HESA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent de la santé
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TÉMOIGNAGES
Le lundi 12 février 2018
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Je déclare la séance ouverte. Bienvenue à tous à la réunion no 89 du Comité permanent de la santé.
Aujourd'hui, nous entreprenons l'examen du projet de loi S-5, Loi modifiant la Loi sur le tabac, la Loi sur la santé des non-fumeurs et d'autres lois en conséquence.
Il semble que les témoins nous ont apporté beaucoup de préparations écrites aujourd'hui. Nous accueillons aujourd'hui Neil Collishaw, directeur de la recherche de Médecins pour un Canada sans fumée, Rob Cunningham, analyste principal des politiques de la Société canadienne du cancer, Lesley James, gestionnaire principale, Politique de la santé, de la Fondation des maladies du coeur et de l'AVC du Canada, et, à titre personnel, le Dr Gaston Ostiguy, pneumologue, professeur agrégé et directeur à la retraite de la clinique de cessation tabagique du Centre universitaire de santé McGill.
Bienvenue à vous tous. Chacun d'entre vous dispose de 10 minutes pour faire son introduction; ensuite, nous passerons aux questions. Nous allons commencer par Médecins pour un Canada sans fumée.
Je vous remercie, monsieur le président.
[Français]
Honorables députés, je vous remercie de votre invitation à vous présenter nos perspectives sur le projet de loi S-5, Loi modifiant la Loi sur le tabac, la Loi sur la santé des non-fumeurs et d’autres lois en conséquence.
Je suis le directeur de recherche de Médecins pour un Canada sans fumée. Bien que je ne sois pas médecin, je travaille depuis plus de 35 ans dans le domaine du contrôle du tabac. J'ai travaillé à Santé Canada dans les années 1980 et à l'Organisation mondiale de la santé dans les années 1990.
[Traduction]
Le projet de loi S-5 légitimera ce qui est actuellement un marché gris des produits de vapotage. Il donnera certains éclaircissements qui faciliteront la banalisation des emballages et réalisera un petit nombre de progrès importants pour la lutte contre le tabac. Cependant, malheureusement, le projet de loi, tel qu'il est libellé actuellement, contient des risques inutiles pour la santé publique. Si ces lacunes ne sont pas corrigées, nous prédisons que le projet de loi créera plus de problèmes qu'il n'en réglera.
La lacune fondamentale du projet de loi est qu'il ouvre trop grand la porte à la promotion des produits de vapotage. Une conséquence de la légalisation des produits de vapotage est que les compagnies de tabac pourraient entrer sur le marché canadien avec de nouveaux produits de vapotage. Actuellement, elles ne participent pas au marché gris.
La sanction royale de ce projet de loi agira comme un pistolet de départ pour la course à la vente de la plus grande quantité possible de ces produits, en employant toutes les stratégies de commercialisation que la loi permettra. Or, le projet de loi permet trop de ces stratégies. Dans sa forme actuelle, il permettra que les compagnies fassent de la publicité à la télévision, à la radio, sur des panneaux publicitaires, dans des points de vente au détail, dans les médias sociaux, par courrier direct, par messagerie texte, et par le biais de concours et de cadeaux promotionnels. Encore une fois, les compagnies pourraient envoyer des filles en tenue étriquée dans les bars pour offrir des échantillons aux clients. Nous avons vu les compagnies de tabac employer ces mêmes stratégies pour introduire les générations précédentes à la nicotine et encourager leur dépendance à cette substance.
Notre recommandation pour réduire le plus possible ce risque est simple: il faut imposer des restrictions à la publicité pour les produits de vapotage, de la même manière que pour les produits du tabac qui — vous vous en souviendrez depuis votre étude du projet de loi C-45 — est assujetti aux mêmes types de restrictions que celles qui sont en place pour le cannabis. Permettez uniquement des annonces qui contiennent des renseignements ou qui font la publicité des marques, et cela, seulement à des endroits restreints. Même si la réglementation de la commercialisation est pareille, les produits de vapotage jouiront quand même d'un avantage concurrentiel par rapport aux produits du tabac, car ils seront vendus sans taxes, dans des paquets de marques, et avec moins de mises en garde liées à la santé. Nous ne sommes pas seuls à faire cette recommandation. La plupart des principaux organismes de la santé suggèrent également d'assujettir les produits de vapotage à des restrictions semblables.
En réponse à ces préoccupations, le Sénat a adopté les amendements proposés par le ministère de la Santé pour donner au gouvernement le pouvoir de réglementation pour réduire la publicité des produits du vapotage dans les cas où les choses tournent mal. Quelques mois plus tard, Santé Canada a publié un document de consultation sur les types de règlements qu'il envisageait d'adopter, et ceux-ci nous ramenaient dans le passé. Ils ressemblaient beaucoup à ceux que l'industrie du tabac avait utilisés pour se régir elle-même quant à la publicité des cigarettes pendant les années 1960 et 1970.
Limiter les annonces télévisées à certains moments de la journée et établir une distance minimum entre les panneaux publicitaires et les écoles ne suffisent pas, comme de pénibles expériences nous l'ont appris. Personne ne doit encourager la consommation d'un produit qui présente un risque de plus de 30 % de créer une dépendance à vie. La réglementation ne pourra pas remettre le génie de la publicité dans la lampe. Nous devons limiter la publicité à l'égard des produits de vapotage maintenant, pas plus tard, et nous devons le faire fermement, et non mollement.
Si le projet de loi est adopté sous sa forme actuelle, le Canada sera pratiquement le seul pays qui permette des règles si libéralisées sur la publicité des produits du vapotage. La plupart des pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques qui permettent la vente des produits de vapotage appliquent des restrictions à la publicité semblables à celles qui s'appliquent aux produits du tabac. Seulement les États-Unis permettent la publicité pratiquement illimitée des produits de vapotage, et quelle en est la conséquence pour les jeunes Étatsuniens? Eh bien, je crois que le titre du communiqué de presse que le Directeur du Service de santé publique des États-Unis a publié en décembre 2016 nous donne la réponse: « Le Directeur du Service de santé publique des États-Unis signale que l'utilisation des cigarettes électroniques chez les jeunes et les jeunes adultes présente un danger pour la santé. »
Je vais maintenant parler d'une autre lacune du projet de loi S-5 que l'on pourrait qualifier de grave omission.
Le projet de loi S-5 ouvre la porte aux produits de vapotage et à leur commercialisation, mais il néglige de commencer à fermer la porte aux produits du tabac. On légalise les produits de vapotage dans l'espoir qu'ils permettent de réduire les effets nocifs du tabac. C'est un espoir légitime, et j'espère sincèrement que cet espoir se concrétisera, mais ce n'est tout de même qu'un espoir. Afin de garantir la réduction des effets nocifs, nous avons besoin d'un plan visant à éliminer la cigarette traditionnelle.
Il y a quelques mois, les États-Unis ont présenté leur vision sur la façon de faire en sorte que les avantages de la consommation de formes moins nocives de nicotine s'accompagnent d'une réduction de la consommation des formes les plus nocives. La Food and Drug Administration des États-Unis a annoncé, en juillet 2017, la création d'un cadre exhaustif de réduction des méfaits qui permettrait de réduire la quantité de nicotine dans les cigarettes traditionnelles afin que les fumeurs se tournent vers des produits moins nocifs. En raison des particularités des lois et des règlements des États-Unis, la FDA est cependant limitée quant à la manière dont elle peut réglementer les cigarettes et elle mise sur la réduction de la nicotine parce que la loi ne lui donne pas d'autres options. Or, au Canada, nous en avons... vous en avez, en tant que législateurs.
Nous pouvons suivre le modèle américain et l'améliorer en créant un cadre de réduction des méfaits visant à réduire l'offre et la demande de cigarettes grâce à diverses approches, qui pourraient comprendre des programmes de plafonnement et d'échanges, des incitatifs financiers, des exigences de rendement et d'autres outils de réglementation modernes. Le gouvernement s'est fixé comme objectif de faire passer le taux de tabagisme à moins de 5 % d'ici 2035, d'où l'expression « moins de 5 d'ici 35 », mais jusqu'ici, il semble qu'il s'agisse davantage d'un slogan que d'un plan. Toutefois, le projet de loi S-5 nous donne maintenant l'occasion d'établir un cadre de réduction des méfaits qui garantira que la légalisation du vapotage contribuera à réduire le tabagisme.
Voici un très bref résumé des changements clés que nous proposons: élargir l'objet de la loi pour inclure la réduction du fardeau des maladies, la prévention de la dépendance à la nicotine et l'atteinte de l'objectif de la ministre, soit « moins de 5 d'ici 35 »; élargir encore une fois la portée de la loi afin de créer un pouvoir de réglementation à l'égard des nouveaux produits non combustibles ainsi que des autres nouveaux produits du tabac qui pourraient arriver sur le marché dans l'avenir; et imposer de nouvelles exigences et obligations à l'industrie du tabac.
Nous avons préparé des suggestions détaillées sur la façon dont ces changements pourraient être apportés durant l'étude article par article du projet de loi, et je serai heureux de vous en parler un peu plus tard.
Le Comité peut grandement contribuer à l'atteinte de l'objectif « moins de 5 d'ici 35 ». Je vous demande de ne pas laisser le projet de loi S-5 être adopté sans mettre en place les garanties nécessaires pour protéger les jeunes et les adultes des pratiques de commercialisation de l'industrie de la nicotine et du tabac. Il faut s'assurer que le projet de loi S-5 permettra de mettre fin à la vente de produits de tabac combustibles et qu'il ne sera pas un moyen de recruter de nouveaux fumeurs.
Je vous remercie de votre attention.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, je m'appelle Rob Cunningham et je suis avocat et analyste principal des politiques à la Société canadienne du cancer.
[Français]
Je vous remercie de me donner l'occasion de témoigner devant vous aujourd'hui.
[Traduction]
D'entrée de jeu, je tiens à remercier le gouvernement fédéral et la ministre de la Santé, l’hon. Ginette Petitpas Taylor, de leur soutien pour promouvoir la lutte contre le tabagisme. Nous remercions également tous les partis de leur appui au projet de loi S-5 à l'étape de la deuxième lecture et de leur contribution, au fil des décennies, à la lutte contre le tabagisme au Canada.
Nous sommes favorables au projet de loi S-5 et nous avons un certain nombre d'amendements à vous recommander en vue de l'améliorer.
Je vais d'abord parler de l'emballage neutre et uniforme. Il s'agit d'une mesure clé de lutte contre le tabagisme qui permet notamment de protéger les jeunes. Le Canada se joindra aux huit pays qui ont mis en place des exigences en matière d'emballage neutre, soit l'Australie, le Royaume-Uni, la France, l'Irlande, la Norvège, la Nouvelle-Zélande, la Hongrie et la Slovénie. L'emballage neutre est aussi envisagé dans de nombreux autres pays.
Le cahier qui vous a été distribué présente notamment un survol de la situation à l'échelle mondiale.
L'emballage neutre permet d'atteindre plusieurs objectifs: réduire l'attrait des produits du tabac, faire obstacle aux messages insidieux véhiculés par les emballages, éliminer les aspects promotionnels des emballages, rehausser l'efficacité des mises en garde relatives à la santé, et réduire l'incidence du tabagisme. L'emballage demeure le principal moyen de faire de la publicité sur le tabac au Canada actuellement. Le tabac crée une dépendance et il est mortel; il ne devrait pas être vendu dans des emballages qui le rendent plus attrayant, point final.
Imperial Tobacco a déclaré qu'il n'existe aucune preuve de l'efficacité de l'emballage neutre. Au contraire, les preuves abondent. J'ai ici une vaste compilation en 13 volumes qui le prouve et que je soumets à l'examen et à l'attention du Comité. C'est une compilation de diverses études à l'échelle mondiale qui fournit des preuves convaincantes de l'efficacité de l'emballage neutre. Il y a plus de 150 études, rapports et autres éléments de preuve qui portent expressément sur la promotion sur les emballages et l'emballage neutre, sans parler des nombreuses études sur les mises en garde et les autres aspects liés à l'emballage. On vous a distribué séparément une table des matières.
Il est bien évident que l'emballage neutre serait efficace. Autrement, pourquoi l'industrie du tabac s'y opposerait-elle si farouchement?
L'adoption de l'emballage neutre a donné de bons résultats en Australie, mais l'industrie du tabac affirme le contraire, tout comme Sinclair Davidson, qui témoignera devant le Comité plus tard aujourd'hui. M. Davidson est agrégé supérieur de recherche auprès de l'Institute of Public Affairs de l'Australie, un organisme ayant reçu du financement de l'industrie du tabac. On pourra constater les réels avantages de l'emballage neutre d'ici 20 ans, mais les premières années sont déjà prometteuses. J'invite les membres du Comité à consulter l'onglet 4 du cahier. Vous y trouverez un graphique qui illustre la prévalence actuelle du tabagisme en Australie. L'emballage neutre a été mis en oeuvre en 2012, et on peut voir une baisse du taux de tabagisme par la suite. On ne peut pas dire que le taux de tabagisme a cessé de diminuer.
Passons à la page suivante. On y présente le taux pour les personnes de 18 et 19 ans. Encore une fois, nous voyons une baisse de la prévalence du tabagisme. Il s'agit de l'Enquête sur la stratégie nationale de lutte contre la drogue. La taille de l'échantillon des jeunes est relativement petite, mais à la page suivante, on a un échantillon plus grand, soit celui des 16-17 ans en Australie, et il y a une diminution. Lorsque les taux de tabagisme baissent, même quelques points de pourcentage sont très importants sur le plan des effets potentiels sur la santé.
Il y a d'autres graphiques qui présentent diverses tailles d'échantillon; dans la mesure où ils sont fiables — ils doivent être utilisés avec prudence —, ils sont encourageants.
En France, l'industrie du tabac fait état d'une diminution d'à peine 0,7 % des ventes de cigarettes dans les 12 mois suivant la mise en oeuvre de l'emballage neutre, le 1er janvier 2017, pour affirmer que l'emballage neutre ne fonctionne pas. Or, il y a également eu une diminution de 5,1 % des ventes de tabac à rouler, une catégorie importante en France. Si l'on tient compte de la croissance de la population, les diminutions par habitant sont d'environ 2 et 6 %. Ces pourcentages ne tiennent pas compte des mouvements de stocks et des changements dans les niveaux de contrebande, qui peuvent fausser les données. Juste avant la mise en oeuvre, les détaillants auraient diminué leurs achats afin de se débarrasser des anciens stocks et de ne pas rester coincés avec des produits invendables. Après le 1er janvier, ils ont dû reconstituer leurs stocks; cela fausse les données.
Le gouvernement français a fortement appuyé l'emballage neutre et, en 2015, il a même organisé une réunion ministérielle afin de promouvoir l'emballage neutre auprès des ministres de la Santé de 10 pays.
Ce que certaines personnes ont affirmé au sujet de l'emballage neutre, c'est qu'il faudra plus de temps à un employé de magasin pour trouver un paquet de cigarettes pour un client. Le problème ne s'est pas posé en Australie, où de nombreux détaillants placent simplement les marques par ordre alphabétique. Des études menées en Australie ont révélé qu'il fallait en fait moins de temps aux employés pour mettre la main sur le paquet voulu.
En ce qui concerne la contrebande, on ne devrait pas tenir compte des allégations sans fondement de l'industrie, et ce, pour de nombreuses raisons. À l'onglet 3 du cahier, vous trouverez des réponses à ces allégations. Il faut garder à l'esprit que, en 2008 et en 2010, les trois principales compagnies de tabac au Canada ont été reconnues coupables de contrebande et qu'elles ont dû payer 1,7 milliard de dollars en amendes et en règlements au civil.
Les seuls rapports cités pour justifier l'affirmation selon laquelle l'emballage neutre fait augmenter la contrebande sont financés par l'industrie du tabac. La firme KPMG, auteure de divers rapports, a dû faire une démarche inhabituelle, celle d'écrire à la ministre britannique de la Santé pour démentir le fait que son rapport indiquait que l'emballage neutre faisait augmenter la contrebande, comme le disait l'industrie. Le rapport précise qu'aucun paquet neutre contrefait n'a été trouvé pour le marché australien. Le marché global pour l'ensemble des activités de contrebande en 2016 était de 2,3 millions de kilogrammes, soit moins que les 2,4 millions de kilogrammes de 2010, avant l'adoption de l'emballage neutre.
Imperial Tobacco fait valoir que la suppression de la marque et du logo sur les paquets de cigarettes donnera lieu à de la contrebande. Ce n'est pas le cas. Les fabricants pourront notamment placer un indicateur alphanumérique exclusif sur les cigarettes pour distinguer chaque marque, comme on le fait en Australie. Il devrait également y avoir un marquage obligatoire, un point qu'a soulevé Mme Gladu et d'autres députés durant le débat à l'étape de la deuxième lecture. Ce marquage permettrait d'identifier les produits destinés à la vente légale au Canada et répondrait aux préoccupations liées à la contrebande. Le meilleur marquage obligatoire serait une mise en garde pour la santé, une mesure appuyée par la recherche.
Un amendement au projet de loi devrait prévoir un pouvoir de réglementation pour permettre que les mises en garde liées à la santé soient apposées directement sur les produits du tabac, et non seulement sur les emballages, tout comme le projet de loi le prévoit actuellement pour les produits de vapotage.
Les amendements que nous recommandons au projet de loi figurent à l'onglet 1 du cahier.
Un autre amendement devrait prévoir un pouvoir de réglementation pour permettre qu'une partie ou la totalité des dispositions de la loi puissent s'appliquer à l'avenir aux produits sans tabac destinés à être fumés dans un narguilé. L'utilisation du narguilé est en hausse chez les jeunes et nécessite une intervention. Un amendement devrait modifier le processus de réglementation prévu dans la Loi sur le tabac. Il ne devrait plus être nécessaire de soumettre les règlements à l'approbation de la Chambre des communes. Pratiquement aucune loi fédérale ne contient une telle disposition, qui empêche les interventions efficaces et rapides qui sont essentielles pour s'attaquer à une épidémie.
En ce qui concerne les cigarettes électroniques, nous reconnaissons qu'elles sont moins nocives que les cigarettes traditionnelles et nous appuyons la modification du statut réglementaire prévue dans le projet de loi S-5. Grâce au projet de loi, le gouvernement rend accessibles les cigarettes électroniques, qui sont moins nocives, aux personnes qui sont incapables d'arrêter de fumer. Parallèlement, le gouvernement reconnaît qu'il existe des incidences négatives potentielles. Une mesure législative est nécessaire pour réduire ces risques potentiels, comme l'usage par les jeunes, ainsi que les tactiques de commercialisation qui visent à décourager l'abandon et à attirer les ex-fumeurs et les non-fumeurs. Bon nombre des restrictions sur la publicité des cigarettes électroniques prévues dans le projet de loi sont faibles par rapport à celles d'autres pays.
Par amendement, on devrait interdire toute publicité associant le produit à un mode de vie, par exemple aux plages tropicales, aux voitures de sport et à la dégustation de vin devant un coucher de soleil romantique — tous des exemples qu'autorise le projet de loi. Devant le Sénat, l'Association canadienne de la vape a appuyé l'interdiction de ce genre de publicité.
Par amendement, on devrait n'autoriser explicitement que la publicité informative ou la publicité préférentielle. C'est légitime. C'est en fait l'intention déclarée du gouvernement, mais qu'on ne retrouve pas dans le libellé actuel du projet de loi. Encore une fois, dans son témoignage, l'Association canadienne de la vape a dit vouloir limiter la publicité à sa forme informative.
Par amendement, on devrait prévenir les campagnes de publicité, par exemple celles par lesquelles l'achat de cigarettes électroniques donne la chance de gagner des vacances gratuites ou des billets pour assister à un concert rock. C'est encore de la publicité associant le produit à un mode de vie.
Par amendement, on devrait limiter les emplacements autorisés pour la publicité, pour moins y exposer les jeunes, tout en continuant d'autoriser celle qui est destinée aux adultes. Actuellement, le projet de loi ne prévoit rien en ce sens; il fait preuve d'une tolérance plus grande que pour le tabac ou le cannabis. La publicité est autorisée à la télévision, dans les transports en commun et les abribus, sur les panneaux publicitaires, dans les magazines de bandes dessinées — presque partout.
D'autres pays, comme la Nouvelle-Zélande, qui légalisent la cigarette électronique avec nicotine, interdiront la publicité de la cigarette électronique tout en l'autorisant aux points de vente au détail, par des dispositions qui correspondent à celles qui s'appliquent au tabac.
Le projet de loi S-5 comporte des dispositions si tolérantes qu'elles sont comparables à celles du code volontaire de 1964 de l'industrie canadienne des produits du tabac. Elles le sont même par rapport aux projets de règlements que le gouvernement a publiés à des fins de consultation.
Même compte tenu des amendements proposés sur la promotion de la cigarette électronique, les lois fédérales et provinciales continueraient d'autoriser la publicité aux points de vente et l'information sur les produits dans les magasins spécialisés dans les produits pour le vapotage ainsi qu'en d'autres endroits précisés.
Nous conseillons vivement d'appuyer le projet de loi S-5 et nos amendements proposés. Le projet de loi est un élément essentiel d'une stratégie fédérale antitabac renouvelée et renforcée.
Avant de conclure, je voudrais formuler des observations sur l'allégation de Rothmans, Benson & Hedges, qui prétend vouloir mettre fin au tabagisme et au commerce des cigarettes. On ne peut pas ajouter foi à cette opération de relations publiques. Si c'est l'objectif du cigarettier, pourquoi n'appuie-t-il pas la banalisation des paquets? Pourquoi finance-t-il les associations de dépanneurs pour qu'elles soulèvent le problème de la contrebande et s'opposent aux augmentations des taxes frappant les cigarettes?
L'onglet 5 de votre reliure montre l'envergure mondiale de la campagne publicitaire « Be Marlboro » (soit Marlboro) du cigarettier Marlboro, qui associe le produit à un mode de vie. On voit bien que sa volonté de ne plus vendre de cigarettes n'est pas sincère. Cette compagnie, aujourd'hui, montre sur les paquets de Canadian Classics, une scène de lac de montagne qui ressemble à Banff ou à Lake Louise. C'est une publicité qui associe le produit à un mode de vie. C'est un exemple qui explique la nécessité de banaliser les emballages.
La compagnie vend les cigarettes Benson & Hedges dites « super slim », qui attirent particulièrement les jeunes filles et les femmes. On devrait les interdire.
D'autres compagnies... Par exemple, celle-ci, Pall Mall, montre des guimauves qu'on fait dorer sur un feu de camp. Elle associe le produit à un mode de vie très attirant, et la banalisation de l'emballage devrait y mettre fin.
Enfin, dernier exemple, parce qu'il y en a tellement, Rothmans, Benson & Hedges, qui vend ses cigarettes dans un paquet doté d'un manchon qui porte de la publicité et qui lui permet de contourner les interdictions de la publicité sur les grands panneaux publicitaires.
Voilà l'occasion pour nous de mettre en vigueur les emballages banalisés.
Nous remercions sincèrement tous les membres du Comité de leur invitation.
Merci.
Merci beaucoup.
Entendons maintenant la représentante de la Fondation des maladies du coeur et de l'AVC, Mme Lesley James.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, bonjour. Je me nomme Lesley James. Je suis la gestionnaire principale, Politique de la santé, à la Fondation des maladies du coeur et de l'AVC du Canada. Je suis aussi chercheuse doctorante.
Je suis honorée de vous parler du projet de loi S-5, dont l'adoption en fera une clé de voûte de notre vision: un Canada libéré du tabagisme commercial.
Sur cette question, votre comité entendra beaucoup de partenaires de notre coalition pour la santé ainsi que de spécialistes de la lutte contre le tabagisme. Notre position commune est d'appuyer les dispositions visant la banalisation des emballages, mais nous craignons beaucoup la tolérance du projet de loi pour la commercialisation à grande échelle de la cigarette électronique. Nous proposons donc des amendements.
Le projet de loi S-5 renforce beaucoup la lutte contre le tabagisme. Il vise à protéger la santé de nos enfants et de nos jeunes contre les visées de l'industrie pour les rendre accros à des produits addictifs et nocifs.
Sous sa forme actuelle, il reconnaît le pouvoir racoleur de la commercialisation du tabac pour les jeunes Canadiens, mais il ne parvient pas à protéger ce groupe vulnérable ni les non-fumeurs contre la publicité convaincante de la cigarette électronique. Un vice fondamental l'afflige donc, et nous espérons qu'on l'amendera pour supprimer les contradictions entre les restrictions imposées au marketing.
Le gouvernement fédéral s'est engagé à abaisser le taux de tabagisme sous 5 % d'ici 2035. Malgré les efforts, les taux restent stables, à 17 %, ce qui est inacceptable. Appuyant l'objectif de 5 %, nous croyons fermement que le projet de loi est indispensable pour l'atteindre.
Il importe de l'atteindre, parce que le tabagisme reste la principale cause de mortalité prématurée au Canada: il tue plus de 45 000 Canadiens chaque année, soit 120 d'entre nous tous les jours. Près d'un cinquième de la mortalité au Canada lui est attribuable. Nous avons beaucoup de pain sur la planche, particulièrement en ce qui concerne les jeunes Canadiens.
Le plus haut taux de tabagisme, 18,5 % s'observe chez les jeunes adultes de 20 à 24 ans. Malheureusement, près de 10 % des Canadiens de 15 à 19 ans se disent fumeurs. Nous savons que la plupart des fumeurs ont commencé à l'adolescence, mais 20 % des Canadiens commencent au début de l'âge adulte.
Comment nous attaquer au problème et diminuer le tabagisme chez tous les Canadiens, particulièrement les jeunes et jeunes adultes? La réponse est simple. Notre fondation préconise et appuie l'adoption et la mise en oeuvre accélérée de la banalisation des paquets de cigarettes. Elle conseille vivement l'adoption de cette mesure stratégique depuis des décennies. Je veux vous montrer pourquoi elle est si importante.
J'ai des exemples de paquets vendus au Canada. En voici un qui vise les jeunes hommes, le paquet « hipster », c'est-à-dire pour jeune homme dans le vent, à la mode, un peu rustique. En voici qui s'adressent aux jeunes femmes, et qu'on fait délibérément ressembler à des emballages de produits cosmétiques, comme le rouge à lèvres que je me suis procuré la semaine dernière. Voyez, le produit à l'intérieur est aussi attrayant que l'extérieur. Attrayant et glamoureux.
Je suis une femme. Je comprends et je reconnais que ces produits font habilement appel aux normes et aux idéaux de beauté de chaque sexe et je tiens à souligner que ces tactiques, qui abusent les jeunes femmes vulnérables, sont offensantes, humiliantes. Il faut y mettre fin.
L'association des termes « slim » et « vogue » à une cigarette à l'allure mince et scintillante démontre la nécessité de la rendre terne. Ainsi, on interdirait la vente des cigarettes fines et on saisirait l'occasion de se servir du produit lui-même comme support de messages pro-santé.
À ce titre, nous demandons l'amendement du projet de loi pour accorder le pouvoir réglementaire nécessaire pour exiger ces messages sur le produit même. On le lui accorde déjà pour les cigarettes électroniques. Des messages comme « Le tabac tue » ou la promotion de programmes de cessation du tabagisme sur chaque cigarette seraient très dissuasifs et ils augmenteraient le nombre de tentatives pour cesser de fumer.
La banalisation des emballages a été avalisée par l'Organisation mondiale de la santé et adoptée dans de nombreux pays. Les faits montrent que la mesure entraîne divers avantages, notamment la baisse accélérée du tabagisme, la réduction des publicités trompeuses, l'augmentation de la visibilité et de l'efficacité des avertissements pro-santé, la réduction de l'attrait du tabac chez les jeunes et l'augmentation du nombre de tentatives pour cesser de fumer.
Après la mise en oeuvre de la politique en Australie, on a assisté à une baisse de l'association de toutes les marques de tabac à des images positives, et la baisse du tabagisme a été la plus importante chez les adolescents.
Les craintes exprimées relativement à la contrebande, du fait de la banalisation des emballages, sont erronées, et l'industrie des produits du tabac les exagère. Elle s'en sert souvent pour neutraliser des mesures de lutte contre le tabagisme.
Nous félicitons tous les parlementaires d'avoir pris l'initiative de la banalisation des paquets de cigarettes et d'avoir reconnu les tactiques de l'industrie et des groupes qui lui servent de façade. La banalisation des paquets est une mesure stratégique efficace, entièrement avalisée par notre fondation et par des centaines de spécialistes de la santé au Canada.
La position de notre fondation sur la cigarette électronique et les produits de vapotage a évolué à la faveur des avancées de la recherche. Malgré l'accroissement continu des connaissances sur la cigarette électronique, une large part d'inconnu subsiste. Nous continuons de nous efforcer de concilier les risques et les avantages et, à cette fin, il importe que les règlements assurent l'innocuité des produits et qu'ils protègent les Canadiens contre d'éventuels préjudices.
Les spécialistes s'accordent à dire que la cessation complète du tabagisme à long terme est plus efficace que la diminution du nombre de cigarettes fumées chaque jour pour réduire le risque de maladie et de mort prématurée. Notre fondation encourage les Canadiens à cesser de fumer, la meilleure prévention des maladies liées au tabagisme.
Nous recommandons aux Canadiens des moyens comme les thérapies de remplacement de la nicotine, les médicaments anti-tabagisme et l'aide psychosociale. Certains pourront trouver dans la réduction de leur tabagisme des avantages comme ceux que procure sa cessation en recourant au vapotage, mais, au Canada, comme partout ailleurs dans le monde, il est fréquent d'utiliser en même temps la cigarette électronique et le tabac, ce qui remet en question les avantages du vapotage pour la santé publique.
Notre fondation en convient: la cigarette électronique est moins nocive que le tabac combustible. Pour cette raison, nous appuyons l'accès accru à la cigarette électronique pour les adultes. Cependant, ce produit n'est pas sans risque. Les allégations de certains chercheurs quantifiant l'écart de nocivité entre la cigarette électronique et le tabac combustible se fondent sur des méthodes défectueuses et tirent des conclusions boiteuses.
Nous savons depuis un bon nombre d'années que la cigarette électronique attire les jeunes Canadiens. Au Canada, une étude a constaté que 18 % des élèves du secondaire qui ne consomment pas de tabac ont essayé la cigarette électronique et qu'une autre tranche de 31 % était désireuse de l'essayer. L'utilisation de la cigarette électronique chez les 15 à 19 ans a plus que doublé ces dernières années. Des études montrent aussi que plus d'adolescents utilisent la cigarette électronique, qu'ils perçoivent comme branchée et agréable, et la recherche conduite au Canada montre l'existence d'un lien entre la consommation de ce produit chez les jeunes et leur tabagisme ultérieur.
Nous voulons que la cigarette électronique n'entraîne pas de dépendance à la nicotine et au tabac. Il importe que les jeunes Canadiens soient protégés contre l'exposition aux campagnes de marketing visant à augmenter la consommation de ces produits. Non seulement la consommation des constituants liquides des dispositifs de vapotage sont-ils susceptibles de causer du tort, mais nous devons aussi protéger les non-fumeurs et les jeunes contre la nicotine, qui deviendra légale et d'obtention plus facile après l'adoption du projet de loi S-5. La nicotine crée une forte dépendance et augmente la pression artérielle, ce qui exige plus de travail du coeur et risque de causer la formation de caillots sanguins.
Il importe d'amender le projet de loi pour limiter davantage la commercialisation de la cigarette électronique au Canada. Dans sa version actuelle, le projet de loi autoriserait le marketing illimité, partout, n'importe où, à la télévision, en ligne, dans les prestations vidéos et les « publidivertissements », les journaux, les magazines, sur les panneaux publicitaires, dans les transports en commun, les médias sociaux, et la liste n'en finit plus.
Fait particulièrement préoccupant, cette publicité peut se faire dans les bars et les boîtes de nuit, endroits souvent fréquentés par beaucoup de jeunes, qui se trouvent alors sous l'influence de l'alcool. Devenant ainsi plus perméables aux messages publicitaires, ils peuvent être amenés à essayer la cigarette électronique. La publicité dans ces endroits fréquentés par les jeunes ou la publicité tous azimuts de produits de vapotage auprès du grand public sont inutiles. Le seul groupe qu'on devrait y exposer sont les actuels fumeurs.
L'interdiction proposée de la publicité associant le tabac à un mode de vie ne sera pas assez forte pour protéger les jeunes contre la machine que l'industrie met en mouvement à coups de milliards de dollars pour la commercialisation du produit. Voilà pourquoi nous demandons l'amendement du projet de loi S-5 relativement aux produits de vapotage pour inclure des restrictions renforcées contre la publicité de la cigarette électronique afin de les harmoniser avec celles de la Loi sur le tabac et du projet de loi sur le cannabis et supprimer la disposition autorisant la publicité associant le tabac à divers modes de vie dans les bars et les publications pour adultes.
Notre fondation avalise aussi officiellement les recommandations de la Société canadienne du cancer.
Enfin, elle appuie fermement le projet de loi banalisant les paquets de cigarettes et elle recommande des amendements pour augmenter l'efficacité du projet de loi. Nous vous recommandons vivement de faire du projet de loi S-5 une loi indispensable qui protège vraiment nos enfants et empêche les non-fumeurs de céder au tabagisme, grâce aux restrictions visant la publicité de la cigarette électronique.
En adoptant ces amendements, on renforcera le projet de loi S-5 et on en fera une loi efficace pour poursuivre la lutte contre le tabagisme et privilégier la santé des Canadiens.
Merci de nous avoir accordé votre temps.
Je vous remercie beaucoup, monsieur le président, ainsi que les membres du Comité, de me permettre de prendre la parole aujourd'hui. Je vous suis reconnaissant de l'invitation.
Je dirige une clinique de cessation tabagique depuis plusieurs années. Je travaille avec des fumeurs malades ou très malades. C'est à peu près ce qui sous-tend mon exposé.
Il est plutôt naïf de croire que tous les fumeurs veulent cesser de fumer ou sont capables de le faire. De nos jours, même les meilleures méthodes cliniques se traduisent habituellement par un taux d'abstinence d'un an de 30 %. Environ un fumeur sur trois au Royaume-Uni tente chaque année d'arrêter de fumer, mais seulement un sur six parmi ceux qui essaient s'abstiennent pendant plus de quelques semaines ou quelques mois, ce qui représente une proportion totale d'environ 5,5 %. Au Canada, 66 % des fumeurs vont tenter de cesser de fumer au cours des six prochains mois.
La cigarette est le produit du tabac qui crée la plus forte dépendance. Il est d'ailleurs bien connu qu'il peut être difficile d'arrêter de fumer. Ce n'est pas qu'une simple question de volonté.
Nous savons très bien que le tabagisme a de terribles conséquences sur la santé, tant pour le fumeur que les personnes exposées à la fumée secondaire. Fumer du tabac tue, mais pas la nicotine. En effet, la nicotine n'est pas à l'origine de cancers, de maladies cardio-vasculaires ni de maladies pulmonaires, comme la MPOC. Elle crée toutefois une dépendance. En tant que pneumologue, j'ai vu assez de cas de cancers du poumon, de MPOC, d'asthme et de bronchite chronique pour savoir que ces maladies sont une terrible conséquence du tabagisme. En pneumologie, le cancer du poumon et la MPOC représentent notre pain quotidien. Cinquante pour cent des fumeurs vont mourir d'une maladie liée au tabac. Les fumeurs meurent de huit à dix ans plus tôt que les non-fumeurs. La longévité des fumeurs qui arrêtent de fumer avant l'âge de 35 ans est toutefois semblable à celle des non-fumeurs. Ils peuvent vivre aussi longtemps, tant les hommes que les femmes. On porte très peu attention à ce groupe de fumeurs.
Je n'ai pas le temps de parler de toutes les maladies liées au tabagisme. Je vais donc me concentrer sur le cancer. Le tabagisme est responsable d'au moins 14 types de cancer. Pour certains d'entre eux, comme le cancer du poumon, c'est la principale cause. La vapeur de la cigarette électronique peut contenir certaines substances carcinogènes, mais leur proportion est inférieure à 1 % de la valeur d'exposition moyenne pondérée en milieu de travail et est jusqu'à 450 fois élevée que dans la fumée de cigarette.
Les Suédois consomment du tabac à priser humide depuis le début du XXe siècle. Ils ont le taux de cancer du poumon le plus faible au monde, un taux inférieur à celui des États-Unis et de la Norvège. Ils ont observé une importante baisse du taux de mortalité par crises cardiaques, qui a atteint 22 % chez les hommes entre 1987 et 1995. Ils ont également un faible taux de cancer de la bouche, qui continue à diminuer malgré l'usage accru du tabac à priser humide.
En dépit de la controverse, il est évident que la cigarette électronique est de loin moins nocive que le tabac — dans une proportion de 95 %. J'espère que vous avez eu l'occasion de consulter le quatrième rapport que Public Health England a publié la semaine dernière et qui confirme cette conclusion. Les fumeurs fument essentiellement pour la nicotine, mais ils meurent essentiellement à cause du goudron, de la combustion du tabac.
Quand on regarde le nombre de maladies liées à la fumée du tabac et, par ailleurs, la dépendance que peut créer la nicotine, on voit qu'il faut plutôt se demander s'il est convenable sur le plan éthique et moral de dissuader les fumeurs dépendants de la nicotine de consommer un produit nicotinique moins nocif dans une proportion de 95 %.
Pour conclure, la cigarette électronique peut sauver des milliers de vies — vous avez les chiffres du Royaume-Uni, des États-Unis et de la Chine —, mais elle doit être réglementée. On ne doit pas en faire la promotion — les intervenants qui m'ont précédé en ont parlé —, mais on ne doit pas non plus faire en sorte qu'il est plus difficile de s'en procurer une que d'acheter des cigarettes de tabac.
Le Dr Polosa vient tout juste de publier une étude qui montre qu'il est très important que le fumeur dépendant qui veut passer à la cigarette électronique reçoive des instructions sur son utilisation. D'après mon expérience, lorsque des personnes âgées achètent une cigarette électronique, ils ne s'en servent pas correctement.
Merci beaucoup de votre attention.
Je vous remercie tous de vos exposés.
Nous allons maintenant passer aux questions. Chaque député aura d'abord sept minutes à sa disposition. M. Oliver sera le premier à prendre la parole.
Merci beaucoup de vos témoignages, de votre recherche et du leadership dont vous avez fait preuve au fil des ans au Canada dans le domaine du tabagisme et du renoncement au tabac.
À mon avis, nous faisons face à deux questions. Il faut entre autres empêcher les non-fumeurs, surtout les jeunes, à devenir dépendants de la nicotine. Les chiffres sont encore alarmants. Je viens tout juste de lire qu'il y a environ 100 000 nouveaux fumeurs quotidiens par année au Canada, et quelque chose comme 82 % des fumeurs qui commencent à l'âge de 18 ans ou avant. Il faut donc manifestement empêcher les jeunes et les autres non-fumeurs de prendre cette habitude.
Les personnes dépendantes de la nicotine forment le deuxième groupe d'intérêt. Il faut tenter de leur faire adopter une autre habitude moins nocive — les preuves ne sont pas encore sans équivoque, mais il y en a beaucoup — et les aider à arrêter.
Ma deuxième question porte sur ce deuxième groupe, sur les personnes dépendantes qui veulent adopter une habitude moins dangereuse ou nocive. J'ai discuté avec un représentant de l'industrie du tabac qui m'a fait part du point de vue de l'industrie, et c'était bien. Les gens de l'industrie faisaient en quelque sorte leurs visites. Ils se disent préoccupés par l'article 20.1 qui dit:
Il est interdit de faire la promotion d'un produit du tabac, y compris au moyen de l'emballage, de l'une des manières suivantes:
a) d'une manière qui pourrait faire croire que le produit est moins nocif qu'un autre produit du tabac ou que ses émissions sont moins nocives que celles d'un autre produit du tabac [...]
L'exemple portait sur la possibilité de chauffer le tabac plutôt que de le brûler.
J'aimerais d'abord savoir ce que vous en pensez. Si l'industrie croit avoir trouvé une façon plus sécuritaire de consommer de la nicotine, elle ne serait pas en mesure d'en faire la promotion sur l'emballage. Êtes-vous d'accord avec l'industrie? J'aimerais entendre ce que chacun de vous a à dire à ce sujet.
Selon la norme internationale, il faut complètement interdire la publicité sur le tabac. C'est dans la Convention-cadre de l'OMS pour la lutte antitabac, à laquelle nous souscrivons.
Le Canada n'a pas d'interdiction. Nous avons des restrictions. En revanche, de nombreux pays ont une interdiction, y compris pour ce qui est des lieux de vente des cigarettes électroniques et des produits du tabac. Le tabac est plus nocif que la cigarette électronique. On va pouvoir commercialiser les cigarettes électroniques, et Santé Canada, au moyen d'un amendement proposé par le comité sénatorial — il figurait déjà dans le projet de loi, mais il y a une modification d'éclaircissement et un document de consultation — a l'intention d'autoriser certains messages concernant l'aspect sanitaire des cigarettes électroniques.
Nous appuyons une interdiction totale de la publicité sur le tabac qui va beaucoup plus loin que ce que propose le projet de loi.
Je vais me permettre de faire une autre observation. Je pense que vous avez entendu plusieurs d'entre nous dire que nous voulons les mêmes restrictions ou environ le même niveau de restrictions pour les cigarettes électroniques et les cigarettes de tabac. Il est important de comprendre qu'il est possible de faire de la publicité informative ou préférentielle d'un produit du tabac. On n'en voit pas beaucoup — je suppose que c'est parce que l'industrie du tabac n'est pas fière des données réelles sur leur produit —, mais cela pourrait être différent pour les cigarettes électroniques si l'industrie est autorisée à faire de la publicité informative ou préférentielle. Nous verrons peut-être des publicités légitimes.
Lorsqu'il est question d'un moyen plus sécuritaire pour les personnes dépendantes de consommer de la nicotine, l'industrie devrait-elle être autorisée à en faire la publicité?
Vous ne parlez pas exactement de la même chose.
Oui, nous appuyons l'adoption de ce projet de loi précisément pour que les fumeurs actuels puissent se procurer légitimement ce produit qui pourrait leur offrir une méthode moins dangereuse de consommer de la nicotine. Le problème, c'est que, même si nous soutenons ce point de vue, il faut également se préoccuper du danger que présente la mise en marché de ce produit.
Je répète que nous sommes favorables à la légalisation des cigarettes électroniques pour consommer de la nicotine, afin d'offrir l'option aux Canadiens. Cela dit, il existe de meilleures normes et de meilleurs dispositifs pour cesser de fumer.
Si nous voulons cibler les personnes dépendantes de la nicotine, comme vous l'avez mentionné, l'emballage du tabac nous offre un moyen, à savoir un message qui dit que les cigarettes électroniques sont moins nocives. C'est une publicité qui s'adresse exactement au groupe auquel nous voulons nous adresser, et personne d'autre n'a besoin de la voir.
Nous avons donc maintenant la solution sous les yeux.
Ce serait autorisé si le message est de Santé Canada, mais l'industrie ne pourrait pas faire une telle affirmation.
Je vois, merci.
Passons à autre chose. Je pense que je vous ai tous entendus dire que le projet de loi S-5 n'en fait pas assez pour éviter que des jeunes deviennent dépendants de la nicotine. Vous avez tous dit qu'il devrait y avoir des restrictions publicitaires plus strictes pour les produits de vapotage et qu'elles devraient correspondre...
Avez-vous une idée de la raison pour laquelle Santé Canada n'a pas adopté ces restrictions alors que nous convenons tous que la nicotine est en soi une substance nocive?
Je pense qu'il faut trouver le bon équilibre. Votre comité a fait une étude et produit un rapport à ce sujet en 2015. C'est un nouveau domaine, et on essaie de trouver le bon équilibre. À notre avis, la ligne est tracée au mauvais endroit, et nous aimerions la déplacer au moyen d'autres restrictions.
Je suis certainement d'accord avec vous. Je dois affirmer catégoriquement que nous devrions faire tout ce que nous pouvons, en tant que société, pour éviter que les nouvelles générations et les non-fumeurs deviennent dépendants de la nicotine. C'est une drogue qui crée une forte dépendance. Nous avons tous intérêt à mettre fin à la dépendance à la nicotine au Canada, si c'est possible.
Docteur Ostiguy, je ne vous ai pas entendu au premier tour ni au deuxième. Avez-vous des observations sur la publicité? Le projet de loi S-5 est-il suffisamment restrictif à l'égard des cigarettes électroniques et du vapotage, ou pensez-vous que nous devrions en faire davantage?
Je pense qu'un des problèmes auxquels nous faisons face en ce moment se pose lorsqu'un patient atteint d'emphysème ou d'un cancer de la gorge qui n'a pas réussi à arrêter de fumer après avoir essayé cinq, six ou sept fois à l'aide de tous les outils offerts actuellement — et c'est le genre de clientèle que nous avons — et à qui nous proposons la cigarette électronique se demande pourquoi parce qu'il croit que c'est aussi nocif que les cigarettes de tabac. C'est ce que rapportent les médias, ce que les gens pensent habituellement, et c'est donc très difficile.
À vrai dire, au cours des dernières années, la clinique a eu des clients qui avaient déjà acheté leur cigarette électronique, mais qui n'avaient pas commencé à s'en servir parce qu'ils ne savaient pas à quoi s'en tenir. Ils nous demandent ce que nous en pensons.
Bien entendu, cela ne nous empêche pas de leur recommander les médicaments approuvés. Ce que je veux dire, c'est qu'on ne soigne pas l'hypertension ou le diabète avec un seul médicament. Il y en a plusieurs. Pourquoi alors ne pas soigner la dépendance au tabac à l'aide de différents moyens? Ce que croit actuellement la moitié de la population — cela m'attriste beaucoup, et c'est également vrai en Europe et en Grande-Bretagne —, c'est que la cigarette électronique est aussi nocive que les cigarettes de tabac. C'est très regrettable.
Merci à tous les témoins de comparaître.
Ma première question s'adresse à M. Cunningham et porte sur la contrebande. Nous savons que le problème est actuellement grave au Canada. D'un bout à l'autre du pays, on parle d'une proportion de 40 %, et je crois que c'est encore plus élevé en Ontario, à 60 %.
Je veux juste confirmer qu'on se servira encore à l'extérieur des emballages neutres des protections conçues par Santé Canada. Je pense que 17 technologies différentes sont employées pour éviter que l'emballage soit copié.
Pouvez-vous parler un peu de ces technologies et de ce qui doit être fait pour les cigarettes proprement dites en ce qui a trait au code alphanumérique dont nous avons discuté?
Je répète que c'est un paquet de l'Australie. La marque apparaît encore, et on peut donc savoir de quelle marque il s'agit. À l'intérieur, sur les cigarettes — et les fabricants sont autorisés à le faire —, il y a des lettres et des chiffres propres à chaque marque. C'est un moyen autorisé en Australie pour distinguer la marque. Santé Canada envisage la même chose.
Au Canada, nous avons un système de marquage fiscal sur l'emballage. C'est comme l'argent. C'est un nombre distinct pour chaque emballage. Cette pratique serait maintenue, mais je pense que nous pouvons l'améliorer en marquant directement la cigarette pour pouvoir distinguer les cigarettes qui peuvent être vendues légitimement au Canada des autres cigarettes. Quant au message, il serait bilingue et court, « Chaque cigarette est nocive. Le tabac tue », et il y aurait le numéro sans frais d'une ligne d'assistance pour cesser de fumer. Cette information ne serait pas sur les produits destinés à l'exportation. Si une compagnie aux États-Unis ou dans un autre pays veut acheminer un produit vers le Canada, la marque ne sera pas la même. S'il est marqué pour le Canada, et que la compagnie affirme que c'est pour les États-Unis, elle se fera prendre. Par contre, si le produit n'est pas marqué pour le Canada, elle n'aura pas d'ennuis. C'est un autre moyen employé pour aider les autorités policières. Il y a également de bonnes recherches qui viennent appuyer cette façon de faire.
J'ai une autre question pour vous, car vous semblez avoir pas mal de rapports qui affirment que le recours aux emballages neutres réduira le nombre de fumeurs. Vous avez parlé de la situation en France. J'ai vu que la ministre de la Solidarité et de la Santé a dit que le programme avait échoué, mais vous dites que c'est parce qu'on n'a pas tenu compte du fait qu'on avait réduit les stocks avant sa mise en oeuvre. Au Japon, Japan Tobacco International a également affirmé que les emballages neutres avaient échoué et qu'il fallait y mettre fin.
Pour tirer au clair cet aspect de la question, pourriez-vous juste résumer les 150 études et nous dire quel genre de diminutions on observe sans cesse, et à qui cela pose problème?
De toute évidence, on en est encore aux premières années. L'Australie est la première à être passée à l'acte. Dans le cas de certains autres pays, le programme n'est en place que depuis à peu près un an. On en verra pleinement les retombées dans 20 ans. C'est efficace selon un examen réalisé par l'Australie après la mise en oeuvre. Toutes les données, à l'exception de celles financées par l'industrie du tabac, pointent dans la même direction. C'est intuitif. Les panneaux publicitaires contribuent à la publicité sur le tabac. L'emballage est une forme de publicité qui accroît la consommation. On peut toutefois renforcer ainsi l'incidence des mises en garde liées à la santé, selon les études menées et soutenues entre autres par l'Organisation mondiale de la santé.
Ma prochaine question s'adresse à quiconque connaît le sujet.
J'ai entendu dire que sur le plan du vapotage et des arômes ajoutés aux produits, on s'inquiète particulièrement d'un additif appelé diacétyle, lequel cause la bronchiolite oblitérante, une maladie respiratoire très grave. Mais comme bien des mythes circulent sur le Web, je me demande si c'est vrai ou non.
Pouvez-vous nous fournir de l'information à ce propos?
Oui. Un rapport à été publié à ce sujet. J'aimerais tout d'abord préciser qu'en Europe, la cigarette électronique est sur le marché depuis 10 ans. Si elle avait des effets nocifs sur les poumons, les documents scientifiques en feraient état.
Pour en revenir au rapport, cette maladie s'est bien entendu manifestée dans l'industrie de fabrication de maïs soufflé, mais on n'a pas détecté beaucoup de cas de cette maladie dans les cinémas, même si les gens y sont exposés au diacétyle.
Ce rapport est très mauvais. Je ne comprends pas que le rédacteur en chef ait accepté de le publier, car les auteurs commencent par y parler de la pneumopathie d'hypersensibilité, comme dans le cas du poumon de fermier, mais concluent qu'il s'agit d'une bronchiolite oblitérante, ce qui est illogique. Ils n'ont pas réalisé de biopsie pour étayer leurs affirmations. Il faut faire extrêmement attention avec de tels rapports, lesquels sont très alarmants.
Non, sans le moindre fondement.
Par contre, nous avons constaté que la consommation de cigarettes électroniques facilite le contrôle de l'hypertension, réduit la réapparition ou l'aggravation des maladies pulmonaires obstructives chroniques et aide les patients à mieux contrôler leur asthme. La cigarette électronique est utilisée depuis 10 ans. Malgré certains effets néfastes qu'elle a à court terme, il semblerait que la documentation...
Pour ce qui est de ses effets cancérogènes, les concentrations de substances y sont très inférieures à celles que l'on trouve dans les cigarettes contenant du tabac. Nous utilisons encore des substances cancérogènes. Nous n'avons pas cessé de prendre des radiographies et nous n'avons pas fermé toutes les mines de silice parce que cette matière peut causer la silicose.
C'est une question de relation entre la dose et la réaction, un aspect que l'on oublie très souvent quand on parle d'un risque.
Très bien.
Ma dernière question s'adresse à Mme James. Nous parlons de la réduction des méfaits attribuée à la cigarette électronique. Je sais que vous avez indiqué que Santé Canada peut prévoir quelque chose à ce sujet dans le règlement, mais considérez-vous que nous devrions ajouter des dispositions à cet égard dans le projet de loi S-5 afin que le message soit soigneusement élaboré et constitue la norme pour l'utilisation générale?
Me demandez-vous si le projet de loi S-5 devrait contenir des détails afin d'afficher un message directement sur le produit du tabac?
Je parle des produits de vapotage. Qu'est-ce que les producteurs devraient être autorisés à affirmer au chapitre de la réduction des méfaits?
Les affirmations relatives à la réduction des méfaits devraient être régies par Santé Canada. Il ne faudrait pas laisser l'industrie déterminer les affirmations qu'elle fera. Santé Canada est l'autorité qui doit évaluer les preuves et formuler le message qui convient aux fins d'interprétation par les Canadiens.
Merci.
J'ai une question pour vous tous, mais je veux que chacun d'entre vous y réponde par « oui » ou par « non».
M. Oliver a certainement exprimé mon opinion à ce sujet en indiquant que nous voulons faire tout ce que nous pouvons pour empêcher les jeunes et les non-fumeurs de commencer à consommer de la nicotine.
La loi y parvient-elle? Nous permet-elle de faire tout ce que nous pouvons?
Merci.
Monsieur Collishaw, je veux revenir à vous. Vous avez expliqué les principaux amendements que vous voudriez voir apporter au projet de loi, dont vous proposez notamment d'élargir la portée. Vous avez dit que vous pensez que nous devrions imposer de nouvelles exigences à l'industrie du tabac.
Pourriez-vous nous en dire davantage sur les nouvelles exigences qui ne figurent pas dans le projet de loi?
Ce projet de loi légalisera un nouveau produit et donnera à l'industrie du tabac l'occasion de vendre une autre forme de dépendance à la nicotine tout en affirmant qu'elle est moins dangereuse. Le Dr Ostiguy a présenté des preuves à l'appui de cette opinion.
Si c'est le cas, nous considérons qu'il faudrait prendre des mesures pour obliger cette industrie, qui s'apprête à proposer un nouveau produit, à réduire l'offre et la demande à l'égard de produits très dangereux qu'elle vend déjà, c'est-à-dire les cigarettes combustibles. Voilà qui nous ramène à ce que j'ai dit: l'objectif consistant à réduire le pourcentage de fumeurs à 5 % d'ici 2035 devrait faire l'objet d'un plan et non d'un slogan. Ayons un plan doté de jalons et de cibles à atteindre, et corrigeons le tir si nous ne les atteignons pas afin de concrétiser le noble objectif que le gouvernement s'est fixé.
Merci.
Monsieur Cunningham, j'ai une brève question sur le vapotage et les emballages neutres. En ce qui concerne le vapotage, vous avez dit que le gouvernement a indiqué que la publicité relative à ce produit devrait se limiter à la publicité préférentielle; or, ce n'est pas ce qu'indique le projet de loi.
Pourquoi donc?
Il s'agit peut-être simplement d'une omission lors de la rédaction du projet de loi. Le gouvernement a fait cette déclaration publique concernant le projet de loi et son règlement d'application. Comme cela fait partie de l'examen effectué par les comités, nous avons l'occasion d'apporter un amendement.
D'accord.
Nous avons entendu un grand nombre de témoignages à ce sujet; je ne veux donc pas m'attarder trop sur la question. Si le projet de loi S-5 autorise actuellement la publicité axée sur le mode de vie dans les bars, laquelle cible les jeunes non-fumeurs pour leur vanter les avantages du vapotage grâce à des tirages et à des concours, à des vacances à la plage, à un accès à des fêtes sur invitation seulement, à des billets de spectacle ou à des activités sportives, il me semble — bien que je ne sois pas expert en marketing — que cela incitera probablement un grand nombre de non-fumeurs et de jeunes à commencer à consommer de la nicotine. Cela me semble être plus grave qu'une omission lors de la rédaction.
Selon nous, il s'agit d'une lacune importante, que l'on peut corriger en apportant un amendement afin d'interdire toute publicité axée sur le mode de vie, point final.
Partagez-vous cet avis?
Une voix: Oui.
M. Don Davies: Ne vous en faites pas, je vais revenir au Dr. Ostiguy à ce sujet.
Je vais être un peu dur en ce qui concerne l'emballage neutre. Je considère les produits du tabac comme des cancérogènes créant une dépendance qui n'ont pas la moindre caractéristique qui rachète leurs défauts. À titre de Comité permanent de la santé, je pense que nous devrions tout faire pour les éliminer.
Selon moi, l'industrie du tabac est une sorte de zombie en complet qui n'a de cesse de revenir tant qu'on n'a pas colmaté tous les trous. L'Australie a d'ailleurs été à même de le constater.
Je m'interroge à propos de l'emballage neutre. Le libellé est-il assez ferme? Je présenterai les choses ainsi; en ce qui concerne le gouvernement fédéral et les noms de marque sur l'emballage, dans « le projet de règlement concernant les emballages neutres, Santé Canada n'a pas inclus la possibilité de réglementer davantage les noms de marque au-delà de la limitation du nombre de mots qu'ils pourraient contenir. »
La mesure est-elle assez stricte ou verrons-nous des publicités affirmant que le tabagisme rend plus grand, plus riche, plus beau et plus sexy?
Cela nous préoccupe certainement, étant donné ce qu'il s'est passé en Australie, où les compagnies ont commencé à adopter des noms plus longs afin de tenter de présenter des images positives axées sur le mode de vie. À mon avis, quand Santé Canada élaborera le règlement, il devrait veiller à resserrer les règles pour éviter ce genre de messages.
Madame James, vous nous avez montré ce que je considère comme étant certains des pires exemples de marketing. Dans ces publicité ciblant les jeunes femmes, le produit ressemble à un cosmétique. C'est le type de cigarette qui donne l'impression d'être branché. Le projet de loi S-5 interdit-il ces cigarettes minces?
Le règlement proposé le fera, mais un amendement au projet de loi S-5 serait bénéfique.
Auriez-vous des conseils à nous donner sur la taille de l'emballage? La taille de l'emballage et l'impression que donne ce dernier devraient-elles être normalisées au lieu d'être différentes?
Voilà une excellente question.
Les emballages sont petits, et tiennent bien dans la main, dans une bourse ou dans une poche. Les jeunes les aiment.
Les jeunes détestent l'emballage neutre, car ils le trouvent gros et encombrant. L'avertissement est grand et saute aux yeux.
L'industrie veut utiliser le paquet à rabat, car il est encore assez petit et mignon.
Si nous pouvons imposer une exigence, ce serait celle du paquet à coulisse, un emballage gros et encombrant doté d'avertissements en grosses lettres et peu commode à transporter.
Merci.
Enfin, docteur Ostiguy, vous avez affirmé qu'il ne faudrait pas que la cigarette électronique soit plus difficilement accessible que les cigarettes. Voyons les choses sous l'angle inverse: convenez-vous que leur accès devrait être aussi restreint?
Oui. Conviendriez-vous qu'il faudrait se montrer aussi restrictif sur les plans du marketing, de la promotion, de l'étiquetage et de l'emballage de la cigarette électronique qu'on l'est pour les produits du tabac en général?
Je conviens qu'en ce qui concerne le projet de loi S-5, la cigarette électronique n'a pas besoin de publicité, car je considère qu'il s'agit d'un outil pour aider les fumeurs dépendants à abandonner le tabagisme.
Par exemple, en vertu de la loi québécoise, le propriétaire d'une boutique de vapotage ne peut enseigner à ses clients comment utiliser les cigarettes électroniques. Il n'est pas facile d'utiliser ce produit de la bonne façon. Les propriétaires ne sont même pas autorisés à montrer leurs produits dans leur vitrine.
J'ai un exemple de boutique de vapotage dont la vitrine est couverte par un store parce que les propriétaires ne peuvent pas annoncer les produits qu'ils pourraient vendre à un fumeur dépendant du tabac. Or, juste à côté se trouve une boutique érotique où tous les produits sont exposés dans la vitrine et dont la porte est ouverte. Il faudrait être logique dans nos lois.
Ce qui m'inquiète actuellement, c'est le fait que la population a l'impression que la cigarette électronique est aussi nocive que la cigarette contenant du tabac. Il n'est pas nécessaire de faire de la publicité sur la cigarette électronique, mais laissons au moins les propriétaires de boutique de vapotage montrer à leurs clients comment l'utiliser correctement et leur dire qu'elle est moins nocive que la cigarette traditionnelle.
J'ai vu bien des références à l'expérience de l'Australie, mais je souhaite que les gens portent attention à celle du Royaume-Uni et au document publié par le Royal College of Physicians de Londres, qui est le quatrième publié par Public Health England.
Dans le dernier rapport, Public Health England va jusqu'à proposer qu'il y ait des boutiques de vapotage dans les hôpitaux et que le régime de santé national paie les cigarettes électroniques des fumeurs dépendants. Nous savons fort bien que la plupart des fumeurs sont moins nantis et moins éduqués.
Merci à tous de témoigner dans le cadre de cette importante étude alors que nous travaillons pour protéger la santé des Canadiens.
Ma question s'adresse au Dr Ostiguy.
Vous avez indiqué que les cigarettes électroniques constituent un substitut valable pour encourager les gens à abandonner le tabagisme, mais bon nombre d'entre elles sont aromatisées à la barbe à papa, au melon d'eau ou à la cerise noire. À quoi servent ces arômes? Les cigarettes électroniques aromatisées ne visent-elles pas à inciter plus de gens et de jeunes à fumer?
L'expérience britannique nous indique que moins de 1 % des personnes n'ayant jamais fumé consomment des cigarettes électroniques. Quand on examine les statistiques sur les jeunes qui vapotent, il faut faire très attention au questionnaire. Ce n'est pas parce qu'ils ont consommé une cigarette électronique au cours du dernier mois qu'ils sont adeptes du vapotage.
Il est préférable d'observer la manière dont les chercheurs britanniques ont conçu leur questionnaire. Ils demandent « Avez-vous déjà utilisé le produit », mais aussi « L'utilisez-vous régulièrement? », « L'utilisez-vous toutes les semaines? » ou « Avez-vous acheté une cigarette électronique pour votre usage personnel? » Selon l'expérience britannique, moins de 1 % des jeunes ou des jeunes adultes qui adoptent la cigarette électronique n'ont jamais fumé; la plupart ont déjà commencé à consommer des cigarettes contenant du tabac.
Dans tous ces questionnaires, les chercheurs britanniques ne demandent pas « Avez-vous consommé une cigarette électronique avec ou sans nicotine? » ou « Si vous avez déjà fumé des cigarettes contenant du tabac, avez-vous essayé la cigarette électronique par le passé? » Parmi les jeunes qui ont essayé la cigarette électronique, certains ont déjà fumé des cigarettes contenant du tabac.
Il faut donc élaborer les questionnaires avec grand soin.
Lesley, pouvez-vous traiter des préoccupations voulant que la consommation de cigarettes électroniques puisse mener les jeunes au tabagisme?
Pensez-vous qu'elles puissent attirer les jeunes?
Le fait que la cigarette électronique puisse mener au tabagisme soulève beaucoup de questions. Des études canadiennes longitudinales indiquent que lorsqu'on étudie une cohorte de jeunes Canadiens, ceux qui essaient la cigarette électronique sont plus susceptibles de commencer à fumer l'année suivante. Il nous reste encore bien des choses à apprendre, toutefois.
Ce qui nous préoccupe, c'est que lorsque la nicotine sera légale dans les cigarettes électroniques, ces jeunes seront maintenant dépendants de cette substance. Cela entraînera-t-il une augmentation des taux que nous observons déjà au fil des ans?
Pour ce qui est des arômes, nous voulons nous assurer qu'il n'existe pas de large éventail de saveurs, comme barbe à papa, Hello Kitty, cerise et je ne sais quoi encore. Nous voulons que les produits soient attirants pour les adultes, pas pour les jeunes, et que ces derniers ne voient pas de publicité à ce sujet, car cela pourrait les mener ultérieurement au tabagisme.
Merci.
Ma prochaine question s'adresse au témoin de la Société canadienne du cancer. De nombreux Canadiens fument encore du tabac et bien des gens deviennent des fumeurs réguliers chaque année. Que pouvons-nous faire pour réduire le nombre de nouveaux fumeurs? Comment les fumeurs peuvent-ils vaincre leur dépendance?
Nous avons besoin d'une stratégie exhaustive. Bien des mesures fonctionnent conjointement, comme l'emballage neutre et l'interdiction du tabac aromatisé. La ministre Petitpas Taylor a une belle occasion d'agir dans le cadre du renouvellement de la Stratégie fédérale de lutte contre le tabagisme, dont la version actuelle expire en mars 2019.
Des consultations ont été réalisées. La ministre travaille à une nouvelle stratégie et a ainsi une occasion en or de rétablir certaines initiatives sur les plans de l'abandon, de la prévention auprès des jeunes, de l'application de la loi, des campagnes dans les médias de masse et de l'élaboration de politiques, tous des éléments qui peuvent vraiment avoir une incidence.
Monsieur Collishaw, qu'en pensez-vous? Comment pouvons-nous réduire le nombre de Canadiens qui subissent les effets nocifs du tabagisme?
Nous avons accompli de bons progrès ces dernières années, en grande partie, en raison de la diminution du taux d'adoption chez les jeunes. J'aimerais que cette tendance se maintienne.
Le problème avec le projet de loi, c'est que je crains qu'il n'incite les jeunes à essayer ce produit et à devenir dépendants de la nicotine. Nous voudrions empêcher cela avant que cela ne se produise et appliquer d'autres mesures pour renforcer les initiatives globales de lutte contre le tabagisme afin de pouvoir continuer de réduire le tabagisme chez les jeunes.
J'ajouterais qu'on pourrait recourir au principe du pollueur-payeur, en vertu duquel l'industrie du tabac devrait rembourser le coût de la stratégie de lutte contre le tabagisme à Santé Canada. À l'heure actuelle, le budget de Santé Canada s'élève à 38 millions de dollars, ce qui équivaut à environ 1,04 $ par personne. Aux États-Unis, ce chiffre est d'environ 3,60 $ et est donc trois fois supérieur au nôtre. Les taux de change varient.
Aux États-Unis, la Food and Drug Administration recouvre l'entièreté du coût de son budget de lutte contre le tabagisme auprès de l'industrie du tabac, en fonction de la part de marché. Nous pourrions faire de même au Canada pour avoir le plus d'impact possible afin de réduire le tabagisme chez les jeunes et d'améliorer l'abandon du tabac.
Je devrais ajouter que la France a aussi adopté le principe du pollueur-payeur. Ils imposent une taxe spéciale aux fournisseurs de tabac, et tout l'argent va au financement de la lutte contre le tabagisme.
Cela termine notre tour de sept minutes. Nous passons maintenant aux tours de cinq minutes.
Nous commençons par M. Webber.
Merci à vous tous d'être là aujourd'hui.
J'ai une question stupide pour commencer. Je ne suis pas fumeur. Je ne fréquente pas de fumeurs. Quelle est la différence entre une cigarette électronique et une vapoteuse?
Lesley pourrait me répondre.
C'est la même chose. D'accord.
J'ai une question pour le Dr Ostiguy. Disons que je suis fumeur, que je viens à votre clinique et que je vous dis que je veux vraiment cesser de fumer — j'en ai assez. Vous avez dit dans votre exposé qu'il faut plus que de la volonté. J'ai de la volonté, mais il me faut manifestement plus que cela.
Que me suggéreriez-vous de faire: opter pour le timbre à la nicotine ou pour la cigarette électronique? Que dites-vous à vos patients?
Il faut pour commencer voir ce que vous avez essayé dans le passé. La plupart des gens ont déjà essayé plusieurs autres choses dans le passé. Nous devons nous appuyer sur cette expérience.
Il faut ensuite déterminer votre degré de dépendance. Êtes-vous un fumeur invétéré ou un petit fumeur? Si vous êtes un fumeur invétéré, il faut évaluer cela. On peut le déterminer en fonction du nombre de cigarettes que vous fumez et, bien sûr, dans une clinique comme la nôtre, nous mesurons le niveau de nicotine que vous avez dans le sang, ce qui constitue une bien meilleure mesure du degré de dépendance d'une personne.
Puis nous discutons avec le patient pour déterminer par quoi il voudrait commencer. Habituellement, nous commencerions par une pharmacothérapie approuvée par Santé Canada, comme une thérapie de remplacement de la nicotine. Nous voyons depuis très peu de temps des publicités dans lesquelles on recommande de combiner des thérapies de remplacement de la nicotine, mais nous le faisons depuis 15 ans. Le timbre fournit un certain niveau de nicotine, mais c'est très faible et le patient n'obtient pas le coup de fouet que lui donnerait une cigarette. Il vous faut une manière d'amener la nicotine à votre cerveau beaucoup plus rapidement que ces dispositifs, alors nous recourrons à une thérapie combinée.
J'avais un patient qui souffrait d'un grave emphysème. Il était incapable de gravir les six marches de la clinique. Il était admis à l'hôpital deux ou trois fois par année à cause de l'exacerbation de la MPOC. Il mettait son plan d'action en oeuvre tous les mois. Nous lui avons donné du Champix, des timbres, des gommes à mâcher de nicotine, du Bupropion. Rien n'a fonctionné.
Il a décidé d'acheter une cigarette électronique. Un an après, la concentration de nicotine dans la cigarette électronique avait été réduite à trois milligrammes par millilitre. Il n'avait pas été admis à l'hôpital à cause de l'exacerbation de la MPOC, et il n'avait pas recouru à son plan d'action, sauf une fois pendant l'hiver. De plus, étant propriétaire d'une entreprise de construction, il avait converti une pièce de sa maison en gym.
Je pourrais vous relater bien des histoires de succès comme celle-là, mais il n'y a pas qu'une façon d'aborder la situation; c'est le genre de choses dont nous devons discuter avec le patient. Malheureusement, nous n'avons pas ce qu'ils ont en Europe. Chaque hôpital devrait avoir une bonne clinique spécialisée dans le renoncement au tabac en mesure de s'attaquer aux cas de fumeurs invétérés et dépendants.
Vous dites qu'il nous faut un produit capable de fournir plus de nicotine dans un timbre, par exemple. Ce qui existe en ce moment n'est pas suffisant.
Je présume que vous êtes au fait de l'étude de la Clinique Mayo qui dit — et le gouvernement paie pour cela — que les gens qui achètent des timbres de nicotine à la pharmacie sans se faire conseiller d'abord ont un taux de succès inférieur aux personnes qui renoncent au tabac sans aucune aide, d'un coup. Il vous faut de l'encadrement et des conseils.
Merci, docteur.
Monsieur Cunningham, sur le graphique que vous nous avez fourni, concernant la façon d'abaisser le taux de tabagisme en Australie, pouvez-vous nous préciser encore à quoi vous attribuez le succès de l'Australie? Qu'ont-ils fait?
Divers facteurs auraient contribué aux baisses du taux de tabagisme. Il n'y a pas que les emballages neutres. Il y a d'autres mesures. L'autorité australienne, le ministère de la santé, arrive à la conclusion que l'emballage neutre est un des facteurs qui a contribué à la diminution de la prévalence.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins d'être ici.
C'est toujours très intéressant, évidemment, et c'est difficile de satisfaire tout le monde et d'arriver à une solution qui couvre l'ensemble des problèmes. Je me posais une question relativement aux magasins qui vendent des produits de vapotage.
Comme mon collègue d'en face M. Webber, je ne fume pas. Je ne vais donc pas dans ces magasins pour y acheter des cigarettes. Dans ceux-ci, vendent-ils des timbres de nicotine? Vendent-ils des produits pour arrêter de fumer? J'en doute, cela dit.
D'accord.
Vous parliez d'accompagnement pour les gens qui veulent arrêter de fumer. S'ils n'ont pas un accompagnement médical, ou du moins un certain accompagnement professionnel, ils ont beaucoup moins de chances de réussite. Le problème des cigarettes électroniques à la nicotine, c'est que le produit se retrouve sur les tablettes de façon générale et facilement. Si les cigarettes électroniques étaient vendues dans des pharmacies, donc par des professionnels de la santé qui pourraient faire le suivi avec ceux qui en achètent, alors il serait possible de voir l'évolution du traitement et, par la suite, d'améliorer la chose.
Monsieur Ostiguy, quelle est votre impression là-dessus?
Cela a été suggéré. J'ai moi-même donné des conférences à des pharmaciens, mais le message n'est pas passé.
C'est sûr que les pharmaciens pourraient jouer un rôle très important dans la lutte antitabac. Ils le font déjà dans le cas de la pharmacothérapie, qui est approuvée par Santé Canada. Ils pourraient le faire pour la cigarette électronique.
Vous dites que le message n'est pas passé, que voulez-vous dire par cela? Y a-t-il un manque de volonté à se lancer dans ce domaine?
J'aimerais faire un commentaire additionnel.
Ces produits sont sur le marché. Depuis 2009, Santé Canada dit que ces produits ne sont pas permis sans la soumission d'une proposition qui en ferait des produits thérapeutiques approuvés. Or personne n'a soumis un tel document. Même si ces produits sont moins dangereux que les cigarettes, ils n'atteignent pas le seuil dit « thérapeutique » selon le standard de Santé Canada. Si on en faisait des produits légaux au moyen du projet de loi S-5, on créerait alors une sorte de troisième voie, entre les produits illégaux et les produits thérapeutiques approuvés par Santé Canada.
Je vais laisser de côté l'aspect technique de la nicotine.
Sur le plan économique, on parle de contrebande et de prix. Si on fait le parallèle avec la légalisation de la marijuana, il y a toute la question relative au prix du produit. C'est ce qui fait en sorte que la contrebande entre en jeu ou non. En ce sens, il devient avantageux pour un fumeur régulier, qui dépense quand même plusieurs milliers de dollars par année, d'utiliser des produits de contrebande. Si le prix des cigarettes devient de plus en plus élevé, c'est un frein pour une certaine partie de la population. Or, pour les gens qui sont des consommateurs réguliers, c'est avantageux d'aller chercher des produits de contrebande et d'encourager ce marché.
Avez-vous constaté cela dans vos études et dans la consommation?
La hausse du prix est la mesure la plus efficace pour diminuer la consommation, particulièrement chez les adolescents, qui n'ont pas beaucoup d'argent pour cela.
Au Canada, il y a de la contrebande, mais elle est davantage présente en Ontario et au Québec, où la taxation est la moins élevée. Dans l'Ouest et en Atlantique, la contrebande est beaucoup moins importante. Ce n'est pas nécessairement à cause de taxes élevées. Les usines illégales et la proximité des centres urbains, comme Toronto, Montréal et différentes régions du Sud de l'Ontario, encouragent la contrebande.
Il y a des mesures que nous pourrions utiliser pour combattre la contrebande. Nous avons des recommandations pour l'Ontario et pour le gouvernement fédéral. Nous pouvons faire cet effort en parallèle.
[Traduction]
Merci beaucoup, monsieur le président.
Docteur Ostiguy, quels avertissements ou quelles mises en garde devraient figurer d'après vous sur les produits de vapotage contenant de la nicotine? Vous dites qu'ils devraient être réglementés, mais qu'il ne faut pas en rendre l'accès plus difficile que pour les cigarettes à base de tabac. Quelles mises en garde ou quels avertissements préconiseriez-vous pour les emballages de produits de vapotage?
On devrait y lire que la nicotine peut créer la dépendance; il faut faire attention à cela. C'est à peu près la seule préoccupation que j'aurais à propos des cigarettes électroniques.
Je le répète, j'aimerais que les gens portent plus attention aux études réalisées en Angleterre et en Europe qui disent que parmi les personnes qui n'ont jamais fumé, il est très inhabituel que des jeunes se mettent à utiliser la cigarette électronique. Avec les cigarettes électroniques, la dépendance causée par la nicotine n'est pas aussi forte qu'avec les cigarettes à base de tabac, car même si la nicotine cause la dépendance, avec la cigarette à base de tabac, vous avez tous les constituants du tabac qui causent encore plus la dépendance — le pH, la saveur, les additifs chimiques, comme le menthol et ce genre de choses. Oui, la nicotine peut causer la dépendance. Le café aussi. Cependant, avec les cigarettes électroniques, la dépendance est moindre qu'avec les cigarettes à base de tabac.
D'après mon expérience, quand les gros fumeurs, très dépendants, décident d'acheter une cigarette électronique, très souvent, les gens voudraient les voir cesser du jour au lendemain. Ce n'est pas la façon. Ils diminuent la dose; ils commencent par 18 milligrammes, puis diminuent à 15, 12, 9, 6, et enfin, à rien. Nous devons être patients. Cela peut prendre un an et demi, mais il faut être patient, assurer le bon suivi et donner des conseils.
Merci.
Monsieur le président, j'aimerais déclarer que je n'ai jamais essayé de fumer même une seule cigarette. Quand j'avais 12 ans, mon père m'a offert 100 $ à condition que je me rende à 18 ans sans fumer une seule cigarette. Cela a fonctionné, et je compte faire de même avec ma propre famille.
Docteur Ostiguy, j'ai une autre question. Vous avez mentionné que vous avez eu des patients pour lesquels passer de la cigarette à base de tabac à la cigarette électronique a fonctionné. Avez-vous constaté, ou pourriez-vous envisager une tendance selon laquelle des jeunes passeraient de la cigarette électronique à la cigarette à base de tabac? Voyez-vous cela comme une possibilité? Est-ce qu'il y a un risque accru?
Je ne vois pas cela parmi nos clients. Bien entendu, nous traitons avec une clientèle adulte.
Une excellente analyse a été publiée la semaine dernière, dans le plus récent document du Public Health England concernant l'effet d'entraînement dont les gens parlaient. Il est très difficile d'en venir à une solide interprétation scientifique de toutes ces données, car on a étudié la question de diverses manières, à l'aide de divers questionnaires, mais l'expérience britannique est ferme: les personnes qui n'ont jamais fumé n'adoptent pas la cigarette électronique. Cela représente moins de 1 %.
Madame James, d'après vous, pourquoi les gens se mettent-ils à fumer? Croyez-vous que c'est un mécanisme d'adaptation? Est-ce pour être branché? Pour moi, c'est vraiment le noeud du problème. Pourquoi, d'après vous, les gens se mettent-ils à fumer?
Les gens se mettent à fumer pour des raisons très variées, et la commercialisation des produits du tabac est, à n'en pas douter, une des raisons. Les modèles de comportement sont aussi un facteur important.
Nous voyons un taux élevé de tabagisme chez les populations autochtones du Canada. Il est très difficile pour les jeunes de ne pas se mettre à fumer quand ils sont entourés de fumeurs.
Toute stratégie dont le but est de réduire le tabagisme et de prévenir l'adoption doit viser les jeunes et les Autochtones, et créer des possibilités où les produits destinés à faciliter le renoncement au tabac sont plus abordables et accessibles que les produits du tabac.
On dirait que c'est vraisemblablement culturel.
Monsieur Cunningham, aimeriez-vous dire quelque chose en 25 secondes?
Les facteurs sont nombreux. Parfois, c'est à cause de la facilité d'accès. Parfois, c'est à cause des faibles prix ou des saveurs attrayantes. Pour certains segments de la jeune population, c'est un produit très positif. L'image projetée grâce au marketing est positive, et c'est la raison pour laquelle nous devons adopter l'emballage neutre.
Avez-vous connu un adolescent qui ne veut pas essayer quelque chose d'un peu dur et dangereux? Qu'il s'agisse d'alcool, de conduite automobile, de sexe ou de n'importe quoi d'autre, cela fait partie de la mentalité des adolescents.
Merci, monsieur le président.
Docteur Ostiguy, vous avez dit — et je crois que tout le monde est d'accord — que le vapotage est plus sûr que de fumer des cigarettes à base de tabac. Cela me semble plausible. Je peux penser à diverses raisons pour lesquelles il en serait ainsi.
Je m'interroge sur les travaux de recherche qui soutiennent cela. Qu'est-ce que nous avons? Le vapotage n'existe, du moins sur le marché, que depuis 10 ans environ. Avons-nous des données vraiment solides pour appuyer cela?
Docteur Ostiguy, nous allons commencer par vous.
Par exemple, en Grande-Bretagne, 3 millions de personnes ont cessé de fumer avec la cigarette électronique. Farsalinos, en Europe, dit dans une étude publiée dans l'Euromonitor qu'il estime que 27 millions de personnes ont cessé de fumer avec la cigarette électronique.
Comme je l'ai dit précédemment, si la cigarette électronique produisait des effets néfastes sur le système cardiovasculaire ou sur le système pulmonaire, la littérature scientifique les aurait fait ressortir, alors que ce n'est pas le cas. Je n'ai pas besoin d'une étude comparative, à double insu, contrôlée contre placebo pour savoir que je risque moins de tuer quelqu'un si je roule à 20 kilomètres-heure dans le centre-ville d'Ottawa que si je roule à 120 kilomètres-heure.
Sachant que les substances cancérogènes, qui pourraient être source de préoccupation, se trouvent en si faible concentration dans la vapeur de la cigarette électronique, je pense que c'est un risque qui...
Je ne dis pas que c'est tout à fait inoffensif. Le Royal College of Physicians de Londres ne dit pas que l'innocuité a été démontrée à 100 %. Ils disent que c'est 95 % moins dommageable que la cigarette à base de tabac. La plupart des dommages causés par le tabac viennent de la combustion, et si vous avez un produit sans combustion, vous éliminez alors une grande partie des effets néfastes du tabac.
Je pense que personne ici ne doute que vapoter est moins dangereux que fumer, certainement pour les fumeurs. Le problème vient avec les effets possibles sur la santé publique. Qu'arrive-t-il si ces produits sont très répandus et que des personnes n'ayant jamais fumé se mettent à les consommer? Si d'ex-fumeurs se mettent à vapoter? Ils vont alors devenir dépendants, et certains vont passer aux cigarettes combustibles. C'est alors que se perpétue l'épidémie. Ce sont les problèmes que nous cherchons à éviter tout en maximisant les bienfaits que le Dr Ostiguy a décrits, soit que les fumeurs incapables de cesser de fumer puissent avoir au moins une expérience un peu moins dangereuse répondant à leur besoin de nicotine. Encore une fois, c'est une question d'équilibre. Comment pouvons-nous profiter des bienfaits découlant de la légalisation d'un produit tout en protégeant le public du danger possible?
J'ajouterais quelque chose, concernant ce que le Dr Ostiguy a dit à propos des jeunes qui n'adoptent pas ces produits, dans les pays européens. Il faut souligner que dans la plupart de ces pays, la publicité de ces produits n'est pas permise. Même en Angleterre, où une certaine publicité est permise et où l'on préconise fortement l'utilisation de ces produits, la publicité qui est permise est nettement moindre que ce que le projet de loi S-5 permettrait. Là où il y a un sérieux problème d'adoption des cigarettes électroniques par de très nombreux jeunes, c'est aux États-Unis, où la publicité de ces produits n'est pas restreinte. Nous ne voulons pas nous trouver dans cette situation au Canada.
Je vais me faire l'avocat du diable. Si le vapotage est 95 % plus sûr que la cigarette, les conséquences sur la santé sont nettement moindres. La nicotine cause assurément la dépendance, mais c'est également le cas de la caféine — et j'ai à n'en pas douter de ce problème —, mais ce n'est pas une question de vie ou de mort. Pourquoi s'en faire?
Ce 95 % se fonde sur des opinions qualitatives. Nous ne pouvons pas quantifier cela et dire que les cigarettes électroniques sont 95 % moins dommageables que le tabac combustible. Il faut prendre garde à ne pas utiliser ce pourcentage et à le faire circuler largement. Nous savons que les cigarettes électroniques sont moins nocives, et la Fondation des maladies du coeur et de l'AVC le croit, mais nous ne savons pas à quel degré, et nous ne le saurons pas avant longtemps. Il faudra des décennies pour que nous puissions comprendre ce que cela signifie du point de vue des conséquences à long terme sur la santé. Nous devons empêcher les jeunes de mettre la main sur ce produit. C'est pour cela qu'il faut en restreindre la publicité.
Merci.
Madame James, j'aimerais explorer la différence entre le vapotage et les produits qui chauffent le tabac sans le brûler. Je ne crois pas que nous ayons eu bien des témoignages au sujet des produits qui chauffent le tabac sans le brûler, et d'après ce que j'ai entendu, les compagnies de tabac sont là à attendre de pouvoir faire leur entrée et d'explorer cela pleinement.
Quelles sont les conséquences de ces produits sur la santé et que pensez-vous de ces produits?
Les produits qui chauffent le tabac sans le brûler sont très nouveaux et on en fait la publicité comme étant un produit qui réduit les méfaits. Rien ne prouve que c'est bien le cas. Il y a les cigarettes électroniques à un bout de l'éventail des méfaits, et le tabac combustible à l'autre bout. Les produits qui chauffent le tabac sans le brûler se situent quelque part entre les deux, mais nous ne savons pas précisément où. Nous ne devrions pas recommander aux Canadiens d'essayer ces produits, car il s'agit quand même de tabac et que c'est nocif.
D'accord. Je vais continuer de vous poser des questions si je le peux.
Je ne saisis toujours pas très bien les effets à long terme de la nicotine sur la santé. Je ne veux pas faire dire au Dr Ostiguy des choses qu'il n'a pas dites, mais j'ai presque eu l'impression que... vous avez mentionné l'élévation de la tension artérielle et des fréquences cardiaques, et d'autres...
Les risques de caillots sanguins.
Encore une fois, je ne veux pas être injuste envers le Dr Ostiguy, mais je l'ai entendu dire que la nicotine n'est pas très nocive pour la santé. Que savons-nous des effets à long terme de la nicotine sur la santé?
Je ne suis pas clinicienne, alors je vais laisser les médecins parler des effets à long terme de la nicotine, mais nous savons que le Surgeon General des États-Unis a signalé l'élévation des fréquences cardiaques et de la tension artérielle, ainsi que la possibilité de caillots sanguins, et nous savons qu'à long terme, la consommation de nicotine chez les jeunes peut nuire au développement de leur cerveau.
Monsieur Ostiguy, je vais vous donner l'occasion de me le dire: puis-je consommer de la nicotine tous les jours pour le reste de ma vie sans m'inquiéter de ma santé?
Je ne pense pas que vous devriez être très inquiet à ce sujet. Votre corps s'adapte très rapidement à la nicotine. Bien entendu, lorsque vous fumez une cigarette, votre rythme cardiaque peut s'accélérer très temporairement, mais il revient à la normale. Elle ne cause pas d'effets à long terme.
Je ne préconise pas la promotion de la nicotine ou de dispositifs assurant un apport en nicotine. Je conviens que la nicotine sous toutes ses formes ne devrait pas être disponible aux personnes âgées de moins de 18 ans. Je suis tout à fait d'accord, mais je ne pense pas que nous devrions exagérer les effets nocifs de la nicotine, sauf ses effets d'accoutumance.
Remarquez que les fumeurs fument... Il n'y pas meilleur moyen de contrôler son humeur que de fumer une cigarette. Que donnait-on aux soldats sur la ligne de front durant la guerre? On ne leur donnait pas du chocolat; on leur donnait des cigarettes.
Votre temps est écoulé.
Il nous reste un peu de temps, alors je propose de procéder à une autre série d'interventions de quatre minutes. Nous disposerons de cinq minutes pour nous rendre à la période des questions, mais chaque parti pourra poser une question supplémentaire.
Je vais accorder aux intervenants quatre minutes, en commençant avec M. Eyolfson.
Merci, monsieur le président.
Docteur Ostiguy, vous avez mentionné des données en Angleterre, plus particulièrement concernant le vapotage et les jeunes, et vous avez dit qu'il est très inhabituel pour les jeunes de commencer à vapoter s'ils n'ont jamais fumé.
Un article paru dans le Journal de l'Association médicale canadienne en 2015 a rapporté que les jeunes âgés de 15 à 19 ans sont deux fois plus susceptibles d'avoir essayé le vapotage comme moyen de consommer du tabac. Il a conclu que 20 % des jeunes âgés de 15 à 19 ans ont essayé le vapotage, tandis que 11 % de ce même groupe avaient essayé de fumer.
Serait-il juste de dire, à tout le moins, que les études réalisées en Angleterre auxquelles vous faites référence ne s'appliqueraient pas au Canada?
Je pense que vous devez vous pencher sur la façon dont les questions ont été posées: « Avez-vous essayé des cigarettes électroniques au cours de la dernière semaine? Avez-vous essayé des cigarettes électroniques au cours du dernier mois? »
Eh bien, on leur demandait s'ils avaient « essayé »... Je vais conclure ma remarque, mais la question était la suivante: « Avez-vous essayé [...]? » On a conclu qu'ils étaient deux fois plus susceptibles d'avoir essayé. C'est la conclusion à laquelle on était arrivée.
Une autre question visait à savoir s'il y avait des méfaits relatifs, comme vous l'avez dit, madame James, des méfaits qualitatifs par opposition à des méfaits quantitatifs. J'ai un autre article du Journal de l'Association médicale canadienne paru en octobre 2017. Il porte sur l'utilisation des cigarettes électroniques et l'initiation au tabagisme chez les jeunes.
Je serai le premier à dire qu'il y a un lien — nous n'avons pas prouvé de relation de cause à effet —, mais l'article fait très clairement état qu'une vaste étude longitudinale a permis de révéler que les jeunes qui commencent à vapoter sont beaucoup plus susceptibles de commencer à fumer la cigarette.
N'est-ce pas en soi un produit potentiellement nocif et dangereux?
J'aimerais simplement que les témoins répondent par oui ou non.
Mais nous savons que lorsqu'une personne commence à fumer dans sa jeunesse, elle est susceptible de développer une dépendance. Nous savons cela; c'est connu depuis des décennies. N'êtes-vous pas d'accord?
Non, mais ceux qui fument sont plus susceptibles de développer une dépendance. Je pense que c'est clair depuis des décennies.
Je pense que, là encore, il faut... J'aimerais que vous vous reportiez au récent rapport que Public Health England a publié la semaine dernière. Toutes les études ont été passées en revue: les études américaines que vous mentionnez, les études canadiennes...
Oui. L'article se penche sur toutes ces études, et il est très difficile d'analyser ces données en raison de la façon dont les questions ont été posées. Nous devons être très prudents en disant que c'est...
Merci, monsieur le président.
Nous savons tous que fumer est mauvais pour la santé, alors il est malheureux et inquiétant que le gouvernement légalise la marijuana. Je sais que certaines personnes vapotent du cannabis. Je ne vois pas vraiment où c'est couvert, dans la loi sur le cannabis ou la loi sur le vapotage plus précisément. Recommanderiez-vous de l'inclure et, le cas échéant, où?
Par l'entremise du projet de loi C-45 et de ce projet de loi, il sera impossible de consommer du cannabis où l'usage du tabac est interdit dans les lieux de travail — les banques, les sociétés de radiodiffusion, la GRC ou le gouvernement fédéral.
Les dispositifs de vapotage peuvent être utilisés pour consommer du cannabis et d'autres substances, si bien qu'il faudra déterminer si la publicité à grande échelle de ces dispositifs sera autorisée. C'est beaucoup plus ouvert que dans la Loi sur le cannabis. Le gouvernement ne devrait pas avoir l'intention d'affaiblir les restrictions prévues dans la Loi sur le cannabis.
Je reconnais, avec la légalisation de la marijuana, que la Fondation des maladies du coeur appuie les lignes directrices pour les utilisateurs à faible risque. Ces lignes directrices détaillées sont élaborées par l'Association médicale canadienne et le Centre de toxicomanie de santé mentale et portent sur la façon dont les Canadiens peuvent réduire le risque s'ils choisissent de consommer du cannabis. Elles renferment des détails sur le vapotage de la marijuana.
Très bien.
J'ai un autre mythe à démolir. J'entends très souvent des gens diabétiques ou parfois obèses qui essaient de cesser de fumer et qui commencent à vapoter du tabac aromatisé à la cerise.
En avez-vous entendu parler? Est-ce un mythe? Est-ce vrai?
M. Polosa en Italie a publié un article à ce sujet, et jusqu'à présent, le vapotage ne semble pas aider les gens à perdre du poids. C'est à peu près la seule étude que je connais.
L'une des questions que j'ai porte sur la concentration de nicotine que nous allons autoriser. Pensez-vous que nous devrions nous fier à...? Les États-Unis essaient de réduire la quantité de nicotine qu'ils autoriseront dans les produits. Devrions-nous commencer avec une concentration de nicotine réduite dans les produits de vapotage?
En ce qui concerne les produits de vapotage, le gouvernement a un document de consultation. Il a un organisme de réglementation. Une limite maximale de la concentration de nicotine dans les produits devrait être fixée. Le problème est différent concernant les cigarettes. Une proposition d'éliminer la nicotine dans les cigarettes n'est tout simplement pas viable au Canada. Les gens fument pour la nicotine. Ce serait à toutes fins pratiques la même chose que d'interdire les cigarettes et, au Canada, nous ne pouvons pas interdire les cigarettes.
J'ai une autre question à propos de l'âge. Le projet de loi définit les jeunes comme étant des personnes âgées de moins de 18 ans, et certaines provinces n'autorisent pas les produits du tabac pour les jeunes de moins de 19 ans.
Que devrions-nous faire dans le projet de loi? Devrions-nous fixer l'âge légal à 19 ans? Devrions-nous dire que c'est l'âge fixé par la province? Que recommanderiez-vous?
Il est extrêmement important de garder ces produits hors de la portée des jeunes Canadiens, alors si on a l'occasion de faire passer l'âge légal à 19 ans, ce serait souhaitable.
J'ajouterais qu'en Europe, la concentration maximale de nicotine dans le liquide à vapoter est de 20 milligrammes par millilitre, et c'est la concentration qui a été adoptée par la majorité des pays qui se sont joints à la Coalition antitabac. C'est une cible raisonnable.
Monsieur Collishaw, je voulais connaître votre opinion sur le produit qui chauffe le tabac plutôt que de le brûler.
Malheureusement, ces produits sont déjà sur le marché au Canada. Nous n'avons aucun moyen de retirer du marché les produits récréatifs contenant de la nicotine. Les États-Unis font actuellement l'objet d'un examen dans le cadre de l'approbation préalable à la mise en marché, et beaucoup d'encre a coulé dans le cadre de ce processus d'approbation préalable à la mise en marché aux États-Unis. Un comité scientifique a recommandé à la FDA de ne pas faire d'allégations relatives à la santé. Nous verrons ce qui se passera.
Au Canada, ce qui m'inquiète, c'est que même si tous les produits du tabac sont couverts dans la Loi sur le tabac actuelle, il n'y a pas d'ensemble de règlements adéquats pour les produits qui chauffent le tabac plutôt que de le brûler, et il y a la possibilité de corriger la situation, partiellement à tout le moins, en apportant des amendements additionnels au projet de loi S-5. Je ne veux pas entrer dans les détails puisque je n'ai pas beaucoup de temps, mais je peux vous montrer à vous tous quelques-unes de mes propositions plus tard.
Messieurs Cunningham, James ou Ostiguy, la question s'adresse à vous trois. Je me rappelle mon père me dire que lorsqu'il a commencé à fumer dans les années 1950, les gens savaient en quelque sorte que c'était mauvais, et c'était mal vu, mais ils ignoraient que la cigarette causait le cancer. Dans ma vie, j'ai vu de nouveaux produits du tabac être conçus, notamment des cigarettes légères, des cigarettes ultrafines et des cigarettes à faible teneur en goudron. Il y a eu un mouvement graduel de l'industrie pour s'adapter et essayer de convaincre les gens que le tabagisme est moins nocif pour la santé qu'il ne l'est réellement.
Nous sommes maintenant saisis d'un nouveau produit. Nous avons le vapotage et les produits qui chauffent le tabac plutôt que de le brûler. Je ne sais pas quelles sont les autres substances que l'on consomme lorsqu'on inhale de la nicotine liquide. Je serais curieux de savoir si elle renferme d'autres produits chimiques. Ne craignez-vous pas que nous tiendrons une conversation dans 20 ans d'ici, comme celle que j'ai eue avec mon père dans les années 1950, où nous admettrons espérer savoir en 2018 quels étaient les effets nocifs du vapotage ou des produits qui chauffent le tabac plutôt que de le brûler? Ou sommes-nous certains que ce n'est pas le cas?
Au fil des décennies, nous avons constaté que les produits sont beaucoup plus nocifs que nous le pensions initialement. Il y a un certain nombre d'années, des produits ont précédé ceux qui chauffent le tabac lancés aux États-Unis. Les compagnies de tabac n'ont pas divulgué tous leurs travaux de recherche. Elles ont choisi soigneusement les recherches qu'elles ont divulguées et, bien entendu, nous avons cette préoccupation à l'heure actuelle.
Pour la raison que vous mentionnez, je pense que nous devons être très prudents à l'égard de ceux qui utilisent les cigarettes électroniques. Comme je l'ai déjà dit, le seul groupe qui devrait être ciblé par la commercialisation des cigarettes électroniques devrait être les fumeurs de tabac actuels. À part cela, il n'y a aucun avantage à ce que d'autres essaient les cigarettes électroniques. Nous devons nous assurer qu'elles ne tombent pas entre les mains des jeunes et que les non-fumeurs ne sont pas persuadés de les essayer.
Oui. Nous avons tenu de nombreuses discussions au comité sur la Loi sur le cannabis, entre autres, concernant les soi-disant drogues d'introduction, et il y a un grand débat sur la question de savoir si le cannabis est une drogue d'introduction ou non. Craint-on que les gens qui commencent à vapoter pourraient finir par fumer la cigarette? Est-ce une préoccupation? Nous en discutons sous l'autre angle. Nous parlons d'inciter les fumeurs de cigarettes à adopter le vapotage en tant qu'outil de réduction des méfaits, mais je me demande si des recherches révèlent que la situation pourrait aller en sens inverse ou s'il y a des préoccupations à ce sujet.
Admettons que cette mesure législative est adoptée, et que mes enfants qui sont dans la vingtaine et la trentaine, sont dans un bar et voient une belle publicité sur le vapotage. Ils commencent à vapoter. Craint-on que les gens qui vapotent se mettent à fumer la cigarette?
Il y a certainement une préoccupation car ces produits contiendront de la nicotine une fois que le projet de loi S-5 est adopté, et qui sait ce qui se passera avec les dépendances si les gens choisissent une cigarette électronique ou un produit du tabac? Selon des recherches qui ont été rendues publiques par l'ACSM, nous savons que les jeunes qui utilisent les cigarettes électroniques sont plus susceptibles d'utiliser des produits du tabac un an plus tard.
Merci encore une fois. Je pense que c'est la dernière série de questions que vous devrez endurer.
Vous avez tous dit que vous pensez qu'il devrait y avoir des restrictions plus élevées sur la publicité du vapotage. Si je ne m'abuse, la Société canadienne du cancer et la Fondation des maladies du coeur ont formulé des avis à ce sujet.
Il y avait quatre secteurs où vous pensez que des amendements relatifs au produit de vapotage devraient être apportés: premièrement, limiter la publicité sur les produits de vapotage à seulement de la publicité informative ou préférentielle; deuxièmement, retirer la disposition qui autorise la publicité axée sur le style de vie dans les bars et les publications envoyées aux adultes; troisièmement, restreindre les promotions qui incitent à l'achat de produits de vapotage aux magasins de détail spécialisés en produits de vapotage; et quatrièmement, renforcer les restrictions sur l'emplacement des publicités permises qui incitent à l'achat de ces produits pour qu'elles cadrent avec les restrictions prévues dans la Loi sur le tabac.
Au témoin de la Société canadienne du cancer, y a-t-il un autre amendement que vous ajouteriez à ces quatre-là?
Aux trois autres témoins, approuvez-vous ces restrictions relatives à la publicité sur le vapotage? Y a-t-il quoi que ce soit que vous aimeriez que notre comité fasse pour réduire la publicité possible des produits de vapotage?
La Fondation des maladies du coeur appuie sans réserve les recommandations de la Société canadienne du cancer et leur raison d'être.
Pour ce qui est de corriger les problèmes que vous voyez avec la publicité, nous appuyons aussi cette position. Cependant, comme je l'ai mentionné dans mes remarques, nous avons d'autres préoccupations quant à la façon dont nous devrions restreindre davantage les cigarettes combustibles et en diminuer l'utilisation, mais c'est un autre sujet.
J'approuve l'interdiction sur la publicité. La popularité de ce dispositif ne découle pas des professionnels de la santé de la société médicale. C'est la population. Il n'est pas nécessaire d'en faire la publicité. Les gens se le procureront. Il faut s'assurer de ne pas créer des obstacles aux fumeurs qui sont très dépendants à la nicotine pour qu'ils puissent obtenir les cigarettes électroniques s'ils veulent cesser de fumer.
À vrai dire, la Société canadienne du cancer avait également des recommandations sur le tabagisme. Je voulais m'attarder sur le sujet car vous croyez tous fermement que les fabricants de produits de vapotage ne devraient pas être autorisés à faire de la publicité pour des produits autres que le tabac.
Voilà qui met fin à mes questions.
Merci beaucoup.
Je tiens à tous vous remercier de vos déclarations.
Je veux revenir aux exposés. Mme James a fait une déclaration qui a vraiment attiré mon attention. J'ai vérifié si ce qu'elle a dit est exact, et ça l'est apparemment. Le tabagisme au Canada demeure la principale cause de décès prématuré au Canada, entraînant le décès de 45 000 personnes chaque année.
Je ne pensais pas que ce chiffre pouvait être exact mais il semble être celui qui est le plus souvent utilisé. Ensuite, j'ai comparé avec les accidents de voiture mortels, qui causent 1 858 décès par année. À partir de cette donnée, 20 fois plus de personnes ont perdu la vie à cause du tabagisme que des accidents de la route. Je pense à toutes les mesures que le gouvernement a imposées à l'industrie de l'automobile pour réduire les accidents de la route: la conduite avec phares allumés, les caméras de recul, les ceintures de sécurité, les coussins gonflables, etc. Le gouvernement a exigé des entreprises de changer leur produit pour le rendre plus sécuritaire, puis des mises à l'essai ont été effectuées.
Vous m'avez beaucoup fait réfléchir.
Je suis ravi que vous n'ayez pas fait référence à tous ces livres, monsieur Cunningham. Je les regardais, et c'était ma crainte tout au long de la réunion.
Vous avez été d'excellents témoins et vous nous avez grandement aidés.
Merci beaucoup.
La séance est levée.
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