CIMM Rapport du Comité
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
RÉPONSE DU GOUVERNEMENT DU CANADA AU DOUZIÈME RAPPORT DU COMITÉ PERMANENT DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION DE LA CHAMBRE DES COMMUNES
Les centres de détention et les certificats de sécurité
RECOMMANDATION 2
RECOMMANDATION 3
RECOMMANDATION 4
RECOMMANDATION 5
RECOMMANDATION 6
RECOMMANDATION 7
RECOMMANDATION 8
RECOMMANDATION 9
RECOMMANDATION 10
RECOMMANDATION 11
RECOMMANDATION 12
RECOMMANDATION 13
RECOMMANDATION 14
RECOMMANDATION 15
RECOMMANDATION 16
RECOMMANDATION 17
RECOMMANDATION 18
RECOMMANDATION 19
RECOMMANDATION 20
RECOMMANDATION 21
RECOMMANDATION 22
RECOMMANDATION 23
RECOMMANDATION 24
RECOMMANDATION 25
RÉPONSES DÉTAILLÉES AUX RECOMMANDATIONS
Le gouvernement remercie le Comité pour le rapport Les centres de détention et les certificats de sécurité présenté le 16 avril 2007.
Les certificats de sécurité offrent au gouvernement du Canada un moyen de procéder au renvoi d’une personne qui est interdite de territoire au Canada et qui pose un risque pour la sécurité nationale ou publique. Le régime des certificats de sécurité, qui est prévu dans la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (LIPR), est en place depuis plus de 20 ans dans le contexte de différentes lois. Depuis 1991, 28 certificats ont été délivrés : six personnes sont actuelles visées par un certificat; 19 personnes ont été expulsées du Canada, et trois certificats ont été jugés déraisonnables par la Cour fédérale.
Le régime des certificats de sécurité
Les certificats de sécurité s’appliquent seulement aux résidents permanents ou aux ressortissants étrangers qui sont interdits de territoire pour des raisons de sécurité, pour atteinte aux droits humains ou internationaux, pour grande criminalité ou pour activités de criminalité organisée. Les certificats de sécurité sont délivrés seulement lorsque les renseignements utilisés pour déterminer l’admissibilité de la personne sont classifiés et qu’il faut en empêcher la divulgation pour des raisons de sécurité nationale ou pour assurer la sécurité d’autrui.
Le ministre de la Sécurité publique et le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration examinent tous deux le certificat de sécurité et peuvent le signer. Le certificat signé par les deux ministres est alors déposé devant un juge désigné de la Cour fédérale, qui tient une audience afin de décider du caractère raisonnable du certificat. Dans le cadre des instances introduites, le gouvernement fédéral a l’occasion de présenter – et le juge, d’examiner – des renseignements classifiés qui ne sont pas divulgués à la personne concernée ou à son avocat. Le tribunal remet toutefois un résumé non classifié du dossier à la personne visée afin que celle-ci puisse être raisonnablement informée des circonstances entourant la délivrance du certificat.
Le certificat jugé raisonnable constitue une mesure de renvoi. Durant l’audience visant à déterminer le caractère raisonnable du certificat ou une fois le certificat jugé raisonnable, le gouvernement fédéral entreprend habituellement un examen des risques afin de déterminer si la personne peut être renvoyée du Canada. Un représentant du ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration procède à cette détermination. Ces déterminations sont assujetties à un contrôle judiciaire.
La détention des personnes présentant un risque élevé assujetties des certificats de sécurité
Le Centre de surveillance de l’Immigration de Kingston (CSIK) a ouvert ses portes en avril 2006. Il a été construit, car les centres de détention provinciaux n’étaient pas jugés appropriés pour assurer la garde prolongée des personnes visées par les certificats de sécurité. En effet, les installations correctionnelles provinciales sont généralement conçues pour les personnes qui attendent que leurs accusations soient traitées et pour les détenus qui purgent une peine de moins de deux ans. L’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) utilise les installations correctionnelles provinciales lorsqu’elle ne dispose pas de centre de surveillance de l’immigration dans la région ou pour détenir les personnes présentant un risque élevé. Les personnes détenues conformément à un certificat de sécurité sont considérées comme présentant une menace grave. Elles peuvent être détenues pendant une longue période tandis qu’elles intentent des poursuites longues et complexes.
Le placement au CSIK permet à l’ASFC de mieux tenir compte des besoins liés à la détention à long terme à des fins d’immigration des personnes visées par un certificat de sécurité et d’éliminer les difficultés liées au côtoiement de celles-ci avec des délinquants. S’ils le désirent, les personnes visées par un certificat de sécurité sont libres de retourner volontairement dans leur pays d’origine.
Le CSIK offre différents services : visites entre 12 h 30 et 16 h tous les jours (à l’exception des jours fériés), privilèges d’interurbains au Canada sans frais (une heure), facturation à un troisième numéro pour les interurbains, accès à un gymnase, cantine, installations permettant la préparation de repas légers (réchauffage seulement) et périodes de loisirs, contribuant ainsi à améliorer les conditions de détention des personnes visées par un certificat de sécurité. Depuis 2000, huit personnes visées par un certificat de sécurité ont été détenues, et la durée de leur détention varie. Certaines personnes ont été expulsées du pays. D’autres ont été mises en liberté et assujetties à des conditions rigoureuses par la Cour fédérale. Une seule personne est encore détenue au CSIK.
Le CSIK est situé sur des terres appartenant au Service correctionnel du Canada (SCC), tout près de l’Établissement de Millhaven. Il est complètement distinct du pénitencier de Millhaven et peut accueillir jusqu’à six personnes. L’ASFC et le SCC ont négocié un protocole d’entente qui définit la relation qui les unit et leur rôle respectif en ce qui concerne la gestion et le fonctionnement du CSIK. L’ASFC est l’autorité habilitée à détenir, alors que le SCC est le fournisseur de services. Le personnel du SCC qui travaille au CSIK a été recruté et formé expressément pour assurer les services dans ce centre.
La décision de la Cour suprême au sujet des certificats de sécurité
Le rapport du Comité permanent tombe à point, soit peu après la décision de la Cour suprême du Canada au sujet des certificats de sécurité dans l’affaire Charkaoui c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration)[1]. Dans sa décision, la Cour suprême du Canada a reconnu que l’une des responsabilités les plus fondamentales d’un gouvernement était d’assurer la sécurité de ses citoyens et que pour y arriver, le gouvernement doit parfois agir en se fondant sur des renseignements qui ne peuvent être divulgués et doit détenir des personnes qui menacent la sécurité nationale. La Cour suprême a conclu que le régime qui permet de présenter des renseignements protégés à la Cour fédérale en vue de la détermination du caractère raisonnable du certificat, ou de la prise d’une décision concernant la détention ou la mise en liberté des personnes visées par un certificat, est inconstitutionnel, car il ne protège pas adéquatement les intérêts des personnes visées par un certificat de sécurité. La Cour suprême a accordé au législateur un an pour adopter de nouvelles mesures en réponse à sa décision.
La décision dans l’affaire Charkaoui contient également des directives importantes concernant la détention de la personne en attendant son expulsion, précisant que cette pratique sous le régime des certificats de sécurité est constitutionnelle du moment qu’on offre la possibilité de faire contrôler périodiquement la détention en tenant compte des circonstances de chaque cas.
Le gouvernement a étudié soigneusement les recommandations contenues dans le rapport du Comité et se réjouit de cette occasion de présenter sa réponse.
Recommandation 1
Que le gouvernement du Canada respecte la décision rendue par la Cour suprême du Canada dans l’affaire Charkaoui c. Canada (Citoyenneté et Immigration) et qu’il modifie la LIPR de manière à prévoir l’intervention d’un avocat spécial lors de l’instance devant la Cour fédérale pour déterminer le caractère raisonnable d’un certificat de sécurité.
Recommandation 2
Que l’avocat spécial soit un avocat possédant l’attestation de sécurité requise désigné pour représenter les intérêts de la personne visée par le certificat et pour vérifier les éléments de preuves confidentiels ou secrets présentés par le gouvernement.
Recommandation 3
Que les mesures mises en oeuvre pour permettre l’intervention d’un avocat spécial offrent aux détenus, sous réserve des considérations relatives à la sécurité nationale et d’une atteinte minimale aux droits des détenus, la possibilité de répondre aux allégations formulées contre eux en prenant connaissance de la preuve et en ayant la possibilité de la contester ou de présenter une contre-preuve.
Le 23 février 2007, la Cour suprême du Canada, dans l’affaire Charkaoui c. Canada, a jugé inconstitutionnels certains aspects du régime des certificats de sécurité. Comme l’indique le Comité, le régime des certificats de sécurité a récemment été étudié par le Sous-comité de la Chambre et le Comité sénatorial spécial chargés de l’examen de la Loi antiterroriste.
Le gouvernement souscrit à la décision de la Cour suprême du Canada. Le gouvernement cherche actuellement à déterminer la meilleure façon de donner suite à la décision et de respecter les principes établis par la Cour suprême, dans le but de présenter un projet de loi au Parlement le plus rapidement possible. Le gouvernement tiendra compte de la nécessité d’assurer l’équité en matière de procédure et de protéger les droits et libertés garantis par la Charte canadienne des droits et libertés, conformément à la décision de la Cour suprême. Le gouvernement prendra aussi en considération les recommandations du Comité permanent et celles issues de l’examen parlementaire de la Loi antiterroriste.
Recommandation 4
Que le gouvernement instaure une politique prévoyant que le recours à des accusations en vertu du Code criminel sera le moyen privilégié pour intervenir dans les cas de résidents permanents ou de ressortissants étrangers soupçonnés de participer à des activités terroristes, d’y contribuer ou d’en faciliter le déroulement..
La procédure en matière d’immigration et celle de justice pénale ne doivent pas être perçues comme une solution de rechange. Chacune vise un but précis, et les formalités ont évolué au fil du temps afin d’atteindre les fins fixées. C’est le cas notamment des méthodes employées pour décider d’intenter une instance, des processus ministériels et judiciaires à respecter, et des droits et garanties procédurales prévus par la Charte qui sont appliqués afin d’assurer le caractère équitable et juste des mesures. La décision de poursuivre au criminel ou de chercher à obtenir le renvoi du Canada doit être rendue au cas par cas. Pour cette raison, dans les cas de résidents permanents ou de ressortissants étrangers soupçonnés de participer à des activités terroristes, d’y contribuer ou d’en faciliter le déroulement, il faut privilégier la prise d’une décision individuelle fondée sur une évaluation indépendante des faits et des circonstances.
Conformément à la LIPR, les instances sont intentées afin de déterminer si une personne est interdite de territoire au Canada, et alors assujettie au renvoi. En droit criminel, des poursuites ne sont intentées que si, après une enquête, un examen de la preuve indique qu'il existe une perspective raisonnable de croire que l'accusé sera condamné et que la poursuite est dans l'intérêt public. Le caractère indépendant du processus décisionnel en matière de poursuite constitue l’une des forces de notre système de justice. Cet aspect a été souligné par l’établissement du Service des poursuites pénales du Canada dans le cadre de la Loi fédérale sur la responsabilité.
Le gouvernement est résolu à protéger adéquatement les droits de la personne et à veiller à ce que les aspects procéduraux des systèmes de justice pénale et d’immigration au Canada soient assortis des garanties nécessaires. Chaque système vise des fins fondamentales distinctes, et la procédure en place pour les atteindre n’est pas la même.
Par ailleurs, les droits et les garanties diffèrent dans les deux cas. Le gouvernement estime qu’il ne faut les confondre, ni les considérer comme interchangeables. Il serait en effet inapproprié de préférer une procédure à l’autre dans le seul but de faire en sorte que certaines dispositions ou garanties prévues par la Charte s’appliquent ou non selon le cas. Certains droits, comme la présomption d’innocence ou le procès devant jury, ne sont indiqués que dans le cas d’instances criminelles, tandis que d’autres, tels que le droit à une audition impartiale, sont d’application plus générale. La détermination des droits ou garanties mise en cause doit se fonder sur la nature de l’instance, et le gouvernement estime que les faits de l’affaire doivent dicter la procédure à utiliser.
Par ailleurs, la détention en application de la LIPR diffère de l’incarcération dans le cadre du système correctionnel canadien. Les peines d’incarcération criminelles sont des sanctions et sont déterminées en fonction des faits établis au moment de la condamnation. L’un des principes de la détermination de la peine veut que la durée de l’incarcération soit proportionnelle à la gravité du crime. Par contre, la détention d’une personne en attendant son renvoi repose sur une évaluation périodique du risque que celle-ci représente pour la sécurité publique ou nationale. Dans l’affaire Charkaoui, la Cour suprême a réitéré ce principe, affirmant que la détention prolongée ne contrevient pas à la Charte, pourvu que la détention fasse l’objet de contrôles périodiques. Même si une personne visée par un certificat de sécurité est condamnée et incarcérée pour un crime, le gouvernement peut décider de demander la détention et le renvoi à sa sortie de prison.
Recommandation 5
Que le gouvernement adopte une loi pour modifier la LIPR afin d’empêcher que des résidents permanents ou des ressortissants étrangers ne soient renvoyés vers leurs pays de nationalité ou de résidence habituelle s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’ils risquent d’être torturés, que leur vie sera en danger ou qu’ils s’exposent à subir des peines ou des traitements cruels et inusités dans ces pays.
Le gouvernement est déterminé à protéger la sécurité de la société canadienne et les libertés et droits fondamentaux garantis par la Charte.
Conformément au droit de l’immigration canadien, les personnes qui sont interdites de territoire au Canada peuvent demander qu’un examen soit mené afin de déterminer si elles risquent la torture ou des mauvais traitements dans leur pays d’origine ainsi que la gravité du risque. Le processus utilisé pour décider du renvoi d’une personne interdite de territoire permet d’évaluer rigoureusement le risque et de peser le risque que coure la personne si elle est renvoyée dans son pays d’origine par rapport au risque qu’elle pose pour la société canadienne. La personne concernée peut présenter tout renseignement qu’elle juge pertinent.
En pratique, le Canada n’a jamais procédé au renvoi d’une personne lorsqu’un décideur détermine qu’il existe des motifs sérieux de croire que la personne risque d’être torturée. Toutefois, en 2002 dans l’affaire Suresh, la Cour suprême a statué que le renvoi, dans des circonstances exceptionnelles, d’une personne exposée à un grave risque de torture ne va à l’encontre de la Charte. Sans définir ces circonstances, la Cour suprême a fait valoir que le processus de pondération doit généralement favoriser le droit à la protection contre la torture.
Recommandation 6
Que le gouvernement adopte une loi pour limiter la durée de détention des personnes visées par des certificats de sécurité dont la Cour fédérale a confirmé le caractère raisonnable et exiger que ces personnes soient accusées ou poursuivies en vertu du Code criminel ou libérées sans condition au terme de cette période.
Comme le mentionne la réponse à recommandation 4, la détention et la mise en liberté sous les conditions fixées par la Cour ne constituent pas des sanctions pénales et n’ont pas une durée ou une portée fixes. La personne qui, selon un juge, pose un risque pour la sécurité nationale ou la sécurité d’autrui peut être soit détenue ou mise en liberté sous condition selon le cas par un juge.
La Cour suprême du Canada a confirmé la validité constitutionnelle de la détention prolongée, pourvu qu’un juge effectue des contrôles rigoureux en accordant une attention particulière aux critères énoncés par la Cour suprême dans sa décision, notamment la durée de la détention. La décision de la Cour suprême dans l’affaire Charkaoui vient préciser les garanties applicables prévues par la Charte et les exigences quant à l’exercice de contrôles de la détention périodiques vigoureux. Les critères établis par la Cour suprême seront appliqués en fonction des faits et des circonstances de chaque cas.
Recommandation 7
Que le gouvernement adopte une loi pour permettre d’en appeler auprès de la Cour fédérale d’appel et, sur autorisation, auprès de la Cour suprême du Canada, d’une décision de la Cour fédérale sur le caractère raisonnable du certificat de sécurité.
Le gouvernement proposera des modifications au régime des certificats de sécurité lorsqu’il donnera suite à la décision de la Cour suprême dans le cadre d’un projet de loi visant à modifier la LIPR.
Recommandation 8
Que le gouvernement veille à ce que les services de police et de renseignement disposent des ressources nécessaires pour faire enquête sur les allégations d’activités criminelles liées à la sécurité, au terrorisme, à l’espionnage et au crime organisé et porter des accusations en conséquence en vertu du Code criminel.
Le gouvernement est d’accord avec le Comité et est fermement résolu à protéger la sécurité nationale, comme le démontrent les investissements qu’il a effectués dans les secteurs de l’application de la loi, du renseignement et des services correctionnels.
Dans le cadre du Budget de 2007, le gouvernement a consenti 80 millions de dollars sur deux ans au Service canadien du renseignement de sécurité afin de l’aider à protéger la sécurité nationale et à fonctionner de façon plus efficace dans l’environnement postérieur aux attentats du 11 septembre. Il a également affecté 102 millions de dollars sur deux ans au SCC afin que celui-ci puisse satisfaire les principaux impératifs, notamment en matière d’infrastructure, de programmes pour les délinquants et de formation du personnel. À l’occasion du Budget de 2006, le gouvernement a effectué d’importants investissements dans des domaines prioritaires, affectant notamment 161 millions de dollars en vue de l’embauche de 1 000 agents à la GRC et de procureurs fédéraux, 101 millions de dollars pour l’armement des agents à la frontière et l’élimination des postes où des agents travaillent seuls, et 303 millions de dollars de plus pour la mise en oeuvre d’une stratégie frontalière qui favorise le mouvement des marchandises à faible risque et le déplacement des voyageurs en Amérique du Nord tout en protégeant les Canadiens et Canadiennes contre les menaces touchant la sécurité.
Recommandation 9
Que le gouvernement du Canada mandate le Bureau de l’Enquêteur correctionnel dont relèvent tous les détenus sous responsabilité fédérale, à l’exception de ceux gardés au Centre de surveillance de l’immigration de Kingston, pour lui confier la responsabilité du CSIK et des enquêtes sur les plaintes actuelles des personnes détenues au CSIK.
Le gouvernement du Canada est conscient de l’importance des mécanismes de surveillance, qui permettent de veiller à ce que les personnes détenues soient traitées de façon équitable et humaine dans le respect de la règle de droit.
L’enquêteur correctionnel (EC) a pour fonction principale de faire enquête et d’assurer qu’on donne suite aux plaintes des délinquants. Il a également l’obligation d’examiner les politiques et les pratiques du SCC donnant lieu aux plaintes afin de cerner les carences systémiques et d’y porter remède; il doit également faire des recommandations en ce sens.
Même si, conformément à un protocole d’entente, le SCC assure certains services au CSIK, c’est l’ASFC qui est responsable de la détention et des personnes détenues dans ce Centre. L’EC a pour mandat d’assurer une fonction de surveillance à l’égard des activités du SCC, et non de l’ASFC.
Les personnes détenues par l’ASFC, y compris celles au CSIK ont des voies de recours pour régler leurs plaintes touchant les conditions de la détention. L’ASFC a mis en place un mécanisme officiel de règlement des plaintes, et les individus peuvent également demander réparation à la Cour fédérale.
Enfin, un contrôle externe du CSIK est assuré par l’entremise de la Croix-Rouge canadienne, qui surveille les conditions de vie dans le cadre d’une entente avec l’ASFC; les individus détenus au CSIK peuvent communiquer leurs préoccupations aux représentants de cet organisme.
Le mandat et les attributions de l’enquêteur correctionnel sont prévus dans la partie III de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. Le gouvernement n’a pas l’intention de proposer des modifications à cette loi pour l’instant.
Recommandation 10
Que l’Agence des services frontaliers du Canada établisse ses propres règles et procédures en matière de détention afin qu’elles soient adaptées aux besoins de la détention à des fins d’immigration et diffèrent de celles applicables aux prisonniers incarcérés à la suite de condamnations criminelles.
L’ASFC applique des normes nationales de détention dans ses centres de surveillance de l’immigration. Celles-ci sont conformes aux normes internationales et touchent plusieurs aspects, notamment les services de santé, les services alimentaires, l’hygiène personnelle, l’accès à un avocat, les services téléphoniques et les communications écrites. Les personnes détenues par l’ASFC, y compris celles au CSIK, reçoivent des renseignements détaillés sur leurs droits et les conditions de leur détention.
Les politiques et les procédures opérationnelles en place au CSIK respectent les normes internationales applicables, la Charte et les normes nationales de détention de l’ASFC.
Recommandation 11
Que les procédures et les règles établies par l’Agence des services frontaliers du Canada reconnaissent la nécessité de faire en sorte que le mode de fonctionnement des centres de détention de l’Immigration soit différent de celui des établissements correctionnels, et que le personnel, en particulier s’il est issu du milieu correctionnel, reçoive une formation en conséquence.
Les procédures et les règles en place dans les centres de surveillance de l’immigration de l’ASFC ont été établies afin d’assurer la sécurité des détenus, du public et des employés. Elles permettent à l’ASFC de respecter les normes internationales en matière de détention ainsi que ses normes nationales de détention.
Les personnes détenues conformément à un certificat de sécurité qui posent un risque pour la sécurité nationale sont détenues au Centre de surveillance de l’Immigration de l’ASFC à Kingston. Le CSIK n’est pas un établissement correctionnel. L’ASFC, qui est habilitée à assurer la détention, a demandé au SCC d’agir en tant que fournisseur de services au CSIK. Un gestionnaire de l’ASFC travaille sur place et en étroite collaboration avec le SCC afin d’assurer l’application efficace du programme de détention de l’ASFC.
Les fournisseurs de services de tous les centres de surveillance de l’immigration de l’ASFC, y compris le personnel médical, reçoivent une formation de deux semaines sur les questions d’immigration, le régime des certificats de sécurité, la détention des demandeurs d’asile, les réalités religieuses et culturelles et les limites professionnelles ainsi que sur les instructions permanentes en vigueur dans certains centres.
Recommandation 12
Que des procédures soient mises en oeuvre et une formation offerte pour remédier aux problèmes de profilage racial et religieux ou de profilage fondé sur d’autres stéréotypes.
Le gouvernement du Canada, y compris ses organismes d’application de la loi, services du renseignement et agences de services frontaliers, n’a pas recours au profilage fondé sur la race, la religion ou des stéréotypes et n’approuve pas ces pratiques.
La Charte interdise expressément toute discrimination fondée sur la race, la couleur, la religion, l’origine nationale ou ethnique dans le cadre des activités du gouvernement, des lois ou de la prestation de services. Les ministères et organismes fédéraux qui sont responsables de la sécurité du pays sont déterminés à traiter toutes les personnes de manière équitable.
Comme l’indique la réponse à la recommandation 10, l’ASFC a établi des normes nationales de détention pour l’exploitation de ses centres de surveillance de l’immigration, et ces normes sont conformes aux normes internationales, y compris les Directives sur la détention des demandeurs d’asile du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, l’Ensemble des principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d’emprisonnement des Nations Unies et l’Ensemble des règles minima pour le traitement des détenus des Nations Unies.
Ces normes contiennent en outre une disposition visant à faire en sorte que le personnel de sécurité suive une formation sur les réalités culturelles et le harcèlement et reçoive de l’information pertinente sur la LIPR.
Les services de sécurité dans les centres de surveillance de l’immigration de l’ASFC sont assurés par un fournisseur de services. Même s’ils ne sont pas des employés de l’ASFC les agents de sécurité sont tenus de respecter les normes nationales de détention et les instructions permanentes établies par l’ASFC pour ses centres. Afin de veiller à ce que le personnel qui assure les services de sécurité agisse de manière respectueuse à l’égard des personnes détenues par l’ASFC, des mesures ont été prises avec la Croix-Rouge canadienne afin que cet organisme indépendant surveille les conditions de détention des personnes détenues en vertu de la loi sur l’immigration.
Recommandation 13
Que l’isolement cellulaire ne soit jamais considéré comme un traitement acceptable dans le cas des personnes détenues à des fins d’immigration et que d’autres dispositions soient prises, si jamais il devait y avoir une seule personne détenue au CSIK.
Le fait qu’une seule personne soit en détention au CSIK ne constitue pas de l’isolement cellulaire tel que défini dans les instruments internationaux.
Les droits demeurent les mêmes, qu’il y ait une ou six personnes détenues au CSIK. Les personnes continuent d’avoir accès à des services téléphoniques et de vidéoconférence, notamment à des appels interurbains gratuits d’une heure par jour, et ils jouissent de la cantine et de périodes de visites et de loisirs généreuses.
Il ne serait pas approprié de transférer un individu dans un autre centre de surveillance de l’immigration de l’ASFC, puisque les autres centres ne respectent pas les exigences en matière de sécurité nécessaires à la détention des personnes visées par les certificats de sécurité et qu’un tel transfert permettrait à celles-ci de côtoyer les individus assujettis aux certificats de sécurité avec des individus qui se sont détenus pour d'autres raisons.
Recommandation 14
Que le CSIK modifie ses procédures pour permettre aux familles et aux amis des détenus de procurer à la cantine des aliments adaptés à la culture de ceux-ci à des prix concurrentiels.
En mars 2007, l’ASFC a pris des mesures en vue de l’approvisionnement de la cantine, notamment en produits de viande précuits halals. Il n’existe aucune restriction en ce qui concerne le choix des fournisseurs. De plus, les prix des produits vendus ne sont pas majorés.
Recommandation 15
Que, dans la mesure où les protocoles de sécurité sont respectés, les détenus puissent avoir facilement accès à un téléphone sans qu’il leur en coûte trop cher et puissent téléphoner à leurs familles au Canada ou à l’étranger pendant au moins une heure chaque jour. Étant donné les difficultés financières éprouvées par certaines des familles des détenus, le coût de ces appels devrait être pris en charge par le CSIK ou les proches des détenus devraient être autorisés à leur faire parvenir des télécartes pour absorber le coût des appels interurbains.
Les détenus ont également un accès illimité au téléphone et au service de vidéoconférence pour communiquer avec leur avocat. L’ASFC permet aux détenus d’effectuer sans frais pendant une heure par jour des appels interurbains pour communiquer avec leur famille et leurs amis. Pour des raisons de sécurité, tous les numéros doivent être approuvés au préalable par l’ASFC.
Le 29 novembre 2006, une note de service a été diffusée aux détenus du CSIK afin de leur offrir la facturation à un troisième numéro, leur permettant ainsi d’appeler des amis et des membres de la famille habitant des pays où il n’est pas possible d’effectuer d’appels à frais virés. Depuis le 16 mars 2007, les personnes peuvent composer des numéros considérés comme des interurbains en utilisant un numéro d’identification personnel pour facturer les appels à des numéros approuvés inscrits sur leur liste d’appels. La durée des appels n’est pas limitée puis que l’ASFC ne paye pas pour les appels interurbains composés directement.
Recommandation 16
Que les détenus soient autorisés à se servir de la vaste cour inutilisée située à proximité de l’établissement pour y faire de l’exercice.
La vaste cour d’exercice située à côté du CSIK n’est pas accessible aux détenus du CSIK puisqu’elle ne fait pas partie des installations.
Le CSIK comporte une cour d’exercice extérieure exclusive, qui est distincte de la cour d’exercice extérieur de l’Établissement de Millhaven. Cette cour mesure environ 31 mètres (100 pieds) de long sur 15 mètres (50 pieds) de large.
Recommandation 17
Que les détenus disposent d’une cuisine dûment équipée et aient la possibilité de préparer eux-mêmes leurs repas.
Pour des raisons de santé et de sécurité et parce que le règlement relatif aux incendies interdit de cuisiner sur les lieux, l’ASFC ne mettra pas à la disposition des détenus du CSIK une cuisinière. Cette pratique est conforme aux politiques en place dans les autres centres de surveillance de l’immigration de l’ASFC.
Le CSIK a été conçu et construit de façon à permettre de façon très limitée la préparation de repas (réchauffage). Dans la salle commune, les détenus ont accès à un réfrigérateur, à un micro-ondes, à un grille-pain, à une cafetière et à une bouilloire. Ils ont aussi accès à la cantine.
L’ASFC fournit des repas qui répondent aux normes fixées par les Nations Unies et qui respectent donc les diverses exigences alimentaires. L’imam du CSIK a inspecté la cuisine où sont préparés les repas destinés aux détenus du CSIK et a déterminé que les pratiques de conservation et de préparation des aliments répondent aux normes pour les produits halals.
Le CISK tient compte des exigences alimentaires prescrites par la religion. Il a pris les mesures nécessaires pour assurer le respect de Ramadan, notamment en offrant les aliments requis pour interrompre le jeûne avant le coucher du soleil et en soirée. Pour le repas du soir, une double portion d’aliments préparés conformément aux prescriptions islamiques était servie aux détenus afin de permettre le réchauffage d’au moins un des repas.
Recommandation 18
Que le CSIK construise les installations nécessaires pour permettre les visites conjugales.
Les visites conjugales ne sont pas permises dans les centres de surveillance de l’immigration de l’ASFC, y compris le CSIK. Les activités, telles que les visites conjugales et les programmes d’éducation et de placement, ont pour objet de contribuer à la bonne réinsertion sociale de la personne au Canada, ce qui est contraire à l’objectif visé par le renvoi. Par ailleurs, il n’existe aucun instrument international obligeant à offrir des visites conjugales.
Recommandation 19
Que des aménagements raisonnables soient effectués afin de permettre aux détenus de quitter leur cellule pour observer de bonne foi les rites imposés par leur religion, et que les membres de leurs familles soient alors autorisés à se joindre à eux.
Sauf durant la période d’entretien et à l’heure des repas, les individus peuvent circuler librement dans le CSIK.
Les familles peuvent visiter les détenus tous les jours, entre 12 h 30 et 16 h. Durant cette période, les individus qui le désirent peuvent observer les rites imposés par leur religion avec des membres de leur famille.
Recommandation 20
Que les visites médicales se limitent aux situations où les détenus en font la demande ou aux cas d’urgence.
L’ASFC est responsable de la santé de toutes les personnes détenues dans les centres de surveillance de l’immigration, y compris le CSIK, et offre des conditions de vie saines et des soins de santé de qualité, notamment des soins de santé mentale le cas échéant.
L’ASFC fournit les fonds nécessaires pour assurer la présence sur place à temps plein d’un membre de personnel infirmier pour répondre aux besoins des personnes détenues au CSIK.
Dans certaines circonstances, par exemple en cas de grève de la faim, l’ASFC assure des soins médicaux quotidiens et des soins psychiatriques hebdomadaires pour veiller à ce que la santé de la personne ne soit pas compromise.
Recommandation 21
Que d’ici à ce qu’un enquêteur correctionnel soit nommé et puisse faire enquête sur les allégations de mauvais traitement de la part des gardiens, les détenus soient accompagnés, sur demande, d’un superviseur lorsqu’ils se déplacent à l’intérieur du CSIK.
L’ASFC prend au sérieux la sécurité des personnes détenues dans ces centres de surveillance. Dans tous les centres de surveillance de l’immigration de l’ASFC, y compris le CSIK, ce sont les services de police locaux qui enquêtent en cas d’allégations de mauvais traitements. D’ailleurs, la Police provinciale de l’Ontario et l’Escouade pénitentiaire mixte ont déterminé, par suite d’une enquête, que les allégations de mauvais traitements au CSIK n’étaient pas fondées. Comme l’indique la réponse à la recommandation 9, l’enquêteur correctionnel n’est pas autorisé par la loi à mener enquête dans les centres de surveillance de l’immigration de l’ASFC, y compris le CSIK.
Les individus sont encouragés à résoudre les différends de manière informelle dans le cadre de discussions. S’ils ne sont pas satisfaits de la solution informelle, ils peuvent présenter une plainte par écrit à la direction du CSIK conformément au processus de règlement des plaintes. La direction prend au sérieux toutes les plaintes.
Le processus débute au palier le plus bas et progresse vers les paliers plus élevés au sein de la direction, le dernier recours étant au niveau du sous-ministre adjoint.
Recommandation 22
Que les détenus aient accès, à tout le moins, à des programmes d’éducation et de loisirs équivalents à ceux offerts aux détenus régis par les politiques du SCC.
L’ASFC n’offre de programme d’éducation pour adultes dans aucun de ses centres de surveillance de l’immigration, y compris le CSIK. L’ASFC donne accès aux détenus à des disques compacts audio et informatiques d’autoformation et à des livres d’autoperfectionnement sur le français et l’anglais en langue seconde.
L’ASFC a informé les détenus qu’ils peuvent demander par écrit d’autres livres ou CD audio ou informatiques, mais n’a reçu aucune demande de cette nature à ce jour. Les détenus ont également accès à des périodiques et à des revues, qu’ils peuvent se procurer à leurs propres frais.
Les personnes détenues au CSIK peuvent utiliser le matériel fourni ou demander que du matériel d’apprentissage leur soit expédié au Centre par la poste et à leurs frais. Le gestionnaire de l’ASFC examine chaque demande et peut aiguiller le détenu vers Citoyenneté et Immigration Canada si une autorisation d’étude est nécessaire.
Recommandation 23
Que le CSIK mette fin au dénombrement quotidien systématique.
L’ASFC se préoccupe de la santé et de la sécurité de toutes les personnes détenues dans ses centres de surveillance de l’immigration, y compris le CSIK. Les dénombrements sont nécessaires puisqu’ils permettent de vérifier que toutes les personnes sont présentes, hors de danger et en bonne santé. L’ASFC effectue des dénombrements dans tous ses centres de surveillance de l’immigration; elle a toutefois interrompu les dénombrements debout officiels au CSIK pour l’instant, mais pourrait renouer cette pratique si les circonstances l’exigent.
Recommandation 24
Que des aménagements raisonnables soient effectués pour offrir davantage d’intimité aux détenus.
Les personnes détenues au CSIK peuvent recevoir des visites en personne. Toutefois, pour assurer la sécurité, un agent de détention est présent. L’agent se tient à une distance qui permet au détenu et à son visiteur d’interagir en toute confidence. Les détenus ont aussi accès à une salle privée pour rencontrer leur avocat.
En ce qui concerne les chambres, chaque détenu dispose de sa propre cellule, et des rideaux couvrent la fenêtre donnant sur l’extérieur et la fenêtre de la porte de la cellule.
Les détenus ne sont pas surveillés par le personnel du CSIK lorsqu’ils se trouvent dans leur chambre. Toutefois, pour des raisons de santé et de sécurité, les personnes sont sous la surveillance directe du personnel du CSIK dans les autres aires. Les agents de détention patrouillent les installations régulièrement et doivent donc regarder dans les chambres pour s’assurer de la présence et du bien-être des détenus.
Recommandation 25
Que le CSIK offre aux détenus des services d’interprète pour les aider à apprivoiser le processus officiel de règlement des griefs.
Des services d’interprète seront fournis sur demande pour les instances judiciaires et autres procédures, notamment le processus officiel de règlement des plaintes à trois paliers.
Il est important de signaler, au nom de l’ASFC, que les personnes détenues sont capables de communiquer avec le personnel, et ce dans tous les centres de surveillance de l’immigration, y compris le CSIK. À ce jour, rien ne montre que les personnes détenues du CSIK ne comprennent pas les employés du Centre ou ne sont pas en mesure de communiquer avec eux. Pour cette raison, il n’a pas été nécessaire de faire appel à un interprète pour traduire les communications courantes.
- [1]
-
Charkaoui c. Canada (Citoyenneté et Immigration) 2007 CSC 9, 23 février 2007, dossiers 30762, 30929, 31178, http://scc.lexum.umontreal.ca/en/2007/2007scc9/2007scc9.html (version anglaise), http://scc.lexum.umontreal.ca/fr/2007/2007csc9/2007csc9.html (version française).