INDU Rapport du Comité
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L’économie canadienne a affiché une croissance robuste ces dernières années. Le PIB réel du Canada — c’est-à-dire son produit intérieur brut (PIB) nominal corrigé de l’inflation — a progressé au cours de cinq des six dernières années au rythme moyen de près de 3 p. 100 par année (voir le graphique 1). Diverses raisons expliquent cet excellent rendement économique — et une demande intérieure qui demeure ferme n’est pas la moindre —, mais le facteur le plus important et le plus étonnant est sans doute l’expansion économique rapide que l’on observe dans le monde depuis 2003, et plus particulièrement en Chine, en Inde et dans l’Asie du Sud-Est. Selon Consensus Economics, la croissance économique réelle a été en moyenne d’environ 3,5 p. 100 par année entre 2003 et 2007. Toutefois, dans les pays asiatiques énumérés plus haut, la croissance économique réelle a été de plus du double de la moyenne mondiale. Ces excellents résultats économiques sont largement attribuables à la demande asiatique de produits de base pour l’industrie. Or, le Canada est bien placé pour répondre à cette demande, et il possède un avantage comparatif à l’égard de ces produits, notamment pour ce qui concerne l’énergie et les métaux de base.
Graphique 1
Source : Banque du Canada, Mise à jour du Rapport sur la
politique monétaire, avril 2008.
Graphique 2
Source : Banque du Canada (http://www.banqueducanada.ca/fr/taux/can_us_lookup-f.html).
Il n’est pas douteux que les « économies émergentes » comme celles de la Chine et de l’Inde, sont à l’origine d’une demande importante de produits industriels et d’une augmentation considérable des prix des produits de base exportés par le Canada, mais elles sont aussi des concurrents de plus en plus importants pour un certain nombre de produits industriels et de consommation. En fait, la baisse très nette des prix des importations canadiennes — lesquelles proviennent de plus en plus d’Asie —, qui a freiné la hausse des prix des produits intérieurs a été l’effet économique le plus évident et le plus durable, sur les marchés canadiens, de l’intégration de ces « économies émergentes » au système commercial mondial. C’est ainsi que les termes de l’échange pour le Canada, c’est‑à‑dire le rapport entre le prix de ses exportations et celui de ses importations, se sont améliorés de façon marquée pendant cette période1, ce qui a entraîné une appréciation rapide et importante du dollar canadien par rapport à de nombreuses devises, le dollar américain surtout. En outre, cette amélioration marquée des termes de l’échange pour le Canada semble avoir été à l’origine d’un intérêt accru de la part des investisseurs étrangers pour le Canada. Si, durant les deux dernières décennies du XXe siècle, l’investissement direct canadien à l’étranger (IDE) a été supérieur à l’investissement direct étranger au Canada, faisant de celui-ci, en 1997, un exportateur net de capitaux pour la première fois depuis la fondation du pays, c’est maintenant l’inverse que l’on observe. En raison de l’acquisition de grandes sociétés canadiennes de ressources naturelles par des intérêts étrangers à partir de 2006, le Canada a enregistré des entrées nettes d’IDE de 27 milliards de dollars en 2006 et de 62,3 milliards de dollars en 2007. Ces entrées nettes de capitaux ont sans aucun doute soutenu l’appréciation du dollar canadien qui, depuis deux ans, a été stimulée par l’amélioration des termes de l’échange. Tout compte fait, la valeur du dollar canadien a augmenté de 78,5 p. 100 en six ans seulement, hausse sans précédent depuis que, en 1971, le gouvernement fédéral a décidé de laisser flotter le dollar (voir le graphique 2)2.
La Banque du Canada prévoit, de plus, des taux de croissance du PIB réel national de 1,4 p. 100 en 2008 et de 2,4 p. 100 en 2009. Ces prévisions, établies en avril 2008, supposent des taux de croissance du PIB réel des États-Unis de 1,0 p. 100 en 2008 et de 1,7 p. 100 en 2009. Ce sont là des taux de croissance positifs du PIB réel américain, mais la Banque du Canada admet qu’il est bien possible que le marasme récent du marché américain du logement, la baisse du niveau de confiance des consommateurs américains, et le double déficit du budget du gouvernement fédéral américain et du compte courant des États-Unis fassent entrer l’économie américaine en récession au premier trimestre, voire au premier semestre de 2008. Ces projections, par conséquent, laissent croire à une reprise économique durant le second semestre ou les trois derniers trimestres de 2008, mais elles ralentiront quand même davantage les exportations canadiennes aux États-Unis (ce que fait déjà la valeur élevée de la devise canadienne) au cours des deux années à venir.
Nombre de conjoncturistes souscrivent, de façon générale, à ces prévisions. Cependant, force est d’admettre qu’il existe une variété d’opinions. Ainsi, tout en reconnaissant la possibilité d’une récession économique aux États‑Unis, le Conference Board du Canada fait preuve d’un peu plus d’optimisme dans ses projections relatives au taux de croissance du PIB réel états‑unien, qui atteindrait selon lui 1,6 p. 100 en 2008 et 2,5 p. 100 en 2009, ce qui entraînerait le maintien d’une croissance plus élevée du PIB réel canadien, qui s’élèverait à 2,2 p. 100 en 2008 et à 3,0 p. 100 en 2009.
Résultats du marché du travail
Étant donné que le PIB réel du Canada augmente de façon rapide et constante depuis plusieurs années, il n’est pas étonnant que le marché du travail du Canada ait également affiché de bons résultats pendant cette période. Le niveau général de l’emploi a augmenté, le nombre d’emplois passant de 15,6 millions en janvier 2003 à 17 millions en décembre 2007, ce qui correspond à une progression de 1,4 million ou de 9 p. 100 en cinq ans seulement (voir le graphique 3). La progression de l’emploi a donc été spectaculaire, plus de 280 000 emplois par année en moyenne ayant été créés durant cette période. Le taux d’emploi a également augmenté régulièrement pour atteindre 63,9 p. 100 en mars 2008, tandis que le taux global de chômage au Canada s’est maintenu juste en dessous de 6 p. 100 pendant les six derniers mois, tombant même à 5,8 p. 100 avant de revenir à 6 p. 100 en mars 2008 — jamais depuis 33 ans le taux d’emploi n’avait été aussi élevé, et le chômage aussi bas.
Graphique 3
Source : Statistique Canada, Enquête sur la population
active, dates diverses.
Cette croissance de l’emploi s’est manifestée dans toute l’économie à l’exception du secteur manufacturier (voir les graphiques 4 et 5). Dans le secteur des services, le nombre d’emplois est passé de 11,4 millions en 2002 à 12,9 millions en 2007, ce qui représente une hausse de 14,1 p. 100. Le secteur de la production de biens comprend aussi bien le secteur manufacturier que l’agriculture, les ressources naturelles, les services publics et la construction. L’emploi dans le secteur manufacturier s’est replié de son sommet de 2,3 millions atteint en novembre 2002, glissant à 2 millions en mars 2008, ce qui s’est traduit par la perte d’environ 352 900 travailleurs, soit 15,1 p. 100 de la main-d’œuvre occupée du secteur en novembre 2002. Cependant, l’agriculture, les ressources naturelles, les services publics et la construction ont largement compensé ces pertes, le nombre d’emplois du secteur de la production de biens passant d’environ 3,9 millions en 2002 à quelque 4 millions en 2007, ce qui donne une progression de 2,3 p. 100.
Graphique 4
Source : Statistique Canada, Enquête sur la population
active, dates diverses.
L’offre relativement faible de main-d’œuvre (par rapport au passé) sur le marché du travail du Canada a en outre entraîné une bonification rapide des salaires et avantages sociaux. La rémunération moyenne dans l’industrie est passée de 16,49 $ à 19,13 $ entre 2000 et 2007, ce qui représente une hausse annuelle moyenne de 2,1 p. 100 (voir le graphique 6). On peut même dire que la rémunération horaire au Canada augmente beaucoup plus rapidement depuis le début de l’« essor des produits de base »; elle a en effet progressé en moyenne de 2,6 p. 100 par année depuis quatre ans. Comme l’inflation des prix a été en moyenne de 2 p. 100 pendant cette période, les travailleurs canadiens profitent d’augmentations notables de leurs revenus réels depuis 2003.
Graphique 5
Source : Statistique Canada, Enquête sur la population
active, dates diverses.
Graphique 6
Source : Statistique Canada, CANSIM, tableau 282-0087.
Résultats du secteur des entreprises
La rentabilité des entreprises s’est améliorée de façon marquée entre 2000 et 2007. S’élevant à 173,1 milliards de dollars en 2000, les bénéfices d’exploitation des entreprises ont reculé une année seulement et ont ensuite progressé tous les ans pour atteindre 262,5 milliards de dollars en 2007, ce qui équivaut à une hausse de près de 52 p. 100 depuis sept ans (voir le graphique 7). En fait, depuis 2004, les bénéfices d’exploitation des entreprises au Canada atteignent chaque année des sommets records. À peu près au même rythme, les marges bénéficiaires, le rendement des capitaux propres et le rendement des capitaux employés dans le secteur des entreprises ont aussi augmenté au cours de cette période. Ils ont atteint 8,8, 12,1 et 8,7 p. 100 respectivement en 2007.
Graphique 7
Source : Statistique Canada, Statistiques financières
trimestrielles des entreprises, dates diverses.
Par contre, le secteur des entreprises au Canada n’a pas eu de bons résultats sur les plans de la productivité ou de la compétitivité, si on le compare au secteur américain. Depuis 2000, en effet, la rémunération horaire de la main-d’œuvre des entreprises canadiennes a augmenté nettement plus rapidement que sa productivité — environ 21 p. 100 contre 7 p. 100 — de sorte que le coût unitaire de la main-d’œuvre canadienne a augmenté d’environ 14 p. 100 entre 2000 et 2006 (voir le graphique 8). Plus important encore, si on tient compte de l’appréciation de la devise canadienne par rapport au dollar américain, les coûts unitaires de la main-d’œuvre canadienne exprimés en dollars américains ont progressé de plus de 50 p. 100 entre 2000 et 2006. En revanche, les coûts unitaires de la main-d’œuvre des entreprises américaines ne se sont accrus que de 7 p. 100.
Graphique 8
Source : Statistique Canada, Le Quotidien :
Productivité du travail, rémunération horaire et
coût unitaire de main-d’œuvre, dates diverses.
Quand on tente de déterminer la cause de la faiblesse relative de la productivité de la main‑d’oeuvre canadienne par rapport à celle des États‑Unis, on constate immédiatement que la rémunération horaire a été comparable de part et d’autre de la frontière, mais que, chez nos voisins du Sud, l’augmentation de la rémunération horaire n’a que légèrement dépassé celle de la productivité de la main‑d’oeuvre. Ainsi, le rendement du secteur des entreprises des deux pays diffère sur au moins un plan, celui de la productivité de la main‑d’oeuvre, qui a progressé de 17,5 p. 100 aux États‑Unis contre 6,4 p. 100 au Canada entre 2000 et 2006. Toufefois, le manque de compétitivité du Canada par rapport aux États‑Unis depuis 2003 résulte, surtout, de l’appréciation marquée et rapide du dollar canadien par rapport à la devise américaine. En fait, cette flambée explique près des trois quarts de la différence de 43 points de pourcentage entre les coûts unitaires de la main‑d’oeuvre. Il importe cependant de faire ressortir que l’appréciation du dollar canadien par rapport à la devise américaine est un facteur sur lequel le secteur des entreprises n’a aucune prise, et que ce dernier ne peut agir que sur la productivité de la main‑d’oeuvre.
La médiocrité de la productivité de la main-d’œuvre canadienne par rapport à celle des États‑Unis n’est pas un fait récent; c’est un problème constant qui remonte au milieu des années 1980 (voir le graphique 9). En 1984, la productivité de la main-d’œuvre des entreprises canadiennes par rapport à celle des États-Unis a atteint son sommet de l’ère moderne, soit 90,6 p. 100, mais elle diminue constamment et elle n’était plus que de 74 p. 100 en 2006.
Graphique 9
Source : Centre d’étude des niveaux de vie http://www.csls.ca/data/iptjune2007.pdf,
tableau 7a.
[1] Le cycle le plus immédiat a débuté au quatrième trimestre de 2001. Les termes sont passés d’un indice (établi à 100 en 2002) de 97,8 à 122,5 au quatrième trimestre de 2007. Il y a donc eu une augmentation de 25,3 p. 100 en six ans.
[2] La comparaison est établie entre le dénominateur de 61,79 ¢US, valeur du 21 janvier 2002, et le sommet de 1,1030 $US atteint le 7 novembre 2007.