PACP Rapport du Comité
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INTRODUCTION La propriété intellectuelle comprend toute création intellectuelle qui est protégée légalement par brevet ou droit d'auteur ou par l'enregistrement d'un dessin industriel, ou qui est visée par le secret industriel. La création, le développement et la protection de la propriété intellectuelle sont essentiels au processus d'innovation. Une gestion efficace de la propriété intellectuelle permet de cerner les occasions de protéger, de transférer et de commercialiser la propriété intellectuelle. Une organisation incapable de gérer la propriété intellectuelle s’expose à des responsabilités légales et risque de ne pas atteindre ses objectifs de rendement financier. En mai 2009, la vérificatrice générale a remis au Parlement un rapport de vérification de gestion ayant pour but de déterminer si le Conseil national de recherches du Canada, Santé Canada ainsi que Pêches et Océans Canada étaient en mesure de prouver qu'ils gèrent efficacement la propriété intellectuelle appartenant à l’État[1]. La vérification portait sur la gestion de la propriété intellectuelle produite à l'externe, c'est-à-dire découlant de marchés d'acquisition de l’État, ainsi que sur la gestion de la propriété intellectuelle produite à l’interne. Elle visait aussi à vérifier si Industrie Canada et le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada s’acquittent de leurs obligations en vertu des politiques fédérales. Étant donné la valeur éventuelle de la propriété intellectuelle et son importance pour l’innovation, le Comité des comptes publics (le Comité) a consacré une audience à ce rapport de vérification le 16 novembre 2009[2]. Du Bureau du vérificateur général du Canada (BVG), le Comité a entendu : Sheila Fraser, vérificatrice générale du Canada; John Affleck, directeur principal. Du Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada, le Comité a entendu Daphne Meredith, dirigeante principale des ressources humaines. D’Industrie Canada, le Comité a entendu Paul Boothe, sous‑ministre délégué principal. Santé Canada de même que Pêches et Océans Canada étaient pour leur part représentés par leurs sous-ministres respectifs : Morris Rosenberg et Claire Dansereau. Le Conseil national de recherches du Canada était représenté par son président, Pierre Coulombe. CONTEXTE Le gouvernement fédéral crée de la propriété intellectuelle de deux façons : à l'interne, par les activités de ses fonctionnaires, dans le cadre de leurs fonctions; ou à l'externe, par les activités de ses sous-traitants, dans le cadre de marchés. Il a des politiques distinctes pour régir l’une et l’autre. En ce qui concerne la propriété intellectuelle créée à l’interne, la Politique sur le programme de récompenses des inventeurs et des innovateurs du Conseil du Trésor permet aux inventeurs de recevoir une prime financière à la suite de la concession d'une licence ou de l'utilisation de leurs inventions par le gouvernement. En vertu de la politique Redevances et droits découlant de la concession de licences sur la propriété intellectuelle appartenant à l’État, les organismes fédéraux peuvent recevoir des crédits annuels correspondant au total des recettes qu'ils tirent de la concession de licences de propriété intellectuelle appartenant à l’État. La propriété intellectuelle créée à l’externe est quant à elle régie par la Politique sur le titre de propriété intellectuelle découlant des marchés d’acquisition de l’État du Conseil du Trésor. Cette politique vise à permettre aux entrepreneurs de détenir les droits sur la propriété intellectuelle développée dans le cadre de marchés. La responsabilité de surveiller et d'évaluer l'application de cette politique incombe conjointement à Industrie Canada et au Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada. Au sein du gouvernement fédéral, le Conseil national de recherches du Canada est le plus important organisme de recherche et de développement et aussi celui qui produit le plus grand nombre d’inventions. Santé Canada de même que Pêches et Océans Canada mènent eux aussi des travaux de recherche et de développement à l'appui de leurs mandats et génèrent par le fait même de la propriété intellectuelle. RAPPORTS D'ÉTAPE Les vérificateurs ont relevé un certain nombre de lacunes dans la façon dont Santé Canada de même que Pêches et Océans Canada gèrent la propriété intellectuelle. Les pratiques du Conseil national de recherches du Canada sont déficientes à certains égards, mais le Conseil demeure un chef de file dans d'autres domaines. En ce qui concerne la propriété intellectuelle créée à l’externe, le Conseil national de recherches du Canada, Santé Canada de même que Pêches et Océans Canada n'indiquent pas toujours si une propriété intellectuelle est censée découler d’un marché. Les vérificateurs ont constaté que de nombreux contrats signalés comme donnant lieu à une propriété intellectuelle, n'en comportaient pas. L'État s'est approprié la propriété intellectuelle dans plus de la moitié des contrats examinés, et dans de nombreux cas, sans justification. Dans bon nombre des dossiers examinés par le BVG à Santé Canada ainsi qu’à Pêches et Océans Canada, il n'était pas fait mention des titres de propriété intellectuelle ou les renseignements à ce sujet se contredisaient dans la négociation avancée ou les documents de demande de soumissions. De même, plusieurs des dossiers ne contenaient pas de clause précisant que les accords de sous-traitance devaient indiquer les droits de propriété ou de licence de l’État. En ce qui concerne la propriété intellectuelle créée à l'interne, le Conseil national de recherches du Canada a sa propre politique et s'est dit intéressé à mettre à profit son expertise pour soutenir les autres ministères. Santé Canada a élaboré une ébauche de politique, mais ne l'avait toujours pas mise en œuvre au moment de la vérification faute de ressources. Pêches et Océans Canada dispose d'une politique sur la propriété intellectuelle, mais celle-ci ne s'applique pas à l'ensemble du Ministère. Ces trois entités fédérales accordent toutes des licences concernant la propriété intellectuelle créée à l’interne, mais Santé Canada de même que Pêches et Océans Canada n’ont pas de lignes directrices sur la marche à suivre à cet égard. Le Conseil national de recherches du Canada a mis en place un processus pour déterminer les inventions auxquelles prennent part ses chercheurs, ses agents de développement commercial et son bureau central de la propriété intellectuelle. Par contre, Santé Canada de même que Pêches et Océans Canada n'ont pas de mécanismes pour déterminer les inventions et ne savent pas si toute la propriété intellectuelle est divulguée. La gestion de la propriété intellectuelle à Santé Canada ainsi qu'à Pêches et Océans Canada est nettement déficiente. En réponse à la vérification, les deux ministères ont présenté des plans d'action au Comité, dans lesquels ils énoncent un certain nombre de mesures qu'ils entendent prendre pour donner suite aux recommandations du BVG. Par exemple, Santé Canada forme des gestionnaires et des spécialistes en acquisition pour déterminer la propriété intellectuelle et en faire rapport avec exactitude, et s'affaire actuellement à élaborer une politique sur la propriété intellectuelle applicable à l'ensemble du Ministère. Pêches et Océans Canada a élaboré deux politiques applicables à l'ensemble du Ministère et se dotera d’un bureau de la propriété intellectuelle. Afin de pouvoir suivre les progrès accomplis par ces entités en ce qui concerne la mise en œuvre de leur plan d'action, le Comité recommande : RECOMMANDATION 1 Que d'ici le 31 décembre 2010, Santé Canada ainsi que Pêches et Océans Canada présentent un rapport d'étape au Comité des comptes publics pour faire le point sur les mesures prises pour donner suite aux recommandations contenues dans le chapitre 2 du Rapport du printemps 2009 de la vérificatrice générale. ORIENTATION ET SURVEILLANCE CENTRALES Avant 1993, les inventions créées par les fonctionnaires ou découlant de marchés d'acquisition de l’État étaient transférées à une société d’État connue sous le nom de Société canadienne de brevets et d’exploitation Limitée, aux fins de traitement, d'évaluation de la brevetabilité et de concession de licences. En 1993, le gouvernement a dissous la Société et préféré décentraliser la gestion de la propriété intellectuelle en la confiant aux ministères, qui ont dû créer leur propre infrastructure, élaborer des politiques internes et recruter le personnel approprié pour gérer la propriété intellectuelle. Toutefois, comme l’ont constaté les vérificateurs, du moins en ce qui concerne Santé Canada de même que Pêches et Océans Canada, les ministères peinent à élaborer et à mettre en œuvre leurs propres politiques, ainsi qu’à se doter de l'infrastructure et de l'effectif nécessaires. Le Comité peut simplement supposer que la situation dans de nombreux autres organismes fédéraux n’est vraisemblablement guère différente. Il semble que l’orientation centrale ou le soutien offert aux ministères à ce chapitre est minime. « Au moment de notre vérification », de dire la vérificatrice générale, « cette coordination n'existait pas; chaque ministère faisait ses propres affaires[3] ». Plus de 15 ans après que la gestion de la propriété intellectuelle ait été confiée aux ministères, l’efficacité des moyens mis en œuvre pour veiller à ce que les ministères gèrent bien la propriété intellectuelle ne semble guère s’être améliorée. Industrie Canada et le Secrétariat du Conseil du Trésor (le Secrétariat) sont chargés de surveiller l'application de la Politique sur le titre de propriété intellectuelle découlant des marchés d'acquisition de l’État, qui a été adoptée en 2000. Il devait y avoir une évaluation de la Politique en 2003, mais elle a été reportée en raison des lacunes des systèmes de collecte de données et d'information sur les contrats d'acquisition. Ce n'est qu'en 2007 qu'un nouveau plan a été approuvé et que le Secrétariat a informé les ministères qu'ils devaient modifier leurs systèmes d'information. Les vérificateurs soulignent que l'évaluation ne sera pas terminée avant 2011, soit huit ans après la date initialement prévue. Pour pouvoir procéder à l’évaluation, le Secrétariat a dû modifier son système central pour que les organismes puissent faire rapport annuellement de la propriété intellectuelle créée dans le cadre d’un marché d’acquisition de l’État. Le Secrétariat a informé les organismes qu’ils devraient modifier leur propre système d’information interne sur la propriété intellectuelle, et les vérificateurs ont constaté que le Conseil national de recherches du Canada, Santé Canada et Pêches et Océans Canada l’avaient fait. Malgré tout, il reste encore beaucoup à faire pour que les données sur la propriété intellectuelle soient interprétées avec exactitude et saisies correctement dans les systèmes d’information. Le BVG a recommandé qu’Industrie Canada et le Secrétariat travaillent en collaboration avec les organismes fédéraux afin d’exercer un meilleur contrôle sur l’application de la Politique sur le titre de propriété intellectuelle découlant des marchés d’acquisition de l’État et de veiller à ce que les données soient interprétées avec exactitude et à ce que les systèmes d’information indiquent correctement la propriété. Soucieux de savoir ce qu’il adviendra de cette recommandation, le Comité recommande : RECOMMANDATION 2 Que d’ici le 31 décembre 2010, Industrie Canada et le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada fassent rapport au Comité des comptes publics de l’état d’avancement des mesures mises en œuvre pour donner suite à la recommandation 2.25 du chapitre 2 du Rapport du printemps 2009 de la vérificatrice générale, ou que le Secrétariat du Conseil du Trésor fournisse au Comité une copie de l’évaluation faite de la Politique sur le titre de propriété intellectuelle découlant des marchés d'acquisition de l’État. Le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada est aussi chargé de surveiller l'efficacité de la Politique sur le programme de récompenses des inventeurs et des innovateurs et les programmes de récompenses des ministères. Les vérificateurs ont constaté que le Secrétariat ne l’avait pas fait. De plus, les ministères ont distribué des récompenses financières aux inventeurs sans communiquer d'information à ce sujet au Secrétariat. Parce que l'efficacité de ces politiques n’est pas suffisamment surveillée, le gouvernement fédéral ne sait pas s’il atteint son objectif, qui est de favoriser la commercialisation de la propriété intellectuelle et de la protéger, au besoin. Cette situation est fort inquiétante, parce qu'il existe des risques importants à ne pas bien gérer la propriété intellectuelle. Non seulement le gouvernement fédéral n'est pas pleinement conscient de la valeur de la propriété intellectuelle créée, mais il pourrait aussi finir par la payer en double. La vérificatrice générale a décrit le problème en ces termes : « Lorsque ces contrats sont établis, on devrait préciser, dans la mesure du possible, les éléments de propriété intellectuelle pouvant être créés, en guise de protection pour le gouvernement. De cette manière, les droits ne sont pas nécessairement cédés entièrement au secteur privé de telle sorte que le gouvernement peut y avoir accès pour apporter des modifications sans avoir à dédommager le secteur privé pour quelque chose qu'il a déjà payé[4]. » Elle a cependant ajouté que : « [l]es contrats que nous avons examinés ne comportaient pas tous une clause précisant ce qu'il adviendrait de la propriété intellectuelle, ce qui peut donner lieu à des différends contractuels[5]. » Interrogés à ce sujet, les représentants du gouvernement n'ont pas été en mesure de fournir au Comité des chiffres pour indiquer dans quelle mesure le gouvernement était contraint de payer des droits pour l'usage d'une propriété intellectuelle qu’il a lui-même développée. Les représentants d’Industrie Canada et du Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada ont dit au Comité qu’ils avaient maintenant un plan pour terminer l’évaluation de la Politique sur le titre de propriété intellectuelle découlant des marchés d’acquisition de l’État en 2010. De même, Industrie Canada évaluera chaque marché pour lequel une exception a été invoquée pour s’assurer que la politique a été appliquée de façon appropriée. En ce qui concerne la Politique sur le programme de récompenses des inventeurs et des innovateurs, Daphne Meredith, dirigeante principale des ressources humaines, a affirmé au Comité que le Comité des sous-ministres adjoints sur les Partenaires fédéraux en transfert de technologie est mieux placé que le Secrétariat pour élaborer des lignes directrices à ce sujet, et que le rôle du Secrétariat consiste à jouer les « meneuses de claques », c'est-à-dire à encourager les ministères à offrir des récompenses pour les inventions créées à l'interne. Cette approche pose plusieurs problèmes. Industrie Canada est peut-être en mesure d'évaluer l'utilisation faite des exceptions prévues en vertu de la Politique sur le titre de propriété intellectuelle découlant des marchés d'acquisition de l’État, mais elle n'est pas un organisme central et n'a pas, en conséquence, l'autorité voulue pour intervenir lorsqu'elle constate un manque de conformité à la politique. De même, le Comité des sous-ministres adjoints sur les Partenaires fédéraux en transfert de technologie n'a aucun pouvoir, ne peut conclure d'entente et ne peut même pas se réunir de façon régulière. Bien qu'il soit important de consulter les utilisateurs fonctionnels, ces consultations ne sauraient remplacer une orientation et une direction centralisées. Les résultats de la vérification et le fait que l'évaluation de la Politique sur le titre de propriété intellectuelle découlant des marchés d'acquisition de l’État ait dû être retardée en raison d'une méconnaissance de cette politique et du caractère incomplet de l'information communiquée sur la propriété intellectuelle, montrent que l'approche très décentralisée actuellement en place ne fonctionne pas bien. Il est clair que les ministères ont besoin de directives et, au besoin, d'une orientation sur la façon de gérer la propriété intellectuelle. Pour avoir le poids requis, les directives doivent émaner d'un organisme central et non d'un ministère responsable ou d'un comité. Parce qu’il estime que le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada doit intervenir davantage pour veiller à ce que la propriété intellectuelle soit bien gérée au sein du gouvernement fédéral, le Comité recommande : RECOMMANDATION 3 Que le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada, de concert avec Industrie Canada, fournisse des directives claires aux organismes fédéraux en ce qui concerne la gestion de la propriété intellectuelle. PRATIQUES EXEMPLAIRES Les vérificateurs ont constaté que le Conseil national de recherches du Canada (le Conseil) a adopté plusieurs bonnes pratiques pour gérer la propriété intellectuelle. Par exemple, la politique du Conseil en matière de propriété intellectuelle permet d’encadrer les rôles et responsabilités relatifs à la gestion de la propriété intellectuelle ainsi qu'à sa divulgation, à sa propriété et à sa protection. Le Conseil est en train d'élaborer des lignes directrices plus complètes sur la concession de licences et la commercialisation. De même, son processus d'examen des divulgations prévoit que les experts en propriété intellectuelle procèdent à une évaluation de la brevetabilité et de la valeur commerciale des inventions. Le Conseil a dit au BVG qu'il était disposé à mettre à profit son expertise pour soutenir la gestion de la propriété intellectuelle créée à l'interne au gouvernement fédéral. Pierre Coulombe, président du Conseil national de recherches du Canada, a dit au Comité que le Conseil travaille déjà avec l’Agence spatiale canadienne et Santé Canada et collabore aussi « de façon sporadique, avec d'autres ministères pour les aider dans leurs démarches d'accès à la propriété intellectuelle[6] ». Le Comité voit d'un très bon œil la volonté du Conseil de partager son expertise avec les autres organismes fédéraux. Cette perspective est d’autant plus importante que l’approche actuelle en matière de propriété intellectuelle est décentralisée et que la plupart des organismes fédéraux n'ont pas l'expertise voulue pour déterminer et protéger la propriété intellectuelle, qu’ils voient souvent comme un produit dérivé d’une quelconque autre activité. Le Comité croit que le partage d’expertise devrait se faire de façon plus systématique plutôt que ponctuellement, mais il estime par contre qu’il appartient au Secrétariat du Conseil du Trésor de veiller à ce que les organismes fédéraux aient accès aux pratiques exemplaires et à l’expertise existant ailleurs dans la fonction publique. Il recommande donc : RECOMMANDATION 4 Que le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada s’inspire des pratiques exemplaires et de l’expertise existant ailleurs dans la fonction publique, notamment au Conseil national de recherches du Canada, pour concevoir des outils et des ressources afin d’aider les organismes fédéraux à élaborer des politiques et des pratiques pour mieux gérer la propriété intellectuelle créée à l'interne. COMMERCIALISATION DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE La Politique sur le titre de propriété intellectuelle découlant des marchés d'acquisition de l’État du Conseil du Trésor régit la propriété intellectuelle créée à l’externe. Cette politique vise expressément « à accroître les possibilités d’exploitation commerciale de la propriété intellectuelle créée par un entrepreneur dans le cadre d'un marché d'acquisition de l'État en permettant à l'entrepreneur d'en demeurer le propriétaire[7] ». Par conséquent, en vertu de cette politique, lorsqu'une propriété intellectuelle est créée dans le cadre d’un marché d'acquisition de l’État, la position par défaut veut que l'entrepreneur en demeure le propriétaire, sous réserve de quelques exceptions, comme des raisons de sécurité nationale ou lorsque le marché d’acquisition vise à obtenir des connaissances et des renseignements qui seront diffusés au public. L'hypothèse sous-jacente est que le secteur privé est mieux placé pour commercialiser la propriété intellectuelle et ainsi générer une croissance économique et créer des emplois. Dans la mesure où le gouvernement reçoit les biens et services livrables aux termes des marchés qu’il a conclus et peut les utiliser, il n'a pas à conserver le titre de propriété intellectuelle sur un produit dérivé découlant d'activités contractuelles. Voici comment Paul Boothe, sous-ministre délégué principal à Industrie Canada, voit la situation : Ce n'est toutefois pas l'objectif principal de bon nombre des contrats qui sont octroyés; ces contrats visent des réalisations bien concrètes. Il est possible que dans certains cas, de la propriété intellectuelle soit générée, mais c'est un avantage supplémentaire qui découle du contrat. Ces éléments ne relèvent pas de notre mandat principal. Ce n'est pas la raison pour laquelle nous établissons des contrats et c'est dans cette optique que nous estimons que la politique devrait prévoir la concession des droits au secteur privé, à moins qu'il existe un bon motif d'agir autrement[8]. Le Comité convient que dans bien des cas, le secteur privé est peut-être mieux placé pour commercialiser la propriété intellectuelle, puisque la plupart des ministères n'ont pas l'expertise voulue dans ce domaine (bien que le Conseil national de recherches du Canada ait un bilan impressionnant en ce qui concerne la commercialisation de la propriété intellectuelle créée à l'interne). Toutefois, le Comité n'est pas d'accord que l'entrepreneur conserve l’exclusivité des droits sur la propriété intellectuelle découlant d'activités financées par le gouvernement fédéral. L'objectif de l'entrepreneur est de recevoir une juste rémunération pour les biens ou services fournis. Toute commercialisation de la propriété intellectuelle est un avantage non prévu. Le Comité croit que s'il est possible de tirer un certain revenu de la commercialisation de la propriété intellectuelle créée dans le cadre d'un marché d'acquisition de l’État, alors une partie de ce revenu devrait revenir au gouvernement, puisque c'est lui qui a financé la création de la propriété intellectuelle. Cela ne veut pas dire que le gouvernement doit demeurer le propriétaire exclusif. Il pourrait par contre détenir une participation minoritaire, de façon à toucher un pourcentage des produits de la commercialisation. Le Comité croit que la position par défaut qui consiste à concéder la totalité du titre de propriété intellectuelle à l'entrepreneur ne permet pas au gouvernement, c'est-à-dire aux contribuables, de réaliser la valeur éventuelle de la propriété intellectuelle. Cette question mériterait à tout le moins d’être étudiée plus à fond. Le Comité recommande : RECOMMANDATION 5 Que le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada, de concert avec Industrie Canada, détermine dans quelles circonstances le gouvernement fédéral doit conserver une partie ou la totalité des droits sur la propriété intellectuelle découlant des marchés d'acquisition de l’État, et fasse rapport de ses conclusions au Comité des comptes publics d'ici le 31 décembre 2010. CONCLUSION La propriété intellectuelle est une importante ressource qui exige une gestion efficace pour déterminer cette propriété, la protéger et, dans certains cas, la commercialiser. S'il n'en fait pas une bonne gestion, le gouvernement ne peut utiliser en totalité la valeur de la propriété intellectuelle et pourrait éventuellement être contraint de payer des droits pour l'usage d'une propriété intellectuelle pour laquelle il a déjà payé. Le rapport de vérification montre que la gestion de la propriété intellectuelle au sein du gouvernement fédéral a de quoi inquiéter. Même si certaines pratiques du Conseil national de recherches du Canada sont efficaces, la gestion de la propriété intellectuelle à Santé Canada ainsi qu'à Pêches et Océans Canada laisse grandement à désirer. L’approche décentralisée actuellement en place pour gérer la propriété intellectuelle au gouvernement fédéral ne fonctionne pas bien. Le Comité croit que le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada doit renforcer son leadership et assurer une meilleure coordination et une orientation plus ferme à cet égard. De même, le Secrétariat doit mettre à profit les pratiques exemplaires et l’expertise du Conseil national de recherches du Canada pour aider les ministères et organismes fédéraux à élaborer des politiques et des pratiques efficaces pour gérer la propriété intellectuelle créée à l'interne. [1] Vérificatrice générale du Canada, Rapport du printemps 2009, chapitre 2, La propriété intellectuelle. [2] Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes, 40e législature, 2e session, réunion no 39. [3] Réunion no 39, 1610. [4] Réunion no 39, 1620. [5] Ibid. [6] Réunion no 39, 1615. [7] Conseil du Trésor du Canada, Politique sur le titre de propriété intellectuelle découlant des marchés d'acquisition de l’État, article 1. [8] Réunion no 39, 1620. |