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PACP Rapport du Comité

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B. Le processus d'appel d'offres

La Direction générale des biens immobiliers de TPSGC offre un service obligatoire - la fourniture de bureaux - aux ministères clients. Comme on l'a vu, TPSGC a procédé à  un appel d'offres complet pour trouver des locaux à  l'Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec, en consultation avec l'Agence et avec la coopération de celle-ci. La Place Bonaventure a fait la meilleure offre et a été informée qu'elle avait décroché le bail. Le surveillant de l'équité de TPSGC a déterminé que la procédure avait été équitable.

TPSGC a appris par la suite que l'Agence souhaitait rester à  la Place Victoria et a reçu une lettre demandant au Ministère de '« conclure un nouveau bail avec la Place Victoria '». En réponse à  cette demande, les fonctionnaires de l'administration centrale de TPSGC ont renégocié avec la Place Victoria un nouveau bail à  un taux réduit portant sur des locaux moins spacieux ne nécessitant pas de réaménagement. TPSGC dit qu'il a effectué une analyse montrant que de rester à  la Place Victoria au nouveau taux et suivant les nouvelles exigences était financièrement avantageux pour l'État et donc permissible aux termes des principes de location de TPSGC.

Mme Cochrane, ancienne sous-ministre de TPSGC, a dit au Comité qu'il y avait eu deux processus distincts : le premier appel d'offres et le renouvellement du bail. Les deux, cependant, avaient le même objectif, à  savoir de trouver des locaux à  bureaux pour l'Agence. En ne respectant pas la procédure d'appel d'offres à  l'égard des nouveaux besoins de l'Agence, TPSGC a tourné la procédure et privé les autres soumissionnaires de la possibilité de faire une offre fondée sur la nouvelle donne. Il n'est pas suffisant d'arguer que le nouveau taux à  la Place Victoria se situe à  l'intérieur de la fourchette de prix pour des locaux de ce genre. Si un appel d'offres est lancé, TPSGC doit le mener jusqu'au bout et non favoriser un propriétaire en particulier à  la demande d'un ministère client.

TPSGC a rouvert le processus et renégocié le bail de la Place Victoria pour une seule et unique raison : une lettre du ministre responsable de l'Agence. Cela n'aurait pas dû suffire. Comme le processus était allé jusqu'à  son terme et qu'une offre avait été retenue, TPSGC aurait dû simplement rejeter la demande ou à  tout le moins chercher à  établir l'existence d'une raison valable, en dehors du caractère prestigieux de l'édifice, de modifier l'énoncé des besoins et de conserver les bureaux à  la Place Victoria .

Aux termes de la Politique du Conseil du Trésor sur le cadre de gestion des biens immobiliers, la Direction générale des biens immobiliers est habilitée à  imposer des solutions en matière d'occupation de locaux. TPSGC a donc sa part de responsabilité dans le contournement du processus d'appel d'offres concurrentiel qui a entraîné une perte importante pour l'État. TPSGC a des normes relativement à  la taille des locaux et aux rénovations, mais beaucoup de ministères clients préfèrent des solutions plus coûteuses, comme cela a été le cas de l'Agence. De toute évidence, TPSGC doit imposer ses normes avec plus de rigueur. Le document dont il a été question précédemment, o๠le sous-ministre de TPSGC énumère les mesures prises pour améliorer le processus, est muet sur le nÅ“ud du problème dans le cas de la Place Victoria, à  savoir que TPSGC a laissé un ministère client pervertir le système d'appel d'offres compétitif. On n'y explique aucunement comment TPSGC entend empêcher que cela ne se reproduise. En conséquence, le Comité recommande :

RECOMMANDATION 1

Que Travaux publics et Services gouvernementaux Canada exerce les pouvoirs dont il dispose pour imposer avec discernement des solutions optimales en matière de locaux de manière à  faire respecter les normes gouvernementales en la matière.

C. Coût pour les contribuables

L'encadré du rapport du BVG sert à  illustrer les coûts additionnels qui peuvent survenir quand TPSGC omet d'imposer une solution. Le BVG a écrit à  ce sujet : '« La demande de l'Agence de ne pas déménager, combinée au non-respect des lignes directrices établies, a entraîné des coûts supplémentaires de 4,6 millions de dollars pour les contribuables. '» Ce montant comprend 2,1 millions de dollars pour un bail improductif à  la Place Bonaventure pour des locaux demeurés vacants et 2,5 millions de dollars pour le renouvellement du bail à  la Place Victoria .

Comme on l'a dit précédemment, TPSGC convient que le bail improductif a coûté 2,1 millions de dollars, mais conteste le coût de 2,5 millions de dollars associé au renouvellement du bail.

Le BVG fonde son évaluation de 2,5 millions de dollars sur une analyse d'options préparée par TPSGC en avril 2002 avant la renégociation du taux du bail de la Place Victoria. D'après les résultats de cette analyse, le coût du renouvellement pour 10 ans du bail de l'Agence à  la Place Victoria dans les locaux qu'elle occupait aurait été d'environ 23 millions de dollars. Le déménagement du siège de l'Agence à  la Place Bonaventure et le déménagement du bureau de l'île de Montréal vers l'est auraient coûté environ 20,5 millions de dollars. Ainsi, la différence entre les deux options est de 2,5 millions de dollars.

TPSGC conteste ce calcul au motif qu'il repose sur l'ancien taux et non le taux renégocié. TPSGC a remis au Comité un tableau comparant l'offre de renouvellement à  la Place Victoria et le bail à  la Place Bonaventure. Le BVG estime pour sa part que la comparaison est faussée du fait que les modalités des deux baux sont différentes à  l'égard de la superficie des locaux et des niveaux de rénovation.

Quoi qu'il en soit, le Comité n'aime pas devoir se faire l'arbitre d'un désaccord entre le BVG et un ministère. La question aurait dû être réglée bien avant que le rapport de vérification ne soit étudié par le Comité, lequel note que le rapport du BVG ne fait état d'aucun désaccord sur ce chiffre. Les ministères et organismes soumis à  une vérification ont l'occasion d'examiner une ébauche du rapport les concernant. En cas de désaccord, si les parties ne s'entendent pas sur un compromis, les ministères et organismes en cause ont la possibilité de mentionner leur désaccord dans le rapport déposé au Parlement. Le BVG est censé s'assurer de l'exactitude des informations contenues dans ses rapports, mais il incombe aux ministères de contester les renseignements erronés et de produire les documents voulus à  l'appui de leurs assertions.

Le Comité note cependant que l'analyse du BVG repose sur une information périmée, à  savoir le taux de la location. Par ailleurs, l'analyse fournie par TPSGC compare à  tort des montants associés à  des baux fondés sur des modalités différentes. Par conséquent, le Comité ne peut que conclure que le montant de 2,5 millions est erroné, mais il ne peut pas calculer la perte réelle pour le contribuable, ni accepter l'affirmation de TPSGC voulant que le renouvellement du bail à  la Place Victoria était avantageux pour l'État. Il pourrait être impossible en l'occurrence d'aboutir à  des chiffres probants, mais le Comité espère qu'à  l'avenir, les ministères et organismes fédéraux régleront les différends avec le BVG portant sur des éléments factuels avant la présentation des rapports de vérification à  la Chambre des communes.

D. Documentation

Au cours de son enquête, le Comité a souvent été déçu par l'absence de documents d'une importance cruciale et par la lenteur des efforts déployés par le Ministère pour les lui fournir. Même lorsque le Comité a finalement eu en sa possession un dossier qu'il doit supposer complet sur la décision prise, il s'est rendu compte que d'énormes lacunes subsistaient. Il note en particulier qu'il n'a reçu aucun document indiquant qui, à  l'Agence, a informé TPSGC pour la première fois que celle-ci ne souhaitait pas emménager dans de nouveaux locaux. Dans son témoignage du 4 avril 2002, M. Marshall a dit que la sous-ministre adjointe Carol Beal '« a été informée que le client avait changé d'avis '», sans préciser par qui et sans fournir un document faisant état de cette demande.

La lettre de M. Drouin au ministre de TPSGC portait la date du 15 avril 2002, soit 11 jours plus tard. Cette lettre ne présentait aucune information ou analyse à  l'appui de la demande de maintien des locaux de l'Agence à  Place Victoria. Comme, à  ce moment, des mesures avaient déjà  été prises pour entamer des négociations entre TPSGC et les propriétaires de Place Victoria, le Comité n'a d'autre choix que de conclure que cette lettre n'a pas déclenché les événements qui ont abouti au renouvellement du bail existant. Elle n'a fait que confirmer une demande antérieure.

TPSGC a fini par remettre au Comité un tableau dont le Ministère affirme qu'il contient une analyse qui atteste les avantages financiers pour l'État du maintien des bureaux de l'Agence à  la Place Victoria. Cependant, cette analyse n'a pas été communiquée au Bureau du vérificateur général durant la vérification.

Dans ces circonstances, on peut être tenté d'émettre des hypothèses pour combler les lacunes. Le Comité ne le fera pas. Toutefois, cette affaire illustre la vulnérabilité de la position dans laquelle un ministère ou un organisme fédéral se place lorsqu'il néglige de documenter ses décisions, surtout dans des cas (comme celui d'une décision de location) o๠d'importantes sommes sont en cause. Lorsque l'argent des contribuables est en jeu, l'absence d'une documentation adéquate est déplorable et témoigne d'un manque de prudence.

Il y a lieu de noter que la vérification de 2002, sur laquelle se fonde le suivi de 2006, invitait la Direction générale des biens immobiliers du Ministère à  mieux gérer sa documentation et recommandait que cette documentation soit améliorée. Le Ministère avait accepté la recommandation. Il est temps qu'il y donne suite.

Le Comité rappelle en outre aux ministères et organismes qu'ils sont tenus, en vertu des politiques du Conseil du Trésor, de garder une documentation suffisante. Ainsi, la section 6.1.2 de la politique du Conseil sur la gestion de l'information charge les sous-ministres (qui sont également administrateurs des comptes de leur ministère) de :

Veiller à  ce que les décisions et les processus décisionnels soient assortis de toute la documentation justificative nécessaire pour assurer et appuyer la continuité des opérations ministérielles, permettre la reconstitution de l'évolution des politiques et des programmes, et permettre la réalisation de vérifications et d'examens indépendants.

Même s'il ne fait que répéter une évidence et même si les ministères et organismes fédéraux ne devraient pas avoir à  se le faire dire, le Comité recommande :

RECOMMANDATION 2

Que Travaux publics et Services gouvernementaux Canada observe la politique du Conseil du Trésor sur la gestion de l'information en documentant et en conservant dans ses archives toutes les décisions de gestion liées à  des locaux loués pour le compte de ministères et d'organismes fédéraux.

E. Rà´le du ministre

Bien que toutes les décisions n'aient pas été documentées durant ce processus, un certain nombre de choses sont claires. Il y a eu un appel d'offres concurrentiel pour la location de nouveaux locaux à  bureaux destinés à  l'Agence. Le gagnant de ce processus a été Place Bonaventure, Place Victoria arrivant quatrième. Un bail a été conclu avec le propriétaire de Place Bonaventure. Peu de temps après la conclusion du bail, le ministre responsable de l'Agence, M. Drouin, a écrit au ministre des Travaux publics pour lui demander de conclure un nouveau bail avec Place Victoria. Travaux publics a bien conclu un nouveau bail avec Place Victoria à  un meilleur taux que celui offert dans le processus d'invitation ouverte à  soumissionner. L'Agence est restée à  Place Victoria et Travaux publics a dû se mettre à  la recherche de nouveaux clients pour remplir les locaux loués à  Place Bonaventure. Ce bail improductif a entraîné des pertes importantes pour l'État.

Ces faits nous poussent à  conclure que les fonctionnaires ont respecté les règles applicables et tenté d'obtenir le meilleur rapport qualité/prix pour l'État. En demandant que l'Agence reste à  Place Victoria, le ministre a cherché à  passer outre à  l'avis des fonctionnaires et au processus visant à  assurer l'équité et le meilleur rapport qualité/prix. Contrairement à  ce qu'il affirme, il ne demandait pas dans sa lettre un simple examen de la situation, et les fonctionnaires ont fait de leur mieux pour respecter ses vÅ“ux. Cependant, un des fonctionnaires en cause a écrit un courriel dans lequel il exprime son insatisfaction face au processus, affirmant que '« la décision de rester à  Place Victoria dans ce cas répond à  un autre critère que celui d'une saine gestion des deniers publics '».

Le ministre a bien tenté de fournir un certain nombre d'explications pour sa décision de demander de rester à  Place Victoria, mais elles n'ont pas été corroborées par d'autres témoins entendus par le Comité. En outre, même si elles étaient acceptées, ces explications ne justifient pas les coûts supplémentaires. M. Drouin a dit que son erreur avait été d'écrire la lettre au lieu que ce soit le sous-ministre qui le fasse, vu qu'il s'agissait de questions administratives, mais le sous-ministre a dit qu'il était d'accord avec le déménagement. Le ministre doit alors assumer la responsabilité des pertes subies par l'État.

CONCLUSION

Le Comité a consacré beaucoup de temps au dossier de la Place Victoria parce qu'il n'arrivait pas à  obtenir des réponses claires et simples à  la question de savoir comment, pourquoi et par qui les décisions ont été prises. Un examen approfondi des documents remis au Comité et des témoignages des personnes qu'il a entendues montre qu'on a fait abstraction des résultats d'un long processus d'appel d'offres - un processus coûteux en soi et conçu pour procurer à  l'État le meilleur rapport qualité/prix - qui a été abandonné pour négocier directement avec les propriétaires de la Place Victoria. Cette série d'événements contrevient à  la politique gouvernementale et a entraîné des pertes financières notables pour l'État et donc pour le contribuable; elle n'a produit aucun avantage tangible et des décisions cruciales de dernière minute ont été prises sans justification documentée ni motif raisonnable.

Comme dans toute autre décision concernant des dépenses, les ministères et organismes fédéraux et leurs ministres responsables doivent tenir compte de considérations allant au-delà  de leurs besoins immédiats. Le fait de permettre à  l'État et aux contribuables canadiens d'en avoir pour leur argent doit constituer l'une des considérations les plus importantes. De plus, ministères et organismes doivent être en mesure d'établir qu'ils ont bien pris en compte ces considérations en tenant des dossiers appropriés documentant le processus décisionnel et les principes sur lesquels il s'est fondé. Ces dossiers montrent qu'ils ont fait preuve de la prudence nécessaire et ont protégé les intérêts des contribuables. Ils offrent en outre une piste de vérification et sont essentiels pour assurer une pleine responsabilité.

Le Comité est profondément déçu du fait qu'indépendamment de l'importance de la perte (qu'il s'agisse de 2,1 millions de dollars, comme l'affirme le Ministère, ou de 4,6 millions, selon le rapport du Bureau du vérificateur général), le Ministère n'a pas suffisamment tenu compte des intérêts du contribuable en 2002. Le Comité s'attend à  ce que ce soit la dernière fois qu'un tel manquement se produit.

ANNEXE I - PRINCIPES À OBSERVER EN CAS DE RENÉGOCIATION D'UN BAIL AVEC UN FOURNISSEUR UNIQUE

Par souci de prudence et d'honnêteté, Travaux publics Canada doit observer les principes suivants lors de l'examen d'une proposition reçue d'un propriétaire en vue du renouvellement d'un bail :

  1. TPSGC doit déterminer qu'il existe un avantage financier démontrable pour l'État.
  2. Une analyse du marché doit venir étayer cet avantage financier.
  3. Les locaux satisfont ou satisferont, à  une date indiquée, sans qu'il n'en coûte rien à  l'État, à  toutes les normes de logement applicables et à  tous les besoins du client en matière de locaux.
  4. La superficie en cause répond aux besoins d'un programme existant.
  5. Le propriétaire a rempli toutes les obligations prévues dans le bail.
  6. Toutes les négociations doivent se dérouler dans le cadre d'un calendrier convenu permettant à  TPSGC de mettre en Å“uvre des solutions de rechange, comme la réinstallation du locataire moyennant une occupation après terme d'une durée aussi courte que possible, si les négociations devaient échouer.

Les offres satisfaisant à  ces critères ne sont pas nécessairement acceptées et sont soumises à  toutes les approbations gouvernementales nécessaires.

Source : Travaux publics et Services gouvernementaux Canada.