HESA Rapport du Comité
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OPINION DISSIDENTE
Présentée par les députés du Bloc Québécois
Christiane Gagnon (Québec) et Luc Malo (Verchères – Les Patriotes)
A. IMPLIQUER LES BONS ACTEURS
1. L’obésité juvénile : un enjeu important
Les membres du Bloc Québécois reconnaissent la gravité de l’épidémie d’obésité juvénile qui fait rage au Québec et au Canada. Cette situation n’est d’ailleurs pas limitée au Québec et au Canada, plusieurs pays occidentaux étant également aux prises avec une telle problématique.
Un consensus règne sur les constats observés par le Comité issus des témoignages entendus lors de l’étude. Les membres du Bloc Québécois sont en accord avec les observations du Comité telles que décrites aux chapitres 1 à 5 du rapport. Le Bloc Québécois considère que la situation est très grave et porte une attention particulière aux enjeux soulevés par le comité. L’obésité juvénile constitue un enjeu important qui requiert une action rapide et adéquate. Le Québec a d’ailleurs agi en annonçant un plan d’action visant à contrer cette épidémie à l’automne 2006.
2. Une question de compétences
Le Comité permanent de la santé a convenu en juin 2006 d’amorcer une étude sur l’obésité juvénile au Canada, et « plus particulièrement sur la responsabilité du gouvernement fédéral envers les enfants des Premières nations et des Inuit ». Le Bloc Québécois déplore que le Comité ait dévié de son mandat original en faisant porter l’étude sur plusieurs champs de compétence qui ne sont pas la responsabilité du gouvernement fédéral.
Les audiences du Comité ont permis de démontrer hors de tout doute que les membres des Premières Nations et les Inuit souffrent d’un état de santé global beaucoup moins bon que celui du reste de la population canadienne. Dès lors, les défis sont grands pour le gouvernement fédéral, constitutionnellement responsable d’assurer les soins de santé de ces populations. Au lieu de chercher à étendre son champ d’action alors qu’il n’en a pas l’expertise, le gouvernement fédéral devrait plutôt chercher à se démarquer dans son approche auprès de ses propres clientèles.
B. Une démarche déjà bien entamée au Québec
Le Bloc Québécois est d’avis que le rapport du Comité permanent de la santé contient des recommandations qui, si elles étaient mises en application par le gouvernement fédéral, constitueraient des dédoublements inutiles d’initiatives déjà en marche au Québec.
1. Agir à l’intérieur de ses compétences
Le Plan décennal pour consolider les soins de santé adopté par les premiers ministres fédéral, provinciaux et territoriaux en septembre 2004 reconnaît la compétence du gouvernement du Québec d’exercer lui-même ses responsabilités à l’égard de la planification, de l’organisation et de la gestion des services de santé sur son territoire. L’entente prévoit que le Québec applique ses propres stratégies de promotion de la santé et de prévention des maladies chroniques, ce qui inclut de facto toute la question de l’obésité.
Le gouvernement du Québec fait rapport à sa population sur l’usage de l’ensemble des fonds destinés à la santé.
2. Une stratégie bien définie
C’est dans le cadre de l’entente de 2004 que le gouvernement du Québec a porté une réflexion sur l’obésité juvénile qui a résulté en l’élaboration du Plan d’action gouvernemental de promotion des saines habitudes de vie et de prévention des problèmes reliés au poids 2006-2012; Investir pour l’avenir. Cette démarche constitue une étape importante dans la prévention de l’obésité juvénile au Québec.
Le plan québécois Investir pour l’avenir couvre l’ensemble des secteurs d’activités cernés par le rapport du Comité permanent de la santé de la Chambre des communes. L’alimentation, l’activité physique, la publicité, la recherche, la santé, l’éducation et les infrastructures sont tous des sujets ayant fait l’objet d’une réflexion au Québec. Cette démarche a impliqué sept ministères et trois organismes gouvernementaux en plus de partenaires du secteur privé et communautaire.
Les résultats de cet exercice ont donné lieu à des objectifs ciblés autour d’axes d’intervention prioritaires et chiffrés. Des investissements de 400 M$ sur 10 ans sont prévus, dont 20 M$ par année seront versés par le gouvernement du Québec.
Malgré le fédéralisme d’ouverture, les membres du Bloc Québécois ne sont pas étonnés de constater que le Comité permanent de la santé, malgré le changement de gouvernement, continue à s’ingérer dans les champs de compétences du Québec et des provinces, au lieu de se concentrer sur ses champs de compétences, comme dans ce cas-ci, à la responsabilité du gouvernement envers les enfants des Premières Nations et Inuit.
Par ailleurs, le Bloc Québécois trouve regrettable que le Comité permanent de la santé n’ait pas accepté de reconnaître dans ce rapport que le Québec puisse mener ses propres initiatives et obtenir sa juste part du financement destiné aux initiatives fédérales en matière d’obésité juvénile, en toute conformité avec ses compétences constitutionnelles et le plan décennal de 2004.
C’est pourquoi le Bloc Québécois recommande :
v Que si le gouvernement fédéral entreprend des actions pour contrer l’obésité juvénile, ces actions ne soient pas contraignantes pour le Québec;
v Que les initiatives du gouvernement fédéral sur l’obésité juvénile dans les domaines de responsabilité provinciale doivent être assorties d’un droit de retrait avec pleine compensation et ce, sans conditions pour le Québec.
C. CIBLER L’INTERVENTION DU GOUVERNEMENT FÉDÉRAL
1. Agir dès maintenant pour les communautés des Premières Nations et les Inuit
Malgré qu’il ait débordé des champs de compétence du gouvernement fédéral, le Comité permanent de la santé s’est attardé à la situation vécue par les Premières Nations et les Inuit. Les membres du Bloc Québécois sont favorables aux recommandations qui interpellent ces communautés1, à condition que celles-ci soient mises à contribution dans l’élaboration et l’évaluation des initiatives destinées à contrer l’obésité juvénile.
Le Bloc Québécois invite le gouvernement fédéral à prioriser ces recommandations et à mettre rapidement en place des mesures qui lui permettront de s’attaquer de façon efficace aux problèmes vécus par ces communautés.
2. Respecter les champs de compétence du Québec et des provinces
Le Plan décennal de 2004 prévoit que le gouvernement du Québec partage l’information et les meilleures pratiques avec les gouvernements des autres provinces et territoires. Le Québec remplit ses obligations puisque plusieurs mécanismes de coopération sont en place, notamment par le biais de tables de concertation FPT2, d’ententes formelles et spécifiques et par l’entretien de contacts réguliers et constants avec les administrations des autres provinces et du gouvernement fédéral.
En vertu du fait qu’il respecte ses engagements, le Québec ne devrait pas être tenu de se plier à des initiatives fédérales touchant ses champs de compétences, comme la recherche, l’éducation, la publicité, etc. Les recommandations 1, 2, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 12 et 13 contenues dans le rapport du Comité permanent de la santé ne peuvent donc être acceptées par le Bloc Québécois. Si les autres provinces canadiennes s’entendent pour donner des responsabilités au gouvernement fédéral dans la lutte à l’obésité juvénile, le Québec devrait, à tout le moins, pouvoir bénéficier d’un droit de retrait avec pleine compensation et ce, sans conditions.
À titre d’exemple, quelle serait l’utilité de créer une nouvelle structure en mettant sur pied un centre d’échange du savoir (recommandation 6) alors que de tels échanges ont déjà cours entre le Québec, le gouvernement fédéral et les provinces? On peut également se questionner sur la pertinence d’une évaluation des lois québécoises sur la publicité destinée aux enfants par le gouvernement fédéral (recommandation 9) et sur les mesures destinées aux écoles (recommandation 11) alors qu’il s’agit clairement d’une compétence provinciale. Enfin, comment justifier que le gouvernement fédéral impose des conditions aux provinces dans la maîtrise d’œuvre des programmes d’infrastructures (recommandation 13)?
3. Une action fédérale mieux cernée
Les membres du Bloc Québécois sont conscients que le gouvernement fédéral peut agir à l’intérieur de ses compétences dans la lutte à l’obésité juvénile. C’est pourquoi ils appuient la recommandation 11 portant sur l’évaluation du crédit d’impôt sur l’activité physique. La recommandation 4, visant à limiter le contenu en gras trans, est également appuyée, en soutien au rapport du Groupe d’experts ayant étudié la question en 2006.
[1] Les recommandations 1, 2, 5, 6, 8, 10 et 12 contiennent des sections sur les Premières Nations et les Inuit.
[2] FPT : fédérales-provinciales-territoriales.