Nous tenons d’abord
et avant tout à remercier les centaines d’organisations, d’entreprises et de
particuliers qui ont pris le temps de faire part de leur expérience et de leurs
idées au Comité permanent des finances.
Dans son rapport, le
Comité soit prône le statu quo, soit recommande des mesures déjà avalisées par
le gouvernement conservateur. Ce faisant, il rate une belle occasion de jeter
un regard neuf sur les grands problèmes économiques, démographiques et
environnementaux auxquels le Canada se trouve confronté.
Que les
recommandations adoptées par le Comité reflètent l’opinion de la majorité de
ses membres, c’est normal. Ce qui l’est moins, c’est que le Comité, qui
s’efforce d’habitude d’exposer dans le corps de son rapport sur les
consultations prébudgétaires la grande diversité des vues exprimées, ait choisi
cette fois de privilégier les témoignages flatteurs pour le gouvernement au
détriment des commentaires critiques de la situation actuelle, même quand ils
ont été repris par de nombreux témoins. Un examen des témoignages entendus par
le Comité révèle des omissions de taille, particulièrement en ce qui concerne
l’état de l’économie canadienne, l’écart grandissant entre riches et pauvres et
la situation extrêmement difficile dans laquelle se trouvent les personnes à
faible revenu.
LES EMPLOIS ET
L’ÉCONOMIE
Outre les commentaires
optimistes dont il est fait état dans le rapport, le Comité a entendu de
nombreux témoignages de gens inquiets devant le risque grandissant que
l’économie canadienne entre dans une période prolongée de faible croissance,
voire qu’elle connaisse une autre récession. Il n’est fait nulle part mention
dans le rapport des nombreuses personnes qui ont fait valoir que la persistance
de taux élevés de chômage et de sous-emploi, en particulier chez les jeunes et
chez les Autochtones, fait craindre pour la prospérité future du Canada. Des
témoins ont réclamé que le gouvernement soutienne activement la création
d’emplois et qu’il renonce à augmenter les charges sociales, tueuses d’emplois,
pour éviter d’aggraver la situation.
Le Parti libéral
recommande que le gouvernement :
- vu
la situation fragile dans laquelle se trouve l’économie, impose un gel des
cotisations à l’assurance-emploi au niveau de 2011 pour ne pas risquer de
compromettre des emplois;
- prolonge
d’au moins cinq ans la période d’application de la déduction pour amortissement
accéléré, laquelle était initialement de deux ans, de manière que les
employeurs soient en mesure de faire les investissements stratégiques qui leur
permettront de stimuler la productivité et de créer des emplois;
- étende
aux grandes entreprises le bénéfice de la partie remboursable du crédit à la
recherche scientifique et au développement expérimental, actuellement réservé
aux petites entreprises, pour encourager aussi les grandes sociétés à investir
dans la recherche et le développement au Canada et à créer des emplois;
- crée
un crédit d’impôt pour investisseurs providentiels de manière à accroître
l’offre de capital de risque pour les entreprises en démarrage et ainsi
instituer un climat favorable à l’innovation et à l’entreprenariat et stimuler
la création d’emplois;
- indexe
le Programme de transfert des fonds découlant de la taxe sur l’essence au
profit des villes pour aider à remédier au déficit d’infrastructure et créer
des emplois, car le gouvernement fédéral ne doit pas permettre que ses
investissements dans l’infrastructure municipale soient amoindris par
l’inflation au fil du temps;
- améliore
les mesures du chômage chez les jeunes en demandant à Statistique Canada de
publier régulièrement des chiffres sur ceux qui ne sont ni scolarisés, ni
salariés, ni en formation;
- permettre
le report aux fins de l’impôt de l’amortissement précédemment réclamé sur les
immeubles de placement quand le propriétaire vend pour réinvestir, ce qui
contribuerait à stimuler l’activité économique et à créer des emplois.
L’INFRASTRUCTURE
SOCIALE ET LES DISPARITÉS DE REVENU
Le rapport est muet
sur le fait que beaucoup de témoins ont fait valoir au Comité comtien les
disparités de revenu croissantes menacent l’intégrité du tissu social. Pour ces
témoins, plusieurs politiques du gouvernement conservateur ont contribué à
creuser ces disparités de revenu, notamment la création de nouveaux crédits
d’impôt non remboursables. Comme l’a dit Rob Rainer, directeur général de l'organisme
Canada sans pauvreté :
« …l'expérience
a montré, je crois, que [les crédits d’impôt de] ce genre ne profitent pas
vraiment à ceux auxquels ils sont destinés, mais plutôt aux ménages à revenu
moyen ou élevé. [Ils contribuent] donc à augmenter l'inégalité dans notre
société. »
Les crédits d’impôt
non remboursables ne profitent pas aux Canadiens à faible revenu qui ne paient
pas d’impôt fédéral faute d’un revenu suffisant. Des témoins y voient un
problème d’équité fiscale et ont imploré le gouvernement de transformer
certains crédits d’impôt (par exemple les crédits d’impôt pour les aidants
naturels, le crédit d’impôt pour personnes handicapées, le crédit d’impôt en
raison de l’âge et le crédit d’impôt pour la condition physique des enfants) en
crédits d’impôt entièrement remboursables, afin que les Canadiens à faible
revenu puissent bénéficier d’un soutien du revenu au titre de ces crédits. Plus
précisément, les organismes qui représentent les aidants naturels ont fait
savoir au Comité que bon nombre d’aidants membres de la famille qui réduisent
leurs heures de travail ou qui quittent leurs emplois pour prendre soin d’un
proche à la maison ne pourront bénéficier du crédit d’impôt pour aidants
familiaux, prévu dans le budget de 2011. Susan Eng, de l’Association canadienne
des individus retraités, a dit au Comité :
« [...] nous
vous encourageons à accorder un crédit d'impôt remboursable, particulièrement
au nombre restreint d'aidants qui dispensent des soins en tout temps. Ce sont
eux qui ont dû quitter leur emploi pour s'occuper de leur famille. Ils ne
seront pas en mesure de tirer parti d'un crédit d'impôt non remboursable. »
Plusieurs dirigeants
autochtones ont prié le gouvernement d’augmenter ses investissements dans les
secteurs de l’éducation, de la santé (incluant les services de santé mentale)
et le logement abordable. Des témoins ont fait état des effets pervers qu’ont
les pénuries de logements actuelles sur de nombreuses collectivités du Nord et
éloignées, notamment sur les femmes qui ont des enfants et qui cherchent à se
soustraire à de la violence.
Le Parti libéral
recommande que le gouvernement :
- prenne les dispositions voulues pour que le
crédit d’impôt pour personnes handicapées soit entièrement remboursable, de
même que les crédits d’impôt pour les aidants naturels, pour les pompiers
volontaires, pour la condition physique et les activités artistiques des
enfants, afin que les Canadiens à faible revenu puissent également y avoir
droit, et qu’il évite à l’avenir d’instaurer des crédits d’impôt non remboursables
ultraciblés quand il n’existe pas de mesures de soutien fédéral comparables
pour les Canadiens à faible revenu;
- collabore avec les provinces, les territoires et
les dirigeants autochtones pour concevoir et appliquer une stratégie nationale
de lutte contre la pauvreté, assortie d’objectifs et d’échéances pour la
réduction et l’élimination de la pauvreté;
- collabore avec les provinces et les territoires
pour élaborer un nouvel accord sur la santé qui prévoit du financement stable
et prévisible et qui favorise l’utilisation d’une stratégie de soins à domicile
ainsi que des normes nationales pour les soins, le financement et l’obligation
de rendre compte;
- abolisse le plafond de 2 % imposé à l’égard de
l’augmentation des fonds consacrés au Programme de soutien aux étudiants du
niveau postsecondaire d’Affaires autochtones et Développement du Nord Canada;
- collabore avec les provinces, les territoires et
les dirigeants autochtones pour élaborer et mettre en œuvre un plan national
pour le logement abordable et y affecte suffisamment de fonds pour combler la
pénurie de logements abordables au Canada;
- collabore avec les provinces, les territoires et
les dirigeants autochtones pour investir dans une stratégie nationale et un
cadre de financement pour la garde des jeunes enfants, qui prévoient l’accès
universel aux services et des normes nationales de qualité;
- ajoute une exemption de base annuelle au régime
d’assurance-emploi, semblable à l’exemption de base annuelle du Régime de
pensions du Canada, afin d’alléger le fardeau fiscal des Canadiens à faible
revenu et de leurs employeurs;
- collabore avec les provinces et les territoires
pour mettre en œuvre un programme complémentaire volontaire, relevant du Régime
de pensions du Canada et prévoyant des prestations déterminées, afin que les
Canadiens et leurs employeurs puissent se prévaloir d’un instrument
d’épargne-retraite comportant peu de risques et de faibles coûts
administratifs;
- élabore un programme qui prévoit un soutien du
revenu partiel pour les personnes handicapées et qui complète le revenu
provenant du travail à temps partiel pour les personnes atteintes d’invalidités
épisodiques permanentes, et aide les personnes ayant une capacité partielle de
travailler à trouver un emploi ou à demeurer dans la population active;
- stimule les dons de charité en établissant un
crédit d’impôt allongé pour dons de charité et étende l’exemption d’impôt sur
les gains en capital aux cadeaux et aux actifs immobilisés qui
s’apprécient : les actions de sociétés privées et l’immobilier.
ENVIRONNEMENT
De nombreux témoins
ont demandé que le gouvernement investisse dans des programmes qui visent à
réduire les changements climatiques et qui aideront le Canada à se tailler une
place dans l’économie mondiale appelée à réduire l’importance des émissions de
carbone, tout en créant des emplois pour les Canadiens.
Le Parti libéral
recommande que le gouvernement :
- hâte la transition vers une économie qui émet
moins de carbone sans incidence sur les revenus de l’État.
- investisse dans des mesures d’efficience
énergétique au moyen d’une stratégie nationale de maisons écologiques, d’un
programme d’obligations vertes et de solutions favorisant les énergies
renouvelables, en veillant tout particulièrement à répondre aux demandes d’énergie
non polluante des collectivités rurales, éloignées et du Nord.