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SECU Rapport du Comité

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Réponse du gouvernement au septième rapport du Comité permanent de la Sécurité publique et nationale

Sous-comité sur la revue de la Loi antiterroriste

Droits, restrictions et sécurité : Un examen complet
de la Loi antiterroriste et des questions connexe


LA LOI SUR L’ENREGISTREMENT DES ORGANISMES DE BIENFAISANCE (RENSEIGNEMENTS DE SÉCURITÉ) ET LA LOI DE L’IMPÔT SUR LE REVENU : RAYER DE LA LISTE OU REFUSER D’ENREGISTRER UN ORGANISME DE BIENFAISANCE (Recommandations 27–34)

Les organismes de bienfaisance sont un élément essentiel de la société canadienne. Ils viennent en aide aux malades et aux démunis, ils font la promotion de l’éducation, ils mettent à la disposition de la population des installations communautaires et ils fournissent une aide humanitaire par tout dans le monde. Par conséquent, des organismes de bienfaisance canadiens enregistrés conformément à la Loi de l’impôt sur le revenu (LIR) bénéficient de nombreux avantages fiscaux, dont les principaux sont l’exemption de l’impôt prévu par la Partie 1 de la LIR et la possibilité de remettre des reçus aux fins de l’impôt à tous les donateurs afin qu’ils puissent obtenir la déduction ou le crédit fiscal correspondant. Toutefois, les organismes canadiens d’application de la loi et de renseignements, de même que des organisations internationales comme le Conseil de sécurité de l’ONU et Groupe d’action financière, ont produit des rapports sur le financement direct et indirect du terrorisme par le truchement d’organismes qui agissent également ou qui prétendent agir à des fins de bienfaisance. En réponse à ces rapports, le Parlement a adopté la Loi sur les organismes de bienfaisance (renseignements de sécurité) (LOBRS) sous le régime de la Loi antiterroriste. La LOBRS permet au gouvernement d’avoir accès à des renseignements confidentiels lorsqu’il doit décider si un organisme peut être enregistré ou demeurer enregistré comme organisme de bienfaisance au sens de la LIR.

Le ministre de la Sécurité publique et le ministre du Revenu national peuvent, après avoir examiné des renseignements confidentiels, signer un certificat déclarant qu’ils sont d’avis qu’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un demandeur ou un organisme de bienfaisance a mis, met ou mettra, directement ou indirectement, des ressources financières à la disposition d’une entité qui prend part à des activités terroristes au sens du Code criminel. Lorsqu’un certificat est délivré, il est automatiquement renvoyé à la Cour fédérale pour contrôle judiciaire. Après l’audition de la preuve, si le juge de la Cour fédérale détermine que le certificat est raisonnable, celui-ci devient une preuve concluante que l’organisme ne peut être enregistré ou demeurer enregistré comme organisme de bienfaisance. En vertu de la LPBRS, l’organisme peut demander que les ministres procèdent à un contrôle judiciaire de la décision de signer un certificat sous motif que les circonstances qui ont mené à la décision ne sont plus les mêmes.

En raison des conséquences de la décision de rayer de la liste ou de refuser d’enregistrer un organisme de bienfaisance, le sous-comité a recommandé que le certificat ne soit pas considéré comme raisonnable lorsque l’organisme de bienfaisance enregistré a démontré qu’il a exercé une diligence raisonnable afin d’éviter un usage abusif de ses ressources et qu’elle soit limitée aux situations où l’organisme de bienfaisance « savait ou aurait dû savoir » que sa pratique était répréhensible.

Il faut savoir que le processus prévu par la LOBRS est d’ordre administratif. En effet, la LOBRS fournit une mesure administrative (p. ex. signature d’un certificat permettant l’utilisation et la protection de renseignements confidentiels) pour arriver à une solution administrative : rayer de la liste ou refuser d’enregistrer un organisme de bienfaisance, l’empêchant ainsi de bénéficier d’avantages fiscaux. Par ailleurs, cette approche est conforme à l’exigence de la LIR selon laquelle les organismes de bienfaisance enregistrés doivent surveiller l’utilisation de leurs ressources et en rendre compte. Lorsque les organismes de bienfaisance remettent leurs ressources à un bénéficiaire qualifié au sens de la LIR, ils ne sont pas tenus de respecter cette exigence.

De plus, afin de ne pas miner la confiance du public dans le système d’aide fiscale aux organismes de bienfaisance enregistrés et d’assurer aux donneurs que leurs dons serviront uniquement aux fins de bienfaisance prévues, le gouvernement devrait prendre toutes les mesures nécessaires pour éviter que tout organisme associé à des activités de terrorisme bénéficie d’avantages fiscaux. La disposition de la LOBRS exigeant qu’il soit démontré que l’organisme « savait ou aurait dû savoir » pourrait dans certains cas faire en sorte que le gouvernement accorde effectivement une subvention à caractère fiscal pour des ressources qui découlent d’activités terroristes.

Par ailleurs, l’ajout d’un moyen statutaire de défense relatif à la diligence raisonnable, en conjonction avec l’établissement de lignes directrices et d’une liste de vérification visant à évaluer la diligence raisonnable, permettrait à des organismes associés à des activités terroristes d’invoquer la diligence raisonnable pour obtenir des renseignements concernant les mesures de lutte contre le terrorisme prises par le Canada et de structurer leurs activités de façon à créer un moyen de défense à l’encontre du régime de la LOBRS.

Les modifications énoncées précédemment pourraient également nuire à la conformité du Canada à la Convention internationale sur la répression du financement du terrorisme et aux recommandations du Groupe d’action financière.

En ce qui concerne les appels judiciaires sous le régime de la LOBRS, le gouvernement est d’avis qu’un examen plus approfondi doit être effectué pour évaluer les répercussions du contrôle judiciaire de la disposition sur l’accès aux appels dans les affaires liées à un certificat de sécurité délivré en vertu de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés. Des préoccupations ont également été soulevées quant au fait que l’ajout dans la LOBRS d’une interdiction générale de publier le nom d’un organisme, à partir du moment où l’enquête commence, et de tous les documents présentés à la Cour fédérale contribuerait à ce que l’on s’éloigne du principe de transparence des procédures du tribunal et entraînerait un risque élevé de contestations fondées sur la Charte.

Le Sous-comité recommande que les mots « à ce moment, et se livre encore » soient supprimés de l’alinéa 4(1)b) de la LOBRS afin que les ministres puissent rayer de la liste ou refuser d’enregistrer un organisme de bienfaisance même si le groupe terroriste qu’il finançait a mis un terme à ses activités avant que les ministres n’aient été informés du financement ou qu’ils aient pu signer le certificat. Comme il ne s’agissait pas de l’objectif de la disposition, le gouvernement peut appuyer la modification proposée.

LA LOI SUR LA PREUVE AU CANADA (Recommandations 35–43)

La Loi antiterroriste a eu pour effet de modifier les articles 37 et 38 de la Loi sur la preuve au Canada en ce qui a trait à l’évaluation, par le juge, des intérêts contradictoires dans les cas où l’on s’oppose à la divulgation de renseignements pour des raisons d’intérêt public déterminées, tout particulièrement des renseignements susceptibles de porter préjudice aux relations internationales ou à la défense ou à la sécurité nationales. Ces modifications ont été apportées à diverses fins. Elles assouplissent le régime et permettent de régler les questions de preuve au début des instances. En outre, elles prévoient une utilisation de renseignements portant sur les relations internationales, la défense ou la sécurité nationales qui ne porte pas atteinte au droit d’un prévenu à un procès équitable et elles permettent de protéger la capacité du gouvernement fédéral de protéger les renseignements dont la divulgation serait potentiellement préjudiciable à de tels intérêts.

La création du certificat du procureur général avait pour objet d’empêcher la divulgation de renseignements concernant une instance, au besoin. Le certificat est délivré pour protéger les renseignements qui ont été obtenus sous le sceau du secret de la part d’une entité étrangère ou la concernant ou encore pour assurer la défense du pays ou protéger la sécurité nationale. De tels renseignements sont souvent fournis à la condition expresse qu’ils ne soient pas divulgués. Le Canada ne peut garantir à l’autre État que les renseignements qui lui ont été fournis ne seront divulgués que si la décision revient au procureur général du Canada plutôt qu’aux tribunaux. Dans un litige récent intéressant l’application de l’article 38 de la Loi sur la preuve au Canada, le ministère public a présenté l’argument suivant : [5]

[traduction]

Les conséquences d’un manquement à la règle des tiers seraient considérables pour le Canada, étant donné qu’il importe en général plus de renseignements de nature délicate qu’il n’en exporte. Certains États seraient peut-être toujours disposés à transmettre des renseignements au Canada, mais leur évaluation des risques et des avantages diffèrera sans doute dans bien des cas s’ils ne sont pas convaincus de la capacité du Canada de protéger les renseignements qui lui ont été transmis sous le sceau du secret. Une telle situation aurait pour effet d’entraver les efforts de lutte du Canada contre le terrorisme.

Le procureur général est également habilité à délivrer un fiat lui assurant la compétence exclusive à l’égard de toute poursuite dans le cadre de laquelle des renseignements sensibles ou potentiellement préjudiciables peuvent être divulgués.

Le gouvernement estime que la durée actuelle d’un certificat du procureur général, qui est de quinze ans, n’est pas excessive, étant donné la nature des renseignements qu’il vise. Néanmoins, le gouvernement est disposé à accepter la recommandation du Sous-comité de ramener à dix ans la durée du certificat, à moins que le procureur général du Canada le délivre de nouveau aux termes du paragraphe 38.13(9). De nombreuses garanties ont déjà été prévues à l’égard de tels certificats. Par exemple, la délivrance, la modification et la révocation d’un certificat sont publiées sans délai dans la Gazette du Canada. Or, pour accroître la transparence de ce régime, le gouvernement accepte de souscrire à la recommandation du Sous-comité, qui propose la modification de la Loi sur la preuve au Canada de manière à obliger le procureur général du Canada à déposer un rapport annuel au Parlement sur le recours aux certificats prévus à l’article 38.13 de cette loi et aux fiat prévus à l’article 38.15. Il convient de souligner que même si ces deux dispositions n’ont jamais été appliquées, elles constituent néanmoins des outils essentiels.

À l’heure actuelle, les parties à une instance peuvent demander à la Cour d’appel fédérale de rendre une ordonnance modifiant ou annulant le certificat délivré au titre de l’article 38.13. Le juge saisi de la demande confirme, modifie ou révoque le certificat. Le gouvernement est d’avis que le mécanisme actuel de révision judiciaire est approprié et ne souscrit donc pas à la recommandation présentée visant à conférer un droit d’en appeler à la Cour suprême du Canada.

La Loi antiterroriste a modifié l’article 38 de la Loi sur la preuve en obligeant certaines personnes à aviser le procureur général du Canada lorsqu’elles prévoient de divulguer ou de faire divulguer des renseignements dont elles croient qu’il s’agit de renseignements sensibles ou de renseignements potentiellement préjudiciables. Or, certaines entités inscrites à l’annexe (notamment les juges de la Cour fédérale, les commissaires à l’information et à la protection de la vie privée et certaines commissions d’enquête), compte tenu des fonctions particulières qu’elles exercent, sont soustraites à l’obligation relative à l’avis par l’alinéa 38.01(6)d), sauf lorsqu’elles rendent une décision ou une ordonnance qui entraînerait la divulgation de ces renseignements.

Ces entités ont été inscrites à l’annexe parce qu’elles disposent de mesures pour protéger les renseignements sensibles ou potentiellement préjudiciables. Par conséquent, le gouvernement n’est pas convaincu qu’elles ont besoin de lignes directrices écrites ou de mécanismes de révision pour les aider à acquitter leur obligation qui consiste à empêcher la divulgation de renseignements sensibles ou potentiellement préjudiciables et à aviser le procureur général du Canada, conformément au paragraphe 38.02(1.1) de la Loi sur la preuve au Canada. Il se peut que l’établissement de telles lignes directrices ne convienne pas dans certaines situations, notamment lorsqu’on pourrait mettre en doute l’indépendance judiciaire. Cela étant dit, le gouvernement répondra avec plaisir à toute demande que lui présentera une entité désignée.

Une fois l’avis donné, dans certaines circonstances, une demande peut être présentée à la Cour fédérale, en vertu de l’article 38.04. À l’heure actuelle, le procureur général du Canada est responsable, au titre de cette loi, de présenter la demande à la Cour fédérale au nom du témoin qui a donné l’avis. Le Sous-comité avait recommandé que le gouvernement acquitte les coûts relatifs à la demande. Dans un tel cas, le témoin participe à la procédure, mais comme il ne l’a probablement pas intentée, il ne devrait pas avoir à engager les dépenses relatives au dépôt d’une demande devant la Cour fédérale. Le gouvernement est d’avis que les autres personnes, y compris les personnes qui demandent la divulgation des renseignements, devraient être responsables des dépenses découlant de la présentation d’une demande devant la Cour fédérale. Il ne souscrit donc pas à la recommandation du Sous-comité obligeant le procureur général à présenter une demande à la Cour fédérale pour obtenir une ordonnance de divulgation des renseignements dans tous les cas où, sauf lorsque les parties se sont entendues, le procureur général ne permet pas la divulgation complète et inconditionnelle. Si par exemple, la partie à l’instance donne un avis à des fins stratégiques, la décision de présenter ou non une demande devrait être prise par voie de délibérations, plutôt qu’incomber de plein droit au procureur général, ce qui serait le cas si ce dernier était responsable de présenter une telle demande.

Après avoir reçu l’avis, le procureur général peut consentir à la divulgation des renseignements. Si le procureur général s’oppose à la divulgation complète ou partielle des renseignements ou si le procureur général n’a pas répondu dans les dix jours suivant l’avis donné, la personne qui la demande est habilitée à présenter une demande à la Cour fédérale après cette période. Souvent, ce délai de dix jours n’est pas suffisant pour permettre au procureur général de prendre connaissance des documents, compte tenu qu’ils peuvent être volumineux, et de procéder aux consultations internes nécessaires. Si la personne était disposée à reporter un peu sa demande, on pourrait envisager la possibilité de conclure un accord de divulgation avec le procureur général. En outre, avant de se prononcer sur la question, le procureur général doit tenir compte de l’incidence sur l’intérêt public non seulement de la divulgation des renseignements, mais également de la non-divulgation de ceux-ci. Il convient aussi d’évaluer les répercussions sur les ressources pour la Cour fédérale que risquent d’avoir les changements proposés. C’est pourquoi le gouvernement n’est pas convaincu qu’il faille changer la situation actuelle.

Quant à la recommandation du Sous-comité, qui propose que l’article 37.21 de la Loi, qui a été abrogé en 2004, soit réadopté, le gouvernement souligne que, dans l’affaire Toronto Star Newspapers Limited et al c. Canada, la Cour fédérale a statué, entre autres, que le paragraphe 38.11(1) de la Loi sur la preuve au Canada, qui est l’équivalent de l’article 37.21, porte atteinte au principe d’ouverture judiciaire, protégé par l’alinéa 2d) de la Charte. La Cour a opté en l’espèce pour une interprétation limitée de la disposition, restreignant ainsi son application aux exigences ex parte prévues par l’article 38. Le gouvernement n’a pas interjeté appel de ce jugement.

La Cour suprême du Canada a démontré également son appui indéfectible au principe de l’audience publique, même en dépit des considérations fondées sur la sécurité nationale, notamment dans les arrêts Ruby c. Canada (Solliciteur général) [6] et Demande fondée sur l’article 83.28 du Code criminel [7], qui portent sur les investigations prévues dans la Loi antiterroriste. Par conséquent, le gouvernement ne souscrit pas à la recommandation présentée par le Sous-comité, qui propose que l’article 37.21 de la Loi sur la preuve soit réadopté. Cette disposition avait été abrogée en 2004 à titre de mesure corrective.

Enfin, le gouvernement adhère aux recommandations du Sous-comité, selon lesquelles il convient d’améliorer le libellé du paragraphe 37(7) de la Loi sur la preuve et d’adopter une disposition semblable concernant les ordonnances de divulgation rendues au titre de l’article 38.06. Le gouvernement souscrit en principe à ces recommandations.

[5]
Le procureur général du Canada c. Mohammad Momin Khawaja, dossier de la Cour fédérale no DES-2-06, mémoire des faits et du droit du demandeur (question constitutionnelle), paragraphe 21.
[6]
[2002] 4 R.C.S. 3.
[7]
[2004] 2 R.C.S. 248.