PACP Rapport du Comité
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
RAPPORT 5, LES COMPORTEMENTS SEXUELS INAPPROPRIÉS — FORCES ARMÉES CANADIENNES, DES RAPPORTS DE L’AUTOMNE 2018 DU VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL DU CANADA
Introduction
But de l’audit
À l’automne 2018, le Bureau du vérificateur général du Canada (BVG) a publié les résultats d’un audit de gestion qui visait à déterminer si les Forces armées canadiennes (les Forces) « avaient pris des mesures adéquates à l’encontre des comportements sexuels inappropriés afin d’intervenir auprès des victimes et de leur venir en aide, et de comprendre et de prévenir de tels comportements ». Le BVG a également examiné « les progrès réalisés dans le cadre de [l’Opération HONOUR] au cours de la troisième année de sa mise en œuvre[1] ». Cette opération avait été lancée à l’échelle de l’organisation dans le but d’« éliminer les comportements sexuels inappropriés[2] ».
En 2016-2017, le portefeuille de la Défense nationale (la Défense nationale) était composé du ministère de la Défense nationale et des Forces, employant 66 000 membres de la Force régulière, 21 800 membres de la Force de réserve et 22 400 membres civils; les Forces se composent de l’Armée canadienne, de l’Aviation royale canadienne et de la Marine royale canadienne [3]. L’audit du BVG portait uniquement sur les mesures prises pour contrer les comportements sexuels inappropriés au sein des Forces; il ne s’étendait pas aux effectifs civils de la Défense nationale ni aux programmes des cadets et des Rangers canadiens[4].
Définition de comportement sexuel inapproprié
Selon les Forces, les comportements sexuels inappropriés comprennent, sans s’y limiter :
- les actions perpétuant les stéréotypes et les préjugés qui déprécient des militaires en raison de leur sexe, de leur sexualité ou de leur orientation sexuelle;
- le langage ou les blagues inacceptables;
- l’accès à du matériel de nature sexuelle ainsi que la distribution ou la publication de ce matériel en milieu de travail;
- les remarques offensantes à caractère sexuel;
- l’exploitation des relations de pouvoir aux fins d’activités sexuelles;
- les demandes de nature sexuelle inopportunes ou la violence verbale de nature sexuelle;
- la publication d’images intimes d’une personne sans son consentement, le voyeurisme, les actions indécentes, les contacts sexuels, l’exploitation sexuelle et les agressions sexuelles[5].
Mise en œuvre de l’Opération HONOUR
En 2014, le chef d’état-major de la défense, qui est le dirigeant des Forces, a commandé « un examen indépendant externe des politiques, procédures et programmes de l’organisation portant sur les comportements sexuels inappropriés ». En mars 2015, une ancienne juge de la Cour suprême du Canada a présenté ses constatations et 10 recommandations[6]. Cet examen externe a révélé qu’il régnait, au sein des Forces, une culture de la sexualisation qui était hostile aux femmes ainsi qu’aux lesbiennes, gais, transgenres, bisexuels et queers. Il a par ailleurs été constaté qu’« il y avait un contraste entre les normes professionnelles élevées dans les politiques des Forces sur les comportements sexuels inappropriés et la réalité quotidienne de bon nombre de militaires[7] ». Pour ces raisons, les Forces ont convenu de mettre en œuvre les recommandations issues de cet examen. Elles ont donc :
- établi un plan d’action;
- formé l’Équipe d’intervention stratégique sur l’inconduite sexuelle (l’Équipe d’intervention);
- lancé l’Opération HONOUR en août 2015;
- mis en place le Centre d’intervention sur l’inconduite sexuelle (le Centre d’intervention), qui fait partie du ministère de la Défense nationale, mais est externe aux Forces;
- demandé à Statistique Canada de recueillir auprès des militaires de l’information sur leurs perceptions et expériences en matière de comportements sexuels inappropriés[8].
Rôles et responsabilités
Un grand nombre de personnes et d’instances ont un rôle à jouer dans le contexte de l’Opération HONOUR :
- Le chef d’état-major (dirigeant des Forces) a « le pouvoir de donner des ordres visant l’organisation, l’instruction, la discipline, l’efficacité, l’administration et la gestion des Forces ». Le Code de discipline militaire (le Code) « définit les infractions d’ordre militaire ». Les infractions qui peuvent mener à des accusations aux termes du Code englobent « les infractions prévues dans le Code criminel du Canada […] et dans d’autres lois fédérales[9] ».
- La chaîne de commandement est composée de
commandants et de la haute direction des Forces. Les personnes qui en font
partie « sont responsables de ce qui suit :
- assurer la direction et la coordination des initiatives menées dans le cadre de l’Opération HONOUR par l’entremise de l’Équipe d’intervention […];
- superviser l’application des mesures de discipline, la formation, l’instruction, les pratiques, les ordres et les politiques visant les comportements sexuels inappropriés;
- exécuter les ordres du chef d’état-major de la défense et présenter des comptes rendus[10] ».
- Le grand prévôt des Forces canadiennes « veille à ce que tout changement apporté aux politiques et aux pratiques relatives aux enquêtes, à l’instruction ou aux normes professionnelles de la police militaire repose sur des approches définies par l’Équipe d’intervention ».
- Sous l’autorité du grand prévôt, la police militaire « fait enquête sur les infractions présumées au Code de discipline militaire et au Code criminel ».
- Le Service national des enquêtes des Forces canadiennes enquête, « avec le soutien de la police militaire, sur les infractions présumées qui sont graves ou de nature délicate et a le pouvoir de porter des accusations[11] ».
- Le chef du personnel militaire est chargé de recruter, de gérer, de prendre en charge et de soutenir les membres des Forces, ainsi que de reconnaître leurs réalisations.
- Les instances au sein du Commandement du
personnel militaire ayant des responsabilités directes à l’égard de l’Opération
HONOUR comprennent les suivantes :
- le directeur – Administration (Carrières militaires);
- l’Académie canadienne de la Défense;
- l’aumônier général;
- le médecin général;
- Génération du personnel militaire;
- le directeur général – Service de bien-être et moral;
- le directeur général – Personnel militaire[12] ».
Signalement des comportements sexuels inappropriés
Selon le BVG, les membres des Forces « doivent signaler tout comportement sexuel inapproprié, qu’ils en aient été victimes ou témoins[13] ». Pour signaler un incident, les victimes peuvent communiquer avec les instances ci-dessous.
- Au sein des Forces :
- la chaîne de commandement;
- le Service national des enquêtes des Forces canadiennes;
- la police militaire.
- Le rôle de ces
instances est de « comprendre les victimes, intervenir de manière
appropriée auprès d’elles, les soutenir, et prévenir les incidents[14] ».
- le Programme de gestion intégré des conflits et des plaintes, qui permet « aux militaires et aux employés civils des Forces d’avoir accès à des services de règlement des plaintes et des conflits[15] »;
- À l’extérieur des Forces, mais au sein de la
Défense nationale :
- le Bureau de l’Ombudsman du ministère de la Défense nationale et des Forces canadiennes. L’Ombudsman est chargé de « faire enquête sur des plaintes portant sur différentes questions, notamment les comportements sexuels inappropriés, lorsque tous les autres recours ont été épuisés[16] ».
Si une victime ne veut pas signaler un incident, malgré son devoir de le faire, mais souhaite recevoir de l’aide, elle peut consulter :
- au sein des Forces :
- les aumôniers (il y en a sur chaque base);
- les cliniques de soins de santé, qui ne sont toutefois pas ouvertes en soirée et les fins de semaine;
- les conseillers en matière de harcèlement, dans des bases un peu partout au Canada;
- le Programme d’aide aux membres des Forces canadiennes, auxquels les membres ont accès 24 heures sur 24;
- l’application mobile « Respect dans les Forces armées canadiennes ».
- À l’extérieur des Forces, mais au sein de la
Défense nationale :
- le Centre d’intervention, qui n’offre pas de service en personne : les victimes peuvent envoyer un courriel ou téléphoner en tout temps et être aiguillées vers des services de soutien en personne.
- À l’extérieur de la Défense nationale :
- les régimes de soins de santé provinciaux et territoriaux[17].
Traitement des plaintes relatives à des comportements sexuels inappropriés
Le BVG a déclaré que « [t]oute plainte reçue fait l’objet d’une enquête. Le commandant de l’unité concernée consulte les conseillers juridiques pour déterminer si l’incident pourrait être une infraction d’ordre militaire, qui peut comprendre une infraction prévue dans le Code criminel. S’il est déterminé que l’incident est une infraction d’ordre militaire, le commandant peut faire enquête et déposer des accusations pour manquement au Code de discipline militaire en cas de conduite inacceptable. S’il s’agit d’un incident de comportement sexuel inapproprié qui enfreint le Code criminel, il doit être renvoyé à la police militaire. Tout membre des Forces qui a un comportement sexuel inapproprié s’expose à des mesures disciplinaires ou à des mesures administratives, ou aux deux[18]. »
Après une enquête de la police militaire, le Service national des enquêtes, en consultation avec le procureur militaire, peut déposer des accusations en vertu du Code criminel. Pour qu’il y ait condamnation, la culpabilité doit être prouvée hors de tout doute raisonnable. Si le militaire est reconnu coupable, « il reçoit une peine et un avis d’intention de recommander sa libération des Forces. Le directeur – Administration (Carrières militaires) effectue ensuite un examen administratif du dossier pour déterminer si le membre sera libéré[19]. »
Les membres peuvent également faire l’objet de mesures administratives, auquel cas le commandant d’unité « mène une évaluation initiale et transmet les résultats de son enquête ainsi que ses recommandations en matière de mesures administratives au directeur – Administration (Carrières militaires) ». Le directeur doit ensuite déterminer s’il « est plus probable qu’improbable » que l’incident allégué se soit produit. Le cas échéant, le membre « peut faire l’objet de mesures administratives, notamment de mesures correctives[20] ».
Audience
Le 29 janvier 2019, le Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes (le Comité) a tenu une audience sur cet audit. Le BVG était représenté à cette audience par Andrew Hayes, sous-vérificateur général, et Robyn Roy, directrice. La Défense nationale était représentée par Jody Thomas, sous‑ministre; le lieutenant‑général Paul Wynnyk, vice-chef d’état-major de la Défense; le lieutenant‑général Charles Lamarre, commandant, Commandement du personnel militaire; et Denise Preston, directrice exécutive, Centre d’intervention[21].
Constatations et recommandations
Soutien aux victimes
À l’issue de l’Examen externe, on recommandait de confier au Centre d’intervention « la responsabilité de prévenir les comportements sexuels inappropriés, de coordonner et de surveiller la formation, de faire le suivi des obligations redditionnelles de chacun, de faire de la recherche et d’agir comme autorité centrale pour la collecte de données[22] ».
Or, le BVG a constaté « qu’au lieu de confier au Centre toutes les responsabilités recommandées dans l’Examen externe, les Forces l’avaient uniquement chargé de fournir par téléphone ou par courriel des services de soutien initiaux aux victimes et de donner des services d’orientation » même si « le personnel du Centre possédait l’expertise en la matière[23] ». Un examen interne réalisé à l’automne 2017 a mené à l’établissement d’une charte de projet précisant le mandat, les rôles et les responsabilités de ce centre[24]. Le BVG a toutefois constaté que cette charte n’avait pas réussi « à dissiper la confusion des membres au sujet de[s] deux organismes[25] » (c.-à-d. le Centre d’intervention et l’Équipe d’intervention stratégique) et a souligné les lacunes suivantes :
- une méconnaissance des services offerts, surtout à l’extérieur de la région de la capitale nationale;
- un manque de disponibilité des services de soutien, en particulier le soutien en personne;
- un manque d’expertise, surtout chez les médecins, le personnel infirmier et les aumôniers;
- un manque de coordination, par exemple en ce qui concerne les rôles respectifs du Centre d’intervention et de l’Équipe d’intervention[26].
Le BVG a donc formulé les deux recommandations suivantes :
Les Forces armées canadiennes devraient collaborer avec le ministère de la Défense nationale en vue de revoir la répartition des rôles et responsabilités entre l’Équipe d’intervention stratégique des FAC sur l’inconduite sexuelle et le Centre d’intervention sur l’inconduite sexuelle et de préciser leurs rôles et responsabilités respectifs, afin d’améliorer leur efficience et d’éviter le dédoublement des efforts. Les Forces armées canadiennes devraient aussi veiller à ce que ces rôles et responsabilités soient diffusés dans l’ensemble de l’organisation pour qu’ils soient mieux compris par tous les militaires[27].
Les Forces armées canadiennes devraient établir une approche nationale intégrée de soutien aux victimes pour veiller à répondre entièrement aux besoins de tout militaire qui est victime de comportements sexuels inappropriés. Cette approche devrait garantir un accès à des services et un soutien spécialisé uniformes à tous les militaires, peu importe l’endroit où ils sont déployés[28].
Dans son Plan d’action détaillé de la gestion, la Défense nationale a indiqué qu’elle est d’accord avec ces deux recommandations et que « [l]e rôle de [l’Équipe d’intervention] sur l’inconduite sexuelle en matière de soutien aux victimes diminuera, et le [Centre d’intervention] deviendra la voix officielle en ce qui concerne tous les aspects liés au soutien des victimes et à la défense de leurs droits, à partir du moment où l’incident se produit jusqu’au moment où les besoins de la victime sont entièrement comblés », se donnant comme délai le 31 mars 2019[29].
En outre, sous la direction du vice-chef d’état-major de la défense, un « plan national de soutien aux victimes sera entièrement mis en œuvre pour assurer l’accès à un niveau minimal de services de soutien à tous les membres des FAC, quel que soit leur emplacement, et comprendra des services pour les groupes spécialisés », comme les femmes, les membres de la communauté LGBTQ2, les minorités visibles et les Autochtones[30]. Enfin, « un service exhaustif de gestion des cas sera entièrement mis en œuvre[31] ».
Interrogé sur le problème des comportements sexuels inappropriés au sein des Forces en général, le lieutenant-général Paul Wynnyk, vice-chef d’état-major de la Défense, a indiqué ce qui suit :
Nous reconnaissons tout à fait que c’est un problème au sein des Forces armées canadiennes. Cela ne s’applique certainement pas à la vaste majorité. Nous parlons ici d’une très petite minorité au sein des Forces armées canadiennes, mais c’est destructeur, cela empoisonne l’organisation et cela nuit à l’efficacité opérationnelle des Forces armées canadiennes.
[C]’est répandu dans la société, et je crois que nous le savons tous, mais c’est particulièrement important de bien faire les choses au sein des Forces armées canadiennes en raison des conséquences que cela peut avoir sur l’efficacité opérationnelle. Je peux vous assurer que les dirigeants des Forces canadiennes prennent cela très au sérieux. C’est la priorité institutionnelle de notre organisation[32].
Lorsqu’on lui a demandé si les changements prévus ou en cours inciteront un plus grand nombre de victimes à signaler leur situation, Denise Preston, directrice exécutive du Centre d’intervention (Défense nationale), a répondu :
Je crois qu’il est tout à fait vrai de dire que plus les personnes touchées, les plaignants, sont autorisées à participer au processus et à recevoir ou communiquer de l’information afin que leurs points de vue soient pris en considération, mieux elles se portent, plus elles se sentent en sécurité et plus elles se rétablissent vite.
J’ajouterai aussi que l’une des améliorations que nous apportons aux services – elle a été recommandée par le BVG, mais nous avions déjà commencé à la mettre en œuvre – consiste à établir ce que nous appelons un processus de gestion des cas. Cela voudrait dire que l’un de nos conseillers serait affecté à un membre dès sa première communication ou son premier signalement. Les membres auraient ainsi un point de contact continu qui les aiderait à franchir les étapes du processus, du début à la fin, qu’il s’agisse de remplir des formulaires, de les accompagner à des rendez-vous et de leur fournir des renseignements, quels que soient leurs besoins. Voilà le rôle que cette personne jouerait. Je pense que ce conseiller contribuera grandement à les aider aussi, parce que les membres ne seront plus tenus dans l’ignorance. Lorsque les gens sont tenus dans l’ignorance, ils font toujours des suppositions négatives qui ne sont pas nécessairement fondées sur des faits[33].
Par conséquent, le Comité recommande :
Recommandation 1 – Au sujet des rôles et responsabilités des organisations participant à l’Opération HONOUR
Que, d’ici le 30 juin 2019, les Forces armées canadiennes présentent au Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes un rapport décrivant A) la mise en œuvre des nouveaux rôles et nouvelles responsabilités de l’Équipe stratégique sur l’inconduite sexuelle et du Centre d’intervention sur l’inconduite sexuelle; B) la manière dont ces rôles et responsabilités sont communiqués à l’échelle des Forces pour assurer qu’ils soient bien compris de tous les militaires.
Recommandation 2 – Au sujet de l’uniformité des services de soutien aux victimes
Que, d’ici le 30 avril 2020, les Forces armées canadiennes présentent au Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes un rapport décrivant A) la mise en œuvre de la nouvelle approche nationale en matière de soutien aux victimes afin de s’assurer que cette approche répond pleinement aux besoins des militaires touchés par des comportements sexuels inappropriés; B) les mesures prises pour s’assurer que les militaires ont accès à un même niveau de services et soutien spécialisés peu importe où ils sont déployés.
Résolution de cas
Pour la police militaire, un dossier est clos lorsque « l’enquête est terminée et que la décision de porter ou non des accusations a été prise ». La politique prévoit « que les enquêteurs doivent consigner en dossier une justification écrite si l’enquête n’est pas terminée au bout de 30 jours conformément à la norme[34] ». En juillet 2018, la politique a été modifiée, et la nouvelle version précise que les enquêtes doivent être menées « le plus rapidement et le plus efficacement possible, en tenant compte de la complexité et de la gravité de l’incident ». Une explication écrite doit aussi être consignée au dossier si aucune activité d’enquête utile n’a été réalisée pendant 30 jours[35].
Des 46 dossiers d’enquête de la police militaire que le BVG a examinés, 35 étaient clos, dont 4 dans le délai prescrit de 30 jours. Il a fallu en moyenne 7 mois pour clore les 31 autres dossiers, et aucune justification n’avait été consignée dans plus de la moitié des cas[36]. L’enquêteur doit, dès la première rencontre, communiquer à la victime de l’information sur tous les services disponibles. De plus, un coordonnateur des services aux victimes doit informer la victime des progrès de l’enquête tous les 30 jours. Or, au moins une de ces étapes n’avait pas été suivie dans 31 des 46 cas examinés[37].
Aucune politique n’exige que les dossiers soient examinés dans un délai donné par le directeur de l’administration (Carrières militaires). Des 29 dossiers que le BVG a étudiés, il a fallu un an, en moyenne, pour qu’une décision et des mesures administratives soient prises. Selon le BVG, certains retards pouvaient être attribuables à des situations indépendantes de la volonté du directeur, notamment des retards « dans la transmission de la réponse du militaire aux faits allégués, dans les transcriptions des procédures judiciaires ou dans l’obtention du dossier médical du militaire en cause[38] ». Les procédures obligatoires avaient été suivies pour la majorité des dossiers, mais les activités imposées par les commandants d’unité variaient[39].
Le BVG a analysé 46 dossiers de la police militaire et 7 dossiers du directeur de l’administration (Carrières militaires) où il était question d’une plainte de harcèlement sexuel. Dans 21 de ces cas, « les victimes avaient ressenti de la peur, de la détresse, un inconfort et un manque de soutien[40] ».
En ce qui concerne la résolution des dossiers, le BVG a formulé la recommandation suivante :
Les Forces armées canadiennes devraient donner la priorité à l’aide aux victimes grâce aux mesures suivantes :
- offrir des services complets et intégrés de gestion de dossiers, dès le moment où la victime signale un incident jusqu’à la fermeture du dossier;
- s’assurer que les militaires, les intervenants et les responsables comprennent bien le processus de traitement d’une plainte, son déroulement et les dénouements possibles tant pour la victime que pour l’auteur présumé d’un incident[41].
La Défense nationale était d’accord avec cette recommandation et s’est engagée, dans son plan d’action, à mettre en place non seulement les mesures recommandées, mais aussi :
Les Forces armées canadiennes continueront d’élaborer et de publier de nouvelles politiques, y compris les Directives et ordonnances administratives de la Défense (DOAD) connexes et un Manuel sur l’Op HONOUR, comme sources d’information exhaustives sur les processus relatifs aux comportements sexuels inappropriés.
Les Forces continueront d’améliorer l’atelier « Le respect dans les FAC » et de fournir des séances d’information, des mises à jour et des rapports afin de garantir la diffusion la plus vaste possible d’informations.
[Les Forces veilleront] à ce que les diverses sources d’information (comme le Manuel, le site Web de l’Op HONOUR et l’application mobile « Le respect dans les FAC ») renferment les plus récentes informations concernant les politiques et les processus[42].
En réponse à une question à ce sujet, le lieutenant-général Wynnyk a déclaré ce qui suit :
Il y a beaucoup de travail en cours. En fait, il était en cours même lorsque le vérificateur général travaillait à ce rapport. Nous admettons qu’il est arrivé que ce soit déroutant. À ce moment-ci, l’une de mes responsabilités est essentiellement d’élaborer un arbre de décision clair que nous pouvons faire connaître à la chaîne de commandement et à tous les membres des Forces canadiennes – il ne s’agira simplement que de suivre ce qu’indique l’arbre.
[…]
Nous cherchons de meilleurs moyens. Je crois que c’est un bon début, mais nous cherchons constamment des façons de mieux communiquer, une façon plus simple de signaler ce type d’incidents. Je tiens à souligner que nous voulons que les gens signalent les incidents. Il existe divers moyens de le faire. Évidemment, les Forces canadiennes en offrent. Nous voulons nous assurer que les gens ont confiance en la chaîne de commandement, mais surtout, que les personnes touchées se sentent à l’aise de signaler un incident de la façon qui leur convient[43].
Par conséquent, le Comité recommande :
Recommandation 3 – Au sujet du soutien aux victimes
Que, d’ici le 31 juillet 2019, les Forces armées canadiennes présentent au Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes un rapport décrivant A) la mise en œuvre des services intégrés, nouveaux et exhaustifs de gestion des cas à l’intention des victimes (depuis le signalement de l’incident jusqu’à la clôture du dossier); B) les mesures prises pour s’assurer que les militaires, les fournisseurs de services et les responsables comprennent bien les processus de règlement des plaintes et les conséquences possibles, tant pour la victime que pour l’auteur présumé.
Signalement des incidents
Selon le BVG, le devoir de signaler aux Forces « n’a pas permis de concilier responsabilité juridique et nécessité de respecter la volonté d’une victime de ne pas porter plainte officiellement[44] ». De plus, les commandants craignaient « de subir de lourdes conséquences s’ils ne signalaient pas tous les incidents dont ils avaient eu connaissance. Cependant, comme les victimes ne voulaient pas toujours signaler un incident, les commandants devaient choisir entre s’acquitter de leur devoir de signaler et respecter la volonté des victimes. » Certains ont donc « décidé de ne pas s’acquitter de leur devoir de signaler, en réglant un incident officieusement à la demande de la victime[45] ». De plus, « certaines victimes, mal à l’aise, hésitaient à parler avec leur commandant ou toute autre personne qui pouvait faire un signalement, de peur de déclencher un processus officiel[46] ».
Les membres des Forces étaient en effet tenus de signaler tous les types de comportements sexuels inappropriés, et « la définition de “comportement sexuel inapproprié” donnée par l’Opération HONOUR était très large : elle englobait à peu près tout, de la blague à l’agression sexuelle[47] ». Le BVG a constaté qu’étant donné « que le devoir de signaler ne définissait pas clairement qui étaient les “autorités compétentes”, certains membres, y compris la chaîne de commandement, nous ont indiqué qu’ils avaient signalé à la police militaire des incidents comme des blagues inappropriées, plutôt que de signaler le comportement par le truchement du processus administratif d’examen des dossiers non criminels ou au niveau hiérarchique le plus bas possible[48] ».
Le BVG a aussi constaté « que le devoir de signaler avait eu une autre conséquence non prévue : l’alourdissement du fardeau administratif lié à la gestion des plaintes. Lors du lancement de l’Opération HONOUR, les signalements de comportements sexuels inappropriés ont augmenté, en partie parce que les victimes s’étaient fait dire qu’il était désormais sûr de dénoncer ces comportements et en partie à cause du devoir de signaler[49]. » La police militaire « n’avait pas suffisamment de ressources pour faire face à l’alourdissement de sa charge de travail, ce qui a causé des arriérés et des retards dans le traitement des plaintes. Même si le Service national des enquêtes des Forces canadiennes a accueilli 18 enquêteurs supplémentaires à l’automne 2016, il ne pouvait pas, au moment de l’audit, déterminer si ces nouvelles ressources suffiraient pour s’acquitter de la charge de travail accrue[50]. »
Par ailleurs, le BVG n’a « pas pu établir une comparaison directe entre les incidents signalés auprès des Forces et les données recueillies dans le cadre du sondage de Statistique Canada de 2016, car les deux organisations définissaient les comportements sexuels inappropriés de manière différente ». Selon le BVG, il est raisonnable de présumer que « la sous-déclaration continue de poser problème » et que les Forces « doivent redoubler d’efforts pour garantir que toutes les victimes se sentent suffisamment en sûreté et soutenues pour porter plainte[51] ».
Le BVG a donc formulé la recommandation ci-dessous :
Les Forces armées canadiennes devraient établir des lignes directrices claires à l’intention des membres sur le règlement imposant de « signaler aux autorités compétentes » tout incident lié à un comportement sexuel inapproprié. Ces lignes directrices devraient préciser quelles sont les « autorités compétentes » pour chaque type d’incident. Il faudrait viser à concilier la nécessité de protéger la sécurité de l’organisation et la nécessité d’appuyer les victimes en leur permettant de divulguer un incident et de demander de l’aide sans qu’elles soient obligées de déclencher un processus officiel de signalement et de plainte[52].
Dans le plan d’action, les Forces se sont dites en accord avec cette recommandation et se sont engagées à prendre les mesures suivantes d’ici le 1er octobre 2019 :
Les FAC examineront les règlements pertinents et élaboreront une approche appropriée pour préciser les obligations liées au signalement des incidents de comportements sexuels inappropriés.
L’approche choisie fera en sorte que les points de vue des victimes concernant les mesures à prendre en réponse aux incidents de comportements sexuels inappropriés soient pris en compte et respectés, dans la mesure du possible.
Un groupe de travail a été créé pour déterminer et élaborer l’approche visant à préciser les obligations des membres des FAC de signaler les incidents[53].
Questionnée à ce sujet, Jody Thomas a fourni l’explication suivante :
Nous savons que certaines personnes ont subi des répercussions lorsque le système de signalement a lancé un processus qu’elles ne voulaient pas. Les Forces armées canadiennes examinent actuellement l’application de la réglementation à cet égard. Elles clarifieront les processus de signalement des incidents de comportement sexuel inapproprié afin que les préoccupations de la victime soient d’abord et avant tout prises en compte et respectées.
Je conviens qu’une certaine confusion régnait quant au processus à suivre pour signaler un incident et aux personnes auxquelles il fallait le signaler. En fait, les efforts déployés pour élargir les possibilités au maximum – s’adresser à la police militaire, à la chaîne de commandement, à un membre du clergé au sein des Forces, aux services médicaux des Forces ou à des homologues civils – ont ajouté de la confusion plutôt que de créer des possibilités. Par conséquent, je crois qu’il est essentiel de bien préciser à quel endroit les gens peuvent signaler un incident, la façon de le faire et le type d’aide fournie après le signalement, et nous y travaillerons[54].
Par conséquent, le Comité recommande :
Recommandation 4 – Au sujet des règles portant sur le signalement des comportements sexuels inappropriés
Que, d’ici le 31 octobre 2019, les Forces armées canadiennes présentent au Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes un rapport décrivant la nouvelle approche en ce qui concerne l’obligation des membres de signaler les comportements sexuels inappropriés aux bonnes instances, et expliquant comment cette approche assure un équilibre entre la sécurité de l’organisation et la nécessité d’appuyer les victimes en leur permettant de signaler des incidents et d’obtenir du soutien sans que cela mène à la présentation d’un rapport officiel.
Formation et sensibilisation en matière de comportements sexuels inappropriés
Selon le BVG, les Forces « ont évalué les besoins en matière de formation dans ce domaine et ont utilisé les résultats de cette évaluation pour définir une stratégie de formation, qui a été approuvée en 2016. La chaîne de commandement a offert des séances d’information et mis en œuvre des programmes clés de sensibilisation et de formation sur l’Opération HONOUR, notamment une formation obligatoire donnée dans l’ensemble des Forces sur les mesures que devraient prendre les militaires qui sont témoins d’un comportement sexuel inapproprié[55]. » Cependant, la formation n’a pas permis aux membres « de bien comprendre comment intervenir efficacement auprès des victimes et leur venir en aide. Cela s’appliquait tout particulièrement à la chaîne de commandement[56]. »
L’Examen externe de 2015 a révélé que, de « l’avis général, les formateurs étaient eux‑mêmes souvent complices de comportements sexuels inappropriés » et que, « selon des membres, les commandants n’avaient pas reçu une formation suffisante et […] n’étaient donc pas en mesure d’évaluer correctement les comportements sexuels inappropriés ni d’intervenir de manière appropriée[57] ». Le BVG a constaté que « la plupart des séances de sensibilisation et de formation offertes dans le cadre de l’Opération HONOUR avaient été données par la chaîne de commandement, qui n’avait pas d’expertise[58] ».
Le BVG a en outre observé que « la chaîne de commandement avait appliqué diverses approches pour présenter les documents de formation déjà préparés, ce qui a nui à l’uniformité de la formation. Même si un message identique a été communiqué aux membres des Forces, à savoir cesser tout comportement sexuel inapproprié, ceux-ci ont entendu des messages différents sur ce qui constituait un tel comportement et sur la façon d’intervenir, le cas échéant[59]. » Les Forces « n’ont pas non plus défini une politique unique pour communiquer clairement aux membres les définitions et les règles relatives aux comportements sexuels inappropriés, et pour leur indiquer le comportement que les Forces attendaient d’eux[60] ». D’autres membres (surtout des femmes) ont indiqué au BVG « qu’ils se sentaient ostracisés par leurs pairs, parce que ceux-ci avaient peur d’interagir avec eux[61] ». En avril 2018, les Forces ont élaboré un nouvel atelier intitulé « Le respect dans les FAC[62] ».
Le BVG a donc formulé la recommandation suivante :
Les Forces armées canadiennes devraient se donner comme priorité d’offrir à tous leurs membres l’atelier intitulé « Le respect dans les FAC », et ce, dans les meilleurs délais. Elles devraient aussi examiner d’autres types de séances de sensibilisation et de formation axées sur l’aide aux victimes afin d’avoir l’assurance que tous les membres suivent une formation appropriée qui appuie les objectifs de l’Opération HONOUR[63].
Dans leur plan d’action, les Forces ont indiqué qu’elles sont d’accord avec cette recommandation et se sont engagées à établir un plan de formation et à offrir à tout le personnel l’atelier « Le respect dans les FAC » d’ici le 31 mars 2019. De plus, la Charte du Centre d’intervention sera modifiée d’ici le 31 mars 2019 afin :
- de reconnaître « la voix officielle » du Centre en ce qui a trait au contenu des formations sur les comportements sexuels inappropriés;
- de conférer au Centre « le mandat explicite de surveiller les programmes de formation et de sensibilisation dans les Forces[64] » en ce qui concerne les comportements sexuels inappropriés.
En réponse à une question au sujet de la formation sur les comportements sexuels inappropriés offerts aux membres des Forces, Jody Thomas a répondu que l’accent doit être mis sur les victimes :
Nous sommes d’accord avec le vérificateur général : nous devons mieux sensibiliser nos gens. La sensibilisation aidera nos gens à acquérir une compréhension qui se traduira par des changements d’attitude et de position. Nous examinons l’ensemble de notre formation existante pour veiller à ce qu’elle soutienne tout d’abord les victimes. Nous misons sur l’expertise du Centre d’intervention sur l’inconduite sexuelle afin de nous assurer que les Forces armées canadiennes fournissent la formation appropriée à cet égard. La formation sera offerte à l’échelle nationale d’une manière coordonnée et mesurée, notamment par l’intermédiaire de l’atelier sur le respect dans les forces armées[65].
Par ailleurs, le lieutenant-général Wynnyk a noté que le Centre d’intervention, en tant qu’organe responsable indépendant qui ne fait pas partie de la chaîne de commandement, assurerait une surveillance externe de la formation offerte par les Forces armées canadiennes[66].
Par conséquent, le Comité recommande :
Recommandation 5 – Au sujet de la formation et de la sensibilisation en matière de comportements sexuels inappropriés
Que, d’ici le 30 juin 2019, les Forces armées canadiennes présentent au Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes un rapport décrivant les progrès réalisés afin d’offrir à tout le personnel, y compris la chaîne de commandement, une formation concernant les comportements sexuels inappropriés dans le cadre de l’atelier « Le respect dans les Forces armées canadiennes ».
Recommandation 6 – Au sujet du mandat du Centre d’intervention sur l’inconduite sexuelle
Que, d’ici le 30 juin 2019, les Forces armées canadiennes présentent au Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes un rapport décrivant le nouveau mandat du Centre d’intervention sur l’inconduite sexuelle, lequel mandat : A) reconnaît le Centre en tant qu’autorité pour ce qui est du contenu des formations; B) permet d’améliorer la surveillance et l’évaluation de la formation sur les comportements sexuels inappropriés offerte par les Forces armées canadiennes.
Surveillance des mesures prises pour contrer les comportements sexuels inappropriés
Comme l’a indiqué le vérificateur général au Comité, la question de la collecte et de l’utilisation inadéquate des données est un problème récurrent auquel doivent faire face les organismes fédéraux. Étant donné l’importance de données fiables pour l’exécution et l’évaluation de l’efficacité des programmes, le Comité a fait de cette question une de ses priorités fondamentales.
Selon le BVG, en 2016, « le chef d’état-major de la défense s’est engagé à obtenir des suivis et des avis indépendants à l’égard de l’Opération HONOUR grâce à la mise en place d’un comité directeur et d’un conseil consultatif externe ». Or, le BVG a constaté que « le conseil consultatif externe s’était réuni pour la première fois en juin 2018 » et qu’au moment de l’audit, « le comité directeur n’avait tenu aucune réunion[67] ».
De plus, dans le cadre de l’Examen externe de 2015, on avait recommandé la création d’un organisme indépendant qui, entre autres, agirait « à titre d’organisme central de collecte de l’information ». Or, le BVG a noté que même si le Centre d’intervention avait été créé, il « n’avait pas été chargé de recevoir les plaintes ni recueillir de l’information[68] ».
Les Forces ont également « confié à l’Équipe d’intervention stratégique des FAC sur l’inconduite sexuelle la responsabilité de coordonner et de surveiller tous les volets de l’Opération HONOUR[69] ». Or, cette équipe « n’avait pas de l’information de bonne qualité pour étayer les rapports d’étape utilisés par la haute direction afin de comprendre l’Opération HONOUR et de prendre des décisions à cet égard[70] ».
De plus, au moment de l’audit, il y avait deux systèmes distincts d’information « centralisés » pour le suivi des plaintes de harcèlement et « le problème des incidents signalés en double n’avait pas été réglé[71] ».
Le BVG a donc formulé les deux recommandations suivantes :
Les Forces armées canadiennes devraient élaborer un cadre d’évaluation du rendement pour mesurer et suivre les résultats de l’Opération HONOUR, et pour présenter des rapports à ce sujet. Les Forces devraient utiliser l’information recueillie pour améliorer continuellement les mesures prises à l’encontre des comportements sexuels inappropriés et s’employer à atteindre leur objectif, à savoir éliminer les comportements sexuels inappropriés dans l’ensemble de l’organisation[72].
Les Forces armées canadiennes devraient avoir davantage recours à des experts externes en la matière, en plus d’utiliser les sources d’information et éléments probants internes, afin de disposer d’une plus grande diversité d’information sur le rendement et d’avoir l’assurance de recevoir une évaluation objective des mesures prises pour mettre fin aux comportements sexuels inappropriés[73].
Les Forces ont accepté la recommandation d’élaborer un cadre de gestion du rendement. Dans le plan d’action, elles se sont engagées à mettre au point un nouveau cadre de mesure du rendement pour évaluer l’efficacité et les résultats de l’Opération HONOUR; de plus, l’Équipe d’intervention offrira des services d’analyse et des conseils aux Forces en ce qui concerne le nouveau cadre[74].
Par ailleurs, les Forces ont accepté la recommandation du BVG portant sur le recours accru à des experts externes en la matière, précisant que le directeur exécutif du Centre d’intervention pourra obtenir des conseils indépendants du conseil consultatif externe pour faciliter une surveillance constante de l’Opération HONOUR[75].
Les représentants de la Défense nationale ont également mentionné qu’un nouveau service de gestion des cas, accompagné d’un cadre de mesure du rendement, contribuera à fournir plus de renseignements, ce qui aidera « à surveiller et à améliorer nos services de soutien[76] ».
Interrogée sur les réunions peu fréquentes du conseil consultatif externe, Jody Thomas a expliqué que le conseil n’était pas initialement formé d’experts. Les Forces ont donc « complètement revu la composition du comité consultatif avant la première réunion[77] ». Le conseil a été reconstitué afin de comprendre un éventail « de personnes offrant du soutien aux victimes, d’experts en données, de psychologues ou de sociologues qui comprennent les causes fondamentales et toutes les choses que nous devons examiner au sein des Forces[78] ».
Par conséquent, le Comité recommande :
Recommandation 7 – Au sujet de la gestion du rendement
Que, d’ici le 30 juin 2019, les Forces armées canadiennes présentent au Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes un rapport décrivant le cadre d’évaluation du rendement qu’elles utilisent pour mesurer les réponses aux comportements sexuels inappropriés, notamment la manière dont les Forces recueillent et utilisent des données fiables dans le contexte de ce processus.
Conclusion
Le Comité estime que les Forces armées canadiennes n’ont pas encore pleinement atteint leurs objectifs en matière d’intervention en cas de comportements sexuels inappropriés ainsi qu’en matière de soutien aux victimes. L’Opération HONOUR n’est ni une réussite ni un échec : elle n’a tout simplement pas encore permis d’arriver aux fins visées. C’est pourquoi le Comité a formulé sept recommandations à l’intention des Forces armées canadiennes dans le but de l’aider à atteindre les objectifs du programme.
Résumé des mesures recommandées et échéances correspondantes
Tableau 1 — Résumé des recommandations et échéances
Recommandation |
Mesure recommandée |
Échéance |
Recommandation 1 |
Les FAC devraient présenter au Comité un rapport décrivant A) la mise en œuvre des nouveaux rôles et nouvelles responsabilités de l’Équipe stratégique sur l’inconduite sexuelle et du Centre d’intervention sur l’inconduite sexuelle; B) la manière dont ces rôles et responsabilités sont communiqués à l’échelle des Forces pour assurer qu’ils soient bien compris de tous les militaires. |
30 juin 2019 |
Recommandation 2 |
Les FAC devraient présenter au Comité un rapport décrivant A) la mise en œuvre de la nouvelle approche nationale en matière de soutien aux victimes afin de s’assurer que cette approche répond pleinement aux besoins des militaires touchés par des comportements sexuels inappropriés; B) les mesures prises pour s’assurer que les militaires ont accès à un même niveau de services et soutien spécialisés peu importe où ils sont déployés. |
30 avril 2020 |
Recommandation 3 |
Les FAC devraient présenter au Comité un rapport décrivant A) la mise en œuvre des services intégrés, nouveaux et exhaustifs de gestion des cas à l’intention des victimes (depuis le signalement de l’incident jusqu’à la clôture du dossier); B) les mesures prises pour s’assurer que les militaires, les fournisseurs de services et les responsables comprennent bien les processus de règlement des plaintes et les conséquences possibles, tant pour la victime que pour l’auteur présumé. |
31 juillet 2019 |
Recommandation 4 |
Les FAC devraient présenter au Comité un rapport décrivant la nouvelle approche en ce qui concerne l’obligation des membres de signaler les comportements sexuels inappropriés aux bonnes instances, et expliquant comment cette approche assure un équilibre entre la sécurité de l’organisation et la nécessité d’appuyer les victimes en leur permettant de signaler des incidents et d’obtenir du soutien sans que cela mène à la présentation d’un rapport officiel. |
31 octobre 2019 |
Recommandation 5 |
Les FAC devraient présenter au Comité un rapport décrivant les progrès réalisés afin d’offrir à tout le personnel, y compris la chaîne de commandement, une formation concernant les comportements sexuels inappropriés dans le cadre de l’atelier « Le respect dans les Forces armées canadiennes ». |
30 juin 2019 |
Recommandation 6 |
Les FAC devraient présenter au Comité un rapport décrivant le nouveau mandat du Centre d’intervention sur l’inconduite sexuelle, lequel mandat : A) reconnaît le Centre en tant qu’autorité pour ce qui est du contenu des formations; B) permet d’améliorer la surveillance et l’évaluation de la formation sur les comportements sexuels inappropriés offerte par les Forces armées canadiennes |
30 juin 2019 |
Recommandation 7 |
Les FAC devraient présenter au Comité un rapport décrivant le cadre d’évaluation du rendement qu’elles utilisent pour mesurer les réponses aux comportements sexuels inappropriés, notamment la manière dont les Forces recueillent et utilisent des données fiables dans le contexte de ce processus. |
30 juin 2019 |
[1] Bureau du vérificateur général du Canada (BVG), Les comportements sexuels inappropriés – Forces armées canadiennes, rapport 5 des Rapports de l’automne 2018 du vérificateur général du Canada, paragr. 5.11.
[2] Ibid., paragr. 5.5.
[3] Ibid., paragr. 5.1 et 5.7.
[4] Ibid., paragr. 5.13. Le BVG n’a pas examiné comment le système de justice militaire avait traité les comportements sexuels inappropriés après le dépôt d’accusations. Cet aspect a été abordé dans : BVG, L’administration de la justice dans les Forces armées canadiennes, rapport 3 des Rapports du printemps 2018 du vérificateur général du Canada.
[5] BVG, Les comportements sexuels inappropriés – Forces armées canadiennes, rapport 5 des Rapports de l’automne 2018 du vérificateur général du Canada (voir Définition).
[6] Ibid., paragr. 5.3.
[7] Ibid., paragr. 5.4.
[8] Ibid., paragr. 5.5. et 5.5.
[9] Ibid., paragr. 5.7.
[10] Ibid., paragr. 5.8.
[11] Ibid., paragr. 5.9.
[12] Ibid., paragr. 5.10.
[13] Ibid., pièce 5.1.
[14] Ibid., paragr. 5.25.
[15] Ibid.
[16] Ibid., paragr. 5.27.
[17] Ibid., paragr. 5.31 et 5.32.
[18] Ibid., paragr. 5.46.
[19] Ibid., paragr. 5.47.
[20] Ibid., paragr. 5.48.
[21] Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes, Témoignages, 1re session, 42e législature, 29 janvier 2019, Réunion no 125.
[22] BVG, Les comportements sexuels inappropriés – Forces armées canadiennes, rapport 5 des Rapports de l’automne 2018 du vérificateur général du Canada, paragr. 5.33.
[23] Ibid., paragr. 5.34.
[24] Ibid., paragr. 5.36.
[25] Ibid., paragr. 5.39.
[26] Ibid., paragr. 5.38.
[27] Ibid., paragr. 5.40.
[28] Ibid., paragr. 5.41.
[29] Défense nationale, Plan d’action détaillé de la gestion, p. 1-2.
[30] Ibid.
[31] Ibid.
[32] Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes, Témoignages, 1re session, 42e législature, 29 janvier 2019, Réunion no 125, 0910.
[33] Ibid., 1005.
[34] BVG, Les comportements sexuels inappropriés – Forces armées canadiennes, rapport 5 des Rapports de l’automne 2018 du vérificateur général du Canada, paragr. 5.51.
[35] Ibid., paragr. 5.53.
[36] Ibid., paragr. 5.52.
[37] Ibid., paragr. 5.59.
[38] Ibid., paragr. 5.54.
[39] Ibid., paragr. 5.57.
[40] Ibid., paragr. 5.61.
[41] Ibid., paragr. 5.63.
[42] Défense nationale, Plan d’action détaillé de la gestion, p. 4-5.
[43] Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes, Témoignages, 1re session, 42e législature, 29 janvier 2019, Réunion no 125, 0905.
[44] BVG, Les comportements sexuels inappropriés – Forces armées canadiennes, rapport 5 des Rapports de l’automne 2018 du vérificateur général du Canada, paragr. 5.71.
[45] Ibid., paragr. 5.72.
[46] Ibid., paragr. 5.74.
[47] Ibid., paragr. 5.77.
[48] Ibid.
[49] Ibid., paragr. 5.76.
[50] Ibid., paragr. 5.78.
[51] Ibid., paragr. 5.85.
[52] Ibid., paragr. 5.79.
[53] Défense nationale, Plan d’action détaillé de la gestion, p. 5-6.
[54] Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes, Témoignages, 1re session, 42e législature, 29 janvier 2019, Réunion no 125, 0855.
[55] BVG, Les comportements sexuels inappropriés – Forces armées canadiennes, rapport 5 des Rapports de l’automne 2018 du vérificateur général du Canada, paragr. 5.92.
[56] Ibid., paragr. 5.93.
[57] Ibid., paragr. 5.94.
[58] Ibid., paragr. 5.95.
[59] Ibid., paragr. 5.97.
[60] Ibid., paragr. 5.98.
[61] Ibid., paragr. 5.100.
[62] Ibid., paragr. 5.102.
[63] Ibid., paragr. 5.104.
[64] Défense nationale, Plan d’action détaillé de la gestion, p. 6-7.
[65] Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes, Témoignages, 1re session, 42e législature, 29 janvier 2019, Réunion no 125, 0900.
[66] Ibid., 0900 et 1000.
[67] BVG, Les comportements sexuels inappropriés – Forces armées canadiennes, rapport 5 des Rapports de l’automne 2018 du vérificateur général du Canada, paragr. 5.110.
[68] Ibid., paragr. 5.111.
[69] Ibid., paragr. 5.112.
[70] Ibid., paragr. 5.113.
[71] Ibid., paragr. 5.115.
[72] Ibid., paragr. 5.119.
[73] Ibid., paragr. 5.120.
[74] Défense nationale, Plan d’action détaillé de la gestion, p. 7.
[75] Ibid., p. 8.
[76] Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes, Témoignages, 1re session, 42e législature, 29 janvier 2019, Réunion no 125, 0855.
[77] Ibid., 1025.
[78] Ibid.