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PACP Rapport du Comité

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INTRODUCTION

Passeport Canada est un organisme de service spécial qui relève du ministre des Affaires étrangères. Il est chargé de délivrer les documents de voyage, essentiellement les passeports, qui permettent aux Canadiens de traverser les frontières internationales. Les demandes de passeport ont considérablement augmenté ces dernières années. Le nombre des passeports délivrés en 2007-2008 a représenté plus du double du chiffre enregistré cinq ans avant. Passeport Canada a eu du mal à répondre à la hausse de la demande et a été carrément débordé en 2007 lors de l’entrée en vigueur de nouvelles règles adoptées par les États-Unis dans le contexte de l’Initiative relative aux voyages dans l’hémisphère occidental (IVHO) : l’allongement des temps d’attente a causé bien des désagréments aux demandeurs de passeport.

En mars 2009, le Bureau du vérificateur général (BVG) a présenté au Parlement les résultats d’une vérification de suivi des services de passeport de Passeport Canada[1]. La vérification a porté sur la mise en œuvre de mesures correctives par Passeport Canada et l’élaboration de plans d’urgence en vue de la hausse prévue du nombre des demandes de passeport associée à la phase II de l’IVHO, qui est entrée en vigueur le 1er juin 2009.

Comme Passeport Canada avait eu beaucoup de mal à absorber la première forte augmentation des demandes de passeport, le Comité des comptes publics voulait s’assurer que l’organisation avait pris les mesures voulues pour se préparer à la seconde vague. Il a tenu une réunion à ce sujet le 9 juin 2009[2]. Il a alors entendu, du Bureau du vérificateur général, la vérificatrice générale du Canada, Sheila Fraser, et la vérificatrice générale adjointe, Wendy Loschiuk, ainsi que John Reed, directeur principal. Le ministère des Affaires étrangères était représenté par le sous-ministre Leonard J. Edwards. De Passeport Canada, le Comité a entendu Christine Desloges, présidente-directrice générale; Jody Thomas, chef de l'exploitation, Direction générale des opérations; et Gary K. McDonald, directeur général, Direction générale des politiques et de la planification.


AUGMENTATION DE LA DEMANDE DE PASSEPORTS

Le nombre des documents de voyage délivrés par Passeport Canada a augmenté régulièrement ces dernières années et est passé d’un peu plus de 2 millions en 2001-2002 à 3,7 millions en 2006-2007. La demande a cependant enregistré un pic de 4,8 millions en 2007‑2008 en raison de l’entrée en vigueur de l’Initiative des voyages dans l’hémisphère occidental (IVHO) des États-Unis[3].

Dans le cadre de la phase I de l’IVHO, depuis le 23 janvier 2007, les Canadiens qui arrivent aux États-Unis par voie aérienne doivent être munis d’un passeport valide ou d’un document de voyage approuvé. Cela a suscité une hausse considérable des demandes de passeport de la part de Canadiens désireux de se rendre aux États-Unis ou d’y transiter par avion. Passeport Canada avait prévu une hausse de 6,6 p. 100 des demandes de passeport en raison de l’IVHO, mais celle-ci a en fait été de 22 p. 100. Passeport Canada était mal préparé à absorber une telle hausse.  Dans sa vérification de 2007 de Passeport Canada, le BVG a constaté que la plupart des bureaux locaux de Passeport Canada n’avaient pas de plan d’urgence en bonne et due forme pour composer avec une hausse soudaine et considérable du nombre des demandes de passeport[4].

En conséquence, au début de 2007, les lignes téléphoniques de Passeport Canada ont été submergées d’appels, les demandes présentées par la poste n’ont pas pu être traitées dans les délais prévus et les normes de service n’étaient pas respectées. Les queues étaient interminables aux bureaux des passeports et les gens ont dû attendre leur passeport relativement longtemps. Comme l’a dit au Comité la présidente-directrice générale de Passeport Canada, Christine Desloges : « Vous vous rappelez peut-être les longues files d'attente, les requérants mécontents, les longs délais de traitement et l'irritation générale résultant du fait que les demandes de passeport nous parvenaient en nombre record[5]. » Dans son rapport de 2008, le Comité des comptes publics a dit : « Le Comité déplore que Passeport Canada n’ait pas été mieux préparé. Beaucoup de gens ont vécu un cauchemar qui n’aurait jamais dû se produire. Les Canadiens comptent sur Passeport Canada; quand ces services leur font défaut, ils sont exposés à des difficultés indépendantes de leur volonté et perdent confiance dans la fonction publique. »[6]

La vérification de 2009 de Passeport Canada par le BVG a montré que Passeport Canada a pris des mesures pour trouver les causes des problèmes éprouvés en 2007 et y remédier de manière à être mieux en mesure d’affronter la phase II de l’IVHO. Grâce à deux bilans internes, Passeport Canada a mis en relief plusieurs causes de la crise de 2007 associée à la phase I de l’IVHO, à savoir :

  • capacité de traitement insuffisante,

  • besoin d’amélioration des processus de production,

  • lenteur du processus d’embauche,

  • modèle imprécis de prévision de la demande,

  • manque de communication avec la population,

  • absence de plan d’urgence[7].

Passeport Canada a pris plusieurs mesures en réponse à ces constats. On a :

  • construit un nouveau centre de traitement des demandes reçues par la poste,

  • modernisé et agrandi beaucoup de bureaux locaux,

  • ajouté 76 agents réceptionnaires,

  • mis au point et perfectionné le système interne de contrôle et de production de rapports sur les demandes de passeport,

  • mis en œuvre un système de suivi électronique,

  • amélioré le processus de délivrance des passeports,

  • adopté un nouveau processus simplifié de renouvellement des passeports,

  • accru les effectifs[8].

Par ailleurs, Passeport Canada s’est doté d’un nouveau modèle de prévision de la demande de passeports, a lancé une vaste campagne de communication, a tenu des ateliers de passeport et a remanié son site Web.

Passeport Canada s’est aussi donné un plan global en cas d’imprévus pour faire face à toute nouvelle hausse soudaine des demandes de passeport. Au moment de la vérification de 2009, la planification détaillée et les communications relatives aux mesures figurant dans le plan étaient encore en cours.  D’après le BVG, Passeport Canada doit encore déterminer à quel point chacune des mesures prévues augmentera sa capacité opérationnelle et quel est le niveau de demande qui déclenchera la prise de ces mesures, et spécifier qui est chargé de déclencher ces mesures. Le BVG a formulé des recommandations sur ces trois questions[9].

Lors de l’audience, le sous-ministre des Affaires étrangères, Leonard Edwards, a dit au Comité que Passeport Canada avait pris des mesures pour répondre à chacune des recommandations du BVG. Passeport Canada a établi des plans d’action mis à jour régulièrement, a défini l’objectif de chacune des mesures sur le plan de la capacité opérationnelle ainsi que les avantages escomptés et a en outre établi les éléments déclencheurs pour chacune des mesures figurant dans le plan d’action et défini les rôles et attributions dans le déclenchement de ces mesures[10].

La vérificatrice générale s’est dite satisfaite des progrès réalisés par Passeport Canada. Elle a dit : « Je crois que nous devons reconnaître le mérite de Passeport Canada. Ils ont analysé les lacunes et déterminé quelles mesures correctives devaient être prises, et ils ont réglé le problème en relativement peu de temps[11]. »

Le Comité est de cet avis. Comme l’a montré la vérification, Passeport Canada a pris de nombreuses mesures pour se préparer à faire face à l’augmentation de la demande de passeports, y compris, éventuellement, à une brusque hausse. Il y a lieu de féliciter la direction et le personnel de Passeport Canada qui mettent un point d’honneur à voir à ce que les Canadiens reçoivent leur passeport en temps voulu. La plus récente phase de l’IVHO est entrée en vigueur le 1er juin 2009 sans que cela ait d’effets fâcheux sensibles sur les services de Passeport Canada.

La manière dont Passeport Canada a réagi aux problèmes pourrait servir d’exemple à d’autres organisations gouvernementales. Après le mal qu’a eu Passeport Canada à absorber la demande au début de 2007, la direction de l’organisation a fait le bilan des événements et pris les mesures voulues pour remédier aux problèmes, notamment en remaniant les politiques et processus, en embauchant du personnel et en dressant des plans d’urgence. Il est certes malheureux que les problèmes de 2007 aient causé des tracas et des difficultés à beaucoup de Canadiens, mais le Comité est heureux de trouver en Passeport Canada l’exemple d’un organisme public qui a su tirer leçon de l’expérience et apporter les mesures correctives voulues en temps opportun.


FINANCEMENT

Si Passeport Canada a pris des mesures pour faire face à l’accroissement de la demande de passeports, l’organisation a encore du chemin à faire sur le plan de la planification des activités et de la planification financière.

Passeport Canada fonctionne sur une base de recouvrement des coûts, c’est-à-dire que ses activités sont financées à même les droits facturés aux clients pour la prestation des services, par exemple pour l’obtention d’un passeport. Passeport Canada gère ces droits au moyen d’un fonds renouvelable et est autorisé à enregistrer un excédent ou un déficit une année donnée, car ceux-ci sont censés s’équilibrer sur l’ensemble d’un cycle conjoncturel.

Passeport Canada peut aussi bénéficier d’injections de fonds ponctuelles pour des fins particulières. En 2007, par exemple, le gouvernement a accordé une somme de 55 millions de dollars à l’organisation, ce qui a permis à celle-ci d’accroître sa capacité opérationnelle, notamment par la construction et l’équipement d’un nouveau centre d’impression de passeports et de traitement des demandes reçues par la poste.

Passeport Canada a fourni au Comité un complément d’informations financières après l’audience. Durant l’exercice 2007-2008, Passeport Canada a enregistré des déficits d’exploitation dans chacun de ses secteurs d’activité, qui ont totalisé 40,5 millions de dollars. Passeport Canada attribue ces déficits à des investissements dans l’infrastructure. Il gère ces déficits en puisant dans les sommes accumulées dans le fonds renouvelable.

Durant l’audience, le Comité a appris que Passeport Canada perd 7 dollars sur chaque passeport et que les droits pour les passeports n’ont pas été révisés depuis 2001. En outre, la production du passeport électronique de 10 ans exigera des investissements importants en technologie, ce qui va peser lourd dans les finances de l’organisation.

Le Comité craint que la situation financière de Passeport Canada soit intenable à long terme. Une partie du déficit est imputable aux investissements nécessaires pour faire face à l’augmentation de la demande de passeports, mais si les droits perçus par Passeport Canada sont inférieurs au coût de revient des passeports, le déficit va perdurer, et l’excédent accumulé dans le fonds renouvelable sera bientôt épuisé. Les représentants de Passeport Canada ont dit au Comité qu’ils sont en train de revoir le modèle opérationnel et le modèle financier de l’organisation, car l’adoption d’une période de validité de 10 ans pour les passeports va modifier considérablement le traitement des passeports et les revenus de Passeport Canada.

Ce n’est pas la première fois que le Comité s’inquiète de la situation financière de Passeport Canada[12]. En 2008, le Comité avait recommandé que « Passeport Canada communique au Comité des comptes publics d’ici le 30 septembre 2008 le résultat de son étude de ses modalités de financement, y compris des gains d’efficacité possibles ». Dans sa réponse, le gouvernement a signalé que la décision d’adopter un passeport valable dix ans avait entraîné la réalisation d’un examen complet de la structure de gouvernance, du modèle de service ainsi que des autorisations législatives et financières de l’organisation[13]. Le gouvernement précisait : « Le résultat de l’Examen opérationnel sera communiqué au Comité après qu’il aura été examiné et approuvé par les ministres. »

Au vu du déficit d’exploitation courant de Passeport Canada, le Comité demeure préoccupé par la situation financière de l’organisation et s’attend que celle-ci lui communiquera effectivement les résultats de l’examen opérationnel quand celui-ci aura été approuvé par les ministres.


CONCLUSION

Quand la première phase de l’IVHO est entrée en vigueur le 23 janvier 2007, Passeport Canada n’était pas prêt à affronter le déluge de demandes de passeport qui en est résulté, ce qui a causé beaucoup de frustration et même des difficultés pour les nombreuses personnes dont les plans de voyage s’en sont trouvés contrariés. La dernière vérification du Bureau du vérificateur général indique que Passeport Canada a pris de nombreuses mesures pour éviter que la situation se renouvelle lors de la seconde phase de l’IVHO. Le Comité prend acte des progrès importants réalisés par Passeport Canada et note les efforts considérables déployés par la direction et le personnel de Passeport Canada pour tirer leçon de l’expérience et prendre les mesures correctives qui s’imposaient. Il est important, pour la population en général et pour les parlementaires, que les passeports soient délivrés de manière équitable en temps opportun, et le Comité espère que Passeport Canada continuera de tout faire pour offrir à la population canadienne un service fiable et efficace.



[1] Bureau du vérificateur général du Canada, Rapport Le Point de mars 2009, Chapitre 5, Les services de passeport—Passeport Canada.

[2] Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes, 40e législature, 2e session, réunion no 26.

[3] Chapitre 5, pièce 5.1.

[4] Bureau du vérificateur général du Canada, Rapport Le Point de mars 2009, Chapitre 5, Les services de passeport—Passeport Canada.

[5] Réunion no 26, 15:45.

[6] Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes, 9e Rapport, Le chapitre 5, Les services de passeport - Passeport Canada, du Rapport de février 2007 du vérificateur général du Canada, 39e législature, 2e session, mars 2008.

[7] Chapitre 5, paragraphe 5.14.

[8] Ibid., paragraphes 5.15 – 5.25.

[9] Ibid., paragraphes 5.36 – 5.38.

[10] Réunion no 26, 15:35.

[11] Réunion no 26, 16:10.

[12] Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes, 22e rapport, Chapitre 3, Bureau des passeports – Les services de passeport, du Rapport de la vérificatrice générale du Canada d’avril 2005, 38e législature, novembre 2005; et 9e Rapport, Le chapitre 5, Les services de passeport - Passeport Canada, du Rapport de février 2007 du vérificateur général du Canada, 39e législature, 2e session, mars 2008.

[13] Gouvernement du Canada, Réponse du gouvernement au neuvième rapport du Comité permanent des comptes publics, Les services de passeport—Passeport Canada, juin 2008.