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CIIT Rapport du Comité

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POSSIBILITÉS DE RENFORCER LES RELATIONS COMMERCIALES AVEC LE BRÉSIL


Introduction

Du 7 au 12 juin, des membres du Comité permanent du commerce international de la Chambre des communes (le Comité) ont réalisé une mission d’étude au Brésil. Cette mission avait deux objectifs principaux : permettre aux membres du Comité de mieux comprendre la vigueur et le dynamisme de l’économie brésilienne et les débouchés qu’elle offre, et étudier les moyens par lesquels le Canada pourrait s’engager davantage à l’égard de ce pays et favoriser un partenariat économique plus étroit avec lui.

Le voyage au Brésil devait au départ constituer la moitié d’une tournée de deux pays, l’autre moitié étant consacrée au Pérou. Ce passage au Pérou devait profiter de l’élan acquis grâce à la signature récente de l’accord de libre-échange entre le Canada et le Pérou, favoriser ainsi des liens économiques bilatéraux plus étroits avec un marché prioritaire en Amérique latine et faciliter la compréhension des conséquences de l’accord de libre-échange pour les entreprises canadiennes actives au Pérou ainsi que des attentes des Péruviens quant au libre-échange avec le Canada.

Le voyage au Pérou a toutefois été remis à plus tard, car les dates prévues par le Comité pour ce voyage coïncidaient avec la visite du président colombien Alvaro Uribe au Canada. Des membres du Comité sont restés au Canada pour avoir une rencontre officieuse avec le président Uribe, alors que d’autres, représentant officiellement l’ensemble du Comité, se sont rendus au Brésil. Le Comité tient à réitérer son intention de faire plus tard la visite qu’il avait prévue au Pérou.

La décision du Comité de se rendre au Brésil visait à renforcer les relations économiques avec des marchés prioritaires aux quatre coins du monde. Le Brésil est l’un de ces marchés, parmi les treize qui sont énumérés dans la Stratégie commerciale mondiale du gouvernement du Canada. En outre, ce dernier a fait du réengagement dans les Amériques une orientation prioritaire dont témoignent l’Accord de libre-échange récemment ratifié entre le Canada et le Pérou et les accords de libre-échange signés avec la Colombie et le Panama, sans oublier des négociations commerciales plus dynamiques avec le Groupe des quatre de l’Amérique centrale (Salvador, Guatemala, Honduras et Nicaragua) et les pays des Antilles.

Pendant son séjour au Brésil, le Comité a tenu des réunions dans deux villes, Sao Paulo et Brasilia. À Sao Paulo, ces réunions visaient à établir des liens avec le secteur privé. Le Comité a rencontré la Fédération des industries de l’État de Sao Paulo, des membres de la Chambre de commerce Brésil-Canada et les représentants d’une grande pharmaceutique brésilienne. Les membres du Comité ont pu compter sur le soutien logistique et les séances d’information du consulat du Canada, où ils ont également rencontré un grand nombre de Canadiens qui travaillent au Brésil et des dirigeants d’entreprise brésiliens qui entretiennent des liens avec le Canada.

À Brasilia, le Comité a rencontré des représentants du ministère des Affaires étrangères, de la Chambre du commerce international et de l’Office brésilien de promotion du commerce et de l’investissement. Il a également été reçu par des membres du Congrès brésilien représentant le Groupe d’amitié parlementaire Brésil-Canada.

Brésil — Vue d’ensemble

L’un des principaux messages que le Comité a entendus au Brésil est que les Canadiens et les entreprises canadiennes sous-estiment la taille, la puissance économique et le potentiel du Brésil. Ce pays, fort d’une population de plus de 190 millions d’habitants, est au cinquième rang des pays les plus populeux de la planète. Il se classe également au cinquième rang pour la grandeur de son territoire et au dixième pour l’importance de son économie. L’économie brésilienne devance maintenant celle du Canada, avec un produit intérieur brut (PIB) estimé à 1,6 billion de dollars américains, contre 1,5 billion de dollars américains pour l’économie canadienne.

A.  Économie brésilienne

Le Brésil est une économie moderne, stable et avancée. Selon ce que le Comité a appris, depuis qu’il a accédé à la démocratie, en 1989, ce pays a apporté de nombreuses réformes économiques. Il est doté d’une loi sur la responsabilité financière, sa banque centrale est autonome et la croissance de son PIB est soutenue par la demande intérieure. En outre, l’actuel ralentissement économique mondial met en lumière la stabilité de ce pays. Certes, il n’a pas été à l’abri des effets de ce ralentissement économique, mais celui-ci, à la différence de la crise financière asiatique de 1997-1998, n’a pas fait ressortir de faiblesses systémiques majeures au Brésil. Sa devise n’a pas été attaquée et il n’y a pas eu d’hyperinflation ni d’autres phénomènes déstabilisants.

Le Brésil est un grand commerçant et ses marchés d’exportation se sont diversifiés. En 2008, ses échanges commerciaux ont atteint 371 milliards de dollars américains : des exportations de 197,9 milliards et des importations de 173,2 milliards. Ses échanges ont progressé de 105 p. 100 au cours des cinq dernières années, principalement grâce à la fermeté du cours élevé des produits de base. La Chine est désormais la plus grande destination des exportations du Brésil, car elle reçoit quelque 25 p. 100 du total des exportations, alors que la proportion n’était que de 6 p. 100 il y a quelques années. Les États-Unis, qui étaient auparavant la principale destination des exportations du Brésil, reçoivent maintenant 13 p. 100 des exportations.

L’activité économique au Brésil se compose d’un grand nombre de secteurs et d’industries. Toutefois, le pays est peut-être connu surtout comme une puissance mondiale en agriculture. En effet, il recèle 22 p. 100 des terres arables du monde et il est considéré comme le producteur agricole le plus efficace du monde. Il ne subventionne pas sa production agricole et, à l’Organisation mondiale du commerce (OMC), il est au premier rang des pays qui réclament l’élimination des subventions à l’agriculture.

Le Brésil compte parmi les chefs de file mondiaux dans une multitude d’autres secteurs également. Il est l’un des plus grands producteurs et exportateurs de matières premières et transformées, il est au neuvième rang des producteurs d’acier et au dixième rang des producteurs d’automobiles. Il est aussi au quatrième rang mondial pour production de pâte et de papier, et il possède l’une des entreprises aérospatiales les plus importantes du monde.

Enfin, le Brésil est un chef de file mondial dans le domaine de la production et de l’exploitation des énergies renouvelables. Le Comité a appris que 89 p. 100 de l’énergie de ce pays provient de sources renouvelables, notamment de l’éthanol, dont il est le premier exportateur et le deuxième producteur au monde. Il a conçu une technologie d’utilisation des carburants qui permet de faire rouler les voitures avec un mélange d’essence et d’éthanol.

Le Brésil tire son éthanol de la canne à sucre, qui, comme le Comité l’a appris, est une matière première biologique à la fois moins coûteuse et plus productive que le maïs. Il faut ajouter que la canne à sucre n’est pas produite aux dépens d’autres cultures vivrières ou de la forêt pluviale de l’Amazone. La production d’éthanol n’utilise que 1,2 p. 100 des terres arables du Brésil, et la canne à sucre ne pousse pas bien dans les régions humides de la forêt pluviale, où elle ne constitue pas une culture souhaitable.

Le Comité a appris que, malgré la puissance et le dynamisme de l’économie actuelle du Brésil, son potentiel est limité pour le moment par l’absence de réformes dans un certain nombre de domaines. Cinq objectifs précis en matière de réforme ont été cernés :

  • Réforme de la fiscalité : La charge fiscale est lourde, au Brésil, compte tenu du niveau des services gouvernementaux qui sont assurés. Les besoins en réforme sont particulièrement importants dans les taxes à la valeur ajoutée.


  • Réforme de la sécurité sociale : Au Brésil, les régimes de retraite, tant publics que privés, sont modestes. En outre, les services de santé sont également considérés comme insuffisants.


  • Réforme dans le domaine du travail : Les charges sociales sont un frein important à la création d’emplois au Brésil. Pour chaque dollar de salaire, les employeurs doivent verser des charges sociales de 1,04 $.


  • Réforme politique : Diverses réformes des systèmes politique et électoral ont été mises en évidence. L’une d’elles consiste à réduire le nombre des partis, qui sont actuellement au nombre de 25.


  • Réforme de l’infrastructure : Le Brésil a besoin d’investissements majeurs dans la plupart de ses infrastructures matérielles, dont les réseaux routier et ferroviaire. Des investissements en infrastructure estimés à 114 milliards de dollars américains sont prévus d’ici 2014, année où le Brésil sera l’hôte de la Coupe mondiale du football.


Tout progrès réalisé sur ces plans ne fera qu’accroître le dynamisme et la vitalité déjà observés dans l’économie brésilienne.

B.  Place du Brésil sur la scène internationale

Le Brésil est la puissance économique dominante en Amérique du Sud. L’économie brésilienne est plus importante que celles de tous les autres pays d’Amérique du Sud réunis, et, mieux encore, comme le Comité l’a appris, l’économie du seul État de Sao Paulo est plus considérable que celle de l’ensemble de l’Argentine, dont l’économie arrive au deuxième rang en Amérique du Sud.

Le Brésil est également le moteur économique du bloc commercial le plus important et le plus puissant du continent, le Marché commun du Sud (Mercosur). Le Mercosur a vu le jour en 1991, et son objectif était de mettre en place un marché commun et une union douanière entre les pays participants. Il regroupe actuellement quatre pays : Brésil, Argentine, Uruguay et Paraguay. Le Venezuela a officiellement demandé à se joindre au bloc. Sa candidature a déjà été acceptée par l’Argentine et l’Uruguay, mais doit encore recevoir l’aval du Brésil et du Paraguay.

Le but du Mercosur est d’accroître la coopération économique entre les pays membres en abaissant les barrières qui entravent la libre circulation des biens, des services, des capitaux et des travailleurs à l’intérieur du bloc. Le Comité a appris que les travaux étaient en cours pour mettre en place un Parlement du Mercosur pour administrer les activités du groupe.

Outre son rôle au sein du Mercosur, le Brésil affirme davantage sa présence sur la scène internationale. Il participe activement à des forums internationaux comme l’OMC et le G20 et aux efforts visant à instaurer la sécurité internationale, comme en témoigne son rôle clé dans le maintien de la paix en Haïti.

Au cours de ses réunions avec les dirigeants d’entreprise et représentants gouvernementaux du Brésil, le Comité a appris que ce pays possédait de nombreux atouts importants comme protagoniste de l’économie mondiale : sa position comme « pilier de stabilité » politique et économique en Amérique latine; la taille de son économie; le fait qu’il n’a aucune dette à l’étranger et qu’il est un créancier net dans le monde; son autarcie pétrolière; la qualité des titres de sa dette intérieure; sa position comme pays qui possède le programme d’énergies renouvelables le plus important.

Expansion des relations entre le Canada et le Brésil

A.  Relations économiques actuelles entre le Canada et le Brésil

1.  Commerce de marchandises

Les relations commerciales du Canada avec le Brésil sont modestes, au regard de la taille des deux économies. Bien que les économies canadiennes et brésiliennes représentaient, combinées, un total de 3,1 billions de dollars américains en 2008, les échanges commerciaux bilatéraux des deux pays n’ont totalisé que 5,3 milliards de dollars, dont 2,6 milliards de dollars en exportations canadiennes et 2,7 milliards en importations provenant du Brésil[1].

La valeur globale du commerce canado-brésilien n’est pas très élevée, certes, mais il a connu une expansion rapide ces dernières années. Depuis 2003, la progression du commerce du Canada avec le Brésil est supérieure à celle de ses échanges avec le monde entier, notamment en ce qui concerne les exportations. En 2008 seulement, les exportations vers le Brésil ont augmenté de 71 p. 100 par rapport à l’année précédente.

Le Brésil se range au deuxième rang des plus importantes destinations des exportations canadiennes en Amérique latine (derrière le Mexique), et au 12e rang de ces destinations dans le monde entier. Il est également la deuxième source des importations en provenance de l’Amérique latine, et au 16e rang dans le monde entier. Pour le Brésil, le Canada est au 24e rang des destinations des exportations et au 14e rang des sources des produits d’importation.

2.  Produits

Globalement, les exportations canadiennes au Brésil se répartissent assez également entre produits à base de matières premières et produits manufacturés. Toutefois, pour ce qui est de produits particuliers, la plupart des exportations les plus importantes du Canada au Brésil proviennent du secteur primaire. En 2008, le produit d’exportation le plus important du Canada au Brésil a été la potasse, suivie par le soufre, le charbon, le papier journal et le blé.

Les importations venant du Brésil se répartissent aussi de façon égale entre produits manufacturés et produits à base de matières premières. Par contre, alors que les exportations canadiennes de matières premières se concentrent dans le secteur des mines, des métaux et de l’énergie, les importations de produits à base de matières premières provenant du Brésil sont en grande partie des produits agricoles : les grandes importations canadiennes sont les oxydes d’aluminium, suivis de la canne à sucre brute, des pièces de véhicules, des aéronefs, du jus d’orange et du café.

À cause d’une vigoureuse croissance des exportations et de la relative anémie des importations, le Canada est maintenant un exportateur net de machines et d’équipement au Brésil. Il est également devenu un important exportateur net de produits de l’industrie extractive et un exportateur net de produits forestiers. Par contre, le déficit commercial du Canada avec le Brésil au chapitre des produits agricoles se creuse, le Brésil continuant d’exploiter son avantage naturel en production agricole.

3.  Services et investissement

Le Canada est un exportateur net de services au Brésil. En 2006, dernière année pour laquelle des données sont disponibles, ses exportations de services ont atteint 364 millions de dollars, tandis que ses importations se sont établies à 251 millions. Exception faite d’une pointe dans les importations de services provenant du Brésil en 2006, le commerce des services entre les deux pays stagne généralement depuis le milieu des années 1990.

Le Canada et le Brésil sont l’un pour l’autre des sources majeures d’investissements étrangers directs (IED). Les investissements directs du Canada au Brésil ont atteint les 9,2 milliards de dollars en 2008, faisant de ce pays la 10e destination des capitaux des investisseurs canadiens. Le Canada est également au 10e rang des sources d’IED au Brésil.

Le Canada est un investisseur particulièrement actif dans le secteur minier et les industries qui fournissent des produits et services à ce secteur au Brésil. Le Comité a appris que 128 entreprises canadiennes sont actives dans le secteur minier au Brésil, ce qui correspond à 3,2 milliards de dollars d’IED dans ce pays. Les deux plus grands producteurs d’or au Brésil sont canadiens.

La valeur totale des investissements brésiliens au Canada est encore plus importante : 11,9 milliards de dollars en 2008. L’investissement direct du Brésil au Canada a progressé rapidement ces dernières années, ce qui tient pour l’essentiel à quelques acquisitions importantes d’entreprises canadiennes par des intérêts brésiliens. La plus notable de ces acquisitions a été l’achat du géant minier canadien Inco par la minière brésilienne Vale (autrefois CVRD), en 2006. Grâce à ces investissements majeurs, le Brésil est maintenant au septième rang des sources d’IED au Canada.

B.  Relations non commerciales du Canada avec le Brésil

Le Comité a appris que l’activité commerciale était au centre des relations du Canada avec le Brésil. On observe cependant des signes de resserrement des liens entre les deux pays dans d’autres domaines également. Ainsi, les échanges entre personne sont à la hausse. En 2008, le Canada a délivré un nombre record de visas à des visiteurs brésiliens : 55 000. Beaucoup de ces visiteurs étaient des étudiants qui venaient au Canada pour apprendre l’anglais. Le nombre de Brésiliens qui demandent des visas d’immigration et des permis de travail au Canada est également à la hausse.

Le Canada et le Brésil collaborent également dans le domaine de la défense et de la sécurité. Des relations étroites, fondées sur une coopération énergique en Haïti, se sont établies entre les échelons supérieurs des dispositifs militaires des deux pays. D’après ce qu’on a dit au Comité, ces relations prendront sous peu une nouvelle ampleur.

Un troisième exemple, parmi bien d’autres, est celui des efforts du Canada visant à aider le Brésil à apporter des réformes judiciaires. La médiation judiciaire et l’arriéré dans les causes sont actuellement des problèmes majeurs au Brésil, et le Canada joue un rôle important auprès de lui dans ces dossiers. Des juges brésiliens sont venus au Canada pour se renseigner sur la médiation judiciaire et ils s’efforcent d’appliquer leurs nouvelles connaissances dans le système judiciaire de leur pays.

C.  Efforts du Canada visant à donner de l’expansion aux relations existantes

Le Canada a pris conscience du fait qu’il était important de donner de l’expansion à ses relations économiques avec le Brésil, et il prend plusieurs mesures pour le faire. Le gouvernement du Canada a notamment cerné les sciences et la technologie comme un domaine qui se prête naturellement à un partenariat. La stratégie commerciale du Canada au Brésil consiste donc à s’appuyer sur des relations bilatérales fondées sur les sciences, la technologie et l’innovation commerciale. Cette stratégie se démarque nettement du modèle commercial de promotion bilatérale dans lequel les pays tentent d’établir des liens commerciaux plus étroits en supprimant les obstacles qui gênent l’accès au marché.

L’élément central de cette stratégie est l’Accord-cadre de coopération Canada-Brésil en matière de science, de technologie et d’innovation, signé en novembre 2008. Aux termes de cet accord, le Canada s’est engagé à débloquer 1,5 million de dollars sur deux ans pour financer des initiatives de recherche alliant entreprises canadiennes et brésiliennes. Il faut qu’une entreprise de chacun des pays participe à l’initiative qui, pour être admissible au financement, doit être assortie d’un plan de commercialisation. Le Canada songe à financer quatre ou cinq projets grâce à ces fonds, et l’accent sera mis au départ sur les technologies environnementales. L’accord n’a pas encore été ratifié par le Congrès du Brésil, mais une fois qu’il l’aura été, les fonds mis à la disposition des entreprises canadiennes et brésiliennes doubleront.

Outre les sciences et la technologie, l’ambassade et les consulats du Canada au Brésil ont cerné un certain nombre de « secteurs prioritaires » qui offrent des possibilités considérables aux entreprises canadiennes. Parmi eux, notons la récupération du pétrole et du gaz, les mines, les technologies de l’information et des communications, les arts et la culture, et les technologies de l’environnement. Les membres du Comité ont également appris qu’il existait des débouchés importants dans l’infrastructure des transports, notamment ferroviaires, et une coopération plus étroite dans la fabrication aérospatiale.

Dans le cadre de ses efforts visant à resserrer les liens avec le Brésil, le Canada affirme davantage sa présence diplomatique dans ce pays. Deux autres bureaux ouvriront leurs portes cette année, l’un à Porto Alegre et l’autre à Recife, et l’effectif sera renforcé. Le Canada intensifie également ses efforts de collaboration avec le Brésil au niveau gouvernemental. Le ministre des Affaires étrangères, Lawrence Cannon, s’est rendu au Brésil en février 2009, et le ministre du Commerce international, Stockwell Day, prévoit y aller lui aussi cette année. Un certain nombre de représentants canadiens de haut rang sont allés au Brésil ces derniers mois, pour travailler avec leurs homologues brésiliens. Enfin, les plans d’une visite officielle au Canada du président du Brésil, Lula da Silva, sont en préparation.

D.  Que peut-on faire de plus?

Le message dépourvu de toute ambiguïté que le Comité a reçu au cours de son séjour est que les débouchés économiques au Brésil sont considérables et que le Canada pourrait tirer des avantages énormes de relations commerciales plus étroites avec ce pays. Et c’est dès maintenant que le Canada doit agir pour bâtir et enrichir ses relations avec le Brésil. Le Comité a appris qu’il y avait un créneau de cinq à sept ans, période pendant laquelle peut établir une solide relation de travail avec le Brésil, après quoi il y aura trop d’autres protagonistes importants actifs au Brésil pour que le Canada puisse se faire remarquer dans la foule.

En effet, au cours de plusieurs de ses réunions, le Comité a appris que les liens économiques du Canada avec le Brésil sont sous-développés, compte tenu de la taille des deux économies. Certes, le commerce a beaucoup progressé ces dernières années, mais d’aucuns ont soutenu que cette croissance ne faisait que prouver que les échanges commerciaux entre les deux pays étaient loin d’atteindre leur potentiel.

1.  Nécessité que le Brésil devienne une priorité

Les membres du Comité se sont fait dire de façon répétée que le Canada devait faire du Brésil une priorité de sa politique étrangère. Il est vrai que le Brésil est l’un des marchés prioritaires du Canada dans le cadre de la Stratégie commerciale mondiale, mais on a dit au Comité que le Brésil semblait échapper à l’attention des entreprises et des décideurs, qui s’intéressent à d’autres marchés majeurs dans le monde, et surtout aux trois autres pays du BRIC (Brésil, Russie, Inde et Chine), acronyme employé pour décrire les marchés les plus importants et les plus dynamiques du monde qui semblent émerger aujourd’hui. Comme un participant des réunions tenues à Sao Paolo l’a fait observer, le « B » du BRIC semble avoir été oublié.

2.  Promotion au Canada des possibilités économiques offertes par le Brésil

Les entreprises et les décideurs sont peut-être coupables de ne pas placer le Brésil assez haut dans l’ordre des priorités, mais le Comité s’est fait dire à maintes reprises que les députés et les cadres supérieurs de l’État saisissaient mieux que le secteur privé canadien les avantages d’une coopération plus étroite entre les deux pays. On a signalé au Comité que le secteur privé canadien semblait relativement peu engagé au Brésil et que le gouvernement du Canada devait mieux informer les entreprises des possibilités offertes par l’économie de ce pays. Bref, le Parlement et le gouvernement doivent mettre en lumière au Canada les débouchés qui existent dans l’économie brésilienne.

3.  Accords de libre-échange et de coopération économique

Comme on l’a vu plus haut, le Canada aborde la constitution de liens commerciaux avec le Brésil en mettant l’accent sur le développement de relations entre les entreprises par la coopération dans les domaines des sciences, de la technologie et de l’innovation. Néanmoins, le Comité a remarqué que le Brésil s’intéressait à des mesures supplémentaires qui pourraient être prises, notamment l’étude des possibilités d’accord de libre-échange ou de coopération économique entre le Canada et le Brésil.

Pour conclure un accord de cette nature, toutefois, le Canada devrait négocier non seulement avec le Brésil, mais aussi, par l’entremise du Mercosur, avec l’Uruguay, le Paraguay et l’Argentine, dans le cadre de négociations bilatérales « quatre plus un ». Comme le Mercosur est l’interlocuteur officiel en matière commerciale pour ce bloc régional, le Brésil ne peut négocier seul un accord de libre-échange; ses partenaires du Mercosur doivent également participer aux entretiens.

La négociation d’un accord de libre-échange entre le Canada et le Mercosur pourrait être une tâche redoutable, car les quatre pays du Mercosur ne sont pas exempts de clivages idéologiques. En outre, les négociations peuvent exiger beaucoup de temps. L’Union européenne (UE) et le Mercosur ont amorcé des négociations en 1999, et les deux parties ne sont toujours pas parvenues à un accord.

Comme la négociation d’accords de libre-échange (ALE) peut exiger beaucoup de temps, des représentants du gouvernement brésilien ont dit au Comité que, au lieu de chercher immédiatement à conclure un ALE, le Canada pourrait songer à conclure avec le Brésil des accords bilatéraux plus modestes dans des domaines d’intérêt mutuel. Des accords prévoyant des droits tarifaires plus faibles dans certains secteurs, par exemple, pourraient être conclus plus rapidement qu’un accord commercial global et rapporter de façon plus immédiate des avantages aux deux pays[2]. Le protocole d’entente sur la santé entre le Canada et le Brésil, signé en mai 2009, est un bon exemple d’accord sectoriel propice au renforcement des liens entre les deux pays[3].

Il faut toutefois signaler que le Mercosur s’est montré ouvert par le passé à la possibilité d’un accord de libre-échange avec le Canada. En 2005, il a même pressenti le Canada afin d’étudier la possibilité d’un accord bilatéral de libre-échange, mais les entretiens n’ont pas dépassé le stade des explorations officieuses, car les négociateurs canadiens n’ont pas reçu de leur gouvernement le mandat nécessaire pour aller au-delà de ce stade. On a dit au Comité que, si le Canada demandait des consultations officielles, le processus de négociation pourrait reprendre rapidement.

Pour que le Canada étudie de plus près la possibilité d’un ALE ou d’un accord de coopération économique avec le Brésil (par l’entremise du Mercosur), il y a d’abord deux étapes préliminaires à franchir. Il faut d’abord faire une analyse franche des griefs passés entre le Canada et le Brésil pour s’assurer qu’il ne subsiste aucun ressentiment ni problème en suspens; les deux pays ont eu par le passé des divergences de vues non négligeables dans des dossiers comme ceux de la maladie de la vache folle et des subventions à l’industrie aérospatiale. Des problèmes semblables sont susceptibles, s’ils ne sont pas résolus, de limiter gravement les efforts de resserrement des relations économiques.

Deuxièmement, les deux parties pourraient travailler de concert à la définition d’objectifs et d’attentes bien définis à l’égard de tout accord bilatéral. Cette étape comprend un effort conjoint visant à définir la portée souhaitable d’un éventuel accord et une analyse des coûts et avantages des différentes possibilités d’accord.

Le Canada doit également être réaliste quant à ce qu’il peut obtenir dans les négociations commerciales et honnête au sujet de ce qu’il est prêt à offrir dans ces négociations. Cela exige une évaluation franche de ce que le Brésil attendrait d’un accord commercial, surtout sur des points comme l’accès au marché. À l’OMC, le Brésil a pris fermement position comme défenseur d’un commerce libre et ouvert. Il s’oppose farouchement aux mesures protectionnistes et aux subventions, notamment en agriculture. Dans toute négociation officielle, il est fortement probable que le Brésil s’opposera au régime canadien de gestion de l’offre, qui impose des restrictions d’accès au marché pour l’importation de certains produits agricoles.

Conclusion

Le voyage au Brésil, bien que bref, a donné aux membres participants du Comité une meilleure compréhension, une meilleure évaluation du vaste potentiel économique du Brésil et des possibilités offertes par une coopération économique plus étroite entre le Canada et le Brésil. Grâce aux efforts extraordinaires déployés par l’ambassadeur du Canada, Paul Hunt, et le personnel de l’ambassade et des consulats de Brasilia, de Sao Paulo et de Rio de Janeiro, le Comité a pu profiter au maximum de son bref séjour au Brésil.

Le Comité est toutefois conscient du fait que la participation à quelques jours de réunions au Brésil n’équivaut pas à une analyse complète des complexités et enjeux particuliers des relations actuelles entre le Canada et le Brésil, ni des questions qui risquent de surgir si les deux pays s’efforcent à un moment donné de resserrer leurs liens économiques. Il faut réaliser une analyse nettement plus poussée si on veut acquérir une meilleure compréhension des enjeux et des approches que le Canada pourrait emprunter pour donner de l’expansion à ses relations économiques avec le Brésil. C’est pourquoi le Comité souhaite, si son programme de travail le permet, entreprendre dans un proche avenir une étude plus détaillée des relations économiques entre le Canada et le Brésil et, avec tous ses membres, retourner dans ce pays. Les membres du Comité souhaiteraient tout particulièrement entreprendre une étude plus approfondie des secteurs agricole et agroalimentaire brésiliens.

Dans l’immédiat, il ressort clairement de l’analyse qui a été faite jusqu’à maintenant que le Brésil est un pays qui déborde de potentiel économique et que le Canada ne devrait ménager aucun effort pour élargir ses relations avec lui. En l’absence de l’information que livrerait une étude plus détaillée, le Comité est d’avis que le gouvernement du Canada devrait amorcer des entretiens préliminaires avec le Brésil à la première occasion pour trouver le meilleur moyen d’établir des liens économiques plus étroits. C’est dans cette optique qu’il formule les recommandations suivantes :

Recommandation 1 :

Compte tenu des avantages attendus de l’Accord-cadre de coopération Canada-Brésil en matière de science, de technologie et d’innovation et du fait que la négociation d’un accord commercial bilatéral avec le Mercosur risque de prendre beaucoup de temps, le gouvernement du Canada devrait chercher d’autres moyens d’établir des relations économiques plus étroites avec le Brésil, grâce à des accords de partenariat et à des protocoles d’entente sectoriels d’intérêt mutuel.

Recommandation 2 :

Le gouvernement du Canada devrait entamer des pourparlers préliminaires avec le Mercosur pour évaluer le niveau d’intérêt quant à la possibilité d’ouvrir des négociations officielles en vue de conclure un accord de libre-échange ou un accord de coopération économique.

Recommandation 3 :

Le gouvernement du Canada devrait, comme cela s’est fait récemment avec l’Union européenne, collaborer avec les pays du Mercosur à une étude commune dont le but serait de cerner les enjeux et les objectifs clés d’un éventuel accord de libre-échange ou de partenariat économique et d’établir la portée de négociations ultérieures.

Recommandation 4 :

Le gouvernement du Canada devrait, avec la coopération des pays du Mercosur, mener une étude conjointe des coûts et avantages possibles d’un accord de libre-échange entre les deux parties. Tout doit être entrepris pour que le nombre le plus important possible d’acteurs, tant au Canada qu’au sein du Mercosur, puisse participer à cette étude.

Recommandation 5 :

Le Brésil représentant l’une des principales puissances du marché agricole mondial, le gouvernement du Canada devrait entreprendre une étude sur les secteurs agricole et agroalimentaire brésiliens, ainsi que sur les répercussions que pourrait avoir un accord de libre-échange agricole avec le Brésil sur les agriculteurs et le secteur agroalimentaire canadiens.

[1]          Toutes les données de la section proviennent de Statistique Canada.

[2]          Il importe de signaler qu’il faudrait prendre des mesures pour garantir la conformité pareil accord aux exigences de l’OMC relatives aux accords commerciaux bilatéraux ainsi qu’aux engagements du Brésil dans le cadre du Mercosur.

[3]          On trouvera de l’information sur le protocole d’entente sur la santé entre le Canada et le Brésil sur le site Web (http://www.hc-sc.gc.ca/ahc-asc/media/nr-cp/_2009/2009_74-fra.php).