CIIT Rapport du Comité
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
LA CAPACITÉ DE L’INDUSTRIE CANADIENNE DE L’ACIER À SOUTENIR LA CONCURRENCE INTERNATIONALEINTRODUCTIONL’industrie canadienne de l’acier contribue à l’économie du pays par l’entremise de plusieurs activités, dont la fabrication de l’acier comme tel, mais également l’utilisation de produits en acier dans de nombreux secteurs de l’économie, tels que les secteurs de l’énergie, de la construction et de la fabrication automobile. Selon l’Association canadienne des producteurs d'acier, le secteur canadien de l’acier emploie directement et indirectement plus de 120 000 Canadiens. Le 20 octobre 2016, le Comité permanent du commerce international de la Chambre des communes (« le Comité ») a décidé d'entreprendre une étude sur les facteurs qui influencent la capacité de l’industrie canadienne de l’acier à soutenir la concurrence internationale, notamment le dumping[1] d’acier étranger sur le marché canadien. Entre le 3 novembre 2016 et le 23 mars 2017, le Comité a tenu quatre réunions afin de recueillir de l’information sur les opportunités et les défis de l’industrie canadienne de l’acier en matière de commerce. Le Comité a entendu 23 témoins durant ces réunions, dont des représentants du gouvernement du Canada, des producteurs d'acier et des syndicats. Le Comité a également reçu six mémoires dans le cadre de son étude, tous soumis par des témoins qui ont comparu devant le Comité. Le présent rapport fournit de l’information générale sur l’industrie de l’acier, résume les témoignages et les mémoires présentés au Comité et fait des recommandations au gouvernement fédéral. Une partie importante de ce rapport est consacrée à la production excédentaire mondiale d’acier et du dumping d’acier étranger sur le marché canadien qui en découle. Cela dit, d’autres éléments ayant trait à la capacité de l’industrie canadienne de l’acier à soutenir la concurrence internationale sont étudiés, tels que l’infrastructure de transport au pays, l’empreinte environnementale de l’industrie, les enjeux reliés à la main-d’œuvre et l’innovation ainsi que les politiques économiques et commerciales des États-Unis. CONTEXTECommerce international de l’acier au CanadaL’Ontario est responsable de la grande majorité du commerce canadien de produits d’acier. En 2016, la valeur des exportations canadiennes des produits d’acier s’est élevée à 6,5 milliards de dollars[2]. Durant cette année, les exportations de l’Ontario ont été évaluées à 5,1 milliards de dollars, ce qui représente 78,8 % de la valeur des exportations canadiennes de produits d’acier. Le Québec suivait en seconde place avec des exportations totalisant 842,9 millions de dollars, ou 12,9 % de la valeur des exportations canadiennes. La valeur des importations canadiennes de produits d’acier en 2016 s’est chiffrée à 9,5 milliards de dollars. Durant cette année, les importations de l’Ontario ont été évaluées à 5,9 milliards de dollars, ce qui représente 62 % de la valeur des importations canadiennes de produits d’acier. La Colombie Britannique suivait en seconde place avec des importations totalisant 1,5 milliard de dollars, ou 15,7 % de la valeur des importations canadiennes[3]. La figure 1 montre l’évolution de la valeur du commerce de produits d’acier au Canada entre 1995 et 2016. On note que le déficit commercial du Canada pour ces produits s’est accru au cours de cette période, passant de 266,5 millions de dollars à 2,9 milliards en raison d’une croissance plus importante des importations que des exportations[4]. Figure 1 – Commerce du Canada avec le monde, produits d’acier, 1995–2016 (milliards de dollars) Note : Les produits d’acier sont ceux définis par le International Trade Administration des États‑Unis dans sa publication Steel Imports Report: Canada. [disponible en anglais seulement] Source : Figure préparée à partir de données de Statistique Canada L’augmentation du déficit commercial du Canada en ce qui a trait aux produits d’acier au cours des dernières décennies s’insère dans un contexte où certains pays ont augmenté leur capacité de production d’acier de façon significative durant cette période, une augmentation telle qu’il est dorénavant permis de parler de surcapacité mondiale de production d’acier. Selon l’Organisation pour la coopération et développement économiques (OCDE), la surcapacité mondiale de production sidérurgique pose des défis importants aux producteurs d’acier partout sur le globe[5]. D’après l’OCDE, cette surcapacité de production est intimement liée avec l’application de plus en plus fréquente de droits antidumping[6] et de droits compensateurs[7] aux importations d’acier[8]. Capacité excédentaire de production d’acier à l’échelle internationaleAu cours des dernières décennies, l’industrie de l’acier a assisté à un déplacement de sa production globale. Par exemple, entre 1996 et 2016, la production mondiale d’acier brut a augmenté, passant de 751 millions de tonnes métriques (mmt) à 1 629,6 mmt[9]. La Chine est responsable de la grande majorité de cette augmentation alors que la production de ce pays est passée de 101,2 mmt en 1996 (13,5 % de la production mondiale) à 808,4 mmt en 2016 (49,6 % de la production mondiale)[10]. Par contraste, la production canadienne d’acier brut est passée de 14,7 mmt en 1996 (2 % de la production mondiale)[11] à 12,5 mmt en 2015 (0,8 % de la production mondiale)[12]. Si la production mondiale d’acier brut a augmenté depuis le début du 21e siècle, la capacité mondiale de production, elle, a augmenté de façon encore plus marquée. Plus précisément, la production annuelle mondiale d’acier brut est passée de 850,2 mmt à 1629,6 mmt entre 2000 et 2016, une augmentation de 91,7 %[13]. Durant cette même période, la capacité annuelle de production mondiale d’acier brut est passée de 1 046 mmt à 2 407 mmt, une augmentation de 130,1 %[14]. Dans des conditions de marché normales, les entreprises s’ajustent à une sous-utilisation de la capacité de production en diminuant cette capacité. L’OCDE considère toutefois que ce mécanisme d’ajustement peut être long et ardu dans l’industrie de l’acier, certaines régions connaissant de longues périodes de capacité excédentaire[15]. Qui plus est, la demande mondiale d’acier n’a pas suivi le même rythme que l’offre de ce produit au cours des dernières années alors que plusieurs pays se remettent encore des contrecoups de la crise économique et financière de 2008-2009[16]. La question de la capacité excédentaire de production d’acier à l’échelle internationale a été soulevée par la grande majorité des intervenants qui ont comparu devant le Comité. À cet égard, un consensus semble exister parmi les intervenants canadiens de l’industrie de l’acier : cette capacité excédentaire est néfaste pour la santé financière de l’industrie canadienne de l’acier et la capacité de cette dernière à soutenir la concurrence internationale. Dans le mémoire qu’il a soumis au Comité, le Syndicat des Métallos explique que la capacité excédentaire mondiale d’acier est due principalement au fait que certains pays, qui ne sont pas membres de l’OCDE, continuent d'investir dans leur capacité de production d'acier afin de soutenir les secteurs de la fabrication et de la construction, et ce, même si la demande mondiale de l'acier est faible. De nombreux témoins ont indiqué que non seulement il existe une capacité excédentaire mondiale de la production d’acier depuis quelques années, mais que celle-ci est d’une ampleur significative. Selon Tenaris, cette capacité excédentaire mondiale s'élève à 700 mmt d'acier, soit 45 fois la taille du marché canadien de l’acier. Essar Steel Algoma Inc. a affirmé que la surcapacité de production est un problème généralisé dans l'ensemble de l'industrie sidérurgique, un problème tel que l'OCDE le considère comme le principal défi économique auquel l'industrie de l’acier est confrontée. À cet effet, Innovation, Sciences et Développement économique Canada[17] a souligné que l’offre excédentaire d’acier sur les marchés internationaux exerçait « une pression à la baisse sur les prix de l’acier au niveau mondial, ce qui nuit injustement à la concurrence dans des marchés ouverts comme le Canada ». Plus particulièrement, le Ministère a déclaré que l’acier excédentaire entraînait une baisse des prix dans les chaînes d’approvisionnement de la production et qu’elle pouvait faire perdre aux producteurs d’acier au Canada « des contrats visant des projets d’infrastructure au profit de compétiteurs qui utilisent de l’acier de qualité inférieure ayant fait l’objet de dumping que l’on camoufle dans un produit fabriqué qui est importé ». Cet état de fait a été confirmé par Evraz, qui a affirmé que la surcapacité mondiale de l'acier entraînait effectivement des prix déloyaux sur le marché canadien et que cela avait mené à des pertes d'emplois au Canada. De plus, le Syndicat des Métallos a fait valoir que la chute du prix de l’acier occasionnée par la capacité excédentaire mondiale de production d’acier oblige les producteurs à assumer des montants grandissants de dettes à court terme et à fonctionner à des niveaux d’endettement insoutenables. Les témoins ayant comparu dans le cadre de l’étude se sont tous entendus pour dire que la Chine est le principal responsable de cette surcapacité mondiale de l'acier. À cet égard, Essar Steel Algoma Inc. a estimé que la Chine était responsable de 60 à 70 % de la surcapacité mondiale. Selon la compagnie, « l'industrie sidérurgique en Chine ne fonctionne pas selon le modèle de maximisation des bénéfices. Autrement dit, l'acier chinois est subventionné par l'État, produit à des prix artificiellement bas et vendu à l'étranger, souvent en dessous du coût véritable pour soutenir les emplois chinois ». Tel qu’expliqué par Ian Lee, professeur agrégé à l’Université Carleton et représentant de l’Institut Macdonald-Laurier, qui a comparu à titre individuel, les entreprises d’acier chinoises sont subventionnées de plusieurs façons, soit par l’entremise de prêts de très longue durée – des prêts qu'elles ne pourraient autrement obtenir parce que ces sociétés sont en faillite – soit par l’entremise de prêts à des taux d’intérêt artificiellement faibles. Ce traitement préférentiel s’explique, selon lui, par le fait que les entreprises d’acier chinoises sont des sociétés d’État et appartiennent au gouvernement chinois. Pour ces raisons, la Chambre de commerce régionale Windsor-Essex a noté la difficulté pour les entreprises d’acier canadiennes de rivaliser avec leurs concurrentes chinoises, sachant que ces dernières « ont des quotas d'emploi et de production, ont très peu d'intérêt pour les profits ou les pertes, manipulent les devises, utilisent du charbon qui émet 15 fois plus de CO2 que le Canada par tonne et pratique le dumping de l'acier au Canada ». Selon M. Lee, bien que les sociétés d’État chinoises perdent de l’argent et sont inefficaces, les promesses du gouvernement chinois de réformer et de privatiser ces dernières ne se sont pas matérialisées parce que les sociétés d’État chinoises emploient un nombre considérable de travailleurs chinois. Il a dit : Ces grandes SE [sociétés d’État] reflètent des intérêts puissants. Elles emploient un nombre considérable de travailleurs, comme je l'ai dit, et je vais conclure, dans cet aperçu bien trop bref de la situation, que les décideurs européens, américains ou canadiens ne devraient pas espérer que les SE fassent l'objet de réformes majeures et qu'ils ne devraient donc pas s'attendre à ce que la Chine réduise sensiblement la capacité de son industrie sidérurgique, comme elle l'avait promis. Affaires mondiales Canada[18] et Innovation, Sciences et Développement économique Canada ont informé le Comité que le gouvernement du Canada tente de s’attaquer à la capacité excédentaire de production d’acier et que ses représentants interagissent avec d’autres pays, y compris dans des forums internationaux tels que l’OCDE, le G20 et l’Organisation mondiale du commerce (OMC), afin d’atténuer l'impact commercial de cette capacité excédentaire mondiale sur le Canada. FACTEURS AYANT UN IMPACT SUR LA CAPACITÉ DE L’INDUSTRIE CANADIENNE À SOUTENIR LA CONCURRENCE INTERNATIONALEDumping d’acier sur le marché canadienEn raison de la surcapacité de l’industrie mondiale de l’acier et des subventions généreuses octroyées aux producteurs de ce produit dans certains pays, la Chine par exemple, de nombreux témoins ont informé le Comité que le dumping de produits de l’acier sur le marché canadien est un problème qui empêche les producteurs canadiens de ces produits de lutter à armes égales avec leurs compétiteurs étrangers. Innovation, Sciences et Développement économique Canada a décrit dans ces mots un marché qui est aux prises avec du dumping de produits étrangers : […] ce que nous pouvons constater relativement au dumping qui se fait à l’échelle mondiale, ce n’est pas ce qu’on appelle un marché libre. Ce n’est pas un marché équitable. Ce n’est pas un marché où les résultats sont déterminés en fonction de la compétitivité des produits. C’est un marché axé uniquement sur le prix, et, si certaines compétences sont capables de vendre leur produit en deçà du coût de production, je n’ai jamais entendu parler d’un modèle de marché libre où ce type d’activité serait considéré comme une forme viable d’échanges commerciaux. En raison de son importante capacité excédentaire, la Chine a été le pays le plus souvent montré du doigt par les témoins ayant été entendus par le Comité en ce qui a trait au dumping d’acier au Canada. Cela dit, certains d’entre eux ont souligné que la Chine n’est pas le seul pays à faire du dumping d’acier sur le marché canadien. Par exemple, Evraz a mentionné que la Corée du Sud est le deuxième plus important exportateur d'acier vers l’Amérique du Nord et que les prix inéquitables de l’acier provenant de ce pays ont causé des perturbations dans de nombreux segments du marché canadien. Les cas de dumping d’acier provenant de Corée du Sud ont permis de cerner un effet pervers de la capacité excédentaire d’acier en Chine. Comme expliqué par l’Association canadienne des producteurs d'acier, l’augmentation des exportations d’acier chinois en Corée du Sud fait en sorte que les producteurs coréens n’ont souvent d’autres choix que de tenter d’écouler leur acier à l’étranger. Ce phénomène ne se limite pas seulement à la Corée du Sud. Par exemple, toujours selon l’association, « [o]n assiste aussi actuellement à des pratiques de dumping en provenance d'Europe. C'est le même problème. L'acier chinois chasse l'acier turc de Turquie et celui-ci finit par aboutir en Amérique du Nord ». Certains témoins ont abordé une autre problématique liée aux pratiques de dumping d’entreprises chinoises, soit les stratagèmes étant conçus pour contourner les règles canadiennes en matière de recours commerciaux. ArcelorMittal Dofasco a expliqué que les producteurs d’acier chinois peuvent, par exemple, faire transiter leur acier au Vietnam afin d’éviter de payer des droits antidumping s’appliquant aux produits chinois. Tenaris a présenté l’exemple d’une autre pratique permettant à des entreprises exportatrices étrangères d’éviter de payer des droits antidumping au Canada : Pour vous donner une idée, nous avons eu gain de cause contre la Chine. Dans les deux années qui ont suivi, un négociant d'un autre pays a soumis une demande à l'[Agence des services frontaliers du Canada] concernant un produit — le même produit pour lequel nous avions eu gain de cause contre la Chine. Ils sont allés dans un autre pays, en Indonésie, y ont ajouté un peu de valeur, sont venus au Canada et ont demandé ce qu'on appelle une « décision anticipée[19] ». C'était une décision confidentielle entre ces parties — entre le gouvernement et cette partie qui voulait le faire —, et nous, les fabricants de ce produit au Canada, n'en avons jamais été informés. Nous n'avons pas eu l'occasion de participer ni n'avons été informés des résultats de cette décision anticipée. Afin d’illustrer l’impact négatif que le dumping d’acier a sur les différentes communautés au Canada, la Chambre de commerce régionale Windsor-Essex a partagé l’opinion voulant que l’élimination du dumping d’acier chinois au pays permettrait la réouverture de l'usine d'Atlas Tube à Welland et le retour au travail d’une centaine d’employés ainsi qu’une augmentation de production de l'usine d'Harrow à environ 150 000 tonnes. Infrastructure de transportLa situation géographique du Canada lui procure certains avantages, comme un accès privilégié aux matières premières, mais présente également des défis, comme les longues distances à parcourir pour rejoindre certains marchés. Selon l’Association canadienne des producteurs d’acier, le Canada a un accès « facile » aux matières premières qui entrent dans la fabrication sidérurgique; les aciéries étant situées près des intrants nécessaires, soit le minerai de fer de haute-qualité, le charbon et la ferraille. Cette situation diffère avec d’autres pays producteurs d’acier comme la Chine par exemple qui « va chercher son minerai de fer dans des pays comme l'Australie et le Brésil, le charbon dans des pays comme la Mongolie, et la ferraille de plus en plus en Amérique du Nord ». Qui plus est, l’association a fait savoir que le transport des matières premières au Canada se faisait d’une manière rentable par l’entremise des réseaux maritime et ferroviaire « modernes » du pays. Innovation, Sciences et Développement économique Canada a indiqué au Comité que l’acier est un produit de commodité lourd et que son transport entre des endroits éloignés peut être couteux et s’avérer non rentable. Selon le Ministère, il est important pour les aciéries d’être situées près de leurs clients. Celui-ci notait que certaines aciéries ontariennes, par exemple, sont bien situées pour fournir des pièces automobiles en raison de leur emplacement à proximité de leurs clients. L’Association canadienne des producteurs d’acier a également noté que le transport nécessaire pour acheminer l’acier aux utilisateurs finaux est minime au pays. Cependant, Amalgamated Trading Ltd., une compagnie de l’Ouest canadien qui importe de l’acier étranger a parlé de problèmes qu’elle a encourus en ce qui concerne le transport de l’acier au sein du Canada. Selon l’entreprise, le réseau du transport canadien est « bon […], mais il est couteux. » L’entreprise a expliqué qu’il coûte plus cher de transporter de l’acier entre l’Ontario, où la majorité de l’acier canadien est produit, et l’Ouest canadien qu’entre l’Asie et Vancouver de sorte que l'importation d'acier étranger joue un rôle important dans l'économie de l'Ouest canadien. La citation suivante illustre d’ailleurs le coût du transport de l’acier d’un bout à l’autre du pays : « Lorsque nous importons de l'acier dans l'Ouest du Canada, nous payons des frais de transport entre l'Asie et Vancouver qui s'élèvent de 45 à 50 $ la tonne. Lorsque nous transportons de l'acier de l'Ontario vers l'Ouest du Canada, nous payons 120 $ la tonne. C'est ce que cela coûte par chemin de fer. Si nous utilisons des camions, nous payons près de 200 $ la tonne ». Utilisation énergétique et émissions de gaz à effet de serrePlusieurs témoins ont indiqué qu’en ce qui concerne le rendement énergétique de production ou les émissions de gaz à effet de serre (GES), l’acier canadien était plus écologique que l’acier provenant d’autres pays. Par exemple, l’Association canadienne des producteurs d’acier a noté que l’acier produit et utilisé au Canada émet 1,1 tonne d’émissions de GES contre 3,5 tonnes pour l’acier chinois utilisé au Canada. Dans le même ordre d’idées, la Chambre de commerce de Hamilton, la Chambre de commerce de Sault Ste. Marie et la Chambre de commerce régionale Windsor-Essex ont affirmé que « [l]’acier utilisé et produit au Canada a les émissions de GES plus faibles que tout autre acier que l’économie canadienne pourrait utiliser ». Des témoins ont évoqué plusieurs facteurs permettant d’expliquer la faible empreinte de carbone de la production sidérurgique au Canada. Innovation, Sciences et Développement économique Canada a fait remarquer que des intrants importants pour la fabrication d’acier au Canada, tel que l’électricité, proviennent de sources non polluantes. D’ailleurs, selon l’Association canadienne des producteurs d’acier, le transport nécessaire pour acheminer l’acier et les intrants physiques jusqu’à leurs destinations finales explique, en partie, pourquoi l’acier produit et utilisé au Canada entraine moins d’émissions de GES que l’acier chinois qui est importé au Canada et qui doit parcourir de longues distances. Innovation, Sciences et Développement économique Canada a dit être d’avis que la faible empreinte de carbone de l’acier canadien confère l’avantage suivant à l’industrie du pays : « [p]renons les problèmes auxquels ont été confrontés les secteurs gazier et pétrolier au fil des ans en termes de contrat social et de perception du produit. Je pense que c’est ce qui va se produire de plus en plus avec l’acier, et ce sera à l’avantage du Canada et des fabricants d’acier canadiens. » Le Ministère a également noté que la faible empreinte de carbone de l’acier canadien aiderait celui-ci à tirer profit des marchés publics qui prennent en compte les émissions de dioxyde du carbone dans l’octroi de contrats. À savoir ce que le gouvernement fédéral peut faire afin de promouvoir l’utilisation d’acier moins polluant au pays, le Ministère a dit : « Nous avons eu des entretiens avec les représentants de différents ministères sur certaines politiques qui peuvent être mises en place. Je crois que Services publics et Approvisionnement Canada examine ces questions, ainsi que celle des infrastructures. » À ce sujet, Tenaris a fait la proposition suivante : « Nous pouvons […] diffuser de l'information pour que les clients sachent que lorsqu'ils décident d'acheter un produit fabriqué en Chine, ils acquièrent quelque chose qui a produit trois fois plus d'émissions de gaz à effet de serre, et que s'ils choisissent d'acheter un produit issu de la chaîne d'approvisionnement du Canada, ils prennent une bonne décision ». Certains producteurs ont toutefois convenu qu’il y avait des coûts associés à cette production à basse intensité carbonique. Stelco Inc. a noté ce qui suit : « Voyez le coût de l'acier qui provient de divers pays étrangers. Visiblement, ces pays évitent beaucoup de coûts relatifs au carbone que nous supportons pour être plus efficaces ». Sur ce point, Gerdau Long Steel North America a commenté qu’une tarification du carbone doit s’appliquer globalement pour que la production sidérurgique canadienne ne soit pas condamnée à l'inactivité. Pour sa part, Evraz a préconisé une mise en œuvre de mécanismes de tarification du carbone faite avec soin. L’entreprise a affirmé : « Nous appuyons la priorité du gouvernement de faire face au changement climatique dans le cadre d'une approche équilibrée. […] Des mesures qui désavantagent les producteurs canadiens au profit de gros pollueurs ne sont pas bonnes pour les emplois de la classe moyenne ni pour l'environnement ». D’autres témoins représentant des producteurs d’acier ont demandé de l’aide afin de faire face aux coûts liés à une production d’acier à basse intensité carbonique. Stelco Inc. a fait la constatation suivante : « Nous voulons fournir l'acier écologique […], mais nous avons besoin d'aide pour, en retour, faire la péréquation de ces coûts. Que ce soit par une taxe ou une péréquation imposée à la frontière, nous sommes visiblement tout ouïe et disposés à collaborer avec vous ». Commentant l’éventuelle mise en place d’un tel tarif, le ministère des Finances Canada a indiqué qu’il serait effectivement possible d’imposer un tarif à la frontière sur les importations d’acier avec comme objectif d’assurer qu’une partie du coût du carbone imposé aux producteurs canadiens soit également imposé aux producteurs étrangers qui exportent au Canada. La Chambre de commerce de Hamilton, la Chambre de commerce de Sault Ste. Marie et la Chambre de commerce régionale Windsor-Essex ont quant à elles proposé que les revenus qui pourraient être issus de la tarification du carbone soient investis dans des secteurs à haute intensité énergétique, celui de l’acier par exemple, pour développer des procédés, des technologies et des innovations à faible teneur en carbone, entre autres choses. Main-d’œuvre et innovationLes témoins qui ont abordé les thèmes touchant à la main-d’œuvre et à l’innovation ont mentionné l’importance de ces facteurs sur la capacité des aciéries canadiennes à soutenir la concurrence internationale. Par exemple, ArcelorMittal Dofasco a affirmé : « Nous comptons sur l’innovation en matière de procédés et de produits pour réussir dans l’industrie sidérurgique nord-américaine et mondiale. Cela dit, nous savons que notre personnel est notre avantage concurrentiel ». Le Syndicat des Métallos a quant à lui expliqué au Comité que l’industrie de l’acier contribue à l’élaboration de l’économie de demain grâce aux divers efforts de l'industrie liés à la recherche et au développement. À cet effet, le syndicat a partagé l’exemple suivant : « […] après des années de recherches, les ingénieurs des domaines de l'acier et de l'automobile ont conçu un acier avancé à haute résistance pour les voitures pouvant réduire le poids total d'un véhicule de 117 kg. Cette réduction entraîne des économies en matière d'émissions de CO2 équivalant à 2,2 t par véhicule ». Au sujet de la main-d’œuvre, Innovation, Sciences et Développement économique Canada a noté qu’il est « crucial » pour l’industrie de l’acier d’avoir accès aux travailleurs les plus compétents, soulignant au passage que les postes dans ce secteur sont de haute technologie et aux responsabilités complexes. Le Ministère a d’ailleurs soutenu que l’industrie de l’acier maintenait des liens avec des universités, des collèges et des instituts de recherche, ce qui permettait aux entreprises de cette industrie d’accéder à une main-d’œuvre qualifiée et expérimentée. Selon l’Association canadienne de producteurs d’acier, les travailleurs de l’acier au Canada sont « hautement qualifiés » et peuvent compter sur une « excellente formation » tout au long de leur carrière, ce qui leur permet d’atteindre un haut niveau de productivité. Enfin, ABB Canada a tenu à souligner que, pour l’entreprise et ses clients, la génération du millénaire constituait le futur de la main-d’œuvre et que cela pourrait être profitable à l’industrie de l’acier puisque celle-ci a adapté ses opérations et ses processus en incorporant l’utilisation de logiciel et en profitant des avantages de l’automatisation. Selon cette entreprise, « pour passer à la prochaine génération, il faut réfléchir aux mesures susceptibles d’aider des intervenants clés de l’économie, comme l’industrie de l’acier, à effectuer une transformation numérique totale ». Politiques économiques et commerciales des États-UnisBien que la Chine ait été au cœur des discussions touchant les importations canadiennes d’acier, lorsqu’il est venu le temps de parler de marchés d’exportations pour l’acier canadien, les États-Unis étaient sur toutes les lèvres. Afin d’illustrer l’importance du marché américain, Evraz a noté que 88 % des exportations canadiennes d'acier en 2016 ont été acheminées vers les États-Unis. Plusieurs témoins ont commenté les politiques économiques et commerciales proposées par la nouvelle administration américaine, notant que celles-ci pourraient poser des défis pour les aciéries canadiennes. ArcelorMittal Dofasco a résumé ses inquiétudes ainsi : « D’éventuels rajustements des taxes aux frontières, l’élargissement des politiques d’achat aux États-Unis, particulièrement dans le cas de projets privés, de même que l’élargissement des règles commerciales des États-Unis qui peuvent entraîner le détournement des importations d’acier au Canada sont tous des thèmes très préoccupants parce qu’ils perturberaient le fonctionnement efficace des chaînes d’approvisionnement ». En ce qui concerne les restrictions des États-Unis sur l’approvisionnement d’acier étranger, Evraz a exhorté le gouvernement canadien à s’opposer « vigoureusement » à un éventuel élargissement de ces restrictions, surtout en ce qui concerne l’approvisionnement du secteur privé, pour la construction d’oléoducs par exemple. Affaires mondiales Canada a fait savoir que les représentants du gouvernement canadien à Washington sont à pied d’œuvre afin d’exempter l’acier canadien des mesures « Buy America »[20] et d’empêcher une expansion de ces mêmes mesures. À cet égard, quelques témoins, dont Groupe ADF Inc., ont suggéré au gouvernement d’envisager de mettre en place au Canada des mesures similaires afin de protéger l’industrie canadienne, soit des mesures de type « Achetez canadien ». Selon le Syndicat des Métallos, une telle politique serait d’ailleurs « tout à fait logique ». On a toutefois expliqué au Comité que les mesures de type « Buy America/Buy American » aux États-Unis existent depuis longtemps et que le gouvernement américain a obtenu une exemption pour ces mesures dans ses accords de libre-échange. Innovation, Sciences et Développement économique Canada a expliqué que les engagements du Canada dans ses accords de libre-échange ne lui accordent pas « la même marge de manœuvre » que les États-Unis afin de favoriser des fournisseurs domestiques d’acier dans le cadre de marchés publics. En matière de fiscalité, Amalgamated Trading Ltd. a prédit que la nouvelle administration américaine allait réduire l’impôt des sociétés américaines et, par conséquent, une « bonne partie » de la production canadienne d’acier allait quitter le Canada pour s’établir aux États-Unis. Même si des témoins ont fait part de certaines inquiétudes par rapport aux politiques commerciales américaines, on a toutefois dit au Comité que le commerce de l’acier entre les deux pays était équilibré. À cet égard, Evraz a fait la constatation suivante : « Le commerce de l'acier entre les États-Unis et le Canada constitue une relation modèle, équilibrée, intégrée et exempte de différends commerciaux. Nos clients n'y voient pas de frontière ». ArcelorMittal Dofasco a partagé une opinion similaire, notant que le commerce d’acier entre les deux pays était équitable puisqu’il n’y a ni dumping ni décret de subvention entre les deux pays. En ce qui concerne l’avenir du commerce en Amérique du Nord et une éventuelle renégociation de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA), plusieurs témoins représentant des producteurs d’acier canadien ont évoqué l’importance de la collaboration et de la coopération sur le continent nord-américain. Selon Stelco, le Canada entre dans une période critique en ce qui concerne ses relations avec les États-Unis et l’industrie canadienne de l’acier a de bons motifs d’être inquiète devant la menace d’une renégociation de l’ALENA. Dans ce contexte, l’entreprise a suggéré l’approche suivante : « Tout en étant encouragé par la position adoptée par notre gouvernement aux premiers jours d'existence de la nouvelle administration américaine, [Stelco est d’avis] que nous devrions insister plus sur la collaboration avec notre principal partenaire commercial. Nous devrions travailler ensemble pour favoriser la croissance dans la fabrication pour nos deux pays ». À ce sujet, ArcelorMittal Dofasco a soutenu qu’une éventuelle renégociation de l’ALENA présenterait « une occasion d’adopter une approche nord-américaine qui augmenterait la base manufacturière en Amérique du Nord et la part du marché des chaînes d’approvisionnement, y compris de l’acier ». SYSTÈME CANADIEN DE RECOURS COMMERCIAUXLe Comité s’est fait dire à plusieurs reprises que l’industrie canadienne de l’acier avait la capacité de soutenir la concurrence internationale, à condition qu’elle puisse le faire selon des règles de jeu équitables. De ce point de vue, l’Association canadienne des producteurs d'acier a formulé l’opinion suivante : Pour répondre à la question essentielle qui a amené le comité à entreprendre cette étude — c'est-à-dire la capacité de l'industrie sidérurgique canadienne de soutenir la concurrence internationale — je dirais que, de notre point de vue, la réponse est un « oui » très clair. Dans un marché libre qui respecterait les principes commerciaux fondamentaux, l'industrie sidérurgique canadienne pourrait non seulement soutenir la concurrence, mais également prospérer. Pour donner à l’industrie canadienne de l’acier les outils pour se battre à armes égales avec la compétition étrangère, on a expliqué au Comité qu’il était primordial que le Canada puisse se défendre contre des pratiques commerciales déloyales d’entreprises et pays étrangers. Pour cette raison, le fonctionnement et l’efficacité du système de recours commerciaux du Canada ont été soulevés à de nombreuses reprises dans le cadre de cette étude. À cet égard, il est utile de mentionner que la Loi sur les mesures spéciales d’importation (LMSI), dont l’administration est confiée à l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) et au Tribunal canadien du commerce extérieur, prévoit la protection des producteurs canadiens contre les dommages causés par le dumping de marchandises importées. Cette protection revêt la forme de droits antidumping[21]. Le ministère des Finances Canada a dit croire que le système antidumping en place au Canada était « très efficace pour l’industrie de l’acier ». Selon le Ministère, les mesures existantes au pays offrent un niveau similaire de protection aux producteurs d’acier à ce qui est offert aux États-Unis par exemple. Le Ministère a également noté que le système antidumping du Canada « figure parmi les plus réactifs au monde pour ce qui est d'imposer des droits rapidement ». Certains témoins ont signalé qu’ils étaient en accord avec une telle évaluation du système antidumping au pays. Par exemple, Evraz a affirmé : « Nous sommes très satisfaits du système canadien de recours commerciaux et des efforts que le gouvernement déploie et continuera de déployer en ce sens ». Dans la même veine, Tenaris a dit : « De façon générale, le système canadien fonctionne de manière relativement efficace du début à la fin ». Certains témoins ont néanmoins tenu à partager avec les membres du Comité des idées qui permettraient d’assurer que le système de recours commerciaux du Canada puisse continuer à répondre aux besoins de l’industrie de l’acier. Gerdau Long Steel North America a souligné qu’il était important pour le gouvernement du Canada de « s'assurer que le système de recours commercial est actualisé, rapide, fiable et qu'il empêchera tout importateur ou exportateur futé de découvrir des moyens de le contourner ». L’entreprise a également dit que le Canada devrait harmoniser ses pratiques avec celles des États‑Unis afin que le Canada ne devienne pas une destination pour le dumping d’acier étranger. Amalgamated Trading Ltd., une entreprise qui importe de l’acier dans l’Ouest canadien, a partagé l’opinion voulant que le système de recours commerciaux du Canada soit efficace et qu’il permette d’imposer des droits antidumping et compensatoires rapidement. L’entreprise a toutefois dit être d’avis que cette façon de faire profitait davantage au centre du Canada du Canada de l’Ouest. Selon l’entreprise, cela s’explique par la difficulté qu’ont les provinces de l’Ouest à s’approvisionner en acier provenant du centre du pays en raison des coûts de transport, mais également parce que « [l]es aciéries canadiennes ne souhaitent pas vendre leurs produits dans l'Ouest du Canada ». Pour ces raisons, l’entreprise a demandé que la possibilité de moduler les droits antidumping en fonction de la situation géographique plutôt que de les appliquer à l'ensemble du pays soit examinée. Quant à lui, le Syndicat des Métallos a partagé certaines recommandations avec le Comité concernant le rôle que les syndicats devraient pouvoir jouer dans le processus de recours commerciaux. Plus précisément, il a demandé que les syndicats puissent déposer des plaintes menant à l’imposition de droits antidumping et compensateurs en vertu de l’article 31 de la LMSI, qu’ils puissent déposer des plaintes de sauvegarde en vertu de l’article 23 de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur et qu’ils puissent participer pleinement au processus menant à l’imposition de droits antidumping et compensateurs, comme c’est le cas aux États-Unis et en Australie. Dans le mémoire qu’il a déposé au Comité, le syndicat estime qu’en permettant aux syndicats de prendre part à ce processus, ceux-ci « pourraient contribuer aux efforts des producteurs canadiens impliqués dans des causes commerciales coûteuses en ralliant l'appui de parties disparates, tant à l'échelle régionale que nationale ». Groupe ADF Inc. s’est quant à lui montré plus critique envers le système de recours commerciaux du Canada. Selon celui-ci, « les mesures actuelles mises en place par le gouvernement canadien pour protéger notre industrie sont insatisfaisantes. Nous recommandons donc un renforcement de ces mesures ». Plus précisément, l’entreprise a mentionné que les fabricants d’acier de construction devraient être mieux informés sur les recours à leur disposition lorsqu’ils sont témoins de pratiques de dumping sur le marché canadien. Groupe ADF Inc. a également suggéré qu'une enquête soit lancée afin d’expliquer les écarts qui existent entre les prix de vente des entreprises canadiennes et ceux des entreprises internationales dans le cadre de projets de ponts et de structures d'envergure au Canada. De façon similaire, dans un mémoire soumis au Comité conjointement par la Chambre de commerce d’Hamilton, la Chambre de commerce de Sault Ste. Marie et la Chambre de commerce régionale Windsor-Essex, il est suggéré au gouvernement fédéral d’explorer la mise en place d’outils d’approvisionnement permettant d’envisager la sélection de fournisseurs locaux sur la base d’une évaluation basée sur les critères suivants : l’incidence environnementale mondiale engendrée par l’importation de produits d’acier, l’existence de règlements en matière de santé et de sécurité comparable au cours de la production et de la fabrication dans le pays exportateur et l’existence d’un accès égal au marché du pays exportateur pour le même produit. Le 22 mars 2017, le gouvernement du Canada a présenté le budget de 2017 dans lequel on retrouve certains amendements suggérés à la LMSI et aux règlements connexes sur les recours commerciaux. Ces amendements permettraient, entre autres, de créer un nouveau mécanisme à la disposition des producteurs canadiens souhaitant déposer une plainte concernant des pratiques commerciales et d’affaires qui visent spécifiquement à éviter des droits en matière de recours commerciaux (enquêtes anti‑contournement), mais également d’accorder un plus grand pouvoir discrétionnaire à l’ASFC dans l’évaluation de la fiabilité des prix dans le pays d’exportation lors d’enquêtes sur le dumping lorsque l’Agence estime que les prix sont faussés en raison de la présence d’une « situation particulière du marché ». Le gouvernement s’engage également dans son plan budgétaire à apporter des modifications réglementaires afin de permettre aux syndicats de participer, à titre de parties intéressées, aux procédures sur les recours commerciaux. Certains témoins ont tenu à partager leurs impressions relativement aux éléments du budget de 2017 concernant le système de recours commerciaux du Canada. ArcelorMittal Dofasco, par exemple, s’est réjoui de l’engagement du gouvernement du Canada à améliorer la capacité du pays de défendre les fabricants canadiens contre le dumping et la subvention d’importations. Selon l’entreprise, les modifications législatives et réglementaires proposées « amélioreront l’application des recours commerciaux, remédieront au contournement des droits, et permettront une meilleure prise en compte des distorsions du marché et des prix. Ces mesures ont bénéficié d'un appui considérable des fabricants et des associations commerciales dans tout le Canada ». Statut d’économie de marché de la ChineUn autre sujet ayant été abordé à de nombreuses reprises durant les travaux du Comité concerne le statut d’économie de marché de la Chine. Le Protocole d’accession à l’OMC de la Chine incluait une clause selon laquelle celle-ci pouvait être traitée comme une économie non marchande dans des poursuites pour dumping si les compagnies chinoises n’arrivaient pas à prouver qu’elles exerçaient leurs activités dans des conditions propres à une économie de marché. Cela dit, suite à l’expiration de cette clause le 11 décembre 2016, la Chine affirme que les pays membres de l’OMC sont maintenant tenus de lui accorder le statut d’économie de marché. Le dumping est déterminé en comparant le prix dans le pays importateur d’un produit faisant prétendument l’objet de dumping à un prix de référence, appelé « valeur normale ». Habituellement, la valeur normale équivaut au prix sur le marché intérieur de l’exportateur de produits semblables au produit faisant l’objet d’une enquête de dumping. Le principal effet du statut d’économie non marchande dans les enquêtes antidumping est qu’il permet d’utiliser d’autres méthodes pour établir cette valeur normale. Prenant l’exemple de la Chine, le ministère des Finances Canada a expliqué que le gouvernement du Canada pouvait utiliser des données d'un pays tiers ou d’autres données de substitution au lieu de se fier aux données chinoises s’il est établi que les prix en Chine ne sont pas fiables. Le Ministère a souligné qu’à défaut de pouvoir utiliser des données de pays tiers ou d’autres données de substitution pour des produits d’acier importés de Chine, le niveau des droits antidumping serait réduit, de l’ordre d’environ 30 points de pourcentage pour certains produits selon différentes estimations. En considérant la Chine comme une économie non marchande, l’ASFC peut faire appel à ces autres modes de calcul pour établir le prix des produits sur le marché intérieur de la Chine. Les marges de dumping ainsi obtenues sont généralement plus élevées que celles obtenues en utilisant les modes de calcul standards de l’ASFC. Le ministère des Finances Canada a confirmé qu’en l’absence d’une modification réglementaire, le traitement réservé aux pays n’ayant pas une économie de marché allait se poursuivre pour la Chine après le 11 décembre 2016. Le Ministère n’a toutefois pas voulu se prononcer à savoir si le statut d’économie de marché devait être accordé à la Chine, se limitant à dire qu’il suivait de près l’évolution de ce dossier. Soulignant que la Chine avait lancé une procédure contre les États-Unis et l’Union européenne (UE) à l’OMC relativement à son statut d’économie de marché, l’Association canadienne des producteurs d’acier a signalé qu’il était important pour le Canada de manifester sa solidarité à l’endroit des États-Unis et de l’UE dans cette affaire. L’association a d’ailleurs expliqué que l’ASFC détermine si un pays étant visé par un recours commercial au Canada se comporte comme une économie non marchande par une enquête individuelle et approfondie, en conformité avec l’article 20 de la LMSI. À cet effet, l’association a dit : « Nous pensons qu'il s'agit d'une approche extrêmement ferme qui est totalement défendable devant l'OMC. Si les Chinois venaient à contester notre capacité à comprendre le fonctionnement de leur économie, nous nous attendrions à ce que notre gouvernement réagisse avec vigueur ». Le Syndicat des Métallos a quant à lui déclaré : « Je pense qu'il n'est absolument pas justifié d'accorder à la Chine le statut d'économie de marché. Ce serait désastreux pour notre pays ». CONCLUSIONSur la base des témoignages qu’il a entendus dans le cadre de son étude, le Comité est d’avis que l’industrie canadienne de l’acier est tout à fait en mesure de soutenir la concurrence internationale. Entre autres avantages concurrentiels, l’industrie canadienne de l’acier bénéficie de produits innovateurs, d’une main-d’œuvre qualifiée et d’un accès facile aux matières premières dont il a besoin. En misant sur ces avantages, les producteurs d’acier au Canada pourront continuer de créer des dizaines de milliers d’emplois, directs et indirects, au pays. Afin de prospérer et de soutenir la concurrence internationale, il est toutefois impératif que les producteurs canadiens et étrangers d’acier soient assujettis à des règles équitables. Le Comité a constaté que la surcapacité de production mondiale d’acier et le dumping de produits étrangers au Canada qui en résulte avaient des conséquences néfastes pour les producteurs d’acier au pays. Il est effectivement difficile, voire impossible, pour les producteurs d’acier au Canada de faire concurrence à des entreprises qui exportent leurs produits au Canada à des prix ne reflétant pas les forces du marché. Pour ces raisons, le Comité note l’importance d’un système de recours commerciaux efficace, équitable et accessible à tous les intervenants de l’industrie canadienne de l’acier. Le Comité se réjouit des nouvelles mesures annoncées dans le budget 2017 du gouvernement fédéral visant à améliorer le système de recours commerciaux au pays. Le Comité note cependant que le gouvernement aurait intérêt à disséminer davantage l’information concernant ce système au sein de l’industrie de l’acier et d’accroître la visibilité des décisions prises concernant l’imposition de droits sur des importations de produits de l’acier. Le Comité croit également qu’il est primordial pour le gouvernement du Canada de conserver le droit d’utiliser d’autres méthodes de calculer la valeur normale d’un produit que les prix de celui-ci sur le marché du pays exportateur lorsque des compagnies étrangères n’arrivent pas à prouver qu’elles exercent leurs activités dans des conditions propres à une économie de marché. Lorsque vient le temps d’imposer des droits antidumping ou des droits compensateurs, le Comité est d’avis que le gouvernement devrait considérer les conséquences du dumping ou de subventions passibles de mesures compensatoires sur une base régionale, lorsqu’approprié. Enfin, en matière d’environnement, le Comité est d’avis que la production d’acier au Canada est parmi les plus respectueuses de l’environnement au monde et que le gouvernement aurait tout intérêt à élaborer une stratégie permettant d’assurer que les producteurs canadiens puissent profiter de la faible intensité carbonique de l’acier canadien. En conséquence, le Comité recommande : Recommandation 1 Que le gouvernement du Canada participe de façon proactive aux discussions et aux initiatives mises de l’avant par les organisations internationales – l’Organisation de coopération et de développement économiques par exemple – ayant comme objectif de trouver des solutions à la capacité excédentaire de production d’acier à l’échelle internationale. Recommandation 2 Que le gouvernement du Canada accroisse la visibilité des services et des outils à la disposition des entreprises canadiennes en matière de recours commerciaux et qu’il informe de façon proactive les intervenants de l’industrie canadienne de l’acier lorsqu’une décision est prise concernant l’imposition de droits antidumping ou de droits compensatoires sur des produits d’acier. Recommandation 3 Que le gouvernement du Canada travaille de concert avec ses principaux partenaires commerciaux, particulièrement les États-Unis, afin d’assurer la mise en place de systèmes de recours commerciaux adéquats et efficaces et afin d’éviter que le Canada ne devienne une destination pour le dumping d’acier étranger. Recommandation 4 Que le gouvernement du Canada se réserve le droit d’utiliser d’autres modes de calcul que les prix sur le marché du pays exportateur pour établir la marge de dumping lorsque des compagnies étrangères n’arrivent pas à prouver qu’elles exercent leurs activités dans des conditions propres à une économie de marché. Recommandation 5 Que le gouvernement du Canada tienne compte des effets du dumping et des subventions passibles de mesures compensatoires sur toutes les régions du Canada lors d’enquêtes visant les importations de produits d’acier et qu’il examine l’incidence de l’imposition de droits antidumping ou compensatoires régionaux plutôt que nationaux lorsqu’il convient de le faire. Recommandation 6 Que le gouvernement du Canada appuie les producteurs d’acier canadiens afin de tirer profit de la faible empreinte de carbone de l’acier canadien par rapport à l’acier produit à l’étranger, y compris la mise en place d’un mécanisme de marchés publics qui tient compte des émissions de dioxyde de carbone lors de l’attribution de contrats. Recommandation 7 Que le gouvernement du Canada maintienne et encourage l’équité commerciale en continuant à considérer l’économie chinoise comme une économie dirigée. Recommandation 8 Que le gouvernement du Canada accorde aux organisations syndicales un rôle accru dans le mécanisme de recours commerciaux du Canada, y compris le droit de participer au processus de plaintes. [1] D’après l’Agence des services frontaliers du Canada, « le dumping est le fait de vendre des marchandises à des importateurs au Canada à des prix inférieurs aux prix offerts pour des produits semblables sur le marché intérieur de l’exportateur ou à des prix ne permettant pas de réaliser des bénéfices ». [2] Statistique Canada, Base de données du commerce international de marchandises du Canada, consultée via Données sur le commerce en direct, 3 mai 2017. En ce qui concerne les données de ce paragraphe et le paragraphe suivant, les produits d’acier sont tels que définis par le International Trade Administration des États–Unis dans sa publication Steel Imports Report: Canada. [disponible en anglais seulement] [3] Ibid. [4] Ibid. [5] Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE)] et le Royaume de Belgique, Background Note No. 2 : Capacity Developments in the World Steel Industry [disponible en anglais seulement], 18 avril 2016. [6] Droits imposés pour compenser le préjudice causé par les importations de marchandises faisant l'objet de dumping. [7] Droits imposés pour compenser le préjudice causé par les importations de marchandises subventionnées. [8] L’OCDE et le Royaume de Belgique, Background Note No. 2 : Capacity Developments in the World Steel Industry [disponible en anglais seulement], 18 avril 2016., et L’OCDE et le Royaume de Belgique, Background Note No. 3 : Trade and Trade Policy Developments [disponible en anglais seulement], le 18 avril 2016. [9] World Steel Association, Global Interactive Map, 2017. [10] Ibid. [11] World Steel Association, Steel Statistical Yearbook 2006 [disponible en anglais seulement], décembre 2006. [12] World Steel Association, Steel Statistical Yearbook 2016 [disponible en anglais seulement], octobre 2016. [13] World Steel Association, Global Interactive Map [disponible en anglais seulement], 2017. [14] OCDE, World Crude Steelmaking Capacity [disponible en anglais seulement], 2016. [15] OCDE, Excess Capacity in the Global Steel Industry and the Implications of New Investment Projects [disponible en anglais seulement], 2015. [16] Ibid. [17] D’ici à ce que la Loi sur le ministère de l’Industrie soit modifiée, l’appellation légale du Ministère demeure « ministère de l’Industrie ». Cela dit, on utilise dans le présent rapport le titre d’usage utilisé actuellement pour désigner ce ministère, soit Innovation, Sciences et Développement économique Canada. [18] D’ici à ce que la Loi sur le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement soit modifiée, l’appellation légale du Ministère demeure « ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement ». Cela dit, on utilise dans le présent rapport le titre d’usage utilisé actuellement pour désigner ce ministère, soit Affaires mondiales Canada. [19] Une décision anticipée est un énoncé par écrit sur le classement tarifaire d’un produit, fournie à une personne par l’Agence des services frontaliers du Canada [ASFC] en vertu de l’alinéa 43.1(1)c) de la Loi sur les douanes. [20] Selon Affaires mondiales Canada, « les dispositions Buy America et la Buy American Act sont des mesures législatives distinctes prévoyant différentes exigences réglementaires. Les dispositions Buy America s'appliquent uniquement aux subventions émises par la Federal Transit Administration (administration fédérale du transport en commun – FTA) ou la Federal Highway Administration (administration fédérale des autoroutes – FHWA). Quant à la Buy American Act, elle peut être appliquée à tous les marchés publics américains. [21] Le site web de l’Agence des services frontaliers du Canada fournit de l’information sur les processus d'enquête canadiens portant sur le dumping et le subventionnement. |