TRAN Rapport du Comité
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Opinion dissidente du NPD Héritage des conservateurs En adoptant le projet de loi C-45, le précédent gouvernement conservateur a introduit des changements néfastes à la Loi sur la protection des eaux navigables (LPEN). L’adoption de ce projet de loi s’inscrivait dans l’agenda des conservateurs d’affaiblir les protections environnementales en vue de favoriser le développement accéléré du secteur des combustibles fossiles. L’objectif avoué de ces changements est de recentrer le processus d’approbation des travaux effectués sur les eaux navigables vers les projets qui risquent d’avoir davantage d’impacts sur les activités de navigation. En éliminant le déclenchement automatique des évaluations environnementales des ouvrages touchants, les eaux navigables, le nouveau régime met uniquement l’emphase sur la protection de la navigation. Cet objectif est d’ailleurs reflété dans le changement de nom de la LPEN, qui se nomme désormais Loi sur la protection de la navigation (LPN). Ce nouveau régime a fait disparaître les protections environnementales et réglementaires de 99% des voies navigables du Canada. Par exemple, la construction d’un pont sur une eau navigable n’est plus soumise à une évaluation environnementale. De plus, le promoteur n’est plus tenu d’avertir le gouvernement même si son projet nuit à la navigation. Enfin, le promoteur du projet n’est plus obligé d’obtenir l’autorisation du ministre des Transports avant de procéder à la construction de l’ouvrage. L’autre changement sournois introduit par les conservateurs consiste à supprimer le déclenchement automatique de l’évaluation environnementale d’un projet qui touche une eau navigable. Outre les ouvrages désignés par le ministre et les oléoducs évalués par l’Office National de l’Énergie (ONÉ), tous les autres projets d’infrastructure touchant les eaux navigables sont dispensés d’une évaluation environnementale. Les néo-démocrates se sont énergiquement opposés à ces changements en menant une grande campagne pour exiger le rétablissement des protections éliminées. Quant aux libéraux, ils avaient également dénoncé la politique des conservateurs. Précisément, l’actuel président du Conseil du Trésor, Scott Brison, qualifiait ces changements de « catastrophiques » et signalait que « Les conservateurs mettent grandement en danger la santé de nos lacs et rivières. » Le député Francis Scarpaleggia, ancien porte-parole libéral en « Politiques des eaux », indiquait à son tour qu’« En tant que député du Québec, je suis particulièrement consterné d’apprendre que seulement quatre lacs québécois bénéficieront d’une protection en vertu de cette nouvelle loi ». Une autre promesse rompue des libéraux Malgré leur opposition aux politiques des conservateurs et leur promesse électorale de rétablir les protections éliminées, les libéraux montrent encore une fois qu’ils ne sont pas dignes de confiance. Nous sommes déçus de voir que les députés libéraux recommandent au gouvernement fédéral le maintien de l’annexe qui prive 99% des lacs et des rivières des protections nécessaires. De plus, les libéraux ne recommandent pas le rétablissement de l’évaluation environnementale des projets d’infrastructures qui touchent ces cours d’eau en refusant de remettre sur pied le déclenchement automatique des évaluations environnementales. En recommandant le maintien et l’amélioration de l’annexe, non seulement les libéraux brisent leur promesse, mais n’appuient pas clairement leur recommandation sur des témoignages entendus par le Comité. Les témoignages entendus pendant l’étude font ressortir deux positions distinctes. D’un côté, des témoins demandaient la suppression de l’annexe et le rétablissement des protections éliminées tandis que d’autres prônaient le maintien de la législation actuelle. Les recommandations, soi-disant consensuelles des libéraux, sont en réalité de la poudre aux yeux à l’ensemble des progressistes qui ont cru à leur engagement électoral de protéger intégralement nos eaux navigables. La promesse rompue des libéraux vient affaiblir les droits des Premières Nations. Kim Beaudin, vice-président national du Congrès des Peuples autochtones, soulignait que : « Les modifications de la Loi sur la protection de la navigation sont importantes pour les peuples autochtones parce qu'elles laissent essentiellement sans protection des millions d'étendues d'eau. La majorité des voies navigables échappant maintenant à l'application de la Loi, le gouvernement n'a pas à intervenir dans la plupart des projets de développement, ce qui le soustrait à l'obligation de procéder à des consultations. » Recommandations du NPD Recommandation 1 : nous recommandons au gouvernement fédéral de supprimer l’arrêté sur les ouvrages et les eaux secondaires. En 2009, libéraux et conservateurs se sont alliés pour créer les premières brèches à la Loi sur la protection des eaux navigables. Afin de prétendument relancer les investissements publics et privés dans les ouvrages sur les voies navigables, le gouvernement et « certaines parties intéressées », parties qui n’ont jamais étaient explicitement identifiées, étaient d’avis que les retards et l’incertitude créée par le processus d’approbation qui existait alors décourageaient les investissements publics et privés dans les ouvrages sur les voies navigables. Cependant, les recherches réalisées par la professeure Adrienne Davidson aboutissent à une conclusion divergente de celles présentées par les libéraux et les conservateurs. Mme Davidson citait notamment son étude intitulée « Réductions de la surveillance fédérale des systèmes aquatiques au Canada: répercussions de la nouvelle protection de la navigation» : « En ce qui a trait à la réduction des formalités administratives, c'est l'un des aspects que nous tenions à examiner dans le cadre de nos projets de recherche. Cela faisait partie de la justification utilisée dans les discussions sur les modifications à la Loi sur la protection de la navigation. Je crois qu'il est important de noter que le nombre d'évaluations environnementales déclenchées en vertu de la Loi sur la protection des eaux navigables ne représente qu'environ 5,8 % de toutes les évaluations environnementales fédérales menées durant cette période de 10 ans. ;» Selon cette étude, 53 % des évaluations environnementales déclenchées aux termes de la Loi sur la protection des eaux navigables étaient effectuées dans un délai de six mois. Donc, ces évaluations environnementales n'exigeaient pas beaucoup de temps et aboutissaient en très grande majorité à l’approbation des projets. Recommandation 2 : nous recommandons au gouvernement fédéral le rétablissement de l’ensemble des protections éliminées aux eaux navigables abolies dans le cadre des projets de loi d’exécution du Budget de 2012. Une fois devenus majoritaires, les conservateurs sont allés de l’avant avec l’élimination quasi complète des protections aux eaux navigables. Nous apprendrons qu’en 2011, un regroupement d'industriels du secteur de l'énergie réclamait au gouvernement Harper des changements aux lois qui protègent l’eau. Un an plus tard, les conservateurs privent 99% des eaux navigables des protections réglementaires et environnementales. Au lieu de réparer les dégâts des conservateurs, le gouvernement libéral continue à prendre soin de ces mêmes lobbyistes au lieu de protéger les droits des Premières Nations et de l’environnement. C’est pourquoi le NPD demande au gouvernement fédéral de supprimer l’annexe de Loi sur la Protection de la Navigation et de rétablir l’intégralité des protections éliminées. Selon, Mme Andrea Hoyt, gestionnaire en évaluation environnementale du gouvernement du Nunatsiavut, « l'Accord sur les revendications territoriales des Inuits du Labrador prévoit de tenir compte du principe de précaution dans les décisions relatives à la gestion des ressources. La suppression de la protection de 99,99 % de nos eaux ne reflète ni le principe de précaution ni une gestion environnementale responsable. Le gouvernement du Nunatsiavut demande au gouvernement du Canada de rétablir les mesures de protection supprimées relatives aux eaux du Canada. » Recommandation 3 : nous recommandons au gouvernement fédéral d’inclure Transports Canada dans le processus décisionnel des évaluations environnementales des oléoducs qui traversent les eaux navigables. Plusieurs mémoires et témoignages font état du manque de crédibilité de l’Office National de l’Énergie dans son évaluation environnementale des oléoducs qui traversent les eaux navigables. Emma Lui indiquait que : « Ce n'est pas un secret pour personne: il y a bien des raisons de s'inquiéter au sujet de l'Office national de l'énergie, dont les administrateurs sont probablement nommés par cooptation par l'industrie énergétique, ce qui soulève des questions et des préoccupations à l'égard de son indépendance réelle. » C’est pourquoi nous recommandons au gouvernement fédéral d’inclure Transports Canada dans le processus d’approbation des pipelines qui touchent les eaux navigables. Selon Emma Lui, « Je crois que le gouvernement fédéral a vraiment une responsabilité à ce titre et qu'il doit penser aux répercussions sur les voies navigables. Il serait aberrant que le ministère n'assume pas un rôle ou une responsabilité dans la protection de ces cours d'eau. »En incluant Transports Canada dans le processus décisionnel, la ministre des Transports sera partie prenante du processus de l’évaluation environnementale et sera imputable. De plus, nous croyons que via son programme de protection de la navigation, Transports Canada détient l’expertise nécessaire afin d’évaluer l’impact environnemental des pipelines sur les cours d’eau navigables. Recommandation 4 : nous recommandons au gouvernement fédéral de rétablir le mandat des agents du Programme de Protections de la Navigation de Transports Canada d’accepter les plaintes du public en matière de droit à la navigation. En établissant une liste de cours d’eau « protégés », le gouvernement Harper impose la responsabilité de l’application du droit à la navigation aux provinces, aux municipalités et au public. Par exemple, si un pont ou un barrage empêche un citoyen de monter une école de kayak sur une rivière, c’est à lui d’aller devant le tribunal et de faire valoir que son cours d’eau vaut d’être protégé. S’acquitter des coûts d’un procès contre un grand promoteur est hors de portée de la majorité des citoyens. Selon M. Greg Farrant , directeur des affaires publiques et gouvernementales de la Fédération des pêcheurs et des chasseurs de l'Ontario , « Il est pénible pour un particulier de saisir un tribunal de ce genre de questions. J'insiste une fois de plus sur le fait que cela revient à saisir un tribunal d'une chose qui s'est déjà produite plutôt que d'essayer d'empêcher cette chose, de l'examiner ou de la revoir. » Sur la base de ce constat, nous croyons qu’il est temps que le gouvernement fédéral assume ses responsabilités en matière de protection du droit à la navigation et de ne pas déléguer aux citoyens la tâche de poursuivre eux-mêmes les responsables de projets devant les tribunaux. Conclusion En résumé, le NPD recommande au gouvernement fédéral d’éliminer l’arrêté sur les ouvrages et les eaux secondaires afin que l’ensemble des projets soient évalués. De plus, nous recommandons la suppression de l’Annexe de la Loi sur la Protection de la Navigation afin que l’ensemble des eaux navigables soient protégées. Nous proposons aussi d’inclure Transports Canada dans l’évaluation des oléoducs qui touchent les eaux navigables afin que le ministre des Transports soit imputable. Finalement, nous demandons au gouvernement fédéral de rétablir le mandat de Transports Canada afin que le ministère prenne en charge les plaintes du public en matière de protection du droit à la navigation. |