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JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


NUMÉRO 041 
l
2e SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 22 juin 2021

[Enregistrement électronique]

(1000)

[Traduction]

    La séance est ouverte. Bienvenue à la 41e réunion du Comité permanent de la justice et des droits de la personne.
    Comme vous êtes nombreux dans la salle aujourd'hui, je vais passer rapidement en revue les règles s'appliquant aux réunions hybrides, conformément à l'ordre de la Chambre du 25 janvier 2021, à l'intention des membres qui sont présents en personne et de ceux qui participent à distance au moyen de l'application Zoom. Les délibérations d'aujourd'hui seront diffusées sur le site Web de la Chambre des communes. Comme vous le savez, dans une émission Web, c'est seulement la personne qui parle, plutôt que l'ensemble des participants, que l'on voit à l'écran.
     Étant donné la pandémie qui perdure et à la lumière des recommandations des autorités sanitaires ainsi que de la directive du Bureau de régie interne du 28 janvier 202... [Difficultés techniques]... en toute sécurité, tous ceux qui assistent à la réunion en personne doivent se tenir à au moins deux mètres les uns des autres et porter un masque non médical quand ils circulent dans la salle. Il est fortement recommandé de porter le masque en tout temps, même lorsqu'on est assis. Vous devez utiliser le désinfectant fourni pour les mains à l'entrée de la salle.
    En tant que présidente, je veillerai à l'application de ces mesures pendant toute la réunion. Je remercie à l'avance les membres de leur collaboration.
    Pour assurer le bon déroulement de la réunion, il y a quelques points que je tiens à souligner. Des services d'interprétation sont disponibles. Vous pouvez suivre la réunion dans la langue de votre choix en cliquant sur l'icône du globe, au bas de votre écran, qui vous permet de choisir l'anglais ou le français. Vous pouvez vous exprimer dans l'une ou l'autre des deux langues; l'interprétation suivra. Lorsque vous avez la parole, assurez-vous de parler lentement et clairement afin d'éviter les problèmes d'interprétation.
    Les membres qui participent en personne doivent procéder comme ils le font ordinairement pour utiliser le microphone installé à leur pupitre.
    Avant d'intervenir, veuillez attendre que je vous donne la parole. Ceux qui participent à la réunion par vidéoconférence doivent s'assurer d'activer leur microphone en cliquant sur l'icône du micro. Pour ceux qui se trouvent dans la salle, votre microphone sera contrôlé comme d'habitude par l'agent des procédures et de la vérification. Lorsque vous n'avez pas la parole, votre microphone doit être mis en sourdine.
    Je rappelle à tous, membres et témoins, que toutes leurs interventions doivent être adressées à la présidence.
    Pour ce qui est de la liste des intervenants, la greffière et moi-même ferons de notre mieux pour maintenir l'ordre d'intervention des membres. J'utiliserai deux cartons indiquant combien de temps, une minute ou 30 secondes, il reste aux témoins pour faire leur déclaration liminaire et aux membres pour poser leurs questions.
    Avant d'entrer dans le vif du sujet, je signale le retour au Comité de M. MacGregor, qui remplace aujourd'hui M. Garrison.
    Bienvenue, monsieur MacGregor.
    J'invite maintenant la très honorable Kim Campbell et l'honorable David Lametti, tous deux ici présents, à nous parler du processus de nomination de l'honorable Mahmud Jamal à la Cour suprême du Canada.
     Je signale à l'attention des membres du Comité le passage suivant, en page 1078, de La procédure et les usages de la Chambre des communes, 3e édition: « La nature des questions pouvant être posées aux témoins qui comparaissent devant les comités n'est assujettie à aucune règle précise à part le fait qu'elles doivent se rapporter à la question à l'étude. » Il s'agit, en l'occurrence, d'une nomination à la Cour suprême.
    Cela étant dit, je souhaite la bienvenue à notre premier témoin de la journée, l'honorable David Lametti.
    Allez‑y, je vous prie. Vous avez sept minutes et demie pour votre déclaration liminaire.
(1005)

[Français]

     Bonjour, honorables collègues.
    D'abord, j'aimerais reconnaître que je me trouve sur le territoire traditionnel du peuple algonquin anishinabe, à Ottawa.

[Traduction]

    J'aimerais également remercier les membres du Comité ainsi que la présidente, d'avoir convoqué cette réunion spéciale. Comme toujours, ce que vous faites pour façonner le caractère de l'une des institutions les plus importantes et les plus durables du Canada est une contribution des plus louables.

[Français]

    J'aimerais aussi remercier la très honorable Kim Campbell de sa présence avec nous, ce matin, mais aussi du travail qu'elle a accompli lors du processus que je soulignerai plus tard.

[Traduction]

    La Cour suprême du Canada est un lieu qui me tient à cœur. C'est là où, il y a des années, j'ai commencé ma propre carrière juridique en tant qu'assistant judiciaire de feu l'honorable Peter deCarteret Cory, qui m'est devenu un mentor et un ami précieux. Son exemple est pour moi un rappel que nos grandes institutions publiques dépendent du dévouement et de l'intégrité de ceux qui y servent.
    C'est pour moi un privilège de prendre la parole aujourd'hui à l'appui de la nomination de l'honorable Mahmud Jamal qui, j'en suis convaincu, servira avec honneur les idéaux les plus élevés de la Cour suprême et contribuera à l'évolution du droit canadien avec sagesse, équité, humilité et une compréhension profonde de notre société.
    J'offre mes plus sincères félicitations au juge Jamal et j'attends avec impatience sa comparution devant les parlementaires cet après-midi.
    Je m'en voudrais de ne souligner, en cette occasion, la contribution et les services rendus par le prédécesseur du juge Jamal, l'honorable Rosie Silberman Abella, au Canada et au maintien de la primauté du droit. La juge Abella est une pionnière et une juriste d'une intelligence et d'un caractère remarquables et elle a laissé une marque indélébile dans le paysage juridique du Canada. Son départ sera une lourde perte pour notre plus haut tribunal, mais je ne doute pas qu'elle continuera d'apporter une contribution importante à notre vie publique dans d'autres rôles.

[Français]

     Le juge Jamal est la quatrième personne nommée à la Cour suprême du Canada par le premier ministre Trudeau dans le cadre du processus modernisé de sélection des juges que le gouvernement a mis en œuvre en 2016. Ce processus accorde la priorité au mérite de la personne, ainsi qu'aux valeurs de représentativité sociale et de transparence. Il exige que chaque personne souhaitant être nommée à notre plus haute cour présente sa candidature en répondant à un questionnaire rigoureux et accessible au public. Il exige que la personne démontre non seulement son excellence juridique et professionnelle, mais aussi ce en quoi ses expériences personnelles ont façonné ses points de vue et sa compréhension de la société canadienne dans toute sa diversité. Ce processus exige aussi que toutes les candidatures soient évaluées selon des critères uniformes, transparents et fondés sur le mérite en premier lieu par un comité consultatif indépendant, formé de personnes hautement qualifiées, qui reflètent les plus hauts standards des collectivités de tout le Canada.

[Traduction]

    Le Comité consultatif indépendant sur les nominations à la Cour suprême, ou CCI, est au cœur du processus de sélection. Je suis heureux d'être accompagné aujourd'hui de sa présidente, la très honorable Kim Campbell, qui a tellement contribué au succès du processus de nomination à la Cour suprême en gérant quatre nominations, dont celle d'aujourd'hui. Mme Campbell ne manque jamais d'informer et de soutenir ce comité avec l'intelligence et la franchise que nous lui connaissons. Nous lui devons beaucoup. J'ai hâte d'entendre ses observations aujourd'hui.
    Je suis également profondément reconnaissant aux personnes qui ont servi comme membres du CCI avec Mme Campbell. Ces membres sont nommés non seulement par le gouvernement, mais aussi par des organismes engagés à maintenir la primauté du droit et à servir les Canadiens. Il s'agit de l'Association du Barreau canadien, de la Fédération des ordres professionnels de juristes du Canada, du Conseil canadien de la magistrature et du Conseil des doyens et doyennes des facultés de droit du Canada. Les membres circonspects provenant de ces organismes et leur dévouement au sein du CCI font en sorte que le processus de sélection des juges reflète une aspiration cruciale de la Cour suprême elle-même, à savoir de devenir vraiment le miroir de notre société et un lieu où les Canadiens peuvent se reconnaître et voir reflétées leurs expériences de vie.
(1010)

[Français]

    Le processus de sélection actuel a été lancé par le premier ministre Trudeau le 19 février 2021 afin de pourvoir le poste qui deviendra bientôt vacant, lorsque la juge Abella prendra sa retraite.
    Comme l'énonce publiquement son mandat, le Comité consultatif indépendant sur la nomination des juges de la Cour suprême du Canada, soit le CCI a été chargé de recommander les candidatures de personnes du plus haut calibre qui sont effectivement bilingues et qui sont représentatives de la diversité canadienne.
     Conformément à la convention de représentation régionale, établie de longue date, le présent processus de sélection a été ouvert à toutes les personnes qualifiées de l'Ontario. Les personnes intéressées ont disposé de six semaines pour soumettre leur candidature, après quoi le CCI en a fait l'examen. Dans le cadre de cet examen, il a notamment consulté le juge en chef du Canada, des références et des parties intéressées, et il a personnellement rencontré certaines personnes candidates. Le CCI a effectué son travail en toute confidentialité, comme l'exige son mandat, et chacun de ses membres a signé une entente de confidentialité au préalable.
    Au terme du processus, le CCI a fourni au premier ministre un rapport comportant une liste de personnes présélectionnées, qui satisfaisaient toutes aux critères de mérite publiquement annoncés et qui se sont le mieux distinguées des autres. J'ai ensuite mené des consultations à propos des candidatures présélectionnées afin de formuler mes conseils au premier ministre.

[Traduction]

    De mon côté, j'ai consulté des juges en chef, y compris le juge en chef du Canada, le procureur général de l'Ontario, des collègues du Cabinet, des porte-parole de l'opposition en matière de justice, des membres de votre comité et du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, ainsi que des membres éminents du Barreau. Le premier ministre a ensuite arrêté son choix.
    J'insiste sur la confidentialité de ce processus, qui est essentielle pour attirer des candidats de valeur qui acceptent de parler de leur expérience de vie et de leurs compétences avec franchise et simplicité. Les députés, sénateurs et membres du Barreau participant au processus devaient tous signer un engagement de non-divulgation.
     Toutes les personnes ayant participé au processus, dont moi-même, le premier ministre et les membres du CCI, comprennent l'importance de la confidentialité pour garantir aux candidats le traitement équitable auquel ils ont droit et l'examen rigoureux qu'exige une nomination à la Cour suprême.
    J'invite maintenant la très honorable Kim Campbell à donner son point de vue sur le processus.
    Merci beaucoup, monsieur le ministre.
    Madame Campbell, vous avez la parole.
    Voilà à peine un an que j'utilise Zoom, et j'oublie toujours d'activer mon micro.
    Je tiens d'abord à vous dire, madame la présidente et membres du Comité, à quel point je suis heureuse d'être avec vous.
    Madame la présidente, nous nous sommes déjà rencontrées. Je vous félicite d'avoir été nommée à la présidence du Comité. C'est un grand honneur. Je suis sûre que les défis ne manqueront pas. C'est l'un des comités les plus intéressants dans lequel siéger, comme vous en conviendrez tous certainement.
    Sans trop entrer dans les détails, je serai heureuse de répondre à vos questions. Si vous me le permettez, je vais brosser un tableau général du processus.
    Il y a quelques années, dans le cadre des célébrations du 150e anniversaire du Canada, j'ai participé à une tribune à la Cour suprême du Canada sur la relation entre le gouvernement et les tribunaux. Mon collègue à cette tribune était l'honorable Bob Rae. Bob Rae et moi-même avons eu bien des désaccords au fil des ans. Il était premier ministre de l'Ontario lorsque j'étais première ministre du Canada, et je crois avoir déjà qualifié son attitude, quand nous nous rencontrions, comme hargneuse, mais nous nous sommes beaucoup radoucis depuis.
    À cette tribune de la Cour suprême, il a dit, entre autres, qu'il préférait la vieille approche de la « tape sur l'épaule » pour nommer les juges à la Cour suprême du Canada. C'est un peu le mythe de celui qui, devenu éminent juriste dans sa province, membre distingué du Barreau, reçoit un jour, du ministre de la Justice ou d'un juge, une petite tape sur l'épaule l'invitant à devenir juge à la Cour suprême du Canada.
    Cependant, comme beaucoup d'entre vous le savent, ce ne sont pas toutes les épaules qui attirent les petites tapes, et beaucoup de gens qui pourraient apporter une contribution extraordinaire à l'élaboration du droit dans notre pays ne sont pas nécessairement sur l'écran radar de ceux qui, traditionnellement, distribuent les tapes sur l'épaule.
    C'était un autre point de désaccord avec l'honorable Bob Rae, puisque je crois que, pour qu'un processus fonctionne bien, il doit bien fonctionner sur toute la ligne. Le premier mandat qu'a reçu le Comité consultatif indépendant était de tâcher d'accroitre le nombre de candidats, et c'est un peu plus difficile qu'il n'y paraît parce que, très souvent, les gens qui se sont distingués au Barreau, les juristes, ont très souvent le réflexe, très canadien, d'hésiter à se mettre de l'avant.
    Dès le tout premier processus — il y en a eu quatre —, nous avons travaillé très fort pour amener les gens, connaissant la valeur exceptionnelle d'un collègue, à l'inciter à poser sa candidature. Selon le système que j'ai mis au point, lorsque nous recevons une recommandation... Nous en recevons souvent de la part de juges ou de membres du Barreau. Une recommandation a été faite par un étudiant en droit à McGill. Quiconque s'intéresse à la Cour peut communiquer avec nous. Ce que nous faisons alors, c'est d'écrire à la personne pressentie pour lui dire: « Votre nom nous a été communiqué comme candidat exceptionnel pour le siège vacant à la Cour suprême du Canada. Veuillez examiner les documents ci‑joints et, si cela vous intéresse, nous vous encourageons vivement à présenter votre candidature. » Cela signifie, c'est que bien des gens qui, autrement, ne voudraient pas donner l'impression de se mettre de l'avant peuvent se dire: « Eh bien, puisqu'on m'invite à présenter ma candidature… », ce qui est effectivement le cas.
     C'est l'un des défis, mais nous avons aussi une très longue liste d'organismes d'avocats et de juristes partout au pays avec lesquels nous communiquons chaque fois qu'il y a une vacance. Nous leur demandons de la faire connaître à leurs membres et d'identifier ceux de leurs membres qui seraient de bons candidats à la Cour suprême du Canada parce que, encore une fois, il y a très souvent des groupes de personnes qui ne voient pas forcément quelle serait leur place dans la distribution actuelle des rôles et qui ne... [Difficultés techniques]. Dans l'optique du premier ministre, plus la composition de la Cour est diversifiée, mieux c'est pour le Canada. Les personnes appartenant à des groupes sous-représentés sont certainement encouragées à envisager de poser leur candidature.
    Notre but est d'accroître autant que possible le nombre de candidatures. Toutefois, pour beaucoup de gens — c'est peut-être moins le cas en Ontario —, siéger à la Cour suprême du Canada est une lourde décision du fait que cela suppose, comme vous le savez, un déménagement dans la région de la capitale nationale. Cela entraîne un rétrécissement du cercle social de vie du fait qu'il faut préserver son indépendance. Il est donc très important que les juges puissent créer une communauté pour offrir du soutien. Ce ne sont pas tous les juges qui, à leur arrivée, se plaisent dans leur nouvelle situation. Pour beaucoup, ce serait un grand sacrifice personnel que de se déraciner, et ils ont donc des réserves à ce sujet.
(1015)
    Je crois avoir mentionné la dernière fois que je vous ai parlé qu'il y a un nombre considérable de juges, dont un ancien juge en chef, de la Cour suprême du Canada, qui sont maintenant à la retraite. Il serait très utile qu'ils tiennent des tables rondes partout au pays avec des membres du Barreau et de la magistrature pour parler de la vie à la Cour, à la fois pour encourager les gens à poser leur candidature et pour créer des attentes réalistes, puisqu'il s'agit d'une nomination judiciaire d'un genre unique.
    Pour ceux qui viennent de l'Ontario et qui ne sont pas loin d'Ottawa ou de la région de la capitale nationale, ou même de Montréal, c'est peut-être moins difficile. Lorsque nous avions à faire une nomination à un siège traditionnellement dévolu aux provinces de l'Ouest, il y avait certainement des candidats de la Colombie-Britannique, par exemple, qui étaient exceptionnels, bilingues, tout ce qu'il fallait. Nous avions l'impression qu'ils espéraient ne pas être nommés à cause des difficultés que cela entraînerait pour eux.
    Bien sûr, de nos jours, les professionnels ont tendance à avoir des conjoints qui sont également des professionnels, qu'il s'agisse d'une épouse et de son mari ou d'un mari et de son épouse. Je pense qu'il faut être conscient de l'ampleur de l'engagement que représente une nomination à la Cour suprême du Canada.
    L'une des premières choses que fait le Comité, c'est de rencontrer le — auparavant, la — juge en chef pour discuter de toutes ces choses. Nous bénéficiions de ses réflexions sur les besoins de la Cour, mais aussi sur certains aspects du travail d'un juge de la Cour suprême du Canada qui pourraient nous aider à identifier les candidats susceptibles d'y contribuer le plus valablement.
    L'autre chose que je dirais — certains d'entre vous m'ont déjà entendu le dire —, c'est que je suis très flattée d'avoir été désignée à la présidence du Comité, mais qu'il ne faut pas oublier c'est vraiment un comité de sept personnes. Mon rôle, en tant que présidente, est de m'assurer que chaque membre du Comité puisse y aller de sa contribution. Comme vous le savez, nous avons quatre représentants d'organismes juridiques, mais il y a toujours, comme le ministre l'a mentionné, deux membres qui ne sont pas avocats.
    Je ne saurais trop insister sur l'excellence de leur contribution. Dans les quatre processus auxquels j'ai participé, les non-juristes se sont montrés incroyablement perspicaces, très réfléchis, et ils soulevaient souvent des points de vue très intéressants qui enrichissaient nos discussions. Je pense qu'il y aurait unanimité sur cette formule qui garantit que les discussions ne se tiennent pas exclusivement entre avocats, mais qu'elles incluent des gens étrangers à la profession juridique, qui ont un solide engagement civique, qui comprennent très bien ce qui est en jeu et à quel point c'est important.
    Fonctionnant en comité, nous commençons nos travaux lorsque toutes les demandes ont été reçues et que les documents ont été distribués. Cette année, nous avons dû travailler en mode virtuel, et les documents ont été transmis sur nos tablettes sécurisées. Nous n'avions pas de documents imprimés comme auparavant.
    Ce qui m'a manqué, je dois dire, ce sont les contacts personnels que nous avions lorsque nous travaillions à Ottawa, c'est‑à‑dire la possibilité de prendre des repas ensemble, de nous gaver de petits fours et de bavarder. Cela nous a manqué, mais les membres ont tous été incroyablement coopératifs et portés à faire des efforts pour créer un esprit d'équipe.
    L'une des choses qui m'a toujours parue importante, c'est d'éviter toute apparence de pensée ou de pression collective ou, à l'opposé, l'influence dominante d'une personne sur les autres. Heureusement, ce sont tous des gens assez indépendants, et il n'y a pas eu de difficultés de ce côté. J'essaie de m'assurer que chacun examine indépendamment les documents. Par la suite, nous nous réunissons pour un premier tour de table, où les candidatures suscitent des « oui », des « non » ou des « peut-être » qui permettent de voir si un consensus se dégage ou non.
    Tout le processus est structuré en vue d'amener sept personnes à travaillent ensemble pour en arriver au consensus nécessaire à l'établissement d'une liste restreinte de candidats, mais aussi de façon à ce que chacun se sente libre d'exprimer sans réserve ses opinions et ses attitudes.
    Je vais terminer, puisque je vois que mon temps de parole achève — mais je serai disponible pour répondre à vos questions —, en disant qu'il s'agit de candidats de grande valeur. Non seulement le travail à la Cour suprême du Canada est exigeant, mais il faut aussi mettre un effort pour préparer son acte de candidature, puisqu'il y a un questionnaire long et difficile à remplir, des discussions sur toutes sortes de questions et des références à fournir.
    Les quatre fois où j'ai participé au processus, j'ai toujours été encouragée de constater la valeur des candidats. Certains d'entre eux étaient peut-être à des postes quelque peu subalternes, mais ils étaient pleins de promesses. Il n'y a pas eu une seule demande qui nous a paru fantaisiste. Au contraire, ce que nous tâchons de faire, c'est d'établir des comparaisons avec un groupe de pairs et les juges éminents qui siègent actuellement à la Cour.
(1020)
    Nous disposons d'un grand bassin de talents, de talents diversifiés et, fait intéressant, de talents bilingues parmi les membres de la profession juridique au pays.
    Je vais m'arrêter ici, car je pense que vous voudrez peut-être poser des questions.
    Je veux simplement dire que, à mes yeux — c'est la quatrième fois que je vous en parle —, le processus s'est bien déroulé. Je l'ai trouvé inspirant, mais difficile aussi pour les membres du Comité, qui ont eu à travailler très fort pour atteindre notre objectif d'établir une courte liste de trois à cinq candidats qui ferait perdre du sommeil au premier ministre quand viendrait le temps de choisir, parmi ces candidats exceptionnels, celui à nommer à la Cour suprême. Cette année, je pense que nous y sommes parvenus.
    Je m'arrête. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup.
    Nous allons entreprendre notre première série de questions.
    Madame la présidente, je pensais que je devais revenir pour présenter le candidat.
    Ai‑je le consentement du Comité pour accorder à M. Lametti quelques minutes pour présenter le candidat?
    Des députés: D'accord.
    La présidente: Allez‑y, monsieur Lametti.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Merci beaucoup, madame Campbell.
    De ce groupe exceptionnel décrit par Mme Campbell, le juge Jamal est celui qui a émergé comme la personne la plus qualifiée pour siéger au plus haut tribunal de notre système de justice. Je suis absolument convaincu que le juge Jamal, compte tenu de ses expériences vécues et de son adhésion manifeste au principe de la primauté du droit, servira le Canada et le peuple canadien avec la même énergie et le même engagement que son prédécesseur à la Cour.
    Le juge Jamal est la première personne de couleur à être nommée à notre plus haut tribunal et la première personne de foi bahá'íe. Son histoire n'est pas seulement une histoire d'excellence dans la profession juridique, dans l'érudition et dans le service bénévole à la communauté, mais aussi une histoire d'exploration du rôle que jouent les différences dans notre société, tirant souvent parti de son rôle de conseiller et de militant pour aplanir les inégalités, qui tiennent dans bien des cas à nos différences.
(1025)

[Français]

     Le juge Jamal a participé comme avocat à des affaires constitutionnelles parmi les plus importantes des dernières décennies, alors la Cour suprême ne lui est évidemment pas étrangère. Il a régulièrement mis ses compétences et son dévouement au service de personnes et d'organisations aux moyens modestes, de façon bénévole. Il a étudié à fond les lois de notre pays, a enseigné le droit et a rédigé de nombreuses publications à cet égard, manifestant par le fait même une grande envergure intellectuelle et un engagement à bien accompagner l'évolution des institutions et des traditions juridiques au Canada. Au cours de sa carrière, il a saisi avec enthousiasme les occasions de travailler à la fois en français et en anglais, y compris comme juge d'appel. À ce titre, il a servi admirablement la Cour d'appel de l'Ontario en tant que juge équitable et réfléchi ayant un sens de l'analyse très aiguisé.
    Je suis fier de sa nomination, et j'ai bon espoir que ce sera aussi le cas de toute la population canadienne.

[Traduction]

    En terminant, madame la présidente, j'aimerais, sur une note un peu plus légère, rappeler une analogie de hockey qui a déjà été utilisée pour illustrer la grande réputation du juge Jamal. Je trouve que cette analogie tombe à pic en ce moment où l'équipe de ma ville natale, les Canadiens de Montréal, mène une chaude lutte pour accéder à la finale de la Coupe Stanley. C'est la réaction d'une avocate apprenant que le juge Jamal, alors membre du Barreau, était l'avocat de la partie adverse. On a dit que cette avocate venait de découvrir ce que c'est que de se présenter à une partie de hockey improvisée et de se trouver en face de Wayne Gretzky pour la mise au jeu. Madame la présidente, je crois que cette analogie en dit long, de façon typiquement canadienne, sur les compétences juridiques exceptionnelles du juge Jamal.
    Je remercie la très honorable Kim Campbell et ses collègues du CCI.
    Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup, monsieur le ministre.
    C'est une excellente analogie. Pour peu que vous connaissiez les membres du Comité, vous savez que nous sommes passionnés par le hockey et que nous applaudissons tous les succès du Canadien. Sauf moi, partisane acharnée des Leafs qui ne s'est pas encore remise de leur défaite.
    Nous allons entreprendre notre première série de questions en commençant avec M. Cooper.
    Monsieur Cooper, vous avez six minutes. Allez‑y, s'il vous plaît.
    Merci, madame la présidente.
    Merci, monsieur le ministre et madame Campbell.
    J'aimerais tout d'abord profiter de l'occasion, madame Campbell, pour souligner votre travail à la présidence du comité, ainsi que celui de votre comité, qui a mené à la nomination du juge Jamal, personne hautement distinguée et éminemment qualifiée pour siéger à la Cour suprême. J'ai hâte de pouvoir lui poser des questions plus tard cet après-midi.
    Monsieur le ministre Lametti, j'ai des questions pour vous. Dans un reportage de Radio-Canada du 10 juin, des sources fédérales ont dit que la base de données privée du Parti libéral, la Liberalist, qui suit les membres, les sympathisants, les bénévoles et les donateurs du Parti libéral, n'était plus utilisée pour filtrer les candidats à la magistrature. À quelle date cette pratique a‑t‑elle cessé?
    Madame la présidente, j'invoque le Règlement. Je me demande si vous pourriez vous prononcer sur la pertinence des questions de M. Cooper.
    Il n'est pas question ici du processus général de nomination. Nous parlons du processus précis qui a mené à la nomination d'une personne de la stature du juge Jamal, et cela concerne le Comité consultatif indépendant et le rôle que Mme Campbell y a joué.
    Pourriez-vous décider si ces questions sont pertinentes dans la discussion sur ce processus?
    Merci, monsieur Virani.
(1030)
    Madame la présidente, au sujet du rappel au Règlement, comme vous l'avez fait remarquer au début de la réunion, les membres du Comité bénéficient d'une assez grande latitude pour poser des questions aux témoins. Tenant compte vos remarques, je dirais que la question est pertinente pour le processus de nomination des juges en général.
    Je dirais que, à la lumière de ces allégations fondées d'ingérence politique de la part du Cabinet du premier ministre, y compris le recours à la Liberalist, la perception d'une atteinte à l'intégrité du processus de nomination est bien réelle. Il est important...
    J'invoque le Règlement, madame la présidente. Je veux faire écho à l'objection de M. Virani.
    Monsieur Cooper, avec tout le respect que je vous dois, il est inexact de dire que ces allégations sont fondées. Ce ne sont, à mon avis, que des allégations, des allégations sans fondement. Elles n'ont pas leur place dans la discussion d'aujourd'hui.
    M. Cooper a commencé ses questions en reconnaissant la grande réputation du juge Jamal qui vient d'être nommé, et je pense que ces propos l'amoindrissent. Nous devrions aller de l'avant et nous concentrer sur les questions à l'étude.
    Merci, monsieur Maloney.
    S'agit‑il du même rappel au Règlement, monsieur Moore?
    Oui, madame la présidente. Je voudrais que nous allions de l'avant.
    Au sujet de ce rappel au Règlement, M. Cooper a à peine pu poser sa question. Le ministre Lametti est un politique chevronné. Il sait comment s'y prendre. Il est habitué aux questions difficiles. Laissons M. Cooper poser ses questions. Il ne dispose que de cinq minutes, après quoi les autres membres pourront poser leurs questions. Ils peuvent demander ce qu'il leur plaît au ministre.
    J'espère que nous pourrons faire avancer nos travaux.
    Moi aussi. Merci, monsieur Moore.
    Monsieur le greffier, je vois que vous avez levé la main. Est‑ce pour un rappel au Règlement de M. Fortin?
    Allez‑y, monsieur Fortin, brièvement, sur le même rappel au Règlement.

[Français]

     Je vous remercie, madame la présidente.
    J'interviens exactement sur le même rappel au Règlement, madame la présidente.
    D'abord, je ferai remarquer à mes collègues que la compétence du juge Jamal ne fait aucun doute à mes yeux. Je ne conteste absolument pas sa compétence. Nous le rencontrerons plus tard et nous pourrons lui poser de nombreuses questions sur bon nombre de sujets. C'est parfait. Je remercie le Comité et le ministre de nous donner cette occasion.
    Toutefois, présentement, nous rencontrons le ministre de la Justice et la présidente du Comité consultatif indépendant sur la nomination des juges de la Cour suprême du Canada, soit le CCI. Le sujet de la rencontre est le processus de nomination. C'est ce dont nous ont parlé M. Lametti et Mme Campbell. Nous devons poser des questions sur le processus de nomination.
    Nous pouvons aimer ou ne pas aimer la question de M. Cooper. Je ne suis pas membre du Parti conservateur, je vous le rappelle, mais nous parlons du processus de nomination. S'il y en a parmi nous qui ne veulent pas en entendre parler, ils peuvent changer de comité. Pour l'instant, nous parlons du processus de nomination employé par le CCI. Je pense que c'est pertinent et j'ai, moi aussi, des questions à poser sur ce processus. Si nos questions ne portent pas sur cela, je ne sais pas ce que nous faisons ici.

[Traduction]

    Excellent. Merci beaucoup, monsieur Fortin.
    Mesdames et messieurs, je vous prie de limiter vos questions au processus de nomination à la Cour suprême. Nous ne parlons pas du processus général de nomination pour l'ensemble de la magistrature. Nous sommes ici expressément pour parler de la nomination à la Cour suprême.
    Allez‑y, monsieur Cooper. Je vous demanderais de reformuler votre question en fonction du sujet dont nous discutons aujourd'hui.
    Il vous reste deux minutes. Pardon, vous avez plutôt écoulé deux minutes de votre temps.
    J'ai écoulé deux minutes.
    Eh bien, j'inviterais le ministre à répondre à la question que je lui ai posée. Je pense que les Canadiens méritent une réponse.
    Allez‑y, monsieur le ministre.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Merci de votre question, monsieur Cooper. C'est toujours un plaisir de vous revoir.
    J'ai répondu publiquement à cette question à maintes reprises, madame la présidente. Dans les nominations ou promotions ordinaires à la magistrature, je n'utilise pas la Liberalist pour évaluer les candidats ou proposer des candidatures. Je ne peux rien dire sur la source ou la nature du reportage dont il est question.
     Je peux dire qu'en ce qui concerne le processus de nomination à la Cour suprême, le CCI et les consultations auprès des personnes que j'ai mentionnées pour recueillir leurs avis sur les candidats présélectionnés, la Liberalist n'a aucunement été utilisée. [Difficultés techniques] que le processus ordinaire de nomination des juges et ce processus sont de la plus haute qualité. Ils sont transparents et répondent aux besoins des Canadiens.
    Si vous vous penchez sur la nomination recommandée aujourd'hui et sur celles que j'ai faites depuis que je suis devenu ministre, vous constaterez l'exceptionnelle valeur des candidats retenus. Ce sont des gens de toutes les allégeances politiques et de tous les horizons, représentant un niveau de diversité jusqu'ici inconnu dans l'histoire du Canada.
(1035)
    Monsieur le ministre, êtes-vous en train de nier qu'on a eu recours à la Liberalist?
    Comme je l'ai dit publiquement à plusieurs reprises, monsieur Cooper, une fois que j'ai fait ma recommandation, nous effectuons un certain nombre d'enquêtes de diligence raisonnable, si vous voulez. L'une concerne les dons aux partis politiques. Une autre porte sur tous les genres de médias dans lesquels une personne peut avoir été engagée, simplement pour avoir une idée, vraiment, de comment gérer l'information. Cependant, j'ai dit...
    Monsieur le ministre, je n'ai pas beaucoup de temps et je ne veux pas vous désobliger. J'ai beaucoup de respect pour vous, mais j'ai posé une question très simple sur...
    Je veux être respectueux et achever la réponse que je vous dois, monsieur Cooper, qui est...
    Monsieur le ministre, je vous demande si vous niez, oui ou non, que la Liberalist a été utilisée.
    Monsieur Cooper, permettez-moi de répondre à la question. Je vous ai dit que je n'utilise pas la Liberalist dans l'évaluation…
    Vous n'avez pas...
    … ou l'identification des candidats.
    Il y a un rappel au Règlement, madame la présidente.
    Madame la présidente, j'invoque le Règlement. Le témoin pourrait‑il répondre à la question? Nous ne sommes pas ici pour harceler les témoins, surtout quand il s'agit du ministre de la Justice. Le ministre pourrait‑il répondre à la question de M. Cooper?
    Merci, madame la présidente.
    Merci, monsieur Virani. J'étais sur le point d'intervenir moi-même.
    Monsieur Cooper, j'ai arrêté le chronomètre pour que nous puissions avoir cet échange. Je pense que la façon dont le Comité a pu fonctionner, c'est de laisser un membre poser une question et laisser le témoin y répondre. Poursuivez ce dialogue respectueux, si vous êtes d'accord.
    S'il vous plaît, monsieur le ministre Lametti, allez‑y de votre réponse.
    Je n'ai qu'une chose à ajouter, madame la présidente. Jamais, d'aucune façon, une candidature que j'ai recommandée n'a été rejetée. Le processus est excellent. Il est fondé sur la qualité. Il est fondé sur les recommandations des comités indépendants de nomination des juges dans les différentes provinces canadiennes. Certaines provinces en ont plus d'un. Je m'attarde à la qualité des candidats. Je regarde les besoins des tribunaux. Je consulte les juges en chef à ce sujet. Nous consultons divers membres de la profession juridique qui sont bien placés pour formuler une opinion.
    Je pense que nous avons réuni un ensemble exceptionnel de candidats hautement qualifiés et diversifiés....
    Monsieur le ministre, avec tout le respect que je vous dois, je vous ai donné une certaine latitude pour répondre à une question très simple, à savoir si la Liberalist a été utilisée, oui ou non, pour filtrer les nominations à la magistrature, pas nécessairement seulement par vous.
    Je peux [Difficultés techniques] mon rôle dans le processus. Mon rôle dans le processus, comme je l'ai souligné, monsieur Cooper, est le rôle principal. Il s'agit de prendre les candidatures recommandées par le comité de nomination des juges et de décider, parmi celles qui sont hautement recommandées et occasionnellement recommandées, lesquelles seront retenues.
    Il vous reste 10 secondes, monsieur Cooper.
    Eh bien, je suppose que mon temps est écoulé. Malheureusement, je n'ai pas obtenu de réponse du ministre.
    Merci, monsieur Cooper.
    J'espère que le prochain tour se déroulera un peu mieux.
    Madame Brière, vous avez six minutes. Allez‑y, s'il vous plaît.
    Merci, madame la présidente. Je vais partager mon temps avec mon collègue Randeep Sarai.
    Bonjour à nos témoins.

[Français]

     En tant que francophone québécoise et défenderesse de la langue française, j'ai été ravie de constater que le candidat choisi était bilingue.
    Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur l'importance du critère de bilinguisme dans le processus de sélection?
    Je vous remercie de votre question.
    Grâce à mon expérience en tant qu'auxiliaire juridique à la Cour suprême, je peux vous dire que j'ai réalisé l'importance du bilinguisme tant dans la rédaction des mémoires que dans les plaidoiries. Chaque mot et chaque phrase sont pesés. Il y a parfois des phrases et des concepts idiomatiques, qui sont très difficiles à traduire.
    Il est donc très important que le juge soit en mesure de comprendre la langue de la plaidoirie et celle du mémoire, surtout quand la durée des plaidoiries ou le nombre de pages des mémoires sont limités. Il est primordial que le sens des arguments soit transmis. Selon moi, c'est crucial.
    Mme Campbell aimerait peut-être ajouter des commentaires.
(1040)
    Je vais ajouter quelques mots.
    Au cours des discussions avec le juge en chef, il a souligné l'importance du bilinguisme à la Cour suprême du Canada.

[Traduction]

    L'une des choses qui sont importantes également et que bien des Canadiens ne comprennent peut-être pas, c'est que la charge de travail de la Cour suprême du Canada est plus lourde que celle de la Cour suprême des États-Unis, du fait qu'elle est saisie d'un plus grand nombre d'affaires. Étant donné que les plaidoyers se font dans les deux langues et que les avocats comparaissent dans les deux langues, plus les juges eux-mêmes maîtriseront les deux langues, plus leur emploi du temps sera efficace. Je pense qu'au fil des ans, la Cour [Difficultés techniques] de traduction.
    Même les juges... Par exemple, l'ancienne juge en chef Beverly McLachlin a dit qu'elle continuait de perfectionner son français tout le temps qu'elle était à la Cour. Plus la Cour pourra bien fonctionner dans les deux langues, plus il lui sera facile de gérer sa charge de travail très exigeante.
Au‑delà de nos préoccupations concernant sa composition constitutionnelle bilingue, je pense que, vu la nature de la Cour, tout ce qui permet aux juges de communiquer entre eux, mais aussi avec les avocats et les participants qui plaident devant eux, aisément, pleinement et clairement, revêt une très grande valeur. Pour notre comité, c'était l'un des points de notre mandat qui n'était pas négociable. Je pense que nous en avons tous bien compris l'importance pratique.
    Merci à vous deux de votre temps et de vos compétences.
    Monsieur Sarai, vous avez la parole.
    Je vous remercie d'être parmi nous aujourd'hui, monsieur le ministre Lametti et madame Campbell. Il s'agit d'une nomination historique pour le pays. Mme Campbell, qui a été la première femme première ministre du pays, sait ce qu'est l'histoire. La nomination à la Cour suprême du Canada de la première personne de couleur est un événement historique.
    Je comprends que c'est au candidat de se déclarer membre d'une minorité et qu'au cours du processus ayant mené à la nomination du dernier juge élevé à la Cour suprême, aucun candidat ne l'avait fait. Outre le candidat que nous avons ici aujourd'hui, le juge Jamal, y a‑t‑il beaucoup de candidats qui se sont déclarés membres d'une minorité?
    Ma question s'adresse à la très honorable Kim Campbell.
    Le groupe comptait 18 candidats, parmi lesquels sept se sont déclarés membres d'une minorité visible, trois d'une minorité ethnique, culturelle ou autre. Cinq candidats se sont identifiés comme autochtones, un comme LGBTQ et aucun comme personne handicapée.
    Pour ce qui est de l'importance d'accroître la représentativité de la Cour, je me permets de rappeler qu'en tant que première femme à exercer la charge de ministre de la Justice et procureure générale du Canada, j'ai nommé Rosalie Abella à la Cour d'appel de l'Ontario en 1992. À l'époque, j'étais très consciente de l'importance de donner aux femmes plus de voix. Nous avons été très satisfaits de la diversité des candidatures que nous avons eu à examiner.
    Merci, madame Campbell. Y a‑t‑il un critère qui permet d'élargir le champ des cheminements et des points de vue à la Cour suprême et dans quelle mesure les antécédents des juges actuels entrent-ils en ligne de compte dans l'examen des candidatures?
(1045)
     Eh bien, je dirais que la décision finale appartient au premier ministre. Selon le mandat reçu du premier ministre, l'accroissement de la diversité des expériences vécues et des points de vue des juges du plus haut tribunal du pays revêt une grande importance. Le Comité a essayé de donner satisfaction au premier ministre.
    Il n'y a pas eu de compromis sur la qualité. L'idée selon laquelle si vous optez pour la diversité, vous perdez en qualité est une véritable farce. Dans la communauté juridique d'aujourd'hui au Canada, nous avons des juristes et des avocats exceptionnels de tous les milieux et de toutes les tendances. Ce n'est pas du tout un problème. Nous savons certainement que le premier ministre voulait choisir et nous sommes très heureux d'avoir pu présenter un éventail de candidatures exceptionnelles qui lui permettait de faire ce choix et qui, nous le souhaitons, l'a tenu éveillé la nuit devant le choix à faire.
    La diversité des expériences fait partie du mandat pour tout le processus. Lorsque nous sollicitons des candidatures, nous insistons sur ce point également, en encourageant les gens qui n'appartiennent peut-être pas à un groupe représenté à la Cour à se considérer comme des candidats d'intérêt s'ils veulent être pris en considération.
    Merci, madame la présidente.
    Merci, monsieur Sarai. Votre temps est écoulé.
    Je donne maintenant la parole à M. Fortin pour six minutes. Allez‑y, je vous prie.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Je tiens d'abord à vous remercier, madame Campbell et monsieur Lametti, d'être ici avec nous ce matin pour aborder ces importantes questions.
    Vous êtes tous deux d'éminents juristes, bien reconnus comme tels, et je suis convaincu que votre apport au système judiciaire est d'une importance majeure. Cela dit, j'aurais des questions à poser à Mme Campbell, mais je voudrais commencer par M. Lametti.
    S'il vous plaît, monsieur le ministre, je ne veux pas argumenter avec vous. Je veux simplement être certain d'avoir bien compris. Je vais reprendre la question de mon collègue M. Cooper concernant l'utilisation de la « libéraliste » ou de toute autre information partisane.
    J'ai cru comprendre, de votre réponse, mais je me suis peut-être trompé, que vous n'aviez, dans le cas du juge Jamal, fait aucune vérification quant à ses allégeances politiques. Vous n'avez pas consulté la « libéraliste » ni quoi que ce soit d'autre, d'aucune façon. Ai-je bien compris ou pas, monsieur le ministre?
    Si vous préférez ne pas répondre, c'est votre droit le plus strict. Dites-moi simplement que vous ne répondrez pas, mais, de grâce, s'il vous plaît, ne me faites pas perdre ces quelques précieuses minutes que nous avons pour vous interroger tous les deux.
    Si j'ai bien compris votre réponse, vous n'avez pas utilisé la « libéraliste » ni aucun autre processus pour vérifier les allégeances politiques du juge Jamal.
    Pour la nomination à la Cour suprême, la réponse courte est « non ».
    Merci, monsieur le ministre.
    À l'époque, quand je l'ai nommé à la Cour d'appel de l'Ontario, au début de mon mandat, j'ai employé le processus comme tel. J'ai suivi ses mérites et ses qualités, qui sont bien évidentes. Après que je sois arrivé à la conclusion que je devrais le nommer à la Cour d'appel de l'Ontario, en provenance directe de la pratique du droit, nous avons utilisé, comme je viens de le décrire à notre collègue M. Cooper plusieurs outils pour mieux connaître le candidat.
    Il y avait probablement d'autres candidats sur la liste courte. Avez-vous vérifié les allégeances politiques des autres candidats ou pas, monsieur le ministre?
    Sauf le respect que je vous dois, vous êtes en train de mélanger deux choses.
    Mon rôle dans le processus de nomination à la Cour suprême était de prendre la liste des personnes présélectionnées ou la liste courte, si vous voulez...
    Je veux juste savoir...
    ... et de faire des consultations. Comme je l'ai dit, nous n'avons pas employé quoi que ce soit pour le processus.
    Vous ne l'avez fait pour aucun des candidats?
    Exactement.
    Je vous remercie, monsieur le ministre.
    Est-ce possible de savoir rapidement depuis quelle date vous n'utilisez plus la « libéraliste »?
    Comme je l'ai dit à notre collègue M. Cooper, c'était une annonce dans un journal...
    Vous ne confirmez donc pas cette nouvelle.
    ... dont je ne connais même pas la source.
    Vous ne le confirmez pas. Vous pouvez donc continuer à l'utiliser, si je comprends bien. Est-ce exact?
    Je n'ai pas d'opinion sur la source de l'article.
    Oublions la source. Confirmez-vous cette nouvelle ou non?
     Il n'y a pas de nouvelle. J'ai décrit le processus.
(1050)
    La nouvelle, c'est que vous n'utilisez plus la « libéraliste » depuis récemment. Je comprends que ce n'est pas [inaudible].
    Je vous ai décrit le processus, ainsi qu'à M. Cooper.
    Je ne confirme pas la nouvelle, parce que cela ne vient pas de mon bureau.
    D'accord. Je vous remercie, monsieur le ministre.
    Madame Campbell, si vous le permettez, j'aurais une ou deux questions à vous poser.
    Je pense que la nomination du juge Jamal, de ce que j'en sais sans le connaître personnellement, est excellente. Il me semble être un juriste compétent ayant une expérience humaine diversifiée qui pourra sûrement apporter d'importants points de vue à la Cour suprême.
    Cela dit, dans le processus de sélection, pouvez-vous me confirmer si vous avez, à un quelconque moment, vérifié les allégeances politiques d'un ou de plusieurs candidats?

[Traduction]

    Je peux dire que non, absolument pas. Nous avons accès à celles de leurs décisions judiciaires que les candidats jugent les plus importantes ou, dans le cas de candidats qui ne sont pas de la magistrature, aux articles ou écrits qui nous renseignent sur leur philosophie. Certaines des questions du questionnaire leur donnent la possibilité d'exposer un peu leur pensée et leur vision du rôle du juge, mais nous ne prêtons aucun intérêt à leurs allégeances politiques.
    En fait, je pense que c'est un peu un jeu de dupes parce que l'idée que la façon dont quelqu'un vote dans sa vie civile se reflétera sur ses décisions judiciaires n'est pas très bien établie empiriquement, et nous ne nous intéressons donc pas du tout à cela.

[Français]

    Je vous remercie, madame Campbell.
    Je comprends, par votre témoignage, que ce ne serait pas une bonne idée que quelqu'un soit nommé en fonction de ses idées politiques ou de ses orientations politiques. Ai-je bien compris?

[Traduction]

    Je crois que [Difficultés techniques] dans un domaine extrême de la pensée judiciaire, vous ne voudriez peut-être pas les nommer, mais je pense que la plus grande préoccupation que j'avais quand j'étais ministre de la Justice... Comme je l'ai dit, j'étais ministre dans le gouvernement de M. Mulroney, mais je ne sais pas quelle était l'allégeance politique de Rosalie Abella. J'ai nommé beaucoup de gens intéressants sans avoir la moindre idée de leur allégeance politique, ni même s'ils en avaient une.
    Les éléments importants sont la compétence et le caractère, la volonté de faire le travail et le tempérament approprié. À cet égard, le juge Jamal est une étoile. Il est reconnu par les gens de droite, de gauche et du centre comme une sommité de la pensée juridique, mais aussi pour ses qualités personnelles de grande collégialité. Je crois comprendre qu'à la Cour d'appel de l'Ontario, où les juges siègent en comités, les autres juges étaient ravis de siéger avec lui.
     Les choses de ce genre, cette capacité de travailler avec les autres et de trouver un consensus, sont vraiment importantes pour le bon fonctionnement de la Cour. C'est [Difficultés techniques].

[Français]

    On ne vous entend plus, madame Campbell. On ne peut pas entendre votre témoignage.

[Traduction]

    Merci.
    Je pense que c'est important. Leur façon dont ils votent n'est pas pertinente.
    Merci. Je suis désolée de vous interrompre, monsieur Fortin.
    Votre temps de parole est écoulé.

[Français]

    Je le sais, mais je voudrais faire un rappel au Règlement, madame la présidente.

[Traduction]

    Oui.

[Français]

    Depuis le début, il arrive souvent que le son coupe lorsque les témoins répondent. Leurs réponses sont vraiment intéressantes et importantes, et je suis content d'être ici aujourd'hui pour parler avec eux.
    Y aurait-il moyen de s'assurer que les témoins ont les équipements nécessaires avant le début de la réunion et de faire des tests de son?
    J'ai perdu une partie des réponses de Mme Campbell, et la même chose est survenue dans le cas de M. Lametti. Nous sommes tous d'accord ici pour dire qu'il est important d'entendre ces réponses.
    J'aimerais qu'on puisse valider cela tout de suite. Peut-être quelqu'un des TI pourrait-il vérifier cela avec eux. Nous devons nous assurer d'avoir des communications décentes, madame la présidente.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur Fortin. Je vais consulter la greffière et m'assurer que nous gardons le contrôle de l'équipement pour nos témoins. Je vois que nos deux témoins ont l'équipement voulu.
    Nous allons passer à M. MacGregor.
    Allez‑y, monsieur. Vous avez six minutes.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue au ministre Lametti et à Mme Campbell.
    Nous sommes très heureux que vous soyez tous les deux ici pour discuter du processus de nomination.
     Monsieur le ministre Lametti, je vais peut-être commencer avec vous. Je me félicite que le projet de loi C‑15 ait reçu la sanction royale hier. J'ai eu l'honneur de servir aux côtés de Romeo Saganash au cours de la dernière législature. Cela revêt donc une signification profonde et personnelle pour moi, ainsi que pour de nombreux Autochtones partout au pays.
     Dans le préambule du projet de loi C‑15, il est dit que la Déclaration met l'accent sur la nécessité urgente de respecter les systèmes juridiques des peuples autochtones. L'article 5 du projet de loi exige que le gouvernement prenne toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce que les lois fédérales soient compatibles avec la Déclaration.
    Pour ce qui est des qualifications et des critères d'évaluation, on lit sous la première rubrique, « Connaissance supérieure démontrée du droit », que « la connaissance des traditions juridiques autochtones peut également être prise en considération ».
     Madame Campbell, vous voudrez peut-être ajouter quelque chose. Au sujet des qualifications et critères d'évaluation et de la rubrique qui fait mention de « la connaissance des traditions juridiques autochtones », pourriez-vous nous en dire un peu plus? J'aimerais savoir dans quelle mesure cela a été pris en compte dans votre examen des candidats, vu le contexte dans lequel nous fonctionnons actuellement au Canada, où les droits et les titres autochtones prennent de plus en plus d'importance dans la société canadienne et constitueront certainement une grande partie des décisions juridiques à venir, surtout avec l'adoption du projet de loi C‑15.
(1055)
    Merci, monsieur MacGregor.
     Avant de céder la parole à Mme Campbell, j'aimerais vous remercier des compliments que vous avez faits au sujet du projet de loi C‑15. Merci. Je n'ai pas manqué de saluer le leadership de Romeo Saganash tout au long de ce processus. Il mérite beaucoup de crédit pour l'adoption du projet de loi C‑15. Il a longtemps milité en sa faveur, de même que pour son propre projet de loi d'initiative parlementaire.
    En tant que gouvernement, nous reconnaissons — et moi, à titre de ministre de la Justice, je reconnais — que nous devons travailler fort pour améliorer le système de justice sous toutes ses formes. Cela signifie que, conformément à la Déclaration des Nations Unies, il nous faut aider à revitaliser, pour ainsi dire, les systèmes normatifs autochtones. Tout récemment, en réponse à l'appel à l'action 50, j'ai annoncé un financement de 10 millions de dollars à l'échelle du Canada pour 21 projets visant à revitaliser des systèmes particuliers de justice autochtone.
    C'est un volet de notre effort. Il s'agit aussi, en partie, de favoriser un meilleur accès à la justice, d'améliorer le système de justice et de le rendre plus participatif et d'avoir plus de juges autochtones, chose que j'ai faite aussi en nommant des juges autochtones à la Cour supérieure et en élevant à la Cour d'appel des juges qui siègent actuellement à la Cour supérieure. C'est également une priorité pour nous de veiller à ce que cette représentation autochtone s'étende le plus tôt possible à la Cour suprême du Canada.
    Cela étant dit ce, je cède la parole à Mme Campbell.
    Je dirais simplement que le Comité était très désireux de trouver un candidat autochtone. L'obstacle de la langue demeure; il existe une capacité de bilinguisme fonctionnel parmi les Autochtones, parfois chez des avocats encore jeunes.
    À ma dernière comparution, j'ai dit croire que, d'ici quatre ou cinq ans, nous verrions un candidat autochtone à la Cour suprême du Canada. Je pense également que l'importance pour les juges non autochtones de la Cour d'être instruits sur ces questions est largement reconnue. Je donne l'exemple de l'honorable Malcolm Rowe, qui vient de Terre-Neuve-et-Labrador, où ce n'est pas un domaine du droit qui demeure plutôt embryonnaire. Grâce à sa participation à un organisme appelé Action Canada, qui lui a fait parcourir le pays, il a appris à connaître les dirigeants autochtones de Haida Gwaii, du Nunavut et d'ailleurs. Il était très curieux et très conscient de l'importance de ces questions. La juge Sheilah Martin est très respectée dans les communautés autochtones et a fait de cet aspect du droit un élément qui lui importe grandement.
    C'est moins un problème au Québec parce que les questions ne sont pas aussi bien définies dans le droit québécois, mais c'est certainement le cas dans l'ouest du Canada, en Ontario et dans le Canada atlantique. Je pense que nous assistons à une augmentation du nombre d'avocats autochtones, mais aussi à une reconnaissance croissante de la part d'avocats et de juristes non autochtones que c'est un domaine dans lequel ils doivent s'engager. Par exemple, lorsque j'étais ministre de la Justice, j'ai organisé un symposium national sur la justice autochtone avec le ministre de la Justice du Yukon. La façon de penser a évolué notablement depuis, si bien que nous ne cherchons pas seulement à comprendre les droits des Autochtones tels qu'ils sont inscrits dans la Constitution, mais aussi toute cette autochtonisation de notre pensée juridique.
    Nous vivons une période stimulante et exigeante, et nous avons des gens au pays qui peuvent contribuer grandement à cette évolution. Je crois fermement que nous le verrons à la Cour suprême du Canada, mais la Cour suprême n'est pas le seul lieu où ces compétences et ces talents seront d'une grande valeur dans le développement de notre système et notre culture juridiques.
(1100)
    Je vous remercie tous deux.
    Merci beaucoup, monsieur MacGregor. Vous avez terminé juste à temps.
    Nous allons maintenant passer à notre deuxième série de questions, en commençant par M. Moore, pour cinq minutes.
    Allez‑y, s'il vous plaît.
    Merci, madame la présidente.
    Merci à vous deux d'être ici aujourd'hui pour prendre part à ce processus de grande importance.
    Monsieur le ministre Lametti, à titre d'information pour ceux qui suivent nos délibérations... Combien de provinces ont un nombre garanti de sièges à la Cour suprême?
    Il n'y en a qu'une seule dans la Constitution, le Québec. Trois sièges à la Cour suprême sont occupés par des juges québécois, en reconnaissance du caractère distinct du droit civil, qui diffère des systèmes juridiques des neuf autres provinces et des trois territoires.
    Cela dit, la tradition veut que trois juges proviennent de l'Ontario, deux des provinces de l'Ouest et un des provinces de l'Est. Cette répartition a été assouplie de temps à autre dans le passé, mais, pour l'essentiel, c'est ainsi que les choses se font.
    Merci, monsieur le ministre.
    Je comprends cela. Pourquoi alors avez-vous mentionné que dans le cadre de votre recherche, celle‑ci ne viserait que d'éventuels candidats de l'Ontario?
    L'idée était simplement de respecter cette tradition. Il va sans dire que des candidats d'ailleurs auraient pu se présenter. Rien ne les empêchait de le faire, mais il s'agissait néanmoins d'un critère de recherche.
    Cela me semble tout à fait logique.
    Ma question est la suivante. Pourquoi, après la retraite du juge Cromwell — il était juge de la Cour suprême du Canada pour le Canada atlantique —, votre gouvernement n'a‑t‑il pas établi tel critère limitant la recherche de son remplaçant au Canada atlantique? En tant que Canadien de l'Atlantique, cela me préoccupe, car depuis la Confédération, le Canada atlantique a toujours eu un juge à la Cour suprême du Canada.
    Comment se fait‑il que, lorsqu'il y a eu vacance d'un siège de l'Ontario, vous avez limité votre recherche à des candidats ontariens? Je suis d'avis d'ailleurs que vous avez fait un excellent travail pour trouver un candidat très qualifié, mais comment se fait‑il que, quand le siège du Canada atlantique est devenu vacant, la recherche s'est faite dans l'ensemble du pays, plutôt que d'être limitée au Canada atlantique?
    Je n'étais pas ministre à ce moment‑là. Je ne peux pas vraiment parler du processus. C'était l'une des premières fois qu'on l'appliquait. Ce que je peux dire, c'est qu'il a abouti à la nomination du juge Rowe, qui est de Terre-Neuve.
    Encore une fois, je ne peux pas parler de la façon dont les critères retenus dans ce cas, n'ayant pas participé aux discussions.
    Merci, monsieur le ministre.
    Je pense qu'il est important de reconnaître la diversité de notre pays et le rôle important que le Canada atlantique y joue. À l'avenir, le siège du Canada atlantique dans cette institution de grande importance devrait être occupé par un juge des provinces atlantiques.
    Madame la présidente, combien de temps me reste‑t‑il?
    Il vous reste deux minutes.
    Monsieur le ministre, nous sommes un comité composé de parlementaires. Le Comité de la justice, comme l'a mentionné la très honorable Kim Campbell, est un comité important, et aucun d'entre nous ne tient pour acquis le privilège d'en être membre.
    Il y a quelques années, le Comité de la justice a recommandé que le comité chargé d'examiner les nominations à la Cour suprême du Canada soit un comité de plein droit du Parlement, présidé par un député. Je pense, par exemple, que la présidence de notre comité, quand nous rencontrerons le juge Jamal plus tard aujourd'hui... Il devrait être un comité du Parlement ayant les mêmes droits que nous et le même pouvoir d'interrogation de témoins. Il ne devrait pas être présidé par quelqu'un de l'extérieur du Parlement. Pour bien des gens, cela n'a pas de sens.
    Pouvez-vous nous dire pourquoi cette recommandation n'a pas encore été mise en œuvre?
(1105)
    Merci, monsieur Moore. Je suis au courant de cette recommandation.
     En ce moment, il s'agit d'un véritable comité parlementaire, où les témoins sont donc assujettis aux règles habituelles des comités parlementaires, y compris les règles [Difficultés techniques]. C'est très bien, et je réponds aux questions en conséquence. D'après ce que je comprends de la nature de la réunion de cet après-midi, il s'agira d'une séance de « présentation du candidat ».
     Le processus des nominations à la Cour suprême est entre les mains du premier ministre. Mme Campbell, son comité et moi-même, en bout de ligne en ma qualité de ministre de la Justice, en menant des consultations sur les noms figurant dans la liste restreinte, ne faisons que préparer des recommandations à l'intention du premier ministre.
    D'après ce que j'ai compris — c'est l'idée qui a prévalu pour cette séance —, vous aurez l'occasion cet après-midi de rencontrer le candidat recommandé, de lui poser des questions et de mieux le connaître. On a jugé que ce n'était pas le travail habituel d'un comité parlementaire.
    Depuis que je suis ministre de la Justice, j'ai participé à deux processus jusqu'à maintenant, dont celui‑ci. J'ai certainement trouvé que le processus s'était extrêmement bien déroulé la dernière fois, pour la nomination du juge Kasirer. D'après ce que j'ai pu constater quand j'étais député, il s'est très bien déroulé dans le cas des nominations des juges Rowe et Martin.
    C'est sans précédent... Ces processus se déroulent très bien. Ils donnent de la transparence à ce qui se passe au Comité. Je pense qu'il est très utile d'y faire participer le grand public, y compris un éminent doyen de faculté de droit, comme ce sera le cas cet après-midi.
    Merci, monsieur le ministre. Merci, monsieur Moore.
    Nous allons maintenant passer à M. Maloney, pour cinq minutes.
    Allez‑y, monsieur.
    Merci, madame la présidente.
    Je me félicite de cette occasion. C'est en effet une occasion tout à fait spéciale.
    Monsieur le ministre Lametti, votre comparution devant le Comité est toujours hautement appréciée, aujourd'hui tout particulièrement. Merci.
    Je m'adresse à la très honorable Kim Campbell. Je n'ai jamais encore eu l'occasion de poser des questions à une ancienne première ministre. Permettez-moi de commencer en disant que j'ai été enchanté de vous entendre dire: « Il n'y a pas eu de compromis sur la qualité ». Ce processus, comme celui que nous suivons cet après-midi, est important.
    Vous avez commencé en parlant de votre désaccord avec Bob Rae au sujet de l'approche de la « tape sur l'épaule ». Ce dont nous parlons réellement, c'est une marche à suivre pour les nominations. Je suis membre de la profession depuis plus de 20 ans. Je pense que tout le monde conviendra que chaque nomination qui a été faite à la Cour suprême du Canada, quelle que soit l'approche adoptée, a porté sur un juge de grande distinction.
     À l'époque où vous étiez ministre de la Justice, puis première ministre, je crois qu'il y a eu trois nominations à la Cour suprême du Canada, selon l'ancien processus. En 2006, nous avons instauré un nouveau processus. Le gouvernement de l'époque a créé l'organisme dont nous avons vu le résultat du travail cet après-midi. En 2016, notre premier ministre actuel a institué le nouveau processus, que vous dirigez. Je vous en remercie.
    Malheureusement, le climat politique s'est polarisé. Ces processus permettent parfois à la polarisation de se manifester. Nous l'avons déjà vu dans le passé et nous l'avons vu encore aujourd'hui.
    Certaines personnes préfacent leurs questions d'un commentaire faisant valoir l'excellence de tous les candidats, notamment celui au sujet duquel le Comité se réunit, après quoi elles s'emploient à miner le processus. Le but de cette audience et de cette réunion du Comité cet après-midi est de montrer aux Canadiens que notre plus haut tribunal est solide, que le processus est éprouvé et que nous cherchons sans cesse à l'améliorer.
    La question que je vous pose — nous n'avons pas vraiment discuté de ce qui se passera cet après-midi — est la suivante. Que pensez-vous de l'évolution de l'approche, depuis celle de la « tape sur l'épaule », que vous avez décrite, jusqu'au processus que nous avons maintenant?
    J'aimerais connaître votre point de vue sur la façon dont les choses ont progressé et se sont améliorées.
    Eh bien, je dirais très brièvement qu'en tant que membre d'un groupe qui, souvent, n'avait pas d'épaules qui attiraient les petites tapes et qui était sous-représenté... Lorsque j'étais ministre de la Justice, 25 % de mes nominations à la magistrature ont été des femmes, alors que les femmes ne représentaient que 12,5 % des personnes admises au Barreau à titre permanent. J'ai donc nommé des femmes de façon disproportionnée afin de commencer à créer un groupe de personnes qui, gagnant en maturité, pourraient devenir candidates à des postes supérieurs.
     Cependant, ce que nous constatons, je pense, avec cette approche, et encore une fois, il y a de nombreuses façons différentes de procéder... Ce que je vois dans l'approche que le premier ministre m'a demandé de présider reflète ce qui se fait déjà dans les provinces.
     Quand j'étais ministre de la Justice, les gens pouvaient poser leur candidature à un poste de juge. Il y avait des comités locaux d'examen des candidatures judiciaires, composés de gens de la profession juridique, des forces de l'ordre, de divers groupes nommés par la province et par le gouvernement fédéral de façon à éviter que les candidats retenus soient redevables à un groupe particulier, et ces comités étaient chargés d'examiner les candidatures et de déterminer lesquels des candidats étaient aptes à siéger. Ensuite, le ministre [Difficultés techniques].
    Il fut un temps au Canada où il n'y avait rien de tout cela, où c'était peut-être davantage une question de favoritisme. Cela ne veut pas dire que les personnes nommées n'étaient pas compétentes, mais que beaucoup de personnes compétentes ont été exclues. Je vois cela, à bien des égards, comme un reflet de ce qui se passe avec la nomination des juges des cours supérieures dans toutes les provinces et comme une occasion à saisir par les gens qui connaissent le droit.
    C'est toute une entreprise. Si un comité en était chargé, il aurait énormément de travail, entre autres, en raison du temps que nécessite l'examen de toutes les candidatures. Mais l'idée serait de soustraire les nominations au processus partisan.
     Je ne vois pas pourquoi il ne pourrait pas y avoir d'autres façons de procéder, mais je pense que notre processus fait comprendre aux juristes que n'importe qui peut faire acte de candidature. C'est assez nouveau, parce qu'il y a eu une époque où beaucoup pensaient que le fait de poser sa candidature serait vu comme risible. Vous connaissez la réaction des gens devant les ambitieux: « Pour qui vous prenez-vous? » Eh bien, dans le nouveau processus, si une personne répond aux critères, elle a parfaitement le droit de poser sa candidature. Nous procéderons à l'examen le plus juste possible et nous allons travailler pour assurer à chaque candidat une audience et une évaluation équitables, tout en reconnaissant que nous ne pouvons pas transmettre tous les noms au premier ministre et qu'il y aura forcément une présélection.
    Je vois cette évolution comme vraiment cohérente avec ce qui se fait pour les nominations aux tribunaux, aux cours supérieures dans les provinces, et je pense qu'il est approprié de changer le processus afin de donner aux gens plus de temps pour préparer leur candidature. C'est d'ailleurs ce que nous avons fait quand nous avons entrepris de solliciter largement des candidatures.
    Je ne suis pas en train d'établir le mandat du Comité, mais je crois que le premier ministre, le ministre et d'autres décideurs seraient très ouverts aux suggestions pour en faire [Difficultés techniques]. Il y a aussi le fait que c'est la prérogative du premier ministre de faire ces nominations, et je suis d'avis que, dans la mesure où les premiers ministres sont disposés, pas nécessairement à entraver leur pouvoir discrétionnaire — je ne pense pas qu'ils devraient le faire —, mais à ouvrir le processus et à demander l'avis d'autres... D'ailleurs, ils ont toujours demandé l'avis d'autres personnes, mais je pense que d'avoir un groupe de gens qui se concentrent vraiment sur les candidatures, dont beaucoup ont eux-mêmes choisi ce travail et se révèlent formidables à la tâche, est un pas dans la bonne direction.
    Vous êtes des gens réfléchis, et je pense que beaucoup d'entre vous auraient peut-être des approches réfléchies à proposer pour améliorer les choses, mais dans le sens des nominations aux cours supérieures dans les provinces, je pense que le fait de les soustraire aux décisions purement partisanes donnerait de la crédibilité au processus et le rendrait plus accessible aux gens qui n'ont pas leurs entrées dans les officines partisanes.
(1110)
    Merci.
    Votre temps est écoulé, monsieur Maloney.
    Merci.
    Je vais maintenant donner la parole à M. Fortin pour deux minutes et demie.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Ma question s'adressera à Mme Campbell.
    Ce n'est pas tous les jours que le Comité permanent de la justice et des droits de la personne a la chance de recevoir la présidente du Comité consultatif indépendant sur la nomination des juges de la Cour suprême du Canada. C'est un grand honneur pour nous, madame Campbell, que vous soyez parmi nous aujourd'hui.
    Nous traitons bon nombre de dossiers importants au Comité et à la Chambre. Toutefois, un sujet nous préoccupe beaucoup. J'ai commencé à l'aborder tantôt, et M. Cooper l'a également fait. Il s'agit de la question du processus de nomination.
    À titre de présidente du Comité consultatif, avec l'expérience que vous avez, sur les plans tant politique que juridique, et considérant le fait que vous avez, j'en suis convaincu, un excellent jugement, j'aimerais savoir ce que vous pensez de la question de la vérification des allégeances politiques des candidats à la magistrature.
    J'ai compris que M. le ministre Lametti n'avait pas fait de vérifications dans le cas qui nous occupe, parce qu'il les avait déjà faites quand il a nommé le juge Jamal à la Cour d'appel de l'Ontario. Je comprends que cela aurait aidé, d'une certaine façon. Toutefois, de manière générale, quel est votre avis à ce sujet?
    Trouvez-vous important de vérifier les allégeances politiques pour toutes sortes de raisons valables ou non valables? Est-ce important de le faire avant de procéder à des nominations ou devrait-on complètement évacuer cette étape de vérification avant de désigner quelqu'un?
(1115)

[Traduction]

     Je ne pense pas que cela devrait faire partie de notre processus. Cela ne nous intéresse pas. Nous nous intéressons aux dimensions compétence et philosophie, d'autant que cela se reflète dans l'action des candidats en dehors de la profession juridique. Nous voulons savoir ce qu'ils ont fait au sein de leurs collectivités et s'ils ont contribué à la vie de la communauté. Bien entendu, ceux qui sont juges depuis longtemps sont plus limités à cet égard.
    Leur philosophie et leur exposition à la diversité de la société canadienne sont des aspects qui nous intéressent. Toutefois, nous ne soulevons aucune question de partisanerie. Cela ne nous intéresse pas; nous n'allons pas plus loin, et nous considérons que ce n'est pas approprié pour nos délibérations.

[Français]

     Selon vous, peut-on le vérifier davantage sur la liste de candidats présélectionnés, une fois que le Comité consultatif a fait son travail? Cela ne devrait-il jamais être vérifié?

[Traduction]

    Eh bien, la liste restreinte est un mystère, et il s'agit de la prérogative du premier ministre. Cependant, je peux vous dire que chaque personne qui figure sur cette courte liste est une personne de distinction, de grande réputation et de grande qualité, qui pourrait apporter une excellente contribution à la Cour suprême du Canada.
    Je serais surprise que la partisanerie joue un rôle. Si c'était le cas, ce serait quelque chose de tout à fait différent de l'évaluation exceptionnelle et déjà établie de la capacité juridique, du caractère et de l'intégrité d'une personne.

[Français]

    Je vous remercie beaucoup, madame Campbell.

[Traduction]

    Merci, monsieur Fortin.
    Nous allons maintenant passer à M. MacGregor pour deux minutes et demie. Allez‑y, s'il vous plaît.
    Merci, madame la présidente.
    Madame Campbell, je vais vous poser mes deux questions, puis vous laisser y répondre.
    Je suis enthousiasmé par ce que vous avez dit tout à l'heure au sujet des candidats autochtones et du fait que le système judiciaire canadien est de plus en plus représentatif.
    Je veux d'abord savoir si, dans le cadre des nominations qui ont eu lieu ces dernières années, y compris celle‑ci, vous avez constaté une amélioration du bassin de candidats autochtones qualifiés pour la Cour suprême qui répondent à toutes les exigences. Y a‑t‑il une amélioration du nombre de personnes qui pourraient être qualifiées pour ce poste?
     Deuxièmement, chaque fois que nous suivons ce processus, il faut réfléchir à ce qui a fonctionné et à ce qui n'a pas fonctionné, et vous avez déjà fait un certain nombre de ces choses. Avez-vous des commentaires à faire sur les améliorations qui pourraient encore être apportées à ce processus en fonction de votre plus récente expérience quant à cette nomination?
    Merci.
     Pour répondre à votre deuxième question, je n'en ai pas vraiment, si ce n'est de travailler constamment à ratisser aussi large que possible pour s'assurer qu'on n'ignore personne qui pourrait faire une contribution. Cela dépend peut-être aussi de choses comme la conception universelle pour faire en sorte que les questionnaires soient conçus de façon que les gens aient la possibilité de soutenir leur propre candidature le mieux possible, plutôt que d'être simplement limités.
    Nous pensons parfois que la façon dont nous formulons une question fonctionne pour tout le monde. Ce n'est peut-être pas le cas, alors il y a cet exemple.
    Pour ce qui est de la représentation des Autochtones, nous constatons effectivement que les nombres sont en hausse. De plus, à la faveur d'un processus de sélection antérieur, je me souviens d'avoir eu une discussion avec Phil Fontaine, de l'Assemblée des Premières Nations. Nous nous disions qu'il serait peut-être temps d'envisager la possibilité de réserver un siège à la Cour suprême du Canada à un Autochtone. Bien sûr, il ne faut pas oublier que les communautés autochtones sont aussi très variées. Il y a les Premières Nations, les Métis et les Inuits. Comment aborder cette réflexion? Je pense qu'un jour des membres de ces communautés siégeront à la Cour, mais je crois qu'il est également important que n'importe quel juge de la Cour suprême ait la capacité d'intégrer ces nouvelles façons de penser aux obligations traditionnelles de notre droit.
    Nous devons réfléchir sur beaucoup de choses intéressantes en lien avec le rôle de notre Cour suprême. Je ne m'intéresse pas au changement pour le changement, mais je vis aussi dans un Canada qui est très différent de ce qu'il était dans ma jeunesse. Plusieurs choses...
    Soit dit en passant, je réfléchissais l'autre jour à la façon dont le Parlement a piloté le changement dans des domaines comme les droits des personnes LGBTQ. Comme ce ne sont pas des changements qui ont été proposés par la Cour, je pense que le Parlement a encore un rôle très important à jouer, comme vous l'avez démontré hier dans le projet de loi qui a été signé. Je pense que le leadership vient aussi de là. Cela a aussi une incidence sur la Cour.
    Je vous ai donné une longue réponse à une question courte pour dire simplement que je suis optimiste, mais que nous traversons une période où il se passe beaucoup de choses quant aux progrès pour les Autochtones au Canada comme dans le cas, par exemple, de la création d'un programme de droit autochtone dans l'Ouest canadien. Nous sommes nettement plus ouverts maintenant, de la même façon que nous sommes beaucoup plus ouverts aux droits des personnes LGBTQ que nous ne l'étions dans ma jeunesse. Il nous arrive de soulever un couvercle et de nous dire: « Mon Dieu, nous avons été stupides à ce sujet. » Nous devons combler des retards pour créer la justice dans ce domaine également.
    Nous devons réfléchir à la place de l'autochtonisation et des valeurs autochtones dans notre système juridique. Sera‑t‑il suffisant d'avoir des juges ayant l'expérience de vie autochtone, ou la démarche devra-t-elle être plus officielle? Je ne connais pas la réponse, mais je suis très heureuse que les gens posent cette question. Du moins, moi je la pose.
(1120)
    Merci.
    Merci à vous deux.
    Maintenant, avec le temps qu'il nous reste, nous allons terminer notre deuxième tour. Nous allons passer à Mme Findlay, pour cinq minutes.
    Allez‑y, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup d'être avec nous aujourd'hui. Je suis heureuse de vous revoir, très honorable Kim Campbell.
    Je crois que la dernière fois que nous nous sommes rencontrées en personne, j'animais un panel devant plusieurs centaines d'avocates à Vancouver. Il y avait vous et la juge Abella. Ce fut donc une excellente occasion de célébrer le fait d'être une femme en droit.
    Sur ce, je vous remercie également de nous avoir fait part de votre appréciation et de vos réflexions sur les défis de la vie en tant que juge de la Cour suprême du Canada et sur les sacrifices que cela suppose, surtout pour ceux qui doivent quitter la Colombie-Britannique. Je me devais de le dire aussi, à titre de députée de la Colombie-Britannique.
    Monsieur le ministre Lametti, j'ai déjà participé, en ma qualité de parlementaire, à des processus de recommandation à la Cour suprême et j'ai participé à des entrevues avec la juge en chef de la Cour suprême du Canada de l'époque et d'autres juristes chevronnés pour examiner les candidatures. La composition du nouveau conseil consultatif indépendant exclut la participation des parlementaires jusqu'à l'étape où nous en sommes aujourd'hui. Il remplace les parlementaires par sept membres impartiaux, dont trois sont choisis par le ministre de la Justice. C'est à dire, vous.
    Pourriez-vous nous expliquer pourquoi vous croyez que c'est la meilleure façon de choisir un juge de la Cour suprême?
     À qui s'adresse cette question, madame Findlay?
    Au ministre Lametti.
    Monsieur le ministre Lametti, vous avez la parole.
    Il y a un autre élément du processus où les parlementaires sont consultés, et c'est la liste restreinte. Je m'engage à parler avec ceux qui me critiquent à la Chambre des communes et au Sénat, ainsi qu'avec les membres du comité d'une région ou d'une province en particulier. C'est ce que j'ai fait dans le cadre des deux processus auxquels j'ai participé. L'un concernait le Québec et le dernier, l'Ontario.
    Une entente de non-divulgation est signée par les gens dans ces circonstances particulières, mais les parlementaires sont consultés à cet égard.
    Je pense que les mérites de ce processus sont...Je ne dirai pas apparents, mais évidents. Tout d'abord, il y a un ensemble de critères qui sont publiés à l'avance, qui encadrent le travail du conseil consultatif et qui permettent à notre collègue, M. MacGregor, de poser la question précise qu'il a posée au début sur la façon dont l'interaction d'un certain critère a été appliquée par le conseil consultatif indépendant. Elle encadre également la décision que le premier ministre doit prendre en fin de compte. Il permet la diversité de pensée et la représentativité au niveau du conseil consultatif. Cela permet aux parlementaires d'être consultés, puis cela permet le processus que nous suivons actuellement et le processus que vous suivrez cet après-midi.
    Il y a ici un très bon équilibre entre le repérage et l'évaluation des bons candidats, le maintien de la confidentialité, la recherche constante de l'intégrité, de la capacité, de l'intelligence et du mérite, et la promotion de la diversité.
    Je pense que nous avons réussi de façon très transparente à mettre en place un très bon processus.
(1125)
    Je vous en remercie.
    Monsieur le ministre Lametti, j'aimerais en savoir davantage sur votre processus de sélection des trois membres que vous nommez au conseil consultatif indépendant.
    Comment ont-ils été choisis?
    Encore une fois, nous cherchons à représenter les diverses franges de la société, sachant très bien que d'autres organismes juridiques présenteront aussi des candidats. Il est également très important pour nous d'avoir une représentation de gens qui n'appartiennent pas au monde juridique au sein de ce conseil [Difficultés techniques].
    Je voulais savoir comment vous les avez choisis, monsieur. Comment avez-vous choisi ces personnes?
    Elles ont été choisies en fonction de critères de représentativité, de diversité et de mérite.
    Ne craignez-vous pas que la nomination du juge Jamal — qui est évidemment un excellent juriste — ne réduise le nombre de femmes siégeant à la Cour suprême au moment où nous perdons la juge Abella?
    Veuillez répondre très brièvement, s'il vous plaît.
    Avant de céder la parole à Mme Campbell, je répondrai par l'affirmative. C'est l'un des critères. Nous voulons atteindre la parité hommes-femmes à la Cour, et cela demeure une priorité fondamentale.
    Absolument. Un autre siège s'ouvrira pour l'Ontario en 2022, quand le juge Moldaver prendra sa retraite.
    Ce sont des choix difficiles. Il ne fait aucun doute que nous nous sommes penchés sur cette question. En fin de compte, le premier ministre a choisi de créer une nouvelle forme de représentativité à ce tribunal, auparavant absente. Ce sont des choix difficiles, mais je pense qu'il ne fait aucun doute qu'il s'agit d'une préoccupation et...
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer au dernier intervenant de ce groupe.
    Monsieur Virani, vous avez la parole.
    Je tiens à remercier le ministre et la très honorable Kim Campbell de leur présence parmi nous. C'est un grand plaisir de vous accueillir et de pouvoir profiter de votre sagesse à tous deux.
    Je m'adresse à la très honorable Kim Campbell. Je vais vous poser une question au sujet de ce que vous avez dit au début, parce que je pense vraiment que cela résume plusieurs des obstacles qui empêchent les communautés sous-représentées de se manifester ou d'être invitées à le faire. Comme vous l'avez si bien dit, on ne leur fait pas souvent signe, que soit par une tape sur l'épaule ou autrement.
    Pouvez-vous nous parler de votre analyse et de la façon dont vous essayez fondamentalement de régler ce genre de préoccupation, parce que lorsqu'on s'efforce de diversifier la magistrature — ce à quoi notre gouvernement s'est engagé —, on constate parfois qu'il n'y a aucun bassin de candidats. Par où faut‑il commencer, selon vous? Est‑ce au niveau des facultés de droit, en encourageant les gens des communautés non représentées à faire des études de droit pour devenir éventuellement un jour juges puînés, pour espérer être retenus à un poste de juge à la Cour suprême, comme ce fut le cas du juge Jamal?
    Madame Campbell, pouvez-vous nous en parler?
     Je pense que c'est tout cela à la fois. Toutes ces choses sont importantes.
    Il m'arrive parfois de souligner qu'à l'époque où je suis devenue première ministre, personne n'avait fait ce travail auparavant. C'était la même chose quand je suis devenue ministre de la Justice. L'objectif est de créer l'impression qu'il est parfaitement normal pour tout un éventail de personnes d'occuper certains postes. Quand nous avons interrogé le juge Jamal dans le cadre de nos délibérations, il nous a dit à quel point il avait été touché par le nombre d'avocats et de juges racialisés qui avaient applaudi sa nomination à la Cour d'appel de l'Ontario. Il ne s'y attendait pas.
    C'était très [Difficultés techniques]. Dans toutes ces choses, plus il y aura de gens, plus la diversité sera grande, plus il aura de points de vue, d’antécédents et de réalités différents, et plus les autres se sentiront représentés. Cela commence au bas de l'échelle et va jusqu'au sommet. Il faut s'assurer de ne pas simplement nommer ceux que nous connaissons le mieux.
(1130)
    Puis‑je revenir brièvement sur un autre point? Lors du recrutement des juges, il arrive que l'on se heurte à des obstacles traditionnels. Certains candidats peuvent se sentir mal à l'aise ou se dire que ce poste ne leur convient pas. Il peut y avoir des obstacles financiers. On peut penser aux avocats de Bay Street issus de cabinets comme celui du juge Jamal. Ayant moi-même exercé à Toronto, je sais que c'est parfois une préoccupation très réelle.
    Quels types d'obstacles constatez-vous, même dans ce processus de recrutement? Je comprends qu'une nomination à la Cour suprême du Canada devrait être la plus grande réalisation professionnelle de presque tous les avocats. Pourriez-vous nous donner une idée des obstacles que vous avez rencontrés chez d'anciens candidats, par exemple?
    Les obstacles géographiques ont été très importants parce qu'il est nécessaire de déménager dans la région de la capitale nationale. Je ne peux pas parler de l'aspect financier. À Vancouver, nous avons eu le cas d'un avocat chevronné dont le nom avait été proposé pour la Cour et à qui l'épouse avait demandé s'il avait une idée du salaire d'un juge. Il a dû faire des pieds et des mains pour ne pas se faire élire après s'être rendu compte qu'il n'était pas prêt à assumer une telle réduction de salaire.
    La plupart des gens qui présentent une demande sont bien sûr conscients de ce que cela implique. S'ils ont des revenus très élevés, ils sont tout à fait prêts à décliner la possibilité de devenir juges. Et s'ils ont la possibilité ainsi de gagner plus, alors c'est tant mieux.
    Je pense que c'est la barrière géographique et la peur de l'isolement qui comptent le plus. Bon nombre de ces candidats, de ces juges potentiels, ont un grand sens de la socialisation. Ils pratiquent le droit parce qu'ils sont soucieux des gens et que cette pratique est un moyen d'améliorer la vie des gens. Les contraintes imposées à un juge de la Cour suprême du Canada quant à la façon dont il peut socialiser — aller dans un bar, bavarder avec les gens — sont également une source de préoccupation pour certains, et l'effet que cela aura sur eux.
    Une des choses que nous constatons — et nous demandons aux candidats comment ils prévoient faire la transition — c'est que la plupart d'entre eux ont eu des discussions sérieuses avec leur famille et leurs enfants. Ils sont très réalistes quant au nouveau mode de vie qui les attend. J'ai dit que ce serait formidable si nous pouvions faire venir des juges à la retraite de la Cour suprême pour qu'ils participent à des événements publics partout au pays et qu'ils parlent de cette vie, qu'ils essaient de répondre aux questions des gens et qu'ils dissipent leurs doutes.
    En fin de compte, pour certaines personnes, c'est un sacrifice important. Certains sont prêts à le faire et d'autres pas, tout comme beaucoup d'avocats veulent être juges et d'autres pas.
    Il faut veiller à ce que personne, susceptible ou désireux d'aller à la Cour suprême, soit dissuadé de présenter sa candidature. C'est la clé, je pense.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Virani. Votre temps est écoulé.
    Je vais maintenant remercier le ministre Lametti et la très honorable Kim Campbell.
    Madame Campbell, vous avez ouvert la voie à des gens comme moi qui marchent dans vos traces. Je ne saurais vous dire à quel point nous apprécions votre travail acharné et votre dévouement au service de notre pays.
    Au nom de tous les membres du Comité et en mon nom personnel, je vous remercie infiniment de votre témoignage d'aujourd'hui.
    La primauté du droit est la chose la plus importante dans une démocratie, alors je vous remercie tous de participer à ce processus.
    Madame la présidente, j'invoque le Règlement. Je ne veux pas décevoir nos invités, particulièrement le ministre Lametti, mais je croyais que nous devions passer deux heures sur ce sujet, puis une demi-heure en comité pour notre étude.
    Vous avez [Difficultés techniques] en ce sens que la réunion elle-même dure deux heures. Nous devons maintenant poursuivre à huis clos. Nous devons tenir compte des 15 minutes qu'il faut pour suspendre la séance, puis pour nous rendre à la séance à huis clos. J'espère que vous serez indulgent.
    J'ai vraiment hâte de terminer ce rapport aujourd'hui. Je sais que nous devons discuter d'un certain nombre de choses précises au sujet de ce rapport.
    Avec la permission des membres du Comité, nous allons suspendre la séance.
    Votre lien Zoom devrait également se trouver dans le courriel que vous avez reçu relativement à cette réunion.
    Merci beaucoup, madame Campbell.
    La séance est suspendue.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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