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PACP Rapport du Comité

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INTRODUCTION

Le Service correctionnel du Canada a la responsabilité des auteurs d’actes criminels condamnés par les tribunaux à des peines d’emprisonnement de deux ans ou plus. Il assure la garde et la prise en charge de près de 14 500 détenus, soit 14 000 hommes et 500 femmes, dans 58 établissements fédéraux et 16 centres correctionnels communautaires. En 2007-2008, son budget s’élevait à 1,87 milliard de dollars, dont 570 millions étaient consacrés à la garde des détenus et 72 millions à l’alimentation, au nettoyage et aux vêtements. Le Service employait plus de 15 000 personnes cette année-là.

Quand on dirige une organisation de la taille du SCC, il est important de s’assurer de l’économie et de l’efficience de ses opérations, surtout quand il s’agit d’une organisation qui fournit de grandes quantités de biens et services. C’est dans cet esprit que le Bureau du vérificateur général (BVG) a vérifié si le Service correctionnel du Canada gère les ressources et les biens utilisés pour assurer les services de sécurité ainsi que l’approvisionnement et la prestation des services en établissement en accordant une attention suffisante à l’économie et à l’efficience[1].

Estimant que l’économie et l’efficience sont deux objectifs fondamentaux quand on gère des fonds publics, le Comité des comptes publics a consacré sa réunion du 12 mars 2009 à cette vérification[2].  Le Comité a rencontré plusieurs fonctionnaires.  Le Bureau du vérificateur général était représenté par Hugh McRoberts, vérificateur général adjoint, et Gordon Stock, vérificateur principal, et le Service correctionnel du Canada par son commissaire, Don Head.

RAPPORT SUR LES PROGRÈS

Au cours de la vérification, le BVG a fait cinq recommandations concernant la façon dont le SCC pouvait rendre ses opérations plus économiques et plus efficientes. Le SCC était d’accord avec ces recommandations et il a précisé ce qu’il ferait pour y donner suite. Le SCC a même présenté au Comité un plan d’action fournissant des détails sur les mesures prévues et commentant les initiatives en cours.

En acceptant manifestement les recommandations du BVG, en fournissant des réponses détaillées et en présentant un plan d’action, le SCC a démontré qu’il était bien résolu à mettre en œuvre les recommandations en question. Le commissaire de cet organisme, Don Head, a d’ailleurs indiqué que les différents volets du plan d’action seront tous exécutés au cours de l’exercice se terminant le 31 mars 2010. Voici ce qu’il a déclaré :

Service correctionnel et moi-même avons trouvé le rapport extrêmement utile parce qu’il indique les domaines auxquels il nous faut accorder plus de temps et d’attention. Nous comprenons clairement le besoin de frapper un équilibre entre les trois aspects dont a fait rapport la vérificatrice générale, et nous nous engageons à le faire. Nous nous faisons également un devoir de trouver d’autres possibilités de faire des gains d’efficience et d’économiser davantage dans le cadre de notre programme de transformation. Enfin, j’espère bien revenir un jour pour vous parler des progrès réalisés par rapport à nos plans[3].

Le Comité se réjouit de voir que le SCC s’engage à faire le nécessaire pour améliorer l’économie et l’efficience de ses opérations. Profitant de cette volonté exprimée par le commissaire de faire part des progrès accomplis, il recommande :

RECOMMANDATION 1
Que le Service correctionnel du Canada remette au Comité des comptes publics, d’ici le 30 avril 2010, un compte rendu des progrès accomplis pour mettre en application les recommandations faites par le Bureau du vérificateur général au chapitre 7 du Rapport de décembre 2008.

ÉCONOMIE ET EFFICIENCE AU CHAPITRE DE L’APPROVISIONNEMENT

Dans son Rapport sur les plans et les priorités 2007-2008, le Service affirmait que pour face à certains défis, comme le changement du profil de la population carcérale et l’augmentation des dépenses non discrétionnaires, il avait dû revoir et réajuster constamment ses dépenses pour répondre aux besoins les plus urgents. Il disait aussi avoir épuisé sa capacité de réaffecter les ressources existantes pour résoudre les problèmes actuels et futurs[4]. Les vérificateurs ont cependant trouvé de nombreux moyens d’accroître l’efficience et l’économie de manière à pouvoir réaffecter des sommes inutilisées à d’autres priorités. C’était particulièrement évident au chapitre de l’acquisition de biens et services.  

Il incombe au Service correctionnel de répondre aux besoins de base des délinquants incarcérés dans ses établissements et de fournir des uniformes aux agents de correction qui y travaillent. En 2007-2008, le SCC a dépensé 71,7 millions de dollars pour assurer des services d’alimentation, de nettoyage et d’habillement. Le BVG s’attendait à ce qu’il se dote de politiques, de normes, de procédures et de pratiques nationales afin de faciliter la gestion économique de ces services. Il a cependant constaté que le SCC n’avait pas analysé ses besoins en approvisionnement à l’échelle nationale pour avoir une vue globale de la demande de biens, sauf en ce qui touche l’habillement, et que les 58 établissements sous sa responsabilité analysent eux-mêmes leurs propres besoins et prennent la majeure partie des décisions en matière d’approvisionnement indépendamment les uns des autres.  

Au chapitre de l’alimentation, le BVG a constaté que le SCC n’avait pas envisagé de faire des économies d’échelle et de réduire le nombre de contrats[5]. Pourtant, d’autres établissements comme les hôpitaux et les chaînes hôtelières ont fait des économies appréciables en contrôlant systématiquement et en analysant leurs achats de nourriture et en négociant des contrats de longue durée. Le SCC n’a pas cherché à déterminer s’il est plus économique de préparer des repas sur place que d’avoir recours à des entreprises d’alimentation.  

Les établissements du SCC décident individuellement de la plupart des achats de produits de nettoyage, comme dans le cas de la nourriture, et le SCC n’a pas fait d’analyse suffisante pour déterminer si le processus actuel d’achat de produits de nettoyage est le plus économique et s’il ne serait pas préférable d’acheter en plus grosses quantités[6].

Contrairement aux achats de nourriture, le SCC gère la majorité de ses achats de vêtements à l’échelle nationale et les contrats pour ces biens sont attribués à la suite d’un concours. Le SCC n’a cependant pas comparé ses pratiques de distribution des vêtements avec celles de l’industrie[7].

Le BVG a recommandé que le SCC recueille suffisamment d’informations et fasse une analyse en profondeur des achats qu’il effectue pour ses services d’alimentation, de nettoyage et d’habillement[8]. Le SCC devrait aussi examiner les économies qu’il pourrait réaliser selon le volume de ses achats. Il a convenu d’examiner ses pratiques et d’établir des politiques nationales sur l’acquisition économique de biens.

Le BVG a conclu que le SCC se concentre principalement sur la sûreté et la sécurité et ne porte pas suffisamment attention à l’économie et l’efficience. Le Comité convient que l’économie et l’efficience sont des objectifs importants qui méritent une attention suffisante, sauf que la sûreté et la sécurité doivent demeurer les priorités du SCC et les efforts pour améliorer l’économie et l’efficience des opérations ne doivent pas se faire à leur détriment.

Par contre, le Comité trouve inquiétant que le SCC ait fait fi des pratiques de gestion élémentaires favorisant l’économie et l’efficience. Il est assez évident qu’il aurait pu réaliser des économies d’échelle en achetant de plus gros volumes au lieu de laisser chaque établissement effectuer ses propres achats individuellement. L’exemple des hôpitaux qui, se fondant sur ce principe, réussissent à faire des économies appréciables lors de leurs achats de biens et services, montre que le SCC pourrait s’inspirer utilement des pratiques adoptées dans d’autres établissements du secteur public. Par exemple, plusieurs établissements du Québec, notamment l’Hôpital Sainte-Justine et Hydro-Québec, exploitent des services d’alimentation et de cafétéria novateurs. Le Comité est surpris que le SCC n’ait pas cherché davantage de moyens d’économiser sur les achats afférents aux services d’alimentation, de nettoyage et d’habillement. Il semble que le SCC n’ait pas suivi certaines pratiques élémentaires, comme le contrôle du gaspillage, en vue d’assurer une plus grande rentabilité.

D’après la vérification, les gestionnaires du Service correctionnel consacrent beaucoup de temps et d’énergie à éviter de dépasser le montant du crédit parlementaire qui leur est alloué au lieu de trouver des solutions innovatrices pour assurer une économie et une efficience accrues. Le Comité croit que le SCC devrait tirer des enseignements de l’expérience d’autres organismes, des secteurs privé et public, en vue d’améliorer ses pratiques d’achat et il recommande :

RECOMMANDATION 2
Que le Service correctionnel du Canada cherche à accorder plus d’attention aux principes d’économie et d’efficience en ce qui a trait à ses achats en adoptant les pratiques exemplaires d’organismes des secteurs public et privé.

Le Comité reconnaît en même temps que les établissements du SCC ont souvent un rôle important dans leur collectivité. Ils peuvent contribuer grandement aux économies locales par l’achat de biens et services. Le Comité craint qu’un trop brusque changement dans le régime d’approvisionnement, de local à national, ait de graves conséquences dans certaines collectivités, surtout en cette période de ralentissement économique. Un approvisionnement national pourrait aussi avoir des effets nuisibles sur l’environnement, par rapport aux achats locaux, puisqu’il nécessiterait l’expédition des marchandises sur de grandes distances.

Lorsqu’on lui a demandé si les vérificateurs s’étaient penchés sur cette question, Hugh McRoberts, du BVG, a répondu : « Il est certain que nous nous attendrions à ce que les enjeux liés aux entreprises locales comparativement aux enjeux nationaux, tous les enjeux possibles, aient été pris en compte dans le genre d’analyse que nous pensions voir, mais il n’en a tout simplement pas été question[9]. » Autrement dit, avant de décider d’effectuer des achats de biens à l’échelle locale ou nationale, le SCC doit d’abord analyser toutes les questions en cause, ce qu’il n’a pas fait. Le Commissaire a fait observer qu’il pourrait être plus économique d’acheter certains biens localement. Voyons ce qu’il a dit :

Encore là, à la lumière de l’analyse de nos besoins alimentaires, on pourrait déterminer qu’il serait parfois plus économique et efficient de se procurer ces denrées auprès de marchands locaux. La vérificatrice générale n’insinuait pas que tous nos achats devaient se faire nationalement. Les aliments périssables seront probablement achetés localement, contrairement aux denrées qui se conservent plus longtemps. Nous devons d’abord terminer notre évaluation pour déterminer où se situe le juste équilibre[10].

Le Comité trouve lui aussi qu’il est important de trouver un juste équilibre, mais, pour y arriver, le SCC doit effectuer une analyse minutieuse. Par conséquent, le Comité recommande :

RECOMMANDATION 3
Que le Service correctionnel du Canada, quand il examine les coûts d’acquisition et de prestation de services d’alimentation, de nettoyage et d’habillement, analyse également l’impact de ses pratiques d’acquisition sur les économies locales et l’environnement.

GESTION DES HEURES SUPPLÉMENTAIRES

Les vérificateurs ont trouvé que le SCC n’avait pas accordé suffisamment d’attention aux principes d’économie dans la gestion des heures supplémentaires. Les employés du SCC font beaucoup d’heures supplémentaires, on dépense beaucoup d’argent à ce chapitre et, au cours des six dernières années, les coûts réels des heures supplémentaires ont largement dépassé le montant prévu au budget à cet effet[11]. La direction du SCC n’avait cependant aucune stratégie ni politique générale visant à surveiller et à prévoir dans son budget le nombre d’heures supplémentaires.

Dans sa réponse à la recommandation du BVG concernant le temps supplémentaire, le SCC s’est engagé à améliorer le suivi et l’analyse de ses dépenses en heures supplémentaires et les solutions de rechange qu’il peut mettre en place pour les éviter[12]. Toutefois, on ne sait pas au juste s’il s’attaque à certaines des causes profondes de ses coûts en heures supplémentaires, y compris, selon les vérificateurs, les agents en congé imprévu ou en formation, la nécessité pour les agents d’escorter des détenus à l’hôpital ou au tribunal, la nécessité de séparer les uns des autres les membres de certains groupes criminels et le manque de fonds pour créer d’autres postes[13].

Les congés de maladie sont un des facteurs qui font grimper les coûts en heures supplémentaires. M. Head a fait savoir au Comité que le nombre de congés de maladie a augmenté au cours des quelques dernières années et que la moyenne annuelle par agent s’établit actuellement à 17 jours. Quand un agent prend une journée de maladie, il doit être remplacé et son remplaçant est habituellement payé au tarif du temps supplémentaire.

Quand on lui a demandé si les congés de maladie étaient directement reliés aux dépenses en heures supplémentaires, le commissaire a répondu : « En grande partie, oui. Si la situation était optimale — c'est-à-dire si tous nos postes étaient pourvus, nos horaires adéquatement équilibrés et nos scénarios de postdéploiement bien en place — nous aurions la capacité, par l'intermédiaire de nos agents suppléants, de couvrir un certain nombre de congés, qui incluent non seulement les congés de maladie, mais aussi les congés annuels et les congés pour obligations familiales[14]. » C’est donc dire que le SCC peut réduire ses coûts en heures supplémentaires en se dotant d’un effectif complet pour remplacer ses agents correctionnels en congé. D’ailleurs, dans son plan d’action, le SCC indique qu’il prévoit recruter 1 200 agents en 2008-2009.

En plus d’embaucher d’autres agents correctionnels, le SCC doit s’intéresser aux causes des congés de maladie, comme le moral des employés et les conditions de stress dans le milieu de travail. Il arrive aussi à des agents correctionnels de prendre des journées de maladie après avoir été agressés ou avoir vécu une situation très stressante, comme une prise d’otages ou une grave émeute. Le Comité recommande :

RECOMMANDATION 4
Que le Service correctionnel du Canada prévoie ses coûts en heures supplémentaires dans son budget et cherche à les réduire à l’aide de mesures susceptibles de réduire, chez les agents correctionnels, le besoin de prendre des journées de maladie, et qu’il fasse rapport au Comité des comptes publics, d’ici le 31 décembre 2009, de la façon dont il entend corriger ce problème.  

CONCLUSION

L’économie et l’efficience sont à la base d’un usage prudent des fonds publics. Il est important non seulement d’atteindre les objectifs fixés, mais de le faire en recourant aux moyens les plus rentables qui soient. L’économie et l’efficience sont des valeurs qui pourraient être utilisées plus régulièrement comme critères d’évaluation pour les vérifications du BVG.

Les révélations du BVG à l’effet que le SCC ne se souciait pas suffisamment de l’économie et de l’efficience de ses opérations sont troublantes, d’autant plus que le SCC a déclaré qu’il ne pouvait plus réaffecter de ressources pour répondre à ses besoins. Le Comité trouve cependant encourageant de voir que le SCC semble prendre au sérieux les recommandations du BVG et qu’il a entrepris d’apporter des changements pour intégrer l’économie et l’efficience dans le processus décisionnel de la gestion. Le Comité pense que le SCC profiterait sous ce rapport des pratiques adoptées par d’autres organisations des secteurs public et privé. Il croit aussi que le SCC doit s’assurer de faire des économies à l’achat de biens et services tout en tenant compte de l’importance de soutenir les économies locales, et veiller à trouver un juste équilibre entre sûreté et sécurité, d’une part, et économie et efficience, d’autre part. Le SCC doit également faire en sorte d’avoir en place des systèmes appropriés pour dépenser prudemment les 122 millions de dollars supplémentaires annoncés dans le Budget 2008 afin de moderniser son infrastructure physique, en s’appuyant sur une conception et une construction plus efficaces et efficientes.



[1] Vérificatrice générale du Canada, Rapport de décembre 2008, chapitre 7, L’économie et l’efficience des services—Service correctionnel du Canada.

[2] Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes, 40e législature, 2e session, réunion 10.

[3] Réunion 10, 17:15.

[4] Service correctionnel Canada, Rapport sur les plans et les priorités 2007-2008, p. 16-17.

[5] Rapport de décembre 2008, chapitre 7, paragraphe 7.26.

[6] Ibid., paragraphe 7.30.

[7] Ibid., paragraphe 7.37.

[8] Ibid., paragraphe 7.38.

[9] Réunion 10, 16:00.

[10] Réunion 10, 16:35.

[11] Chapitre 7, paragraphes 7.49 et 7.50.

[12] Chapitre 7, réponse à la recommandation 7.63.

[13] Chapitre 7, paragraphe 7.53.

[14] Réunion 10, 17:00.