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RNNR Rapport du Comité

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Opposition officielle – Nouveau Parti démocratique du Canada

Rapport dissident concernant l’étude sur l’état actuel et futur des oléoducs et des gazoducs et la capacité de raffinage au Canada

Les membres néo-démocrates du comité sont encouragés par le fait que cette étude, suscitée par notre préoccupation relative au déclin de l’industrie canadienne du raffinage, ait attiré l’attention sur le besoin d’identifier et de comprendre plus clairement la variété des défis énergétiques auxquels sont confrontés les Canadiens. Nous sommes toutefois déçus par les recommandations que le rapport de la majorité propose, qui ne sont qu’une répétition de l’approche déséquilibrée du gouvernement en matière de gestion des ressources naturelles au Canada. Cette approche déstabilise l’équilibre économique que nous avons bâti depuis la Deuxième Guerre mondiale.

Bien que le rapport identifie un nombre important d’enjeux relatifs aux raffineries et aux oléoducs au Canada, quatre enjeux principaux n’ont pas été adéquatement abordés : (1) la nécessité d’avoir une stratégie énergétique adaptée aux besoins du Canada qui priorise les intérêts des Canadiens; (2) la protection des emplois de qualité et à valeur ajoutée dans le secteur du raffinage; (3) la nécessité d’assurer une sécurité énergétique viable partout au pays; et (4) l’importance du développement responsable et durable des ressources et un processus rigoureux d’évaluation environnementale.

Contexte de l’étude

En novembre 2011, les membres néo-démocrates du comité ont proposé au Comité permanent des ressources naturelles de se pencher sur l’État actuel et futur des oléoducs, des gazoducs et de la capacité de raffinage au Canada. Nous espérions qu’un tel rapport contribuerait à notre compréhension du développement rapide de notre secteur du pétrole et du gaz, en plus d’offrir une perspective générale de l’approvisionnement énergétique au Canada. Les quatre jours de témoignages d’experts ont soutenu notre opinion selon laquelle nous avons plus que jamais besoin d’une stratégie énergétique exhaustive et nous ont offert un excellent aperçu des solutions possibles en matière de politiques.

Malheureusement, ces témoignages sont largement ignorés dans  le rapport de la majorité, qui en plus fait  fi de la nécessité de développer une stratégie énergétique exhaustive.  Les recommandations de la majorité  traduisent une vision alarmante, celle du développement accéléré des ressources énergétiques, et ce, sans tenir compte des répercussions économiques, de l’application des contrôles environnementaux ou de l’internalisation des coûts environnementaux.    

Ce rapport dissident se penche sur les recommandations de la majorité et présente une vision alternative du développement des ressources naturelles qui priorise les intérêts de la population canadienne.  

Les recommandations finales proposées dans le rapport principal sont conçues dans l’optique de justifier l’approche actuelle du gouvernement conservateur  dans le secteur du développement des ressources énergétiques. Les recommandations de la majorité illustrent une approche unidimensionnelle du développement des ressources naturelles qui priorise les profits de l’industrie du pétrole. Or, nous croyons que les Canadiens s’attendent davantage à une sécurité énergétique et au développement durable des ressources naturelles de notre pays.

Cette approche des conservateurs exclut pratiquement toutes autres valeurs. Par exemple, l’approche des conservateurs privilégie l’exportation des ressources brutes à la création d’emplois à valeur ajoutée ici même au Canada et les acquisitions étrangères à la sécurité des ressources au pays. Une telle approche expose le Canada aux risques que comporte la propriété étrangère incontrôlée des ressources naturelles canadiennes. Elle fait également fi d’obligations internationales potentiellement périlleuses, comme la règle de proportionnalité de l’ALENA qui exige que le Canada exporte une quantité fixe de ressources naturelles dès le moment où les exportations en question sont amorcées.        

Cette approche de développement à tout prix crée un conflit entre les Canadiens et dissimule les coûts environnementaux associés que devront assumer les générations futures. L’approche des conservateurs encourage l’exploitation et l’exportation des ressources naturelles brutes en retour de minimes retombées pour le Canada en plus de coûts environnementaux et sociaux importants qui devront être assumés par les Canadiens.

Une stratégie énergétique pour le Canada

Le Canada doit se doter d’une stratégie énergétique. Cette stratégie doit établir un plan pour développer nos importantes ressources naturelles afin d’assurer des retombées économiques maximales pour les Canadiens, d’aborder un grand nombre de défis énergétiques de longue date, en plus de garantir le bien-être environnemental et social des générations actuelles et futures. Le gouvernement conservateur refuse de développer une telle stratégie malgré la demande constante provenant des gouvernements provinciaux et territoriaux, de l’industrie et des citoyens.

La place qu’occupe l’énergie dans la vie des Canadiens, son importance pour notre économie, sans compter la complexité des facteurs à considérer, sont autant d’éléments qui mettent l’accent sur la nécessité de développer une stratégie énergétique pancanadienne. Une telle stratégie sous-tend l’élaboration de politiques dans divers domaines, notamment l’approvisionnement intérieur de ressources énergétiques renouvelables et non renouvelables et l’exportation de ressources non renouvelables. L’élaboration des politiques dans ces domaines doit s’attarder à l’équilibre qu’il est souhaitable d’atteindre entre les retombées potentielles et les répercussions économiques, sociales et environnementales.   

Sous les politiques du gouvernement conservateur, des milliards de dollars en subventions directes et indirectes destinées à l’industrie du gaz et du pétrole ont causé l’augmentation artificielle de la valeur du dollar canadien. Des données portent à croire que 50 % des pertes d’emplois dans le secteur manufacturier sont imputables à l’inflation du dollar canadien, soit plus que la sous-traitance et la dernière récession. Les politiques déséquilibrées du gouvernement relatives au développement des ressources imposent un lourd fardeau à l’économie canadienne.   

Les néo-démocrates croient que le gouvernement fédéral a un rôle à jouer dans le développement d’une stratégie exhaustive pour la sécurité énergétique à long terme de notre pays dans le cadre d’un avenir moins pollué par le carbone, et ce, en consultation et en collaboration avec les gouvernements provinciaux, territoriaux et autochtones, les syndicats, les fournisseurs d’énergie, les organisations environnementales et les autres parties prenantes.  

Une stratégie énergétique canadienne fructueuse doit respecter les principes fondamentaux de la durabilité économique, sociale et environnementale, y compris la mise en œuvre de la réglementation environnementale existante visant à internaliser les coûts environnementaux. Elle doit réduire la dépendance du Canada envers les sources non renouvelables en maximisant la conservation d’énergie et en renforçant le développement de sources d’énergie renouvelables. Elle doit également garantir l’exportation responsable des ressources et maximiser les retombées économiques du développement des ressources.   

Contrairement à cette approche, le gouvernement a plutôt choisi de se concentrer presque exclusivement sur l’exportation de ressources énergétiques non renouvelables, ne prenant pratiquement pas en considération l’approvisionnement intérieur en termes de ressources énergétiques renouvelables et non renouvelables. Les conservateurs ne prêtent pas attention aux répercussions sociales et environnementales de la politique gouvernementale puisque leur approche est motivée par les intérêts commerciaux des principales entreprises du secteur énergétique.  

Recommandation : Que le gouvernement devrait, dès maintenant, amorcer le travail avec les provinces, les territoires, les municipalités, les groupes autochtones, l’industrie, les ONG et la communauté académique afin de développer une stratégie énergétique pancanadienne exhaustive qui fait passer les intérêts des Canadiens avant toute chose.

Le déclin de l’industrie nationale du raffinage et la perte d’emplois à valeur ajoutée s’y rattachant

L’émergence de l’industrie des sables bitumineux dans l’ouest du Canada a transformé le pays. Les réserves de pétrole brut sont estimées à environ 170 milliards de barils, et même à 300 milliards de barils si l’on tient compte de l’extraction additionnelle permise par les avancées technologiques. En 2010, le Canada a produit 1,5 million de barils de bitume par jour. Ces réserves présentent non seulement un important potentiel d’exportation brute, mais également la possibilité de créer de la valeur ajoutée dans le secteur de la valorisation et du raffinage.

Malheureusement, jusqu’à présent, le Canada n’a pas tiré avantage de la possibilité d’ajouter de la valeur à cette production brute. Même si les raffineries canadiennes sont relativement propres et efficaces, seulement 15 raffineries complètes demeurent opérationnelles, et seulement une poignée d’entre elles ont l’équipement nécessaire pour raffiner le pétrole brut extrait des sables bitumineux. Bien que le Canada demeure un exportateur net de produits raffinés, ce statut est menacé. Le Canada a perdu environ une raffinerie par année depuis le sommet de sa production dans les années 1980. Alors qu’au début des années 1980 les raffineries canadiennes produisaient environ 2,2 millions de barils de produits raffinés par jour, aujourd’hui  la  production a chuté de 400 000 barils par jour. D’autres provinces perdront toute capacité à raffiner les produits du pétrole si le Canada continue de perdre ses raffineries à la vitesse actuelle.

Le déclin de l’industrie canadienne du raffinage représente également une importante baisse à l’égard de la disponibilité d’emplois stables et bien rémunérés. La taille de la main-d’œuvre dans le secteur du raffinage a atteint son apogée en 1989, avec 27 400 employés, pour diminuer de près de 10 000 employés et atteindre à peine 17 500 employés en 2009. Les témoignages des membres du Syndicat canadien des communications, de l’énergie et du papier indiquent que « pour chaque 400 000 barils de pétrole brut exportés en dehors du pays pour la valorisation et le raffinage, 18 000 emplois canadiens sont perdus ». Actuellement, sept usines de valorisation situées en Alberta traitent seulement 53 % du pétrole bitumineux avant son exportation. Cela représente une importante occasion manquée en ce qui concerne des emplois stables à forte valeur ajoutée.

La construction proposée de pipelines à haut volume pour l’exportation, comme les projets Keystone XL et Enbridge Northern Gateway, aurait pour résultat d’augmenter considérablement l’exportation de bitume brut. Le NPD s’inquiète du fait que l’appui inconditionnel du gouvernement conservateur pour ces projets de pipelines ne tient pas compte de leurs répercussions négatives très importantes sur l’emploi canadien à long terme et sur la valeur perdue par rapport à notre richesse en ressources naturelles.

Nous reconnaissons que le pétrole et le gaz vont continuer à jouer un rôle important dans notre apport énergétique à moyen terme, mais estimons toutefois qu’une stratégie énergétique responsable devrait décourager l’exportation massive de nos ressources non transformées et devrait plutôt encourager la valorisation, le raffinage et la fabrication pétrochimique  responsables qui ajoutent une valeur à nos produits. Ces opérations devraient se faire ici au Canada afin de maximiser les retombées économiques et la création d’emplois canadiens.

Recommandation : afin de maximiser la viabilité à long terme de l’industrie de la valorisation et du raffinage au Canada, le gouvernement du Canada devrait surveiller continuellement l’apport intérieur en matière de raffinage, et travailler avec les provinces et les territoires afin de protéger les emplois canadiens de qualité du secteur de la valorisation et du raffinage.

Promouvoir la sécurité énergétique durable dans toutes les régions

Une approche énergétique exhaustive doit également tenir compte de  la sécurité à long terme de nos réserves énergétiques, tant au plan pancanadien que régional. Les témoignages entendus au comité soulignent le fait que bien que le Canada soit un exportateur net de pétrole, la production et la consommation d’énergie varient significativement selon les régions.

À ce sujet, les personnes que nous avons entendues en comité ont indiqué que la dépendance de l’est du Canada au pétrole et au gaz importés pour satisfaire plusieurs besoins énergétiques (incluant une plus grande dépendance sur les combustibles fossiles pour le chauffage domiciliaire) expose la région à la grande volatilité des prix et à l’incertitude de l’approvisionnement. Le témoignage du professeur Larry Hughes de l’Université Dalhousie souligne qu’il est essentiel d’améliorer la sécurité énergétique de cette région en misant sur la conservation de l’énergie, en développement des sources alternatives d’énergie renouvelable, et en explorant les moyens possibles pour augmenter l’accès des provinces de l’Est aux ressources énergétiques de l’Ouest.

Malgré toutes les preuves disponibles, le gouvernement conservateur a éliminé son appui fédéral à l’énergie renouvelable en mettant fin au programme écoÉNERGIE pour l’éléctricité renouvelable. Il a également mis fin au populaire programme écoÉNERGIE Rénovation - Maisons qui aidait les Canadiens à réduire leur consommation énergétique et à améliorer l’efficacité énergétique de leur maison. L’élimination de ce programme ainsi que d’autres mesures similaires a eu des répercussions négatives sur la sécurité énergétique canadienne.

Les membres néo-démocrates du comité croient que la meilleure façon d’assurer la sécurité énergétique de tous les Canadiens à long terme est de réduire notre dépendance envers les combustibles fossiles et de favoriser le développement des technologies nous permettant d’utiliser des sources alternatives d’énergie qui soient sécuritaires, durables et viables sur le plan environnemental, et qui remplissent les besoins énergétiques de toutes les régions.

Développement responsable et durable des ressources

La viabilité sociale, économique et environnementale doit être au centre de notre approche de développement des ressources naturelles. Le NPD rejette le  faux dilemme qui est présenté entre la protection de notre environnement et le fait d’assurer des emplois à long terme aux Canadiens. Il est possible et impératif que la viabilité environnementale devienne centrale à notre façon de faire des affaires, afin que les générations futures puissent prospérer. Plus spécifiquement, les évaluations environnementales qui prennent en considération les effets cumulatifs des projets, l’application des lois environnementales, la consultation avec les Premières Nations et la surveillance scientifique sont tous des éléments essentiels d’un développement responsable de nos ressources.

Malheureusement, le gouvernement conservateur refuse d’adopter ces principes. En 2010, les conservateurs ont utilisé le budget pour transférer l’autorité de la plupart des évaluations environnementales des grands projets de l’Agence canadienne d’évaluation environnementale vers l’Office national de l’énergie et la Commission canadienne de sûreté nucléaire. Les membres néo-démocrates du comité craignent que le gouvernement conservateur répète un tel geste en 2012 pour accélérer les évaluations environnementales des grands projets d’exploitation des ressources naturelles.

Même si nous sommes d’accord pour dire que les lois canadiennes concernant les évaluations environnementales pourraient être revues afin de mieux servir les intérêts du public, de l’industrie, des Premières Nations et de l’environnement, les membres néo-démocrates du comité soutiennent que la diminution des protections environnementales développées au cours des deux dernières décennies dans le but d’accélérer l’approbation des projets ne servira pas l’intérêt des Canadiens. Cela est particulièrement vrai si la modification des lois se fait de manière à museler le débat public sur les changements en question et sans un examen préalable approprié par le comité parlementaire.

Recommandation : que tout changement au processus réglementaire ne devrait pas avoir de répercussion négative sur la participation des Canadiens dans le processus d’évaluation, soit en réduisant le financement des programmes de participation publique, soit en réduisant le temps disponible pour les commentaires du public. Tout changement réglementaire ne devrait pas non plus modifier l’obligation de consulter les groupes autochtones. De plus, tout changement devra être proposé dans un projet de loi indépendant afin que les parlementaires puissent adéquatement l’étudier.

Conclusion

Les témoignages reçus par le comité permanent des ressources naturelles soulignent la nécessité d’élaborer une stratégie énergétique pancanadienne et confirment nos préoccupations concernant la perte d’usines de raffinage à forte valeur ajoutée au Canada. Ces témoignages soulignent également la nécessité de se pencher sur la question de la sécurité énergétique tout en tenant également compte de la nécessité de protéger adéquatement l’environnement. Sous les conservateurs, le déclin de l’industrie canadienne du raffinage et la construction de nouveaux pipelines pour augmenter la capacité d’exportation du bitume brut suggèrent que, dans le futur, les Canadiens recevront une moins grande valeur pour leurs ressources énergétiques, tout en voyant leurs réserves de cette ressource non renouvelable décliner à un rythme très rapide. Un tel futur pose un risque, non seulement pour notre environnement et nos communautés, mais également pour les emplois canadiens de qualité et la compétitivité économique à long terme de notre secteur de l’énergie, dans un monde qui procède déjà à une transition vers des sources énergétiques plus propres.

Le NPD a une vision très différente pour les ressources et pour le futur énergétique du Canada; une vision où l’on maximise les bénéfices tirés du développement de nos ressources naturelles tout en minimisant les répercussions négatives pour notre société et notre environnement. Bien que nous reconnaissons que cette approche en matière de gestion des ressources nécessitera une plus grande collaboration avec les provinces et les territoires et un plus grand engagement par rapport à un nombre de politiques beaucoup plus diverses que celles actuellement proposées par les conservateurs, les études comme celles-ci tracent une ébauche du chemin à suivre.