D'octobre 2011 à février 2012, le Comité
permanent de la santé de la Chambre des communes a entendu des témoins sur les
questions des maladies chroniques liées au vieillissement, ainsi que de la
promotion de la santé et de la prévention des maladies. Au cours des 17
audiences qui ont été tenues, le Comité a entendu les témoignages des fonctionnaires, ainsi que des témoins
représentant des professionnels de la santé, des patients, des personnes âgées,
des défenseurs des patients, des chercheurs, des assureurs privés et des
organisations caritatives.
Dans le cadre de son étude, le Comité a reconnu que
l’administration et la prestation de services de soins de santé relèvent des
provinces et territoires. Tenus de respecter les dispositions de la Loi
canadienne sur la santé, les provinces et territoires financent ces
services avec l’aide du gouvernement fédéral dans le cadre de transferts
fiscaux. Les services de soins de santé incluent les soins de santé primaires
assurés, comme les services des médecins et autres professionnels de la santé,
les soins hospitaliers, les soins à domicile et le champ d’activité.
Selon des témoins qui ont cité des données de Statistique
Canada[1], l’espérance de vie
s’établit à 80,9 ans. De plus, près de 90 % des Canadiens se disent
en bonne, en très bonne ou en excellente santé[2]. En ce qui a trait à
l’espérance de vie, depuis le début des années 1900, la durée de vie moyenne
des Canadiens s’est accrue de plus de 30 ans, 25 de ces
années étant attribuables aux progrès réalisés en matière de santé publique[3]. Toutefois,
si le nombre d’années de vie en bonne santé a atteint un sommet en 1996, il est
en déclin depuis[4].
Le fardeau des maladies chroniques est lié aux
habitudes alimentaires, aux taux de surpoids et d’obésité et au niveau
d’activité physique des Canadiens. En effet, un régime alimentaire sain
réduit le risque de maladies chroniques. Les saines habitudes
alimentaires, l’exercice régulier et l’abstention de fumer permettraient
d’éviter 90 % des cas de diabète de type 2, 80 % des cas de
coronaropathies et le tiers des cas de cancer[5]. Au Canada, jusqu’à 48 000 décès par année
sont liés à une mauvaise nutrition[6].
Le taux d’obésité est en croissance. En effet, depuis 1980, le taux
d’obésité dans plusieurs pays a doublé, voire triplé[7]. En
2007-2008, près d’un Canadien adulte sur quatre était obèse, et le quart des
adolescents canadiens était obèse ou en surpoids[8].
Chez les enfants, le taux d’obésité a presque quadruplé en 30 ans[9],
et ce taux est nettement plus élevé chez les enfants autochtones que chez les
autres enfants canadiens[10]. Au
chapitre des coûts en santé, en 2008, les coûts associés aux maladies
chroniques le plus souvent liées à l’obésité se chiffraient à 4,6 milliards de dollars,
comparativement à 3,9 milliards en 2000[11].
Un niveau d’activité physique réduit est également lié à une moins
bonne santé. En effet, moins de la moitié de l’ensemble des
Canadiens sont suffisamment actifs, et seulement 7 % des enfants répondent
aux normes d’activité quotidienne[12]. La situation est
encore pire chez les adolescents. En outre, jusqu’à 25 maladies chroniques sont
directement liées à l’inactivité physique, et on estime que, comparativement à
une personne active, une personne inactive passera 38 % plus de temps à
l’hôpital, consultera son médecin de famille et une infirmière respectivement
5,5 % et 12 % plus souvent, et utilisera des services spécialisés
13 % plus fréquemment[13].
Les premiers Canadiens de la génération du baby boom
ont eu 65 ans en 2011, année qui marque le début du changement
démographique prévu qui entraînera une augmentation de la proportion des
65 ans et plus. Aujourd’hui, 14 % des Canadiens appartiennent à ce
groupe d’âge, et leur nombre atteindra 6,7 millions en 2021[14],
puis 10 millions en 2036, constituant alors 25 % de la population
canadienne[15]. Ce changement
démographique s’est déjà opéré dans beaucoup de régions peu peuplées,
c’est-à-dire le Canada rural[16]. Qui plus est, en
2041, 4 % de la population, soit environ 1,6 million de Canadiens,
auront plus de 85 ans[17].
Plusieurs témoins ont évoqué la prévalence des
maladies chroniques, particulièrement chez les personnes âgées, soulignant que
ces affections constituent la principale cause de décès dans ce groupe
d’âge. Parmi les maladies chroniques les plus fréquentes figurent les
affections cardiovasculaires (cardiopathies et AVC), le cancer, le diabète et
les troubles respiratoires ainsi que, dans une moindre mesure, l’arthrite, la
douleur chronique et les troubles mentaux comme la démence et la dépression. De
74 à 90 %[18] des personnes âgées
sont atteintes d’au moins une maladie chronique, et environ le quart en
présente plus d’une[19]. Au chapitre de la
médication, 74 % des personnes âgées prennent au moins un médicament[20] et 15 % en prennent cinq ou plus[21].
Au Canada, le coût annuel des maladies chroniques s’établit à
190 milliards de dollars[22]. De cette somme,
90 milliards de dollars sont affectés aux traitements et le reste sert à
compenser le manque de productivité[23]. Le traitement des
maladies chroniques représente 67 % de tous les coûts directs des soins de
santé[24]. De plus, d’après
de nombreux témoins, il faudrait mettre davantage l’accent sur la prévention
ainsi que sur l’amélioration du diagnostic et de la prise en charge des
maladies chroniques, étant donné que le Canada s’apprête à composer avec le
vieillissement de sa population au cours des prochaines années[25].
Le gouvernement du Canada investit dans des
partenariats afin de favoriser le vieillissement en santé. Ces partenariats misent sur l’inclusion sociale, l’autonomie, la qualité de vie et la prévention
des maladies chroniques en gardant les personnes âgées en contact avec leur
milieu de vie[27].
Le Comité a entendu le témoignage de représentants de l’Agence de
la santé publique du Canada (ASPC). Ces derniers ont brossé un tableau des
initiatives fédérales en matière de maladies chroniques associées au
vieillissement, de promotion de la santé et de prévention des maladies en
général. Ainsi, ils ont parlé de diverses initiatives qui sont adaptées aux
divers stades de la vie, font la promotion du vieillissement en santé et
s’attaquent au fardeau des maladies chroniques chez les personnes âgées. Dans bien des cas, ces initiatives nécessitent l’établissement de
partenariats avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, des
organisations non gouvernementales et avec le secteur privé. Les représentants
de l’ASPC ont fait valoir l’importance d’une approche multisectorielle, ou qui
met à contribution l’ensemble de la société, au lieu de ne compter que sur le
seul secteur de la santé. Cette approche s’inscrit dans la foulée de la
réunion tenue sous l’égide des Nations Unies en septembre 2001, réunion au
cours de laquelle le Canada a reconnu la nécessité de tabler sur tous les
secteurs pour élaborer des stratégies de prévention des maladies chroniques.
En 2005, le gouvernement fédéral a investi
300 millions de dollars sur cinq ans pour mettre en œuvre la Stratégie
intégrée en matière de modes de vie sains et de maladies chroniques. En
septembre 2010, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux (F/T/P) ont
endossé deux initiatives, une décision marquant le renouvellement des efforts.
Il s’agit de :
a) La Déclaration fédérale, provinciale et territoriale sur la
prévention et la promotion[*] — En 2010, le gouvernement fédéral a annoncé qu’il affecterait
74,4 millions de dollars annuellement aux fins de la Déclaration, un
document qui avait reçu l’appui de tous les ministres de la Santé, de la
Promotion de la santé et du Mode de vie sain. Les signataires de la
Déclaration ont comme vision commune que la promotion de la santé et la
prévention des maladies, des incapacités et des blessures sont prioritaires et
nécessaires à la viabilité du système de santé. Dans la Déclaration, ils
reconnaissent que bien des mesures nécessaires ne sont pas du ressort du secteur de la santé en raison de
la nature même de bon nombre des déterminants de la santé, qui ne relèvent pas
de ce secteur. De plus, les signataires prennent acte du fardeau des maladies
chroniques associées à un mode de vie malsain;
b) Freiner
l’obésité juvénile : Cadre d’action fédéral, provincial et territorial
pour la promotion du poids santé[†], un document qui présente trois
stratégies intégrées fondées sur les travaux de la Stratégie pancanadienne en
matière de modes de vie sains et de la Déclaration
fédérale, provinciale et territoriale sur la prévention et la promotion, à savoir :
i. Faire du surpoids et de l’obésité juvéniles une
priorité collective d’intervention pour les ministres F/P/T de la Santé, de la
Promotion de la santé et du Mode de vie sain, qui encourageront les ministères et les autres secteurs de la société
canadienne à faire preuve de leadership partagé et à prendre des mesures
communes ou complémentaires en ce sens.
ii. Coordonner les efforts liés aux trois priorités stratégiques essentielles, soit :
§ des environnements favorables : s’assurer que les environnements sociaux et physiques où les
enfants vivent, apprennent et s’amusent soutiennent davantage l’activité
physique et la bonne alimentation;
§ des mesures précoces : reconnaître le risque de surpoids et d’obésité chez les enfants et s’y
attaquer rapidement;
§ des aliments nutritifs : chercher des moyens d’augmenter la disponibilité des aliments nutritifs et l’accès à ces aliments, et de diminuer la commercialisation d’aliments et de boissons à teneur élevée en gras, en sucre ou en sodium visant les enfants.
iii. Mesurer les progrès collectifs et rendre compte des résultats quant à la réduction du surpoids et de l’obésité juvéniles, tirer des leçons des initiatives qui ont connu du succès et modifier les approches au besoin.
Cette approche collaborative nécessite
l’établissement de partenariats entre les gouvernements F/T/P. Les
représentants de l’ASPC ont expliqué que la création de l’Agence reposait sur
le principe que de tels partenariats sont essentiels à l’efficacité des
stratégies en matière de santé publique. Le Réseau pancanadien de santé
publique (RPSP) a donc été établi; il est dirigé par un conseil
d’administration composé de 17 membres issus des gouvernements F/P/T. Son
mandat consiste notamment à communiquer l’information; à donner des conseils
d’ordre stratégique et technique aux sous-ministres de la Santé F/P/T; et à
appuyer les pouvoirs publics en cas d’urgence en santé publique.
L’approche collaborative des gouvernements F/T/P comprend
des programmes axés sur les trois thèmes de son mandat : promotion de la
santé, prévention des maladies chroniques et soutien du dépistage précoce et de
la prise en charge des maladies chroniques. Santé Canada et ses organismes
appuient ces programmes qui proposent notamment des stratégies et des cadres
propres à certaines maladies qui ont été élaborés dans la foulée des
partenariats entre les gouvernements et les organismes non gouvernementaux.
Ceux-ci incluent : la Stratégie canadienne de santé cardiovasculaire; la
Stratégie canadienne de lutte contre le cancer, qui relève du Partenariat
canadien contre le cancer; la Stratégie canadienne du diabète; le Cadre de
santé pulmonaire pour le Canada; et enfin, le Cadre pour une stratégie en
matière de santé mentale au Canada. Il a été question également du Programme
pour la surveillance accrue des maladies chroniques. Les représentants de
l’Agence ont insisté sur la nécessité d’améliorer la surveillance à cet égard.
La surveillance constitue l’un des thèmes du mandat de l’ASPC, qui
gère plusieurs bases de données sur les maladies transmissibles et non
transmissibles. Initialement, le Programme pour la surveillance accrue des
maladies chroniques permettait de communiquer des données sur la surveillance
de l’hypertension artérielle et du diabète grâce au Système national de
surveillance des maladies chroniques. Dans le cadre du Programme, un montant de
15 millions de dollars, octroyé sur une période de quatre ans, a permis
de mener une étude nationale de la santé des populations relative aux maladies
neurologiques, étude qui contribuera à améliorer la qualité des données de
surveillance des affections, notamment la maladie d’Alzheimer, la maladie de
Parkinson, l’épilepsie et les maladies neuromusculaires. Les données sur la
prévalence, l’incidence, la morbidité et la mortalité des maladies chroniques
comme le cancer, les maladies cardiovasculaires, les troubles neurologiques,
l’arthrite, les troubles mentaux, le diabète et les affections respiratoires
sont accessibles dans l’Infobase sur les maladies chroniques de l’ASPC à mesure
qu’elles sont disponibles.
Les investissements consentis par le gouvernement
fédéral visent à améliorer la prise de décisions en matière de politiques et de
programmes grâce à un accès aux données probantes les plus valables sur la
prévention des maladies chroniques et sur les pratiques en matière de promotion
de la santé. Ces investissements concernent notamment le Portail
canadien des pratiques exemplaires ainsi que des outils favorisant le
développement et l’échange des connaissances et vérifiant la mise en œuvre des
pratiques exemplaires. Le Portail est un recueil d’interventions communautaires
liées à la prévention des maladies chroniques et à la promotion de la santé,
interventions qui ont été évaluées, se sont avérées efficaces et peuvent être
adaptées et reproduites par d’autres professionnels de la santé[28].
Sur la question de la promotion de la santé
mentale, le gouvernement fédéral a versé des fonds à la Commission de la santé
mentale du Canada (CSMC), qui a élaboré un cadre de travail à cette fin, et à
la Coalition canadienne pour la santé mentale des personnes âgées (CCSMPA), qui
a établi le guide de pratique clinique des praticiens.
La coopération internationale constitue également l’un des volets
de l’approche intégrée de l’Agence en matière de prévention des maladies
chroniques. Sur cette question, les représentants de l’ASPC
ont expliqué la collaboration de l’Agence avec l’Organisation mondiale de la
Santé (OMS) en vue de renforcer la capacité de surveillance dans les pays en
voie de développement. L’ASPC collabore également avec d’autres pays des
Amériques, grâce au réseau CARMEN, pour élaborer et échanger des études de cas
sur les stratégies de prévention, particulièrement en ce qui concerne
l’obésité. Par son travail, le réseau permet également de faire avancer la
prévention et de faciliter la modification des stratégies. Enfin, l’ASPC a
signalé qu’elle travaillait en étroite collaboration avec l’Organisation
panaméricaine de la santé sur la question de la réduction du sodium dans les
aliments.
Finalement, les représentants de l’ASPC ont parlé du rapport Mesures
de suivi et orientations futures 2011 qui a été adopté à la réunion des ministres
de la Santé en novembre 2011. Le
rapport présente certaines des mesures prises pour appuyer le Cadre depuis
septembre 2010 et propose des recommandations et des interventions à
l’intention des ministres de la Santé et de leur gouvernement respectif, ainsi
que d’autres secteurs, le cas échéant, jusqu’à l’automne 2012 et par la
suite.
Les représentants de l’ASPC ont également parlé
des initiatives propres aux personnes âgées. Créé en 2007, le Conseil national des
aînés a pour mandat de conseiller le gouvernement, par l’entremise du ministre
des Ressources humaines et du Développement des compétences et du ministre de
la Santé, sur les possibilités et les nouveaux enjeux liés à la qualité de vie
et au mieux-être des personnes âgées. Le Canada participe également au
Projet mondial des Villes-amies des aînés de l’OMS, un programme par
l’entremise duquel l’ASPC assure le leadership des collectivités dans un effort
visant à améliorer l’environnement bâti des collectivités (notamment
l’éclairage des rues ainsi que la largeur et l’accessibilité des trottoirs)
afin d’aider les personnes âgées à mener une vie saine et active. Plus de 560 collectivités canadiennes participent à ce
programme, et la majorité d’entre elles, soit 316, se trouvent au Québec[29].
Le projet des Villes-amies des aînés permet aux Canadiens âgés de
participer à la planification et à la conception de leur propre collectivité
afin de créer un environnement sain, sûr et favorable où ils peuvent vivre et
s’épanouir. Ce projet a rendu plusieurs collectivités plus sécuritaires
et plus accessibles aux personnes âgées, en plaçant les Canadiens âgés au cœur
des discussions sur la conception des villes-amies des aînés.
Les représentants de l’ASPC ont précisé également que la Direction
générale de la santé des Premières nations et des Inuits est responsable de la
mise en œuvre non seulement de la Stratégie canadienne du diabète, mais aussi
de l’Initiative sur le diabète chez les Autochtones. Tout comme la Stratégie,
l’Initiative met l’accent sur les stratégies de prévention et l’amélioration de
la prise en charge du diabète, mais elle est adaptée pour répondre efficacement
aux besoins de la population autochtone canadienne.
Finalement, l’ASPC a élaboré un questionnaire d’évaluation pour les
Canadiens, CANRISK, qui permet de mieux déceler les personnes susceptibles
d’être atteintes du diabète et de tirer profit des stratégies de prévention
pour retarder ou prévenir l’apparition de la maladie.
Des témoins ont parlé du Guide alimentaire
canadien, publié pour la première fois en 1942 et récemment mis à jour en
2007. Le guide alimentaire de Santé Canada, intitulé Bien manger avec le
Guide alimentaire canadien, repose sur des politiques nutritionnelles
fondées sur des données probantes et vise à aider les Canadiens à faire
des choix alimentaires sains qui répondent à leurs besoins nutritionnels, favorisent
la santé et préviennent les carences nutritionnelles.
Au chapitre des initiatives de financement visant à promouvoir
l’alimentation saine et le poids santé, l’ASPC investit annuellement plus de
112 millions de dollars pour aider les enfants vulnérables et leur famille
grâce à divers programmes, dont le Programme d’action communautaire pour les
enfants, le Programme canadien de nutrition prénatale et le Programme d’aide
préscolaire aux Autochtones dans les centres urbains et les agglomérations du Nord.
Le Programme canadien de nutrition prénatale a été présenté comme un programme
communautaire assuré par l’ASPC pour aider les collectivités à promouvoir la
santé publique et à offrir les appuis nécessaires pour améliorer la santé et le
bien‑être des femmes enceintes, des nouvelles mères et des bébés qui
traversent des circonstances difficiles. Les témoins ont également parlé des Recommandations canadiennes relatives au gain de
poids durant la grossesse que le
gouvernement a formulées pour aider les professionnels de la santé et les
femmes enceintes à gérer le gain de poids durant la grossesse. Finalement, la Trousse éducative Mangez bien et soyez
actif, publiée par Santé Canada, vise à faciliter
l’enseignement de la saine alimentation et de
l’activité physique à des groupes d’enfants et d’adultes. Enfin,
pour que les Canadiens vivant dans des collectivités isolées du Nord puissent
avoir accès à des aliments nutritifs et périssables, le gouvernement fédéral
investit annuellement 60 millions de dollars dans le Programme
Nutrition Nord Canada[30].
L’activité physique et la vie active sont des
éléments essentiels au maintien d’une bonne santé. De
1998 à 2002, le gouvernement fédéral et la Société canadienne de physiologie de
l'exercice (SCPE) ont élaboré des guides d’activité physique destinés aux
adultes, aux adultes plus âgés, aux enfants et aux adolescents. Des versions
révisées des quatre guides ont été publiées en janvier 2011 par la SCPE.
En mars 2011, le gouvernement fédéral a annoncé qu’il investirait 5
millions de dollars sur deux ans dans la prévention des blessures sportives et
récréatives, en collaboration avec des organismes non gouvernementaux,
notamment dans le but de prévenir les blessures graves comme les commotions
cérébrales, les noyades et les fractures dans des activités très populaires
comme le hockey, les sports d’hiver, le cyclisme et les sports nautiques.
Dans le cadre des audiences, le Comité a été mis
au courant des projets de recherche appuyés par les Instituts de recherche en santé
du Canada (IRSC). Dotés d’un budget annuel d’environ un milliard
de dollars, les IRSC, qui regroupent 13 instituts virtuels, constituent
l’organisme subventionnaire fédéral pour tous les domaines de la recherche en
santé : recherches biomédicales, recherches cliniques et recherches sur la
prestation des soins de santé notamment. Plusieurs d’entre eux font de la
recherche sur la promotion de la santé ainsi que sur la prévention et le
traitement des maladies chroniques.
Les IRSC sont l’un des membres fondateurs de l’Alliance mondiale
contre les maladies chroniques, une organisation formée en juin 2009 qui se
compose de six organismes de recherche sur la santé issus de différentes
régions du monde. Ces organismes se sont fixés comme priorité
de mener une recherche coordonnée sur les maladies chroniques. Pour ce
faire, le plan stratégique des IRSC de 2009‑2010 à 2013‑2014 donne
notamment la priorité à la recherche stratégique sur le fardeau des maladies
chroniques et des troubles mentaux. À cette fin, les IRSC
évoquent la nécessité d’axer davantage les soins sur le patient et d’alléger
les pressions exercées sur le système de santé en raison du vieillissement de
la population et des taux accrus de maladies chroniques, et soulignent
l’importance de mobiliser les ressources en collaborant avec divers ministères
et organismes publics, ainsi qu’avec des organisations non gouvernementales
pour répondre aux besoins en matière de recherche.
Par l’intermédiaire de l’Institut du vieillissement des IRSC, le
gouvernement fédéral a affecté 122 millions de dollars à la recherche sur
le vieillissement en 2009‑2010. De cette somme, 44 millions de
dollars ont été versés en 2010 pour appuyer la recherche sur le diabète, et
d’autres fonds ont été versés pour appuyer la recherche sur le cancer, les
cardiopathies et les AVC[32]. Plusieurs témoins
ont parlé de l’Étude longitudinale canadienne sur le vieillissement (ELCV),
l’une des initiatives stratégiques des IRSC. L’ELCV permettra de suivre une
cohorte de Canadiens de 45 ans et plus pendant une période de 25 ans
et aidera à comprendre l’évolution des maladies, de la psychologie, des
fonctions, des incapacités et des processus psychosociaux qui accompagnent le
vieillissement. Jusqu’à ce jour, 38 millions de dollars ont été investis
par l’intermédiaire des IRSC, montant qui vient s’ajouter aux 15 millions
de dollars consentis par les gouvernements provinciaux et d’autres partenaires.
Les IRSC ont fait beaucoup pour mettre de l’avant la recherche dans
les secteurs de la promotion de la santé et de la prévention des maladies. En
plus des investissements en cours dans la recherche sur l’obésité, les IRSC
financent la recherche sur la prévention des maladies par l’entremise de ses
divers instituts, de même que la promotion de la santé en général et,
indirectement, de la recherche alimentaire et nutritionnelle. En novembre 2010,
l’Institut de la nutrition, du métabolisme et du diabète (INMD) des IRSC a tenu
un atelier intitulé « Priorités de recherche sur l'alimentation et la
santé » dont l’objectif était de cerner les lacunes en matière de
recherche.
Afin d’accroître la capacité des collectivités autochtones à
prendre part à la conception, à la surveillance et à l’application de
recherches visant à réduire les disparités sur le plan de la santé chez les
Autochtones, les IRSC ont mis sur pied l’initiative « Voies de
l'équité en santé pour les Autochtones ».
Il existe également l’Enquête sur la santé dans
les collectivités canadiennes (ESCC), administrée par Statistique Canada, qui
collige des données liées à l’état de santé, à l’utilisation des services de
santé et aux déterminants de la santé de la population canadienne. En
2004, l’enquête était axée sur la nutrition; ce thème sera repris en 2015.
Finalement, en juillet 2010, le gouvernement fédéral a annoncé
qu’il investirait 8,2 millions de dollars sur cinq ans dans les
Équipes stratégiques des IRSC en recherche appliquée sur les blessures. Ainsi, cinq équipes de recherche sur les blessures sont
financées grâce à cette initiative, et leurs recherches porteront sur les
blessures chez les enfants.
Des témoins ont exposé divers problèmes et proposé plusieurs
solutions au Comité durant les audiences. Ces questions sont
abordées ci-après.
Certains témoins ont formulé de vives
inquiétudes sur les lacunes dans la formation des professionnels de la santé
quant au diagnostic, au traitement et à la prise en charge des maladies
chroniques chez les personnes âgées. Selon eux, non seulement
nous manquons de gériatres – les médecins se spécialisant en soins pour les
aînés, mais les omnipraticiens ne reçoivent pas la formation nécessaire pour
soigner les aînés. Notamment, le Canada ne compte que 200 gériatres alors
qu’il en faudrait actuellement de 500 à 600 et qu’il en faudra davantage au fur
et à mesure que la population vieillit[33]. Dans la même veine, d’ici
2020, il y aura une pénurie de spécialistes des troubles respiratoires de
l’ordre de 35 %[34]. À ce chapitre, il
a d’ailleurs été proposé que la formation des médecins soit moins axée sur les
spécialités liées aux soins actifs[35]. Le
fait que les gériatres reçoivent un salaire (contrairement à la plupart des
autres médecins qui sont rémunérés à l’acte), représente un effet dissuasif sur
les étudiants en médecine[36]. Cependant, la rémunération
à l’acte ne favorise pas l’interdisciplinarité des soins ni ne garantit que les
soins seront meilleurs[37]. Selon certains
témoins, la formation et le perfectionnement des médecins et des autres
professionnels de la santé ne sont pas suffisamment axés sur le vieillissement[38].
Une initiative quinquennale ontarienne, le projet Phoenix : A
Call to Caring, des Associated Medical Services, a permis d’améliorer la
formation des professionnels de la santé, particulièrement en ce qui concerne
la prestation de soins aux personnes âgées. Ce projet met
l’accent sur la nécessité de conjuguer compassion et maîtrise technique dans la
prestation de soins axés sur le patient[39]. En matière de
promotion de la santé et de prévention des maladies, l’Association des facultés
de médecine du Canada préconise une telle approche dans la formation des futurs
médecins, compte tenu du fardeau de plus en plus lourd que constituent le
vieillissement de la population et les maladies chroniques. Certains témoins
ont également abordé la question de l’accès aux soins primaires, signalant que
le Canada manquait non seulement de gériatres mais également d’omnipraticiens.
En effet, jusqu’à 6 % des Canadiens atteints d’au moins une maladie
chronique liée au vieillissement n’ont pas accès à un médecin de premier
recours[40].
Le champ d’activité est de compétence provinciale,
mais les représentants des pharmaciens et du personnel paramédical ont fait
valoir qu’ils offrent un moyen de mieux utiliser les ressources en santé. Les
pharmaciens ont été présentés comme des fournisseurs de services de santé
accessibles dans la collectivité. Selon certains témoins, les pharmaciens sont
bien placés pour fournir un service de gestion des médicaments et, de ce fait,
pour participer à la prise en charge des maladies chroniques. Ils peuvent
donner de l’information complète sur les médicaments, assurer le suivi auprès
des patients pour contrer les effets indésirables des médicaments, se pencher
sur les problèmes de conformité en matière de pharmacothérapie et communiquer
avec les fournisseurs de soins de santé lorsqu’ils relèvent des problèmes. Ils peuvent aussi proposer d’autres thérapies. Des témoins ont
également mentionné que l’inclusion des pharmaciens dans un modèle de soins de
santé collaboratif, qui sera examiné plus avant, pourrait permettre de réduire
les coûts du système de soins de santé. Aussi, les programmes de dépistage dans
les pharmacies, comme celui en place en Ontario pour le dépistage de
l’hypertension artérielle, peuvent réduire le nombre d’hospitalisations[41].
Des témoins ont affirmé que le personnel paramédical constitue le
troisième groupe de fournisseurs de soins de santé en importance au Canada. Les
services paramédicaux communautaires, dont il faudrait dans certains cas
élargir le champ d’activité, permettent de fournir des soins de prévention et
de réadaptation dans des contextes autres que les urgences. Des
témoins ont fait valoir que le personnel paramédical peut fournir des soins de
transition efficaces aux patients qui ont obtenu leur congé de l’hôpital et une
telle approche pourrait contribuer à réduire le nombre de réadmissions à
l’hôpital qui se situe actuellement à 15 % dans les 30 jours de la
sortie de l’hôpital. Dans le même ordre d’idées, des témoins ont
présenté les services paramédicaux communautaires comme un moyen efficace
d’éviter des appels au 911, de réduire les visites aux services d’urgence et de
garder les patients âgés chez eux plutôt que de les hospitaliser lorsqu’ils
attendent une place dans un établissement de soins de longue durée[42].
La question des caractéristiques ethniques et
culturelles des patients ainsi que de la nécessité de leur fournir des services
dans leur langue a été soulevée, ainsi que celle de l’obligation, au
Canada, de fournir des soins de santé et des services sociaux dans les deux
langues officielles. Dans les cas de démence, une maladie qui touche une
personne âgée sur onze[43], c’est la capacité
de parler une langue seconde qui se perd en premier[44]. En outre, ce sont les membres de la famille et d’autres
fournisseurs de soins qui doivent intervenir lorsque la langue devient un obstacle[45].
Pour ce qui est de la composition ethnique au Canada, des témoins
ont affirmé que, au cours des deux dernières décennies, la population urbaine
est progressivement devenue plus diversifiée et que cette tendance devrait se
poursuivre[46]. La communauté
chinoise est l’une des plus nombreuses communautés ethniques et, de ce fait,
elle a été la première pour laquelle on a élaboré des modèles de prestation de
service adaptés à la réalité culturelle. Des témoins ont expliqué que ce ne
sont pas tant les besoins d’un groupe ethnique en matière de soins de santé qui
sont uniques, mais plutôt la manière dont le groupe réagit à une stratégie
particulière[47].
Enfin, la reconnaissance des titres de compétence étrangers des
professionnels de la santé qui immigrent au Canada est une occasion d’élargir
la base de professionnels de la santé du Canada; ces nouveaux venus peuvent
également apporter une contribution nécessaire sur les plans linguistique et
culturel[48].
Plusieurs témoins ont fait état de la complexité
de la prise en charge des patients âgés atteints de maladies chroniques. Comme il
a été indiqué précédemment, la majorité des personnes âgées souffrent au moins
d’une maladie chronique et prennent au moins un médicament sur ordonnance;
toutefois, une proportion considérable d’entre elles souffrent de plusieurs
maladies chroniques et prennent donc plusieurs médicaments d’ordonnance.
Certains témoins ont parlé du fardeau de diverses maladies
chroniques. Il existe clairement un lien entre le vieillissement et le diabète
de type 2, et le fait d’avoir 40 ans ou plus constitue un facteur de
risque d’apparition de cette maladie; il en va de même du surpoids et d’un mode
de vie sédentaire. La prévalence du diabète est en hausse. Cette
maladie affecte actuellement 7,6 % de la population et on prévoit que,
d’ici 2020, 11 % des Canadiens en seront atteints. Si l’on tient
compte des personnes à risque d’être atteintes du diabète, cela signifie que, à
l’heure actuelle, un Canadien sur quatre est atteint de cette maladie et que
cette proportion devrait passer à un Canadien sur trois d’ici 2020. Parallèlement, le diabète entraîne des coûts considérables pour le
système de soins de santé, des coûts qui se chiffrent actuellement à
11,7 milliards de dollars par année et qui passeront vraisemblablement à
16 milliards de dollars par année, compte tenu de l’augmentation prévue du
nombre de personnes atteintes. Il est important de noter que 80 % de ces
coûts sont attribuables à des complications associées au diabète, notamment les
crises cardiaques, les AVC, les néphropathies, la cécité, les amputations et la
dépression[49].
Cependant, le vieillissement de la population ne représente que 1 % des
coûts des services de soins de santé[50].
Santé Canada et l’ASPC subventionnent la Coalition
d’une vie active pour les aîné(e)s pour qu’elle conçoive des ressources
documentaires permettant aux adultes plus âgés de comprendre que les maladies
chroniques, dont le diabète, sont souvent associées au mode de vie. La
Coalition fournit aux dirigeants des collectivités et aux personnes âgées des
renseignements sur la façon dont elles peuvent modifier leur mode de vie[51].
Le cancer, maintenant considéré comme une maladie chronique à cause
de l’amélioration des traitements et de sa prise en charge, est également lié à
l’âge et sa prévalence est en hausse. On prévoit que, pour la période de 2007 à
2031, le nombre de cas de cancer augmentera de 71 %. Environ 30 % des
décès sont attribuables au cancer[52]. Le financement du
Partenariat canadien contre le cancer, créé en 2007 par le gouvernement du
Canada, a été reconduit pour cinq ans, soit de 2012 à 2017. Parmi les patients
atteints de cancer, 50 % en mourront. Cependant, les patients et leur
famille ne sont souvent pas préparés à prendre des décisions sur la fin de vie
et à en discuter. Le Partenariat canadien contre le cancer
collabore avec la Coalition pour des soins de fin de vie de qualité au Canada,
dans le cadre de son plan d’action, pour améliorer les soins palliatifs au pays[53].
Quoique les crises cardiaques et les AVC, ou
maladies cardiovasculaires, soient la cause d’un peu moins de 30 % des
décès, il s’agit de la principale cause de décès et d’invalidité chez les
Canadiens de 65 ans et plus. L’âge est la plus importante variable
explicative des cas d’AVC; la probabilité de ce genre d’accident augmente à
partir de 55 ans et double à tous les 10 ans par la suite. En outre, s’il est vrai que 50 000 Canadiens sont
hospitalisés chaque année à cause d’un AVC, il semble que de cinq à dix fois
plus de personnes subissent des AVC moins graves, pour lesquels ils
n’obtiennent pas de soins médicaux, mais ils entraînent néanmoins un certain
niveau d’invalidité. La prévalence croissante de l’obésité et du
diabète, combinée au vieillissement de la population, contribuera à une
augmentation des maladies cardiovasculaires dans les années à venir[54].
Il appert également que les maladies respiratoires sont nettement
plus fréquentes chez les personnes âgées. Certaines
statistiques présentées au Comité révèlent notamment que 80 % des
personnes atteintes de cancer du poumon ont plus de 60 ans; que le taux de
prévalence de la maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC, auparavant
nommée emphysème) chez les gens âgés de 65 à 74 ans est presque trois fois
plus élevé que chez les gens de 35 à 44 ans; qu‘à l’heure actuelle, les
maladies pulmonaires coûtent 15 milliards de dollars par année et que,
d’ici 2020, elles pourraient coûter 27 milliards de dollars par année; que
la MPOC est un facteur de comorbidité dans 50 % des décès attribués à la
grippe, et que la prévalence des maladies pulmonaires augmentera de 33 à
41 % au cours des 30 prochaines années[55]. Pour arriver à des mesures coordonnées et concertées, le
gouvernement fédéral s’est associé à la communauté de la santé pulmonaire pour créer
un cadre de travail national sur la santé pulmonaire. Un plan d’action, axé
particulièrement sur la prévention, le dépistage et les soins, a été élaboré
pour améliorer la santé pulmonaire. Après avoir évalué à quel point les
Canadiens sont sensibilisés aux maladies pulmonaires, il faut prendre des
mesures précises qui réduiront considérablement le nombre de personnes
atteintes[56].
Des témoins ont également fait état du fardeau des maladies
musculosquelettiques, notamment l’arthrite et l’ostéoporose. L’arthrite est
apparemment la cause la plus fréquente d’invalidité dans la population; elle
affecte un Canadien sur six, soit 4,5 millions de personnes. Environ
1,7 million d’aînés en souffrent. Les maladies musculosquelettiques sont
également liées à d’autres maladies chroniques. Elles peuvent avoir une
incidence directe sur la capacité d’une personne de pratiquer des activités
physiques, ce qui nuit à la condition physique globale, entraîne la prise de
poids et le diabète et affecte la santé mentale[57].
Par surcroît, les maladies musculosquelettiques ne nuisent pas seulement aux
gens qui en sont atteints, mais elles ont également une incidence considérable
sur l’ensemble de la main-d’œuvre. Comme ces maladies diminuent la capacité de
pratiquer des activités physiques et constituent un risque pour la santé
mentale, elles entraînent une baisse de la productivité et une diminution de la
participation au marché du travail. Par conséquent, les maladies
musculosquelettiques figurent parmi les problèmes de santé qui coûtent le plus
cher au Canada[58].
Dans le cadre de la présente étude, la douleur chronique a été
présentée comme un problème qui devrait être inclus dans la catégorie des
maladies chroniques liées au vieillissement. En effet, un Canadien sur cinq vit
avec une douleur chronique, et cette prévalence augmente avec l’âge. La douleur
chronique est souvent mal diagnostiquée et mal soignée. À l’instar des maladies
musculosquelettiques, la douleur chronique a une incidence sur de nombreux
aspects de la vie quotidienne, car elle réduit l’activité physique et nuit aux
interactions sociales. Par conséquent, elle entraîne une détérioration de la
condition physique et une prise de poids, et elle augmente l’incidence du
diabète, des maladies cardiaques, des AVC et de la dépression[59].
Plusieurs témoins ont souligné la complexité de la prise en charge
des patients atteints de plusieurs maladies chroniques. Une
personne âgée sur quatre de 65 à 79 ans est atteinte d’au moins quatre
maladies chroniques et la proportion passe d’une personne sur trois après
80 ans[60]. Les
combinaisons de maladies sont liées au mode de vie plus qu’à l’âge. En effet, le
manque d’activité physique et l’excès de poids accroissent les risques de
souffrir de maladies chroniques, notamment la cardiopathie, le diabète et
certains cancers[61]. Divers
facteurs compliquent la prise en charge efficace de ces patients : au fur
et à mesure que les gens avancent en âge[62], on note une diminution de la capacité à tolérer les médicaments et
de bien y réagir[63],
une augmentation de la probabilité de réaction indésirable aux médicaments[64] et d’effet néfaste d’un médicament sur un autre, une augmentation
des cas de consommation abusive de médicaments, une diminution de la capacité
du patient de décrire ses symptômes et d’exprimer d’autres préoccupations
lorsque des problèmes de santé mentale sont présents, la difficulté de
connaître la situation globale de soins lorsque plusieurs fournisseurs de soins
interviennent. Ce qui est encore plus difficile lorsqu’il n’y a pas de dossiers
médicaux informatisés, et une diminution du respect du régime de traitement
attribuable à des contraintes financières et à une mobilité limitée. Il
faut suivre une formation appropriée pour faire la distinction entre les
symptômes des maladies physiques et les manifestations somatiques des maladies
mentales. Par conséquent, il arrive souvent que des maladies
traitables ne soient pas diagnostiquées et traitées[65]. Les contraintes financières réduisent non seulement la capacité
des patients d’assumer les coûts de leur traitement médical et des soins dont
ils ont besoin à long terme, mais également leur capacité d’acheter des
aliments nutritifs, de participer à des événements communautaires et de rester
physiquement actifs[66].
Au chapitre du défi que posent les effets indésirables des
médicaments, il existe l’initiative e‑Therapeutics+ de l’Association des
pharmaciens du Canada. Dans le cadre de cette initiative, tous les avis de
Santé Canada sont publiés dans le but d’informer les professionnels de la santé[67]. Il existe également d’autres initiatives qui remédient aux
problèmes liés à l’inactivité physique et au manque de participation sociale
des Canadiens du troisième âge, dont il est question plus loin à la rubrique Déterminants
sociaux de la santé.
Dans le cadre de la présente étude, des
préoccupations au sujet de la santé mentale des aînés du Canada ont été
fréquemment exprimées. Des témoins ont souligné la nécessité de tenir
compte de la santé mentale des personnes âgées dans le cadre de l’étude sur les
maladies chroniques[68]. En
effet, une personne souffrant de problèmes de santé mentale s’intéresse
généralement peu à ses autres problèmes de santé. Autrement dit, si on
n’apprend pas dès le départ comment aborder les problèmes de santé mentale, il
ne sert pas à grand-chose d’élaborer des stratégies pour traiter les problèmes
de santé[69].
La démence, dont la maladie d’Alzheimer et les pathologies
associées, est considérée comme la matriarche des maladies chroniques. En
effet, la démence, sous ses diverses formes, est la maladie chronique la plus
lourde de conséquences sur le plan des soins de santé, et elle a des
répercussions encore plus considérables sur les autres niveaux de soins[70].
Des témoins ont affirmé que, à l’heure actuelle, 500 000 personnes
âgées souffrent de démence; on prévoit que, d’ici 2038, le nombre de personnes
atteintes passera à 1,1 million. Sous l’angle de la
prévalence, cela représente une augmentation de 1,5 à 2,8 % pour
l’ensemble de la population, quoique la démence soit surtout diagnostiquée chez
les personnes âgées[71].
Plusieurs témoins ont souligné que le fait de mesurer la prévalence de la
démence ne permet pas d’évaluer son incidence de façon précise, parce que cette
maladie constitue un fardeau considérable pour les aidants naturels, qui sont
souvent stressés, déprimés et épuisés[72].
La démence est la raison la plus courante pour transférer des
patients d’un hôpital de soins actifs à un établissement offrant un autre
niveau de soins. Des témoins ont expliqué que les personnes âgées sont
généralement capables de prendre en charge leurs maladies chroniques tant
qu’elles ne souffrent pas de démence. Toutefois, dès que la démence apparaît,
il leur devient difficile de gérer elles-mêmes leurs maladies, et c’est à ce
moment que commence un cycle d’hospitalisation, de stabilisation, de retour à
la maison, de mauvaise autogestion de la maladie, de détérioration de l’état de
santé et de réadmission à l’hôpital. Ce cycle se répète malheureusement trop
souvent parce que les professionnels de la santé ne détectent pas toujours la
présence d’un problème de santé mentale[73].
Par conséquent, bon nombre de provinces ont leur propre stratégie en matière d’Alzheimer,
certaines l’intégrant dans une stratégie ciblant les aînés. Beaucoup de mesures
sont prises, partout au pays, d’une part pour s’occuper des personnes atteintes
de la maladie d’Alzheimer et, d’autre part, pour maintenir les aînés en bonne
santé et stimuler leur esprit[74].
De nombreux témoins ont présenté la dépression comme un problème
sérieux de santé mentale chez les personnes âgées. En effet, jusqu’à 15 %
d’entre elles qui vivent dans la collectivité souffrent de dépression[75].
Cependant, cette proportion peut aller jusqu’à 80 ou 90 % dans les
établissements de soins de longue durée. D’après les statistiques de l’OMS,
d’ici 2020, la dépression sera la deuxième cause de perte d’années de vie
productive et de vies raccourcies par une mort prématurée. Des témoins ont
parlé du suicide, la complication la plus tragique de la dépression. Il a été
établi que le taux de suicide chez les hommes de 90 ans et plus se situe à
33,1 sur 100 000 habitants, ce qui est presque le double de la
moyenne pour tous les groupes d’âge[76]. Les maladies
chroniques dont il a été question précédemment figurent parmi les facteurs
susceptibles de mener au suicide.
Un peu de travail a été fait auprès des personnes âgées en créant
des brochures et des dépliants faciles à consulter sur la dépression et les
maladies mentales les plus communes. Ce travail aidera à
lutter contre la stigmatisation, amènera les aînés à reconnaître les symptômes
et les incitera à consulter leur médecin et à demander de l’aide[77].
Le Comité a appris l’existence du Comité consultatif sur les aînés
de la Commission de la santé mentale du Canada et de sa contribution à
l’élaboration d’une stratégie sur la santé mentale, stratégie qui a été publiée
le 8 mai 2012. Le Comité consultatif a élaboré des lignes directrices
concernant la prestation de services complets de santé mentale pour les
personnes âgées[78]. Dans le cadre de
la recherche sur la prestation des services de santé, l’accent a notamment été
mis sur la santé mentale. La recherche a également porté sur le rôle de
l’activité physique et de la participation sociale et leurs effets positifs sur
la santé mentale[79].
Plusieurs témoins ont mentionné que les maladies chroniques ne
constituent pas une conséquence inévitable du vieillissement[80].
Un mode de vie sain, notamment une alimentation nutritive, une vie active et
l’évitement de comportements malsains ou à risque contribuent dans une grande
mesure à prévenir ou à retarder l’apparition des maladies chroniques. Des
témoins ont indiqué que la majorité des personnes âgées peuvent rester chez elles
et conserver un certain niveau d’indépendance pendant la plus grande partie de
leur vie. Cette indépendance comprend notamment la prise en charge autonome de
leurs soins de santé et des traitements nécessaires, en consultation avec les
fournisseurs de soins de santé[81].
Le Comité a entendu parler d’initiatives qui encouragent les
Canadiens du troisième âge à continuer de mener une vie active, tant sur le
plan physique que social. Comme il a été mentionné précédemment, le Canada
participe à l’initiative des Villes-amies des aînés de l’OMS. Cette initiative,
particulièrement présente au Québec, assure le leadership des collectivités
pour leur permettre de mieux répondre aux besoins des Canadiens du troisième
âge et les aider à mener une vie saine et active. La participation sociale
constitue un élément central de cette initiative. Elle a été
présentée comme un facteur essentiel au développement d’un sentiment
d’appartenance et de contribution à la société, qui, à son tour, a un effet
positif sur la santé physique globale, réduit la dépression et aide à ralentir
le déclin des capacités cognitives[82]. Le fait que la stimulation cognitive pouvait, dans certains cas,
donner de meilleurs résultats que les médicaments, a également été avancé[83]. Le Partenariat canadien contre le cancer a également conçu le
projet COALITION (Connaissances et actions liées pour une meilleure
prévention), qui vise l’amélioration de la santé des collectivités[84]. Dans le même ordre d’idées, la CVAA, ou Coalition d’une vie
active pour les aîné(e)s, fait la promotion, auprès des personnes âgées, d’une
vie active comme moyen de contribuer au bien-être global. La coalition
travaille en partenariat avec des organisations nationales, provinciales et
municipales. Elle s’emploie à sensibiliser davantage la population aux
bienfaits d’une vie active, elle offre des ressources et des mesures sociales
pour inciter les aînés à adopter des habitudes de vie saines et elle établit,
soutient et fait connaître les priorités en matière de recherche[85]. Enfin, la représentante de l’Association chiropratique
canadienne a parlé de la campagne « Bon pied, bon œil » qui cible
précisément les personnes âgées et qui propose des stratégies pour prévenir les
chutes, améliorer l’équilibre et augmenter la force musculaire[86].
En plus de la responsabilité personnelle d’adopter un mode de vie
sain et actif pour prévenir et retarder l’apparition des maladies chroniques,
des témoins ont souligné la nécessité de promouvoir la prise en charge autonome
des problèmes de santé. Cette dernière a été présentée comme
un moyen de donner aux personnes âgées et à leurs fournisseurs de soins la
capacité de collaborer activement à la prise en charge de la maladie[87]. On a suggéré des campagnes de sensibilisation et de
promotion de la prise en charge autonome de la santé, pour inciter les
Canadiens et les collectivités à prendre en charge leur santé, ainsi que
l’élaboration de lignes directrices nationales portant sur la prise en charge
autonome des diverses maladies chroniques[88].
Outre le fait qu’il incombe à chacun d’adopter des
habitudes de vie saines pour prévenir ou retarder l’apparition de maladies
chroniques et d’assumer la responsabilité de ses problèmes de santé, des représentants
du secteur de l’assurance ont par ailleurs indiqué que les Canadiens devraient
eux-mêmes prendre en charge le coût de leurs soins de longue durée. Ils
ont affirmé que les Canadiens étaient responsables de planifier une telle
éventualité, soit en faisant des économies ou en souscrivant une assurance
privée au titre de soins de santé de longue durée[89].
La majorité des Canadiens âgés vivent en autonomie
chez eux et veulent y rester. Seulement 7 % des Canadiens de plus de
65 ans résident dans des établissements de santé[90], et entre 20 et 30 % des résidents en soins de longue durée
n’ont pas vraiment besoin d’être dans ces établissements. Souvent, ils y
sont parce qu’ils ne peuvent pas effectuer les activités normales de la vie
quotidienne et qu’ils ne peuvent pas bénéficier d’une aide à la vie autonome
dans un foyer pour personnes âgées[91]. En fait, sous
l’angle des soins de santé, il n’y a souvent aucune raison valable d’envoyer
les personnes âgées dans un établissement de soins de longue durée[92]. En vue de réduire le nombre de visites à l’hôpital et aux
salles d’urgence et d’offrir aux personnes âgées la possibilité de rester chez
elles et de vivre en autonomie le plus longtemps possible, des témoins ont demandé
que soient améliorés les services de soins communautaires, notamment les soins
à domicile[93].
Au sujet des soins communautaires, il faudrait renforcer le système
en améliorant l’intégration des services et l’utilisation des champs d’activité
de tous les professionnels de la santé et des fournisseurs de soins de santé à
domicile[94]. Des témoins ont
suggéré que les services de santé communautaires pourraient comprendre des
cliniques mobiles, un service après les heures normales de travail, des visites
à domicile, des programmes d’approches communautaires, des soins paramédicaux
pour les cas non urgents, la gestion des médicaments assurée par les
pharmaciens et des équipes d’infirmières mobiles pour répondre aux appels non
urgents[95]. Des témoins ont
aussi parlé des modèles scandinaves en matière de soins communautaires dont
pourrait s’inspirer le Canada[96].
Selon plusieurs témoins, la prestation de soins à domicile en tant
que composante des soins communautaires devrait être améliorée. Ils ont
mentionné que le rapport de la Commission royale sur l’avenir des soins de
santé, intitulé Guidés par nos valeurs : l’avenir des soins de santé au
Canada[97], et le rapport du Comité sénatorial spécial sur
le vieillissement, intitulé Le vieillissement de la
population, un phénomène à valoriser[98],
avaient déjà souligné que les services de soins devraient être subventionnés
par l’État. Des témoins ont fait remarquer que l’Accord de
2004 sur la santé mettait l’accent sur les soins à domicile tout en indiquant
que ces soins n’avaient pas encore été traités adéquatement[99].
Sous leur forme actuelle, les services de soins à domicile sont
plus centrés sur le rétablissement après un séjour à l’hôpital que sur la prise
en charge des maladies chroniques[100]. Le
système de soins de santé est axé sur les soins de courte durée et n’englobe ni
les soins continus, ni l’amélioration de la qualité de vie des personnes
atteintes de maladies chroniques[101].
Pour y remédier, il a été suggéré qu’il faut non
seulement assurer la participation des professionnels de la santé, mais aussi un
meilleur soutien pour les aidants naturels. Certains témoins ont salué
la mise en œuvre des récents incitatifs fédéraux, notamment le crédit d’impôt
non remboursable et le prolongement des prestations de compassion de
l’assurance-emploi versées aux personnes qui s’occupent d’un malade. D’autres ont
demandé que les aidants naturels reçoivent un soutien accru, par exemple en
ayant accès à de la formation, ce qui relève de la compétence des provinces[102].
Une telle formation pourrait les aider à utiliser le système de santé et à
traiter des questions liées aux soins fournis aux patients[103].
Comme il a été mentionné précédemment, le stress, la fatigue et l’épuisement
professionnel des aidants naturels sont de nouvelles préoccupations sur le plan
des soins aux personnes en phase terminale ou atteintes de maladies chroniques. Selon les témoins, les prestations prolongées versées aux
aidants naturels devraient couvrir le soutien sur le plan de la santé mentale
et des soins de relève, ce qui relève aussi de la compétence des provinces[104].
Compte tenu du vieillissement de la population, le besoin de lits
de soins de longue durée ira en grandissant. Comme il a déjà été mentionné,
l’optimisation des ressources des soins à domicile et en milieu communautaire
serait un moyen d’atténuer cette tendance, car elle permettrait d’assurer que
les lits sont occupés par les patients qui en ont vraiment besoin. Selon
certains témoins, une telle approche permettrait de raccourcir le séjour des
patients dans les établissements de soins de longue durée. On a d’ailleurs
constaté des améliorations dans ce domaine. En effet, les personnes âgées qui
sont transférées dans des établissements de soins de longue durée y passent la
dernière année ou les deux dernières années de leur vie[105].
Ce séjour est plus court que celui observé au cours des dernières décennies, où
la moyenne se situait alors entre huit et dix ans. Néanmoins, des témoins
ont souligné que l’optimisation des soins communautaires pourrait réduire
encore plus la durée du séjour dans les établissements et les centres
d’hébergement de soins de longue durée[106] qui, en définitive, ne devrait être que de quelques mois[107].
Toutefois, du fait que le secteur des soins de longue durée est, de tous les
secteurs des soins de santé, celui qui est le moins financé, qui intéresse le
moins les chercheurs et qui enregistre les plus bas niveaux de financement pour
la recherche, les progrès pour atteindre cet objectif sont très lents[108].
Outre les habitudes de vie malsaines qui
favorisent l’apparition de maladies chroniques, il existe un lien entre ces
maladies et le patrimoine génétique et biologique, ainsi qu’avec
l’environnement social du patient. L’environnement social comprend les
déterminants sociaux de la santé, notamment le niveau de revenu, le niveau
d’éducation, le logement et l’isolement social[109].
Des témoins ont souligné le rôle important que jouent le logement et le revenu
en tant que déterminants de la santé et le fardeau que constituent pour
beaucoup de personnes âgées les dépenses liées aux soins et au traitement des
maladies chroniques[110]. Ils ont également
fait valoir que l’investissement dans le logement social aurait une incidence
directe sur la santé[111]. Dans un contexte
plus large, des témoins ont parlé d’une étude en cours sur le lien entre la
santé des personnes âgées et les inégalités sociales. La
recherche montre que les inégalités s’accentuent avec l’âge, et que les
personnes les moins favorisées sur le plan des déterminants sociaux de la santé
sont davantage exposées à des conséquences plus néfastes que prévu pour la
santé, qu’on appelle « désavantages accumulés[112] ». Il est impossible, dans le cas des soins aux
personnes âgées atteintes d’affections chroniques, de séparer la santé des
services sociaux[113].
Plusieurs témoins ont attiré l’attention sur la nécessité de
transformer le modèle actuel de prestation des soins actifs en un modèle qui
répond mieux aux besoins des personnes souffrant de maladies chroniques,
particulièrement les personnes âgées. Des témoins ont aussi
parlé de la nécessité d’étendre la palette des soins primaires au-delà de la
simple médecine de famille[114]. Pour
effectuer un tel changement de politique, il faudrait, ont-ils expliqué, passer
de la priorité accordée aux maladies aiguës à la reconnaissance du rôle
essentiel des maladies chroniques et, par conséquent, passer des soins en
établissement à un réseau de soins de santé[115].
Ils ont décrit l’intégration d’une variété de services fournis par tout un
éventail de secteurs de la société[116]. Des témoins ont
instamment demandé l’élimination des cloisonnements qui existent dans le
secteur de la santé afin que tous les professionnels de la santé puissent
donner ensemble, dans l’intérêt des patients, les soins complexes
indispensables à la prise en charge efficace des affections chroniques[117]. Dans le contexte de l’intégration des autres secteurs, des
témoins ont mentionné les besoins particuliers des personnes âgées atteintes de
maladies chroniques et ont vivement recommandé le maintien de la prestation des
services de soins de santé qui peuvent ne pas être considérés médicalement
nécessaires à l’heure actuelle[118].
Pour certains témoins, un modèle de soins
interdisciplinaire comprenant l’intégration des services d’un éventail de
professionnels de la santé est essentiel à la prestation des soins complexes
dont ont besoin les personnes âgées atteintes d’affections chroniques. Ce
modèle conviendrait le mieux pour aider les patients à prendre en charge leurs
propres besoins en matière de santé et à maintenir une bonne qualité de vie[119]. Selon les témoignages, un tel modèle fondé sur le travail
d’équipe devrait être axé sur le patient et mis en place uniformément dans la
collectivité, les centres de soins de santé, les foyers pour personnes âgées et
les établissements de soins de longue durée[120].
Des modèles de soins intégrés pour personnes âgées ont été élaborés
et mis en œuvre au Canada et à l’étranger. Deux programmes de recherche menés
au Québec, SIPA (Services intégrés pour personnes âgées en perte
d’autonomie)[121] et PRISMA
(Programme de recherche sur l’intégration des services de maintien en
autonomie)[122] ont été portés à
l’attention du Comité. Le modèle SIPA intègre les soins en établissement et les
soins en milieu communautaire, et il a été démontré qu’il accroît la
satisfaction des patients. Le modèle PRISMA fait lui aussi appel à des équipes
interdisciplinaires et des gestionnaires de cas et vise à ce que les gens
restent plus longtemps chez eux. Sur le plan des modèles conçus spécialement
pour les soins aux malades chroniques, il existe le modèle des soins aux
malades chroniques de Wagner[123]. Selon ce modèle,
la prise en charge des maladies chroniques est une composante du système de
prestations de soins de santé et de services sociaux. Dans ce modèle, les soins
de santé sont entièrement intégrés dans les services communautaires et on
essaie de donner aux patients les moyens de prendre eux-mêmes des décisions et
d’être autonomes. Des témoins ont évoqué les soins axés sur
les patients et ont suggéré que ces soins pourraient inclure un modèle de
financement rattaché au patient[124]. Ils ont également
fait valoir que de 5 à 8 % des personnes âgées vivant dans des résidences
privées et dans les collectivités auraient besoin d’une telle approche intégrée
des soins de santé[125].
Des témoins ont suggéré qu’un système intégré efficace permettrait
aux professionnels de la santé d’exercer dans toute l’étendue de leur champ de
pratique[126]. De
plus, les services de soins paramédicaux non urgents ou communautaires pourraient
atténuer la pression qui pèse sur le système de prestation de soins de courte
durée[127]. Le
personnel paramédical pourrait être intégré dans un modèle de soins aux malades
chroniques pour fournir des soins à domicile aux personnes ayant subi une
intervention chirurgicale, surveiller les patients atteints d’affections
chroniques, donner une éducation sanitaire afin que les patients puissent se
prendre en charge plus facilement et faire des évaluations de routine. L’intégration
des pharmaciens dans un modèle de soins aux malades chroniques a été présentée
comme étant un ajout important pour contrôler les effets indésirables de
médicaments et offrir aux patients des services de gestion de la
pharmacothérapie et des renseignements sur la santé et les médicaments[128].
Plusieurs témoins ont indiqué que, pour être véritables, les soins
interdisciplinaires nécessitent l’élaboration et la mise en œuvre de systèmes
d’information, ce qui comprend les systèmes des dossiers de santé électroniques
et d’ordonnances électroniques[129]. Les
fournisseurs de soins devraient avoir accès à tous les renseignements dont ils
ont besoin relativement à un état de santé ou à un patient qu’ils traitent[130]. Ces éléments sont jugés essentiels pour améliorer l’efficacité du
système de soins de santé et la continuité des soins[131].
Le modèle multisectoriel intègre l’approche interdisciplinaire, ou
les soins axés sur le travail d’équipe, dans une approche plus vaste qui
englobe « l’ensemble de la société » et qui fait intervenir une gamme
de services non liés à la santé. Des témoins ont déclaré que beaucoup de
personnes âgées ont besoin des services sociaux pour prendre en charge leurs
problèmes de santé et vivre en autonomie. Le ménage, la préparation des repas,
le transport, l’infrastructure qui les encourage à mener une vie active ont été
donnés comme exemples. Des témoins estiment que tout changement au niveau de la
prestation des services de santé et des services sociaux ne devrait pas
pénaliser les personnes âgées à faible revenu[132].
Le Comité a appris que 5 % de la population –
principalement des personnes âgées atteintes d’affections chroniques[133] – utilise actuellement 50 % des ressources des soins de santé,
que le coût des soins à domicile est inférieur de 40 à 75 % au coût des
soins en établissement[134],
et que les soins de santé sont de meilleure qualité quand les fournisseurs de
soins sont intégrés et qu’ils exercent dans toute l’étendue de leur champ de
pratique. De plus, les recherches laissent entendre que la mise en place
d’un tel système n’exigerait aucun financement supplémentaire[135].
Le modèle actuel ne répond pas aux besoins des personnes âgées, peu importe le
nombre de fois qu’il est ou sera remanié ou ajusté. En fait, pour répondre aux
besoins de la population vieillissante du Canada, un changement fondamental des
pratiques cliniques et professionnelles s’avère nécessaire[136].
Le Comité a appris l’existence du Translating Research in Elder
Care Program (TREC), ou programme de concrétisation de la recherche dans les
soins aux aînés. Il s’agit d’une étude quinquennale de
5 millions de dollars subventionnée par les IRSC afin d’examiner la
situation des centres d’hébergement et de soins de longue durée de trois
provinces, soit l’Alberta, la Saskatchewan et le Manitoba. Le programme
TREC analyse les facteurs ayant une incidence sur l’utilisation des pratiques
exemplaires et établit de quelle manière leur utilisation influe sur les
résidents et les résultats du système. En ce qui concerne les résidents, il
s’agit de la qualité de vie quotidienne, d’une fin de vie de qualité et de la
sécurité. Quant au système, il s’agit de soutien à la famille et aux
fournisseurs de soins, de meilleures pratiques en matière de soins et de
l’établissement de stratégies visant à mobiliser les employés de première ligne
pour qu’ils améliorent leurs pratiques[137].
Des témoins ont parlé des effets nuisibles du
sodium et des gras trans dans les aliments. Il a notamment été question du Groupe d’étude sur les graisses trans, que
coprésidaient Santé Canada et la Fondation des maladies du cœur du Canada[138]. Ce groupe multiintervenant, mis sur
pied en 2005, avait pour mandat d’élaborer, à l’intention de la ministre de la
Santé, des recommandations et des stratégies pour éliminer ou réduire les gras
trans dans les aliments prêts-à-servir. Son
rapport, « TRANSformer l'approvisionnement alimentaire »,
présenté au ministre en juin 2006, formule plusieurs recommandations sur
le plan réglementaire, des incitatifs et de la recherche.
Des témoins ont indiqué que plus de 80 % des aliments et
boissons destinés aux enfants sont mauvais pour la santé et ont une teneur
élevée en gras, en sucre et en sodium ou contiennent peu d’éléments nutritifs[139]. Il a également été question de l’Initiative canadienne pour la
publicité sur les aliments et les boissons destinée aux enfants. L’initiative[140], lancée en 2007 et endossée par 19 entreprises de l’industrie alimentaire et des
boissons, vise à encourager la promotion de choix alimentaires sains et à
décourager la promotion de choix alimentaires malsains auprès des enfants de
moins de 12 ans. Des témoins ont aussi parlé de l’initiative Vive les
enfants, des Annonceurs responsables en publicité pour enfants, qui vise à
outiller les enfants pour les amener à adopter un mode de vie sain, à être plus
actifs et à mieux connaître les médias qui les entourent.
La Loi sur la protection du consommateur du Québec est la
seule loi canadienne qui interdit la publicité commerciale destinée aux enfants[141].
Le Québec se classe parmi les provinces canadiennes où la consommation de
boissons gazeuses et le taux d’obésité chez les enfants de 6 à 11 ans sont les
plus bas[142]. À ce chapitre,
certains témoins ont recommandé qu’une interdiction similaire soit adoptée[143] et qu’elle vise non
seulement la télévision, mais aussi d’autres médias comme Internet[144]. Quelques-uns étaient d’avis qu’il est nécessaire d’adopter une
approche concertée et de mettre en place des mesures intensifiées et soutenues
pour promouvoir le poids santé chez les enfants et les adolescents[145].
Plusieurs témoins ont parlé du besoin de
promouvoir l’activité physique et ont présenté quelques initiatives qu’ont
entreprises diverses organisations à cet égard. ParticipACTION a décrit son initiative Journée du sport, une
activité d’envergure nationale qui s’est tenue en septembre 2011 pour
célébrer tant les sports populaires que de compétition. L’organisation a
également parlé de son programme Sogo Active, un mouvement
national visant à accroître le niveau d’activité physique des jeunes Canadiens
de 13 à 19 ans. De son côté, l’Association
canadienne des ergothérapeutes a décrit le guide sur le mode de vie actif
qu’elle prépare actuellement en collaboration avec des chercheurs
universitaires.
Dans le but de remédier au problème de l’inactivité après l’école,
Éducation physique et santé Canada, en partenariat avec la GoodLife Kids
Foundation, a créé des ressources et des mesures de soutien pour aider les
écoles et les communautés à concevoir et à offrir des programmes parascolaires
axés sur l’activité physique. En collaboration avec des
enseignants et des professionnels du milieu, Éducation physique et santé
Canada élabore des ressources, des outils et des initiatives pour que tous les
enfants canadiens développent les connaissances, les compétences et les
habiletés nécessaires pour être actifs. Éducation physique et santé Canada travaille également à un projet
pilote sur la littératie des enfants et des adolescents par le biais de
ressources et d’outils d’évaluation à l’intention des enseignants. Finalement,
ParticipACTION, en association avec Éducation physique et santé Canada
et d’autres intervenants, a lancé Canada actif 20/20, une stratégie
nationale pour accroître l’activité physique[146].
Sur le plan des stratégies provinciales, il a été
question de l’initiative Québec en Forme, lancée en 2002 par la
Fondation Lucie et André Chagnon et le gouvernement du Québec pour promouvoir
les modes de vie sains chez les enfants défavorisés de 4 à 12 ans. Finalement, il a également été question de la Charte
de Toronto pour l’activité physique : Pour un engagement en faveur de la
santé[147]. La Charte est un appel à l’action et un
instrument de plaidoyer pour implanter durablement des conditions favorisant un
mode de vie actif pour tous. Elle vise quatre domaines fondamentaux : implanter une politique
nationale avec son plan d’action; proposer des politiques qui soutiennent
l’activité physique; revoir l’offre de services et le financement pour
prioriser l’activité physique; et établir des partenariats pour passer à
l’action.
Certains témoins se sont dits préoccupés par les blessures chez les
jeunes et ont demandé que le gouvernement fédéral joue un rôle plus actif dans
ce dossier. Même s’ils voient d’un bon œil l’édiction récente de la Loi
canadienne sur la sécurité des produits de consommation, ils ont néanmoins proposé
la création d’une stratégie nationale sur les blessures chez les enfants et les
adolescents et sur les blessures au cours de la vie[148].
Une telle stratégie reposerait sur la recherche, la sensibilisation publique et
la politique. Toutefois, les ressources et les fonds alloués à la recherche sur
les blessures sont minces par rapport au fardeau économique et social qu’elles
représentent[149]. Qui plus est, les retombées des
investissements dans des stratégies efficaces de prévention des traumatismes
pourraient être considérables, notamment sur le plan des pertes de vie évitées
et la réduction des coûts des soins de santé[150].
Selon les statistiques, les gouvernements de tous
les ordres ont consacré, en 2011-2012, 0,9 % des dépenses publiques
totales en soins de santé à la promotion de la santé, à l’activité physique et
aux sports[151]. De plus, la
hausse de 5 % du financement accordé aux initiatives de prévention
permettra au système de soins de santé de réaliser des économies à moyen terme[152]. À cet égard, selon une étude réalisée
récemment aux États-Unis, d’ici 25 ans, les investissements dans la
prévention devraient permettre de prévenir les décès prématurés attribuables
aux maladies chroniques et de réduire les coûts des soins de santé[153]. Le gouvernement
fédéral devrait adopter une vision de la promotion de la santé et de la
prévention des maladies qui incite la population et les communautés à prendre
part à des activités de vie saine et qui fait preuve de leadership[154].
La persuasion technologique sur les appareils mobiles constitue une
nouvelle approche prometteuse de promotion de la santé et de prévention des
maladies[155].
Le but est de concevoir une technologie pour modifier les attitudes et les
comportements humains de manière non coercitive et sans chercher à tromper. Une
telle technologie pourrait joindre une vaste proportion de la population, si
l’on se fie au taux de pénétration des appareils mobiles au Canada, qui
atteignait environ 70 % en 2010[156].
Plusieurs témoins ont reconnu que la prestation de
services de santé et de services sociaux relève essentiellement des provinces
et des territoires. Toutefois, ils ont formulé des suggestions quant aux
mesures que pourrait prendre le gouvernement fédéral relativement à la
promotion de la santé, à la prévention des maladies chroniques et à la prise en
charge des maladies. Ces rôles sont décrits ci-dessous.
Selon certains témoins, la Loi canadienne sur
la santé est trop restrictive[157]. À leur avis, il ne
suffit pas de se limiter aux soins de courte durée, et il faut
considérer les soins à domicile comme étant médicalement nécessaires au vu de
la Loi[158]. De plus, il
faudrait une loi sur la continuité des soins, une Loi sur les soins de
longue durée, qui viserait les soins en établissement et en milieu
communautaire et qui comporterait des principes similaires à ceux de la Loi
canadienne sur la santé[‡][159]. L’affectation de ressources aux initiatives de soins à domicile permettrait aux Canadiens de recevoir des soins
à domicile, ce qui de ce fait, réduirait la dépendance aux services de soins de
courte durée coûteux[160]. Un modèle
subventionné par l’État et prescrit par la législation fédérale pourrait donner
de meilleurs résultats dans le domaine de la santé qu’un modèle du secteur
privé à but lucratif ou qu’un modèle hybride subventionné par l’État sans but
lucratif/privé et à prestation de services de santé à but lucratif[161].
Il serait possible de mieux encourager l’adoption
d’habitudes alimentaires saines si la réglementation sur l’étiquetage alimentaire
était modifiée. À ce chapitre, des témoins ont indiqué qu’il pourrait s’avérer
nécessaire d’apposer l’étiquetage nutritionnel sur le devant de l’emballage. Ce
type d’étiquetage a été décrit comme un moyen d’aider les Canadiens à faire des
choix éclairés. L’actuel « tableau de
la valeur nutritive » affiché sur les aliments préemballés a été décrit
comme inutilement compliqué. Il serait possible de présenter des données
concises sur le devant de l’emballage, comme c’est déjà le cas ailleurs. Un tel
étiquetage permettrait aux consommateurs de rapidement consulter l’information
nutritionnelle, pour savoir par exemple si le contenu en sel ou en gras est
considéré comme faible, moyen ou élevé[162].
Plusieurs témoins ont attiré l’attention sur les discussions qui se
tiendront concernant le renouvellement de l’Accord de 2014 sur la santé en tant
que stratégie de prévention des maladies chroniques liées à l’âge. Certains
témoins ont suggéré que le renouvellement de l’Accord est une occasion pour le
gouvernement fédéral d’investir dans les transferts relatifs à la santé[163],
particulièrement dans des secteurs prioritaires clés tels que les soins à
domicile, l’assurance-médicaments et la continuité des soins[164]. Bien que des témoins aient suggéré d’utiliser l’Accord pour
promouvoir la responsabilité, les normes pancanadiennes et la coordination
plurigouvernementale, ils ont aussi décrit comment il pourrait atténuer les
répercussions des maladies chroniques liées au vieillissement. Par exemple,
l’Accord pourrait ouvrir la voie à diverses réformes telles que : des
services de santé intégrés qui utilisent différentes catégories de fournisseurs
de soins[165]; des avancées
technologiques comme les dossiers de santé électroniques, afin de favoriser la
collaboration entre les professionnels de la santé[166];
une réforme des soins primaires visant l’intégration des services de soins à
domicile et en milieu communautaire[167]; des stratégies
coordonnées de prévention des maladies et de promotion de la santé à l’échelle
nationale[168]; et un fonds de
stimulation des pratiques exemplaires, de l’innovation et de la recherche[169].
Des témoins ont soutenu que ces changements rendraient le présent
système de santé plus attentif aux besoins changeants des Canadiens et qu’ils
amélioreraient l’utilisation des services de santé disponibles[170].
En conséquence, le système de santé deviendrait plus responsable, plus efficace
et plus rentable[171].
Le Comité a entendu les témoignages de plusieurs
représentants du milieu de la recherche. Ces témoignages ont fait état des recherches
importantes en cours ainsi que des lacunes qui doivent être comblées. Il a
notamment été question de l’Institut du vieillissement des IRSC qui a adopté
une approche intégrée parce que les décisions concernant les politiques
relatives à la restructuration de la prestation des services de santé doivent
être fondées sur des données probantes[172].
On a aussi parlé d’un certain nombre de domaines qui nécessitent un peu plus de
recherches, par exemple, les stratégies visant à prolonger la durée de vie en
autonomie des personnes âgées[173], la prestation de
soins de longue durée[174], l’utilisation des
professionnels de la santé dans toute l’étendue de leur champ de pratique[175] et l’intégration des services de santé et des services sociaux pour les
personnes âgées[176]. Au chapitre de la
promotion de la santé et de la prévention des maladies, des témoins ont parlé
du besoin d’intensifier la recherche sur la façon d’inciter les gens à adopter
des habitudes de vie plus saines[177].
Plusieurs témoins ont décrit les stratégies
nationales visant expressément certaines maladies et qui ont été mises en
œuvre, telles que la Stratégie canadienne de prévention des accidents
cérébrovasculaires[178], le Cadre de
travail national sur la santé pulmonaire[179],
la Stratégie canadienne de lutte contre le cancer lancée par le biais du
Partenariat canadien contre le cancer[180],
la Stratégie canadienne sur le diabète[181] et la Stratégie canadienne de santé cardiovasculaire[182].
La mise en œuvre de la Stratégie nationale de lutte contre la douleur devrait
être annoncée bientôt[183]. Quant à la
Stratégie nationale en matière de santé mentale[184] (y compris une stratégie de prévention des affections neurologiques), elle a
été mise en œuvre. Bien que plusieurs de ces stratégies soient
financées dans le cadre de l’approche collaborative des gouvernements F/T/P en
matière de maladies chroniques et de modes de vie sains, des témoins ont
souligné que, pour les personnes atteintes de multiples affections chroniques,
particulièrement les personnes âgées, la prise en charge des maladies
chroniques est plus complexe que la somme de ses composantes. Ainsi, il faudrait élaborer une stratégie nationale de
promotion du vieillissement en bonne santé. Une telle
stratégie devrait comporter des mesures visant à : favoriser la promotion
de la santé et la détection précoce des maladies; promouvoir les stratégies de
promotion de la santé et de prévention des maladies, notamment par l’adoption
d’un mode de vie sain; soutenir les soignants professionnels et non
professionnels; aborder la question des déterminants de la santé; améliorer
l’accès aux services de santé, ce qui comprend les soins en fin de vie et les
soins continus appropriés; et enfin, œuvrer pour que les gens restent plus
longtemps chez eux[185].
Pour ce qui est de l’adoption d’un mode de vie
sain, plusieurs témoins ont suggéré des secteurs où le gouvernement fédéral
pourrait accroître sa participation, notamment l’élaboration et la mise en
œuvre d’une stratégie alimentaire et nutritionnelle pour un approvisionnement
en vivres sains et sans danger, ce qui comprend la sécurité des aliments pour tous
les Canadiens[186].
Au cours des audiences, il a été question de la transmission du
savoir, soit la mise en pratique des résultats des recherches. Plusieurs
témoins ont dit que le gouvernement fédéral se doit de faciliter la
transmission du savoir par la mise en place d’un mécanisme national d’échange
de renseignements, notamment des résultats de recherche, et de mise en commun
des pratiques exemplaires et des innovations des différentes sphères de
compétence[187]. L’établissement
de partenariats et de stratégies nationales a beaucoup aidé à promouvoir la
mise en commun des pratiques exemplaires[188].
Des témoins ont évoqué plusieurs projets régionaux réussis et ont suggéré la
mise en place d’un mécanisme solide pour faire connaître ces réussites dans
tout le Canada[189]. Les provinces
éprouvent des difficultés à modifier les politiques requises pour inclure les
soins aux malades chroniques dans le système de soins de santé, mais un
meilleur échange de renseignements et des pratiques exemplaires faciliteraient
un tel changement de politiques. En outre, l’Institut du vieillissement des
IRSC a lancé récemment un programme appelé « Meilleurs cerveaux ». Ce
programme permet à des chercheurs et à des décideurs de présenter à des responsables
politiques des résultats de recherche pertinents[190].
Enfin, la création d’un centre d’innovation sur le vieillissement a été décrite
comme étant un moyen de faciliter l’échange de renseignements et la mise en
commun de pratiques exemplaires, non seulement entre les régions du Canada,
mais aussi avec d’autres pays[191].
Le gouvernement fédéral est responsable de la prestation des
services de santé de certains groupes qui ont été cités par plusieurs témoins. Selon ces derniers, le gouvernement devrait montrer l’exemple et
apporter les changements nécessaires pour passer du modèle actuel de soins de
courte durée à un modèle qui répond mieux aux besoins des personnes atteintes
d’affections chroniques[192]. Par exemple, les anciens
combattants, les Autochtones qui vivent dans les réserves, les membres de la
Gendarmerie royale du Canada et les membres des Forces canadiennes
devraient recevoir le continuum de soins complets, y compris la prestation de
services intégrés, dans le but de prévenir davantage les affections chroniques
et de mieux les prendre en charge[193].
Le Comité a entendu que les Autochtones sont
beaucoup plus susceptibles d’être atteints du diabète, de maladies
respiratoires chroniques et d’autres affections, et qu’il serait utile
d’adopter une approche intégrée de prestation des services de soins de santé[194]. Cependant, cette approche doit être adaptée à la population et tenir
compte des différences culturelles[195].
À propos des groupes relevant du gouvernement fédéral, il a été
suggéré que ce dernier augmente et maintienne ses investissements liés aux
modes de vie sains pour les collectivités des Premières nations, en accordant
une attention spéciale aux collectivités du Nord et en région éloignée parce
qu’elles sont les plus touchées par la maladie. De plus, il a été question du
besoin de créer un mécanisme coordonné pour rassembler, évaluer et analyser les
données concrètes émergeant des initiatives d’inspiration communautaire menées
dans les collectivités autochtones[196].
Le Comité convient que la promotion de la santé devrait débuter tôt
dans la vie et se poursuivre toute la vie durant afin de réduire le risque de
maladies chroniques à long terme. Le Comité
comprend aussi que, même à un âge avancé, il est possible d’améliorer sa santé
en troquant de vieilles habitudes contre des choix de vie plus sains.
Toutefois, changer ses habitudes n’est pas une chose simple. De l’avis du
Comité, une approche à volets multiples est nécessaire. Certes, le gouvernement
fédéral a son rôle à jouer, mais la contribution des autres paliers de gouvernement,
des professionnels de la santé, des organisations pour la vie active, des
industries alimentaire et de la condition physique et des particuliers est tout
aussi importante.
Le Comité reconnaît que, même si un mode de vie sain implique
nécessairement des choix dont nous seuls avons la responsabilité, les
circonstances personnelles peuvent souvent nous empêcher de faire ces bons
choix. C’est pourquoi le Comité applaudit l’appui de l’ASPC à des projets qui
visent à réduire les inégalités en matière de santé découlant d’un désavantage
sur le plan des déterminants sociaux de la santé.
Le Comité comprend les préoccupations liées aux besoins en matière
de santé des personnes atteintes d’une maladie chronique, en particulier les
personnes âgées. Le Comité s’inquiète de la prévalence des
problèmes de santé mentale et appuie les efforts de la Commission de la santé
mentale du Canada. Le Comité est impatient d’examiner plus en détail la toute
nouvelle Stratégie en matière de santé mentale et encourage les provinces et
les territoires à collaborer étroitement avec la Commission de la santé mentale
pour mettre en œuvre la Stratégie.
Le Comité convient que la prise en charge des personnes âgées
atteintes d’une ou de plusieurs maladies chroniques est un exercice parfois
complexe qui, pour être optimal, peut nécessiter l’adoption d’une approche
interdisciplinaire. Une telle approche comprend la réforme de la prestation des
soins primaires aux personnes atteintes d’une maladie chronique, en particulier
les personnes âgées. Cette réforme nécessite la création d’équipes de soins et
l’élargissement du champ d’activité de certains professionnels de la santé en
vue d’améliorer l’utilisation des ressources existantes. Souvent, l’approche
des soins qui met l’ensemble de la société à contribution va au-delà de la
définition habituelle de « services de soins de santé » pour inclure
les tâches ménagères, l’aide à la préparation des repas, le transport et la
transformation de l’infrastructure communautaire de façon à favoriser et à
faciliter la vie active. Les aidants naturels jouent un rôle important à cet
égard, et le Comité appuie les demandes d’appuis supplémentaires en matière de
formation, d’éducation, de soutien en santé mentale et de soins de répit.
Bien que le Comité appuie ces approches, il tient en revanche à
souligner que le gouvernement fédéral devrait se concentrer sur son rôle de
mobilisateur et de collaborateur afin de faciliter et d’encourager les
provinces et territoires à adopter des pratiques exemplaires dans la mesure du
possible. À cet égard, le Comité se réjouit de la création récente du groupe de
travail sur l’innovation en soins de santé, un projet provincial et
territorial. Le Comité convient que le gouvernement fédéral
joue un rôle clé pour inciter au partage des renseignements et à la mise en
commun des pratiques exemplaires. Au sujet des groupes relevant du gouvernement
fédéral en matière de soins de santé, le Comité soutient les préoccupations des
témoins qui ont suggéré la mise en œuvre d’une approche intégrée de prestation
des soins de santé.
Par conséquent, le Comité recommande :
Que la ministre de la Santé continue d’engager un
dialogue avec les ministres de la Santé, de la
Promotion de la santé et du Mode de vie sain des
provinces et des territoires sur la nécessité d’adapter les soins de santé en
fonction d’un modèle davantage interdisciplinaire et multisectoriel;
Que la ministre de la Santé continue de tendre la
main aux provinces et territoires pour mettre en commun les pratiques
exemplaires sur :
- le champ d’activité des professionnels de la santé;
- le recours possible à des équipes soignantes;
- les approches de soins multisectorielles qui incluent non seulement les services de santé classiques, mais aussi les services sociaux nécessaires pour maintenir une bonne qualité de vie et prendre en charge les conditions de santé;
Que le gouvernement du Canada continue de recourir
à des approches intégrées et multisectorielles de soins lorsque cela s’avère
nécessaire et pertinent.
Une grande attention a été apportée aux travaux de recherche menés
actuellement au Canada concernant la promotion de la santé, la prévention des
maladies et la prise en charge des maladies chroniques. Même si de nombreux
témoins se sont réjouis du volume de travail entrepris à l’Institut canadien
d’information sur la santé et aux IRSC, d’autres ont parlé des lacunes qu’il
reste à combler et ont demandé que le gouvernement fédéral se charge de
remédier à la situation. À ce chapitre, le Comité est heureux
de constater les efforts que déploient les IRSC pour cibler les priorités en
matière de recherche stratégique. De plus, il félicite les IRSC d’encourager la
recherche qui améliorera les soins axés sur le
patient, déterminera les pressions que le vieillissement de la population et
les taux en croissance de maladies chroniques exercent sur le système de soins
de santé, et abordera la question de l’importance de tirer parti des ressources
au moyen de la collaboration avec d’autres ministères, organismes
gouvernementaux et organisations sans but lucratif. Le Comité suggère
que la recherche s’étende également aux ressources humaines de la santé, compte
tenu de l’importance, soulignée par certains témoins, d’augmenter le nombre de
personnes formées dans certaines spécialités. Finalement, des témoins ont parlé
de l’importance de rendre concrets les résultats de recherche. Le Comité convient que les résultats de recherche doivent être
accessibles et s’avérer utiles aux intervenants.
Par conséquent, le Comité recommande :
Que les Instituts de recherche en santé du Canada
continuent d’appuyer la recherche sur les maladies chroniques;
Que Santé Canada continue à collaborer avec
l’industrie compétente afin de l’inciter à offrir volontairement des choix
santé aux Canadiens;
Que Santé Canada continue à faire la promotion de
choix de modes de vie sains pour tous les Canadiens afin de rendre ces choix
plus faciles.
Au cours de l’étude du Comité, divers témoins ont
déclaré que les modes de vie sains, même lorsqu’ils sont adoptés tardivement, ont
une incidence fortement positive sur la santé et peuvent contribuer à réduire
la prévalence des maladies chroniques. Afin d’inciter les Canadiens à améliorer
leur état de santé, des fonctionnaires et des intervenants nationaux et
régionaux ont présenté des projets visant à appuyer les modes de vie sains, et
à en faire la promotion, ainsi qu’à réduire le nombre de personnes atteintes de
maladies chroniques. La réduction du fardeau de ces maladies grâce à
l’adoption d’un mode de vie sain passe d’abord par la participation de la
population. Cependant, les initiatives des gouvernements sont essentielles à la
promotion de saines habitudes. En outre, des représentants des
IRSC et des chercheurs universitaires ont fait part de leurs conclusions sur
les moyens à prendre pour alléger ce fardeau et pour aider les gens à adopter
des habitudes plus saines. Le Comité soutient ceux qui mènent des recherches
sur les maladies chroniques et la promotion de la santé et attend avec
impatience d’en voir les effets concrets sur l’amélioration des soins de santé. Enfin, le Comité est sûr que le gouvernement fédéral continuera de faire
preuve de leadership et incitera les provinces et territoires à optimaliser
leur approche de la promotion de modes de vie sains et de la gestion des soins
des Canadiens atteints de maladies chroniques.