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LANG Rapport du Comité

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L’IMMIGRATION : UN OUTIL POUR ASSURER LA VITALITÉ ET L’ÉPANOUISSEMENT DES COMMUNAUTÉS FRANCOPHONES EN SITUATION MINORITAIRE

1.  Introduction

Le 24 février 2015, le Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes (ci-après « le Comité ») a entrepris une étude sur les programmes du gouvernement du Canada visant à favoriser l’immigration francophone dans les communautés francophones en situation minoritaire (CFSM).

L’objectif de cette étude était de mieux comprendre le rôle que joue l’immigration francophone dans l’épanouissement et le développement des CFSM et d’examiner l’impact des programmes fédéraux visant à recruter, accueillir et intégrer les immigrants francophones au sein des CFSM.

La croissance démographique des CFSM est cruciale à plusieurs égards, notamment pour la vitalité des communautés, afin de bâtir une économie croissante et de maintenir certains droits, tels que l’accès à des services gouvernementaux dans les deux langues officielles.

Comme plusieurs communautés au Canada, les CFSM font face à un exode rural et un bas taux de natalité et ont besoin d’immigrants qui ont les compétences nécessaires pour remplir les emplois disponibles et contribuer à leur vitalité.

 Le Conseil de la coopération de la Saskatchewan (CCS) a affirmé que leur « situation démographique nette continue à se détériorer puisqu'il n'y a pas suffisamment de nouveaux venus[1] ». Or, l’immigration francophone dans les CFSM a un impact direct sur la vitalité des CFSM. L’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO) a affirmé que « la survie et la vitalité de notre communauté dépendent beaucoup de l'arrivée d'immigrants francophones[2] ».

Le gouvernement fédéral s’est fixé une cible de 4 % du nombre total d’immigrants économiques francophones s’établissant à l’extérieur du Québec d’ici 2018.

2.  L’immigration comme source de vitalité pour les communautés francophones en situation minoritaire

Selon Gilles LeVasseur, professeur à l’École de gestion Telfer à l’Université d’Ottawa, la dualité linguistique canadienne repose, entre autres, sur « une croissance démographique permettant un équilibre entre les deux grandes communautés linguistiques du Canada[3] ». L’augmentation du poids démographique des CFSM et l’atteinte d’un équilibre entre les groupes linguistiques sont au cœur des stratégies en immigration des CFSM.

La dualité linguistique canadienne repose, entre autres, sur la valorisation de l’aspect économique des langues officielles. Selon Gilles LeVasseur, c’est ce qui permet « aux Canadiens et aux nouveaux arrivants de s’identifier pleinement à la dualité linguistique et de développer des réactions identitaires positives envers les deux communautés de langue officielle[4] ». 

3.  La gestion du dossier de l’immigration

3.1.  Les programmes du gouvernement du Canada

Au printemps 2013, le gouvernement du Canada a lancé la Feuille de route pour les langues officielles du Canada 2013-2018 : éducation, immigration, communautés[5]. Comme son nom l’indique, l’immigration est l’une des trois priorités qui ont été retenues pour les cinq prochaines années dans le domaine des langues officielles. De fait, le gouvernement du Canada s’est engagé à verser une somme totale de 149,5 millions de dollars pour financer deux activités de programmes reliés à l’immigration : la formation linguistique pour les immigrants économiques et le Programme d’établissement et d’intégration des nouveaux arrivants.

Dans le cadre de la Feuille de route 2013-2018, le programme de formation linguistique bénéficie d’une affectation totale de 120 000 000 $. Durant la première année de la Feuille de route, soit 2013-2014, « dans les provinces et territoires où CIC [Citoyenneté et Immigration Canada] gère les services d’établissement, 29 208 immigrants économiques (clients uniques) se sont inscrits à des cours de langue […][6] ». Cela représente un investissement de 24 000 000 $[7].

L’accès à des programmes de formation linguistique est important pour l’intégration des immigrants et leur pleine participation à la société canadienne. Dans le cadre de ses programmes réguliers, Citoyenneté et Immigration Canada (CIC) finance les Cours de langue pour les immigrants (CLIC) et le programme Language Instruction for Newcomers to Canada (LINC). Il s’agit de cours gratuits de langue française et de langue anglaise de base offerts aux résidents permanents.

3.1.1.  Le Programme d’établissement et d’intégration des nouveaux arrivants

La Feuille de route 2013-2018 attribue 29 398 470 $[8] pour l’établissement et l’intégration des immigrants dans les communautés de langue officielle en situation minoritaire (CLOSM). En juin 2013, l’hon. Jason Kenney a affirmé que :

En fait, depuis 2006, notre gouvernement a triplé les fonds octroyés aux services d’établissement, les faisant passer de 200 millions à 600 millions de dollars par année à l’extérieur du Québec. Les fonds pour le Québec sont calculés selon une formule différente.
Au cours des dernières années, nous avons, en particulier, grandement augmenté le nombre de services offerts dans les communautés francophones en situation minoritaire. De 2009 à 2012, nous avons augmenté de près de 70 % le nombre de points de service pour les nouveaux arrivants d’expression française partout au Canada, soit d’un peu plus de 100 à environ 170. On en trouve maintenant dans 24 villes partout au Canada à l’extérieur du Québec[9].

Lors de sa comparution devant le Comité dans le cadre de cette étude, le ministre de CIC, Chris Alexander, a également commenté la Feuille de route 2013-2018 :

En 2013, nous avons dévoilé une nouvelle Feuille de route qui définit l'immigration comme l'un des trois piliers permettant d'assurer la vitalité future des langues officielles au Canada. Dans le cadre de cette Feuille de route, le gouvernement investira, au cours de cette année et des cinq années à venir, presque 150 millions de dollars dans les initiatives liées aux langues officielles et à l'immigration. Un objectif essentiel consiste à faire valoir les avantages de la maîtrise des langues officielles du Canada et à investir dans la formation linguistique des nouveaux arrivants qui s'établissent dans les communautés de langue officielle en situation minoritaire[10].

En dépit du fait que les cibles en matière d’immigration francophone n’ont pas encore été atteintes, le ministre Alexander a souligné que CIC fournit présentement les outils pour y parvenir : « On a maintenant les outils pour y arriver : Entrée express, les réseaux d'immigration francophone, une stratégie au titre de la Feuille de route et la volonté politique, qui est peut-être l'élément le plus important. Depuis 2006, on dépasse les résultats antérieurs et on va continuer à le faire[11]. »

3.1.2.  Le programme Entrée express

Le 1er janvier 2015, CIC a lancé le système Entrée express pour le recrutement d’immigrants économiques. Le ministre Alexander a décrit le nouveau système de gestion des demandes de résidence permanente reliées aux différents programmes d’immigration économique comme pouvant « contribuer de façon importante à la vitalité économique des communautés francophones en situation minoritaire à l'extérieur du Québec[12] ».

Le ministre a également affirmé qu’Entrée express constitue un système qui permettra d’atteindre les cibles en matière d’immigration francophone dans les CFSM en raison, notamment, des divers avantages que procurent le système, « c'est plus rapide et c'est en ligne. C'est une façon de faire du recrutement[13]. »

Selon le ministre Alexander, le système Entrée express se démarque par son efficacité. À l’aide du système, le traitement des candidatures est réalisé en moins de six mois et des visas ont déjà été délivrés pour certaines candidatures soumises au début du mois de février 2015[14]. Toutefois, il est à noter que plusieurs témoins ont spécifié que les retombées du système en termes d’immigration francophone demeuraient encore inconnues puisqu’il s’agit d’un programme nouveau.

Cela étant dit, selon plusieurs témoins, le système contribuera à l’immigration francophone dans les CFSM seulement si le gouvernement fédéral y ajoute des mesures visant spécifiquement les francophones. C’est pourquoi la Fédération des francophones de Terre-Neuve et du Labrador (FFTNL) a suggéré « que le gouvernement ajoute une lentille francophone au système Entrée express, afin de nous aider à combler au moins partiellement notre désavantage en matière d'attraction des nouveaux arrivants[15] ». L’immigration francophone étant plus difficile, le Conseil économique du Nouveau‑Brunswick (CENB) a indiqué que « des mesures spéciales doivent être mises en place pour faciliter, encourager et inciter l'immigration francophone[16] ».

C’est la raison pour laquelle le directeur municipal de la Ville de Moncton a affirmé que « [p]our ce qui est du système Entrée express, il serait avantageux d'accorder des points supplémentaires aux immigrants francophones qui veulent s'installer dans des collectivités de langue minoritaire au Canada[17] ». De même, la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) a proposé « qu’un bon nombre de points additionnels soient accordés aux francophones qui s'établissent dans une communauté[18] » dans le cadre du système Entrée express.

Les témoins ont également soulevé des préoccupations sur l’importance que le système accorde à la connaissance de la langue française. Le système fonctionne de la manière suivante : on crée d’abord un profil dans le système Entrée express et les candidatures se retrouvent dans un bassin. Celles-ci sont classées à l’aide d’un système de pointage tenant compte des capacités linguistiques, de l’éducation, des compétences professionnelles et de l’âge des candidats. Par la suite, une invitation à soumettre sa candidature pour l’obtention du statut de résident permanent est envoyée aux candidats qui ont obtenu le plus grand nombre de points[19]. Le pointage obtenu par les candidats est calculé sur un total de 1 200 points[20]. Le candidat qui maîtrise une première langue officielle peut se mériter jusqu’à 136 points et « [l]a connaissance de la deuxième langue, soit le français ou l'anglais, permet d'obtenir 24 points de plus[21] ».

Le ministre de CIC a fourni des données quant aux francophones qui se sont qualifiés dans le système Entrée express. Le premier bassin de candidats du système Entrée express était composé de 22 398 personnes. Parmi celles-ci, 200 ont réussi des résultats d’examen en français. Le deuxième bassin comportait 2,5 % de francophones. Selon le ministre, la deuxième ronde est composée de plus de francophones car :

[l]es premières rondes d'invitation touchaient surtout ceux et celles qui avaient des avis relatifs au marché du travail, qui travaillaient surtout dans l'Ouest et qui faisaient la transition d'un statut de travailleurs temporaires à un statut de résidents permanents. Pour la dernière ronde, c'était 2,5 %, ce qui ne comprenait pas les gens qui avaient des avis relatifs au marché du travail. C'est un bon chiffre et nous comptons continuer dans ce sens[22].

Malgré tout, il a été souligné que l’identification des francophones dans le système Entrée express est problématique et que CIC travaille pour y remédier. En effet, le ministre a déclaré ce qui suit :

Je dois vous avouer aussi, mesdames et messieurs, que nous ne sommes pas satisfaits de la capacité de notre système d'immigration à établir la compétence en français des nouveaux arrivants lorsqu'ils font leur demande en anglais. Les gens bilingues ne déclarent pas toujours leurs capacités linguistiques. On les invite et on les incite à le faire, mais ils ne le font pas tous.
Le nombre de francophones qui arrivent sur notre territoire pourrait très bien être supérieur à celui que nous connaissons. Nous allons nous doter des moyens nécessaires pour préciser les capacités linguistiques de tous nos arrivants, dans les deux langues officielles, de façon à savoir où nous en sommes par rapport à notre intention d'atteindre un pourcentage de 4 % d'immigrants économiques francophones d'ici 2018[23].

3.1.3.  Le programme Destination Canada

Destination Canada est un salon d'emploi international organisé par CIC qui cherche à mettre en contact des immigrants francophones potentiels avec des employeurs et autres intervenants provenant des différentes CFSM.

En 2012, le gouvernement du Canada a éliminé les subventions de voyage pour les organismes provinciaux, municipaux et non gouvernementaux. Selon le ministre Kenney, ce changement représente une réduction d’environ 400 000 $.

3.2.  La nécessité d’une stratégie collaborative (fédérale, provinciale–territoriale, municipale et communautaire)

La FCFA a indiqué que, si elle n’avait qu’une seule suggestion à faire au gouvernement fédéral, elle serait de mettre en œuvre un plan stratégique pour l’immigration francophone au Canada :

En matière d'immigration, comme nous l'avons dit, il faut une stratégie cohérente, une stratégie fédérale faite en consultation avec les communautés, les municipalités et les provinces. Nous pensons que tous les intervenants doivent y être, mais il ne faut pas qu'on nous arrive pas avec des bouts de pansements adhésifs pour coller un peu partout quand on trouve une bibitte, un bobo et ainsi de suite. Il nous faut vraiment une telle stratégie, mais une stratégie cohérente[24].

De plus, le professeur LeVasseur a apporté les précisions suivantes :

[U]ne intégration des politiques et des moyens d'immigration est nécessaire entre les divers paliers gouvernementaux, et ce, afin de mieux encadrer et d'intégrer les nouveaux arrivants dans les communautés de langue officielle. Une fois que la sélection des nouveaux arrivants est complétée, le gouvernement du Canada doit travailler de concert avec les provinces afin que ces derniers puissent, dès leurs premiers jours au Canada, s'intégrer aux communautés de langue officielle. Trop souvent, les nouveaux arrivants sont laissés à eux-mêmes et doivent faire des choix sans comprendre les enjeux canadiens et l'importance de la dualité canadienne. Le gouvernement du Canada doit accompagner les nouveaux arrivants dans leurs démarches d'intégration au sein de la société canadienne[25].

Ainsi, sur le plan de la gestion de l’immigration, deux priorités ont été établies par les témoins: l’élaboration et la mise en œuvre d’un plan stratégique en immigration francophone et l’ajout d’une lentille francophone au système Entrée express afin que celui-ci contribue à l’augmentation du nombre d’immigrants dans les CFSM.

4.  Le recrutement des immigrants francophones dans les communautés francophones en situation minoritaire

4.1.  Promouvoir les communautés francophones en situation minoritaire auprès des immigrants potentiels

Plusieurs témoins ont fait valoir au Comité qu’un des problèmes fondamentaux auxquels les CFSM sont confrontées est le manque de visibilité dans les programmes du gouvernement du Canada. Comme l’explique Gilles LeVasseur « [l]e nouvel arrivant doit être sensibilisé à la présence des communautés de langue officielle en situation minoritaire afin de pouvoir poser des choix linguistiques et identitaires qui soient dans l’intérêt des politiques publiques d’immigration canadienne[26] ». Sans quoi, l’« absence de valorisation des communautés de langue officielle auprès des nouveaux arrivants […] développe chez ces derniers le désir de s’intégrer au sein du groupe majoritaire pour des raisons principalement économiques[27] ». 

M. LeVasseur affirme également que l’identité canadienne est parfois complexe à saisir pour un nouvel arrivant. On ne peut donc pas s’attendre à ce qu’il comprenne la notion de CLOSM[28].

Comme l’explique le commissaire aux services en français de l’Ontario, l’immigrant doit être sensibilisé à la possibilité de vivre en français et dans un milieu bilingue :

[…]il faut s'assurer qu'avant et dès leur arrivée, ces immigrants savent qu'ils peuvent non seulement obtenir des services en français auprès des gouvernements fédéral et provincial, mais aussi vivre en français, par exemple demander à ce que leurs enfants soient éduqués en français et obtenir des services communautaires en français. Il faut que ces nouveaux arrivants soient au courant de ces services et de ces possibilités[29].

4.2.  La prospérité économique : une condition sine qua non pour favoriser l’immigration

4.2.1.  Le rôle des employeurs

Dans le système d’immigration actuel, les employeurs jouent un rôle important dans le recrutement des immigrants. Par contre, comme l’explique le CENB, « [l]'entrepreneur a des postes à combler. Il ne se préoccupe pas du poids relatif de sa communauté linguistique lorsqu'il cherche des travailleurs. Il cherche à combler un besoin de compétences[30] ». 

Le Réseau de développement économique et d’employabilité (RDÉE) Canada a d’ailleurs confirmé que le système Entrée express crée « des liens très étroits entre les besoins en main-d’œuvre des employeurs canadiens et la sélection des immigrants qualifiés[31] ». 

Le directeur municipal de la ville de Moncton au Nouveau-Brunswick a affirmé que la promotion de la dualité linguistique est un facteur important qui contribue au recrutement et à l’intégration des immigrants, notamment les immigrants de catégorie économique[32]. Selon ce dernier :

[…] le Grand Moncton a observé une augmentation du nombre d'immigrants francophones. Avant 2006, le pourcentage d'immigrants s'établissant dans la collectivité et qui avaient le français pour langue maternelle était de 9 % seulement. Entre 2006 et 2011, le nombre d'immigrants francophones a atteint 18 % de la population immigrante totale[33].

La promotion de la dualité linguistique comme avantage économique auprès des employeurs apparaît donc comme une stratégie à favoriser pour accélérer le recrutement d’immigrants d’expression française et stimuler l’économie locale tout en contribuant à l’épanouissement de la dualité linguistique canadienne.

4.3.  Ouvrir et adapter le marché du travail pour favoriser l’immigration francophone en milieu minoritaire

Comme toutes les communautés au Canada, la capacité des CFSM à recruter des immigrants dépend de la conjoncture économique locale et régionale.

Si l’espoir de trouver un bon travail pour se construire une vie meilleure est la raison principale qui incite les immigrants à venir au Canada et que la prospérité économique est une condition sine qua non pour favoriser l’immigration, il importe que des mesures soient prises pour ouvrir le marché du travail aux immigrants, tout particulièrement les immigrants francophones.

Certaines régions du pays peinent plus que d’autres à offrir des emplois aux immigrants et donc de les retenir. C’est notamment le cas dans les régions qui connaissent un ralentissement économique ou dont l’économie est en transition. À titre d’exemple, les secteurs primaires et secondaires du Nouveau-Brunswick, c’est-à-dire « [l]es secteurs forestier, agricole, de la pêche et du transport[34] », sont en manque de main-d’œuvre. Le CENB confirme que l’accompagnement d’entreprises qui œuvrent dans des secteurs où il y a un besoin criant de main-d’œuvre est une façon de promouvoir et de faciliter l’immigration francophone tout en stimulant l’économie locale ou régionale[35].

4.3.1.  La reconnaissance des diplômes étrangers

Les problèmes que pose la reconnaissance des diplômes étrangers freinent l’arrivée au Canada d’immigrants économiques qualifiés et leur capacité de se mettre au travail dès leur arrivée. Comme explique le RDÉE Canada, c’est aussi un problème qui touche les employeurs ainsi que les fournisseurs de services francophones qui entreprennent des démarches auprès des employeurs et des immigrants :

[…] il arrive que nous disions à un employeur que nous sommes en mesure de lui trouver le candidat idéal, mais qu'en entamant le processus, nous nous apercevions que le candidat, bien qu'il ait des compétences, détient des diplômes qui ne sont pas encore reconnus. C'est un défi majeur pour nous[36].

Il s’agit d’un problème complexe à multiples facettes. Un aspect problématique de la reconnaissance des diplômes a été souligné lors des témoignages. Il s’agit du partage des compétences entre les paliers de gouvernement : le gouvernement fédéral est responsable de la reconnaissance des diplômes étrangers. Cependant, ce sont les ordres professionnels, placés sous l’égide des provinces et territoires, qui déterminent si un immigrant peut exercer une profession réglementée.

CIC a affirmé donner à l’étranger « des services de pré-arrivée, qui donnent une sorte de parcours pour chacune des professions réglementées. On explique aux nouveaux arrivants qui suivent les sessions d'orientation données par Collèges et instituts Canada au moyen de la classification des programmes d'enseignement, quelles sont les étapes à suivre, à partir de l'étranger, dans le processus d'accréditation et de reconnaissance des titres. C'est un des mécanismes qui est disponible[37] ». 

5.  L’accueil et l’intégration des immigrants francophones dans les communautés francophones en situation minoritaire

5.1.  La migration interprovinciale–territoriale des immigrants francophones

Certains témoins ont commenté le phénomène de la migration interprovinciale‑territoriale des immigrants francophones. Tout comme le départ des étudiants et des jeunes travailleurs fragilise les CFSM, le départ des immigrants francophones représente une perte pour les communautés qui misent sur leur intégration pour assurer leur vitalité tant sur le plan linguistique et culturel que sur le plan économique.

5.1.1.  Le contexte socio-économique, un facteur décisif

La migration interprovinciale–territoriale des immigrants francophones dépend essentiellement du contexte socio-économique de la région dans laquelle ils se sont installés. C’est l’économie régionale qui, de prime abord, détermine si les immigrants s’installeront à long terme ou s’ils migreront vers une autre région de la province, du territoire ou du pays. D’aucuns diront qu’une économie en perte de vitesse et un marché de l’emploi faible ne favorisent pas la rétention des immigrants francophones, pas plus que celle de la population locale.

Certaines provinces qui connaissent un ralentissement économique peinent à retenir les immigrants. En revanche, les provinces dont l’économie est florissante bénéficient de ce qu’elles appellent une immigration secondaire. C’est notamment le cas de l’Alberta, qui « bénéficie plutôt d’un flux d’immigration secondaire, principalement en provenance du Québec[38] ». 

Les immigrants sont mobiles et peuvent choisir de migrer d’une province à l’autre ou d’un territoire à l’autre. Cependant, certains témoins ont soulevé des questions concernant la migration interprovinciale–territoriale des immigrants francophones qui méritent d’être soulignées. 

L’AFO a fait valoir au Comité qu’il faudrait élaborer de meilleurs appuis à l’immigration secondaire, notamment trouver un moyen de suivre le parcours des immigrants afin que les ressources financières du gouvernement du Canada allouées aux services d’accueil et d’établissement soient transférées vers la province ou le territoire de destination secondaire de l’immigrant[39].

5.2.  L’exode vers la majorité linguistique

5.2.1.  La promotion des communautés francophones en situation minoritaire auprès des immigrants francophones nouvellement arrivés

La sensibilisation des immigrants francophones à l’existence des CFSM et aux avantages de vivre et de travailler dans un milieu bilingue est un facteur important pour le recrutement et l’établissement d’immigrants francophones dans les CFSM. C’est également un des éléments clés qui favorise leur intégration dans les milieux francophones minoritaires. On constate que si les immigrants sont recrutés par l’entremise des réseaux francophones en immigration, le rapprochement avec la communauté francophone se fait plus facilement, car l’immigrant possède déjà l’information nécessaire pour inscrire ses enfants dans une école francophone, trouver des ressources en français et intégrer le réseau associatif et institutionnel de la minorité[40].

5.2.2.  L’intégration économique

Tout au long du présent rapport, le Comité a souligné l’importance d’un secteur économique prospère comme condition au recrutement et à l’intégration des immigrants. Il est donc primordial que les CFSM aient la capacité d’accompagner les nouveaux arrivants dans leur processus d’intégration économique. Comme le précise le CCS, le processus d’intégration économique se fait de deux façons, soit par le marché du travail  ou par la création d’une entreprise[41].

Conclusion

En conclusion, le recrutement et l’intégration des immigrants dépendent de l’économie locale, la capacité des réseaux d’intégration de les accueillir et de l’information que ces derniers reçoivent quant à la possibilité de vivre et de travailler dans les CFSM. Les communautés francophones minoritaires, comme le reste du Canada, ont besoin d’immigrants afin de maintenir et d’augmenter leur vitalité, et il est important que le gouvernement fédéral et toutes ses agences prennent des mesures positives pour atteindre sa cible de 4% d’immigrants francophones qui s’établissent hors Québec d’ici 2018.

Recommandations

Que Citoyenneté et Immigration Canada fasse la promotion de la possibilité de vivre et de travailler en français dans des communautés francophones en situation minoritaire.

Que Citoyenneté et Immigration Canada étudie des options pour augmenter le nombre d’immigrants francophones qui s’installent dans une communauté francophone en situation minoritaire au Canada par l’entremise de son programme Entrée express.


[1]             Chambre des communes, Comité permanent des langues officielles (LANG),  Témoignages, 2e session, 41e législature, 12 mars 2015, 1620 (Robert Therrien, directeur général, Conseil de la coopération de la Saskatchewan).

[2]             LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 24 mars 2015, 1540 (Peter Hominuk, Assemblée de la francophonie de l’Ontario).

[3]             LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 12 mars 2015, 1540 (Gilles LeVasseur, professeur, École de gestion Telfer, Université d'Ottawa, à titre personnel).

[4]             Ibid.

[5]             Gouvernement du Canada, Feuille de route pour les langues officielles du Canada 2013-2018 : éducation, immigration, communautés, Ottawa, avril 2013.

[6]             Secrétariat du Conseil du Trésor, La Feuille de route pour les langues officielles du Canada 2013-2018 : Plans, Dépenses et Résultats.

[7]             Ibid.

[8]             Ibid.

[9]             LANG, Témoignages, 1re session, 41e législature, 13 juin 2013, 1540 (Jason Kenney, ministre, Citoyenneté et Immigration Canada).

[10]           LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 31 mars 2015, 1535 (Chris Alexander, ministre, Citoyenneté et Immigration Canada).

[11]           LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 31 mars 2015, 1605 (Chris Alexander, ministre, Citoyenneté et Immigration Canada).

[12]           LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 31 mars 2015, 1540 (Chris Alexander, ministre, Citoyenneté et Immigration Canada).

[13]           LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 31 mars 2015, 1555 (Chris Alexander, ministre, Citoyenneté et Immigration Canada).

[14]           Ibid.

[15]           LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 24 mars 2015, 1540 (Gaël Corbineau, directeur général, Fédération des francophones de Terre-Neuve et du Labrador).

[16]           LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 24 mars 2015, 1530 (Anne Hébert, directrice générale, Conseil économique du Nouveau-Brunswick).

[17]           LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 26 mars 2015, 1600 (Jacques Dubé, directeur municipal, Ville de Moncton).

[18]           LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 26 mars 2015, 1650 (Marie-France Kenny, présidente, Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada).

[19]           LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 31 mars 2015, 1555 (Chris Alexander, ministre, Citoyenneté et Immigration Canada).

[20]           Citoyenneté et Immigration Canada, Les critères d’entrée et le Système de classement global.

[21]           LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 31 mars 2015, 1600 (Chris Alexander, ministre, Citoyenneté et Immigration Canada).

[22]           LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 31 mars 2015, 1620 (Chris Alexander, ministre, Citoyenneté et Immigration Canada).

[23]           LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 31 mars 2015, 1535 (Chris Alexander, ministre, Citoyenneté et Immigration Canada).

[24]           LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 26 mars 2015, 1645 (Marie-France Kenny, présidente, Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada).

[25]           LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 12 mars 2015, 1545 (Gilles LeVasseur, professeur, École de gestion Telfer, Université d'Ottawa, à titre personnel).

[26]           LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 12 mars 2015, 1540 (Gilles LeVasseur, professeur, École de gestion Telfer, Université d'Ottawa, à titre personnel).

[27]           LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 12 mars 2015, 1545 (Gilles LeVasseur, professeur, École de gestion Telfer, Université d'Ottawa, à titre personnel).

[28]           LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 12 mars 2015, 1605 (Gilles LeVasseur, professeur, École de gestion Telfer, Université d'Ottawa, à titre personnel).

[29]           LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 24 mars 2015, 1550 (François Boileau, commissaire, Commissariat aux services en français de l’Ontario).

[30]           LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 24 mars 2015, 1530 (Anne Hébert, directrice générale, Conseil économique du Nouveau-Brunswick).

[31]           LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 26 mars 2015, 1530 (Roukya Abdi Aden, gestionnaire, Concertation nationale, Réseau de développement économique et d'employabilité Canada).

[32]           LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 26 mars 2015, 1555 (Jacques Dubé, directeur municipal, Ville de Moncton).

[33]           Ibid.

[34]           LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 24 mars 2015, 1530 (Anne Hébert, directrice générale, Conseil économique du Nouveau-Brunswick).

[35]           Ibid.

[36]           LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 26 mars 2015, 1530 (Roukya Abdi Aden, gestionnaire, Concertation nationale, Réseau de développement économique et d'employabilité Canada).

[37]           LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 31 mars 2015, 1640 (Yves Saint-Germain, directeur, Politique de programmes sur la langue, planification et responsabilisation, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration).

[38]           LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 10 mars 2015, 1555 (Ida Kamariza, coordonnatrice, Réseau en immigration francophone de l'Alberta, Association canadienne-française de l'Alberta).

[39]           LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 24 mars 2015, 1545 (Peter Hominuk, Assemblée de la francophonie de l'Ontario)

[40]           LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 24 mars 2015, 1610 (Gaël Corbineau, directeur général, Fédération des francophones de Terre-Neuve et du Labrador).

[41]           LANG, Témoignages, 2e session, 41e législature, 12 mars 2015, 1535 (Robert Therrien, directeur général, Conseil de la coopération de la Saskatchewan).