Monsieur le Président, ce n'est pas tous les jours que le gentilhomme huissier de la verge noire interrompt un discours. Je considère donc cela comme l'un des nombreux privilèges de ceux qui travaillent à la Chambre.
Comme je le disais, la gravité de la haute trahison se passe de commentaires. À l'heure actuelle, quiconque est reconnu coupable de cette infraction doit passer 25 ans en détention avant de pouvoir demander une libération conditionnelle.
En ce qui concerne les meurtres, les députés se rappellent peut-être d'avoir entendu à l'occasion de débats précédents qu'il y a des meurtres au premier degré et des meurtres au deuxième degré, selon le degré de culpabilité morale du délinquant. Le meurtre au premier degré est le plus répréhensible sur le plan moral et il est passible de la peine la plus sévère. À l'heure actuelle, il est passible de l'emprisonnement à perpétuité, et le délinquant doit avoir passé un minimum de 25 ans en détention avant de pouvoir demander une libération conditionnelle.
L'exemple classique de meurtre au premier degré est le meurtre prémédité ou commis de sang-froid. L'expression technique employée dans le Code criminel est « commis avec préméditation et de propos délibéré ». Ce genre d'homicide prémédité est traité plus sévèrement que les meurtres impulsifs et non planifiés qui peuvent se produire sous l'impulsion du moment ou sous l'influence d'émotions vives et être ensuite une source de remords une fois les passions du meurtrier apaisées.
Ces meurtres sans préméditation, impulsifs, sont considérés comme des meurtres au deuxième degré. Ils sont aussi passibles de l'emprisonnement à perpétuité. Le délinquant doit cependant purger au moins 10 ans de sa peine avant de pouvoir demander une libération conditionnelle.
Le degré de culpabilité morale associée à un meurtre au deuxième degré est généralement moindre que dans le cas du meurtre au premier degré. Il n'est donc pas étonnant que les auteurs d'un meurtre au deuxième degré aient de meilleure chances de se réhabiliter et d'obtenir une libération conditionnelle.
Cela dit, il existe des différences parmi les auteurs d'un meurtre au deuxième degré. Certains ont un degré de culpabilité morale particulièrement élevé, qui peut même atteindre celui d'un meurtre au premier degré, prémédité et délibéré. C'est pourquoi les tribunaux peuvent prolonger le nombre d'années à purger avant que le délinquant ne puisse demander une libération conditionnelle. Ce délai pourra aller de 10 à 25 ans.
Pour prendre sa décision, le tribunal doit tenir compte des critères décrits à l'article 745.4 du Code criminel, soit le caractère du délinquant, la nature de l'infraction et les circonstances entourant sa perpétration, ainsi que toute recommandation du jury. Les tribunaux connaissent très bien ces critères et n'hésitent pas à prolonger la période d'inadmissibilité à la libération conditionnelle dans le cas d'un meurtre au deuxième degré, lorsque la situation le justifie.
Prenons par exemple le cas de Robert Pickton, qui a tué plusieurs femmes sur sa ferme porcine, en Colombie-Britannique. Comme aucune preuve ne démontrait qu'il avait agi avec préméditation et délibérément, il a été reconnu coupable de meurtre au deuxième degré. Le tribunal a toutefois porté à 25 ans son délai d'inadmissibilité à la libération conditionnelle, conformément à l'article 745.4.
Cela étant dit, certains types de meurtres au deuxième degré sont tellement odieux que le Parlement a jugé bon de retirer leur pouvoir discrétionnaire aux tribunaux et de rendre ceux qui les commettent inadmissibles à une libération conditionnelle durant 25 ans.
Le Parlement a choisi de procéder de deux façons. Premièrement, il a déterminé qu'un certain nombre de meurtres au deuxième degré sont tellement odieux qu'ils doivent être considérés comme des meurtres au premier degré; la peine est alors automatiquement assortie d'une période d'inadmissibilité à la libération conditionnelle minimale de 25 ans.
L'article 231 du Code criminel dresse la liste des meurtres au deuxième degré qui font partie de cette catégorie: meurtre d'un policier, d'un agent correctionnel ou de quiconque travaille dans une prison; meurtre commis concurremment à une infraction sexuelle, un enlèvement, un kidnapping, une séquestration, un détournement ou une prise d'otage; et un meurtre commis concurremment à une activité terroriste, ce qui englobe les crimes motivés par des considérations politiques, religieuses ou idéologiques.
Deuxièmement, le Parlement a ciblé certaines infractions et précisé que, dans ces cas, la période d'inadmissibilité serait non pas de 10, mais de 25 ans. L'article 745 du Code criminel nomme deux situations où le Parlement a conclu qu'une période d'inadmissibilité inférieure à 25 ans serait inappropriée. Il s'agit d'un meurtre au deuxième degré lorsque le meurtrier a déjà été condamné pour meurtre et d'un meurtre au deuxième degré lorsque le meurtrier a déjà été reconnu coupable de meurtre intentionnel au sens de la Loi sur les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre.
En assujettissant ces deux types de meurtres au deuxième degré aux mêmes peines que les meurtres au premier degré, on envoie le signal aux gens que ceux-ci sont aussi moralement répréhensibles que les meurtres en série, le génocide et les crimes de guerre.
Avant de décrire les dispositions du projet de loi , je demanderais aux députés de garder à l'esprit le bref tour d'horizon que nous venons de faire, car ils pourront mieux apprécier la portée des changements que je propose ainsi que les principes philosophiques qui les sous-tendent.
Je m'en voudrais également de ne pas rappeler aux députés les modifications importantes que le gouvernement a déjà apportées au Code criminel afin de rendre le régime de détermination des peines associées aux infractions de meurtre plus transparent et plus proportionnel.
Pour ce qui est de la transparence, les députés se souviendront qu'en 2011, le gouvernement a fait en sorte que la disposition de la dernière chance dans le Code criminel soit abrogée par l'ancien projet de loi , qui est entré en vigueur le 2 décembre 2011. Je siégeais au comité de la justice à l'époque et, chose incroyable, je me souviens que le porte-parole libéral en matière de justice avait déclaré très clairement que le Parti libéral, s'il formait à nouveau le gouvernement, rétablirait la disposition de la dernière chance. J'espère que ce n'est pas la politique actuelle du Parti libéral, mais je soupçonne que c'est peut-être encore le cas.
Quiconque commet un meurtre après cette date devra purger la pleine période d'inadmissibilité à la libération conditionnelle prévue pour cette peine dans le Code criminel et ne sera donc plus autorisé à demander une libération conditionnelle anticipée après avoir purgé seulement 15 ans de sa peine en prison. Il importe de noter que l'ancien projet de loi prévoyait également de nouvelles conditions strictes pour les personnes déjà reconnues coupables de meurtre qui ont toujours le droit de recourir à la disposition de la dernière chance.
En 2011, le Parlement a adopté l'ancien projet de loi , Loi protégeant les Canadiens en mettant fin aux peines à rabais en cas de meurtres multiples. Ce projet de loi a modifié le Code criminel afin de permettre aux tribunaux d'imposer une peine proportionnelle au préjudice causé par les auteurs de meurtres multiples en imposant des périodes d'inadmissibilité à la libération conditionnelle, soit une période pour chaque victime. Ces périodes devaient être purgées de façon consécutive.
Ce faisant, on garantit que le temps passé en détention par des auteurs de meurtres multiples reflète le caractère odieux de leurs crimes. Dans des cas pareils, les tribunaux s'appuient sur des critères identiques à ceux que j'ai mentionnés plus tôt dans le contexte de l'article 745.4 du Code criminel.
On s'est dernièrement servi des dispositions de l'ancien projet de loi lors du procès de Justin Bourque, qui a récemment été condamné à l'emprisonnement à perpétuité, sans possibilité de libération conditionnelle avant 75 ans, pour l'embuscade et le meurtre de trois agents de la GRC à Moncton, au Nouveau-Brunswick. Nous venons d'honorer leur mémoire il y a quelques jours, à l'occasion du premier anniversaire de leur décès.
Les propositions contenues dans le projet de loi se veulent une autre étape dans les efforts que le gouvernement continue de déployer pour garantir la sécurité des Canadiens. Elles se fondent également sur des mesures antérieurement contenues dans les anciens projets de loi et , en apportant une plus grande transparence et proportionnalité au régime de détermination de la peine pour la haute trahison et le meurtre.
Advenant leur adoption, les mesures proposées dans le projet de loi signifieront donc que, pour les pires délinquants, un emprisonnement à perpétuité voudra dire que le délinquant passera sa vie derrière les barreaux, et non dans la collectivité à la suite de l’octroi d’une libération conditionnelle. Une telle peine constituera ainsi une sanction qui reflète vraiment la gravité des crimes commis.
Les Canadiens sont trop souvent consternés de découvrir que les contrevenants condamnés à une peine d'emprisonnement à perpétuité ne demeurent pas nécessairement derrière les barreaux toute leur vie. De même, le public n'accepte pas facilement que des agresseurs condamnés pour les crimes les plus choquants et monstrueux qui soient puissent être libérés dans la collectivité où ils les ont commis, et où les victimes et leur famille résident peut-être encore.
Pour répondre à ces préoccupations, nous proposons le projet de loi , Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition et apportant des modifications à d'autres lois, afin d'autoriser les peines d'emprisonnement à perpétuité obligatoires et discrétionnaires sans possibilité de libération conditionnelle. Le projet de loi va comme suit.
Tout d'abord, il prévoit une peine d’emprisonnement à perpétuité obligatoire sans possibilité de libération conditionnelle pour une haute trahison et pour un meurtre prémédité perpétré en commettant une agression sexuelle, un enlèvement, ou un acte terroriste; ou si son auteur est un policier ou un employé des services correctionnels; ou si le comportement de son auteur est d’une nature si brutale que l’on ne peut s’empêcher de conclure qu’il y a peu de chance pour qu’à l’avenir ce comportement soit inhibé par les normes ordinaires de restriction du comportement.
Comme les députés peuvent le constater, le projet de loi prévoit une peine d'emprisonnement à perpétuité obligatoire et sans possibilité de libération conditionnelle pour une catégorie assez restreinte de crimes pour le moins odieux. Par exemple, qui d'entre nous oserait soutenir qu'un meurtre prémédité commis d'une manière particulièrement brutale ou dans le cadre d'un enlèvement, d'une agression sexuelle ou d'un acte terroriste ne fait pas partie des meurtres les plus condamnables?
À cet égard, la Cour suprême a statué dans de multiples décisions que, lorsque le meurtre comporte un élément de domination illégale d'une personne par une autre, le degré de culpabilité morale de son auteur est extrêmement élevé et mérite le pire châtiment prévu dans la loi canadienne.
Avant de passer à une discussion des dispositions du projet de loi au sujet du pouvoir discrétionnaire d'imposer des peines d'emprisonnement à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle, je vais me pencher sur le critère voulant que, pour mériter une telle peine sans possibilité de libération conditionnelle, le comportement associé à la perpétration de l'infraction ait été d'une « nature brutale ».
Nous avons rédigé le libellé avec soin. C'est un critère qui est actuellement utilisé dans le régime des délinquants dangereux du Code criminel pour déterminer si un délinquant qui a commis une infraction très grave devrait recevoir une peine de détention à durée indéterminée.
Comme les députés le savent peut-être, une peine de détention à durée indéterminée en vertu des dispositions sur les délinquants dangereux est semblable à une peine d'emprisonnement à perpétuité. La différence fondamentale, c'est la période d'inadmissibilité à la libération conditionnelle plus courte, soit de sept ans, qui s'applique aux délinquants dangereux.
Le projet de loi propose d'importer le critère juridique associé à l'acte de nature brutale au régime de détermination de la peine pour les meurtres odieux car il fournirait une norme intelligible que les tribunaux connaissent et qui est actuellement utilisée pour prédire les possibilités qu'un délinquant devienne un membre de la société respectueux des lois dans le futur.
Il est indéniable que tous les meurtres sont des infractions terribles qui justifient la peine d'emprisonnement à perpétuité. Cependant, je pense que nous pouvons tous convenir que certains meurtres sont commis de telle manière qu'ils aggravent la nature terrible de ce crime et doivent être punis plus sévèrement en conséquence.
Chers collègues, ce sont des critères rigoureux pour définir les criminels les plus dangereux et pour faire en sorte que la peine obligatoire d'emprisonnement à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle soit proportionnelle à la gravité des préjudices causés par ces délinquants et à la nécessité de protéger les Canadiens du danger qu'ils représentent.
Comme je l'ai mentionné plus tôt, le projet de loi propose également d'autoriser les tribunaux à utiliser leur pouvoir discrétionnaire pour imposer une peine d'emprisonnement à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle dans d'autres situations où le degré de culpabilité morale du délinquant le justifie. Les tribunaux auraient le pouvoir d'imposer cette peine pour les trois catégories suivantes de meurtre: le meurtre au premier degré commis avec préméditation et de propos délibéré; le meurtre au deuxième degré réputé, aux termes de l'article 231 du Code criminel, être un meurtre au premier degré; le meurtre au deuxième degré, aux termes de l'article 745 du Code criminel, lorsque le meurtrier a déjà été condamné auparavant pour meurtre ou pour un meurtre intentionnel aux termes de la Loi sur les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre.
Pour exercer leur pouvoir discrétionnaire dans ces situations, les tribunaux s'appuieraient sur des critères identiques à ceux que j'ai mentionnés plus tôt dans le contexte de l'article 745.4 et des dispositions sur les meurtres multiples du Code criminel, à savoir le caractère du délinquant, la nature et les circonstances du meurtre, ainsi que toute recommandation formulée par les jurés.
Plus tôt, j'ai demandé aux députés de garder à l'esprit le bref tour d'horizon du régime de détermination de la peine pour les meurtres que j'ai fait au début de mon discours. Je viens de mentionner trois catégories de meurtre susceptibles d'entraîner une peine d'emprisonnement à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle aux termes du projet de loi ; il s'agit justement des catégories déjà reconnues par le Parlement comme affichant un niveau de réprobation morale plus élevé méritant la peine la plus sévère en vertu du droit canadien.
Le projet de loi propose simplement de permettre aux tribunaux d'exercer le pouvoir discrétionnaire d'appliquer des critères qu'ils connaissent déjà pour faire en sorte que les criminels les plus dangereux ne soient jamais remis en liberté et ne présentent plus aucun danger pour les Canadiens.
D'un côté, honorables députés, le projet de loi est une initiative proprement canadienne qui ferait fond sur les précédents établis par des initiatives antérieures en la matière qui font maintenant partie intégrante du régime de détermination de la peine en cas de haute trahison et de meurtre.
D'un autre côté, cependant, il alignerait le Canada sur d'autres démocraties occidentales qui ont cru bon d'inclure dans leur régime de détermination de la peine des peines d'emprisonnement à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle. De telles peines pour meurtre sont prévues dans pratiquement tous les États et territoires en Australie, en Nouvelle-Zélande, dans neuf pays européens, dont l'Angleterre, et dans pratiquement tous les États américains.
Dans chacun de ces territoires, les détenus purgeant de telles peines peuvent être remis en liberté par un acte de clémence du pouvoir exécutif inspiré par les valeurs constitutionnelles du territoire en question. Le projet de loi propose que l'on applique une formule semblable au Canada.
Même si mon collègue le aura sans doute bien d’autres choses à ajouter sur le sujet, j’aimerais souligner que le projet de loi prévoit la possibilité pour les délinquants condamnés à une peine d'emprisonnement à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle de présenter de manière exceptionnelle une demande de libération conditionnelle après avoir purgé au moins 35 ans de leur peine.
Même si la libération conditionnelle n’est pas une option pour un tel délinquant, après avoir purgé 35 ans de sa peine, il pourrait présenter une demande au , qui examinerait si sa libération pourrait être justifiée pour des motifs d’ordre humanitaire ou si le but et les objectifs de la peine ont été atteints.
Le ministre pourrait demander l’avis de spécialistes de la Commission des libérations conditionnelles du Canada et présenterait ensuite sa recommandation et la demande au gouverneur en conseil. Si le délinquant est libéré par le gouverneur en conseil, il devrait respecter des conditions rigoureuses, et le non-respect de ces conditions entraînerait son retour derrière les barreaux.
Pour terminer, j’aimerais souligner que les mesures proposées dans le projet de loi ont été soigneusement rédigées pour cerner les délinquants les plus dangereux et les plus incorrigibles qui ont commis les crimes les plus odieux.
J’exhorte donc tous les députés à reconnaître le bien-fondé de ces réformes justes et équilibrées et à s’engager aujourd’hui auprès de la population canadienne à veiller à ce que ce projet de loi soit adopté à la reprise des travaux après les prochaines élections.
:
Monsieur le Président, cette fois-ci, je pense que c'est effectivement mon dernier discours de la 41
e législature à la Chambre. Je pensais que mon discours de ce matin serait peut-être le dernier, mais finalement, ce sera celui-ci.
Comme tout le monde, je veux en profiter pour remercier tous les employés de la Chambre. Je pense aux greffiers, aux pages, au personnel de sécurité, au service dans le lobby, aux chauffeurs d'autobus, qui nous permettent d'être à la bonne place et à l'heure, et aux gens des cafétérias, qui nous permettent de manger afin qu'on ne tombe pas dans les pommes.
Dans mon cas, puisque je commence à être connue pour ce que j'appelle l'improvisation intelligente de mes discours, j'ai un immense respect pour les interprètes, qui ont le travail ingrat d'interpréter mes propos, alors qu'ils n'ont absolument aucun papier devant eux. Je les félicite, car je sais également que je ne suis pas celle qui parle toujours le plus lentement. J'ai donc encore plus de respect pour eux, et je les remercie de leur travail.
Je remercie également les gens du hansard. À la minute où je termine mes discours, j'en reçois les textes, et je constate parfois que ces personnes ont même l'art d'écrire mes propos mieux que je ne les ai exprimés. Lorsque je me relis, je me trouve bien éloquente, mais je sais que ce n'est pas exactement ainsi que je m'étais exprimée. Alors, je les remercie d'améliorer la qualité de mon langage. Je l'apprécie et tous les francophones du pays l'apprécient aussi.
Je veux remercier mon équipe, qui fait un travail extraordinaire: Roxane, Shirley, Aline, Alex, Yan et Elise. Cela a été assez rock-and-roll, cette année, d'être l'équipe de la députée de Gatineau et porte-parole de l'opposition officielle en matière de justice, compte tenu du nombre de projets de loi que nous avons eu à traiter et à recommander, comme le disait le secrétaire parlementaire. J'ai eu l'aide de la députée de , que je remercie aussi.
Cela m'amène à remercier mon chef, le leader de l'opposition officielle et député d', qui m'a accordé sa confiance pour faire ce travail qui n'était pas de tout repos.
Toutefois, je remercie surtout les citoyens de Gatineau. En 2011, ils m'ont élue à une majorité véritable, forte et stable, la plus grande au Québec. Je me plais à le dire, car ceux qui connaissent mon parcours savent que j'ai participé à d'autres élections auparavant et que les résultats étaient relativement serrés. Alors, terminer première au Québec avec 63 % des votes, c'est ce que j'appelle une majorité forte et stable. On essaiera de faire de même en 2015, pour la suite des événements. Je remercie donc du fond du coeur les gens de Gatineau, qui ont su m'accompagner tout au long de mes démarches, pendant ces quatre ans, en étant actifs et en me faisant part de leurs commentaires.
Lorsque je votais et que plusieurs personnes me demandaient ce que signifiait ce geste, je leur disais que je votais avec mon coeur. Je n'ai jamais voté autrement que par conviction, selon mon coeur et en pensant aux gens de Gatineau. C'était pour cela que je les regardais. C'est à eux que je pensais à chaque fois. J'ai peut-être échappé un vote, un soir où on a voté pendant toute une nuit, mais 99 % du temps, j'ai voté en ne pensant qu'aux citoyens de Gatineau.
[Traduction]
Je vais maintenant de passer au projet de loi .
L'avocat criminaliste d'Ottawa, Leo Russomano, a dit ceci:
Disons les choses telles qu'elles sont. Il s'agit d'un projet de loi proposé durant une année électorale pour régler un problème. C'est une solution en quête d'un problème [...]
En fait, il est question de peines d'emprisonnement à perpétuité. Qu'un individu obtienne une libération conditionnelle ou non, il purge une peine d'emprisonnement pour le reste de sa vie. Cela fait naître un manque de confiance dans l'administration de la justice.
[Français]
D'autres nous disaient, en passant, que le secrétaire parlementaire leur avait parlé de Clifford Olson.
[Traduction]
[...] les pires meurtriers, les tueurs en série comme Clifford Olsen, mourront derrière les barreaux. Elle prédit que d'autres qui n'auront aucune chance de purger le reste de leur peine à perpétuité sous surveillance stricte dans la communauté seront en colère et désespérés et qu'ils deviendront un danger pour eux-mêmes ou pour les autres.
[Français]
Je vais revenir sur ce point.
[Traduction]
Le projet de loi vise à imposer des peines plus sévères aux individus reconnus coupables de haute trahison.
[Français]
Le secrétaire parlementaire l'a bien mentionné.
[Traduction]
Louis Riel a été la dernière personne reconnue coupable de haute trahison au Canada.
[Français]
À un moment donné, il faut arrêter de rire des gens. Les infractions mentionnées dans le projet de loi sont en effet des crimes horribles. Personne à la Chambre, peu importe le siège occupé, va applaudir cela ou éprouver quelle que compassion que ce soit. La sympathie est définitivement pour les victimes.
Ce que je déplore chez les conservateurs depuis le début de leur règne en 2006 s'inscrit dans ma passion. Je suis avocate depuis longtemps. La justice, tout d'abord sociale, mais surtout la justice avec un grand « J », c'est ce qui m'anime et me passionne. C'est ce qui fait en sorte que j'ai décidé un jour d'aller en politique. Les conservateurs se plaisent à parler du nombre de projets de loi déposés, mais la quantité n'est jamais synonyme de la qualité. On peut bien avoir 150 projets de loi mais si ces 150 projets de loi, ou lois dans certains cas, ne signifient rien ou se retrouvent un jour devant les tribunaux et se font rejeter ou abolir, il y a un problème quelque part. Là n'est pas tellement la question parce que parfois il peut s'agir de conflits d'opinion. Dans ces cas, je peux respecter la question du débat et ainsi de suite.
Toutefois, c'est extrêmement arrogant d'arriver en fin de mandat et d'échanger les projets de loi en surprise hier soir afin de placer celui-ci à l'ordre du jour pour au moins donner l'impression d'en discuter, alors que les conservateurs le promettent depuis longtemps et qu'ils font des conférences de presse. Il y en a peut-être qui ne l'ont pas lu, mais un média national anglophone a dit que malgré tout l'accent que les conservateurs avaient mis sur le projet de loi , il n'y avait même pas eu une heure de débat à son sujet. Quelle surprise: après l'article, voici l'heure de débat. Que ceux qui nous écoutent sachent, comme nous le savons vous et moi, monsieur le Président, que ce que nous sommes en train de faire, c'est du verbiage. C'est du verbiage qui ne donnera strictement rien.
Le secrétaire parlementaire en a parlé; nous avons fait l'étude en comité du projet de loi , qui prévoyait une possibilité de libération conditionnelle, étudiée par la Commission des libérations conditionnelles du Canada, jusqu'à 40 ans pour le même genre de crime que dans le projet de loi . J'ai posé des questions pendant l'étude en comité. Même le député conservateur, qui avait déposé le projet de loi, en a suspendu l'étude pendant un certain temps parce qu'il semblait y avoir un conflit avec le dépôt du projet de loi , en grande pompe et ainsi de suite. J'ai souvent dit une chose aux conservateurs, je vais la répéter encore et c'est un peu triste que ce soient mes derniers mots à la Chambre: je trouve que les conservateurs vont malheureusement s'être énormément servis des victimes pour faire passer des principes, des concepts ou des phrases choc, des moments de haut niveau médiatique qui, dans le fin fond, vont strictement servir à décevoir. Ils vont décevoir les victimes parce que, comme je l'ai dit au moment où nous avons étudié la Charte des droits des victimes, ce ne sont que de beaux énoncés d'intention, des voeux pieux. Toutefois, lorsque l'opposition officielle a présenté des amendements concernant ces droits et affirmer qu'il s'agissait effectivement d'un droit à l'information, ces amendements ont été battus par les conservateurs.
Je ne suis pas amère, parce que je suis quand même une fille positive. Ce n'est pas pour rien que je suis au NPD où nous sommes optimistes et positifs. J'ai donc quand même l'espoir que tout n'est pas fini et que nous pourrons réparer un jour beaucoup des dommages que ce gouvernement aura fait au système de justice.
Cela me ramène à ce point central de ce que j'aurai vécu au cours des deux dernières années, de façon plus immédiate, à titre de porte-parole de l'opposition officielle en matière de justice. Il s'agit du fait que le gouvernement, par tous ces projets de loi, par ce genre d'énoncés choc, nuit au concept de justice comme tel, et donne cette impression que le système va mal aux communs des mortels, à tous les citoyens canadiens, à tous ceux qui nous écoutent et à tous ceux qui s'intéressent à la question. Il donne l'impression que si le système va mal, c'est parce que la Commission des libérations conditionnelles du Canada ne fait pas son travail, parce que les juges sont trop soft, parce que l'opposition est proterroriste et parce que ceci ou cela.
On parle de justice et on croit fondamentalement à la justice. On peut parler du dossier d'Olson. Il n'est jamais sorti de prison et il est mort en prison ou de celui de Bernardo, un autre cas visé par ce genre de choses, qui ne sortira jamais de prison. On peut parler du fait que les familles sont obligées d'aller devant la Commission des libérations conditionnelles du Canada de façon périodique. Des projets de loi ont été présentés pour faire en sorte qu'il n'y ait pas d'audience avant une certaine période de temps, afin que les familles ne soient pas obligées d'y aller si souvent. Il y a d'autres solutions encore plus simples. Quand on présente des solutions simples à un problème qui existe et que tout le monde reconnaît, ce n'est pas aussi séduisant qu'une grande conférence de presse avec beaucoup de drapeaux en arrière et des propos choc qui ne devraient jamais sortir de la bouche des gens censés être des leaders dans notre société.
Lorsqu'on a fait l'étude du projet de loi du député conservateur, j'ai dit que la Commission des libérations conditionnelles du Canada utilisait déjà d'autres moyens dans plusieurs dossiers. C'est faux de prétendre que les gens sont appelés constamment à aller devant la commission. Pourquoi? C'est parce que les autorités ont déjà tendance à ne pas laisser la personne sortir. Alors, on ne dérange pas, on informe. Probablement que cela fait revivre certaines choses. Comme je le disais à une des victimes qui était devant le comité à un moment donné, quand bien même on le mettrait à 60 ans, c'est quelque chose qu'on n'enlèvera jamais du coeur d'une personne.
Ma jeune soeur est décédée pendant cette législature. Pense-t-on que dans 5, 10 ou 15 ans, je vais l'oublier? Et ce n'était même pas une mort à la suite d'un crime. Ce sont des choses qui ne s'oublient pas.
On pourrait simplifier la vie des familles et leur dire que ces personnes ne sortiront jamais de prison et que ce sont des criminels dangereux.Toutes sortes d'outils existent. En déposant le projet de loi , on laisse croire qu'on règle un gros problème. Comme je le disais, en ce qui concerne un cas de crime de haute trahison, on repassera. Des cas comme celui de Louis Riel, il n'en pleut pas au Canada. Dans ce contexte, on peut passer à autre chose. Dans le cas des autres crimes mentionnés, comme ceux de Bernardo et d'Olson, le gouvernement est incapable de dire des noms de gens qui seraient en train de se promener dans nos rues et qui auraient commis un crime comme ceux mentionnés dans le projet de loi C-53. Il n'en a pas, parce que cela n'arrive pas. Toutefois, si on le dit et qu'on le répète assez souvent, on va faire croire aux gens que cela existe. On fait peur aux gens.
Je me souviens d'une entrevue que j'ai eue à faire avec une magnifique radio de Québec qui m'attendait de pied ferme, parce que c'était sur la question du registre des délinquants sexuels dangereux. Ils m'attendaient en se disant qu'ils allaient recevoir les softies du NPD. Ils contaient, avant de me passer en onde, le cas d'un gars qui se promenait libre comme l'air dans les rues de Québec. Ils avaient hâte d'avoir le registre. Je les ai arrêtés, en une fraction de seconde, en leur disant que j'étais surprise qu'ils me parlent d'un registre pour régler le problème de la personne qui était dans leurs rues, alors que la vraie question était plutôt de savoir ce qu'elle faisait dans les rues.
Arrêtons de tout mêler et de créer des situations qui laissent croire certaines choses qui n'existent pas.
En tant que Parlement, dans cette institution démocratique, il est de notre devoir à tous, tant sur les banquettes gouvernementales que sur celles de l'opposition, de ne pas induire la Chambre en erreur, de travailler à l'appui de nos piliers de démocratie et de ne pas nuire aux piliers juridique, législatif et exécutif.
Or, malheureusement, ce gouvernement n'aura fait que cela: il aura semé des doutes sur la qualité et la transparence de nos juges de la Cour suprême, y compris la juge en chef; quand une décision est rendue, on dit que la cour est comme ceci ou comme cela, et ainsi de suite; si nous ne disons pas comme les représentants du gouvernement, nous sommes pro-criminels et pro-terroristes. C'est d'une grande tristesse.
Nous n'avons peut-être pas les mêmes programmes, mais je pense que tous les députés de la Chambre veulent qu'il y ait le moins de crimes possible en vue d'assurer la sécurité publique de nos concitoyens. Faisons-le correctement.
Les conservateurs n'ont aucune statistique. Ils n'ont jamais été capables de présenter au Comité permanent de la justice et des droits de la personne quelque statistique que ce soit pour appuyer les projets de loi qu'ils mettaient en avant.
Le ministre a présenté son projet de loi sur les prédateurs sexuels. Pourtant, il s'est vanté qu'il n'y avait jamais eu autant de lois que celles du gouvernement conservateur pour rendre les peines encore plus sévères. Il nous a présenté un constat d'échec en nous démontrant que ces infractions avaient augmenté au cours des deux dernières années, et ce, malgré la plus grande sévérité des lois. Il y a un problème quelque part.
Le bottom line réel des dossiers de la justice et du crime, c'est que les statistiques ne prouvent pas les déclarations des conservateurs. Les statistiques nous démontrent que le nombre de crimes commis descend. Que le nombre de certains types de crimes ait augmenté est fort possible, mais concentrons-nous sur ces problèmes au lieu de faire de la petite politique de bas étage uniquement pour faire des shows de boucane devant les médias, en faisant sortir des victimes pour les utiliser.
Par contre, lors des nombreuses conservations que j'ai eues avec les victimes à différents moments de cette législature, j'ai été contente de constater que leurs yeux s'ouvraient de plus en plus et qu'elles commençaient à réaliser qu'elles étaient des pantins entre les mains du gouvernement, ce qui m'attriste profondément.
Je voudrais parler de la disposition qui permet au ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile d'agir. Puisque ce ne sera pas le ministre actuel, je n'entrerai même pas dans le type de spécialisation de la personne qui est là. Même si la personne la plus compétente occupait le siège du ministre de la Sécurité publique, cela resterait indécent. C'est indécent de politiser la question dans le contexte d'une société libre et démocratique, soumise à une Constitution, à des lois et à une Charte des droits. On ne fait pas cela.
Il s'agit, encore une fois, d'un constat qui va à l'encontre de la Commission canadienne des libérations conditionnelles, dont les membres sont pourtant nommés par le gouvernement. Il y a un problème quelque part. Ou ils sont assez bons pour faire leur travail ou ils ne le sont pas, et alors changeons cela au plus coupant.
Cependant, ne commençons pas à donner un pouvoir de cette nature à une personne qui occupe de hautes fonctions politiques et qui va attendre de voir ce que M. et Mme Tout-le-Monde vont venir lui dire. Nous savons que nous sommes tous semblables quand il se commet un crime horrible: nous avons tous tendance à vouloir le pire des pires. C'est pour cette raison qu'un organe indépendant, capable d'analyser le dossier et de l'examiner, est nécessaire.
Arrêtons de mélanger les pommes et les poires, et surtout, cessons de nuire au système judiciaire dans son ensemble. Corrigeons-le et réparons les problèmes, mais ne le jetons pas, comme le bébé avec l'eau du bain, comme si c'était un vulgaire système.
Le système juridique dessert bien les Canadiens dans son ensemble. Qu'il s'agisse de procureurs de la Couronne, de procureurs de la défense, de juges ou de n'importe quel intervenant, ces personnes font ce qu'elles ont à faire dans un contexte qui n'est pas toujours facile, vu les compressions gouvernementales.
Dans ce contexte, arrêtons donc d'attaquer ce système de tous bords tous côtés et de présenter des projets de lois qui n'iront même pas plus loin que la fin de la journée, ou qui vivra peut-être une autre heure demain.
C'est absolument insultant et indécent d'avoir présenté ce genre de dossiers aussi important, et ce, en sachant fort bien qu'il ne franchira pas davantage les discours que les gens vont entendre maintenant.
:
Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi , qui prévoit qu'on enferme les délinquants et qu'on jette la clé de leur cellule. Il s'agit de la Loi sur les peines de prison à vie purgées en entier. Cette mesure législative élimine toute possibilité de libération conditionnelle pour un grand nombre des crimes les plus graves, notamment pour de nombreuses formes de meurtre au premier degré et pour haute trahison.
L'objectif déclaré du projet de loi est de réduire le traumatisme subi par les familles des victimes en leur évitant des audiences inutiles à répétition. C'est un objectif louable, et il y a quelques semaines à peine, les libéraux ont appuyé une mesure législative visant le même objectif, le projet de loi , Loi sur le respect dû aux familles des personnes assassinées et brutalisées. Les députés se rappelleront que ce projet de loi visait à faire passer de 25 à 40 ans le délai préalable à la libération conditionnelle pour une catégorie restreinte de crimes particulièrement violents.
Cependant, bien que nous approuvions l'objectif du projet de loi , qui consiste à réduire le traumatisme des victimes, et l'approche qu'il adopte, nous n'appuierons pas la Loi sur les peines de prison à vie purgées en entier. Les libéraux sont disposés à envisager d'autres moyens de réduire le traumatisme des victimes. Par exemple, nous pourrions considérer de prolonger l'inadmissibilité à la libération conditionnelle au-delà de 25 ans pour certains crimes visés par le projet de loi , tout comme nous avons appuyé l'imposition de périodes consécutives d'inadmissibilité à la libération conditionnelle aux auteurs de plusieurs meurtres. Comme les députés le savent, grâce à ce changement, Travis Baumgartner s'est vu imposer une période d'inadmissibilité à la libération conditionnelle de 40 ans pour le meurtre de trois de ses collègues dans une entreprise de véhicules blindés. Aussi grâce à cette mesure, la période d'inadmissibilité de Justin Bourque a été fixée à 75 ans pour le meurtre de trois agents de la GRC à Moncton.
Les crimes visés par le projet de loi sont odieux et c'est pourquoi la loi canadienne les punit sévèrement. Cependant, la principale raison pour laquelle nous n'appuierons pas ce projet de loi, c'est qu'il substituerait le à la Commission des libérations conditionnelles. La nature du travail des ministres est de prendre des décisions politiques. Cette mesure est un retour en arrière et un affront à la primauté du droit. Elle est probablement inconstitutionnelle aussi. J'expliquerai pourquoi plus tard.
Examinons d'abord le contenu de la .
Le projet de loi C-53 modifierait le Code criminel pour prévoir une peine d’emprisonnement à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle pour certains types de condamnations pour meurtre et pour les cas de haute trahison, pourvu que le délinquant soit âgé d'au moins 18 ans. Pour ce qui est des condamnations pour meurtre, il doit s'agir d'un meurtre commis avec préméditation et de propos délibéré qui correspond aux circonstances suivantes: la victime est un agent de la paix, un membre du personnel correctionnel ou une personne travaillant dans une prison; la mort est causée par l’accusé au cours de la perpétration ou de la tentative de perpétration d'un détournement d’aéronef, de divers types d'agressions sexuelles, d'un enlèvement, d'une séquestration ou d'une prise d'otage, ou encore au cours de la perpétration ou de la tentative de perpétration d'une activité terroriste; ou bien le comportement de l’accusé associé à la perpétration de l’infraction est d’une nature si brutale que l’on ne peut s’empêcher de conclure qu’il y a peu de chance pour qu’à l’avenir ce comportement soit inhibé par les normes ordinaires de restriction du comportement.
Aux termes du projet de loi , une condamnation pour haute trahison commanderait également l'imposition d'une peine d’emprisonnement sans possibilité de libération conditionnelle. Commet une haute trahison quiconque attaque la reine, fait la guerre au Canada ou aide un ennemi contre lequel les Forces canadiennes sont engagées dans des hostilités.
Le projet de loi créerait également un pouvoir judiciaire discrétionnaire permettant de fixer des peines d'emprisonnement à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle pour trois types de délinquants.
D'abord, les personnes reconnues coupables de meurtre au deuxième degré qui ont déjà été reconnues coupables de meurtre. Ensuite, les personnes reconnues coupables de meurtre au deuxième degré qui ont déjà été reconnues coupables de génocide, d'un crime contre l'humanité ou d'un crime de guerre. Enfin, les personnes reconnues coupables de meurtre au premier degré.
Un juge pourrait recourir au pouvoir judiciaire discrétionnaire, sur demande du poursuivant et compte tenu de l'âge et du caractère de l'accusé, de la nature de l'infraction et des circonstances de sa perpétration, ou sur la recommandation du jury.
En outre, le projet de loi modifierait la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. Il permettrait à un délinquant purgeant une peine d'emprisonnement à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle de présenter, après avoir purgé 35 ans de sa peine, une demande de libération sur décret au , demande qui serait renvoyée au gouverneur en conseil. Si la demande était rejetée, le délinquant pourrait présenter une nouvelle demande après cinq ans. Le délinquant dont la demande de libération sur décret était acceptée serait assujetti au pouvoir de la Commission des libérations conditionnelles du Canada, notamment en ce qui a trait à la cessation ou à la révocation de la libération sur décret et à l'imposition de conditions.
Comme je l'ai dit, les libéraux sont disposés à accepter 35 ou 40 années d'inadmissibilité pour les crimes visés dans ce projet de loi, comme nous l'avons indiqué lorsque nous avons appuyé le projet de loi . Cette augmentation pourrait faire une différence notable pour les familles des victimes. Cependant, nous n'approuvons pas le choix proposé par le gouvernement en ce qui a trait à l'organe chargé de prendre les décisions après ce délai.
Outre les changements déjà mentionnés, le projet de loi modifierait la Loi sur la défense nationale. Il imposerait l'emprisonnement à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle pour les infractions suivantes: un manquement au devoir face à l'ennemi de la part d'un commandant, si celui-ci s'est conduit en traître; un manquement au devoir face à l'ennemi de la part de toute personne, si celle-ci s'est conduite en traître; une infraction relative à la sécurité si l'auteur de l'infraction s'est conduit en traître; la haute trahison; un meurtre du même type que ceux prévus dans les modifications au Code criminel.
Le projet de loi créerait aussi un pouvoir judiciaire discrétionnaire permettant au juge militaire d'imposer une peine d'emprisonnement sans possibilité de libération conditionnelle dans les mêmes circonstances que celles prévues au civil. De plus, le projet de loi modifierait la Loi sur le transfèrement international des délinquants afin d'autoriser l'emprisonnement à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle lorsque, de l'avis du , des documents fournis par une entité étrangère démontrent que le délinquant aurait été déclaré coupable de l'une des infractions prévues au premier paragraphe, à l'exception de la disposition portant sur l'infraction de nature brutale.
Ce dernier changement m'apparaît particulièrement problématique, puisqu'il permettrait au d'imposer, sur la foi de preuves fournies par des entités étrangères, un emprisonnement à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle. On risque alors que des preuves altérées ou inventées de toutes pièces mènent, au Canada, à un emprisonnement à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle. Des États affichant certains des pires systèmes de justice de la planète pourraient fournir des preuves considérées admissibles.
Il est important de comprendre comment les modifications proposées dans le projet de loi changeraient le statu quo. À l'heure actuelle, toutes les condamnations pour meurtres sont passibles d'une peine obligatoire d'emprisonnement à perpétuité. Le projet de loi propose de rendre les auteurs de certains types de meurtres inadmissibles à une libération conditionnelle; dans tous les cas, il s'agit déjà de meurtres au premier degré, pour lesquels la période d'inadmissibilité à la libération conditionnelle est de 25 ans. Une condamnation pour haute trahison serait passible d'un emprisonnement à perpétuité et de 25 ans d'inadmissibilité à la libération conditionnelle.
Pour les délinquants qui purgent une peine à perpétuité, la semi-liberté deviendrait possible après 22 ans, et la libération conditionnelle, après 25 ans. Sur demande, la Commission des libérations conditionnelles doit réexaminer tous les ans les demandes de semi-liberté refusées, et tous les deux ans les demandes de libération conditionnelle refusées.
Fait à noter: conformément à une loi adoptée en 2011 avec l'appui des libéraux, les délinquants peuvent se voir imposer des périodes d'inadmissibilité consécutives s'ils ont commis plusieurs meurtres. Comme je l'ai déjà dit, deux meurtriers ont ainsi été déclarés inadmissibles à la libération conditionnelle pour 40 ans et 75 ans respectivement.
Signalons aussi qu'en vertu de la loi actuelle, des délinquants peuvent être déclarés délinquants dangereux. Ils sont alors emprisonnés pour une période indéterminée, réévaluée de façon périodique.
J'aimerais également souligner que ce projet de loi donnerait au , un politicien élu, le pouvoir de libérer des détenus, un rôle qui revient actuellement à la Commission des libérations conditionnelles. Le ministre de la Sécurité publique, quel qu'il soit, risquerait d'être influencé par ses intérêts personnels, les demandes pressantes de ses électeurs, son parti, et surtout le . Ces conflits d'intérêts pourraient jouer dans les décisions concernant la libération de détenus et ne pas servir les intérêts la justice.
Si les Canadiens y réfléchissent bien, je doute qu'ils soient d'accord pour que le décide quels détenus seront libérés ou non. Ce rôle revient à la Commission des libérations conditionnelles, et à juste titre. Les impératifs politiques ne doivent aucunement influencer ces décisions. C'est d'ailleurs pour cette raison que les juges ne sont pas élus, au Canada.
Je me demande pourquoi le gouvernement considère que la Commission des libérations conditionnelles ne sait pas faire son travail. Lorsque nous avons entendu des témoignages à propos du projet de loi , j'ai eu la chance d'interroger Suzanne Brisebois, de la Commission des libérations conditionnelles, au sujet des activités de la commission. Je lui ai posé la question suivante: « De qui relève la Commission des libérations conditionnelles du Canada? » Voici ce qu'elle a répondu:
La commission est un tribunal administratif indépendant. Les membres potentiels doivent se soumettre à un processus de sélection rigoureux dans le cadre d'un concours [...]
Nous sommes comptables envers la population canadienne. Ici encore, la protection du public canadien est notre grande priorité et fait partie de notre mandat.
J'ai également posé à Mme Brisebois la question suivante:
La commission est-elle moins bien équipée que les autres instances pour traiter les dossiers les plus graves? Pourriez-vous nous dire si elle est particulièrement mal équipée pour traiter ces dossiers?
Elle a répondu ce qui suit:
Nos commissaires suivent une formation rigoureuse lors de leur intégration, que ce soit au bureau national ou dans les régions. Ils sont informés au sujet des divers aspects de la loi, de nos politiques, de nos procédures, de l'évaluation du risque et des divers outils actuariels au cours d'une période de formation très rigoureuse.
On devrait laisser la Commission des libérations conditionnelles faire son travail. Le fait de remplacer les décisions de la commission par des décisions politiques de la part du représente un pas en arrière.
Les libéraux ont appuyé la disposition du projet de loi visant à porter à 40 ans la période d'inadmissibilité à la libération conditionnelle ainsi que les modifications proposées en 2011 pour permettre l'imposition de périodes consécutives d'inadmissibilité à la libération conditionnelle. Fait important, dans les deux cas, les changements ont préservé le pouvoir discrétionnaire de la magistrature lorsqu'il s'agit de déterminer les peines au criminel, dans le respect de la Charte. Tout en permettant d'imposer des peines plus sévères, ces changements ont préservé la capacité des juges d'imposer des peines proportionnelles à la gravité des crimes.
Contrairement au projet de loi C-587, ce projet de loi limiterait le pouvoir discrétionnaire des juges d'une façon qui ouvrirait la voie à une contestation en vertu de la Charte. Comme je l'ai dit, nous sommes ouverts à l'idée d'accroître la période d'inadmissibilité, pourvu que ce soit la Commission des libérations conditionnelles qui prenne toutes les décisions une fois la période écoulée. Cette approche permettrait de préserver le pouvoir judiciaire des juges de manière à ce que les peines soient conformes aux droits constitutionnels.
J'aimerais d'ailleurs parler du fait que le gouvernement actuel n'a aucun respect pour la Constitution et, surtout, pour la Charte canadienne des droits et libertés.
Cette semaine, Amy Minsky, de Global News, a révélé que les conservateurs ont gaspillé près de 7 millions de dollars de l'argent des contribuables pour tenter, en vain, de défendre des mesures législatives et des pouvoirs exécutifs qui violent les droits des Canadiens. Ils ont notamment dépensé 1 million de dollars pour empêcher les réfugiés de bénéficier de soins de santé, près de 350 000 $ pour tenter de nommer un juge fédéral du Québec à la Cour suprême, et plus de 425 000 $ pour tenter de mettre fin aux activités d'un centre d'injection supervisée.
J'ai appris la semaine dernière, grâce à une question inscrite au Feuilleton, que le gouvernement conservateur a dépensé au moins 257 825,17 $ dans le cadre de l'affaire Ishaq parce que le gouvernement veut faire en sorte qu'une femme ne puisse pas porter le niqab au moment de prononcer le serment de citoyenneté. J'ai dit « au moins » parce que la cause est toujours en appel. Il n'y a vraisemblablement aucune chance que le gouvernement actuel gagne sa cause, mais il est clair qu'il veut semer la peur parmi les Canadiens et les diviser pour des raisons politiques. Je veux insister sur le montant consacré à l'affaire Ishaq: le gouvernement a dépensé plus de 257 000 $ pour qu'une femme ne puisse pas porter le niqab au moment de prononcer le serment de citoyenneté. Voilà un exemple flagrant d'une mauvaise utilisation de l'argent des contribuables.
Comme le savent les Canadiens, le gouvernement actuel méprise les tribunaux et encore plus la Charte. Nous nous souvenons tous des propos diffamatoires du et du à l'endroit de la juge en chef de la Cour suprême. En tant qu'avocat, ils m'ont scandalisé; en tant que Canadien, ils m'ont profondément déçu.
Les députés se souviendront également d'avoir appris que le gouvernement actuel fait fi des avis constitutionnels de ses propres avocats. Les députés ne sont pas sans savoir qu'Edgar Schmidt, avocat au ministère de la Justice, a révélé aux Canadiens que le gouvernement actuel va de l'avant avec ses projets de loi même lorsqu'ils ont au mieux 5 % de chances d'être conformes à la Charte.
À titre de porte-parole libéral en matière de justice, je reproche souvent au gouvernement de vouloir constamment modifier le Code criminel sans affecter les ressources nécessaires pour prévenir les actes criminels. En général, les politiques du gouvernement sont vouées à l'inefficacité, car elles ne se fondent pas sur des données probantes.
Comme je l'ai dit lorsque je suis intervenu à propos du projet de loi , je songe en particulier aux compressions comme celles que le gouvernement a récemment imposées aux cercles de soutien et de responsabilité, un groupe de réinsertion communautaire qui vise à faire assumer aux délinquants sexuels la responsabilité du mal qu'ils ont commis et qui les aide à réintégrer la société à la fin de leur peine. Il a été démontré que les cercles de soutien et de responsabilité réduisent le taux de récidive des délinquants sexuels d'entre 70 et 83 %. C'est un changement incroyable.
Selon une étude du gouvernement, chaque dollar investi dans le programme a permis à la société d'économiser 4,60 $. Sur une période de cinq ans, 240 crimes sexuels ont pu être évités. Pourtant, le gouvernement a décidé de mettre fin au financement du programme. Cette décision est extrêmement irresponsable et elle entraîne un risque réel et constant pour la sécurité publique.
Revenons au projet de loi , la Loi sur les peines de prison à vie purgées en entier. Je tiens à rappeler que les libéraux appuient fortement l'objectif poursuivi, qui est de réduire le traumatisme que constituent pour les familles des victimes les audiences de libération conditionnelles inutiles et répétées. Je me rappelle le témoignage émouvant de deux membres de la famille de victimes que nous avons entendu au cours des audiences sur le projet de loi . Ce sont ces témoignages qui nous ont fait appuyer le projet de loi C-587. L'objectif visé —réduire le traumatisme des familles des victimes— peut et devrait être atteint au moyen de changements différents de ceux qui sont prévus dans le projet de loi C-53.
La principale raison pour laquelle nous n'appuierons pas le projet de loi, c'est qu'il remplacera la Commission des libérations conditionnelles par des décisions à saveur politique du ministre de la Sécurité publique. C'est un pas en arrière et une atteinte à la primauté du droit. De plus, c'est probablement inconstitutionnel.
Je me demande si ces considérations expliquent pourquoi le gouvernement a présenté cette mesure législative si près de la fin de la session, alors qu'il est impossible qu'elle soit adoptée.