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PACP Rapport du Comité

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LE CHAPITRE 5, LA GESTION DE LA PRESTATION DES SERVICES JURIDIQUES AU GOUVERNEMENT - MINISTÈRE DE LA JUSTICE DU RAPPORT DE MAI 2007 DU VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL DU CANADA

INTRODUCTION

Le ministère de la Justice du Canada employait quelque 2 500 avocats et disposait d’un budget de près d’un milliard de dollars en 2006-2007. Puisqu’il offre des services juridiques au gouvernement du Canada et à ses ministères et organismes, on le désigne parfois comme le cabinet juridique du gouvernement fédéral. Entre autres choses, il offre des services consultatifs sur les programmes et les politiques, il rédige des projets de règlement et de loi ou des modifications à des textes existants et il représente le gouvernement devant les tribunaux, que ce soit pour le défendre dans des litiges civils ou pour faire appliquer les lois fédérales en poursuivant les contrevenants. (À noter que l’adoption de la Loi fédérale sur la responsabilité, en décembre 2006, a donné lieu à la création du Bureau du directeur des poursuites pénales, qui englobe maintenant les services de poursuites autrefois assurés par le ministère de la Justice. Ce bureau, qui compte 750 employés à temps plein, avait prévu des dépenses de 184 millions de dollars en 2008-2009.)

En mai 2007, le Bureau du vérificateur général du Canada (BVG) a déposé un rapport de vérification du ministère de la Justice intitulé « La gestion de la prestation des services juridiques au gouvernement – Ministère de la Justice Canada » [1]. Soucieux de la bonne gestion des services juridiques du gouvernement, le Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes a tenu une audience sur cette vérification le 8 avril 2008[2]. Le Comité a entendu deux représentants du BVG : Sheila Fraser, la vérificatrice générale elle-même, et Hugh McRoberts, le vérificateur général adjoint. Du ministère de la Justice, il a entendu John H. Sims, sous-ministre et sous-procureur général du Canada, Yves Côté, sous-ministre délégué, et Terrance McAuley, sous-ministre adjoint par intérim.

CONTEXTE

En 1993, le BVG avait procédé à une vérification des services de consultation et de contentieux offerts par le ministère de la Justice[3]. Il avait alors relevé certaines lacunes dans la gestion de la prestation des services juridiques, comme l’absence de plan stratégique du ministère, la piètre gestion des mandataires de l’extérieur et la nécessité de revoir les méthodes extrajudiciaires de règlement des différends.

En 2007, les vérificateurs ont vérifié si le ministère gérait de façon efficace la prestation des services juridiques afin de répondre aux besoins du gouvernement. Ils ont aussi vérifié s’il s’assurait de la qualité des services juridiques rendus et s’il les exécutait de manière rentable. Au cours de la vérification, ils ont déterminé si le ministère avait fait des progrès depuis la dernière vérification, qui remontait à 1993.

Le rapport de vérification de mai 2007 renferme six recommandations, auxquelles le Comité souscrit entièrement. Le Comité remarque que le ministère est d’accord lui aussi avec ces recommandations. Il s’attend donc à ce que ce dernier les mette en pratique intégralement et dans les meilleurs délais.

PLAN D’ACTION

À la suite d’une vérification du BVG, la plupart des ministères dressent un plan d’action indiquant ce qu’ils ont l’intention de faire pour combler les lacunes relevées par les vérificateurs. Il est particulièrement utile qu’ils fournissent ce plan au Comité avant que ce dernier n’amorce ses audiences, afin que ses membres puissent en prendre connaissance et poser des questions. En présentant un plan d’action détaillé, les autorités ministérielles montrent qu’elles prennent au sérieux les constatations des vérificateurs, qu’elles ont l’intention d’agir et qu’elles se chargent de mettre le plan à exécution, ce qui est aussi très important. Certains ministères fournissent un plan d’action avant les audiences, mais ce n’est malheureusement pas la majorité.

Lorsque le sous-ministre de la Justice, John Sims, s’est présenté devant le Comité pour discuter de la vérification, on lui a demandé à plusieurs reprises de dévoiler le calendrier des initiatives mises en œuvre ou envisagées par son ministère en réponse aux recommandations des vérificateurs, mais il n’était pas en mesure de le faire à ce moment-là. Le Comité pense que le sous-ministre aurait pu lui fournir des informations plus précises si son ministère avait établi un plan d’action avant la tenue des audiences.

Le Comité se réjouit malgré tout que le ministère de la Justice lui ait transmis un plan d’action plusieurs semaines après les audiences, un plan décrivant les mesures déjà prises et celles qui seraient prises en réponse aux recommandations du BVG. La vérificatrice générale s’est dite heureuse de la réponse du ministère à la vérification. « Je suis persuadée que le ministère est en bonne voie d’apporter des changements positifs à sa gestion de la prestation des services juridiques », a-t-elle indiqué[4]. Pour s’assurer que le ministère continue d’apporter ces changements positifs et qu’il met en œuvre son plan d’action, le Comité aimerait recevoir de sa part un compte rendu de la situation. Comme plusieurs des initiatives décrites dans le plan d’action ne seront pas terminées avant avril 2009, le Comité recommande : 

Recommandation 1
Que le ministère de la Justice du Canada fournisse au Comité des comptes publics, d’ici le 30 avril 2009, un compte rendu détaillé de la mise en application des mesures adoptées en réponse aux conclusions et aux recommandations contenues dans le chapitre 5, Gestion de la prestation des services juridiques au gouvernement, du rapport de mai 2007 du Bureau du vérificateur général du Canada.

Tout en reconnaissant les progrès accomplis par le ministère pour donner suite aux conclusions du BVG, le Comité trouve que le plan d’action ne traite pas de façon approfondie plusieurs sujets d’inquiétude.

MANDATAIRES EN MATIÈRE CIVILE

Le ministère de la Justice embauche parfois des mandataires de l’extérieur pour s’occuper de contentieux ou d’autres affaires civiles en son nom parce qu’ils sont spécialisés dans un certain domaine ou parce que les avocats du ministère de la Justice Canada ne sont pas disponibles. Selon ce qu’a appris le Comité, le ministère dépense entre 25 et 30 millions de dollars chaque année à cette fin, et les mandataires en matière civile s’occupent d’environ 1 p. 100 des affaires dont est saisi le ministère.

Le BVG a relevé plusieurs lacunes dans les pratiques de sélection et de gestion des mandataires en matière civile. Par exemple, il n’a trouvé aucun document faisant état de la recherche d’un avocat compétent au ministère avant de se tourner vers l’extérieur, aucun document justifiant la sélection du mandataire retenu, aucune information essentielle cohérente ni aucune évaluation documentée du rendement des mandataires . Le BVG a recommandé que Justice Canada examine les lacunes signalées à l’égard de sa gestion des mandataires en matière civile et prenne des mesures correctives.

Le sous-ministre a expliqué au Comité que son ministère avait fait beaucoup d’efforts depuis la vérification pour améliorer le processus de sélection des mandataires, afin qu’il soit plus ouvert, plus juste, plus transparent et plus accessible. Il a toutefois admis qu’il n’y avait pas encore de système d’évaluation des mandataires en matière civile à proprement parler, en raison de la nature des mandataires embauchés pour s’occuper d’affaires civiles. Le plan d’action fourni au Comité précise que des mesures ont été prises pour améliorer : la documentation sur les recherches effectuées à l’interne pour trouver un avocat compétent avant de faire appel à quelqu’un de l’extérieur, les documents justifiant le choix des mandataires, l’information essentielle concernant les modalités relatives au travail et le contrôle de l’évolution des frais. Un projet pilote est en cours en vue de mettre à l’essai une méthode d’évaluation du rendement des mandataires en matière civile.

Quand on a demandé aux représentants du ministère si le favoritisme ou l’allégeance au parti politique du ministre de la Justice en exercice entrait en ligne de compte dans le choix des mandataires en matière civile, ils ont répondu que le ministère avait des bassins de candidats aux compétences diverses mais que, en bout de ligne, c’est le ministre qui décide. Le sous-ministre a d’ailleurs déclaré à ce sujet :

Nous croyons qu’il est judicieux que ce soit le ministre qui prenne la décision au bout du compte, parce qu’il y a une dimension subjective dans le choix d’un avocat. Le ministre doit avoir la conviction que les avocats qui le représenteront personnellement devant les tribunaux possèdent les qualifications requises. Mais cette liste a été obtenue à partir des manifestations d’intérêt d’avocats de l’extérieur, et les fonctionnaires du ministère de la Justice en ont approuvé le contenu. C’est à partir de cette liste que l’on fait ensuite une recommandation au ministre [6].

Le Comité ne comprend pas très bien pourquoi on trouve judicieux que le ministre décide subjectivement de retenir tel mandataire plutôt qu’un autre, puisque la personne embauchée représentera le gouvernement du Canada et non les intérêts personnels du ministre. Le Comité pense que le choix des mandataires en matière civile devrait être aussi juste et transparent que celui de tout autre fournisseur de services au gouvernement. Les avocats ont autant de droits que quiconque et ils s’attendent à ce que la décision de recourir ou non à leurs services soit prise en fonction des coûts et avantages. La création de bassins de candidats n’écarte pas la possibilité ou la réalité d’un parti pris au moment du choix final. Par conséquent, le Comité recommande : 

Recommandation 2
Que le ministère de la Justice du Canada adopte un processus transparent, juste et concurrentiel de sélection des mandataires en matière civile de l’extérieur.

RECOUVREMENT DES COÛTS

La Politique sur les services communs du gouvernement oblige tous les ministères à recourir au ministère de la Justice du Canada pour obtenir des services juridiques. Devant répondre aux besoins des ministères clients, le ministère de la Justice n’a aucun contrôle sur le volume de travail à effectuer. En consultation avec les ministères clients, il a mis au point un cadre stratégique pour les services juridiques fondé sur la planification conjointe et la responsabilité partagée à l’égard des coûts et du rendement, de l’affectation et de l’utilisation des ressources. Le ministère peut maintenant recouvrer la majorité de ses coûts auprès de ses ministères clients grâce à des arrangements financiers conclus avec ces derniers. Une des idées à l’origine de ces arrangements était que, si les ministères assumaient une partie de la facture, cela les inciterait à diminuer leur demande.

Mais comme les frais juridiques représentent une faible partie du budget total des ministères clients, le BVG pense que les coûts supplémentaires ne sont généralement pas un facteur important dans la décision de demander ou non des services supplémentaires. Les dépenses de fonctionnement du ministère de la Justice du Canada ont plus que doublé entre 1997-1998 et 2004-2005[7]. Le BVG a constaté que le ministère n’a guère fait d’analyses pour vérifier l’hypothèse voulant que le partage et le recouvrement des coûts aient pour effet de contrôler la demande et de réduire les frais, et qu’il ne sait  pas s’il conserve un bon rapport coût-efficacité .

Le sous-ministre a appris au Comité que, avec l’approbation du Conseil du Trésor, son ministère avait adopté une approche uniforme de recouvrement des coûts, appliquée à tous les services juridiques fournis aux ministères et organismes gouvernementaux[9], et que les arrangements relatifs au recouvrement des coûts sont maintenant plus cohérents, bien documentés et administrés avec efficacité.

Mais il reste encore à trouver un moyen de mieux gérer et contrôler la demande grandissante de services juridiques. Le Comité est conscient du fait que les ministères doivent avoir accès à des services juridiques de qualité, mais il est important également de garantir une utilisation efficace, économique et efficiente des deniers publics. Le Comité est d’avis que le ministère de la Justice du Canada doit travailler avec les ministères clients à la gestion de la demande de services juridiques et trouver le moyen de fournir les services demandés à peu de frais. Par conséquent, le Comité recommande :

Recommandation 3
Que le ministère de la Justice du Canada étudie des moyens de contrôler la demande de services juridiques de ses ministères clients et qu’il fasse part des résultats de son étude au Comité des comptes publics d’ici le 30 avril 2009.

RAPPORTS SUR LE RENDEMENT

Au cours de sa vérification, le BVG a examiné les rapports annuels du ministère de la Justice au Parlement, soit le Rapport sur les plans et les priorités et le Rapport ministériel sur le rendement. Ayant constaté que ces rapports contenaient peu de mesures significatives de son rendement[10], il a recommandé que le ministère de la Justice du Canada définisse des mesures de rendement en fonction de ses priorités ministérielles et améliore sa reddition de comptes au Parlement.

Le ministère a répondu qu’il allait intégrer les mesures pertinentes énoncées par le Secrétariat du Conseil du Trésor dans l’évaluation annuelle de son cadre de responsabilisation de gestion et aussi évaluer la qualité des données utilisées. Selon le plan d’action fourni au Comité, ces deux choses auraient été faites.

Le Comité s’inquiète depuis un certain temps de la qualité des rapports qui sont présentés au Parlement et il est heureux du travail accompli par le BVG à ce sujet. Il pense que les ministères et organismes devraient rendre leurs rapports plus crédibles, notamment en y incluant des mesures de rendement significatives. Le Comité lit chaque année le rapport sur le rendement du BVG et il y trouve des indicateurs de rendement chiffrés fort intéressants, même s’il est difficile de déterminer les résultats à long terme de la vérification du rendement.

Le Comité ne sait pas au juste pourquoi le ministère de la Justice pense qu’il doit inclure dans son rapport sur le rendement les indicateurs de rendement apparaissant dans son cadre de responsabilisation de gestion (CRG). Les résultats de l’évaluation du CRG ont déjà été rendus publics et ils n’ont pas besoin d’être reproduits de nouveau dans le rapport ministériel sur le rendement. En outre, les rapports sur le rendement ont tout simplement pour but de rendre compte des progrès accomplis par les ministères pour respecter leurs priorités, alors que le CRG est l’instrument dont se sert le Secrétariat du Conseil du Trésor pour évaluer la capacité de gestion des ministères. Le Comité espère que le ministère de la Justice a d’autres priorités et d’autres buts en dehors de l’amélioration de sa capacité de gestion. Il pense que ce ministère peut et doit faire mieux en ce qui a trait à la définition d’indicateurs de rendement significatifs. Estimant que le ministère de la Justice a encore des choses à faire pour améliorer ses rapports au Parlement, il recommande : 

Recommandation 4
Que le ministère de la Justice du Canada définisse des indicateurs de rendements précis et significatifs et établisse des cibles pour ces indicateurs dans son prochain rapport sur les plans et les priorités. 

Le BVG a aussi constaté qu’on ne fait pas encore rapport au Parlement du coût total des services juridiques rendus à l’ensemble du gouvernement. Le ministère de la Justice du Canada fait rapport du coût total de ses services juridiques, mais il est difficile de discerner les autres coûts juridiques assumés par les ministères [11]. Il n’existe donc pas de rapport global au Parlement sur le total des coûts des services juridiques pour le gouvernement. M. Sims a indiqué que son ministère n’a pas accès à certains des coûts liés aux services juridiques, comme le coût des locaux, du personnel de soutien, de l’équipement informatique, etc. C’est le Secrétariat du Conseil du Trésor qui doit compiler les frais juridiques totaux du gouvernement. Le Comité aimerait qu’il y ait plus d’information sur les frais juridiques totaux, mais il ignore s’il serait pratique ou rentable de produire des rapports à ce sujet, car il faudrait mettre en place pour cela des systèmes d’information complexes. Voici donc ce qu’il recommande :

Recommandation 5
Que le Secrétariat du Conseil du Trésor étudie s’il est possible de faire rapport des frais juridiques totaux du gouvernement du Canada et qu’il communique les résultats de son étude au Comité des comptes publics d’ici le 30 avril 2009.

CONCLUSION

Le ministère de la Justice du Canada fournit des services juridiques aux ministères et organismes fédéraux. La majorité des ministères clients sont plutôt satisfaits des services qu’ils reçoivent. Le BVG a cependant relevé quelques lacunes dans la gestion des services juridiques, comme une planification stratégique insuffisante au sein du ministère et un manque de rigueur dans la gestion, notamment au chapitre des ressources. Le ministère a commencé à donner suite aux recommandations du BVG et il semble avoir fait des progrès sur ce plan, mais le Comité a relevé quelques autres points qu’il y aurait lieu d’aborder selon lui. Le Comité pense que le ministère devrait assurer une meilleure gestion de ses mandataires en matière civile, concevoir de meilleurs incitatifs pour restreindre la demande de services juridiques et fournir de l’information plus utile dans ses rapports au Parlement sur son rendement et les coûts totaux des services juridiques offerts au gouvernement.

[1
Rapport du Bureau du vérificateur général du Canada, mai 2007, « Chapitre 5 : La gestion de la prestation de services juridiques au gouvernement – Ministère de la Justice Canada ».
[2]
Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes, 39e législature, 2e session, réunion 25.
[3]
Rapport du Bureau du vérificateur général du Canada, 1993, « Chapitre 17 : Ministère de la Justice – Services consultatifs juridiques et services en matière de litiges ».
[4]
Réunion 25, 11 h 05.
[5]
Chapitre 5, paragraphe 5.18.
[6]
Réunion 25, 12 h 05.
[7]
Chapitre 5, paragraphe 5.4.
[8]
Ibid., paragraphe 5.80.
[9]
Réunion 25, 11 h 10.
[10]
Chapitre 5, paragraphe 5.28.
[11]
Chapitre 5, paragraphe 5.27.