SECU Rapport du Comité
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Réponse du gouvernement au septième rapport du Comité permanent de la Sécurité publique et nationale
Sous-comité sur la revue de la Loi antiterroriste
Droits, restrictions et sécurité : Un examen complet
de la Loi antiterroriste et des questions connexe
INTRODUCTION
L’examen parlementaire de la Loi antiterroriste a fourni l’occasion de revoir des dispositions qui avaient été adoptées il y a plus de cinq ans et d’examiner d’autres questions plus actuelles. Pour cette raison, le gouvernement du Canada a appuyé activement l’examen de la Loi antiterroriste que les comités de la Chambre des communes et du Sénat ont effectué en vertu de l’article 145 de la Loi, participant également à cet examen. Le gouvernement applaudit l’ensemble des efforts faits par les deux comités et il est reconnaissant de la richesse et de la variété des témoignages qui ont été recueillis.
Le gouvernement s’est engagé à veiller à ce que ces lois continuent de répondre aux besoins des Canadiens; aussi a-t-il appuyé l’examen avec force. Les lois doivent protéger la sécurité nationale, tout en respectant les droits de la personne, et elles doivent fournir un fondement légal solide qui permette au gouvernement de réagir d’une manière concertée efficace et complète à la menace que représente le terrorisme.
À titre d’avant-goût à une réponse d’ordre législatif, le gouvernement salue l’occasion qui lui est fournie de présenter cette réponse écrite aux recommandations du Sous-comité de la Chambre des communes sur l’examen de la Loi antiterroriste.
CODE CRIMINEL : QUESTIONS CONCERNANT LA DÉFINITION ET INFRACTIONS LIÉES AU TERRORISME (Recommandations 1–15)
Définition d’« activité terroriste » dans le Code criminel
Définir le terrorisme de manières clairement axées sur le nœud du problème et le distinguer d’autres formes plus conventionnelles d’actes criminels afin de déterminer l’application de la responsabilité criminelle et des mesures d’enquête et de prévention, constituent un défi de taille pour la collectivité internationale et les législatures du monde entier. Dans son rapport, le Sous-comité fait observer que la définition d’« activité terroriste » dans la loi canadienne est complexe et pas facile à comprendre. Cependant, il ajoute que cela ne l’étonne pas, car « le phénomène qu’on tente de décrire aux fins du droit pénal, c’est-à-dire l’activité terroriste au début du XXIe siècle, connaît de nombreux avatars ». Le Sous-comité s’est penché sur les autres définitions proposées dans les mémoires et présentations. Il a aussi étudié, en particulier, la définition énoncée dans la Convention internationale sur la répression du financement du terrorisme [1] et il l’a trouvée trop étroite parce que trop axée sur les activités associées uniquement à des actes de violence grave. Il lui a préféré la définition d’« activité terroriste » adoptée par le Parlement en 2001.
La définition d’« activité terroriste », à l’article 83.01 du Code criminel, compte deux volets. Le premier englobe une série d’infractions visant à exécuter les instruments internationaux contre le terrorisme. Selon le second, qui est plus général et indépendant, une « activité terroriste » est tout acte (action ou omission) qui est « d’une part, commis à la fois : (A) au nom — exclusivement ou non — d’un but, d’un objectif ou d’une cause de nature politique, religieuse ou idéologique » et qui vise à intimider le public ou à contraindre une personne, un gouvernement ou une organisation à accomplir un acte ou à s’en abstenir, si l’action ou omission cause intentionnellement un préjudice grave précisé. Au nombre des préjudices précisés figurent les suivantes : causer des blessures graves à une personne ou sa mort, mettre sa vie en danger, compromettre gravement sa santé ou sa sécurité, causer des dommages matériels considérables tout en causant aussi l’un des préjudices mentionnés ci-dessus et, dans certaines circonstances, perturber gravement ou paralyser des services, installations ou systèmes essentiels, publics ou privés.
Certains sont d’avis que la définition indépendante est trop vaste et que la mention d’une cause de nature politique, religieuse ou idéologique peut inciter à un « profilage » d’ordre politique, religieux ou idéologique. Les tribunaux sont actuellement saisis de la question de l’exigence d’une motivation dans l’affaire R. c. Khawaja [2]. On craint en outre que les éléments ayant trait au fait de perturber gravement, ou paralyser, des services essentiels puissent étendre les mesures antiterroristes aux grèves ouvrières illégales, mais pacifiques, et aux autres protestations. Ces craintes ont aussi été soulevées en 2001 et, en réponse, le Parlement a prévu dans cet article une exception pour les revendications, protestations ou manifestations d’un désaccord ou pour les arrêts de travail qui n’ont pas pour but de provoquer l’un des préjudices graves mentionnés dans la définition.
Le gouvernement, qui est conscient de la variété des opinions exprimées au sujet de cette question importante, est d’accord avec la recommandation du Sous-comité. Selon le libellé actuel, l’exigence qu’une action ou omission ait été commise « au nom — exclusivement ou non — d’un but, d’un objectif ou d’une cause de nature politique, religieuse ou idéologique » a pour effet de restreindre la portée de la définition, ce qui aide à distinguer l’activité terroriste des autres formes plus conventionnelles d’activités criminelles. Elle fournit aussi une mesure de sauvegarde supplémentaire pour un accusé, car la poursuite doit prouver cette motivation hors de tout doute raisonnable. De plus, la recommandation du Sous-comité est conforme aux examens indépendants de la définition de terrorisme, menés récemment en Australie et au Royaume-Uni, qui ont amené à conclure que les exigences de motivation semblable énoncées dans leurs lois devraient demeurer inchangées. Le gouvernement pourra réexaminer la définition à la lumière des évaluations judiciaires une fois que l’affaire Khawaja aura été conclue.
Le Sous-comité a aussi scruté des mesures non législatives, telles les exigences de formation et de surveillance, pour assurer qu’on n’invoque pas de façon abusive des critères liés à la politique, à la race, à la religion ou à l’idéologie. Ces mesures sont en place depuis quelque temps et demeurent susceptibles d’examen et d’amélioration pour assurer que les organes canadiens de police et de sécurité exercent leurs fonctions efficacement tout en entretenant des relations positives avec toutes les collectivités. Le gouvernement du Canada estime que de telles relations positives doivent être nouées au niveau opérationnel et que des mesures non législatives sont en conséquence un élément essentiel.
Diverses démarches concrètes ont été faites pour amorcer un dialogue avec les groupes diversifiés du Canada afin de favoriser la compréhension, la confiance et la coopération entre ces communautés et les organes de police, de services frontaliers et de sécurité. Il s’agit, entre autres, d’initiatives locales axées sur les relations communautaires ou visant expressément les craintes des communautés musulmane et arabe du Canada, d’activités de liaison avec le public et d’intervention régionale ainsi que d’initiatives nationales visant à nouer un dialogue au sujet des mesures touchant la sécurité nationale, comme la création de la Table ronde transculturelle sur la sécurité. Cette table ronde, qui regroupe des représentants de l’ensemble des communautés du Canada, est un volet important de la stratégie gouvernementale en matière de sécurité nationale. Son mandat est d’engager les Canadiens et le gouvernement dans un dialogue continu sur la sécurité nationale dans notre société diversifiée et pluraliste. Depuis sa création, elle a eu un apport précieux quant à l’impact des mesures de sécurité et elle a exercé diverses activités de rayonnement dans l’ensemble du pays, comme les colloques régionaux qui ont réuni des membres de groupes ethno-culturels et des représentants du gouvernement et de la sécurité nationale et leur ont permis d’échanger des opinions sur les questions ayant trait à la sécurité nationale.
Il importe aussi de souligner certains des mécanismes d’examen externes et internes auxquels sont assujettis nos organes de police et du renseignement de sécurité. Ces mécanismes fournissent un moyen d’évaluer les plaintes du public et de mener des enquêtes indépendantes sur la conduite des organes de police, de services frontaliers et de renseignement de sécurité. Le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité est un exemple d’organisme civil d’examen indépendant qui rend compte au Parlement des activités du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS). Le commissaire responsable du Centre de la sécurité des télécommunications exerce des fonctions semblables. En outre, dans la partie II du rapport de la Commission d’enquête sur les actions des responsables canadiens relativement à Maher Arar, il est recommandé d’élargir l’examen des activités policières relativement à la sécurité nationale. Le gouvernement a entrepris l’étude de ces recommandations et il présentera sa réponse à cet égard en temps voulu.
Autres questions de fond
Après avoir examiné l’équilibre entre la nécessité de dispositions antiterroristes efficaces et la liberté d’expression, le Sous-comité a aussi recommandé la création d’une nouvelle infraction de glorification du terrorisme dans le but de promouvoir celui-ci. Le gouvernement examinera soigneusement s’il y a lieu de créer une telle infraction, compte tenu de la Charte canadienne des droits et libertés et de ce que cela implique sur le plan stratégique.
Quant au paragraphe 83.22(1) du Code criminel, qui qualifie d’acte criminel le fait de charger une personne de se livrer à une activité terroriste, le gouvernement est d’accord avec la recommandation voulant que la disposition soit élargie de manière à inclure le fait de charger une personne de faciliter l’exercice d’une activité terroriste [3]. Cependant, le gouvernement ne croit pas que le même changement s’impose au paragraphe 83.21(1), dans lequel est qualifié d’acte criminel le fait de charger sciemment une personne de se livrer à une activité au profit d’un groupe terroriste, car le libellé actuel est suffisamment large pour englober le fait de charger quelqu’un de faciliter l’exercice d’une telle activité.
Les représentants de la profession juridique ont aussi exprimé l’opinion que l’infraction consistant à contribuer sciemment à la capacité de tout groupe terroriste de se livrer à une activité terroriste ou de la faciliter, à l’article 83.18 du Code criminel, puisse être étendue aux avocats qui offrent des services juridiques à des personnes accusées d’infractions de terrorisme. Le Sous-comité a recommandé des modifications visant à assurer que les avocats puissent œuvrer sans crainte de poursuites. Le gouvernement estime suffisantes les exigences actuelles de la mens rea (c.-à-d. l’élément moral) et les autres mesures de sauvegarde, dont l’application du droit à la représentation juridique prévu par la Charte. Il est d’avis que la protection du client au nom du secret professionnel ne doit pas pouvoir servir à masquer le fait de participer ou de contribuer sciemment à tout groupe terroriste.
Le Sous-comité a recommandé de limiter le pouvoir discrétionnaire du procureur général du Canada d’amorcer une poursuite pour terrorisme dans n’importe quelle circonscription territoriale du Canada. Malgré cette recommandation, la sécurité nationale et les aspects liés à la preuve dans une importante affaire de terrorisme, ainsi que la complexité et les difficultés d’ordre logistique qui s’ensuivent, peuvent obliger à utiliser des installations spéciales qui n’existent pas dans toutes les régions du Canada. Il peut être essentiel pour les intérêts de la justice ou de la sécurité des Canadiens, et pour ceux de l’accusé, que le procès se déroule dans des endroits et des installations appropriés. De plus, les progrès dans les domaines du transport et des technologies de l’information et des communications font que le transfert de dossiers est beaucoup moins préjudiciable qu’il ne l’aurait été dans les décennies passées. Le gouvernement estime qu’un procès devrait être tenu dans les endroits dotés des installations appropriées qui sont essentielles pour de telles affaires.
Le Sous-comité a aussi recommandé l’élargissement de l’infraction consistant à héberger ou à cacher, prévue à l’article 83.23 du Code criminel. L’infraction a été libellée de manière à viser expressément la situation de quelqu’un qui héberge ou cache sciemment une personne dont il sait qu’elle s’est livrée à une activité terroriste ou qu’elle est susceptible de le faire et qui le fait afin de lui permettre de se livrer à une activité terroriste ou de la faciliter. L’infraction est axée sur le fait d’héberger ou de cacher une personne pour lui permettre de se livrer à une activité terroriste ou de la faciliter. Par contre, aider une personne à s’enfuir après qu’elle a commis une activité terroriste serait visé par les dispositions de complicité après le fait, à l’article 23 du Code criminel. Le Sous-comité a recommandé de maintenir l’exigence d’une motivation à l’égard du fait d’héberger ou de cacher une personne qui est susceptible de se livrer à une activité terroriste, mais de faire un acte criminel nouveau du fait d’héberger ou de cacher une personne qui s’est livrée à une activité terroriste dans le passé, sans l’exigence supplémentaire d’une motivation. Ce libellé serait plus large que les dispositions actuelles de complicité après le fait, qui comportent l’exigence d’une motivation, à savoir fournir une assistance à quelqu’un pour lui permettre de s’enfuir. Le gouvernement estime qu’il serait préférable que l’orientation de l’article 83.23 demeure de prévenir toute conduite ayant trait à une activité terroriste future qui pourrait autrement être facilitée ou exercée. Cependant, compte tenu des observations du Sous-comité, le gouvernement réexaminera le libellé de cette infraction et les dispositions applicables de détermination de la peine. Le Sous-comité a fait une recommandation semblable [4] à l’égard de l’infraction similaire consistant à héberger ou à cacher, à l’article 21 de la Loi sur la protection de l’information et, généralement parlant, les mêmes raisonnement et conclusions s’appliqueraient.
Au sujet des sanctions pour infractions multiples, le Sous-comité a proposé que quiconque est condamné pour avoir participé sciemment à une activité terroriste soit passible d’une peine maximale d’emprisonnement à perpétuité. Le gouvernement est d’avis que cela est déjà prévu aux articles 21 et 22 du Code criminel, selon lesquels quiconque aide une personne à commettre un crime ou l’encourage à le faire, ou conseille à quelqu’un d’autre de commettre un crime, participe à ce crime et est donc passible de la même sanction que la personne qui l’a effectivement perpétré. Si l’acte criminel constitue une activité terroriste, l’article 83.27 substitue généralement l’emprisonnement à perpétuité à la peine maximale autrement applicable. Quant à l’application de ces peines, le principe énoncé à l’article 83.26 du Code criminel est que des peines consécutives doivent être purgées dans les cas où de multiples condamnations sanctionnent les infractions basées sur les mêmes faits et où l’une d’elles a trait à une infraction de terrorisme.
Le Sous-comité a aussi proposé que ce principe soit clarifié dans les cas où une peine est infligée à l’égard d’un acte criminel commis au profit d’un groupe terroriste (article 83.2), de sorte qu’en plus de la peine imposée en vertu de l’article 83.2, une personne puisse aussi être condamnée pour l’acte criminel sous-jacent. Cependant, l’article 83.2 a pour effet de créer une infraction imposant une peine maximale d’emprisonnement à perpétuité au lieu de la peine qui serait autrement applicable à l’égard de l’acte criminel, si cet acte est commis au profit d’un groupe terroriste. Ainsi, par exemple, une fraude (article 380), normalement punissable d’une peine maximale de 14 ans, serait passible d’une peine maximale d’emprisonnement à perpétuité en vertu de l’article 83.2 si elle était commise en vue de financer un groupe terroriste. L’article 83.26 prévoit que les peines infligées pour certaines infractions de terrorisme, mis à part la peine d’emprisonnement à perpétuité, devraient être purgées consécutivement à toute autre peine découlant de la même infraction ou de la série d’infractions ou d’une peine que la personne purge déjà.