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Monsieur le Président, comme toujours, c'est pour moi un grand honneur de prendre la parole à la Chambre. Aujourd'hui, nous parlons du projet de loi S-6, .
Il est intéressant que nous soyons saisis du projet de loi la semaine même où la Cour suprême du Yukon a invalidé les efforts déployés par le gouvernement du Yukon — un autre gouvernement de droite —, efforts visant à faire fi des consultations, du processus environnemental établi et des Premières Nations dans le cadre de son offensive contre le bassin de la vallée Peel. La Cour suprême a statué que le gouvernement du Yukon n'avait pas le droit de faire cela. Comme dans tout dossier de développement, il y a ici une question d'acceptabilité sociale, et c'est ce que la cour a invoqué.
Il s'agit là d'une tendance, et nous en parlerons dans le cadre de l'étude du projet de loi. Le gouvernement pense pouvoir sauter l'étape de l'acceptabilité sociale en présentant des projets de loi omnibus, en affaiblissant des règlements, en agissant dans les coulisses, le tout pour mettre en branle des mégaprojets de développement, sans faire preuve de la diligence la plus élémentaire et sans consulter qui que ce soit, pas même les Premières Nations, lesquelles ont des droits constitutionnels garantis aux termes de l'article 35. C'est ainsi que le gouvernement finit par créer une situation comme celle-ci.
Le militantisme exercé par le gouvernement en faveur du secteur pétrolier a suscité un ressac à la grandeur du pays. Les gens se disent que 99,999 p. 100 des lacs et des rivières du Canada ont été privés de la protection de la loi pour que les oléoducs puissent passer partout sans la moindre entrave. Ils se demandent si on ne rit pas d’eux. Ils ne veulent pas que le bitume passe par leur localité alors qu’il n’y a aucun robinet d’arrêt d’un côté ou de l’autre des lacs et des rivières.
Je représente probablement l’une des plus grandes régions minières du Canada, sinon du monde. Les dirigeants des sociétés minières présentes dans ma région comprennent les enjeux lorsque je leur parle. Ils comprennent l’importance de ce qu’on appelle des « ententes sur le terrain ». En effet, il faut avoir l’aval des gens de la place et une façon de l’obtenir, c’est de satisfaire aux normes environnementales et de consulter les Premières nations. Demandez à n’importe qui du secteur minier en Ontario aujourd’hui s’il est possible de démarrer un projet et on vous répondra que la chose sera impensable sans consultations préalables.
Nous avons ici le projet de loi qui refond unilatéralement le système d’évaluation environnementale et socioéconomique du Yukon. Le projet de loi ne tient aucunement compte des question relatives aux consultations des Premières nations et n’accorde aucune importance à la valeur économique énorme du paysage et de la beauté naturelle du Yukon. Voilà une autre manœuvre pour faire fi des citoyens de notre pays et créer un consensus sur ce dont le développement devrait avoir l’air. Je crois que nous aboutirons simplement à un autre échec, à une autre impasse avec ces gros projets, qui nous feront revivre l’expérience du pipeline de la vallée du Mackenzie. Si les choses ne sont pas faites de façon équilibrée, elles n’aboutiront absolument à rien.
J’ai traversé tout le pays, parfois assis à l'arrière d’une mini-fourgonnette bon marché avec un groupe de musiciens et parfois, comme politicien, et je n’ai jamais vu une région de notre pays qui m'a ravi autant que le Yukon. J’adore St. John's, Terre-Neuve et je tiens à mes racines familiales…
M. Mark Strahl: Parlez-nous de Timmins. Une vraie honte.
M. Charlie Angus: Monsieur le Président, je ne vais pas laisser le député me déstabiliser. Je suis allé au Cap-Breton. Partout où je vais, ma femme me demande si c'est aussi beau que chez nous. Je lui réponds que c’est beau, mais que ce n’est pas comme chez nous; mais lorsque je suis allé au Yukon pour la première fois et que ma femme m’a demandé si c’était aussi beau que chez nous, je lui ai dit que c’était l’endroit qui pourrait réellement me faire chavirer le cœur.
Heureusement, la magnifique région de Cobalt—Temiskaming où je vis, avec ses splendides pins blancs à Temagami, offre des possibilités de canotage extraordinaires — non pas que je fasse personnellement du canot, soit dit en passant. Si je ne peux pas le voir de la fenêtre d’une voiture, je n’y vais pas. Toutefois, j’encourage tout le monde à y venir. Je vais rester là où je suis, dans le Nord de l’Ontario. Toutefois, le Yukon offre quelque chose de magique.
Je dis cela sérieusement, parce que, lorsque je vais au Yukon, je vois tous ces gens qui viennent d’Allemagne et qui se font du Canada une image de pays doté de ressources naturelles incroyables. Ces gens viennent au Yukon. Il y en a qui viennent du Japon et de partout ailleurs dans le monde.
Il faut donc trouver un juste équilibre entre les ressources naturelles extraordinaires que nous avons et les autres intérêts en jeu. Nous savons assurément cela dans ma région, lourdement tributaire de l’activité minière. Ma région compte la mine de métaux communs la plus profonde au monde, la mine Kidd, qui a été découverte en 1964. Ma région a pas mal les plus grosses mines d’or en activité. Les mines Hollinger sont sur le point de rouvrir. Mon grand-père, Charlie Angus, a été tué dans une mine Hollinger. C’était la plus grosse mine d’or en Occident. Elle va rouvrir, après 100 ans. La mine Dome est toujours exploitée. Toutefois, peu importe leur richesse, ces ressources ne sont pas illimitées.
Nous devons trouver des façons d’avoir une valeur ajoutée. Nous devons obtenir quelque chose en retour des ressources que nous développons. Je dois admettre qu’en Ontario, les conservateurs n’ont pas été très brillants. Pour eux, le Nord est une sorte de colonie; le Nord a l’argent et cet argent prend la direction du Sud. Lorsqu’une compagnie ferme une mine dans le Nord, ses dirigeants nous disent que c’est bien dommage et bien triste, mais qu'ils n’ont jamais eu l’intention de rester là-bas pour de bon.
Nous pouvons mieux faire les choses. Les Yukonnais, avec la mentalité qu’ils ont, les ressources naturelles extraordinaires dont ils disposent et leur esprit communautaire, ont le droit d’avoir vraiment voix au chapitre dans les projets de développement à réaliser, qu’il s’agisse d’un projet minier, hydroélectrique, pétrolier ou gazier ou dans les décisions concernant le maintien des terres dans leur état naturel. C’est ce qui a créé la polémique dans le projet du bassin hydrographique de la vallée Peel.
Le projet de loi supprimerait l’évaluation environnementale et socioéconomique qui a été élaborée au Yukon, par les Yukonnais, pour le Yukon. Aucune, absolument aucune, consultation n’a été menée auprès des Premières Nations, ce qui n’a rien d’étonnant de la part du gouvernement actuel. Les conservateurs ne comprennent tout simplement pas que ce sont des obligations constitutionnelles. Ils ne le comprennent tout simplement pas.
Le gouvernement conservateur, avec l’aide active d’un député conservateur local et du sénateur du Yukon, impose aux Yukonnais les intérêts de sociétés du Sud pour les ressources. C’est ce qu’on m’a dit au sujet de la vallée Peel, la dernière fois que je suis allé à Whitehorse. Les conservateurs voient ce bassin hydrographique et ils se disent qu’il présente une valeur énorme.
Les Yukonnais n’aiment pas être trahis au profit de sociétés qui risquent de disparaître du jour au lendemain.
Les gens du Yukon à qui nous avons parlé, et bien sûr les travailleurs extraordinaires de l’opposition néo-démocrate au Yukon, ont discuté d’un certain nombre de modifications contenues dans le projet de loi. Ces modifications donneraient au le pouvoir de transmettre des orientations exécutoires à l’Office d’évaluation environnementale et socioéconomique du Yukon. Les Yukonnais sont comme les autres habitants du Nord, alors l’idée qu’un ministre, dans son bureau, leur dise quoi faire est tout simplement inadmissible.
Voici une autre mesure tout à fait typique pour ces gens-là: la prescription par voie législative d'un délai maximal pour procéder à une évaluation. Les conservateurs se demandent pourquoi les projets d'oléoduc n'aboutissent pas. En fait d'évaluations publiques, les gens devront désormais demander par écrit l'autorisation d'y participer, et le gouvernement décidera s'il le leur permet ou non. Il n'y a donc rien d'étonnant à ce que l'Office national de l'énergie fasse constamment chou blanc. Adoptant la même stratégie que pour l'Office national de l'énergie, les conservateurs veulent pouvoir prescrire par voie législative un délai maximal pour la réalisation des évaluations. Or, selon ce qu'on constate dans le Nord de l'Ontario, lorsqu'ils passent ainsi outre à la procédure normale, cela suscite un tollé, car ils ne respectent pas le contrat social.
Le projet de loi laisserait au le soin de déléguer les responsabilités, en tout ou en partie, au gouvernement du Yukon. S'il est question de responsabilités fédérales, c'est parce que des terrains domaniaux sont en cause et que la Couronne fédérale a des obligations juridiques fondamentales envers les Premières Nations. Le gouvernement ne peut pas déléguer ses responsabilités simplement parce qu'il pense que la province sera plus disposée à passer outre à ses obligations juridiques et constitutionnelles.
Le projet de loi créerait de vastes exemptions relativement aux renouvellements, aux modifications, aux permis et aux autorisations. J'ai vu ce que ça donne avec les projets de développement des ressources. Dans ma région, le Nord de l'Ontario, nous avons constaté que, une fois qu'une entreprise obtient son permis, qui est en quelque sorte une carte blanche, elle peut grandement élargir ses activités et, ce faisant, en aggraver les répercussions. Il faut pouvoir expliquer ces répercussions aux gens.
Les Yukonnais sont au Yukon. Les nouveaux venus ont aussi à coeur ce territoire que ses premiers habitants. C'est leur territoire. Ils seront toujours là. Par contre, les sociétés minières se succèdent. Elles changent de main. Certaines seront rachetées parce qu'elles seront rentables alors que d'autres déclareront faillite. Néanmoins, les ressources avec lesquelles elles s'amusent appartiennent à la population yukonnaise.
Beaucoup de personnes ont dénoncé haut et fort le projet de loi. J'ai un immense respect pour la chef néo-démocrate du NPD du Yukon, Liz Hanson, et son enthousiasme sans borne pour les Yukonnais. Ce qui fait si cruellement défaut, c'est une volonté de jouer cartes sur table. Il faut nouer une relation caractérisée par le dialogue et le respect plutôt que les poursuites judiciaires et les tractations secrètes, comme le veut la tendance profonde qui mine actuellement les projets de développement, d'un océan à l'autre.
Les conservateurs croient que, s'ils font fi des consultations et des processus publics et procèdent par voie de règlements conçus en coulisse, tous les projets d'exploitation minière et de construction de pipelines pourront se réaliser comme par miracle. Moi qui connais concrètement la réalité du Nord du Québec et de l'Ontario, je peux dire que, si on n'obtient pas l'aval de la population, les projets ne se concrétisent pas, un point c'est tout.
J'ai en main un éditorial du Yukon News qui dit que la réforme des évaluations environnementales doit se faire ouvertement. L'article a été publié le 13 juin 2014. En voici un extrait:
Bien des gens sont à blâmer pour ce processus inutilement louche...
— ces propos ne sont pas parlementaires, mais je ne fais que les citer —
[...] pour ce processus inutilement louche. Les premiers fautifs sont le sénateur et le député du Yukon, qui sont censés défendre les intérêts des Yukonnais à Ottawa. Or, ils ont plutôt tenu la population dans l'ignorance; [le député] s'est contenté de prononcer de vagues généralités sur les modifications, sans jamais entrer dans les détails. Ils devraient avoir honte.
C'était un extrait de l'article du Yukon News .
Il faut que le ministre fédéral puisse donner des instructions générales obligatoires à l'Office d'évaluation environnementale et socioéconomique du Yukon. Il faut s'assurer que les conservateurs ne portent pas atteinte aux droits fondamentaux en matière de protection et de consultation dans le cadre du processus de transfert des responsabilités.
Le gouvernement se vante sans cesse de consulter, mais fait fi de l'opinion des personnes qui sont le plus directement touchées. Nous avons entendu la grande chef du Conseil des Premières Nations du Yukon, Ruth Massie, dire qu'il n'y avait pas eu de consultations adéquates et que, s'il n'y en a pas davantage avant l'adoption du projet de loi, le conseil intenterait une action en justice.
Encore une fois, le gouvernement pense qu'il peut impunément faire fi de ses obligations en vertu de la loi. La Cour suprême du Yukon a dit cette semaine que c'était hors de question. Il faudra donc reprendre le processus de planification de Peel.
Il y a de nombreuses mesures législatives pour lesquelles le gouvernement a été prévenu qu'elle ne respectent pas les exigences constitutionnelles de notre pays, mais elles ont quand même été adoptées, puis ont été rejetées. Ce n'est pas une façon d'exploiter les ressources dans notre pays.
Avant les élections, en 2004, j'ai eu le grand honneur de travailler avec la nation algonquine située dans la région du parc La Vérendrye, au Québec, et jusque dans l'Abitibi. À l'époque, les habitants voyaient des millions de dollars provenant de l'exploitation des ressources hydrauliques, forestières et minières quitter la région. Aucun habitant de la région n'a jamais été embauché. Ils n'ont jamais pu attirer l'attention autrement qu'au moyen de barricades, de menaces d'injonction et de manifestations.
La population locale s'est demandé s'il ne valait pas mieux qu'elle investisse ses ressources dans la négociation et qu'elle développe sa relation avec les sociétés forestières, de manière à pouvoir tirer des avantages de l'exploitation de son territoire et de le faire reconnaître comme non cédé. Aucun traité n'a jamais été signé, y compris pour les terres des Algonquins, dans le Nord-Est de l'Ontario. Ils se sont dit que, s'ils consacraient leurs efforts à la consultation et au développement d'une bonne relation, les collectivités et l'économie régionale pourraient connaître un essor.
Cette réflexion a eu lieu il y a 14 ans dans les localités algonquines du Nord du Québec et du Nord de l'Ontario où j'ai travaillé. Depuis le temps, j'ai pu observer des changements radicaux. Les sociétés minières comprennent les nouvelles règles du jeu. Elles commencent maintenant par discuter avec les populations locales. Ce n'est pas toujours facile. Il nous reste beaucoup de progrès à faire et beaucoup de problèmes à résoudre, mais nous pouvons voir la lumière au bout du tunnel alors que ce n'était pas le cas avant.
Des municipalités comme Timmins, Kirkland Lake et Black River-Matheson dépendent des ressources minières. Elles comprennent que, si elles ne sont pas capables de cultiver leurs partenariats avec les Cris de Mushkegowuk, avec le conseil tribal Wabun et avec leurs voisins algonquins, les ressources minières ne pourront pas être exploitées.
Je demande à mes collègues ministériels la raison pour laquelle ils ignorent leur tendance à refuser de mener des consultations, à compromettre la réglementation environnementale et à priver la population et les autorités locales de leur droit d'être consultées, dans le but d'entreprendre un programme d'extraction minière, d'activités de fracturation et d'exploitation pétrolière qui n'aura pas gain de cause devant les tribunaux, comme il n'a pas eu gain de cause la semaine dernière devant la Cour suprême du Yukon ainsi que contre Kinder Morgan et Burnaby Mountain. C'est une question de légitimité sociale.
Je reviens au projet de loi . Certaines parties de ce projet de loi portent principalement sur des questions de régie interne, qui peuvent figurer dans tous les projets de loi. Le fait que le projet de loi démantèlera le processus d'évaluation environnementale et socioéconomique, mis au point au Yukon à l'intention des Yukonnais, est inconcevable pour le Nouveau Parti démocratique. Nous, les néo-démocrates, ne soutiendrons pas un tel projet de loi parce que nous cherchons à assurer un développement durable, un développement à long terme qui se fonde sur le principe qui nous a été inculqué.
Nous avons énormément de ressources dans notre pays, et ces ressources doivent être traitées avec le respect qu'elles méritent. Mais au lieu de cela, nous voyons ce genre d'économie de joueur.
J'ai discuté avec un député provincial du Yukon de l'attitude du gouvernement de son territoire — et de la similarité avec le gouvernement conservateur —, qui croît que s'il peut extraire et exploiter les ressources le plus vite possible, et ce sont des ressources limitées, tout serait bien mieux, et que nous ne devrions pas nous inquiéter des conséquences sur l'économie ou l'environnement. Ce n'est pas une façon raisonnable d'exploiter les ressources.
J'aimerais également souligner que dans ma région, nous avons le Cercle de feu, qui fait partie de la grande région de Timmins—Baie James. C'est une autre ressource exceptionnelle. Le Cercle de feu se trouve là, parmi certaines des collectivités les plus pauvres du quart-monde. Il y a Webequie d'un côté, et Marten Falls et Ogoki Post de l'autre. Ces collectivités ont été exclues dès le départ des plans de développement économique.
Nous avons une abondance de ressources et nous pouvons bien faire les choses, mais il faut mener des consultations. Rien ne se passera dans le Cercle de feu sans la participation du peuple Matawa et, en aval, du peuple Mushkegowuk. Quand je me rends dans les collectivités non autochtones, j'entends le même message: il faut que ce soit fait correctement.
Il y a des travailleurs de l'industrie minière des deux côtés de ma famille, je représente des villes minières, et je vis dans une ville où la moitié des hommes parcourent le monde entier pour travailler dans les mines. Or, si nous leur demandions leur avis au sujet du Cercle de feu, ils diraient que, si on ne fait pas les choses comme il faut, on devrait laisser les ressources sous terre. S'il n'y a aucun plan de valorisation, les ressources devraient rester sous terre. Un travailleur de l'industrie minière m'a dit que c'était essentiel pour l'avenir des enfants. Il se demandait pourquoi on voulait vider le compte bancaire dès maintenant pour faire un coup d'argent.
Au lieu de bâtir une relation de nation à nation fondée sur le respect, le gouvernement croit qu'il n'a qu'à changer la réglementation pour que tout aille pour le mieux. Or, le gouvernement pourrait être traîné devant les tribunaux, et si c'est le cas, il perdra sa cause.
Si on se penche sur la jurisprudence, on constate que les décisions concernant les droits juridiques des Premières Nations du Canada ne sont qu'une suite ininterrompue de victoires pour les Premières Nations. Qu'il s'agisse de la décision concernant la Première Nation de la rivière Taku, de la deuxième décision visant la Première Nation haïda, ou du jugement de l'affaire Delgamuukw, ces décisions tendent à confirmer ces droits de plus en plus. Les choses ont changé.
Chacune de ces décisions indique clairement ce qu'il en est. Elles malmènent de plus en plus le gouvernement. Une des raisons qui expliquent pourquoi les tribunaux agissent ainsi est la mauvaise foi de la Couronne. Le non-respect de ses responsabilités fiduciaires porte constamment atteinte à son honneur.
Avant de parler du Yukon, je vais revenir à ma région et au Traité no 9, qui a été signé pour partager les terres. Il contenait également une promesse concernant l'éducation. À l'époque, l'Ontario était négligeable sur le plan économique et Toronto n'était qu'une petite ville.
Les ressources obtenues par le truchement du Traité no 9 ont fait de l'Ontario une puissance économique à l'échelle internationale. L'économie ontarienne, qui a été le rouleau compresseur du XXe siècle, a été créée par l'hydroélectricité, l'or, le cuivre, le fer et les forêts visés dans ce document.
Qu'ont obtenu en échange les signataires du traité? On les a envoyés dans des camps de personnes déplacées et dépouillés de tous leurs droits économiques. Le traité ne dit rien au sujet de la privation de leurs droits économiques, culturels et religieux et de leur droit à l'éducation, rien non plus à propos de devenir les pupilles de Duncan Campbell Scott, qui s'est rendu dans le Nord pour signer le traité.
Chose certaine, nous devrons un jour faire quelque chose pour corriger la situation. Lorsque je me rends dans les collectivités, les gens me disent que nous devrons désormais faire preuve de respect à leur égard. Nous ne pouvons pas corriger le passé. Personne ne peut rien y changer. Si nous sommes conscients de ce qui s'est passé et que nous connaissons nos obligations, nous pourrons aller de l'avant.
Lorsque j'examine un projet de loi et que je me rends compte que le gouvernement n'a pas respecté son obligation juridique de consulter en lien avec celui-ci et que les gens de la région y sont traités comme si leur point de vue avait moins de valeur que le point de vue et les intérêts des sociétés minières du Sud, je sais qu'il sera contesté devant les tribunaux, comme d'autres mesures législatives l'ont été. On peut faire un parallèle entre cette situation et la décision qui a été rendue par le tribunal du Yukon en ce qui concerne le bassin versant de la rivière Peel: ce projet de loi sera rejeté, et nous serons de retour à la case départ.
Une seule chose peut ressortir de ce processus: la mauvaise foi. Les gens que je connais dans l'industrie des ressources ne veulent pas qu'il y ait de la mauvaise foi. Ils veulent un climat de paix sur le terrain. C'est un commentaire que j'entends tout le temps. Ils veulent négocier. Ils savent que, si la population locale est mécontente, le projet ne se concrétisera pas.
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Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir l'occasion de participer au débat concernant le projet de loi .
Je suis préoccupé par la façon de procéder du gouvernement dans ses rapports avec les collectivités des Premières Nations d'un bout à l'autre du pays. En tant que député et en tant que Canadien, je trouve franchement embarrassant que le gouvernement ne reconnaisse pas son devoir constitutionnel, sa responsabilité fiduciaire, de traiter de nation à nation avec les collectivités des Premières Nations, tel qu'il s'est engagé à le faire.
Mon collègue de mentionnait à l'instant une réunion dont on a fait état dans l'actualité hier. Des représentants d'une collectivité des Premières Nations du Yukon ont rencontré le ministre. Ils se sont sentis insultés, parce que ce dernier leur a dit qu'ils ne sont pas un gouvernement, et que, d'ailleurs, leur participation à l'accord relatif à la Loi sur l'évaluation environnementale et socioéconomique au Yukon leur enlève, je ne sais comment, leur statut de gouvernement, si bien qu'il est seulement tenu de négocier avec le gouvernement Yukon maintenant. Il est difficile de concevoir qu'un ministre de la Couronne puisse avoir ce genre d'approche à l'égard des collectivités des Premières Nations.
La direction que prend le gouvernement m'inquiète. À la moindre occasion, il semble accroître sa détermination à trouver des moyens de permettre rapidement à des sociétés d'exploitation minière du Sud ou à des sociétés pétrolières nationales et internationales d'exploiter les ressources naturelles du Nord, et de partout au Canada, pour dire bien franchement, d'extraire ces ressources du sol et de les acheminer vers les marchés le plus rapidement possible, sans égard aux risques inhérents pour l'environnement et les collectivités qui seront touchées par cette activité d'exploitation et sans égard à la question de la propriété de ces ressources naturelles. À ce chapitre, je rappelle la responsabilité du gouvernement de négocier avec les Premières Nations.
C'est un exemple classique de l'approche du gouvernement dans ces dossiers, de sa maladresse en ce qui concerne les droits et obligations des Premières Nations issus des traités, les titres fonciers, et le devoir non seulement de consulter, mais aussi de faire des accommodements. Il semble que le gouvernement manque sans cesse à son devoir de respecter les directives fournies par la Cour suprême, et ce sur toute la ligne.
Nous pouvons parler de l'exploitation pétrolière et minière et des poissons. En ma qualité de porte-parole en matière de pêches et océans, je discute constamment avec des membres de collectivités des Premières Nations près des côtes. Ces gens sont frustrés que le gouvernement ne respecte pas sa responsabilité en vertu de la Constitution; cette responsabilité a été réaffirmée, précisée et énoncée à maintes reprises par les tribunaux un peu partout au pays. Le gouvernement refuse d’agir en ce sens.
Ensuite nous arrivent des enjeux comme celui-ci. Le gouvernement a essayé d'imposer des modifications au système d'éducation des collectivités des Premières Nations. Il y a eu une telle levée de boucliers que le gouvernement a au final décidé d'abandonner son projet de loi. Les chefs et les collectivités des Premières Nations de partout au pays ont tellement répondu de manière négative à l'imposition unilatérale de quelque chose qui empiète évidemment sur une compétence des collectivités des Premières Nations que le gouvernement n'a eu d’autre choix que de revenir sur sa décision.
Au sujet des modifications à la Loi sur les pêches qui ont débuté en 2012, le grand chef de l'Assemblée des Premières Nations a témoigné devant le comité et a affirmé que c’était très insultant pour lui et les autres chefs de partout au pays. Quelque 640 Premières Nations devaient être consultées sur les questions qui touchent leurs droits, et le gouvernement en a fait fi. Il est allé de l'avant et a apporté des modifications qui touchent ces droits sans en tenir compte.
C'est ce genre de manque de respect et d'action unilatérale qui ont poussé des chefs yukonnais à venir à Ottawa. Neuf représentants sont venus à Ottawa au cours de la fin de semaine pour rencontrer le ministre. Ce qu'ils ont dit a été cité, et je crois qu'il importe de citer encore une fois l’article.
« Le ministre nous a fait taire en nous disant que nous n'étions « pas de véritables gouvernements », raconte dans un communiqué de presse Eric Fairclough, le chef de la Première Nation Little Salmon Carmacks, « et qu'il n'était donc pas tenu de nous faire participer activement à la modification de la loi issue de nos traités. »
Le gouvernement a fait adopter la Loi fédérale sur la responsabilité, mais il y a bien peu de consultations, sinon aucune. Il menace les leaders des collectivités autochtones en leur disant qu’il y aura des conséquences s’ils s’opposent à lui. Or, cette attitude nuit au travail des Premières Nations et aux efforts déployés par beaucoup de leaders pour faire progresser leurs collectivités. De plus, en agissant de la sorte, le gouvernement montre clairement qu’il n’assume pas les responsabilités qui lui incombent dans ses rapports avec les collectivités des Premières Nations.
Oserais-je porter à votre attention la réticence du gouvernement à traiter du problème de la disparition et du meurtre de 1 100 femmes autochtones au Canada? Le gouvernement semble capable de comprendre que les meurtres abjects d’un membre des Forces canadiennes et d’un réserviste ainsi que l’attaque perpétrée contre les gens à la Chambre sont des actes terroristes. Il a été capable de déterminer clairement qu’il s’agissait d’actes terroristes. Toutefois, il ne reconnaît pas le problème des femmes autochtones et il refuse d’apporter des changements et de mettre en place les programmes nécessaires pour s’attaquer à ce qui amène ces femmes et leurs familles à craindre pour leur vie tous les jours, au Canada. Il est inadmissible que le gouvernement semble avoir cette attitude à l’endroit des Premières Nations.
Permettez-moi d’aller un peu plus loin dans le projet de loi . Le projet de loi modifierait la Loi sur l’évaluation environnementale et socioéconomique au Yukon. Cette loi a été établie en 2003 pour donner suite à l’Accord-cadre définitif du Yukon. Cet accord est un processus consultatif entre les collectivités des Premières Nations, le gouvernement du Yukon et la Couronne.
J’aimerais préciser tout d’abord que l’accord prévoyait la tenue d’un examen après cinq ans. Le gouvernement n’a pas aimé cet examen et il a décidé de ne pas le rendre public. Il a décidé d’imposer ses propres changements, en traitant directement avec le gouvernement du Yukon, sans tenir aucune consultation substantielle avec les collectivités des Premières Nations. Les modifications ont été élaborées dans le secret. Les groupes qui n’étaient pas des syndicats — l’Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs, l’Association minière du Canada, l’Association canadienne des producteurs pétroliers et l’Association canadienne des pipelines de ressources énergétiques — ont tous été autorisés à donner leur avis. Toutefois, il n’y a eu aucun processus public, et l’opposition demeure très importante tant parmi les Yukonnais qu'au Conseil des Premières Nations du Yukon.
Pourquoi le gouvernement conservateur agit-il ainsi? Quel est le but des conservateurs? Ils ont souvent parlé d’extraction des ressources. Ce qu’ils veulent, c’est accélérer les choses et se débarrasser du processus réglementaire. Ils ont modifié la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale. Ils ont modifié la Loi sur les pêches. Ils ont modifié un certain nombre de dispositions législatives qui traitent de la protection de notre environnement et des mesures de contrôle sur le développement des ressources: la Loi sur la protection des eaux navigables et la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie.
J'aimerais parler d'un changement particulièrement intéressant. Dans les Territoires du Nord-Ouest, les conservateurs ont décidé de se débarrasser de tous les offices locaux et régionaux de gestion des eaux et des ressources qui comptaient des représentants des Premières Nations locales ainsi que des gouvernements fédéral et territoriaux. Il en existait un certain nombre partout dans les Territoires du Nord-Ouest, tout comme ailleurs au pays. Ces offices tenaient compte des intérêts particuliers des collectivités des Premières Nations dans le dossier dont nous débattons aujourd'hui. En vertu du processus en place, une société, minière ou autre, devait présenter un plan à l'office. Celui-ci était alors chargé d'examiner la proposition et de poser des questions.
Chose plus importante encore — et nous pourrions tous en tirer une très grande leçon —, les représentants des offices allaient rencontrer les collectivités des Premières Nations, et la population locale leur expliquait directement ce que seraient les répercussions des projets. Ce ne sont pas tous les projets qui se butaient à une très forte opposition. Il va sans dire que, dans de nombreuses localités, les gens cherchent du travail et des débouchés qui généreront de la richesse dans leur milieu de vie et qui leur profiteront, autant à eux qu'à leurs enfants et aux générations futures. Toutefois, ils sont conscients qu'il faut envisager les choses en pensant aux générations futures, et non simplement en fonction des prochains mois ou des prochaines années; ils ont une vision à long terme.
Il était toujours important que les gens comprennent que les plans expliquaient la forme qu'allait prendre le projet de développement et ses répercussions. Ils devaient aussi savoir que des mesures d'atténuation adéquates allaient être mises en oeuvre pour réduire au minimum les répercussions, pour atteindre les objectifs précis concernant l'extraction des ressources et la création d'emplois et pour faire en sorte que certains des revenus retournent dans la collectivité et ailleurs. Toutefois, il était aussi important que, peu importe la durée de vie du projet de développement, il existe des mécanismes intégrés ou d'autres méthodes pour veiller à ce que le site soit le plus possible remis dans son état naturel.
C'est ce genre de processus qui a été éliminé. Cela est devenu évident lorsque j'ai eu la chance, à l'été 2013, de visiter Yellowknife et de rencontrer les représentants de certains de ces offices. J'ai rencontré des membres des Premières Nations Tlicho, qui m'ont un peu fait connaître leur culture et leur façon de gérer les ressources naturelles afin d'en tirer le meilleur parti possible pour leur communauté. J'ai beaucoup appris.
Cette visite fut intéressante. Elle remonte à quelques années, mais lorsque j'ai rencontré les représentants des offices, ils étaient déjà inquiets, entre autres, parce que le gouvernement éliminait de plus en plus les mesures de soutien dont ils disposaient. Par exemple, si un projet de développement allait avoir des répercussions sur un cours d'eau en particulier, que ce soit un lac ou une rivière, on mobilisait les biologistes du ministère des Pêches et des Océans et les représentants de l'office local. Ces derniers participaient au projet, prenaient part aux consultations et pouvaient aller parler directement aux citoyens en tenant compte de leur vision de la terre, de l'environnement et de la pêche. Les représentants pouvaient expliquer concrètement, à l'aide de faits, les répercussions d'un projet de développement.
Déjà en 2012, on s'était rendu compte que, dans la foulée des compressions massives au ministère des Pêches et des Océans, on n'avait plus le même nombre de fonctionnaires. C'était le cas, par exemple, à Yellowknife. Au lieu d'avoir 8 ou 10 scientifiques et gestionnaires affectés aux relations avec ces offices, il n'y en avait plus que 2. Il fallait chercher cette expertise à Burlington, en Ontario, ou à Winnipeg, au Manitoba. Il ne s'agissait plus d'une expertise locale.
Là où je veux en venir, c'est qu'on commençait déjà à voir que, sous le gouvernement, la situation se détériorait du point de vue du contrôle sur les décisions relatives au développement des ressources.
Nous avons ensuite été saisis, je crois, du projet de loi , qui a permis de créer un superoffice pour la vallée du Mackenzie. Le gouvernement pensait que cela accélérerait le processus et le rendrait moins lourd, puisque les entreprises n'auraient à transiger qu'avec un seul office. Du coup, elles seraient en mesure de faire le travail beaucoup plus rapidement, c'est-à-dire accéder aux ressources, les extraire et réaliser des bénéfices.
À ce propos, dans les nouvelles de ce matin, on parlait de la nation tlicho qui poursuit le gouvernement parce qu'elle estime que le superoffice ne tient pas compte de l'objectif de l'accord sur l'autonomie gouvernementale. En fait, le superoffice élimine le contrôle exercé par les Premières Nations à l'échelle locale, et c'est ce que les Tlichos contestent.
Je sais que nous avons entendu le ministre répéter aux collectivités des Premières Nations que, si cette mesure ne leur plaît pas, elles devront poursuivre le gouvernement. Nous savons également que le gouvernement débourse des centaines de millions de dollars, pris dans les poches des contribuables canadiens, pour continuer de lutter contre les droits des Premières Nations de notre pays, droits qui sont clairement définis dans la Constitution. À mon avis, cette situation est inacceptable.
Je ne crois pas que le projet de loi constitue un pas dans la bonne direction. Je suis déçu de l'orientation adoptée par le gouvernement dans ses relations avec les communautés des Premières Nations.
Si le gouvernement continue dans cette voie, tout ce qu'il fera sera rejeté par les tribunaux, à l'instar du projet d'aménagement du territoire du bassin hydrographique de la rivière Peel.
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Monsieur le Président, je suis heureuse d'intervenir au sujet de ce projet de loi. Hier, j'ai rencontré un groupe de représentants du Yukon qui ont soulevé de vives inquiétudes quant aux modifications que le gouvernement a incluses dans le projet de loi, mais qu'ils n'avaient pas approuvées. Ce n'est pas seulement qu'ils ne les avaient pas acceptées, mais il n'en avait pas été question.
C'est tout à fait faux.
Le député a beau dire que c'est faux, monsieur le Président, mais c'est exactement ce qui s'est passé.
Je vais d'abord parler brièvement du projet de loi. Je signale à la Chambre que les néo-démocrates s'opposent au projet de loi en raison des lacunes du processus. Je suppose que si le député veut prendre la parole, il aura son tour pour le faire ou il pourra me poser une question.
En fait, le projet de loi a été élaboré derrière des portes closes. Il est issu du Sénat, mais il aurait dû s'agir d'un projet de loi d'initiative ministérielle. Cela illustre le manque de respect que le gouvernement manifeste à l'égard des obligations découlant des traités et des droits constitutionnels.
C'est pour cela que la participation du public a été insuffisante. Je sais que le député de a tenu une réunion à ce sujet au Yukon et que la salle était comble. Cela démontre l'importance de ce dossier pour les habitants du Yukon.
Je devrais fournir un peu de contexte au sujet du projet de loi car nous n'en avons pas discuté depuis quelque temps et certains ne le connaissent peut-être pas. Le projet de loi vise à modifier la Loi sur l'évaluation environnementale et socioéconomique au Yukon et la Loi sur les eaux du Nunavut et le Tribunal des droits de surface du Nunavut. Son titre abrégé est la Loi sur l'amélioration de la réglementation au Yukon et au Nunavut. Il a été présenté au Sénat le 3 juin 2014.
Le projet de loi vise à changer le régime de réglementation en vigueur au Yukon et au Nunavut. Il compte deux parties. La partie 1 propose une série de modifications à la Loi sur l'évaluation environnementale et socioéconomique au Yukon et la partie 2 propose des modifications à la Loi sur les eaux du Nunavut et le Tribunal des droits de surface du Nunavut.
Il faut souligner que le projet de loi redéfinit unilatéralement le système d'évaluation environnementale et socioéconomique du Yukon. Le système découle de l'accord-cadre définitif, qui a réglé la majorité des revendications territoriales des Premières Nations dans le territoire. La plupart des résidants du territoire considèrent que la Loi sur l'évaluation environnementale et socioéconomique du Yukon — ou LEESY, dans sa forme abrégée — est une solution élaborée au Yukon et adaptée aux conditions environnementales et sociales du territoire.
On estime que les changements proposés dans le projet de loi sont imposés de l'extérieur pour satisfaire les entreprises d'exploitation des ressources du Sud. Là encore, nous pouvons constater que le gouvernement écoute l'industrie plutôt que de consulter les gens sur le terrain, c'est-à-dire ceux qui vivent sur ces terres et y travaillent.
Les néo-démocrates sont bien entendu contre ce projet de loi parce qu'il a été élaboré sans consultation adéquate des Premières Nations et des résidants du Yukon et que la majorité d'entre eux s'y opposent. Bien que les modifications proposées à la loi relative au Nunavut à la partie 2 soient principalement d'ordre administratif, l'Office des eaux du Nunavut a soulevé quelques préoccupations à leur sujet.
Nous devons absolument reconnaître que le projet de loi abolirait le processus d'évaluation environnementale et socioéconomique élaboré au Yukon par les Yukonnais pour le Yukon. Nous comprenons pourquoi les gens s'insurgent contre les mesures que le gouvernement cherche à imposer.
Comme je l'ai indiqué, les consultations menées auprès des Premières Nations du Yukon étaient insuffisantes. Des consultations doivent être menées avant que ce genre de modifications puissent être proposées. Comme l'ont dit à maintes reprises les néo-démocrates, dans les faits, le gouvernement a inclus dans le projet de loi des modifications dont personne n'avait parlé, et ce n'est pas la première fois que nous le voyons procéder ainsi. Il semble les avoir sorties de nulle part.
Le gouvernement conservateur, qui compte sur l'entière collaboration des députés conservateurs et du sénateur du Yukon, impose aux Yukonnais un programme favorisant les intérêts des sociétés d'exploitation des ressources du Sud. Nous pouvons donc comprendre pourquoi les gens s'insurgent contre cette situation.
Comme je l'ai mentionné, mon collègue, le député des , a tenu des audiences sur la question. Cependant, il n'en demeure pas moins que quatre changements soulèvent vraiment l’ire des Yukonnais.
Voici ce que mon collègue a dit:
L'un de ces changements accorde au ministre des Affaires autochtones et du développement du Nord canadien le pouvoir de donner des orientations exécutoires à l'Office d'évaluation environnementale et socioéconomique du Yukon. C'est une mesure qui a été mise en oeuvre dans les Territoires du Nord-Ouest, où elle a soulevé des préoccupations légitimes. Le Yukon, dont le régime est différent depuis les 10 dernières années, perçoit toute mesure du genre comme une atteinte aux droits et aux pouvoirs qu'il a obtenus de haute lutte sur ses terres et ses ressources.
Cependant, nous avons déjà vu à maintes reprises le présent gouvernement conservateur essayer d’accorder des droits à un ministre fédéral pour prendre unilatéralement des décisions. Je crois que cela inquiète grandement ces personnes.
En ce qui concerne le deuxième changement, je vais encore une fois citer le discours de mon collègue, le député des :
Le deuxième changement est l'introduction de délais prévus par la loi relativement aux évaluations.
Le troisième changement autorise le ministre des Affaires autochtones et du développement du Nord canadien à déléguer une partie ou la totalité des responsabilités au gouvernement du Yukon. C'est une mesure qui préoccupe grandement les Premières Nations, de même que les Yukonnais. Le gouvernement du Yukon a réussi à conclure avec les Premières Nations une entente qui est cruciale pour l'avenir de ce territoire. Je pense que personne ne le contestera. Les rapports entre les Premières Nations et les provinces deviennent de plus en plus tendus au fil du temps. L'incapacité de négocier de nation à nation au niveau provincial cause toutes sortes de problèmes dans une foule de projets partout au pays. Par conséquent, le mode de délégation des responsabilités suscite des préoccupations.
Je cite encore une fois un extrait du discours qu’a prononcé mon collègue des Territoires du Nord-Ouest lorsque la Chambre a été saisie pour la première fois de la question.
On prévoit également de vastes exemptions à la LEESY en ce qui a trait aux renouvellements, ainsi que des modifications aux dispositions sur les permis et les autorisations. En voyant cela, les gens se demandent ce qui se passe et veulent savoir comment s'assurer que ces mesures sont adéquates.
De plus, ces modifications favorisent davantage le gouvernement du Yukon que les Premières Nations de ce territoire, [...]
— les députés comprennent sûrement pourquoi il y a des contestations judiciaires à l'heure actuelle —
[...] soit l'autre partenaire du processus prévu dans la LEESY. Le Conseil des Premières Nations du Yukon a menacé d'entreprendre des procédures judiciaires si le projet de loi est adopté.
Comme mes collègues l'ont dit pendant ce débat, les mesures législatives mises de l'avant par le gouvernement conservateur se retrouvent devant les tribunaux les unes après les autres, et que se passe-t-il? Il perd chaque fois. Les conservateurs ont perdu environ 200 causes liées aux Premières Nations. Il est plutôt évident que l'on ne sert pas les intérêts des Canadiens en présentant des mesures législatives auxquelles tant de gens s'opposent.
Voici une solution rapide: il suffit d'écouter les demandes de changements et de mettre ces changements en application. Voilà, le tour est joué. Cela ne coûterait pas très cher, bien moins cher que si l'on s'adressait aux tribunaux.
Je l'ai dit tout à l'heure, mon collègue a tenu une réunion à ce sujet au Yukon. Habituellement, rares sont les gens qui ont envie de discuter du processus d'évaluation environnementale, et surtout, rares sont ceux qui comprennent les tenants et aboutissants de ce type d'enjeu. Les Yukonnais, eux, comprennent le processus, à un point tel, que la salle était pleine à craquer. Je crois donc qu'il est important que le gouvernement écoute le débat que nous avons aujourd'hui et les commentaires qui sont faits. Il devrait ensuite réécouter le témoignage qui a été présenté et se dire « Peut-être que nous devrions prendre un peu de recul. Nous pouvons faire ce qui s'impose. »
Les conservateurs peuvent apporter les amendements nécessaires, mais encore faut-il qu'ils le veuillent.
Je trouve qu'il est important de citer certains des témoins qui ont comparu devant le comité sénatorial. La grande chef Ruth Massie, du Conseil des Premières Nations du Yukon, a été heureuse de témoigner devant ce comité, car elle souhaitait s'assurer que les préoccupations du conseil soient entendues, dans l'espoir que le gouvernement en tiendrait compte de bonne foi. Elle a parlé du Conseil des Indiens du Yukon, qui a représenté les Premières Nations du Yukon lors des négociations sur les revendications territoriales et qui a signé l'accord-cadre définitif, en 1993. Cet accord enjoignait au Conseil des Premières Nations du Yukon, au Canada et au Yukon d'élaborer des dispositions législatives afin de mettre en oeuvre les objectifs et les principes énoncés dans l'évaluation des activités de développement figurant au chapitre 12. Il s'agit des dispositions contenues dans la Loi sur l'évaluation environnementale et socioéconomique au Yukon. Ils sont prêts à faire cela, mais le gouvernement leur a mis des bâtons dans les roues.
Voici ce qu'a déclaré Ruth Massie:
Le CPNY compte neuf Premières Nations autonomes du Yukon et travaille en collaboration avec les autres Premières Nations du Yukon — y compris les trois Premières Nations qui n’ont pas signé d’entente — sur des projets et des initiatives précises.
Il s'agit d'une organisation qui est déjà dotée des assises nécessaires pour pouvoir collaborer avec ses partenaires et qui est en mesure de travailler avec les organisations minières. Elle est disposée à le faire, mais elle doit s'assurer que, au bout du compte, la Terre mère sera protégée.
Elle a ajouté ce qui suit:
Plus particulièrement, le CPNY et les Premières Nations du Yukon ont travaillé en collaboration au cours des 15 dernières années pour traiter des questions relatives à la LEESY, y compris son élaboration, sa mise en œuvre et son examen. En 2008, l’UFA a ordonné au CPNY, au Canada et au Yukon d’effectuer un examen complet de la LEESY, connu sous le nom d’« examen quinquennal » puisqu’il devait avoir lieu cinq ans après le texte législatif fédéral de la LEESY. Malgré les revendications des fonctionnaires fédéraux, cet examen n’a pas encore été achevé.
Faisons une pause ici. Le gouvernement a présenté ce projet de loi même si l'examen prévu de la loi n'a pas encore eu lieu. Il y a un problème.
La grande chef a ensuite dit ceci:
Pendant plusieurs années au cours de l’examen quinquennal, les fonctionnaires fédéraux ont soutenu qu’aucune modification législative ne serait apportée à la LEESY pour mettre en œuvre les recommandations de l’examen quinquennal. Or, le Canada propose maintenant que le projet de loi S-6 modifie la LEESY conformément à son Plan d’action visant à améliorer les régimes de réglementation dans le Nord. Nous croyons que certaines des modifications proposées dans le projet de loi S-6 minent l’esprit et l’objectif de la LEESY, soit d’appliquer les droits issus de traités des Premières Nations du Yukon et de leurs citoyens. Les modifications proposées altèrent fondamentalement le fonctionnement du processus de la LEESY. Dans certains cas, ces modifications proposées portent sur des questions qui n’ont jamais été abordées pendant l’examen quinquennal ou qui, dans d’autres cas, contredisent les accords conclus entre le CPNY, le Canada et le Yukon au cours de cet examen.
En effet, le gouvernement contredit les accords. Nous savons que c'est le cas, parce que nous l'avons constaté à maintes reprises.
La grande chef a ajouté ceci:
Si les modifications proposées dans le projet de loi S-6 sont adoptées, l’État aura manqué à son obligation de consulter les Premières Nations et de prendre des mesures d’adaptation à leur égard, ainsi qu’à son devoir constitutionnel de défendre l’honneur de l’État.
À notre avis, ces modifications portent atteinte aux droits en vertu de nos accords sur les revendications territoriales, y compris le droit à une évaluation indépendante de certains projets à réaliser conformément au chapitre 12 des ententes définitives. Ces modifications porteraient également atteinte à l’intégrité et à l’efficacité de la LEESY.
Comment peut-on imaginer mettre en place une mesure législative qui porte atteinte à l'intégrité et à l'efficacité de la loi elle-même? Cela signifie que les modifications proposées dans le projet de loi devront être rejetées ou révisées. C'est pourquoi, de ce côté-ci de la Chambre, nous prenons la parole aujourd'hui pour rejeter ce projet de loi et pour demander qu'il soit révisé.
J'ai ici une foule d'autres documents, mais je n'aurai pas le temps de tous les passer en revue.
Cela dit, il m'apparaît essentiel de rappeler, moi aussi, que des représentants sont venus à Ottawa, hier, pour discuter de la question et demander d'amender le projet de loi puisqu'il aura des répercussions sur leurs territoires, sur leur capacité d'agir dans certains domaines et sur la protection de l'environnement. Pourtant, le ministre les a essentiellement fait taire.
Je cite les propos d'Eric Fairclough, chef de la nation de Little Salmon/Carmacks, tels que les rapportent un article de cbc.ca en date d'hier:
Le ministre nous a fait taire en nous disant que nous n'étions « pas de véritables gouvernements » et qu'il n'était donc pas tenu de nous faire participer activement à la modification de la loi issue de nos traités.
Si les ministériels cherchent à me convaincre que ce n'est pas ce qu'a dit le gouvernement, il y a un problème. Cependant, je ne peux pas imaginer que quelqu'un puisse inventer de toute pièce une histoire voulant que le ministre ait dit que ce ne sont pas de véritables gouvernements. C'est une allégation grave.
M. Fairclough a ajouté que cela « va à l'encontre des récentes décisions des tribunaux qui ont confirmé l'obligation de consulter les Premières Nations ».
Ce chef n'est pas le seul à avoir formulé de tels commentaires. Je pourrais parler d'un autre groupe autochtone du Nord. Il administre une partie des Territoires du Nord-Ouest qui a une superficie comparable à celle du Nouveau-Brunswick. Il a déjà demandé une injonction à la Cour suprême des Territoires du Nord-Ouest relativement à une mesure législative fédérale semblable à celle dont il est aujourd'hui question, car elle violerait le traité qu'il a négocié de haute lutte. Ce groupe, ce sont les Tlichos, et ils disent que:
[...] la loi, qui entrera en vigueur en avril, édulcorerait le processus décisionnel local en remplaçant les organismes de réglementation environnementale qui ont été mis sur pied en vertu d'accords sur le règlement des revendications territoriales par un unique office aux ordres d'Ottawa.
Les critiques affirment que le superoffice est la concession que les conservateurs [...] ont extorquée au gouvernement territorial en échange de l'inclusion dans la même mesure législative de règles lui cédant les redevances sur les ressources.
Ce n'est pas qu'au Yukon. Ce n'est pas qu'en Ontario. Ce n'est pas qu'au Nouveau-Brunswick. Le même scénario se répète dans chaque province et chaque territoire que vise un projet de loi d'initiative ministérielle dont le gouvernement force l'adoption malgré les craintes qu'il soulève. Résultat: on se retrouve systématiquement devant les tribunaux.
Pour que les mesures législatives fonctionnent bien et pour cultiver de bonnes relations — pas seulement de bons liens, mais aussi d'excellentes relations de travail — avec les Premières Nations, les Inuits et les Métis, il faut faire en sorte qu'il y ait un véritable dialogue. Il faut tenir compte de ce qu'ils disent, car ils connaissent les effets négatifs que les changements pourraient avoir sur eux. Il faut apporter les changements nécessaires avant d'adopter les mesures législatives et avant qu'elles ne se retrouvent devant les tribunaux.
Contrairement au gouvernement conservateur, notre chef respecterait et consulterait les parties intéressées dans le dossier de l'exploitation des ressources du Nord. Il faut reconnaître que le dialogue de nation à nation est extrêmement important. Il faut que les habitants du Nord participent pleinement à tous les projets d'exploitation des ressources du Nord.
Il y a quelques autres aspects dont il faut aussi parler. Selon la grande chef Ruth Massie et le chef Eric Fairclough, les préoccupations des Premières Nations touchent quatre aspects: les instructions données à l'office, la délégation des pouvoirs fédéraux au gouvernement du Yukon, les exemptions concernant les renouvellements et les modifications, et le calendrier des évaluations faites en vertu de la Loi sur l'évaluation environnementale et socioéconomique au Yukon
Je souligne en terminant que le gouvernement doit admettre qu'il faut apporter ces changements au projet de loi. Je sais que la chef du NPD du Yukon travaille en étroite collaboration avec les Premières Nations et qu'elle réclame, comme eux, que ces changements soient apportés au projet de loi.
Je termine là-dessus et je suis disposée à répondre aux questions.
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Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole aujourd'hui pour parler du projet de loi , un projet de loi qui aura une incidence considérable sur nous tous, quelle que soit la région du pays où nous habitons. Manifestement, le projet de loi aura des répercussions plus importantes dans le nord de notre pays, en particulier au Nunavut et au Yukon.
J'aimerais commencer par reconnaître le mérite de la suggestion concernant la possibilité qu'un comité permanent se déplace pour recueillir directement les opinions au sujet d'enjeux comme celui-ci, car ce serait fort positif dans certains cas. Il faudra attendre que les porte-parole et le ministre décident si ce voyage aura lieu. J'avais l'impression que le parti de l'opposition officielle n'autorisait pas les comités à voyager. Toutefois, j'ose espérer que sa position a changé, lorsque les comités ont des raisons légitimes de voyager. Il faudra attendre de voir ce qui va se passer.
Un député d'en face a fait allusion au comité des affaires autochtones. Personnellement, je me réjouirais de voir le comité des affaires autochtones prendre des mesures plus tangibles à l'égard d'un dossier fort important qui a été soulevée à la Chambre aujourd'hui, à savoir celui des centaines de femmes ou de jeunes filles autochtones assassinées ou portées disparues.
Cela dit, je vais revenir sur le projet de loi .
Lorsque je pense au projet de loi , plusieurs choses me viennent à l'esprit. J'ai écouté très attentivement une bonne partie des questions qui ont été posées aux néo-démocrates, plus particulièrement celles portant sur les consultations. Encore une fois, j'ai eu l'occasion de poser quelques questions sur la notion de consultation. Je sais que le projet de loi lui-même apporterait des changements très importants. En fait, il était justifié de tenir des consultations dans ce cas, et je crois qu'il y a un gros point d'interrogation: dans quelle mesure le gouvernement s'est engagé de bonne foi dans le processus de consultation?
Ce que je sais, c'est que j'ai eu l'occasion de recevoir la rétroaction de quelques personnes provenant du Nord. L'une de ces personnes est l'ancien député de Yukon, Larry Bagnell, que j'ai connu très brièvement lorsque j'ai été élu pour la première fois, dans le cadre d'une élection partielle. Tout comme moi, il semblait croire qu'il n'y a pas eu de véritables consultations et il a soulevé quelques préoccupations qui, selon nous, étaient importantes. Par exemple, on peut se demander pourquoi le gouvernement n'a pas été en mesure de dégager le consensus nécessaire, de dégager un plus grand consensus en ce qui concerne l'adoption de la mesure législative dont nous sommes saisis aujourd'hui. À mon avis, il n'a pas atteint cet objectif.
Les échos que nous commençons à recevoir des citoyens ou des intervenants qui communiquent avec les porte-parole ou les bureaux des caucus témoignent également de cette attitude du gouvernement à l'égard du projet de loi.
Le fait que le projet de loi fasse l'objet d'une motion d'attribution de temps en dit long sur la situation. Cela limitera le nombre de députés qui pourront prendre la parole au sujet du projet de loi. À vrai dire, je pense que la question intéresse plus particulièrement certains députés, mais je crois que nous devrions au moins donner à tous les députés l'occasion de dire ce qu'ils pensent du projet de loi. Or, comme d'autres mesures législatives, le projet de loi fait l'objet d'une motion d'attribution de temps.
À première vue, il semble que le gouvernement voit dans l'attribution de temps une façon de faire adopter ses projets de loi.
Malheureusement, à cause de cette pratique, nous serons forcés de nous prononcer sur un projet de loi qui aurait été bien meilleur si le gouvernement avait réussi à mener des consultations de bonne foi — et j'insiste la notion de bonne foi, parce que de nombreux ministériels ont affirmé que le gouvernement avait bel et bien mené des consultations. J'ai même entendu certains d'entre eux citer des gens disant que le gouvernement avait mené des consultations. Je crois qu'il l'a fait dans une certaine mesure, mais, de toute évidence, le genre de consultation qu'il préconise ne s'est pas avérée efficace, car, selon les échos que nous recevons, le gouvernement aurait vraiment avantage à revoir son approche.
Que ferait le projet de loi , au juste? Lorsqu'on lit le sommaire, on constate qu'il viserait essentiellement à établir des délais pour les évaluations environnementales et un régime de recouvrement des coûts. Le sommaire dit également ceci:
Cette partie modifie également la loi afin que des instructions générales obligatoires ministérielles puissent être données à l’Office, que le ministre puisse déléguer ses attributions au ministre territorial et que le membre de l’Office qui participe à une préétude ou à une étude puisse, malgré l’expiration de son mandat ou sa révocation pour cessation de résidence au Yukon, continuer à exercer ses fonctions relativement à cette préétude ou étude jusqu’à ce que les décisions écrites soient rendues [...]
La partie 2 modifie la Loi sur les eaux du Nunavut et le Tribunal des droits de surface du Nunavut afin de modifier la durée maximale de certains permis, de fixer des délais pour la prise de certaines décisions, de prévoir la conclusion d’ententes relativement aux sûretés, d’établir un régime de recouvrement de coûts [...]
Deux lois seraient grandement modifiées par le projet de loi .
Certains problèmes ont été soulevés. J'ai mentionné qu'il y a eu un manque de consultation, et quelques points ont justement été portés à mon attention. Le gouvernement propose maintenant de nouvelles mesures dans le projet de loi , et on peut se demander s'il a poussé les consultations aussi loin.
Le projet de loi accorderait au ministre de vastes pouvoirs lui permettant de donner des orientations exécutoires à l'office d'évaluation et de transférer unilatéralement certains pouvoirs à un ministre territorial sans le consentement des Premières Nations. Il serait aussi possible de ne pas exiger d'évaluation lors du renouvellement ou de la modification de certains projets. Un autre problème concerne les échéanciers parfois irréalistes. Voilà quelques-uns des points problématiques. De façon générale, on a l'impression que ces éléments n'ont pas fait l'objet d'une consultation réelle et honnête, et ce ne sont probablement pas les seuls.
Pour ce qui est des possibilités qu'offre le Nord, dans un contexte d'évolution et de développement de notre nation, nous aurions tort de négliger le potentiel de cette région, puisque son développement pourrait profiter à l'ensemble du pays s'il est fait correctement et encadré par une bonne gouvernance. Nous pourrions tous en bénéficier, et pas seulement sur le plan financier. Dans bien des cas, quand nous parlons du Nord ou d'un projet de loi comme celui-ci, nous ne portons pas assez attention à l'environnement, à la beauté naturelle de la région, à ce que nous pouvons faire pour dynamiser le Nord et le rendre plus accueillant pour les gens en quête d'une expérience nordique. Nous pourrions faire tellement plus.
Le Parti libéral est en faveur d'évaluer les richesses naturelles du Nord au moyen de méthodes viables. La mise en branle de ces activités économiques dépend de la durabilité de l'environnement et des communautés autochtones concernées qui participent en tant que partenaires égaux.
Dans l'ensemble, le gouvernement a échoué en matière d'exploitation des ressources naturelles — et pas seulement dans le Nord. Si on pense aux Prairies ou à toute autre région du Canada, on constate que le n'a exercé aucun leadership à cet égard. Le Cabinet du premier ministre n'a fait preuve d'aucun leadership en matière d'exploitation des ressources.
Nous pourrions citer plusieurs exemples. Nous pourrions mentionner le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui ou le dossier controversé des pipelines, dans lequel une province négocie avec une autre alors que le premier ministre se tient coi, sans prendre aucune initiative susceptible de rapprocher les parties et de bâtir un consensus.
Si nous souhaitons exploiter et promouvoir nos ressources, nous devons conclure un contrat social. Ottawa a la responsabilité de travailler avec les différents intervenants et d'exercer un leadership solide. En matière de développement, c'est ce qui nous a manqué au cours des dernières années et nous en avons payé le prix collectivement, tant au point de vue social qu'économique. Nous avons raté des occasions parce que le premier ministre n'a pas jugé bon de faire preuve de leadership afin de conclure un contrat social.
Je suis intervenu à plusieurs reprises au sujet de projets de loi touchant nos Premières Nations et nos peuples autochtones. S'il y a un thème commun qui les lie, comme tout ce qui concerne nos Premières Nations et nos peuples autochtones, c'est le manque de consultation. Encore une fois, il s'agit d'une des plus importantes critiques.
Comment les conservateurs peuvent-ils s'attendre à ce qu'un parti de l'opposition appuie sa mesure législative si les intéressés affirment ne pas avoir été adéquatement consultés? Selon ce qu'on entend, le projet de loi et l'incidence qu'il pourrait avoir sur le développement soulèvent des craintes légitimes. Le gouvernement semble croire qu'il sait, lui, ce qu'il convient de faire, et qu'il n'a pas nécessairement besoin de consulter. Il tient à dire qu'il a mené des consultations, mais s'agit-il de consultations valables?
Au total, 11 Premières Nations autonomes ont clairement affirmé que les consultations menées par le gouvernement fédéral ne suffisaient pas et que le projet de loi ne mérite donc pas d'être appuyé. Voilà une déclaration de poids. Ces Premières Nations affirment ne pas avoir été suffisamment consultées. Elles n'avaient même pas été informées de certaines des mesures que le gouvernement a incluses dans le projet de loi. Ont-elles vraiment été consultées sur tous les aspects de la mesure législative qui a été présentée? Selon les renseignements que nous avons obtenus, ce n'est pas le cas, et c'est ce qui explique les graves lacunes du projet de loi.
J'ai déjà survolé Yellowknife, et j'y suis même allé une fois. J'ai déjà servi dans les Forces canadiennes, et ce fut un tout un privilège. J'étais basé à Lancaster Park, juste au nord d'Edmonton. Nous avions des Hercules C-130, et nous nous rendions dans le Nord pour pêcher de l'omble chevalier. Tout le monde aimait pêcher ce magnifique poisson.
Lorsqu'on survole Yellowknife, on prend davantage conscience de l'immensité de notre pays. Il y a tellement de débouchés là-bas. Pensons à l'or, à l'argent, au cuivre, au zinc et à tous les autres minerais qui peuvent être extraits dans le Nord. Le potentiel de développement y est énorme.
Le Nord compte probablement quelque 100 000 habitants, peut-être un peu plus. Nous devons y jouer un rôle, mais nous devons d'abord collaborer avec les gouvernements territoriaux. Nous devons aussi collaborer avec les Inuits, nos Premières Nations, les personnes d'origine autochtone, ainsi que les collectivités qui savent ce qui passe sur le terrain et connaissent donc la meilleure façon de développer le Nord pour les générations futures. Il ne s'agit pas seulement d'extraire les ressources, mais aussi de trouver des moyens de les valoriser.
La principale priorité, quand on présente un projet de loi de cette nature, serait d'obtenir un consensus. Je ne crois pas que le gouvernement est parvenu à l'obtenir.
Je ne pense pas que le Parti libéral et la députée de s'opposeraient à ce que les membres du comité permanent se rendent dans le Nord pour mieux comprendre la situation et voir ce qui se passe vraiment sur le terrain.
Après tout, le projet de loi aurait des répercussions importantes. Nous comptons sur le gouvernement pour traiter la question d'une manière conciliante et respecter le processus de consultation. Je crois que j'ai parlé de consultation une dizaine de fois dans mon intervention.
Si nous ne sommes pas prêts à faire le travail, nous devrions y penser à deux fois avant de présenter une mesure législative. Si nous ne respectons pas le processus de consultation et que nous forçons l'adoption du projet de loi, cela pourrait mener à plus d'affrontements et de problèmes à l'avenir. Il est préférable de bien faire les choses dès le départ et de favoriser la collaboration. Peu importe que cela prenne un ou deux mois supplémentaires de travail. L'attitude dont le gouvernement a fait preuve en présentant ce projet de loi et en recourant à l'attribution de temps en dit long.
Je me rends compte que mon temps de parole est écoulé. Je m'arrêterai donc là.
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Monsieur le Président, à la suite de votre commentaire, je vais essayer de finir ce débat sur un ton positif. J'espère y arriver. Comme d'habitude, je suis très honoré de me lever à la Chambre pour parler du projet de loi .
Je suis honoré en ce sens que j'ai toujours l'occasion de soulever des questions qui me tiennent à coeur, en tant que député d'une circonscription nordique, comme celle d'Abitibi—Baie-James—Nunavik—Eeyou, et dans laquelle il y a une diversité de populations. Je rappelle que cette circonscription compte 14 communautés inuites, neuf communautés cries — et bientôt 10, je l'espère — et deux communautés algonquines. De plus, les villes de cette circonscription dépendent largement du développement des ressources naturelles.
Ainsi, c'est toujours un privilège de me lever pour parler de ces questions qui tiennent à coeur à mes concitoyens dans cette vaste et magnifique circonscription.
En outre, je suis honoré de prendre la parole sur ce projet de loi, parce que je voudrais soulever deux questions essentielles dans le cadre de ce débat que je termine. La première, c'est le fait que le projet de loi déconstruit en quelque sorte le processus d'évaluation environnementale prévu pour les Yukonnais et développé par les gens du Yukon. La deuxième concerne toute la question qui a été largement débattu cet après-midi à propos de la consultation et de l'accommodement des Premières Nations.
D'ailleurs, je rappelle sans cesse à la Chambre que ces questions constituent des obligations constitutionnelles que nous avons en tant que pays et que le gouvernement a envers les Premières Nations. On ne peut nier ces questions très sérieuses. Elles ne sont pas légères et, en fait, je pense qu'elles sont très importantes.
Ce matin même, j'ai déposé à la Chambre le projet de loi C-641, qui vise à harmoniser les lois du Parlement canadien avec la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Ce document de droit international est le seul qui traite spécifiquement des droits des peuples autochtones, qui sont au nombre de 370 millions sur cette planète. J'estime que nous devons, en quelque sorte, embrasser ce document important à la Chambre.
Lorsque la déclaration a été adoptée en 2007, le secrétaire général des Nations Unies parlait de ce document comme de la voie de la réconciliation entre les États et les peuples autochtones. Je suis entièrement d'accord avec cette déclaration. Cela nous empêcherait de vivre le genre de situations que nous vivons présentement concernant toute la question de consultation et d'accommodement des peuples autochtones, lorsqu'on examine des mesures législatives à la Chambre.
En effet, l'article 19 de cette déclaration stipule qu'il faut consulter et accommoder les peuples autochtones, en plus d'obtenir leur consentement, lorsqu'on examine des mesures législatives qui les touchent particulièrement et directement.
J'ai déposé le projet de loi C-641 ce matin même, et j'en suis très fier. Il amènerait non seulement les Autochtones, mais l'ensemble des Canadiens vers cette voie de la réconciliation dont on a tant besoin maintenant au pays.
Cela reste à suivre, et j'espère obtenir l'appui de la Chambre pour l'adoption de ce projet de loi, voire l'appui de l'ensemble des Canadiens, parce qu'il nous concerne tous.
Dans la cause Delgamuukw, le juge en chef nous a clairement indiqué que nous étions tous ici pour y rester. C'est une déclaration à laquelle je crois aussi. Alors, essayons de trouver un modus vivendi afin de vivre ensemble de façon harmonieuse et pacifique.
En ce qui a trait au processus d'évaluation environnementale dont on parle dans le cadre de ce projet de loi, je peux parler en toute connaissance de cause. En effet, j'ai présidé moi-même le Comité consultatif pour l'environnement de la Baie-James, qui est prévu par le chapitre 22 de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois. Ce comité surveille la mise en oeuvre du régime de protection de l'environnement et du milieu social, qui est prévu par la Convention de la Baie-James et du Nord québécois. Ayant présidé ce comité pendant plusieurs années, je peux en parler longuement, parce que je comprends aujourd'hui l'importance d'avoir un processus clair, indépendant et impartial.
Le Comité consultatif pour l'environnement de la Baie-James, pour la partie sud du territoire de la Baie-James, est composé de Cris, de membres nommés par le gouvernement et d'autres nommés par le gouvernement provincial, soit le Québec, dans ce cas-ci. C'est donc un processus clair.
À cet égard, lorsque les processus d'évaluation environnementale, les pouvoirs et les mandats des comités d'évaluation sont clairs pour tout le monde, le développement se porte bien. Ainsi, le développement dans le Nord du Québec se porte bien, parce qu'on sait à quoi s'en tenir. On connaît les règles et les normes établies en vertu de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois. Quand c'est clair, tout le monde comprend très bien les règles du jeu et sait à quoi s'en tenir, que ce soit les peuples autochtones qui sont directement touchés ou ceux qui exploitent les ressources naturelles, en particulier dans les territoires. Ainsi, tout se porte bien.
Puisque je conclurai le débat, j'aborderai rapidement la question de la consultation et de l'accommodement des peuples autochtones. C'est un point essentiel qui a été discuté tout au long de l'après-midi. J'étais présent tout l'après-midi et j'ai écouté attentivement aussi bien les discours prononcés dans le cadre de ce débat que les questions et réponses qui sont venues de part et d'autre. C'est important de considérer l'ensemble de ces questions.
Ma collègue de a cité quelques exemples des oppositions qui ont été exprimées à ce gouvernement par rapport aux changements qu'il veut apporter par le truchement de ce projet de loi. Dans un premier temps, elle a cité la Wildlife Conservation Society Canada. Elle a cité également la Tourism Industry Association of the Yukon, qui a exprimé son opposition au projet de loi et son appui aux peuples autochtones dans le cadre des modifications qu'on veut apporter en vertu du projet de loi . Je cite cette association touristique qui est présente dans les territoires:
[Traduction]
L'Association de l'industrie touristique du Yukon soutient que, si on retire au gouvernement territorial le pouvoir de prendre des décisions concernant l'aménagement de son territoire, le point de vue des entreprises touristiques du Yukon finira par avoir moins de valeur dans des contextes où l'utilisation des terres est remise en question et un conflit surgit entre les intérêts de l'industrie d'extraction des ressources et ceux des entreprises touristiques.
[Français]
J'aimerais également citer un passage de la lettre que Canadian Parks and Wilderness Society Yukon Chapter a écrite. Cette lettre a été envoyée tant au gouvernement qu'à d'autres députés présents à la Chambre, incluant certains députés de l'opposition. La Canadian Parks and Wilderness Society dit qu'elle s'oppose à certains changements proposés dans le projet de loi , mentionnant quatre points en particulier. Je cite le premier:
[Traduction]
[...] accorde au ministre fédéral de nouveaux pouvoirs lui permettant de donner des orientations exécutoires à l'Office d'évaluation environnementale et socioéconomique du Yukon, un amendement qui compromet l'indépendance de l'office [...]
[Français]
Je viens de parler de l'indépendance de ces processus.
Je terminerai en disant que les Premières Nations directement concernées par ce projet de loi se sont plaintes de n'avoir pas été consultées adéquatement et du fait que leurs préoccupations n'aont pas été reflétées par ces changements.
Il faut toujours se rappeler que nous avons une obligation constitutionnelle envers les Premières Nations. On ne peut pas la nier, tout simplement dire qu'on a consulté les Premières Nations et ne rien faire quant à leurs préoccupations. Nous avons la double obligation de les consulter et de les accommoder. Il faut toujours s'en rappeler.
Encore une fois, nous craignons que ces questions ne se retrouvent à nouveau devant les tribunaux et que ceux-ci nous donnent raison, d'où nos préoccupations.