute conclusion ou recommandation à l'égard de la responsabilité civile ou criminelle de personnes ou d'organisations et de veiller à ce que l'enquête dont il est chargé ne compromette aucune autre enquête ou poursuite en matière criminelle en cours; [...] |
Comment pouvons-nous concilier cet énoncé avec les déclarations faites par le premier ministre? Dans son numéro du 13 mars 2004, le Windsor Star lui prête les propos suivants:
Je veux faire toute la lumière [sur le scandale des commandites]. Je veux que les moindres faits soient mis au jour et que toutes les personnes impliquées subissent les conséquences de leurs actes [...] |
Comment est-il possible de concilier les déclarations du premier ministre et les propos très commentés qu'il a fait à la télévision, il y a quelques semaines, et l'alinéa k) du mandat de la Commission Gomery? Ils sont inconciliables. En fait, il s'agit d'un scandale libéral, et le gouvernement libéral ne veut pas faire toute la lumière sur cette affaire.
Selon les mandats proposés, le juge Gomery peut présenter un rapport mais il ne peut pas nommer des personnes. C'est très inhabituel pour une enquête publique. Il suffit de se reporter à la Loi sur les enquêtes.
La Loi sur les enquêtes, qui figure au chapitre I-11 des Lois du Canada, traite précisément des pouvoirs des commissaires, à savoir le pouvoir d'assigner des témoins à comparaître, le pouvoir d'exiger la production de documents par assignation; le pouvoir de mener une enquête; le pouvoir d'obtenir l'aide d'autres personnes et le pouvoir de traiter avec les témoins.
La Loi sur les enquêtes ne limite pas les pouvoirs du commissaire comme on le voit ici. C'est du jamais vu. Cela ne fait pas partie de la Loi sur les enquêtes.
L'article 2 de la Loi sur les enquêtes prévoit simplement ce qui suit:
Le gouverneur en conseil peut, s'il l'estime utile, faire procéder à une enquête sur toute question touchant le bon gouvernement du Canada ou la gestion des affaires publiques. |
On ne prévoit pas de restriction. Nommer des noms ne fait pas l'objet d'une restriction. Désigner des coupables, non plus. Les commissaires qui font enquête au Canada n'ont pas de restrictions à respecter quant aux personnes qu'ils peuvent nommer.
Un seul commissaire au Canada, à savoir le juge Gomery, s'est vu imposer des restrictions. Nous devons nous demander pourquoi. C'est parce que les libéraux ne veulent pas aller au fond des choses.
Pourquoi ne veulent-ils pas faire toute la lumière sur cette affaire? Ils ne veulent pas le faire, car fondamentalement, 250 millions de dollars ont été versés au Québec par l'entremise du Programme de commandites — souvent avec aucun document, ou presque, à l'appui. De cette somme, 100 millions de dollars ont abouti directement entre les mains des agences de communications libérales, dont beaucoup n'ont rien fait de plus que transmettre des documents et prélever un pourcentage de l'argent.
De nombreux témoins ont comparu devant la Commission Gomery relativement non pas à leurs allégations, mais à leurs aveux. Des gens ont donné le nom de ceux qui avaient donné ou reçu de l'argent. Dans certains cas, des hauts dirigeants du Parti libéral ont reconnu qu'il y avait eu de la corruption.
Pour mettre cela en contexte, le type de corruption dont nous parlons comprend le vol de deniers publics, la commission de fraude contre le gouvernement, le blanchiment d'argent public et une conspiration touchant tous ces aspects. C'est le plus grave scandale dans l'histoire politique du Canada. Une commission d'enquête a été formée, mais elle n'a pas le pouvoir juridique de faire toute la lumière sur cette affaire.
Je le répète, j'ai effectué plus de 25 enquêtes pour le compte du gouvernement du Canada en tant que commissaire au même sens que le juge Gomery. Or, je n'ai jamais été confronté à une disposition comme l'alinéa k) qui limitait ma capacité de parvenir à des conclusions. Je ne connais aucun commissaire fédéral qui se soit jamais retrouvé dans cette situation.
J'ai été déçu d'entendre les observations du ministre de la Justice et procureur général du Canada dans cette enceinte, car je crois, et je le dis en toute déférence, qu'il a été sélectif dans ses observations et dans la jurisprudence qu'il a citée. La principale autorité au Canada en matière de commission d'enquête est en fait la décision que la Cour suprême du Canada a rendue en 1997 relativement à la Commission Krever. Elle porte très précisément sur ce qu'un enquêteur ou un commissaire d'enquête peut faire ou non et elle explique comment la primauté du droit est protégée et l'importance d'une commission d'enquête capable de faire toute la lumière sur une affaire sans empiéter sur la responsabilité civile ou criminelle.
La motion qui a été présentée aujourd'hui ne laisse entendre en aucune façon que le juge Gomery peut assigner une responsabilité civile ou criminelle, mais plutôt qu'on pourrait lui permettre de « donner des noms et assigner des responsabilités ». Le droit canadien précise très clairement que c'est tout à fait approprié.
Tout d'abord, je vais vous citer le sommaire de l'affaire Krever, où on dit ce qui suit:
Le commissaire a le pouvoir de tirer toutes les conclusions de fait pertinentes qui sont nécessaires pour expliquer ou appuyer les recommandations, même si ces conclusions peuvent nuire à la réputation de certaines personnes. De plus, le commissaire peut conclure à l'existence d'une faute sur la foi des conclusions de fait, pourvu qu'elles soient nécessaires à la réalisation de l'objet de l'enquête tel qu'il est décrit dans le mandat. |
Il n'y a là aucun problème de droit. Il n'y a aucune raison d'ordre juridique pour qu'un commissaire ne puisse donner des noms et attribuer des responsabilités.
Une voix: Celles de qui?
M. Jim Prentice: Un député demande celles de qui.
Avec le grand respect que j'ai pour le juge Gomery, je dois dire aussi qu'il me semble qu'une commission d'enquête qui ne peut ni donner des noms ni désigner des coupables est plutôt inutile. Il est étrange, n'est-ce pas, que ce soit ce que disent la jurisprudence et la Cour suprême du Canada. Je vais de nouveau citer la décision Krever, cette fois au paragraphe 38:
[...] les commissaires ont le pouvoir d'imputer une faute. Pour exercer ce pouvoir, les commissaires doivent aussi être habilités à établir les faits sur lesquels sont fondées les conclusions faisant état d'une faute, même s'ils nuisent à la réputation de certaines parties. S'il en était autrement, le processus d'enquête ne servirait essentiellement à rien. |
Plus loin, on lit ceci au paragraphe 39 de la décision rendue dans la cause Krever — il s'agit d'une décision rendue par la Cour suprême du Canada en 1997:
Ces conclusions de fait peuvent fort bien désigner nommément les particuliers et les organismes qui sont pris en faute. |
On résume au paragraphe 39 de la même décision:
[...] une enquête publique sur une tragédie serait bien inutile si elle ne permettait pas d'en identifier les causes et les acteurs de crainte d'atteinte à la réputation [...] |
La loi du Canada est très claire. J'espère que le ministre de la Justice prendra le temps d'examiner la question.
Il n'y a pas de conflit insurmontable entre le fait que le juge Gomery puisse donner des noms et faire son travail, d'une part, et, d'autre part, les poursuites au civil et au pénal qui suivent normalement leur cours. Soutenir autre chose, c'est mener la Chambre dans une direction qui n'est pas conforme à la loi au Canada.
Faisons toute la lumière sur cette affaire. Modifions les pouvoirs d'enquête du juge Gomery pour qu'il puisse donner des noms et désigner des coupables.
Je voudrais faire ressortir un autre point. Mon collègue d'en face, le ministre de la Justice, a dit qu'il fallait respecter le processus. Je dis quant à moi qu'il faut respecter les Canadiens, qui veulent aller au fond de cette histoire. Ils veulent savoir qui est responsable. L'enquête Gomery, telle qu'elle a été conçue, ne peut donner aux Canadiens les réponses qu'ils réclament.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, on nous a présenté de l'information intéressante aujourd'hui, y compris notamment les leçons à tirer des travaux de la Commission Krever. Dans sa sagesse, la Cour suprême nous a dit que les travaux de la Commission Krever ne visaient pas à trouver des coupables, ni à déterminer les responsabilités sur le plan civil ou criminel. Même si l'information recueillie par la commission devait conduire le public à croire à la culpabilité ou à la responsabilité civile de certaines personnes, la commission, elle, ne devait pas tirer de telles conclusions.
Le député est un avocat. Il connaît bien les règles de la preuve, les règles des contre-interrogatoires et les règles de la représentation par un avocat, qui doivent toutes être respectées dans le cas d'un procès criminel ou civil. Le député semble dire que, si nous voulons aller au fond des choses, il faut donner des noms et désigner des coupables, ce qui équivaut à déclarer des personnes coupables d'actes criminels.
Le député serait-il d'accord pour dire qu'avant que nous puissions aller au fond des choses, la Commission Gomery doit établir les faits dans son rapport et y identifier les personnes impliquées ainsi que les obligations qu'elles avaient? Puis, pour procéder à la dernière étape, ne faut-il pas tenir des procès civils ou criminels respectant la primauté du droit et permettant de déterminer en fin de compte si des gens sont coupables?
M. Jim Prentice: Monsieur le Président, j'ai un immense respect pour le député d'en face. Il a éclairci certains commentaires du ministre de la Justice.
En ce qui concerne la Commission Krever, la décision de la Cour suprême du Canada résume très clairement le pouvoir dont est investi un commissaire, tout en résumant également l'ensemble des lois canadiennes à cet égard. Je renvoie les députés au paragraphe 57 de l'arrêt de la Cour suprême et aux trois alinéas suivants, qui illustrent les lois canadiennes telles que résumées par la Cour suprême du Canada. Cela répondra à la question du député. Le premier alinéa stipule que:
[...] le commissaire a le pouvoir de tirer toutes les conclusions de fait pertinentes qui sont nécessaires pour expliquer ou appuyer les recommandations, même si ces conclusions peuvent nuire à la réputation de certaines personnes. |
Le deuxième alinéa stipule que:
le commissaire peut conclure à l'existence d'une faute sur la foi des conclusions de fait, pourvu que ces conclusions soient nécessaires à la réalisation de l'objet de l'enquête tel qu'il est décrit dans le mandat. |
Le troisième alinéa, très important, stipule que:
[...] le commissaire peut conclure qu'il y a eu manquement à une norme de conduite, pourvu qu'il ressorte clairement qu'il ne s'agit pas d'une norme légalement contraignante telle que la conclusion soit assimilable à une conclusion de droit au sujet de la responsabilité criminelle ou civile. |
C'est aussi simple que cela. Le juge Gomery doit avoir toute la latitude nécessaire pour s'acquitter de son travail important et pour tirer les conclusions de fait. Ce n'est pas son rôle de décider le la responsabilité criminelle ou civile. Cela est très clair. Rien de ce qui a été proposé aujourd'hui au sujet de son mandat ne porte à croire que le juge Gomery serait investi du pouvoir de juger de la responsabilité criminelle. Ce n'est pas ce qui a été dit. On a plutôt dit qu'en s'acquittant de son mandat, il pourrait tirer les conclusions de fait, nommer des personnes, juger de leur norme de conduite et les déclarer responsables. À partir de ce point, le processus criminel suivra son cours. Je pense que la loi est très claire.
L'hon. Keith Martin (secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté très attentivement les observations du député. Il est évident qu'il souhaite lui aussi que les personnes qui ont volé l'argent soient poursuivies, que l'argent volé soit remis et que des mesures soient prises pour que les deniers publics soient dépensés avec sagesse et efficacité.
Il est intéressant que les députés du Parti conservateur souhaitent que l'on établisse un système de contrôleur pour garantir une utilisation correcte des deniers publics. Ils veulent s'assurer que la GRC soit appelée et que les responsables soient poursuivis. Or, c'est justement ce qui a été fait. Nous avons établi un système de contrôleur. Nous avons appelé la GRC. Des poursuites ont été intentées et d'autres le seront.
Le député n'estime-t-il pas que le gouvernement fédéral a fait ce qui devait l'être en agissant exactement comme l'aurait souhaité le Parti conservateur, avant même que celui-ci ne demande quoi que ce soit?
M. Jim Prentice: Monsieur le Président, en peu de mots, je dirai que ce n'est pas le cas. Je ne suis pas d'accord.
Le gouvernement libéral a cherché à gagner du temps depuis le début. Aussi tôt qu'en 1995, on a averti les libéraux que le programme d'achats ne fonctionnait pas. En 1999, le Secrétariat du Conseil du Trésor a averti le ministre de l'époque. En 2000, une vérification du ministère des Travaux publics révélait l'existence de certains problèmes. En 2002, Paul Martin a reçu une lettre d'un haut dirigeant du Parti libéral qui l'avertissait de l'existence de certains problèmes.
Le président suppléant (M. Marcel Proulx): Puis-je rappeler au député de parler des députés en utilisant leur titre?
M. Jim Prentice: Monsieur le Président, en 2002, le premier ministre a reçu une lettre du président de la Commission permanente d’élaboration des politiques du Parti libéral dans laquelle ce dernier l'informe de l'existence de problèmes persistants et de rumeurs qui enflent. Il y a trois ans, l'opposition à la Chambre des communes a demandé pour la première fois la tenue d'une enquête publique sur le Programme de commandites. Le ministre des Finances avait dit l'époque qu'il ne croyait pas qu'il fallait instituer une telle enquête, mais qu'il fallait plutôt confier cette tâche à la vérificatrice générale.
La vérificatrice générale a présenté son rapport en 2004. Ce n'est qu'à ce moment-là, cinq ans après que les faits eurent été portés à l'attention du gouvernement, que le ministre des Finances a souscrit à l'idée d'une enquête publique. Ce n'est qu'à ce moment-là qu'il a accepté la tenue d'une commission d'enquête aux pouvoirs singulièrement restreints comme la Commission Gomery.
Est-ce que je crois que le gouvernement libéral a tenté sérieusement d'aller au fond des choses rapidement? Absolument pas. Tout ce qu'il a fait, il l'a fait à son corps défendant. En définitive, nous avons affaire non pas à un scandale national, mais à un scandale libéral.
Mme Rona Ambrose (Edmonton—Spruce Grove, PCC): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour appuyer une motion présentée par le Parti conservateur du Canada et visant à modifier l'alinéa k) du mandat de la Commission Gomery.
Je suis heureuse de pouvoir prendre la parole sur une motion de l'opposition et me prévaloir de ce droit démocratique parlementaire que nous ne pouvions plus exercer depuis un certain temps. Le gouvernement nous a privés de l'exercice de ce droit démocratique parce qu'il craint l'opposition, parce qu'il craint d'être tenu responsable de ses actes et, surtout, hélas, parce qu'il craint ces mêmes électeurs qui lui ont confié la tâche de gouverner.
En modifiant le mandat du juge Gomery, nous pouvons faire un premier pas vers le rétablissement de la confiance d'une population déçue envers ses élus.
[Français]
Le Canada est actuellement dirigé par un gouvernement sous enquête. Pour savoir ce qui arrive à notre argent, il faut attendre le verdict de la vérificatrice générale, du juge Gomery, de la GRC et de la Sûreté du Québec.
[Traduction]
C'est une bien triste situation. Nous sommes ici aujourd'hui pour discuter d'un moyen important d'empêcher que la situation ne se reproduise. Les libéraux ne permettent pas au juge Gomery de donner des noms ni de désigner les responsables du plus grand scandale de l'histoire du Canada. Le juge a donc les mains liées par le parti qui a commis les actes répréhensibles faisant l'objet d'une enquête. On ne peut y voir autre chose qu'une tentative délibérée pour éviter de rendre des comptes.
Des sondages récents révèlent que la confiance des Canadiens à l'égard des élus est à un niveau affreusement bas. Je crois fermement qu'il nous faut travailler sans relâche pour régler ce problème. Nous ne pouvons plus demeurer les bras croisés alors que la confiance de l'électorat à notre endroit se détériore lentement. Les institutions démocratiques du Canada ne doivent pas être entachées; c'est la raison de notre présence ici aujourd'hui.
En réalité, le premier ministre lui-même a dit: « Je veux aller au fond des choses. Je veux que chaque fait soit connu et que chaque personne impliquée dans ce scandale assume les conséquences de ses gestes ». L'opposition est entièrement d'accord avec le premier ministre. En permettant au juge Gomery de faire toute la lumière sur le scandale des commandites, nous remplirons la promesse du premier ministre.
De nombreux Canadiens soupçonnaient depuis longtemps que le Programme de commandites destiné au Québec avait été créé pour financer le Parti libéral à même l'argent des contribuables. Le juge Gomery, qui enquête sur les allégations de corruption liées au Programme de commandites, a récemment levé l'ordonnance de non-publication visant le témoignage d'un dirigeant d'agence de publicité, et les révélations entendues ont choqué les Canadiens des quatre coins du pays. On a découvert que ce dirigeant utilisait son entreprise pour blanchir d'importantes sommes d'argent appartenant aux contribuables afin de remplir les coffres du Parti libéral.
Jean Brault, ancien président de l'agence de publicité montréalaise Groupaction, a fourni des éléments de preuve détaillés selon lesquels il a versé un million de dollars de pots-de-vin au Parti libéral en échange de nombreux contrats pour des agences de publicité québécoises. M. Brault a aussi affirmé s'être fait demander de placer de loyaux serviteurs du Parti libéral sur sa liste de paye.
Ce scandale du Parti libéral touche chaque Canadien. L'argent que ce dernier a durement gagné aurait servi à frauder ses concitoyens. Au lieu d'unir le pays, les libéraux ont monté les provinces les unes contre les autres et les Canadiens les uns contre les autres. Le Parti libéral ne représente pas le Canada d'aujourd'hui ni les valeurs canadiennes.
Le Parti conservateur est d'avis que le témoignage rendu devant la Commission Gomery était loin d'être un cas isolé et facilement explicable. Ce n'était pas non plus le travail de quelques personnes incontrôlées. Il s'agissait plutôt d'une tentative systématique et délibérée en vue de détourner l'argent des contribuables dans un but purement partisan et de le faire d'une manière qui permette de déjouer les lois électorales et d'autres lois au profit du Parti libéral du Canada.
Nous sommes tous bien au fait du détournement systématique de l'argent des contribuables effectué par les libéraux. Il suffit de penser au registre des armes à feu, au cafouillis de DRHC dans lequel un milliard de dollars qui devaient être consacrés à la création d'emplois sont disparus, à l'achat injustifié de deux jets Challenger au montant de 100 millions de dollars par suite d'un marché conclu sans appel d'offres, et cette liste est loin d'être exhaustive. Il ne s'agit pas uniquement de politiques peu judicieuses et de gaspillage d'argent public. C'est un scandale beaucoup plus grave et important.
Les témoignages entendus jusqu'à maintenant indiquent que le programme de commandites a permis aux libéraux de transférer des fonds publics à des agences de publicité amies et de les retransférer ensuite dans les coffres du Parti libéral du Canada. Au cours des dernières semaines, le gouvernement libéral a pris plusieurs mesures extraordinaires pour distraire l'attention du public canadien de tout ce scandale et des allégations de gaspillage et de mauvaise gestion. Au cours des dernières semaines, de nouvelles dépenses équivalant à 25 milliards de dollars ont été annoncées. Après avoir conclu une entente secrète avec le NPD, le gouvernement a dit tout ce qu'on voulait entendre et prêté allégeance à tout le monde pour tenter de conserver le pouvoir. Même les postes au Cabinet sont devenus des récompenses pour ceux qui étaient prêts à appuyer la corruption gouvernementale.
La conséquence la plus grave de tout ce scandale s'est manifestement fait sentir au niveau de l'unité nationale. Ce qui est ironique dans tout cela, c'est que ce programme de publicité qui devait servir à promouvoir l'unité nationale a plutôt grandement porté préjudice au fédéralisme au Québec. Il a également accru les chances du Bloc québécois de ravir tous les sièges du Québec au cours des prochaines élections fédérales. La situation actuelle est très complexe et la seule option fédéraliste qui s'offre aux gens du Québec a pour nom le Parti conservateur du Canada.
Même le NPD a accepté de fermer les yeux sur la corruption libérale pour assurer quelques milliards de dollars de dépenses supplémentaires de la part du gouvernement.
Ce qui se passe au Québec est symptomatique d'un plus grave problème auquel le gouvernement doit faire face. Qu'il s'agisse du dossier de la péréquation ou du déséquilibre fiscal qu'il néglige de considérer, le gouvernement manque tout simplement de vision nationale. Alors que le Programme de commandites a nui aux chances des fédéralistes au Québec, d'autres mesures qu'a prises le gouvernement n'ont réussi qu'à raviver les rancoeurs. En acceptant des accords de péréquation uniques, le gouvernement a dressé les provinces les unes contre les autres. En traitant le Québec comme un instrument financier dans ses campagnes réélectorales, il n'a fait qu'accroître l'appui en faveur de la séparation.
Nous ne devons pas laisser le gouvernement libéral, par ce scandale, affaiblir nos institutions publiques, notre réputation dans le monde ou l'unité de notre pays. L'avenir de notre pays ne sera pas brillant si le gouvernement ne rend pas des comptes. Une saine gestion des fonds publics ne peut pas exister si on induit le Parlement et les Canadiens en erreur au sujet de l'attribution des contrats.
On ne peut pas prétendre défendre les valeurs canadiennes si on ne dit pas la vérité aux Canadiens. Aujourd'hui, les Canadiens exigent avec raison que les politiciens assument une plus grande responsabilité personnelle pour leurs actes. Au moment opportun, les Canadiens décideront également du sort qui attend le gouvernement.
Lorsque les Canadiens se prononceront sur le gouvernement, ils le feront en étant convaincus que le Parti conservateur du Canada fera toute la lumière sur le scandale et qu'un tel scandale ne se produira plus jamais.
J'ai été extrêmement fière de participer, en mars dernier, à Montréal, au congrès sur les politiques de notre parti, au cours duquel nous avons débattu de notre vision positive suivant laquelle le Canada peut retrouver un Parlement éthique et intègre.
Un gouvernement conservateur n'hésiterait pas à renforcer les fonctions de vérification interne et de contrôle du gouvernement pour faire en sorte que l'application des programmes corresponde à l'objet de ces derniers, que les dépenses soient mesurées par rapport aux objectifs prévus et que les dépassements de coûts soient immédiatement portés à l'attention du Parlement.
Un gouvernement conservateur veillerait également à ce que le bureau du contrôleur général fonctionne de façon indépendante et rende des comptes au Parlement. Son mandat serait de garantir le respect de normes et pratiques très rigoureuses sur la gestion des dépenses au sein de tous les ministères fédéraux, des sociétés d'État, des agences et des fondations.
Un gouvernement conservateur permettrait aussi à la vérificatrice générale de présenter ses rapports au greffier de la Chambre des communes même quand le Parlement ne siège pas. Une telle mesure aurait été particulièrement utile lorsque, l'année dernière, le gouvernement libéral a prorogé la session afin que la population ne soit pas informée de la teneur du rapport de la vérificatrice générale sur le Programme de commandites, dès le moment où les actes illégaux ont été divulgués.
Le député de Saint-Laurent—Cartierville a dit qu'il n'avait jamais rencontré quelqu'un au Québec qui lui a dit qu'il avait changé d'opinion au sujet du séparatisme après avoir vu une commandite. Voilà une affirmation qui en dit long de la part de quelqu'un qui a milité avec ferveur dans le sillage du référendum de 1995.
Ce programme est devenu un échec complet dès le départ. Si nous devons en retirer quelque chose, c'est de veiller à ce qu'une telle chose ne se reproduise jamais plus. Après avoir entendu dans un témoignage que Jean Carle, le chef de cabinet de l'ex-premier ministre Jean Chrétien, avait camouflé, au moyen de fausses factures, les détails d'une entente de commandite d'un montant de 125 000 $, le juge Gomery a eu cette remarque extraordinaire: « S'il s'agissait de trafic de drogue, on parlerait de blanchiment d'argent ».
Ce scandale a mis en cause certaines personnes précises et un parti politique corrompu. Le juge Gomery doit être autorisé à désigner des personnes par leur nom et à leur imputer des responsabilités dans cette affaire déplorable. Les Canadiens ne peuvent pas admettre que les auteurs de blanchiment d'argent s'en tirent en toute impunité.
Nul doute, la présente législature a eu comme toile de fond la Commission Gomery. Celle-ci en a dominé tous les aspects et a fait planer son ombre sur tous ses travaux. Rex Murphy, commentateur politique d'expérience, a eu cette réflexion: « Les livres d'histoire en parleront comme de la législature Gomery. »
Nous pouvons mettre un terme à cet épisode en modifiant l'alinéa k) du mandat de la Commission Gomery. J'espère que tous les députés appuieront la motion afin que les victimes de ce scandale, à savoir les contribuables canadiens, éprouvent le soulagement de savoir que les responsables ont répondu de leurs actes devant la justice.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, la première chose qui m'a frappé dans le discours de la députée a été l'allusion aux agences de publicité amies des libéraux. Cela m'a rappelé la déclaration faite devant la Commission Gomery, selon laquelle il existe deux catégories d'agences de publicité au Québec: les agences séparatistes et les autres. Ou encore le témoignage entendu par la commission, selon lequel la gestion du programme de publicité était encore pire sous le régime conservateur. Cela aussi, on l'a entendu dans le cadre des travaux de la Commission Gomery.
Si la façon de procéder, pour régler la question, est de citer des déclarations faites devant la Commission Gomery, alors il faut les citer toutes sans exception. Le plus important, c'est ce que le juge Gomery a dit, dans sa déclaration préliminaire, au sujet de ce qu'il pourrait faire en vertu de la Loi sur la preuve au Canada. Sa tâche consiste clairement à établir les faits et à formuler des recommandations.
Tous les autres députés qui ont pris la parole, y compris le collègue de la députée qui a parlé juste avant elle, ont dit clairement qu'il ressortait de la décision de la Cour suprême relativement à l'enquête Krever qu'il serait inconvenant que la commission d'enquête se prononce sur la responsabilité civile ou criminelle de qui que ce soit, ou même qu'elle donne l'impression qu'une telle responsabilité existe.
Si la commission d'enquête ne peut pas se prononcer sur la responsabilité civile ou criminelle, la députée conviendra-t-elle que le mandat de la commission se limite alors à l'établissement des faits et que, pour respecter la primauté du droit et l'application régulière de la loi, les poursuites civiles ou criminelles qui s'ensuivront devront être guidées par les conclusions de la Commission Gomery, si elle veut que les résultats qu'elle souhaite soient atteints?
Mme Rona Ambrose: Monsieur le Président, en ce qui a trait à l'argument du député portant que des agences de publicité reliées à divers partis ont été nommées à la Commission Gomery, je tiens à dire que je n'appuie aucun genre de corruption, à quelque moment que ce soit.
Le Parti conservateur du Canada est un parti différent. Il veut être jugé sur sa propre valeur et il va s'opposer fermement à tout programme qui ne fait pas l'objet d'un contrôle approprié et qui entraînerait des dépenses et le gaspillage des impôts payés par les contribuables.
Comme je l'ai déjà dit, il importe de noter certaines mesures positives qui sont prônées par le Parti conservateur du Canada et que j'aimerais bien voir le gouvernement prendre en considération. Les conservateurs aimeraient que le gouvernement renforce les fonctions de vérification interne et de contrôle, afin que les programmes soient exécutés d'une manière conforme à leur objectif. C'est précisément à ce niveau que ce programme a échoué dès le départ.
Cette mesure nous permettrait aussi d'évaluer les dépenses en fonction des objectifs et de faire en sorte que tout dépassement de coûts soit immédiatement signalé au Parlement. Peut-être que si cela avait été fait dans le passé, les conséquences désastreuses que nous constatons maintenant ne se seraient jamais produites.
Nous, députés conservateurs, avons aussi dit qu'il faut s'assurer que le contrôleur général exerce ses fonctions de façon indépendante et qu'il rende des comptes directement au Parlement. Une telle façon de procéder permettrait de faire en sorte que les normes et pratiques les plus rigoureuses en matière de gestion des dépenses soient appliquées au sein de tous les ministères fédéraux, sociétés d'État, agences et fondations. Je pense que ce sont des mesures que le député aimerait lui aussi voir son gouvernement prendre.
L'hon. Walt Lastewka (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, je respecte les propos de la députée au sujet du contrôleur général. Si je me souviens bien, c'est un gouvernement conservateur antérieur qui a aboli ce poste au début de 1993 et, en fait, notre gouvernement l'a rétabli. J'espère qu'elle ne tentait pas d'induire qui que ce soit en erreur.
Nous avons eu beaucoup de discussions plus tôt sur la possibilité que des personnes soient accusées, et ainsi de suite. La population canadienne demande si des gens vont être accusés ou condamnés à des peines. M. Paul Coffin, la première personne accusée dans le cadre du Programme fédéral de commandites, a plaidé coupable aujourd'hui à 15 accusations de fraude. Je me demande si la députée conviendrait avec moi que cela est la preuve irréfutable que des gens vont être accusés. Cette accusation a été portée grâce à la vérification judiciaire effectuée par l'avocat-conseil Gauthier. La personne a été accusée, elle a maintenant plaidé coupable et le prononcé de la peine suivra. Est-ce que c'est là une preuve formelle pour la députée que des gens vont être accusés ou est-ce qu'elle en doute toujours?
Mme Rona Ambrose: Monsieur le Président, je ne me souviens pas d'avoir dit quoique ce soit qui ait quelque chose à voir avec la question que le député vient de poser. Je fais remarquer à nouveau que si certaines de nos suggestions avaient été suivies, nous ne nous serions jamais retrouvés dans cette situation. C'est pourquoi les contribuables peuvent avoir l'assurance qu'après les prochaines élections, un gouvernement conservateur veillera à ce que les processus voulus soient en place, de manière à ce que cela ne se produise plus jamais.
Une des choses que j'ai soulevées dans mon discours, et je vais le faire à nouveau car je crois que c'est important, c'est qu'un gouvernement conservateur permettrait à la vérificatrice générale de déposer des rapports directement auprès du greffier de la Chambre des communes, même lorsque le Parlement ne siège pas dans le cas d'élections. Cette politique aurait évidemment été bénéfique, puisque c'est ce gouvernement libéral qui a prorogé le Parlement l'an dernier pour éviter que le rapport de la vérificatrice générale sur les commandites ne soit rendu public et qui n'a pas permis que la population reçoive les informations dommageables avant de se lancer en campagne électorale.
[Français]
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, je vous informe que je vais partager mon temps avec le député de Repentigny.
Tout comme l'a fait mon collègue, le député de Montmorency—Charlevoix—Haute-Côte-Nord et whip du Bloc québécois, je réitère l'opposition du Bloc québécois à la motion déposée aujourd'hui par le Parti conservateur.
Nous voulons tous que les responsables du scandale des commandites soient connus, que leurs actions soient dénoncées, que l'abus des deniers publics érigé en système au profit d'un parti politique soit puni. Nous voulons que l'argent qui a été obtenu illégalement par le Parti libéral, de l'argent qui sortait directement des coffres du gouvernement par l'entremise du programme fédéral des commandites, soit retourné au Trésor public. C'est ce que voulait le Bloc québécois lorsqu'il a présenté sa motion pour que soit créée la fiducie de « l'argent sale », une expression chère au député d'Outremont.
Le Bloc a obtenu gain de cause et le gouvernement libéral, inquiété par la menace d'une élection prochaine, a décidé de donner suite à la décision de la Chambre en annonçant la création d'une fiducie de 750 000 $, et ce, à la veille d'un vote de confiance. C'est un montant qui nous apparaît bien insuffisant. En effet, le seul témoignage du président de Groupaction, Jean Brault, a permis d'identifier pas moins de 2,2 millions de dollars qui auraient été versés à la caisse du Parti libéral du Canada par le biais du scandale des commandites.
Les nombreuses questions du Bloc québécois en Chambre, les odeurs de malversation et l'apparente mauvaise gestion du programme des commandites ont contraint le gouvernement à mettre sur pied une commission d'enquête selon les règles de la loi fédérale sur les enquêtes.
Le gouvernement a demandé au juge Gomery d'exercer ses fonctions en évitant de formuler toute conclusion ou recommandation à l'égard de la responsabilité civile ou criminelle de personnes ou d'organisations, et de veiller à ce que l'enquête dont il est chargé ne compromette aucune autre enquête ou poursuite en matière criminelle en cours.
C'est la raison pour laquelle certains témoins ont d'abord été entendus à huis clos, avant que le juge accepte de rendre publique une partie ou la totalité de leur témoignage.
Nous souhaitons que le rapport du juge, qui devrait arriver d'ici la fin de l'année, nous permette de nous faire une idée sur les fautes qui auraient été commises et sur leurs auteurs pour que le gouvernement puisse ensuite intenter des poursuites civiles ou criminelles, s'il y a lieu.
Les collègues conservateurs voudraient , eux, voir modifier le mandat du juge Gomery. C'est comme si à la dernière minute de jeu, un arbitre décidait de changer les règlements, ce qui modifierait le résultat final de la partie. Cela est impensable!
S'il fallait modifier le mandat du juge Gomery, il faudrait permettre aux témoins, à tous les témoins, de revenir devant la Commission en étant au fait des conséquences possibles qui découleraient de leurs témoignages, allégations et admissions.
Le commissaire Gomery n'a pas mené ses interrogatoires dans le but de porter des accusations puisque tel n'était pas son mandat. Ainsi, les témoignages entendus sont certainement incomplets pour permettre au commissaire de désigner des responsables.
Ajoutons que les travaux de la Commission Gomery reposent sur une promesse: on invite les témoins à tout dévoiler en échange de la promesse que le juge ne formulera pas de recommandations sur la responsabilité civile ou criminelle des individus. On ne peut pas rompre cette promesse en cours de route. Voilà pourquoi nous sommes contre la motion présentement devant nous.
Le mandat de la Commission Gomery ratisse assez large pour que nous en apprenions des vertes et des pas mûres. Des individus comme Marc-Yvan Côté, un libéral notoire et ex-ministre libéral du Québec, a admis à la commission avoir reçu 120 000 $ comptant pour donner un coup de pouce aux circonscriptions orphelines de l'Est du Québec, lors de l'élection de 1997, dans le but de avoué de battre le Bloc québécois.
Le journal Le Devoir, dans son édition du 6 mai, mentionnait, et je cite: « Ces sommes ont servi à arroser les circonscriptions acquises au Bloc québécois, dites « orphelines » dans le langage libéral, lors des élections de 1997.
Le Devoir mentionnait également: « Cet argent sale n'est pas apparu dans les dépenses officielles du parti, une infraction à la loi électorale. '' Il y a eu une irrégularité, je vous l'admets [...] monsieur le commissaire, il n'y avait pas de reçus. C'était inconnu '' a dit M. Béliveau, le premier homme d'honneur du Parti libéral à accepter le blâme pour le financement occulte de cette formation politique. »
Cette admission a fait trembler l'organisation libérale dans ma circonscription. En effet, l'exécutif libéral et le candidat de 1997 se sont sentis obligés de se justifier en affirmant à la presse locale ne pas être du nombre des circonscriptions à avoir reçu une enveloppe brune. Il reste qu'en 1997, le porte-couleur local des libéraux s'est fait très discret; ce sont plutôt les bonzes du Parti libéral qui ont fait la campagne contre moi, avec Alfonso Gagliano en tête, un personnage qui passait régulièrement par Drummondville.
En 1997, en 2000 et l'an dernier, en 2004, les libéraux ont mordu la poussière dans Drummond, une circonscription fortement souverainiste. D'ailleurs, la station de radio CJDM menait récemment un sondage. La question était la suivante: « À la suite du scandale des commandites, souhaitez-vous que le Québec accède à la souveraineté? ». Lors de ce sondage, 69 p. 100 des répondants ont répondu: oui, un résultat est semblable à ceux des référendums tenus sur la question nationale au Québec.
Cela étant dit, il est important que le commissaire Gomery puisse nous déposer son rapport le plus rapidement possible et qu'il ait toute la latitude pour faire la lumière sur les faits.
Une fois que le rapport aura été porté à notre connaissance et à celle du grand public, il reviendra à la GRC, au directeur général des élections et au ministère du Revenu de porter des accusations.
Puisque le premier ministre s'est engagé dans son adresse officielle aux électrices et aux électeurs à déclencher des élections dans les 30 jours suivant le dépôt du rapport, je crois que c'est à la population que reviendra le mandat de punir les responsables politiques de ce scandale, tout comme elle l'a fait lors de l'élection de 2004.
Nous n'insisterons jamais assez pour dire que le scandale des commandites n'est pas un scandale québécois. C'est un scandale libéral, monté de toutes pièces par des gens oeuvrant pour le compte du Parti libéral. La preuve est faite devant la commission et même devant les tribunaux.
Ce matin, l'ancien président de Coffin Communication, Paul Coffin, a plaidé coupable à 15 chefs d'accusation de fraude. La firme de publicité de M. Coffin a reçu environ 8 millions de dollars de contrats de commandites du ministère des Travaux publics, ce qui lui a permis d'obtenir des revenus de 2,7 millions de dollars. Dans son témoignage devant la Commission Gomery, M. Coffin a admis que la plus grande partie de ses revenus de 2,7 millions de dollars était basée sur de fausses factures réclamées par le haut fonctionnaire responsable du programme des commandes, Charles Guité.
Coffin Communication a aussi servi de courroie de transmission pour une campagne de publicité de plusieurs millions de dollars sur les soins de santé. En 2000, le Bureau du Conseil privé voulait retenir les services de l'agence Gingko, mais cette firme de Toronto n'était pas accréditée. Pour contourner les règles d'attribution, le ministère des Travaux publics a utilisé Coffin Communication comme intermédiaire, ce qui a permis à l'agence d'encaisser près de 160 000 $ sans effectuer aucun travail.
L'admission de culpabilité de M. Coffin prouve bien la négligence dont a fait preuve le gouvernement libéral dans la gestion du Programme de commandites. Cela confirme les appréhensions de la vérificatrice générale qui exprimait bien des réserves à l'égard de la gestion de ce programme dans son rapport de 2003.
En conclusion, les révélations qui ont permis au premier ministre de mettre fin au Programme de commandites, de mettre sur pied la Commission Gomery, d'entreprendre des démarches légales pour récupérer l'argent et de congédier Gagliano et les dirigeants des sociétés d'État impliqués dans le scandale devraient être assez probantes pour lui permettre de rembourser tout l'argent sale, c'est-à-dire les 5,3 millions de dollars et non pas seulement les 750 000 $ actuels.
Quant à la motion du Parti conservateur, par respect pour les gens qui ont témoigné devant la commission et pour éviter de leur causer un tort préjudiciable, le Bloc québécois votera contre cette motion.
Le président suppléant (M. Marcel Proulx): Puisqu'il est 14 heures, nous procéderons maintenant aux déclarations de députés.
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
[Article 31 du Règlement]
* * *
[Traduction]
Le Centre commémoratif de Peterborough
L'hon. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, le Centre commémoratif de Peterborough est le lieu de rassemblement des Petes de Peterborough et des Lakers, qui ont remporté la Coupe Mann en 2004. Il accueille aussi le Temple de la renommée des sports de Peterborough, ainsi que toute une gamme d'activités communautaires.
Cependant, les habitants de Peterborough n'ont pas oublié que, à l'origine, le centre a été construit à la mémoire des anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale. Depuis, il est devenu un monument à la mémoire de tous les anciens combattants.
L'année dernière, le centre commémoratif a été rénové et modernisé. À la suite de ces rénovations, des groupes locaux d'anciens combattants, notamment la Légion, ont organisé une cérémonie de réinauguration. En présence du lieutenant-gouverneur de l'Ontario, ce monument historique a été une fois de plus dédié aux anciens combattants pour qui il avait été construit. Ce fut un événement impressionnant et émouvant.
Je félicite tous ceux qui ont participé à la réinauguration. La semaine prochaine, en cette Année de l'ancien combattant, une cérémonie spéciale sera tenue en présence du prince Edward pour marquer le 60e anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale. Tâchons de ne jamais oublier ceux à qui le centre commémoratif est dédié.
* * *
La Société canadienne des postes
Mme Diane Finley (Haldimand—Norfolk, PCC): Monsieur le Président, en 1994, le ministre libéral responsable de la Société canadienne des postes a prétendu que: « Aussi longtemps que notre gouvernement sera au pouvoir, il n'y aura aucune fermeture de bureaux de poste dans les régions rurales ou dans les petites municipalités. »
Malgré cette promesse libérale, d'innombrables bureaux de poste ruraux ont été fermés ou sont menacés de fermeture.
Dans ma circonscription, Haldimand—Norfolk, les résidants de Lowbanks ont vu leur bureau de poste fermer. Les villages de Clear Creek et York suivront peut-être. Depuis des décennies, ces bureaux de poste offrent un service essentiel à mes électeurs.
Depuis 1997, la Société canadienne des postes a récolté des bénéfices et des dividendes de près de 1 milliard de dollars. Malgré ces profits et ces promesses, le gouvernement libéral continue de fermer des bureaux de poste ruraux. Nos collectivités rurales méritent mieux.
Comme le disent mes électeurs: « Le fait d'éliminer un service aussi important ou même de l'entraver est tout simplement inacceptable. »
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Le tournoi de hockey de la Coupe Mémorial
M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.): Monsieur le Président, dimanche dernier, les Knights de London ont terminé une saison de rêve en remportant la Coupe Mémorial par la marque de 4 à 0 contre l'Océanic de Rimouski. Leur fiche pour la saison 2004-2005 et les séries éliminatoires a été de 79 victoires, 9 défaites et 2 matchs nuls. Les habitants de London sont particulièrement fiers que cet exploit soit survenu en cette Année de l'ancien combattant, qui coïncide aussi avec le 150e anniversaire de la ville de London.
Mark et Dale Hunter sont les bâtisseurs de cette équipe qui a fracassé de nombreux records. Avec l'aide du capitaine, Danny Syvret, du joueur le plus utile, Corey Perry, du motivateur, Brandon Prust, de Dylan Hunter et des deux gardiens de buts, Adam Dennis et Gerald Coleman, les Knights sont restés invaincus pendant le tournoi de la Coupe Mémorial.
À titre de député de London—Fanshawe, et avec mes collègues, le ministre du Travail et du Logement, également député de London-Centre-Nord, et la députée de London-Ouest, je félicite nos champions, les Knights de London, et toute la collectivité de London pour cette saison exceptionnelle.
Le premier ministre et les députés de London seront heureux d'accueillir prochainement cette équipe sur la Colline du Parlement, afin de célébrer plus officiellement sa saison remarquable.
* * *
[Français]
Guy Tardif
M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les Patriotes, BQ): Monsieur le Président, le 24 mai dernier nous quittait un grand bâtisseur du Québec moderne, M. Guy Tardif.
Ex-employé de la GRC et détenteur d'un doctorat en criminologie de l'Université de Montréal, Guy Tardif aura pratiqué cette profession jusqu'en 1976, année où il a été élu député de la circonscription de Crémazie à l'Assemblée nationale sous la bannière du Parti québécois.
Dès lors, René Lévesque confie à cet homme doté d'une grande intelligence les rênes du ministère des Affaires municipales. Cependant, ce que l'histoire retiendra comme étant la plus grande réalisation du ministre Tardif est le programme Corvée-habitation, par lequel il réussit le coup de maître d'unir les efforts des syndicats et des entrepreneurs autour de la noble cause de donner accès à un logement décent aux moins bien nantis.
Après neuf années de service public au gouvernement du Québec, il s'établit à Saint-Denis-sur-Richelieu où il fonde, avec sa conjointe, Ghislaine, et leurs enfants, le Clos Saint-Denis. Ils y développent et mettent en valeur diverses boissons artisanales, dont la fameuse « Pomme de glace », qui a remporté de nombreux prix.
Au nom de mes collègues du Bloc québécois, j'offre à la famille de M. Guy Tardif nos plus sincères condoléances.
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[Traduction]
Le Programme de stages Canada-Ukraine
Mme Yasmin Ratansi (Don Valley-Est, Lib.): Monsieur le Président, depuis deux siècles, des Ukrainiens viennent au Canada en quête d'une nouvelle vie.
Des générations de nouveaux arrivants en provenance d'Ukraine ont contribué de manière importante à l'édification du Canada, une des meilleures démocraties du monde.
Grâce à leur patrimoine unique, les Ukrainiens ont enrichi la mosaïque culturelle du Canada.
Ce printemps, le Programme parlementaire Canada-Ukraine célèbre 15 ans de travail au sein du Parlement du Canada, avec l'arrivée de 28 étudiants provenant de 15 universités d'Ukraine et de Géorgie.
En 15 ans, la Chambre des communes a accueilli une génération de jeunes Ukrainiens qui ont tous eu la chance de faire personnellement l'expérience de la vie dans une société civile et de voir la démocratie en action.
En accueillant un stagiaire, les députés offrent la meilleure forme d'aide étrangère qu'une démocratie puisse donner aux leaders de demain, soit la possibilité d'observer directement le travail d'un Parlement démocratique dans une société ouverte.
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Le programme de hockey junior
M. Brian Fitzpatrick (Prince Albert, PCC): Monsieur le Président, voilà trois ans, le programme de hockey junior de l'équipe Raider de Prince Albert se trouvait en difficulté. Tel n'est pas le cas aujourd'hui. En effet, Prince Albert dispose maintenant d'une installation de hockey tout à fait moderne: le Centre Art Hauser.
L'équipe de hockey Raider, sous la direction de l'entraîneur Anholt, vient de terminer une saison des plus réussies. Les spectateurs se font plus nombreux et l'engouement pour le hockey revient en force.
Il y a trois ans, certains dirigeants du hockey se sont mis à la tâche et ont lancé un programme appellé « Bring Back the Magic ». La campagne a été une grande réussite.
Dernièrement, la population de Prince Albert a rendu hommage au travail exceptionnel de ceux qui ont dirigé cette campagne, à savoir Gary Anderson, Vic Lemieux, Terry Simpson et Ab Pelligrini.
Prince Albert est à nouveau reconnue comme la « ville de hockey du Nord ». Je suis honoré de saluer le travail exceptionnel de ces dirigeants du hockey.
Pour ce qui est de la Coupe Mémorial, cette année a été celle des Knights de London mais la prochaine risque fort, selon moi, d'être celle des Raiders de Prince Albert.
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Le conseil canadien des métiers du bâtiment
M. Russ Powers (Ancaster—Dundas—Flamborough—Westdale, Lib.): Monsieur le Président, Ottawa accueille cette semaine la conférence législative du Conseil canadien des métiers du bâtiment. Grâce aux efforts du conseil, le bâtiment où nous nous trouvons et pratiquement tous ceux qui nous servent de lieu de résidence, de travail et de loisirs nous font bénéficier d'un style de vie qui nous semble aller pratiquement de soi. Nous remercions le conseil de son apport incommensurable à notre société.
Je tiens tout particulièrement à souligner les réalisations de l'Union internationale des journaliers d'Amérique du Nord, organisation aux débuts modestes en 1903 qui, aujourd'hui, compte plus de 800 000 membres sur l'ensemble du continent et dont l'apport à notre mode de vie a été significatif. En plus de dynamiser notre économie, ses membres jouent un rôle très constructif par leurs activités bénévoles et philanthropiques.
Je m'en voudrais de ne pas saluer les responsables et les membres du personnel du bureau régional pour le centre et l'est du Canada, établi à Hamilton, en Ontario. Je souhaite remercier tout particulièrement le précédent et l'actuel vice-président international et directeur régional, soit respectivement Enrico « Henry » Mancinelli et Joseph S. Mancinelli, de leur volonté de servir avec enthousiasme le Canada en général et la région de Hamilton en particulier.
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[Français]
Le Centre d'action bénévole Les p'tits bonheurs
Mme Carole Lavallée (Saint-Bruno—Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, récemment à Saint-Bruno, près de 200 personnes assistaient, au Centre Marcel-Dulude, à un concert bénéfice de l'Orchestre symphonique des jeunes de la Montérégie, au profit du Centre d'action bénévole Les p'tits bonheurs.
L'utile se joignait ainsi à l'agréable. L'utile, l'essentiel devrais-je dire, c'est ce centre d'action bénévole au coeur de Saint-Bruno, en campagne de financement, qui a besoin d'agrandir ses locaux pour répondre à une demande croissante de services communautaires en tous genres: friperie, popote roulante, aide aux personnes âgées, aide aux jeunes familles, etc.
L'agréable, c'est un concert de l'Orchestre symphonique des jeunes de la Montérégie composé d'une centaine de jeunes qui nous ont donné une soirée de très belle musique, qui faisait voler les coeurs et adoucissait les moeurs.
Bravo aux deux « chefs d'orchestre »: Gaby Bouvrette, directrice du Centre d'action bénévole Les p'tits bonheurs, et Luc Chaput, chef de l'Orchestre symphonique de la Montérégie, pour cette excellente soirée.
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B. Fernand Nadeau
M. Jean-Claude D'Amours (Madawaska—Restigouche, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec grand regret que la population du Nouveau-Brunswick, et plus particulièrement celle d'Edmundston, a appris le décès, hier, de M. B. Fernand Nadeau, ancien ministre de la province du Nouveau-Brunswick et ancien maire de la ville d'Edmundston.
B. Fernand Nadeau était un homme engagé et actif dans sa communauté. Il fut entre autres maire de la ville d'Edmundston de 1963 à 1969. M. Nadeau a contribué grandement au développement de la province du Nouveau-Brunswick alors qu'il était, de 1967 à 1970, député de la région d'Edmundston à l'Assemblée législative du Nouveau-Brunswick et, successivement, ministre des Affaires municipales et ministre du Travail sous le gouvernement du regretté Louis J. Robichaud.
Je désire donc, en mon nom personnel et au nom de la population de Madawaska—Restigouche, offrir mes sincères condoléances à la famille et aux proches de M. B. Fernand Nadeau.
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[Traduction]
Martin Donald Jones
M. Peter Goldring (Edmonton-Est, PCC): Monsieur le Président, il y a 61 ans, un adolescent, réserviste volontaire de la Marine royale du Canada, servait à bord du NCSM Prince Henry, un croiseur transportant des péniches de débarquement stationné au large de la Normandie, en France.
Sous une pluie d'obus ennemis et dans les nuages de fumée s'échappant des bouches des canons des navires, l'invasion de l'Europe se déroulait sur la plage Juno.
À bord du Prince Henry, l'habile marin Jones faisait sa part afin de couvrir le débarquement des troupes des Regina Rifles et du Canadian Scottish sur la plage Juno.
Après la guerre, Martin Donald Jones est rentré à Edmonton où il a travaillé pendant 29 ans, jusqu'à sa retraite en 1985, pour la Société canadienne d'hypothèques et de logement, de nouveau au service du public canadien.
Mes chers amis, c'est entourés de leurs parents et de leurs amis que Marty et son épouse Pauline célèbrent la vie et le 80e anniversaire de Marty à Edmonton cette semaine.
Je félicite Marty et je lui souhaite une bonne santé. Que Dieu le bénisse!
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Le budget
M. Navdeep Bains (Mississauga—Brampton-Sud, Lib.): Monsieur le Président, des maires des quatre coins de l'Ontario, dont les maires de Mississauga et de Brampton, réclament l'adoption du budget de 2005. Ils veulent de meilleures routes, des systèmes de transport en commun améliorés et une infrastructure plus durable.
C'est pour les mêmes raisons que les maires de Toronto et d'Ottawa ont pressé tous les partis d'appuyer le budget. C'est pour cela aussi que les maires ont diffusé une déclaration disant ceci: « Les municipalités des quatre coins du Canada ont consacré trop de temps et d'efforts pour voir le Nouveau Pacte anéanti à cause de manoeuvres politiques ».
Des milliards de dollars du budget de 2005 ont déjà été dépensés pour les garderies et le développement économique des collectivités du Nord et des collectivités rurales du Sud de l'Ontario.
Je joins ma voix à celles des maires pour dire que l'intérêt des Ontariens doit passer avant la politicaillerie. Plutôt que d'en laisser traîner l'étude au sein du comité, adoptons le budget de 2005 de manière à ce que les villes et les collectivités de l'Ontario puissent commencer à en récolter les fruits.
* * *
La Journée nationale de lutte contre l'homophobie
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, le 1er juin est la Journée nationale de lutte contre l'homophobie, et notre chef ainsi que les députés du caucus du Nouveau Parti démocratique fédéral se déclarent solidaires de la communauté des gais, des lesbiennes, des bisexuels et des transgenres pour dénoncer les préjugés, la discrimination et l'homophobie.
Nous félicitons la Fondation Émergence et ses partenaires de tout le Canada de leurs efforts courageux et soutenus en vue de mettre un terme à la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle et de promouvoir l'égalité, la diversité et l'ouverture dans notre société.
Nous, députés du Nouveau Parti démocratique, nous prononçons vigoureusement en faveur de l'égalité de tous et de la reconnaissance de la diversité comme valeur extrêmement positive et comme facteur d'affirmation dans notre société. Nous espérons que viendra bientôt le jour où, enfin, les couples homosexuels verront leur droit au mariage reconnu dans la loi. Nous espérons voir le jour où l'homophobie sera chose inconnue, où nous, gais et lesbiennes, pourrons nous afficher tels que nous sommes en manifestant notre fierté, notre amour et notre soutien, sans éprouver la crainte, la haine et la violence qui accompagnent l'homophobie.
Nous soulignons cette journée de façon solennelle et nous fêtons également les progrès extraordinaires déjà réalisés.
* * *
La justice
M. Russ Hiebert (Surrey-Sud—White Rock—Cloverdale, PCC): Monsieur le Président, dans notre système de justice, la peine doit correspondre au crime. Penchons-nous sur le cas de Herbert Ward.
Violeur, Ward a été condamné pour agression sexuelle plus de 24 fois au cours de sa déplorable carrière de criminel, qui remonte à 24 ans. Il n'empêche que, tout au long de cette période, Ward n'a passé que 51 mois en prison.
En 2003, la dernière fois où Ward a plaidé coupable à une série d'agressions sexuelles, la Couronne a réclamé qu'on qualifie ce prédateur en série de « criminel dangereux » pour faciliter son incarcération permanente. « Il n'en est pas question », a dit le juge. Ces crimes n'étaient pas suffisants pour qu'on le désigne ainsi.
Or, voici que le violeur de Scarborough a frappé de nouveau, si l'on en croit une femme qui affirme avoir été sa victime, vendredi dernier.
Combien faudra-t-il de victimes chez les femmes avant que le gouvernement libéral ne propose des peines minimales obligatoires pour les auteurs de récidives avec violence? Combien faudra-t-il de nouvelles victimes avant que le gouvernement libéral n'agisse?
* * *
[Français]
Le budget
M. Guy Côté (Portneuf—Jacques-Cartier, BQ): Monsieur le Président, lors de la présentation du budget en février dernier, le premier ministre a raté une belle occasion de répondre aux besoins criants du Québec, qui n'arrive plus à joindre les deux bouts, alors que le gouvernement fédéral nage littéralement dans l'argent.
En plus d'être nié catégoriquement dans le budget, le déséquilibre fiscal s'est transformé en déséquilibre politique où les libéraux se servent des milliards de dollars pour s'ingérer impunément dans les champs de compétence du Québec.
Après avoir pillé 47 milliards de dollars dans la caisse d'assurance-emploi, il n'y a toujours pas de caisse autonome. Pour la mise en oeuvre du Protocole de Kyoto, le gouvernement libéral a préféré faire un chèque en blanc aux grands pollueurs plutôt que de mettre en avant le principe du pollueur-payeur.
Le Bloc québécois soumettra en comité des amendements sérieux et importants pour la population québécoise. Espérons que les députés libéraux du Québec entendront raison et voteront en faveur de ceux-ci.
* * *
[Traduction]
Le Nouveau Parti démocratique
M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, PCC): Monsieur le Président, le NPD étudie actuellement de nouvelles demandes qu'il pourrait présenter au gouvernement en retour de son appui. Les députés néo-démocrates ont sans doute lu des coupures de presse de 1973; à l'époque, le gouvernement libéral minoritaire n'a survécu qu'en accédant aux demandes du NPD, qui comprenaient le gel du prix du pétrole au Canada et la création du Programme énergétique national.
Le PEN a gelé le prix du pétrole et a imposé une taxe sur les exportations pétrolières de l'Ouest afin de subventionner les importations de pétrole de l'Est. Le chef du NPD de l'époque, David Lewis, avait déclaré que ces mesures constituaient une victoire au-delà de toutes ses espérances.
Le PEN a été un désastre pour l'Ouest canadien. Le gouvernement fédéral, sous l'influence du NPD, s'est ensuite mis à dépenser sans compter et à accumuler des déficits pendant 20 ans.
Le NPD, qui préconise des taxes et des dépenses, est encore en train de conclure des pactes avec le diable. Les Canadiens feraient bien de surveiller leur portefeuille.
* * *
[Français]
Les garderies
M. David McGuinty (Ottawa-Sud, Lib.): Monsieur le Président, cinq provinces, soit l'Ontario, le Manitoba, la Saskatchewan, Terre-Neuve-et-Labrador ainsi que la Nouvelle-Écosse, ont signé des ententes sur la garde d'enfants avec le gouvernement libéral.
Ces ententes s'inscrivent dans le cadre de l'engagement pris par notre gouvernement de financer, à hauteur de 5 milliards de dollars sur cinq ans, l'établissement d'un système d'éducation préscolaire et de garde d'enfants dans chaque province et chaque territoire.
[Traduction]
L'adoption du budget à l'étape de la deuxième lecture constitue un pas de plus vers l'obtention de fonds pour les services de garde. Les projets de loi portant adoption du budget ont été renvoyés au Comité des finances, et les Canadiens veulent que tous les partis agissent avant tout en fonction de l'intérêt public et qu'ils appuient le projet de loi C-43 et le projet de loi C-48.
Comme l'a déclaré la présidente de l'Association canadienne pour la promotion des services de garde à l'enfance:
Les enfants et les familles d’un bout à l’autre du Canada sont otages d’un certain opportunisme politique. Nous avons besoin d’un parlement actif, capable de poser les gestes qui comptent le plus pour les Canadiennes et Canadiens, comme celui de jeter les bases d’un système pancanadien de services de garde [...] |
Adoptons le budget, amorçons le processus et donnons aux Canadiens le programme national de garderies qu'ils méritent.
QUESTIONS ORALES
[Questions orales]
* * *
[Traduction]
Le député de Newton—Delta-Nord
L'hon. Stephen Harper (chef de l'opposition, PCC): Monsieur le Président, le premier ministre soutient qu'il n'était pas au courant de négociations entre son bureau et des députés de l'opposition. Pourtant, des enregistrements indiquent que son chef de cabinet et son ministre de la Santé ont dit clairement que le premier ministre voulait rencontrer le député de Newton—Delta-Nord.
Comment le premier ministre peut-il dire qu'il n'était pas au courant alors qu'il était prêt à rencontrer le député de Newton—Delta-Nord la veille du vote?
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, les deux affirmations sont fausses.
Premièrement, j'ai dit hier à la Chambre que, lorsque le député a approché le gouvernement, j'en ai évidemment été informé. Deuxièmement, je n'ai toutefois jamais dit que je recontrerais le député. En fait, on a pu lire dans les journaux que l'histoire du député était complètement fausse.
L'hon. Stephen Harper (chef de l'opposition, PCC): Monsieur le Président, le gouvernement continue de prétendre qu'il n'a pas essayé d'acheter l'appui de l'opposition, mais les enregistrements rendus publics aujourd'hui prouvent le contraire.
Comment le premier ministre peut-il expliquer que le représentant de son gouvernement a téléphoné au député de Newton—Delta-Nord pas moins de 23 fois au cours des trois jours qui ont précédé le vote?
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, comment l'opposition explique-t-elle que M. Sudesh Kalia, qui se décrit comme un ami de M. Grewal et qui a joué le rôle d'intermédiaire, a dit, selon les journaux, que M. Grewal lui avait demandé d'organiser une rencontre?
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Le premier ministre sait qu'il doit désigner les députés par le nom de leur circonscription et non par leur nom. Je sais qu'il voudra faire cette correction et éviter cela à l'avenir.
Le très hon. Paul Martin: Monsieur le Président, la tierce personne, en l'occurrence M. Kalia, à qui le député de Newton—Delta-Nord a demandé d'organiser une rencontre, a dit que la version des faits donnée par le député était complètement fausse. Il a dit ceci:
Il m'a fait part de quelques demandes [concernant] ce qu'il aimerait obtenir [...] Pour sa femme, il veut un poste au Sénat ou aux Nations Unies et, pour lui-même, un poste au Cabinet. |
La tierce personne a dit que la version du député était complètement fausse.
L'hon. Stephen Harper (chef de l'opposition, PCC): Monsieur le Président, je crois que les enregistrements montreront que M. Kalia est loin d'être une tierce personne. Il parlait au nom du gouvernement.
Il est parfaitement clair, d'après les enregistrements, que le gouvernement était prêt à faire des offres à des députés en échange de leur vote.
Le premier ministre nie-t-il que les voix sur ces enregistrements sont celles de son chef de cabinet et de son ministre de la Santé?
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, j'ai déjà dit que je n'ai pas entendu les enregistrements.
J'ai cependant lu la transcription venant de la tierce personne à qui le député a demandé d'organiser une rencontre. J'ai aussi parlé aux ministres, et il est absolument clair qu'aucune offre n'a été faite, mais plutôt qu'une offre a été sollicitée. Aucune offre n'a été faite, et c'est la vérité.
* * *
Le Programme de commandites
M. Peter MacKay (Nova-Centre, PCC): Monsieur le Président, comme cela a déjà été si bien dit, le premier ministre ne reconnaîtrait pas la vérité s'il l'avait devant lui.
Des voix: Oh, oh!
Le Président: Je n'ai pas entendu la première partie du commentaire du député, mais j'aimerais que les députés nous dispensent des attaques personnelles. Cela est tout à fait inutile et je crois que nous pourrions éviter ce genre de désordre si les députés se comportaient un peu mieux et évitaient les attaques personnelles, qui sont totalement inutiles.
M. Peter MacKay: Monsieur le Président, l'an dernier, avant d'interrompre une enquête parlementaire sur le scandale des commandites et de déclencher des élections anticipées, le premier ministre avait déclaré qu'il y avait nécessairement eu une direction politique dans ce scandale.
Il a également déclaré que Gomery irait au fond des choses et qu'aucune restriction ne lui serait imposée. Pourtant, le mandat interdit intentionnellement au juge Gomery de nommer des personnes ou de dire qui étaient les responsables politiques.
Pourquoi le premier ministre a-t-il caché des renseignements avant les dernières élections et pourquoi limite-t-il maintenant la possibilité, pour le juge Gomery, de déclarer qui sont les responsables politiques du scandale au sein du Parti libéral?
L'hon. Scott Brison (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, le 20 février 2004, le député de Nova-Centre a déclaré ceci au sujet du mandat du juge Gomery:
Le mandat est certainement large. On ne peut pas nier que, d'après les premières indications, il permettra aux responsables de faire ce qu'ils ont à faire. |
Le député avait alors raison, mais aujourd'hui, son parti fait fausse route avec sa motion. Le fait est que le juge Gomery a le droit et la capacité, grâce à l'article 13 de la Loi sur les enquêtes, de nommer des individus et de désigner des responsables.
J'invite le député à retourner planter ses patates et à cesser de semer le doute sur le travail du juge Gomery.
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je réitère mon observation de tout à l'heure au sujet des attaques personnelles et j'invite tous les députés à éviter ce genre d'attaques à la Chambre. Ces attaques n'aident pas du tout à maintenir l'ordre.
Le député de Nova-Centre peut poser une question complémentaire.
M. Peter MacKay (Nova-Centre, PCC): Monsieur le Président, à la fin des travaux de la Commission Gomery, les Canadiens voudront savoir qui était responsable du plus gros scandale politique de l'histoire du Canada. Le premier ministre affirme que seul le juge Gomery pourra nous dire cela. Ce n'est pas vrai.
Le mandat de la commission empêche le juge Gomery de nommer des personnes criminellement ou civilement responsables et rien d'autre ne lui donne expressément le pouvoir de nommer des individus ou de désigner des responsables. C'est étrange. Le ministre de la Justice prétend qu'élargir le mandat interférerait avec d'autres processus. Ce n'est pas vrai non plus.
Le premier ministre peut-il nous dire s'il y a des députés libéraux, anciens ou actuels, ou des employés du Parti libéral, anciens ou actuels, qui font présentement l'objet d'enquêtes par la GRC?
L'hon. Scott Brison (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, je répète que le juge Gomery a décrit son mandat dans ses propres mots. Il a dit:
Selon l'art. 13 de la Loi sur les enquêtes, sur lequel je reviendrai dans un instant, j'aurai le droit de tirer des conclusions au sujet des fautes éventuellement commises et de leurs auteurs. |
Plus loin, le juge Gomery mentionne qu'il abordera:
[...] la question de savoir si les activités en question ont été influencées par des interventions politiques et, dans l'affirmative, par qui, dans quel but et avec quelles conséquences; |
la question de savoir si une personne ou une organisation du gouvernement du Canada a obtenu des avantages financiers, politiques ou autres grâce à ces activités et, dans l'affirmative, dans quel but et avec quelles conséquences. |
Le juge Gomery a raison. Il a le mandat de nommer des individus et de désigner des responsables.
* * *
[Français]
Le député de Newton—Delta-Nord
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, je voudrais dire au premier ministre que dans l'affaire de son chef de cabinet, je n'ai besoin d'aucune immunité parlementaire pour tenir le même discours en Chambre qu'à l'extérieur. Cela étant dit, il est tout à fait incroyable que deux semaines après le fait, le premier ministre continue de dire qu'il n'a pas écouté l'enregistrement compromettant.
Alors que des explications complètes sont nécessaires, le premier ministre va-t-il admettre que dans le dossier de son chef de cabinet, il a fait preuve de la négligence la plus totale?
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, si je ne l'ai pas écouté, c'est parce que je n'ai pas l'enregistrement.
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, j'imagine qu'il y a un poste de radio ou de télévision dans son bureau. En effet, cela a été diffusé sur les ondes des postes de télévision et de radio et sa traduction est dans les journaux.
Lors de son adresse aux Canadiens et aux Québécois, le premier ministre déclarait, au sujet du scandale des commandites: « Je suis désolé que nous n'ayons pas été plus vigilants, que je n'ai pas été plus vigilant. » Or, s'ils s'avèrent, les agissements de son chef de cabinet sont passibles de poursuites en vertu de l'article 119 du Code criminel.
Est-ce que le premier ministre va tirer des leçons de ses erreurs du passé, cesser de fermer les yeux volontairement, faire preuve de vigilance cette fois-ci et suspendre...
Le Président: Le très honorable premier ministre a la parole.
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, je demanderais au chef du Bloc de simplement regarder le témoignage de M. Kalia qui a été la tierce personne du député vis-à-vis du gouvernement. M. Kalia a dit que le gouvernement n'avait pas fait d'offre, que c'est le député qui a demandé des choses qui ont été carrément refusées.
M. Michel Guimond (Montmorency—Charlevoix—Haute-Côte-Nord, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre protège son chef de cabinet en prétendant que c'est le député conservateur qui a fait lui-même les approches auprès de son gouvernement pour offrir son vote moyennant compensation.
Le premier ministre admettra-t-il que peu importe qui a fait le premier cette démarche, ce qui compte, aux yeux de la loi, c'est ce qui a été dit, et en ce sens, son chef de cabinet aurait contrevenu à l'article 119 du Code criminel?
[Traduction]
L'hon. Tony Valeri (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre a déclaré avoir été informé que le député de Newton—Delta-Nord avait contacté son cabinet au sujet de la possibilité de traverser le parquet. Le premier ministre a également dit s'être clairement opposé à toute offre d'accord.
Le député a porté une accusation en alléguant l'existence d'une intention criminelle dans ce cas. La GRC, qui est un organisme indépendant, décide elle-même quelles circonstances et quelles preuves justifient une enquête de sa part.
Si le député possède des renseignements justifiant la tenue d'une enquête, je l'invite à les communiquer. En fait, il y est tenu.
[Français]
M. Michel Guimond (Montmorency—Charlevoix—Haute-Côte-Nord, BQ): Monsieur le Président, le chef de cabinet du premier ministre a dit ceci, et je le cite en traduisant: « [...] vous pouvez rester à la maison, rester où vous êtes, ou si vous voulez, nous pouvons faire un arrangement qui vous permettra de bouger. »
Comment le premier ministre peut-il nier qu'il existe suffisamment de soupçons dans cet enregistrement pour qu'il agisse promptement face à son chef de cabinet? Qu'il le suspende immédiatement.
[Traduction]
L'hon. Tony Valeri (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, le député porte encore des accusations. Je crois savoir que la transcription a été rendue publique, mais je ne comprends pas pourquoi l'opposition officielle a tellement tardé à la divulguer.
Quoi qu'il en soit, comme l'a dit le premier ministre, il n'y a pas eu d'offre et aucun accord n'a été conclu. En fait, le député de Newton—Delta-Nord a lui-même contacté le gouvernement. Le premier ministre a clairement indiqué que nous ne cherchons à attirer personne dans notre parti.
[Français]
L'hon. Jack Layton (Toronto—Danforth, NPD): Monsieur le Président, au cours des six dernières semaines, deux ministres libéraux, un secrétaire parlementaire, l'avocat du Parti libéral à la Commission Gomery et le premier ministre lui-même se sont tous vantés de leurs appels à la GRC. Mais lorsque cela concerne le chef de cabinet du premier ministre et un député conservateur, leur enthousiasme pour la GRC disparaît. Le premier ministre peut-il nous dire pourquoi?
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je suis un peu surpris que le chef du NPD ne connaisse pas l'éthique dans tout cela. Le gouvernement n'a pas le droit de donner des directives à la GRC. Il peut lui fournir des informations, tout comme n'importe quelle personne peut le faire, mais la décision d'agir appartient à la GRC.
[Traduction]
L'hon. Jack Layton (Toronto—Danforth, NPD): Monsieur le Président, tout le monde se souviendra sûrement de cas où le gouvernement a demandé à la GRC d'intervenir.
Curieusement, dans le cas des commandites, le premier ministre n'a rien fait parce qu'il soutenait qu'il ignorait tout. Dans ce cas-ci, il se garde d'agir parce qu'il ne veut pas connaître les faits. Il n'y a pas de quoi rire. La GRC doit faire enquête dans cette affaire. Elle devra avoir accès au registre de tous les appels téléphoniques, courriels, correspondance et comptes rendus de réunions pertinents.
Ma question au premier ministre est la suivante. Cette documentation sera-t-elle fournie à la GRC?
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement communiquera évidemment à la GRC toute l'information qu'elle demandera. J'espère que, si le chef du NPD a en sa possession des renseignements utiles, il les communiquera.
Étonnamment, le chef de l'opposition semble dire que le Canada est un État policier et que nous dicterons à la GRC ce qu'elle doit faire. Ce n'est pas ainsi que notre système fonctionne. Il serait tout à fait incorrect, de la part du gouvernement, d'ordonner à la GRC de lancer une enquête. La gendarmerie doit avoir accès à l'information, avant de décider elle-même s'il y a lieu de faire enquête.
* * *
Le Programme de commandites
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, PCC): Monsieur le Président, aujourd'hui, nous avons appris que le gouvernement a conclu une entente avec l'ancien premier ministre Chrétien. C'est le genre d'entente que le ministre des Travaux publics a qualifiée hier à la Chambre de tentative de corruption de témoins et d'interférence. Or, le ministre a dit que ce serait honteux de conclure pareille entente. L'entente en question prévoit que M. Chrétien ne tentera pas pour le moment de provoquer la récusation du juge Gomery, mais qu'il pourra le faire plus tard.
Comment se fait-il que le gouvernement conclut aujourd'hui une entente que le ministre décriait pas plus tard qu'hier?
L'hon. Scott Brison (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, l'affirmation du député est ridicule. La réalité est bien simple, M. Chrétien, à titre personnel, a le droit de se défendre et de prendre les mesures qu'il estime appropriées.
Le gouvernement a été clair. Il n'a ni approuvé ni appuyé les actes antérieurs de M. Chrétien. Il a décidé d'adopter une autre position. C'est son droit. Le gouvernement croit dans la Charte des droits et dans la liberté des Canadiens de se défendre à titre individuel dans le cadre de notre système.
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, PCC): Monsieur le Président, cette entente, autrement dit cette mise en attente de la demande de M. Chrétien pour faire révoquer le juge Gomery, n'est que temporaire. Cette demande de récusation peut revenir n'importe quand et menacer la commission. Dans l'entente, le gouvernement a-t-il prévu que M. Chrétien doit attendre les conclusions du juge Gomery avant de passer de nouveau à l'attaque?
L'hon. Scott Brison (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, la question et l'affirmation de la députée sont fausses. Il n'y a pas eu d'entente. M. Chrétien, à titre personnel, a décidé d'un plan d'action et il a le droit de l'appliquer. Le gouvernement a également établi un plan d'action.
Le premier ministre a décidé d'appuyer les travaux de la Commission Gomery. À la Chambre, les conservateurs sont les seuls qui agissent de façon à compromettre et à interrompre les travaux de la commission. La motion qu'ils ont présentée à l'occasion de cette journée de l'opposition est, dans le meilleur des cas, perturbante ou redondante et, dans le pire des cas, mal intentionnée et destinée à nuire aux travaux de la Commission Gomery.
[Français]
M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, PCC): Monsieur le Président, les avocats de Jean Chrétien ont suspendu leur requête de destitution du juge Gomery parce qu'ils ont une entente avec les libéraux. Ils se réservent le droit de soumettre à nouveau leur requête plus tard et de retarder la publication du rapport du juge. Les avocats du gouvernement ont consenti à cette entente.
Le premier ministre s'engagera-t-il à déposer en Chambre les détails de cette entente avec son prédécesseur?
[Traduction]
L'hon. Scott Brison (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, le député devrait parler à son collègue de Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam qui a déclaré: « Nous croyons que Jean Chrétien a bien fait. »
Les députés d'en face ne peuvent, d'une part, intervenir à la Chambre pour déclarer que M. Chrétien a fait quelque chose de mal, quand, d'autre part, un de leurs éminents députés appuie M. Chrétien et le félicite de son geste.
En outre, M. Chrétien, à titre personnel, a le droit de dresser un plan d'action. C'est exactement ce qu'il a fait. Cela n'a rien à voir avec le gouvernement.
M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, PCC): Monsieur le Président, le gouvernement libéral a d'abord tenté par tous les moyens possibles d'empêcher le juge Gomery de faire son travail. Le gouvernement a demandé à l'ancien premier ministre de poursuivre le juge Gomery pour mettre fin à la commission. Il a maintenant conclu une entente secrète avec M. Chrétien au sujet de cette poursuite et il refuse de nous donner plus de détails.
Le gouvernement modifiera-t-il le mandat de la commission de manière à ce que le juge Gomery dépose son rapport à la Chambre en même temps qu'au Cabinet?
L'hon. Scott Brison (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, si ce n'était pas une affaire aussi sérieuse, il serait amusant de voir les députés d'en face passer d'une période des questions à l'autre en s'accrochant désespérément à tout ce qui pourrait jeter une ombre sur le travail du juge Gomery ou semer le doute.
Le juge Gomery a dit dans ses propres mots qu'en vertu de l'article 13 de la Loi sur les enquêtes il a le droit de tirer des conclusions au sujet des fautes éventuellement commises et de leurs auteurs. Or, les conservateurs ont présenté aujourd'hui une motion qui remet en question la logique du juge Gomery. Leur motion serait, au mieux, redondante, mais si elle est adoptée elle mettrait en péril les travaux de la Commission Gomery.
* * *
[Français]
Le premier ministre
M. Michel Gauthier (Roberval—Lac-Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, dans le dossier concernant son chef de cabinet, le premier ministre se comporte exactement comme Jean Chrétien et Alfonso Gagliano dans le scandale des commandites. Il croit qu'il lui suffit de nier une chose pour que celle-ci disparaisse.
Le premier ministre comprendra-t-il enfin qu'il ne lui suffit pas de nier les responsabilités de son chef de cabinet, mais qu'il lui faut agir, prendre ses responsabilités et le suspendre, rien de moins?
[Traduction]
L'hon. Tony Valeri (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, nous entendons des allégations venant d'en face. Le premier ministre a déclaré qu'il avait été informé du fait que le député de Newton—Delta-Nord avait communiqué avec son cabinet à propos de son passage dans le camp ministériel. Il a indiqué très clairement qu'aucun marché ne serait offert. Aucun marché n'a été offert.
Je ne comprends pas pourquoi les questions se poursuivent. On a répondu à la question et, si le député a des informations pertinentes, je lui conseillerais de les transmettre à la GRC s'il estime que des actes répréhensibles ont été commis.
[Français]
M. Michel Gauthier (Roberval—Lac-Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, la seule défense du premier ministre dans le dossier concernant son chef de cabinet, c'est de dire que le député a lui-même fait des approches, ce qui libérerait son chef de cabinet de toute responsabilité.
Le premier ministre admettra-t-il qu'il ne suffit pas que quelqu'un veuille se vendre pour autoriser l'achat? C'est clair, il me semble.
[Traduction]
L'hon. Tony Valeri (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, je répète qu'aucune offre n'a été faite. Le député a insinué qu'une offre a été faite. Le premier ministre a indiqué très clairement qu'aucun marché ne serait offert et aucun marché n'a été offert. En réalité, c'est le député de Newton—Delta-Nord qui a communiqué avec le gouvernement au sujet de son adhésion au parti ministériel.
Bien que les transcriptions aient été affichées dans un site web, il reste à voir si ces bandes vont également être authentifiées.
* * *
[Français]
L'assurance-emploi
M. Yves Lessard (Chambly—Borduas, BQ): Monsieur le Président, maintenant que la ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences a eu le temps de prendre connaissance du dossier de la création de la caisse autonome d'assurance-emploi, elle devrait être en mesure de nous éclairer sur ses intentions.
Puisqu'elle s'est déjà prononcée en faveur de la caisse autonome d'assurance-emploi lorsqu'elle était députée conservatrice, peut-elle nous dire si elle entend, à titre de ministre, maintenir sa position et procéder à la création d'une caisse autonome d'assurance-emploi, comme le lui demande à l'unanimité le Comité permanent du développement des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées?
[Traduction]
L'hon. Belinda Stronach (ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences et ministre responsable du renouveau démocratique, Lib.): Monsieur le Président, j'ai eu l'occasion d'étudier le dossier. Le budget de 2005 contenait des mesures considérables visant la mise en place d'un système qui favorise une plus grande transparence, une meilleure reddition de comptes et une stabilité accrue lors de la fixation du taux de cotisation, tout en garantissant une indépendance. Avant tout, la vérificatrice générale a déclaré que ces fonds devraient rester regroupés avec le Trésor.
[Français]
M. Yves Lessard (Chambly—Borduas, BQ): Monsieur le Président, la ministre se souvient-elle des raisons pour lesquelles elle a déjà voté, il y a à peine deux mois, en faveur de la caisse autonome? Sinon, c'est assez inquiétant pour le ministère qu'elle dirige.
Puisqu'un projet de loi du Bloc québécois visant à mettre sur pied une caisse autonome d'assurance-emploi est présentement à l'étude au Comité permanent du développement des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées, la ministre ne réalise-t-elle pas que c'est maintenant qu'elle doit se prononcer et appuyer clairement le projet de loi C-280?
[Traduction]
L'hon. Belinda Stronach (ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences et ministre responsable du renouveau démocratique, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais rappeler au député que cela se passait avant le budget. Dans le dernier budget, le gouvernement du Canada a mis en place de nouveaux mécanismes visant à garantir une plus grande transparence dans l'étude des cotisations d'assurance-emploi, des avis indépendants, l'équilibre entre les recettes, les coûts et les prestations versées, ainsi qu'un taux qui assurera la stabilité pendant les périodes de fluctuations économiques.
* * *
La santé
M. Steven Fletcher (Charleswood—St. James—Assiniboia, PCC): Monsieur le Président, il y a plus d'un mois, la Chambre a accepté à l'unanimité d'indemniser toutes les personnes infectées par du sang contaminé. Depuis, le gouvernement a fait des nouvelles dépenses de plus de 20 milliards de dollars, mais il n'a pas donné un traître sou aux victimes du sang contaminé.
Pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas encore répondu aux voeux du Parlement, exprimés démocratiquement, et indemnisé toutes les victimes?
L'hon. Carolyn Bennett (ministre d'État (Santé publique), Lib.): Monsieur le Président, comme vous le savez, il y a un accord. Le ministre de la Santé a dit très clairement que nous allons adhérer à cet accord et que nous allons essayer d'indemniser les personnes en cause le plus tôt possible. Il existe également un processus judiciaire, et la justice nous guidera dans ces délibérations.
M. Steven Fletcher (Charleswood—St. James—Assiniboia, PCC): Monsieur le Président, on dirait que le ministre de la Santé a tellement honte, cet après-midi, qu'il se cache sous sa table.
Le gouvernement a admis qu'il avait une responsabilité à l'égard des victimes, mais il refuse toujours de les aider. Il semble qu'il va continuer de faire abstraction de la volonté du Parlement et prétexter de la vérification actuarielle pour retarder sa décision.
Même s'il ne restait plus rien dans la caisse, le ministre va-t-il indemniser toutes les victimes?
L'hon. Ujjal Dosanjh (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, je ne suis...
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre. Je suis persuadé que le ministre de la Santé est ravi de ce soutien enthousiaste et de cet encouragement, mais il veut répondre à la question, et il nous faut un peu de silence pour entendre sa réponse.
Le ministre de la Santé à la parole.
L'hon. Ujjal Dosanjh: Monsieur le Président, je ne suis pas du genre à me cacher ni à enregistrer subrepticement des conversations.
Je dois dire que, en ce qui concerne l'hépatite C, nous avons fait le nécessaire. Les négociateurs du gouvernement ont des entretiens avec les avocats des divers groupes, et nous parviendrons à une entente pour que les victimes soient indemnisées et que le problème se règle de façon satisfaisante.
* * *
Les affaires autochtones
M. Jim Prentice (Calgary-Centre-Nord, PCC): Monsieur le Président, depuis septembre dernier, la vice-première ministre ne cesse de répéter à la Chambre qu'elle maîtrise parfaitement le dossier des pensionnats autochtones. Les Canadiens savent qu'il n'en est rien, car un gouvernement qui dépense 700 millions de dollars pour régler 2 p. 100 des causes est bien loin de maîtriser la situation.
Hier, la vice-première ministre a changé son fusil d'épaule et a annoncé un programme d'indemnisation universel qui va coûter plus de quatre milliards de dollars. Je ne vois pas de crédits prévus à cet égard dans le budget du gouvernement. J'aimerais savoir où il va prendre l'argent. Va-t-il sabrer dans les services ou augmenter les impôts? D'où viendra l'argent?
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.): Monsieur le Président, malheureusement, le député comprend mal ce que nous avons fait hier avec le chef national. Nous avons confié une mission à un représentant fédéral, un éminent juriste, l'ancien juge de la Cour suprême, Frank Iacobucci. Il va consulter l'Assemblée des Premières Nations, les demandeurs et leurs avocats, les églises et leurs avocats et il va négocier avec tous ces intervenants. Nous voulons en l'occurrence trouver une façon rapide de traiter les demandes de ceux dont la vie a été bouleversée par l'expérience qu'ils ont vécue dans les pensionnats autochtones.
M. Jim Prentice (Calgary-Centre-Nord, PCC): Monsieur le Président, le gouvernement a dépensé 700 millions de dollars pas très rapidement.
La vice-première ministre défend depuis un an dans cette enceinte son programme pour les pensionnats autochtones et elle nous dit que le règlement extrajudiciaire des différends fonctionne extraordinairement bien. Hier, elle a changé son fusil d'épaule et elle a annoncé qu'elle avait besoin d'une autre année et des services d'un juge pour consulter et étudier le dossier. Pourquoi cet aveu d'incompétence n'a-t-il pas été fait il y a un an ou cinq ans?
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.): Monsieur le Président, j'ignore exactement pourquoi le député pense que nous avons abandonné le règlement extrajudiciaire des différends. En fait, l'APN et d'autres intéressés comprennent que le processus de règlement extrajudiciaire des différends doit continuer de jouer un rôle important dans le règlement définitif des demandes d'indemnisation. Comme l'APN et d'autres intéressés l'ont recommandé, le processus doit être utilisé dans les cas de voies de fait graves et d'agression sexuelle.
Nous avons déjà apporté des modifications pour simplifier ce processus. Le représentant fédéral peut, en consultation avec d'autres intéressés, trouver d'autres façons de le simplifier, mais je veux garantir à tout le monde que nous comprenons tous que le processus de règlement extrajudiciaire des différends doit...
Le Président: Le député de Pontiac a la parole.
* * *
[Français]
L'environnement
M. David Smith (Pontiac, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Environnement.
Au cours de la fin de semaine, le chef du Bloc québécois a eu l'audace de prétendre que le budget de 2005 n'était pas dans l'intérêt de la population du Québec. Je sais fort bien que pour la population de ma circonscription, l'environnement est une question très importante.
Est-ce que le ministre peut dire à la Chambre de quelle façon les initiatives environnementales prévues dans le budget bénéficieront à la collectivité québécoise?
L'hon. Stéphane Dion (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, les Québécois attendent avec impatience le budget le plus vert depuis la Confédération. Des contacts très fructueux ont été établis avec le gouvernement du Québec en vue d'utiliser le Fonds du partenariat.
Les projets fusent de partout pour utiliser le fonds pour le climat, pour de nouveaux investissements pour les parcs nationaux, pour des investissements pour les énergies renouvelables et les éoliennes. Les maires attendent d'avoir des investissements verts pour les villes et les municipalités, à travers le nouveau pacte et les Fonds municipaux verts, le programme ÉnerGuide pour les villes, etc. Il ne faut pas bloquer le Québec, il faut le verdir encore davantage.
* * *
[Traduction]
La frontière canado-américaine
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD): Monsieur le Président, le milliardaire américain qui est propriétaire du pont Ambassador et qui tient pratiquement à la gorge un tiers de l'économie canadienne, a annoncé qu'il voulait que les Canadiens le paient pour qu'il déménage, installe et dote en personnel les nouveaux postes de douanes en sol américain. Il veut ainsi s'assurer qu'il gardera le contrôle sur le nouveau poste frontalier et l'économie canadienne.
Le gouvernement a permis à des entreprises privées de dicter les conditions régissant le plus important poste frontalier de la frontière américaine, où 42 p. 100 du commerce canadien est entassé sur deux kilomètres de rivage.
Le premier ministre fera-t-il preuve de leadership et mettra-t-il fin à cette absurdité en appuyant l'établissement d'un nouveau poste frontalier public à Windsor, comme ceux que nous avons partout ailleurs au pays? S'engagera-t-il à créer à Windsor un poste frontalier public comme nous en avons partout ailleurs?
L'hon. Jean Lapierre (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, si le député veut se rendre utile, nous avons saisi le Comité d'examen de la Loi sur les transports au Canada d'un projet qui portera sur les postes frontaliers internationaux et qui a pour but d'en faciliter la gestion.
J'espère que la Chambre adoptera ce projet de loi le plus tôt possible.
* * *
La réforme démocratique
L'hon. Ed Broadbent (Ottawa-Centre, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au président du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.
À la séance du comité ce matin, les membres libéraux, bloquistes et néo-démocrates se sont montrés coopératifs dans un effort pour faire adopter une résolution qui mènerait enfin à une réforme électorale au Canada. Les conservateurs ont toutefois fait de l'obstruction systématique du début à la fin. Les libéraux, les bloquistes et les néo-démocrates ont fini par quitter la réunion, de sorte qu'il n'y avait plus quorum.
Le président du comité convoquera-t-il une nouvelle réunion, dans l'espoir que les conservateurs reviennent faire le travail pour lequel ils ont été élus?
L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.): Monsieur le Président, il y a longtemps que j'ai répondu à une question à la Chambre.
Je serais fort heureux et honoré de convoquer une séance du comité dès que ce sera possible, afin que celui-ci puisse, du moins je l'espère, produire et publier à l'intention de la Chambre des communes un rapport sur cette très importante question.
* * *
La défense nationale
M. Dave MacKenzie (Oxford, PCC): Monsieur le Président, en 2001, un officier de sécurité navale a dit à ses supérieurs que c'était son devoir de les avertir du danger et de conseiller à tous de cesser tout travail dans les secteurs où on trouve du peridite.
Le ministre de la Défense nationale a dit à la Chambre des communes que ces sous-marins n'iraient en mer que s'ils étaient jugés aptes à le faire. Cependant, nous connaissons tous la tragédie qui a eu lieu à bord du HMCS Chicoutimi en 2004.
Le ministre peut-il nous expliquer comment il a pu autoriser que des sous-marins aillent en mer même s'ils renfermaient la substance toxique appelée peridite?
L'hon. Bill Graham (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, nos sous-marins ont fait l'objet d'une refonte complète et d'une opération de canadianisation.
Le député sait que nous travaillons là-dessus. Nos sous-marins ne vont pas en mer à moins de pouvoir le faire en toute sécurité. Nous les soumettons d'ailleurs actuellement à une batterie de tests en mer pour déterminer si tous les problèmes décelés dans l'enquête sur le Chicoutimi ont été étudiés de manière approfondie.
Les sous-marins n'iront en mer que s'ils sont jugés aptes à le faire, et nous le savons. Je ne doute pas qu'ils constitueront un important atout pour la marine canadienne, les Forces canadiennes et notre pays.
M. Dave MacKenzie (Oxford, PCC): Monsieur le Président, il y a pire. Cette substance toxique a été utilisée pour maintenir l'isolant en place. L'isolant choisi pour ces sous-marins est l'amiante. C'est peut-être pour cela que le ministre de la Défense nationale a estimé nécessaire de porter un masque quand il a visité le Chicoutimi après l'incendie.
Le ministre peut-il expliquer aux membres d'équipage de nos sous-marins qui ont été exposés à cette substance toxique pourquoi il persiste à dire que ces sous-marins constituent un excellent achat pour le Canada?
L'hon. Bill Graham (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, le député pourrait peut-être expliquer ses observations aux membres de notre marine et aux membres d'équipage de ces sous-marins, qui ont hâte de retourner en mer. Nous pouvons compter sur de superbes sous-mariniers professionnels et qualifiés. Ils veulent que nos sous-marins reprennent la mer.
Ces sous-marins rendront de grands services à la marine canadienne. Ils ont fait l'objet d'une refonte par suite de l'enquête sur le Chicoutimi. Ils reprendront la mer. Ils sont un actif pour nous. Ne les dénigrons pas et ne dénigrons pas non plus les membres d'équipage de notre marine. Ils font du sacré bon travail en assurant le retour en mer de nos sous-marins.
* * *
[Français]
L'emploi
M. Peter Van Loan (York—Simcoe, PCC): Monsieur le Président, ce gouvernement continue de pénaliser les régions. Alors qu'on devrait encourager le tourisme comme levier de développement économique en région et le maintien de nos jeunes en région, ce gouvernement compresse les subventions.
Pourquoi le ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences compresse-t-il le financement des emplois d'été pour étudiants de près de 50 p. 100 dans certaines régions?
[Traduction]
L'hon. Belinda Stronach (ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences et ministre responsable du renouveau démocratique, Lib.): Monsieur le Président, le nombre de circonscriptions, la modification des limites des circonscriptions et les données du recensement de 2001 ont entraîné un rééquilibrage.
Afin de limiter les effets de ce rééquilibrage, j'ai demandé aux fonctionnaires du ministère de baliser les budgets des régions. Aucune circonscription ne perdra plus de 30 p. 100 de son budget de l'an passé. On parle ici de 4 millions de dollars supplémentaires dans le budget de 2005-2006 pour atténuer les effets.
M. Peter Van Loan (York—Simcoe, PCC): Monsieur le Président, je suis heureux de constater que la ministre reconnaît au moins qu'il y a des effets considérables.
[Français]
Le peu de considération du gouvernement à l'endroit des étudiants se manifeste dans d'autres secteurs aussi.
Est-ce que la nouvelle ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences est toujours d'accord pour faire ce avec quoi elle était encore d'accord il y a deux semaines, et est-ce qu'elle entend réduire les taux d'intérêt excessifs consentis aux étudiants, qui sont de 2,5 à 5 p. 100 au-dessus du taux préférentiel?
[Traduction]
L'hon. Belinda Stronach (ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences et ministre responsable du renouveau démocratique, Lib.): Monsieur le Président, le projet de loi C-48 prévoit des mesures destinées à faciliter l'obtention de prêts étudiants. Nous espérons que l'opposition sera favorable au projet de loi C-48, qui nous permettra d'accomplir de grandes choses pour les étudiants.
* * *
[Français]
Les garderies
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, le ministre du Développement social ne cesse de répéter qu'il n'y a pas de contradiction entre ses propos et ceux du premier ministre. Il affirme que, dans le dossier des garderies, les négociations continuent avec le gouvernement du Québec.
Si le ministre du Développement social prétend que sa position est la même que celle du premier ministre, à savoir que le Québec recevra sans conditions l'argent destiné aux garderies, comment se fait-il alors qu'après sept mois il n'y ait toujours pas d'entente avec le gouvernement du Québec?
[Traduction]
L'hon. Ken Dryden (ministre du Développement social, Lib.): Monsieur le Président, il n'y a jamais eu de contradiction. J'ai répété à maintes reprises à la Chambre que les discussions se poursuivent avec la province de Québec. Elles sont en cours à l'heure actuelle. Elles se déroulent dans l'esprit de ce qui a déjà été fait dans le domaine de l'éducation préscolaire et de la garde d'enfants au pays, et dans l'optique que le Québec ne sera pas pénalisé pour le travail ambitieux qu'il a réalisé.
* * *
[Français]
L'infrastructure
M. Mario Laframboise (Argenteuil—Papineau—Mirabel, BQ): Monsieur le Président, hier, le ministre d'État responsable de l'Infrastructure et des Collectivités a confirmé que son ministère cherchait à imposer des objectifs nationaux communs avant d'effectuer le transfert des recettes de la taxe sur l'essence au Québec et aux provinces.
Comment le ministre peut-il justifier son intention d'imposer des objectifs et des conditions au Québec, qui réclame, dans ce dossier comme dans celui des garderies, la remise de l'argent sans aucune condition?
L'hon. John Godfrey (ministre d'État (Infrastructure et Collectivités), Lib.): Monsieur le Président, nous travaillons toujours ensemble dans le plus grand respect des provinces pour trouver des solutions communes. Dans le cadre des programmes d'infrastructure, nous avons déjà fait une consultation concernant les objectifs qui satisfont des besoins, par exemple environnementaux. Nous continuons de le faire avec le Québec et avec les municipalités du Québec.
* * *
[Traduction]
Le Service correctionnel du Canada
Mme Lynne Yelich (Blackstrap, PCC): Monsieur le Président, hier, la ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile a essayé de nous assurer que des contrôles très stricts sont en place pour limiter l'accès des criminels incarcérés à des documents pouvant être considérés comme dégradants. La ministre peut-elle nous expliquer comment il se fait que les magazines pornographiques ne sont pas considérés comme dégradants pour les femmes?
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.): Monsieur le Président, je répète ce que j'ai expliqué hier. C'est une question difficile, mais en fait, les détenus peuvent avoir accès dans certaines circonstances à toutes sortes de documents que tous les Canadiens peuvent se procurer dans les kiosques à journaux du pays.
Je crains que, si la députée ne peut pas comprendre que le Service correctionnel du Canada fait tout son possible pour que, compte tenu de ses obligations, les détenus n'aient pas entre leurs mains de documents dégradants ou de documents pouvant miner...
Le Président: La députée de Blackstrap a la parole.
Mme Lynne Yelich (Blackstrap, PCC): Monsieur le Président, j'essaie encore de comprendre comment les détenus, parmi lesquels se trouvent des agresseurs sexuels et des meurtriers, ont pu obtenir le droit de vote.
La ministre pourrait-elle expliquer aux femmes qui ont été violées et agressées par des délinquants sexuels récidivistes, qui constituent le tiers des délinquants sexuels, comment elle compte assurer leur protection alors même que le gouvernement fait passer les droits des victimes innocentes de viol et d'agression sexuelle après les droits des délinquants sexuels ayant commis des crimes violents?
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.): Monsieur le Président, je crains qu'il n'y ait un thème sous-jacent dans cette question. Étant donné que la députée semble s'interroger sur la pertinence d'accorder le droit de vote à tous, nous devons peut-être nous demander si l'opposition officielle est prête à respecter la Charte canadienne des droits et libertés.
Si les députés de l'opposition officielle pensent que nous ne devrions pas respecter les décisions de la Cour suprême du Canada, je crains que nous ayons beaucoup de difficulté à...
Le Président: Le député de London—Fanshawe a la parole.
* * *
La défense nationale
M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.): Monsieur le Président, le budget de 2005 accordera aux Forces canadiennes des fonds supplémentaires dont elles ont grandement besoin et permettra d'accroître le nombre des membres des réserves.
Maintenant que le budget a été approuvé en principe, le ministre de la Défense nationale pourrait-il dire à la Chambre quand les Forces canadiennes pourront commencer à bénéficier de cet important apport de fonds et sous quelle forme cela se manifestera?
L'hon. Bill Graham (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de reconnaître l'appui extraordinaire manifesté par le président du Comité de la défense à l'égard des membres de nos forces armées. Ces derniers attendent impatiemment d'obtenir ces sommes supplémentaires, la plus importante augmentation accordée au cours des 20 dernières années, pour recruter de nouveaux membres, acheter de l'équipement et transformer les forces armées.
Ensemble, montrons à nos militaires que nous sommes prêts à les appuyer. Exhortons nos collègues de l'opposition à appuyer nos militaires afin de leur permettre d'obtenir l'aide dont ils ont besoin pour faire leur magnifique travail en notre nom.
* * *
Les affaires étrangères
M. Peter Goldring (Edmonton-Est, PCC): Monsieur le Président, l'année dernière, le premier ministre a dit qu'il rencontrerait le ministre en chef Misick des îles Turks et Caicos.
La meilleure façon de servir les intérêts du Canada au chapitre des affaires étrangères et du commerce international est de favoriser l'établissement de relations plus solides entre le Canada, les îles Turks et Caicos et toute la région des Antilles. En tant que mesure importante dans le cadre de cette démarche, le premier ministre s'engagera-t-il de nouveau à rencontrer sous peu le ministre en chef Misick?
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, le Canada n'est pas en mesure, pour l'instant, de discuter de l'association officielle dont le député semble parler, mais, de toute évidence, nous continuerons de travailler à l'établissement de liens commerciaux et politiques.
Le Canada et les Antilles ont des liens historiques qui remontent à plusieurs siècles. Nos relations avec les Antilles reposent sur l'amitié et le respect. Nous accueillons favorablement toutes les occasions de renforcer ces liens.
M. Peter Goldring (Edmonton-Est, PCC): Monsieur le Président, des soldats canadiens ont été rassemblés dans les îles Turks et Caicos et envoyés 100 milles plus loin, en Haïti, pour aider à y assurer la sécurité, mais ils ont été retirés en août dernier.
Les conditions se sont détériorées en Haïti, des gangs portant des armes militaires ayant causé la mort de nombreux habitants. Les soldats des Nations Unies sont incapables de réprimer les actes de violence. Comme il y a en Haïti 100 policiers civils canadiens qui ne sont pas munis d'armes militaires et que des élections sont imminentes, quelles mesures de sécurité le Canada prendra-t-il pour mieux aider à mettre fin aux tueries et pour garantir la tenue d'élections démocratiques et sans danger?
Hon. Pierre Pettigrew (Minister of Foreign Affairs, Lib.): Monsieur le Président, le député a raison d'attirer l'attention de notre pays et de la Chambre sur la situation très pénible que nous voyons actuellement en Haïti.
De toute évidence, Haïti est en période de transition. Il est très important que nous vivions bien cette transition. En effet, la sécurité constitue une préoccupation, mais la MINUSTAH, dirigée par les Brésiliens et les Chiliens, de même que la police canadienne, continueront de déployer tous les efforts possibles pour accroître la sécurité, ce qui favorisera une saine transition vers la démocratie au cours des prochaines élections en Haïti.
* * *
[Français]
L'industrie du meuble
M. André Bellavance (Richmond—Arthabaska, BQ): Monsieur le Président, après les 80 emplois perdus en février dernier, la compagnie Shermag a annoncé, hier, qu'elle fermait de façon permanente son usine de fabrication de meubles de Victoriaville, provoquant la perte définitive de 95 emplois additionnels: un autre dur coup pour la région.
La ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences est-elle consciente que des mesures concrètes s'imposent et qu'il est urgent de remettre en vigueur un programme permanent d'aide destiné aux travailleurs âgés qui sont frappés de plein fouet par ces fermetures d'usine qui se multiplient?
L'hon. Jacques Saada (ministre de l'Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec et ministre responsable de la Francophonie, Lib.): Monsieur le Président, jusqu'en 1995, Développement économique Canada a contribué de façon substantielle au développement de Shermag. Cependant, comme vous le savez, l'entreprise est maintenant une entreprise qui compte plus de 2 000 employés, et le ministère de l'Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec n'a pas comme cible ce genre d'entreprises. Nous regrettons les pertes d'emploi. Nous espérons que Shermag pourra se développer à nouveau à l'avenir.
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[Traduction]
Les affaires étrangères
M. Mario Silva (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, les violations des droits de la personne en Colombie atteignent un niveau critique. Le conflit armé interne entraîne la mort d'environ 11 personnes par jour et cause le déplacement de population intérieur le plus important après ceux du Soudan et de l'Angola.
La situation s'est améliorée sous le programme de sécurité démocratique du président Uribe. Cependant, les violations des droits de la personne et du droit international humanitaire commises autant par les groupes d'insurgés que par les forces de sécurité continuent. Ce sont les civils, et particulièrement les défenseurs des droits de la personne, les syndicalistes et les membres d'organisations de la société civile qui sont le plus touchés. Quelles mesures le gouvernement du Canada prend-il pour améliorer la situation en Colombie et pour y faire respecter les droits de la personne?
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, bien évidemment, nous avons les mêmes préoccupations que l'honorable député à propos de la situation des droits de la personne en Colombie. Le personnel de notre ambassade à Bogota se rend dans les zones de conflit pour offrir un soutien réel et visible aux groupes vulnérables et aux particuliers, et il continue d'encourager instamment le gouvernement colombien, directement ou par le truchement des Nations Unies et d'autres organisations, à respecter ses obligations internationales relatives aux droits de la personne. Actuellement, le Canada est à la tête d'un groupe de 24 pays donateurs qui travaillent avec le gouvernement colombien, les organismes des Nations Unies et les organisations de la société civile afin de promouvoir le respect des droits de la personne dans le pays.
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Présence à la tribune
Le Président: Je voudrais signaler aux députés la présence à la tribune de Son Excellence M. Abdullah Abdullah, ministre des Affaires étrangères de la République islamique d'Afghanistan.
Des voix: Bravo!
Le Président: J'aimerais aussi signaler aux députés la présence à la tribune de l'honorable Greg Sorbara, ministre des Finances de l'Ontario.
Des voix: Bravo!
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Privilège
Le Comité permanent de la procédure et des Affaires de la Chambre
[Privilège]
M. Scott Reid (Lanark—Frontenac—Lennox and Addington, PCC): Monsieur le Président, je soulève la question de privilège. Pendant la période des questions, le député d'Ottawa-Centre a fait référence à des faits qui se sont produits plus tôt aujourd'hui pendant la séance à huis clos du Comité permanent de la procédure et des Affaires de la Chambre. J'ai en ma possession l'avis de la séance no 37, qui précise: « Ordre du jour: Examen à huis clos de la réforme électorale ».
Le député a fait un exposé extrêmement sélectif des faits. Il sait pertinemment qu'après avoir abordé le sujet en public, il m'est impossible de répondre à ses déclarations, si ce n'est pour dire qu'elles s'écartent considérablement des faits et qu'elles sont certainement contraires, en esprit, à ce qui s'est effectivement passé.
J'estime que le député a violé le privilège de l'ensemble des membres du comité en révélant la teneur de délibérations à huis clos et, en particulier, en présentant les actions de députés conservateurs sous un jour défavorable et d'une façon qui les empêche de réagir sans enfreindre eux-mêmes le Règlement.
Je sais très bien, et vous le savez certainement aussi, monsieur le Président, que les Présidents ont toujours statué que, sauf dans des situations extrêmes, ils ne recevraient de questions de privilège liées aux délibérations d'un comité que sur la présentation d'un rapport dudit comité portant directement sur l'affaire, mais non les questions de privilège soulevées par des députés à titre individuel.
Je crois cependant que la situation actuelle est exceptionnelle. J'attire votre attention sur ce que dit Marleau et Montpetit, aux pages 128 et 129:
Les comités ont eu l'occasion de faire rapport à la Chambre du refus de témoins de comparaître lorsqu'on les y avait convoqués; du refus de témoins de répondre à des questions; du refus de témoins de fournir des documents ou des dossiers; du refus de certaines personnes d'obéir aux ordres d'un comité; et de la divulgation de faits survenus durant une séance à huis clos. |
J'estime que la divulgation sélective de faits, qui ne correspond pas exactement à ce qui s'est passé au comité, justifie l'intervention personnelle du Président.
Lorsque vous aurez disposé de la question de privilège, monsieur le Président, j'aimerais demander le consentement unanime pour déposer la motion qui était débattue à la Chambre, afin que tous les députés puissent l'examiner et se rendre compte que le député d'Ottawa-Centre a effectivement présenté les faits de façon très sélective.
L'hon. Ed Broadbent (Ottawa-Centre, NPD): Monsieur le Président, en ce qui concerne la réunion du comité qui a eu lieu à huis clos aujourd'hui, ce que j'ai dit à ce sujet était exact et j'espérais évidemment que c'était tout à fait conforme au Règlement de la Chambre. Je n'ai désigné aucun député et je n'ai cité aucune parole. Je n'ai fait que décrire ce qui s'est passé. Si le député veut contester cela, qu'il le fasse.
On peut espérer qu'en fin de compte, nous aboutirons à un comité dans lequel tous les membres accomplissent enfin du travail.
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, PCC): Monsieur le Président, c'est évident que nous avons ici un aveu de culpabilité. Le député d'Ottawa-Centre a clairement indiqué et confirmé les faits présentés par notre collègue, en ce sens qu'il a, volontairement et en connaissance de cause, trahi la confiance de ce comité, car cette réunion avait eu lieu à huis clos. Il en a parlé durant la période des questions, ce qui est tout à fait inapproprié.
Comme mon collègue le dit, monsieur le Président, j'espère que vous rendrez une décision favorable à son égard au sujet de la question de privilège qu'il a soulevée.
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, j'ignore comment le leader parlementaire de l'opposition officielle peut prétendre que le député d'Ottawa-Centre a avoué sa culpabilité. Je pense qu'il a précisé clairement qu'il a parlé à la Chambre aujourd'hui de la procédure et du fonctionnement du comité. Il n'a pas divulgué de renseignements sur le fond de la motion ou la teneur du débat et il n'a pas nommé de députés.
Fondamentalement, il s'est concentré sur le processus et le fonctionnement de ce comité ainsi que sur le fait que le Parti conservateur a choisi d'agir d'une façon qui a rendu le fonctionnement du comité tout à fait impossible, ce qui a conduit le député à intervenir comme il l'a fait. Il n'a en aucune façon violé ainsi les règles d'éthique ou les privilèges de la Chambre et j'espère que le Président sera d'accord là-dessus.
Le Président: Visiblement, cette question a pris la présidence de court. Je ne savais pas que la réunion du comité qui faisait l'objet de la question posée aujourd'hui était une réunion à huis clos.
De toutes façons, la question elle-même portait sur les prochaines réunions du comité, ce qui explique que la question était recevable pendant la période des questions.
Je vais me pencher sur cette affaire et je vais passer en revue le préambule de la question du député d'Ottawa-Centre, qui, je présume, est visé par l'objection du député de Lanark—Frontenac—Lennox and Addington, objection appuyée par les arguments avancés par le député de Prince George—Peace River.
Je tiendrai ensuite compte des arguments de la députée de Vancouver-Est et du député d'Ottawa-Centre et je ferai part de ma décision à la Chambre en temps et lieu.
Le député de Lanark—Frontenac—Lennox and Addington désire-t-il prendre la parole au sujet d'une autre question de privilège liée à la même question?
M. Scott Reid: Non, monsieur le Président. Je prends la parole au sujet d'une question connexe.
Je ne divulguerai aucun aspect de la réunion à huis clos en disant que le comité était en train de revoir son 40e rapport à la Chambre des communes, qui contenait une série de motions présentées par le chef du Nouveau Parti démocratique. Un élément précis lié au calendrier, que je considérais comme étant peu pratique, faisait l'objet des discussions.
Je vais demander le consentement unanime de la Chambre pour présenter ce rapport provisoire et le déposer ici-même. Les députés pourront donc constater que ce qui est rapporté ici diffère grandement de la présentation des faits selon le député d'Ottawa-Centre.
Pour cette raison, je demande le consentement unanime de la Chambre pour déposer ce rapport provisoire.
Le Président: Y a-t-il consentement unanime pour que le député dépose ce rapport?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le Président: La présidence a reçu avis d'une question de privilège de la part du député de Glengarry—Prescott—Russell.
* * *
Blocage de la ligne téléphonique de députés
L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.): Monsieur le Président, je soulève la question de privilège parce que des individus ou des groupes ont bloqué la ligne téléphonique de certains députés afin, je crois, d'empêcher ces derniers de faire leur travail.
Erskine May définit le privilège parlementaire comme suit:
Le privilège parlementaire est la somme des droits particuliers dont jouit chaque Chambre, collectivement, en tant que partie constitutive de la Haute Cour qu'est le Parlement, dont jouissent aussi les membres de chaque Chambre, individuellement, et faute desquels il leur serait impossible de s'acquitter de leurs fonctions. Ces droits dépassent ceux dont sont investis d'autres organismes ou particuliers. |
C'est à la lumière de cet extrait de la 20e édition de l'ouvrage d'Erskine May que je souhaite m'adresser à la Chambre.
Deuxièmement, monsieur le Président, un de vos prédécesseurs, la regrettée Jeanne Sauvé, a statué, le 29 octobre 1980, que «...bien que nos privilèges soient définis, la violation de privilège n'est pas circonscrite.» Elle a ajouté « On aura beau inventer de nouvelles façons de s'immiscer dans nos délibérations, la Chambre pourra toujours conclure, dans les cas pertinents, qu'il y a eu violation de privilège. »
Monsieur le Président, je tiens également à rappeler à la Chambre que vous avez rendu une décision, lors de la législature précédente, sur Ie fait de bloquer des lignes téléphoniques, bien que dans ce cas, la raison était différente, et que c'était le député Jim Pankiw qui, de son initiative personnelle, avait bloqué les communications téléphoniques et électroniques d'autres bureaux. La présidence avait alors déclaré ce comportement inapproprié et je crois que des mesures assez énergiques avaient été prises, notamment l'enlèvement de l'ordinateur ou des lignes d'accès au système.
Au cours des 29 dernières heures, mon bureau de la Colline du Parlement a reçu au moins 828 messages télécopiés. Je les ai ici même. Je suis prêt à les déposer pour que la présidence puisse en prendre connaissance si cela peut l'aider à établir s'il y a abus par rapport à ce qui devrait normalement se passer.
De plus, je tiens à informer la présidence que nous avons du débrancher notre matériel pendant plusieurs heures parce qu'il fonctionnait sans interruption.
Je tiens aussi à informer la Chambre que les députés ont accès dans le cadre de leur travail à des services téléphoniques. Cela est normal et cela relève du domaine public. Le télécopieur est branché à une de ces lignes téléphoniques et constitue un accessoire du téléphone. Les numéros de téléphone sont transmis aux électeurs qui peuvent nous joindre par téléphone ou par télécopieur au moyen d'un message électronique. De nombreux députés n'ont plus accès à cet équipement depuis un jour et demi. Je crois comprendre que d'autres députés demanderont à intervenir auprès de Votre Honneur plus tard.
Mon bureau reçoit normalement tous les jours de 40 à 50 télécopies des électeurs, mais ces deux derniers jours nous avons pu en recevoir seulement cinq. Le reste du temps, l'équipement est complètement bloqué. Un groupe qui se nomme Focus on the Family, dont le site web est www.marriagematters.ca, fait en sorte que nous ne pouvons plus nous servir de nos systèmes téléphoniques.
Je tiens également à attirer l'attention de la Chambre des communes sur un cas semblable, dont les tribunaux ontariens ont été saisis. Un individu du nom de William Murdock a engorgé le télécopieur d'un député provincial de l'Ontario. Il a été condamné par la Cour supérieure de l'Ontario en vertu de l'alinéa 430(1)c) du Code criminel, qui rend illégale l'utilisation d'une ligne téléphonique aux fins de harcèlement.
La présidence est certainement au courant de ce cas de condamnation au criminel pour exactement la même infraction dont a été victime, à un autre endroit, un autre député, bien qu'il s'agisse dans ce cas d'un député provincial.
Je note que certains députés d'en face ont le sentiment que l'impossibilité de mes électeurs à me joindre ne constitue pas à leur avis une question de privilège. Ils préfèrent chahuter plutôt que de traiter cette question sérieusement.
Malleau et Montpetit dit, à la page 84:
La présidence a régulièrement réaffirmé que la Chambre se devait de protéger contre toute intimidation, obstruction ou ingérence son droit de bénéficier des services de ses députés. |
L'obstruction, l'intimidation et l'ingérence se manifestent lorsque 1 000 télécopies sont transmises à mon bureau, de façon à empêcher les électeurs de Glengarry—Prescott—Russell de communiquer avec moi. De plus, les avis transmis par les mandataires de la Chambre aux députés, afin qu'ils se présentent devant les comités ou ailleurs, sont également transmis par télécopieur. Je ne peux les recevoir non plus.
Je soutiens, monsieur le Président, qu'il y a là matière à question de privilège. En effet, l'organisme en question, selon moi, est coupable d'outrage au Parlement. Si la présidence en décide ainsi, je suis prêt à proposer la motion appropriée pour renvoyer cette question au comité parlementaire que j'ai l'honneur et le privilège de présider.
[Français]
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Haute-Saint-Charles, BQ): Monsieur le Président, le problème qu'a souligné le député de Glengarry—Prescott—Russell m'habite et me préoccupe à l'heure actuelle.
J'ai reçu plus de 1 000 télécopies en 36 heures. Ce faisant, les gens de la circonscription de Charlesbourg—Haute-Saint-Charles, qui communiquent souvent par fax avec mon bureau à Ottawa, en sont empêchés par un groupe qui monopolise un instrument de travail essentiel pour tous les députés de cette Chambre. Être en contact avec son député est un droit fondamental de notre société démocratique.
Nous avons aussi reçu plus de 2 300 courriels depuis lundi matin. Vous savez que cela utilise les ressources des serveurs de la Chambre et empêche, encore une fois, les communications légitimes de mon bureau en raison des délais occasionnés par le flux intense de courrier électronique.
De plus, le temps nécessaire pour simplement faire le ménage, si vous me permettez l'expression, monopolise mes employés. Ce faisant, encore une fois, non seulement les moyens électroniques sont bloqués, au détriment des gens de Charlesbourg—Haute-Saint-Charles qui désirent contacter leur député, mais mes employés ont plus de difficulté à donner aux gens de Charlesbourg—Haute-Saint-Charles des services auxquels ils ont droit et auxquels ils s'attendent de la part de leur représentant au Parlement fédéral.
Je veux être bref, car le député de Glengarry—Prescott—Russell a bien fait valoir le point. C'est donc une atteinte aux privilèges des parlementaires, car ils ne peuvent pas bien faire leur travail ni avoir de contacts avec les citoyens de leur comté. En outre, des milliers de Québécois, de Québécoises, de Canadiens et de Canadiennes n'ont pu contacter leur député fédéral.
Cela dit, un geste concret doit être posé pour faire en sorte que de telles actions soient arrêtées.
Je vois mon collègue de Calgary-Sud-Ouest s'apprêter à prendre la parole. J'ai l'impression qu'il défendra ces actions actuelles. Cependant, dans un cas qui l'intéressera, ce sera peut-être son bureau qui sera bloqué, et il ne pourra pas ainsi faire le travail qui est le sien. Ce pourrait très bien lui arriver la semaine prochaine ou peut-être même demain.
Je vous demande de faire en sorte que de telles actions, de telles attaques aux privilèges des parlementaires soient empêchées.
[Traduction]
M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, PCC): Monsieur le Président, je comprends les inquiétudes de mes deux amis et collègues, mais je crois que nous sommes en présence de l'un des efforts les plus spécieux pour trouver matière à question de privilège dont j'ai pu être témoin pendant mes huit années de travail comme député.
Les deux députés nous disent simplement que plusieurs centaines de citoyens canadiens, dont les taxes et les impôts permettent au Parlement de fonctionner, se sont servis de lignes de télécommunication publiques payées par le Parlement pour communiquer avec des députés, ce qui est leur droit le plus strict.
Il est de notre devoir, monsieur, de recevoir ces communications dans le cadre de nos fonctions. Nous ne pouvons pas savoir, avant d'avoir reçu un message, s'il provient ou non de l'un de nos électeurs. En fait, j'ajouterais que le travail d'un député exige qu'il ne se limite pas à communiquer avec ses électeurs, et je suis certain que mes deux collègues seront d'accord avec moi sur ce point.
Je ne sais pas, mais peut-être que certains messages parmi les centaines de messages reçus par le député de Glengarry—Prescott—Russell provenaient de ses électeurs. Toutefois, j'ai de la difficulté à comprendre pourquoi le député dit qu'il est dorénavant impossible pour ses électeurs de lui envoyer des télécopies parce que d'autres personnes lui en envoient. S'il reçoit des télécopies, c'est signe qu'on peut le joindre.
Il nous arrive tous, de temps à autre, de recevoir un grand nombre de communications par téléphone, courrier électronique ou télécopieur, et notre personnel a parfois du mal à s'occuper rapidement de tous ces messages. Mais nous sommes ici pour écouter les Canadiens.
Mon collègue du Bloc québécois prétend qu'il s'agit d'une attaque. Le simple fait que des citoyens veuillent communiquer avec des députés à propos d'un sujet d'actualité constituerait une attaque. Rien de plus absurde.
Il est tout aussi absurde de qualifier de harcèlement, comme le fait le député de Glengarry—Prescott—Russell, la communication d'opinions du public sur des enjeux importants. Il s'agit simplement pour les Canadiens de communiquer librement leurs opinions politiques aux représentants élus au Parlement du Canada.
J'estime, Monsieur, que le simple fait de reconnaître qu'il y a ici matière à soulever la question de privilège équivaudrait à remettre en question la liberté d'expression dans les communications avec les députés élus.
Si, sur le plan logistique, il faut d'autres moyens de communiquer avec nous de façon que les lignes ne soient pas encombrées, l'administration de la Chambre devrait peut-être se pencher sur la question. Toutefois, s'il y a trop de communications qui viennent des Canadiens, la solution ne consiste pas à conclure que l'expression démocratique des opinions constitue du harcèlement, une attaque, ou encore une atteinte aux privilèges des députés. S'il faut une solution d'ordre logistique parce que les lignes des télécopieurs ou les comptes de courrier électronique ne suffisent plus, je suis persuadé qu'on pourra la trouver.
Toutefois, il faut éviter de censurer les Canadiens qui veulent communiquer avec leurs députés et de qualifier de harcèlement la libre expression d'opinions politiques. Ce serait spécieux.
L'hon. Don Boudria: Monsieur le Président, je crois comprendre qu'un autre député souhaite parler d'une question semblable, je serai donc bref. Un des fax que j'ai reçus provenait de quelqu'un qui se faisait passer pour un député de la Chambre. J'ai aussi reçu plusieurs copies de celui-ci.
J'estime que cette situation aussi est très grave. Ce fax fait partie des 828 que j'ai reçus, dont certains provenaient de gens qui se faisaient passer pour des députés. Si les députés ne pensent pas que c'est grave, je leur demanderais d'y penser davantage.
Enfin, je rappelle à la Chambre que, dans le cadre d'un cas presque identique en Ontario, un tribunal a jugé qu'un tel comportement était criminel. Il a imposé une peine. L'inculpé a interjeté appel de la décision, sans succès, et cette dernière a été maintenue.
Dans cette affaire, le fait de harceler un député provincial en encombrant sciemment son télécopieur de manière à empêcher qui que ce soit d'autre de communiquer avec lui ou elle est considéré comme un crime. Si c'est un crime, cela contrevient à tout le moins à mon privilège en tant que député dans la mesure où mes électeurs ne peuvent me contacter.
Je n'en ai aucun doute. Le juge n'en avait aucun doute non plus. Dans une autre instance, le juge de la cour d'appel était du même avis. Aux députés qui prétendent que ce n'est pas sérieux, qu'on a le droit d'entraver le système de communication d'un député de la Chambre, je me permets de dire qu'un jour quelqu'un interférera avec leur système de communication.
La même chose se produisait il y a plusieurs centaines d'années quand les gens tentaient d'interférer dans les allées et venues des députés du Parlement du Royaume-Uni, d'où sont venues les décisions rendues par un de vos prédécesseurs, monsieur le Président: on avait parlé de protection contre les voies de fait, autrement dit de la liberté d'accès au Parlement. Aujourd'hui, il s'agit de l'accès de nos électeurs. C'est la même chose, par extension.
Je porte cette situation à l'attention de la Chambre dans l'espoir d'obtenir une décision favorable.
M. Jim Gouk (Colombie-Britannique-Southern Interior, PCC): Monsieur le Président, je vais être très clair. Je tiens à ce qu'on accorde toute l'attention nécessaire au grief du député s'il est légitime. Dans son dernier exposé, le député a dit que les gens qui lui envoyaient des fax le faisaient délibérément pour l'empêcher de communiquer.
Toutefois, j'ai entendu mon collègue présenter les choses de façon bien différente. Il a parlé du droit des Canadiens de communiquer avec les représentants élus de partout au pays. Si je voulais encombrer le télécopieur du député, je lui enverrais de façon anonyme toute une série de documents inutiles pour que la machine soit occupée en permanence, empêchant ainsi qui que ce soit d'autre de communiquer avec lui.
Il pourrait peut-être nous donner des précisions à ce sujet. Reçoit-il un flot continu de communications vides de sens ou s'agit-il plutôt de lettres légitimes, signées par des personnes qui transmettent des demandes pertinentes?
L'hon. Don Boudria: Monsieur le Président, les lettres que je reçois sont toutes identiques. Elles proviennent toutes du même endroit. Dans certains cas, une personne a dû appuyer des dizaines de fois de suite sur le bouton d'envoi. Autrement dit, dans certains cas, le télécopieur crache un grand nombre de lettres identiques l'une après l'autre. Il n'y a personne qui communique de façon légitime avec un député en transmettant un message identique, produit par une tierce personne à l'aide d'un système informatique à Vancouver, à une personne de Sarsfield en Ontario, où je vis, ou à un député de l'autre bout du pays.
Ce n'est pas ainsi qu'on communique avec un député. Nous avons tous le droit de communiquer les uns avec les autres. Toutefois, à un certain niveau, cela devient du harcèlement. Nous savons tous par exemple qu'il n'y a rien de répréhensible au fait de téléphoner une fois à un voisin. Toutefois, si je téléphonais à mon voisin 35 fois dans la même demi-heure, la police serait vite à ma porte parce que cela ne serait pas acceptable, et nous le savons tous.
J'ai en main le document en question, que je suis bien prêt à déposer au besoin. C'est un exemple de la lettre que je reçois à des dizaines et des dizaines d'exemplaires du même endroit et du même expéditeur. Aucune de ces lettres n'est signée. Elles sont toutes produites par un ordinateur qui a reproduit des noms au bas, dont certains sont censés correspondre à des députés à la Chambre.
M. Gary Goodyear (Cambridge, PCC): Monsieur le Président, il y a moins d'une heure, nous avons entendu la vice-première ministre dire que c'était le Parti conservateur qui ne respectait pas la Charte des droits. Et maintenant nous avons droit au discours d'un député qui souhaite ne pas recevoir de télécopies.
Pour ma part, mon bureau a été inondé de courriels sur cette question. Il en arrivait de 1 500 à 2 000 par jour et j'ai dû faire appel à du personnel supplémentaire pour que les Canadiens puissent s'exprimer, comme c'est leur droit. Je crois que le député n'a pas su convaincre la Chambre que les droits de ses électeurs ont été brimés de quelque manière.
M. Brian Fitzpatrick (Prince Albert, PCC): Monsieur le Président, je cherche plutôt à obtenir des éclaircissements. Le député a parlé d'un député provincial qui a soumis l'affaire à la police. La personne a été accusée par la suite, et le système de justice pénale a suivi son cours. Je crois comprendre que le problème du député est de même nature que celui du député provincial. J'aimerais bien savoir si le député a soumis la question à la police.
L'hon. Don Boudria: Monsieur le Président, je ne crois pas qu'il soit nécessaire d'avoir siégé à la Chambre aussi longtemps que moi pour savoir que les privilèges des députés ne sont pas protégés par les cours provinciales, ni même, dans le cas qui nous occupe, par les cours supérieures.
Ce que je disais en faisant une analogie, c'est qu'il s'agit là d'une infraction parce qu'elle est commise de façon systématique. S'il s'agit d'une infraction au Code criminel, que j'essaie de transmettre une information ou non — ou que d'autres députés le fassent, car je ne suis pas le seul; des dizaines de députés ont probablement vécu la même situation — je l'ai fait pour montrer à quel point elle est grave. Je peux m'occuper moi-même de mes problèmes en tant que citoyen privé.
La question demeure que, premièrement, notre Président a jugé par le passé que saboter le service téléphonique était considéré comme inacceptable. Deuxièmement, au niveau provincial, une telle activité est considérée comme une infraction criminelle. Troisièmement, personne ne réussira à me convaincre qu'une même personne qui envoie des dizaines de télécopies par ordinateur, une à la suite de l'autre, présente des instances à un député. Il s'agit de harcèlement de députés qui siègent à un comité de la Chambre des communes pour accomplir une tâche confiée par cette dernière.
J'espère ne pas être en train de me répéter, monsieur le Président. Je réponds, conformément à vos directives, à une question qu'a soulevée un député d'en face.
Le Président: La présidence prendra la question en délibéré.
[Français]
Je voudrais remercier les honorables députés de Glengarry—Prescott—Russell et de Charlesbourg—Haute-Saint-Charles ainsi que les autres députés ayant posé des questions concernant toute cette question. Je remercie l'honorable député de Calgary-Sud-Est de ses remarques et de sa contribution.
[Traduction]
Je prendrai la question en délibéré et rendrai en temps opportun à la Chambre une décision qui, je l'espère, sera satisfaisante pour le député de Glengarry—Prescott—Russell et pour tous les autres députés qui ont présenté des instances.
Au lieu de déposer les documents, le député de Glengarry—Prescott—Russell pourrait peut-être les mettre à la disposition de la présidence pour que je puisse les examiner au cours des délibérations sur cette question.
Initiatives ministérielles
[Les crédits]
* * *
[Français]
Les crédits
Motion de l'opposition — La Commission Gomery
La Chambre reprend l'étude de la motion.
Le Président: Avant la période réservée aux déclarations de députés et aux questions orales, l'honorable députée de Drummond a eu la parole. Il lui reste maintenant cinq minutes pour répondre à des questions ou recevoir des commentaires concernant ses remarques.
Comme aucun député ne souhaite intervenir, nous poursuivons le débat avec l'honorable député de Repentigny.
M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Monsieur le Président, cela me fait plaisir de prendre la parole sur la motion de mes collègues et amis du Parti conservateur. Il s'agit de leur première journée d'opposition officielle. Jusqu'à tout récemment, le gouvernement leur avait usurpé ces journées au mois de mai, pour ne pas avoir à débattre de motion qui leur déplairait. Ils ont tout de même décidé, malgré le fait que le premier ministre ait fait campagne au leadership sur le déficit démocratique, de supprimer certaines journées consacrées à l'opposition, que ce soit les conservateurs, le NPD ou le Bloc québécois.
Compte tenu du fait que je prends la parole après la période de questions orales, je crois qu'il est important de rappeler, pour les gens qui nous écoutent ou nous regardent, l'objet de la motion du Parti conservateur. Par la suite, il me fera plaisir d'expliquer la position du Bloc québécois quant à cette motion.
La motion du Parti conservateur se lit comme suit — pour une fois, elle est relativement courte et simple:
Que la Chambre demande au gouvernement de modifier l'article k) du mandat de la Commission Gomery pour que le commissaire puisse donner des noms et assigner des responsabilités. |
Cela peut vouloir dire: trouvez le coupable et accusez-le. Cela me fait penser au temps où George W. Bush recherchait Saddam Hussein en Irak, mort ou vif. C'est un peu ce qu'on comprend de cette motion qui demande au gouvernement d'élargir le mandat de la Commission Gomery pour identifier les coupables, les assigner, les nommer, les punir, et j'en passe.
Dans des termes populistes et dans des discussions de tavernes, cette motion recevrait sûrement la faveur du public. En effet, a priori, tout le monde veut identifier les coupables, les assigner, leur imposer les peines et les sanctions qui leur reviennent suite aux infractions qu'ils ont commises.
Cependant, ici, en cette Chambre — et c'est le rôle des parlementaires —, nous devons aller au-delà de nos premiers instincts ou réflexes. Ceux-ci nous mèneraient à les condamner et à faire de la Commission Gomery un tribunal populaire à la télévision, un peu comme Star Académie ou Canadian Idol qu'on voit ces temps-ci. On montrerait à la population qui sont les coupables.
Le Bloc québécois s'oppose à cette motion du Parti conservateur. Toutefois, il est très important de rappeler que nous voulons que les gens responsables du scandale des commandites soient identifiés et aient des sanctions quant aux crimes qu'ils ont commis. Cependant, là où nous avons un problème, c'est lorsqu'il s'agit de modifier le mandat d'une commission ou d'un juge, après que les témoins eussent été entendus.
La Commission Gomery a été instituée en vertu de la Loi sur les enquêtes qui spécifie:
Le gouverneur en conseil peut, s'il l'estime utile, faire procéder à une enquête sur toute question touchant le bon gouvernement du Canada ou la gestion des affaires publiques. |
Ainsi, si le Parlement voulait modifier le mandat de la Commission Gomery pour que le commissaire puisse nommer des noms et assigner des responsabilités, il faudrait modifier la Loi sur les enquêtes qui date de 1985.
De tout temps au Bloc québécois, un concept reste très important pour nous, celui de la rigueur. Donc, lorsqu'une motion du Parti de l'opposition officielle demande tout simplement au juge de regarder plus loin et de trouver le coupable, nous trouvons qu'il y a un manque de rigueur. En effet, pour ce faire, il faudrait amender la Loi sur les enquêtes de 1985.
La Commission Gomery est une commission d'enquête, ce qui fait en sorte qu'elle ne peut que donner des recommandations, mais elle n'a pas de véritables pouvoirs judiciaires. L'article k) du mandat de la Commission Gomery, qui a été donné par le comité du Conseil privé en vertu de la partie I de la Loi sur les enquêtes, stipule que:
[...] le commissaire reçoive instruction d'exercer ses fonctions en évitant de formuler toute conclusion ou recommandation à l'égard de la responsabilité civile ou criminelle des personnes ou d'organisations et de veiller à ce que l'enquête dont il est chargé ne compromette aucune autre enquête ou poursuite en matière criminelle en cours. |
C'est là l'important. Lorsque l'on s'oppose à la motion des conservateurs, cela ne veut pas dire que l'on se rallie aux libéraux et que l'on veut protéger les criminels impliqués dans la Commission Gomery. Cela veut dire que, dans le mandat de la Commission Gomery — les conservateurs auraient dû le lire avant — , on spécifie, en apportant une attention importante, que le juge Gomery a un reçu un mandat en vertu de la Loi sur les enquêtes et qu'il ne doit pas nuire, en parallèle, à toute autre enquête ou poursuite en matière criminelle en cours.
Depuis cette rocambolesque affaire de la Commission Gomery, nous avons été témoins de plusieurs avertissements relatifs au respect de la commission d'enquête et du système juridique dans lequel nous vivons actuellement.
Je vous rappelle quelques faits qui démontrent l'importance d'être excessivement prudents si nous voulons, une fois pour toutes, respecter le voeu des Canadiens et des Canadiennes — surtout des Québécois et des Québécoises — , afin d'identifier les responsables du scandale des commandites, et laisser la Commission Gomery poursuivre son travail.
Par exemple, dans le premier cas, il s'agit du privilège parlementaire. Lorsque Chuck Guité et Alfonso Gagliano sont venus témoigner devant le Comité permanent des comptes publics, on leur avait alors garanti que leur témoignage ne pouvait pas être utilisé ailleurs. En effet, ils bénéficiaient d'une immunité parlementaire, en comité, leur permettant de pouvoir dire ce qui s'était passé, sans que l'on puisse utiliser leur témoignage ultérieurement lors d'une poursuite contre eux.
À la Commission Gomery, des avocats ont voulu faire changer la règle du privilège parlementaire. Fort heureusement, on a conservé cette règle de l'immunité parlementaire permettant aux témoins et aux députés qui s'expriment en comité de ne pas voir leurs propos retenus contre eux.
On aurait pu dire, parce que l'on voulait accuser Chuck Guité et Alfonso Gagliano, que l'on lèverait l'immunité parlementaire. Cela aurait créé un précédent dangereux pour la Chambre des communes, pour les parlementaires et, éventuellement, pour les témoins qui seraient venus ici. Les parlementaires de tous partis confondus ont fait preuve de rigueur et ont usé de la subtilité nécessaire afin de préserver ce privilège parlementaire.
Un peu plus tard, à la Commission Gomery, on a interdit la publication des témoignages de Chuck Guité, de Jean Brault et d'une autre personne, dont j'oublie le nom — que l'on me soufflera probablement incessamment.
Pourquoi a-t-on appliqué cette interdiction de publication pendant les témoignages de Chuck Guité et de Jean Brault? Parce que, en même temps ou quelques semaines plus tard, leur procès devant la Cour criminelle devait être entendu.
On aurait alors pu dire non à l'interdiction de publication, prétextant que le public voulait savoir et entendre. Puisque c'était un tribunal populaire, on aurait pu y aller et faire fi de toutes les règles de prudence relatives au système juridique. Cependant, tel ne fut pas le cas. En effet, dans le mandat de la Commission Gomery, on précise que l'on ne doit compromettre aucune autre enquête ou poursuite en matière criminelle en cours. Le juge Gomery a eu la prudence de conserver un certain interdit de publication, qu'il a levé peu de temps après. Par la suite, on a fait une demande du report du procès au criminel. En ce moment, Chuck Guité, Paul Coffin et Jean Brault sont déjà accusés pour fraude.
Je vais aller encore plus loin. Dans le scandale, il y a eu des poursuites de l'ordre de 40 millions de dollars concernant 10 groupes ou individus impliqués dans le scandale des commandites.
Oui, nous voulons trouver les coupables; oui, nous devons les identifier; oui, il doit y avoir des sanctions contre les coupables; oui, on doit enfin démontrer à la population qui a agi dans ce scandale.
Cependant, on ne doit pas le faire de la façon que les conservateurs le veulent, c'est-à-dire en permettant de changer le mandat du juge Gomery après coup et en utilisant le témoignage des gens qui ont comparu devant la Commission Gomery à d'autres fins que celles prévues.
C'est la raison pour laquelle le Bloc québécois veut identifier les coupables et qu'ils soient sanctionnés, mais pas de cette façon.
M. Peter MacKay (Nova-Centre, PCC): Monsieur le Président, félicitations à mon collègue pour son discours.
J'ai une question très simple à lui poser. Mon collègue député croit-il que la GRC ait la capacité d'arrêter ou de commencer une enquête contre le gouvernement, le Parti libéral, alors que le rapport de la vérificatrice générale indique clairement que la GRC a reçu de l'argent du Programme de commandites? C'est un problème sérieux pour une enquête criminelle ou civile quand la GRC, le service policier national, semble être en conflit d'intérêts.
J'aimerais que le député fasse un commentaire à ce sujet.
M. Benoît Sauvageau: Monsieur le Président, je remercie beaucoup mon collègue de sa question et de ses beaux mots à l'égard de mon discours.
Je partage ses préoccupations face à la GRC. D'un autre côté — et j'élaborerai davantage sur cet aspect —, ce n'est pas parce que nous avons des doutes quant à la probité de la GRC de faire enquête là-dessus que nous devons, pour atténuer ces doutes, fausser le mandat de la Commission Gomery.
Si la GRC n'est pas l'institution la plus apte à faire enquête sur le scandale des commandites, peut-être que le procureur général devrait intenter des poursuites par le biais du système juridique canadien dans son entièreté, comme il l'a fait pour Chuck Guité, Paul Coffin et Jean Brault. Ces derniers sont accusés de fraude devant le système juridique canadien. Ils sont donc devant les tribunaux à l'heure actuelle. Si je ne me trompe pas, Paul Coffin a plaidé coupable, ce matin, à 15 chefs d'accusation. On a laissé de côté la GRC dans ce dossier. De même, quand le procureur a intenté une poursuite de 40 millions de dollars contre Groupaction, Everest, Gosselin Communications, Lafleur et leurs présidents, il n'a pas passé par la GRC.
Si la Commission Gomery nous permet d'identifier d'autres responsables dans le scandale des commandites, ce sera au système juridique de faire la preuve que ces gens sont réellement coupables de fraude. Le cas échéant, c'est par le système juridique que ces gens devront être sanctionnés.
Cependant, pour ce qui est de la GRC et de son implication dans le scandale des commandites, celle-ci a déjà entamé une dizaine d'enquêtes sur le gouvernement. On n'a qu'à se souvenir du Shawinigate ou de Placeteco; on pourrait faire une certaine recension.
Mon collègue de Nova-Centre saura se souvenir, en raison de son expérience en Chambre, que nous sommes toujours en attente, de façon un peu particulière, de plusieurs rapports de la GRC. Ici en cette Chambre, tous partis confondus, nous pouvons nous questionner à savoir pourquoi, quant à certains dossiers, il faut attendre 2, 3, 5 ou 8 ans avant d'obtenir des réponses à la suite d'enquêtes de la GRC. À cet égard, je partage son interrogation et sa préoccupation face à la rapidité de la GRC à rendre publiques les enquêtes qu'elle entreprend sur le gouvernement.
[Traduction]
M. Peter MacKay (Nova-Centre, PCC): Monsieur le Président, je tiens à dire dès maintenant que je partagerai mon temps de parole avec le député de Brandon—Souris, qui représente la ville des Wheat Kings.
La motion elle-même est fort simple. Elle demande qu'on élargisse le mandat du juge Gomery pour lui permettre de donner des noms et d'assigner des responsabilités. C'est une façon très simple d'essayer de donner aux Canadiens les réponses qu'ils cherchent.
La commission siège depuis un certain temps. Je dirais que la majorité des Canadiens s'attendent à ce qu'on donne au commissaire le pouvoir de peser les faits et de déterminer qui est responsable, après avoir entendu tous les témoignages.
Les machinations politiques du premier ministre ont causé une grande déception dans le pays. Les membres de son Cabinet ont essayé délibérément de détourner l'attention de la vraie question, qui concerne la reddition de comptes, qui concerne une conspiration du Parti libéral et des efforts déployés pour canaliser des fonds publics, par l'entremise d'agences de publicité amies des libéraux, vers les coffres du Parti libéral dans le but de rester au pouvoir. Nous avons vu ce genre de tentatives désespérées au cours des derniers jours.
Tout cela prouve encore une fois que le premier ministre usera de tous les moyens pour s'accrocher au pouvoir. J'ajouterais, comme l'a mentionné mon collègue, qu'il y a aussi beaucoup d'autres scandales. Aucun autre gouvernement dans l'histoire du Canada n'a été autant marqué par les scandales que le gouvernement actuel. L'histoire prouvera que c'est bel et bien vrai.
On sait que la véritable crainte du premier ministre est qu'un nouveau gouvernement ne fasse la lumière sur tout. Il examinerait les divers autres programmes qui ont mal tourné, et je pense ici au registre des armes à feu, au scandale de DRHC et à l'annulation du contrat d'achat d'hélicoptères, pour ne citer que quelques cas. Des sommes considérables appartenant à l'État ont été détournées, gaspillées et, dans certains cas, volées. Une bonne partie de cet argent s'est retrouvée dans les coffres du Parti libéral, grâce à un plan très efficace qu'il a délibérément conçu à cette fin.
Le noeud de la question reste la désignation des responsables. Pourquoi ne pas aller encore plus au fond des choses pour résoudre cette question si importante? Pourquoi s'opposer à ce que le juge Gomery puisse tirer des conclusions de fait exhaustives et transparentes? Pourquoi ne pas lui donner le pouvoir de le faire? L'alinéa k) de son mandat précise:
[...] que le commissaire reçoive instruction d'exercer ses fonctions en évitant de formuler toute conclusion ou recommandation à l'égard de la responsabilité civile ou criminelle de personnes ou d'organisations et de veiller à ce que l'enquête dont il est chargé ne compromette aucune autre enquête ou poursuite en matière criminelle en cours; [...] |
Personne ne le veut. Nous ne voulons pas que le commissaire aille jusqu'à établir une responsabilité civile ou criminelle, mais qu'il puisse simplement assigner des responsabilités après avoir entendu de nombreux témoignages.
Le juge Gomery déclare lui-même, au sujet du mandat de la commission:
La commission n'a pas le pouvoir d'imputer une responsabilité criminelle ou civile en dommages relativement à des sommes d'argent perdues ou gaspillées; elle n'en a ni la capacité ni l'intention de le faire. |
Il ajoute:
Les conclusions de fait que je pourrai tirer et les opinions que je pourrai émettre ne seront pas basées sur des critères d'ordre juridique; elles serviront de fondement aux recommandations que je formulerai comme prévu à l'alinéa b) du mandat. Il s'ensuit que les rapports de la Commission n'auront aucune répercussion juridique; ils ne pourront être invoqués devant les juridictions civiles ou pénales qui pourraient être appelées à examiner ces mêmes questions, et ces juridictions ne seront pas liées par ces rapports. |
Nous voulons simplement que le commissaire soit habilité à tirer des conclusions quant à la responsabilité, et non pas à s'ingérer dans des enquêtes criminelles, à jeter une ombre sur ces enquêtes, à en diminuer l'efficacité ou à leur nuire. Nous savons que des accusations criminelles ont été portées et que des enquêtes criminelles ont donc été lancées. Y en a-t-il d'autres? Le premier ministre a refusé de répondre à cette question aujourd'hui.
Nous ne cherchons pas à conférer au juge Gomery le pouvoir de porter des accusations, comme certains l'ont laissé entendre. L'attribution de responsabilités civiles ou criminelles est tout autre chose. Tout ce que nous voulons, c'est que le juge puisse nommer les responsables, en se fondant bien évidemment sur ses conclusions.
Personne n'a nié ce qui s'est passé. Le premier ministre, dans son plaidoyer très médiatisé adressé à la population pour obtenir son indulgence, n'a pas nié ce qui s'est produit ni que c'était le fait du Parti libéral. Ce n'est pas un scandale lié au Québec. Ce n'est pas le scandale d'un autre parti ou d'un autre gouvernement. C'est un scandale libéral qui découle de façons de faire délibérées qui s'étendent sur 10 ans.
Le ministre de la Justice, avec sa grandiloquence et son ton professoral et condescendant habituels, cite certains éléments du droit écrit et de la jurisprudence triés sur le volet. En vérité, l'article 13 ne prévoit pas qu'une enquête comme la commission Gomery débouche sur des conclusions préjudiciables à certaines personnes; cet article exige qu'on donne un avis. C'est une exigence de préavis. Aucun avis n'a été donné aux personnes qui ont témoigné ou qui le feront.
Nous avons entendu des témoignages sous serment, à l'origine frappés d'une ordonnance de non-publication, de la part de personnes accusées au criminel — et l'une d'entre elles a plaidé coupable. Il n'a jamais été question de nuire aux enquêtes en cours. Aucune conclusion semblable ne serait tirée sur le plan civil ou criminel.
Nous voulons simplement que le commissaire, après avoir examiné attentivement les témoignages sous serment et les documents, soit en mesure de donner des noms. C'est très simple et c'est tout à fait dans l'esprit des déclarations maintenant risibles du premier ministre, qui soutenait vouloir aller au fond des choses, ne ménager aucun effort et donner à la commission Gomery tous les outils voulus. Le gouvernement balaie ces déclarations du revers de la main en s'opposant à l'élargissement du mandat de la commission.
Pour ce qui est de l'examen des faits, le fardeau de la preuve est différent. Il ne s'agit pas de tirer des conclusions, il s'agit de formuler des recommandations.
Permettez-moi d'ajouter autre chose en ce qui concerne les recommandations. Le premier ministre a confié à une personne l'autorité de mettre en oeuvre les recommandations de la Commission Gomery, mais ces recommandations s'évanouiront dans le sillage du déclenchement des élections 30 jours après la présentation du rapport, si bien que la promesse du premier ministre n'est encore une fois que de la poudre aux yeux.
De toute évidence, le scandale des commandites est sans pareil dans l'histoire du Canada. Des témoins ont déclaré sous serment que le Parti libéral a obtenu des ristournes clandestines sur les marchés de commandite. Ce ne sont pas des allégations ou des insinuations. Ce sont des témoignages livrés sous serment et pouvant faire l'objet d'accusations de parjure s'il devait être établi clairement qu'ils étaient délibérément faux. Dans certains cas, ces témoignages sont l'équivalent de confessions de fraude, d'utilisation de moyens frauduleux et d'une litanie d'autres irrégularités aux termes de la Loi électorale du Canada. Comme on dit, il y a eu préméditation. Les gestes ont été posés délibérément, intentionnellement. Et il n'est question que d'un seul programme au sein d'un seul ministère.
Les actions et la direction du Parti libéral n'ont été que tromperies du début à la fin. En tant que grand argentier du pays, le premier ministre savait ou aurait dû savoir ce qui se passait sous ses yeux. Il est impossible de croire qu'il n'était pas au courant. Les Canadiens ne peuvent tirer que deux conclusions: ou il est incompétent, ou il était impliqué, à moins qu'il n'ait été en transe.
Les libéraux ont utilisé ces fonds à des fins partisanes au moins lors de trois élections. L'argent a servi à acheter des appuis, à acheter des militants bénévoles et à acheter la victoire. Cette victoire a été acquise à grands frais pour les contribuables et au grand mépris de la confiance de la population. Une fraude de cette ampleur est inégalée dans l'histoire de notre pays.
La vérificatrice générale a signalé des dépenses de programmes de 250 millions de dollars, dont 100 millions de dollars en commissions versées directement à des firmes de publicités copines des libéraux, mais la firme de vérification indépendante Kroll Lindquist Avey a repéré des dépenses de 355 millions de dollars dont près de la moitié, soit 44 p. 100, a été versée en commissions à ces firmes. Le montant empoché par le Parti libéral du Canada demeure inconnu. Nous savons cependant que les 750 000 $ du fonds en fiducie ne couvriraient pas la moitié de ce montant. Par ailleurs, peut-on croire en l'existence de ce fonds en fiducie?
De nombreux témoins disent avoir participé à cette tentative délibérée qui consistait à retourner au Parti libéral une partie de leurs commissions provenant du Programme de commandites, cela pour avoir l'assurance d'obtenir des contrats dans l'avenir. On peut difficilement imaginer plus sordide comme scandale politique et comme cas classique de fraude: les fonds publics utilisés à des fins sectaires.
Il ressort des témoignages présentés à la commission que de nombreuses entreprises amies des libéraux se sont enrichies. De nombreux particuliers et entreprises amis des libéraux en ont profité de manière outrancière. Claude Boulay et sa partenaire, Diane Deslauriers, de Groupe Everest, ont obtenu un total de 29,8 millions de dollars en traitements et en ristournes. Dans son témoignage, Diane Deslauriers a dit avoir travaillé presque tous les jours au bureau de campagne électorale du premier ministre en 1993, et nous savons que M. Boulay a travaillé à la première course à la direction du premier ministre.
Lorsqu'il a témoigné devant la Commission Gomery, le premier ministre a tout juste admis connaître ces gens-là. En fait, il ne savait pas trop s'il s'agissait plus que de simples connaissances. Nous avons vu un échange de correspondance qui prouve le contraire. C'est incroyable. Chaque jour, l'examen des faits a taillé en pièces la crédibilité du premier ministre.
Jean Lafleur et sa famille ont empoché 14,1 milliards de dollars. Luc Lemay, propriétaire de Groupe Polygone, a obtenu 13,5 milliards de dollars. C'est extraordinaire. Jacques Corriveau, un proche confident de l'ex-premier ministre Jean Chrétien, a encaissé 8 millions de dollars, essentiellement en commissions provenant de contrats de sous-traitance liés aux commandites. Il a aussi admis devant la commission avoir inscrit sur la liste de paye de son entreprise des employés du Parti libéral alors qu'ils travaillaient pour ce parti. Jean Brault et sa femme ont aussi reçu 4,9 millions de dollars du Programme de commandites. Jean Brault a payé le salaire d'un certain nombre de travailleurs du Parti libéral par l'entremise de Groupaction. Les vérificateurs de la firme Kroll ont pu établir un lien entre les transactions de 1,7 million de dollars inscrites dans les livres de Groupaction et la déclaration de Jean Brault, qui a admis avoir blanchi de l'argent pour le Parti libéral.
Quel était le dénominateur commun dans tous ces cas? Il s'agissait de libéraux qui remettaient au Parti libéral de l'argent acquis malhonnêtement. Il s'agissait de fonds publics.
Il est triste de devoir continuellement mobiliser du temps de la Chambre pour dire ce qui saute aux yeux. Ce parti n'est pas apte à gouverner notre pays. Il a nettement trahi la confiance du public. Le juge Gomery devrait avoir tous les outils, tous les pouvoirs nécessaires pour étaler au grand jour toute la corruption. C'est là l'objectif que vise la motion d'aujourd'hui.
L'hon. Shawn Murphy (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, l'enquête a été lancée en vertu de la Loi sur les enquêtes. L'article 13 de cette loi donne au commissaire des pouvoirs très étendus. Lorsqu'il a entrepris ses travaux, en septembre dernier, le juge Gomery a fait une déclaration préliminaire dans laquelle il affirme qu'il a le pouvoir de trouver les fautes et de désigner des responsables. C'est très clair. Cependant, il ne peut pas déclarer quelqu'un coupable d'un acte criminel ou civilement responsable. La députée de Calgary—Nose Hill a déclaré que l'alinéa k) interdit au juge Gomery de déclarer quiconque coupable.
Le député de Nova-Centre devrait savoir que nous avons un système de justice solide. Lorsqu'une personne est accusée d'une infraction criminelle, cela se fait habituellement par mise en accusation ou par procédure sommaire. Il y a communication de la preuve. L'accusé a le droit d'avoir recours aux services d'un avocat. Il existe une procédure bien connue et très élaborée concernant la règle de la preuve. Il y a un procès et, si le procureur du gouvernement peut prouver la culpabilité de l'accusé au-delà de tout doute raisonnable, cette personne est déclarée coupable et condamnée.
Selon la logique de la motion, tout cela est mis de côté. Selon les mots de la députée de Calgary—Nose Hill, M. Gomery peut trouver le coupable et je présume que c'est un autre juge qui prononcerait la sentence.
J'ai deux questions à poser au député. Tout cela est codifié dans notre Charte des droits et libertés. Reconnaîtriez-vous avec moi, comme, je crois, la plupart des avocats...
Le vice-président: Je prie le député de Charlottetown de désigner les députés par le nom de leur circonscription.
L'hon. Shawn Murphy: Admettriez-vous avec moi, par votre intermédiaire, monsieur le Président, que...
Le vice-président: Désolé d'interrompre à nouveau le député, mais il est important de passer par l'intermédiaire de la présidence, comme l'exige notre Règlement.
L'hon. Shawn Murphy: Par votre intermédiaire, monsieur le Président, le député serait-il d'accord pour affirmer avec moi que cela irait certainement à l'encontre de la Charte des droits et libertés?
Commentant le mandat au moment où la commission d'enquête a été annoncée, le député a déclaré: « Eh bien, le mandat est certainement large.On ne peut pas nier que d'après les premières indications, il permettra aux responsables de faire ce qu'ils ont à faire. » Quel est le changement qui est survenu depuis qu'il a fait cette déclaration?
M. Peter MacKay: Monsieur le Président, il n'y a pas eu de changement du tout. Le mandat est large, mais pas suffisamment large. À n'en pas douter, nous avons découvert avec le passage du temps que le mandat a été délibérément limité par le premier ministre. En fait, la vérificatrice générale a recommandé qu'il y ait un examen aussi des données des sondages et des contrats d'exécution de sondages que distribuait le ministère des Finances, dirigé à l'époque par le premier ministre. Le mandat de la Commission Gomery ne comprend pas cela.
Je n'accepte absolument pas que le Parti libéral trouve encore le moyen, par commodité, de se draper dans la Charte. Les enquêtes criminelles ne sont aucunement entachées par les recommandations du juge Gomery, quelles que soient ces recommandations. Il y en a de nombreux exemples. J'attire l'attention sur quelques-unes de ces enquêtes: l'enquête concernant Patricia Starr, l'enquête sur la mine Westray, l'enquête sur Walkerton, celle sur le sang contaminé, où nous avons vu des accusations criminelles portées et un plaidoyer de culpabilité soumis pas plus tard qu'hier. Affirmer qu'il en va autrement est complètement insensé.
Ces enquêtes n'ont pas du tout été entravées du fait que des enquêtes criminelles étaient en cours. Je suis au courant de l'affaire Westray parce qu'elle s'est produite dans ma circonscription, une situation tout à fait tragique dans une mine à Plymouth, en Nouvelle-Écosse. Les condamnations au criminel décidées hier dans l'enquête sur le sang contaminé démontrent de la même façon que ces démarches peuvent se faire simultanément.
À mon avis, le commissaire peut ajouter aux travaux qui doivent être effectués au cours d'une enquête criminelle et du procès qui suivra.
Le fait est que le Parti libéral lui-même, toute l'organisation du Parti libéral, devrait faire l'objet d'une enquête, tout comme l'organisation de la Croix-Rouge a fait l'objet d'une enquête criminelle. Le problème, bien sûr, c'est la GRC elle-même. Je cite un passage d'un article rédigé par Greg Weston, dans lequel il a dit:
Évidemment, la Gendarmerie elle-même avait empoché près de 2 millions de dollars en argent provenant des commandites, et la majeure partie de cet argent était cachée dans un compte bancaire non gouvernemental, au Québec. |
Je ne veux aucunement calomnier les excellents et honnêtes membres de la GRC qui travaillent fort et qui font la fierté de notre pays, mais c'est aux échelons supérieurs que nous constatons que, tout comme certains hauts fonctionnaires, ils peuvent être cooptés et être mêlés à la corruption au sein du gouvernement.
Le gouvernement a trempé dans un complot contre la confiance du public et a fraudé la population de centaines de millions de dollars. La majeure partie de cet argent a été versée dans sa caisse politique à des fins partisanes. Voilà l'objet de l'enquête. Nous devrions connaître tous les faits. Les Canadiens décideront en dernier ressort du responsable. Je crois que la piste risque de les mener directement au premier ministre.
M. Merv Tweed (Brandon—Souris, PCC): Monsieur le Président, le collègue qui m'a précédé a exprimé ce que nous ressentons tous à ce sujet. Les Canadiens se sont penchés sur cette affaire et ont entendu ce qui a été dit au sujet de la Commission d'enquête Gomery. Selon moi, ils estiment que cette commission est la réponse appropriée, que le juge Gomery, lorsqu'il rendra des comptes à la population, signalera ce qui a mal fonctionné, désignera les responsables et dira de quoi ils sont responsables.
Malheureusement, plus le temps passe et plus l'enquête progresse, plus nous nous rendons compte qu'il n'en sera pas ainsi. Nous présentons aujourd'hui cette motion et demandons à la population canadienne et à la Chambre de prendre la décision de l'appuyer. Les Canadiens souhaitent que la Commission Gomery, à la fin de ses travaux, leur fournisse les réponses qu'ils espèrent.
Je ne parviens pas à comprendre comment un gouvernement peut rester impassible et rendre millionnaires ses amis tandis que les contribuables canadiens, qui triment dur, confient leur argent à Ottawa afin qu'il l'investisse dans leur meilleur intérêt, en santé et en éducation, en approvisionnements et en équipement pour nos forces armées. Tous ces gens souffriront d'une manière ou d'une autre de ce scandale.
Les Canadiens n'obtiendront pas leur réponse. Nous avons entendu des témoignages, comité après comité. Des gens nous ont dit ce qu'ils n'ont pas pu faire au cours des dernières années, faute d'argent. Nous savons où est allé cet argent et à qui. Le juge Gomery nous le dévoile, jour après jour.
Je tiens à choisir mes mots avec grand soin. Selon moi, le gouvernement actuel a fait croire aux Canadiens que la Commission Gomery leur fournirait une réponse définitive. C'est ce que nous affirme tous les jours le ministre en réponse aux questions: « Laissez le juge Gomery terminer ses travaux. Laissez-le produire son rapport. Les Canadiens prendront leur décision lorsque le rapport aura été produit. »
L'alinéa dont nous parlons dans le présent débat est le suivant:
que le commissaire reçoive instruction d'exercer ses fonctions en évitant de formuler toute conclusion ou recommandation à l'égard de la responsabilité civile ou criminelle de personnes ou d'organisations... |
Quand j'entends cela et que j'écoute les propos du ministre, de l'autre côté de la Chambre, en réponse aux questions, je reçois des messages contradictoires. Le gouvernement me dit que les libéraux veulent faire toute la lumière sur ce scandale. Ils veulent que les gens obtiennent les réponses voulues. Ils veulent que les responsables répondent de leurs actes. Pourtant, le gouvernement a inclus dans le mandat du juge un alinéa qui empêche celui-ci d'atteindre ces objectifs.
Je pense que nous nous sommes tous fait berner si nous croyons que le juge Gomery sera en mesure de le faire, à moins que nous n'adoptions la motion qui a été présentée aujourd'hui.
Les contribuables canadiens méritent de savoir qui sont les responsables de la manipulation de ces millions de dollars. Ils ont le droit de savoir. Après tout c'est leur argent. Ce n'est pas l'argent du gouvernement libéral et celui-ci ne peut se permettre de le dépenser à sa guise, de le distribuer à ses amis, d'établir de fausses factures soi-disant pour payer un groupe d'individus qui renvoient ensuite cet argent au Parti libéral du Canada qui, à son tour, l'utilise pour financer ses campagnes électorales.
Nous savons maintenant que ce manège ne s'est pas limité à une seule campagne électorale. Il a eu cours pendant les trois dernières campagnes. Si une nouvelle campagne électorale avait été déclenchée ces jours-ci, qui sait, cet argent aurait peut-être servi à en financer une quatrième. Par surcroît, qui peut dire que la même chose ne s'est pas produite auparavant?
Voilà sur quoi porte ce débat. Il porte sur la responsabilité du gouvernement. Le gouvernement ne veut-il pas que les Canadiens lui fassent confiance? Les libéraux ne veulent-ils pas que les Canadiens nous respectent en tant que parlementaires, parce que nous, députés, leur présentons la vérité comme un juge interprète cette notion, et parce que nous exigeons que certaines personnes rendent des comptes?
Nous parlons de notre système de justice dans ce monde et, dès que quelqu'un doit rendre des comptes, la barre est abaissée, de sorte que cette personne n'a pas à le faire. Les Canadiens veulent que cela change et que cela change avec la Commission Gomery.
Lors de mes déplacements dans ma circonscription la semaine dernière, j'ai entendu souvent l'avis selon lequel il faut attendre la fin de l'enquête de la Commission Gomery. Mes électeurs m'ont dit qu'ils étaient convaincus que la Commission Gomery irait au fond des choses, que le juge Gomery nous dirait qui est responsable, qui devrait être inculpé et qui devrait être puni.
Quand ils apprennent que ce n'est ni son travail ni son rôle, ils perçoivent comme une insulte le fait que le gouvernement dise publiquement qu'il veut aller au fond des choses. Nous avons tous entendu le premier ministre prononcer à la télévision nationale un discours qui ne portait ni sur des questions d'importance historique ni sur des questions de valeurs qui importent aux Canadiens, mais plutôt sur des questions n'intéressant que le Parti libéral du Canada. Le premier ministre n'a fait que se porter à la défense du Parti libéral.
Il a déjà été dit à plusieurs reprises que c'était un problème libéral. Je pense qu'il faut le répéter de nouveau. Ce n'est pas une question provinciale. Ce n'est pas un problème causé par d'autres Canadiens. C'est un problème interne du Parti libéral.
Tous les jours, à l'enquête Gomery, je vois des hauts responsables du Parti libéral comparaître et déballer de l'information. Ces gens-là ne font pas des allégations, ils témoignent. Ils font des aveux. Ils font tout ce qu'ils peuvent pour incriminer tout le monde, à mon avis. Je pense que les gens commencent à s'en rendre compte. Le malheur, c'est que, compte tenu du mandat actuel de la Commission Gomery, nous ne saurons sans doute jamais qui sont les coupables.
Ce matin, j'ai écouté quelques-unes des observations faites par les députés d'en face. Ils ont fait valoir pourquoi cela ne devait pas se faire ainsi. Ils ont dit que cela nuirait à l'enquête de la GRC, que cela nuirait à l'enquête policière. Je ne pense pas qu'il soit risqué de permettre au juge Gomery d'imputer des fautes aux responsables. Cela ne nuirait pas au travail de la GRC. Bien au contraire.
Il faut cependant se demander pourquoi l'alinéa k) figure dans le mandat et s'il s'inscrivait dans la situation d'ensemble que connaissait le gouvernement à ce moment-là.
Le gouvernement prétend aujourd'hui que modifier le mandat pendant que l'enquête est en cours risque d'en compromettre l'issue. Je ne vois pas comment. Je n'ai entendu personne fournir d'explication à ce sujet aujourd'hui. À mon avis, plus on aura de moyens de faire sortir la vérité et d'en faire rapport, plus nous serons en mesure de faire toute la lumière sur cette affaire et d'aider tous les Canadiens à comprendre ce qui est arrivé.
Nous avons été témoins de cet épisode de l'histoire du Canada où un gouvernement a profité et abusé de son pouvoir de taxation pour approvisionner ses coffres et utiliser l'argent à ses propres fins. Personnellement, cela me fâche. Ce n'est pas pour cela que je voulais venir au Parlement et que j'ai été élu. Je me suis présenté pour que les gens me respectent et pour faire ce qu'il faut comme il faut. Or, jour après jour, on constate un dérapage.
Je pense que cela nous nuit à tous, malheureusement. L'histoire nous enseigne que les gouvernements qui profitent des contribuables du pays ou de la province qu'ils représentent finissent par être punis, mais de la même façon, un grand nombre d'honnêtes gens sont mis dans le même sac et voient leur réputation entachée. Cela me contrarie.
Le but de la motion à l'étude est d'informer les Canadiens qui pensent tous obtenir une explication au bout du compte.
Je demanderais au gouvernement libéral et à nos vis-à-vis de bien réfléchir. S'ils sont d'avis que la population canadienne mérite des réponses et mérite de connaître la vérité, ils n'auront aucune réticence à appuyer la motion et à laisser le juge Gomery présenter son rapport en temps et lieu. Le juge va donner des noms et tenir certaines personnes responsables, ce que nous souhaitons tous, en tant que Canadiens.
M. Steven Fletcher (Charleswood—St. James—Assiniboia, PCC): Monsieur le Président, les électeurs de Brandon—Souris sont très bien représentés par le député. Le député a parlé du respect envers les parlementaires. Je sais que ses électeurs respectent leur représentant. Le député pourrait-il expliquer comment le fait d'appuyer la motion du Parti conservateur contribuerait à ramener l'intégrité au Parlement, après tous les dégâts causés par le gouvernement?
M. Merv Tweed: Monsieur le Président, finalement, nous voulons tous intervenir à la Chambre et retourner dans nos collectivités pour communiquer avec les gens qui nous ont élus. Tous les députés devraient pouvoir regarder leurs électeurs dans les yeux et leur dire qu'ils ont fait tout en leur pouvoir pour que la vérité soit connue, pour leur dire la vérité et non pas pour que les besoins des députés soient satisfaits ou pour qu'ils puissent facilement rendre des comptes au public. Je crois que c'est ainsi qu'on peut juger de la valeur des hommes et des femmes et je crois que c'est aussi de cette façon qu'on devrait juger tous les parlementaires.
M. Peter MacKay (Nova-Centre, PCC): Monsieur le Président, puisque nous parlons de la vérité, je tiens à apporter une précision sur quelque chose qui est arrivé plus tôt dans le débat. Le député de Kings—Hants, qui a été parachuté au Cabinet et qui est maintenant ministre des Travaux publics et bouclier humain du premier ministre en ce qui concerne la Commission Gomery, a cité les propos suivants du juge Gomery:
J'aurai le droit de tirer des conclusions au sujet des fautes éventuellement commises et de leurs auteurs. |
Le député a arrêté là. Le juge Gomery a déclaré juste après:
L'Enquête ne débouchera sur ce genre de conclusions que dans la mesure où cela sera nécessaire pour l'exécution de son mandat. |
Le mandat est clairement très important ici. Le juge Gomery a lui-même indiqué:
Les conclusions de fait que je pourrai tirer et les opinions que je pourrai émettre ne seront pas basées sur des critères d'ordre juridique; elles serviront de fondement aux recommandations que je formulerai comme prévu à l'alinéa b) du mandat. |
Voilà la question. L'alinéa b) du mandat prévoit que le commissaire peut formuler des recommandations en vue de prévenir la mauvaise gestion des futurs programmes de commandites ou activités publicitaires et qu'il peut tenir compte des recommandations visant à changer la Loi sur la gestion des finances publiques et, enfin, qu'il peut faire rapport sur la responsabilité des ministres et des fonctionnaires, selon la recommandation de la vérificatrice générale du Canada.
Il n'est pas question de responsabilité, de noms à donner et de reddition de compte. Le juge Gomery le dit lui-même. Le ministre des citations choisies induit encore une fois les Canadiens en erreur quant au mandat du juge Gomery. Ce sont des tentatives délibérées pour tromper le public au sujet du mandat du juge Gomery. Cela fait partie du camouflage. Cela fait partie de la tentative du gouvernement en vue d'éviter d'avoir à rendre des comptes. Tout a pour but d'enterrer la vérité.
M. Merv Tweed: Monsieur le Président, comme je l'ai dit dans mes commentaires antérieurs, voilà le problème. Je crois que le public canadien croit que le juge Gomery publiera son rapport en donnant un compte rendu intégral. Malheureusement, nous savons qu'il ne le peut pas. Nous savons qu'il en sera empêché par les dispositions de son contrat. Nous voulons seulement que la vérité éclate et que des gens soient tenus responsables en bout de ligne. Lorsque nos enfants font quelque chose de répréhensible, nous voulons qu'ils assument leurs responsabilités, de façon à ce qu'ils deviennent de meilleurs adultes. Je pense qu'il est temps que le gouvernement fasse la même chose.
Le vice-président: Conformément à l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement ce soir, à savoir: l'honorable député d'Okanagan—Coquihalla, L'Iran; l'honorable député de Sault Ste. Marie, Le développement social.
L'hon. Shawn Murphy (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, je parlerai de la motion présentée par le député de Saanich—Gulf Islands. Cette motion vise à modifier l'alinéa k) du mandat de la Commission Gomery.
D'emblée, je n'approuve pas cette motion et je ne l'appuierai pas. En effet, elle vise à apporter une modification à la Commission Gomery, un changement qui, selon moi, compromettrait tout le processus. Le juge Gomery a entendu des témoignages depuis le mois de septembre et il est prévu, si je comprends bien, qu'il termine ses audiences la semaine prochaine ou dans deux semaines. Il est trop tard pour commencer à changer les règles, en particulier celles qui concernent le mandat de cette commission très importante.
Ces règles sont très claires. Elle ne sont pas arbitraires. Elles ne sont pas ambiguës. Elles sont définies dans la Loi sur les enquêtes. Elles sont très différentes de celles des cours de justice ou des tribunaux, car les enquêtes publiques ont un but bien différent et, dans le contexte du Programme de commandites, la Commission Gomery a un but bien précis dans la stratégie du gouvernement.
Mes collègues se souviendront que le premier ministre a annulé le Programme de commandites des sa première journée en fonction. Depuis ce moment, il a pris de nombreuses mesures décisives pour régler la question. On a lancé une enquête criminelle. Des contrôleurs ont été affectés dans tous les ministères pour surveiller la dépense. De nouvelles règles et de nouvelles lignes directrices en matière d'éthique ont été établies pour les détenteurs de charges publiques. Un avocat spécial a été nommé pour récupérer les sommes perdues. On a intenté des poursuites civiles d'une valeur totale de presque 41 millions de dollars contre 19 sociétés et particuliers et on a créé la Commission d'enquête sur le Programme de commandites, à savoir la Commission Gomery.
Chacune de ces mesures visait un objectif particulier. Le premier ministre et le gouvernement luttent contre la corruption. Nous devons trouver les responsables mais nous devons également cerner les facteurs qui ont rendu possibles de telles malversations et déterminer comment les éviter à l'avenir. C'est le rôle de la Commission Gomery.
J'ai pour ma part une certaine expérience de l'ensemble de la question. J'ai siégé au Comité permanent des comptes publics au cours des trois ou quatre dernières années. En février dernier lorsque la Commission Gomery a été annoncée et même avant que les comités n'amorcent leur travail, le premier ministre a pris comme mesure de confier au Comité permanent des comptes publics le mandat de se pencher immédiatement sur l'ensemble de la question.
Nous y avons travaillé durant quatre ou cinq mois et entendu entre 80 et 90 témoins. Ainsi, entre février et mai de l'an dernier, nous avons siégé quatre jours par semaine et recueilli les témoignages de la plupart des responsables du gouvernement ayant quelque chose à voir avec le programme, de bon nombre des entreprises de publicité, des hauts fonctionnaires et des fonctionnaires chargés d'administrer le programme. Ce fut un travail difficile mais fort intéressant et exigeant.
Je trouve les allégations fort inquiétantes et les gens de Charlottetown ne m'ont pas envoyé à Ottawa pour justifier ou défendre ce qui ne peut l'être. Tout cela est fort préoccupant.
Finalement, nous avons rédigé un rapport. C'est un très bon rapport. Je ne suis pas certain que tous les députés l'ont lu, mais à mon avis, nous avons cerné un grand nombre de facteurs systémiques ou généraux à l'origine du problème.
C'était un tout petit programme, administré par environ huit fonctionnaires au nom de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada. Malheureusement, le programme a été établi en dehors de ce que je considère comme les règles normales du gouvernement.
Il ne semble pas avoir été assujetti aux règles normales du Conseil du Trésor ni aux dispositions de la Loi sur la gestion des finances publiques. J'estime que le ministre, ce faisant, n'a pas dirigé cette petite section du ministère dans le meilleur intérêt des Canadiens, et en particulier des contribuables. Il prétend qu'il n'avait pas le temps de diriger son ministère. Ce n'est pas une excuse valable.
Je crois que le sous-ministre n'a pas non plus assumé ses responsabilités envers les Canadiens. Il lui incombait de veiller à ce que le programme fonctionne conformément à la Loi sur la gestion des finances publiques et aux lignes directrices du Conseil du Trésor. La direction générale de la vérification interne du ministère des Travaux publics a aussi manqué à ses engagements à deux reprises.
Le premier ministre — et c'est tout à son honneur — a pris un certain nombre de mesures. Je ne les énumérerai pas toutes, mais l'une d'entre elles a été d'établir la Commission Gomery et de lui donner un très vaste mandat, énoncé à l'article 13 de la Loi sur les enquêtes. Dans ses déclarations préliminaires, le juge Gomery a défini clairement ses obligations envers les Canadiens: conclure à la responsabilité, conclure à l'inconduite et imputer la responsabilité.
Comme je l'ai déjà dit, au moment où la Commission Gomery a été mise sur pied, l'ancien député de Nova-Centre a approuvé le mandat:
Le mandat est certainement large. On ne peut nier que, d'après les premières indications, il permettra aux responsables de faire ce qu'ils ont à faire. |
Il était certainement d'accord avec moi à l'époque, mais d'autres facteurs ont joué depuis, et il est évident, d'après les propos qu'il a tenus à la Chambre pendant la dernière demi-heure, qu'il a opéré un revirement total.
La Chambre est saisie d'une motion que je ne peux songer un instant à appuyer. Ainsi que je la comprends, les conservateurs veulent tout d'abord que le juge Gomery ait le pouvoir de reconnaître des gens coupables de comportement criminel. Deuxièmement, ils veulent donner au juge le pouvoir d'attribuer une responsabilité civile, autrement dit de déclarer que telle ou telle personne doit tel montant d'argent.
Cela va à l'encontre de la Charte des droits, du Code criminel et de toutes les règles judiciaires des dix provinces et des trois territoires du Canada. Nous avons au Canada un système bien établi de droit pénal et civil. Si on veut creuser plus loin, on peut consulter la Charte des droits, qui consacre ce droit. On y dit que, au pénal, il doit y avoir inculpation, ce qui se fait par mise en accusation ou procédure sommaire. L'infraction est divulguée et le procureur est tenu de présenter une preuve. Aux termes de la Charte des droits, le prévenu a le droit de retenir les services d'un avocat et de lui donner des instructions. Il existe un corpus bien établi de règles en matière de preuve et de procédure qui régissent les procès au pénal.
La fonction d'enquête et le rôle de la poursuite sont séparés l'une de l'autre. Le prévenu, après les stades de l'inculpation, de l'établissement et de la communication de la preuve, a droit à un procès, et le procureur — c'est très important pour obtenir un verdict de culpabilité — doit prouver la culpabilité au-delà de tout doute raisonnable devant un juge seul ou un jury.
Si je comprends bien la motion présentée aujourd'hui, tout ce que j'ai dit depuis cinq minutes ne vaut rien du tout. La motion de l'opposition réclame pour le juge Gomery le pouvoir d'attribuer la responsabilité criminelle. Permettez-moi de donner un exemple et de le pousser jusqu'à sa conclusion ultime.
Des témoins sont invités ou cités à comparaître devant la Commission Gomery. Ils se présentent devant le juge et déposent leurs témoignages du mieux qu'ils le peuvent. Ils rentrent chez eux, ne suivent pas l'enquête de près et trois, quatre, six ou neuf mois plus tard, ils lisent dans un journal national qu'ils ont été trouvés coupables d'un acte criminel passible d'une peine minimale de six, huit ou dix années d'emprisonnement. Je tiens à préciser pour ceux qui suivent les débats que je n'invente rien. Si je suis la logique dont il est question à la Chambre, la prochaine étape est que la police jettera ces personnes en prison en leur imposant des peines minimales de six, huit ou dix ans.
J'aimerais parler de la deuxième partie de la motion. Les conservateurs veulent que le juge Gomery attribue non seulement la responsabilité criminelle, mais aussi la responsabilité civile. Si on en arrivait là dans les tribunaux canadiens dans le cadre de notre système de jurisprudence, on suppose qu'il y aurait d'abord la préparation, le dépôt et la signification de la plainte en bonne et due forme.
Les gens ont besoin de savoir s'ils sont accusés de fautes criminelles. Ils ont besoin de savoir s'ils sont poursuivis. L'information, la connaissance et la communication de la preuve sont essentiels au système. La plainte doit être déposée et signifiée dans les formes de manière à ce que l'accusé puisse présenter une défense s'il le désire. En cas de différend impossible à résoudre après la communication préalable, après la communication de la preuve et après l'interrogatoire préliminaire des témoins, il y a un procès.
Le procès peut avoir lieu devant un juge ou, si la réclamation dépasse un certain montant, devant un juge et un jury. Le juge établit alors une conclusion de fait. Je devrais souligner que le fardeau de la preuve dans un procès civil est totalement différent, ce que personne n'a encore souligné dans cette enceinte, selon moi. Il ne s'agit pas de prouver hors de tout doute raisonnable. La preuve repose sur la prépondérance des probabilités. Après avoir entendu les témoignages, dans le cas d'une poursuite civile, le juge ou un jury bien instruit établit une conclusion de fait sur laquelle on fondera le jugement.
Ce principe serait carrément ignoré si nous acceptions la logique qui sous-tend la motion. Une personne pourrait être trouvée coupable sans même s'être rendue à Montréal. Je n'invente rien. Ce serait la conséquence fondamentale de cette motion. Une personne pourrait acheter la Presse et lire à la page 3 que le juge Gomery vient de la tenir responsable, elle ou son entreprise, et qu'elle doit verser à quelqu'un d'autre un dédommagement de 100 000 $, de 200 000 $ ou de 500 000 $. Ce serait la première fois que la personne entendrait parler de la réclamation. Mais ce n'est pas ainsi que le système canadien a été conçu, et je ne voudrais certainement pas être partie prenante à une motion qui ignorerait les assises de notre système judiciaire.
L'alinéa k) prévoit ce qui suit:
[...] que le commissaire reçoive instruction d'exercer ses fonctions en évitant de formuler toute conclusion ou recommandation à l'égard de la responsabilité civile ou criminelle de personnes ou d'organisations et de veiller à ce que l'enquête dont il est chargé ne compromette aucune autre enquête ou poursuite en matière criminelle en cours. |
C'est exactement ce qui s'est produit. Dans deux cas au moins, probablement après avoir entendu les observations des avocats, le juge Gomery a entendu des témoignages à huis clos. Par la suite, ne voulant pas causer préjudice ou porter atteinte à ce qui pourraient être des poursuites en matière criminelle, il s'est penché sur la preuve entendue et l'a en grande partie rendue publique.
Toutefois, si l'on en croit la motion dont nous sommes saisis, si je comprends bien, les poursuites criminelles seraient une perte de temps. Le juge Gomery serait chargé d'en décider. La seule chose que le juge entendant la cause pénale aurait à faire serait de prononcer la sentence à l'égard de chacun des criminels.
La motion est tout à fait insensée. Elle va à l'encontre des dispositions de la Charte des droits et libertés et du Code criminel. Elle va à l'encontre de bon nombre d'autres lois et règles en vigueur au Canada.
Tout le monde veut faire la lumière sur toute cette affaire, mais cela ne représente qu'une attaque de plus contre le juge Gomery. Cela a commencé dès sa nomination. Le président du Comité des comptes publics l'a traité de politicard. C'est la première chose que le président a dite. Cette campagne de dénigrement s'est poursuivie depuis.
Les Canadiens veulent que la Commission Gomery puisse terminer son travail et ils veulent que justice soit faite. C'est pour cette raison que je ne peux appuyer cette motion. Je la trouve tout à fait ridicule et je ne peux pas l'appuyer.
Je citerai à nouveau les paroles de mon éminent collègue de Nova-Centre qui a dit en février dernier: Ce mandat permettra aux responsables de faire ce qu'ils ont à faire. » On tirera les conclusions qui s'imposent.
Je n'appuierai pas cette motion que je trouve plutôt inquiétante. Je ne crois pas qu'elle obtiendra l'appui de la Chambre.
M. Peter MacKay (Nova-Centre, PCC): Monsieur le Président, dans le même registre que son cousin transfuge de Kings—Hants, le député d'en face aime faire des citations sélectives.
Il m'a demandé, de matière rhétorique, ce qui avait changé. Sait-il ce qui a changé? Nous avons vu une procession de libéraux, devant la Commission Gomery, qui ont avoué leur participation à des actes criminels dans le but de prélever par la fraude des derniers publics à des fins partisanes. Et voilà maintenant que nous apprenons que la commission n'a pas le pouvoir de faire des recommandations en matière de responsabilité.
Nous n'avons pas à entendre ces balivernes sur le chevauchement des compétences pour ce qui est de la responsabilité civile et criminelle. Il s'agit simplement de formuler des recommandations, comme nous l'avons vu à la Commission Krever, à Walkerton et dans un certain nombre d'enquêtes publiques, où des procédures criminelles et civiles se déroulaient simultanément.
Les propos du député d'en face ne sont qu'absurdités mensongères, et rien d'autre. Il cherche, délibérément, à tromper les Canadiens quant au sens de la motion. Il cherche, délibérément, à détourner l'attention...
Le vice-président: Je demanderais au député de Nova-Centre de retirer les mots « délibérément, à tromper ». Vous pouvez présumer des motivations de quelqu'un ou vous pouvez tenter de les découvrir, mais à n'en pas douter, ici, nous supposons que chaque député est honorable. J'incite le député de Nova-Centre à retirer les mots « délibérément, à tromper ».
M. Peter MacKay: Monsieur le Président, à votre demande, je retire le mot « délibérément ». J'affirme que le député induit les Canadiens en erreur lorsqu'il tient ces propos.
Il est également très drôle. Il laisse entendre que, d'une façon ou d'une autre, l'opposition ne veut pas que le juge Gomery fasse toute la lumière sur cette affaire. Selon ma dernière analyse, nuls autres que l'ancien premier ministre libéral, Jean Chrétien, l'ancien ministre libéral des Travaux publics et une ribambelle de ministres libéraux des Travaux publics, qui sont éclaboussés par toute cette affaire sordide, ont engagé une poursuite au civil pour empêcher le juge Gomery de mener son enquête.
J'aimerais que l'honorable député, s'il est honorable, admette que les seules personnes qui ont engagé une poursuite pour empêcher le juge Gomery de mener son enquête sont d'anciens parlementaires et son ancien chef, Jean Chrétien et Alfonso Gagliano. Ce sont les seules personnes qui l'ont fait.
Personne à la Chambre, pas une seule personne, refuse que le juge Gomery aille au fond des choses. Certains veulent plus rapidement que d'autres qu'il aille au fond de certaines choses. À notre avis, lorsque nous aurons fait toute la lumière sur cette affaire, nous constaterons que la filière remonte jusqu'aux échelons les plus élevés du Parti libéral.
Le député sera-t-il au moins assez honnête pour admettre que les seules personnes qui ont tenté d'arrêter le juge Gomery en engageant une poursuite sont Alfonso Gagliano et Jean Chrétien, deux des personnes les plus haut placées dans le Parti libéral?
L'hon. Shawn Murphy: Monsieur le Président, j'ai déjà dit publiquement à maintes reprises que je n'appuierai personne qui, de quelque manière que ce soit, compromet, entrave ou tente de retarder le travail du juge Gomery.
Il y a cependant un point que le député de Nova-Centre a soulevé qui est trompeur. Il parle de l'alinéa k) et il parle d'autres enquêtes. C'est une disposition qu'on voit couramment dans toutes les enquêtes. Je vais en énumérer quelques-unes: l'enquête sur l'affaire Arar, celle sur la crise à Ipperwash, celle sur Walkerton, celle sur l'affaire Stonechild et celle sur l'affaire Grange. Toutes ces enquêtes ont été mises sur pied par des gouvernements conservateurs, sauf celle sur l'affaire Stonechild, qui a été mise sur pied par un gouvernement néo-démocrate.
Je crois que notre premier ministre actuel mérite des félicitations pour les mesures qu'il a prises et pour l'établissement de cette enquête publique. Je veux signaler au député de Nova-Centre que cela n'a pas toujours été le cas, et je vais parler en particulier de son ancien chef, le très honorable Brian Mulroney. Après que M. Mulroney a laissé son poste de premier ministre, il a accepté des enveloppes contenant 300 000 $ en argent comptant, dans des chambres d'hôtel sombres, comme l'a rapporté William Kaplan. M. Mulroney a rit des Canadiens en disant que ce n'était pas des affaires de personne et qu'il avait payé de l'impôt sur cet argent.
Cela montre bien que la Chambre doit reconnaître le mérite qui revient à notre premier ministre pour avoir pris toutes les mesures qu'il a prises, y compris cette enquête. Je crois qu'on devrait permettre à celle-ci de se poursuivre, sans délai, sans compromis et sans d'autres motions de ce genre de la part de l'opposition.
M. Deepak Obhrai (Calgary-Est, PCC): Monsieur le Président, le député d'en face vient de dire que toutes les enquêtes sont assujetties au même libellé. Il a mentionné toutes les autres commissions qui ont été nommées, et il a expliqué pourquoi celles-ci étaient visées par un libellé identique et pourquoi il devait en être ainsi.
La différence ici c'est que le dossier touche le parti au pouvoir. Il s'agit ici de la corruption du parti au pouvoir. Ce sont les libéraux qui sont tenus responsables. À chaque jour, lorsque nous suivons les travaux de la Commission Gomery, qui voyons-nous témoigner? Nous voyons des libéraux qui parlent de corruption. C'est leur parti au pouvoir qui est responsable de cette corruption. Par conséquent, je pose la question suivante au député: Comment pouvons-nous avoir une commission dont les pouvoirs sont semblables à ceux des autres commissions, alors que son mandat est différent?
Dans ce cas-ci, le mandat de la commission est simplement de déterminer ce qui s'est passé. Les Canadiens veulent connaître la vérité et celle-ci doit mettre en cause le Parti libéral. Pourquoi les libéraux ont-ils peur de laisser la Commission Gomery s'exprimer, assumer ses responsabilités et dire qui est responsable de ce fiasco?
L'hon. Shawn Murphy: Monsieur le Président, je vais répéter ce que j'ai dit plus tôt. Les pouvoirs de la commission sont très étendus. Ils sont clairement prévus dans la loi. L'enquête se déroule en vertu de l'article 13 de la Loi sur les enquêtes. Dans sa déclaration préliminaire, le juge Gomery a été très clair en ce qui a trait à ses fonctions, ses responsabilités et ses objectifs.
Encore une fois, il faut faire une distinction entre, d'une part, le rôle et les fonctions d'une enquête publique et, d'autre part, notre système de justice pénale et civile. Il ne faut pas confondre les deux. Un juge chargé d'une enquête publique ne peut imputer la responsabilité d'actions; il ne peut trouver des personnes coupables d'actes criminels qui pourraient leur valoir des peines d'emprisonnement. Un juge chargé d'une enquête publique ne peut non plus attribuer une responsabilité civile mettant en cause des sommes importantes, lorsque les personnes visées par ces accusations ou ces allégations n'en connaissent même pas l'existence. C'est là le point fondamental que je veux faire valoir aujourd'hui.
M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): Monsieur le Président, afin de tirer au clair la question du mandat du juge Gomery, les mots magiques qui, selon les députés de l'opposition, limitent la capacité du juge Gomery à faire son travail, sont « responsabilité civile ou criminelle ». Il n'a pas le droit de formuler des conclusions à l'égard de la responsabilité civile ou criminelle. Ces mots disent tout.
J'aimerais que le député nous donne son avis à ce sujet. On suppose que cet aspect du mandat n'empêcherait pas la Commission Gomery d'arriver à des conclusions sur des faits. Par exemple, le juge Gomery pourrait conclure qu'un particulier ou une entreprise a émis des factures frauduleuses pour certaines activités. C'est là une conclusion fondée sur les faits et non une conclusion à l'égard de la responsabilité civile ou criminelle. Ai-je raison?
L'hon. Shawn Murphy: Monsieur le Président, le député a tout à fait raison. Le mandat est clair. Le juge Gomery peut faire la lumière sur des faits. Il peut déterminer qu'il y a eu inconduite et en imputer la responsabilité.
J'ai un dernier commentaire. Un député de l'opposition comprend clairement cette distinction et c'est le député de Calgary-Centre-Nord. Je vais citer quelque chose qu'il a dit en février de l'année dernière. C'est très important, parce que ça montre qu'il avait compris:
Bien que l'enquête publique sera importante, elle n'est pas une solution au comportement criminel. Le but d'une poursuite au criminel est de poursuivre des criminels. Les deux sont bien différents et la plupart des Canadiens comprennent sûrement que les conséquences d'un comportement criminel devraient être une poursuite au criminel et l'imposition de sanctions pénales. |
Voilà un député qui a clairement compris la distinction. Je suis d'accord avec lui. Je l'appuie. J'aimerais que tous les autres députés...
Le vice-président: La whip du gouvernement invoque le Règlement.
* * *
Les travaux de la Chambre
L'hon. Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Monsieur le Président, des consultations ont eu lieu entre tous les partis en vue d'accélérer la tenue des votes par appel nominal qui doivent avoir lieu le mercredi 1er juin 2005, à la fin de la période prévue pour les initiatives ministérielles. Vous constaterez qu'il y a consentement pour adopter l'ordre suivant:
Que, le mercredi 1er juin 2005, la motion portant la mise aux voix sur la motion d'adoption du deuxième rapport du Comité permanent des comptes publics, proposée par le député de Kitchener-Centre, soit réputée adoptée avec dissidence; |
que la motion portant la mise aux voix sur la motion de troisième lecture du projet de loi C-9, proposée par le député d'Honoré-Mercier, soit réputée adoptée avec dissidence; |
que la motion portant adoption du quatrième rapport du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration, proposée par le député de Calgary—Nose Hill, soit réputée adoptée avec dissidence. |
Le vice-président: Est-ce d'accord?
Des voix: D'accord.
AFFAIRES COURANTES
[Affaires courantes]
* * *
[Traduction]
Les comités de la Chambres
L'hon. Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Monsieur le Président, il y a eu des consultations entre tous les partis et vous constaterez que la Chambre donnerait son consentement unanime à l'égard de la motion suivante:
[Français]
Que, nonobstant l'ordre adopté le mardi 2 novembre 2004, le Comité permanent des finances soit autorisé à déposer son rapport sur l'étude de la question du déséquilibre fiscal au plus tard le vendredi 17 juin 2005, au lieu du jeudi 2 juin 2005. |
[Traduction]
Le vice-président: La Chambre a entendu la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord
(La motion est adoptée.)
Initiatives ministérielles
[Les crédits]
* * *
[Traduction]
Les crédits
Motion de l'opposition--La Commission Gomery
La Chambre reprend l'étude de la motion.
M. Deepak Obhrai (Calgary-Est, PCC): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat sur la motion présentée par le Parti conservateur et concernant le mandat de la Commission Gomery. Cette commission est en train de devenir un élément charnière de l'histoire politique du Canada. Ses répercussions sont beaucoup plus vastes qu'on le pense, tout comme celles de ses constatations et de son rapport. À la télévision, nous avons vu le premier ministre implorer les Canadiens de laisser la Commission Gomery faire son travail avant que des élections soient déclenchées; il y a donc bien des choses qui dépendent de cette commission.
Mais ce qui importe le plus au sujet de cette commission, c'est que les Canadiens sont en colère. Les Canadiens ont été témoins du plus grand scandale politique de l'histoire de notre pays. Où que nous allions, nous constatons que les Canadiens sont furieux. Ils ont fait confiance au gouvernement. Ils lui ont confié leur argent, l'argent des contribuables. Ils s'attendent à ce que nous utilisions notre bon sens et que nous soyons responsables financièrement lorsque nous dépensons leur argent. Ce qui s'est produit, c'est que leur confiance a été complètement anéantie, entièrement trahie.
Mais il a fallu la vérificatrice générale pour souligner cela. Elle a déclaré qu'il y avait quelque chose de grave. Comme nous l'avons vu, la confiance que les Canadiens portaient à leur gouvernement a été brisée, malmenée et trompée. Qu'ont alors fait les libéraux? Ils ont voulu se protéger, aussi ont-ils créé une commission parce que le Parti libéral, le parti au pouvoir, avait trompé la confiance des Canadiens.
Comme le j'ai dit, nous voyons jour après jour des libéraux défiler devant la commission et raconter comment l'argent a été détourné à des fins personnelles ou au profit du parti. Chaque jour nous voyons une image peu avantageuse pour le Canada, qui se targue d'avoir un système transparent. Ce système transparent a été fracassé et ce sont les libéraux, de l'autre côté de la Chambre, et leurs amis qui l'ont brisé.
Ce qui est renversant, comme nous le voyons dans les révélations qui sont faites, c'est que cela a été fait lors des élections de 2000. J'étais là en 2000. Je n'aurais jamais imaginé que le Parti libéral utiliserait l'argent des contribuables pour son propre profit, pour gagner des votes. Les révélations qui sont faites à la commission sont incroyables.
La colère gronde au sein de la population et le Parti libéral le sait. Les libéraux savent que quelque chose de très mal s'est produit. Ils le savent.
C'est extraordinaire. Je parle des élections de 2000. Combien de députés du parti ministériel ont été élus pour la première fois en 2000? Ils prennent la parole et prétendent que c'est quelque chose qui remonte à un passé lointain, qu'ils sont nouveaux et qu'ils n'ont rien à voir avec le passé.
Donc, il y a la commission. Nous avons entendu ce que le premier ministre a à dire lorsqu'il prend la parole. Évidemment, jour après jour, le ministre des Travaux publics, un nouveau puisque l'ancien est parti, se contente de dire qu'il faut attendre le rapport du juge Gomery.
Pourtant, le Premier ministre n'a pas eu d'états d'âme lorsqu'il a congédié l'ancien ministre des Travaux publics, qui était alors notre ambassadeur au Danemark. Il ne lui a pas fallu beaucoup de temps. La question se pose donc: pourquoi l'a-t-il congédié? De toute évidence, les libéraux savaient que quelque chose n'était pas bien. Nous avons aussi vu les libéraux congédier M. Pelletier, un PDG. Pourquoi?
C'est dire que des mesures ont déjà été prises et le Parti libéral sait qu'elles révèlent ce qui était pourri et ce qui est allé de travers. Les Canadiens veulent savoir. Tout d'abord, par l'intermédiaire de la commission, ils veulent savoir comment les choses se sont passées. Ils veulent aussi savoir pourquoi cela s'est passé. Nous savons tous pourquoi. Ce n'est pas un secret trop bien gardé.
Ils veulent savoir comment. Grâce aux audiences de la commission, nous découvrons ce qui s'est passé. Ils veulent aussi savoir qui est responsable et qui acceptera le blâme. C'est l'essence même de la motion dont nous discutons. Comme on l'a déclaré, à l'alinéa k) du mandat, le gouvernement a dit: « en évitant de formuler toute conclusion ou recommandation à l'égard de la responsabilité civile ou criminelle de personnes ou d'organisations ».
Cela dit très clairement que la Commission Gomery ne peut signaler qui est responsable. Cette grande question demeurera. Si la Commission Gomery termine ses travaux sans avoir répondu à cette question, les Canadiens n'auront aucune confiance dans notre système politique. Nous devons redonner confiance aux gens dans notre institution. Nous sommes responsables de l'utilisation des deniers publics. Je le répète, cette confiance a été trahie.
Nous demandons simplement que le juge Gomery puisse nommer des personnes et assigner des responsabilités. Par la suite, la GRC et d'autres organismes d'application de la loi pourront se servir des preuves découlant des travaux de la commission. Il est important que les Canadiens sachent.
Nous savons tous que c'est le Parti libéral qui était impliqué. Cela s'est passé sous son mandat. Ce sont les libéraux qui ont le plus profité de tout cela. Ainsi, il ne s'agit pas de savoir qui est responsable. Nous savons que ce sont eux. Nous voulons savoir qui ne s'est pas acquitté de ses responsabilités. Nous devons être certains qu'en fin de compte, des gens devront rendre compte de leurs actions.
Je vais partager mon temps de parole, monsieur le Président, avec mon collègue d'Okanagan—Coquihalla.
Pour revenir à la principale question, le climat politique a changé. Nous avons maintenant un gouvernement minoritaire et on peut espérer que ce ne sera pas le cas à la suite des prochaines élections. Nous flanquerons nos vis-à-vis à la porte, je l'espère, et nous prendrons le pouvoir. Nous disons aux Canadiens que nous allons ramener les notions de responsabilité et de transparence dans tout le processus politique. Nous entendons notamment donner plus de ressources au Bureau du vérificateur général pour veiller à ce que les Canadiens aient le sentiment que les deniers publics sont dépensés judicieusement par le gouvernement.
Les Canadiens sont des citoyens honnêtes. Ils sont prêts à payer des impôts. Notre système est fondé sur l'honneur. Nous demandons aux Canadiens de nous dire véritablement combien d'argent ils gagnent. Nous leur disons ensuite combien d'argent ils doivent payer pour que nous puissions administrer les affaires du pays de façon responsable. Les Canadiens acceptent cela. Pourtant, lorsque cette confiance est réduite à néant, on doit leur donner les réponses.
Il est tout à fait essentiel que nous sachions que la commission peut désigner les responsables. C'est ce que dit la motion. Je sais que les députés libéraux n'appuieront pas la motion, car ils sont sur la sellette.
L'hon. Walt Lastewka (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, lorsque la Commission Gomery a été créée, le juge Gomery a été très clair dans sa déclaration préliminaire. Il a dit:
J'aurai le droit de tirer des conclusions au sujet des fautes éventuellement commises et de leurs auteurs. |
En fait, il s'est servi d'un exemple:
...la question de savoir si les activités en question ont été influencées par des interventions politiques et, dans l'affirmative, par qui, dans quel but et avec quelles conséquences...la question de savoir si une personne ou une organisation du gouvernement du Canada a obtenu des avantages financiers, politiques ou autres grâce à ces activités et, dans l'affirmative, dans quel but et avec quelles conséquences; |
Sauf erreur, le NPD comprend la teneur de ces propos, tout comme le Bloc Québécois et les députés ministériels. J'ai de la difficulté à saisir pourquoi le député et son parti ne comprennent pas.
Est-ce tout simplement parce que le député n'a pas lu ou n'a pas entendu ce que le juge Gomery a dit très clairement?
M. Deepak Obhrai: Monsieur le Président, justement, il vient de le dire. Par conséquent, pourquoi a-t-il de la difficulté à appuyer la motion? C'est exactement ce que propose la motion. Vous devriez l'appuyer.
Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît. J'invite le député à adresser ses remarques à la présidence.
M. Deepak Obhrai: Monsieur le Président, je pose encore une fois la question au député. Il a dit qu'il n'y avait pas de problème. Dans ce cas, pourquoi éprouve-t-il des difficultés à appuyer la motion? S'il pense que ce que le juge Gomery a dit s'est réalisé, il devrait appuyer cette motion. Pourquoi les libéraux disent-ils maintenant qu'ils ne peuvent appuyer la motion en invoquant toutes sortes d'excuses?
Dans la même veine, le député a dit que de telles constatations peuvent être faites dans le cadre d'une enquête uniquement dans la mesure où celles-ci seraient nécessaires pour exécuter le mandat en fonction des pouvoirs attribués. Or, les pouvoirs conférés ici ne permettent pas de le faire.
M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, PCC): Monsieur le Président, il me semble important de lire le libellé exact de la motion à l'étude, car la plupart des Canadiens à qui je parle ignorent que M. Gomery est assujetti à des restrictions considérables quant aux conclusions qu'il pourra tirer dans le cadre de son enquête. La motion est rédigée en ces termes:
Que la Chambre demande au gouvernement de modifier l'article k) du mandat de la Commission Gomery pour que le commissaire puisse donner des noms et assigner des responsabilités. |
C'est tout à fait étonnant. La plupart des Canadiens n'en reviennent pas que la commission coûte aussi cher, exige autant de temps, d'efforts et d'énergie et entende autant de témoins et que, en fin de compte, la loi et le mandat de la commission empêcheront le juge Gomery de désigner des coupables.
Je mets au défi les députés libéraux qui le voudront de me suivre après mon discours; je leur offrirai un café et nous irons ensemble rencontrer les gens dans la rue. Nous leur demanderons s'ils savent que M. Gomery n'est pas autorisé à donner des noms ni à désigner des responsables à l'issue de son enquête. Je vous assure que neuf personnes sur dix croiront que nous plaisantons et nous demanderont pourquoi nous agissons de la sorte.
Des députés libéraux attribuent telle ou telle déclaration à M. Gomery. Le juge Gomery est bien intentionné et assume une lourde tâche. Je ne le nie certainement pas. L'alinéa k) du mandat de la Commission Gomery précise:
[...] que le commissaire reçoive instruction d'exercer ses fonctions en évitant de formuler toute conclusion ou recommandation à l'égard de la responsabilité civile ou criminelle de personnes ou d'organisations [...] |
C'est stupéfiant. Je mets encore une fois au défi les députés libéraux de venir avec moi. Je suis convaincu que neuf Canadiens sur dix ignorent qu'à la fin des travaux de la Commission d'enquête, qui coûte des millions de dollars, le juge Gomery ne pourra pas désigner les coupables ni même laisser entendre qui sont les responsables.
Des citoyens bien intentionnés nous demanderont sûrement à quoi tout cela rime. Les conservateurs posent eux aussi la question. Le gouvernement libéral a déjà usé de tactiques semblables à l'égard d'autres commissions. La Commission Krever, chargée d'enquêter sur le sang contaminé, la Commission d'enquête sur la Somalie et la Commission d'enquête sur le sommet de l'APEC ont toutes connu le même sort. Il s'agit d'une méthode délibérée pour avoir les Canadiens à l'usure, pour qu'ils en aient marre d'entendre parler de scandale et se réjouissent qu'on ferme le dossier.
Il s'est passé trop de choses pour que les responsables échappent à leur responsabilité. Ce n'est pas nous mais la vérificatrice générale qui a dit qu'il s'agit du plus important scandale financier de l'histoire de ce pays.
Une voix: Certainement pas.
M. Stockwell Day: Quelqu'un vient de dire « certainement pas ». Les députés d'en face peuvent douter de la vérificatrice générale s'ils le souhaitent, mais c'est ce qu'elle a dit. Cela montre à quel point les libéraux minimisent cette tragédie dans leurs esprits quand ils disent que ce n'est certainement pas le plus grand scandale. Je me rappelle de l'ancien premier ministre qui a dit qu'il ne s'agissait que de quelques millions de dollars et qu'il fallait s'attendre à ce que les gens volent quelques millions de dollars. Le fait de perdre quelques millions de dollars est déjà inacceptable, et nous en sommes maintenant dans les dizaines de millions et peut-être les centaines de millions.
À en entendre le genre de questions que posent les députés libéraux, c'est une occasion parfaite pour eux de montrer qu'ils sont sincères. S'ils prétendent que ce n'est pas si important, ils n'ont qu'à appuyer la motion. S'ils disent souhaiter que certaines personnes soient tenues responsables, nous voulons qu'elles soient nommées. S'ils prétendent que c'est ce qu'ils veulent, ils devraient appuyer la motion.
Un député a dit que la motion était frivole. J'invite les députés libéraux à m'accompagner dans la rue maintenant pour demander l'avis des gens qui paient la note. Il faudrait leur demander s'ils estiment qu'il est frivole de la part de l'opposition de demander que le juge Gomery puisse identifier des coupables et les tenir responsables. Je défie n'importe qui d'en face de me suivre quand nous aurons fini. Ils secouent la tête et disent non, ils ne veulent pas me suivre. Ils ne veulent pas faire face à la population. C'est tout ce que la motion veut. Elle n'est pas frivole et devrait être prise au sérieux. C'est très simple.
Si les députés libéraux sont sincères, s'ils veulent prouver aux Canadiens que la commission n'est pas qu'une vaste diversion, ils n'ont qu'à se joindre à nous et voter pour permettre au juge Gomery d'identifier les coupables. Il faut le dire.
En tant qu'ancien ministre des Finances d'une province, j'ai siégé avec mes homologues à la table des ministres des Finances à l'époque où le premier ministre actuel était lui-même ministre des Finances. Il était au courant de tous les fonds provinciaux dont nous parlions lorsque nous demandions de l'argent pour les soins de santé, l'enseignement postsecondaire et certaines questions environnementales liées à Kyoto. Lorsqu'il disait non à toutes ces demandes, il pouvait expliquer en long et en large pourquoi cet argent ne pouvait pas être versé. Il savait où était tout l'argent et, s'il ne le savait pas d'emblée, il n'avait qu'à le demander aux fonctionnaires qui l'accompagnaient. Eux savaient où se trouvait chaque dollar. Ils ont dit qu'ils avaient cherché partout et qu'ils ne pouvaient pas trouver d'argent pour les soins de santé.
Les députés se souviendront que c'est comme cela qu'il a réduit le déficit. Du jour au lendemain, sans avertissement, il a réduit de 34 p. 100 le transfert aux provinces au titre des soins de santé. Il savait où était chaque dollar et pourquoi il ne pouvait pas donner d'argent aux provinces. Il savait tout et voici qu'il prétend que, pendant dix ans, alors qu'il était ministre des Finances, il n'avait aucune idée comment des centaines de millions de dollars étaient dépensés inutilement. Sheila Fraser s'en est aperçue et a découvert le plus gros scandale financier de l'histoire de notre pays.
L'ancien ministre des Finances qui est maintenant premier ministre dit qu'il ne savait rien. Il faut trouver les responsables et si, à la suite de ce processus, personne n'est forcé d'assumer sa part de responsabilité dans cette affaire, les députés du parti ministériel ne craindront jamais plus l'électorat. Les gens qui n'hésitent pas à voler l'argent des contribuables pour le donner à qui ils veulent ne craindront jamais plus une commission. Ils ne craindront jamais plus la loi. Ils ne craindront jamais plus la GRC. Si personne n'est puni, ceux qui veulent voler l'argent des contribuables encore n'auront aucune crainte.
Nous demandons au députés libéraux de montrer leur sincérité, de voter avec nous et d'appuyer la motion. C'est tout ce que nous demandons.
Le vice-président: Comme il est 17 h 15, je dois interrompre les délibérations et mettre aux voix sur-le-champ toutes les motions relatives aux crédits.
Le vote porte sur la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le vice-président: Que tous ceux qui s’y opposent veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le vice-président: À mon avis, les non l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
Le vice-président: Convoquez les députés.
Après l'appel de la sonnerie:
Le vice-président: La whip en chef du gouvernement a demandé que le vote soit reporté après la période réservée aux initiatives ministérielles demain.
D'accord?
Des voix: D'accord.
L'hon. Dominic LeBlanc: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Il y a eu consultation entre les partis et vous constaterez, je crois, qu'il y a consentement unanime pour dire qu'il est 17 h 30.
Le vice-président: D'accord?
Des voix: D'accord.
INITIATIVES PARLEMENTAIRES
[Initiatives parlementaires]
* * *
[Français]
La Loi de l'impôt sur le revenu
Mme Caroline St-Hilaire (Longueuil—Pierre-Boucher, BQ) propose que le projet de loi C-306, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu (frais de transport en commun), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
— Monsieur le Président, je suis très heureuse de prendre la parole aujourd'hui sur le projet de loi C-306, intitulé Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu (frais de transport en commun). Ce projet de loi vise à modifier la Loi de l'impôt sur le revenu afin de permettre à un particulier de déduire de ses impôts payables certains frais relatifs à l'utilisation du transport en commun.
Par « transport en commun », on entend notamment un transport public par autobus, par métro ou par train de banlieue, ou encore un service de transport léger sur rail. Bien évidemment, la définition prévue dans le projet de loi n'est pas limitative et pourra éventuellement s'étendre à d'autres types de transport collectif.
En 2005, il est de l'avis de tous que la promotion du transport en commun se doit d'être une priorité. Le projet de loi C-306 vise essentiellement à offrir aux contribuables québécois et canadiens une déduction fiscale pour l'achat de laissez-passer afin de les inciter à utiliser davantage les différents modes de transport collectif. C'est là l'objectif fondamental de ce projet de loi: inciter la population à utiliser un mode de transport qui soit beaucoup plus économique et écologique et qui contribue également à réduire la pression exercée sur le réseau routier par la circulation automobile.
Je ne crois pas utile de faire un long plaidoyer pour démontrer les bienfaits et la nécessité de faire du transport en commun une priorité. Nous sommes tous d'accord sur ce point; d'ailleurs, nous sensibilisons la population à cet égard depuis plusieurs années. Des organismes de tous horizons font des études pour en démontrer les mérites et essaient de trouver des solutions afin d'accroître l'utilisation du transport collectif.
Toutefois, malgré toutes les vertus attribuées au transport en commun, il demeure souvent l'enfant pauvre des mesures gouvernementales. Bien évidemment, ce n'est pas seulement un incitatif fiscal qui peut arranger les choses et permettre d'atteindre cet objectif. Certains me diront que c'est une chose que de favoriser l'accroissement de l'utilisation du transport en commun, mais cela ne règle pas les besoins en matière d'infrastructure. Je suis entièrement d'accord. D'ailleurs, ici, une précision importante s'impose, soit celle du respect des compétences du Québec et des provinces.
En effet, l'intervention du gouvernement fédéral doit se faire dans le respect de ses propres champs de compétence. Rappelons que le financement du transport en commun est de compétence exclusive du Québec et des provinces. Toutefois, il est évident que les besoins sont importants et que le Québec a une capacité financière limitée, et on sait pourquoi. De fait, il existe depuis de nombreuses années un sérieux problème de déséquilibre fiscal qui mine la capacité du gouvernement du Québec de répondre aux demandes des municipalités, notamment pour financer les infrastructures de transport collectif.
Le gouvernement fédéral occupe une trop grande part du champ de compétence fiscal par rapport à ses responsabilités. Il y a longtemps qu'on le dit, mais on ne le dira jamais assez: l'argent est à Ottawa, tandis que les besoins, eux, sont à Québec. Le Bloc québécois a dénoncé cette situation sur toutes les tribunes et continuera à le faire tant et aussi longtemps que le fédéral n'aura pas répondu aux demandes pressantes d'augmenter les transferts au Québec, et ce, sans condition, on s'entend bien.
Le Québec doit être maître de ses choix et de ses priorités et, surtout, avoir la latitude financière pour y répondre adéquatement. Le gouvernement fédéral, plutôt que de s'ingérer dans les champs de compétence du Québec comme il a une grande propension à le faire, devrait utiliser les outils dont il dispose, notamment en modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu pour accorder l'incitatif fiscal proposé par le projet de loi C-306.
Ce qu'il faut garder à l'esprit, c'est évidemment la rentabilité économique et environnementale de cette mesure, tant à moyen qu'à long terme, qui sera beaucoup plus avantageuse que les coûts engendrés par l'octroi d'une telle déduction fiscale. Il faut éviter d'avoir des stratégies à courte vue et plutôt investir dès maintenant de façon responsable et durable.
Concernant le développement durable, j'aimerais faire le point sur deux aspects à prendre en considération pour s'assurer du bien-fondé d'une telle mesure. On se demande sûrement pourquoi on doit favoriser une mesure incitative par le biais d'une déduction fiscale.
Eh bien je vous répondrai qu'un des aspects les plus importants du transport collectif est celui relatif aux questions environnementales.
Le transport collectif favorise indéniablement un meilleur environnement, notamment par la diminution des émissions de gaz à effet de serre, la réduction de la consommation d'énergie et l'augmentation de la qualité de vie et de l'environnement urbain.
Nous sommes à l'ère de Kyoto et nous avons la responsabilité collective de trouver des mesures qui peuvent réduire les émissions de gaz à effet de serre. Le transport en commun s'avère un moyen efficace, plus sécuritaire que le transport automobile et permet une meilleure mobilité. Il ne faut pas oublier que la congestion routière dans les villes a des implications non seulement en termes de productivité, mais également en termes de pollution atmosphérique.
Selon les dernières données révélées par Statistique Canada, entre 2000 et 2003, le nombre de voitures a augmenté de 5,5 p. 100 ce qui représente près de 18 millions d'automobiles qui roulent sur les routes du Québec et du Canada. Vous réalisez cela; c'est énorme! Si rien n'est fait pour encourager les modes de transport alternatif, il y aura nécessairement des conséquences néfastes, et ce, à très court terme, notamment sur l'augmentation de la pollution atmosphérique, la capacité de se déplacer en milieu urbain et la possibilité d'atteindre les objectifs fixés par le Protocole de Kyoto. Telle est l'urgence d'intervenir et de favoriser des choix responsables en matière de transports.
Un des choix responsables est de favoriser le transport en commun et c'est précisément ce que fait le projet de loi C-306, qui se veut être un incitatif susceptible d'influencer directement les utilisateurs.
Permettez-moi de vous donner quelques chiffres qui parlent d'eux-mêmes. Un trajet de 60 km en transport en commun peut coûter jusqu'à 10 fois moins cher qu'en auto. Par exemple, pour se rendre au centre-ville de Montréal en métro à partir de Longueuil, cela prend environ 10 minutes, alors qu'il faut parfois compter plus d'une heure en automobile, et ce, beau temps, mauvais temps, congestion ou pas.
L'autobus produit jusqu'à neuf fois moins de gaz à effet de serre que l'auto. Le métro est encore moins polluant puisqu'il fonctionne à l'électricité. Un autobus complet représente entre 40 et 50 voitures de moins aux heures de pointe. Cela veut dire plus de 175 tonnes d'émissions de gaz à effet de serre de moins par année. Ces chiffres confirment donc, hors de tout doute, que sur le plan environnemental, le transport collectif s'avère primordial et une façon concrète de contribuer à un environnement sain.
Un autre aspect qui m'apparaît fondamental lors de l'étude d'une mesure législative comme celle dont nous débattons aujourd'hui, c'est l'impact qu'elle aura sur le plan économique. Sous cet aspect, il est indéniable que le transport en commun joue également un rôle majeur et diminue, entre autres, les coûts de la congestion routière pour les entreprises et les automobilistes. La croissance économique du Québec et des grands centres urbains dépend nécessairement d'un système de transport qui soit efficace et qui offre rapidité et mobilité.
Il est clair que tout le monde y gagne, soit les entreprises seront plus concurrentielles, particulièrement dans le contexte de la garantie de « livraison à temps », soit les utilisateurs feront des économies substantielles. Cela représente des bénéfices économiques directs pour l'ensemble de la communauté.
Je vous réfère à une importante étude publiée par la chambre de commerce du Montréal métropolitain intitulée « Le transport en commun: un puissant moteur du développement économique de la région métropolitaine de Montréal ». On nous apprend dans cette étude qu'en 2003, le transport en commun a permis aux ménages montréalais d'économiser près de 600 millions de dollars en frais de déplacement. Cette économie se traduit par un pouvoir d'achat accru des ménages, ce qui génère d'importantes retombées économiques pour la grande région montréalaise.
La même étude prévoit également que les coûts de congestion sont évalués à près de un milliard de dollars par année pour la région de Montréal et que le transport en commun contribue directement à réduire les pertes causées par la congestion. De plus, une augmentation de 2 p. 100 de la part modale du transport en commun signifie une diminution de 19 millions de déplacements en voiture sur le territoire montréalais. Les bénéfices générés s'élèvent à plus de 150 millions de dollars par année. Telle est l'importance de favoriser l'utilisation accrue du transport en commun. Ce ne sont là que quelques exemples, mais combien révélateurs.
En conclusion, j'aimerais souligner que cette mesure proactive a reçu un appui favorable et unanime auprès des différents organismes étant de près ou de loin concernés par le transport en commun. Ces organismes et régies urbaines, responsables de la gestion du transport en commun, recherchent nombre d'initiatives qui encourageraient directement les utilisateurs à emprunter leurs services collectifs.
Depuis une dizaine d'années, certains d'entre eux, notamment la Société de transport de Montréal, demandent aux paliers supérieurs de gouvernements des mesures fiscales afin d'encourager les utilisateurs à laisser leur automobile dans leur stationnement privé.
Des organismes attendent depuis plusieurs années déjà que les gouvernements passent à l'action. D'ailleurs, une vaste coalition s'est créée au fil des ans afin de revendiquer des mesures qui soient rentables à court terme, mais durables à long terme.
Cette mesure fait l'unanimité. Il ne manque que la volonté politique du gouvernement fédéral d'aller de l'avant et de favoriser l'utilisation accrue d'un service public essentiel qui serait bénéfique non seulement pour les utilisateurs, mais pour l'ensemble de la société.
Je profite de ce débat pour inviter le ministre fédéral des Transports à être conséquent, pour une fois, avec les propos qu'il a tenus le 12 décembre dernier dans The Gazette, en affirmant que son gouvernement devrait aller de l'avant en permettant une déduction fiscale pour les laissez-passer de transport en commun. Comme on l'a vu lors du dernier budget, le pouvoir de persuasion du ministre des Transports ne semble pas trouver écho auprès de son collègue des Finances. Je l'invite tout de même à être un peu plus persistant et à mener cette importante bataille au sein de son gouvernement. Voilà une opportunité que le ministre des transports devrait saisir pour faire de la belle politique et servir les intérêts de tous.
En terminant, je veux inviter tous mes collègues de cette Chambre à appuyer le projet de loi C-306. Il en va de la qualité de vie de la population, de la protection de l'environnement et du maintien de la vitalité économique de toute la population. Les répercussions sur l'avenir sont modulées par nos décisions d'aujourd'hui.
M. Bernard Bigras (Rosemont—La Petite-Patrie, BQ): Monsieur le Président, c'est avec une grande joie que je participe à cette période de questions et commentaires dans le cadre du débat du projet de loi C-306 présenté par ma collègue de Longueuil—Pierre-Boucher.
Voilà l'exemple d'un projet de loi qui répond à deux objectifs fondamentaux. D'abord, il permettra de réduire la pression sur notre système routier. Ensuite, c'est un type de politique que le Canada aurait dû adopter il y a plusieurs années déjà. Pourquoi? Parce que si l'on veut atteindre nos objectifs de réduction d'émissions de gaz à effet de serre — engagement pris par le gouvernement fédéral dans le cadre du Protocole de Kyoto —, il faut faire en sorte que la politique fiscale puisse jouer pleinement son rôle au Canada.
Pour atteindre cet objectif de réduction, il faut bien sûr que la réglementation suive son cours. Il faut aussi passer d'une approche volontaire à une approche plus contraignante pour les secteurs industriels et pour l'ensemble des secteurs de l'activité économique canadienne. Toutefois, il faut aussi faire en sorte que la politique fiscale et les instruments fiscaux à la disposition du gouvernement fédéral puissent agir.
Bien souvent, le gouvernement fédéral refuse d'adopter ici, au Canada, une politique fiscale environnementale. Qu'est-ce qu'une politique fiscale environnementale? C'est de faire en sorte de donner des incitatifs fiscaux, des déductions fiscales et des crédits d'impôts pour les citoyens et citoyennes qui décident d'adopter de meilleures pratiques environnementales.
Le gouvernement fédéral aurait très bien pu répondre, dans son budget — comme ma collègue l'a dit— , à ce type d'initiative, en allouant des déductions ou des crédits d'impôts pour l'achat de véhicules hybrides. C'est là l'objet du projet de loi C-306: il vise à donner des crédit d'impôts pour les utilisateurs de transport en commun. Malgré tout, le gouvernement s'entête à présenter des plans visant à atteindre les objectifs de réduction de gaz à effet de serre. Pourtant, les résultats sont inverses.
Il faut donc que le gouvernement se range du côté de l'opposition, en adoptant des mesures visant une politique fiscale environnementale.
En conclusion — car vous allez m'arrêter — , je pose une question à ma collègue: par ce type de politique, le Canada peut-il atteindre ses objectifs de réduction de gaz à effet de serre?
Mme Caroline St-Hilaire: Monsieur le Président, je remercie mon collègue de sa question et des compléments d'information qu'il a ajoutés.
Effectivement, je suis d'avis que non seulement ce genre de projet de loi peut donner un coup de pouce aux utilisateurs, comme je l'ai dit dans mon discours, mais cela peut aussi envoyer un message positif. Bien sûr, c'est le gouvernement fédéral qui est responsable de l'environnement. Il ne lui suffit que de se décider à envoyer des messages positifs à la population et à lui indiquer l'importance du transport en commun ainsi que ses impacts tant économiques qu'environnementaux. À mon avis, le projet de loi C-306 est une bonne façon d'envoyer des messages positifs à la population.
[Traduction]
M. Massimo Pacetti (Saint-Léonard—Saint-Michel, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir aujourd'hui au sujet du projet de loi d'initiative parlementaire C-306. Cette mesure législative propose d'accorder une aide fiscale aux Canadiens qui utilisent le transport en commun. Cette mesure vise à favoriser l'utilisation du transport en commun pour améliorer l'environnement. Nous convenons tous que c'est là un objectif louable. Toutefois, il faut se demander si l'aide fiscale pour des laissez-passer de transport en commun est la meilleure façon de promouvoir l'utilisation du transport en commun. D'après de nombreuses études, ce n'est pas la meilleure formule. Il y a des formules beaucoup plus efficaces.
Le gouvernement libéral a mis en place des programmes d'infrastructure qui comportent des investissements directs dans le transport en commun. En vertu du nouveau pacte pour les villes et les collectivités, le gouvernement met un financement considérable à la disposition des municipalités qui peuvent ainsi s'occuper de questions prioritaires comme le transport en commun.
Depuis le milieu des années 1990, le gouvernement a investi plus de 12 milliards de dollars dans les programmes d'infrastructure. De ce total, 4 milliards de dollars sont allés au Fonds canadien sur l'infrastructure stratégique, 2 milliards de dollars à Travaux d'infrastructure Canada et 1 milliard de dollars au Fonds sur l'infrastructure municipale rurale. Le gouvernement se sert de ces programmes d'infrastructure pour financer des projets un peu partout au Canada, y compris le transport en commun dans les grands centres urbains. Permettez-moi de profiter de cette occasion pour présenter certains projets.
Le gouvernement s'est engagé à investir 450 millions de dollars pour le projet de transport rapide RAV, qui reliera Richmond, l'aéroport et le centre-ville de Vancouver. Ce lien ferroviaire doit être opérationnel et en service à temps pour les Jeux olympiques et paralympiques d'hiver de 2010 qui se tiendront en Colombie-Britannique.
Un financement fédéral considérable est également versé à des projets de transport en commun à Toronto. Le gouvernement accorde quelque 385 millions de dollars à la société GO Transit pour élargir et améliorer ses services de banlieue. De plus, le gouvernement s'est engagé à investir 350 millions de dollars supplémentaires pour la modernisation et le renouvellement des immobilisations de la Toronto Transit Commission.
[Français]
Nous octroyons aussi 103 millions de dollars pour la rénovation du métro de Montréal.
Le Nouveau pacte pour les villes et les collectivités est prioritaire pour notre gouvernement.
En fait, nous avons adopté, en 2004, les premières mesures de ce nouveau pacte, y compris l'octroi d'un remboursement intégral de la taxe sur les produits et services aux municipalités. Ce remboursement fournira aux municipalités des nouvelles ressources d'environ 7 milliards de dollars sur 10 ans, qu'elles pourront affecter à de grandes priorités d'infrastructure, comme le transport en commun.
Nous avons décidé d'aller encore plus loin. Dans le budget de 2005, nous avons approfondi notre engagement consistant à fournir aux villes et aux collectivités un financement fiable à long terme pour les aider à satisfaire leurs besoins. En particulier, nous avons confirmé que nous allons leur fournir 5 milliards de dollars sur cinq ans à l'appui d'une infrastructure écologiquement viable, y compris le transport en commun. Le ministre d'État responsable de l'Infrastructure et des Collectivités a déjà entamé les négociations avec les provinces et les territoires afin de conclure une entente au sujet de ce financement.
Ces investissements, ainsi que d'autres, entraîneront une amélioration notable des services de transport en commun partout au Canada. L'amélioration des services incitera des personnes qui se déplacent actuellement en voiture à adopter plutôt le transport en commun.
[Traduction]
Un des principaux défis environnementaux auxquels le monde est confronté à l'heure actuelle est celui des changements climatiques. Le gouvernement reconnaît l'importance de relever ces défis.
En avril 2005, mes collègues, les ministres de l'Environnement, des Ressources naturelles et de l'Industrie ont rendu public le document intitulé Aller de l'avant pour contrer les changements climatiques : un Plan pour honorer notre engagement de Kyoto, qui sera utilisé pour guider l'approche du gouvernement fédéral à l'égard de la mise en oeuvre de mesures pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Je suis heureux de signaler que les éléments clés de ce plan ont été financés dans le budget de 2005.
[Français]
Ces initiatives incluent le Fonds éco-net, un fonds novateur de un milliard de dollars pour encourager les projets les plus économiques de réduction des émissions de gaz à effet de serre par les Canadiens, l'industrie et — dans les cas où l'intérêt national est en jeu et où des entreprises canadiennes contribuent à la réduction des émissions de gaz à effet de serre — des projets à l'étranger.
[Traduction]
Il y a un Fonds du partenariat de 250 millions de dollars pour offrir un appui ciblé à de grands projets stratégiques qui sont considérés comme des priorités par le gouvernement du Canada, les provinces et les territoires.
On va accroître le programme Encouragement à la production d'énergie éolienne et on va instaurer un nouveau programme Encouragement à la production d'énergie renouvelable à partir de sources propres et renouvelables.
[Français]
Elles incluent également l'expansion du programme ÉnerGuide pour les maisons et la modernisation des logements, qui soutiendra l'amélioration de l'efficacité énergétique pour un total de 500 000 logements d'ici 2010.
Il y a des incitatifs fiscaux bonifiés d'environ 295 millions de dollars sous forme d'une déduction pour amortissement accéléré, visant à favoriser l'investissement dans la production d'énergies efficientes et renouvelables.
De plus, un plan de mise au point d'une stratégie scientifique et technologique relative à l'énergie durable, de concert avec les provinces et les territoires, est prévu d'ici la fin de 2006.
[Traduction]
Il y a également un accroissement de 300 millions de dollars des crédits consacrés au Fonds municipal vert qui investit dans des projets municipaux écologiques et novateurs dans des domaines comme les économies d'énergie et d'eau, le transport urbain et le réacheminement des déchets, pour renforcer la viabilité des collectivités. La moitié de cette somme sera consacrée à la décontamination des friches industrielles, qui sont des propriétés abandonnées qu'on sait être ou qu'on soupçonne d'être contaminées et dont la remise en valeur offre des possibilités économiques.
Au total, le budget de 2005 a prévu plus de quatre milliards de dollars au cours des cinq prochaines années pour des initiatives clés comprises dans le Plan du Canada sur les changements climatiques, qui portent les dépenses fédérales pour soutenir les mesures destinées à lutter contre les changements climatiques à plus de six milliards de dollars au total depuis 1997.
Les programmes existants qui touchent les changements climatiques comprennent des mesures pour soutenir la science, la recherche sur les impacts et l'adaptation, les travaux internationaux, l'élaboration de politique, la sensibilisation de la population grâce à des projets comme le Défi d'une tonne, ainsi que le développement et la mise à l'essai de techniques grâce au financement de Technologies du développement durable Canada notamment.
Nous comprenons que d'autres mesures seront nécessaires à l'avenir. Le gouvernement s'est engagé à prendre d'autres mesures si ses ressources le lui permettent. Nous continuerons d'apprendre de nos investissements et de notre expérience internationale.
Le gouvernement croit que le plan et les mesures reliés aux changements climatiques prévus dans le budget de 2005, qui viennent s'ajouter aux initiatives déjà en cours relativement aux changements climatiques, permettront au Canada de se lancer dans la voie d'un avenir fondé sur l'énergie propre et d'accroître l'efficience, la viabilité et la compétitivité internationale de l'économie canadienne, tout en permettant d'avancer dans la réalisation de nos objectifs de réduction de nos émissions aux termes du Protocole de Kyoto.
[Français]
Un grand nombre d'initiatives concernant les changements climatiques seront aussi importantes en ce sens qu'elles entraîneront des activités et qu'elles modifieront les comportements de manière à amener d'autres bienfaits environnementaux comme la réalisation des objectifs canadiens de réduction de la pollution de l'air, étant donné que les émissions de polluants atmosphériques et de gaz à effet de serre proviennent souvent des mêmes sources.
Outre le fait de s'attaquer au problème des changements climatiques, notre gouvernement appuie entièrement la conservation et l'amélioration de notre environnement. L'engagement gouvernemental en la matière a été illustré par les initiatives environnementales annoncées dans les récents budgets, qui s'ajoutent à celles qui visent plus particulièrement les changements climatiques et qui ont totalisé plus de 7 milliards de dollars depuis 1997.
Ces investissements englobent des mesures visant à nettoyer les sites contaminés, à concevoir, mettre en oeuvre et faire observer les lois cadres comme la Loi canadienne sur la protection de l'environnement et la Loi sur les espèces en péril, à améliorer la qualité de l'air et de l'eau et à investir dans le développement de technologies environnementales.
[Traduction]
Les mesures que nous mettons en oeuvre montrent que le gouvernement prend notre environnement très au sérieux. Nous investissons beaucoup dans des programmes d'infrastructure. Nous mettons en place un nouveau pacte pour les villes et les collectivités. Nous avons débloqué des ressources importantes pour nous attaquer aux changements climatiques et nous avons élaboré un Plan du Canada sur les changements climatiques. Manifestement, nous faisons notre part et nous le faisons grâce à des moyens beaucoup plus efficaces que simplement une aide fiscale pour le transport public.
M. Bob Mills (Red Deer, PCC): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat sur ce projet de loi d'initiative parlementaire, le projet de loi C-306. Après avoir écouté le dernier intervenant, je ne peux m'empêcher de revenir brièvement sur tout ce dont le gouvernement libéral se vante. Voyons rapidement les faits.
Par rapport au Protocole de Kyoto, nous avons dépassé de 30 p. 100 les niveaux de 1990. Nous nous étions engagés à réduire nos émissions de 6 p. 100 par rapport à ces niveaux. De toute évidence, nous avons lamentablement échoué à ce chapitre.
Toutes sortes de programmes ont été annoncés. Pourtant, selon l'OCDE, sur 29 pays industrialisés, le Canada se classait au 24e rang en 2003. Selon le dernier rapport de l'OCDE pour 2004, sur 29 pays industrialisés, le Canada se classe maintenant au 28e rang pour ce qui est de l'intégrité environnementale. Le dernier intervenant ne devrait probablement pas se vanter du bilan des libéraux.
Trois villes canadiennes déversent encore des eaux d'égout brutes dans l'océan. Au Canada, il reste encore plus de 10 000 sites fédéraux contaminés, sans compter les 50 000 autres sites qui le sont aussi, et rien n'est fait au sujet des friches industrielles. Il y a également les étangs bitumineux de Sydney.
Je suis ici depuis 1993. Chaque année, j'ai entendu le gouvernement dire qu'il va décontaminer ces sites. Vous savez quoi? Il y a deux ou trois semaines, nous avons entendu dire qu'il y aurait une autre étude de deux ans sur les étangs bitumineux de Sydney et que le gouvernement se chargerait de les dépolluer. Le gouvernement libéral fait toujours miroiter l'assainissement des étangs bitumineux de Sydney. J'imagine que si je réussis à survivre ici encore 10 ou 15 ans, j'entendrai probablement le gouvernement dire qu'il va dépolluer les étangs bitumineux de Sydney.
Certaines municipalités doivent faire bouillir leur eau. Nous avons toutes sortes de problèmes environnementaux, comme les jours de smog à Toronto, etc.
Avant de parler du projet de loi, je me devais de rectifier ce qu'a dit le dernier intervenant.
L'objectif du projet de loi est d'accorder un crédit d'impôt pour le transport en commun. Cela constitue sans doute une bonne mesure, puisque cela profiterait directement aux utilisateurs. Espérons que cela aura un effet sur les comportements individuels afin que les transports en commun deviennent une solution de choix. C'est ce genre de choses que nous devons faire.
Par exemple, j'ai un fils et une fille qui habitent et travaillent à Vancouver. Ils ont beaucoup de difficulté en raison de l'augmentation des coûts. Ils se servent tous deux de leur voiture pour déposer les enfants chez la gardienne et pour se rendre au travail. Dans les grandes villes, l'essence peut coûter jusqu'à 600 $ ou 700 $ par mois. Ils se servent tout de même de leur voiture.
Cependant, je pense que s'il y avait des mesures incitatives, comme des réseaux de transport express, des cartes d'autobus mensuelles, un système de métro et ainsi de suite, mes enfants envisageraient probablement de changer leur mode de vie, même si la solution de rechange n'est pas idéale. La perspective d'un crédit d'impôt pourrait avoir un effet sur eux.
Nous tentons de convaincre les gens qu'il y a des avantages environnementaux à l'utilisation des transports en commun. Dans le secteur canadien du transport, 27 p. 100 des émissions de gaz à effet de serre proviennent du transport privé, alors que 0,3 p. 100 proviennent des différents types de transports en commun. Les réductions d'émissions, que ce soit de dioxyde de soufre, d'oxyde de diazote ou de particules, seraient énormes. Toutes les causes du smog pourraient être grandement atténuées si nous améliorions et si nous utilisions notre système de transport urbain.
Nous devons également trouver un moyen de faire quelque chose pour les habitants des régions rurales, qui ressentent également les effets de l'augmentation du prix de l'essence et des problèmes de transport. Je dois admettre que je n'ai pas de réponse précise à offrir, mais j'ai quelques idées. Nous pourrions mettre l'accent sur l'assainissement de l'air qu'entraînerait la mise en place de divers types de réseaux de transport rapide.
Comme je suis le porte-parole de mon parti pour cette question, je fais l'objet d'un intense lobbyisme -- comme nombre d'autres députés sans doute -- de la part des représentants de l'industrie de la pile à combustible, des bus à hydrogène, au gaz propane et au gaz naturel. Presque tous me disent que nous n'avons pas ce genre de véhicule au Canada. Il y a en à Los Angeles et à Beijing. Mille véhicules semblables ont été commandés pour les Jeux olympiques de Beijing, mais il n'y en a aucun dans les grandes villes du Canada. Il y a quelque chose qui ne va pas dans notre système de promotion du transport rapide.
Il est intéressant que Calgary, par exemple, se serve de l'énergie éolienne pour son train léger et qu'elle en fasse la promotion en invitant les gens à se laisser emporter par le vent. La ville de Calgary est un des principaux acheteurs d'énergie éolienne, qui sert à propulser le système de train léger de Calgary. Ce système de transport est d'ailleurs devenu une importante attraction touristique. Il est étonnant d'entendre tellement de visiteurs étrangers dire que Calgary est une des premières villes à utiliser une énergie renouvelable pour ses transports en commun. La population de Calgary en est très fière et n'hésite pas à s'en vanter. Son système fait l'envie de beaucoup d'autre villes.
Quels sont les effets socio-économiques du transport rapide? Il réduit la congestion, comme la députée du Bloc québécois l'a souligné. La congestion est un grave problème dans nos grandes villes. À défaut de nouvelles routes, le réseau routier existant ne pourra pas absorber l'augmentation du trafic qui est prévue. Il y a donc des économies à réaliser à cet égard.
J'ai parlé d'air pur et de la suppression de la pollution liée à cela. Il y a une plus grande mobilité sociale et moins de problèmes de santé. La santé est l'une des raisons pour lesquelles des pays comme la Chine et l'Inde examinent certains des problèmes environnementaux et le transport rapide.
Ce qu'il ne faut jamais oublier, quand on parle de Kyoto, de l'air et de ce que nous pourrions faire, c'est que nous avons un climat froid. Nous avons de grandes distances à franchir, une faible population et relativement peu d'infrastructures pour nous aider à résoudre certains de ces problèmes.
Un projet de loi semblable a déjà été présenté à la Chambre. Il a été adopté par 240 voix contre 25. Cependant, comme c'est souvent le cas des projets d'initiative parlementaire que la Chambre adopte, il est resté lettre morte. Nous entendons parler d'autres programmes et que des mesures seront prises. On fait de multiples annonces, mais Ies tergiversations qui entourent ces projets de loi sont vraiment remarquables. J'espère que ce projet de loi sera adopté, que des mesures seront prises et que les gens recevront de l'aide concrète dans ce domaine.
Nous pouvons nous adresser aux sociétés pour leur demander d'instaurer des programmes qui inciteront leurs employés à utiliser d'autres moyens de transport pour se rendre au travail. À l'heure actuelle les sociétés fournissent aux employés des espaces de stationnement gratuits ou couvrent une partie de leurs coûts. Cela est prévu dans le contrat de travail de nombreux employés. Peut-être pourrions-nous utiliser le transport en commun comme mesure d'encouragement. L'industrie pourrait adhérer à cela, surtout si nous donnons des crédits fiscaux pour ce genre de promotion. Il y a tant de choses que nous pouvons faire dans ce domaine.
La seule critique que je formulerai au sujet du projet de loi est qu'il ne contient pas assez de détails quant aux mesures à prendre et au coût. Il faudrait définir tout cela.
La plupart des pays du G7 ou du G8 investissent abondamment dans le transport en commun; le Canada fait figure d'exception. Le transport en commun est une de leurs principales préoccupations de conservation et une des façons utilisées pour réduire le smog et la pollution de leurs grandes villes. Nous en avons beaucoup à apprendre. Nous pourrions examiner ce qui se fait chez nos voisins du sud et nous en apprendrions beaucoup.
Ce projet de loi comporte de nombreux avantages. Je crois qu'il faut le peaufiner quelque peu. Je constate que le président du Comité de l'environnement est ici. J'ose espérer que le comité pourra s'occuper du dossier, peaufiner le projet de loi et proposer des solutions concrètes qui contribueront à régler nos problèmes de pollution atmosphérique dans nos grandes villes. N'oublions pas non plus les habitants des régions rurales que nous pourrions également aider.
Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Monsieur le Président, je suis heureuse de participer au débat aujourd'hui. Je tiens à remercier ma collègue du Bloc d'avoir présenté cette mesure.
Notre collègue du Parti conservateur a parlé d'une motion présentée antérieurement à la Chambre. Elle a été adoptée par la Chambre le 4 novembre 1998 et elle exonérait les laissez-passer de transport en commun payés par l'employeur.
En 1998, le gouvernement libéral avait l'occasion d'encourager l'utilisation du transport en commun, mais il n'a pas su mettre en oeuvre la mesure. Je tiens à ajouter que le ministre des Finances actuel l'avait appuyée lors du vote. Il me semble difficile de croire qu'il en fera autant cette fois-ci mais il serait bon qu'il ne change pas trop rapidement son fusil d'épaule.
Je vais m'inspirer passablement du texte de mon collègue Nelson Riis, qui a présenté cette motion lorsqu'il siégeait ici. Ce texte est fort pertinent également pour ce qui concerne le projet de loi de ma collègue du Bloc.
Puisque j'admets que je vais faire une lecture pratiquement textuelle du discours de mon collègue Nelson Riis, personne ne pourra m'accuser de plagiat. C'était un excellent discours en 1998 et il mérite d'être répété aujourd'hui puisqu'il a gardé toute sa pertinence. Voici ce qu'il a dit:
Nous payons des impôts sur nos revenus. Les avantages accordés par l'employeur doivent également être déclarés par ceux qui en bénéficient et ils sont donc imposables. Les permis de stationnement ou les cartes de transport en commun que l'employeur fournit à ses employés sont des exemples d'avantages imposables en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu fédérale. |
Cependant, l'interprétation que fait Revenu Canada de cette loi procure une échappatoire permettant à la plupart des employés de recevoir des permis de stationnement gratuits en franchise d'impôt. Les travailleurs qui profitent de cet avantage économisent environ 1 722 $ par année. Cela incite évidemment ces travailleurs à voyager en voiture et représente un manque à gagner non négligeable pour le fisc. |
Le gouvernement peut régler le problème en faisant des cartes de transport en commun fournies par l'employeur un avantage non imposable. |
Une telle exemption fiscale profiterait directement aux employés, qui rapporteraient plus d'argent au foyer. Il a poursuivi en disant:
Pour le gouvernement fédéral, ce changement serait une excellente occasion d'influer sur une politique d'intérêt public au niveau local. |
Je voudrais dire à ce stade-ci que ce point jette un certain éclairage sur la position de mon collègue libéral qui a parlé auparavant, le député de Saint-Léonard—Saint-Michel. J'aurais aimé lui poser une question parce qu'il a dit que, selon les études réalisées, cette solution ne présentait aucun avantage. J'aimerais qu'il me montre ces études ou au moins qu'il m'en donne les références, pour que je puisse en prendre connaissance.
Mon collègue a en outre déclaré qu'aux États-Unis, lorsque l'État a offert cette exemption, même s'il y avait des limites relatives au montant des subsides pour le transport en commun et à la manière de les offrir, l'utilisation du transport en commun parmi les employés pouvant bénéficier de ces subsides a augmenté en moyenne de 25 p. 100.
Il a dit encore à ce sujet:
De toute évidence c'était là un virage radical. À San Francisco, par exemple, l'utilisation des transports en commun parmi les employés participants a augmenté de 31 p. 100, ce qui a réduit le nombre de milles parcourus en véhicules à moteur dans la région de la baie de San Francisco de 17 millions et le nombre de tonnes de polluants de 61 millions, tout en augmentant les revenus des transports en commun de 1,6 million de dollars. |
J'aimerais que mon collègue libéral me dise où se trouve l'étude qui prouve le contraire. L'étude effectuée dans la région de San Francisco dont je viens de parler montre qu'une telle solution fonctionne bel et bien.
Plus loin dans son intervention, il ajoute:
Ce sera à l'avantage de tous les contribuables en ce sens que cela réduira la circulation, qu'ils dépenseront moins en soins médicaux, et que cela réduira les coûts d'infrastructure et les émissions de gaz à effet de serre. Rares sont les politiques fiscales qui présentent autant d'avantages pour les Canadiens. |
Soutenir le transport en commun ne constitue pas seulement une question de transport. Cela constitue une question de santé, une question sociale, une question de pollution et une question environnementale. Et il s'agit sûrement aussi d'une question économique. Cela représente un solide pas en avant dans notre engagement à respecter les obligations que nous avons contractées à Kyoto. Cela a du bon sens. Cela est efficace par rapport au coût. Et cela s'est révélé efficace ailleurs dans le monde. |
Aux sceptiques, je dirai qu'il ne s'agit pas d'une simple exonération fiscale qui va profiter à quelques personnes. Cela représente un énorme avantage financier en ce qui concerne notre régime de soins de santé et nos engagements en vertu du Protocole de Kyoto.
Et ce n'est pas uniquement le Nouveau Parti démocratique ou le Bloc qui le dit. Le représentant de l'Association canadienne du transport urbain a déclaré:
Le transport en commun peut se révéler une solution extraordinaire, mais il faut accroître la capacité et le nombre d'usagers. Il faut encourager les Canadiens à utiliser le transport en commun, par exemple au moyen d'initiatives d'exonération fiscale. |
Chaque année, nous rencontrons les membres de l'Association canadienne du transport urbain qui font valoir leur point de vue. Je me demande combien de mes collègues libéraux ont dit aux membres de l'association qu'ils se trompaient éperdument et que les incitatifs fiscaux liés aux laissez-passer ne fonctionneraient pas.
Si ces députés reconnaissent la crédibilité de ce genre d'associations, ils devraient avoir le courage d'appuyer certaines des politiques que ces associations préconisent pour accroître l'utilisation du transport en commun et réduire les émissions de gaz à effet de serre au pays. Le bénéficiaire ultime, c'est la population canadienne.
Le vice-président de l'association a indiqué que le fait de modifier le régime fiscal fédéral afin que les employeurs offrent une exonération fiscale inciterait grandement les gens à se rendre au travail en transport en commun au lieu de prendre leur voiture sans autre passager. C'est une mesure sur laquelle la Chambre s'est déjà prononcée. Lors du vote, 141 libéraux s'étaient déclarés en faveur, à l'instar de 23 réformistes seulement, de 39 bloquistes, de 21 néo-démocrates — l'ensemble de la formation à l'époque — , de 15 progressistes-conservateurs et d'un indépendant. Quatre libéraux et vingt-et-un réformistes ont voté contre, et le reste devait être en vacances. Les députés ont donc voté en faveur des exonérations fiscales associées aux laissez-passer pour le transport en commun.
Une voix: Avec une écrasante majorité.
Mme Bev Desjarlais: Nous avons voté en faveur, le ministre des Finances compris, avec une écrasante majorité. Le gouvernement a-t-il mis cette mesure en oeuvre? N'est-ce pas le rôle du Parlement de prendre des décisions? Lorsqu'il dit que nous devons faire quelque chose, ne sommes-nous pas censés obtempérer? Je croyais que nous avions été élus pour cela, que c'était ce que veut la démocratie, mais le gouvernement n'a rien fait.
Depuis sept ans, nous aurions profité des avantages d'une diminution de la pollution et du nombre de véhicules sur les routes. Peut-être aurions-nous senti le besoin d'aller un peu plus loin et d'étendre cette mesure non seulement aux laissez-passer payés par l'employeur, mais aussi à toute forme d'utilisation des transports en commun. Bien franchement, l'argument en faveur de la déductibilité aux fins d'impôt des frais de transport en commun est celui qui a été employé dans le cas des laissez-passer payés par l'employeur. Ce serait certainement avantageux.
Mon collègue de Kamloops, à l'époque, Nelson Riis, s'exprimait en des termes très convaincants et positifs. Quand on entend de bonnes interventions, il ne sert à rien de les réécrire. Je tiens à souligner de nouveau que la politique fiscale canadienne favorise l'utilisation de la voiture. Un exemple classique est l'exemption prévue pour les espaces de stationnement.
Nous encourageons l'utilisation de la voiture, mais nous parlons de respect de l'environnement et de développement durable. Il est temps que le Parlement, le gouvernement et le premier ministre disent ce qu'ils pensent et traduisent leurs paroles en gestes concrets. Ce serait un profond changement et cela secouerait probablement les Canadiens, mais il est temps qu'ils le fassent.
La motion à l'étude ne sera peut-être pas adoptée aujourd'hui, mais n'est-il pas temps d'appliquer celle qui a été adoptée en 1998? J'espère que cette motion obtiendra aussi le soutien de notre assemblée, et, qui sait, le gouvernement libéral étonnera peut-être les Canadiens en donnant suite aux demandes sur lesquelles le Parlement s'est prononcé.
[Français]
M. Robert Bouchard (Chicoutimi—Le Fjord, BQ): Monsieur le Président, je désire d'abord féliciter ma collègue de la circonscription de Longueuil—Pierre-Boucher pour avoir présenté ce projet de loi.
Cela me fait plaisir d'intervenir à titre de porte-parole du Bloc québécois en matière de revue nationale sur le projet de loi C-306, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu (frais de transport en commun).
On peut certes se questionner sur les gestes qui ont motivé le dépôt de ce projet de loi. Pourquoi donner des déductions fiscales aux utilisateurs du transport en commun? Au cours de mon exposé, je vais tenter de répondre à cette question.
D'abord, ce n'est pas la première fois qu'un projet de loi permettant des déductions fiscales aux utilisateurs du transport en commun est débattu en cette Chambre. En 1999, le Parlement canadien a adopté, par 240 voix contre 25, une motion demandant au gouvernement d'examiner la question de l'exemption fiscale pour l'utilisation du transport en commun. Également, en 2001, le projet de loi C-209 proposait environ les mêmes objectifs. Celui-ci a été accueilli très positivement par cette Chambre et, à l'extérieur de cette Chambre, par les associations d'usagers. Par contre, le projet de loi a été bloqué par le gouvernement libéral.
Le gouvernement a toujours souligné qu'il cherchait, par l'intermédiaire de divers programmes, un meilleur avenir pour tous. Toute mesure visant à favoriser un usage accru du transport en commun peut certainement contribuer à l'accomplissement des objectifs dans ce rapport. En effet, un tel projet de loi inciterait grandement les gens à utiliser le transport en commun.
On parle beaucoup du Protocole de Kyoto. Dans cette foulée, le gouvernement canadien pourrait adopter une mesure concrète et ainsi faire d'une pierre deux coups, en incitant l'utilisation du transport en commun et en diminuant les émissions de gaz à effet de serre.
Plus encore, cette mesure pourrait avoir un effet bénéfique encore plus grand; elle permettrait de diminuer l'engorgement des routes, de diminuer les coûts de construction et d'entretien de ces mêmes routes et d'augmenter la qualité de vie des citoyens.
Il est clair que le transport en commun est extrêmement économique pour les utilisateurs. Qu'on me permette d'en faire la démonstration. Posséder une automobile qu'on pourrait qualifier d'intermédiaire représente un coût de près de 8 000 $ par année, sans parler des frais de stationnement. En revanche, un abonnement annuel à un réseau de transport public coûte, selon le lieu où l'on se trouve au Québec, entre 500 $ et 1 000 $, ce qui est une énorme économie, voire une économie substantielle.
Il va sans dire que certains s'y opposeront, prétextant qu'il s'agit d'une mesure discriminatoire puisqu'elle ne touche pas l'ensemble des Québécois et des Canadiens. Il y a dans mon comté des sous-centres régionaux. Évidemment, les résidants de tels petits centres en région rurale où des réseaux de transport en commun ne sont pas accessibles ne profitent pas de cette déduction fiscale. Il est vrai que les gens vivant en région ne disposent pas toujours d'un service développé comme celui des grands centres.
Or, il s'agit d'une mesure bénéfique pour l'ensemble de la population, car l'un des volets les plus importants de ce projet de loi repose sur l'accessibilité à une meilleure qualité de vie pour tous.
Le projet de loi aura un volet économique important, mais aussi un volet environnemental pour améliorer la qualité de vie des citoyennes et des citoyens.
À mon avis, le gouvernement fédéral se doit d'offrir une aide aux utilisateurs du transport en commun, et ce, dans le respect des compétences des provinces et du Québec, pour favoriser un accroissement de l'achalandage du service de transport en commun.
En offrant des déductions fiscales, cela augmente le revenu des compagnies de transport qui pourront offrir de meilleurs services dans leur communauté.
Malgré le fait que c'est à Montréal également — je pense qu'il faut se servir de l'exemple de Montréal — que l'on utilise le plus de transport en commun en Amérique du Nord, toutes proportions gardées, et qu'il y a une progression continue de l'achalandage dans le transport en commun, l'utilisation de l'automobile croît à un rythme malheureusement plus rapide que celui du transport en commun. Il s'agit d'un phénomène qui est observé au Canada, au Québec et même ailleurs dans le monde.
Les gouvernements ont donc un défi important à relever pour inciter les contribuables à utiliser les transports en commun. Pour ce faire, le gouvernement devra investir plusieurs millions de dollars pour renouveler les infrastructures et les équipements de transport afin d'assurer la pérennité et le renouvellement de ce patrimoine collectif. On n'a qu'à penser au métro de Montréal qui fut construit dans les années 1960 et qui devra subir une cure de rajeunissement importante dans les prochaines années.
Ce n'est que la pointe de l'iceberg, car l'on prévoit des investissements importants au Québec. Pour les 10 prochaines années, on estime que les gouvernements devraient investir une somme de 4,6 milliards de dollars, comparativement aux 10 dernières années où les gouvernements ont investi 2 milliards de dollars.
Compte tenu des nombreux investissements qui devront être faits dans les prochaines années, et si l'on tient compte aussi que les contribuables paient des impôts et des taxes sur l'essence et également sur les droits d'immatriculation dédiés au transport au commun, je me pose la question suivante. Quelles mesures les gouvernements peuvent-ils mettre en place pour inciter davantage de citoyens à utiliser les transports en commun?
Le projet de loi C-306 comporte un avantage important. Tout d'abord, le gouvernement fédéral, par l'implantation d'une déduction d'impôt, intervient directement dans un champ de compétence qui le concerne. De plus, il s'agit d'une mesure concrète qui augmentera assurément les revenus des différentes sociétés de transport. En effet, davantage de contribuables se procureront des laissez-passer mensuels ou annuels au lieu de billets à la pièce.
D'autre part, il y aura aussi un effet bénéfique sur les budgets des sociétés de transport situées en périphérie des grands centres. Si l'on prend l'exemple de la Société de transport du Saguenay, dans mon comté, qui dispose de trois terminus majeurs, soit à Jonquière, Chicoutimi et La Baie, et un budget de tout près de 16 millions de dollars sur une base annuelle, une telle mesure pourrait apporter davantage d'argent à cette société de transport et devenir un incitatif pour plusieurs citoyens pour forcer certaines municipalités à ajouter des lignes de services pour les usagers pour améliorer le transport en commun.
Bref, ce projet de loi est un moyen idéal pour diminuer les embouteillages sur les routes du Québec et du Canada. Si tous les usagers du transport en commun de la région de Montréal prenaient leur voiture, la durée de déplacement augmenterait en moyenne d'une heure et demie, soit trois fois plus que présentement.
Il s'agit de moyens pour donner une alternative abordable aux gens qui sont devenus esclaves de la hausse des prix de l'essence.
De plus, en retirant les voitures de la circulation, cela aiderait à conserver nos routes un peu plus longtemps. Cela nous éviterait également de devoir investir des millions de dollars chaque année pour les entretenir et les améliorer.
Je souhaite que ce projet de loi C-306 soit adopté.
[Traduction]
L'hon. John McKay (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je veux mentionner certains points qu'il faut soulever dans ce débat. Il n'est pas très agréable d'être le rabat-joie par rapport à ce qui semble, à première vue, une excellente idée. Qui pourrait s'opposer au principe général qui consiste à encourager les gens à utiliser le transport en commun? Certainement pas le gouvernement ou n'importe quel député. Nous pensons toutefois que, même s'il repose sur de bonnes intentions, ce projet de loi est une initiative très coûteuse, assortie d'avantages incertains.
Les députés savent que le gouvernement du Canada est prudent sur le plan budgétaire. Ils ne s'en sont rendu compte que récemment, mais ils savent que nous sommes très prudents avec l'argent que les contribuables nous confient. Nous nous réjouissons que les néo-démocrates l'aient compris récemment.
Le projet de loi a une efficacité douteuse et il n'est pas tout à fait aussi équitable qu'il semble l'être. Par son orientation générale, cette mesure vise à accroître l'utilisation des transports en commun. Comme je le disais tout à l'heure, personne à la Chambre ne s'oppose à cette intention. Toutefois, nous devons aussi soupeser les coûts de cet encouragement, et rien ne prouve clairement qu'il entraînera l'augmentation souhaitée de la clientèle des transports en commun. Donc, il faut soupeser les coûts au regard d'autres facteurs, comme l'accessibilité, la commodité, le confort et les préférences personnelles.
Donc, cela ne surprend personne qu'étude après étude montre que l'utilisation des transports en commun est relativement insensible à leur coût pour les usagers. Les usagers des transports en commun recourent à ce moyen de transport pour d'autres raisons que son coût, pour des motifs comme la commodité et pour des raisons qui leur sont personnelles. Dans ce cas-ci, il est question d'allégement fiscal relatif au coût d'utilisation des transports en commun. Les études montrent que cela n'entraînera qu'une augmentation relativement faible de la clientèle, et les députés peuvent dire que même trois clients de plus, c'est bien. Oui mais, trois clients de plus à quel prix?
Dans ce cas de figure, le coût serait très élevé. Disons, par exemple, que la clientèle s'accroît de 10 p. 100. Cela coûterait au gouvernement environ 240 millions de dollars, au moins, et la fourchette pourrait atteindre 300 millions de dollars, et 90 p. 100 de l'allégement irait aux gens qui utilisent déjà les transports en commun. Donc, nous versons 90 p. 100 de l'aide, un montant se situant entre 240 et 300 millions de dollars, à des gens qui utilisent déjà les transports en commun. C'est une très coûteuse augmentation de 10 p. 100 de la clientèle des transports en commun.
En plus de m'interroger sur l'efficacité de cette mesure, il me faut aussi mettre en doute l'équité du projet de loi. Il ne fait pas de doute que la plupart des réseaux de transport en commun se trouvent dans les agglomérations urbaines et que celles-ci seraient dans une proportion écrasante les bénéficiaires de cette initiative, par rapport aux régions rurales ou à d'autres centres. De plus, ceux qui utilisent d'autres moyens écologiques pour se rendre du point A au point B pourraient aussi être défavorisés, en puissance.
Le Président: Je peux dire au secrétaire parlementaire que, lorsque cette question reviendra à la Chambre, il lui restera six minutes sur le temps réservé à son intervention. Je sais qu'il cherchera à en tirer tout le parti possible.
La période de temps réservée à l'étude des initiatives parlementaires est maintenant écoulée et l'article retombe au bas de la liste de priorité du Feuilleton.
MOTION D'AJOURNEMENT
[Ajournement]
* * *
L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.
* * *
[Traduction]
M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, PCC): Monsieur le Président, ma question porte sur la mort tragique de Zahra Kazemi. Par pur hasard, j'ai justement pu rencontrer aujourd'hui le fils de Mme Kazemi, qui s'est également entretenu avec le chef de l'opposition officielle. Nous avons discuté de certains points.
En posant ma question, je tiens à rappeler au ministre qu'il y a deux ans maintenant que toute cette histoire a commencé et que Mme Kazemi a été arrêtée. Nous savions qu'il y aurait des complications. Lorsque nous avons appris qu'elle était morte, nous savions que nous ne pouvions pas accorder foi aux histoires que nous servaient les autorités iraniennes.
Tout d'abord, nous avons affirmé que le gouvernement devait démontrer qu'il était sérieux. Deuxièmement, nous avons dit qu'il fallait immédiatement rappeler notre ambassadeur. Troisièmement, nous devions exiger la tenue d'un procès public. Quatrièmement, le gouvernement devait soulever la question auprès des Nations Unies. Cinquièmement, nous devions laisser entendre que nous pourrions exercer des sanctions et, sixièmement, nous devions exiger que le corps de Mme Kazemi soit rapatrié.
Le gouvernement n'a rien fait de tout cela. Il s'est contenté de jouer la sempiternelle carte de la diplomatie douce, qui ne sert à rien. La diplomatie douce n'est d'aucune efficacité auprès des tyrans. Nous savons qu'il y a une différence philosophique fondamentale entre nous, mais il est clair, et d'ailleurs l'histoire le démontre bien, que la politique de conciliation ne fonctionne pas lorsque nous devons traiter avec ces régimes totalitaires.
Je veux citer les propos qu'a tenus l'ancien chef de la République tchèque, un homme brave et courageux. Ce sont les commentaires qu'il a faits sur cette question. Nous devrions la prendre très au sérieux, car ces gens ont connu des situations de ce genre. Ils ont certes payé un prix élevé et ils savent de quoi ils parlent lorsqu'il est question de régimes sévères. Le 28 janvier, il s'est adressé à toute l'Europe et a dit:
Il est suicidaire que l'Union européenne s'inspire des pires traditions politiques de l'Europe, dont le dénominateur commun est la notion selon laquelle il faut apaiser le mal et que la meilleure façon de parvenir à la paix est d'être indifférent à la liberté d'autrui. C'est tout le contraire qui est vrai... |
Des gens comme Nathan Sharansky, qui raconte les expériences qu'il a vécues au cours de ses années en prison et au goulag et qui a souffert aux mains de régimes oppressifs, donnent ce conseil à tous les gouvernements: « La communauté internationale ne devrait jamais faire confiance à un État plus qu'il ne fait confiance à son peuple. » Le gouvernement iranien ne fait pas confiance à sa propre population. Il la maintient dans la répression. Il torture, persécute et assassine.
Nous ne pouvons pas faire confiance à un gouvernement qui ne fait pas confiance à sa propre population. Pourtant, notre gouvernement a fait confiance aux dirigeants du régime iranien lorsqu'ils ont dit qu'ils s'occuperaient de l'affaire et qu'il ne fallait pas s'inquiéter. Ils ont dit qu'ils découvraient ce qui était arrivé à Zahra Kazemi. Nathan Sharansky a également dit qu'il fallait être prudent, car tout régime qui commet des actes scandaleux contre sa population fera la même chose à d'autres populations. C'est exactement ce qui est arrivé à Zahra Kazemi.
Lorsque le gouvernement a obtenu la preuve concluante d'un médecin, en novembre dernier, comme avons-nous réagi? Le médecin avait pratiqué l'autopsie, puis s'était enfui. Il était en sécurité et en dehors de l'Iran. Il a dit que cette femme avait été torturée, violée, puis assassinée. Comment avons-nous réagi en novembre après avoir appris la nouvelle? Nous avons renvoyé notre ambassadeur en Iran pour qu'il normalise les relations. Cette conduite est anormale. Pourquoi cela s'est-il produit?
L'hon. Dan McTeague (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je suis ravi de répondre aux importantes questions que soulève le député d'Okanagan—Coquihalla.
Comme le député devrait le savoir, le gouvernement du Canada demeure déterminé à faire en sorte que justice soit rendue pour la famille Kazemi. Je peux dire au député que cette affaire est bien plus qu'une simple affaire consulaire. Il est aussi très clair que la violation des droits fondamentaux de Mme Kazemi ont attiré l'attention de la communauté internationale.
Le gouvernement a pris des mesures extraordinaires afin d'obtenir des résultats dans cette affaire. Nous avons indiqué clairement notre indignation et notre mécontentement au gouvernement iranien. Par ailleurs, nous continuerons d'exercer des pressions afin que l'Iran en vienne concrètement à respecter davantage les droits de la personne.
Récemment, dans la foulée du procès expéditif du 16 mai à Téhéran, le député assistait à la séance du Comité des affaires étrangères lorsque le ministre des Affaires étrangères a annoncé le resserrement de notre politique d'engagement limité avec l'Iran. Ces nouvelles mesures seront en oeuvre tant que les autorités iraniennes ne seront pas disposées à traiter l'affaire Kazemi de façon sérieuse et crédible.
Toutefois, nous avons indiqué clairement que ces mesures ne comprennent pas le rappel de notre ambassadeur en Iran, rappel que le député réclame. Depuis les événements tragiques qui ont conduit à la mort de Mme Kazemi et qui l'ont suivi, nous avons rappelé notre ambassadeur à deux reprises en guise de protestation. Le député le sait. Nous avons agi de la sorte afin de faire comprendre clairement à l'Iran notre indignation devant la façon dont elle traitait cette affaire.
L'Iran a compris clairement le message et les mesures que le ministre a annoncées il y a deux semaines réitèrent notre intransigeance dans ce dossier. Notre message ne serait nullement renforcé par un autre rappel de notre ambassadeur pour les mêmes motifs.
Les renseignements fournis récemment par le docteur Shahram Aazam ont fait ressortir les préoccupations que nombre d'Iraniens, y compris des membres du Parlement iranien, le Majlis, exprimaient depuis longtemps au sujet de la torture dont Mme Kazemi a fait l'objet lorsqu'elle était en détention.
Lorsque le docteur Aazam nous a présenté son rapport en novembre 2004, nous étions inquiets pour sa sécurité et sa sûreté. Il avait demandé refuge au Canada. Bien sûr, la Loi sur la protection des renseignements personnels prévoit la confidentialité des renseignements. Nous n'avons pas communiqué son rapport et ce fut, selon moi, une décision responsable. Le docteur Aazam a pris seul la décision de publier son rapport.
Nous continuons de rechercher de vrais résultats dans cette affaire. Il aurait été facile de prendre des mesures radicales et de limiter voire de couper nos relations diplomatiques avec l'Iran. Cependant, une telle réaction aurait été préjudiciable aux intérêts canadiens. Rappeler un ambassadeur est un geste symbolique qui nuit aux actions nécessaires et, plus important, cela ferme des portes qu'il faut garder ouvertes.
Nous avons demandé à notre ambassadeur de retourner en Iran parce que nous avons des préoccupations graves auxquelles il faut apporter l'attention nécessaire. Notre ambassadeur est à Téhéran afin de discuter avec les autorités iraniennes pour que justice soit faite dans le cas Kazemi et aussi pour nous renseigner sur les mesures que l'on pourrait prendre en passant par le système iranien lui-même.
Je tiens à souligner que, dans toute cette affaire, nous collaborons avec nos partenaires sur la scène internationale. Le ministre a adopté des actions résolues. Nous croyons que les mesures radicales et très difficiles que préconise le député, tout bien intentionné qu'il soit et aussi inspiré qu'il puisse l'être par ce qu'il appelle la diplomatie douce, constituerait une voie diplomatique inappropriée. Nous croyons qu'il est important de trouver une solution à cette affaire.
Nous croyons savoir que le fis de Mme Kazemi, M. Hachemi, a applaudi aux mesures prises par le ministre les 17 et 18 mai. Nous continuerons de travailler pour faire en sorte que le temps ne fasse pas oublier la mort de Mme Kazemi.
M. Stockwell Day: Monsieur le Président, j'ai rencontré le fils de Zahra Kazemi, il y a moins de deux heures. Il n'a pas applaudi; et il n'a pas émis de louanges; il était absolument bouleversé et préoccupé par tant d'inaction.
Le secrétaire parlementaire a qualifié de draconien le rappel de notre ambassadeur et a dit que ce geste n'était pas dans l'intérêt du Canada. Qu'en est-il des intérêts de cette femme qui a été enlevée, arrêtée à tort, torturée, violée et tuée? Voilà les intérêts dont nous devrions nous soucier, les droits de la personne.
Qu'a fait le Canada la semaine dernière? Il y a un groupe appelé MEK, que le SCRS a qualifié de terroriste. J'ai parlé aux membres de ce groupe; il se compose d'expatriés d'Iran, opposés au régime de ce pays. Je leur ai exposé la situation. Ils m'ont dit que lorsqu'on est déterminé à s'en prendre à des civils innocents, ce n'est pas une bonne chose; cependant, nous condamnons ce groupe...
Le Président: Le secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères a la parole.
L'hon. Dan McTeague: Monsieur le Président, je sais que le député a informé la Chambre qu'il a rencontré la famille. Il ne fait aucun doute dans mon esprit et pour les avocats de la famille que le député a posé un geste très important.
Si le député souhaite véritablement faire valoir ses arguments aussi efficacement qu'il tente de le faire en ce moment, la dernière chose qu'il souhaiterait, ce serait d'empêcher qu'on fasse valoir ces mêmes arguments au bon endroit, c'est-à-dire en Iran, de façon directe et claire.
Il y a aussi l'autre question dont nous devons tenir compte, soit le non-respect de l'Iran pour les normes internationales en matière de prolifération nucléaire.
Maintenant que nous avons exploré et emprunté l'avenue du rappel de notre ambassadeur, nous sommes responsables des Canadiens à l'étranger. Il s'y trouve d'autres Canadiens. Chose certaine, il n'est pas question que ceux-ci renoncent à leurs droits et aux possibilités qui s'offrent à eux.
Nous comprenons la tragédie Kazemi. Nous comprenons qu'il y a eu meurtre. Nous comprenons le régime iranien, mais nous devons également veiller à exercer le plus de pression possible sur ce régime afin qu'aucun autre Canadien ne subisse le même sort. Veiller à ce que personne ne soit jamais agressé de cette façon est un meilleur moyen de faire progresser la cause des droits de la personne dans ce pays.
* * *
M. Tony Martin (Sault Ste. Marie, NPD): Monsieur le Président, au cours des neuf derniers mois, j'ai demandé, à maintes reprises, au ministre du Développement social de s'engager à mettre sur pied son nouveau programme national de garderies selon un modèle sans but lucratif.
En fait, la semaine dernière, je lui ai dit que, s'il ne change pas de cap, il devrait craindre de voir des méga-entreprises envahir le domaine des garderies. Je l'ai informé que toutes les recherches montrent qu'un modèle sans but lucratif assure la meilleure qualité de service et je sais que le ministre insiste sur le fait que le programme de garderies sera axé sur la qualité.
Le ministre fait de la qualité son critère premier et il estime que le modèle, à but lucratif ou sans but lucratif, n'a aucune incidence sur la qualité. Pourtant, ce n'est pas ce que montrent les recherches. Ce n'est pas non plus ce que révèle l'expérience vécue un peu partout dans le monde. Le ministre indique qu'au Québec on trouve les deux modèles, mais il omet de reconnaître que, pour avoir ce qu'il a maintenant, surtout des garderies sans but lucratif, le Québec a imposé un moratoire de cinq ans sur tout financement des garderies à but lucratif à même les deniers publics.
Par conséquent, si pour le ministre, c'est la qualité qui doit primer, il est évident qu'il ne tient pas compte de la recherche. Les études effectuées un peu partout dans le monde révèlent que les établissements sans but lucratif fournissent des services de meilleure qualité et qu'ils sont davantage tenus de rendre des comptes quant à l'utilisation des deniers publics. Une étude réalisée en décembre 2004 par l'Université de Toronto révèle que, compte tenu des subventions gouvernementales, la qualité des services dans les garderies sans but lucratif était supérieure d'environ 10 p. 100 en comparaison des établissements à but lucratif.
En outre, la même étude nous apprend que les salaires et l'éducation du personnel sont plus élevés dans les garderies sans but lucratif. Or, il est établi qu'un salaire et un niveau d'éducation plus élevés ont une incidence positive sur la qualité des services et contribuent au maintien d'un effectif d'expérience.
Dans un domaine où il est largement reconnu qu'il est difficile de faire des profits, les garderies à but lucratif doivent sabrer dans leurs coûts d'exploitation pour maintenir leur rentabilité et leur compétitivité. Les parents ne devraient pas avoir à choisir le niveau de qualité en fonction de leurs moyens.
Deux études réalisées au Québec confirment que la qualité des services est supérieure dans les garderies sans but lucratif. On sait ce qui s'est produit dans les soins à domicile en Ontario et ce qui se produira dans les garderies, à moins que le gouvernement libéral de M. McGuinty décide maintenant de fermer la porte aux établissements à but lucratif.
Si nous bâtissons le système, il attirera les fournisseurs. Bâtissons-le correctement et invitons le genre de fournisseurs dont nous avons réellement besoin, c'est-à-dire ceux qui offrent des services de qualité, sans but lucratif et communautaires. Empêchons les méga-entreprises d'entrer dans le secteur des garderies au Canada.
Hon. Eleni Bakopanos (Parliamentary Secretary to the Minister of Social Development (Social Economy), Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureuse d'avoir l'occasion de parler d'une question importante soulevée par mon collègue, le député de Sault Ste. Marie, soit la question des ententes de principe conclues avec les provinces et les territoires concernant l'éducation préscolaire et la garde des enfants.
Tout récemment, le ministre du Développement social a signé des ententes de principe avec ses homologues au Manitoba et en Saskatchewan, comme le député de Sault Ste. Marie l'a mentionné, de même qu'avec ses homologues en Ontario, à Terre-Neuve-et-Labrador et en Nouvelle-Écosse, afin d'appuyer la mise sur pied de programmes d'éducation préscolaire et de garde d'enfants de qualité dans ces provinces.
Ces ententes montrent bien que les gouvernements sont déterminés à bâtir quelque chose de solide, à bâtir, dans chaque province, un système d'éducation préscolaire et de garde d'enfants dont les enfants et les familles pourront bénéficier. Nous nous servons de ces ententes comme modèles en espérant pouvoir conclure des ententes avec toutes les provinces et territoires dans les jours et les semaines qui viennent.
[Français]
Comme mon collègue peut le remarquer, chaque accord de principe reflète notre engagement commun à l'égard d'une vision, de principes et d'objectifs nationaux en matière d'apprentissage et de garde des jeunes enfants. Les accords tiennent également compte des priorités et des objectifs précis de chaque province et de chaque territoire. Cela leur permettra donc de concevoir et offrir des programmes et des services qui répondent le mieux aux besoins et aux circonstances des enfants, domaine qui relève de leur compétence.
[Traduction]
Le Manitoba et la Saskatchewan ont des politiques de longue date visant à promouvoir des services de garde d'enfants sans but lucratif, et leurs ententes de principe sont conçues en conséquence, mais les gouvernements des provinces et territoires ont tous des systèmes différents et des priorités différentes. Comme mes collègues le savent, beaucoup d'entre eux comptent sur un mélange de services à but lucratif et sans but lucratif réglementés. Les ententes de principe conclues leur donneront la flexibilité nécessaire pour qu'ils puissent investir comme bon leur semble afin d'améliorer les programmes d'éducation préscolaire et de garde d'enfants sur leur territoire.
Cependant, si je peux faire une parenthèse ici, je crois qu'il est important de revoir rapidement ce qu'on entend par services de garde d'enfants sans but lucratif et à but lucratif afin de clarifier cette question.
Les services d'éducation préscolaire et de garde d'enfants sans but lucratif sont régis par la législation provinciale ou territoriale. Comme les autres organisations de l'économie sociale, ils ne génèrent aucun excédent ou investissent toute somme excédentaire dans le programme. Les services publics de garde d'enfants administrés par les municipalités, les gouvernements provinciaux, les hôpitaux ou les établissements d'enseignement sont généralement considérés comme faisant partie de secteur sans but lucratif.
Les services d'éducation préscolaire et de garde d'enfants à but lucratif peuvent comprendre des garderies et des services réglementés de garde en milieu familial. Ces services peuvent être assurés par une personne, un partenariat ou une société régis par la législation provinciale ou territoriale.
Comme je l'ai mentionné, actuellement, les services d'éducation préscolaire et de garde d'enfants au Canada comprennent à la fois des services sans but lucratif et des services à but lucratif.
[Français]
Dans l'ensemble, le secteur sans but lucratif comptait pour 77 p. 100 de toutes les places en garderie au Canada en 2001, soit la dernière année pour laquelle des données nationales sont disponibles. La plus forte proportion de services de garde d'enfants à but lucratif était à Terre-Neuve, avec 64 p. 100, et en Alberta avec 56 p. 100.
Les politiques de financement gouvernemental des services de garde d'enfants à but lucratif varient d'une province et d'un territoire à l'autre. Certaines provinces, comme le Manitoba et la Saskatchewan, limitent le financement au secteur sans but lucratif et le pourcentage de places dans les garderies à but lucratif est très faible, soit 8 et 1 p. 100 respectivement.
D'autres provinces, comme Terre-Neuve-et-Labrador et l'Alberta, financent également les deux secteurs et une proportion relativement élevée des places en garderie est offerte par le secteur à but lucratif.
[Traduction]
Avec ses partenaires provinciaux et territoriaux, le gouvernement est convaincu qu'il peut faire en sorte que ses investissements servent à fournir des programmes et des services d'éducation préscolaire et de garde d'enfants de haute qualité, et ce sont là les mots clés, afin de répondre aux besoins des enfants et des familles d'un bout à l'autre du Canada.
M. Tony Martin: Monsieur le Président, je me préoccupe du fait que je n'ai entendu aucun engagement envers l'aspect sans but lucratif. Je sais, au même titre que tout le monde qui s'est penché sur ce dossier, que si nous ne nous engageons pas à ce que les garderies soient sans but lucratif, nous cédons les rênes aux grandes garderies industrielles. Je sais que le ministre lui-même s'en préoccupe, tout comme certains ministres provinciaux.
Le fait est que, dans les deux ententes conclues avec le Manitoba et la Saskatchewan, les provinces ont insisté pour qu'il y ait un engagement concret par écrit envers le secteur sans but lucratif parce qu'elles savent, comme le savent beaucoup d'autres — surtout les communautés qui attendent ce programme national de garderies depuis si longtemps — que si nous donnons le feu vert au secteur à but lucratif, les gros intérêts industriels s'installeront au Canada et se mettront plein les poches de l'argent des contribuables qui sert actuellement à construire des garderies dont on a tant besoin dans tout le pays.
Que compte faire le ministre pour nous rassurer, à savoir que, si le gouvernement continue dans le même sens et permet aux organismes à but lucratif de jouer un rôle, nous ne nous retrouverons pas avec de grandes garderies industrielles...
Le vice-président: La secrétaire parlementaire a la parole.
L'hon. Eleni Bakopanos: Monsieur le Président, je pense avoir dit que c'était en grande partie de compétence provinciale. Je pense que je l'ai dit clairement, et j'aimerais rassurer le député ainsi que tous les députés ici présents.
[Français]
Il faut s'assurer que les familles de partout au pays aient accès à des programmes d'apprentissage et de garde des jeunes enfants de haute qualité qui pourront les aider à placer leurs enfants sur le chemin de la réussite plus tard à l'école et dans la vie.
Voilà pourquoi la qualité et le développement sont deux des principes directeurs de l'initiative.
[Traduction]
Nous collaborons avec nos collègues des provinces et des territoires. Le gouvernement a confiance qu'il pourra veiller à ce que ses investissements financent des programmes d'éducation préscolaire et de garderie de haute qualité, que ces services répondront aux besoins des enfants et de leurs familles et que le gouvernement fédéral et ses collègues des provinces et des territoires travaillent de concert.
Le vice-président: Conformément au paragraphe 81(4) du Règlement, la motion portant ajournement de la Chambre est retirée d'office. La Chambre se forme maintenant en comité plénier pour étudier tous les crédits au titre du Développement des ressources humaines (développement social), dans le Budget principal des dépenses pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 2006. Je quitte maintenant le fauteuil, afin que la Chambre se constitue en comité plénier.
[Suite des délibérations au fascicule B]
* * *
[Suite des délibérations consignées à la partie A]
Initiatives ministérielles
[Les crédits]
* * *
[Français]
Les crédits
Développement des ressources humaines (Développement social) — Le Budget principal des dépenses de 2005-2006
(Étude en comité plénier de tous les crédits sous la rubrique Développement des ressources humaines (Développement social) dans le Budget principal des dépenses, sous la présidence de M. Strahl.)
Le président: Je voudrais ouvrir cette séance du comité plénier en faisant une courte déclaration.
Le débat de ce soir est le deuxième débat qui se déroule en vertu de l'alinéa 81(4)a) du Règlement, qui prévoit l'étude en comité plénier, pendant au plus quatre heures de débat, du budget des dépenses de deux ministères choisis par le chef de l'opposition.
Le débat se déroule également en vertu des motions adoptées par consentement unanime hier et plus tôt aujourd'hui.
Le débat de ce soir est de nature générale et porte sur tous les crédits sous la rubrique Développement des ressources humaines (Développement social). La parole sera accordée par période de 15 minutes. La première ronde d'orateurs débutera avec l'opposition officielle, suivie du gouvernement, du Bloc québécois et du Nouveau Parti démocratique.
Après cela, nous suivrons le déroulement normal qui tient compte de la taille proportionnelle de chaque parti.
[Traduction]
Comme le prévoit la motion adoptée plus tôt aujourd'hui, les partis pourront utiliser chaque période de 15 minutes pour des discours ou pour des questions et réponses par un ou plusieurs de leurs députés.
Dans le cas des discours, les députés du parti à qui la période de 15 minutes est allouée peuvent parler l'un après l'autre. La présidence apprécierait que le premier député qui prendra la parole au début de chaque période indique comment le temps qui lui est alloué sera utilisé, notamment s'il sera partagé.
Lorsque la période est utilisée pour des questions et observations, la présidence s'attendra à ce que la réponse du ministre corresponde à peu près au temps pris pour poser la question puisque ce temps sera compté dans le temps accordé au parti.
Bien que les députés puissent prendre la parole plus d'une fois, la présidence tentera de s'assurer que tous les députés qui désirent intervenir sont entendus avant d'inviter des députés à prendre la parole de nouveau, tout en respectant la rotation proportionnelle des orateurs des divers partis.
[Français]
Les députés n'ont pas à être à leur place pour obtenir la parole.
J'aimerais rappeler aux députés que, selon l'énoncé de la motion adoptée hier, aucune demande de vérification du quorum, aucune motion dilatoire et aucune demande de consentement unanime ne sera recevable au cours des travaux de ce soir.
[Traduction]
En tant que président, je m'inspirerai des règles régissant le comité plénier et des motions adoptées hier et plus tôt aujourd'hui. Néanmoins, afin de permettre un bon échange, je ferai preuve de discrétion et de souplesse dans l'application de ces règles.
Il est très important de respecter les traditions de la Chambre en matière de décorum. Les députés doivent faire leurs observations et poser leurs questions de manière judicieuse. Le président s'attend à ce que tous les députés se concentrent sur le sujet du débat, soit le Budget principal des dépenses du ministère du Développement des ressources humaines (Développement social).
[Français]
J'aimerais également signaler qu'en comité plénier, les ministres et les députés doivent être appelés par leur titre ou le nom de leur circonscription et que les commentaires doivent, évidemment, être faits par l'entremise de la présidence. Je demande la collaboration de chacun pour respecter les normes établies en matière de décorum, de langage et de comportement parlementaires.
À la fin des débats de ce soir, le comité lèvera la séance. Un rapport sera réputé avoir été fait des crédits sous la rubrique Développement des ressources humaines (Développement social), et la Chambre s'ajournera immédiatement à demain.
[Traduction]
Nous pouvons maintenant commencer la séance de ce soir. La Chambre, constituée en comité plénier conformément à l'alinéa 81(4)a) du Règlement, le deuxième jour désigné, entreprend l'étude en comité plénier de tous les crédits sous la rubrique Développement des ressources humaines (Développement social) dans le Budget principal des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2006.
Mme Carol Skelton (Saskatoon—Rosetown—Biggar, PCC): Monsieur le président, je tiens à remercier le ministre et les sous-ministres d'être ici ce soir.
Je partagerai mon temps de parole avec ma collègue de Simcoe—Grey pour le premier tour.
Le 10 décembre, le ministre a déclaré à la Chambre:
Monsieur le Président, les Canadiens estiment que les programmes importants qui visent l'éducation, les soins de santé et les services de garde devraient être accessibles à tous [...] C'est pour cette raison que nous allons le mettre en oeuvre. |
Il est clair que nous aurons un système de garderies à deux niveaux. Les Canadiens ne pourront pas tous profiter du programme libéral. Ce programme fera des gagnants et des perdants. Pourquoi ne donne-t-on pas aux parents une option financière raisonnable lorsqu'ils choisissent comment élever leurs enfants?
L'hon. Ken Dryden (ministre du Développement social, Lib.): Monsieur le président, en décembre, je disais que le programme national d'éducation préscolaire et de garde d'enfants devait être aussi accessible et aussi ambitieux que les autres systèmes que nous avons créés dans ce pays en matière de soins de santé et d'éducation.
Je ne comprends pas du tout ce dont parle la députée lorsqu'elle affirme que nous aurons un système à deux niveaux. Tous ceux qui le souhaitent auront accès à ce programme. Comme je le dirai plus tard, ce programme n'exclut pas les autres options. Les parents n'ont pas à l'utiliser nécessairement huit heures par jour, cinq jours par semaine; ils peuvent s'en servir seulement le matin ou l'après-midi ou pour des périodes plus courtes encore.
Mme Carol Skelton: Monsieur le président, les parents veulent choisir la façon dont ils prennent soin de leurs enfants. Malheureusement, les parents des régions rurales ont des choix plus limités que ceux des régions urbaines. Lorsque j'utilise l'expression à deux vitesses, je veux dire qu'il y a des parents qui n'auront pas accès au programme de la façon dont en parle le ministre. Par conséquent, le ministre favorise les familles urbaines, car un grand nombre de communautés rurales ne peuvent soutenir des garderies officielles. Dans bien des cas, les familles de ces milieux ont besoin de garderies souples, saisonnières, et non pas de garderies ouvertes les jours de semaine, de neuf à cinq.
Pourquoi le ministre ne permet-il pas la création d'un programme vraiment national qui traite les enfants de tous les coins du pays sur un pied d'égalité, à l'intérieur d'un cadre basé sur la souplesse en matière de choix parental et de besoins familiaux?
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, tout d'abord, ce sont les provinces et les territoires qui ont la responsabilité de mettre en oeuvre ce système. Ce sont eux qui doivent trouver les modalités de prestation de ces services dans toutes les régions. Il est prévu que toutes les régions soient desservies.
Le programme d'éducation préscolaire et de services de garde d'enfants est très souple, étant donné que tout est calculé à petite échelle, soit deux, quatre, cinq ou huit places. Ce système n'a pas besoin d'infrastructure massive ni d'un grand nombre d'enfants pour fonctionner. C'est un peu de cette façon que l'éducation rurale a commencé dans le pays. On trouve l'espace où quelque chose peut être créé.
Mme Carol Skelton: Monsieur le Président, le Parti conservateur du Canada, à son récent congrès d'orientation qui s'est tenu à Montréal, a adopté une résolution demandant l'adoption d'une loi nationale en faveur des personnes handicapées, comme celles que l'on trouve dans d'autres pays développés.
Lorsque j'ai demandé au ministre, au comité, si le Parti libéral partageait notre sentiment d'urgence et notre préoccupation à l'égard des Canadiens handicapés, il ne s'est pas engagé. Maintenant qu'il a eu le temps d'examiner les avantages d'une loi comme celle-là, serait-il prêt à collaborer avec le Parti conservateur pour présenter une mesure législative pertinente?
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, j'ai dit au comité — et je n'ai pas refusé de m'engager — qu'une telle loi avait été adoptée aux États-Unis et que j'étais très intéressé à en apprendre davantage sur le sujet. En fait, j'ai demandé au comité s'il ne serait pas lui-même intéressé à explorer plus en profondeur le potentiel d'une loi nationale en faveur des personnes handicapées.
Mme Helena Guergis (Simcoe—Grey, PCC): Monsieur le président, mes questions ont trait au programme de garderies proposé. Pourquoi le ministre ne fait-il pas confiance aux parents canadiens pour élever leurs propres enfants et faire des choix responsables et adaptés à leurs besoins en ce qui concerne la garde des enfants? Pourquoi le ministre prône-t-il un régime de garderies universel qui prive les parents du droit de choisir?
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, en fait, à l'instar des députés et du grand public, je sais que la relation la plus critique pour le développement des enfants est celle qu'ils ont avec leurs parents. L'éducation préscolaire et les services de garde d'enfants constituent l'un des outils offerts aux parents pour les aider à élever leurs enfants. Ils peuvent s'en prévaloir un peu, beaucoup ou pas du tout. Ce n'est pas un régime identique pour tous. C'est ce que nous disions tout à l'heure. Il existe différentes circonstances, des endroits de tailles différentes et des besoins différents. Toutefois, les objectifs sont les mêmes parce que tous les enfants ont les mêmes possibilités.
Mme Helena Guergis: Monsieur le président, j'ai reçu un courriel d'une personne de ma circonscription qui s'appelle Laurie et qui se dit fort perplexe. Avant l'annonce du budget, elle avait l'impression, comme bon nombre de ses amis, que la plupart des familles demandaient que le régime fiscal soit rendu plus équitable de manière à ce que les familles et les parents qui souhaitent élever leurs enfants à la maison puissent le faire au lieu de financer des établissements avec leurs impôts.
Il y a plus de cinq ans, cette personne a déménagé dans ma circonscription, Simcoe—Grey, mais, du fait que les impôts étaient si lourds, les services publics si chers et le coût de la vie si élevé, elle n'a pas pu rester à la maison, et elle travaille à l'heure actuelle.
Monsieur le président, je voudrais demander au ministre pourquoi il est si insensible et pourquoi il ne répond pas aux besoins des jeunes familles du Canada. Nombreuses sont les familles qui choisiraient qu'un parent reste à la maison pour s'occuper des enfants. Le gouvernement ne tient pourtant pas compte de leurs besoins et il crée un programme que ces parents doivent financer par leurs impôts sans jamais pouvoir en profiter. Le ministre peut-il expliquer pourquoi son programme est discriminatoire à l'égard d'un si grand nombre de familles canadiennes laborieuses comme celle de Laurie, dans ma circonscription, Simcoe—Grey?
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, le système d'éducation préscolaire et de garde des enfants dont nous voulons favoriser la création et le développement serait accessible à tous, tout comme le serait un système d'éducation ou un système de soins de santé. Les usagers décideraient de leur intensité d'utilisation, comme c'est le cas pour la santé et l'éducation.
Comme la députée le sait, dans la grande majorité des jeunes familles, les deux parents travaillent, comme c'est le cas de celle de Laurie. Telle est la réalité aujourd'hui. Et ce sera presque certainement celle de demain. L'autre aspect de la réalité correspond au défi de donner aux enfants qui grandissent les meilleures occasions possible d'apprentissage et de croissance.
Mme Helena Guergis: Monsieur le président, je remarque que le ministre parle des faits. Il y a une augmentation dramatique du nombre de familles où les deux conjoints sont sur le marché du travail. Pourtant, le ministre ne semble pas s'apercevoir que cette augmentation est attribuable au fardeau fiscal trop élevé des Canadiens.
Nous ne pouvons pas continuer à leur imposer ce fardeau, puis construire des garderies qui ne seront pas accessibles à tous les enfants. Dans ma circonscription de Simcoe—Grey, les gens n'auront pas accès à des garderies publiques. Cet avantage ne deviendra jamais une réalité pour eux.
Je suis membre d'un parti qui respecte le droit des parents de choisir. Nous appuyons les parents qui veulent avoir recours à des garderies. Nous appuyons les parents qui ont des besoins particuliers en fait de garde d'enfants. Nous appuyons les parents qui choisissent de rester à la maison pour s'occuper de leurs enfants.
Pourquoi le ministre ne croit-il pas à l'égalité de toutes les familles canadiennes? Pourquoi continue-t-il de faire croire aux Canadiens que tout le monde pourra bénéficier des nouveaux services, alors que ce ne sera tout simplement pas le cas?
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, au contraire, dans ce qui a été dit ce soir, la seule chose qu'on ne devrait pas faire croire aux gens est que les services ne seront pas accessibles à tous. Les services seront bel et bien accessibles à tous. Les gens auront le choix d'y avoir recours ou non. La vaste majorité des familles choisissent de confier leurs enfants à des services de garde d'une forme ou d'une autre. La tâche dont nous devons nous acquitter consiste améliorer de beaucoup les services de garde et à les rendre beaucoup plus abordables.
Mme Helena Guergis: Monsieur le président, je crois toujours que le ministre ne comprend pas que s'il y a autant de ménages à deux revenus et pourquoi les deux parents doivent travailler, c'est que nous faisons payer trop d'impôts aux Canadiens. Nous ne pouvons pas continuer d'agir ainsi et nous attendre à commencer à financer un système de garderies auquel tous les Canadiens n'auront pas accès.
Compte tenu des milliards de dollars d'excédents que nous avons au Canada, il n'est pas facile de dire aux Canadiens qu'ils en ont pour leur argent. Ils n'en ont pas pour leur argent. La création de ce programme ne fera que le confirmer.
Je pense vraiment que le Parti libéral et le gouvernement doivent comprendre que leur stratégie de communication est vraiment un échec parce qu'elle ne leur profite pas.
Des électeurs comme les miens n'auront jamais accès au système. Les électeurs de Simcoe--Grey n'en bénéficieront jamais. Seuls en bénéficieront les habitants des grands centres.
Je mets le ministre au défi d'expliquer cela à mes électeurs et de leur montrer comment ils y auront accès.
L'hon. Tony Ianno (ministre d'État (Famille et Aidants naturels), Lib.): Monsieur le président, je voudrais répondre à la députée. Malheureusement, avant de devenir députée fédérale il y a huit ou neuf mois, et avant cela je suppose, la députée a été membre du gouvernement provincial conservateur qui accordé d'énormes baisses d'impôt. Or, la pauvre Laurie et sa famille éprouvent toujours des problèmes.
Si seulement il suffisait de diminuer les impôts. Tous les problèmes seraient réglés. Nous ne tiendrions même pas le présent débat.
Nous avons la possibilité de créer un système d'éducation préscolaire qui ne sera qu'un modeste début, mais qui permettra néanmoins à de jeunes enfants et à des familles de profiter des mêmes occasions que les familles plus à l'aise financièrement.
C'est une occasion en or qui nous permettra dans l'avenir d'élargir le système au niveau provincial selon les régions et leurs besoins.
Mme Helena Guergis: Monsieur le président, ce que le ministre d'État n'a pas mentionné dans sa réponse, c'est qu'il n'y a pas une province au pays qui ne se lamente pas pour que l'argent lui soit renvoyé, plutôt que ce soit le gouvernement qui ait des excédents comme ceux qu'il enregistre maintenant.
Oui, j'ai travaillé pour le parti conservateur de l'Ontario et il est vrai que nous avons beaucoup réduit les impôts. En même temps, nous avons accru la création d'emplois et la croissance de l'emploi, et nous avons pu augmenter les recettes fiscales. Nous avons réussi à accroître les dépenses dans certains domaines, même si les libéraux fédéraux avaient considérablement amputé les montants d'argent allant aux provinces, et je ferais remarquer qu'on le voit très bien dans les milliards de dollars d'excédents qui s'accumulent depuis 1997.
L'hon. Tony Ianno: Monsieur le président, si on tient compte du fait que Mike Harris est arrivé au pouvoir en 1995 et qu'à partir de ce moment là, il y a eu trois millions d'emplois supplémentaires au pays, il y a 25 p. 100 de Canadiens de plus au travail aujourd'hui. Cela s'explique par de bonnes politiques économiques, mais nous avons aussi une conscience sociale qui ne ressemble pas à celle de l'autre parti. Nous croyons que les Canadiens ont les possibilités. Nous en avons créé au moyen d'une saine politique financière afin de garantir que tous les Canadiens, et en particulier les enfants, aient toutes les occasions de recevoir une bonne éducation pour réaliser leurs rêves et ceux de notre pays.
Mme Carol Skelton: Monsieur le président, j'aimerais que le ministre m'explique sa vision d'une garderie en région rurale ou d'une garderie dans le Nord de la Saskatchewan, disons. Quelle est cette vision?
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, tout d'abord, il appartient à la Saskatchewan de décider quelle forme au juste les services prendraient dans une petite localité. La députée doit fort bien connaître les petites localités. Il y a des voisins proches, il y a des gens qui donnent un coup de main pour garder les enfants. La petite localité peut aussi être plus grande et avoir les moyens de s'offrir un service de garde beaucoup plus important.
Le défi que le gouvernement provincial doit relever consiste à essayer de répondre aux besoins de tous les enfants de la province. Quelle que soit la taille des localités, il y a toujours des gens qui habitent dans une petite localité. Il s'y trouve aussi des enfants. Il y a encore la possibilité, dans les petites localités, d'offrir des services d'éducation préscolaire et de garderie.
L'hon. Ken Dryden (ministre du Développement social, Lib.): Monsieur le président, nous, Canadiens, nous faisons certaines conceptions de notre identité, de ce que nous attendons de nous-mêmes et pour nous-mêmes, de ce que nous espérons des autres et pour les autres. Nous comptons avoir une chance, puis une deuxième chance. Nous voulons mener une vie pleine, riche, épanouissante. Pour certains, ce n'est pas facile à cause de la maladie ou d'un accident, d'un handicap, de la pauvreté ou de l'âge, à cause de problèmes personnels ou familiaux, à cause de quelque chose qui les retarde lorsque la course commence ou en cours de route.
Le travail de Développement social Canada est de déceler les divergences entre ces conceptions et la réalité et, avec d'autres, de chercher des solutions.
À mes yeux, notre politique sociale repose sur deux grands objectifs: le mieux-être social et la sécurité du revenu. Aucun ministère isolé, aucun ordre de gouvernement ou ensemble de politiques ne peut suffire à la tâche. C'est pourquoi les politiques et programmes sociaux réussis, au Canada, ont été le fruit de la collaboration entre le gouvernement fédéral, les provinces et territoires, les municipalités et les Canadiens à titre individuel.
Nous devons tout simplement travailler en collaboration pour pouvoir en arriver à des résultats positifs, importants et significatifs. Ce partenariat doit tenir compte du fait que les Canadiens veulent avoir leur mot à dire sur les décisions qui ont des répercussions sur eux, que les gouvernements doivent mettre à profit la collaboration entre le fédéral les provinces et les territoires, que les gouvernements doivent rendre des comptes aux Canadiens et s'assurer la participation de tiers pour suivre les progrès sociaux et que la recherche, les connaissances et l'information sont des éléments essentiels. De plus, les partenariats ne peuvent être efficaces que s'ils sont basés sur des valeurs et sur les priorités des Canadiens, c'est-à-dire le bien de la collectivité, l'égalité et la justice, le respect de la diversité et un juste équilibre entre les droits et les responsabilités.
Développement social Canada a vu le jour il y a dix-huit mois à peine, héritant de tout un éventail de politiques, de programmes et de services à l'intention des personnes âgées, des handicapés, des enfants, des familles, des prestataires de soins et des collectivités ainsi que de toutes les valeurs et des motivations qui en assurent la réalisation. DSC doit s'inspirer de tout cela pour renforcer les assises et la cohésion sociales en favorisant le bien-être et la sécurité du revenu des Canadiens.
[Français]
Dans notre planification pour l'avenir, il nous faut tenir compte du fait que nous vivons plus longtemps et en meilleure santé. Notre vie en tant qu'aîné se prolonge. Nous vivrons près du quart de nos vies après la retraite, après que nos enfants auront grandi.
Le troisième âge apporte parfois une grande vulnérabilité sur les plans physique, financier et psychologique. Le troisième âge peut également être une période de grandes possibilités.
Il incombe à DSC d'aider les personnes âgées à tirer le maximum de leur vie. C'est à DSC que revient de veiller à ce que les pensions publiques des aînés soient suffisantes pour vivre, en plus de veiller à ce que ces pensions soient encore disponibles l'an prochain, dans 10 ans, dans 50 ans, lorsqu'ils en auront besoin, lorsque nous en aurons besoin.
[Traduction]
Il y a plusieurs années, les gouvernements fédéral et provinciaux se sont entendus, en tant qu'administrateurs conjoints du Régime de pensions du Canada, pour apporter des réformes importantes au régime afin d'en assurer la viabilité financière à long terme. L'actuaire en chef du Canada a d'ailleurs affirmé que le RPC était financièrement viable pour au moins 75 ans. De plus, le taux de pauvreté chez les personnes âgées est passé de 21 p. 100 en 1980 à 6,9 p. 100 en 2002.
Afin de remettre les choses en perspective, précisons que, selon l'OCDE, le système canadien de revenu de retraite, qui combine des fonds privés et publics, est considéré comme l'un des meilleurs au monde au chapitre de l'équité, du niveau des prestations et de la viabilité financière.
Toutefois, la qualité de vie des personnes âgées ne se mesure pas uniquement en termes de soutien du revenu. Elle se mesure aussi en motivation, en raison de vivre la vie au quotidien. Le programme Nouveaux Horizons pour les aînés permet à ceux qui en sont à la deuxième partie de leur vie de partager leurs compétences, leur expérience et leur sagesse avec les autres afin de rendre leurs collectivités meilleures et d'améliorer du même coup leur propre vie.
DSC se préoccupe également des personnes handicapées. Autrefois, on cachait les personnes handicapées que l'on définissait souvent par leur handicap et elles en venaient souvent elles-mêmes à en faire autant.
Il y a plus de 20 ans, la Charte des droits et libertés a renforcé notre compréhension de l'égalité. Elle a rendu les Canadiens plus sensibles aux problèmes de discrimination. Maintenant, les personnes handicapées veulent vivre et insistent pour vivre pleinement chaque jour à l'école, au travail et dans leurs loisirs.
Le gouvernement du Canada a pris des mesures importantes au fil des ans, notamment dans les secteurs de l'emploi, du revenu et de la fiscalité, pour aider les personnes handicapées à surmonter de nombreux obstacles à l'inclusion.
DSC réunit l'important programme gouvernemental de soutien du revenu, la pension d'invalidité du RPC, ainsi que d'autres programmes et services offerts par le Bureau de la condition des personnes handicapées, pour favoriser l'inclusion totale des personnes handicapées dans tous les aspects liés à l'apprentissage, au travail et à la communauté.
Nous savons que nous devons faire davantage, mais nous savons aussi que nous ne pouvons pas y parvenir seuls. Dans les collectivités, des gens trouvent de nouveaux moyens novateurs pour s'attaquer à de vieux problèmes. À DSC, nous apportons notre aide. Une innovation de ce genre passe par l'économie sociale, à savoir des entreprises sociales communautaires, sans but lucratif.
Bien que de nombreuses collectivités canadiennes ont trouvé leur propre façon de venir en aide à leurs habitants, d'autres ont plus de difficulté à le faire. En cherchant ce qui donne de bons résultats et en partageant ces stratégies avec d'autres collectivités, DSC s'emploie à soutenir les efforts communautaires qui améliorent la vie des Canadiens. Les députés en apprendront davantage à ce sujet lorsque ma secrétaire parlementaire prendra part au débat.
Plus de 2,8 millions de Canadiens s'occupent de personnes âgées, d'adultes et d'enfants handicapés, ainsi que de Canadiens éprouvant des problèmes de santé graves ou à long terme. Pour certains, ces soins sont énormément exigeants. Le gouvernement du Canada reconnaît que les aidants familiaux non rémunérés ont besoin d'aide et de soutien. En fait, nous estimons que cette préoccupation est tellement importante que nous avons un ministre d'État chargé de la Famille et des Aidants naturels.
DSC collabore avec les provinces et les territoires et a demandé aux Canadiens d'exprimer leurs points de vue sur l'élaboration d'une stratégie complète sur les aidants. Là encore, les députés en apprendront davantage lorsque le ministre d'État chargé de la Famille et des Aidants naturels participera au débat plus tard.
[Français]
Devant toute la planification à faire pour les années à venir, Développement social Canada s'est fortement engagé à veiller à ce que tous les enfants canadiens aient la possibilité de commencer leur vie du bon pied. Le bien-être des enfants canadiens est l'un des éléments clés de la qualité de vie de notre pays maintenant et dans l'avenir.
Nous savons tous que les pressions qui s'exercent sur les familles ont changé et qu'elles continueront de changer. Comme ils l'ont toujours fait auparavant, les parents continueront de jouer le rôle principal en ce qui concerne l'éducation de leurs enfants.
Cependant, de nos jours, la majorité des familles canadiennes qui ont de jeunes enfants n'ont plus un seul revenu. Sept femmes sur dix qui ont des enfants de moins de 6 ans font partie du marché du travail. C'est la réalité.
[Traduction]
Reconnaissant qu'une société dynamique et productive nécessite un investissement dans nos enfants, le gouvernement du Canada a instauré un train complet de politiques et de programmes destinés à aider les parents au besoin et à appuyer et à améliorer l'éventail des choix offerts aux familles. Ces mesures comprennent une injection de 10 milliards de dollars par an d'ici 2007 au titre de la Prestation fiscale canadienne pour enfants et du Supplément de la prestation nationale pour enfants qui ont aidé 3,5 millions de familles à faible revenu à subvenir aux besoins de leurs enfants; au titre de la disposition d'exclusion du Régime de pensions du Canada qui permet aux parents de renoncer temporairement à leur travail pour s'occuper de leurs enfants sans être pénalisés lorsqu'ils prendront leur retraite et au titre de mesures fiscales visant à aider les familles qui ont des enfants handicapés à assumer les coûts supplémentaires liés aux handicaps de leurs enfants.
Toutefois, nous savons que même ces mesures n'ont pas donné aux parents de jeunes enfants toute la souplesse voulue et les possibilités de choix que la vie moderne nécessite. Dans le discours du Trône de l'automne dernier, on a confié à Développement social Canada le mandat d'accroître l'accès à des programmes d'apprentissage et de garde de jeunes enfants de qualité susceptibles d'aider les familles à mieux aider leurs enfants à partir du bon pied. Le budget prévoit 5 milliards de dollars sur cinq ans pour nous rapprocher de cet objectif.
Ensemble, les provinces, les territoires et le gouvernement fédéral ont élaboré une vision commune pour l'apprentissage et la garde des jeunes enfants. J'ai travaillé avec chaque province et territoire à la conclusion d'ententes bilatérales de principe qui permettront de concrétiser cette vision. Cinq provinces ont déjà signé ces ententes et nous espérons que d'autres le feront dans les semaines et les mois à venir.
Cela dit, les gouvernements provinciaux, les gouvernements territoriaux, les administrations municipales, les Canadiens, tous veulent des améliorations dans ces domaines. DSC en veut autant.
Le Canada est une fédération et c'est en tant que fédération que nous pouvons le mieux répondre aux besoins des Canadiens. En tant que citoyens canadiens, avec l'aide de nos familles, de nos entreprises et de nos syndicats, nous sommes capables de satisfaire nous-mêmes la plupart de nos besoins. Lorsque nous n'y arrivons pas, nous demandons au gouvernement de nous aider. Nous ne nous soucions guère que l'aide provienne du gouvernement fédéral, provincial, territorial ou d'une administration municipale. Nous voulons obtenir de l'aide lorsque nous en avons besoin.
Il y a aussi d'énormes disparités au Canada. Même si, à titre de Canadiens, nous pouvons considérer comme étant nettement prioritaires des choses comme les soins de santé, l'éducation préscolaire et les services de garde, l'enseignement postsecondaire, un environnement sain et des villes et collectivités dynamiques, il se peut que certains territoires ou provinces puissent offrir cela, et d'autres pas. C'est là où le gouvernement fédéral joue un rôle si important.
En ce qui concerne le développement social, les aînés et la sécurité du revenu, les personnes ayant un handicap, l'éducation préscolaire et les services de garde, les familles et les aidants naturels, nous n'avons jamais assez de ressources pour faire tout ce que nous, les autorités fédérales, provinciales, territoriales et municipales, souhaitons accomplir et tout ce que la population souhaite obtenir. Cela signifie que nous devons absolument travailler ensemble pour d'excellentes raisons liées aux secteurs de compétence, et pour d'autres d'ordre pratique. La population ne s'attend pas à une coopération, elle présume que celle-ci existe. Elle ne peut imaginer ni tolérer rien d'autre, et c'est très bien ainsi.
À Développement social Canada, nous respectons les champs de compétence. Nous respectons aussi les besoins, les espoirs et les possibilités des gens. C'est le vrai fédéralisme, le fédéralisme vivant. C'est un fédéralisme que les gens comprennent. C'est pourquoi, la semaine dernière, à Québec, dans le cadre d'une réunion des ministres fédéral, provinciaux et territoriaux responsables des personnes âgées, nous avons convenu de travailler en collaboration et de nous réunir chaque année plutôt que tous les 18 mois, comme dans le passé.
C'est pourquoi mon ministère, en collaboration avec les provinces, les territoires et la communauté des personnes handicapées, élabore un plan d'action de dix ans pour faire progresser l'inclusion des personnes handicapées. C'est pourquoi les cinq ententes sur l'éducation préscolaire et les garderies que nous avons signées jusqu'à maintenant sont différentes et c'est pourquoi les ententes que nous signerons au cours des prochaines semaines avec d'autres provinces et territoires seront aussi uniques.
Les principes sont les mêmes, les attentes sont les mêmes et les ambitions sont les mêmes, mais chaque province et territoire aura sa propre façon de les traduire sur le terrain. Il nous faut travailler avec les provinces et les territoires. Cependant, nous devons tous insister fortement sur la reddition de comptes, sur ce que la population attend et exige de nous. En termes simples, je dirai que nous devons travailler tous ensemble parce que les exigences sont trop lourdes pour chacun d'entre nous, seul.
Le programme d'éducation préscolaire et de garderies nous donne un exemple du fédéralisme à son meilleur. Quelle sera la prochaine étape? Notre ministère travaillera pour donner aux Canadiens confiance en leur gouvernement. Les citoyens veulent savoir que les programmes qui leur sont chers sont garantis et s'adapteront en fonction de l'évolution de la situation. Nous collaborerons avec nos partenaires provinciaux et territoriaux afin d'élaborer de nouvelles façons de faire plus souples là où elles sont nécessaires.
Nous ne tenterons pas de tout faire seuls. Les Canadiens ne supportent plus l'ancienne façon de faire où les gouvernements définissent les problèmes et élaborent les solutions sans les écouter. Les gouvernements prennent de meilleures décisions si les citoyens participent à l'élaboration des plans et les députés doivent jouer un important rôle à cet égard.
Nous n'oublierons jamais les arrangements auxquels nous sommes parvenus en tant que Canadiens et ne laisserons jamais les autres les oublier et nous travaillerons toujours pour progresser vers l'atteinte des objectifs que nous nous sommes fixés.
[Français]
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le président, avant d'aborder certaines questions plus administratives au sujet des crédits relatifs au nouveau ministère du Développement social, j'aimerais parler d'une question beaucoup plus structurelle.
Le Bloc québécois n'est pas en faveur de la création du nouveau ministère du Développement social parce qu'un but est non avoué: par la création de ce ministère, on empiète dans les champs de compétence des provinces, s'agissant de développement social.
On sait que le Québec n'a pas signé l'Entente-cadre sur l'union sociale en 1999. Il était clair que la volonté du gouvernement fédéral était de paver la voie pour s'immiscer dans les champs de compétence des provinces, surtout en matière de développement social.
J'aurais des recettes beaucoup plus faciles à suggérer où l'on n'aurait pas besoin d'étudier les crédits du nouveau ministère aujourd'hui. Il s'agirait d'abord de régler toute la question du déséquilibre fiscal. Le ministre se dit très sensible à ce problème, on peut le lui concéder. Cependant, je pense qu'il n'emprunte pas la bonne voie pour répondre aux attentes des différentes provinces. Évidemment, il a soulevé une question très importante. Les différentes provinces ont des avenues et des objectifs différents, selon les pressions venant de leur population et s'exprimant de façon différente.
On sait très bien que lorsqu'une des institutions créées au Québec a un manque à gagner, les gens sortent dans la rue. C'est au Québec qu'on observe ces grandes manifestations. Ce fut le cas relativement à la santé et au financement des écoles.
J'inviterais le ministre à examiner toute la question du déséquilibre fiscal. Le gouvernement a engrangé des surplus de 70 milliards de dollars et dispose d'une marge de manoeuvre de 140 milliards de dollars pour développer de nouvelles initiatives, dont probablement certaines en développement social.
Le ministre du Développement social disait tout à l'heure que le gouvernement veut rendre des comptes aux Canadiens. Que pense-t-on que veulent faire les provinces? C'est justement rendre des comptes à leurs concitoyens et concitoyennes. Or, devant la menace du déséquilibre fiscal, on ne peut répondre aux attentes de façon adéquate.
J'aimerais d'ailleurs rappeler au ministre une réflexion livrée par le Conseil national du bien-être social. Ce dernier souligne que le gouvernement ne devrait pas engager sa politique familiale sur la voie des programmes d'intervention, parce que « ces programmes fédéraux ne font qu'accroître le fractionnement des programmes et des politiques qui relèvent de la compétence des provinces ». On comprend très bien, quand on lit la Constitution de 1867, que la question sociale relève des provinces.
Par ce nouveau ministère, le ministre aura toute la latitude qu'il voudra bien se donner pour envahir les champs de compétence des provinces. Selon la vision du ministre, ce sont des programmes à frais partagés, à raison de 50 p. 100 de part et d'autre. C'est ainsi que cela fonctionnait il y a 25 ans.
Je pense que c'est une question de vision. Le Québec ne pense pas que les intrusions de ce nouveau ministère soient des programmes à frais partagés; ce sont des compétences qui relèvent du Québec, et non pas des compétences partagées, comme le pense et l'affirme le ministre du Développement social.
D'entrée de jeu, j'aimerais lui poser certaines questions. On dit qu'il en coûtera 53 milliards de dollars pour gérer le nouveau ministère du Développement social. De ce montant, 97 p. 100 va à deux programmes: le Régime de pensions du Canada et à la Sécurité de la vieillesse, ce qui laisse environ 1,5 ou 2 milliards de dollars pour les initiatives dans les champs de compétence des provinces. On sait qu'il existe différentes catégories d'objectifs: inclusion et participation, collectivités dynamiques, investissements dans les enfants et les familles, innovation en matière de services. Tous ces différents secteurs d'activité comprennent quelques programmes.
J'aimerais que le ministre nous explique si, en plus des montants de 53 milliards et 1,2 milliard de dollars qui doivent être réservés à toutes ces initiatives, il prévoit l'ajout de nouveaux crédits.
Cela n'était pas très clair lorsque j'ai étudié les crédits. Il y a des cases qui sont libres dans ces nouvelles initiatives du ministre où l'on voit, par exemple, des sommes destinées au fonctionnement. Cependant, on n'a pas encore mis de sommes pour l'investissement dans les enfants et dans les familles. Il n'y a pas de sommes destinées pour les subventions et pour les contributions relatives aux paiements de transfert. On constate qu'il y a des cases libres pour le budget de 2005-2006.
Je suis très inquiète, car on nous a dit que c'est un ministère qui ne coûtera pas vraiment plus cher, que c'était juste pour être plus opérationnel, que cela répondrait mieux aux différentes clientèles. On nous a dit que c'est un transfert de fonctionnaires. On a transféré 12 000 fonctionnaires; il en reste à peu près 11 000 à Ressources humaines Canada.
Vous vouliez donc être beaucoup plus opérationnel et diligent envers toutes les clientèles que vous visez. Vous visez beaucoup de clientèles, monsieur le ministre, à savoir les clientèles de la famille, les enfants et les personnes handicapées. Vous avez donc beaucoup de clients.
Avec 1,5 milliard de dollars, qui est censé être le budget alloué, si 97 p. 100 va au Régime de pensions du Canada et au Programme de la Sécurité de la vieillesse, il ne vous reste pas beaucoup de milliards.
Je prévois à peu près 500 millions de dollars pour le fonctionnement des différentes directions de votre ministère. Il vous reste alors 1,2 milliard de dollars environ. Pensez-vous aller chercher d'autres sommes d'argent? Vous avez un projet ambitieux. Vous voulez aider les aidants naturels. Je constate que le ministre est ici pour vous aider peut-être à répondre à toutes ces questions.
Moi-même et mes adjoints — ils ne sont pas ici ce soir — avons essayé de comprendre les blancs laissés en vrac. Cela ne nous dit pas combien d'argent vous allez injecter dans les collectivités dynamiques, par exemple, combien de subventions et combien de contributions iront aux paiement de transfert. Oui, il y a de grands blancs. C'est la même chose pour l'investissement dans les enfants et les familles.
Aussi, où allez-vous prendre le budget pour les garderies? J'en reparlerai tout à l'heure lors de la deuxième question. Nous devons regarder où vous allez prendre le budget. Avez-vous d'autres nouveaux crédits que vous allez nous annoncer dans les prochains mois?
Dois-je maintenant laisser la parole au ministre? C'est ma première expérience en comité plénier. J'aimerai avoir des réponses.
[Traduction]
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, je ne sais pas exactement par où commencer. La députée a fait énormément d'observations et posé beaucoup de questions.
Pour ce qui est des commentaires faits au début, soit que le gouvernement s'immisce et fait de l'ingérence et tout cela, la députée aurait simplement dû être à Winnipeg, à Regina, à Gander, à Hamilton ou à Halifax lors des annonces concernant les garderies. Les gens qui se trouvaient dans la salle n'ont pas eu le sentiment qu'on s'immisçait dans leurs affaires. Les ministres responsables n'ont pas non plus eu le sentiment qu'on s'immisçait dans leur champ de compétence. Les cinq premiers ministres concernés, et je signale que quatre d'entre eux étaient présents lors des annonces, n'ont pas eu le sentiment qu'on se mêlait de leurs affaires.
Comme je l'ai dit plus tôt dans mon intervention, c'est le reflet de notre compréhension de la notion de fédération et du rôle du gouvernement fédéral. Dans les domaines qui sont considérés comme hautement prioritaires, les secteurs que les Canadiens considèrent importants, il faut trouver une façon d'offrir les services dont le public a besoin. Il arrive souvent que les provinces et les territoires ne soient tout simplement pas en mesure d'offrir, à un moment précis, des services dans certains secteurs prioritaires.
Si l'on remonte à 12 ou 13 mois, on constate qu'aucun changement majeur n'était prévu pour une période de cinq ou dix ans en matière d'éducation préscolaire et de services de garde d'enfants. Il n'allait pas y avoir de tels changements principalement parce que, exception faite du Québec, les provinces et les territoires n'étaient pas en mesure d'apporter ces changements, n'avaient pas l'ambition nécessaire, ou n'en faisaient pas la priorité voulue pour donner le gros coup de pouce nécessaire dans ce secteur afin d'améliorer la situation.
C'est la raison pour laquelle toutes ces initiatives et ces cinq annonces ont entraîné une telle réaction. Si on compare le Budget principal des dépenses de 2005-2006 à celui de 2004-2005, on constate que le total pour 2005-2006 s'élève à 29,4 milliards de dollars, ce qui représente une augmentation nette d'environ 945 millions de dollars par rapport à 2004-2005.
Les principaux changements sont les suivants: une augmentation de 953 millions de dollars dans les programmes de sécurité du revenu, par suite de changements dans le taux moyen des paiements et au sein de la population, compte tenu des données démographiques révisées; une augmentation de 39,3 millions de dollars dans les sommes votées à titre de subventions et contributions, principalement en raison des postes du budget de 2004 qui ont été approuvés dans le Budget supplémentaire des dépenses de 2004-2005; et une augmentation de 19,4 millions de dollars pour les paiements effectués aux agences de recouvrement privées. Ce poste a été transféré à DSC, qui est responsable de la gestion des activités de recouvrement.
Il y a eu une diminution de 44,4 millions de dollars liée aux contributions au régime d'avantages sociaux des employés, par suite d'une diminution des coûts salariaux et du taux de rémunération lié aux avantages, qui est passé de 21,5 p. 100 à 20 p. 100. Il y a aussi eu une diminution de 21,6 millions de dollars dans les dépenses de fonctionnement, par suite de l'attribution à RHDC de services ministériels partagés qui sont fournis par DSC, ainsi que d'autres rajustements d'ordre technique.
J'imagine qu'au delà de ces données, nous pourrions parler de ce que nous faisons. Y a-t-il une question ayant trait à l'éducation préscolaire et aux services de garde d'enfants?
[Français]
Mme Christiane Gagnon: Monsieur le président, 15 minutes m'étaient allouées pour poser des questions. Nous sommes deux partenaires ce soir. Est-ce que je dois céder la parole immédiatement ou ai-je encore quelques minutes pour moi?
Le président: Vous avez seulement deux minutes, et c'est tout.
Mme Christiane Gagnon: Monsieur le président, je sais très bien que les provinces ont accueilli le système de garderies avec joie, comme le dit le ministre. Toutefois, au Québec, c'est une autre situation. Nous ne sommes pas contre le fait que ce système de garderies national puisse voir le jour dans d'autres régions. Cependant, nous avons demandé au ministre du Développement social que, si une province ne veut pas participer au programme parce qu'elle a déjà son propre programme, elle puisse avoir droit de retrait avec pleine compensation. C'est cela, respecter les champs de compétence des provinces. Néanmoins, le ministre s'entête à vouloir négocier avec conditions.
Je ne ferai pas un débat à ce sujet. Cependant, en même temps, j'aimerais dire au ministre que le montant de 5 milliards de dollars qu'il a alloué aux garderies en cinq ans peut paraître très généreux. Toutefois, je voudrais rappeler audit ministre qu'au Québec, depuis l'instauration du programme en 1998, le fédéral a économisé 1 milliard de dollars qui n'a pas été réclamé en déductions de frais d'impôts. Par conséquent, si toutes les provinces contribuent à mettre en place un système de garderies, qui coûte 2 milliards de dollars au gouvernement du Québec, le gouvernement pourrait peut-être lui laisser plus de latitude quant à l'argent que ce gouvernement investira dans les garderies.
J'aimerais donc entendre le ministre en ce qui concerne sa volonté de respecter les champs de compétence des provinces...
Le président: Le ministre du Développement social a la parole.
[Traduction]
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le Président, comme on l'a déjà dit à la Chambre, il suffit de voir le rôle qu'a joué le gouvernement du Québec dans l'apprentissage préscolaire et la garde des enfants pour constater qu'il est clairement en tête de file. Il est clairement un exemple. Je pense qu'il a servi d'inspiration pour l'engagement qui a été pris lors de la dernière campagne électorale.
Tout cela est entendu dans nos discussions avec le gouvernement du Québec. Il est clair que le gouvernement du Québec a beaucoup investi dans l'apprentissage préscolaire et la garde des enfants, beaucoup plus que toute autre province. Le gouvernement du Québec ne sera pas pénalisé pour avoir pris les devants et pour avoir pris des décisions plus ambitieuses que les autres provinces.
M. Tony Martin (Sault Ste. Marie, NPD): Monsieur le Président, c'est un honneur et un plaisir d'avoir l'occasion de m'adresser au ministre à partir du siège qui appartient au chef de l'opposition. D'habitude, je suis assis dans le coin et je n'ai donc pas l'occasion d'être face à face avec le ministre quand je lui pose des questions sur ces sujets de grande importance.
C'est un plaisir d'être ici ce soir aux côtés de mon collègue de Winnipeg-Centre, qui est très passionné, comme le sont tous les néo-démocrates, à propos de certains des programmes dont le ministre du Développement social et ses collègues sont maintenant responsables. Ces programmes aident les gens et leur permettent de vivre la meilleure vie possible. Ils viennent en aide à ceux qui sont mal pris et à ceux qui veulent avoir une chance. Ils aident à répondre aux besoins des gens en matière de soins de santé et aux besoins des familles et des enfants en matière d'éducation. Le ministre et ses collègues doivent tous s'acquitter d'une lourde responsabilité et nous, les néo-démocrates, sommes ici pour les aider à atteindre certains de ces objectifs.
Nous sommes prêts à rester plus tard ce soir parce que nous sommes intéressés et même enthousiasmés par les possibilités qui s'offrent depuis l'adoption du nouveau budget néo-démocrate en deuxième lecture à la Chambre. Le député de Winnipeg-Centre et moi-même avons rencontré nos électeurs respectifs la semaine dernière et nos savons qu'ils sont très enthousiasmés par ce nouveau budget et par les nouveaux engagements de dépenses dans des programmes qui aideront les gens et les collectivités et contribueront à améliorer la qualité de vie de tous.
Je tiens tout d'abord à prévenir le ministre qu'il ne doit pas songer, ne serait-ce qu'un instant, à imiter ce que Mike Harris a fait en Ontario entre 1995 et 2003, car cette expérience a eu des effets dévastateurs, dommageables, destructeurs et déchirants pour les habitants de cette province. Je le sais parce que j'y étais. Pendant huit ans, j'ai lutté contre le programme du gouvernement. Nous étions impuissants, car nous faisions face à un gouvernement majoritaire qui changeait constamment les règles pour faciliter l'exécution de son programme.
Les faits sont maintenant bien connus partout au pays. Il suffit d'évoquer le nom de Walkerton pour comprendre que le ministère de l'Environnement n'avait pas les ressources nécessaires pour envoyer des inspecteurs environnementaux sur place, afin de prévenir ce qui s'est produit.
Nous savons tous ce qui s'est passé à Ipperwash, et comment, du jour au lendemain, l'attitude des gens à l'égard des premières nations a considérablement changé.
L'actuel gouvernement libéral de l'Ontario a beaucoup de mal à joindre les deux bouts et à tenir les promesses qu'il a faites dans sa campagne électorale de 2003. Une fois élu, ce gouvernement s'est rendu compte de la difficulté de la tâche, comme nous l'avions d'ailleurs prévu parce que nous avons nous-mêmes formé le gouvernement entre 1990 et 1995, une période extrêmement difficile, notamment sur le plan économique. Entre 1995 et 2003, notre province a été l'une des plus prospères au pays sur le plan économique. Or, le gouvernement de l'époque, dirigé par Mike Harris, a dilapidé l'argent. Il a accordé tellement d'allégements fiscaux aux sociétés que le gouvernement ontarien n'arrive plus à trouver l'argent nécessaire pour soutenir les gens, les collectivités, l'éducation et les soins de santé.
Partout dans la province, les soins de santé traversent une terrible crise. Les médecins ne sont pas en nombre suffisant, et les hôpitaux s'efforcent, tant bien que mal, d'éviter des fermetures de lits. Pendant les fins de semaine, certaines salles d'urgence restent fermées. Il se passe toutes sortes de choses, des choses que nous n'aurions jamais cru possibles dans une province aussi riche que l'Ontario.
Cela s'est produit parce que le gouvernement a choisi d'accorder la priorité aux allégements fiscaux des grandes sociétés, ce que nous l'avons convaincu de laisser tomber dans ce budget fédéral. Nous l'avons convaincu de ne pas dépenser 4,6 milliards de dollars pour accorder un autre allégement fiscal aux grandes sociétés au détriment des services de garde d'enfants, de l'éducation, de l'environnement, des chômeurs et de l'aide aux pays du tiers monde afin de jouer notre rôle de leader mondial et de faire notre part.
Une fois le budget adopté, nous disposerons d'un fonds pour aider les travailleurs qui se retrouvent démunis parce que leur employeur a fait faillite et qu'ils ne jouissaient pas de la protection salariale et n'ont donc pas été payés. Les personnes âgées et les retraités pourront plus facilement joindre les deux bouts.
Voilà ce que contient le budget fédéral que le ministre aura la responsabilité de mettre en oeuvre. Il disposera de ces fonds. Il fera preuve de leadership et, tant et aussi longtemps qu'il sera ministre, il devra respecter ces engagements.
Les Canadiens attendent avec impatience que le gouvernement adopte le budget afin que le financement des services de garde, de l'éducation, de l'environnement et du logement se concrétise et que nous puissions voir les résultats de ce travail.
Je vais parler brièvement des garderies. Ce n'est rien de nouveau. Nous en avons déjà parlé. Je veux aborder la question de la récupération du supplément de la Prestation fiscale pour enfants. Depuis que cela a commencé, j'ai été horrifié de voir, même lorsque j'étais membre du parlement provincial, que les provinces récupéraient de l'argent des familles les plus à risque et les plus vulnérables, de l'argent qui leur avait été versé par le gouvernement fédéral dans le but de faire baisser le taux honteusement élevé de pauvreté des enfants dans notre pays.
Je veux également parler un petit peu d'une conversation que nous avons eue au comité au sujet des transferts sociaux. Si nous avons du mal à appuyer l'adoption du projet de loi C-22, c'est que nous voudrions que le ministère s'engage à respecter un cadre relié à ce transfert social qui reflète certaines des valeurs dont le ministre a parlé dans son merveilleux discours tout à l'heure, lorsqu'il a précisé ce que le Canada devrait être et comment il devrait appuyer ses citoyens et ses collectivités.
Nous voulons collaborer avec le ministre pour veiller à ce qu'il y ait un cadre de responsabilité et de transparence rattaché à cet argent afin que, lorsque cet argent va aux provinces, nous sachions et les provinces sachent à quoi il est destiné. De cette façon, nous pourrions demander des comptes aux gouvernements fédéral et provinciaux sur la façon dont cet argent est dépensé.
Je voudrais également parler d'une question qui a été soulevée par les conservateurs, soit l'adoption d'une loi sur les personnes handicapées du Canada. C'est une merveilleuse idée et chose certaine, le gouvernement obtiendrait l'appui complet de notre caucus à tout ce qu'il pourrait faire à ce sujet.
Je veux également parler du logement. J'ai eu une rencontre la semaine dernière dans ma circonscription pour parler de quelques-uns des programmes merveilleux qui ont été mis en oeuvre pour faire face à la situation tragique des sans-abri, surtout dans certaines de nos grandes villes. Certains des programmes mis en oeuvre commencent à faire sentir leurs effets, mais ils doivent être renforcés. Il doit y avoir un financement de base et une certaine stabilité dans le système pour aider ces gens qui travaillent si fort en notre nom pour veiller à ce que les sans-abri aient un endroit où dormir le soir et un endroit qu'ils peuvent considérer comme leur maison. Ils ont besoin d'avoir le sentiment qu'ils sont appuyés et qu'ils n'ont pas à consacrer de 50 à 75 p. 100 de leur temps à collecter des fonds. Ils devraient être en mesure de consacrer leurs énergies et leurs efforts, ainsi que l'enthousiasme qu'ils ont pour cette cause à s'occuper des gens qui vivent dans la rue faute d'avoir un endroit où se loger.
Toutes ces questions sont très importantes. On s'y attaque dans une certaine mesure dans le nouveau budget que nous avons adopté à l'étape de la deuxième lecture il y a deux semaines et auquel nous devons faire franchir toutes les étapes à la Chambre rapidement.
Je crois que tout le monde connaît la position des néo-démocrates. Nous souhaitons un programme national de garderies et nous sommes convaincus que la seule façon d'offrir un choix aux parents de notre pays, c'est d'instaurer un tel programme. Pour que les parents puissent décider de rester à la maison ou d'aller travailler, ils doivent, dans les deux cas, savoir que leurs enfants seront pris en charge dans un endroit sûr et que des programmes de qualité, axés sur leur développement, assureront leur croissance et leur apprentissage. Si un tel programme n'est pas disponible dans chaque collectivité canadienne, les parents n'auront aucun choix. Le seul choix qu'ils auront, ce sera de demeurer à la maison. Je ne dis pas que c'est là un mauvais choix à faire. C'est d'ailleurs le choix que ma femme et moi avons fait pour notre famille, parce que nous pouvions nous le permettre et qu'aucune autre possibilité ne s'offrait à nous à ce moment-là.
Comme l'a dit aujourd'hui le ministre, un plus grand nombre de parents font ce même choix de nos jours. Étant donné la situation économique ainsi que l'éducation et la formation dont bénéficient particulièrement les femmes de nos jours et vu ce qu'elles ont à offrir à la société, nous devons procurer de tels choix, à mon avis.
L'argument que je ferais valoir, c'est que, si les parents de chaque collectivité à travers le Canada doivent pouvoir choisir entre demeurer à la maison et se rendre au travail, nous devons mettre en place et financer un programme national de garderies abordable et de qualité. Nous croyons en un programme national de garderies fondé sur les principes QUAD. Je vais mentionner ce que nous ne voulons pas. Selon nous, ce programme doit être assuré par des organismes sans but lucratif, et nous devrons revenir là-dessus. En fait, ce sera l'objet de ma question, si le ministre veut bien y réfléchir un peu. Sur quelles recherches se fonde-t-il pour prétendre que nous obtiendrons la même qualité, que les garderies soient à but lucratif ou sans but lucratif? S'il recherche la qualité, il obtiendra de la qualité.
Les recherches dont nous disposons ont été réalisées par des gens qui oeuvrent dans le milieu des garderies; ils soutiennent fermement que, si nous n'optons pas pour le modèle de garderies sans but lucratif, nous n'obtiendrons pas la qualité. Il a été établi, non seulement par des recherches, mais aussi par les expériences vécues un peu partout dans le monde, que si un régime à but lucratif est mis en place, invariablement, de grandes garderies s'implantent et finissent par dominer le secteur.
Ce qui arrive, c'est que ces institutions trouvent des façons d'économiser pour augmenter leurs profits en réduisant les salaires, en diminuant le budget alimentaire ou en transformant les travailleurs en garderie en concierges le soir après leur journée d'enseignement. Si nous n'investissons pas dans l'équipement, les jouets et les installations nécessaires, nous aurons des garderies de piètre qualité.
Nous croyons que le système de garderies devrait être à but non lucratif. Nous croyons aussi que le ministre devrait collaborer avec nous pour élaborer une loi fédérale qui veillerait à ce que les provinces offrent un programme de garderies de qualité à l'échelle nationale et que l'argent qu'elles reçoivent sera dépensé. L'Ontario est un autre exemple. Le gouvernement fédéral a versé des fonds pour des garderies en Ontario ces trois ou quatre dernières années aux termes des ententes signées par les premiers ministres sur les garderies et cet argent n'a pas été dépensé.
La même chose est arrivée en Colombie-Britannique. En fait, la Colombie-Britannique a retiré les fonds qu'elle devait investir pour les remplacer par les montants versés par le gouvernement fédéral. Le financement du fédéral était inférieur aux sommes que la Colombie-Britannique a retirées.
À notre avis, il doit y avoir un mécanisme fédéral pour veiller à ce que les fonds versés, qui représentent un montant considérable, surtout si nous nous dirigeons vers 1 p. 100 du PNB, soient vraiment affectés aux garderies et que le gouvernement continue d'aider les provinces après cinq ans pour assurer la croissance du système et que les provinces ne seront pas laissées en plan, pour ainsi dire, comme cela s'est déjà produit. Les provinces ont des préoccupations à cet égard.
Nous avons besoin d'une loi qui traiterait de cela, de la prestation des services par des établissements à but non lucratif, de la qualité et des principes QUAD. J'aimerais collaborer avec le ministre à ce sujet.
Le temps me manque, je poserai donc ma question. Sur quelles recherches vous basez-vous pour soutenir votre décision d'autoriser des garderies à but lucratif ou à but non lucratif? Ce faisant, pourquoi êtes-vous si convaincu que vous obtiendrez la qualité que vous estimez possible?
Le président: D'une certaine façon, nous sommes plutôt décontractés ce soir, mais nous encourageons tout de même les députés à adresser leurs commentaires par l'intermédiaire de la présidence et à s'abstenir de poser des questions directes comme « Qu'allez-vous faire? ». Ils devraient plutôt poser des questions dans le style de « Qu'est-ce que le ministre prévoit faire? ».
Nous donnerons au ministre une minute pour répondre à la question et nous verrons comment il s'en accommode.
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, en ce qui concerne les recherches, disons d'abord qu'elles nous indiquent que toutes les provinces et tous les territoires comptent sur des garderies à but lucratif et sans but lucratif. Dans tous les pays d'Europe occidentale, qui sont, comme nous le savons, des systèmes beaucoup plus évolués, les deux options sont disponibles. Le député a raison. Des études montrent qu'il y a une certaine différence de qualité entre les garderies à but lucratif et les garderies sans but lucratif. D'autres montrent que les garderies à but non lucratif sont plus performantes que celles sans but lucratif.
Entre autres mesures, nous suivrons de près toutes nos initiatives. Nous disposons de 100 millions de dollars pour mettre sur pied un programme de reddition de comptes. Des plans d'action et des renseignements seront exigés des provinces et des territoires. Nous surveillerons très attentivement les provinces et les territoires pour voir comment ils se débrouillent. Nous serons attentifs afin de déterminer qui a les meilleurs ou les pires mécanismes de prestation.
M. Michael Savage (Dartmouth—Cole Harbour, Lib.): Monsieur le président, je suis heureux de participer au débat de ce soir. Je partagerai mon temps avec le ministre d'État responsable de la Famille et des Aidants naturels et j'aurai une question à lui poser lorsque j'aurai eu la chance de faire quelques observations. Je le considère vraiment comme le défenseur de certains des êtres les plus vulnérables de notre société.
Je veux parler d'une question qui me tient particulièrement à coeur. C'est celle des aidants naturels. L'entraide est une valeur chère aux Canadiens. Partout dans notre pays, les Canadiens s'occupent de leurs parents et amis et ils le font plus que jamais auparavant. Pour certains, les responsabilités sont raisonnables, mais pour d'autres, les exigences sont accablantes.
S'occuper de quelqu'un pendant longtemps peut être une expérience très intense. Les coûts personnels et sociétaux peuvent être très élevés. Le gouvernement a un rôle à jouer pour soutenir les aidants naturels non rémunérés et les aider à dispenser leurs soins de manière à ce que ceux dont ils s'occupent aient une bonne qualité de vie et à ce qu'eux puissent dispenser leurs soins sans risquer de compromettre grandement leur santé physique et leur situation financière.
De plus, en offrant un soutien aux aidants naturels, les gouvernements atténuent les pressions exercées sur nos systèmes officiels de soins de santé et de services sociaux. Plus de 2,8 millions de Canadiens dispensent des soins à des aînés, à des adultes et des enfants handicapés et à des Canadiens qui ont des problèmes de santé à court ou à long terme.
En matière de prestation de soins, les situations varient selon l'identité de l'aidant naturel, le lieu, le type de besoin, le niveau de revenu, le soutien familial, le contexte culturel et divers autres facteurs.
Permettez-moi de parler de ma propre expérience et de rattacher la question à mon propre contexte. J'ai vécu l'une des expériences les plus marquantes de ma vie lorsque mes six frères et soeurs et moi-même avons eu à prodiguer des soins à nos parents qui étaient mourants, de manière à ce qu'ils puissent mourir à la maison. Mon père avait un cancer de l'estomac et ma mère un cancer de l'intestin. De Noël 2002 jusqu'à la mort de ma mère le 31 mars et celle de mon père le 13 mai, mes deux soeurs, Shelagh et Brigid, ont laissé leur emploi à Toronto et sont venues habiter la maison familiale en Nouvelle-Écosse.
Elles étaient les principales pourvoyeuses de soins et, sous leur direction, nous avons tous prodigué des soins à notre père et à notre mère. Nous nous sommes relayés. Nous nous réunissions en famille, souvent trois fois par jour, pour prier avec mes parents, leur donner leurs médicaments, les soulager et faire tout ce qu'il y avait à faire.
C'était évidemment une période triste pour la famille, mais elle a aussi été enrichissante à divers égards. Nous avons approfondi notre foi et nous nous sommes rapprochés, comme famille. Personne d'entre nous ne pourrait dire que l'expérience d'accompagner dans la mort les parents qui nous avaient tant donné ne l'a pas enrichi. Nous n'avons jamais regretté d'y être. Nous n'avons jamais regretté d'avoir eu l'occasion d'être généreux pour des parents qui l'avaient tant été à notre égard.
Ce fut une période difficile pour nous, mais nous étions privilégiés. Notre famille n'était pas riche, mais nous avions suffisamment d'argent. Nous étions sept à nous relayer, quoique mes soeurs Shelagh et Brigid aient assumé le gros de la charge. Nous nous sommes tous relayés et cela a grandement facilité les choses.
Tout cela a duré peu de temps. Je me rappelle très bien qu'après la mort de ma mère, mon père m'a dit: « Je vais aller à l'hôpital, où on prendra soin de moi, et vous, les enfants, vous allez reprendre votre vie normale. » Il a déclaré que c'était ce qu'il voulait, mais nous savions que c'était faux. Nous savions que, au fond, il faisait son entêté comme à l'habitude. Il désirait que nous le convainquions que nous voulions nous occuper de lui, ce que nous avons fait. Et nous avons pris soin de lui. Je me souviens du jour où il nous a dit qu'il nous laisserait nous occuper de lui. Il a affirmé qu'il acceptait uniquement parce qu'il savait qu'il ne vivrait plus très longtemps. Il voulait que nous vivions nos vies.
Ce fut une courte période et nous avions les ressources nécessaires, en plus d'avoir des employeurs qui comprenaient notre situation. Chacun d'entre nous travaillait pour une entreprise compréhensive ou avait des partenaires qui lui accordaient le temps voulu. Nous avons également pu compter sur le soutien de personnes comme Jack McNeil, un bon ami de la famille et un diacre de l'Église catholique, qui a été un guide spirituel.
La plupart des gens ne sont pas aussi chanceux. Ce qui a été pour nous une expérience triste, mais enrichissante, se révèle une expérience très stressante pour de nombreux Canadiens qui n'ont pas le niveau de revenu nécessaire pour s'absenter du travail et prendre soin de leurs proches, qu'il s'agisse d'adultes — un conjoint ou un parent — ou d'enfants autistes ou présentant d'autres difficultés. Ces Canadiens vivent des moments stressants et le gouvernement du Canada doit les aider à traverser ces moments.
C'est difficile. Cela ne fait aucun doute. Les efforts que doivent consentir les aidants diminuent leur capacité de fournir des soins de qualité. Si, en tant que gouvernement, nous n'accordons pas de soutien aux aidants, cela pourrait avoir des effets néfastes non seulement sur la qualité de vie des personnes à qui des soins sont fournis, mais encore sur celle des gens qui fournissent les soins. Prendre soin de quelqu'un entraîne des coûts pour les aidants, les employeurs et la société. Les aidants peuvent perdre des revenus et avoir plus de petites dépenses. Les employeurs pourraient devoir engager des frais pour permettre à des employés de prendre soin de quelqu'un.
Je voudrais dire quelques mots sur le ministre. J'ai eu la chance de passer pas mal de temps avec lui. Il a pris le temps de venir en Nouvelle-Écosse, et de visiter d'autres régions du pays, de discuter avec des aidants parce que ces derniers ont tendance à être les grands oubliés de notre société.
En Nouvelle-Écosse, je me suis un peu occupé de l'organisme Caregivers Nova Scotia en raison de mon expérience personnelle, et j'ai eu l'occasion de rencontrer nombre de gens dont le fardeau est quasiment inimaginable.
Le ministre était avec moi à Halifax le mois dernier comme conférencier invité de Caregivers Nova Scotia. Une des personnes à qui il était rendu hommage ce soir-là était une personne dont le conjoint, si je ne m'abuse, se mourait du cancer et qui avait un enfant autistique et trisomique. Comment des gens peuvent-ils vivre dans pareilles conditions? Comment des gens qui ne gagnent pas beaucoup d'argent peuvent-ils s'en sortir lorsqu'ils sont aux prises avec de tels problèmes?
Si nous sommes tous entrés en politique, c'est pour venir en aide aux gens qui ont besoin d'aide, pas à ceux qui n'en ont pas besoin. Quand des gens font quelque chose pour soutenir des proches qu'ils aiment, ce qui enlève tout un poids au système, il n'y a pas de cause plus noble que puisse appuyer le gouvernement.
Je sais que le ministre a consacré beaucoup de temps à cela. Je l'en remercie, à l'instar des gens de Caregivers Nova Scotia et d'autres Canadiens d'un bout à l'autre du pays. Le ministre pourrait peut-être nous parler de ce que fait le gouvernement pour soutenir les aidants qui consacrent autant de temps et d'énergie à leurs proches et à leurs amis.
L'hon. Tony Ianno (ministre d'État (Famille et Aidants naturels), Lib.): Monsieur le président, je voudrais d'abord remercier le député de Dartmouth--Cole Harbour et l'assurer de mon appui. La compassion est évidente, de même que la compréhension du problème qui se pose concernant les aidants, ces héros méconnus de notre société.
Je me suis entretenu avec de nombreux députés. Je sais que nombre d'entre eux vivent des circonstances personnelles depuis un bon moment. Certains ont plus de chance que d'autres, mais plusieurs n'en ont pas autant.
Comme société et comme gouvernement, nous nous devons d'unir nos efforts à ceux de tous les intervenants et de tous les ordres de gouvernement afin de trouver des moyens de venir en aide aux personnes vieillissantes, aux personnes handicapées et à leurs familles qui se dévouent volontiers pour elles et ce, avec amour et compassion. Nous devons veiller à aider les trois millions de personnes qui se dévouent gratuitement et à trouver des possibilités économiques permettant d'aider ces familles, surtout dans des circonstances particulières ou lorsque ces personnes vieillissent et que le conjoint, un voisin ou un ami a besoin d'aide et qu'ils sont là pour les soutenir, que ce soit pour faire l'épicerie, tondre le gazon, l'accompagner chez le médecin ou répondre à quelque besoin que ce soit.
Avec tous les ordres de gouvernement, nous devons trouver des moyens d'aider ces gens. Sans eux, le Canada serait plongé dans de graves difficultés, car tout l'argent que nous injectons dans les services de santé serait loin de permettre d'offrir le type d'existence que nous souhaitons pour ceux qui nous sont chers.
Dans le budget, nous avons d'abord porté le crédit d'impôt pour frais médicaux de 5 000 $ à 10 000 $. C'est un premier pas.
Au cours des tables rondes que nous avons eues dans le Canada atlantique, dans les Prairies et en Ontario — et il y en aura une en Colombie-Britannique —, ce que nous ont dit tous les intéressés, tous ceux qui offrent des soins dans notre société, c'est que, parfois, une personne seule se sent dépassée. Leur message, c'est que la société a une certaine responsabilité, que nous devons tous faire notre part, donner un coup de main, être là, aider financièrement, rendre un petit service ou simplement écouter avec compassion. Je crois que nous pouvons le faire. Nous constatons au cours de ces discussions que chacun a une opinion différente selon sa situation personnelle. Il n'y a pas de solution passe-partout.
Que se passe-t-il le premier jour où on se retrouve avec un proche qui a besoin d'attention? Que fait-on? Voilà le genre de question que nous nous posons en essayant de trouver quelle doit être la première étape. Avec notre programme électoral d'un milliard de dollars sur cinq ans et avec la collaboration des provinces et des groupes intéressés, que pouvons-nous faire pour aider à combler le vide, pour atténuer les premières difficultés? Vers qui ceux qui ont besoin d'aide se tournent-ils?
Comme nous le savons tous, tous les ordres de gouvernement travaillent souvent chacun de leur côté. Le premier jour, à qui faut-il s'adresser? Nous espérons trouver une solution à certains de ces problèmes en travaillant avec tout le monde à notre table ronde nationale de septembre et en demandant au comité de voir en priorité où les députés peuvent collaborer avec le gouvernement, avec nous. Nous ne demandons pas aux députés d'attendre que nous nous présentions avec les réponses. Nous leur demandons de travailler ensemble parce qu'il n'y a pas de réponse unique.
J'espérais que le comité puisse faire une partie de ce travail dans ses déplacements au Canada et ses rencontres avec tous les intéressés et les ministres provinciaux responsables. Je crois que c'est un début. C'est un peu comme pour l'éducation préscolaire et les garderies: il faut commencer quelque part.
Il existe effectivement des mesures fiscales qui s'appliquent aux personnes handicapées, ces 25 points prévus au budget pour tenir compte des désirs du comité. Nous poussons toujours notre programme vers l'avant parce que 40 p. 100 des Canadiens âgés sont handicapés et que, quelle que soit notre situation aujourd'hui, nous pouvons tous être touchés.
J'ai assisté à une activité de financement, un rassemblement pour la sclérose en plaques sur Bay Street, et j'ai eu l'occasion de dire quelques mots. J'ai dit, très brièvement, que tous les participants pouvaient en rentrant à la maison le soir se transformer en aidants, avec tout ce que cela peut comporter. Il est important que nous travaillions en collaboration, que nous aidions les autres et que nous collaborions de toutes les façons possibles, de manière individuelle et collective. Ensemble, nous pouvons résoudre certains des problèmes auxquels les aidants doivent faire face.
La population canadienne vieillit. Les Canadiens vivent plus longtemps et en meilleure santé. Toutefois, le gouvernement devra également assumer sa part de responsabilités dans ce processus.
Il y a plusieurs questions sur lesquelles le comité devra se pencher pour améliorer le sort de ces gens. C'est une question qui m'emballe parce qu'elle transcende les clivages de parti. Je peux en discuter avec tous mes collègues, comme je l'ai fait par le passé. Je sais que tous les députés s'intéressent à la question autant que nous. Je les exhorte à y consacrer un peu d'énergie pour que nous puissions trouver des solutions aux divers problèmes quand nous parcourrons le pays pour tenter de faire avancer les choses. Certains députés ont vécu des expériences pertinentes dans ce domaine et ils savent mieux que d'autres comment résoudre certains de ces problèmes.
Mme Rona Ambrose (Edmonton—Spruce Grove, PCC): Monsieur le président, je partagerai mon temps avec le député de Haliburton—Kawartha Lakes—Brock.
Je remercie le ministre du Développement social, le ministre d'État à la Famille et aux Aidants naturels, ainsi que leurs représentants qui restent ici tard ce soir pour répondre à nos questions sur des enjeux que les Canadiens ont à coeur et qui comptent pour beaucoup dans le tissu social de notre pays. J'exprimerai mon point de vue personnel et celui de mon groupe de pairs, car c'est la contribution légitime que je peux apporter sur ces questions.
J'aimerais d'abord exprimer mon point de vue sur la politique. Le ministre d'État a dit qu'il aimerait nous voir aborder ce domaine de façon non partisane. Je crois sincèrement que la garde d'enfants et les choix offerts à cet égard auront une incidence énorme non seulement pour mon sexe, mais pour mon groupe d'âge. Honnêtement, je tiens à ce que le ministre du Développement social sache ce que mes pairs ont connu et ce qu'ils ont à dire, à savoir que nous sommes loin des années 60.
Le groupe social auquel j'appartiens est composé de femmes jeunes et bien scolarisées qui habitent en ville et travaillent comme professionnelles. Nous nous montrons tout à fait à la hauteur dans les facultés de médecine, d'art dentaire et de droit ainsi que dans les autres établissements où sont formés des professionnels. Nous nous montrons également à la hauteur sur le marché du travail. Et je me permets de dire aussi que nous nous montrons à la hauteur sur la scène politique.
Néanmoins, lorsque nous avons des enfants, nous voulons être traitées également, que nous choisissions de rester à la maison, de travailler à temps partiel ou de travailler à temps plein et d'avoir recours à des services de garde. Nous voulons avoir tous ces choix. Les femmes de ma génération veulent que le gouvernement les aide quel que soit leur choix, plutôt que de les forcer à faire un choix plutôt qu'un autre.
J'ai remarqué notamment dans le rapport sur les plans et les priorités cité par le ministre du Développement social que le gouvernement du Canada prévoit dépenser 100 millions de dollars pour appliquer un train de mesures de responsabilisation censées faciliter la recherche et la mise au point d'indicateurs fondés sur les preuves. Le ministre du Développement social pourrait-il dire à la Chambre si une partie de l'argent sera consacrée à une analyse des services de garde d'enfants tenant compte des besoins des parents selon leur sexe et selon leurs revenus, de manière à ce que les femmes, et en particulier les femmes de mon groupe social, puissent trouver leur compte dans ce programme, en toute équité.
J'ai beaucoup étudié à l'université les théories féministes et l'analyse comparative des sexes. Je crains que ce programme ne soit une source de discrimination envers les jeunes femmes qui sont sur le marché du travail, mais qui aimeraient rester chez elles à temps partiel ou à temps plein avec leurs enfants. C'est un programme discriminatoire envers les femmes qui ont des emplois mal rémunérés et qui travaillent souvent par quart. C'est aussi une forme de discrimination envers les femmes qui habitent dans les régions rurales et les régions éloignées.
Le ministre du Développement social a-t-il fait une analyse comparative des sexes? Pourrait-il m'en donner les résultats ce soir?
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, pour ce qui est de la responsabilité, les détails de la stratégie n'ont pas encore été arrêtés avec les provinces et les territoires. Cela dit, il y a une bonne base de collaboration dans ce secteur. Par exemple, des travaux sont en train d'être menés par le comité fédéral-provincial-territorial sur le développement des jeunes enfants, les connaissances, l'information et les pratiques efficaces, ainsi que par les directeurs provinciaux et territoriaux responsables de l'éducation et de l'accueil des jeunes enfants.
En résumé, nous sommes encore en train de définir les points précis sur lesquels il faudra se pencher.
La députée a parlé de choix. Chaque programme, chaque politique que l'on met en oeuvre implique un choix. Il n'y a pas de programme qui ne soit le résultat d'un choix. Le programme des soins de santé ne traite pas de tout, l'éducation non plus et il en est de même pour l'éducation préscolaire et la garde d'enfants. Ce n'était pas censé être le cas, ce ne l'est pas et ce ne le sera pas.
La question que nous nous posons tous est la suivante: qu'est-ce que le parti de la députée va offrir en matière de choix? Les seules propositions concrètes formulées par son parti datent de la dernière campagne électorale. On faisait mention d'une économie d'impôt de 2 000 $. Cette mesure coûterait environ 2 milliards de dollars et son incidence au niveau de la garde d'enfants serait minime. C'est une question de choix. La députée peut faire ce choix. Toutefois, cela reste un choix, comme c'est le cas pour toutes ces mesures.
Mme Rona Ambrose: Monsieur le président, le gouvernement a choisi de mettre en oeuvre un programme qui est restrictif et n'offre qu'une possibilité. Toutefois, de notre côté de la Chambre, nous avons dit que nous voulons un programme équitable. Nous sommes en faveur de garderies officielles, mais nous sommes aussi en faveur de garderies informelles, de garderies à la maison. Nous reconnaissons le droit d'un parent de demeurer à la maison à temps partiel s'il le souhaite. Voilà ce que nous entendons par choix réel. Nous voulons savoir si le gouvernement va accompagner financièrement tous les choix, et pas seulement un.
La discrimination fondée sur le sexe est un problème grave. J'espère que le ministre pourra prendre dès ce soir l'engagement de réaliser une analyse, différenciée selon les sexes, du programme qu'il a doté de 100 millions de dollars. Je crois qu'il constatera que certaines femmes passeront à travers les mailles du filet, qu'elles n'auront pas accès. Cela m'amène à une autre question au sujet de l'universalité.
Ce que je déplore, c'est que ce programme ne soit pas universel. Le ministre a pris un engagement et il a affirmé qu'il respecte l'universalité. Toutefois, je ne vois pas comment il peut soutenir qu'un programme est universel s'il n'est pas accessible à tous. S'il s'est engagé envers les quatre principes QUAD, je veux savoir lequel de ces principes est le plus important? Lesquels vous engagerez-vous à suivre sur la durée et est-ce que vous vous engagerez à effectuer une analyse de ce programme différenciée selon les sexes?
Le président: Juste un rappel; je demande à nouveau aux députés de bien vouloir s'adresser à la présidence et d'appeler un député par le nom de sa circonscription ou, en l'occurence, par son titre. Le ministre du Développement social a la parole.
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, pour enchaîner avec la réponse que j'ai donnée précédemment à la députée, nous comptons élaborer une analyse comparative entre les sexes.
En ce qui concerne l'universalité et les principes qui sont les plus importants, on ne peut pas avoir des principes QUAD et décider que Q et A sont plus importantes que U et D. On a des principes QUAD, à savoir qualité, universalité, accessibilité et développemental. Tout cela fait partie d'un système efficace et ambitieux. C'est ce qu'on veut dans les secteurs de la santé, de l'éducation, de l'apprentissage et de la garde des jeunes enfants. Nous avons besoin de tous ces aspects pour offrir les autres. Nous avons besoin de qualité pour offrir un système. Personne ne s'intéresse particulièrement à un système entièrement médiocre. Personne ne s'intéresse à un système qui n'est ni développemental ni accessible. Tous ces aspects sont indissociables.
M. Barry Devolin (Haliburton—Kawartha Lakes—Brock, PCC): Monsieur le président, je voudrais poursuivre dans la même ligne de pensée. J'ai entendu le ministre dire à de nombreuses occasions que ce programme sera accessible à tous, un peu comme l'éducation publique. Si je peux donner l'exemple de l'Ontario, ma province d'origine et celle du ministre, nous constatons actuellement que le gouvernement ontarien se prépare à offrir des possibilités d'apprentissage et de garde d'enfants dans le système des écoles élémentaires. Après la prématernelle et la maternelle, il implante des garderies dans les écoles.
L'universalité veut dire qu'un service peut théoriquement être offert à tous. Donc, s'il est offert dans une école, il est universel. Or, les gens qui décident de ne pas l'utiliser doivent tout de même le payer. Les parents qui demeurent à la maison pourraient choisir de ne pas l'utiliser. Ils en paieraient essentiellement le coût deux fois, une fois par leurs impôts, pour payer le programme offert à tous les autres participants, et une autre fois par la perte de revenus, si un des parents décide de rester à la maison.
Ce que je crains, c'est qu'il y ait en Ontario un programme aligné sur le système scolaire, c'est-à-dire qui fonctionne de 9 heures à 15 ou 16 heures, du lundi au vendredi, mais pas l'été. Dans ma circonscription, en région rurale, il y a beaucoup de travailleurs du secteur de la vente au détail qui travaillent en soirée, la fin de semaine et l'été. Je crois que ceux qui accordent autant d'attention aux garderies qu'à l'enseignement préscolaire craignent que le système qui semble se dessiner en Ontario sera discriminatoire envers eux.
Le système sera bien adapté aux professionnels qui travaillent de 9 heures à 16 heures, du lundi au vendredi, mais il ne conviendra pas aussi bien à ceux qui travaillent par quarts ou à des heures irrégulières.
Ce que l'on semble vouloir implanter en Ontario n'est pas un système universel. Les services ne seront pas accessibles à tous et, ironiquement, ils seront discriminatoires envers les gens qui gagnent le moins cher parce qu'ils travaillent à des heures irrégulières. Ces gens ont l'impression que le système ne sera pas adapté à leurs besoins. Qui plus est, ils paieront en partie ce système par leurs impôts.
C'est pourquoi nous disons que, si l'aide financière est versée aux parents et que ceux-ci ont des options, y compris des soins professionnels à temps plein, tous les parents sans exception obtiendront une aide financière pour payer des garderies pour leurs enfants.
J'aimerais que le ministre commente cette position.
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, en Ontario, le programme vient compléter les programmes de prématernelle et de maternelle. Il ne fait pas partie du système scolaire. Les services sont offerts à l'école, mais ils ne relèvent pas de l'école.
Pour ce qui est de l'horaire dont le député a parlé, soit de 9 heures à 15 heures, cela ne correspond pas nécessairement aux heures où les services d'éducation préscolaire et de garde d'enfants sont offerts à l'école.
Comme je l'ai déjà dit au député et à d'autres, c'est un système qui est en pleine évolution. Il est difficile de savoir exactement qui sera le principal fournisseur des services.
Le député de Sault Ste. Marie craint les garderies de type industriel. Le député de Haliburton—Kawartha Lakes—Brock craint que le système scolaire ne s'empare des services de garde et ne les rende moins flexibles pour répondre aux besoins particuliers.
Nous devons nous assurer que cela ne se produira pas. Encore une fois, dans le cas de l'Ontario, les services sont offerts en milieu scolaire, mais ils ne sont pas structurés de la même façon que l'école. Je crois que les écoles deviendront de plus en plus actives à cet égard à l'avenir parce qu'elles sont au centre d'une collectivité. Ils sont une présence importante dans les petites villes. Elles permettent d'offrir ces services, qui pourraient être difficile à offrir autrement.
M. Barry Devolin: Monsieur le président, le ministre a dit à maintes reprises que c'est la première d'un grand nombre d'étapes. Je me suis servi du modèle et des chiffres du Québec pour déterminer combien de places sont offertes dans cette province, et j'ai fait une extrapolation de cette structure de coûts à l'échelle du Canada. La mise en oeuvre à l'échelle nationale d'un tel programme pour tous les enfants coûterait plus de 10 milliards de dollars par année.
Le gouvernement fédéral parle de 1 milliard de dollars par année, ce qui m'amène à m'interroger sur la provenance des 9 milliards de dollars qui restent? Si j'étais un représentant provincial ou municipal, je trouverais très inquiétant que le gouvernement fédéral s'apprête à lancer pareil projet en grande pompe et j'aurais peur de finir par payer une bonne partie de la note.
L'Ontario a des centres de la petite enfance qui encouragent les parents à y amener leurs enfants. Les enfants et les parents peuvent bénéficier d'excellentes possibilités d'apprentissage. De nombreux parents qui restent à la maison pour s'occuper de leurs enfants fréquentent régulièrement ces centres, y compris ma femme et nos enfants. Il semblerait que le gouvernement de l'Ontario soit en train de tourner le dos aux centres de la petite enfance. Il les affame et transfère les fonds dans le réseau scolaire. Je constate qu'il peut y avoir des divergences de vues à cet égard.
J'aimerais savoir si le ministre appuie le programme des centres de la petite enfance en Ontario? Croit-il que ces centres font un travail valable pour les parents qui restent à la maison? Dans ses négociations avec l'Ontario, s'assurera-t-il que les centres de la petite enfance disposent d'un soutien suffisant?
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, nous soutenons déjà indirectement ces centres. Ceux-ci font du bon travail.
Comme je le disais plus tôt, au chapitre des services à l'intention des parents et des enfants, une foule de services différents sont nécessaires. Ces centres répondent à un besoin et ils font du bon travail. Je ne serais pas surpris que, d'ici cinq à dix ans, beaucoup de garderies incorporent une telle composante, qui en fera partie presque naturellement.
L'un des grands avantages que présente une garderie est le fait qu'un bambin de trois ans ne peut pas s'y rendre par ses propres moyens; il faut que ses parents l'y conduise. Cela donne l'occasion aux parents d'entrer dans la garderie avec l'enfant, ce qui ne se fait pas aussi couramment à l'école élémentaire ou secondaire.
Une fois à l'intérieur de la garderie, ils sont à même de voir ce qui s'y passe. Ils peuvent rencontrer d'autres parents, parler avec eux et parler avec les gens sur place. Ils peuvent apprendre. Ils peuvent mettre à profit un incident pour tirer des leçons fort utiles et importantes. C'est l'essence de l'évolution naturelle.
L'hon. Eleni Bakopanos (secrétaire parlementaire du ministre du Développement social (économie sociale), Lib.): Monsieur le président, je change un peu de sujet, mais j'aborde tout de même une question étroitement liée à notre ministère. Je parle des collectivités, des gens. Je veux parler d'un dossier que j'ai eu le privilège de diriger au gouvernement fédéral.
[Français]
C'est un dossier nouveau pour le gouvernement fédéral, mais pas pour les élus du Québec. De fait, l'économie sociale est en place au Québec depuis 20 ans. Néanmoins, à l'échelle internationale, ce mouvement est connu depuis 1800 en Italie. C'est un mouvement de coopération et de collaboration entre les êtres humains et les communautés.
Je suis très ravie que le gouvernement fédéral ait décidé de se pencher sur la question et d'essayer de donner aux communautés les moyens et les ressources nécessaires pour qu'elles prennent soin de leurs propres citoyens et de leurs propres besoins.
[Traduction]
Pour moi, l'économie sociale est un mouvement. Ce n'est pas un programme. C'est un mouvement dirigé par les citoyens et la collectivité. De mon point de vue et du point de vue du ministère, le rôle du gouvernement est fondamental dans l'établissement de ce cadre. Comment fournir les outils nécessaires aux citoyens, comment mettre des outils à la disposition des défavorisés et comment fournir les outils et les ressources pour que les Canadiens soient en mesure d'améliorer leur qualité de vie et celle de leur collectivité?
Lorsque j'ai été nommée secrétaire parlementaire, j'ai eu le privilège de rendre visite, un peu partout au Canada, à diverses organisations non gouvernementales qui donnent du travail et d'autres outils aux citoyens. Je me suis sentie privilégiée de voir comment des hommes et des femmes de toutes les couches de la société prennent en main leur avenir et celui de leur collectivité. En tant que gouvernement, nous aimerions les habiliter à le faire et leur fournir les outils nécessaires.
Je songe entre autres à une organisation qui ne se trouve pas très loin d'ici. Il s'agit plus précisément du programme Good Day Workshop qui a cours ici même à Ottawa. Ce programme d'approche sans but lucratif offre un service de remise à neuf de meubles. Il emploie des gens ayant des besoins particuliers notamment à cause de certaines dépendances, de problèmes de santé mentale, de sans-abrisme et de chômage. Les participants à ce genre d'entreprise sociale ont beaucoup à gagner parce qu'ils acquièrent de nouvelles compétences et qu'ils ont un emploi protégé, un revenu commun limité et l'appui de leurs pairs.
[Français]
Également, dans mon comté de Ahuntsic, il y a un organisme qui s'appelle Amrac. Comme dans l'exemple que j'ai déjà mentionné, il y a des citoyens qui apprennent la restauration et la fabrication de meubles à l'Atelier de meubles recyclés Ahuntsic-Cartierville, et ces meubles sont vendus à une population démunie, qui paie un prix modique et non pas le prix du marché. Donc, ils investissent dans un programme de formation pour les sans-emploi et dans l'achat d'équipements.
La différence entre une entreprise privée et une entreprise sociale, c'est que les profits générés par l'entreprise sociale retournent à cet organisme de façon à donner encore plus de chances à ceux qui sont sans emploi, aux démunis, d'avoir quelques ressources, d'avoir un emploi et de faire une contribution dans la société.
[Traduction]
Une des meilleures définitions de l'économie sociale que j'ai jamais entendue est: comment pouvons-nous faire en sorte que les groupes désavantagés cessent d'être dépendants du gouvernement et de l'État? Comment pouvons-nous faire d'eux des membres productifs de la société? Je crois que le rôle de notre ministère et de ses différents programmes est de rendre les gens moins dépendants en leur donnant les moyens et les ressources dont ils ont besoin pour devenir des membres productifs de notre société.
[Français]
À titre de secrétaire parlementaire, j'ai eu le plaisir de visiter un magasin à un dollar à Halifax qui est affilié aux hôpitaux de la Nouvelle-Écosse. On y embauche et on y forme des personnes handicapées en vue de leur permettre d'accéder au marché du travail, tout en vendant des biens à un prix abordable aux résidents locaux. J'étais là quand des résidents sont entrés dans ce magasin. On voit que ceux qui y travaillent sont fiers d'avoir un emploi et de faire quelque chose d'utile pour la société. C'est cela qu'on veut donner.
À Vancouver, à l'autre bout du pays, j'ai aussi visité le Café Potluck. Je crois qu'une de mes collègues le connaît très bien car tous les gens qui vivent à Vancouver connaissent ce café. Il est situé dans le centre-ville et il ressemble à un café branché habituel. Cependant, on y sert des repas gratuits, ou à un coût moindre, aux gens dans le besoin. Le café est subventionné par des revenus générés par sa propre entreprise de traiteur haut de gamme, qui embauche et forme des gens du quartier.
[Traduction]
Le secteur à but non lucratif du Canada est un des plus dynamiques du monde. Environ 10 000 entreprises et organismes emploient quelque 100 000 personnes partout au Canada. Ces entreprises et organismes fournissent un large éventail de services, que ce soit sur le plan de la santé, de l'éducation, de l'emploi, des services sociaux, du développement communautaire, des arts, de la culture, de la religion, des sports, des activités récréatives et de l'environnement.
Ces organismes jouent un rôle central dans la vie des Canadiens et je tiens à ce que nous remercions tous les bénévoles qui font don de leur temps, de leur talent et de leur énergie pour améliorer la qualité de vie de leurs concitoyens. C'est l'essence de ce que nous voulons accomplir grâce à nos programmes d'économie sociale et de développement social.
Pour bien comprendre l'économie sociale et son apport à la prospérité des collectivités, il faut examiner les facteurs complexes de la qualité de vie dans les collectivités. Des aspects tels que l'emploi, les conditions économiques, l'environnement naturel, le logement, la santé, le soutien social et bien d'autres influent sur le climat social des collectivités. Aucun organisme ne peut constituer à lui seul tous les maillons de cette chaîne de facteurs. Lorsque les conditions ne sont pas optimales, la découverte de solutions efficaces exige une approche de collaboration.
Comment avons-nous instauré cette collaboration? Quand j'ai été nommée, j'ai décidé de consulter les experts. Il existe des organismes qui travaillent dans le secteur de l'économie sociale un peu partout au Canada. Nous avons réuni les intervenants et créé une table ronde nationale. À l'aide des recommandations de cette table ronde nationale, nous espérons dresser un cadre qui fera appel non seulement à Développement social Canada, mais aussi à Industrie Canada et aux quatre organismes de développement régional du pays qui, en fait, veilleraient au respect des promesses faites.
En tant que secrétaire parlementaire, j'ai eu le plaisir de faire la première annonce en compagnie du ministre de l'Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec. Nous avons annoncé que 30 millions de dollars seraient versés sur cinq ans par l'entremise d'une tierce partie, qui participe actuellement à un processus d'appel d'offres. La tierce partie, grâce à son expertise dans ce dossier versera aux organismes non gouvernementaux et aux entrepreneurs sociaux ces fonds et les fonds de capitaux patients, dont nous pourrions parler plus en profondeur si quelqu'un le souhaite, pour faire en sorte que les entreprises sociales continuent de croître et donnent de l'emploi à plus de personnes démunies dans notre société.
Mon ministère s'emploie aussi à contribuer aux initiatives communautaires qui améliorent la vie des enfants, des aînés, des familles qui vivent dans la pauvreté et d'autres Canadiens vulnérables. Je suis certaine que nous aurons la chance d'en parler plus tard.
Je veux aborder un point que le ministre a mentionné plus tôt et qui a été présenté sous forme de question. Je citerai l'exemple de 12 collectivités du Canada qui ont trouvé, grâce au dialogue, des solutions innovatrices dans le cadre d'un programme pilote intitulé Comprendre la petite enfance. Nous sommes nombreux à savoir que l'éducation préscolaire est une priorité pour beaucoup de collectivités. Comprendre la petite enfance est une initiative qui aide les collectivités à déterminer comment se classent leurs enfants de cinq ans qui se préparent à commencer l'école et comment les services et les programmes existants peuvent être modifiés pour mieux préparer ces enfants à apprendre.
[Français]
Cette approche unique se fonde sur un partenariat local élargi entre des citoyens et des organisations qui ont les mêmes préoccupations et qui ont, ensemble, le pouvoir d'influencer les services et les programmes communautaires. En retour, les communautés ont une idée juste de la situation et sont à même de relever les défis.
Le très fructueux programme Comprendre la petite enfance a été élargi pour englober désormais jusqu'à 100 nouvelles communautés au cours des prochaines années.
D'autres histoires de réussite communautaire peuvent être rattachées au programme communautaire populaire intitulé Nouveaux horizons pour les aînés. J'ai eu le plaisir récemment, avec le ministre, de faire deux annonces dans mon comté, Ahuntsic, concernant deux organismes qui travaillent avec les aînés. L'un d'eux a un site web extraordinaire; c'est un site construit par les aînés pour les aînés, mais qui peut aussi aider les enfants. Nous avons trouvé cela totalement innovateur et extraordinaire. C'est grâce au programme que notre gouvernement a mis sur pied que nous avons été capables d'allouer ces fonds pour créer ce site web. Nous allons suivre cet organisme de très près, parce que je crois que ce sera le début de quelque chose qui pourra vraiment être élargi à d'autres organismes non gouvernementaux qui travaillent avec les aînés et qui veulent aider les jeunes. Nous avons trouvé l'aspect intergénérationnel de ce projet très intéressant.
L'initiative Nouveaux horizons pour les aînés se penche sur les besoins des personnes âgées en créant des occasions propices à leur participation au sein de leur communauté. Nous encourageons les aînés à y participer activement, car nous voulons qu'ils continuent d'être productifs dans la société.
[Traduction]
Nous sommes présentement en train de mettre en place des outils qui aideront les communautés à croître parallèlement à l'économie sociale. Au moment où la société canadienne devient plus complexe et plus hétérogène, il faut absolument poursuivre le dialogue avec les communautés, de façon à trouver des moyens inédits de relever les nouveaux défis qui ne manqueront pas de se présenter.
Bien que certaines communautés relèvent ces défis avec beaucoup de succès, d'autres éprouvent de la difficulté à trouver des solutions novatrices. Nous devons encourager le dialogue. Comme je l'ai déjà dit, la table ronde nationale sur l'économie sociale encourage le dialogue et la mise en valeur de moyens novateurs d'envisager nos problèmes et de trouver des solutions aux problèmes que les communautés s'efforcent de régler.
Sous savons que le dialogue avec les communautés est une source de solutions efficaces. Nous savons également que le partage accru de l'information et l'intensification de la recherche dans le domaine des meilleures pratiques sont également nécessaires. C'est pourquoi notre ministère continue de s'intéresser activement à ces deux domaines, afin d'en apprendre plus encore sur les meilleures solutions et les moyens les plus efficaces pour étendre ces réussites à un plus grand nombre de communautés.
Cette approche a été déterminante dans notre travail courant avec les communautés, comme je l'ai mentionné plus tôt. Nous persévérerons dans ces initiatives grâce au dialogue, à l'échelle locale, avec le secteur bénévole, et à la collaboration avec les coalitions qui participent à des programmes tels que l'initiative Comprendre la petite enfance.
Les communautés s'édifient sur les partenariats sociaux. La force de ces communautés se reflète en contrepartie dans l'économie sociale et dans d'autres initiatives de notre ministère. En tant que gouvernement, nous devons aspirer à travailler de façon plus intelligente afin d'aider les communautés à réaliser tout leur potentiel. C'est à cela que nous nous sommes engagés à Développement social. Et nous continuerons de nous consacrer à la réalisation de cet objectif.
[Français]
M. Marcel Gagnon (Saint-Maurice—Champlain, BQ): Monsieur le président, je vais essayer de ne pas bombarder le ministre de questions, comme l'a fait ma collègue tout à l'heure. Au Québec, on était habitués à le voir devant les filets des Canadiens et on savait qu'on pouvait le bombarder parce qu'il arrêtait tout. On pense un peu qu'on est à une joute de hockey.
Ce soir, nous avons une discussion fort intéressante. Nous avons tous la même demande: aidez-nous à faire plus pour la communauté. Je pense que la solution à tous nos problèmes serait tout simplement de respecter les compétences des provinces. En effet, ce soir, ce dont tout le monde discute relève des compétences des provinces.
J'ai été député à Québec. J'ai travaillé pour ce dont vous avez parlé. J'ai aidé des travailleurs sociaux à s'organiser. Tout ce qui dérange, c'est qu'il y a deux paliers de gouvernement qui s'enfargent l'un dans l'autre. Il y a un gaspillage éhonté d'énergie et d'argent. Pourquoi sommes-nous contre la formation de ce ministère? Ce n'est pas parce qu'on n'aime pas le ministre ou les gens qui vont le former, c'est parce que l'argent qui va aller aux 14 000 fonctionnaires ne se rendra pas jusqu'aux provinces, au Québec, pour satisfaire aux besoins dont on a parlé.
J'ai aimé l'histoire de notre collègue qui parlait de ses vieux parents décédés et qu'on avait aidé. Justement, il y a à peine trois semaines, dans ma famille, j'ai vécu la même chose. Il est vrai qu'il faut venir en aide à ces gens. Toutefois, tant qu'il y aura deux paliers de gouvernement qui s'occupent de la même chose, ce sera un gaspillage d'énergie et d'argent.
Le ministre a dit tout à l'heure: « Aidez-nous! » Retrouvons le début du pays, la Constitution canadienne, où il y avait un partage des responsabilités et des pouvoirs. Tout était prévu pour que chacun fasse le travail qui lui revenait.
Avec le gouvernement fédéral, ce n'est pas cela. En comité, j'ai vu un schéma qui le montrait, mais je ne l'ai pas avec moi. De plus en plus, il faut que le gouvernement fédéral soit partout. Plutôt que de régler le déséquilibre fiscal et de redonner l'argent aux provinces pour la santé, l'éducation, l'aide aux familles et d'autres choses, on va à côté des gouvernements provinciaux, on s'établit et on fait le travail en double, comme si on était des compétiteurs sur le même terrain. Cela entraîne un gaspillage d'argent et de plus, nous avons de la difficulté en matière de contrôle.
En comité parlementaire, je me souviens d'une question qu'on posait au ministre du Revenu national et qui l'embêtait un peu. Il disait que le ministère était devenu tellement gros qu'on avait de la difficulté à tout contrôler. Effectivement, la machine est devenue tellement grosse, elle gaspille tellement d'argent.
Je ferais juste une petite parenthèse. Depuis le temps que je suis député, je sais que parfois cela ne prend pas un gros montant d'argent pour régler des problèmes. Les députés du parti gouvernemental le savent, ils ont annoncé 30 000 $ pour un projet au Québec. Je parlerai uniquement de la partie volée du scandale des commandites, des quelque 100 millions de dollars qu'on ne retrouve pas. Je n'accuse personne. Je ne parle pas de tout le budget du scandale des commandites au sujet duquel on doit se questionner, je parle de la partie volée. Je l'ai divisée par 300 députés. Savez-vous que chaque député aurait eu une enveloppe de 333 000 $ pour aider sa communauté?
Savez-vous ce qu'on fait dans un comté avec ce montant? C'est assez énorme. En tout cas, on fait plus que ce qui a été fait avec le scandale des commandites, vous serez d'accord avec moi. On peut aider quantité de gens. Toutefois, il y a trop de monde. Deux gouvernements se pilent sur les pieds et multiplient les efforts, souvent pour se nuire.
Je pense que cela serait une façon de nous aider à accomplir tous les beaux projets qu'on a, d'un côté comme de l'autre. Je pense très sincèrement qu'on veut les mener à bien.
Le dossier dont je m'occupe est celui des personnes âgées. Il y a quelques années, on s'est aperçu que des milliers de personnes âgées à travers le Canada, soit 270 000 cas avoués par le ministère, avaient été privées du Supplément de revenu garanti auquel elles avaient droit.
Pour aller au fond de ce dossier, j'ai fait le tour du Québec et j'ai vu des choses atroces. Entre autres, à Sherbrooke, une femme est décédée à 88 ans après avoir vécu sa vieillesse avec 6 000 $ par année. À sa mort, le gouvernement lui devait 90 000 $ en Supplément de revenu garanti. J'ai vu des choses épouvantables.
Je demanderai d'abord deux ou trois questions au ministre. Actuellement, peut-on s'assurer que toutes les personnes âgées qui ont droit au Supplément de revenu garanti le reçoivent? Quand ce dossier nous a été confié, on en comptait 270 000 au Canada, dont 68 000 au Québec. La tournée et la brasse camarade que nous avons faites nous ont permis d'en retrouver près de la moitié. Par la suite, encore quelque 110 000 personnes âgées à travers le Canada ne touchaient pas le Supplément de revenu garanti auquel elles avaient droit. Je voudrais savoir s'il en reste aujourd'hui et, le cas échéant, combien. Je reprendrai la parole plus tard pour poser une autre question.
[Traduction]
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, je partagerai la réponse avec mes deux collègues.
Très rapidement, en ce qui concerne une des premières remarques du député, à mon grand bonheur j'ai été gardien de but d'une équipe qui se faisait tirer très peu de rondelles, et c'était une bonne chose.
Ensuite, je n'accepte pas le ton du député. Je ne suis pas d'accord avec toute cette idée de gaspillage, d'argent englouti, de concurrence. Dans la plupart des circonstances, l'expérience nous a montré qu'il s'agit d'ententes conclues en collaboration. Même dans les quelques derniers mois, durant les négociations sur les congés parentaux, ou auparavant sur les soins de santé, le gouvernement du Québec a toujours participé aux négociations. Elles ont toutes porté fruits en ce qui concerne le gouvernement du Québec.
Je donne la parole à mon collègue pour ce qui est de la question des personnes âgées.
Le président: Ce n'est pas très orthodoxe. Le ministre d'État à la Famille et aux Aidants naturels a la parole.
L'hon. Tony Ianno: Monsieur le président, je sais que le député se préoccupe grandement de la question de la rétroactivité et de ceux qui étaient admissibles mais qui ne recevaient pas de SRG à l'époque. Le ministère envoie des centaines de milliers de trousses d'information. Nous avons des gens qui se rendent dans les communautés. Nous continuons de tenter de trouver des moyens de...
[Français]
M. Marcel Gagnon: Je m'excuse, monsieur le président, mais je suis le seul à poser des questions, alors qu'il y a deux ministres pour y répondre. Est-ce normal? On me dit qu'on devrait procéder dans un ratio de 1:1, n'est-ce pas?
[Traduction]
Le président: Je voulais savoir si le député était d'accord. Deux ministres différents aimeraient répondre, si c'est acceptable; sinon, nous alternerons et le député pourra poser une autre question séparément. Voulez-vous entendre ce que le ministre d'État a à dire?
[Français]
La parole est à l'honorable député de Saint-Maurice—Champlain, qui peut poser une autre question.
M. Marcel Gagnon: Monsieur le président, j'ai un certain nombre de questions à poser. Je vais plutôt poser les questions l'un et l'autre pourraient y répondre En fait, la question reste la même et le ministre va y répondre tout à l'heure.
Je voudrais faire remarquer que les personnes qui ont été privées du Supplément de revenu garanti — on l'a admis — l'ont été parce que le gouvernement n'a pas donné l'information qu'elles avaient le droit d'avoir. Je trouve cela anormal.
Je pourrais donner des cas précis de gens qui n'ont pas reçu cet argent, soit parce qu'ils n'ont pas été informés, soit parce qu'ils ont été mal informés. L'ex-ministre avait réglé le problème. La preuve qu'ils avaient été mal informés est qu'on a changé les choses. Pourquoi n'acceptez-vous pas, actuellement, que la rétroactivité soit pleine et entière, soit d'au moins cinq ans?
Vous savez, lorsqu'un couple âgé de 70 ans a été privé — tous les deux — de 20 000 $ depuis cinq ans, on a prouvé que c'est le gouvernement qui en était responsable. Ce couple retire 4 000 $ et perd 20 000 $. Pourquoi n'accepte-on pas que le même sort soit réservé aux personnes à qui on doit de l'argent que ce que le gouvernement exige? Lorsque l'on doit de l'argent au gouvernement, la rétroactivité est plus que de 11 mois. Est-ce que la rétroactivité pour les personnes âgées peut être d'au moins cinq ans?
Un recours collectif a même été intenté à ce sujet. C'est incroyable de constater les arguments que donne le gouvernement pour ne pas céder à cette demande. Pourtant, cet argent est dû à ces personnes.
En ce qui a trait à l'aide que vous apportez, y aurait-il possibilité — je suis vexé d'entendre le ministre dire que je l'insulte par le ton que j'utilise; je pense que le ton est le plus aimable possible — de dire aux personnes âgées que les 2,7 milliards de dollars qu'on va donner dans les cinq prochaines années viendront des 3,2 milliards de dollars que l'on a économisé? En effet, on informait mal les personnes âgées. Ce n'est pas de l'argent qu'on leur donne, c'est un remboursement. Ce qui est malheureux, c'est que l'on a économisé 3,2 milliards de dollars au cours des 11 ou 12 derniers années et on va remettre 2,7 milliards de dollars dans les cinq prochaines années. Cela va commencer en 2006.
Je voudrais que le ministre réagisse à cela. Je trouve que c'est une façon qui est plus ou moins honnête de régler ce dossier. On exige la pleine rétroactivité pour les personnes âgées.
[Traduction]
L'hon. Tony Ianno: Monsieur le président, je veux juste clarifier une chose. Le député a fait remarquer que j'aurais dit qu'il a été insultant. Je n'ai jamais dit cela. Peut-être y a-t-il eu une erreur de traduction.
Le député faisait partie du gouvernement du Québec. Les programmes de ce dernier sont aussi rétroactifs jusqu'à 11 mois. J'aurais aimé qu'il ait lutté aussi hardiment quand il était membre du gouvernement québécois afin de faire en sorte que tous les programmes soient rétroactifs jusqu'à cinq ans, puisqu'il y tient tellement.
[Français]
M. Marcel Gagnon: Monsieur le président, je vais corriger cela. On a parlé de 11 mois de rétroactivité au Québec. Je ne veux pas dire que cela est faux, mais il y a une erreur. La rétroactivité pour la Régie des rentes du Québec est de...
[Traduction]
Le président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je pense qu'il s'agit d'une question de débat et non d'un recours au Règlement. Il faut accorder au ministre un délai raisonnable pour répondre. Il a environ une minute et demie pour ce faire.
L'hon. Tony Ianno: Monsieur le président, je sais que le sujet passionne le député. Premièrement, je ne crois pas qu'on puisse se réjouir de voir une personne admissible au SRG ne pas l'obtenir.
Sur les 1,5 million de Canadiens qui touchent le SRG, 1,3 million le reçoivent automatiquement par le truchement de leur déclaration de revenus. Malheureusement, près de 200 000 personnes n'en font pas la demande lorsqu'ils font leur déclaration de revenus. Chaque année, on envoie un formulaire de demande à ces personnes. Malheureusement, certaines n'y donnent pas suite. Nous nous efforçons, de concert avec les autres ordres de gouvernement et nos intervenants, d'aller cogner aux portes, de faire de la publicité et de trouver des moyens de rejoindre le plus grand nombre possible de personnes âgées admissibles afin qu'elles en profitent.
Comme les députés le savent, le budget prévoit 2,7 milliards de dollars pour les personnes âgées; c'est la première fois qu'il y a un poste pour elles dans le budget principal. Je suis fier qu'on accorde 700 millions de dollars annuellement aux personnes âgées à faible revenu, ce qui représentera un montant de 433 $ par personne une fois la mesure en vigueur. Je suis très fier de ce que le gouvernement a fait.
L'hon. Maria Minna (Beaches—East York, Lib.): Monsieur le président, je suis très heureuse d'être ici ce soir. Je vais poser une question au ministre dans un moment, mais je voudrais d'abord parler d'un sujet qui me passionne. Depuis dix ans, je travaille très fort sur certains dossiers. Plus particulièrement, j'ai travaillé d'arrache-pied, avec mes collègues, sur des questions qui concernent les enfants et les personnes âgées. Les bonnes raisons pour le faire ne manquent pas.
Il y a au Canada près d'un million de personnes âgées qui vivent seules. La plupart d'entre elles sont des femmes qui sont réduites à la pauvreté. C'est pourquoi le gouvernement, grâce au travail énergique du caucus féminin, du caucus de la politique sociale que je préside, et de mes collègues, a réclamé de bons programmes pour les personnes âgées. Comme le ministre vient de le dire, le budget prévoit le relèvement du supplément de revenu garanti, dont les prestations augmenteront de 2,7 milliards de dollars, la multiplication par deux du programme des aidants naturels, le programme Nouveaux horizons, qui est absolument fantastique, et la création d'un secrétariat qui devra veiller à ce que les programmes destinés aux personnes âgées et le dialogue avec elles ne soient pas une intervention ponctuelle, mais un engagement durable du gouvernement. C'est extrêmement important pour les personnes âgées de ma circonscription et du reste du pays.
Mes collègues et moi-même avons également consacré beaucoup d'efforts au plan d'action pour les enfants. J'ai toujours cru que le fait d'investir dans les enfants et les familles demeurait l'une des meilleures façons de renforcer la trame socio-économique du pays. Il s'agit pour moi d'une politique économique et non pas simplement d'une politique sociale. J'étais au nombre des huit députés qui, durant pratiquement un an en 1996, ont combattu pour assurer le démarrage de la Prestation nationale pour enfants et du Supplément de la prestation nationale pour enfants destinée aux familles à faible revenu. Le gouvernement a commencé à investir dans les enfants et, aujourd'hui, il aide plus de 3,5 millions de familles à assumer le coût d'élever leurs enfants. Selon les prévisions, nos initiatives auront engendré au total, en 2007, des investissements de 10 milliards de dollars. Elles auront vraiment changé pour le mieux la vie des familles.
En 2000, les prestations de maternité et les prestations parentales accordées par le programme d'assurance-emploi ont été bonifiées pour assurer un revenu de remplacement durant une période allant jusqu'à un an à tout nouveau parent restant à la maison pour s'occuper d'un enfant nouveau-né ou adopté. Ces prestations aident beaucoup les parents à concilier les exigences du travail et de la vie familiale. En 2003, 86,4 p. 100 des femmes ayant des gains assurables et des enfants âgés de moins de 12 ans ont reçu des prestations de maternité ou les prestations parentales ou les deux. Le nombre de demandes de prestations parentales par des hommes a également continué à augmenter, quoique plus lentement qu'au moment de l'introduction des bonifications. Environ 11 p. 100 des hommes ont demandé des prestations parentales ou manifesté l'intention de le faire. L'un des aspects importants du programme est son inclusivité.
Le Régime de pensions du Canada comporte également une disposition visant à faire en sorte que les parents qui s'absentent d'un travail à plein temps pour élever leurs enfants en bas âge n'aient pas à se contenter de pensions réduites plus tard dans la vie. Cet aspect est fort important pour les pères et les mères qui souhaitent rester à la maison avec leurs enfants et reprendre le travail par la suite sans avoir à renoncer à leur sécurité financière au moment de la retraite.
De plus, le gouvernement a établi des mesures qui ciblent les enfants handicapés et leurs familles, notamment la nouvelle prestation pour enfants handicapés et d'autres initiatives à caractère fiscal. De telles mesures aident les familles à assumer les coûts additionnels qu'occasionne un enfant handicapé.
Par l'entremise d'initiatives conjointes avec les provinces et les territoires, le gouvernement aide également à améliorer et à élargir la portée des programmes de développement de la petite enfance. L'initiative Comprendre la petite enfance sera étendue à au moins 100 collectivités de plus dans tout le Canada. Grâce à cette initiative, le gouvernement donne aux collectivités l'information dont elles ont besoin pour veiller à ce que les enfants soient prêts à apprendre lorsqu'ils entrent à l'école. Il n'y a rien de plus utile que d'investir dans nos enfants, rien de plus important que de veiller à ce que non seulement les enfants qui ont de l'argent, qui ont des parents à la maison, mais que tous les parents aient un choix et que leurs enfants soient en mesure d'entreprendre très tôt leur apprentissage. Il est question de l'apprentissage des jeunes enfants et non de la garde d'enfants, ce que les gens confondent parfois.
L'apprentissage et la garde des jeunes enfants sont extrêmement importants, mais malgré tout cet appui très utile de la part du gouvernement du Canada, des problèmes demeurent. Nous le savons. En particulier, la plupart des familles n'ont toujours pas accès aux types de programmes d'apprentissage et de garde des jeunes enfants qui peuvent faire entrer leurs jeunes enfants sur la voie du succès. Nous le savons, comme nous savons que près de 70 à 80 p. 100 des parents dans notre société travaillent.
Il est essentiel que le Canada fasse plus. Les recherches montrent clairement qu'un accès à des programmes d'apprentissage des jeunes enfants de qualité contribue énormément à la saine croissance des enfants. Cela a également un effet sur la capacité de nombreux parents à faire partie de la main-d'oeuvre active. C'est important, car la grande majorité des familles à faible revenu, des familles monoparentales, des familles avec des personnes handicapées et le reste sont des familles à un seul revenu. Le fait de vivre dans la pauvreté a bien entendu de grands effets sur le développement d'un enfant.
De plus, même les enfants qui sont éduqués principalement par un parent à la maison peuvent profiter de la participation à des cours de prématernelle pendant quelques heures chaque semaine. Nous le constatons dans le cas des programmes pour la petite enfance. Beaucoup de parents qui sont à la maison font en fait participer leurs enfants à ces programmes. Cependant, il n'y a pas suffisamment de places pour ces enfants. Même ceux qui ont les moyens de payer les frais au complet ne peuvent trouver des services de garde acceptables.
Soixante-dix p. 100 des enfants de moins de six ans vivent dans un foyer où le parent seul ou les deux parents travaillent ou poursuivent des études. Pourtant, à peine 20 p. 100 des places en garderie au Canada sont réglementées. C'est vraiment inadmissible. De plus, les programmes sont trop coûteux pour de nombreux parents et leur qualité varie beaucoup entre les provinces et les territoires et à l'intérieur de ces régions.
Le gouvernement a entrepris de répondre à ces préoccupations en mettant en place, en 2003, le cadre multilatéral sur l'apprentissage et la garde des jeunes enfants. Le gouvernement du Canada transfère plus d'un milliard de dollars sur cinq ans aux provinces et aux territoires. Le budget de 2005 a confirmé le financement permanent de cette initiative à hauteur de 350 millions de dollars par année.
Ces investissements portent déjà fruit. Ils améliorent l'apprentissage et l'aide procurés aux jeunes enfants de tout le pays.
Dans son budget de 2005, le gouvernement du Canada a réitéré son engagement à injecter 5 milliards de dollars additionnels sur cinq ans dans une nouvelle initiative visant à accélérer la mise en place d'un réseau d'apprentissage et de garde des jeunes enfants dans chaque province et territoire du pays. Celui-ci serait fondé sur les principes suivants: qualité, universalité, accessibilité et développemental.
Le gouvernement cherche actuellement à conclure avec chaque province et territoire une entente de principe bilatérale. Ces ententes vont énoncer la vision, les cibles et les principes nationaux en matière d'apprentissage et de garde d'enfants; des objectifs clairs et mesurables; les niveaux de financement et les secteurs admissibles pour l'investissement; une reddition de comptes serrée par la production de rapports publics; la promesse d'une collaboration mutuelle pour ce qui est des connaissances, des informations et des meilleures pratiques; et l'engagement de la part d'une province ou d'un territoire à élaborer un plan d'action couvrant la période de financement fédéral en consultation avec ses citoyens et les intéressés.
Cet aspect est très important. C'est ce que souhaitent les Canadiens depuis des décennies. C'est ce que réclament les activistes ainsi que les femmes, les mères et les pères: responsabilisation, qualité, réglementation, accessibilité et caractère abordable. Voilà ce qui importe aux familles. C'est extrêmement important. Je suis fière que ce soit prévu dans notre budget et dans notre plan.
J'aimerais maintenant poser une question au ministre. L'importance de ce programme est extrêmement claire à mes yeux. Certains députés semblent encore en douter.
Comment le gouvernement du Canada entend-il offrir souplesse et choix dans le cadre d'un réseau national d'apprentissage et de garde des jeunes enfants qui permettra aux familles canadiennes d'offrir à leurs enfants le meilleur départ possible dans la vie?
La possibilité de choisir importe. Elle a été évoquée ce soir. D'après moi, notre proposition et notre programme offrent effectivement des choix. Je serais reconnaissante au ministre de parler de cette question.
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, je remercie la députée de Beaches--East York de ses observations et de sa question. Elle a consacré beaucoup de temps et d'énergie à ce dossier. Nous disions plus tôt qu'il ne s'était pas passé grand-chose avant l'engagement pris l'an dernier. C'est grâce aux interventions de personnes comme elle et d'autres à la Chambre qu'il a été possible d'entretenir la flamme et de réaliser ce genre de chose.
La députée faisait état, dans sa question, des programmes et des mesures d'aide que le gouvernement a créés pour les enfants et les parents. Il y a la prestation fiscale canadienne pour enfants, le supplément de la prestation nationale pour enfants, la prestation de maternité et la prestation aux parents par le truchement de l'assurance-emploi, la prestation pour enfants handicapés et le projet Comprendre la petite enfance, qui connaît une croissance rapide. C'est dans ce contexte que s'inscrit l'engagement du gouvernement d'investir cinq milliards sur cinq ans pour aider les provinces et les territoires à mettre en oeuvre leurs projets d'apprentissage et de garde des jeunes enfants.
La relation des enfants avec leurs parents est l'aspect le plus important de leur vie. Il en a toujours été ainsi et il en sera toujours de même. La vie des parents et celle des familles se modifient au fil du temps. Toutefois, le défi, pour un enfant, de se développer et d'apprendre en mettant pleinement à profit son potentiel demeure cependant le même. L'apprentissage et la garde des jeunes enfants n'est pas et n'a jamais été vu comme la seule voie de développement des jeunes enfants, pas plus que l'école primaire et secondaire n'est vue comme le seul cadre d'apprentissage et de formation.
En termes simples, l'apprentissage et la garde des jeunes enfants n'est qu'un des nombreux moyens auxquels les parents peuvent avoir recours, à leur convenance, pour assurer le développement de leurs enfants. N'oublions jamais que, pour la grande majorité des parents canadiens, l'apprentissage et la garde des jeunes enfants constitue une importante ressource. Dans 70 p. 100 des cas, les pères et les mères qui ont des enfants de moins de six ans travaillent tous les deux.
La grande majorité de ces enfants se retrouvent dans des services quelconques de garderies, de qualité insuffisante. Seulement 20 p. 100 des enfants fréquentent des garderies réglementées, mais non adaptées aux besoins d'apprentissage et de développement d'un jeune enfant. Ces services ne permettent pas aux enfants de tirer pleinement profit des heures, des jours, des semaines et des années qu'ils y passent. Les enfants qui fréquent ces garderies s'y épanouissent-ils ou y perdent-ils leur temps?
Nous voulons que les parents aient un vrai choix. Nous voulons qu'ils aient la chance de choisir la qualité, de choisir les services à prix abordable, de choisir les services disponibles. Nous n'avons pas construit des écoles en donnant de l'argent aux parents pour ensuite leur demander de mettre cet argent dans une cagnotte qui servirait à la construction de l'école ou à l'embauche d'enseignants. Nous n'avons pas construit d'hôpitaux ni de routes de cette façon non plus. Nous avons décidé que les écoles, les hôpitaux et les routes étaient assez importants pour assez de gens et qu'ils étaient assez importants pour la société d'aujourd'hui comme celle de demain pour que nous y consacrions directement des fonds publics. C'est ce que nous faisons avec l'éducation préscolaire et la garde d'enfants.
Par ailleurs, le système d'éducation préscolaire et de garde d'enfants est étonnamment flexible; il n'en est encore qu'à ses débuts et il est appelé à évoluer d'une manière considérable. Le gouvernement du Canada s'entend avec les provinces et les territoires sur les principes, les attentes, les connaissances et les responsabilités. Les provinces et les territoires décident eux-mêmes comment le mieux remplir ces obligations; ils ont la flexibilité voulue pour trouver des réponses différentes pour les campagnes et les grandes villes, pour les besoins des minorités linguistiques, et pour les travailleurs à horaires spéciaux ou à besoins particuliers.
Ce n'est pas une école élémentaire. On n'a pas besoin d'un groupe de 150 élèves et de millions de dollars pour un immeuble afin que tout fonctionne bien. L'éducation préscolaire et la garde d'enfants ne sont pas tout ou rien non plus, c'est-à-dire un système fonctionnant huit heures par jour, cinq jours par semaine et 50 semaines par année ou rien du tout. Non, ce n'est pas tout ou rien. Même les parents qui restent à la maison pour s'occuper de leurs enfants veulent que, durant la semaine, leurs enfants fassent d'autres expériences avec d'autres enfants ailleurs qu'à la maison. L'éducation préscolaire et la garde d'enfants, ce peut être deux matins par semaine ou un jour par semaine pour les parents et leurs enfants, à leur gré.
Rien ne peut offrir de réponse à tout. Le système de santé ne le fait pas, ni le système d'éducation. Même si nous voudrions qu'ils en fassent plus, c'est ce qu'ils font qui compte, et cela compte beaucoup. Notre vie est meilleure à cause d'eux, et elle le sera encore plus s'il y a un système d'éducation préscolaire et de garde d'enfants dans toutes les provinces et tous les territoires.
L'hon. Maria Minna: Monsieur le président, j'aimerais passer à un autre aspect du programme. Il s'agit d'informer mes électeurs et l'ensemble des Canadiens.
Comme les députés le savent, je suis membre du Comité des finances, qui étudie le budget à l'heure actuelle. Nous avons discuté de ce sujet cet après-midi. L'opposition officielle voudrait scinder le projet de loi en plusieurs morceaux. Cet après-midi, des motions ont été présentées, dont l'une proposait de séparer l'Accord atlantique du reste du projet de loi et l'autre, d'en retirer les questions environnementales. Je ne sais vraiment pas ce que l'avenir nous réserve encore.
J'ai une question pour le ministre parce que je suis très inquiète. Si le budget n'est pas adopté avant que la Chambre ne soit prorogée pour l'été, qu'arrivera-t-il aux 700 millions de dollars qui ont été alloués à l'éducation préscolaire et aux services de garde d'enfants? Je crois qu'il est important que les Canadiens sachent à quoi s'en tenir.
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, tout est menacé. Voilà ce qui se passe. C'est simple; il y a un risque ou il n'y en a pas.
La vaste majorité des Canadiens ont dit que ce dossier leur tenait beaucoup à coeur. La question que je pose depuis un peu plus d'un mois est la suivante: « Qu'est-ce qui presse tant? » Qu'est-ce qui presse tant alors que nous parlons d'une mesure que le public appelle de tous ses voeux? Il s'agit de 700 millions de dollars cette année, soit une somme d'argent qui représente une augmentation de 30 p. 100 des dépenses de tous les gouvernements du pays à l'heure actuelle pour les services dont il est question.
Quels intérêts servons-nous en mettant en péril ce projet de loi? Enfin, après tout ce temps, nous nous dirigeons vers l'établissement d'un véritable système d'éducation préscolaire et de garde d'enfants, un système que les gens réclament depuis si longtemps. Nous avons enfin donné le coup de barre qu'il fallait. La population a réagi favorablement aux annonces faites dans ce dossier. Et voilà que certains députés décident de tout remettre en question.
M. Jeff Watson (Essex, PCC): Monsieur le président, je partagerai mon temps de parole avec ma distinguée collègue de Durham. De plus, je poserai une série de courtes questions et j'espère sincèrement que la présidence verra à ce que les réponses soient aussi brèves.
Tout d'abord, par souci de concision, le ministre a indiqué à plusieurs reprises qu'il ne croyait pas que les parents étaient en mesure d'élever leurs propres enfants. Mon épouse et moi avons récemment eu un quatrième enfant, un magnifique petit garçon. Le ministre pourrait-il me dire pourquoi il est d'avis que son programme de 10 milliards de dollars par année permettra d'élever mes enfants mieux que mon épouse et moi pouvons le faire et à partir de quel âge cela s'applique-t-il?
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, comme je ne veux pas prendre trop de temps, je dirai tout d'abord que je n'ai jamais dit ce que le député prétend que j'ai dit. Deuxièmement, je ne crois pas ses prémisses. Je crois en tout ce que j'ai dit chaque fois que j'ai parlé de cette question, chaque fois que j'en ai parlé ce soir et chaque fois que j'en ai parlé à titre de parent. J'ai deux enfants. C'était pour moi une chose très sérieuse que d'élever deux enfants. Ils ont maintenant 30 et 27 ans. À titre de parent, nous avons joué un rôle clef dans leur éducation, comme toutes leurs autres activités ont eu un rôle à jouer et comme les programmes d'apprentissage et de garde peuvent également faire partie du développement des enfants.
M. Jeff Watson: Monsieur le président, le ministre et son ministère ont financé bon nombre de projets de recherche et d'activistes dans le domaine pour promouvoir l'attitude autocratique du gouvernement, des projets qui ne laissaient que peu ou même pas de choix du tout aux parents. Le ministre pourrait-il nous faire savoir quels groupes opposés au programme libéral obligatoire en matière d'apprentissage et de garde d'enfants ont reçu un financement, et combien d'argent ils ont reçu?
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, je ne connais pas la réponse à cette question. Je vais m'informer et tenter de trouver une réponse pour le député.
M. Jeff Watson: Monsieur le président, le ministre se plaît à comparer les débuts du programme de garderies aux débuts du système d'éducation universelle. Or, il oublie un aspect important: le système d'éducation reconnaît l'importance du choix. Dans notre système d'éducation, nous avons des écoles privées, des écoles à charte, l'éducation religieuse, l'éducation publique et les foyers-écoles.
Pourquoi ne pouvons-nous pas avoir la même liberté de choix, le même grand nombre de choix avec l'éducation préscolaire et la garde d'enfants? Pourquoi un système monolithique?
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, encore une fois, le député fait entièrement fausse route.
Si le député veut comparer des pommes avec des pommes dans le cadre d'un système d'éducation, de l'école élémentaire et de l'école secondaire, il sait que, jusqu'à un certain âge, tous les enfants doivent fréquenter l'école.
Les foyers-écoles constituent absolument un choix pour l'éducation scolaire et la garde d'enfants. Tous les parents qui ne veulent pas que leur enfant participe à des programmes d'éducation préscolaire et de garde peuvent lui enseigner à la maison. Cela n'est pas la même chose qu'une école élémentaire ou une école secondaire, que les enfants fréquentent cinq jours par semaine et 40 semaines par année. Les parents d'enfants d'âge préscolaire ont beaucoup plus de choix.
M. Jeff Watson: Monsieur le président, l'enseignement à domicile, c'est sept jours sur sept.
Voici ma quatrième question. De toute évidence, le programme libéral de gardiennage d'enfants ne vise pas à répondre aux besoins divers des parents. En effet, la garde d'enfants en établissement est généralement le dernier choix des parents. Le programme libéral ne leur permet pas de choisir le type de soins qu'ils veulent. Toutes les familles canadiennes doivent contribuer à ce programme à deux vitesses, mais seulement un petit nombre d'entre elles en bénéficiera vraiment. Ce programme n'est universel que par son impopularité.
Pourquoi le ministre n'aménagerait-il pas ce programme de 10 milliards de dollars par année de façon à ce que des choix équitables soient offerts à toutes les familles, peu importe où ou par qui les parents souhaitent faire garder leurs enfants?
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, tout ce que le député a dit est jargonistiquement et ritualistiquement incorrect. Il suffit de comparer ce qu'offrent les garderies à l'heure actuelle et ce qui pourrait être offert en vertu d'un programme comme celui-ci. Le député n'a manifestement pas pris le temps ou la peine d'approfondir la question.
J'espère qu'il le fera, qu'il se dégagera de la feuille de papier et de l'apprentissage « à bout de bras » et qu'il ira se renseigner à la source. Je fais le voeux qu'il mette un jour les pieds dans une garderie, pour voir à quoi cela ressemble et comment on s'y sent, pour voir les enfants et leur regard, et pour voir comment ils remuent et ils explorent.
M. Jeff Watson: Monsieur le président, permettez-moi de citer le ministre, qui a déclaré ce soir que la relation la plus importante qu'un enfant a pour son développement est celle qu'il entretient avec ses parents. De plus, il a affirmé que c'est le cas et que ce sera toujours le cas. Pourquoi, dans ces conditions, le ministre fait-il la promotion d'un programme qui sépare les parents et les enfants, nuisant du même coup à la relation la plus importante pour le développement?
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, je ne sais vraiment pas par où commencer pour répondre à n'importe quelle de ces questions, car elles sont tellement éloignées du vécu de tout le monde. Parmi les familles où les deux parents ont un emploi, 70 p. 100 ont fait leur choix. Elles ont estimé que cela compte beaucoup pour elles, que cette expérience pour leurs enfants compte beaucoup.
M. Jeff Watson: Monsieur le président, le ministre a déclaré ce soir que tous « peuvent avoir accès » au système; en d'autres termes, il suffit que vous fassiez le choix. En ce moment, de nombreux parents demandent aux grands-parents ou à d'autres parents de surveiller les enfants et de leur enseigner des choses. Par leurs impôts, ces parents acquittent le coût de ces programmes. Ils n'ont aucun choix à cet égard. Pour accéder à ces programmes, ils doivent rompre des rapports qu'ils entretiennent avec des parents. Pourquoi le ministre impose-t-il un coût sans donner de véritables choix à ces parents?
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, comme je l'ai dit plus tôt, tout programme qu'offre qui que ce soit représente des choix qui ont été faits et d'autres possibilité qui n'ont pas été retenues.
Ce que j'ai bien hâte de vivre, c'est le moment où le parti du député se décidera à présenter son programme. J'ai bien hâte de voir les choix qui y seront faits, ce que ces choix représentent, qui en bénéficierait et qui n'en bénéficierait pas. Nous connaissons tous le choix qu'ils ont dévoilé en mai et juin derniers: un crédit d'impôt de 2 000 $, ce qui offrirait aux familles ayant les plus bas revenus la somme princière de 320 $ pour un enfant, alors que le coût moyen d'une place en garderie est de 8 000 $.
Mme Bev Oda (Durham, PCC): Monsieur le président, si vous le permettez, je poserai une série de questions.
Le Canada est composé de plusieurs cultures. J'ai participé à des activités dans diverses communautés culturelles en Ontario, ma province natale. Chacune de ces communautés a ses propres traditions et valeurs en ce qui concerne la famille et les enfants.
À la Villa Columbo dans la communauté italienne de Toronto, les enfants d'âge préscolaire ont des contacts avec leurs grands-parents et d'autres aînés du fait que la garderie est située dans un centre pour aînés au sein même de la communauté.
Au centre culturel nippo-canadien, la garderie est intégrée à un milieu culturel riche où les enfants peuvent apprendre le japonais et les arts, les activités et les chants de leur patrimoine familial.
Les parents des enfants qui fréquentent ces garderies choisissent d'y placer leurs enfants parce qu'ils ont à coeur les traditions et le patrimoine de leur famille. Il choisissent de respecter leur patrimoine et ils savent que, dans le cadre élargi du système d'éducation, leur patrimoine ne sera présenté que comme le patrimoine d'un autre pays et que leurs traditions serviront de prétexte pour faire des activités ou seront tout au plus une curiosité exotique. Ces parents protestent. Ils veulent avoir le choix pour leurs enfants d'âge préscolaire.
Comment le ministre va-t-il répondre aux besoins de ces familles et leur permettre de faire un choix respectant leur diversité culturelle dans le cadre de ce programme de garderie?
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, comme je l'ai dit plus tôt ce soir, un des grands avantages des services d'éducation préscolaire et de garde des jeunes enfants est leur échelle. Ces services sont offerts à une échelle très réduite par rapport au système scolaire. Étant donné leur petite échelle, ils peuvent donc fonctionner avec moins d'enfants. Ils peuvent fonctionner avec une infrastructure moins grande qui entraînera des coûts moindres. Ils ouvrent une foule de possibilités comme celles dont la députée vient de parler, des possibilités en fonction des communautés linguistiques et culturelles. Il existe bon nombre de centres d'éducation préscolaire et de garde de jeunes enfants qui visent précisément les besoins dont la députée a parlé et il y en aura certainement encore plus dans l'avenir.
Mme Bev Oda: Monsieur le président, la semaine dernière, j'ai reçu une lettre d'une de mes électrices dans laquelle elle raconte que ses parents ont enfin pu venir la rejoindre au Canada. Elle était très excitée parce que les grands-parents se chargeraient désormais de garder les enfants pendant que son mari et elle sont au travail. Ils font tous deux du travail par postes et cumulent plusieurs emplois afin de pouvoir joindre les deux bouts. L'arrivée des grands-parents était un grand avantage pour eux parce qu'ils étaient incapables de trouver des services qui répondaient à leurs besoin dans leur localité, une petite localité rurale.
Le ministre pourrait-il m'expliquer comment ce programme répondra aux besoins des récents immigrants qui sont parfois forcés de cumuler plusieurs emplois, de faire du travail par postes, et ainsi de suite? Si je comprends bien, et j'aimerais une explication, ce programme vise plutôt les gens qui ont des emplois plus réguliers qui correspondent à ce qui est considéré comme une journée de travail normale et il n'offrira peut-être pas la flexibilité dont cette famille a besoin, particulièrement dans le cas de l'entente avec l'Ontario, d'après ce que j'y ai lu.
Je me demande comment ce programme aidera cette famille et les autres familles du même genre.
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, comme la députée l'a mentionné et comme nous l'avons déjà dit, chaque province établira ses propres priorités.
Il est clair que le travail par postes et le genre de situation que la députée a décrite sont beaucoup plus une réalité aujourd'hui qu'il y a peut-être 10 ou 20 ans.
Encore une fois, je reviens à ce que je disais plus tôt au sujet de la flexibilité inhérente à un système qui comporte un certain nombre d'éléments qui sont sur une échelle beaucoup plus petite.
J'imagine que la majorité des garderies, du moins dans un avenir prévisible, seront incapables d'offrir le genre de services dont la députée a parlé pour ce qui est de venir en aide aux parents qui font du travail par postes ou qui travaillent le dimanche, mais je crois que certaines d'entre elles pourront offrir de tels services. J'imagine que ce sera l'approche qu'elles adopteront, que ce sera leur façon de répondre à un besoin dans une localité en particulier et que ce sera leur façon de s'assurer que leur demande sera acceptée par le gouvernement provincial.
Mme Bev Oda: Monsieur le président, les gens de ma circonscription sont d'avis qu'ils devraient bénéficier tout autant des impôts qu'ils paient que n'importe quelle autre famille. Je représente un grand nombre d'agriculteurs et beaucoup d'entre eux travaillent sur une base saisonnière et peuvent emmener leurs familles avec eux. Ce sont des exploitants agricoles et ces gens-là ne font pas du neuf à cinq. L'ensemencement et la récolte sont des activités saisonnières et les deux parents doivent souvent travailler aux champs. Par conséquent, leurs besoins d'aide en ce qui a trait à leurs enfants d'âge préscolaire varient en fonction des saisons et de leurs horaires.
J'ai lu l'entente signée en Ontario, ainsi que certaines des autres ententes conclues. Quelles études ou quels travaux ont été faits pour étendre les avantages du programme proposé de garde d'enfants de façon à répondre aux besoins particuliers de ces familles? Ces familles jouent un rôle tout aussi important dans l'économie du Canada, la production alimentaire du pays, et aussi au niveau de notre héritage, et elles veulent pouvoir continuer à le faire. Elles ont pu le faire traditionnellement en faisant appel à des membres de la famille, des voisins, etc., pour dispenser ces soins. Toutefois, je n'ai pas l'impression que ces contribuables en ont pour leur argent, puisqu'ils ne reçoivent pas l'aide dont ils ont besoin.
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, c'est une bonne question, mais je pense qu'il faut aussi reconnaître que c'est un défi énorme, de la même façon que si on bâtissait une école primaire au lieu d'un centre de la petite enfance. Nous ne nous attendons pas à ce qu'une école primaire ou secondaire soit disponible à toute heure pour répondre aux besoins des parents.
Les systèmes et les institutions de grande envergure ne sont guère flexibles.Toutefois, comme je l'ai dit plus tôt, la bonne nouvelle c'est qu'une structure plus petite comme celle-ci a de bien meilleures chances d'être souple et de s'adapter beaucoup plus rapidement, de façon à répondre à des besoins comme ceux auxquels la députée fait allusion.
L'hon. Judy Sgro (York-Ouest, Lib.): Monsieur le président, je suis heureuse de pouvoir intervenir dans le débat très important que nous tenons ce soir sur le budget du ministère des Ressources humaines et du Développement social.
En commençant, je voudrais dire quelques mots de notre récent budget, qui contient de nombreuses initiatives pour les Canadiens âgés. Le budget annonce des investissements majeurs dans les programmes s'adressant aux personnes âgées, de la santé jusqu'à la sécurité du revenu, de l'épargne-retraite jusqu'à l'aide aux aidants naturels. Nous avons toujours comme objectif d'améliorer la qualité de vie de toutes les personnes âgées et nous ne devons jamais oublier que notre pays a été construit par ceux et celles qui sont aujourd'hui des personnes âgées.
Le Supplément de revenu garanti apporte aux personnes âgées qui ont un faible revenu des prestations leur garantissant un revenu minimal pendant toute leur retraite.
En 2004, notre gouvernement, sous l'habile leadership de notre premier ministre et d'un grand ministre d'État à la Famille et aux Aidants naturels, s'est engagé à accroître l'enveloppe consacrée au Supplément du revenu garanti de 1,5 milliard de dollars au cours des cinq prochaines années. Cela a été clairement illustré dans nos programmes et dans les documents que nous avons distribués.
Cependant, le budget de 2005 va bien au-delà de cet engagement. Nous n'augmenterons pas le budget du Supplément de revenu garanti accordé aux personnes âgées à faible revenu de seulement 1,5 milliard de dollars, mais bien de 2,7 milliards de dollars sur deux ans. En 2007, le maximum du Supplément de revenu garanti sera majoré de plus de 400 $ par année pour une personne seule et de près de 700 $ pour un couple.
Dans notre société, les personnes âgées sont actives et veulent le rester. Le budget augmentera le budget du programme Nouveaux Horizons, qui connaît un grand succès, qui fait la promotion du secteur bénévole et soutient les personnes âgées. Le financement annuel de ce programme passera à 25 millions de dollars en 2007 et 2008. Il s'agit là d'un programme très populaire auprès de nombreux Canadiens, dont beaucoup de personnes âgées.
Le budget prévoit 13 millions de dollars sur cinq ans pour la mise sur pied d'un nouveau secrétariat national pour les aînés qui aidera le gouvernement à mettre l'accent sur les nombreux besoins des personnes âgées aujourd'hui.
Les personnes âgées sont préoccupées par une variété de sujets. Parmi ceux-ci, il y a les pensions, le système de santé, l'assurance-médicaments, le logement et les difficultés que représente la vie avec un revenu fixe. Nous entendons parler de ces préoccupations tous les jours.
Notre gouvernement est déterminé à maintenir le système de retraite qui apporte aux Canadiens la possibilité de vivre dans la dignité et la sécurité et de maintenir aussi les autres programmes sociaux qui caractérisent notre pays et qui font du Canada le meilleur endroit où vivre à toutes les étapes de la vie.
Grâce à la solide gestion financière du gouvernement, à la croissance économique et à la réforme du Régime de pensions du Canada qui a été couronnée de succès, nous avons pu protéger la qualité de vie des aînés canadiens.
En 1997, le gouvernement a dû reconstruire le Régime de pensions du Canada pour répondre aux demandes accrues d'une population vieillissante et assurer la viabilité du régime. Ce ne fut pas facile, mais c'était une décision importante à prendre.
Depuis 1999, le gouvernement fédéral a investi plus de 35 milliards de dollars pour soutenir le renouvellement de notre système de soins de santé, la recherche et d'autres programmes de promotion de la santé. Le gouvernement a joué un rôle de chef de file pour préserver l'excellente qualité de notre système de santé et s'assurer que celui-ci répond aux besoins de notre population vieillissante.
Il faut que les aînés canadiens sachent qu'ils ont leur place dans la société, qu'ils sont importants pour nous et qu'ils continueront de jouer un rôle capital dans la collectivité. Nous continuerons d'encourager la compréhension et le respect mutuels. Ces aînés qui nous sont chers méritent de bénéficier d'un système de revenu de retraite leur permettant de vivre dans la dignité. Le budget de 2005 témoigne de l'engagement que nous avons pris à cet égard envers nos aînés.
Les députés ici présents ce soir, comme moi-même et d'autres, ont dans leur circonscription de nombreux habitants qui sont sur le point de devenir des aînés ou qui se préparent à cette période de la vie.
Je voudrais poser la question suivante au ministre d'État responsable de la Famille et des Aidants naturels: comment le gouvernement peut-il travailler avec ses autres partenaires sociaux pour s'occuper des besoins et des priorités en évolution des aînés dans les années à venir et pour s'assurer que les mesures que nous prenons maintenant dureront de nombreuses années à venir?
L'hon. Tony Ianno (ministre d'État (Famille et Aidants naturels), Lib.): Monsieur le président, je félicite la députée de York-Ouest, qui travaille auprès des aînés depuis de très nombreuses années. Elle accueille régulièrement des groupes d'aînés à Ottawa. Demain, elle reçoit un groupe de 110 aînés de sa circonscription, que j'espère rencontrer.
Nous avons beaucoup de raisons de nous réjouir de la situation des aînés. En 1980, le taux de pauvreté se chiffrait à 21 p. 100 mais, en 2003, il avait chuté à moins de 7 p. 100. Il y a encore du chemin à faire, mais nous allons collaborer très fort avec les députés. Nous savons que, sans les aînés, qui ont travaillé à édifier notre grande nation, le Canada ne jouirait pas de la démocratie et de la liberté qu'il a et qu'il ne susciterait pas le même respect dans le monde.
Il faut saluer les députés de ce côté-ci de la Chambre qui travaillent depuis de nombreuses années sur les dossiers concernant les aînés. Plusieurs d'entre eux sont présents aujourd'hui, notamment la députée de Beaches—East York et bien d'autres de nos collègues qui continuent à nous épauler pour faire en sorte que nous conservions toujours une longueur d'avance lorsqu'il s'agit des aînés que nous respectons tous.
Il y a un an à peine, le groupe de travail du premier ministre a fait 17 recommandations et déjà 13 d'entre elles ont été mises en oeuvre. Le gouvernement s'emploie à réduire la pauvreté chez les aînés et à leur donner la dignité et le respect que nous souhaitons tous pour notre propre famille.
La députée a mentionné l'augmentation du Supplément de revenu garanti. Pour une personne qui gagne 12 400 $, 433 $ n'est pas une grosse somme, mais c'est un bon point de départ. Cette augmentation coûtera au gouvernement 700 millions de dollars par année. En outre, le gouvernement a prévu un nouveau secrétariat pour les aînés, qui sera constitué lorsque le budget sera adopté. Ce secrétariat permettra au gouvernement d'agir comme centre névralgique et au Cabinet de veiller à ce que les questions de tous les ordres de gouvernement concernant les aînés soient examinées et traitées avec le respect qu'elles méritent.
Lors de la rencontre fédérale-provinciale-territoriale qui s'est tenue à Québec la semaine dernière sur les aînés, les choses ont fort bien démarré. Nombre de ministres provinciaux ont dit vouloir adopter le programme et ont demandé des réunions annuelles pour collaborer sur des questions susceptibles d'améliorer considérablement la qualité de vie des aînés.
Nous collaborons avec d'autres ministères, notamment en ce qui concerne le logement. Le ministre du Travail et du Logement a bien voulu accepter de travailler avec nous de façon à ce qu'une partie des fonds destinés au logement abordable soient réservés aux aînés à faible revenu et aux personnes handicapées, par exemple dans le cadre du PAREL, afin de permettre aux personnes âgées de demeurer plus longtemps à la maison et de vivre dans la collectivité qu'ils ont aidé à bâtir.
Nous nous efforçons de mettre en avant différentes initiatives, notamment des suppléments au loyer, qui assureront aux aînés un logement abordable, comme le député d'en face l'a demandé dans sa question un peu plus tôt aujourd'hui. Comme nous le savons, quels que soient les critères retenus, qu'il s'agisse du seuil de faible revenu ou du panier de consommation, nous visons à faire en sorte que les aînés atteignent un niveau où ils ne vivront pas dans la pauvreté. Nous savons que les personnes âgées vivent plus longtemps et en meilleure santé. Nous voulons donc nous assurer qu'ils aient les logements et les dollars nécessaires pour participer pleinement à la société.
Cela nous amène au programme Nouveaux Horizons. Ce programme permettra aux organismes à l'échelle du pays qui s'occupent des aînés de trouver des façons de réduire l'isolement, d'inclure les aînés qui ont déjà fait une contribution importante et qui ont encore beaucoup à donner, et de veiller à leur intégration, que ce soit auprès des jeunes dans les écoles ou à titre de mentors dans la société en général.
Nous savons que nos aînés font deux fois plus de bénévolat que les autres. Nous devons nous assurer qu'ils disposent des outils nécessaires pour continuer à nous aider à rendre nos vies meilleures.
Bien entendu, il y a un grand nombre de dossiers qui sont aussi d'une extrême importance et qui nous permettraient de faire en sorte que nos aînés puissent contribuer de bien des façons à améliorer notre qualité de vie.
Nous sommes en pourparlers avec le ministre responsable de l'ACDI au sujet de Corps Canada et de la possibilité d'enrôler nos aînés dans ce programme. À l'occasion de la Journée des anciens combattants, il arrive que nos aînés se rendent dans les écoles et qu'il discutent avec les enfants. Ils racontent les sacrifices qu'ils ont consentis afin que nous puissions profiter de cette liberté qui nous est chère.
Nous voulons étendre ces initiatives. Nous voulons trouver des façons de collaborer avec les groupes communautaires. Le programme Nouveaux Horizons est le moyen rêvé.
Il y a bien d'autres questions dont nous pourrions continuer à parler, que ce soit le dossier des aidants ou celui des personnes âgées handicapées. Nous devons trouver des moyens de les garder dans leur foyer. Le ministère des Anciens combattants, par exemple, a recours pour ce faire à un programme d'autonomie à domicile.
Nous devons trouver des moyens de permettre à nos aînés de créer, comme nous l'avons fait, en collaboration avec le ministre du Logement, dans le cas des pavillons jardins et des appartements pour personnes âgées. Ces initiatives permettent aux aînés d'avoir de la compagnie à la maison s'ils le désirent. Avec l'argent versé par le gouvernement, dans le cadre du programme PAREL, il peuvent aménager une nouvel appartement ou s'assurer une nouvelle source de revenus. Ce programme permet également à une personne âgée à faible revenu de cohabiter avec une autre personne âgée qui a justement l'espace nécessaire. Cela leur permet à tous les deux de vivre à un prix raisonnable et d'avoir un revenu raisonnable.
Je pense qu'il s'agit là de l'approche créative qui faisait l'objet de la question de la députée. Elle a demandé quelles mesures nous prenions pour améliorer la qualité de vie de nos personnes âgées. Bien d'autres idées germeront. En collaboration avec le ministre du Logement, j'essaie de voir si la SCHL ne finira pas par offrir le prêt hypothécaire inversé pour les aînés à faible revenu. Nous avons bien hâte de recevoir de bonnes nouvelles à cet égard.
L'enthousiasme règne à l'intérieur de notre caucus. Les députés restent en contact avec nous et nous transmettent des suggestions qui, selon eux, pourraient fonctionner. Nous lançons encore une fois un défi aux députés d'en face pour qu'ils soumettent leurs idées. Ensemble, nous pouvons améliorer la qualité de vie des personnes âgés pour qu'elles ne vivent plus dans la pauvreté.
L'hon. Judy Sgro (York-Ouest, Lib.): Monsieur le président, lorsqu'il est question des aidants naturels, bon nombre d'entre nous connaissent des gens partout au pays, dans nos circonscriptions, qui prennent soin de parents âgés. Bien souvent, les femmes doivent laisser leur emploi pour s'occuper d'un parent âgé ou d'un membre de la famille gravement malade.
Je sais que les gouvernements en parlent depuis longtemps. Je suis consciente que nous avons entamé un nouveau processus afin de combler ces besoins. Le ministre a-t-il quelque chose à nous dire aujourd'hui, alors qu'il poursuit son important travail à cet égard?
L'hon. Tony Ianno: Monsieur le président, ce qui est excitant, c'est que nous organisons des tables rondes d'un bout à l'autre du pays. Nous recevons les conseils de professionnels, d'aidants naturels et de bénéficiaires, qui nous font part de beaucoup d'idées. Nous espérons que, vers la fin de septembre, nous aurons cerné les besoins pour lesquels il y a un vide, afin de venir en aide à ceux qui améliorent la vie de leurs êtres chers.
En plus de ce qui a été mentionné plus tôt, il faut tenir compte du crédit d'impôt pour frais médicaux et des sommes d'argent qui seront éventuellement affectées aux soins à la maison. De toute évidence, les soins de relève sont très importants pour donner un peu de répit aux gens, surtout aux aidants naturels qui ne sont pas payés.
Développement social Canada a également lancé une page web interactive qui permettra aux aidants naturels d'exprimer leurs préoccupations et de faire part de leurs expériences. Nous pourrons ainsi continuer d'avoir de nouvelles idées afin d'améliorer leur vie.
Au cours de la première semaine seulement, 3 500 visiteurs ont fait part de leurs expériences personnelles et de leurs suggestions. Nous invitons tous les Canadiens à visiter le site Internet de Développement social Canada et à communiquer avec nous s'ils ne peuvent pas prendre part aux prochaines tables rondes.
M. Tony Martin (Sault Ste. Marie, NPD): Monsieur le président, il y a quelques points que je voudrais soulever en ce qui a trait à la garde d'enfants, puis j'aimerais poser quelques questions. L'une d'elle porte sur la récupération de la prestation fiscale nationale pour enfants. J'espère également avoir le temps de poser une question sur le logement.
Ce qui me préoccupe en ce qui a trait au rôle que le gouvernement doit jouer au chapitre du financement des programmes de garde d'enfants, c'est que jusqu'à présent, cela n'a rien d'un programme national. Il s'agit encore en grande partie d'un méli-mélo d'accords. Les fonds promis seront versés si le budget est adopté, espérons-le, mais il n'existe pas réellement de structure qui nous permette de considérer ce programme comme un programme national. Ce n'est pas comme le programme de soins de santé.
Le gouvernement est parti du bon pied avec le Manitoba et la Saskatchewan pour ce qui est de leur engagement à l'égard de certains projets. J'espérais qu'il poursuivrait dans la même voie dans le cadre des discussions qu'il a engagées avec les autres provinces afin de les convaincre d'accéder aux mêmes promesses de soins de garde d'enfants communautaires sans but lucratif. Je crois que c'est ce qui permettra le mieux de répondre aux besoins des familles et des enfants.
S'agit-il d'un programme national? Dans la négative, que propose de faire le ministre pour en faire un programme national?
Au cours des derniers mois, les conservateurs ont fait de nombreux commentaires. Tout d'abord, qu'il suffise de dire qu'il n'est pas ici question de nounoucratie ou de gardiennage d'enfants. C'est une conception pour le moins simpliste.
Nous devons aussi, et je pense que le ministre sera de cet avis, reconnaître le travail et la contribution des parents qui restent à la maison. Nous devons trouver le moyen de le faire. Il ne faut toutefois pas préconiser une solution au détriment de l'autre. Nous devons résoudre la question et examiner des moyens d'aider ces parents, en particulier ceux qui en ont le plus besoin. Ce serait mal de préconiser un service de garde d'enfants de bonne qualité au détriment des parents qui restent à la maison. Ce serait faire preuve de fourberie.
Je voudrais également critiquer rapidement l'argument selon lequel il faudrait créer un régime quelconque d'avantages fiscaux pour les parents qui restent à la maison, et je voudrais également parler de ce que cela coûterait au pays. Je pense que le ministre en a parlé brièvement.
MM. Gordon Cleveland et Michael Krashinsky ont rédigé un texte que j'ai trouvé plutôt instructif. Selon eux, la rémunération des parents qui restent à la maison, l'un des principaux éléments de la politique des conservateurs en matière de services de garde d'enfants, n'a aucun sens du point de vue financier. La déduction fiscale de 2 000 $, soit environ 600 à 800 $ par enfant, pour une famille ordinaire ne tient pas compte de ce que coûterait réellement la rémunération des parents à la maison. C'est une autre façon d'expliquer ce que veulent faire les conservateurs.
Si un nombre important de parents décident de rester à la maison, les coûts sociaux seront astronomiques. Il faudrait leur verser au moins l'équivalent des prestations de maternité et des prestations aux parents, actuellement de 55 p. 100 de la rémunération normale, jusqu'à concurrence de 413 $ par semaine. Ces prestations, qui couvrent la première année d'existence d'un enfant, coûtent déjà environ 2,7 milliards de dollars par année. Et ce n'est que pour la première année. Si on multiplie ce nombre par six, soit la période d'âge préscolaire, il en coûterait plus de 16 milliards par année. Je crois qu'on parlait plutôt d'un montant de 10 milliards de dollars. Je suis d'accord avec eux sur ce point. C'est probablement ce qui finira par se produire si nous nous dotons d'un programme national, dans lequel nous investirons 1 p. 100 du PIB.
Selon les économistes, et en particulier Charlie Coffey, chaque dollar investi dans un programme national de garderies de qualité rapporterait deux dollars au bout du compte. Il est question d'environ 16 milliards de dollars par année et nous ne sommes pas tout à fait sûrs de la valeur du rendement, bien que nous sachions qu'il y aurait un rendement.
Comme je l'ai dit il y a quelques minutes, je n'ai pas d'objection à ce qu'on évalue la contribution des parents qui restent à la maison et l'excellent travail qu'ils accomplissent en s'occupant de leurs enfants. Toutefois, il y a un coût rattaché à cela.
Les congés de maternité et les congés parentaux ne profitent qu'à environ 60 p. 100 des parents qui ont des nouveau-nés. Il faudrait 27 milliards de dollars par année, auxquels s'ajouteraient des milliards de dollars en pertes de productivité, pour étendre cet avantage à toutes les familles, sans compter la perte de revenus pour ces familles et la perte de recettes fiscales courantes et à venir pour l'État.
Selon ces économistes, la saignée serait de 83 milliards de dollars par année pour l'économie. Si on additionne toutes ces sommes, le coût de la proposition des conservateurs s'élève à plus de 100 milliards de dollars par année. Voilà ce dont nous parlons. Voilà la proposition des conservateurs. Si nous l'acceptons, nous devrons subir cette conséquence.
Le nouveau programme national de garderies que nous envisageons serait bénéfique pour les parents qui choisissent de rester à la maison. Il leur permettrait de se donner un répit. Les parents qui voudront en profiter à divers moments convenant à leur emploi du temps pourront le faire. Un programme de garderies bien accessibles dans une collectivité sera bénéfique pour toutes les familles de cette collectivité, à moins de manquer vraiment d'imagination.
Permettez-moi de dire un mot de la dimension économique des garderies, dont ont parlé avec beaucoup d'éloquence le vice-président de la Banque Royale du Canada, Charles Coffey, et, tout récemment, le gouverneur de la Banque du Canada, David Dodge. Pour chaque dollar affecté aux services de garde, la société récupère deux dollars de retombées économiques sous forme d'augmentation des recettes fiscales et de diminution du coût des services sociaux, de l'éducation et des soins médicaux. Charles Coffey s'est exprimé ainsi:
Le développement du cerveau de l'enfant au cours des six premières années de la vie jette les bases de l'apprentissage, du comportement et de la santé pendant toute sa vie. Une éducation de qualité supérieure pour les jeunes enfants produit des résultats positifs et des économies à long terme, notamment: l'amélioration des résultats scolaires, la réduction des placements dans des classes spéciales, des taux moins élevés de décrochage scolaire et un potentiel de revenu accru tout au long de leur vie. Cette éducation de qualité supérieure fait une différence pour les enfants, certes, mais elle compte aussi pour leur parents employés. De plus en plus, les employeurs reconnaissent que l'accès à de bons programmes destinés à la petite enfance est essentiel pour recruter et conserver les parents comme employés. On estime que les conflits entre les obligations professionnelles et familiales coûtent aux entreprises canadiennes environ 2,7 milliards de dollars en temps de travail perdu en raison des absences. |
Nous pourrions peut-être ajouter cela aussi aux coûts de la proposition des conservateurs. Le gouverneur de la Banque du Canada, David Dodge, a dit:
Les parents, les psychologues, les sociologues et les spécialistes en santé publique comprennent intuitivement depuis longtemps l'importance du développement de la petite enfance, mais ce n'est que depuis environ 25 ans que les scientifiques, les médecins et les spécialistes en sciences sociales reconnaissent enfin son rôle crucial. |
En somme, les documents montrent clairement que l'intervention visant à améliorer la santé de la mère et de l'enfant, à soutenir les parents et à fournir une éducation préscolaire est un moyen efficace d'améliorer la capacité d'apprendre à six ans, ce qui rend plus efficaces les études primaires comme moyen de formation du capital humain. |
Selon le ministre, jusqu'à maintenant, qu'est qui fait de cela un programme national?
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, il ressort de l'évolution des discussions avec les provinces que les ententes se ressemblent considérablement. Elles sont semblables à hauteur de 80 ou 90 p. 100 d'une province à l'autre.
Le système national que j'envisage pourrait être comparé à ce qui se passe pour l'éducation, qui est de compétence provinciale, mais qui comporte des similitudes à l'échelle de l'ensemble du pays. Certaines des attentes à l'égard du système d'éducation sont les mêmes, que ce soit celui de la Colombie-Britannique, de l'Île-du-Prince-Édouard ou de Terre-Neuve-et-Labrador. Il y a des différences. Les intervenants des divers systèmes les connaissent bien et les mettent en relief, mais tout observateur de l'extérieur verrait bien davantage les ressemblances que les différences.
C'est vraisemblablement de cette manière que va évoluer l'apprentissage préscolaire et la garde des jeunes enfants. On verra des différences d'une province ou d'un territoire à l'autre mais on s'entendra par ailleurs sur les caractéristiques d'un système réglementé d'apprentissage préscolaire et de garde des jeunes enfants de qualité pour l'ensemble du Canada.
Pour ce qui est des calculs du député, j'ai déjà dit que chaque programme présenté représente un choix. Or, certains choix ne concernent pas vraiment l'apprentissage préscolaire et la garde des jeunes enfants. Il ressort des calculs que a déduction de 2 000 $ ne constitue pas un choix qui concerne la garde d'enfants. C'est un choix qui concerne une déduction fiscale.
Il ne s'agit pas d'une prestation relative à la garde d'enfants. Évidemment, si tel était le cas, toutes les répercussions dont le député a parlé s'appliqueraient. S'il s'agissait d'une proposition valable en matière de garde d'enfants, alors il en découlerait des incidences sur les comportements, sur l'économie et sur les coûts, comme il l'a dit.
Mais il ne s'agit pas d'une proposition valable en matière de garde d'enfants et les parents ne la prendraient pas au sérieux. Elle n'aurait donc pas les répercussions dont le député a parlé.
Nous avons toujours été conscients des facteurs économiques liés à la garde d'enfants et des observations qu'ont faites Charles Coffey et David Dodge. Pendant toutes ces années, il y a 20 ou 30 ans, nous avons parlé de la grande importance des premières années d'un enfant. Nous avons parlé de l'importance pour un enfant de connaître l'expérience d'aller à l'école. Nous avons parlé de l'importance de l'école pour la situation économique et sociale de la famille, et de l'apprentissage que l'enfant pouvait faire à la maison. Qu'est-ce que tout cela veut dire dans une grande mesure? Il s'agit là du milieu d'apprentissage et de développement. Il s'agit d'interactions qui ont lieu au cours de cette période, qu'elles soient stimulantes ou non.
Nous avons toujours su ces choses-là. La difficulté que nous éprouvons lorsque notre vie change, lorsque notre société change et lorsque notre façon de vivre change, c'est de savoir comment nous pouvons reproduire de notre mieux cette expérience si importante pour le développement d'un enfant.
Notre défi est de créer l'environnement propice pour ces enfants. Comment pouvons-nous le relever maintenant que nos conditions de vie sont différentes?
M. Tony Martin: Monsieur le président, a-t-on analysé cette récupération? C'est une question que m'ont posée des personnes vivant dans la pauvreté. Combien de personnes travaillent pour garder le Supplément de la prestation nationale pour enfants, mais ne gagnent pas suffisamment pour être admissibles à un supplément d’aide sociale? Combien de personnes handicapées incapables de travailler sont-elles assujetties à la récupération du supplément?
Combien de personnes s’occupant d’un enfant handicapé de moins de six ans sont assujetties à la récupération du supplément? Combien de personnes s’occupant d’un bébé de moins d’un an sont assujetties à la récupération du supplément? Combien de personnes qui vivent dans un refuge pour sans-abri et sont incapables de trouver un logement abordable sont assujetties à la récupération du supplément? Combien de personnes consacrent plus de la moitié de leur revenu au loyer et combien dépendent des banques d’alimentation pour nourrir leurs enfants? Combien d'entre elles perdent le supplément?
Je laisse aux députés d'en face le soin de décider qui va répondre. Est-ce qu'une partie de cet argent récupéré servira à renforcer l'IPAC, pour que les gens qui offrent ces services importants et exigeants bénéficient d'un financement de base?
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, il faudra que nous vérifions ces points pour le député. Nous n'avons pas les réponses. Nous ne sommes pas certains de trouver des réponses à ces questions, mais nous essaierons.
L'hon. Tony Ianno: Monsieur le président, nous travaillons en concertation avec le ministre et nous comprenons bel et bien la problématique du logement abordable de ce côté-ci de la Chambre. J'ai fait partie du groupe de travail d'Anne Golden à Toronto à propos de l'itinérance et, bien sûr, des collègues du caucus ont consacré de très grands efforts à ce rapport pour garantir que tous nos travaux débouchent sur l'IPAC.
Un montant d'un milliard de dollars a été dégagé aux fins du logement de transition dans l'ensemble du pays et je pense que des fonds ont aussi été débloqués dans la localité du député. Cela a donné des résultats extrêmement bons pour de nombreux Canadiens qui n'ont pas les revenus voulus, pour leur permettre d'avoir le logement qu'ils désirent. Cela a constitué un grand pas en avant, ne serait-ce que dans ma circonscription. De nombreuses unités de logement de transition ont été construites, cela a donné de très bons résultats, et il y en aura d'autres.
Le programme national d'action pour le logement qui va se réaliser, avec 600 millions de dollars en Ontario, la province du député, va beaucoup contribuer à la construction de logements abordables. L'administration des coopératives d'habitation a été transférée au Fonds fiduciaire pour le logement au Canada Je crois que cela se passe extrêmement bien, grâce à l'appui de nombreux députés.
Il se passe beaucoup de choses dans le domaine du logement. Comme je l'ai mentionné plus tôt, les suppléments pour le loyer aideront les personnes à faible revenu qui sont inscrites sur des listes d'attente dans de nombreuses régions. Le précédent gouvernement conservateur en Ontario, j'étais allé voir le ministre Hodgson à l'époque, était tout à fait contre le logement abordable. Toutefois, nous avons persévéré et maintenant, avec un gouvernement qui coopère davantage avec nous, nous envisageons avec enthousiasme de veiller à ce que tous les Canadiens aient le type de logement dont ils puissent être fiers.
M. Ken Boshcoff (Thunder Bay—Rainy River, Lib.): Monsieur le président, à titre de président du Sous-comité de la condition des personnes handicapées, je suis heureux de faire quelques brèves remarques avant de poser ma question au ministre.
L'attachement au traitement de tous sur un pied d'égalité constitue un élément distinctif de notre pays. La citoyenneté canadienne repose sur les principes de dignité, de justice et d'équité auxquels a droit, dans tous les aspects de la vie quotidienne, toute personne qui habite au Canada, qu'elle soit un homme, une femme ou un enfant. Nous croyons que tout le monde a le droit de vivre, d'apprendre, de travailler, d'être un membre actif de sa collectivité et d'avoir les responsabilités et les avantages d'une telle appartenance.
Le gouvernement du Canada est profondément convaincu que tout le monde devrait être en mesure de participer et de contribuer à la vie en société. Aussi s'efforce-t-il de fournir à chacun les outils, les ressources et les occasions de réaliser son potentiel. Il fait particulièrement attention à ce que personne ne soit laissé pour compte.
Les habitants de ma circonscription, Thunder Bay—Rainy River, appuient sans réserve ces objectifs. Nos résultats antérieurs en matière d'intégration des personnes handicapées renforcent notre engagement. Le Canada a d'ailleurs été l'un des premiers pays à inscrire dans sa Charte des droits et libertés les droits des personnes handicapées.
Depuis 25 ans, le gouvernement du Canada prend d'importantes mesures, en particulier dans les domaines de l'emploi, du revenu et de l'impôt, pour aider les personnes handicapées à niveler les obstacles à l'intégration. Des dépenses directes de programmes, des mesures fiscales, une réglementation, des soutiens communautaires et, bien sûr, la prestation d'invalidité dans le cadre du Régime de pensions du Canada font de notre pays un chef de file mondial dans le domaine du soutien aux personnes handicapées et à leur famille.
Plus d'une personne sur cinq est touchée au Canada. Quelque 3,6 millions de Canadiens sont handicapés et 2,8 millions de personnes s'occupent d'un membre de la famille ou d'un ami qui a un handicap ou un problème chronique de santé. Le vieillissement de la population entraînera une forte croissance de ce nombre, puisque l'incidence des handicaps augmente avec l'âge. Ainsi, l'intégration des personnes handicapées et de leur famille ne représente pas seulement un objectif social louable, mais de plus en plus un impératif économique.
Conscient de ce fait, le gouvernement du Canada travaille avec les gouvernements, les secteurs bénévole, communautaire et privé ainsi que toutes les personnes intéressées à l'élaboration d'une stratégie globale d'intégration à part entière des personnes handicapées dans toutes les facettes de la vie en société. Les liens étroits entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont servi d'assises à cette démarche visant en particulier à augmenter l'emploi, le revenu et l'aide aux personnes handicapés.
Les ministres responsables des services sociaux continuent de traiter comme une priorité collective le dossier des personnes handicapées. De son côté, le gouvernement du Canada prend des mesures pour assurer la participation pleine et entière des personnes handicapées à la fonction publique fédérale. Les politiques gouvernementales visent à créer des milieux inclusifs et faciles d'accès.
Nos objectifs ont reçu et reçoivent l'appui solide de parlementaires qui ont été des acteurs essentiels dans la sensibilisation du gouvernement aux enjeux liés aux personnes handicapées et aux mesures à venir. Les parlementaires occupent les avant-postes et sont le lien entre le gouvernement et les personnes handicapées. Ce sont des intervenants indispensables, qui mettent en lumière des difficultés éprouvées par leurs électeurs. Grâce aux travaux des comités, les députés aident aussi à trouver des solutions à ces problèmes et cherchent à faire disparaître les obstacles qui limitent la participation des personnes handicapées à la vie communautaire.
Le Sous-comité de la condition des personnes handicapées, en particulier, sert de tribune aux personnes handicapées et aux organismes d'intervention, qui font ainsi connaître au gouvernement les mesures qui fonctionnent bien ou non et les améliorations possibles. Ce rôle est crucial dans l'élaboration de politiques et de programmes dynamiques.
Ce sont les recommandations passées du sous-comité qui expliquent en grande partie les mesures actuelles du gouvernement, comme la simplification du processus de demande de la prestation d'invalidité en vertu du Régime de pensions du Canada, la mise en place du rétablissement automatique de la prestation d'invalidité après une tentative infructueuse de retour sur le marché du travail en raison de la récurrence du handicap moins de deux ans plus tard et l'amélioration des avantages fiscaux et des procédures de demande, pour les personnes handicapées.
Les travaux et les recommandations du Groupe de travail sur les personnes handicapées, qui remontent à 1996, ont également joué un rôle essentiel dans l'orientation des interventions du gouvernement du Canada; la majorité des recommandations en matière d'emploi et de soutien communautaire a été appliquée. L'avis du groupe de travail a été décisif pour l'avancement de la cause des personnes handicapées. Il a permis de définir un cadre fondamental d'action aux échelons fédéral, provincial et territorial, dont il est question dans le rapport intitulé À l'unisson, publié en 1998, sur lequel nous continuons d'asseoir nos approches en matière de politiques.
Les crédits et les programmes nés de ces travaux ont ouvert les horizons aux personnes handicapées. Ces dernières et leur famille, les étudiants, les entrepreneurs, les athlètes et les organismes desservant les personnes handicapées ont tous bénéficié des nouveaux débouchés ainsi offerts ces dernières années. Ces avancées prouvent le progrès incroyable et les nombreuses réalisations possibles lorsque les parlementaires, le gouvernement du Canada, les organismes et, surtout, les personnes handicapées travaillent ensemble à l'amélioration de la qualité de vie.
Nous accomplissons peut-être des progrès, mais il nous reste beaucoup à faire pour assurer l'intégration et l'égalité des chances des personnes handicapées.
Les résidants de Thunder Bay—Rainy River, la circonscription que je représente, en fait tous les Canadiens savent que pour réaliser cette intégration et cette égalité, les obstacles qui empêchent encore les personnes handicapées de vivre une réalité que le reste de la population tient pour acquise doivent eux aussi disparaître. Il ne faut pas que les percées accomplies nous rendent exagérément optimistes.
Il reste beaucoup de questions à régler. Les personnes handicapées font partie des groupes les plus pauvres de la société canadienne. Un trop grand nombre de personnes handicapées continuent d'être confrontées à des problèmes de transport, de logement, d'éducation, d'emploi et d'attitude qui les empêchent de réaliser leur plein potentiel. Cette situation est inacceptable, tant du point de vue du gouvernement du Canada que de l'ensemble de la population. On peut et on doit faire mieux,
Le gouvernement fédéral ne peut pas y arriver seul. Cette approche ne serait pas judicieuse, car il n'y a pas un seul secteur qui, à lui seul, a toutes les réponses et les ressources nécessaires. Il faut la participation et le soutien d'un vaste éventail de secteurs pour faire progresser le programme d'action: les provinces, les territoires, les organismes desservant les personnes handicapées, les municipalités, les collectivités, les secteurs bénévoles et communautaires et le secteur privé.
Ce défi commun doit être relevé; c'est non seulement la bonne chose à faire, mais également l'élément essentiel à la résolution de nombreux autres enjeux sociaux et économiques. Pour s'attaquer à la pauvreté, à l'itinérance, à la croissance économique, à l'habitabilité des villes, à la qualité des soins de santé, à la violence et au crime, aux soins des jeunes enfants, au renforcement des communautés autochtones et aux enjeux liés aux personnes âgées, il faut absolument que les personnes handicapées soient de la partie.
Dans un contexte de vieillissement de la population, l'avenir du Canada dépend d'une action concertée et renouvelée dans le dossier des personnes handicapées. Ce dont on a besoin, c'est d'une orientation et d'un programme axés sur les citoyens, souples, inclusifs et définis dans un cadre précis de développement social. Tous les ministères et organismes d'État et tous les ordres du gouvernement doivent intégrer la question des personnes handicapées dans leur planification des politiques et des programmes. Nous ne pouvons pas limiter notre analyse à notre action au chapitre des personnes handicapées; il faut décider comment intégrer la question dans tous les dossiers qui sont au premier plan des préoccupations de la population. Cela est indispensable à l'intégration.
Le champ d'intervention dans ce domaine ne doit pas se limiter aux gouvernements, mais englober l'ensemble du pays. La relance de notre action en faveur des personnes handicapées exige la sensibilisation de la population et une approche mieux ciblée des partenaires possibles, afin de progresser sur plus d'un front à la fois.
Pour y arriver, le gouvernement du Canada, en collaboration avec les provinces, les territoires et les personnes handicapées, a entrepris d'élaborer un plan d'action étalé sur 10 ans. Nous travaillons actuellement à recentrer nos efforts, afin de les associer plus étroitement aux autres grandes priorités et d'élaborer des réponses plus efficaces sur le plan des politiques et des programmes, pour une plus grande intégration des personnes handicapées d'ici 10 ans. Le travail est loin d'être terminé. Nous sollicitons les idées et les innovations de tous les milieux quant à la façon de remplir cette tâche d'importance capitale.
Je félicite le ministre de s'être personnellement engagé à faire une priorité du dossier des personnes handicapées dans son ministère et au Cabinet. Étant donné l'importance de ce dossier du point de vue de la croissance économique et de la cohésion sociale, je demande au ministre de nous faire part de quelques-unes des mesures qui, à son avis, doivent être prises pour continuer d'avancer dans ce dossier.
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, je remercie chaleureusement le député d'avoir si bien exposé les tenants et les aboutissants de cette question. Je sais que ce domaine des personnes handicapées est une priorité pour lui, vu le travail qu'il a accompli à ce chapitre comme maire de Thunder Bay et qu'il continue d'accomplir à la Chambre.
Il y a quelque 20 ans, la principale répercussion de la Charte des droits et libertés a été de nous rappeler les droits de chaque personne, notamment des victimes de discrimination. Vingt ans et plus auparavant, la plupart des handicapés vivaient à l'écart de nos yeux et de notre esprit. La Charte a contribué à nous rappeler leur présence. Nous devons les avoir présents à l'esprit dans toutes nos activités.
Mais avant tout, il nous faut construire sur des fondations solides. Autrement dit, comme l'a mentionné le député, travailler en étroite collaboration avec nos partenaires provinciaux et territoriaux, et concentrer les processus et les relations existant aux niveaux fédéral, provincial et territorial sur la formulation des éléments clés de ce plan d'action décennal. Cela signifie renforcer encore les liens avec les personnes handicapées et en faire de véritables partenaires dans l'élaboration d'un plan.
Nous allons également nous efforcer de combler ce qui est généralement considéré comme une lacune très grave: l'inaccessibilité généralisée des aides et des dispositifs techniques, des services d'aide personnelle et autres.
Il importe d'explorer les innovations permettant d'améliorer la situation des handicapés au point de vue emploi et revenus, notamment d'élaborer des stratégies à l'égard des organismes employeurs. Il importe de bien mettre en lumière que l'invalidité est une question sociale cruciale qui intervient dans d'innombrables secteurs où l'État peut intervenir: pauvreté, emploi, apprentissage, logement et transport, pour n'en nommer que quelques-unes. Par conséquent, cela signifie saisir le gouvernement fédéral de la question de l'invalidité afin qu'elle soit au coeur des priorités de tous ses ministères et organismes.
Je suis également déterminé à oeuvrer avec tous mes collègues afin d'amener le gouvernement fédéral à devenir un employeur modèle pour les personnes handicapées et afin de promouvoir des services de grande qualité en leur faveur.
C'est essentiel, nous devons éveiller et accroître la conscience du public à l'ampleur et à la pertinence croissantes des enjeux que pose l'invalidité à l'ensemble des Canadiens.
Notre pays doit se préparer à affronter la réalité démographique imminente du vieillissement de la population. Grâce à la science et à la médecine, de plus en plus de personnes de tous âges peuvent vivre plus longtemps et ce, de façon plus productive, plus valorisante, plus satisfaisante et plus inclusive malgré leur handicap.
M. Andrew Scheer (Regina—Qu'Appelle, PCC): Monsieur le président, je partagerai mon temps de parole avec le député de Nepean—Carleton.
Je voudrais poser tout de suite des questions au ministre et le questionner plus particulièrement sur certaines formes de discrimination dont il n'a peut-être pas tenu compte dans son programme bureaucratique de gardiennage d'enfants. En effet, ces initiatives en matière de dépenses annoncées à la hâte ne tiennent pas compte des besoins des familles rurales. Le gros de l'argent—je pense que c'est en fait tout l'argent—est destiné à la garde d'enfants en établissement dans un cadre urbain. Les familles rurales, qui misent sur des services de garde d'enfants saisonniers et non réglementés et qui n'ont pas accès à des programmes en milieu urbain, sont laissées pour compte.
Le ministre pourrait-il me dire pourquoi il met en oeuvre un système qui n'offre aucun soutien aux parents vivant en milieu rural relativement aux choix qu'ils font pour la garde de leurs propres enfants?
L'hon. Ken Dryden: Pour commencer, monsieur le président, c'est faux. Il y a deux semaines environ, nous avons annoncé notre programme à Terre-Neuve, plus précisément en banlieue de Gander, dans le village de Glenwood, où se trouve une garderie.
L'ensemble du programme est axé sur la prestation de services et sur la création de possibilités pour les enfants, où qu'ils habitent. Dans les petites localités, cela pose un plus grand défi, mais dans ce cas comme dans celui de l'enseignement, on s'efforce constamment de relever ce défi. On travaille d'autant plus fort pour trouver la formule qui convient aux collectivités rurales et aux collectivités urbaines.
Il n'y a jamais eu de formule à caractère particulièrement urbain en cette matière. Il n'y en a pas eu et il n'y en aura jamais. Il s'agit d'un système d'apprentissage et de garde pour les jeunes enfants partout au pays, ce qui veut dire autant dans les petites localités que dans les grandes.
M. Andrew Scheer: Il a peut-être tenu une conférence de presse dans un petit village, monsieur le président, mais il n'encourage certainement pas les parents de toutes les régions rurales à prendre leurs propres décisions en ce qui concerne la garde de leurs enfants.
J'ai lu quelque part que moins de 10 p. 100 des parents en Saskatchewan choisissent d'envoyer leurs enfants aux garderies organisées. Ils choisissent plutôt de faire garder leurs enfants dans des garderies familiales, des gardiennes de quartier ou des garderies confessionnelles. Pourquoi le ministre veut-il obliger les 90 p. 100 des parents qui choisissent de ne pas envoyer leurs enfants dans une garderie bureaucratisée à payer deux fois: une fois pour leur choix de préférence et une autre pour financer le programme que veut leur imposer le ministre?
Il ne s'agit pas de choisir un parfum de crème glacé. Il s'agit de faire le meilleur choix pour nos enfants. Les statistiques nous indiquent que la grande majorité des parents canadiens veulent choisir comment faire garder leurs enfants; ils ne veulent pas que le ministre leur impose un programme prêt-à-porter.
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, ceux qui étaient présents plus tôt dans la soirée savent qu'on a déjà répondu plusieurs fois à cette question, en grande partie. L'argument est erroné. Ceux qui ont assisté à la déclaration sur les garderies à Regina ont vu la réaction du public, du ministre et du premier ministre de la province; ils les ont entendus dire combien cette initiative sera importante pour l'éducation préscolaire et le soin des enfants dans la province.
Je ne sais pas exactement combien d'argent cela représente pour la Saskatchewan, mais ce sera près du double de ce que cette province dépense actuellement en éducation préscolaire et en garderies. Ce sera presque le double de ce qu'elle fait en ce moment. Voilà l'incidence que cela aura sur toute la province, et les possibilités que cela offrira.
M. Andrew Scheer: Monsieur le président, je veux être sûr de bien comprendre. Le ministre ne sait pas où va l'argent, mais il sait que le montant a doublé et que ce doit donc être une bonne chose. C'est une attitude tout à fait caractéristique des libéraux. S'il y a un problème, les libéraux investissent de l'argent. Si le problème subsiste, ils en investissent davantage.
Ce n'est pas d'argent dont nous parlons. Je suis certain que cela a grandement réjoui les fonctionnaires et le premier ministre socialiste de la province. Je parle au nom des parents qui ont opté pour d'autres formes de services de garde. Je ne parle pas des fonctionnaires du ministère, mais des parents qui ont des enfants et qui font face à ce défi. Quel choix ont-ils?
Pourquoi leur demande-t-on de soutenir le programme du ministre et leur propre choix s'ils estiment que ce programme ne répond pas à leurs besoins particuliers ou s'ils pensent qu'il vaut mieux dispenser ces services et éduquer eux-mêmes leurs enfants ou peut-être les confier à un parent ou à un membres d'un groupe confessionnel ou d'une organisation communautaire? Où ces gens-là cadrent-ils dans cette approche uniformisée?
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, toutes les personnes que le député a mentionnées peuvent encore se prévaloir de tous ces choix. Un des choix qu'elles n'ont guère actuellement, et c'est vraiment honteux, c'est celui des services réglementés. Elles n'ont pas le choix de services de garde de haute qualité. Elle n'ont pas le choix de services inclusifs. Elles n'ont pas autant qu'elles le souhaiteraient accès à des services de garde abordables.
Ce que nous voulons faire, c'est offrir un véritable choix quand vient le moment de déterminer le type de service de garde pour lequel une personne optera, comme le propose le député. C'est très bien. Les parents peuvent encore faire ce choix. Ce que nous voulons, c'est leur offrir aussi la possibilité de se prévaloir de services axés davantage sur le développement, de meilleure qualité et plus abordables.
M. Andrew Scheer: Monsieur le président, j'ai entendu bien des propos insultants depuis le peu de temps que je suis ici, mais jamais rien d'aussi offensant. Le ministre est-il en train de dire que les parents qui choisissent d'élever eux-mêmes leurs enfants et de leur dispenser une éducation préscolaire ne fournissent pas des soins de qualité? Est-il en train de dire que les membres d'une famille, les groupes religieux ou les associations communautaires qui s'occupent d'éducation préscolaire et de garde d'enfants ne fournissent pas des soins de qualité?
Ces intervenants doivent-ils obtenir un certificat du ministre pour être capables de fournir un apprentissage préscolaire? Les parents qui restent à la maison et qui décident d'enseigner à leurs enfants à domicile dispensent-ils une éducation inférieure à celle qui serait fournie dans le cadre de la structure bureaucratique dont rêve le ministre? Tout cela est incroyable.
Je mets le ministre au défi de s'adresser aux milliers de personnes qui ont communiqué avec mon bureau et qui fournissent cet apprentissage préscolaire à leurs propres enfants ou aux enfants de leurs voisins. Je le mets au défi de leur dire qu'ils ne fournissent pas des soins de grande qualité, et de leur dire que les soins qu'ils dispensent sont inférieurs à ceux que souhaitent imposer les bureaucrates à son bureau.
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, le député a parlé de son court séjour à la Chambre. Un des aspects remarquables de ce court séjour est qu'un député peut, semble-t-il, dire ce qu'il pense qu'un autre a dit, même si ces paroles n'ont jamais été prononcées. S'il répète ces paroles sur un ton assez outré, il donne l'impression que c'est ce qui a été dit. Bien entendu, ces paroles n'ont jamais été prononcées. Personne n'a dit cela et personne ne dira jamais cela car personne ne le croit.
Je le répète, si le député avait été ici plus tôt, il aurait entendu que la relation fondamentale, la source centrale du développement et de l'apprentissage de chaque enfant se trouve chez ses parents. Nous le savons tous. Il faut envisager la question dans le contexte actuel, où la grande majorité des parents travaillent tous les deux et laissent leurs enfants aux soins d'un service de garde. Les questions qu'il faut se poser sont: quels sont les types de services de garde offerts? Quelles sont les options? Quels sont les choix?
Notre programme de 5 milliards de dollars sur cinq ans vise à jeter les bases d'un système qui offrira des services de garde d'une plus grande qualité que ceux qui sont actuellement offerts. Il y a beaucoup de bonnes garderies, mais l'objectif général est de hausser le niveau de qualité de ce système et d'améliorer l'expérience de ces enfants.
M. Pierre Poilievre (Nepean—Carleton, PCC): Monsieur le président, soyons honnêtes. Le ministre parle d'une bureaucratisation des garderies qui coûtera de 10 à 12 milliards de dollars, ce qui signifie que les familles devront payer davantage d'impôts et que les parents auront moins de choix.
Le ministre n'est pas honnête au sujet du coût total de ce programme. En fait, tous les groupes qui appuient cette bureaucratisation des garderies affirment qu'elle coûtera entre 10 et 12 milliards de dollars.
Le Nouveau Parti démocratique a déclaré à la Chambre qu'il coûtera au moins 10 milliards de dollars, et je signale que c'est ce même parti qui est l'auteur du dernier budget.
Les principaux groupes qui ont fait des études et qui appuient l'initiative du ministre affirment également qu'elle coûtera entre 10 et 12 milliards de dollars.
Or, le ministre essaie de convaincre les Canadiens que son programme ne coûtera que 1 milliard de dollars par année. Pourquoi le ministre cache-t-il aux contribuables approximativement 10 milliards de dollars des coûts réels de ce programme?
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, je dis depuis le début que 5 milliards de dollars sur cinq ans ont été promis durant la campagne électorale l'an dernier pour aider à mettre en place un système d'éducation préscolaire et de garde d'enfants. Personne ne s'attendait à ce que ce montant soit suffisant pour établir un tel système.
Comme je l'ai répété plusieurs fois, et le député le sait, dans les toutes premières étapes de la création d'un système de soins de santé ou d'un système d'éducation, nous ne savons pas encore quelles seront nos ambitions, nos désirs et nos espoirs à l'égard de ces systèmes.
Il y a cent ans, personne n'aurait pu s'imaginer que dans notre système d'éducation tous pourraient décrocher un diplôme d'études secondaires et qu'il y aurait autant de collèges et d'universités. Il y a quarante ans, personne n'aurait jamais cru que nous aurions un système de soins de santé aussi ambitieux.
Avec les années, les gens ont décidé par eux-mêmes ce qui était important et ce qui ne l'était pas. À l'avenir, les gens décideront quelle importance revêt pour eux l'éducation préscolaire et les garderies.
M. Pierre Poilievre: Monsieur le président, j'ose espérer que la prochaine réponse du ministre sera en proportion du temps qu'il faut pour poser la question. Combien coûtera la mise en oeuvre complète de la bureaucratie nationale des garderies qu'il prévoit établir?Quels seront les coûts annuels de la mise en oeuvre complète du programme?
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, nous ne le savons pas plus que nous savons combien peut coûter la mise sur pied d'un système de soins de santé ou d'un système d'éducation. Les décideurs de l'avenir prendront leurs décisions en fonction des connaissances et des aspirations qu'ils auront alors. Ils auront à prendre les décisions qui les concerneront.
M. Pierre Poilievre: Monsieur le président, la vérité, c'est que le ministre cache le coût réel de ce programme, car il ne veut pas admettre qu'il finira par coûter de 10 à 12 milliards de dollars.
Je vais lui donner une dernière chance. Il est évident qu'il a étudié ce dossier. J'imagine que ses fonctionnaires y travaillent. Comment imaginer qu'il puisse appuyer un programme d'une telle énormité sans connaître le coût total de sa mise en oeuvre?
Les contribuables canadiens ont le droit de savoir combien coûtera la mise en oeuvre intégrale de cette nouvelle bureaucratie gigantesque des garderies. Je lui donne une autre chance. Sa dernière réponse était qu'il ne savait pas. C'est là un “je ne sais pas“ de 10 milliards de dollars. Je vais lui donner une dernière chance de se racheter et d'être honnête avec les contribuables canadiens. Combien ce programme coûtera-t-il?
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, ma réponse demeurera la même, quel que soit le nombre de fois que le député me posera la question. Il y a 100 ans, personne n'aurait su combien coûterait le système d'éducation ni combien coûterait le système de santé. C'est aux gens de décider au moment opportun de leur ordre de priorité et de ce qu'ils sont prêts à payer. Si, dans cinq ans, ils veulent seulement investir 1 milliard de dollars dans le domaine de l'apprentissage et de la garde des jeunes enfants, ce sera leur choix. S'ils veulent dépenser davantage, ce sera aussi leur choix.
M. Pierre Poilievre: Monsieur le président, le ministre vient d'admettre quelque chose de tout à fait étonnant à cette heure tardive. Il vient d'avouer qu'il n'a aucune idée du coût total de mise en oeuvre du programme qu'il est en train de mettre sur pied. Cela me rappelle le registre des armes à feu. Il devait coûter 2 millions de dollars nets. Il a coûté mille fois plus cher aux contribuables canadiens, soit 2 milliards de dollars. Le programme dont il est question ici, qui coûte horriblement cher, pourrait entraîner des dépassements de coûts incroyables compte tenu que le ministère et le bureau du ministre n'ont apparemment pas cherché à déterminer à combien pourraient s'élever les coûts dans trois, quatre, cinq ans.
Le ministre dit qu'il ne sait pas combien le programme coûtera. Les contribuables savent que 10 ou 12 milliards de dollars supplémentaires pour la bureaucratie, c'est énorme. Cela veut dire moins d'argent pour prendre des décisions au sujet de la garde de leurs enfants chez eux. Le programme n'offre aucun nouveau choix aux parents qui restent à la maison ou aux parents qui font garder leurs enfants par un membre de la famille ou par un voisin. Non seulement le programme n'offre pas de nouveaux choix, il prive les parents de certains choix en imposant de nouveaux coûts aux contribuables. Les parents auront donc moins d'argent dans leurs poches. Le ministre ne donne pas de nouveaux choix, il en enlève.
Ma question est fort simple. Le programme coûtera de 10 à 12 milliards de dollars. Comment le ministre assumera-t-il ces coûts? Coupera-t-il dans les soins de santé? Augmentera-t-il les impôts? Ou provoquera-t-il un déficit?
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, il est clair que le député n'a aucun sens de l'histoire, qu'il ne comprend pas comment fonctionne une société, qu'il ne saisit pas comment se font les choix des gens ni ce qu'ils peuvent vouloir faire avec le temps. Il n'a aucun sens de l'histoire. Voilà pourquoi on ne peut répondre à cette question, mais du reste, il est inutile d'y répondre, car les choix se feront plus tard.
Les gens peuvent faire leur choix à tout moment, dans trois ans ou dans cinq ans. Ils peuvent décider. Il faut faire confiance à l'avenir. Il faut faire confiance aux gens de l'avenir. Les parents de demain seront peut-être mieux informés que ceux d'aujourd'hui parce qu'ils auront eu cinq ans de plus pour apprendre et pour faire l'essai du programme.
Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.): Monsieur le président, à cette heure tardive, je suis heureuse de parler de cette importante série de prévisions budgétaires d'un ministère qui a de grandes responsabilités au sein du gouvernement.
On a déjà dit que la véritable valeur d'une civilisation se mesure à la façon dont elle prend soin de ses membres vulnérables et à tous égards, les Canadiens se soucient profondément du bien-être de leurs compatriotes. Nous comprenons que, pour créer des collectivités vigoureuses, une population en santé, une économie dynamique et une société plus juste, il faut que les Canadiens aient les outils et les ressources financières dont ils ont besoin pour se réaliser pleinement. Nous savons qu'en appuyant les personnes défavorisées et en réduisant la pauvreté, nous fortifions la société dans son ensemble.
Il serait difficile de trouver une collectivité parmi nos circonscriptions qui n'est pas touchée par la pauvreté. Cette dernière frappe les Canadiens de tous âges et des quatre coins du pays. Les investissements que fait le gouvernement fédéral dans les citoyens se sont traduits, et se traduisent encore, par une amélioration des conditions de vie, et nous continuons de trouver de nouvelles façons d'appuyer la lutte contre la pauvreté dans les collectivités.
Les enfants qui sont soustraits à la pauvreté peuvent jouir d'une meilleure santé, de plus grandes possibilités de s'instruire, de meilleures conditions de vie et, globalement, d'un meilleur départ dans la vie grâce auquel ils peuvent développer davantage leur potentiel, et ce, aux diverses étapes de la vie.
Les aînés qui disposent d'un revenu adéquat peuvent mener une vie qui n'est pas vraiment différente de celle qu'ils menaient auparavant, une vie qui a un sens, une vie engagée, où ils contribuent au mieux-être de leur famille et de leur collectivité et conservent leur dignité surtout.
En ce qui concerne les personnes handicapées, les Canadiens autochtones et autres groupes vulnérables, le fait d'échapper à la pauvreté peut se traduire par une vie plus riche et mieux remplie.
Comme la pauvreté est un phénomène complexe qui a plusieurs facettes, nous constatons qu'il ne saurait y avoir une seule politique englobant les circonstances particulières de chaque individu, famille et collectivité. Nous savons, par exemple, que le fait d'occuper un emploi ne permet pas nécessairement de se soustraire à la pauvreté. Le Canada compte une population importante de travailleurs à faible revenu.
Pour lutter contre la pauvreté, nous devons collaborer avec nos partenaires, à savoir les gouvernements, les entreprises, le secteur bénévole, les collectivités et les citoyens, en recourant à un ensemble de politiques intégrées. Voilà l'approche du gouvernement du Canada.
Cette approche repose sur trois grands piliers généraux, soit procurer un soutien du revenu aux familles nécessiteuses; appuyer l'intégration au marché du travail des personnes en âge de travailler et offrir des prestations et des services en fonction des difficultés particulières auxquelles se heurtent certaines personnes, leur famille et leur collectivité. Permettez-moi de vous donner quelques exemples.
La Prestation nationale pour enfants est l'un des éléments importants de notre approche visant à enrayer la pauvreté chez les enfants. Fruit de la collaboration entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, la Prestation nationale pour enfants prévoit des mesures de soutien du revenu, des programmes et des services pour les familles à faible revenu avec des enfants, peu importe que les parents fassent partie de la population active ou qu'ils bénéficient de prestations d'aide sociale.
D'ici 2007-2008, les prestations pour enfants que verse le gouvernement fédéral devraient atteindre les 10 milliards de dollars chaque année. C'est donc dire qu'une famille à faible revenu comptant deux enfants recevra un montant maximum de 6 259 $ chaque année sous forme de prestations pour enfants.
Pour leur part, les provinces, les territoires et les premières nations réinvestissent 764,2 millions de dollars en prestations et en services complémentaires pour les familles à faible revenu avec enfants. Cela comprend les prestations pour enfants et les suppléments du revenu gagné, des initiatives destinées aux enfants et reliées aux services de garde, des services à la petite enfance et des services destinés aux enfants qui présentent des risques, ainsi que des initiatives pour les jeunes et des prestations de maladie complémentaires.
En avril 2005, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont rendu public leur cinquième rapport sur la Prestation nationale pour enfants. Ce rapport montre que les investissements effectués par les gouvernements dans l'intérêt des familles à faible revenu continuent de s'accroître.
En outre, le rapport d'évaluation conjointe de la prestation nationale pour enfants, qui sera diffusé sous peu, montre les progrès accomplis à l'égard des trois objectifs de l'initiative, à savoir: réduire l'incidence et la gravité de la pauvreté; favoriser la participation des parents à la population active en faisant en sorte que leur situation ne soit jamais aussi reluisante que s'ils occupaient un emploi et réduire les chevauchements administratifs.
En plus du soutien du revenu, d'autres services sont nécessaires pour épauler les enfants de famille à faible revenu. Nous savons que des services de garde de qualité et abordables non seulement favorisent le développement d'enfants sains, mais représentent également un facteur non négligeable qui se répercute sur la capacité de travailler des parents.
Afin de rendre les services de garde meilleurs et plus accessibles aux familles canadiennes, le gouvernement fédéral a réservé, dans le budget de 2005, la somme de cinq milliards de dollars, sur cinq ans, pour établir un système d'éducation préscolaire et de garde d'enfants dans chaque province et territoire. Jusqu'à maintenant, nous avons conclu des ententes de principe avec cinq provinces, la première étant, et j'en suis fière, la Saskatchewan, dans le but de mettre en place un tel système.
Au moyen de l'initiative Comprendre la petite enfance, nous appuyons aussi les travaux grâce auxquels les collectivités peuvent savoir comment les jeunes enfants se tirent d'affaire et comment la prestation de services locaux peut faciliter le développement des enfants ou y nuire. Dans le cadre de cette initiative, des fonds sont affectés à l'apprentissage et à la mobilisation communautaires, afin que les enfants soient prêts à apprendre quand ils intégreront le système scolaire officiel.
Passons maintenant des jeunes aux personnes moins jeunes. Au Canada, les taux de pauvreté chez les aînés ne cessent de régresser. Il y a une génération, nous avons instauré un régime de pensions de l 'État et la Sécurité de la vieillesse pour nos citoyens qui étaient alors les plus vulnérables. Grâce au Régime de pensions du Canada, à la Sécurité de la vieillesse et au Supplément de revenu garanti, environ 50 milliards de dollars sont versés chaque année aux aînés canadiens sous forme de soutien du revenu direct.
Soucieux d'améliorer davantage la situation des aînés à faible revenu qui demeurent vulnérables, on a annoncé, dans le budget de 2005, des augmentations du Supplément de revenu garanti pour les aînés à faible revenu, soit une augmentation de 2,7 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années.
Au cours des 25 dernières années, le gouvernement du Canada a pris d'importantes mesures, notamment dans le domaine de l'emploi, du revenu et de la fiscalité, afin d'aider les personnes handicapées à surmonter le problème du faible revenu et d'autres obstacles à l'inclusion. En témoigne le Cadre multilatéral pour les ententes sur le marché du travail visant les personnes handicapées, au titre duquel le gouvernement du Canada investit 223 millions de dollars chaque année dans des programmes provinciaux et territoriaux qui ont pour but d'aider les handicapés. Autre exemple: la Prestation pour enfants handicapés, qui vise à aider les familles à revenu faible et modeste à assumer les coûts additionnels se rattachant à l'éducation d'un enfant handicapé.
Dans une mesure qui revêt une grande importance pour la ville de Winnipeg, d'où je viens, le budget de 2004 prévoyait le doublement des fonds affectés à la Stratégie pour les Autochtones en milieu urbain, ce qui portait le total des fonds à 50 millions de dollars. Un plus grand nombre de personnes peuvent ainsi profiter des programmes tenant compte des enjeux et des priorités des Autochtones hors réserve. Cela permettra également d'assurer un plus grande cohérence et une plus grande congruence et d'accroître le niveau de communication entre les ministères et de collaboration entre les divers secteurs de compétence.
En vertu des Ententes sur le développement des ressources humaines autochtones, une autre initiative importante pour ma ville, le gouvernement du Canada verse 1,6 milliard de dollars, répartis sur cinq ans, pour que des organismes autochtones puissent concevoir et exécuter des programmes et des services d'emploi.
Le gouvernement a aussi annoncé dans le budget de 2005 le versement d'une somme de 398 millions de dollars, répartie sur cinq ans, pour aider les nouveaux arrivants à s'intégrer au Canada.
Le gouvernement offre également des prestations et des services qui tiennent compte des difficultés auxquelles font face les personnes et les familles que guette l'exclusion. Le gouvernement du Canada a ainsi affecté 1,1 milliard de dollars à l'Initiative en matière de logement abordable, laquelle repose sur un partenariat avec les provinces et les territoires. Le gouvernement a aussi affecté plus de 500 millions de dollars à des programmes de rénovation résidentielle destinés à aider des résidents à faible revenu à effectuer des réparations essentielles.
Pour favoriser l'application de solutions émanant de la collectivité et visant à contrer le phénomène de l'itinérance, plus d'un milliard de dollars ont été injectés dans l'Initiative nationale pour les sans-abri.
En outre, les efforts communautaires, notamment ceux qui sont axés sur l'économie sociale, jouent un très grand rôle.
Enfin, nous savons que la solution déterminante au problème de la pauvreté réside dans une économie productrice d'emplois soutenue par une main-d'oeuvre qualifiée. Par conséquent, le gouvernement s'efforce de continuer de susciter un climat économique propice à tous les citoyens.
Quelle a été l'efficacité de notre façon de faire? On ne saurait nier que des progrès mesurables ont été accomplis. Prenons l'exemple des personnes âgées. En 1980, 21,3 p. 100 des Canadiens âgés se situaient sous le seuil de faible revenu après impôt de Statistique Canada. En 2003, ce pourcentage n'était plus que de 6,8 p. 100.
Les spécialistes ont confirmé que cette diminution substantielle était en grande partie attribuable à la maturation du système public de revenu de retraite.
Chez les enfants, les taux de faible revenu ont également reculé, passant de 18,6 p. 100 en 1996 à 12,4 p. 100 en 2003. La Prestation nationale pour enfants a eu une influence non négligeable à cet égard. Vu l'augmentation des niveaux d'investissement fédéral, la Prestation nationale pour enfants continuera de prévenir et de réduire la pauvreté infantile. Les 5 milliards de dollars répartis sur cinq ans que le gouvernement du Canada a annoncés pour le programme d'éducation préscolaire et de garderie devraient aussi donner d'importants résultats dans le développement de nos enfants.
On a déjà beaucoup fait et on continue. Cependant, en dépit de tout cela, il est clair qu'il y a encore beaucoup à faire. Les Canadiens n'ont pas tous bénéficié des programmes dans la même mesure et la lutte à la pauvreté pose encore des défis de taille.
Vu l'importance de la question pour l'inclusion socio-économique des Canadiens, je demande au ministre du Développement social de nous faire connaître son point de vue sur les mesures que le gouvernement du Canada devrait prendre pour aider davantage les Canadiens à faible revenu.
L'hon. Ken Dryden: Monsieur le président, comme je l'ai dit plus tôt, en tant que Canadiens, nous comprenons ce que veut dire être Canadien, ce que nous attendons de nous-mêmes et pour nous-mêmes et ce que attendons d'autrui et pour autrui. Nous voulons avoir la chance de vivre une vie bien remplie et enrichissante, mais la même chance n'est pas donnée à tous. On peut faire davantage pour les familles et les enfants, pour les personnes handicapées, pour nos aînés les plus vulnérables, pour les Canadiens autochtones et pour les immigrants de fraîche date.
Malgré les gains économiques que nous avons réalisés au cours des dix dernières années, nombre de nos concitoyens demeurent dans le besoin. Nombre d'entre eux, qu'ils aient un emploi à plein temps ou qu'ils n'aient jamais pu travailler, éprouvent chaque jour de la difficulté à joindre les deux bouts. Que faire à partir de là?
Il y a près de dix ans, un vaste consensus s'est dégagé au Canada sur le fait que l'aide aux familles avec enfants était une priorité absolue. Ce consensus des gouvernements, des citoyens, des communautés et des entreprises a donné lieu à la Prestation nationale pour enfants, programme que l'on a décrit comme étant le plus important phénomène de politique sociale depuis l'avènement de l'assurance-maladie.
Chaque année, nous prodiguons un soutien du revenu à 2,7 millions de Canadiens et à 1,5 million de familles canadiennes. Pourtant, malgré la Prestation nationale pour enfants, et même si nous continuons d'instaurer les conditions nécessaires au relèvement du niveau de vie des enfants et à l'amélioration de leur état de préparation à apprendre et à se développer, trop d'entre eux vivent actuellement dans un milieu à faible revenu en dépit de nos efforts pour assurer la sécurité et la vigueur des collectivités, l'existence de logements abordables, un système de soins de santé durable et répondant aux attentes ainsi que des soutiens à l'emploi et au revenu pour leurs parents.
Ce printemps, des ministres fédéraux, provinciaux et territoriaux chargés des services sociaux ont rendu publics ou rendront publics trois documents clés en ce qui concerne la Prestation nationale pour enfants. En avril, ce fut le Rapport d'étape: 2003. Au cours des prochains jours, nous rendrons public le rapport sommaire de la première évaluation de la Prestation nationale pour enfants. En juin, nous publierons la plus récente analyse des répercussions de la PNE. Collectivement, ces documents nous donneront de bonnes indications quant aux progrès que nous accomplissons dans la lutte contre la pauvreté chez les enfants.
Un récent rapport de l'UNICEF, intitulé « La pauvreté des enfants dans les pays riches » a fait remarquer que de nombreux pays européens ont commencé à accorder une plus grande attention à la pauvreté en général sur leur territoire en formant un consensus entre les citoyens, les collectivités, les entreprises, les secteurs bénévoles et les politiciens afin de déterminer ce qu'est la pauvreté et comment il convient de la mesurer. Ce n'est que dans ces conditions, se sont-ils rendu compte, qu'ils peuvent fixer des objectifs compréhensibles et acceptés, et ce n'est qu'avec des objectifs qu'ils peuvent susciter l'action ciblée et la volonté nécessaires pouvant donner les résultats voulus.
Au Canada, nous avons une foule de mesures destinées aux gens à faible revenu qui sont utilisées de façon trop sélective et souvent de manière trop opportuniste par les gouvernements, les groupes de revendication et les universitaires, selon le message que chacun veut transmettre. Ensemble, ces mesures rendent les succès ou les échecs relatifs moins évidents. Elles font en sorte que la reddition de comptes est plus facile à éviter.
Développement Social Canada est à l'avant-garde de la politique sociale canadienne. Je veux susciter une discussion avec les gouvernements, les collectivités, les entreprises, le secteur bénévole et le grand public au sujet de la pauvreté, de la meilleure façon de la comprendre et de l'évaluer, des priorités que nous devrions établir et des objectifs que nous devrions fixer. J'ai hâte de lancer cette discussion dans un avenir rapproché.
Le vice-président: Comme il est 22 h 36, tous les crédits sont réputés avoir fait l'objet d'un rapport, conformément au paragraphe 81(4) du Règlement.
(Il est fait rapport de tous les crédits de Développement des ressources humaines (Développement social).)
[Français]
Le président suppléant (M. Marcel Proulx): La Chambre s'ajourne à demain, à 14 heures, conformément à l'article 24(1) du Règlement.
(La séance est levée à 22 h 37.)