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FINA Rapport du Comité

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CHAPITRE 3 – EFFETS GÉNÉRAUX DU RECUL DES COURS DU PÉTROLE SUR L’ÉCONOMIE MONDIALE ET SUR L’ÉCONOMIE CANADIENNE

A. Contexte

Selon les données sur les prix du disponible de la Energy Information Administration américaine, les cours mondiaux du brut ont commencé à dégringoler en juin 2014. En effet, comme l’illustre la figure 3, le WTI – pétrole léger non sulfuré de référence américain – s’échangeait 50 $US le baril en février 2015, contre 105 $US en juin 2014. Pour la même période, et comme l’illustre aussi la figure 3, les données de la Banque du Canada montrent que le cours du dollar canadien a fléchi par rapport au dollar américain. En juin 2014, en moyenne, un dollar canadien équivalait à 0,924 $US; en février 2015, il ne valait plus en moyenne que 0,80 $US, en recul de 13,4 %.

Figure 3 – Prix du pétrole brut et taux de change du dollar canadien par rapport au dollar américain, mars 2014 – février 2015 (données mensuelles)

Figure 3 – Prix du pétrole brut
          et taux de change du dollar canadien par rapport au dollar américain, mars 2014 –
          février 2015 (données mensuelles)

Nota : Les prix du pétrole brut sont les prix du disponible du West Texas Intermediate (WTI) franco à bord (FAB) à Cushing, en Oklahoma.

Sources : Figure préparée à l’aide de renseignements obtenus auprès de : U.S. Energy Information Administration, Petroleum & Other Liquids, Spot Prices, Data, et de la Banque du Canada, Moyenne mensuelle de taux de change — dix dernières années, à la clôture des cours.

Le Canada étant un grand producteur et un exportateur net de pétrole, ce sont les provinces productrices, notamment l’Alberta, la Saskatchewan et Terre‑Neuve‑et‑Labrador, qui se ressentent le plus du repli des cours mondiaux du pétrole, car les intentions de forage, d’investissement et d’embauche y sont en recul. Sont également touchées les entreprises qui fournissent des biens et services au secteur pétrolier, dont certaines se trouvent dans des provinces non productrices de pétrole.

En janvier 2015, la Banque du Canada a indiqué dans un rapport que, au cours de l’année à venir, les entreprises à vocation exportatrice et les fabricants pourraient rebondir; en effet, la majorité des entreprises des secteurs non pétroliers s’attendaient à devoir embaucher et prévoyaient de nouveaux investissements dans la production manufacturière.

Selon un rapport de janvier 2015 du Conference Board du Canada, le produit intérieur brut (PIB) réel du Canada devrait perdre 0,4 % en 2015 sous l’effet du recul des cours du pétrole. La figure 4 fournit une ventilation des réductions ou des augmentations attendues selon les provinces.

Figure 4 – Incidence en points de pourcentage du repli de 40 % des cours du pétrole brut sur le produit intérieur brut réel en 2015, par province

Figure 4 – Incidence en points
          de pourcentage du repli de 40 % des cours 
          du pétrole brut sur le produit intérieur brut réel en 2015, par province

Source : Conference Board du Canada, Remaniement régional : l'impact de la baisse des prix du pétrole sur l'économie canadienne, janvier 2015.

B. Opinion des témoins

Des témoins ont expliqué au Comité l’effet des baisses des prix du pétrole sur l’économie canadienne. RBC Groupe financier et l’Institut C.D. Howe ont déclaré que, dans l’immédiat, l’effet global sera négatif, mais qu’à moyen et à long terme les conséquences devraient être positives. RBC Groupe financier a ajouté que, à court terme, le PIB en termes nominaux reculera et que les sociétés engrangeront moins de profits; à moyen et à long terme, les exportations des secteurs autres que pétrolier et gazier, comme celles du secteur manufacturier, ainsi que les investissements en capitaux dans ces secteurs, augmenteront.

Comme Unifor et Manufacturiers et exportateurs du Canada, la Banque du Canada a affirmé que, si l’économie canadienne est en moins bonne posture de manière générale, le repli des prix du pétrole accroîtra le revenu disponible des ménages, toutes choses étant égales par ailleurs; pour faire cette affirmation, la Banque a tenu compte de la diminution de l’ensemble des revenus réels des entreprises et des effets sur la chaîne d’approvisionnement dans tous les secteurs liés à l’extraction pétrolière et gazière. Toujours de l’avis de la Banque du Canada, une baisse des prix de l’essence au détail représentera des économies pour les consommateurs et les entreprises exportatrices non liées au pétrole. Par ailleurs, le recul des coûts de fonctionnement des entreprises qui utilisent le pétrole comme intrant se traduira par une hausse tant de la production que des investissements et des profits. Selon l’Association des fabricants de pièces d’automobile du Canada, toutes choses étant égales par ailleurs, un fléchissement du taux de change canadien induit par une baisse du prix du pétrole renchérit les importations, comme le matériel et l’outillage; or les producteurs canadiens achètent souvent ces équipements fabriqués aux États-Unis.

La Banque du Canada, le Congrès du travail du Canada et Manufacturiers et exportateurs du Canada ont fait savoir que, globalement, le plongeon du cours du pétrole entre juin 2014 et février 2015 aura des effets négatifs sur l’économie canadienne pendant les six premiers mois de 2015. La Banque du Canada a souligné que, même si le PIB réel a progressé de 2,4 % au quatrième trimestre de 2014, les revenus réels des entreprises canadiennes ont chuté en raison d’une perte de pouvoir d’achat, car le repli des cours mondiaux du pétrole a diminué la valeur des exportations de pétrole canadien. La Banque estime aussi que les investissements des entreprises dans le secteur pétrolier et gazier ont représenté un tiers environ de tous les investissements canadiens dans des entreprises du pays et devraient chuter de quelque 30 % en 2015. Philip Cross, qui a témoigné à titre personnel, a exprimé une opinion similaire dans son mémoire au Comité.

La Banque du Canada, Manufacturiers et exportateurs du Canada et l’Association canadienne des producteurs d'acier ont expliqué que l’activité économique dans certains secteurs, surtout la fabrication et la construction, diminuera dans tout le pays en raison des chaînes d’approvisionnement, car le secteur des sables bitumineux albertain achète près d’un tiers de ses biens et services auprès d’autres provinces. Encana Corporation a déclaré que 2 300 fournisseurs au pays appuient le secteur du pétrole et du gaz, et que ces chocs de prix pétroliers se ressentent immédiatement dans toute la chaîne d’approvisionnement. Manufacturiers et exportateurs du Canada a estimé que, si le repli des cours du pétrole se maintient, la production manufacturière perdra environ 12 milliards de dollars par année à partir de 2015.

S’appuyant sur un sondage récent auprès de ses membres, l’Association canadienne des automobilistes a noté que la perception populaire de l’impact du recul des prix du pétrole sur l’économie canadienne diffère selon le lieu. Par exemple, selon elle, deux tiers des répondants albertains estiment que la baisse des prix du pétrole aura un effet négatif significatif sur l’économie canadienne à plus long terme; ailleurs au Canada, 40 % au plus de la population était de cet avis. Par ailleurs, selon elle, ce sondage a permis de constater que, même si divers groupes de prévisionnistes s’attendent à ce que les prix du pétrole demeurent plus faibles jusqu’en 2016, la plupart des Canadiens sondés prévoient un redressement d’ici l’automne 2015; c’est ce que Wade Locke explique dans son mémoire au Comité. L’Association canadienne des automobilistes estime que l’écart de perception entre les groupes de prévisionnistes et la population concernant les effets des prix du pétrole sur la tenue de l’économie canadienne pourrait se rétrécir avec le temps, si le niveau des prix du pétrole se maintient en 2015.

La Banque du Canada et Unifor ont jugé que la baisse des cours du pétrole résulte essentiellement d’une offre mondiale abondante, qui stimule l’activité économique aux États-Unis. Plus précisément, la Banque a déclaré que le recul des prix du pétrole depuis 2014 augmentera le PIB américain d’environ un point de pourcentage d’ici la fin de 2016. Pour elle, à plus long terme, la valeur relativement faible du dollar canadien accroîtra la compétitivité de la production au Canada, surtout dans le secteur manufacturier. Elle a de plus mentionné que, en raison de la reprise économique aux États-Unis, le secteur manufacturier canadien devrait s’attendre à de nouvelles hausses des exportations vers ce pays.

S’agissant de l’incidence de la baisse des prix du pétrole sur les revenus de l’État, Philip Cross a mentionné que le gouvernement fédéral n’aura pas à réévaluer sa politique budgétaire en raison de cette baisse, car son incidence sera minime. Wade Locke a souligné que la diminution des revenus des provinces jouera sur les paiements de péréquation à venir, lesquels seront, notamment moindres pour les provinces dont l’économie est relativement plus faible.

La municipalité régionale de Wood Buffalo a indiqué que le déclin des cours du pétrole n’avait pas encore touché les activités quotidiennes des résidents de la région, où se trouve Fort McMurray, même si ceux-ci comptaient limiter leurs dépenses futures. La municipalité a également mentionné qu’en janvier 2015 l’utilisation des banques alimentaires de la région était supérieure de 75 % à ce qu’elle était un an plus tôt, et devrait augmenter encore en février 2015.