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INDU Rapport du Comité

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OPINION DISSIDENTE DU NOUVEAU PARTI DÉMOCRATIQUE

L’écart de productivité

L’écart de productivité entre le Canada et ses principaux concurrents menace l’économie du pays et sa capacité à maintenir la qualité de vie au XXIe siècle. Le fait est largement accepté et étayé par de nombreuses études du Conseil des académies canadiennes (2009), du Conseil des sciences, de la technologie et de l’innovation (2010) et, plus récemment, par le rapport Jenkins (2011).

« Bien entendu, le défi, et la raison pour laquelle la question fait l’objet de tant de débats, vient du fait que le Canada souffre d’une piètre productivité résultant d’une innovation lacunaire. Nos dépenses publiques en R-D sont inférieures à la moyenne, notre taux de détenteurs de doctorat par habitant se situe dans le tiers inférieur. » (M. Rob Annan, directeur des Politiques, MITACS, 19 juin 2012, 9 h 10)

Le NPD croit que l’écart de productivité doit être au cœur de toute discussion sur l’innovation et la propriété intellectuelle. Par conséquent, les néo-démocrates membres du Comité de l’industrie présentent une opinion dissidente afin de faire ressortir des éléments importants des témoignages d’experts indépendants ou de l’industrie que le rapport principal passe sous silence.

Innovation, propriété intellectuelle et emplois bien rémunérés pour les Canadiens

« [L]’innovation a une valeur commerciale, alors que la propriété intellectuelle peut en avoir ou pas, car ce n’est qu’un résultat. Il faut se garder de multiplier les droits de propriété intellectuelle. Il vaut mieux chercher à les améliorer plutôt que d’en avoir plus. Une meilleure propriété intellectuelle est propice à l’innovation, qui a une valeur commerciale. C’est ce qui suscite l’emploi et la croissance économique dans tous les secteurs — l’économie du savoir, le secteur manufacturier, tout. » (M. Jeremy de Beer, professeur à l’Université d’Ottawa, 15 mai 2012, 10 h 15, nous soulignons)

Le NPD s’inquiète du fait que, dès le début, l’opinion du Comité a été influencée par l’idée que « plus il y en a, mieux c’est » dans le domaine de la propriété intellectuelle. Les experts sont clairs : la propriété intellectuelle et les brevets de grande qualité favorisent l’innovation, mais les droits de propriété intellectuelle ne sont qu’un élément d’une série d’outils visant à stimuler la recherche et le développement ainsi que l’innovation des entreprises.

Empêcher la fuite de la propriété intellectuelle

Le Canada doit se doter de meilleures politiques à l’appui d’une propriété intellectuelle adéquate. Pour ce faire, il doit avoir les bons outils pour retenir les entreprises innovantes et les droits de propriété intellectuelle. La valeur du déficit canadien en matière de propriété intellectuelle atteindrait la somme énorme de 4,5 milliards de dollars. Cela nuit aux emplois et à l’économie canadienne.

« Nous nous sommes renseignés sur le nombre de petites et moyennes entreprises qui ont conclu des ententes de fusion et d’acquisition sur une période de cinq ans. Nous avons découvert qu’environ 58 p. 100 des entreprises vendues ont été acquises par des acheteurs étrangers et que 66 p. 100 de la PI a quitté le pays, ce qui signifie que les acheteurs étrangers convoitent énormément nos entreprises qui sont riches en propriété intellectuelle [...] [N]ous devons reconnaître qu’il y a un manque au pays. Quelque chose fait défaut... Nous ne conservons pas une assez grande part de notre PI au Canada. Je pense, et Tony sera peut-être du même avis, que le maintien de la PI au pays contribuerait également à créer des emplois. » (Mme Karen Mazurkewich, directrice, Propriété intellectuelle, Conseil international du Canada (CIC), 2 octobre 2012, 11 h 45)

Il est donc essentiel de voir la question de la propriété intellectuelle dans le contexte plus large des défis auxquels sont confrontés les nouvelles petites entreprises, les secteurs manufacturier, aérospatial et pharmaceutique et les autres programmes gouvernementaux à l’appui de la recherche et du développement.

Réductions du programme de la RS&DE : une mauvaise idée pour l’innovation et la productivité

Si l’étude a pour but ultime de prier le gouvernement d’améliorer l’innovation et la productivité au pays, alors il est essentiel qu’il envisage également d’apporter d’autres modifications importantes aux programmes. À titre d’exemple, de nombreux témoins ont fait observer que les réductions du programme de la recherche scientifique et du développement expérimental auraient des effets néfastes sur les investissements des entreprises dans l’innovation et la recherche et le développement...

« En réduisant le crédit d’impôt pour la recherche scientifique et le développement expérimental, le gouvernement pénalise nos investissements actuels qui, comme je l’ai mentionné, engendrent une grande productivité dont bénéficie non seulement notre société, mais aussi le Canada. » (M. Emechete Onuoha, vice-président, Citoyenneté et affaires gouvernementales, Xerox Canada, 6 novembre 2012)

« Au total, cela revient à une réduction de 750 millions de dollars en mesures incitatives pour les entreprises. Quelles seront les conséquences sur les investissements des entreprises dans la R-D... d’après les sondages que nous avons effectués, les entreprises réduiront leurs dépenses en R-D de 25 à 30 p. 100 en raison de ces mesures. On se situe entre 1 milliard et 1,5 milliard de dollars, selon le sondage que nous avons mené cette année. » (M. Martin Lavoie, directeur des politiques, Manufacturiers et exportateurs du Canada, 1er novembre 2012, 12 h 45)

Recommandation

Que le gouvernement reporte les réductions prévues de 500 millions de dollars du programme de la recherche scientifique et du développement expérimental et qu’il consulte plutôt l’industrie au sujet des améliorations qui appuieraient la recherche et le développement dans les entreprises sans entraîner de perte nette du financement et de perte éventuelle de droits de propriété intellectuelle.

Recommandation

Que le gouvernement étudie plus à fond les moyens de développer des entreprises canadiennes innovantes afin de conserver au Canada de précieux droits de propriété intellectuelle et de combler l’écart de productivité avec ses concurrents.

Recommandation

Que le gouvernement du Canada étudie diverses options pour simplifier le processus et fournir un meilleur soutien, notamment former les petites entreprises à la présentation de demande de brevet.

La propriété intellectuelle dans l’industrie aérospatiale

Les chefs de file de l’industrie aérospatiale canadienne sont clairs. Le gouvernement ne soutient pas suffisamment le secteur aérospatial de calibre mondial, ce qui nuit aux entreprises. Il doit négocier plus rigoureusement l’achat d’aéronefs auprès d’entreprises étrangères afin d’obtenir les droits de propriété intellectuelle nécessaires pour assurer un entretien et des réparations de grande qualité.

« Le dernier enjeu est extrêmement important. Il s’agit des marchés publics ou des approvisionnements fédéraux relativement aux appareils étrangers. […] Nos PME sont particulièrement très désavantagées, parce qu’elles n’ont pas accès à cette PI, étant donné que le gouvernement n’en négocie pas les droits dès le départ. […] Il faut améliorer nos politiques d’approvisionnement en négociant dès le départ l’accès à la PI. C’est un aspect essentiel à la création d’autres emplois bien rémunérés, comme c’est déjà le cas au sein de l’industrie. » (Lucy Boily, vice-présidente, Politiques et compétitivité, Association des industries aérospatiales du Canada, 2 octobre 2012, 11 h 10)

Recommandation

Que le gouvernement tire un meilleur parti possible des marchés publics et des accords sur les retombées industrielles régionales afin d’obtenir les droits de propriété intellectuelle des fabricants d’équipement d’origine pour aider les entreprises canadiennes à intégrer les chaînes de valeur mondiales.

Bien faire les choses : innovation pharmaceutique et coûts des soins de santé

Les négociations de libre-échange entre le Canada et l’Union européenne tirant à leur fin, le déclin des sociétés canadiennes de recherche pharmaceutique inquiétait particulièrement les néo-démocrates membres du Comité de l’industrie. La prorogation des droits attachés aux brevets des médicaments d’origine était considérée comme une solution à la chute des investissements dans la recherche et le développement de médicaments au Canada. Cependant, une étude récente montre que cette solution entraînerait une augmentation annuelle des coûts des soins de santé de 2,8 milliards de dollars. Le NPD tient à créer des emplois à forte valeur ajoutée en recherche et à limiter les coûts des soins de santé, surtout pour les aînés.

Des témoins indépendants ont clairement dit que l’industrie pharmaceutique connaissait une importante restructuration et que l’octroi de nouveaux droits de brevet n’entraînerait probablement pas de nouveaux investissements en recherche et développement et ne stimulerait pas l’innovation thérapeutique.

« Dans le cadre de l’accord conclu vers 1989 avec l’industrie pharmaceutique, on avait promis d’investir jusqu’à 10 p. 100 des revenus dans la R-D, ce qui correspondait encore à la moitié de l’investissement moyen enregistré dans les pays de l’OCDE. On l’a fait pendant quelques années […] et nous sommes maintenant revenus aux niveaux de jadis […] Alors, nous n’allons pas ramener ces entreprises [pharmaceutiques] en leur donnant davantage [de droits de propriété intellectuelle] […] Nous aurions beau tripler les droits de brevet qu’il n’y aurait pas d’augmentation marquée, du moins sur le plan économique. » (M. Richard Gold, professeur à l’Université McGill, 7 juin 2012, 10 h 30)

Les entreprises prospères du XXIe siècle, dont les sociétés pharmaceutiques, ont de plus en plus recours à des stratégies de collaboration dès le départ afin d’établir une propriété intellectuelle commune et d’accélérer le rythme de l’innovation des partenaires. Cette stratégie, saluée comme un succès, devrait être envisagée par un plus grand nombre de secteurs.

« Ce n’est pas anti-PI, n’est-ce pas? C’est une phase préconcurrentielle, avant le début de la concurrence, et cela ne fait qu’accélérer le processus. Nous savons que les sociétés pharmaceutiques ont du mal à sortir de nouveaux produits, et le partage de données en amont accélérera le processus de découverte et leur permettra d’être concurrentielles en aval de la chaîne de valeur. » (M. Pierre Meulien, président et chef de la direction, Génome Canada, 23 octobre 2012, 12 h 20)

Cela soulève la question de savoir quelle est la véritable solution pour cette industrie : plus de droits de propriété intellectuelle ou, simplement, un plus grand nombre de stratégies d’entreprises innovantes et de mesures incitatives ciblées. En outre, les négociations de l’AECG s’étant tenues à huis clos, les néo‑démocrates membres du Comité de l’industrie estiment qu’il faut plus de transparence pour évaluer les options envisagées par le gouvernement dans le cadre des réformes du régime de propriété intellectuelle dans le domaine pharmaceutique ainsi que les conséquences pour les provinces, les consommateurs, les budgets fédéraux et l’industrie.

Vu que le Comité n’a entendu aucun témoignage sur le Traité sur les droits des brevets, le Protocole de Madrid et le Traité de Singapour sur les marques, et l’Arrangement de La Haye sur les dessins industriels, les membres néo-démocrates du comité sont surpris de l’inclusion d’une recommandation concernant ces traités dans le rapport majoritaire. Le Comité devrait chercher à obtenir plus d’information avant de se prononcer sur ces traités. 

Recommandation

Que le gouvernement du Canada entreprenne un examen indépendant et fondé sur des données probantes des défis auxquels est confronté le secteur pharmaceutique des médicaments d’origine au Canada afin de trouver les solutions les plus appropriées et déterminer les mesures à prendre.

Recommandation

Que le gouvernement offre plus de transparence par rapport à sa position et l’état des négociations de l’AECG concernant les brevets pharmaceutiques.

Recommandation

Que le gouvernement conclut un accord commercial avec l’Europe qui n’entraînera pas de hausse du coût des médicaments sur ordonnance pour les aînés.

Appuyer la filière de l’innovation

L’innovation étant un processus, il est essentiel de l’encadrer à toutes les étapes, même dès le début. Le Canada doit faire davantage pour commercialiser les inventions et les nouvelles idées, mais il est très important de ne pas renoncer aux investissements nécessaires afin de stimuler les innovations de la prochaine génération.

« Il est important de maintenir un financement pour ce qu’on appelle la « blue sky research », soit la recherche qui va dans n’importe quelle direction et qui peut trouver quoi que ce soit.

Je vous ai tous vus ce matin avec vos BlackBerry. Les équations de Maxwell sont à la base de la transmission des signaux électroniques et il a fallu attendre 50 ans avant que Hertz et Marconi les mettent en application. Je suis sûre que M. Maxwell n’aurait pas obtenu de financement aujourd’hui et personne n’aurait de cellulaire. Il faut continuer à financer la recherche en amont.

Il est sûr qu’il faut maintenir un grand équilibre entre la recherche fondamentale, la recherche appliquée et, par la suite, son application vers la commercialisation. Éventuellement, la recherche en amont n’existera plus. On aura peut-être commercialisé beaucoup de choses, mais il n’y aura plus rien dans le pipeline. […] Les organismes subventionnaires jouent donc un rôle très important, soit celui de financer la recherche fondamentale. » (Mme Catherine Beaudry, professeure à l’École Polytechnique de Montréal, 12 mai 2012, 9 h 40)

Conseil national de recherches

Recommandation

En raison du rôle important que joue le Conseil national de recherches en matière de recherche, notamment en ce qui concerne les brevets et les documents évalués par les pairs, et de création de savoir, que le gouvernement divulgue sur-le-champ au Parlement ses intentions en ce qui concerne le soutien à une réorientation vers des activités de recherche dirigées par les entreprises et pertinentes pour l’industrie.

Recommandation

Que le Conseil national de recherches conserve les droits de propriété intellectuelle découlant du travail de son personnel et qu’il continue d’appuyer les activités de recherche et de développement non orientées grâce à des mécanismes de financement à long terme stables et constants pour les projets de recherche fondamentale.

Contrefaçon

Devant la prolifération incessante de produits de consommation contrefaits sur le marché canadien, les néo-démocrates membres du Comité de l’industrie constatent qu’il est important, tant pour les entreprises que les consommateurs, de s’attaquer à la contrefaçon et à la violation du droit d’auteur. C’est d’autant plus important lorsque les biens contrefaits présentent un risque pour la santé ou la sécurité des Canadiens.

Malgré ces enjeux, les conservateurs ne sont pas intervenus rapidement et de manière équilibrée pour régler la question des biens contrefaits. De plus, le budget de 2012 prévoit des compressions de 143 millions de dollars à l’Agence des services frontaliers du Canada, ce qui entraînera une réduction du nombre d’agents de première ligne et réduira encore plus notre capacité de surveiller nos frontières.

Une approche équilibrée pour lutter contre la contrefaçon ou les infractions doit répondre également à l’intérêt public, et aux intérêts des titulaires de marques déposées et titulaires de droits d’auteur. Cela exigera des consultations pour faire en sorte que les droits et intérêts des individus sont respectés tout en admettant les coûts croissants que la contrefaçon impose à l’économie canadienne.

Recommandation

Que, dans un effort de sensibilisation au piratage et à la contrefaçon et de coordination, le gouvernement mette à contribution des groupes de consommateurs en plus des groupes de l’industrie.

Recommandation

Que les agents de la Gendarmerie royale du Canada et des services frontaliers aient les pouvoirs nécessaires à l’exécution de leur travail, tout en assurant le respect des libertés civiles et l’application régulière de la loi. Il faudra peut-être prévoir des indemnités lorsque la saisie des biens n’est pas justifiée.

Recommandation

Que des recours pénaux soient possibles lorsqu’il y a contrefaçon de marque de commerce ou piratage de droit d’auteur de manière délibérée et à l’échelle commerciale. Cependant, les consommateurs étant souvent incapables de faire la différence entre le produit original et le produit contrefait, les amendes excessives imposées aux consommateurs qui ne peuvent faire une telle distinction ne sont pas appropriées.

Recommandation

Que le gouvernement cesse de réduire le budget de l’Agence des services frontaliers du Canada et qu’il veille plutôt à ce qu’elle ait les ressources nécessaires pour lutter efficacement contre la contrefaçon sans nuire à l’exercice de ses autres importantes responsabilités, soit protéger les Canadiens et les frontières.