Passer au contenu
;

Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document

43e LÉGISLATURE, 2e SESSION

HANSARD RÉVISÉ • No 045

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 8 décembre 2020




Emblème de la Chambre des communes

Débats de la Chambre des communes

Volume 150
No 045
2e SESSION
43e LÉGISLATURE

COMPTE RENDU OFFICIEL (HANSARD)

Le mardi 8 décembre 2020

Présidence de l'honorable Anthony Rota


    La séance est ouverte à 10 heures.

Prière



Affaires courantes

[Affaires courantes]

(1005)

[Traduction]

La Loi sur la Société canadienne des postes

    — Monsieur le Président, c'est un grand plaisir pour moi de présenter aujourd'hui mon projet de loi d'initiative parlementaire, qui porte le numéro C-260 et qui est intitulé « Loi modifiant la Loi sur la Société canadienne des postes ». Certains diront que c'est plutôt simple, comme titre, mais c'est voulu, car il s'agit d'une mesure toute simple. Elle vise en effet à modifier la Loi sur la Société canadienne des postes de telle sorte que les Canadiens d'un océan à l'autre puissent savourer leurs vins, spiritueux et bières artisanales favoris, quel que soit la province ou le territoire d'origine de ces produits, puisqu'ils pourront se les faire livrer sans restriction à leur domicile par les excellents employés de Postes Canada.
    À l'heure actuelle, de nombreux Canadiens sont incapables de trouver leurs vins, leurs spiritueux ou leurs bières artisanales de prédilection sur les tablettes des commerces près de chez eux, et les producteurs canadiens sont incapables de les leur expédier parce que le Canada ne s'est toujours pas débarrassé des restrictions désuètes, pour ne pas dire archaïques, qui l'interdisent. En plus d'empêcher l'ensemble des Canadiens de goûter à ces excellents produits, ces restrictions nuisent aux PME qui les fabriquent en les empêchant de les expédier et de les vendre à qui bon leur semble.
    À cause de la pandémie de COVID-19, les Canadiens préfèrent faire leurs achats en ligne ou au téléphone. En plus de rendre les Canadiens plus heureux, cette modification toute simple leur permettrait de le faire en toute sécurité. Elle donnerait en outre un bon coup de pouce aux petites entreprises, qui ont vu leur achalandage chuter considérablement depuis le début de la pandémie.
    Je suis convaincu que tous les députés se joindront à moi pour appuyer ce projet de loi et la modification législative qu'il propose, afin de permettre à tous les Canadiens de s'abreuver des produits artisanaux de leur choix.

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

Pétitions

Les insecticides

    Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui au Parlement pour présenter une pétition sur une question qui inquiète profondément un grand nombre de mes concitoyens. Il s'agit de la question des insecticides de la classe des néonicotinoïdes, et particulièrement de leur incidence sur les pollinisateurs. Les pétitionnaires demandent au gouvernement de prendre des mesures pour emboîter le pas à l'Union européenne, adhérer au principe de la prudence et interdire l'utilisation des pesticides de la classe des néonicotinoïdes au Canada.

[Français]

Le Falun Gong

    Monsieur le Président, ce matin, je suis fier de me lever ici pour présenter une pétition signée par des Canadiens, qui cherche à rappeler au gouvernement les crimes du Parti communiste chinois envers la communauté du Falun Gong et qui demande que la loi Magnitski soit imposée à ceux qui participent d'une façon ou d'une autre à ces actes criminels.
    Je lis une partie de la pétition:
     Depuis plus de 21 ans, les dirigeants du Parti communiste chinois orchestrent la torture et l'assassinat d'un grand nombre de personnes pratiquant le Falun Gong, une discipline spirituelle promouvant les principes de « Vérité, Compassion et Tolérance », y compris l'assassinat à grande échelle de pratiquants pour leurs organes vitaux afin d'approvisionner le commerce de transplantations d'organes du régime communiste.
    Depuis plusieurs années, les gens du Falun Gong font des représentations, et plusieurs députés de tous les partis ont appuyé leurs demandes. Je suis heureux, aujourd'hui, de déposer cette pétition à la Chambre.

[Traduction]

L'environnement

    Monsieur le Président, je prends la parole pour présenter une pétition signée par des jeunes de ma circonscription, Okanagan-Sud—Kootenay-Ouest, et de la circonscription voisine, Kootenay—Columbia. Ces jeunes sont préoccupés par les répercussions de plus en plus importantes des changements climatiques. Ils soulignent que les cibles et les mesures du gouvernement sont nettement insuffisantes et ils veulent qu'au lieu de viser le gain à court terme au détriment des générations futures, les emplois s'inscrivent dans une perspective durable.
     Les pétitionnaires demandent au gouvernement d'améliorer leurs perspectives d'avenir en présentant une stratégie détaillée de lutte contre les changements climatiques fondée sur des données scientifiques. Ils souhaitent l'élimination des subventions aux combustibles fossiles et le réinvestissement de ces fonds dans les énergies renouvelables, l'efficacité énergétique, les transports à faibles émissions de carbone et la formation professionnelle.

Questions au Feuilleton

    D'accord?
    Des voix: D'accord.

Ordres émanant du gouvernement

[Ordres émanant du gouvernement]

[Traduction]

Le Code criminel

     La Chambre reprend l'étude, interrompue le 4 décembre, de la motion portant que le projet de loi C-7, Loi modifiant le Code criminel (aide médicale à mourir), soit lu pour la troisième fois et adopté.
    Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole au nom du Parti conservateur au sujet du projet de loi probablement le plus important dont le Parlement est saisi. Je dis cela sans savoir combien de temps la Chambre continuera à siéger, parce qu'il s'agit d'une décision relative à une intervention de l'État dans la vie de ses citoyens en fin de vie.
    C'est probablement l'un des débats les plus importants que le Parlement aura. On entend des représentants du gouvernement ou certains experts expliquant pourquoi nous sommes en retard et approchons de la date butoir, mais c'est le gouvernement qui est entièrement responsable de cette situation, pour trois raisons.
    D'abord, le gouvernement a décidé, sans aucune raison, de proroger le Parlement. Nous avons perdu plusieurs mois que nous aurions pu consacrer à un débat de fond plein de compassion sur le projet de loi C-7 et sur toute une série d'autres choses.
     Ensuite, ce projet de loi s'explique par une décision de la Cour supérieure du Québec et c'est quelque chose de si fondamental qu'en principe, il aurait dû y avoir appel devant deux cours supérieures: la Cour d'appel du Québec et la Cour suprême du Canada. Cela n'est pas arrivé, alors que cela aurait dû être le cas, comme le pensent la plupart des observateurs juridiques.
    Enfin, le gouvernement et le procureur général auraient pu demander plus de temps, compte tenu de la prorogation, de leurs propres retards, de la pandémie, et c'est peut-être ce qu'ils vont nous dire aujourd'hui. Je crois que c'est ce qu'ils finiront par faire aujourd'hui, et c'est approprié.
(1010)

[Français]

    Nous sommes proches d'une date limite pour ce projet de loi à cause de l'inaction du gouvernement. Le gouvernement a été lent pour ce qui est de l'appel d'une décision d'un tribunal du Québec. En outre, le gouvernement a prorogé le Parlement. C'est pourquoi nous sommes si proches d'une date limite fixée par une décision d'un tribunal, au Québec.

[Traduction]

    Comme je l'ai dit quand je me suis exprimé au sujet du projet de loi précédent, qui est maintenant le projet de loi C-7, il y a quatre ans et demi ou cinq ans, quand nous débattons du rôle de l'État dans les derniers moments de vie de l'un de ces citoyens, il y a de la compassion de part et d'autre. Beaucoup de gens ne veulent pas que leur prochain souffre dans les derniers moments de sa vie.
    Je reviens sur l'affaire Sue Rodriguez, quand la Cour suprême a été saisie de cette question pour la première fois. Une personne atteinte de la sclérose latérale amyotrophique, ou maladie de Lou Gehrig, perd ses capacités physiques et elle est confinée d'une manière horrible. Quand la fin de sa vie approche, est-elle apte à consentir, comme une autre personne pourrait le faire, et à décider elle-même de la manière dont sa vie se terminera?
    Il y a de la compassion de la part des personnes qui veulent pouvoir s'assurer du bien-être de leurs êtres chers. Il y a aussi de la compassion chez les personnes qui s'inquiètent que l'État prenne des décisions sur la qualité de vie. En fait, la juge du Québec a cité de nombreux discours prononcés lors de la législature précédente à propos de l'ancien projet de loi, dans la foulée de l'arrêt Carter, y compris mon propre discours. J'avais dit à quel point je craignais que nous nous retrouvions sur une pente glissante et que nous aurions à réexaminer la question quelques années plus tard. J'avais dit qu'un plus grand nombre de personnes vulnérables risquaient d'être emportées par une loi, et j'ai le regret de constater que c'est exactement là où nous en sommes.
    En tant que parlementaire, avocat, père, et fils d'une femme courageuse qui a lutté contre le cancer et dont la phase palliative de la maladie a été gravée profondément dans ma mémoire lorsque j'avais 9 ans, je suis ici pour veiller à ce que le projet de loi fasse l'objet d'un débat en bonne et due forme et qu'il contienne des mesures de sauvegarde. Les personnes qui laissent entendre que nous devrions précipiter le débat n'en comprennent pas la gravité.

[Français]

    Le débat qui nous anime aujourd'hui mérite d'être abordé avec respect et compassion. Ce n'est pas un débat normal sur des politiques normales. On parle du pouvoir de l'État d'enlever la vie à un citoyen à la demande de celui-ci. C'est un geste d'une énorme gravité, et le débat qui vise à encadrer cette loi est nécessaire. On parle ici de la valeur de la vie humaine, de la dignité humaine.
    Je sais que les gens des deux côtés de ce débat sont bien intentionnés, mais je crains que le projet de loi crée une première brèche dans la valeur que nous accordons à la vie. C'est une pente glissante que nous ne devons pas emprunter avec une loi aussi vague et sans garde-fou.

[Traduction]

    Dans l'arrêt Rodriguez, dans les années 1990, le juge Sopinka, qui représentait la Cour suprême à l'époque, a parlé de la distinction entre le rôle passif et le rôle actif de l'État en fin de vie. Le terme « passif » se rapporte aux soins palliatifs, au soulagement de la douleur et possiblement à la non-intervention, c'est-à-dire la non-réanimation. Cependant, lorsque l'État assume un rôle actif, ce rôle repose sur l'article 7 de la Charte, qui est fondé sur la dignité humaine. Le procureur général a été le greffier de Peter Cory, un juge de la même cour, et les divergences des juges McLachlin et Cory portaient d'ailleurs toutes les deux sur la dignité humaine en ce qui concerne l'article 7 de la Charte.
    Tous ces juges ont parlé du rôle de l'État dans la protection des personnes vulnérables dans la prise de leur décision, comme on les appelait, c'est-à-dire les personnes qui peuvent être poussées à demander un traitement de fin de vie parce qu'elles ont l'impression d'être un fardeau. Ce sujet fait l'objet de discussions depuis les années 1990, et le procureur général actuel supprime les mesures de sauvegarde de notre régime. Toute la jurisprudence sur la question de l'aide à mourir, de l'euthanasie ou du suicide assisté traite de la protection des personnes vulnérables.
    C'est aussi le cas dans l'arrêt Carter. Cet arrêt a réinterprété et modifié le précédent établi par la décision Rodriguez, le stare decisis, en raison des normes sociales, mais il n'a rien changé à la nécessité d'avoir des mesures de sauvegarde. La Cour suprême indique en effet, dans l'arrêt Carter, qu'un « système de garanties soigneusement conçu » est nécessaire et que les limites seraient scrupuleusement surveillées.
    C'est ainsi que l'arrêt Carter modifie la décision Rodriguez et autorise l'aide médicale à mourir au Canada. Le projet de loi C-7 ne prévoit toutefois pas une aide à mourir, mais bien une aide au suicide, puisqu'il n'exige plus que la mort soit raisonnablement prévisible et élimine les mesures de sauvegarde qui sont, d'après toutes les décisions rendues par la Cour à ce sujet, fondamentales pour que l'État puisse jouer un rôle en fin de vie.
    Le procureur général semble mal connaître toute la jurisprudence relative à l'aide à mourir. Je trouve honteux qu'il ne permette pas d'apporter au projet de loi des amendements raisonnables en vue de rétablir la diligence nécessaire pour protéger les personnes vulnérables. Il élimine la période d'attente de 10 jours. Alors qu'il s'agit de décisions aux conséquences irréversibles, dans lesquelles l'État participe activement à la mort de ses citoyens, il élimine aussi le fait d'exiger deux témoins.
     Le procureur général, qui est complètement déconnecté de la jurisprudence canadienne et de la décision de M. Cory, pour qui il a travaillé comme greffier, précipite les choses en laissant croire que nous sommes déraisonnables, alors que les conservateurs ne cherchent qu'à protéger les personnes vulnérables qui ne sont pas en mesure de prendre une décision, ce que les deux décisions de la Cour suprême, c'est-à-dire Rodriguez et Carter, décrivent comme étant essentiel à la dignité humaine, au sens de l'article 7 de la Charte. Tous les groupes représentant les personnes handicapées s'opposent à ce projet de loi tel qu'il est proposé par le gouvernement, en raison du retrait des mesures de sauvegarde et de la redéfinition.
    Krista Carr d'Inclusion Canada a déclaré:
    Assimiler le suicide assisté à un droit à l'égalité est un affront sur le plan moral. Le fait d'avoir un handicap ne doit pas devenir un motif acceptable de suicide sanctionné par l'État. L'aide médicale à mourir doit se limiter aux personnes en fin de vie.
    La professeure Grant de l'Université de la Colombie-Britannique, une éminente universitaire que j'inviterais le procureur général à relire, a déclaré:
    Les organismes voués aux personnes handicapées reçoivent presque quotidiennement des témoignages de gens qui songent à recourir à l’AMM à cause du manque choquant de ressources gouvernementales qui rend leur vie intolérable. Parmi celles-ci, on trouve des personnes qui sont hébergées en établissement, qui n’ont pas les moyens de payer leurs traitements ou qui sont isolées socialement. Nous avons tous été témoins des inégalités sociales liées à la COVID-19.
(1015)
    Le gouvernement semble quelque peu contrarié que la demande raisonnable du caucus conservateur concorde avec les deux décisions rendues par la Cour suprême qui reposent sur l'article 7 de la Charte et qui concernent le droit à la vie. Nous devons veiller à ne pas modifier le régime de la manière que j'ai décrite il y a cinq ans, c'est-à-dire en nous engageant sur une pente glissante à l'égard des personnes qui sont vulnérables dans la prise de leur décision, comme les personnes âgées isolées au sein d'une résidence.
    Nous avons entendu le témoignage de certaines personnes qui se sentaient obligées de demander l'aide médicale à mourir en raison du coût des soins palliatifs ou du manque de soins dans leur établissement. Certains professeurs et certains témoins autochtones ayant exprimé leurs objections ont souligné en particulier le problème des traumatismes générationnels, des pensionnats et des personnes qui ont vécu ce genre de traumatismes et de souffrances. L'État va-t-il alors se contenter de fournir à ces personnes un outil d'aide au suicide, ou devrions-nous plutôt chercher à les aider?
    C'est une question de compassion. L'État doit jouer un rôle approprié. Il ne faudrait pas changer fondamentalement un régime qui n'existe que depuis quelques années.
    J'ai dit au début qu'il y avait de la compassion dans les deux camps, mais le procureur général du Canada a une approche qui va à contre-courant. En fait, l'ancienne procureure générale, la députée de Vancouver Granville, a également critiqué l'approche imprudente du procureur général actuel en ce qui concerne le régime juridique depuis la décision Carter, car il enlèverait les mesures de sauvegarde qui doivent être scrupuleusement appliquées selon les deux tribunaux: le délai de 10 jours et la présence de quelques témoins.
    Tous les principaux groupes de personnes handicapées au Canada sont d'accord avec mes collègues conservateurs, dont la position est fondée sur la compassion et la raison. Je suis très fier des efforts que nous avons déployés dans le dossier. Des juristes, des dirigeants autochtones et des personnes travaillant avec des personnes souffrant de problèmes de santé mentale ont uni leurs efforts aux nôtres. J'ai travaillé sur les questions de santé mentale et de prévention du suicide pendant de nombreuses années depuis l'époque où j'étais dans les forces armées.
    Par ailleurs, nous ne fournissons pas non plus suffisamment d'aide en ce qui concerne les soins palliatifs. Pour revenir au cadre original établi dans l'affaire de Sue Rodriguez, où le juge Sopinka a parlé du rôle passif de l'État, il faut permettre à une personne de mourir sans douleur tout en étant consciente et permettre à la famille de se réunir autour d'une personne recevant des soins palliatifs. Nous devons faire mieux.
    En fait, le gouvernement a transgressé l'esprit de l'arrêt Carter en retirant les mesures de sauvegarde. N'oublions que les mesures de sauvegarde, qui ont été soigneusement conçues, sont essentiellement ce qui a motivé le changement de position de la Cour suprême entre l'arrêt Rodriguez et l'arrêt Carter. Pourquoi le gouvernement les retire-t-il, alors que des Canadiens vulnérables, des aînés et des défenseurs des personnes handicapées disent se sentir menacés? Mme Carr a affirmé, dans un autre commentaire, que le projet de loi C-7 est leur « pire cauchemar ».
    Quelle est la tâche du Parlement? Nous ne sommes pas que des délégués qui se contentent de répondre à des sondages. Dans la tradition de Burke, nous sommes ici pour présenter notre perspective et représenter avec ardeur nos collectivités, nos familles, nos valeurs et nos points de vue. Je ne peux imaginer un débat où il serait plus important de faire valoir ces valeurs.
    Comme la Cour suprême l'a déclaré dans l'affaire Rodriguez et depuis, c'est une question de dignité humaine dans l'application de l'article 7. Dans l'affaire Carter et l'affaire Rodriguez, il a toujours été entendu qu'on ne pouvait réserver un traitement injuste à une personne incapable physiquement de prendre une décision au sujet du suicide en fin de vie et qu'il fallait définir une approche. Tel était l'argument de la juge McLachlin lorsqu'elle a inscrit son opinion dissidente dans l'arrêt Rodriguez. Elle était d'avis que le choix à faire était cruel dans le cas de Sue Rodriguez.
    Il n'a jamais été question d'adopter une approche générale pour le suicide assisté, sans que le caractère irrémédiable de l'état du patient ou le caractère raisonnablement prévisible de sa mort fassent partie des facteurs à considérer. Cela ouvre la voie à un régime de suicide géré par le gouvernement, où on utilise des termes vagues concernant les problèmes de santé graves ou les handicaps en général. J'ai soulevé les mêmes réserves raisonnables il y a quelques années, concernant les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale, auxquelles nous sommes capables de fournir de l'aide, et concernant les personnes vulnérables qui ne sont pas en mesure de prendre une décision, ce qui est conforme à la position de la Cour suprême depuis une génération. C'est pour ces personnes que les mesures de sauvegarde existent.
(1020)
    Le gouvernement ne devrait pas nous faire la leçon sur le respect de l'échéance alors qu'il a prorogé le Parlement et qu'il n'a pas interjeté appel d'une décision qu'une cour supérieure a rendue sur une question fondamentale quelques années seulement après la décision rendue par la Cour suprême dans l'affaire Carter. Maintenant, il ne tient pas compte de l'avis de ceux qui militent pour les droits des personnes handicapées, ni de l'avis des dirigeants autochtones, des médecins, des juristes et de l'opposition. Qu'est-ce que nous réclamons? Nous ne sommes pas en train de dire qu'il faut éliminer le régime qui a été établi lors de la dernière législature. Nous voulons que les mesures de sauvegarde soient maintenues. Les critères établis en fonction de l'arrêt de la Cour suprême et de l'article 7 de la Charte ne seraient pas respectés sans les mesures de sauvegarde.
    Je suis fier que l'opposition conservatrice refuse de céder et d'abandonner les personnes vulnérables. Nous allons défendre avec vigueur le maintien des mesures de sauvegarde que l'État devrait appliquer à l'égard de décisions aussi sérieuses que celles que nos concitoyens devront prendre à la fin de leur vie. Nous sommes là pour représenter ceux qui n'ont pas voix au chapitre. Nous sommes là pour défendre les personnes qui, pendant cette pandémie qui les force à s'isoler, pourraient sentir qu'on les pousse à se soumettre à un régime de fin de vie contre leur plein gré.
    Même à l'extérieur du domaine politique, peu importe leurs allégeances, tous les Canadiens veulent que l'on prenne soin des personnes vulnérables. C'est tout ce que nous demandons. Si nous devons rester ici jour et nuit et tous les jours de la semaine pour défendre ces Canadiens, nous le ferons.
    Qui est déraisonnable? Est-ce le procureur général qui ne comprend pas la jurisprudence sur l'aide médicale à mourir? Je suis vraiment très déçu. C'est un ancien professeur de droit à l'Université McGill, et il ne semble même pas avoir lu les arrêts Rodriguez et Carter. Il supprime des mesures de sauvegarde qui sont essentielles pour protéger les personnes vulnérables qui ne sont pas en mesure de prendre une décision, selon les juges Sopinka, McLachlin et Cory, dans l'arrêt Rodriguez, et la juge McLachlin, dans l'arrêt Carter.
    La Cour suprême du Canada a toujours indiqué que nous ne pouvons pas autoriser l'aide médicale à mourir, le suicide assisté, l'euthanasie, ou peu importe l'appellation utilisée, et garantir le respect de l'article 7 de la Charte des droits et libertés, sans un système de garanties soigneusement conçu et scrupuleusement régi. Cela comprend une période de réflexion de 10 jours pour s'assurer que le moral de la personne faisant la demande n'est pas à son plus bas. Puis, l'État intervient. La présence de deux témoins est aussi requise pour s'assurer que l'on ne force pas ou ne contraint pas une personne vulnérable à choisir l'aide médicale à mourir. Ce sont là des amendements très raisonnables qui sont réclamés non seulement par les députés conservateurs, mais également par les Canadiens.
(1025)

[Français]

    Nous adoptons une approche raisonnable en proposant des amendements au projet de loi sur l'aide médicale à mourir. C'est un enjeu primordial pour notre société, et c'est pourquoi nous, de l'opposition officielle, sommes ici pour défendre les plus vulnérables de notre société. C'est pourquoi nous avons déjà proposé des amendements raisonnables pour nos aînés, pour les personnes handicapées et pour les Canadiens qui souffrent de problèmes de santé mentale.
    Ce débat est très important pour le bien-être des Canadiens et des Canadiennes de partout au pays. C'est pourquoi je suis fier de mon caucus, dont l'approche quant au projet de loi C-7 est empreinte de compassion et défend les plus vulnérables de notre société.

[Traduction]

    Or, c'est au gouvernement d'agir. Aujourd'hui, il demandera peut-être à la cour de repousser l'échéance, ce qu'il aurait dû faire il y a des mois. Il aurait dû interjeter appel de la décision ou ne pas proroger le Parlement. Même si nous avons une échéance à respecter, nous ne devrions pas oublier les gens que nous devons protéger.
    Lorsque nous nous présentons à la barre et que nous nous inclinons devant vous, madame la Présidente, c'est parce que le Parlement est un tribunal. C'est le plus haut tribunal et il doit y avoir un dialogue avec la Cour suprême lorsqu'il est question de décisions liées à la Charte. Le Parlement est souverain. Lorsque le gouvernement prétend que nous agissons de façon déraisonnable parce que nous voulons soutenir l'esprit de l'arrêt Carter, le tribunal qu'est le Parlement doit aussi être respecté. Le gouvernement n'a pas montré un tel respect jusqu'à maintenant.
    Si le gouvernement prenait simplement le temps de relire les arrêts Carter et Rodriguez et qu'il mettait en place les mesures de protection prévues, qu'il maintenait la dignité requise par l'article 7 de la Charte, nous aurions l'assurance que le droit garanti dans l'arrêt Carter serait respecté et qu'une approche rigoureuse serait en place pour protéger les personnes vulnérables qui ne sont pas en mesure de prendre une décision et les personnes les plus vulnérables de la société. Les conservateurs veulent que ces amendements raisonnables soient adoptés pour le bien-être du pays.
    Je suis heureux d'avoir l'occasion d'expliquer aux Canadiens que le Parti conservateur ne travaille pas à empêcher l'adoption du projet de loi ni à enfreindre un ordre de la cour. Le Parti conservateur travaille à faire respecter l'avis de la Cour suprême rendu dans deux arrêts concernant la protection des plus vulnérables de la société.
(1030)

[Français]

    Madame la Présidente, j'aimerais remercier mon collègue le chef de l'opposition officielle de son discours.
    Nous avons des comptes à rendre aux Québécois, aux Canadiens et aux Canadiennes, mais également à la Cour supérieure du Québec.
    J'aimerais savoir comment le chef de l'opposition officielle peut croire qu'il est approprié de ne pas tenir d'une décision de la Cour supérieure du Québec.
    Madame la Présidente, il est approprié de protéger les plus vulnérables de notre société. En fait, c'était la décision de la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Rodriguez ainsi que dans l'arrêt Carter.
    Malheureusement, ce n'était pas l'approche du gouvernement libéral. Nous sommes là, tout près de la date limite, et ce, à cause de la prorogation. Nous en sommes là à cause de l'inaction du gouvernement. C'est pourquoi nous présentons des amendements raisonnables. C'est pourquoi nous allons continuer à protéger les plus vulnérables, comme nos aînés du CHSLD Herron, par exemple, qui sont très isolés.
    Nous sommes ici pour les Canadiens, les handicapés et les aînés. C'est pourquoi les amendements, les garde-fous sont très importants.

[Traduction]

    Madame la Présidente, je souhaite apporter une correction. Le député parle beaucoup de santé mentale, mais le projet de loi indique clairement au paragraphe 1(2.1): « Pour l’application de l’alinéa (2)a), la maladie mentale n’est pas considérée comme une maladie, une affection ou un handicap. » À la section « Mesures de sauvegarde », l'un des critères prévus au paragraphe 1(3.1) est « que la personne qui a fait la demande d’aide médicale à mourir remplit tous les critères prévus au paragraphe (1) ». J'apporte cette précision, car il s'agit d'un débat d'une importance cruciale à la Chambre et que nous sommes responsables de fournir à la population canadienne des renseignements exacts.
     Le député parle aussi beaucoup de dignité. Les défenseurs des droits des personnes ayant un handicap avec qui j'ai collaboré m'ont dit se battre entre autres pour obtenir un revenu minimum garanti qui leur permettrait justement de vivre dans la dignité. Le député d'en face appuie-t-il la mise en place d'un revenu minimum garanti comme le demande la communauté des personnes handicapées?
    Madame la Présidente, je tiens à remercier la députée de Winnipeg-Centre de soulever ce qu'elle considère comme une disposition d'exclusion pour la santé mentale. Voici le problème. On peut concevoir la santé mentale comme une condition reconnue, un livre de psychiatrie à la main. On peut aussi la voir comme une personne en dépression qui se trouve dans une situation pénible et préjudiciable, une personne qui est isolée au milieu d'une pandémie, un aîné qui a l'impression d'être un fardeau pour sa famille. Pour revenir aux décisions Rodriguez et Carter — que j'invite tous les députés à lire, y compris le procureur général —, le consentement, les conditions préalables au consentement et l'examen après 10 jours servent justement à s'assurer que la décision n'a pas été prise par une personne dont l'état d'esprit était précaire parce qu'elle se sentait vulnérable ou sous la contrainte.
     La santé mentale fait partie des aspects de la prise de décision concernant la fin de vie, tout comme le stress et la douleur. Ce sont tous des facteurs à prendre en considération. C'est pourquoi la cour, dans la décision Carter, a déclaré qu'il est crucial de mettre en place un régime soigneusement conçu de mesures de sauvegarde. Or, le gouvernement ne propose pas un tel régime. Nous demandons des mesures de sauvegardes raisonnables pour protéger les plus vulnérables.
(1035)
    Madame la Présidente, je remercie le chef de l’opposition pour ses propos concernant le projet de loi. Je lui dirais qu'en fait, le projet de loi améliore les mesures de protection, notamment dans le deuxième volet, relativement au délai de 90 jours exigé pour l'évaluation et à l'expertise exigée pour les membres du groupe d'évaluation.
    Le député d'en face s'est donné beaucoup de mal pour citer une abondante jurisprudence en vue de remettre en question le caractère approprié du deuxième volet. Pourtant, la décision rendue dans l'affaire Truchon indique que le fait de priver les personnes qui ne sont pas en fin de vie, y compris les personnes handicapées comme Mme Gladu et M. Truchon, de l'accès à l'aide médicale à mourir est inconstitutionnel.
    Étant donné que nous avons mené de vastes consultations, que des Canadiens souffrent inutilement et que nous sommes saisis d'une mesure législative assez simple, le député d'en face exercera-t-il son ascendant pour convaincre son caucus de nous permettre de voter sur le projet de loi afin de soulager, au lieu de prolonger, les souffrances inutiles des Canadiens?
    Madame la Présidente, lorsque le gouvernement a éliminé l'aspect « irrémédiable, » il a fait passer le régime de l'aide médicale à mourir à un régime de suicide assisté. Le secrétaire parlementaire vient de le reconnaître dans ses observations.
    Le gouvernement élimine certaines mesures de protection. Il y facilite l'accès, rendant ainsi encore plus précaire la situation des personnes vulnérables qui ne sont pas en mesure de prendre une décision et éliminant du même coup deux mesures de protection. En fait, cela va directement à l'encontre de la clarté offerte par les affaires Rodriguez et Carter sur la dignité et sur les personnes vulnérables dans la prise de leur décision.
    Je demanderais au secrétaire parlementaire d'user de son propre ascendant. Nos amendements demandent seulement au gouvernement d'arrêter d'éroder les protections accordées. Le gouvernement foule aux pieds la décision du tribunal. En éliminant la disposition sur l'approche de la mort raisonnablement prévisible, il fait disparaître ce garde-fou. Cela devrait inquiéter les Canadiens, surtout vu l'isolation et la peur vécues en cette période de pandémie par certains de nos aînés. Ce sont des personnes vulnérables lorsque vient le temps de prendre une décision. Ce sont ces personnes que le tribunal nous demande de protéger.
    J'aimerais que le secrétaire parlementaire use de son ascendant, peut-être en remettant une copie de ces jugements au procureur général. L'ancienne procureure générale, qui a présenté le régime à la suite de l'arrêt Carter et qui était une libérale jusqu'à ce qu'elle soit expulsée par le premier ministre, s'inquiète de l'approche proposée, tout comme le font les groupes de personnes handicapées et un grand nombre des dirigeants autochtones, des professionnels en santé mentale et des députés de l'opposition. Tout ce que nous demandons, ce sont quelques mesures de sauvegarde raisonnables. Il revient au secrétaire parlementaire de laisser tomber les réponses toutes faites.
    Lorsque les libéraux ont décidé de proroger le Parlement, ils ont créé des contraintes de temps. Nous continuerons de défendre les personnes les plus vulnérables.
    Monsieur le Président, comme le chef de l’opposition l'a décrit, le projet de loi se rapproche d'un régime de suicide assisté. Le secrétaire parlementaire a ensuite parlé des Canadiens qui souffrent inutilement. Je crains les effets cumulatifs de ces deux aspects si l'État ne fait pas tout pour préserver la capacité des Canadiens à vivre dans la dignité.
    Le chef de l’opposition peut-il nous parler de la nécessité pour le gouvernement de prendre des mesures en ce qui concerne le soutien aux personnes handicapées, le logement, les soins palliatifs et les atrocités qui ont lieu en ce moment dans les centres de soins de longue durée du pays? Le chef de l'opposition peut-il parler du fait que la question ne se limite pas à cette mesure législative, mais qu'il faut établir un cadre grâce auquel les gens ne souffrent pas inutilement parce qu'ils ont de l'espoir et qu'ils ont accès à d'autres services et programmes?
    Madame la Présidente, je remercie ma collègue de Calgary Nose Hill de défendre les intérêts des personnes dont nous parlons.
    Comme l'ont dit certains juristes, dont la professeure Grant, de l'Université de la Colombie-Britannique, lorsque, d'une part, nous avons un manque de soins palliatifs ou de fin de vie efficaces, des problèmes entourant les soins de longue durée, des lacunes et des écarts mis en évidence par les pressions exercées par la pandémie, une incidence croissante des problèmes de santé mentale ainsi que des traumatismes découlant notamment de mauvais traitements pendant l'enfance, et que la société fait des pieds et des mains pour aider les personnes vulnérables à surmonter ces problèmes, mais que, d'autre part, le gouvernement affaiblit les mesures de sauvegarde pour maintenir ces gens hors du système exploité par l'État en ce qui a trait à la fin de vie, alors nous manquons à notre devoir envers nos citoyens.
    Nous tenons à protéger les personnes vulnérables. Comme je l'ai dit à l'ancienne procureure générale libérale, qui a présenté le régime qui a suivi l'arrêt Carter, je commençais à accepter ce régime, notamment parce que j'étais rassuré par les mesures de sauvegarde en place ainsi que par les critères exigeant que la condition doive être irrémédiable et la mort, raisonnablement prévisible. Le gouvernement modifie fondamentalement cela et supprime des mesures de sauvegarde alors que nous savons pertinemment que la pandémie rend encore plus de gens vulnérables.
    C'est une politique publique irresponsable à l'égard de la question la plus importante dont le Parlement ne sera jamais appelé à débattre. Voilà pourquoi j'espère que le gouvernement entendra raison. Il suffirait de quelques amendements raisonnables pour protéger de nombreux Canadiens.
(1040)
    Madame la Présidente, je suis très reconnaissante d'avoir l'occasion d'ajouter ma voix aux discussions concernant le projet de loi C-7, Loi modifiant le Code criminel relativement à l'aide médicale à mourir.
    Le projet de loi du gouvernement libéral vise à modifier la mesure législative sur l'aide médicale à mourir originale, qui a obtenu la sanction royale il y a à peine quatre ans. Le nouveau projet de loi a été créé en réponse à l'affaire Truchon, lorsque la Cour supérieure du Québec a statué qu'il était inconstitutionnel de limiter l'accessibilité à l'aide médicale à mourir aux personnes dont la mort naturelle est raisonnablement prévisible. Le 11 septembre 2019, il y a un peu plus d'un an, la juge de la Cour supérieure a statué que cet article portait atteinte à l'article 7 de la Charte des droits et libertés, qui garantit le droit à la liberté, à la sécurité et à la vie.
    La décision de la cour entrera en vigueur le 18 décembre 2020. Les conservateurs ont toujours maintenu leur position selon laquelle le gouvernement fédéral aurait dû porter cette décision de la Cour supérieure au Québec en appel devant la Cour suprême du Canada. Étant donné qu'il s'agit d'une décision qui a une incidence sur la vie et la mort des gens, je suis sincèrement d'accord avec la position de notre parti.
    Si le gouvernement libéral avait fait appel, les Canadiens auraient eu beaucoup plus de temps pour discuter de cette question vraiment cruciale. Par surcroît, si le gouvernement libéral n'avait pas prorogé le Parlement pendant six semaines en août et septembre, le Parlement aurait aussi eu plus de temps pour étudier et débattre le projet de loi. Cependant, le gouvernement libéral a carrément ignoré la nécessité d'une telle discussion. Nous allons maintenant voter sur une mesure qui élargit radicalement les conditions entourant l'aide médicale à mourir, et j'ai de nombreuses inquiétudes. Par conséquent, je n'appuierai pas le projet de loi.
    Je comprends le souhait de légaliser l'aide médicale à mourir au Canada. J'ai vu ma grand-mère souffrir terriblement à la fin de sa vie. L'aide médicale à mourir ne lui a pas été proposée, mais, franchement, je ne sais pas si elle l'aurait acceptée. C'était une femme très forte et très résistante, qui avait la langue bien pendue et qui était particulièrement douée pour l'écriture. J'ai hérité de ces talents. C'est pourquoi je suis ici aujourd'hui en tant que députée, ce dont elle aurait été extrêmement fière. Elle avait des aptitudes incroyables alors qu'elle n'avait même pas une huitième année d'études. Elle aurait accompli des choses étonnantes si elle n'était pas née dans une famille très pauvre de la campagne manitobaine.
    Elle a malheureusement été victime d'un accident vasculaire cérébral qui l'a rendue incapable de parler ou d'écrire, ses deux activités préférées. Puis, son diabète a fait des siennes et il a fallu lui amputer une jambe. Un peu plus tard, ses médecins nous ont dit qu'ils devraient amputer son autre jambe. Ce fut vraiment horrible, et je n'ai jamais vécu d'expérience plus terrible que de la voir traverser toutes ces épreuves. Je me demande si l'aide médicale à mourir aurait constitué une option plus douce pour elle. Voilà pourquoi je comprends pourquoi l'aide médicale à mourir a été légalisée au Canada, et j'en suis profondément reconnaissante.
    Toutefois, les conservateurs ont signalé certains problèmes de taille au sujet de cette nouvelle version étendue de l'aide médicale à mourir, et nous avons travaillé fort pour que les mesures de sauvegarde existantes restent en place pour les personnes les plus vulnérables au pays. Malheureusement, les libéraux ont voté contre chacun des amendements que nous avons proposés, et je ne comprends vraiment pas pourquoi. Nous avons présenté de nombreux arguments solides et sensés provenant de différents intervenants de partout au pays, la plupart n'ayant aucun lien partisan avec le Parti conservateur. En fait, il ne s'agit pas ici d'un enjeu partisan, mais il est traité comme tel par le gouvernement libéral, ce que je trouve profondément dérangeant.
    Quand j'ai mené mes recherches à propos du projet de loi pour définir ma position, j'ai découvert avec surprise que plus de 1 000 médecins avaient écrit au procureur général pour lui signaler leur opposition à cette mesure. Je lirai ici quelques extraits de leur lettre, qui m'a paru très convaincante. Voici ce qu'ils disent:
     Ce projet de loi, qui élargit l’« aide médicale à mourir » (AMM) pour inclure pratiquement tous ceux et celles qui sont malades et qui souffrent au Canada, s’il est adopté dans sa forme actuelle, fera de notre pays le leader du monde dans l’administration de la mort.
    En tant que médecins, nous sommes obligés d’exprimer notre stupéfaction [...] Le choc d’une maladie soudaine, ou d’un accident entraînant une invalidité, peut inspirer aux patients et patientes des sentiments de colère et de dépression, et ils peuvent se sentir coupables d’avoir besoin de soins; mais ces émotions, avec le soutien et l’attention nécessaires, peuvent se dissiper avec le temps.
    Ils ajoutent ensuite:
     Le soin et l’encouragement offerts par les médecins peuvent être le facteur le plus puissant pour surmonter le désespoir et ranimer l’espérance. Malheureusement, les patients et patientes ne peuvent plus avoir une confiance inconditionnelle en leur professionnel de la médecine pour défendre leur vie quand ils sont à leur état le plus faible et le plus vulnérable. Subitement, une injection mortelle fait partie du répertoire des interventions offertes pour mettre fin à leurs douleurs et à leurs souffrances.
    Voici enfin un dernier extrait:
    Le projet de loi C-7 permettrait à ceux et celles qui ne sont pas mourants de mettre fin à leur vie par injection mortelle administrée par un médecin ou une infirmière praticienne. Il est scandaleux que la plupart des protections que le Parlement avait estimées nécessaires en 2016 pour protéger les personnes vulnérables contre une mort injustifiée soient en voie d’être supprimées. En vertu du nouveau projet de loi, une personne dont la mort naturelle est considérée comme « raisonnablement prévisible » pourrait être diagnostiquée, évaluée et euthanasiée en une seule journée. Nous sommes très inquiets que la suppression de la période de réflexion de 10 jours et d’autres mesures de protection ne fasse qu’augmenter le nombre de morts par contrainte ou par manque de réflexion adéquate.
    La suppression imprudente des mesures de protection précédemment jugées essentielles mettra les patients et patientes vulnérables directement en danger, et pourrait même leur coûter la vie.
(1045)
    Les commentaires correspondent très bien à ce que nous avons entendu de la part de la communauté des personnes handicapées et d'autres groupes du genre au comité de la justice lors de l'étude du projet de loi. En fait, 72 groupes nationaux de défense des personnes handicapées s'y sont opposés. J'ai personnellement répondu à de nombreux appels d'électeurs de ma circonscription qui ont été les premiers à me dire qu'ils votaient habituellement pour le NPD, mais qu'ils se sentaient obligés de me contacter pour exprimer leur crainte quant aux conséquences de la mesure législative sur eux.
    Il y a une véritable terreur au sein de la communauté des personnes handicapées à l'égard du projet de loi. J'en ai été directement informé. Pourtant, le gouvernement libéral n'en tient absolument pas compte. Je ne comprends vraiment pas pourquoi.
    Plus encore, les libéraux ignorent même les Nations unies qui se sont prononcées à ce sujet. Une rapporteuse spéciale des Nations unies sur les droits des personnes handicapées a réagi à l'élargissement de l'aide médicale à mourir avec une consternation évidente. Voici ce qu'elle a déclaré:
    Je suis extrêmement préoccupée par la mise en œuvre de la législation sur l’aide médicale à mourir dans une perspective de handicap. On m'a informée qu'il n'y a pas de protocole en place pour démontrer que les personnes handicapées ont reçu des solutions de rechange viables lorsqu'elles sont admissibles à l’aide médicale à mourir. J'ai également reçu des plaintes inquiétantes concernant des personnes handicapées dans des institutions qui subissent des pressions pour obtenir de l'aide médicale à mourir, et des praticiens qui ne signalent pas officiellement les cas impliquant des personnes handicapées. J'exhorte le gouvernement fédéral à enquêter sur ces plaintes et à mettre en place des mesures de protection adéquates pour veiller à ce que les personnes handicapées ne demandent pas d’aide médicale à mourir simplement parce qu'il n'existe pas de solutions de rechange communautaires et de soins palliatifs.
    C’est une citation assez percutante, à mon avis.
    Nous savons qu’il existe de graves problèmes en ce qui concerne les soins palliatifs. Nous savons que 70 % des Canadiens, soit 7 sur 10, n’ont pas accès à des soins palliatifs en fin de vie au Canada. Je trouve ce chiffre choquant, et je n’avais aucune idée de cette situation avant de faire des recherches pour ce projet de loi.
    Je crois que, sans accès à des soins palliatifs de bonne qualité, nous n’offrons pas un véritable choix aux Canadiens. S’ils ne peuvent vivre paisiblement leurs derniers moments en profitant de soins sûrs et fiables qui répondent à leurs besoins, je comprends pourquoi l’aide médicale à mourir peut devenir si attrayante.
    Qui plus est, la pandémie de COVID-19 a vraiment levé le voile sur l’état terrible des soins aux aînés au Canada. À Winnipeg, les résidants des foyers pour personnes âgées ont énormément souffert. Bien que de nombreux foyers de soins font un travail phénoménal et exceptionnel, d’autres n’en font pas autant. Il y a quelques semaines, les Manitobains ont été horrifiés d’apprendre qu’un centre de soins pour personnes âgées situé juste à l’extérieur de ma circonscription manquait de personnel et était débordé par les cas de COVID-19.
    Lorsque les ambulanciers paramédicaux sont arrivés, ils ont constaté que certains résidants étaient morts depuis des heures et que personne ne s’en était aperçu. D’autres étaient gravement déshydratés et mouraient de faim. Si nous voulons que les gens puissent mourir dans la dignité, nous devons aussi veiller à ce qu'ils puissent vivre dans la dignité. C’est un volet essentiel de la discussion, et le gouvernement libéral n’en a aucunement tenu compte. En fait, dans leur plateforme électorale de 2015, les libéraux ont promis des milliards de dollars pour les soins palliatifs, mais ils n’ont pas tenu parole.
    De plus, j’ai trouvé alarmant que la période de réflexion de 10 jours prévue dans la loi initiale sur l’aide médicale à mourir soit éliminée dans ce projet de loi. Il est important de signaler que la loi actuelle sur l’aide médicale à mourir permet que cette période de réflexion soit levée dans certains cas; une certaine souplesse est donc déjà prévue dans le cadre actuel de la loi à cet égard.
    Je ne tiens pas à tout prix à conserver la période de 10 jours. Elle pourrait être un peu plus courte ou un peu plus longue. J’aimerais d’abord entendre à ce sujet des psychologues professionnels pour vraiment comprendre combien de jours il serait préférable d'accorder pour que les décisions de fin de vie ne soient pas prises sous le coup des émotions, ou dans le feu de l’action, pour ainsi dire. J’ai l’intime conviction qu’à tout le moins, quelqu’un qui demande l’aide médicale à mourir devrait profiter d’une certaine période de réflexion par la suite, puisqu’il n’y aura pas de retour en arrière.
    Il y a des journées plus difficiles que d’autres. Une personne peut avoir eu une mauvaise interaction avec un travailleur de la santé ou ne pas aimer sa nouvelle chambre ou son nouvel établissement; sa famille ne lui a peut-être pas rendu visite depuis un certain temps, ou alors elle vit simplement une journée physiquement ou émotionnellement difficile et douloureuse; il y a tellement de raisons pour lesquelles une personne dans son état le plus vulnérable devrait être protégée par des mesures de sauvegarde lorsqu’elle prend des décisions de fin de vie. Or, si ce projet de loi est adopté, l’aide médicale à mourir pourrait être demandée et obtenue en quelques heures.
    Mes convictions au sujet de la suppression de cette mesure de sauvegarde se sont renforcées en entendant l’ancienne ministre libérale de la Justice, la députée de Vancouver Granville, qui était responsable de la première mesure législative sur l’aide médicale à mourir il y a seulement quatre ans et demi, demander à l’actuel ministre de la Justice pour quelle raison il envisageait de supprimer cette période de réflexion, alors qu'enlever cette mesure de protection n’était pas prévu dans l’arrêt Truchon. La personne qui a présenté ce projet de loi il y a quatre ans et demi demande pourquoi les libéraux suppriment cette période de réflexion, mais nous n’avons reçu aucune réponse ferme du gouvernement libéral. Je trouve que cela en dit long. Pour des raisons inconnues, les libéraux sont allés bien au-delà de ce qu’exige l’arrêt Truchon lorsqu’ils ont rédigé le projet de loi C-7, alors à mon avis, ces préoccupations sont légitimes.
(1050)
    En fait, nous avons appris dans le « Premier rapport annuel sur l’aide médicale à mourir au Canada, 2019 » que 3,6 % des patients qui avaient présenté une demande écrite d’aide médicale à mourir ont retiré leur demande par la suite. Cela ne semble peut-être pas beaucoup, mais sur les 7 336 personnes qui ont demandé l’aide médicale à mourir, 263 ont changé d’avis.
    N’oublions pas que l’aide médicale à mourir est une mesure nouvelle au Canada et qu’il n’est pas facile de l’obtenir partout. Mes collègues peuvent imaginer le nombre de personnes qui présenteront une demande après l’adoption du projet de loi C-7. L’aide médicale à mourir est un principe de plus en plus accepté, mais nous savons que 263 personnes ont continué à vivre grâce à cette période de réflexion. Je pense qu’il est donc crucial de la maintenir. Malheureusement, elle va disparaître, parce que le gouvernement libéral refuse d’écouter.
    Les conservateurs ont également proposé un amendement qui prolongerait la période de réflexion de 90 jours pour les personnes qui demandent l’aide médicale à mourir et dont la mort n’est pas raisonnablement prévisible. Nous avons proposé de la prolonger jusqu’à 120 jours en citant des arguments solides. Plus de 1 000 médecins, que j’ai cités tout à l’heure, ont souligné que nous vivons dans un pays où, dans certaines régions, le temps d’attente pour consulter un psychiatre est de 4 à 8 fois plus long que le délai de 90 jours proposé dans le projet de loi pour les personnes dont la mort naturelle n’est pas considérée comme raisonnablement prévisible.
    Nous savons aussi que les idées suicidaires sont très courantes chez les gens qui se tirent d’un accident catastrophique avec, par exemple, une blessure qui bouleverse leur vie, mais qu’avec le soutien approprié, ces idées disparaissent, et ces gens retrouvent une vie heureuse et utile. De plus, dans bien des cas, il faut beaucoup plus de temps que les 90 jours prévus pour obtenir un fauteuil roulant ou des soins de réadaptation spécialisés de qualité. Je me demande donc à quoi sert un délai de 90 jours si une personne n’a pas accès à d’autres solutions pendant cette période. Je n’y comprends rien.
    Les conservateurs sont également convaincus que nous pouvons mieux protéger les patients vulnérables en exigeant qu’ils soient les premiers à demander de l’information sur l’aide médicale à mourir et que cette information ne leur soit pas offerte ouvertement ou cavalièrement comme s’il s’agissait d’un traitement ordinaire, comme un analgésique ou diverses thérapies. Les conservateurs croient que l’aide médicale à mourir est une question extrêmement sérieuse et que l’on ne devrait pas pousser les patients les plus vulnérables à la demander.
    Chaque fois que des députés de ce côté-ci de la Chambre affirment qu’il est possible d’exercer des pressions sur les patients au sujet de l’aide médicale à mourir, je constate que, pendant ces débats, les députés libéraux ferment les yeux. Ils se moquent et disent que cela ne se produit jamais, alors que le Comité de la justice a entendu autre chose. Des témoins lui ont dit que des pressions s’exerçaient et se faisaient sentir depuis quatre ans et demi.
    Roger Foley est un exemple tristement célèbre de cette pression. On lui a offert l’aide médicale à mourir à quatre reprises jusqu’à maintenant et il n’a jamais indiqué qu’il était intéressé. En fait, il a dit tout le contraire. Lorsqu’il a eu une mauvaise journée, on lui en a fait l’offre. C’était presque comme s’ils le tentaient en lui disant qu’il y a une façon plus facile et en lui suggérant de tout arrêter. Je trouve cela terrifiant.
    Je trouve le cas de Roger très alarmant. Des mesures de protection doivent être mises en place pour veiller à ce que, lorsque les gens en sont aux moments les plus faibles et les plus vulnérables, on ne leur offre pas quelque chose qui mettrait fin à leur vie pour toujours, mais plutôt diverses options pour améliorer les soins et le soutien, s’ils le veulent.
    Un autre problème que j’ai avec ce projet de loi, c’est qu’il propose d’élargir l’aide médicale à mourir si rapidement. En fait, le cadre initial de cette mesure législative a été légalisé il y a quatre ans et demi, ce qui est vraiment très peu de temps. La loi originale a fait l’objet de recherches et d’un examen approfondis, et de nombreuses mesures de protection ont été mises en place pour protéger les personnes les plus vulnérables. Ces mesures de protection étaient jugées essentielles à l’époque.
    Aujourd’hui, moins de cinq ans plus tard, le gouvernement libéral élargit massivement l’aide médicale à mourir et élimine bon nombre des mesures de protection qu’il a lui-même jugées essentielles dans la première mesure législative, il y a à peine cinq ans. À ce rythme, je crains beaucoup que nous débattions de l’élargissement de l’aide médicale à mourir aux enfants ou aux personnes ayant des problèmes de santé mentale au cours de ma vie, et je trouve cela absolument terrifiant.
    Qui plus est, ce projet de loi précède l’examen quinquennal obligatoire. J’ai l’impression que sans cela, nous allons à l’aveuglette, sans les données appropriées qui auraient pu être révélées dans le cadre d’un examen approfondi. Il y a des questions simples qui, je l’aurais espéré, auraient été évaluées dans le cadre de cet examen, comme celles-ci: « qui choisit l'aide médicale à mourir? »; « est-ce surtout les personnes âgées ou les pauvres? »; « s’agit-il de communautés racialisées ou de Blancs plus riches? »; « l’aide médicale à mourir a-t-elle une incidence sur certains groupes démographiques? »; « pourquoi ces données démographiques? »; « y a-t-il des thèmes récurrents motivant le choix de l'aide médicale à mourir qui pourraient être abordés en fournissant de meilleurs soins pendant la souffrance en fin de vie, plutôt que la mort? ».
    En tant que législateurs, nous devrions faire tout ce que nous pouvons pour offrir des solutions de rechange à l’aide médicale à mourir qui sont fiables et facilement accessibles à tous, mais le gouvernement actuel ne le fait pas du tout.
    Ce que je trouve intéressant à ce sujet, c’est que l’actuel ministre de la Justice libéral est responsable de cette expansion agressive de l’aide médicale à mourir. En fait, il avait voté contre le premier projet de loi libéral sur l’aide médicale à mourir, il y a quatre ans et demi, parce qu’il croyait qu’il n'allait pas assez loin. Nous connaissons depuis longtemps sa position, et cela m’amène à me demander si les consultations libérales sur ce projet de loi étaient vraiment impartiales. Cela explique peut-être pourquoi ce projet de loi va bien au-delà de ce que le juge de la Cour supérieure du Québec a demandé dans l’arrêt Truchon.
(1055)
    Il y a tellement de questions qui viennent avec les nouvelles libertés que l'aide médicale à mourir confère aux Canadiens. Personnellement, je demeure convaincue que nous avons la responsabilité, en tant que législateurs, de faire preuve de la plus grande prudence qui soit quand il est question de mettre fin à la vie de nos concitoyens. Nous assistons présentement à un énorme changement de mentalité relativement à l'aide médicale à mourir, alors nous devons avancer de manière posée en nous reposant sur des recherches rigoureuses et exhaustives, ce à quoi les nouveaux critères contenus dans le projet de loi n'ont toujours pas été soumis. En ce qui me concerne, l'élargissement proposé des critères d'admissibilité à l'aide médicale à mourir va trop loin, en plus d'être éminemment précipité.
    Le projet de loi C-7 supprimerait d'autres mesures de sauvegarde, comme la présence de deux témoins indépendants lorsqu'un patient signe sa demande d'aide médicale à mourir. Cette mesure sert de rempart contre les dérives et la coercition, en plus de soumettre la discussion avec le patient à une surveillance plus que nécessaire. Quand je pense qu'il faut deux témoins indépendants pour authentifier un testament, mais pas pour mettre fin à la vie d'une personne, j'ai l'impression de vivre dans un univers parallèle.
    Les conservateurs ont également proposé que la loi exige que les médecins qui autorisent les demandes d'aide médicale à mourir connaissent bien les problèmes de santé en cause. Il me semble que, pour une situation de vie ou de mort comme celle-ci, cette proposition devrait aller de soi. Eh bien non, les libéraux l'ont rejetée, encore une fois pour des raisons à peu près inexpliquées.
    De plus, des habitants de ma circonscription m'ont dit qu'ils craignaient sérieusement qu'on force des professionnels de la santé à administrer l'aide médicale à mourir même s'ils sont contre pour des raisons morales. Les libéraux insistent pour dire qu'il n'en sera pas ainsi et que la liberté de conscience des professionnels de la santé sera protégée. Toutefois, les communications à ce sujet ont été pour le moins lamentables, sans quoi je ne recevrais pas autant d'appels à ce sujet. J'exhorte le gouvernement libéral à consacrer plus de temps et d'énergie aux communications sur cette question en particulier.
    Je vais conclure en citant la lettre des 1 000 médecins que j'ai mentionnés au cours de mon intervention. Je cite:
    Notre profession a été forcée de faciliter le suicide au lieu de le prévenir, et ce, pour un nombre toujours croissant de personnes. Nous observons avec consternation et horreur la façon dont la nature de notre profession médicale a été si rapidement détruite par la création de lois malavisées. Nous, soussignés, déclarons que l’adoption du projet de loi C-7, si rien n’est fait, contribuera à la destruction de bien plus que notre profession médicale, mais fondamentalement, d’une société canadienne qui apprécie véritablement et qui prend soin de ses membres les plus vulnérables. Les Canadiens et Canadiennes méritent mieux.
    Madame la Présidente, je suis moi-même un ardent défenseur des soins palliatifs. J’ai été un membre fondateur du comité parlementaire qui a étudié les soins palliatifs et les soins de compassion; en outre, le plus grand centre de soins palliatifs du pays, la résidence Teresa Dellar, se trouve dans ma circonscription.
    La députée a dit que le ministre de la Justice avait voté contre le projet de loi initial, mais il l’a fait parce qu’il comprenait la jurisprudence et savait donc, dès le départ, que ce projet de loi était inconstitutionnel. Je trouve que le chef de l’opposition a fait preuve de désinvolture en disant que le ministre de la Justice ne comprenait rien à la jurisprudence.
    La députée a aussi dit qu’il fallait laisser aux gens le temps de réfléchir; or, avant la période d’attente de 10 jours, il y a une période d’évaluation qui leur permet certainement de bien réfléchir. Je n’arrive pas à comprendre comment la députée peut penser qu’en supprimant la période d’attente de 10 jours, nous empêchons les gens de réfléchir à leur décision.
(1100)
    Madame la Présidente, je me réjouis que le député ait un extraordinaire centre de soins palliatifs dans sa circonscription. Je voudrais bien que les autres députés puissent dire la même chose. Si le gouvernement libéral avait tenu la promesse qu’il a faite en 2015 d’investir des milliards de dollars dans les soins palliatifs, il y aurait beaucoup plus de centres, et pas seulement dans sa circonscription.
    Pour répondre à sa question concernant la période de réflexion de 10 jours, je suis toujours d’avis qu’il est très important qu’une fois leur décision prise, les personnes puissent poursuivre leur réflexion.
    Madame la Présidente, je remercie la députée de Kildonan—St. Paul d’avoir si bien expliqué les risques que pose le projet de loi pour les Canadiens.
    Je veux revenir aux soins palliatifs dont la députée a également parlé dans son allocution. Elle a raison de dire que le gouvernement libéral a annoncé, en 2015, son intention de soutenir les soins palliatifs, mais il ne l’a jamais fait. En 2017, il a réitéré cette annonce, mais il n’a rien fait. Il a récemment annoncé un investissement de l’ordre de 6 milliards de dollars sur 10 ans dans l’ensemble du pays. C’est une goutte d’eau dans la mer pour tenter d’améliorer les soins palliatifs dans tous les coins du pays.
    J’aimerais que la députée commente la situation en matière de soins palliatifs et revienne sur le cas de sa grand-mère. Tout à l’heure, elle a parlé avec émotion des soins de fin de vie prodigués à sa grand-mère et du rôle que les soins palliatifs ont joué dans sa situation. J’aimerais qu’elle nous dise comment il serait possible de les améliorer à l’avenir.
    Madame la Présidente, il y a de nombreux établissements de soins palliatifs dans ma circonscription qui sont absolument extraordinaires et qui font un travail remarquable, surtout pendant cette pandémie. Comme je l’ai dit plus tôt, il y a aussi d’autres foyers de soins pour personnes âgées à Winnipeg qui ne réussissent pas aussi bien. Comme je l’ai mentionné, à un moment donné, la situation était tellement grave dans une de ces résidences, avec tant de cas de COVID et une telle pénurie de personnel, que les ambulanciers paramédicaux qui ont été appelés sur les lieux ont été complètement abasourdis par ce qu’ils ont trouvé à leur arrivée. De nombreuses personnes étaient mortes depuis des heures et personne ne s’en était aperçu. Les gens mouraient littéralement de faim, selon ce qu’ils ont décrit.
    Ma grand-mère a reçu d’assez bons soins palliatifs, je dois dire, mais j’ai constaté qu’on aurait pu en faire davantage pour peut-être mieux la soutenir dans ses derniers jours. En rétrospective, il y aurait tellement de choses que je changerais. Nous le disons tous et le pensons tous à propos de nos grands-parents et de nos parents lorsqu’ils décèdent, mais je trouve que c’est un débat très important. Si nous voulons élargir l’aide médicale à mourir, nous devons aussi élargir l’offre de soins palliatifs.
    Madame la Présidente, j’écoute depuis cinq ans les nombreux débats qui ont cours au sujet de cette très importante question. Je crois très sincèrement que toutes les vies ont la même valeur. Nous devons souligner l’importance des soins personnels, des soins à domicile et des soins palliatifs. J’ai bien aimé nos discussions à ce sujet, et je tiens à préciser que des fonds ont été débloqués dans ce domaine.
    Le Parti conservateur fera-t-il preuve de transparence et d’honnêteté envers les Canadiens en énonçant la véritable raison pour laquelle il n’est pas prêt à faire adopter ce projet de loi?
    Il n’appuie pas le projet de loi et préférerait qu’il soit porté en appel devant une cour supérieure. S’il était au pouvoir, il n’adopterait pas ce projet de loi à ce stade-ci parce qu’il l’aurait renvoyé à une cour supérieure.
    Madame la Présidente, le député d’en face a raison. Nous aurions interjeté appel auprès de la Cour suprême. Lorsqu’il est question de vie ou de mort, un changement aussi important pour la société devrait absolument être soumis au plus haut tribunal du pays, point final.
    Madame la Présidente, je sais que cette question soulève des problèmes de conscience très graves. En tant que législateurs, il nous faut être très prudents.
    Je me souviens du moment où l’arrêt Carter a été rendu. Je suis avocat de formation. Je l’avais lu attentivement et j'étais préoccupé par le fait que le gouvernement y précise que la mort devait être raisonnablement prévisible, car cela n’était pas prévu dans l’arrêt Carter. Bien entendu, c'est ce qui a amené les demandeurs dans la décision Truchon, Nicole Gladu et Jean Truchon, à interjeter appel.
    Il vaut la peine de mentionner pourquoi ils l’ont fait. Mme Gladu avait 74 ans. Elle se déplaçait en fauteuil roulant. Elle souffrait du syndrome post-poliomyélite, une maladie qui affaiblissait ses muscles et réactivait la scoliose qu'elle avait quand elle était enfant. Elle avait de la difficulté à respirer et souffrait constamment. M. Truchon est né avec la paralysie cérébrale. Il n’avait plus l’usage de ses membres. En 2012, il avait perdu l’usage de son seul membre fonctionnel, son bras gauche, à cause d’une grave sténose spinale, ce qui l’avait presque complètement paralysé et lui causait des spasmes douloureux. Il avait renoncé à la plupart de ses activités et s’était tourné vers l’aide à la vie autonome, parce qu’il ne pouvait plus faire grand-chose par lui-même. Ces deux personnes se sont vu refuser l’aide médicale à mourir en vertu de la loi québécoise sur les soins de fin de vie, et elles ne répondaient pas aux exigences de la loi fédérale parce que leur décès n’était pas raisonnablement prévisible.
    Mon collègue est-il d’accord avec la décision rendue dans l’affaire Truchon, dans la mesure où elle concluait que l’exigence voulant que la mort soit raisonnablement prévisible constituait une violation des droits constitutionnels des Canadiens?
(1105)
    Madame la Présidente, je remercie le député de ses observations réfléchies. J’aurais aimé entendre ce que la Cour suprême aurait eu à dire au sujet de l’arrêt Truchon. Cela m’aurait rendue plus confiante à l’égard de cette décision, mais au bout du compte la suppression de l’expression « raisonnablement prévisible » m’inquiète. Je l’ai dit franchement dans mon intervention.
    Je me demande vraiment si, de mon vivant, je verrai cette disposition s’appliquer aux enfants dont la mort n’est pas raisonnablement prévisible ou à ceux qui ont un problème de santé mentale. En ce qui concerne la maladie mentale, je sais que le gouvernement a dit très clairement que ce projet de loi l’exclut, mais à la vitesse à laquelle nous l’élargissons, je ne suis pas convaincue que je ne verrai pas cela s’appliquer à la maladie mentale au cours de ma vie. Je trouve que c’est l’aspect le plus terrifiant de ce nouveau projet de loi.
    Madame la Présidente, j’aimerais revenir sur la question du secrétaire parlementaire au sujet de la différence entre la période d’évaluation et la période de réflexion. Je sais que des députés ministériels ont dit que cela ne pourrait pas se faire le même jour parce qu’une période d’évaluation est prévue avant la période de réflexion. Toutefois, aucun délai n’est fixé pour la période d’évaluation. Il n’y a aucune raison pour que la période d’évaluation ne puisse pas avoir lieu très rapidement. Nous nous retrouvons encore dans une situation où tout cela pourrait se produire d’un seul coup. Il n’y a pas de paramètres temporels pour la période d’évaluation. Le gouvernement aurait pu, s’il avait voulu, proposer un délai pour la période d’évaluation, mais il ne l’a pas fait.
    Madame la Présidente, je remercie le député pour cette question.
    Je le renvoie aux messages envoyés par 1 000 médecins sur cette question et dont j’ai cité des extraits dans mon allocution. Ils y expriment leur vive inquiétude et je suis d’accord avec eux.
    Madame la Présidente, j’aimerais que la députée parle du consentement concomitant et du fait que la loi n’exigerait même pas qu’on demande aux personnes si elles sont consentantes le jour où elles reçoivent l’aide médicale à mourir. Nous, les conservateurs, avons au moins proposé un amendement qui aurait obligé les intervenants à demander aux personnes de donner leur consentement le jour même. N’est-ce pas là le minimum de ce qui serait raisonnable?
    Madame la Présidente, je trouve préoccupant que le consentement ne soit pas demandé juste avant la procédure. Je sais que cette exigence a été supprimée et j’ai entendu beaucoup d’histoires sur les raisons de cela. La personne pourrait donner son consentement anticipé et recevoir l’aide médicale à mourir après avoir perdu essentiellement la capacité de donner son consentement. J’ai toutefois des réserves à cet égard. Là encore, c’est une question que nous aurions pu étudier plus en profondeur, si nous avions eu plus de temps, si le gouvernement libéral n’avait pas prorogé le Parlement.
    Madame la Présidente, nous en sommes maintenant à l’étape de la troisième lecture du projet de loi C-7. Cela veut dire que la Chambre a terminé son examen de tous les amendements et que nous devons maintenant nous prononcer sur la version définitive du projet de loi et ses conséquences.
    Avant de parler du projet de loi dans sa forme finale, je veux répondre directement à ce qui, selon moi, est le principal argument du gouvernement en faveur de cette mesure législative et d’autres mesures semblables. Il nous dit que c’est une question de choix, que les personnes ont le choix de vivre comme elles l’entendent et de mourir comme elles l’entendent. L’idée, c’est que la personne est la seule à pouvoir porter un jugement moral sur la manière dont elle veut vivre et mourir et que personne d’autre ne peut le faire à sa place. Elle est la seule à pouvoir juger de ce qui la rend heureuse. Personne d’autre qu’elle ne peut en juger.
    C’est le seul argument sérieux avancé par les défenseurs de ce projet de loi et d’autres mesures semblables. Bien entendu, nous devons aussi être sensibles aux autres arguments, moins sérieux qui sont avancés, par exemple, que c’est ce que les tribunaux nous demandent de faire ou que c'est ce que les gens que nous avons consultés nous ont dit de faire.
    Une petite partie de ce projet de loi correspond à la décision d’un tribunal inférieur, mais la plus grande partie a été inventée de toutes pièces par le gouvernement et par les gens qu’il a, ou qu’il n’a pas, consultés. Plus d’un millier de médecins ont signé une lettre pour s’opposer au projet de loi, et tous les organismes de défense des droits des personnes en situation de handicap qui se sont prononcés au sujet du projet de loi s’y sont opposés. Ce sont là des arguments frivoles qui découlent de la lecture de décisions judiciaires frivoles et de consultations frivoles.
    Comme je l’ai dit, pour appuyer ce projet de loi, on soutient que les gens devraient avoir le choix de prendre des décisions sur leur vie et sur leur mort parce qu’ils savent mieux que quiconque ce qui les rendra heureux. Soulignons que ceux qui avancent cet argument choisissent de l’appliquer de façon sélective. Même en laissant entendre que c’est une question de choix, ils insistent pour changer les termes que nous utilisons pour décrire ce choix afin que nous ne nous sentions pas trop mal.
    L’expression « aide médicale à mourir » a été inventée à l’époque de la présentation du projet de loi C-14, et elle n’est pas utilisée dans d’autres pays pour décrire le phénomène des médecins qui tuent leurs patients. Si c’est vraiment une question de choix, pourquoi faut-il inventer de nouveaux pseudotermes pour susciter de meilleurs sentiments face à ce choix?
    Si je demandais carrément à mes collègues s’ils pensent qu’une personne devrait pouvoir se suicider, je suis certain qu’un grand nombre d’entre eux répondraient qu’il ne s’agit pas là d’un suicide. C’est complètement différent, puisqu’il s’agit de l’aide médicale à mourir. Officiellement, ce qu’on entend par aide médicale à mourir, c’est faciliter le suicide, ou tuer dans un contexte médical. Nous prétendons nous concentrer sur le choix, mais nous sommes encore tellement mal à l’aise face à ce choix que nous inventons de nouveaux termes pour le décrire.
    Certains collègues n’aiment pas le mot « euthanasie » pour décrire le phénomène des médecins et des infirmières qui tuent des patients qui leur ont demandé de le faire. Voici ce que la ministre de la Santé a dit au Comité permanent de la justice et des droits de la personne: « [...] le fait qu'on parle de ce projet de loi comme étant la loi sur “l'euthanasie”, comme je l'ai entendu à la Chambre des communes, [porte] gravement atteinte à la dignité des personnes [...] »
    La ministre de la Santé sera peut-être intéressée d'apprendre que le mot « euthanasie » vient en fait de deux mots grecs, « eu », qui signifie bien, et « thanatos », qui signifie mort. Le terme euthanasie signifie « bonne mort ». Il est en soi une aseptisation de la notion de meurtre. Si le terme est trompeur, ce n’est pas parce qu’il est trop dur, mais parce qu’il est trop doux. Comme nous l’avons entendu, ce ne sont pas tous les cas de suicide assisté qui peuvent raisonnablement être qualifiés de bons décès, quelle que soit la définition qu’on leur donne.
    On remarquera que le terme « euthanasie » n’est jamais utilisé pour décrire l’administration de la peine de mort. Le terme a été inventé pour édulcorer l’idée du meurtre médicalisé d’une personne consentante. Il est instructif de constater qu’un terme édulcoré servant à désigner cette pratique a dû être remplacé par un nouveau terme édulcoré pour occulter davantage la nature véritable de l’acte commis, une fois que les gens ont eu pleinement conscience de sa signification et de sa réalité au niveau social.
    Il ne fait aucun doute que, dans 20 ou 30 ans, le terme « aide médicale à mourir » sera considéré comme maladroit et sera remplacé par un autre terme édulcoré, plus à la mode et plus réconfortant, pour désigner quelque chose qui nous met naturellement mal à l’aise. Si tout cela est une question de choix, et si nous sommes à l’aise avec ce choix, pourquoi ne sommes-nous pas à l’aise de parler franchement de gens malades qui se suicident et de médecins qui tuent leurs patients lorsqu’on leur demande de le faire? Ne serait-ce pas là une description plus simple et plus exacte du choix que beaucoup veulent défendre?
    S’il y a une pratique ou une activité que les gens ne se sentent pas à l’aise de voir décrite avec précision, nous devrions peut-être nous demander d’où vient ce malaise, plutôt que d’exiger que les images et les descriptions soient mises de côté.
    Les députés devraient également noter que l’idée du choix de mourir, ou du droit de mourir, est défendue de façon sélective. Certaines personnes ont le droit de mourir et d’autres pas, apparemment, et nous devons donc nous demander pourquoi ce principe est appliqué de façon sélective.
    Supposons que moi, un homme blanc en bonne santé, je vive une grande tragédie personnelle, comme la mort d’un enfant ou la rupture de mon mariage. Il est possible qu’à la suite d’un tel événement, je commence à éprouver une douleur existentielle extrême et à avoir des idées suicidaires. Si je me rends chez le médecin pour lui faire part de ma situation, il ne me présentera pas l’aide médicale à mourir comme un moyen de me sortir des difficultés auxquelles je suis confronté. Mon apparence, mon état de santé et d’autres caractéristiques indiqueront au médecin que ma vie vaut la peine d’être vécue. Nous savons tous que lorsqu’un jeune en bonne santé choisit de mourir, ceux qui l’entourent disent: « Quelle tragédie. Il avait tant de raisons de vivre. »
(1110)
    L’argument du choix de mourir ne s’applique pas à ceux qui, selon la société, ne devraient pas choisir de mourir, même si ces personnes sont sincères dans l’expression de leur douleur, dans leur impression que leur douleur est irrémédiable, tout comme dans leur désir de ne pas continuer à vivre. Qu’en est-il toutefois d’une personne plus âgée, qui est handicapée, qui ne correspond pas au modèle social stéréotypé de quelqu’un qui a la vie devant soi et qui se présente au système de santé en proie à une douleur existentielle et à des idées suicidaires?
    Nous savons, d’après les témoignages entendus au comité de la justice, que des gens dans cette situation se voient offrir l’aide médicale à mourir et que l’on exerce même des pressions sur elles en ce sens. Les personnes âgées ou handicapées se voient souvent offrir l’aide médicale à mourir sans l’avoir demandée. On a entendu ce genre de témoignages à maintes reprises au comité de la justice, et cela a été confirmé par la ministre responsable de l’inclusion des personnes handicapées, qui a reconnu à quel point elle est préoccupée par le fait qu’on offre régulièrement et proactivement aux personnes handicapées une aide médicale à mourir dont elles ne veulent pas.
    Nous estimons que c’est une contradiction importante et révélatrice du principe du libre choix. Pour certains, la mort est une option inacceptable qui devrait être activement déconseillée. Pour d’autres, c’est une option souhaitable qui devrait être vivement encouragée. La discussion ne porte donc pas seulement sur un choix entre deux options, mais plutôt sur le fait que ce choix s’articule différemment selon que l’on considère la vie d’une personne comme digne d’être vécue ou non.
    Voici ce qui préoccupe terriblement les représentants du milieu des personnes handicapées: dans quelle mesure ce projet de loi inclut-il les personnes handicapées, à l’exclusion des autres personnes, dans une nouvelle catégorie de gens pour lesquels on estime que la mort est une solution raisonnable?
    Supposons que l’un de mes quatre enfants souffre d’un handicap. Et supposons que j’apprenne à mes trois autres enfants à toujours persévérer parce que la vie vaut la peine d’être vécue, alors que je dis à mon quatrième enfant qu’il doit envisager l’aide médicale à mourir s'il se retrouve dans une situation avec laquelle il ne peut composer. Pensez-vous que mon quatrième enfant se sentirait privilégié d’avoir un tel choix? Ne pensez-vous pas qu’il se sentirait dévalorisé par le fait même que je lui propose cette option, uniquement à lui, parce que je présume que sa vie ne mérite pas d’être vécue?
    Le choix s’inscrit dans un contexte social. Quand on parle de choix, on sait que les gens font un choix entre plusieurs options et que la nature de ces options dépend de la société dans laquelle ils vivent.
    Auparavant, je pensais qu’il valait toujours mieux avoir de nombreuses options comme au restaurant où il est toujours plus intéressant d'avoir plusieurs options, et plus le menu est long, mieux c’est. Si aucune des nouvelles options proposées ne me convient, ce n’est pas un problème: je ne suis pas obligé d’en choisir une, mais je ne dois pas reprocher aux autres de vouloir avoir plusieurs options à leur disposition, même si ces options ne me plaisent pas. La longueur du menu ne nuit à personne. Mais en y réfléchissant bien, je me suis rendu compte que ce n’était pas si simple. Si je suis au restaurant et que les seules options disponibles sont du poulet ou du bœuf, je me dis qu’il est dommage qu’il n’y ait pas de poisson, de plats végétariens ou autre chose, car le fait d’avoir certaines options sur un menu change fondamentalement la nature de l’expérience.
    Supposons qu’en voyage, j’entre dans un restaurant qui offre des sandwiches de chair humaine, en plus du menu habituel. On peut raisonnablement affirmer que je ne prendrai pas un repas dans ce restaurant si je n’ai pas l’intention de commander un sandwich de chair humaine. Vraisemblablement aucun député ici présent ne serait tenté de prendre un repas dans ce restaurant, même s’il avait l’intention au départ de manger du filet mignon. Cet exemple montre que l’ajout d’une option peut modifier radicalement l'expérience dans un lieu ou un environnement donné. Une personne souffrant d’un handicap qui se voit proposer l’aide médicale à mourir vit une expérience très différente des soins de santé de celle à qui on offre régulièrement des soins qui valorisent la vie.
    Le fait que certaines personnes se voient offrir certains choix ou qu’elles soient encouragées à les faire, contrairement à d’autres, modifie radicalement leur expérience des soins qu’elles reçoivent. Dans ce meilleur des mondes qu’on nous promet avec ce qu’on appelle l’aide médicale à mourir, il y a quand même des gens qui recherchent des espaces sécurisés dans lesquels ils peuvent recevoir des soins qui mettent la vie en valeur. Il y a encore beaucoup de gens dans ce pays qui n’ont pas plus envie de recevoir des soins dans un établissement qui offre l’aide médicale à mourir qu’ils n’ont envie de manger dans un restaurant qui offre des sandwiches à la chair humaine. Ces gens-là devraient avoir la liberté de se faire soigner dans un établissement où le maintien de la vie est la seule option possible et où ils se sentent à l’abri de toute pression éventuelle s’ils éprouvent un moment de faiblesse ou s’ils en arrivent à penser qu’ils sont un fardeau inutile. Il y a encore des gens qui veulent se faire soigner par des soignants animés par la conviction que toutes les vies méritent d’être vécues, mais paradoxalement, ceux qui prétendent défendre la liberté de choix menacent en fait ces espaces sécurisés. Étant donné que ce projet de loi ne protège pas la liberté de conscience, les médecins sont obligés d’abandonner leur profession, et les établissements de soins qui mettent la vie en valeur sont obligés de fermer leurs portes.
    Nous nous demandons pourquoi nous avons une crise dans les établissements de soins de longue durée au Canada. C’est peut-être parce que beaucoup de gens qui travaillaient dans des organisations situées dans cet espace sécurisé sont contraints d’abandonner parce que leur liberté de conscience n’est pas protégée. Protéger la liberté de conscience des médecins et des établissements ne concerne pas seulement les droits des soignants. Cela concerne aussi le droit des malades de recevoir des soins dans un certain type d’environnement, si c’est ce qu’ils souhaitent.
    J’ai eu l’occasion de discuter avec un grand nombre d’électeurs de ma circonscription, y compris des gens qui sont tout à fait favorables à l’assouplissement de l’aide médicale à mourir, et j’ai constaté que les réalités actuelles de la configuration sociale du choix sont pour eux des facteurs décisifs. Autrement dit, ils veulent faciliter l’euthanasie parce qu’ils estiment que l’autre possibilité est intolérable. En l’absence de soins adéquats, en l’absence d’un traitement efficace de gestion de la douleur, en l’absence du soutien nécessaire au maintien de la dignité, les gens se résignent face à ces réalités et décident d’en finir plutôt que de supporter des conditions insupportables, alors que ces conditions peuvent être changées. La généralisation de l’euthanasie et les pressions qui vont s’exercer sur tous les établissements de soins pour qu’ils offrent ce service vont saper de plus en plus les soins qui mettent la vie en valeur.
(1115)
    Un jour, j’ai eu une longue conversation avec une dame de ma circonscription qui m’a expliqué les raisons pour lesquelles elle préconisait l’élargissement de l’euthanasie. Elle a avancé avec insistance les arguments classiques, comme le choix et le contrôle, puis m’a raconté une expérience pénible qu’elle avait vécue dans un établissement de soins pour un douloureux problème de constipation. Elle est allée demander de l’aide au poste de soins infirmiers où elle a reçu un accueil brusque et sans empathie. Le souvenir de l’humiliation qu’elle a ressentie après avoir longtemps essayé de résoudre son problème seule avant d’aller demander de l’aide auprès d’une personne qui lui a semblé insensible et dégoûtée a vraiment incité cette dame à réfléchir aux circonstances dans lesquelles elle pourrait vouloir mourir.
    Je peux comprendre ce qu’elle a ressenti à ce moment-là, mais je pense que la solution consiste à donner aux gens la possibilité de recevoir des soins de compassion. C’est tragique de voir que les gens envisagent la mort à cause d’une expérience qu’ils ont perçue comme était une humiliation et à laquelle il serait possible de remédier directement.
    Bon nombre des personnes âgées qui envisagent la mort disent qu’elles ne veulent pas devenir un fardeau pour les autres. Elles disent que c’est un choix, mais cette décision est aussi très révélatrice de ce qui se cache derrière ce choix. Il est rare qu’on entende des enfants insister pour payer un loyer à leurs parents ou pour vivre en autonomie parce qu'ils ne veulent pas être un fardeau pour leurs parents. Je n’ai certes jamais entendu mes enfants dire cela.
    Pourquoi les aînés ont-ils l’impression d’être un fardeau, alors que les enfants n’ont pas l’impression d’en être un? Là encore, c’est une question de contexte social. Si, depuis leur enfance, les enfants entendent leurs parents leur dire qu’ils sont un lourd fardeau pour eux, qu’ils coûtent beaucoup d’argent qui pourrait servir à autre chose et qu’ils les empêchent d’avoir une vie sociale, les enfants commenceraient probablement à penser qu’ils sont un fardeau.
    À l’inverse, si les personnes âgées et les personnes handicapées étaient constamment rassurées quant à leur rôle et leur contribution à la société, si elles se faisaient constamment dire qu’elles détiennent la clé de notre avenir, au lieu de se faire répéter qu’elles sont un fardeau, alors là, bien entendu, elles seraient plus susceptibles de choisir la vie et non la mort.
    Ce n’est pas seulement une question de choix. C’est plutôt l’architecture sociale du choix qui incite des personnes à faire des choix différents dans toutes sortes de situations, en fonction des options limitées qui leur sont offertes et de la façon dont ces différentes options se répercutent les unes sur les autres.
    Je vais renforcer cet argument en abordant un autre sujet. Les députés se souviennent sans doute que le projet de loi C-6 du gouvernement visant l’interdiction de la thérapie de conversion repose sur le principe que les gens ne peuvent pas consentir à quelque chose qui va à l’encontre de leur dignité humaine. Malgré mes réserves concernant le libellé du projet de loi C-6, je suis d’accord avec le principe que la thérapie de conversion est inacceptable et ne devrait pas être permise.
    À la lumière des projets de loi C-6 et C-7, je ne sais toujours pas ce que le gouvernement pense de la capacité d’une personne à consentir à un préjudice. Le gouvernement est-il d’avis que les gens devraient pouvoir consentir volontairement à des actions qui leur feront du tort? Si nous examinons ces projets de loi ensemble, nous pourrions conclure que le gouvernement trouve acceptable que les gens consentent à leur mort, mais pas à certains actes qui sont pires que la mort. Cependant, cette catégorisation subjective de certains préjudices comme étant pires que d’autres peut clairement être en contradiction avec la perception subjective d’une personne quant aux actes qui lui paraissent plus dommageables que d’autres.
    En tant que parlementaires, le temps est venu pour nous de parler des choix qui s'offrent aux personnes âgées et aux personnes handicapées, et de leur offrir d'autres options que la mort. Nous devons élargir nos discussions pour ne plus simplement parler d'une question de choix, mais examiner les différentes manières dont les choix sont présentés et qui mettent les gens dans des situations difficiles et douloureuses. Une société saine ne se contente pas de protéger le droit de ses citoyens de choisir entre diverses options, mais veille à ce que toutes les options soient suffisamment robustes pour que les choix des citoyens leur procurent du bonheur. Bien entendu, ce ne sont pas tous les choix qui mènent au bonheur.
    On peut faire des choix qu'on pense mener au bonheur, sans toutefois y parvenir. La décision est particulièrement grave quand le résultat est final et irréversible. La communauté dans son ensemble a un intérêt raisonnable à ce que le choix soit fait en fonction de tous les renseignements dont on dispose, en tenant compte du fait que l'on peut s'adapter à de nouvelles circonstances au fil du temps, et c'est souvent ce qui arrive. Croire en la poursuite du bonheur suppose non seulement de croire en la liberté, mais aussi en l'importance de bien réfléchir pour utiliser judicieusement cette liberté.
    Après avoir réfléchi à l'application de la notion de choix dans ce contexte, je souhaite à présent émettre quelques observations à propos des dispositions de ce projet de loi, et du moment où celui-ci a été présenté. Ce projet de loi propose d'éliminer l'exigence selon laquelle la mort doit être raisonnablement prévisible pour les personnes demandant l'euthanasie, et place celles pour qui la mort n'est pas raisonnablement prévisible sur une deuxième voie comportant certaines exigences distinctes. Le réexamen de la question de la prévisibilité raisonnable a été provoqué par une décision de justice au Québec, la décision Truchon, que le gouvernement aurait pu choisir de porter en appel, mais ne l'a pas fait.
    Ce projet de loi va bien au-delà de cette seule question. De fait, il vise à éliminer arbitrairement un certain nombre de garanties qui n'ont rien à voir avec la décision Truchon. Il supprime le délai de réflexion de 10 jours, réduit le nombre de témoins requis, et élimine l'exigence de consentement concomitant. Les experts ont notamment souligné que la suppression du délai de réflexion de 10 jours ouvrirait la porte à la possibilité pour une personne de recevoir l'aide médicale à mourir le jour même où il la demande.
    Certains députés se sont vigoureusement opposés à l'utilisation de cette expression. Le concept de mort le jour même est choquant, car il laisse entendre que le pire jour d'une personne pourrait bien être son dernier, et que des pensées suicidaires passagères pourraient entraîner une mort immédiate. Cependant, les députés mal à l'aise avec cette expression doivent admettre que le projet de loi tel qu'il est conçu ne contient aucun paramètre concernant les personnes dont la mort est jugée raisonnablement prévisible.
    Si les députés estiment que des paramètres temporels existent, j'aimerais alors qu'ils m'indiquent où ils se trouvent dans le projet de loi. Si les députés estiment que des paramètres temporels devraient exister, alors pourquoi n'ont-ils pas proposé leur réintroduction dans le projet de loi? Dans sa forme actuelle, le projet de loi ne contient pas d'exigences concernant les délais pour les personnes pour lesquelles la mort est raisonnablement prévisible.
    À l'étape de la troisième lecture, les députés devront se prononcer pour ou contre la possibilité d'obtenir l'aide médicale à mourir le jour même où elle est demandée. Comme l'a dit Wilberforce:
    Vous pouvez, certes, choisir de détourner le regard, mais vous ne pourrez plus désormais plaider l'ignorance.
(1120)
    Les conservateurs ont proposé des amendements raisonnables pour réintroduire la période de réflexion — mais plus courte — et des exigences en ce qui concerne le consentement concomitant et des témoins indépendants, en particulier, afin de tenir compte des différentes expériences dont ont fait part des personnes handicapées à propos du système de santé. Nous demandons aussi que les professionnels de la santé ne parlent d’euthanasie que si le patient aborde le sujet en premier. Ces garanties importent et elles visent à protéger les personnes vulnérables en réduisant le risque qu’on les incite à prendre des décisions précipitées dans des situations de vulnérabilité.
    En réponse à notre demande de garanties, le gouvernement a déclaré qu’il fait confiance aux professionnels de la santé et que ces règles ne sont pas nécessaires. L’objet d’une garantie n’est pas de répondre à ce qui est peut-être le cas moyen, mais d’établir une norme minimale. Nous parlons d’environ 100 000 personnes dans ce pays qui, du fait de leurs qualifications professionnelles, seraient habilitées à administrer l’euthanasie. Ces 100 000 personnes sont-elles tellement vertueuses ou dignes de confiance qu’il n’est pas nécessaire que des lois régissent leur comportement, contrairement au reste des citoyens? Je crois que la plupart des personnes dans le monde de la médecine font de leur mieux pour servir généreusement les autres, mais il suffit d’écouter les témoignages devant le comité de la justice pour s’apercevoir que certaines de ces personnes qui prodiguent des soins ne se montrent pas à la hauteur de leur mission. Nous avons tous besoin, dans une certaine mesure, de lois qui régissent nos comportements. Si nous avons besoin de règlements, comment pouvons-nous penser qu’il en aille autrement de ces 100 000 personnes? Est-ce qu’il n’y a pas de brebis galeuses? Je ne dis pas qu’il faudrait se montrer particulièrement soupçonneux à leur égard, mais qu’elles doivent être guidées dans leurs actes par des lois et des règlements, comme le reste des citoyens. Les personnes chargées d’ôter la vie à quelqu’un devraient le faire en respectant des paramètres strictement définis pour leur propre bien et pour le bien de tous. Je fais confiance aux médecins tout comme je fais confiance aux policiers, ce qui n’empêche pas qu’ils doivent être assujettis à des règlements et à une surveillance. Nous savons qu’il y a quelques brebis galeuses dans nos forces de police et s’il nous faut des garanties par rapport aux policiers parce qu’ils peuvent ôter la vie, alors, il nous en faut aussi par rapport aux personnes qui peuvent ôter la vie dans un contexte médical.
    Le gouvernement ne ménage pas ses efforts pour nous convaincre qu’il est temps d’agir et il prétend que ce sont les conservateurs qui retardent l’adoption de ce projet de loi. Il devait aller de soi que si le gouvernement veut que nous investissions dans l’adoption rapide de son projet de loi, il doit nous persuader qu’il s’agit d’un bon projet de loi, ce qu’il n’a pas fait. La décision Truchon nécessite une réponse, mais les choses seraient bien plus simples si le projet de loi portait seulement sur cette réponse, au lieu de proposer divers autres changements. Dans sa forme actuelle, nous sommes obligés d’examiner tous les éléments ensemble et pas uniquement la petite partie qui répond à la décision Truchon. C’est le choix du gouvernement, pas le nôtre.
    Voyons aussi comment nous sommes arrivés si près de l’échéance fixée par la cour. Le projet de loi a été présenté en février. En mai et juin, les conservateurs voulaient que la Chambre siège suivant une formule modifiée, mais le gouvernement a refusé. Puis il a enterré son propre projet de loi en prorogeant le Parlement en août. Avec toutes ces décisions, nous étions déjà au milieu de l’automne avant que le projet de loi soit examiné. Il n’a fait l’objet que de quatre séances de témoignages au comité de la justice. Le gouvernement a choisi de le retarder jusqu’à la dernière minute, puis de dire que le temps presse, au lieu d’opter pour un examen approfondi. Soyons clairs, il s’agit d’une tactique politique qui vise à soumettre ces changements radicaux à aussi peu de débat que possible.
    Quand j’étais élève au secondaire, j’ai eu l’honneur de participer à un programme spécial qui faisait de nous des députés d’un jour à l’Assemblée législative de l’Alberta. À l'une de nos réunions, un ministre progressiste-conservateur aguerri nous a expliqué comment les lois étaient adoptées. Les élèves étaient surpris par la longueur et la complexité du processus. Ils ont demandé pourquoi cela prenait autant de temps et s’il était possible de raccourcir un peu le processus. Le ministre nous a répondu qu’il était content que cela demande autant de temps parce qu’une des lois qui avaient été le plus rapidement adoptées à l’Assemblée législative de l’Alberta était la Sexual Sterilization Act de 1928 qui autorisait le gouvernement à stériliser des personnes handicapées contre leur volonté, car il estimait qu’elles imposaient à la société une charge excessive. Les législateurs de l’époque auraient dû prendre plus de temps pour écouter les personnes handicapées et réfléchir aux conséquences de ce qu’ils faisaient. J’ai retenu depuis la leçon: lorsque nous prenons des décisions précipitamment, nous risquons de porter atteinte aux droits fondamentaux de nos semblables, notamment des personnes handicapées.
    Les députés de ce côté de la Chambre qui soulèvent des questions et réclament qu’on prenne le temps d’examiner le projet de loi et qu’on mette en place les garanties voulues sont du bon côté de l’histoire. Comme dans le cas de la Sexual Sterilization Act de 1928, quand la loi sera abrogée dans cinq ou 50 ans, je serai fier de dire à mes petits-enfants que j’ai défendu la dignité immuable et universelle de chaque être humain.
(1125)
    Madame la Présidente, permettez-moi de commencer par dire que toute cette question du processus que préconise le Parti conservateur est un faux argument. La possibilité de débattre était et est encore là, si c’est vraiment le seul intérêt du Parti conservateur.
    Les conservateurs doivent se montrer plus transparents avec les Canadiens. Comme ils ne sont pas favorables au projet de loi, ils veulent l’empêcher d’avancer. Voilà la vérité. Je demande au député d’être franc avec les Canadiens, d’admettre que le Parti conservateur du Canada n’appuie pas le projet de loi et que c’est la raison pour laquelle nous en sommes là.
    Madame la Présidente, le secrétaire parlementaire confond deux questions.
    Est-ce que je pense que le projet de loi est mauvais? Oui. Ai-je voté contre en deuxième lecture et vais-je voter contre en troisième lecture? Oui. Ai-je voté pour les amendements raisonnables de mon ami de St. Albert-Edmonton qui aurait amélioré le projet de loi? Oui. Le gouvernement contrôle-t-il le calendrier législatif? Oui. Les libéraux auraient-ils pu ne pas proroger? Auraient-ils pu prévoir un débat sur le projet de loi en mai et juin? Oui.
    Par conséquent, cette situation d’urgence artificielle dans laquelle nous nous trouvions est fabriquée par les décisions que le gouvernement a prises. Il s’agit d’une urgence fabriquée par les libéraux eux-mêmes, destinée à limiter le débat réfléchi sur le projet de loi. Oui, je pense que c’est un mauvais projet de loi, mais je pense aussi que nous aurions pu en débattre en mai et juin. Nous aurions pu l’examiner plus tôt si les libéraux n’avaient pas prorogé et nous aurions pu laisser au comité de la justice le temps nécessaire pour l’étudier.
    Il y a eu quatre réunions avec des témoins. Les conservateurs ont présenté des motions pour demander que nous en ayons cinq, que nous tenions une réunion de plus, vu l’inquiétude généralisée au sein de l’opposition. Nous avons reçu de nombreux mémoires soumis par des médecins qui ont été rejetés au départ en raison d’un calendrier arbitraire qui n’avait même pas été publié. Ce n’est qu’après une motion du député de St. Albert-Edmonton que ces mémoires ont pu être traduits et présentés, mais même là, ils ont été distribués bien après l’examen des amendements.
    C’était un processus déraisonnable, fabriqué par un gouvernement qui voulait que le projet de loi ne soit pas soumis à un débat sérieux.
(1130)
    Madame la Présidente, la majeure partie des critères initiaux du projet de loi C-14 sont toujours dans le projet de loi C-7, à mon avis.
    Pour bénéficier d’une aide médicale à mourir, une personne doit satisfaire aux critères d’admissibilité suivants: bien sûr, elle doit être majeure. Elle doit être apte à prendre des décisions pour elle-même à propos de ses soins de santé. Elle doit faire une demande volontaire d’aide médicale qui ne résulte pas d’une pression externe, par exemple, d’un professionnel de la santé ou d’un membre de sa famille. Elle doit donner son consentement en connaissance de cause après avoir reçu tous les renseignements nécessaires pour prendre sa décision, y compris un diagnostic médical, les formes de traitement disponibles et les options qui s’offrent à elle pour apaiser ses souffrances, y compris les soins palliatifs. Elle doit avoir une affection médicale grave et irrémédiable, c’est-à-dire que la personne doit souffrir d’une maladie ou d’une incapacité grave et irrémédiable, un état avancé de détérioration de ses capacités qui ne peut être inversé et éprouver des souffrances physiques ou psychologiques intolérables dues à une maladie, une affection ou un état de détérioration qui ne peut être soulagé dans des conditions que la personne juge acceptables.
    Mon collègue souscrit-il à la possibilité pour les personnes qui remplissent ces critères d’avoir accès à l’aide médicale à mourir?
    Madame la Présidente, encore une fois, il y a une certaine confusion ici entre quelques points. Le député a parlé de critères d’admissibilité. Il y a des critères d’admissibilité, il y a des garanties pour confirmer que ces critères d’admissibilité sont effectivement remplis de façon réfléchie, il y a aussi une question de contexte. Les gens ont-ils accès à ces solutions de rechange?
    Par exemple, si une personne souffre de façon grave et irrémédiable parce qu’elle n’a pas accès à des soins qui apaiseraient ses souffrances, elle peut répondre aux critères d’admissibilité. Cependant, un problème de contexte se pose ici, dans le fait qu’elle prend une décision basée sur des options limitées parce que le système ne lui a pas fourni les soins qu’elle souhaitait.
    En ce qui concerne les garanties, nous avons tellement entendu de choses au comité de la justice et j’invite le député à prendre connaissance des témoignages de personnes handicapées qui ont décrit des situations où elles ont subi des pressions et se sont vu reprocher d’être égoïstes de ne pas vouloir s’engager dans cette voie. Nous avons des cas de pressions. Il est clair qu’il s’agit de problèmes et, en principe, les députés diront que cela ne devrait évidemment pas se produire. Cependant, le fait est que cela se produit actuellement et que les personnes qui ont exercé ces pressions n’ont pas été poursuivies et n’ont pas fait l’objet de mesures disciplinaires.
    Le gouvernement a soutenu que personne n’a été poursuivi en vertu de cette loi, ce qui veut dire qu’elle fonctionne bien. Comme nous avons reçu des témoignages selon lesquels elle ne fonctionne pas bien et qu’il n’y a pas eu de conséquences pour les auteurs d’abus, cela donne à penser que les garanties, telles qu’elles existent, échouent. Le gouvernement veut supprimer davantage de garanties sans régler certains des problèmes liés au contexte. Je veux en priorité régler les problèmes de contexte et les problèmes de garantie afin de protéger les personnes vulnérables.
    Madame la Présidente, ma question porte davantage sur la discussion des services de soins palliatifs qui fait partie de ce dossier. J'ai la grande chance d’avoir deux centres de soins palliatifs dans ma circonscription. J’ai le centre Georgian Triangle et le centre Matthews House. Les deux éprouvent des difficultés ces jours-ci à cause de la COVID et de l’impossibilité d’amasser des fonds dans le cadre de collectes. Ils s’adressent à la collectivité et font un travail extraordinaire. Il s’agit de mourir dans la dignité, non seulement pour la personne, mais aussi pour les membres de sa famille.
    Premièrement, il est évident que le gouvernement n’investit pas assez dans ce type d’établissement. Deuxièmement, quelle est l’importance par rapport au projet de loi d’avoir d’autres options pour les personnes qui souffrent en fin de vie?
    Madame la Présidente, il est merveilleux d’entendre des députés à différents moments de ce débat parler de l’excellent travail effectué dans leurs circonscriptions par ceux qui accompagnent les gens dans leurs derniers jours et qui s’emploient à fournir des soins palliatifs de bonne qualité. C’est une tragédie que la plupart des Canadiens n’y aient pas accès et que de nombreux Canadiens se voient offrir la mort bien avant de pouvoir recevoir ces choses qui leur permettraient de gérer efficacement leur douleur.
    C’est un choix que nous devons faire en notre qualité de législateurs. Nous devons examiner l’architecture de ce choix qui se présente aux gens. Comme je l’ai dit, il ne s’agit pas seulement d’offrir des choix aux gens. Il s’agit de se demander quelles sont les options qui s’offrent à eux et de dire que si nous retirons tout de cette option de vie, si nous n’avons pas de soins palliatifs appropriés, si nous n’avons pas de soutien efficace en fin de vie, si nous n’avons pas de gestion efficace de la douleur et si nous disons ensuite aux gens qu’ils ne peuvent choisir qu’entre la douleur et la mort, ce n’est évidemment pas un choix souhaitable. Nous pouvons cependant aider les gens à sortir de ce dilemme en leur proposant autre chose. S’ils ne peuvent que choisir entre la douleur et la mort, ce n’est pas une situation idéale. Ce n’est pas une situation dans laquelle nous voulons que les gens se trouvent et il existe des technologies permettant de mieux gérer la douleur que celles offertes à la grande majorité des Canadiens actuellement.
    Au cours des cinq dernières années, on nous a présenté de nombreux projets de loi visant à accélérer la mort, mais pas à traiter la vie. Malheureusement, cela envoie un message clair sur les priorités du gouvernement en ce qui concerne les personnes âgées et les personnes handicapées.
(1135)
    Madame la Présidente, mon collègue parle du contexte et des options. C’est exactement ce que me disent les représentants de la communauté des personnes handicapées dans ma circonscription. Ce sont des gens qui, avant la COVID, touchaient une pension d’invalidité d’environ 1 000 $ par mois. Ensuite, nous avons donné à tout le monde une PCU de 2 000 $ par mois, parce que nous estimions que c’était ce dont les gens avaient besoin pour vivre dans la dignité.
    Le député parle de la tragédie dans les établissements de soins de longue durée. Compte tenu de ces options, mis à part le projet de loi C-7, le député appuierait-il la proposition du NPD visant à intégrer les soins de longue durée dans la Loi canadienne sur la santé afin que nos aînés reçoivent les soins qui leur sont dus? Serait-il pour l’augmentation des pensions d’invalidité à 2 000 $ par mois pour que ces personnes puissent vivre dans la dignité comme elles le méritent?
    Madame la Présidente, nous allons être d’accord avec le NPD sur le principe selon lequel nous devons faire plus et mieux pour soutenir les aînés et les handicapés. Dans certains cas, nous pourrons ne pas nous entendre sur le mécanisme, car les conservateurs aiment l’idée des partenariats qui peuvent par exemple exister dans la prestation des soins palliatifs et des soins de longue durée. Nous pensons qu’en écoutant notre conscience, en respectant ce qui peut être le mandat unique et particulier de certains de ces établissements privés à but non lucratif, grâce à des partenariats comme celui-ci, nous pouvons en faire plus et offrir plus collectivement. La solidarité ne se limite pas à ce que fait le gouvernement. La solidarité, c’est ce que nous faisons tous ensemble, les politiciens ainsi que les organismes à but non lucratif, les groupes religieux et les groupes communautaires.
    Nous pouvons ne pas nous entendre sur certains de ces mécanismes, mais nous espérons pouvoir travailler ensemble suivant un cadre commun qui nous dit que nous devons faire mieux pour que les gens aient accès à une option de vie digne.
    Madame la Présidente, je suis heureuse de prendre la parole à la Chambre sur cette question très importante et de continuer à être la porte-parole de ceux qu'on persiste à ignorer.
    Le gouvernement agit comme s'il était prioritaire de faire adopter la loi à toute vitesse pour respecter l’échéance de la décision Truchon. Les Canadiens souffrent à cause de la pandémie, et tandis que des gens et des entreprises continuent de glisser entre les mailles du filet, le gouvernement donne la priorité à l’élargissement de l’accès à l’euthanasie plutôt qu’à fournir aux Canadiens le soutien dont ils ont besoin. C’est choquant de constater qu’il fait adopter ce projet de loi à la course, avant même que l’examen quinquennal obligatoire du régime d’euthanasie au Canada n’ait eu lieu. C’est une imprudence qui coûtera la vie à des gens.
    La décision Truchon n’est pas une décision juridique exécutoire pour la Chambre des communes, mais le gouvernement choisit d’agir comme si elle l’était, malgré les appels de ce côté-ci de la Chambre en faveur de sa contestation. Lorsqu’on a affaire à une chose aussi grave, avec des enjeux aussi élevés que la vie et la mort, il est impératif que le processus ne soit pas précipité par la décision d’un tribunal provincial inférieur. Nos citoyens vulnérables méritent mieux. En toute honnêteté, cette échéance n’est que de la poudre aux yeux.
    Étonnamment, non seulement le projet de loi C-7 étend l’accès à l’euthanasie à ceux pour qui la mort n’est pas raisonnablement prévisible, mais il va au-delà de la décision Truchon en éliminant les mesures de sauvegarde nécessaires qui sont en place pour protéger les personnes vulnérables. En éliminant la période de réflexion de 10 jours, les personnes qui sont près de la fin de leur vie pourront recevoir une aide médicale à mourir le jour même où elles la demanderont. Cela signifie, essentiellement, que pour de nombreux Canadiens, le jour le plus sombre de leur vie sera leur dernier jour.
    J’aimerais souligner une statistique importante qui se trouve dans le « Premier rapport annuel sur l’aide médicale à mourir au Canada » publié en 2019. Selon ce rapport, à la date de sa publication, 263 Canadiens qui avaient demandé l’aide médicale à mourir avaient fini par retirer leur demande. En raison de la période d’attente actuelle de 10 jours, 263 vies canadiennes ont été sauvées. Manifestement, ces personnes avaient l’impression de vouloir mourir quand elles en ont fait la demande, mais elles ont décidé quelques jours plus tard qu’elles voulaient continuer à vivre.
    Si la période de réflexion de 10 jours n’avait pas été en vigueur, la vie de 263 Canadiens aurait pu se terminer prématurément. C’est peut-être un appel téléphonique d’un ami de longue date, une rencontre avec un membre de la famille ou de bonnes nouvelles de leur médecin qui les ont motivés à changer d’avis. Peu importe. Le fait est qu’elles ont changé d’avis. Pourquoi le gouvernement veut-il priver les Canadiens de la possibilité de prendre une telle décision? Il justifie la nécessité du projet de loi C-7 par la décision Truchon, mais où cela est-il dit dans la décision Truchon?
    L’exigence du consentement final est une autre mesure de sauvegarde importante que le projet de loi C-7 cherche à éliminer. Cela me fait vraiment peur. Le raisonnement qui en sous-tend la suppression est le fait qu’une personne peut perdre sa capacité de consentir à l’euthanasie avant qu’elle ne soit pratiquée si sa maladie progresse et entraîne un déclin cognitif important. Par conséquent, les personnes peuvent consentir à l’avance à ce qu’il soit mis fin à leur vie si elles perdent la capacité de prendre une décision aussi difficile.
    Je trouve fort intéressant que nous convenions tous qu'un crime est commis si une personne n’est pas en mesure de consentir à l’avance à une activité sexuelle et qu’on abuse d'elle alors qu'elle n’est pas en état de dire non. Cependant, le gouvernement pense que des personnes peuvent consentir à l’avance à ce qu’on mette fin à leur vie, même si elles perdent la capacité de dire non au moment de la procédure. Le problème que pose le consentement préalable, c’est qu’il est impossible de savoir ce que souhaite une personne si elle est incapable de le communiquer. On ne peut pas savoir si une personne dans cet état veut vraiment mourir. Peut-être que la personne a changé d’avis et souhaite continuer de vivre lorsque l’aide médicale à mourir est administrée, mais qu’elle ne peut pas le dire. C’est épouvantable.
    Les risques qu’entraîne la suppression des 10 jours de réflexion et de l’obligation d’un consentement final sont trop graves pour que je les accepte. Nous ne devons pas oublier qu'il s'agit d'une question de vie ou de mort. Le gouvernement doit protéger les Canadiens vulnérables. Il doit veiller à ce que des mesures de sauvegarde soient en place, et leur suppression met des vies en danger.
    J’aimerais rappeler au gouvernement que, dans sa précipitation à respecter une échéance inutile, il a ignoré la voix des Canadiens handicapés, de leurs médecins et de leurs défenseurs. Je rappelle aux députés les paroles de Krista Carr, directrice générale d’Inclusion Canada, qui a dit que ce projet de loi est « le pire cauchemar » des Canadiens handicapés. Il y a aussi les paroles de Catherine Frazee, qui a déclaré que le projet de loi dit aux gens comme elle que leur vie ne mérite pas d’être vécue.
(1140)
    Il y a aussi la Dre Heidi Janz qui a déclaré au comité de la justice que le projet de loi « fera en sorte que des personnes handicapées chercheront à bénéficier de l’aide médicale à mourir comme solution ultime, après avoir été opprimées par le capacitisme toute leur vie ». Roger Foley a courageusement expliqué au comité, depuis son lit d’hôpital, que si le projet de loi est adopté, il ne survivra pas et que le Parlement du Canada aura son sang sur les mains.
    J'interviens ici à la Chambre pour rappeler au gouvernement les paroles qu’il a refusé d’entendre. L’option de l’euthanasie pour les personnes qui ne sont pas mourantes est dangereuse et relève du capacitisme. Ce n’est pas moi qui le dis. Ce sont les personnes concernées elles-mêmes.
    Les médecins qui travaillent avec les Canadiens handicapés ont déclaré très clairement au comité qu’une période de réflexion de 90 jours n’est pas assez longue. Ils ont expliqué que les tendances suicidaires sont très courantes en cas d’épisode médical catastrophique, mais qu’avec de bons soins et du soutien, il est presque toujours possible de surmonter ces tendances.
    Lors de ma dernière intervention au sujet du projet de loi, j’ai présenté à la Chambre l’histoire de Kristine Cowley. Depuis les lésions médullaires qu’elle a subies il y a 33 ans, Kristine vit le genre de vie dont la plupart des personnes valides rêveraient, mais il lui a fallu des années après son traumatisme pour se sentir de nouveau bien. Elle craint que des personnes comme elle décident de mettre fin à leurs jours dans un moment de découragement total.
    Je vais maintenant raconter l'expérience de David Shannon. David a subi un traumatisme de la moelle épinière pendant une mêlée de rugby à l'âge de 18 ans. Il a dit qu'après son accident, il a frôlé la mort plus souvent qu'il n'ose l'imaginer lorsqu'il restait au lit. David a fini par faire carrière comme dirigeant d'une organisation non gouvernementale et au sein d'un cabinet d'avocat spécialisé dans les droits de la personne et le droit de la santé.
    Je vais citer David:
    J'ai accompli beaucoup de choses dans ma vie. J'ai parcouru le pays d'un océan à l'autre dans mon fauteuil roulant. J'ai sauté d'un avion à 25 000 pieds d'altitude. Je me suis rendu jusqu'au pôle Nord et j'y ai planté une pancarte indiquant un stationnement accessible aux personnes handicapées. J'ai écrit un livre, j'ai joué dans des pièces de théâtre et à la télévision. J'ai obtenu mon diplôme de droit et j'ai été commissaire aux droits de la personne. J'ai également reçu l'Ordre de l'Ontario et l'Ordre du Canada. J'ai aimé et j'ai été aimé. L'accomplissement dont je suis le plus fier est celui d'avoir profité de la vie.
    À plusieurs reprises au cours de ce débat, des députés de ce côté-ci de la Chambre se sont demandé combien d'histoires comme celle-là passeront inaperçues si le projet de loi C-7 est adopté. J'exhorte mes collègues à bien se rendre compte de ce qu'on leur demande de faire. À l'instar du retrait des mesures de sauvegarde, le fait que l'adoption de ce projet de loi puisse entraîner la mort prématurée de personnes comme David Shannon et Kristine Cowley représente à mon avis un risque beaucoup trop important pour que je l'accepte.
    Ceux qui appuient ce projet de loi continuent de s'en remettre à la notion d'autonomie pour justifier leur volonté de faire fi de ces risques. Voici un autre commentaire de David Shannon à ce sujet:
    Ce qui me choque le plus au sujet du projet de loi C-7, c'est qu'il constitue une autorisation implicite de promouvoir la mort. Pourquoi n'encourage-t-on pas plutôt l'autonomie des gens? Lorsqu'on est blessé, il faut d'abord faire des compromis. Il faut savoir qu'il existe des mesures de soutien, que la vie peut être fantastique, qu'on n’est pas obligé de quitter ce monde et nos proches.
    Lorsqu'une personne est blessée, elle est affaiblie. Lorsqu'elle est affaiblie, son autonomie en est diminuée. C'est lorsqu'ils sont dans cet état d'affaiblissement que le gouvernement souhaite offrir la mort aux Canadiens. Je rappelle à la Chambre que le gouvernement est absolument incapable d'offrir aux Canadiens handicapés les soins dont ils ont besoin. Je rappelle à la Chambre qu'il faut souvent beaucoup plus que 90 jours pour même pouvoir consulter un spécialiste. Je rappelle à la Chambre ce que la ministre de l'Inclusion des personnes handicapées a déclaré au comité de la justice: il y a des régions du pays où il est plus facile d'obtenir l'aide médicale à mourir qu'un fauteuil roulant.
    Non seulement nous offrons la mort lorsque l'autonomie d'un patient est la plus diminuée, mais nous incitons les patients à mourir en ne leur offrant pas de soins. J'ai déjà posé cette question, et je la pose à nouveau: en tant que députés, souhaitons-nous vraiment qu'on se souvienne de cette législature comme étant celle où on a offert aux patients la mort plutôt que des soins? C'est la voie que nous empruntons avec ce projet de loi.
    Encore une fois, au nom des Canadiens handicapés, de leurs médecins et de leurs défenseurs, j'implore les députés de mettre fin à cette attaque contre les handicapés du pays. Ils ont été très clairs au sujet de cet affront ultime dont leur communauté serait victime si ce projet de loi venait à être adopté. J'implore les députés d'écouter leur demande. Nous savons à quels abus on pourra s'attendre dans l'avenir. Le gouvernement ne pourra pas dire qu'il ne savait pas; c'est juste qu'il n'aura pas écouté.
(1145)
    On nous a mis en garde, sans équivoque, à propos de ce qui allait arriver, mais je voudrais maintenant parler des abus qui se produisent déjà.
    Voici ce que Gabrielle Peters, une journaliste qui vit avec une lésion de la moelle épinière, a écrit dans une récente lettre ouverte aux sénateurs canadiens: « Il faut bloquer l’adoption du projet de loi C-7 parce que je sais qu’il entraînera des décès évitables de personnes handicapées. Je le sais parce que cela se produit déjà. Je sais que cela se produit déjà parce que j’ai failli être l’une des victimes ».
    Le gouvernement se précipite pour éliminer les garanties relatives à l’euthanasie alors que les garanties en vigueur ne sont même pas respectées. Selon le Dr Jaro Kotalik, bioéthicien, il est évident que les autorités provinciales et territoriales n’exercent pas pleinement le rôle de surveillance, d’application de la loi et de rapport sur le rendement du programme d’aide médicale à mourir, ce qu’elles sont censées faire selon les lois et les règlements fédéraux.
    C’est ce qui ressort du témoignage de Roger Foley devant le Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Les personnes qui prennent soin de lui, dont il dépend pour tout ce qui concerne son confort et les nécessités de la vie, lui ont suggéré à quatre reprises d’opter pour l’aide médicale à mourir, ce qui est totalement illégal puisque la mort de Roger n’est pas raisonnablement prévisible.
    Il est incroyable qu’à l’occasion de la Journée internationale des personnes handicapées, tous les députés libéraux aient voté contre l’ajout de protections pour les personnes handicapées dans le projet de loi C-7. Même la ministre de l’Inclusion des personnes handicapées qui, lors de l’étude préliminaire du Sénat, a dit qu’elle partageait certaines préoccupations des Canadiens handicapés a voté contre notre amendement.
    J'aimerais rappeler à la Chambre ce que la rapporteuse spéciale des Nations unies sur les droits des personnes handicapées a dit de sa visite au Canada: « Je suis extrêmement préoccupée par la mise en œuvre de la législation sur l’aide médicale à mourir dans une perspective de handicap. On m'a informée qu'il n'y a pas de protocole en place pour démontrer que les personnes handicapées ont reçu des solutions de rechange viables lorsqu'elles sont admissibles à l’aide médicale à mourir ».
    L’opposition a tenté de donner suite à cette préoccupation en proposant en comité un amendement exigeant que les patients jouissent d’un accès effectif à des soins avant que l’aide médicale à mourir puisse être administrée. Je rappelle à la Chambre que les députés libéraux ont voté contre.
    J'aimerais faire part à la Chambre d’une autre préoccupation soulevée par la rapporteuse. Elle a dit: « J'ai également reçu des plaintes inquiétantes concernant des personnes handicapées dans des institutions qui subissent des pressions pour obtenir de l'aide médicale à mourir, et des praticiens qui ne signalent pas officiellement les cas impliquant des personnes handicapées. »
    Plus tôt, j’ai fait référence au rapport de 2019 de Santé Canada sur l’aide médicale à mourir. Certaines statistiques qu’il renferme étaient utiles, mais le rapport pose manifestement quelques problèmes, comme l’absence de toute mention d’abus. Comme les renseignements recueillis ont été rapportés par des fournisseurs d’aide médicale à mourir eux-mêmes, il était peu probable que des abus soient mis au jour. Nous savons qu’il y a eu des abus, c’est évident. Des cas comme celui de Roger Foley, et beaucoup d’autres, montrent que c’est indéniable.
    Dix-huit mois avant sa mort par aide médicale à mourir, Archie Rolland avait été transféré contre son gré d’une résidence où il recevait des soins très spécialisés vers un établissement de soins de longue durée gériatrique qui ne pouvait pas combler ses besoins. Il a déclaré que ce n’est pas la maladie qui le tuait. Il était fatigué de se battre pour obtenir des soins de compassion.
    Sean Tagert, un père de famille atteint de SLA, épuisé de se battre pour obtenir les soins dont il avait besoin pour vivre chez lui, s’est fait dire qu’il devrait être placé dans un établissement de soins de longue durée loin de sa communauté et de sa famille. Il n’a pu vivre le reste de ses jours chez lui avec son jeune fils et a estimé que l’aide médicale à mourir était la seule option qui lui restait.
    Il y a aussi les histoires d’Alan Nichols, Yvon Tremblay, Gabriel Bouchard, Tommy Sec, Jonathan Marchand, Raymond Bourbonnais, Candice Lewis et beaucoup trop d’autres. Certaines de ces personnes luttent toujours pour leur vie, tandis que d'autres ont déjà cédé à la pression de mourir.
    Pourquoi y a-t-il tant d’histoires d’horreur? Pourquoi y a-t-il un tel manque de conformité? C’est simple: il y a un manque de surveillance. De nombreux médecins et membres de la famille de patients m’ont dit que leurs plaintes sont restées lettre morte. Il y a aussi une culture d’intimidation sévère en médecine qui fait que les médecins ont peur de dénoncer, par crainte de perdre leur emploi.
(1150)
    Un communiqué de presse diffusé en mars dernier par le Collectif des médecins contre l’euthanasie disait: « La pression a été intense pour beaucoup de médecins, particulièrement chez les spécialistes en soins palliatifs, certains choisissant de quitter la spécialité médicale avant les récents développements. Les descriptions reçues font état d’environnements de travail toxiques et de crainte de mesures disciplinaires par les autorités médicales règlementaires. »
    La dernière fois que je suis intervenue à propos du projet de loi, le secrétaire parlementaire du ministre de la Justice m’a demandé si j’avais connaissance de cas où des pressions exercées ont abouti à des poursuites. Il y a beaucoup de cas de pressions, simplement pas de poursuite. Lorsque des plaintes d’abus sont déposées, il n’y a pratiquement aucune possibilité de recours. Si une personne porte plainte à la police, celle-ci ne peut enquêter en raison du secret médical. Lorsque des plaintes sont déposées auprès du Collège des médecins et chirurgiens, aucune suite ne leur est donnée. De nombreux médecins subissent tellement d’intimidation qu’ils renoncent avant même que les plaintes ne soient déposées.
    J’ai tenté de savoir, auprès de la Bibliothèque législative de la Colombie-Britannique, combien de plaintes ont été déposées contre des médecins du Collège des médecins et chirurgiens de la Colombie-Britannique à propos de l’aide médicale à mourir. On m’a répondu que le Collège des médecins et chirurgiens de la Colombie-Britannique ne peut révéler l’existence d’une plainte d’un patient contre un médecin, à moins que la plainte n’entraîne une mesure disciplinaire officielle et, par conséquent, le nombre exact de plaintes déposées auprès du Collège, qu’elles soient liées à l’aide médicale à mourir ou non, ne peut être déterminé à partir de sources publiques.
    On m'a ensuite présenté une analyse de la couverture de presse de plaintes relatives à l’aide médicale à mourir dans l’espoir que cela me soit utile. C'est difficile à croire, mais les médias sont le seul endroit où les renseignements sur les plaintes relatives à l’aide médicale à mourir sont publiquement disponibles. C'est honteux. Songeons aux cas de maltraitance de personnes âgées qui se produisent dans ce système facile à duper. Des millions de Canadiens âgés ne sont pas protégés contre ce régime parce qu’il n’y a absolument aucun moyen de le surveiller.
    Songeons à des cas comme ceux de mes concitoyens, qui ont assisté à une assemblée publique que j’avais organisée lorsque l’enquête sur l’aide médicale à mourir a été ouverte aux mémoires. Avec près de 100 personnes, nous avons passé en revue chaque question en essayant de comprendre et de répondre de manière réfléchie. Plus nous répondions aux questions, plus nous prenions conscience que l’enjeu était beaucoup trop compliqué et nuancé pour qu’une enquête soit d’une quelconque utilité.
    Puis, un jeune père s’est levé et a raconté son histoire. Il avait reçu un diagnostic de cancer du cerveau en phase terminale. Devant l’assemblée, il a expliqué comment il était devenu dépressif à la suite de son diagnostic et s’était tourné vers des services de counseling pour l’aider à faire face à cette nouvelle réalité. Son conseiller lui a plutôt proposé l’aide médicale à mourir. Il a été choqué qu’à son heure la plus sombre, un conseiller professionnel lui suggère la chose même qui était extrêmement tentante pour lui, mais qui ne correspondait pas à son objectif ultime de vivre au mieux sa vie jusqu’à sa conclusion naturelle.
    Le professionnel de la santé de notre groupe de discussion était scandalisé. C’était complètement illégal, selon la loi en vigueur, et cela aurait dû être dénoncé, ce à quoi le jeune homme a répondu: « Comment même s’y prendre pour dénoncer? » Cet homme, dont la vie était compromise, ne savait même pas comment signaler un incident. Le médecin a dit qu’il pouvait aller en ligne et rédiger une plainte au Collège des médecins et chirurgiens, et il lui a dit de le faire immédiatement. Le jeune homme lui a répondu qu’il n’en avait pas l’énergie. Il suivait une chimiothérapie et était absolument épuisé. Il n’arrivait pas à se concentrer sur quoi que ce soit d’autre à ce moment-là.
    Combien de personnes ne savent pas à qui s’adresser pour porter plainte ou n’ont tout simplement pas l’énergie ou la force de se battre? Elles mènent déjà un combat contre la mort et nous voudrions qu’elles aillent en ligne et déposent une plainte alors qu’elles ne vivront peut-être pas assez longtemps pour en voir la conclusion.
    En terminant, voici une citation de Derek Ross, un avocat de droit constitutionnel:
    Compte tenu des preuves persistantes selon lesquelles les mesures de protection actuelles ne sont pas respectées, il est alarmant de constater que le gouvernement cherche à supprimer bon nombre de ces mesures au lieu de les renforcer et de les maintenir. Qui enquête sur ces constatations de non-conformité? Et qui recueille et regroupe ces données? L’arrêt Carter était fondé sur l’hypothèse que les garanties procédurales seraient « scrupuleusement surveillées et appliquées ». Le gouvernement fédéral a la responsabilité d’examiner les cas de non-conformité signalés et de veiller à ce que les données sur la non-conformité soient recueillies et utilisées pour éclairer les décisions stratégiques futures.
    La situation actuelle de l'aide médicale à mourir entraîne des abus horribles, comme le savent tous ceux qui sont concernés. Ce projet de loi est un cauchemar pour les personnes handicapées et pour les médecins partout au Canada. Les risques qu'il comporte sont trop importants pour qu'on les accepte, car les enjeux sont une question de vie ou de mort. Nous n'avons pas droit à l'erreur.
(1155)
    Madame la Présidente, à entendre la députée, on sent que cette question lui tient à cœur, ce que je ne remets pas du tout en question. Cependant, je suis plutôt en désaccord avec elle en ce qui concerne l'attention que portent les professionnels de la santé, les familles et les amis au type d'abus qu'elle semble croire qui existe, si c'est bien le cas. Je n'ai jamais entendu personne s'en plaindre. Jamais un résidant de ma circonscription ne m'a fait part d'un abus quelconque. Je n'affirme pas que cela n'existe pas, mais je ne crois pas que la députée appuie l'essence même d'une mesure législative sur l'aide médicale à mourir, alors j'ai une question à lui poser.
    La députée convient-elle de la nécessité d'avoir une mesure législative de cette nature, même sous une forme amendée?
    Madame la Présidente, j’appuie deux principes fondamentaux. Le premier est que le choix doit venir du patient, et le deuxième, que celui-ci doit avoir véritablement accès à des soins avant de recevoir l’aide médicale à mourir.
    Si nous ne pouvons même pas offrir des soins palliatifs ou des soins psychiatriques, comment pouvons-nous envisager une mesure pareille? Le projet de loi sur les soins palliatifs que nous avons adopté il y a quelques années stipule que, pour que l’aide médicale à mourir soit considérée comme une option volontaire, il faut que le patient ait véritablement accès à des soins. J’aimerais pouvoir convaincre mes collègues que ce projet de loi n’est pas un bon projet de loi. Ce que nous devons faire, c’est mettre l’accent sur des soins médicaux de qualité.
    J’aimerais faire part au député des statistiques qui nous ont été données par l'Association canadienne des soins de longue durée. Le budget fédéral de 2017 prévoyait un investissement sans précédent de 6 milliards de dollars sur 10 ans dans les soins à domicile et les soins communautaires, mais les soins de longue durée n’en faisaient pas partie. La Stratégie nationale sur le logement n’inclut pas les soins de longue durée. Le projet pilote d’auxiliaires étrangers pour le soutien à domicile n’inclut pas les emplois dans des établissements de soins de longue durée. Le budget fédéral de 2019 ne prévoyait aucun investissement dans les établissements de soins de longue durée. Le gouvernement fédéral a débloqué 343,2 milliards de dollars pour lutter contre la COVID-19 pendant les trois premiers mois de l’année, mais pas un seul dollar n’est allé aux établissements de soins de longue durée.
    Comment allons-nous pouvoir accompagner les personnes âgées et les personnes vulnérables du Canada si nous n’investissons pas dans les établissements de soins de longue durée?
(1200)
    Madame la Présidente, la députée a fait un excellent discours.
    Il est intéressant de suivre la discussion entre mes collègues et les députés ministériels. De notre côté, nous faisons remarquer qu’au cours des témoignages que nous avons entendus, surtout au comité la justice, des gens ont fait ressortir l’existence de graves problèmes. La députée a lu des témoignages de personnes handicapées qu’on a voulu pousser vers l’euthanasie alors qu’elles n’avaient jamais exprimé le moindre intérêt pour cela. Du côté du gouvernement, cependant, on soutient que le système doit fonctionner correctement puisque personne n’a été inculpé, qu’aucune plainte n’a été déposée par l’entremise des mécanismes officiels, et que personne n’a appelé le bureau du député de Winnipeg-Nord pour signaler un incident, ce qui de toute façon ne serait pas la façon appropriée de signaler un tel incident. On dirait qu’il y a un décalage, même si, en même temps, ce qu’ils disent est en partie vrai car nous savons qu’il y a des problèmes mais que les gens ne sont pas blâmés ou tenus responsables en cas d’abus.
    Même si la députée en a déjà parlé, j’aimerais savoir comment nous pouvons corriger ce décalage afin de nous assurer que, premièrement, il n’y a pas d’abus, et que, deuxièmement, il existe des mécanismes qui permettent d’accompagner, d’informer et de protéger les gens qui subissent des pressions pour demander l’aide médicale à mourir. Le fait est que nous ne saurons jamais ce qui se passe dans la plupart de ces cas-là, à cause des problèmes au niveau du signalement et de l’accompagnement. Dans la grande majorité des cas, nous ne saurons jamais ce qui s’est passé.
    Madame la Présidente, cela fait des années que je défends cette cause. J’ai d’ailleurs eu l’occasion de travailler avec Mark Warawa, qui n’est plus parmi nous mais qui a été un député extraordinaire. Beaucoup de gens sont venus me voir au sujet de cas de non-conformité. Les autres députés n’y ont peut-être pas prêté attention, mais s’ils l’avaient fait, dans l’intérêt des personnes âgées et des personnes handicapées, ils sauraient ce qui se passe. Il n’y a absolument aucun moyen de surveiller cela.
    La première chose à faire, c’est de s’assurer que les personnes vulnérables sont protégées. Nous parlons surtout du projet de loi C-7 alors que nous devrions nous assurer qu’un protocole est en place, comme l’a recommandé le rapporteur des Nations unies, un protocole qui permette de surveiller tout ce qui se passe, plutôt que de se limiter à ceux qui fournissent l’aide médicale à mourir. Nous sommes en train de faciliter de plus en plus la procédure, alors que nous n’avons aucun moyen de repérer tous les abus qui sont commis.
    Encore une fois, je me fais le porte-parole de ceux qui ne peuvent pas se faire entendre, et je dis que les abus existent. Nous devons être vigilants. Il faut faire attention de ne pas aller trop loin.
    Madame la Présidente, je suis heureux de pouvoir poser une question à ma collègue. Tout à l’heure, le chef de l’opposition a parlé des personnes vulnérables qui ne sont pas en mesure de prendre une décision. Ma collègue parlait seulement des soins de longue durée, mais la promesse que le gouvernement a faite il y a cinq ans, au sujet d’un investissement de 3 milliards de dollars dans les établissements de soins palliatifs et dans les soins palliatifs, ne s’est jamais concrétisée.
    J’aimerais savoir si, de l’avis de la députée, cela risque d’accentuer le sentiment de vulnérabilité des gens qui ne sont pas en mesure de prendre une décision présentement.
(1205)
    Madame la Présidente, ce qu’on nous dit, c’est que les personnes vulnérables n’ont pas accès à des soins de qualité, et dans ces conditions, bon nombre d’entre elles n’ont pas le choix. Elles sont entre nos mains et nous ne leur offrons pas des soins; nous leur offrons l’euthanasie.
    J’aimerais vous rappeler ce qui est arrivé au député Mark Warawa. On lui a diagnostiqué un cancer et il lui a fallu neuf jours pour voir un spécialiste en soins palliatifs. Il n’y en avait que deux dans l’hôpital. Le fait qu’il ait dû attendre neuf jours pour voir un spécialiste des soins palliatifs montre bien que notre système a besoin d’être mieux soutenu. Nous devons nous assurer que ce type de soins existe pour ceux qui en ont besoin. Je suis choquée qu’on fasse fi de tout cela et qu’on essaie de faire adopter ce projet de loi à la va-vite. Je suis choquée qu’on fasse fi de ce que nous ont dit les défenseurs des personnes vulnérables qui ont comparu devant le comité la justice. J’aimerais bien que le gouvernement prenne le temps d’écouter ceux qui militent pour qu'il y ait plus de soins et non pour qu'on précipite la mort des gens.
    Madame la Présidente, je sais que ma collègue suit le débat. Je l'ai vue à l'écran plus tôt, donc elle a pu entendre tout ce qui se disait. Plusieurs arguments ont été soulevés dans le cadre du débat. Les députés ministériels ont notamment fait valoir que le projet de loi a été présenté pour respecter des règles imposées par la cour à propos de la constitutionnalité de la loi. De plus, le ministre de la Justice et procureur général s'est opposé à la loi initiale sur l'aide médicale à mourir parce qu'elle ne répondait pas à cette exigence.
    En ce qui concerne les divers amendements qui ont été présentés par le Parti conservateur, un d'entre eux aurait-il fait en sorte que la nouvelle mesure législative ne respecte pas la Constitution? La députée est-elle plutôt d'avis que la mesure législative amendée comme le suggéraient les conservateurs l'aurait respectée en tous points?
    Madame la Présidente, il est important de comprendre que nous nous sommes appliqués à assurer la conformité de nos amendements. Malheureusement, les libéraux ont rejeté tous les amendements que nous avons proposés.
    Madame la Présidente, je partagerai mon temps de parole avec le député de Battle River—Crowfoot.
    J'interviens aujourd'hui pour participer à l'important débat sur le projet de loi C-7, qui élargit les conditions d'admissibilité à l'aide médicale à mourir. Le gouvernement libéral a sommairement empêché le Parlement d'effectuer une étude multipartite en comité pour examiner cette mesure législative, mais j'estime encore important d'exprimer officiellement mon opinion parce que le projet de loi C-7 porte littéralement sur une question de vie et de mort.
    D'entrée de jeu, je cite mon collègue, le député de Lanark—Frontenac—Kingston, qui a posé la question qui suit au gouvernement au début de nos séances hybrides. Dans le contexte où on demandait de placer des défibrillateurs dans des salles communautaires, des patinoires et d'autres endroits où se réunissent les Canadiens, le député a demandé:
     Il en coûtera environ 1 milliard de dollars pour rénover l'édifice du Centre. Je crois que ce montant est juste. Il en coûtera 5 millions de dollars pour munir toutes les voitures de police de DEA — de défibrillateurs. Cette mesure permettrait de sauver 300 vies par année. Par rapport à la rénovation de l'édifice du Centre, est-il plus ou moins important de sauver 300 vies par année, moyennant une dépense correspondant à la moitié de 1 % de 1 milliard de dollars?
    Mes collègues de part et d'autre de la Chambre savent que je suis un fervent défenseur de nos institutions et de notre histoire, et que je souhaite les protéger pour que les générations futures puissent les apprécier, en tirer des enseignements et même dans certains cas les révérer. C'est le cas du Parlement, des sites historiques partout au Canada et même des statues de nos fondateurs en raison de leur vision et même de leurs erreurs, parfois nombreuses. Le député de Lanark—Frontenac—Kingston a posé une question simple mais profonde au Parlement au sujet de la valeur de la vie, et de la façon de la mesurer. Voici une question que tous les députés se posent depuis le début de la pandémie de coronavirus: comment peut-on protéger et sauver des vies? C'est une question qui constituera le fondement du débat à la Chambre des communes pour le reste de notre existence et bien après.
    En un peu plus de huit mois, tous les ordres de gouvernement ont consacré conjointement un demi-billion de dollars à la lutte contre la pandémie. Tous les gens, riches ou pauvres, jeunes ou vieux, mariés ou célibataires, parents ou grands-parents, peu importe la forme que prend leur famille ou leur ménage, ont été touchés par la COVID-19, et les gouvernements sont intervenus pour les aider. Les mesures qu'ils ont présentées reposaient, d'une façon ou d'un autre, sur une vérité simple et profonde: les élus de tous les ordres de gouvernement du pays respectent le droit à la vie, et ils veulent que notre pays le défende et le protège.
    Je souhaite exprimer aujourd'hui mon opposition au projet de loi C-7. L'aide médicale à mourir est une pratique qui, si rien n'est fait, pourrait transformer le droit de mourir en une obligation de mourir.
    Comment est-il possible que le même gouvernement qui a défendu sans réserve l'imposition de fermetures et de confinements économiques en réponse au coronavirus nous empêche maintenant de protéger les Canadiens en élargissant considérablement les paramètres juridiques de l'aide médicale à mourir? C'est horrible.
    Je vais citer la députée de Vancouver Granville, l'ancienne ministre de la Justice, qui a dit ceci au sujet du projet de loi C-7:
    [Le] projet de loi C-7, sur l'aide médicale à mourir, élimine cette mesure de sauvegarde qu'est la période de réflexion de 10 jours de même que l'exigence d'une nouvelle confirmation du consentement, ce qui ouvre la voie aux demandes anticipées d'aide médicale à mourir.
    Pourquoi? Ce changement n'est aucunement exigé par la décision Truchon rendue par la Cour d'appel du Québec, que le gouvernement a choisi de ne pas porter en appel. De plus, la Cour suprême du Canada insiste, dans l'arrêt Carter, sur la nécessité d'obtenir un consentement clair. Divers experts, dont des médecins spécialisés en soins palliatifs et des défenseurs des personnes handicapées, soutiennent qu'il s'agit d'une mesure de sauvegarde cruciale. Par ailleurs, des rapports sur l'aide médicale à mourir dont la production est exigée par la loi et qui concernent les mineurs matures et les personnes souffrant d'une maladie mentale soulignent que les demandes anticipées créent des défis considérables.
    Il est très troublant de voir la direction que les libéraux ont choisi de prendre. Une seule décision rendue par un tribunal de première instance d'une seule province a renversé la loi existante, qui avait été adoptée lors d'une législature antérieure.
(1210)
    On ne valorise plus la vie. Même les mesures de sauvegarde les plus élémentaires sont jugées trop restrictives par l’actuel ministre de la Justice, le Cabinet et le caucus. Un consensus fragile a été établi lors de la dernière législature, mais le projet de loi C-7 va éliminer cet important consensus. J’espère que nous pourrons le rétablir lors d’une prochaine législature, lorsque les dirigeants réfléchiront davantage aux questions de vie et de mort et feront peut-être preuve d’une certaine humilité à l'égard de ces questions.
    En tant que parlementaires, nous devons — même les députés d'en face — rejeter l’élargissement imprudent des conditions entourant l’aide médicale à mourir dans notre société. Cependant, je suis consterné de voir que cela ne se produira pas.
    Le projet de loi C-7 ne porte sur l’aide médicale à mourir que par son titre. Ses promoteurs s’accrochent à cette désignation pour lui donner un vernis de respectabilité et le rendre acceptable pour la population. Le projet de loi C-7 supprimerait les mesures visant à protéger les Canadiens vulnérables et même la nécessité que la mort soit proche, imminente ou même raisonnablement prévisible. L’aide médicale à mourir prévoit des mesures de sauvegarde, ce qui n’est pas le cas du projet de loi dont nous discutons aujourd’hui qui propose tout simplement la mort administrée par un médecin.
    Madame la Présidente, il importe vraiment de se rappeler que nous devons tenir compte des tribunaux et de leurs décisions. Autrement dit, le gouvernement doit se pencher sur certaines questions en ce qui concerne la loi.
    Pour ce qui est de la dernière décision de la Cour, je trouve préoccupant que le gouvernement fédéral n’ait pas fait appel. Pour autant que je sache, le gouvernement fédéral n’a pas manqué d'interjeter appel de toutes les décisions concernant une Première Nation, et ce jusqu’à la Cour suprême, et il s'est battu bec et ongles dans tous les cas. Nous savons pourquoi la Cour suprême a exigé que le Parlement légifère. Cependant, en ce qui concerne une question aussi fondamentale que la prévisibilité de la mort – une notion claire mais difficile à traiter pour nous tous mais dont nous comprenons la raison d'être –, un tribunal provincial a rendu une décision mais le gouvernement fédéral n’a pas interjeté appel et a présenté une mesure législative qui va au-delà de ce qui était exigé.
    Mon collègue croit-il qu’il aurait été préférable d'interjeter appel et que la Cour suprême rende une décision très claire avant que le Parlement réagisse?
(1215)
    Madame la Présidente, je crois qu’il aurait été préférable que l’on examine la décision et qu'on la porte en appel devant la Cour suprême pour obtenir une interprétation plus large de la loi.
     À la dernière législature, nous avons adopté l’approche appropriée pour élaborer le projet de loi en créant un comité multipartite. Ce comité a formulé des recommandations. Tout le monde n’était pas d’accord, mais le projet de loi qui en est résulté a fait l’objet d’un large consensus à la Chambre, en dépit de certaines lacunes que, même moi, je constate dans la loi actuelle. Au moins, le projet de loi était le fruit d'un exercice démocratique. De plus, il a été adopté par le Sénat, a reçu la sanction royale et a pris force de loi.
    Comme l’a dit mon collègue, nous nous retrouvons aujourd’hui avec une mesure qui fait suite à la décision d’une juge d'une instance inférieure, décision qui n’a pas été portée en appel. Je crois que le gouvernement a profité de cette décision pour modifier la loi à la hâte. Je souligne, et je suis sûr qu'on l'a déjà noté, que le ministre de la Justice actuel a voté contre la loi actuellement en vigueur.
    À l’époque, il estimait qu’elle n’était pas suffisamment robuste ou expansionniste. Il a eu l’occasion de remanier cette loi d’une manière qui ignore la législature et ignore la contribution de la dernière législature, qui a été demandée par tous les partis. Aujourd’hui, nous nous retrouvons avec un projet de loi très réduit qui brise ce consensus. C’est pourquoi nous en débattrons dans les années à venir et durant les législatures à venir.
    Madame la Présidente, la question des mesures de sauvegarde a fait l’objet de nombreuses discussions. Je me demande si mon ami et collègue pourrait nous dire en quoi ce projet de loi les diminue grandement. Il a parlé de la façon dont elles ont été soigneusement élaborées dans le respect du processus démocratique lors de la dernière législature. Pourrait-il nous dire comment certaines de ces mesures de sauvegarde ont été réduites ou complètement éliminées dans le projet de loi, allant au-delà de la décision de la cour que le gouvernement utilise pour justifier ce projet de loi qu’il a présenté?
    Madame la Présidente, c’est tout à fait exact. Les artisans de ce projet de loi aiment dire aux députés et aux Canadiens qu’ils ont été forcés de le faire, qu’un tribunal inférieur leur a forcé la main pour en arriver à cette mesure législative. Toutefois, dans bien des cas, comme mes collègues l’ont souligné et comme l’a fait remarquer l’ancienne ministre de la Justice, qui est maintenant députée indépendante, ce projet de loi va bien au-delà de la décision du tribunal. Il supprimerait des mesures de sauvegarde.
    Par exemple, la période de réflexion de 10 jours est supprimée. D’autres importantes mesures de sauvegarde ont été supprimées. Cela aura des conséquences sinistres au fil du temps, car l’aide médicale à mourir va devenir un encouragement à la mort à certains endroits, les gens devant prendre en compte des choses auxquelles ils n’auraient pas songé autrement. Cela m’inquiète. Je m’inquiète pour les Canadiens qui sont dans une position vulnérable ou proche de la fin de leur vie, ou même pour les personnes qui ont perdu espoir un bref moment. Souvent, nous savons que, grâce aux soins de santé et à de meilleurs soins, les gens peuvent rebondir, pas toujours, et je sais qu’il y a des cas difficiles, mais cette loi nous poussera dans la mauvaise direction sur ces questions importantes.
(1220)
    Madame la Présidente, c’est un honneur de participer au débat sur un sujet aussi important.
    J’aimerais tout d’abord parler des commentaires du ministre de la Justice et d’autres députés qui affirment que les conservateurs retardent l’adoption de ce projet de loi, que nous sommes en quelque sorte responsables de ce retard. Je parlerai davantage de ce point, mais il y a vraiment un mot qui rejette complètement à lui seul cet argument: « prorogation ».
    Le gouvernement a déjà présenté ce projet de loi. Cela ne surprendra certainement aucun de mes électeurs, mais lorsque le gouvernement a avancé son excuse pour justifier la nécessité de remettre en question la loi, cela a coïncidé avec le jour où des documents très révélateurs devaient être publiés concernant un scandale sans précédent impliquant le premier ministre et divers membres du gouvernement. Il y a eu prorogation et le programme législatif a été interrompu, à cause de la COVID, ont-ils prétendu. Aujourd’hui, de nombreux projets de loi qui avaient été présentés durant la législature précédente ont été présentés à nouveau au cours de la présente législature. Et maintenant, les libéraux prétendent que les conservateurs ont en quelque sorte retardé le processus.
    Nous avons 24 jours de retard dans le processus législatif, période pendant laquelle nous aurions pu traiter ce projet de loi et beaucoup d’autres mesures importantes, liées à la COVID ou non, et pourtant, voilà où nous en sommes. Les mots qui me viennent à l’esprit à ce sujet ne relèvent pas nécessairement du langage parlementaire, mais il est honteux que nous nous retrouvions dans cette situation et que les ministériels laissent entendre que nous ne faisons pas notre travail en débattant d’un projet de loi qui est littéralement une question de vie ou de mort.
    Les électeurs demanderont des comptes aux ministériels à ce sujet. J’ai entendu beaucoup de commentaires de parties intéressées représentant toute la gamme des opinions dans ce dossier. Je vais revenir sur certains des commentaires que le ministre de la Justice a faits plus récemment. Il faut dialoguer, discuter et réfléchir soigneusement afin de trouver le bon équilibre. C’est pourquoi le Parlement existe, cette Chambre sacrée dans laquelle nous avons tous l’honneur et le privilège de siéger, afin que nous puissions tenir des débats.
    J’aimerais que la composition de la Chambre change un peu en ce qui concerne le nombre de sièges dont disposent certains partis. Je fais certainement de mon mieux pour que cela se produise, et les nouvelles à ce sujet sont encourageantes. Toutefois, il est intéressant de noter que les personnes que les Canadiens envoient dans cette enceinte, quelle que soit sa composition, le sont en raison de l’importance du dialogue associé à chaque aspect de notre travail ici, qu’il soit lié à la COVID ou à l’aide médicale à mourir, dont nous débattons aujourd’hui, ou aux nombreux dossiers dont sont saisis cette Chambre et ses comités.
    On ne saurait diminuer l’obligation de faire preuve de diligence raisonnable dans tous les cas de figure. Je contribue certainement à ce débat et rejette catégoriquement l’opinion du gouvernement selon laquelle, d’une façon ou d’une autre, les conservateurs retardent les choses. La faute revient directement aux libéraux. Ils fabriquent de l’urgence alors que la raison pour laquelle il y a urgence est due à des jeux politiques soigneusement façonnés par les ministériels.
    À entendre le ministre de la Justice parler du projet de loi C-7 au cours des dernières semaines, on peut constater une évolution dans ses réponses. La dernière fois que j’ai participé à un débat, c’était à partir de mon bureau de circonscription et le ministre de la Justice avait dit la veille que les libéraux avaient obtenu un large consensus sur cette question, qu’ils s’étaient rassemblés et avaient fait ce que les gens leur avaient demandé de faire.
(1225)
    Il s’est vanté de 300 000 soumissions lors des consultations, alors que je sais pertinemment — je l'ai dit dans ma dernière intervention — que la position à laquelle le gouvernement était parvenu était certainement différente de bon nombre des soumissions de mes électeurs, qui ne semblaient pas avoir été prises en compte.
    Je trouve très intéressant le changement de ton dans la réponse du ministre de la Justice hier. Le ministre a qualifié le sujet de délicat. Il a été beaucoup plus nuancé dans son approche, reconnaissant qu’il y a un profond désaccord sur le sujet, mais que les conservateurs devraient se dépêcher. Je paraphrase, mais le changement de ton du ministre signale que les libéraux ont reçu une tape sur les doigts. Ils prétendent avoir obtenu un consensus sur une question, alors que ce n'est manifestement pas le cas.
    Les défenseurs des droits des personnes handicapées et les professionnels de la santé semblent certainement être du même avis, même si je n’irai pas jusqu’à dire qu’il est universel, car ce serait une utilisation inappropriée de ce terme pour une application aussi large. Cependant, le consensus semble avoir été vaste, quoique non universel, sur le fait que ce projet de loi est imparfait et mérite d’être réexaminé.
    C’est exactement le rôle de cette institution, que ce soit la Chambre ou l’autre endroit qui débatte du projet de loi C-7. J’imagine que le projet de loi sera adopté. Il a certainement été adopté à l'étape de la deuxième lecture et de celle du rapport. Je pense donc que nous obtiendrons un résultat semblable et que l’autre endroit aura également l’occasion d'en débattre.
    Je voudrais parler de l’ironie tragique de la situation actuelle. Le gouvernement du Canada, comme les gouvernements du monde entier, comme les instances provinciales et municipales, a englouti des billions de dollars dans des programmes de réponse à la COVID. Il ne fait aucun doute que les personnes les plus à risque et les plus vulnérables face à ce virus qui s’est emparé de notre monde au cours des derniers mois, ou presque un an maintenant, sont les personnes âgées. Je trouve tragiquement ironique que, dans le cas de la pause législative censée donner la priorité à la COVID, nous débattions de ce projet de loi qui met en danger certaines des personnes les plus vulnérables.
    Tandis que les gouvernements ont versé des billions de dollars, à juste titre dans de nombreux cas, dans des programmes d’aide et de réaction à la COVID, nous débattons ici d’un projet de loi qui permettrait aux gens de mettre fin à leur vie et qui réduit les mesures de sauvegarde concernant une décision qui ne pourrait être plus définitive. Cette ironie tragique nous amène à ce jour. Les ministériels vont parler de nécessité, et souvent ils critiquent le débat des conservateurs sur de nombreux aspects de la réaction à la COVID, mais ici, ils visent quelque chose qui est certainement l’antithèse de l’objectif de tous les parlementaires, c’est-à-dire essayer de faire ce qu’il y a de mieux pour nos concitoyens, ce qu’il y a de mieux pour les Canadiens.
    On oublie souvent la constitutionnalité de cet endroit, et la réalité que la plus haute charge publique dans ce pays n’est pas celle du premier ministre, mais celle du député. Nous pourrions avoir un long débat sur les motifs de ce malentendu, que ce soit la prédominance des médias américains au Canada, l’éducation ou autre, mais en ce qui concerne la primauté du Parlement dans le droit et la société au Canada, le député est au sommet de cette institution.
    Nous sommes 338 à siéger ici à la Chambre. Quand les électeurs parlent de sujets comme le sentiment d'aliénation ressenti dans l'Ouest, ils nous demandent ce que nous pouvons faire pour améliorer la situation. Ma réponse est la suivante: je sais que je peux changer les choses parce que j'occupe le même nombre de sièges que le premier ministre, que le député de Winnipeg-Nord et que n'importe lequel de mes collègues conservateurs, bloquistes, néo-démocrates et verts. C'est ce qui fait la force de notre institution et c'est pourquoi les votes libres font partie de la réalité de la Chambre. J'encourage certainement mes collègues...
(1230)
    Le secrétaire parlementaire du leader du gouvernement a la parole.
    Madame la Présidente, l'opposition conservatrice utilise un argument fallacieux pour donner l'impression qu'il s'agit d'une question de procédure. Il n'est pas question de procédure, mais plutôt de manque de confiance. Les conservateurs, en tant qu'opposition officielle, disent qu'ils ne font pas confiance à la Cour supérieure du Québec, ce qui, à mon avis, porte atteinte au caractère et à la compétence de la juge de la Cour supérieure du Québec. Ils disent non au projet de loi parce que la décision aurait dû être portée en appel.
    Ma question au député est la suivante: va-t-il faire preuve de franchise et de transparence auprès des Canadiens et dire que les conservateurs n'aiment pas le projet de loi et que s'ils étaient au pouvoir, ils ne respecteraient pas la décision de la cour supérieure et en appelleraient devant la Cour suprême du Canada?
    Madame la Présidente, j'ai une réponse en deux volets pour le député.
    D’abord, je l’encourage à lire notre Constitution, s’il ne l’a déjà fait, pour comprendre la procédure des appels dans les tribunaux de première instance, les tribunaux d’instance supérieure et la Cour suprême. Ce n’est pas une question de confiance, cela concerne plutôt les décisions qui sont prises dans les couloirs ou plutôt dans les coulisses du pouvoir. J’invite le député d’en face à se familiariser avec cette procédure, qui ne devrait pas manquer de l’intéresser.
    Deuxièmement, concernant l’ouverture et la transparence, je pense qu’il y aurait beaucoup de choses à dire là-dessus. Où sont les documents concernant le scandale de l’organisme UNIS? Où sont les documents concernant tous les aspects de…
    La députée de Winnipeg-Centre a la parole.
    Madame la Présidente, je pense que nous sommes tous d’accord pour dire que l’histoire de notre pays est entachée de nombreux cas de violation des droits des personnes ayant un handicap. Les conservateurs l’ont dit à maintes reprises aujourd’hui.
    Ma question est la suivante: sont-ils par conséquent prêts à appuyer la demande formulée par la communauté des personnes handicapées qui réclame un revenu de base garanti, davantage d’investissements dans des logements sociaux abordables et accessibles, et davantage d’aide pour que les gens puissent vivre dans la dignité? Oui ou non?
    Madame la Présidente, s’il s’agit de garantir aux Canadiens la possibilité de vivre dans la dignité, nous sommes tout à fait pour. Toutefois, lorsque la députée parle de programmes supplémentaires pour protéger les plus vulnérables, je lui pose simplement la question suivante: comment seront-ils financés?
    Ils seront financés par la prospérité des Canadiens, y compris par l’exploitation des ressources naturelles. J’ai entendu dire que des communautés autochtones s’inquiètent que des opposants politiques à la Chambre essaient…

[Français]

     Je dois interrompre le député. L'honorable députée de Laurentides—Labelle souhaite invoquer le Règlement.
    Madame la Présidente, il y a un problème d'interprétation.
    L'interprétation ne semble pas fonctionner.
    Cela fonctionne maintenant.
    L'honorable député de Battle River—Crawfoot a la parole.

[Traduction]

    Madame la Présidente, pour ce qui est de garantir aux Canadiens la possibilité de vivre dans la dignité en pouvant compter sur des programmes sociaux bien financés, nous devons assurer la croissance de l'économie afin que le gouvernement ait les moyens de les financer. Il faut bien sûr aussi s’assurer que ces programmes continuent de servir les intérêts supérieurs des Canadiens. J’invite donc la députée à réfléchir à la possibilité d’appuyer certains projets d’exploitation des ressources naturelles, qui jouissent déjà d'un appui considérable de la part des communautés autochtones de sa région et d’ailleurs.
    Madame la Présidente, c’est avec grand plaisir que j’ai écouté le discours du député de Battle River-Crowfoot aujourd’hui. J’ai eu l'honneur de collaborer avec ce jeune homme lorsqu’il travaillait à l’Assemblée législative de la Saskatchewan. L’écouter aujourd’hui exposer les points de vue des électeurs de sa circonscription sur un projet de loi aussi important est vraiment une source d’inspiration. C’est un grand parlementaire et je suppose qu’il le restera pendant longtemps.
    Ma question est la suivante: le député peut-il nous donner plus de détails sur les amendements raisonnables que le Parti conservateur a proposés au sujet du projet de loi? Pourrait-il nous donner un ou deux exemples illustrant les raisons pour lesquelles, à son avis, le gouvernement libéral a jugé bon de rejeter des amendements raisonnables qui auraient permis de mettre en place des sauvegardes, comme la période de réflexion de 10 jours, préconisée par la plupart des représentants des personnes handicapées au Canada?
(1235)
    Madame la Présidente, j’ai du mal à croire qu’il y a à peine quelques années, je travaillais pour le député et pour d’autres députés provinciaux. C’est un honneur pour moi de siéger aujourd’hui dans cette auguste institution, aux côtés du député. J’espère que je vais pouvoir continuer de le faire pendant encore de nombreuses années et j'espère qu'il y aura une nouvelle répartition des sièges et une reconfiguration et que cela viendra d'en face.
    Il a parlé de deux amendements très importants que nous avons proposés et qui auraient permis de garantir quelque chose de crucial, à savoir la protection des personnes les plus vulnérables. Il y avait d’abord la période de réflexion et ensuite les paramètres de la mort raisonnablement prévisible.
    La protection des plus vulnérables devrait être la priorité de tous les députés, et c’est la raison pour laquelle je les invite tous, et ce seront là mes derniers mots, à voter de façon à représenter au mieux les intérêts des électeurs de leur circonscription, et non pas selon les consignes de leur chef de parti.

[Français]

    Madame la Présidente, encore une fois, c'est avec beaucoup d'émotion que je me lève à la Chambre pour prendre la parole sur cette question extrêmement délicate, soit l'aide médicale à mourir.
    Au cours de cet exposé, je vais mettre en lumière la réalité parlementaire et judiciaire. Je suis quand même leader parlementaire de l'opposition officielle, alors j'ai un mot à dire là-dessus, et j'ai même beaucoup de choses à dire là-dessus. Je vais parler des raisons pour lesquelles nous sommes rassemblés aujourd'hui pour parler du projet de loi C-7 à l'étape de la troisième lecture. De plus, je vais évidemment aborder le fond de la question, c'est-à-dire ma position et celle de mes collègues à cet égard.
    Avant de commencer, je tiens à mettre les choses au clair: c'est un sujet qui n'appelle aucune partisanerie. Dans ce dossier, il n'y a ni bons ni méchants, il n'y a ni bonnes positions ni mauvaises positions, et il n'y a ni bons votes ni mauvais votes. Il y a juste des positions qui nous mettent à l'aise, en lesquelles nous croyons et que nous sommes prêts à défendre personnellement, comme individus. Ce sujet peut affreusement diviser, tout comme il peut être une occasion en or d'avoir une conversation intelligente mais, d'abord et avant tout, respectueuse de l'opinion contraire.
    Vous n'êtes pas sans savoir, madame la Présidente, que j'aime bien les batailles politiques. Les arguments et les contre-arguments, je ne hais pas cela, au contraire. Cela fait partie du métier de politicien, mais il y a des questions qui ne se prêtent pas à cela.

[Traduction]

    En ce qui me concerne, l’aide médicale à mourir n’est pas une question partisane. Il n’y a pas d’un côté les bons et de l’autre côté les méchants. Il n’y a pas de bons votes et de mauvais votes. Il n’y a que des votes et des positions avec lesquels nous nous sentons à l’aise. C’est en défendant ce principe que nous manifestons du respect pour nos homologues. Face à ce problème, voilà comment j’entends le régler. Même si, parfois, je me montre un peu agressif dans ma façon de parler, aujourd’hui, je vais faire de mon mieux pour rester modeste, car je veux être respectueux de tous les points de vue.

[Français]

    Le projet de loi C-7 fait suite à une décision prise par la Cour supérieure du Québec, mais ce n'est pas la première fois que le sujet de l'aide médicale à mourir est abordé.
    Rappelons que c'est la province du Québec qui a été la première à amorcer la réflexion qui a conduit à l'adoption d'une loi concernant l'aide médicale à mourir. Malheureusement, ou heureusement, je sais de quoi je parle, puisque j'étais député provincial à l'Assemblée nationale du Québec. En passant, cela fait 12 ans, aujourd'hui, que j'ai été élu pour la première fois. En tant que député provincial, j'ai eu à travailler pendant six ans, sous trois premiers ministres et trois gouvernements différents, sur cette question délicate.
    Je tiens à mettre la position au clair. La preuve que cette question peut être traitée de façon non partisane, c'est que trois premiers ministres, soit le premier ministre Charest, la première ministre Marois et le premier ministre Couillard, sous deux partis politiques différents, ont mené le travail parlementaire qui a conduit à la première adoption d'une loi provinciale sur l'aide médicale à mourir au Canada. D'ailleurs, il faut souligner que cela s'est fait sous l'égide d'un premier ministre médecin, le Dr Philippe Couillard. J'étais présent.
    Ensuite, il y a eu le jugement de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Carter concernant, encore une fois, l'aide médicale à mourir. Le fédéral devait trancher pour déterminer où se situaient les balises fédérales concernant l'aide médicale à mourir. De façon très correcte, le premier ministre Stephen Harper, étant donné que le programme politique faisait en sorte que nous étions sur le point de déclencher une campagne électorale, avait décidé, avec le concours des autres partis politiques, de ne pas aborder cette question. C'était la bonne chose à faire.
(1240)

[Traduction]

    Comme je l’ai dit tout à l’heure, c’est une question qui n’est pas partisane. C’est la raison pour laquelle l’ancien premier ministre Harper a pris la bonne décision de ne pas en parler pendant la campagne électorale de 2015, parce qu’il voulait laisser au nouveau gouvernement élu, qu’il soit conservateur, NPD ou libéral, le soin de présenter un nouveau projet de loi. J’ai participé à la discussion, j’ai siégé au comité.

[Français]

    Le gouvernement était bien avisé de créer un comité parlementaire transpartisan, et surtout, mixte, puisque des sénateurs et des députés de la Chambre des communes y siégeaient.
     J'ai eu le grand privilège d'y siéger à la demande de ma cheffe de l'époque, l'honorable Rona Ambrose. J'ai eu le privilège d'avoir des conversations tellement intéressantes et fascinantes avec des Canadiens d'un océan à l'autre qui avaient des points de vue divers. Nous en sommes arrivés à un consensus sous la forme du projet de loi C-14. Quand je dis consensus, il faut faire attention, parce que la démocratie étant ce qu'elle est — et c'est tant mieux — certains étaient pour et d'autres étaient contre.
    Le projet de loi C-14 a donc été adopté il y a cinq ans par la Chambre des communes. Cette loi comportait une clause que l'on pourrait qualifier de mesure de temporarisation puisqu'elle prévoyait la tenue d'un examen de la loi par les parlementaires.
    Il était inévitable que cette question soit portée devant les tribunaux, et c'est arrivé. Une juge de la Cour supérieure du Québec a tranché dans l'affaire Truchon c. Procureur général du Canada le 11 septembre 2019.
    Par l'entremise du ministre de la Justice, le gouvernement fédéral s'est immédiatement saisi de ce jugement, a décidé de mener une consultation par Internet et a déposé un projet de loi au mois de février dernier à la Chambre des communes. À notre point de vue, il s'agissait déjà là d'une erreur importante. Je n'ai strictement rien contre la juge ni contre la Cour supérieure du Québec. Chaque tribunal a ses responsabilités et prend ses décisions. La nomination de cette juge à ce tribunal en 2017 est une bonne chose, et sa nomination à la Cour d'appel le 20 novembre dernier est une très bonne chose.
    En tout respect, cette question est très délicate. Peu importe la loi qui sera adoptée, elle donnera lieu à des contestations judiciaires. Il aurait été normal, préférable, respectueux et responsable de la part du gouvernement de porter la cause en appel, puis devant la Cour suprême. Comme l'a si bien dit tout à l'heure mon collègue de l'Alberta, quand on lit la Constitution, on comprend que chaque province a sa Cour supérieure, puis sa Cour d'appel, avant d'en arriver à la Cour suprême.

[Traduction]

    Or, il nous faut, en l’occurrence, l’évaluation de la plus haute cour. Dans ce cas particulier, la Cour supérieure du Québec est une bonne instance, mais ce n’est pas suffisant. Nous devons être sûrs de notre jugement sur ce sujet. C’est pourquoi le gouvernement aurait dû faire appel de la décision et laisser les juges de la Cour suprême décider ce qui est bon et bien au regard de la loi et de la Constitution — et de l’histoire du Canada, dont nous sommes fiers. C’est le principe.
    Ce n’est cependant pas ce qui s’est passé. Le gouvernement a décidé d’imposer sa volonté. J’ai entendu le député de Winnipeg-Nord. Il s’exprime toujours bien, toujours avec passion, mais, sans vouloir l’offenser, je ne suis pas d’accord avec lui. En faisant appel de cette décision devant la Cour d’appel, puis devant la Cour suprême, nous ne manquons pas de respect à la Cour supérieure du Québec.

[Français]

    Il s'agit simplement de respecter le processus judiciaire tel qu'il est écrit dans notre Constitution, et ce, particulièrement lorsqu'il s'agit d'une question aussi délicate que celle de l'aide médicale à mourir. Peu importe la loi qui sera adoptée ici, on doit s'attendre à ce qu'elle soit contestée.
     Il aurait été hautement préférable de rédiger une loi basée sur un arrêt de la Cour suprême, comme ce fut le cas il y a cinq ans, plutôt que sur une décision de la Cour supérieure. Je dis cela avec le plus grand respect pour Mme la juge Baudouin, qui vient d'être nommée tout récemment à la Cour d'appel par le ministre libéral, et pour la Cour supérieure du Québec, qui joue un rôle important, essentiel et vraiment sérieux dans notre système judiciaire.
    Un débat a donc eu cours à la Chambre des communes. C'était bien avant l'épisode de la COVID-19, avant qu'on sache ce que voulait dire le mot « présentiel », alors que le mot « zoom » faisait référence au téléobjectif d'un appareil photo et non à une façon de tenir nos rencontres. Bref, nous avons appris plusieurs nouveaux mots en 2020.
    Je reviens à mon propos. Le projet de loi C-7 a été déposé à la Chambre des communes le 24 février dernier, après la décision rendue le 11 septembre 2019 et les consultations subséquentes menées par le gouvernement. Le 26 février et le 27 février, nous avons amorcé le débat en deuxième lecture. Le processus était normal, régulier et rigoureux. Les discussions ont eu lieu. C'était convenable, même si nous aurions souhaité que cette question soit portée devant la Cour suprême.
    Or, la COVID-19 est arrivée. Le gouvernement a fait ce qu'il devait faire, c'est-à-dire suspendre l'étude du projet de loi et demander une prolongation à la Cour, parce qu'il y aurait un retard. La Cour a accepté. Nous avons repris les travaux parlementaires au mois de septembre et c'est là que le gouvernement a erré fondamentalement. J'aurai l'occasion d'y revenir plus tard.
(1245)
    Parlons maintenant du fond de la question sur le projet de loi C-7. Comme je l'ai dit tantôt, ce projet de loi ne peut pas faire l'unanimité parce que la société n'est pas unanime. Cela est le fondement même de la démocratie. C'est pour cela qu'on existe ici à la Chambre des communes. Il y a des gens qui sont pour et il y en a qui sont contre. Il y a des gens qui sont de droite et il y en a qui sont de gauche. Il y a des gens qui sont souverainistes et il y en a qui sont fédéralistes. La société n'est pas un bloc monolithique. La société est, dans sa beauté, toute pleine de textures différentes. C'est cela, la démocratie qu'on doit préserver. C'est pour cela qu'on doit avoir des débats intelligents à la Chambre des communes.
    C'est pourquoi, au cours de l'analyse qui a été faite, notre parti a soumis deux amendements tout à fait respectueux, tout à fait raisonnables, et qui visent à protéger les personnes les plus vulnérables de notre société. Ces amendements demandaient essentiellement le rétablissement du délai de réflexion de 10 jours quand le décès est raisonnablement prévisible, et la prolongation du délai de réflexion de 90 à 120 jours quand le décès n'est pas raisonnablement prévisible. Ces amendements visent à permettre à la personne qui décide d'agir de disposer du temps nécessaire pour réfléchir et prendre sa décision en son âme et conscience.
     C'est pourquoi des organismes prestigieux se sont prononcés contre le projet de loi C-7. L'Association des psychiatres du Canada a émis de très sérieuses réserves. L'Association du Barreau canadien a dit qu'elle avait des réserves conditionnelles par rapport à ce projet de loi. Le Conseil des Canadiens avec déficiences n'était pas d'accord avec le projet de loi. Le réseau québécois Vivre dans la Dignité et Inclusion Canada sont parmi les groupes qui se sont prononcés. Des leaders spirituels autochtones ont manifesté de très sérieuses réserves. Bref, la société a parlé et c'est cela, un débat intéressant.
    Ce débat devait se faire correctement, avec des gens qui sont contre et d'autres qui sont pour. C'est pourquoi nous aurions souhaité que le débat suive son plein cours, sans le très lourd effet de la date limite imposée par la Cour supérieure du Québec.
    Je vais maintenant parler de notre travail parlementaire, qui est essentiel. Je disais que le projet de loi C-7 a été présenté au mois de février, avant la COVID-19 et le retour à la Chambre. Toutefois, le gouvernement a décidé de proroger le Parlement. On sait que le premier ministre a pris cette décision parce qu'il n'était pas content du travail que faisaient nos députés dans les comités parlementaires étudiant la question de l'éthique et de WE Charity. Plus le travail avançait, plus ça chauffait pour le premier ministre. Il a donc décidé de proroger le Parlement.
    Cette prorogation a mis fin aux travaux de tous les comités et de la Chambre et il a fallu reprendre à zéro l'étude du projet de loi C-7. À cause de cela, on a perdu 24 jours de travail parlementaire. S'il n'y avait pas eu cette prorogation, on aurait repris le 21 septembre et non le 23 avec le discours du Trône. De plus, en reprenant le 21 septembre, on conservait le bénéfice de tous les travaux menés à ce jour sur le projet de loi, soit 24 jours de séance de plus, qui ont été perdus.
    Le gouvernement a le pouvoir de proroger le Parlement. Même si j'accepte cette prorogation, comment se fait-il que le gouvernement ait attendu si longtemps avant de présenter le projet de loi C-7? Aujourd'hui, on nous dit que l'échéance du 18 décembre imposée par la Cour approche à grands pas et qu'il faut qu'on se dépêche afin que le Sénat adopte ce projet de loi d'ici à cette date.
    Le gouvernement a présenté son discours du Trône le 23 septembre. Sait-on quand le projet de loi C-7 a été présenté? Il aurait pu être présenté le 24 septembre comme le projet de loi C-2. Il aurait pu être présenté le 25 septembre comme le projet de loi C-3 sur les juges. Or, ce projet de loi a été présenté le 5 octobre, avec sept jours parlementaires de perdus.
    Aujourd'hui, le gouvernement nous fait la leçon en disant que les conservateurs n'arrêtent pas de parler pour parler et que nous lui faisons perdre son temps. Non! C'est lui qui est maître absolu de l'ordre du jour, et c'est lui qui a décidé de proroger le Parlement et nous faire perdre 24 jours de travail parlementaire. C'est lui qui, malgré la prorogation, a tardé sept jours de séance avant de déposer ce projet de loi, alors qu'il savait très bien que tout devait être fini pour le 18 décembre, selon l'ordre de la Cour supérieure.
(1250)
    Alors, non, je ne porterai jamais la responsabilité du fait que nous sommes à une semaine et demie de la date limite qui nous a été imposée par la Cour supérieure du Québec, dans sa décision, pour adopter une loi, soit le 18 décembre, et que nous ne l'avons toujours pas fait. La responsabilité pleine et entière incombe à ce gouvernement, et jamais je ne tolérerai qu'on nous accuse de quoi que ce soit à cet égard.
    Que ce soit à l'étape de la deuxième lecture, de l'étude en comité parlementaire, de l'étude du rapport du comité parlementaire ou de la troisième lecture, jamais les députés conservateurs n'ont agi de façon mesquine. Certains sont pour cette pratique tandis que d'autres s'y opposent, mais nous avons toujours exprimé nos opinions de façon correcte et respectueuse.

[Traduction]

    Nous n’avons jamais fait d’obstruction systématique ou eu recours à d’autres règles pour faire en sorte qu’aucune décision ne soit prise. Nous nous sommes montrés respectueux parce que ce sujet l’exige. Nous avons agi comme il convient. Je suis très fier d’être le leader parlementaire de l’opposition officielle parce que les députés de ce côté de la Chambre, l’opposition officielle, ont fait un travail fantastique à chaque étape. Les députés conservateurs sont très sérieux; ils sont très parlementaires; ils ont agi suivant les règles.

[Français]

    C'est le contraire de ce qu'ont fait les libéraux au Comité permanent des finances, où ils ont fait de l'obstruction systématiquement, pendant plus de 16 heures, pour empêcher l'étude des scandales d'éthique. C'est sans parler du Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique, où les libéraux ont fait presque 40 heures d'obstruction pendant 10 réunions. C'est cela qu'on appelle gaspiller du temps. Ici, nous avons fait un travail sérieux et rigoureux, et nous en sommes très fiers.
    D'ailleurs, concernant cette fameuse date du 18 décembre, c'est le gouvernement qui est pris en otage, comme je l'ai dit. Toutefois, si jamais le projet de loi n'était pas adopté par le Parlement canadien — il doit aussi être adopté par le Sénat — d'ici le 18 décembre, que va-t-il se passer? Le projet de loi C-14 va continuer de s'appliquer et, au Québec, l'arrêt dans l'affaire Truchon va s'appliquer.
    Alors, c'est sûr que ce qui est prévu par le projet de loi C-7 ne sera pas appliqué, mais la vie va se poursuivre, sans jeu de mots, bien entendu. On va continuer de faire ce qui doit être fait, comme on le faisait depuis le début, à la différence que l'arrêt dans l'affaire Truchon va s'appliquer au Québec et qu'ailleurs au Canada, c'est le projet de loi C-14 qui va s'appliquer.
    J'aimerais parler d'un dernier élément, qui est essentiel.

[Traduction]

    En ce qui concerne la liberté de parole et la liberté de vote, je suis très fier d’être le leader à la Chambre du Parti conservateur. Sur cette question, tous les députés conservateurs ont le droit de voter selon leurs propres convictions. La preuve en est que mon chef, le futur premier ministre du Canada, le député de Durham, a voté contre, et moi pour. C’est cela, la démocratie.
    Dans notre parti, nous avons des personnes qui sont contre, comme mon chef, et il y a moi, le leader parlementaire de l’opposition officielle, qui me suis prononcé pour. C’est cela, la démocratie, et nous devrions la défendre. Même si je ne suis pas d’accord avec certains de mes collègues et même si tous mes collègues derrière sont mécontents de me voir me prononcer pour, qu'est-ce que ça peut faire?
    Nous sommes le seul parti qui préserve cet outil si important, cet outil qui peut combattre le cynisme en politique. Je suis fier de faire partie de cette équipe.
(1255)

[Français]

    Au cours du vote sur l'amendement, il y a même des députés conservateurs qui ont voté contre les amendements tout à fait raisonnables que nous avions proposés. Quand est venu le temps de se prononcer sur le rapport, 13 députés conservateurs ont voté avec le gouvernement sur ce projet de loi. Je faisais partie de ce nombre. Il s'agissait de six Québécois, de sept députés de l'extérieur du Québec, d'anglophones, de francophones, de gens de l'Est et de l'Ouest et même de voisins. Moi, j'ai voté pour cela, mais mon voisin de Portneuf—Jacques-Cartier, qui est tout juste à côté, a voté contre cela.
    Célébrons cette démocratie. Célébrons ce parlementarisme. Célébrons la pleine liberté de conscience quand vient le temps de voter sur ces questions. Surtout, préservons le travail des parlementaires correctement et condamnons vigoureusement le fait que ce gouvernement a traîné les pieds, ce qui fait qu'on se retrouve aujourd'hui dans l'entonnoir de l'échéance.
    Madame la Présidente, quand j'entends mon collègue de Louis-Saint-Laurent — pour qui j'ai beaucoup d'estime — dire que le gouvernement traîne les pieds, tout le monde se souviendra de l'affaire Carter.
    On se souviendra que la Cour suprême du Canada avait à l'époque ordonné à l'unanimité au gouvernement Harper de proposer un projet de loi, qui serait le projet C-14. Or, pendant 10 mois, le gouvernement conservateur s'est traîné les pieds, si bien que lorsque notre gouvernement libéral est arrivé au pouvoir en 2015, nous n'avions plus que deux mois pour proposer ce projet de loi. Il a fallu demander une prolongation, un événement historique.
    Mon collègue dit que nous allons encore trop vite. C'est toujours le même double discours: soit nous nous traînons les pieds, soit nous allons trop vite.
    En fait, le projet de loi C-7 est une suite logique du projet de loi C-14. Mon collègue a siégé avec moi au Comité mixte spécial sur l’aide médicale à mourir qui a mené au projet de loi C-14. Est-il d'accord avec moi qu'on n'a pas mené toutes les consultations nécessaires pour pouvoir respecter l'arrêt Carter dès le départ?
    Madame la Présidente, c'est toujours agréable d'entendre mon collègue du Nouveau-Brunswick.
     Je me permets de nommer sa province, parce que les noms de circonscription sont très longs et j'avoue que je ne m'en souviens jamais. Je salue son travail très sérieux. Il est un avocat sérieux pour qui j'ai beaucoup de respect et d'estime.
     D'abord, en ce qui concerne la question de 2015, je l'ai dit lors de mon discours: nous étions à la veille d'une campagne électorale. L'aide médicale à mourir est une question qui ne tolère aucune partisanerie. Or, une campagne électorale, c'est le summum de la partisanerie. C'est normal, nous nous battons pour nos circonscriptions et pour nos sièges et certains débats sont acrimonieux parce que c'est la partisanerie qui nous guide.
    L'aide médicale à mourir demande tout sauf la partisanerie. C'est pourquoi j'estime que le gouvernement Harper a fait la bonne chose en disant qu'il fallait laisser le prochain gouvernement régler cette situation et en demandant une prolongation au tribunal. C'est ce qui s'est fait, correctement.
    Quant à la relation entre les projets de loi C-7 et C-14, je rappellerais à mon éminent collègue — qui a le grand bonheur d'être avocat, contrairement à moi — que l'Association du Barreau canadien a exprimé de très sérieuses réserves sur la constitutionnalité du projet de loi C-7 et de certaines de ses dispositions.
     J'invite donc mon collègue à la prudence, tout en lui rappelant que, personnellement, je vais faire comme lui et voter en faveur de ce projet de loi.

[Traduction]

    Madame la Présidente, je souhaite féliciter le député de la logique incontournable de ses observations aujourd’hui.
    Nous savons que les libéraux ont bloqué au comité et ici, à la Chambre, des amendements raisonnables destinés à protéger les plus vulnérables, mais nous savons aussi que la ministre chargée de l’inclusion des personnes handicapées a déclaré devant le comité sénatorial qui faisait une étude préalable du projet de loi C-7 qu’elle avait de sérieuses réserves et qu’elle entendait régulièrement des personnes lui dire qu’elles sont atterrées d’apprendre qu’un membre handicapé de leur famille s’était vu offrir l'aide médicale à mourir sans qu'il l'ait demandée. Nous savons aussi que le leader parlementaire libéral a émis des doutes sur l’acceptabilité des amendements qui seront peut-être proposés au Sénat.
    Je me demande si le député pourrait commenter la légitimité d’amendements éventuels, quand le projet de loi C-7 arrivera au Sénat, pour ce qui est de mieux protéger les plus vulnérables.
(1300)
    Madame la Présidente, je respecte beaucoup le député et, si je me souviens bien, il a voté en faveur de l’amendement et aussi en faveur du projet de loi.
    L’important est que nous devons toujours penser aux plus vulnérables. C’est notre travail, mais nous devons aussi respecter le processus. C’est pourquoi le député de St. Albert-Edmonton a déposé deux amendements, qui étaient très raisonnables, afin de protéger les plus vulnérables d’entre nous. La Chambre a décidé et s’est prononcée contre ces amendements. C’est dommage, mais c’est la réalité. Nous devrions respecter la volonté de la Chambre des communes.
    Cependant, tout comme nous devons respecter la volonté de la Chambre des communes, nous devons respecter la volonté du Sénat. La plupart des sénateurs ont été nommés par le premier ministre. Par conséquent, laissons le Sénat faire son travail. C’est pourquoi, quand nous aurons terminé la troisième lecture et que le texte aura été mis aux voix à la Chambre des communes, le travail se poursuivra au Sénat. Comme l’a dit le député de Thornhill, pendant les consultations du Sénat, la ministre chargée de l’inclusion des personnes handicapées a dit avoir des réserves.
    Pourquoi le premier ministre insiste-t-il tellement, surtout auprès d’une ministre de premier plan qui est chargée de protéger les plus vulnérables?
    Madame la Présidente, le député est un éminent parlementaire, et il l’a d’abord été à l’assemblée législative provinciale avant de siéger ici, à la Chambre, à Ottawa. Il connaît très bien le processus. Par exemple, les conservateurs ont essayé de déposer des amendements dans l’espoir, s’ils étaient adoptés au comité, d’être en mesure d’appuyer le projet de loi.
    Cependant, le député sait aussi que nous n’avons pas un gouvernement majoritaire. Cela signifie qu’ils n’ont pas pu obtenir le soutien des députés d’opposition à leurs amendements, tout comme aujourd’hui, la direction du Parti conservateur s’oppose à l’adoption du projet de loi. Elle a très bien fait comprendre qu’elle aurait porté l’affaire devant la Cour suprême du Canada et que, parce que ses amendements n’ont pas été adoptés, elle n’appuie pas le projet de loi.
    Le député reconnaît-il, au nom de la transparence, que c’est la direction du Parti conservateur à la Chambre qui ne veut pas la mise aux voix? Ce n’est pas le processus parce que, même si nous débattions pendant un mois encore, l’opposition a les mécanismes, les outils et ainsi de suite pour faire en sorte que le texte ne soit jamais mis aux voix.
    Madame la Présidente, je rappelle à mon collègue de Winnipeg-Nord ce que j’ai dit tout à l’heure, à savoir que j’ai beaucoup apprécié le fait que le chef de l’opposition ait voté contre et que le leader à la Chambre ait voté pour le projet de loi. C’est un bel exemple de démocratie. Le Parti conservateur respecte toutes les personnes et tous les points de vue, y compris tous mes collègues qui m’applaudissent. Ils sont peut-être déçus d'apprendre que je vais voter pour, mais c’est ça la démocratie.
    Comme je l’ai dit tout à l’heure, nous aurions en effet préféré que la Cour suprême se prononce là-dessus. Quoi qu’il en soit, le député sait pertinemment que cela sera contesté devant les tribunaux. En ce qui nous concerne, il aurait été préférable que le projet de loi se fonde sur une décision de la Cour suprême, car de cette façon, qu’on soit pour ou contre, il aurait été fondé sur une décision de l'instance la plus grande, la plus exigeante et la plus haute du pays, la Cour suprême du Canada.
(1305)
    Madame la Présidente, mon collègue a commencé par dire que, dans ce débat, on fait trop souvent des procès d’intention. Malheureusement, je vais devoir me porter à sa défense parce que le député de Winnipeg-Nord lui a fait un procès d’intention.
    Mon collègue du NPD, ce grand musicien, a fait une remarque très judicieuse tout à l’heure. Il a dit que le gouvernement n’hésitait pas à traîner les Premières Nations ou les anciens combattants devant les tribunaux, mais que lorsqu’il s’agissait de vie ou de mort, il refusait de porter l’affaire devant la Cour suprême du Canada. Qu’en pense mon collègue?
    Madame la Présidente, je me sens très mal à l’aise.
    Mon collègue a dit que le gouvernement n’hésitait pas à traîner les Premières Nations devant la Cour suprême. Les chefs des Premières Nations se disent préoccupés par ce projet de loi, tout comme l’Association des psychiatres du Canada. Il n’y a pas de lien avec le Parti conservateur du Canada. Non, c’est la société canadienne qui est préoccupée.
    Mais en tant qu’êtres humains, nous pouvons changer d’avis. Un de mes amis, qui était un ardent partisan de l’aide médicale à mourir, a changé d’avis. Pourquoi? Parce que son père était malade il y a deux ans et qu’il a essayé de le dissuader de demander l’aide médicale à mourir, alors que lui-même en était un farouche défenseur. Aujourd’hui, il a changé d’avis à cause de ce qu’il a vécu avec son père. C’est ce qu’il m’a dit.
    Je le répète, il n’y a pas de bonne ou de mauvaise décision, il n’y a pas de bon ou de mauvais vote. Il n’y a que des votes et des décisions qui sont fondés sur ce avec quoi on est à l’aise.
    Madame la Présidente, je suis heureux d’avoir à nouveau l’occasion de prendre la parole au sujet du projet de loi. Il y avait beaucoup de choses que je voulais dire la première fois, à l’étape du rapport, mais je n’en ai pas eu le temps. J’espère qu’aujourd’hui, j’aurai la possibilité d’aller jusqu’au bout de mes remarques.
    Je compte partager mon temps avec le député de Northumberland—Peterborough-Sud.
    Le chef de l’opposition a dit aujourd’hui dans cette Chambre que le projet de loi C-7 transformait notre régime d’aide à mourir en un régime d’aide au suicide. L’ancien projet de loi C-14, qui avait été présenté en réponse à l'arrêt Carter, donnait suite à la décision de la Cour suprême selon laquelle l’aide médicale à mourir était certes un droit, mais que ce droit devait être protégé par des mesures de sauvegarde afin que les personnes les plus vulnérables ne s’en prévalent pas lorsqu’elles ont la possibilité de vivre une vie productive.
    L'arrêt Carter a donné lieu à une loi stipulant que la mort devait être raisonnablement prévisible. Le projet dont nous sommes saisis aujourd’hui supprime cette condition ainsi que beaucoup d’autres mesures de sauvegarde que la première loi préservait.
    Pourquoi en sommes-nous arrivés là? Les députés ne sont pas sans savoir qu’un tribunal inférieur du Québec, une seule juge en l’occurrence, a jugé, dans l’affaire Truchon, que la disposition du projet de loi C-14 relative à la mort raisonnablement prévisible allait à l’encontre de la Charte des droits. Il s’agit d’un tribunal inférieur du Québec, d’une seule juge, qui prend une décision sur la vie et la mort des Canadiens de partout au Canada.
    On aurait pu penser qu’un gouvernement libéral qui n’hésite pas à traîner les anciens combattants devant les tribunaux ou les Premières Nations devant la Cour suprême du Canada n’aurait pas hésité à faire appel de cette décision et qu’il aurait porté l’affaire Truchon devant la Cour suprême, celle-là même qui avait statué dans l’affaire Carter, pour déterminer si le caractère raisonnablement prévisible de la mort était ou non constitutionnel.
    Pas du tout. Le gouvernement libéral a décidé de ne pas faire appel de la décision Truchon et de faire exactement ce que le juge du tribunal inférieur demandait. Les libéraux ont ainsi supprimé la condition de la mort raisonnablement prévisible du régime d’aide médicale à mourir. C’est pour cela que nous sommes ici aujourd’hui.
    Quand le projet de loi C-14 a été présenté pour donner suite à l'arrêt Carter, les députés se rappelleront que des parlementaires ont souligné le fait que cette mesure représentait la crête d'une pente raide et glissante vers une approche visant à élargir la portée du suicide assisté à un groupe de plus en plus grand de Canadiens vulnérables. C'est la préoccupation que nous avons soulevée à l'époque, et, bien franchement, certaines personnes se sont moquées de nous. Elles ont dit que nous tenions des propos alarmistes. Elles ont fait fi de nos préoccupations. Voilà où nous en sommes aujourd'hui: nos préoccupations se sont avérées fondées.
    La dernière fois, je n'ai pas eu la chance de lire une lettre d'un médecin de ma circonscription, Abbotsford, le Dr James Warkentin, qui a exprimé ses inquiétudes au sujet de la mesure législative. Il a déclaré ceci: « Je vous remercie de m'avoir invité à vous écrire au sujet du projet de loi C-7. En tant que médecin de famille, la décriminalisation de l'aide médicale à mourir en 2016 m'a profondément ébranlé. Comment était-ce possible que, un jour, si je tuais quelqu'un, je pouvais perdre mon permis d'exercice et me retrouver en prison et que, le lendemain, on s'attendait plutôt à ce que je commette cet acte? Qui plus est, comment était-ce possible que, un jour, les plus vulnérables soient protégés contre les pressions exercées sur eux pour mettre fin à leur vie et que, le lendemain, il y ait des voies sanctionnées par l'État pour ce faire? » Il a ensuite énuméré les six raisons pour lesquelles plus de 1 000 médecins canadiens ont signé une lettre pour s'opposer au projet de loi C-7.
(1310)
    Je vais lire cette lettre dans un instant aux fins du compte rendu, comme je crois que ces juges seront contents de l'y trouver consignée. Il est évident, en effet, que de nombreux professionnels de la santé partout au pays sont contre le projet de loi C-7, qui ferait disparaître un grand nombre des mesures de sauvegarde, des garde-fous et des autres mesures protégeant les plus vulnérables initialement prévus dans l'arrêt Carter.
    La lettre commence ainsi:
    Ce projet de loi, qui élargit l’« aide médicale à mourir » (AMM) pour inclure pratiquement tous ceux et celles qui sont malades et qui souffrent au Canada, s’il est adopté dans sa forme actuelle, fera de notre pays le leader du monde dans l’administration de la mort.
    En tant que médecins, nous sommes obligés d’exprimer notre stupéfaction en voyant comment des personnes, qui ont peu d’expérience vécue des réalités en jeu dans la pratique quotidienne de la médecine, ont subitement et fondamentalement changé la nature de la médecine en décriminalisant l’euthanasie et le suicide assisté.
    En passant, lorsqu'ils parlent personnes « qui ont peu d’expérience vécue des réalités en jeu dans la pratique quotidienne de la médecine », ils parlent de nous, les députés dans cette Chambre. La lettre se poursuit ainsi:
     Malheureusement, nos patientes et patients sont ceux qui souffrent le plus des conséquences de ce plan malavisé. Le choc d'une maladie soudaine, ou d'un accident entraînant une invalidité, peut inspirer aux patients et patientes des sentiments de colère et de dépression, et ils peuvent se sentir coupables d'avoir besoin de soins; mais ces émotions, avec le soutien et l'attention nécessaires, peuvent se dissiper avec le temps. Le soin et l'encouragement offerts par les médecins peuvent être le facteur le plus puissant pour surmonter le désespoir et ranimer l'espérance. Malheureusement, les patients et patientes ne peuvent plus avoir une confiance inconditionnelle en leur professionnel de la médecine pour défendre leur vie quand ils sont à leur état le plus faible et le plus vulnérable. Subitement, une injection mortelle fait partie du répertoire des interventions offertes pour mettre fin à leurs douleurs et à leurs souffrances.
    Le projet de loi C-7 permettrait à ceux et celles qui ne sont pas mourants de mettre fin à leur vie par injection mortelle administrée par un médecin ou une infirmière praticienne. Il est scandaleux que la plupart des protections que le Parlement avait estimées nécessaires en 2016 pour protéger les personnes vulnérables contre une mort injustifiée soient en voie d’être supprimées. En vertu du nouveau projet de loi, une personne dont la mort naturelle est considérée comme « raisonnablement prévisible » pourrait être diagnostiquée, évaluée et euthanasiée en une seule journée. Nous sommes très inquiets que la suppression de la période de réflexion de 10 jours et d’autres mesures de protection ne fasse qu’augmenter le nombre de morts par contrainte ou par manque de réflexion adéquate.
    La suppression imprudente des mesures de protection précédemment jugées essentielles mettra les patients et patientes vulnérables directement en danger, et pourrait même leur coûter la vie [...]
    Notre profession a été forcée de faciliter le suicide au lieu de le prévenir, et ce, pour un nombre toujours croissant de personnes. Nous observons avec consternation et horreur la façon dont la nature de notre profession médicale a été si rapidement détruite par la création de lois malavisées.
    C’est un extrait d’une lettre signée par plus de 1 000 médecins au Canada. Elle se poursuit, mais je n’ai pas le temps de la terminer.
    C’est le point de vue des médecins partout au pays et les groupes de personnes handicapées, les professionnels de la santé, les groupes confessionnels, les défenseurs des soins palliatifs et les Premières Nations réclament tous plus de prudence avant d’élargir l'accès au suicide assisté, mais le gouvernement a refusé d’écouter ces préoccupations.
    Au comité, les députés conservateurs de l’opposition ont proposé de nombreux amendements qui auraient remédié à certaines lacunes de la mesure législative, qui auraient rétabli les protections que les personnes vulnérables du pays ont réclamées. Soixante-douze groupes de personnes handicapées s’opposent à ce projet de loi. Ils veulent plus de protections, mais ces protections ne sont pas là.
    J’encourage mes collègues d’en face à bien vouloir accorder plus de temps à ce projet de loi. Que l'on nous donne la chance de bien faire les choses.
(1315)
    Madame la Présidente, que ce soit la Cour suprême du Canada, il y a cinq ans, dans l’arrêt Carter, ou la Cour supérieure du Québec, ou encore les parlementaires dans la présente législature ou des législatures précédentes qui ont débattu de cette question pendant des centaines, voire des milliers d’heures en comités ou à la Chambre, aux étapes de la deuxième ou de la troisième lecture et bien plus encore, cette question a fait l’objet d’un débat très passionné depuis de nombreuses années. Il ne fait aucun doute que chaque vie est d’égale valeur. Je crois que la société canadienne souhaite que ce projet de loi soit adopté.
    En comité, les conservateurs ont proposé des amendements et les ont fait adopter. J’ai supposé qu’ils seraient d’accord pour adopter ce projet de loi. Il n’y a pas que le Parti libéral qui était d’accord, d’autres partis politiques de la Chambre l’étaient également.
    Le député pourrait-il nous dire ce qu’il pense de ce point?
    Madame la Présidente, le député a laissé entendre que le contenu du projet de loi C-7 a fait l’objet de débats pendant des années et des années. Le gouvernement libéral vient à peine de le présenter. La question de l’élargissement de l’aide médicale à mourir pour la transformer effectivement en suicide assisté doit faire l’objet d’un débat de fond, parce que c’est une question de vie ou de mort.
    Malheureusement, le député n’en est pas conscient. Il ne comprend pas à quel point il est crucial que 72 groupes de personnes handicapées au Canada craignent que le projet de loi ne mette leurs membres en danger. Les plus vulnérables de notre société, qu’il s’agisse des pauvres, des enfants ou des personnes qui ont des troubles de santé mentale, se sentent tous vulnérables devant cette mesure législative. Pourquoi en est-il ainsi et pourquoi le gouvernement libéral n’est-il pas à l’écoute de ces préoccupations?
    Madame la Présidente, je suis ravie d’être membre d’un parti qui permet à ses députés de voter selon leur conscience lorsqu’il s’agit de projets de loi comme celui-ci. Nous avons insisté sur le fait qu’il ne s’agit pas d’un enjeu partisan. D’après ce que nous avons entendu de la part de Canadiens de partout au pays, cela les touche au plus profond d’eux-mêmes. J’aimerais que le député nous fasse part de ses commentaires sur l’idée de pouvoir voter selon sa conscience.
    Je suis triste pour les gens d’en face et autour de moi qui, à mon avis, n’ont pas cette liberté. C’est ce à quoi les Canadiens s’attendent absolument de leur Parlement, la prise de conscience de notre responsabilité dans de telles situations de voter selon notre conscience.
    Madame la Présidente, je peux dire sans me tromper que le Parti conservateur est le seul parti à la Chambre qui prend les votes libres au sérieux, qui donne régulièrement à ses députés la possibilité de dire oui ou non à une mesure législative, en particulier sur des questions de conscience.
    J'irais jusqu'à dire que, partout au Canada, les médecins qui ne veulent absolument pas participer à la mort assistée ou au suicide assisté devraient bénéficier du même genre de mesure de protection. Partout au pays, on dit à nos médecins que cela fait partie de leurs obligations d'adresser les personnes concernées à d'autres médecins si eux-mêmes ne souhaitent pas donner de conseils sur l'aide médicale à mourir. Ce n'est pas ce qu'on attend d'un pays qui respecte les libertés, notamment la liberté de conscience.
    Nous devons intervenir et faire en sorte que les médecins n'aient pas à agir contre leur conscience, de la même manière que le chef conservateur nous laisse libres de voter comme nous l'entendons sur tout sujet qui relève de la question de conscience.
(1320)
    Madame la Présidente, je suis quelque peu déçu par la tournure prise dernièrement par le débat sur l'aide médicale à mourir. J'ose espérer que nous pourrons retrouver le débat vigoureux, mais empathique, du début.
    L'aide médicale à mourir est une question de conscience, et je suis très fier d'appartenir à un parti qui m'a donné à moi, le député de Northumberland—Peterborough-Sud, la liberté de voter comme je l'entends.
    Les vastes consultations que j'ai menées à l'intérieur et à l'extérieur de ma circonscription ont fait ressortir un certain nombre de défauts dans la mesure législative à l'étude. Ce qui me fait tiquer, personnellement, c'est que, même si un grand nombre de personnes et d'organismes défendant les droits des personnes handicapées ont sonné l'alarme et que les médias en ont beaucoup parlé, aucun amendement, aucun changement n'y a été apporté.
    Je pose la question en toute sincérité à mes collègues d'en face et j'aimerais avoir une réponse à l'avenant: sommes-nous rendus arrogants au point de croire que le texte à l'étude est absolument parfait et qu'il ne peut être amélioré d'aucune façon? Le député de Papineau a souvent répété qu'on peut toujours s'améliorer et qu'il faut saisir toutes les occasions de le faire. Je lui signale donc, en toute amitié et sans vouloir lui manquer de respect, que ce projet de loi peut être amélioré et que l'occasion se présente justement à nous de le faire.
    Certains projets de loi adoptés par le gouvernement au cours de la seule dernière année n'ont pas eu les résultats escomptés. Le programme de subvention pour le loyer ne s'est pas déroulé aussi bien que le gouvernement l'avait espéré. Tous les observateurs raisonnables, et même des députés d'en face, le reconnaîtraient. Voilà pourquoi ils ont dû lancer une deuxième version du programme. Le Crédit d'urgence pour les grands employeurs n'aide pas non plus suffisamment de gens et il devra sans doute être modifié. Nous avons vu les lacunes.
    Ce qui est problématique dans le projet de loi qui nous occupe, c'est qu'on ne peut pas revenir en arrière. C'est une question de vie ou de mort. Si des personnes des groupes les plus vulnérables décèdent à cause du projet de loi, nous ne pourrons pas les ramener à la vie. Nous n'avons pas de marge d'erreur. En tant qu'avocat, je suis parfaitement conscient de l'obligation qui est la nôtre de nous conformer à la décision Truchon et de modifier le projet de loi. Cependant, comme l'a dit notre chef, il existe divers moyens de repousser la date limite fixée.
    En toute justice, tout observateur raisonnable et objectif dirait que si le gouvernement n'avait pas prorogé le Parlement pendant six semaines supplémentaires, nous aurions pu respecter la date limite fixée.
    Je vais passer à mes observations, mais tenons-nous-en au fond du débat et aux attentes de la population. Cette dernière souhaite en effet un débat approfondi sur de graves enjeux qui soulèvent les passions, la raison même de l'existence du Parlement et la raison même pour laquelle ce débat raisonnable est ce qui fait du Canada, à mon avis, un si grand pays.
    Pour en venir au fond de mon discours, ceux qui appuient le projet de loi C-7 ne souhaitent la souffrance de personne, tout comme ceux qui ne l'appuient pas d'ailleurs. Il est important de commencer ce débat controversé en reconnaissant que, même si leurs croyances divergent, les deux camps sont animés par des convictions profondes. Comme pour tout projet de loi qui aura une influence majeure sur la vie des gens, le débat actuel est extrêmement important.
    L'aide médicale à mourir est un sujet relativement nouveau. Le Canada est l'un des seuls pays à l'avoir légalisée, ce qui veut dire que nous devons nous aventurer sur ce terrain inconnu en prenant toutes les précautions nécessaires. Comme les députés conservateurs l'ont fait valoir, il nous faut des mesures de sauvegarde. Nous ne sommes pas les seuls à le dire. Certains des plus éminents juristes de l'histoire du Canada ont soulevé cette question, des juristes de toutes allégeances politiques qui demandent et exigent que les mesures de sauvegarde soient maintenues. Comme nous le disons, c'est une question de vie ou de mort. C'est une question de bon sens. Nous devons certes garantir aux gens qu'ils pourront mourir dans la dignité, mais je crois fermement que nous devrions d'abord nous assurer qu'ils puissent vivre leurs derniers jours dignement.
(1325)
    Pour y arriver, pour garantir que les gens choisissent de recourir à l'aide médicale à mourir pour les bonnes raisons, je pense que nous devons parler de l'état des soins palliatifs au Canada. Malheureusement, la situation des soins palliatifs au pays est moins que favorable. À l'heure actuelle, l'aide médicale à mourir est considérée comme essentielle, mais les soins palliatifs ne le sont pas. C'est un problème qui devrait inquiéter grandement l'ensemble des députés et l'ensemble des Canadiens.
    Les soins palliatifs sont des soins de santé offerts aux patients atteints de maladies limitant leur espérance de vie. Ces soins permettent aux patients de vivre leurs derniers jours, jusqu'à la toute fin, en ayant la meilleure qualité de vie possible. Personnellement, j'ai eu certaines des conversations les plus importantes de ma vie avec des proches ou des amis qui vivaient leurs derniers jours, et je suis persuadé que de nombreux autres députés ont vécu la même chose. Ces moments de qualité transmettent aux personnes qui continuent à cheminer d'innombrables enseignements, enseignements que je mets encore en pratique aujourd'hui.
    Lorsqu'il est possible de conserver une qualité de vie raisonnable, nous avons le devoir sacré, en tant que société, de veiller à ce qu'on prenne soin des gens afin que s'ils décidaient de demander l'aide médicale à mourir, ils le feraient de leur propre chef et non à cause d'une piètre qualité de vie qui aurait pu être évitée.
    Les soins palliatifs sont axés sur les préoccupations des patients et des familles, et visent à accompagner les patients alors qu'ils éprouvent les symptômes physiques et mentaux d'une maladie grave. Il peut s'agir d'aider un patient à gérer sa douleur et ses symptômes afin qu'il puisse être confortable chez lui le plus longtemps possible.
    Malheureusement, même si 75 % des Canadiens préféreraient vivre leurs derniers moments chez eux, seulement 15 % d'entre eux ont accès à des soins palliatifs à domicile, et plutôt que de finir leurs jours dans la demeure où ils ont parfois grandi, 60 % meurent dans des hôpitaux froids et impersonnels.
    De nombreux médecins ont fait part de cette préoccupation, car la majorité des Canadiens n'ont pas accès à des soins palliatifs de grande qualité. Il est possible que bien des gens, certains en tout cas, choisissent l'aide médicale à mourir parce qu'ils ont l'impression de ne pas avoir d'autre option. La Dre Stephanie Kafie, qui pratique la médecine familiale à Niagara Falls tout en se concentrant sur les soins aux aînés, a fait part des préoccupations suivantes:
    La Dre Kafie a déclaré que, dans la précipitation pour adopter ce projet de loi, on ne s'est pas penché sur l'état des soins palliatifs. Ces soins ne sont pas considérés comme un service essentiel contrairement à l'aide médicale à mourir. Or, d'après son expérience, la Dre Kafie estime que de nombreuses demandes d'aide médicale à mourir résultent de lacunes en matière de soins palliatifs. La précipitation pour faire adopter des mesures législatives mal ficelées mettant en cause les médecins a entraîné une érosion de la profession médicale et a commencé à nuire considérablement aux relations médecin-patient. Les médecins ont les mains liées. Ils ne sont pas consultés au sujet des changements radicaux qui sont apportés à la loi.
    Comme l'indique la Dre Kafie, il est crucial de consulter les médecins lors de l'élaboration d'une mesure législative. Comme c'est souvent le cas, trop peu de parlementaires travaillant sur le projet de loi possèdent de l'expérience dans le domaine.
    Le Dr Drijber, médecin en soins palliatifs, a déclaré que cette mesure législative semble faire fi de la dignité qui accompagne les soins palliatifs et de l'importance des derniers moments de vie pour ceux qui restent et ceux qui vont mourir. Le Dr Drijber est allé jusqu'à dire que le gouvernement n'a apparemment pas consulté comme il se doit les experts et les personnes qui travaillent dans le domaine pour obtenir des conseils au sujet du processus décisionnel.
    Nous arrivons bientôt à la fin du débat et je tends la main aux députés d'en face en toute sincérité et ouverture. Ils savent, tout comme moi, que certaines personnes dans leur circonscription ne partageront pas leur opinion. Nous devons nous assurer que toutes les voix sont entendues. Sommes-nous si arrogants, en tant que parlementaires, pour penser que nous ne devrions pas modifier cette mesure législative, que nous ne pouvons pas, comme l'a dit le député de Papineau, toujours faire mieux?
(1330)
    Madame la Présidente, là où je suis entièrement d'accord avec le député, c'est en ce qui a trait aux soins palliatifs, aux services de soins à domicile et aux services de soins de longue durée.
    Même si ces services sont du ressort du provincial, le gouvernement national a tout de même son rôle à jouer; c'est ce que j'ai toujours cru. Il n'est pas simplement question de transferts de fonds. Nous devons nous assurer que des normes existent, qu'il est possible pour les individus d'obtenir l'accès à ce type de services, en particulier aux soins palliatifs. Trop de patients des soins palliatifs décèdent dans les corridors des hôpitaux ou dans une chambre d'hôpital, alors qu'ils devraient être dans un établissement de soins palliatifs ou dans un foyer.
    Mon collègue pourrait-il dire quel genre de rôle proactif le gouvernement national devrait jouer, selon lui, en vue de la collaboration avec les autres gouvernements et, possiblement, quel rôle Ottawa devrait jouer pour assurer une plus grande uniformité de ce genre de services à l'échelle du Canada, en particulier des soins palliatifs?
    Madame la Présidente, je remercie le député de cette question réfléchie et raisonnable. Je comprends que le député a les meilleures intentions du monde pour ce qui est de faire en sorte que nos aînés et les personnes en fin de vie reçoivent les meilleurs soins possible.
    Il est important aussi de permettre l’innovation et l’innovation provinciale, afin que cela se fasse au Québec ou en Ontario, et que nous puissions voir ces pratiques exemplaires mises en œuvre dans toutes les provinces. Il est essentiel aussi que nous gérions bien nos finances, afin que le gouvernement fédéral soit en mesure de financer comme il convient les transferts au titre de la santé, pas comme les transferts qui avaient été amputés sous le gouvernement Chrétien.
    Madame la Présidente, le député est vraiment avocat.
    Des préoccupations avaient été exprimées en 2016 au sujet de la mesure législative, du risque de dérive judiciaire, et nous y voilà. Pourquoi, alors, ne pas faire appel de la décision devant la Cour suprême, qui pourrait maintenir certains des garde-fous et des garanties mis en place? Je me demande si le député a quelque chose à dire à ce sujet.
    Madame la Présidente, nous avons assurément au Canada quelques-uns des plus brillants juristes du monde dans nos cours supérieures, à la Cour suprême et dans tous les tribunaux de première instance. Pourquoi donc ne pas profiter de tout leur savoir et leur sagesse dans ce projet de loi que je ne comprends pas?
    Comme nous l’avons vu, nos juges ont beaucoup à apporter dans ce débat. Qu’il s’agisse de la juge McLachlin, du juge Cory ou du juge Sopinka, ils ont tous tellement apporté au débat et à la discussion et, à bien des égards, ils définissent les termes mêmes de cette conversation.
    Madame la Présidente, j’aime toujours écouter les députés et j’aime surtout écouter le député de Winnipeg-Nord parce qu’il canalise très clairement la discussion. Il a déclaré qu’il est très important, selon lui, de tirer les enseignements des soins palliatifs et qu’il pense que le gouvernement fédéral pourrait jouer un rôle. Eh bien, il a pris la parole à la Chambre avec le premier ministre quand il a proposé une stratégie nationale des soins palliatifs et que les libéraux se sont prononcés en faveur de cette stratégie.
    Je l’ai mentionné pendant la première série de discussions sur le projet de loi sur la fin de vie et j’ai demandé pourquoi nous n’avons pas de stratégie des soins palliatifs.
    Les libéraux ont répondu qu’il y en aurait une, mais qu’ils devaient d’abord répondre à la Cour suprême.
    Voilà donc où nous en sommes. Nous avons un autre projet de loi sur la fin de vie et les libéraux nous demandent s’il ne serait pas possible d’avoir une stratégie des soins palliatifs parce que c’est une tellement bonne idée, que nous pourrions peut-être commencer à en parler. Nous l’avons déjà fait. Nous nous sommes prononcés sur la question. Nous avons dit aux Canadiens qu’il y aurait une stratégie et les libéraux n’ont rien fait. Combien de temps est-ce que cela prendra?
(1335)
    Madame la Présidente, je risque d'avoir du mal à répondre à cette question. J’apprécie certainement le député. Je dois dire qu’il fait partie de mes parlementaires préférés par son habileté à poser des questions.
    Pour répondre à cette question, je dirai que c’est maintenant qu’il faut agir. Je conviens, malheureusement, que le gouvernement actuel a parfois du mal à tenir ses beaux engagements, comme le dirait le chef du député.
    Madame la Présidente, je partagerai mon temps de parole avec le député de Cypress Hills—Grasslands.
    Nous sommes le 8 décembre 2020, à 10 jours seulement de l’échéance imposée au Parlement par la Cour supérieure du Québec dans la décision Truchon. Les libéraux laissent entendre que c’est peut-être la faute des députés conservateurs, qui retardent les progrès sur ce sujet très important. Je ne suis pas d’accord.
    Comment en sommes-nous arrivés là en premier lieu? Notre leader a parlé ce matin et soulevé ce sujet, et je vais répéter ce qu’il a dit. Premièrement, le procureur général n’a pas fait appel de cette décision de la Cour supérieure du Québec. Il s’agit d’une instance inférieure. Selon moi, c’est une mauvaise décision et il aurait dû faire appel, dans un premier temps, devant la Cour d’appel du Québec. Nous aurions profité de la sagesse de ses magistrats. Ensuite, il aurait dû faire appel, comme pour toutes les questions constitutionnelles importantes, devant la Cour suprême du Canada. J’ai le plus grand respect pour la Cour suprême du Canada ainsi que pour ses compétences et son érudition en matière constitutionnelle. Le procureur général a laissé passer cette occasion de solliciter l’avis de la Cour suprême du Canada dans la discussion de ce sujet très important.
    Le Parlement, comme l’a dit notre leader, est la plus haute cour du pays. Nous sommes souverains. Nous pouvons faire et défaire les lois que nous voulons, à condition que ce soit dans le respect de la Constitution de ce pays. Tel est le dialogue que nous aurions dû avoir avec la Cour suprême du Canada. Cela n’arrivera malheureusement pas sur ce sujet.
    Le deuxième point très important est la prorogation. Nous avancions bien sur le projet de loi C-7. Nous en parlions déjà en février et mars. La prorogation est arrivée et le débat a repris de zéro. En quoi est-ce que c’est notre faute? Pourquoi le gouvernement libéral a-t-il décidé de proroger le Parlement? Ce n'était pas pour de bonnes raisons d’intérêt public. Sa décision était strictement politique. Nous n’allons certainement pas porter le chapeau. C’est au gouvernement libéral d’assumer la responsabilité.
    Un autre point que j'aimerais soulever est que si le projet de loi C-7 avait simplement apporté les étroites modifications exigées par l'arrêt Truchon, ce débat aurait duré beaucoup moins longtemps et la question aurait été réglée beaucoup plus rapidement. Toutefois, le gouvernement en a plutôt profité pour étendre le débat. Les libéraux laissent entendre qu'en dénonçant ces problèmes, nous faisons preuve d'un manque de respect envers l'arrêt Truchon et la Cour supérieure du Québec. Or, ce n'est pas nous qui sommes responsables d'avoir ajouté ces autres questions au débat; c'est le gouvernement qui les a incluses dans son projet de loi C-7. Si le projet de loi C-7 appliquait uniquement l'arrêt Truchon, il ne proposerait pas d'éliminer la période de réflexion de 10 jours. Le « Premier rapport annuel sur l'aide médicale à mourir au Canada, 2019 », publié récemment par Santé Canada, indique que, des 7 336 personnes qui ont demandé l'aide médicale à mourir en 2019, 236 ont changé d'avis au cours de la période de réflexion de 10 jours. Manifestement, cette période de réflexion de 10 jours sert à quelque chose. Elle est utile. Pourquoi l'éliminer?
    De plus, le projet de loi C-7 introduit le concept des directives anticipées et, conséquemment, élimine l'exigence du consentement concomitant de la personne qui demande l'aide médicale à mourir. Cela transférerait la responsabilité de la décision finale de la personne qui reçoit l'aide médicale à mourir à celle qui l'administre. Nous ne sommes pas plus avancés. J'estime que ce n'est pas une amélioration.
    Puis, il y a la modification d'une autre mesure de sauvegarde: alors qu'on exige actuellement la présence de deux témoins, on n'en exigerait plus qu'un seul. Pourquoi? Pourquoi est-ce si important? Tant de documents juridiques nécessitent la présence de deux témoins — les testaments, par exemple — pour éviter toute coercition de la part des personnes qui pourraient en tirer un avantage. Dans le cas des testaments, les bénéficiaires du testament peuvent en tirer avantage. Voilà pourquoi on exige la présence de deux témoins. C'est un principe juridique de longue date. Ces modifications sont considérables, et les groupes de défense des intérêts des personnes handicapées partout au pays les dénoncent haut et fort.
(1340)
    Des nombreux groupes représentant les personnes handicapées venus témoigner devant le comité, pas un seul ne s'est dit en faveur du projet de loi C-7 et du retrait de ces mesures de protection. C'est pourquoi il est maintenant minuit moins une et que nous sommes dans cette impasse.
    M. Neil Belanger, directeur général de la British Columbia Aboriginal Network on Disability Society, a fait des observations sur un document publié récemment et intitulé « In Plain Sight », qui a été produit dans le cadre d'un examen commandé par le ministre de la Santé de la Colombie-Britannique, Adrian Dix, au sujet du racisme à l'endroit des Autochtones au sein du système de santé de la province. Même s'il s'agissait d'un examen du système de santé de la Colombie-Britannique, les principes s'appliquent à l'ensemble du Canada. M. Belanger et le groupe qu'il représente s'inquiètent du retrait proposé des mesures de protection. Il a écrit:
     L'existence du racisme et de la discrimination systémiques au sein des systèmes de santé du Canada est indéniable, tout comme les expériences vécues par les Autochtones lorsqu'ils cherchent à obtenir des soins et les décès recensés parmi les Autochtones. Nous nous en voudrions tous d'avoir présumé que, par magie, cela ne se refléterait pas dans le régime de l'aide médicale à mourir.
    Puis, lors de son témoignage devant le comité sénatorial, il a ajouté:
[...] le gouvernement du Canada n'a pas consulté de façon significative les Autochtones du Canada en situation de handicap, les aînés autochtones ou les dirigeants autochtones en ce qui concerne l'aide médicale à mourir. Cette absence de consultation est contraire à l'engagement du gouvernement envers la réconciliation, à la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones et à la Convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées.
    D'autres groupes de défense des personnes handicapées disent la même chose, mais le gouvernement refuse de les écouter. M. Belanger va même plus loin. Son organisme et lui voudraient qu'on conserve le critère relatif à la fin de vie prévisible qui avait été instauré après l'arrêt Carter avec l'adoption du projet de loi C-14 par le Parlement après mûre réflexion il y a à peine quatre ans et demi.
    Récemment, lorsque l'organisme de M. Belanger est venu faire une présentation au Comité sénatorial des affaires juridiques et constitutionnelles au sujet du projet de loi C-7, il a affirmé ceci:
     La British Columbia Aboriginal Network on Disability Society [...] demande, de concert avec ses organisations sœurs de défense des personnes handicapées et d'innombrables autres de partout au Canada, que l'on retire le deuxième volet des modifications que propose le projet de loi C-7 et que l'accès à l'aide médicale à mourir soit restreint aux personnes qui remplissent le critère relatif à la fin de vie prévisible [...]
    Le deuxième volet concerne l'accès à l'aide médicale à mourir pour les personnes dont la mort n'est pas raisonnablement prévisible.
    Certains diront que tout cela est sans importance et que la décision Truchon dit que c’est inconstitutionnel. Pour revenir à mes premières observations, on aurait dû interjeter appel de cette décision, mais cela n’a pas été fait. Je vais devoir dire à M. Belanger que le débat a déjà eu lieu. Le gouvernement traite malheureusement comme un principe constitutionnel arrêté le fait qu’il est inconstitutionnel qu’une loi de ce pays refuse l’aide médicale à mourir aux personnes qui répondent à tous les autres critères, mais qui ne sont pas mourantes.
    Il s’agit d’un changement fondamental qui n’a pas été examiné. Le gouvernement a déclaré à de nombreuses occasions qu’il a mené de larges consultations et que 300 000 personnes y ont participé, mais la seule question qu’il n’a jamais posée est la suivante: les citoyens sont-ils d’accord que l’aide médicale à mourir soit offerte aux personnes dont la mort n'est pas raisonnablement prévisible? La question fondamentale n’a jamais été posée. Ce n’est pas une vraie consultation, à mon avis. C’est un prétexte pour servir un projet législatif préconçu. Il a été dit à plusieurs occasions à la Chambre au cours de ce débat que l’actuel procureur général s’est prononcé contre le projet de loi C-14, il y a quatre ans, parce qu’il ne réglait pas cette question et qu’il n’étendait pas l’aide médicale à mourir à ces personnes. Il s’agit de l’actuel procureur général qui impose sa volonté au Parlement et qui empêche ce débat très important.
    Dans son premier rapport sur l’état de l’aide médicale à mourir, Santé Canada déclarait qu’en 2019, environ 2 % des Canadiens avaient recouru à l’aide médicale à mourir. Il s’agit de la moyenne nationale, mais le chiffre est bien plus faible dans certaines provinces. C’est la moyenne au Québec et c’est nettement au-dessus de la moyenne en Colombie-Britannique.
    Pourquoi ces différences? Est-ce parce qu’il y a plus de malades ou de personnes âgées…
(1345)
    Le député devra terminer cette réflexion pendant les questions et observations.
    Le secrétaire parlementaire a la parole.
    Madame la Présidente, je crois que le projet de loi dont nous débattons tient dans une large mesure compte des travaux de la Cour suprême du Canada et de sa décision il y a cinq ans, de la Cour supérieure du Québec, de l’avis de dizaines de milliers de Canadiens et des centaines d’heures de débat à la Chambre, aux comités permanents et ailleurs. À ma connaissance, il a le soutien des néo-démocrates, du Parti vert, du Bloc québécois et des libéraux. Nous savons que ce n’est pas une question de processus et je réfuterai tout argument erroné des conservateurs qui l’affirmerait. En fait, les conservateurs ne veulent pas que le projet de loi soit mis aux voix parce qu’ils pensent que le sujet aurait dû être soumis à la Cour suprême du Canada.
    Les députés d’en face sont-ils prêts à se montrer transparents avec les Canadiens et leur dire clairement que telle est la vraie raison pour laquelle ils n’appuient pas le projet de loi?
    Madame la Présidente, si nous n’appuyons pas le projet de loi, c’est uniquement parce qu’il ne protège pas suffisamment les personnes handicapées. Les députés conservateurs ne sont pas les seuls à le dire. Beaucoup de groupes de défense des personnes handicapées sont venus au comité exposer l’avis de leurs membres. C’est un sujet dont on parle dans tout le Canada.
    Pourquoi le gouvernement libéral n’écoute-t-il pas ces vraies préoccupations? Nous avons proposé des solutions et des amendements raisonnables. Les libéraux les refusent tous. On dirait qu’ils ont décidé d’avance quel sera le résultat. Ils n’écoutent pas le débat.
    Madame la Présidente, je tiens à remercier tous mes collègues pour les discours très réfléchis et compatissants et les différents points de vue que j’ai entendus. Il y a une question dont je n’ai entendu personne parler aujourd’hui, le fait que le projet de loi C-7 crée une dispense de consentement final pour les personnes dont l’aide a déjà été évaluée et approuvée et qui craignent de perdre leurs capacités avant la date choisie. C’est ce que l’on appelle familièrement l’« amendement Audrey Parker ».
    Audrey Parker avait reçu le diagnostic de cancer du sein au stade quatre avec métastases dans les os et le cerveau. Elle a passé les dernières semaines de sa vie à sensibiliser les gens à ces problèmes. Elle craignait de perdre ses capacités et d’être incapable de donner son accord définitif en raison de sa tumeur cancéreuse au cerveau, et elle a mis fin à ses jours prématurément. Je pense que ce n’est pas ce que tout le monde veut. Nous voulons que les gens vivent entièrement leur vie. Nous ne voulons pas qu’une personne exerce son droit à l’aide à mourir plus tôt qu'elle l'aurait souhaité à cause d’une exigence juridique.
    Mon collègue a-t-il des commentaires à faire sur cette partie du projet de loi?
(1350)
    Madame la Présidente, je dois admettre que l’argument d’Audrey Parker est très convaincant. Personne ne veut que les Canadiens meurent plus tôt qu’ils ne le devraient.
    Je crois que le meilleur argument contre le principe d’Audrey Parker, comme on l’appelle parfois, réside dans le fait que, rien que l’année dernière, et nous en avons la preuve tangible, 263 personnes ont changé d’avis au cours de la période d’attente de 10 jours. Je reconnais que même dans le cadre du projet de loi C-7, les gens ont la possibilité de changer d’avis s’ils sont encore conscients. Sinon, quelqu’un d’autre prend la décision. Mme Parker aurait probablement signé ce document, mais en fin de compte c’est le médecin qui doit prendre l'ultime décision d’administrer ou non l’injection mortelle. Ce médecin pourrait se demander si elle fait partie des 263 personnes qui changeraient d’avis. Pourquoi est-ce la décision du médecin?

[Français]

    Madame la Présidente, j'écoute avec beaucoup d'intérêt le débat sur le projet de loi C-7, ayant moi-même été membre du comité mixte qui a mené au projet de loi C-14.
     J'ai entendu mon collègue dire qu'il avait le plus grand respect pour la Cour suprême du Canada. Je lui rappellerais qu'on ne peut pas parler du projet de loi C-7 sans d'abord parler du projet de loi C-14, parce que le projet de loi C-7 est la suite normale et naturelle du projet de loi C-14. De plus, la Cour suprême du Canada, en laquelle mon collègue a beaucoup confiance, a rendu une décision à l'unanimité dans l'affaire Carter.
    N'est-il pas tout à fait naturel de s'en tenir à la décision Carter, entre autres, puisque la décision Truchon répond un peu aux lacunes du projet de loi C-14, pour accepter que le projet de loi C-7 vienne enfin boucler la boucle de l'affaire Carter et du projet de loi C-14?

[Traduction]

    Madame la Présidente, cette question me donne l’occasion de faire la distinction entre l’arrêt Carter et la décision Truchon. J’ai le plus grand respect pour la Cour suprême du Canada. Pensons à sa grande érudition.
    L’arrêt Carter a souligné l’importance d’un régime scrupuleux de protection et de sauvegarde des personnes handicapées. La décision Truchon ne l’a pas remis en cause. Il n’y a donc pas de contradiction. C’est ce gouvernement qui contredit l’arrêt Carter.
    Madame la Présidente, plus tôt ce matin, le chef de l’opposition a lancé le débat avec un discours musclé sur les problèmes que pose le projet de loi C-7 et sur la façon dont le gouvernement a traité ce dossier. Le député a commencé par dire qu'il pourrait s'agir du plus important projet de loi étudié au cours de cette législature, peu importe le temps qu'elle durera. Après tout, nous discutons d'une question de vie ou de mort, et la décision que nous rendrons ici aura une grande incidence sur la vie d'innombrables Canadiens.
    Ce sont ces gens qui feront leur propre choix, des choix qui se répercuteront sur leur vie, leur héritage, leurs proches et leurs aidants naturels. C'est un choix qu'ils ne pensaient peut-être jamais devoir faire et qui s'impose maintenant en raison d'une maladie soudaine, d'une proposition de suicide assisté non sollicitée ou pour toute autre raison. Tout peut arriver; c'est pourquoi nous devons optimiser les mesures de protection et de sauvegarde en place pour chaque personne concernée, surtout pour celles qui sont susceptibles d'être victimes de mauvais traitements et de négligence.
    Nous sommes à la dernière étape du débat dans cette enceinte, et je souhaite m'attarder à la question du choix — ou d'absence de choix, dans certains cas — devant lequel une personne peut être placée. Certains affirment que l'accès élargi à l'aide médicale à mourir est dans l'intérêt supérieur de ces personnes, non seulement pour soulager leurs souffrances, mais aussi purement par égard pour leur liberté de choisir.
    Sur la question du choix, nous devons nous souvenir qu'il ne s'agit pas d'une décision banale. La mort d'une personne, qu'elle soit prématurée ou non, constitue réellement un point de non-retour. C'est une décision définitive. Les circonstances diverses qui peuvent mener une personne à envisager de mettre fin à sa vie compliquent les choses très rapidement.
    Pour l'expliquer du point de vue d'une personne qui l'a vécu, je citerai le journaliste Ben Mattlin, qui souffre d'amyotrophie spinale. Il a écrit dans le New York Times:
    J'ai vécu tellement près de la mort pendant tellement longtemps que je sais à quel point la frontière entre la contrainte et le libre choix est mince et poreuse. Je sais à quel point il est facile pour une personne d'exercer par inadvertance son influence sur une autre personne pour qu'elle se sente dévalorisée et pour qu'elle perde tout espoir. Je sais à quel point il est facile de mettre un tant soit peu de pression pour qu'elle soit « raisonnable », pour qu'elle libère les autres du fardeau et pour qu'elle « lâche prise ».
    Comme le soutiennent les défenseurs de l'aide médicale à mourir, il peut être difficile de comprendre pourquoi des gens militent pour une loi sur cette aide lorsqu'on n'a jamais vu un être cher souffrir. Mais c'est aussi difficile de comprendre toutes les forces subtiles, toujours bien intentionnées, compatissantes, même douces, mais aussi fortes qu'un tsunami, qui se manifestent quand l'autonomie physique est irrémédiablement compromise.
    Malgré l'invalidité importante de M. Mattlin, il est père de famille, époux, auteur et journaliste. Il a réussi sa vie et il sait ce qu'il veut. Il est donc moins vulnérable que d'autres, qui pourraient être plus facilement persuadés que l'aide médicale à mourir est leur meilleure option.
    L'idée que quelqu'un demande volontairement l'aide médicale à mourir est, de plusieurs façons subtiles, le début d'une pente glissante qui mène à l'aide médicale à mourir demandée moins volontairement, ou contre le gré de la personne. Le choix n'est pas toujours aussi libre, surtout s'il manque de véritables solutions de rechange. L'une des plus grandes craintes des gens au cours de leur vie est leur propre mortalité. C'est en grande partie ce sur quoi porte le débat d'aujourd'hui.
    Quand je parle du projet de loi C-7, quand il s’agit de faire face à notre propre mortalité, je pense souvent à ce que ma femme et moi avons vécu, lors du décès de grands-parents et d’autres membres de notre famille. Nous avons passé d’innombrables heures à leurs côtés, à l’hôpital ou dans leur foyer de soins. Le temps passé avec notre famille est tellement précieux.
    Au cours de l’année dernière, la santé de la grand-mère de ma femme s’est détériorée. Son mari était décédé quelques années auparavant, et elle vivait, je crois, en soins de niveau 1 pendant presque toute la durée de la première vague de COVID. Nous n’étions pas autorisés à entrer dans le bâtiment et devions rester à l’extérieur. Elle avait une belle unité d’angle avec beaucoup de fenêtres et nous avons donc pu observer son état et lui parler par la fenêtre.
    Au fil du temps, nous avons vu son état d’esprit et son état physique se détériorer de façon continue et progressive. Il s’est dégradé au point qu’elle ne pouvait plus lever la tête lorsque nous venions à la fenêtre pour lui parler. Elle ne pouvait pas voir qui était là.
    Lorsque les restrictions ont été levées et qu’une ou deux personnes ont été autorisées à entrer dans l’unité, ma femme a pu s’asseoir à côté de sa grand-mère, lui tenir la main et lui dire qu’elle l’aimait. C’était merveilleux de voir son état s’améliorer et de pouvoir lui remonter le moral.
(1355)
    Je pense que dans le cadre de cette discussion sur le projet de loi C-7, nous devons surtout nous assurer que nous accordons de la valeur à la vie et que nous offrons aux gens toutes les possibilités de vivre leur vie. Nous devrions également pouvoir avoir nos proches à nos côtés dans nos derniers moments à la fin de notre vie.
    Nous devons également veiller à ce que les gens bénéficient pleinement de tous les soutiens. Au risque de me répéter, je souligne que l’une des plus grandes parties du projet de loi C-7 est la nécessité des soins palliatifs. J’ai déjà longuement parlé du fait que nous devons nous assurer d’offrir aux personnes un choix réel et des options réelles afin qu’elles aient toutes les options dont elles ont besoin et, très franchement, qui leur sont dues.
    La grande majorité des gens visés par le projet de loi C-7, ou qui envisageront d'avoir recours à l'aide médicale à mourir, sont des aînés. Quand on examine les contributions qu'ils ont apportées à la société, on constate qu'ils ont bâti le pays. Ce sont ces gens qui nous ont permis de jouir des libertés et des possibilités que nous avons. Or, nous sommes saisis d'un projet de loi, qui sera mis aux voix sous peu, qui leur indique essentiellement que nous n'accordons aucune valeur ni à leur vie ni aux contributions qu'ils ont apportées au pays. Voilà le message qu'envoie le projet de loi.
    Je sais que des gens diront que ce n'est pas ce que fait le projet de loi, mais, parfois, il n'est pas question de ce que fait directement un projet de loi, mais ce qu'il fera indirectement. Dès que nous indiquons au pays, aux citoyens, que nous n'accordons essentiellement aucune valeur à la vie et que nous ne la défendrons pas bec et ongles, nous envoyons le mauvais message aux gens.
    Je sais que les gens qui défendent le projet de loi C-7 et l'aide médicale à mourir le font dans une optique de compassion. Je ne mettrai jamais en doute quelqu'un qui invoque cette raison pour défendre le projet de loi. Toutefois, il faut aussi comprendre que, pour faire preuve de compassion à l'égard des personnes qui en sont à ce stade de leur vie, il faut notamment...
(1400)
    Je suis désolée, mais je dois interrompre le député. Il disposera de deux minutes et demie pour terminer son discours après la période des questions et de cinq minutes pour les questions et les réponses.

Déclarations de députés

[Déclarations de députés]

[Traduction]

Anna Kisil

    Madame la Présidente, selon Gandhi: « L'avenir dépend de ce que nous faisons dans le présent ». Aujourd'hui, je prends la parole pour rendre hommage à une personne qui a façonné l'avenir par ce qu'elle accomplissait chaque jour.
    Le mois dernier, notre collectivité a perdu Anna Kisil. Anna a immigré de l'Ukraine en 1990 et a fondé de nombreuses entreprises avec sa famille. Elle a ensuite donné en retour à notre collectivité, au Canada et à l'Ukraine, non seulement en faisant montre de générosité, mais aussi en faisant preuve de leadership et en devenant éventuellement la présidente de la fédération mondiale des organismes de femmes ukrainiennes.
    Anna a reçu de nombreux prix et médailles pour son service, y compris la croix d'Ivan Mazepa, remise par le président de l'Ukraine.
    Ce qui était frappant chez Anna, c'était la façon dont elle appuyait les jeunes pour qu'ils puissent changer les choses à leur tour, aujourd'hui et demain. En fait, Anna a déjà lutté en ma faveur et m'a offert une occasion sans laquelle je ne serais sans doute pas ici aujourd'hui. Et je ne suis pas le seul.
    À propos de ce moment, Anna m'a dit un jour: « J'ai lutté pour toi parce que j'ai cru que tu pouvais changer des choses. » Anna Kisil n'a pas seulement changé les choses, elle a aussi aidé les autres à faire de même. Ce faisant, elle a apporté une contribution immense au Canada, à l'Ukraine et à notre collectivité, pour aujourd'hui et pour l'avenir.
    Vichnaya Pamyat.

L'intervention en réponse à la pandémie de COVID-19

    Madame la Présidente, je tiens à remercier toutes les personnes de ma circonscription qui m'ont posé des questions et fait part de leurs préoccupations pendant la pandémie. Les Canadiens s'interrogent sur les décisions prises par leur gouvernement et sur les plans visant à leur permettre de retrouver une vie normale.
    Il est alarmant de voir la réaction à l'égard des citoyens qui sont mobilisés et qui posent des questions essentielles au sujet des déclarations faites par le premier ministre devant les Nations unies au sujet d'un nouveau départ. En refusant de répondre à ces questions légitimes et en dénigrant ceux qui les posent, le premier ministre ternit ses fonctions. Je cite à ce sujet un récent article où il est dit ceci: « Qualifier les citoyens inquiets de “complotistes” et prétendre que ceux qui acceptent les déclarations que le premier ministre a faites devant les Nations unies sont victimes de désinformation n'est rien de plus que de l'intimidation. Notre liberté et la survie de la démocratie reposent sur les connaissances, sur l'action et sur la participation aux affaires civiques. »
    J'encourage les gens de ma circonscription à continuer de poser des questions essentielles. C'est important pour nous et pour les générations à venir.

Le Jour de l'émancipation

    Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole à la Chambre à l'occasion de la première lecture de la motion d'initiative parlementaire no 36 que j'ai présentée. Cette motion demande, d'une part, la désignation du 1er août comme jour d'émancipation au Canada et, d'autre part, que la Chambre reconnaisse l'abolition de la traite transatlantique des esclaves le 1er août 1834. Enfin, la motion vise à reconnaître l'importance du 1er août comme célébration historique de la liberté des Canadiens de race noire.
    Je tiens à souligner que la motion a été appuyée par la sénatrice Wanda Thomas Bernard, le député de Hull—Aylmer et les membres du Caucus des parlementaires noirs, tous partis confondus. Je tiens à saluer la précieuse contribution d'intervenants communautaires comme Rosemary Sadlier de la Royal Commonwealth Society ainsi que de l'Ontario Black History Society et de l'Association canadienne des travailleuses et travailleurs sociaux.
    En conclusion, j'invite mes collègues de la Chambre à voter en faveur de la désignation du 1er août comme journée annuelle de l'émancipation dans notre magnifique pays.

[Français]

La Fête nationale de l'Acadie

    Madame la Présidente, l'Acadie s'est donné une fête nationale pour souligner son histoire, celle d'un peuple digne, malmené, mais fier et unique.
    Chaque année, le 15 août, la Fête nationale de l'Acadie vibre jusqu'à l'intérieur des terres de Montcalm et j'en suis fier. Je suis un Québécois d'origine acadienne et je suis le représentant d'une circonscription qui abrite la Nouvelle-Acadie, qui fut le berceau d'accueil de nombreuses familles d'Acadiens.
    Cependant, cette année, à cause de l'insensibilité de l'appareil bureaucratique, les Acadiens vont subir une deuxième déportation, car on leur demande de déménager leur fête nationale à la fête du Canada ou à la Fête nationale du Québec s'ils veulent être subventionnés. C'est une attaque frontale à la dignité d'une nation qui mérite pourtant que l'on respecte le sens de sa fête nationale, qui souligne la résilience, la fierté et la combativité du peuple acadien.
    Qu'attend le ministre du Patrimoine canadien pour réparer cet affront?

Christian Barthomeuf

    Monsieur le Président, le 27 novembre dernier, 114 Canadiens et Canadiennes ont été investis de l'Ordre du Canada, l'une des plus hautes distinctions honorifiques du pays.
    Je tiens spécialement à féliciter l'un d'entre eux: Christian Barthomeuf, résidant de Brome—Missisquoi et propriétaire du Clos Saragnat à Frelighsburg. Tout au long de sa carrière, M. Barthomeuf s'est démarqué par ses contributions au monde de la viticulture en créant de nouvelles façons de cultiver adaptées au climat québécois.
     Cet homme au parcours remarquable est surtout reconnu comme l'inventeur du célèbre cidre de glace, produit qui lui a fait gagner de nombreux prix internationaux. M. Barthomeuf a contribué à faire connaître les produits du terroir québécois à l'étranger et à démarquer le Québec sur la scène internationale. Même après 40 ans, celui que l'on surnomme le « paysan rebelle » n'a jamais cessé d'innover et d'enrichir l'offre gastronomique de notre région.
    Pour terminer, je transmets toutes mes félicitations à ce viticulteur et cet entrepreneur qui rend la région de Brome—Missisquoi très fière.
(1405)

[Traduction]

Les vœux du temps des Fêtes

    Monsieur le Président, lors d'une nuit étoilée, il y a de cela très longtemps, un message d'espoir a été livré pendant une période très sombre de l'histoire. Ce message disait: « Ne craignez point, car je vous annonce une nouvelle qui sera pour tout le peuple une grande joie: il vous est né en cette nuit un sauveur. Gloire, dans les hauteurs, à Dieu! Et, sur terre, paix chez les hommes de bon vouloir! » Si jamais il y a une année où nous aurions besoin qu'une bonne nouvelle éclaire cette grande noirceur faite de craintes, de doutes et de désespoir, ce serait cette année.
    Puissions-nous embrasser cette paix qui a été promise il y a si longtemps et surmonter cette incertitude que provoque la peur que nous éprouvons actuellement. Que le bon vouloir qui a été exprimé cette nuit-là se perpétue dans nos vies, comme il a été si clairement démontré dans les vaillants efforts de nos travailleurs de première ligne, de nos petits entrepreneurs, de nos camionneurs, de nos épiciers, de nos agriculteurs, de nos pêcheurs et de tant d'autres gens qui ont consenti des sacrifices considérables et, ensemble, jeté les bases de la relance de notre pays.
    Que l'amour, la joie, la paix et l'espoir qui ont été annoncés cette nuit-là il y a tant d'années soient avec chacun et avec chaque famille à Noël et tout au long de la prochaine année. Au nom de Crystal, mon épouse, et de ma famille, j'aimerais souhaiter à tous les députés et à tous les Canadiens un très joyeux Noël, ainsi que santé et joie pour la nouvelle année.

La période des Fêtes

    Monsieur le Président, il faut l'admettre, 2020 a été une année épouvantable. Toutefois, grâce aux nouvelles d'hier sur la distribution des vaccins, nous savons maintenant qu'il y a de la lumière au bout du tunnel. Il n'en demeure pas moins que Noël et le temps des Fêtes seront différents et difficiles cette année.
    Ce sera une période particulièrement difficile pour certains. J'invite donc les résidants de la merveilleuse circonscription de Pickering—Uxbridge et les Canadiens de partout au pays à penser à soutenir les entreprises locales et à acheter localement pendant le temps des Fêtes. Je les invite aussi à faire des dons à une banque alimentaire ou à acheter quelques jouets supplémentaires pour les remettre à un organisme local qui fait la collecte de jouets. Bien que l'année ait été difficile, nous pouvons tous participer aux efforts, animés par l'esprit des Fêtes, pour mettre un peu de lumière dans la vie des personnes qui en ont vraiment besoin.
    Joyeux Noël et joyeux temps des Fêtes à tous, et bon débarras à l'année 2020.

Les cloches de Noël

    Monsieur le Président, il est merveilleux de prendre la parole au nom des gens d'exception de Long Range Mountains. Je tiens à les remercier, ainsi que tous les autres habitants de Terre-Neuve-et-Labrador, de contribuer à freiner la propagation de la COVID-19 dans notre province. Comme ma collègue l'a dit, on voit la lumière au bout du tunnel.
    Aujourd'hui, alors que les esprits se tournent vers les cloches d'église, les clochettes de traîneaux et autres carillons, je voudrais vous parler d'une femme dont le nom de famille est pour le moins approprié: Charlotte Bell.
    Pour beaucoup d'entre nous, Mme Bell est la présidente-directrice générale de l'Association de l'industrie touristique du Canada. Nous connaissons sa passion pour les secteurs du tourisme et de l'accueil. Nous savons que cette passion n'a fait que grandir pendant la pandémie. Beaucoup d'entre nous avons pu constater personnellement son esprit novateur et son grand attachement envers cette industrie, ses dirigeants, ses travailleurs et ses clients. Tout son travail et ses efforts de planification ont donné des résultats le long des nombreuses routes sinueuses qu'elle a visitées d'un océan à l'autre. Mme Bell a maintenant choisi d'entreprendre une nouvelle aventure. Je sais toutefois que peu importe où elle ira, elle emportera toujours avec elle sa passion pour le tourisme.
    J'invite mes amis, ici et dans la circonscription de Long Range Mountains, à prendre un temps d'arrêt et de réflexion, à être prudents et à chérir leurs proches durant le temps des Fêtes. Que la route que nous parcourons tous nous mène à un endroit magique.
    Je souhaite un joyeux Noël à tous.

Jim Phillips

    Monsieur le Président, cet été, le Canada a perdu un authentique ami et allié. Jim Phillips a œuvré comme président et directeur général de l'Alliance commerciale de la frontière Can/Am pendant près de trois décennies. Son héritage s'incarne dans les liens solides qui se sont tissés entre le Canada et les États-Unis.
    Sous la gouverne exceptionnelle de Jim Phillips, les décideurs essentiels des deux pays pouvaient se réunir dans une même pièce et repartaient toujours avec le plan de match permettant de régler les éventuels irritants frontaliers, des résultats concrets suivant de près. Sans l'excellent travail mené par Jim, nous n'aurions pas, entre autres choses, de cartes NEXUS ni de frontière aussi fiable et sécuritaire que le 49e parallèle.
    Jim manquera beaucoup à tous ceux d'entre nous qui s'occupent des questions canado-américaines. Nous travaillerons sans relâche pour poursuivre le travail auquel Jim a consacré les 30 dernières années de sa vie.
    Je remercie Jim. Repose en paix, mon ami.
(1410)

Ron Irwin

    Monsieur le Président, samedi dernier, Lisa et moi avons été très attristés d'apprendre le décès de notre cher ami, l'honorable Ron Irwin.
    À l'échelle locale, il a occupé les fonctions de commissaire d'école, de conseiller municipal et de maire. En 1980, M. Irwin a été élu pour la première fois député libéral de Sault Ste. Marie et a été le secrétaire parlementaire du ministre de la Justice de l'époque, Jean Chrétien. Il a été réélu pour un second mandat en 1993 et a servi en tant que ministre des Affaires indiennes et du Nord Canada.
    M. Irwin a été décoré de l'Ordre du Canada et a reçu la Médaille du jubilé de la reine. J'ai eu l'honneur de lui remettre l'épinglette Canada 150 pour sa carrière exceptionnelle de plus de 35 ans dans la fonction publique. M. Irwin a servi non seulement notre circonscription, mais aussi notre pays avec beaucoup de conviction et de la persévérance. Il a été ambassadeur du Canada en Irlande et consul général à Boston.
    J'ai eu la chance d'avoir M. Irwin comme ami et partisan. Personne ne faisait campagne comme lui. Repose en paix, cher ami.
     Lisa et moi offrons nos condoléances à son épouse Marg Irwin, à sa famille et à ses nombreux amis. Je le remercie au nom de tous les habitants de Sault Ste. Marie pour ses années de service.

La connectivité Internet dans les régions rurales

    Monsieur le Président, des centaines de sondages viennent de me revenir d'habitants de ma circonscription, qui soulèvent des préoccupations quant à la mauvaise qualité de la connectivité Internet et des réseaux cellulaires dans notre circonscription.
    Les frustrations actuelles liées à la pandémie de COVID-19, en particulier le fait de devoir travailler et d'être scolarisé à la maison, ont accru leur exaspération et accentué leur demande pour un meilleur service. En 2017, seuls 37 % des ménages ruraux avaient accès à une vitesse Internet considérée comme suffisante par le gouvernement fédéral, contre 97 % des ménages urbains. Aujourd'hui, en 2020, alors que de plus en plus de personnes travaillent, étudient et surfent sur le Net à domicile, la qualité de nos connexions, déjà peu fiable, s'est détériorée.
    Le gouvernement libéral a promis à plusieurs reprises d'améliorer la connectivité Internet, mais n'a pas tenu parole. Cela fait figure de camouflet pour les habitants de ma circonscription qui paient plus pour obtenir moins et achètent souvent de l'équipement supplémentaire, comme des amplificateurs, juste pour obtenir des téléchargements de cinq mégaoctets par seconde, s'ils ont de la chance.
    Les conservateurs du Canada exigent du gouvernement libéral des mesures concrètes pour connecter les Canadiens des zones rurales et éliminer ces obstacles à l'égalité des chances dans l'économie et la société numériques d'aujourd'hui.

[Français]

Le chantier Davie

    Monsieur le Président, les libéraux aiment venir parader au chantier Davie, à Lévis, pour y faire de belles promesses. Une fois que les photos sont prises, ils repartent ensuite en douce, sans rien faire pour les travailleuses et les travailleurs du chantier et tous les fournisseurs.
    Pourtant, les besoins de la Garde côtière et de la Marine royale canadienne sont urgents, et seule la Davie a la capacité de produire, ici, au pays, ces navires dans les temps et les coûts prévus.
    Les libéraux prétendent que le chantier Davie est dorénavant intégré dans la Stratégie nationale de construction navale, mais ils bafouent et violent cette stratégie en faisant construire des traversiers à l'étranger.
    Il est temps que les libéraux passent enfin de la parole aux actes en offrant un contrat ferme à la Davie avant Noël et qu'ils cessent de bouder le plus grand chantier naval canadien, qui fait notre fierté.

[Traduction]

Myler Wilkinson

    Monsieur le Président, il y a quelques jours, nous avons perdu Myler Wilkinson, un ancien professeur de littérature et d'études dans le domaine de la paix au collège Selkirk de Castlegar. Myler était un érudit, un auteur primé et un éducateur dont les étudiants disaient souvent qu'il était le meilleur professeur qu'ils aient jamais eu.
    La région de Kootenay–Ouest est un terreau fertile de longue date pour l'activisme en faveur de la paix. On y trouve les Doukhobors, dont la devise est « travailler dur et vivre paisiblement ». Des milliers d'Américains opposés à la guerre du Vietnam ont trouvé refuge dans la région dans les années 1960 et 1970.
     Myler et sa femme, Linda, ont eu la brillante idée de s'appuyer sur ce noyau d'activistes pour la paix pour créer le Mir Centre for Peace, à Selkirk. Ce centre s'est bien développé depuis 1999 et propose des cours sur la justice transformatrice et des études sur la paix.
    Je suis fier de représenter une circonscription dont l'histoire d'activisme pour la paix est aussi courageuse et audacieuse. Myler nous manquera à tous, mais il nous a laissé en héritage le centre Mir pour perpétuer sa passion pour la paix sur Terre et sa bonne volonté envers les hommes.

[Français]

Jean Duceppe

    Monsieur le Président, il y a 30 ans hier, Jean Duceppe, l'un des plus grands artistes québécois, s'éteignait.
    Comme acteur, comédien et animateur, il a marqué les esprits au théâtre, au cinéma, à la télévision et à la radio. Reconnu entre autres pour ses rôles dans Mon oncle Antoine, La mort d'un commis voyageur, Charbonneau et le chef et Les Plouffe, ou encore pour la compagnie de théâtre qu'il a fondée et qui porte toujours son nom, Jean Duceppe était avant tout un ardent défenseur du Québec.
     Cet amoureux de son peuple au legs culturel immense, j'ai la chance de pouvoir dire que c'était aussi mon grand-père. De toutes les répliques qu'il aura livrées, c'est au crépuscule de sa vie qu'il a prononcé ses paroles les plus marquantes. Ces mots résonnent aujourd'hui aussi puissamment que lorsque j'étais enfant: « Le Québec est notre seul pays. »
(1415)

[Traduction]

Le don de sang

    Monsieur le Président, il y a maintenant près de deux semaines que la ministre de la Santé et moi avons débattu de l'opportunité de lever l'interdiction faite aux gais de donner du sang. J'ai alors rappelé au gouvernement libéral qu'il promet depuis maintenant cinq ans non pas de mener de nouvelles études et recherches, mais bien de mettre fin à la discrimination et aux préjugés dont les hommes gais du pays font encore l'objet.
    La ministre sait qu'il existe une solution sûre et scientifiquement éprouvée, à savoir interroger les futurs donneurs sur la nature de leurs comportements sexuels et non sur leur orientation sexuelle en général. L'Association médicale canadienne et la campagne Tous le même sang y sont d'ailleurs favorables. Le temps des excuses est derrière nous. Les hommes gais veulent pouvoir aider leur prochain. Nous voulons être traités comme tous les autres Canadiens. C'est tout à fait possible.
    Tout ce que je demande aux libéraux, c'est de tenir la promesse qu'ils ont faite pendant les deux plus récentes campagnes électorales. Tous les partis sont d'accord. Écrivons une page d'histoire et fonçons — pas dans des mois ou dans des années, maintenant. Changeons cette politique qui pénalise depuis trop longtemps les hommes gais du Canada.

Les vœux du temps des Fêtes

    Monsieur le Président, je tiens d'abord à vous souhaiter, ainsi qu'aux parlementaires et à toutes les personnes qui travaillent sur la Colline du Parlement, un Noël aussi joyeux que possible. Chose tout aussi importante, j'aimerais souhaiter à mes électeurs de Brossard-Saint-Lambert un temps des Fêtes rempli de bonheur et de bien-être, le tout sous le signe de la prudence.
    L'année tire à sa fin et nous sommes tous impatients de la mettre derrière nous. L'année 2020 s'est avérée pour nous une période remplie de défis immenses et de menaces réelles à notre santé et à notre sécurité. J'espère que cette relâche des Fêtes nous donnera l'occasion de trouver un peu de réconfort grâce à l'amour de notre famille et de nous arrêter un instant pour savourer tout ce qui nous entoure.
    La pandémie mondiale a profondément changé notre façon de vivre. Personne n'a échappé aux conséquences de la COVID-19 sur le plan personnel et social, mais nous n'avons pas eu à affronter cette nouvelle menace tout seuls. Nous avons tous consenti de nombreux sacrifices et avons adapté nos habitudes et nos routines en conséquence. Chacun d'entre nous a dû relever ces défis, et nous voyons tranquillement apparaître la lumière au bout du tunnel.
    Une fois de plus, je voudrais souhaiter à tous un Noël aussi joyeux que le permettront les circonstances et, comme tout le monde, j'attends avec impatience de meilleurs jours en 2021.

Questions orales

[Questions orales]

[Traduction]

La santé

    Monsieur le Président, le premier ministre a essayé de nous critiquer pour avoir posé des questions sur l'entente avec CanSino. Il se trouve que nous n'étions pas les seuls à nous interroger. Le Globe and Mail rapporte que le Groupe de travail sur les vaccins contre la COVID-19 du gouvernement a recommandé de ne pas faire affaire avec CanSino. Le premier ministre a dit à plusieurs reprises que les décisions du gouvernement concernant les vaccins étaient fondées sur les conseils de scientifiques.
    Pourquoi le gouvernement a-t-il fait une exception dans le cas du géant pharmaceutique chinois CanSino?
    Monsieur le Président, dès le début, nous avons été là pour les Canadiens. Nous avons communiqué avec des fabricants de vaccins potentiels pour en commander de toutes les sources possibles. Nous n'allions fermer aucune porte lorsqu'il s'agissait d'aider les Canadiens. Ainsi, nous nous sommes retrouvés avec sept ententes, signées avec un groupe diversifié des plus grands fabricants de vaccins du monde. Nous continuerons de faire tout notre possible, en fonction des meilleurs conseils des spécialistes, pour obtenir des vaccins pour les Canadiens afin que nous puissions traverser la pandémie et l'enrayer une fois pour toutes.
    Monsieur le Président, nous avons découvert que la première porte que le premier ministre avait ouverte est celle de la Chine. Nous avons aussi appris la semaine dernière que le gouvernement avait été informé des risques pour la sécurité que présentait l'entreprise chinoise CanSino. Le premier ministre a soutenu que le reportage était erroné. Maintenant, nous apprenons que les scientifiques partageaient l'avis des experts en sécurité sur CanSino.
    Si tant les experts en sécurité que les scientifiques s'opposaient à un partenariat avec la Chine, pourquoi le gouvernement ne les a-t-il pas écoutés?
(1420)
    Monsieur le Président, nous avons signé sept contrats avec des producteurs de vaccins de partout dans le monde pour fournir des vaccins aux Canadiens de manière fiable. Nous avons cherché à établir des partenariats avec tous les producteurs potentiels, notamment avec CanSino. En effet, quelques années auparavant, nous avions collaboré avec cette entreprise à la mise au point d'un vaccin contre le virus Ebola, et nos efforts avaient été couronnés de succès. Cette fois-ci, notre collaboration n'a pas fonctionné pour diverses raisons. Cependant, nous avons conclu sept contrats extraordinaires qui permettront, peut-être, au Canada d'obtenir plus de doses de vaccins par habitant que tout autre pays.
    Monsieur le Président, nous avons perdu cinq mois pour un accord avec la Chine qui, selon le premier ministre, n'a pas fonctionné. Nous n'avons pas accordé la priorité à la production de vaccins au Canada. Le gouvernement a fait la sourde oreille. Au lieu de rechercher une solution fabriquée au Canada, ce que leurs propres experts recommandaient, les libéraux ont conclu un partenariat avec CanSino. Dans le cadre de ce partenariat, ils ont investi des millions dans des installations qui, leur a-t-on dit, n'étaient pas prêtes à produire des vaccins.
    Pourquoi le premier ministre a-t-il favorisé une solution fabriquée en Chine plutôt qu'une solution fabriquée au Canada, comme ses propres experts le lui recommandaient?
    Monsieur le Président, depuis le début, nous nous fions à nos experts, ainsi qu'aux groupes de travail sur l'immunité et les vaccins, pour nous recommander la marche à suivre afin d'assurer un approvisionnement suffisant de vaccins potentiels aux Canadiens. Ces conseils nous ont permis de nous retrouver dans une position enviable, c'est-à-dire que nous disposons de plus de doses de vaccins provenant d'un plus grand nombre d'entreprises que pratiquement n'importe quel autre pays, et nous espérons commencer la vaccination la semaine prochaine. Voilà ce qu'un gouvernement qui écoute les experts et qui travaille fort pour les Canadiens est capable d'accomplir.

[Français]

La justice

    Monsieur le Président, la semaine dernière, le New York Times a illustré à quel point il était facile d'accéder à de la pornographie juvénile sur les sites Web pour adultes.
     MindGeek continue ses activités habituelles parce que le gouvernement actuel ne fait rien. MindGeek a même son siège social à Montréal. Quand est-ce que le gouvernement libéral ouvrira une enquête sur cette question pour protéger nos jeunes?
    Monsieur le Président, nous travaillons activement à la création d'une nouvelle réglementation pour obliger les plateformes en ligne à retirer tout contenu illégal.
     Cela inclut les propos haineux, les représentations de l'exploitation sexuelle d'enfants ou le contenu violent ou extrémiste. Notre approche fera que le contenu illégal sera retiré rapidement, les plateformes seront surveillées et les victimes auront accès à un processus rapide, transparent et indépendant. Nous travaillons avec nos partenaires internationaux à ce sujet et nous présenterons cette réglementation dès que possible.
    Monsieur le Président, en mars, des sénateurs et des députés canadiens des quatre partis politiques ont envoyé une lettre au ministre de la Justice afin qu'il prenne des mesures pour réglementer MindGeek et les compagnies pornographiques. On doit avoir une approche de vérification de l'âge et enlever les contenus juvéniles.
    Quand est-ce que le gouvernement va protéger nos jeunes contre l'exploitation sexuelle?
    Monsieur le Président, comme je l'ai dit, nous travaillons activement sur des mesures concernant une nouvelle réglementation obligeant les plateformes en ligne à retirer tout contenu illégal, que ce soit l'exploitation sexuelle d'enfants, la pornographie juvénile ou les propos haineux.
    Nous allons être là pour défendre les Canadiens, et nous travaillons très fort sur les mesures qu'on pourra mettre en place.

La santé

    Monsieur le Président, permettez-moi de dire rapidement que le gouvernement aura notre appui concernant toute mesure visant à mettre un terme à l'exploitation sexuelle des jeunes.
    Dans un autre ordre d'idées, nous savons que le gouvernement aurait pu faire fabriquer des vaccins au Canada et avoir des installations adéquates. Nous savons qu'il aurait pu le faire sous licence. Nous savons qu'il aurait pu le faire sans licence avec des arrangements ultérieurs. Nous savons qu'il aurait pu synchroniser ses démarches d'homologation. Il ne l'a pas fait.
    Pour envoyer tout cela sous le tapis, le gouvernement achète 250 000 doses. Pour le Québec, ça fait une trentaine de milliers de doses. Il n'y a même pas de quoi s'occuper des aînés de Sherbrooke, là-dedans.
    Combien est-ce que le gouvernement a payé pour cet exercice cosmétique?
(1425)
    Monsieur le Président, depuis le début, nous travaillons avec nos experts, avec les scientifiques qui font des recommandations concernant la façon dont on va pouvoir protéger les Canadiens. C'est en suivant leurs avis qu'on a pu signer plus de contrats avec plus de compagnies différentes qui développent un vaccin que n'importe quel autre pays et qu'on a obtenu plus de doses par personne que n'importe quel autre pays, de plusieurs dizaines de millions de doses.
    Nous voyons que les vaccins pourraient arriver dès la semaine prochaine. Évidemment, la production commence lentement, mais nous allons pouvoir vacciner des millions de Canadiens au début de 2021.
    Monsieur le Président, le retard démontre que, peu importe ce qui a été fait, cela n'a pas été assez bien fait, parce qu'il y a quand même un retard.
    Le gouvernement a fait le choix de ressusciter un dangereux sentiment de sécurité en disant qu'on avait maintenant un vaccin et qu'on serait peut-être correct, et 125 000 personnes traitées au Canada, c'est évidemment inadéquat.
    Compte tenu de cela, est-ce que le premier ministre pourra aider les vrais gens sur le terrain qui vont devoir gérer cela?
    Va-t-il se présenter, jeudi, devant les premiers ministres du Canada et du Québec avec des transferts en santé qui correspondent à leur demande?
    Monsieur le Président, nous travaillons pour livrer les vaccins le plus rapidement possible. Cela dépend énormément de la production des compagnies qui vont fournir les vaccins.
    En ce qui concerne les premiers ministres, j'ai été très content de travailler avec eux depuis des mois pour investir des milliards de dollars dans le système de santé et pour aider les citoyens, notamment à l'aide des Forces armées canadiennes et de la Croix-Rouge. Nous allons continuer de nous assurer que les provinces ont toute l'aide nécessaire du fédéral pour passer à travers la crise. C'est notre priorité et j'ai bien hâte d'en parler avec...
    À l'ordre. L'honorable député de Burnaby-Sud a la parole.
    Monsieur le Président, les Canadiens et les Canadiennes étaient encouragés par l'annonce de l'arrivée d'une petite quantité de vaccins de Pfizer, mais le vaccin a des problèmes. Il est difficile à transporter et à entreposer. Nous sommes toujours préoccupés pour nos aînés. Ils ont besoin d'avoir accès au vaccin. Le vaccin de Moderna peut régler ces défis.
     Quel est le plan pour le vaccin de Moderna pour protéger nos aînés?
    Monsieur le Président, nous avons travaillé avec toutes les différentes compagnies de vaccins pour nous assurer que l'approbation sera donnée le plus rapidement, tout en respectant toutes les règles. C'est pour cela que les vaccins de quatre compagnies sont en train d'être évalués, dont ceux de Pfizer et de Moderna. Nous espérons que, dans le cas de Pfizer, ce sera réglé bientôt et que, dans le cas de Moderna, ce sera réglé prochainement.
    Nous savons que cela va prendre différents types de vaccins pour vacciner tout le monde. C'est pourquoi nous sommes convaincus que nous allons pouvoir donner des vaccins à 3 millions de Canadiens au début de 2021.

[Traduction]

    Monsieur le Président, les Canadiens ont été encouragés d'apprendre qu'un petit nombre de vaccins de la société Pfizer seront disponibles au Canada, mais ce vaccin présente certains problèmes. Il est difficile à entreposer et à transporter, et il ne sera pas offert à ceux qui vivent en dehors des grandes villes canadiennes. Je pense aux communautés autochtones et aux gens des collectivités rurales et éloignées qui n'auront pas accès au vaccin.
    Le vaccin de Moderna est prometteur et pourrait résoudre certains de ces problèmes, mais nous voulons connaître le plan. Comment compte-t-on rendre le vaccin de Moderna accessible pour les gens qui vivent à l'extérieur des grandes villes?
    Monsieur le Président, les médias parlent de Pfizer actuellement parce qu'on s'attend à ce que les premiers vaccins de cette société soient livrés dès la semaine prochaine. Nous pouvons commencer à déterminer la méthode de livraison de ces vaccins, qui sera plus complexe sur le plan logistique.
    En ce qui concerne le vaccin de Moderna, il est un peu plus simple à transporter et à administrer. C'est pourquoi nous comptons sur ce vaccin pour vacciner les Canadiens qui vivent dans les collectivités nordiques et éloignées. Nous travaillons en étroite collaboration avec Moderna pour acheminer les doses de ce vaccin vers ces collectivités le plus rapidement possible. Comme je l'ai dit, des millions de personnes devraient recevoir le vaccin, les plus vulnérables...
    Le député de Carleton a la parole.

L'économie

    Monsieur le Président, la ministre des Finances a une brillante idée qui concerne les comptes bancaires des gens. Elle craint vraiment que les Canadiens épargnent trop, même si cet argent est prêté à des entreprises créatrices d'emplois ou y est investi. Elle cherche donc des façons pour le gouvernement d'exploiter les économies des Canadiens.
    Le gouvernement croit-il vraiment que secouer les Canadiens la tête en bas pour vider leurs poches est vraiment une mesure qui stimulera l'économie?
(1430)
    Monsieur le Président, une fois de plus, les conservateurs interprètent mal mes propos. Je me demande presque s'ils le font exprès.
    Le fait est qu'il n'y a rien de dystopique ou même de très compliqué dans l'idée d'un potentiel de stimulation de l'économie. Nous savons tous que les petites entreprises locales sont le cœur de l'économie. Nous savons également qu'en raison de la distanciation physique, nous ne pouvons plus les fréquenter. Voilà pourquoi le gouvernement cherche des moyens d'encourager les Canadiens à soutenir les petites entreprises locales dès que nous pourrons rouvrir l'économie en toute sécurité.
    Monsieur le Président, quand elle parle de potentiel de stimulation de l'économie, on dirait qu'elle veut utiliser les réserves des Canadiens comme s'il s'agissait de sa propre carte de crédit prépayée. Toutefois cela n'est pas surprenant de la part d'un gouvernement qui accumule le plus gros déficit de tous les pays du G20, et de loin, et ce, même si nous affichons l'un des pires taux de chômage, à part l'Italie, et l'un des pires taux de mortalité due à la COVID-19.
    Voilà que la ministre affirme qu'au lieu d'avoir une cible budgétaire, elle a des garde-fous fiscaux qui, un jour, seront rattachés à une cible budgétaire. Cette cible budgétaire au fond du gouffre financier ne risquera-t-elle pas d'arracher les garde-fous qui nous empêcheraient de basculer dans le vide?
    Monsieur le Président, le député d'en face ne semble toujours pas comprendre pourquoi c'est logique sur le plan économique de soutenir nos petites entreprises et d'encourager les Canadiens à le faire aussi. Par conséquent, je me permets de citer quelqu'un qu'il trouvera probablement un peu plus sympathique, le premier ministre conservateur de l'Ontario, Doug Ford.
     Voici ce qu'il en dit: « Maintenant, plus que jamais, nous devons soutenir les nôtres […] Étant donné la #COVID19, les entreprises ont appuyé les communautés et les travailleurs de la santé, nous devons maintenant les appuyer en retour en tant que consommateurs. » Je suis entièrement d'accord.

[Français]

La santé

    Monsieur le Président, après des jours à se faire questionner par notre parti, les libéraux ont agi en catastrophe pour trouver quelques vaccins pour les Canadiens — et encore, c'est une infime partie de ce dont nous avons besoin.
    On sait que les Forces armées canadiennes seront impliquées dans l'effort de vaccination. Plusieurs de ces militaires proviennent de la base de Bagotville. Comment le gouvernement va-t-il distribuer les vaccins aux membres des Forces armées canadiennes, qui relèvent de la compétence fédérale?

[Traduction]

    Monsieur le Président, nous avons fait preuve de transparence envers les Canadiens à toutes les étapes dans notre démarche pour obtenir le plus large éventail de vaccins au monde et le plus grand nombre de doses par habitant, et dans notre collaboration avec les provinces et les territoires pour distribuer les vaccins afin qu'ils s'acquittent de leurs responsabilités en matière d'immunisation. Par ailleurs, nous allons travailler de concert avec les organisations qui relèvent du gouvernement fédéral pour que tous les Canadiens aient accès à un vaccin.

[Français]

    Monsieur le Président, cela va tellement bien au Canada qu'il y a plusieurs provinces qui pensent à revoir leurs mesures de confinement.
     On ne pourra jamais parler de reprise économique tant et aussi longtemps que la population ne sera pas immunisée contre le virus. Les Canadiens méritent de la certitude, de la clarté et de la compétence de la part de leur gouvernement.
    À quel moment allons-nous obtenir l'immunité collective et pendant combien de temps encore serons-nous confinés?

[Traduction]

    Monsieur le Président, il est important que tous les Canadiens envisagent de se faire vacciner une fois que l'on aura vérifié l'innocuité du vaccin au Canada.
    Je tiens à remercier les agents de la réglementation de Santé Canada, qui travaillent sans relâche pour faire en sorte que, quel que soit le vaccin qui arrivera, il ne sera déployé qu'une fois son innocuité prouvée. L'une des choses auxquelles nous travaillons est de nous assurer que nous ne communiquons pas de mauvais renseignements aux Canadiens quant aux risques associés à la vaccination.

La justice

    Monsieur le Président, hier, le ministre de la Justice a dit: « Nous comptons sur les autorités policières pour faire appliquer les lois canadiennes. » Or, un site Web canadien comporte des vidéos et des images de personnes âgées de moins de 18 ans et d'enfants en train de se faire exploiter, maltraiter et violer. Ces vidéos sont retéléversées et demeurent sur le site Web pendant des années.
    Le ministre a dit que les libéraux prenaient au sérieux les vides juridiques. Le ministre de la Sécurité publique estime-t-il qu'il s'agit d'un vide juridique et qu'il faut y remédier sur-le-champ?
    Monsieur le Président, je peux assurer à la députée d'en face que l'exploitation sexuelle des enfants est l'un des crimes les plus odieux. Nous travaillons très fort pour soutenir les organismes d'application de la loi par tous les moyens. Nous fournissons des ressources non seulement à la GRC, mais aussi aux services de police provinciaux et municipaux. Nous veillons à ce qu'ils disposent des ressources, des outils et des pouvoirs dont ils ont besoin pour combattre ce crime des plus odieux. J'ai communiqué avec la GRC et lui ai demandé de communiquer avec les autorités compétentes, en l'occurrence le service de police de Montréal, au Québec, pour leur offrir toute l'aide possible.
(1435)
    Monsieur le Président, cela se produit encore aujourd'hui. Certaines entreprises du secteur privé prennent des mesures pour protéger les jeunes et les victimes d'agression. Trois grandes entreprises de paiement ont affirmé qu'elles allaient cesser de permettre au site Web de tirer des profits d'agressions d'enfants ou qu'elles l'avaient déjà fait. Les victimes disent que le site Web « fait des profits en exploitant le pire moment de ma vie » ou encore qu'il « est devenu le trafiquant qui profite de moi ». Des spécialistes estiment qu'il y aurait plus de 62 fichiers d'agressions d'enfants en ligne.
     Combien d'enfants devront être victimes de crimes aussi atroces avant que les libéraux agissent pour mettre fin à la situation?
    Monsieur le Président, en tant que père de trois filles et législateur, je trouve le contenu de ces plateformes profondément dégradant. C'est pour cette raison que le gouvernement travaille depuis des mois avec des experts, des organismes non gouvernementaux et des gouvernements étrangers en vue de présenter un projet de loi à la Chambre au début de 2021. La nouvelle réglementation exigerait des plateformes en ligne, pas seulement des sites Web, qu'elles suppriment le contenu illégal, y compris en matière de propos haineux, d'exploitation sexuelle des enfants et de contenu violent ou extrémiste.

[Français]

La santé

    Monsieur le Président, alors que tous les premiers ministres se rencontrent jeudi pour parler des transferts en santé, on constate dans nos hôpitaux les conséquences réelles du sous-financement fédéral.
    Le chef de l’opposition officielle chahute systématiquement.
    Des voix: Oh, oh!

[Traduction]

    Il y a trop de bruit à la Chambre.

[Français]

    À l'ordre.
    Il n'est pas possible de continuer, car le bruit à la Chambre est excessif.
    L'honorable député de Joliette a la parole.
    Monsieur le Président, alors que tous les premiers ministres se rencontrent jeudi pour parler des transferts en santé, on constate dans nos hôpitaux les conséquences réelles du sous-financement fédéral.
     Parce qu'Ottawa ne fournit pas sa juste part, le Québec est obligé de faire des choix déchirants. On est obligé de choisir qui on peut soigner parce qu'on n'a pas de personnel pour tout le monde. Le Québec est obligé de réduire à 50 % les activités de ses blocs opératoires. Cela risque de rapidement descendre à 30 %.
    Jeudi, est-ce que le gouvernement va enfin annoncer une hausse durable des transferts en santé?
    Monsieur le Président, nous avons soutenu les Canadiens.
    C'est maintenant l'heure pour les provinces d'intensifier leurs efforts. Nous avons annoncé l'Accord sur la relance sécuritaire de 19 milliards de dollars avec les provinces et les territoires pour aider notre système de soins de santé à répondre à la COVID-19. Maintenant, les provinces doivent investir ce financement pour augmenter le dépistage, la recherche de contacts et la collecte de données.
    Monsieur le Président, pour chaque tranche de 100 $ que le gouvernement a dépensé dans la pandémie, seulement 15 ¢, et non 15 $, ont servi à financer la santé.
     Chaque jour, on voit le nombre des victimes de la COVID-19. Ce qu'on ne voit pas, c'est le nombre des personnes qui n'ont pas accès aux soins, le nombre des personnes qui ne se font pas opérer ou qui n'ont pas leurs traitements contre le cancer. On ne voit pas le nombre des personnes dont la qualité de vie se dégrade alors qu'elles sont sur des listes d'attente parce qu'il manque de personnel soignant.
     C'est ce qui arrive quand la santé est sous-financée. Une aide ponctuelle ne permettra pas d'engager du monde. Quand les libéraux vont-ils se rendre compte de ce qui se passe et hausser durablement les transferts?

[Traduction]

    Monsieur le Président, durant la pandémie, le gouvernement fédéral a soutenu les provinces et les territoires. En fait, sur chaque tranche de 10 $ déboursés en réponse à la COVID-19, 8 $ provenaient du gouvernement fédéral.
    Nous avons épaulé les provinces et les territoires en procédant à des transferts directs pour les tests de dépistage, la recherche des contacts et la gestion des données, par exemple, mais aussi en les aidant à gérer la crise grâce à la participation de membres de la Croix-Rouge canadienne, qui se sont rendus dans des centres d'hébergement et qui ont offert du soutien directement sur le terrain, ce qui a contribué à réduire les éclosions.
    Nous serons là pour les provinces et les territoires. Ils doivent cependant dépenser l'argent nécessaire pour se préparer à ce qui s'en vient.
    Monsieur le Président, des experts ont témoigné des effets dévastateurs qu'ont eus les confinements liés à la COVID-19 sur la santé mentale des Canadiens.
    Les cas d'alcoolisme et de toxicomanie se multiplient, tout comme les cas de violence familiale, de décès liés aux opioïdes et de suicides. Certains ont décrit les conséquences des mesures de confinement comme une épidémie en soi.
    Alors que Noël approche à grands pas — une période toujours difficile sur le plan de la santé mentale pour plusieurs — et que les mesures de confinement sont encore en place, le gouvernement croit-il qu'il en a fait assez pour empêcher une deuxième vague de suicides, de violence familiale et de surdoses pendant la période de Noël?
(1440)
    Monsieur le Président, depuis très longtemps, le gouvernement se soucie des problèmes de santé mentale et d'abus d'alcool et d'autres drogues. En fait, nous en avons fait plus que tout ce que le gouvernement précédent a jamais accompli en ce qui touche l'abus d'alcool et d'autres drogues. Je suis fière du travail que nous avons accompli pour traiter les personnes qui consomment comme des êtres humains.
     En outre, la pandémie nous a amenés à investir dans la mise sur pied du portail Espace mieux-être, qui s'ajoute aux transferts directs aux provinces et aux territoires. J'encourage tous les Canadiens à consulter le portail pour obtenir du soutien et avoir accès à des professionnels qui pourront les aider à traverser cette période difficile.
    Monsieur le Président, des dizaines de milliers de Canadiens sont séparés de leurs proches parents depuis des mois à cause des mesures de confinement et de la fermeture des frontières découlant de la COVID-19, et 4 millions de Canadiens vivent seuls.
    Pour certaines de ces personnes, le fait de passer Noël seules en confinement pourrait exacerber leurs problèmes de santé mentale. Pour les Canadiens qui vivent seuls et qui veulent désespérément retrouver leur famille pendant la période des Fêtes pour préserver leur santé mentale, quel conseil le gouvernement fédéral peut-il leur donner sur la façon de se réunir en famille en toute sécurité et d'atténuer les répercussions de l'isolement sur leur santé mentale tout en empêchant la propagation de la COVID-19?
    Monsieur le Président, depuis le début, nous demandons aux Canadiens de faire d'énormes sacrifices et nous le savons. En réalité, partout dans le monde, les gens font des sacrifices pour endiguer la COVID-19 et protéger leurs proches.
    Je ne sous-estime pas ces sacrifices. En fait, je remercie les Canadiens de se protéger les uns les autres et de protéger leur collectivité. Néanmoins, il y a de la lumière au bout du tunnel. Des vaccins efficaces sont sur le point d'être distribués.
    Je rappelle à tous les Canadiens que, s'ils ont besoin d'aide et qu'ils n'y ont pas accès dans leur province ou leur territoire, ils peuvent visiter le portail Espace mieux-être Canada, qui est dans les deux langues officielles et qui a été traduit dans 200 autres langues.

Les affaires autochtones

    Monsieur le Président, lors des élections de 2015 et de 2019, et pas plus tard que cet été, le premier ministre a réitéré sa promesse, désormais rompue, de lever l'ensemble des avis concernant la qualité de l'eau potable d'ici mars 2021. Le gouvernement a prétexté la pandémie pour se libérer de sa promesse, mais cette excuse ne tient pas si l'on examine la situation.
     Le député de Kenora a été en contact avec plusieurs dirigeants communautaires autochtones de sa circonscription qui ont pu poursuivre des projets d'infrastructure, notamment d'approvisionnement en eau, pendant la pandémie.
     Le gouvernement admettra-t-il que la promesse de fournir de l'eau potable aux populations autochtones était vide dès le départ?
    Monsieur le Président, nous ne renonçons pas à notre promesse de mettre fin à tous les avis à long terme d'ébullition dans les réserves des Premières Nations, nous nous engageons plutôt plus profondément à long terme. Chaque communauté aux prises avec un avis d'ébullition est desservie par une équipe de projet, un plan d'action et des personnes qui se consacrent à la levée de l'avis.
     La semaine dernière, nous avons annoncé 1,5 milliard de dollars pour accélérer l'accès à l'eau potable à court et à long terme, et assurer la stabilité nécessaire pour que cela se concrétise non seulement au printemps 2021, mais après.
    Bien que nous ne puissions pas sous-estimer l'impact de la COVID-19 sur l'approvisionnement à long terme en eau potable, nous sommes...
    Le député de Desnethé—Missinippi—Rivière Churchill a la parole.
    Monsieur le Président, la semaine dernière, au lieu d'avouer son propre échec aux communautés autochtones, le premier ministre s'est caché derrière son ministre et l'a forcé à assumer la responsabilité du non-respect de cette promesse de mars 2021.
    Lorsqu'il était temps de faire une promesse électorale, le premier ministre était ravi d'être devant la caméra, d'occuper l'avant-scène et d'être sous les feux de la rampe. Maintenant que cette promesse a été rompue, il brille par son absence. Ce n'est pas du leadership.
    Comment les peuples autochtones peuvent-ils ce que disent le premier ministre et son gouvernement?
    Monsieur le Président, je vais terminer ce que j'allais dire.
    Même s'il ne faut pas sous-estimer l'incidence de la COVID-19 sur les délais nécessaires à la fourniture d'eau potable à long terme, nous avons bon espoir que d'ici le printemps 2021, le nombre de communautés faisant l'objet d'un avis permanent de faire bouillir l'eau s'élèvera à 12.
     Nous nous sommes déterminés à collaborer à long terme avec ces communautés. C'était l'objet de l'annonce de la semaine dernière concernant le versement de 1,5 milliard de dollars aux communautés et, oui, cela relève de ma compétence à titre de ministre.
(1445)

Les ressources naturelles

    Monsieur le Président, dans un rapport publié aujourd'hui, le directeur parlementaire du budget montre que tout scénario où le pipeline Trans Mountain se révélerait profitable est une chimère. Les coûts de construction ont grimpé à plus de 12 milliards de dollars et toute mesure de lutte contre les changements climatiques, comme le projet de loi du gouvernement sur la carboneutralité, rendra le projet non viable. Et pourtant, le premier ministre est déterminé à aller de l'avant avec ce fiasco environnemental et économique.
    Quand le premier ministre cessera-t-il de vendre cette chimère et de jeter des milliards de dollars par les fenêtres, pour faire plutôt les investissements nécessaires pour lutter contre la crise climatique et créer de bons emplois durables?
    Monsieur le Président, beaucoup de facteurs contribuent à déterminer si un pipeline est nécessaire, comme le soutien contractuel, le choix des expéditeurs et la nature des marchés à qui sont acheminés les produits livrés par le pipeline. TMX est un bon projet qui a généré plus de 7 000 emplois pour les Canadiens. Les arguments en faveur du projet sont très solides et la construction va continuer.

[Français]

    Monsieur le Président, non seulement le pipeline libéral gaspille des fonds publics, mais le gouvernement libéral est un cancre de la crise climatique.
    Dans un récent rapport sur l'indice de performance en matière de changement climatique, l'échec des libéraux est clair: le Canada est 58e sur 61 pays. C'est embarrassant et irresponsable.
    Au Québec, une pétition de 110 000 noms vient d'être déposée à l'Assemblée nationale contre le projet de GNL Québec. Les Québécois démontrent qu'ils veulent une transition verte et durable.
    Quand est-ce que les libéraux vont prendre l'urgence climatique au sérieux et investir dans le transport électrique et les énergies renouvelables?
    Monsieur le Président, nous avons pris beaucoup de mesures, par l'entremise du Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques, pour nous attaquer à la crise des changements climatiques.
    Bien sûr, nous savons que nous devons en faire plus. Dans les prochaines semaines, nous allons en faire plus avec un nouveau plan pour lutter contre les changements climatiques.

[Traduction]

La santé

    Monsieur le Président, le nombre de cas continue de battre des records dans l'ensemble du pays, et je sais que les familles de ma circonscription, Scarborough—Agincourt, s'inquiètent pour leurs êtres chers de tous âges. Hier, le premier ministre a annoncé que 249 000 doses du vaccin de Pfizer contre la COVID-19 seraient disponibles au Canada d'ici la fin de l'année.
    Maintenant que l'espoir se profile à l'horizon, comment la ministre de la Santé pourrait-elle rassurer les familles de ma circonscription et de partout au pays?
    Monsieur le Président, l'arrivée de vaccins au Canada est clairement un symbole d'espoir. Elle montre que l'on peut voir la lumière au bout du tunnel. Je sais que des familles de partout au Canada s'inquiètent pour leurs proches. Je les remercie pour les efforts fantastiques qu'elles déploient afin que tous leurs membres se protègent les uns les autres.
    Nous collaborons avec les provinces et les territoires pour trouver une façon rapide et efficace de distribuer les vaccins, et ce travail va bon train. Je tiens à remercier les provinces et les territoires du travail qu'ils accomplissent, à tous les niveaux, pour s'assurer qu'on puisse distribuer les vaccins quand ils arriveront au Canada.

[Français]

Les services publics et l'approvisionnement

    Monsieur le Président, nous avons tous lu ou écouté des contes de fées lorsque nous étions jeunes. Le dernier s'appelle « Frank Baylis et ses amis libéraux ».
    L'histoire est simple, mais accablante. Le problème, c'est que les personnages principaux ne s'entendent pas. Ils ne se considèrent pas tous comme des amis, même si les faits disent le contraire.
    Ma question est simple: est-ce que la ministre a octroyé d'autres contrats à des coquilles vides comme FTI Professional Grade, une compagnie qui a été créée quelques jours avant qu'on signe le contrat de 237 millions de dollars donné à l'ami Frank Baylis?
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de sa question.
    À ce jour, nous avons reçu plus de 3 000 ventilateurs pour les Canadiens et les Canadiennes. C'est très important pour les efforts que nous faisons au pays pour aider tous les Canadiens et les gens dans les hôpitaux.

[Traduction]

    Nous sommes au service des Canadiens. Le gouvernement libéral a constitué des stocks d'équipement de protection individuelle et de matériel médical en tout genre. Des entreprises de partout au pays ont répondu à l'appel. Elles ont toute notre reconnaissance, tout comme l'ensemble des Canadiens.

[Français]

    Monsieur le Président, les ventilateurs de M. Baylis n'étaient même pas approuvés par Santé Canada lorsque le contrat a été octroyé. De plus, M. Baylis a avoué, en comité, qu'il avait besoin d'argent. Il a été obligé de refinancer son entreprise et ses installations parce qu'il avait des problèmes.
     Est-ce que le gouvernement a payé deux fois le prix parce que Frank Baylis avait des problèmes financiers?
    Est-ce que le contrat a été fait de manière à cacher les extras?
    Monsieur le Président, c'est une histoire intéressante, mais ce n'est pas du tout le cas.
    Après un examen approfondi par un groupe d'experts indépendants, nous avons accordé un contrat à FTI Professional Grade Inc. C'est pour les Canadiens et Canadiennes et pour les hôpitaux. Nous sommes ici pour le Canada.
(1450)

[Traduction]

Les affaires étrangères

    Monsieur le Président, j'aimerais donner au gouvernement l'occasion de préciser sa politique à l'égard de la Chine. J'ai une question très simple, à laquelle j'espère obtenir une réponse.
    Le gouvernement a-t-il déjà instauré un nouveau cadre au sujet de la Chine, oui ou non?
    Monsieur le Président, j'aimerais remercier le député de me donner l'occasion de parler de notre politique à l'égard de la Chine.
    Les Canadiens qui nous regardent à la maison comprennent que nos relations avec la Chine sont à la fois complexes et multidimensionnelles. Ils comprennent que la Chine de 2020 n'est pas la Chine de 2016, et que notre stratégie doit évoluer au même rythme que nos relations avec la Chine. Comme je l'ai dit à maintes reprises en comité, où le député m'a posé de nombreuses questions, notre politique est fondée sur nos intérêts, nos valeurs et nos principes, y compris les droits de la personne. Elle vise à établir un partenariat mondial et à respecter les règles internationales.
     Monsieur le Président, cette réponse montre bien pourquoi les politiques du gouvernement sont un tel gâchis. Les libéraux sont incapables de répondre à une question simple.
    Dans son témoignage d'il y a deux semaines au comité, le ministre a communiqué deux messages contradictoires. Selon La Presse canadienne, le gouvernement avait déjà instauré un nouveau cadre au sujet de la Chine. Au même moment, selon le National Post, ce n'était pas le cas. S'il nous est impossible de tirer la chose au clair et que les médias n'en sont pas capables non plus, comment diable est-ce que n'importe qui d'autre, y compris la Chine, est censé comprendre la politique du gouvernement à l'égard de la Chine?
    Monsieur le Président, je crois que c'est très clair. Les Canadiens l'ont compris. Ce n'est peut-être pas le cas de l'opposition, mais je peux assurer au député que les Canadiens comprennent que la Chine de 2020 n'est pas la Chine de 2016. Si après deux heures et demie de questions, les conservateurs cherchent toujours une réponse, je pense qu'ils ont un problème parce que les Canadiens comprennent la situation.

[Français]

La justice

    Monsieur le Président, la Cour supérieure du Québec a ordonné au gouvernement de corriger l'aide médicale à mourir avant le 18 décembre, mais le projet de loi C-7 est paralysé.
    Les libéraux ont prorogé le Parlement durant six semaines. Ils n'ont qu'eux à blâmer si le temps manque. N'empêche que la prise en otage des travaux par la droite religieuse est déplorable. Il y a des personnes vulnérables et souffrantes qui attendent.
    Le gouvernement va-t-il s'assurer que le projet de loi C-7 sera adopté à temps sans bâillon et pense-t-il que le chef des conservateurs doit rappeler ses fanatiques à l'ordre?
    Monsieur le Président, nous avons été très déçus de voir les conservateurs poursuivre leurs tactiques pour empêcher l'adoption du projet de loi sur l'aide médicale à mourir.
    Nous savons que la grande majorité des Canadiens croit que l'aide médicale à mourir est un droit fondamental de la personne. Le délai imposé par la Cour supérieure du Québec prend fin dans deux semaines et les conservateurs tentent de nier l'urgence de la situation.
    C'est une situation grave et le chef de l'opposition officielle doit démontrer son leadership en l'espèce.
    Monsieur le Président, la prise en otage des travaux sur l'aide médicale à mourir par la droite religieuse des conservateurs devrait servir de leçon.
    Cela démontre pourquoi il faut tenir la religion le plus loin possible des affaires de l'État. La laïcité de l'État est fondamentale. Il faut protéger et promouvoir cette valeur. Pourtant, en ce moment, le fédéral participe à une contestation judiciaire de la laïcité de l'État au Québec.
    Va-t-il tirer une leçon de ce qui se passe aujourd'hui et cesser de prendre l'argent des contribuables québécois pour contester la laïcité de l'État québécois?
    Monsieur le Président, nous avons une position très claire là-dessus. Ce que je peux dire, c'est que nous ne participons pas au procès lié à cette contestation au Québec. C'est un cas où des Québécois et des Québécoises sont en train de s'opposer à la loi devant les tribunaux, ce qui est leur droit. Nous suivons le procès.

[Traduction]

Le commerce interprovincial

    Monsieur le Président, durant la pandémie, les Canadiens se font livrer davantage de produits à domicile, mais ils ne peuvent pas commander tous les excellents vins, spiritueux et bières que fabriquent nos bons producteurs canadiens. Les monopoles sur l'alcool invoquent des règles désuètes pour empêcher les Canadiens d'acheter les produits qu'ils veulent, et le gouvernement ne fait rien pour corriger la situation. Aujourd'hui, j'ai présenté un projet de loi visant à élargir le choix des consommateurs et à permettre la libre circulation de la bière, du vin et des spiritueux canadiens en cette période critique.
    Le gouvernement appuiera-t-il ce projet de loi pour aider les entreprises canadiennes et leurs travailleurs?
(1455)
    Monsieur le Président, le député sait très bien que le gouvernement est déterminé à éliminer les barrières entre les provinces et les territoires. C'est pour cette raison que nous avons négocié l'accord de libre-échange canadien. Nous espérons pouvoir collaborer bientôt avec les députés d'en face pour nous assurer de réduire les formalités administratives, afin de multiplier les occasions pour les entreprises et, par-dessus tout, d'offrir davantage de choix aux Canadiens.

Les jeunes

    Monsieur le Président, les jeunes Canadiens sont durement touchés par les pertes d'emplois et les ralentissements économiques en raison de la pandémie. Dans la mise à jour économique de l'automne, on retrouve des phrases comme « en doublant […] le financement destin[é] aux nouvelles possibilités d’emploi » et « en adoptant des mesures supplémentaires ». Le problème est là. Il n'y a pas de détails, pas d'échéancier et aucune indication pour que nos jeunes sachent s'ils pourront retourner sur le marché du travail et quand ils pourront le faire.
    La ministre cessera-t-elle sa litanie de platitudes et donnera-t-elle des détails sur les mesures relatives aux emplois pour les jeunes canadiens?
    Monsieur le Président, c'est la raison pour laquelle le gouvernement a mis en place des mesures pour répondre aux besoins des jeunes. Nous savons que la COVID-19 a des répercussions sur tous les Canadiens et que certaines tranches de la population sont plus durement touchées que d'autres. Les jeunes n'y font pas exception.
    En ce qui concerne Emplois d'été Canada, le programme demeure ouvert et j'invite donc les jeunes à s'inscrire. Quand est venu le temps de décréter un moratoire sur le remboursement des prêts d'études canadiens, nous avons fait en sorte que les intérêts soient gelés. Nous avons augmenté le financement du programme Futurpreneur pour que les jeunes entrepreneurs professionnels puissent continuer à collaborer pour trouver des solutions.
    Le gouvernement continuera de travailler au nom de tous les Canadiens, y compris les étudiants et les jeunes. Je remercie le député de se préoccuper de cette question.

La petite entreprise

    Monsieur le Président, la semaine dernière, j'ai eu le plaisir de visiter le Curio Exploration Hub, un nouveau centre d'activités novateur pour les enfants qui a été créé par Stephanie Stoute. Cette mère de deux jeunes enfants est une entrepreneure qui travaille fort et qui s'est trouvée sans le vouloir à ouvrir son entreprise pendant la pandémie. Mme Stoute peine à joindre les deux bouts et à garder son entreprise ouverte. Sa nouvelle entreprise n'est pas admissible à l'un ou l'autre des programmes d'aide du gouvernement. Mme Stoute a mis son cœur, son énergie et ses économies dans cette entreprise.
    Pourquoi le gouvernement ne veut-il pas corriger les lacunes de ces programmes et aider Mme Stoute?
    Monsieur le Président, j'aimerais d'abord rappeler aux Canadiens que le gouvernement a mis en place un vaste filet de sécurité pour les entreprises canadiennes. Je dirais qu'aucun autre pays n'a mis en place un aussi vaste filet de sécurité pour aider les entreprises grâce à des programmes comme la subvention salariale, la subvention pour le loyer et le Compte d'urgence pour les entreprises canadiennes.
    Au moment de concevoir les programmes, nous devons tenir compte à la fois des mesures d'intégrité et des besoins urgents des entreprises canadiennes. Nous cherchons toujours des façons d'améliorer les programmes et de nous pencher sur les cas particuliers qui ne sont pas couverts.

[Français]

Les mesures d'urgence visant la COVID-19

    Monsieur le Président, la semaine passée, le gouvernement du Canada a fait une annonce concernant les prêts d'urgence pour nos entrepreneurs en vertu du Compte d'urgence pour les entreprises canadiennes.
     Notre gouvernement a déjà aidé plusieurs entreprises agricoles et autres dans ma circonscription, Glengarry—Prescott—Russell, au moyen de prêts de 40 000 $ dont il est possible de radier 10 000 $ du solde.
    Est-ce que la ministre pourrait informer la Chambre d'autres mesures semblables?
     Nous avons annoncé que les entreprises peuvent avoir un deuxième prêt de 20 000 $ du Compte d'urgence pour les entreprises canadiennes. Nous continuerons à soutenir nos PME et à les aider à faire face à la pandémie en prolongeant la Subvention salariale et en soutenant les PME avec notre nouvelle aide au loyer offerte aux locataires. Nous continuerons à soutenir les entreprises de Glengarry—Prescott—Russell.

[Traduction]

La santé

    Monsieur le Président, les Canadiens s'inquiètent de plus en plus de la capacité du gouvernement de distribuer les vaccins en temps opportun. Nous avons entendu des nouvelles troublantes: des pirates informatiques tentent de perturber les chaînes d'approvisionnement des vaccins. L'agence américaine de cybersécurité et de sécurité des infrastructures sonne l'alarme. L'inaction dans ce dossier aura des conséquences mortelles pour les Canadiens. Qu'est-ce que le gouvernement fait pour protéger nos stocks de vaccins contre des menaces à la cybersécurité?
(1500)
    Monsieur le Président, nous sommes très chanceux que le major-général Fortin et 30 de ses collègues se soient joints à l'équipe de l'Agence de la santé publique du Canada. Depuis des mois, ils travaillent à la planification de la vaccination, y compris la protection de la chaîne de livraison des vaccins et l'examen des menaces potentielles à l'innocuité des vaccins pour les Canadiens. Rien ne nous empêchera d'assurer l'innocuité des vaccins et de veiller à ce qu'ils puissent être administrés à la population canadienne sans danger.

La sécurité publique

    Monsieur le Président, le premier ministre a jusqu'à la fin de la semaine prochaine pour se conformer à la volonté de la Chambre et interdire à Huawei d'utiliser nos réseaux 5G pour espionner les Canadiens et miner notre sécurité nationale. Nos partenaires du Groupe des cinq, les États-Unis, le Royaume-Uni, la Nouvelle-Zélande et l'Australie, ont tous convenu de restreindre ou d'interdire Huawei. Pourtant, ici au Canada, le premier ministre tergiverse et manque de fermeté. Quand le premier ministre apprendra-t-il à se tenir debout et dira-t-il non à Huawei?
    Monsieur le Président, je rappelle à mon collègue que nous sommes en train d'examiner de manière complète la façon de déployer la technologie 5G de façon sûre et sécuritaire. Nous avons été parfaitement clairs: nous continuerons de collaborer avec les experts de la sécurité nationale ainsi qu'avec nos alliés pour nous assurer que nous procédons d'une manière qui protège les Canadiens, leur sécurité et leur bien-être. Nous sommes sans équivoque: jamais nous n'avons compromis et jamais nous ne compromettrons la sécurité des Canadiens.

La santé

    Monsieur le Président, une partie essentielle de notre économie a trait aux entreprises qui fabriquent les rouages dont d'autres entreprises ont besoin. Nous avons des entreprises de calibre mondial dans ce domaine dans le Sud-Ouest de l'Ontario. Les réunions en personne sont essentielles pour Uni-Fab, un employeur de Leamington. Le propriétaire veut doubler la taille de l'entreprise et créer 150 emplois bien rémunérés, mais il doit avoir accès au Michigan. Ses camionneurs peuvent traverser la frontière, mais il ne peut pas faire de même sans devoir s'absenter 14 jours de son entreprise. Personne ne suggère de compromettre la sécurité, mais quand des tests rapides seront-ils accessibles à tous les postes frontaliers du Canada?
    Monsieur le Président, c'était l'occasion de s'associer à la province de l'Alberta pour piloter une étude. Cette étude nous aidera à comprendre la meilleure façon de tester les gens à la frontière et de combiner ces tests aux mesures de quarantaine parce que, au bout du compte, tous les Canadiens s'attendent à ce que nous assurions la sécurité sanitaire à la frontière. C'est exactement ce que nous faisons. Nous examinons les données probantes. Nous examinons les recherches. Nous aurons plus à dire lorsque l'étude sera terminée.

La sécurité publique

    Monsieur le Président, depuis le début de la pandémie, on assiste à une multiplication des incidents haineux: des personnes subissent du harcèlement simplement à cause de leur race ou de leur religion. De tels comportements sont inacceptables et doivent cesser. Bien que certains les considèrent comme des événements isolés, on sait qu'ils ont de vastes répercussions et touchent l'ensemble de la communauté.
    Je suis fière d'avoir été élue récemment pour représenter York-Centre, une circonscription où règne une grande diversité. On y trouve des synagogues, des mosquées et des églises noires, autant d'institutions qui sont trop souvent la cible de crimes haineux motivés par l'antisémitisme, l'islamophobie ou des sentiments anti-Noirs. Je cherche toujours à m'assurer que mes concitoyens peuvent tous vivre, prier et pratiquer leur religion de façon ouverte et pacifique, sans craindre pour leur sécurité.
    Le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile pourrait-il parler à la Chambre de ce que fait le gouvernement pour soutenir la sécurité des communautés du pays?
    Monsieur le Président, je remercie la députée d'York-Centre de toute l'ardeur qu'elle met à défendre les intérêts de ses concitoyens et à lutter contre la haine. Peu importe leur race, leur origine ethnique et leur religion, tous les Canadiens devraient se sentir en sécurité dans les lieux où ils vivent, travaillent, prient et se rassemblent.
    Depuis notre arrivée au pouvoir, nous avons quadruplé le financement destiné à la sécurité des communautés à risque dans le cadre du programme des projets d'infrastructure de sécurité. La semaine dernière, nous avons d'ailleurs annoncé, dans l'énoncé économique de l'automne, une somme supplémentaire de 13 millions de dollars afin de protéger les communautés à risque d'être victimes de crimes haineux. Ainsi, nous fournissons des fonds aux organismes à but non lucratif comme les lieux de culte, les écoles et les centres communautaires. Le gouvernement libéral continuera toujours de soutenir les Canadiens et de veiller à ce qu'ils se sentent en sécurité dans leur communauté, à l'école et dans les lieux de culte.

La petite entreprise

    Monsieur le Président, lorsque la pandémie a frappé et que les travailleurs de première ligne et les hôpitaux ont manqué d'équipement de protection individuelle et de désinfectant, les propriétaires de petites entreprises sont intervenus. Des distilleries et des brasseries se sont mises à fabriquer du désinfectant pour les mains. Elles ont ainsi sauvé des vies et certaines d'entre elles l'ont fait gratuitement. Toutefois, lorsqu'est venu le temps pour le gouvernement de commander du désinfectant, au lieu de s'adresser à ces petites entreprises canadiennes, les libéraux ont choisi de verser plus d'un demi-milliard de dollars à des multinationales.
    Le ministre responsable pourrait-il expliquer ce que doivent faire les petites entreprises canadiennes pour obtenir le soutien qu'elles méritent de la part du gouvernement?
(1505)
    Monsieur le Président, nous avons très clairement indiqué que nous voulons appuyer les solutions fabriquées au Canada. C'est pourquoi nous avons lancé un appel aux entreprises de partout au pays. De nombreuses petites entreprises ont répondu à cet appel. À l'heure actuelle, environ 50 % de l'approvisionnement est constitué de solutions fabriquées au Canada par des entreprises locales. En mars, ce pourcentage était à peu près de zéro. Nous sommes très fiers d'appuyer les entreprises canadiennes de partout au pays. Nous continuerons de travailler avec elles et de promouvoir les programmes « fabriqués au Canada » à l'avenir.

L'environnement

    Monsieur le Président, il est très tentant de poser des questions sur le rapport du directeur parlementaire du budget de ce matin, qui indique clairement que l'oléoduc Trans Mountain rapportera de l'argent seulement si toutes les mesures climatiques échouent, mais nous avons un autre sujet brûlant. Il s'agit des tentatives du gouvernement de se soustraire à la convention de Bâle sur les exportations de plastiques et d'autres déchets non dangereux. Des règles très claires entrent en vigueur le 1er janvier pour les pays signataires de la convention de Bâle, mais le Canada les contourne en concluant un accord avec les États-Unis, qui ne sont pas signataires.
    Quelles mesures prendra le ministre de l'Environnement pour éliminer cette échappatoire?
    Monsieur le Président, le Canada prend très au sérieux ses obligations internationales en matière de gestion des déchets. Il a joué un rôle de premier plan dans la négociation des modifications aux dispositions de la convention de Bâle, que nous avons présentées l'automne dernier.
    Les États-Unis n'ont pas signé la convention de Bâle sur les mouvements transfrontières des déchets. L'accord que nous sommes en train de conclure avec les États-Unis garantira que les déchets qui seront échangés entre les deux pays seront gérés conformément à la convention. Grâce à l'accord, nous pouvons garantir que les déchets qui circuleront entre les deux pays seront gérés d'une manière écologiquement rationnelle.

Recours au Règlement

Les questions orales

[Recours au Règlement]

    Il y a deux ou trois mois, une députée conservatrice a publié un message sur Twitter concernant une théorie complotiste d'extrême droite antisémite au sujet de liens entre George Soros et la vice-première ministre. Elle s'est excusée et elle a supprimé sa publication, alors vous comprendrez ma surprise lorsque j'ai entendu, aujourd'hui, un député répéter la même théorie complotiste.
    Je voudrais donner l'occasion à mon collègue de retirer ses propos et de s'excuser pour ce qu'il a dit aujourd'hui à la Chambre.
    Je remercie le secrétaire parlementaire de son intervention. Je ne crois pas voir aucun député demander la parole. Je vais prendre le recours au Règlement en délibéré et je reviendrai à la Chambre à cet égard, si nécessaire.
    Le député a la parole.
    Monsieur le Président, s'il ne veut pas le dire lui-même, je vais le nommer. Il s'agit du député de Barrie—Innisfil.
    Peut-être souhaite-t-il expliquer ce qu'il a dit à la Chambre.
    Je vois que le député de Barrie—Innisfil souhaite prendre la parole et intervenir au sujet de ce recours au Règlement.
    Le député a la parole.
    Monsieur le Président, je vous invite à écouter les bandes audio. Je n'ai tenu aucun propos antisémite, quel qu'il soit, et je ne resterai pas assis ici à prendre la situation à la légère.
    Je vous invite, monsieur le Président, à écouter mes propos. Ils n'avaient rien d'antisémite. Je ne resterai pas là à me faire accuser.
    Je remercie les deux députés de leur intervention. Je crois que nous nous aventurons sur la voie d'un débat et sur une question d'interprétation. J'estime donc qu'il vaut mieux laisser cela de côté pour l'instant.
    Monsieur le Président, j'invoque le Règlement.
     Dans l'esprit des Fêtes, vous constaterez qu'il y a consentement unanime à l'égard de la motion suivante: que la Chambre reconnaisse que les propriétaires de petites entreprises ont annulé ou reporté les réceptions et les célébrations de Noël pour les employés pour empêcher la propagation de la COVID-19, et ont choisi d'offrir des cartes-cadeaux à leurs employés au lieu d'objets pour encourager l'achat local pendant les Fêtes de cette année; et, étant donné que les réceptions et les repas tenus en personne sont exonérés d'impôt jusqu'à concurrence de 150 $ et que les cartes-cadeaux sont considérées comme un revenu imposable pour les employés, que la Chambre demande au gouvernement d'exclure du revenu d'emploi les cartes-cadeaux jusqu'à concurrence de 150 $ pendant la période des Fêtes de 2020, de sorte que les petites entreprises, les organismes sans but lucratif et les administrations locales puissent récompenser et remercier leurs employés pour leur travail acharné, surtout en ces temps difficiles.
(1510)
    Les députés ont l'habitude, maintenant: puisqu'il s'agit d'une séance hybride de la Chambre, je demanderai seulement à ceux qui s'opposent à ce que le député de Courtenay—Alberni propose cette motion d'exprimer leur désaccord.
    Par conséquent, que tous ceux qui s'opposent à ce que le député propose la motion veuillent bien dire non.
    Des voix: Non.

[Français]

    Monsieur le Président, j'invoque le Règlement.
    Durant la période des questions, nous avons eu l'occasion d'avoir des échanges en anglais et en français. Je demande le consentement unanime de la Chambre pour déposer un document intitulé « Exigences et liste de vérification en matière de langues officielles pour les présentations au Conseil du Trésor », pour aider le président du Conseil du Trésor à exiger les analyses linguistiques nécessaires lors d'octroi de grands contrats, comme celui octroyé à l'organisme UNIS.
    Puisqu'il s'agit d'une séance hybride de la Chambre, par souci de clarté, je demanderai seulement à ceux qui s'opposent à la demande d'exprimer leur désaccord.
    Par conséquent, que tous ceux qui s'opposent à ce que l'honorable député de Mégantic—L'Érable propose veuillent bien dire non.
    Des voix: Non.

ORDRES ÉMANANT DU GOUVERNEMENT

[Ordres émanant du gouvernement]

[Traduction]

Le Code criminel

     La Chambre reprend l'étude de la motion portant que le projet de loi C-7, Loi modifiant le Code criminel (aide médicale à mourir), soit lu pour la troisième fois et adopté.
    Monsieur le Président, je vais essayer de reprendre là où j’en étais. Je parlais de la compassion, je crois, et de la manière dont elle s’exprime, aux yeux des Canadiens et des Canadiennes, notamment dans le souci que nous avons de nos aînés et de notre population vieillissante.
    En Saskatchewan, notamment, le problème s'aggrave. En 2015, Statistique Canada a réalisé une enquête qui a révélé qu’à l’avenir, la proportion de personnes âgées augmentera de 4 à 5 % tous les huit ans, je crois. Répétons-le: notre population continue de vieillir.
    Il suffit d'examiner notre stratégie pour les soins palliatifs et l'infrastructure existante pour constater que les ressources seront insuffisantes. Nous passons beaucoup de temps au Parlement à étudier le projet de loi C-7 parce que le gouvernement a décidé de se fixer comme objectif prioritaire de trouver le moyen d’abaisser les critères d’admissibilité à l’aide médicale à mourir pour en élargir l’accès. C'est essentiellement la raison pour laquelle les groupes de défense des droits affirment que ce que propose cette mesure législative équivaut plus ou moins à un suicide assisté. C'est un message que nous ne voulons pas transmettre aux Canadiens, surtout lorsque nous voyons que de nombreuses régions du pays sont aux prises avec une véritable épidémie de suicides.
    Nous devons être sûrs que la population canadienne reçoit un message clair et concis, à savoir que nous concentrons nos efforts sur la prestation de soins et d’une aide qui soutiennent la vie. Nous ne voulons pas lui donner l'impression que nous avons plus ou moins renoncé et qu'au lieu de préserver la vie, nous allons offrir la possibilité de mourir. Je trouve que le gouvernement emprunte une voie très sombre.
    Encore une fois, nous devons veiller à transmettre le bon message à la population canadienne, à savoir que nous chérissons toute vie et que notre unique préoccupation est la vie et le bien-être des Canadiens.
    Monsieur le Président, je vais profiter de l'occasion pour souligner l'importance des soins palliatifs et des soins de longue durée et réaffirmer, en reprenant une déclaration que je fais souvent, à savoir que toutes les vies ont une valeur égale. C'est une de mes convictions profondes.
    Le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui est le fruit de nombreuses heures de discussion et de débat. Des dizaines de milliers de Canadiens ont donné leur avis sur le sujet. La Cour supérieure du Québec a rendu une décision. Elle reflète d'autres décisions prises antérieurement.
    Le projet de loi semble avoir l'appui du Bloc québécois, du Parti vert, du NPD et, évidemment, du Parti libéral.
    Mon collègue pourrait-il nous dire ce qu'il pense de l’ampleur du débat qui a eu lieu et du degré d’appui, au moins de la part des entités politiques à la Chambre? Pourrait-il nous expliquer pourquoi il pense que nous devrions aller de l'avant avec ce projet de loi?
(1515)
    Monsieur le Président, beaucoup de gens appuient l’idée de maintenir un certain cadre autour du projet de loi C-7, notamment pour veiller à préserver les protections contenues dans la loi. Certaines de ces protections ont été éliminées.
    Le député a également indiqué que des dizaines de milliers de personnes ont été consultées à ce sujet, mais qu’un groupe particulier, à savoir les personnes handicapées au Canada, n’a fait l’objet d’aucune consultation.
    Une des principales objections que moi et beaucoup d’autres personnes avons soulevées est de savoir ce qu’il doit faire pour les personnes handicapées et le message qu’il leur transmet.
    Monsieur le Président, il y a certainement eu beaucoup de discussions de ce côté-ci de la Chambre sur le besoin d’en faire plus en ce qui concerne les personnes handicapées. Combien d’entre elles ont dit avoir été incitées à opter pour l’euthanasie et se font même qualifier d’égoïstes quand elles ne choisissent pas cette option? C’est pourquoi nous avons proposé un amendement raisonnable établissant que l’euthanasie devrait être une conversation initiée par le patient, et non imposée par quelqu’un d’autre.
    Un des autres points soulevés dans la discussion sur les personnes handicapées est que nous entendons des gens parler des nouvelles prestations et des dépenses du gouvernement, mais nous devons aussi reconnaître que les personnes handicapées ont une importante contribution à offrir en ce qui a trait à l’emploi. C’est pourquoi le député de Carleton avait déposé lors de la dernière législature un excellent projet de loi qui aurait éliminé les obstacles à l’emploi pour les personnes handicapées.
    Le député pourrait-il parler un peu plus de la manière dont nous pouvons promouvoir l’inclusion complète et entière des personnes handicapées?
    Monsieur le Président, le député de Sherwood Park—Fort Saskatchewan soulève un point crucial sur la raison pour laquelle nous devons affirmer l’importance de la vie pour chaque personne. Nous devons nous lever et défendre la dignité de la vie de tout un chacun. Il a soulevé un point important quand il a dit que les personnes handicapées sont capables de faire une contribution à la main-d’œuvre. Elles constituent un élément clé du tissu de nos collectivités.
    À Swift Current, où j’habite, le groupe des capacités de Swift Current est une merveilleuse association qui fait un travail fantastique et a une présence très édifiante dans notre communauté. Ce que ce projet de loi leur signale est que leur contribution à notre société n’est pas tellement pertinente. Nous devons veiller à communiquer le bon message.
    Monsieur le Président, certaines questions posées aujourd’hui constituaient réellement des attaques contre des opposants au projet de loi. C’était de la partisanerie qui n’avait vraiment pas sa place dans une discussion sur certaines décisions très importantes concernant la vie et la mort.
    Je voudrais que mon distingué collègue présente certaines des raisons pour lesquelles les conservateurs ont présenté des amendements raisonnables. Ces raisons n’ont rien à voir avec la politique, mais il s’agit plutôt de convictions fondamentales que nous partageons, ainsi que les personnes que nous représentons de ce côté-ci de la Chambre, y compris les personnes handicapées et d’autres issues de différents secteurs pour qui le projet de loi C-7 fait problème. Il ne s’agit pas de politique, mais de convictions fondamentales très importantes pour les gens, et la discussion ne devrait prêter le flanc à aucune partisanerie.
    Monsieur le Président, le député a tout à fait raison. L’affirmation formulée à la période des questions selon laquelle des Canadiens sont tous les jours taxés de fanatisme parce qu’ils s’opposent au projet de loi est absolument ridicule.
    Nous devons demeurer concentrés sur ce que nous faisons pour les Canadiens. Nous devons nous concentrer uniquement sur les meilleures mesures à prendre pour les Canadiens; les gens sont catégoriques à ce sujet: nous devons défendre la dignité.
(1520)
    Monsieur le Président, je vais partager mon temps de parole avec la députée de Yorkton—Melville.
    La Dre Heidi Janz, présidente du comité du Conseil des Canadiens avec déficiences, s’est dite alarmée de voir le comité des finances travailler à un rythme aussi effréné. Elle a invité les membres du comité à procéder à des consultations publiques sur le projet de loi. Je suis d’accord avec elle. Nous allons beaucoup trop vite.
    Déjà en février, un concitoyen de ma circonscription m’avait dit qu’il fallait ralentir. Nous devons aussi nous rappeler que nous sommes ici à cause du scandale de l’organisme UNIS et de la prorogation de la Chambre. Cela nous a privés de plus d’un mois, que nous aurions pu prendre pour débattre de cette question à la Chambre. Le sujet a donc pris un caractère urgent et on se croit obligé de régler le dossier au plus vite.
    Il est important de répéter certaines choses. Parfois, des Canadiens qui nous regardent peuvent trouver que certaines de nos discussions portent à confusion. Je veux donc résumer rapidement deux ou trois points.
    Nous sommes ici à cause de l’affaire Truchon, issue de la Cour supérieure du Québec. Il s’agit de l’article de l’actuelle loi voulant que la mort doive être raisonnablement prévisible. Le juge dans l’affaire a invalidé cet article et déclaré qu’il doit être changé. Voilà donc ce qui a lancé le débat sur le projet de loi dont nous discutons.
    Le gouvernement a choisi de ne pas en appeler du jugement, ce qui est inhabituel. Normalement, lorsqu’un tribunal inférieur rend une décision qui va à l’encontre d’un projet de loi du gouvernement, tout particulièrement dans le cas d’un projet de loi important, le gouvernement fait appel, en l'occurrence, à la Cour d’appel du Québec et, en dernier ressort, à la Cour suprême. Or, le gouvernement, pour une raison que j’ignore, a décidé de ne pas aller en appel. En conséquence, les personnes aux prises avec une maladie chronique ou une déficience chronique auront accès aux mesures prévues dans le projet de loi.
    Ils ont exclu précisément les personnes atteintes de maladies mentales, contrairement, disons aux personnes paraplégiques. À mon sens, cette distinction est arbitraire: elle désigne des gagnants et des perdants; pour cela, la loi, si elle est adoptée, sera sûrement contestée en vertu de la Charte.
    Je veux aussi parler des mesures de sauvegarde qui ont été retirées de la loi, comme la période de réflexion de 10 jours. Comme un de mes collègues l’a mentionné cet avant-midi, depuis l’entrée en vigueur de la loi, 263 Canadiens qui avaient choisi de s’en prévaloir ont changé d’idée pendant la période de réflexion de 10 jours et n’ont pas donné suite à leur projet. C’est donc 263 vies de Canadiens qui ont été sauvées grâce à la période de réflexion de 10 jours. Or, cette période de réflexion a été éliminée et de futurs Canadiens à qui elle pourrait servir ne seront pas sauvés.
    Une autre mesure de sauvegarde qui a été retirée est le consentement final. Une personne peut maintenant consentir à l’avance à cette procédure. C’est un problème pour moi, parce que nous ne savons pas, le temps venu, si la personne désire toujours se prévaloir de la mesure, étant donné que le consentement n’est plus exigé.
    L’autre problème tient au fait que, en vertu du projet de loi, il ne faut plus qu’un seul témoin pour convenir que la mesure est appropriée pour la personne, alors que la loi actuelle en exige deux. Il ne faut donc plus qu’une seule personne pour donner le feu vert.
    Le projet de loi prévoit une période d’attente de 90 jours pour les personnes dont la mort n’est pas raisonnablement prévisible. J’estime que cette période n’est pas assez longue.
    Par exemple, une personne qui a une lésion à la moelle épinière prendra plus de 90 jours avant de commencer à récupérer. En Ontario, il faut en moyenne 126 jours pour avoir accès à un établissement de soins de longue durée spécialisé. La personne qui a besoin de soins spécialisés pour la douleur doit attendre en moyenne cinq mois et demi. Il faut 120 jours pour obtenir quelque chose d’aussi simple que des prestations d’invalidité du RPC. Tout cela prend donc beaucoup plus de temps que 90 jours. Selon moi, une période d’attente de 90 jours, c’est trop court.
    Les personnes handicapées se sont élevées contre cette mesure lorsqu’elle a été annoncée. Selon des responsables d’Inclusion Canada, « En autorisant les Canadiens handicapés à se prévaloir de l’aide médicale à mourir en dehors de cas de fin de vie, le Canada indique que ces Canadiens peuvent être sacrifiés; et ce faisant, il met leur vie, leur dignité et leur appartenance en danger. »
    Des responsables des Canadian Physicians for Life ont pour leur part déclaré que le projet de loi porte préjudice aux malades marginalisés en raison des répercussions inhérentes d’un régime qui présente la mort comme une réponse appropriée à une maladie ou à une déficience qui ne met pas la vie en danger. En outre, on estime que le projet de loi non seulement crée inévitablement le risque que certaines personnes soient euthanasiées contre leur volonté, mais qu’il augmente ce risque en enlevant des mesures de sauvegarde cruciales qui permettaient de veiller à ce que les demandes soient valides au départ.
    De l’avis du Christian Legal Fellowship, les risques que présente le projet de loi — qui ont des répercussions dévastatrices sur les Canadiens marginalisés — sont exagérément disproportionnés par rapport aux avantages qu’on tente de conférer à ceux qui veulent avoir un accès plus rapide à l’aide médicale à mourir.
    Les évêques catholiques du Canada, pour leur part, demeurent farouchement opposés au projet de loi C-7.
(1525)
    Pour montrer que je ne suis pas complètement partial sur cette question, je vais citer un document du Conseil unitarien du Canada, qui appuie l'aide médicale à mourir. Il a déclaré ceci:
     En cette période de pandémie, le système de santé est débordé et à bout de souffle. Nous exhortons le gouvernement à trouver des façons de déployer les ressources nécessaires pour que les personnes qui veulent avoir recours à l'aide médicale à mourir puissent le faire, surtout celles qui vivent dans des collectivités éloignées qui manquent de ressources.
     On a vraiment l'impression qu'il s'agit d'une solution pour désengorger un système de santé débordé. Plus de 50 chefs religieux au Canada ont rédigé un article, et je vais en lire un bref extrait. Voici ce qu'il dit:
     Maintenant que notre système de santé, pourtant réputé dans le monde entier, voit dans l’euthanasie une « solution » à la souffrance humaine, nous sommes en train de miner la créativité et la détermination indispensables au traitement des cas les plus compliqués. En pratique, nous imposons l’élimination délibérée de la vie humaine comme solution à la souffrance humaine [...] Sur le plan moral, quelle chute vers l’abîme. Ce n’est pourtant pas ce que nous avons à l’esprit, en tant que Canadiennes et Canadiens, quand nous souhaitons pratiquer la sollicitude, la compassion et l’inclusion comme société. Nous devons au contraire prendre en charge ceux et celles qui souffrent et offrir des soins exceptionnels aux personnes confrontées à la maladie et à la mort.
    J'ai également reçu beaucoup de correspondance de la part des habitants de ma circonscription, et je tiens à lire certains passages.
    Cécile Goodmanson a écrit:
     Le projet de loi C-7 est horrible, et je vous demande de vous y opposer. C’est essentiellement un pacte de suicide. Avec ce projet de loi, notre société déclare qu'il est acceptable de tuer des personnes qui sont malades, handicapées, seules ou atteintes de maladie mentale. Si ces personnes pensent que la vie ne vaut pas la peine d'être vécue, alors nous devrions accepter ce mensonge et nous débarrasser d’elles rapidement? C'est ridicule. Je pensais que nous n'étions pas censés faire de la discrimination à l’égard des personnes qui sont handicapées, âgées, ou atteintes d'une maladie physique ou mentale.
    Becky Thomas a écrit:
    Le projet de loi C-7 du gouvernement libéral, qui vise à élargir l'accès au suicide assisté et à l'euthanasie, est vraiment horrible. Il permettrait à des personnes qui ne sont même pas mourantes d'exiger d’un médecin qu’il les aide à se suicider. N'importe quelle personne pourra exiger la participation de l'État et des contribuables à sa mort, pourvu qu’elle déclare être en proie à des souffrances psychologiques ou physiques intolérables, des termes très généraux qui se prêtent à toutes les interprétations possibles. Je vous demande instamment de vous élever contre cette offensive.
    Pat et Donna Robol ont envoyé ce texte au ministre de la Justice, et comme je ne suis pas sûr qu’il l’a lu, je vais le lire pour qu’il puisse l’entendre. Ils disent:
     En tant qu’opposants au suicide assisté par un médecin, nous avons rempli le questionnaire; toutefois, nous avons trouvé que le sondage en ligne est difficile à remplir parce qu’il se fonde sur un appui présupposé à l’euthanasie et au suicide assisté. Le questionnaire ne permet pas aux personnes qui sont en désaccord de dire vraiment ce qu’elles pensent. J'ai entendu dire, sur une période de deux semaines environ, que beaucoup de personnes pensaient, en toute conscience, ne pas pouvoir participer à un tel sondage pour cette même raison. Le sondage comportait de nombreuses lacunes, notamment en ce qui concerne le temps alloué et la présomption que tout le monde avait accès à un ordinateur.
    David Dombrowski a écrit:
     Je suis très préoccupé par le fait que le gouvernement libéral ne procède pas à l'examen quinquennal promis de sa loi sur l'euthanasie, mais qu'au contraire, il la libéralise bien au-delà de la décision judiciaire qui a suscité la réponse du gouvernement. Ce gouvernement n'a porté aucune accusation et n'a même pas décidé d'enquêter sur les nombreux cas d'abus rendus publics dans le cadre de la loi existante sur l'euthanasie, et il propose maintenant de supprimer nombre des mesures de sauvegarde existantes.
    Cheryl Fraess a écrit:
     Le gouvernement du Canada se targue d’être le champion de l'inclusion et de l'accessibilité. Avec sa position actuelle sur les nouvelles dispositions de l’aide médicale à mourir, il nous rappelle qu'il y a, de toute évidence, un angle mort dans sa vision d'un Canada plus inclusif. Ce n’est pas seulement un oubli regrettable. C'est une trahison des principes fondamentaux de l'inclusion, une trahison qui met en danger la vie des personnes handicapées.
    Avant de conclure, je voudrais évoquer la mémoire de quelques hommes qui nous ont quittés.
    Mon oncle George est né en 1940. Il était trisomique. Il était le deuxième de la famille. Mon père a dit qu’il ne s’était même pas rendu compte que son frère était trisomique avant l’âge de 8 ou 9 ans. Mon oncle Georges est mort de causes naturelles à 53 ans. Mon oncle Ken a eu un accident épouvantable à la ferme lorsqu’il avait quatre ans, un accident qui l’a rendu paraplégique. Sa vie était très difficile à cette époque, spécialement pour ses parents qui devaient s’occuper d’un fils nouvellement paraplégique, mais il a persévéré. Il a eu une belle carrière au gouvernement provincial et il est devenu un très haut fonctionnaire. Je l’admirais et il était de loin mon oncle favori. Il est mort du cancer dans la cinquantaine. Ces deux hommes ont fait, en partie, ce que je suis aujourd’hui. Je marche dans leurs pas. Sans parler, ils m’ont enseigné la tolérance, l’acceptation et l’amour, et je suis ici aujourd’hui, en partie, grâce à ces deux hommes.
    Ne créons pas un Canada où on met fin à la vie d’hommes comme mon oncle George et mon oncle Ken. Prenons le temps qu'il faut.
(1530)
    Madame la Présidente, il est important de reconnaître que le temps presse pour ce projet de loi. Le Bloc en a parlé à la période des questions et d’autres personnes d’autres partis ont mentionné également qu’il faut adopter la mesure législative.
    Les conservateurs ne devraient pas essayer de donner la fausse impression qu’il s’agit du processus même, ou qu’il pourrait causer un retard dans l'adoption du projet de loi. Si le Parti conservateur veut être complètement transparent, il devrait avouer qu’il n’appuie pas le projet de loi parce qu’il estime que la décision aurait dû être portée en appel à la Cour suprême du Canada. C’est la raison pour laquelle il n’appuie pas le projet de loi.
    Je me demande si mon collègue d’en face reconnaîtrait que c’est effectivement le cas.
    Madame la Présidente, le secrétaire parlementaire a peut-être besoin d’un peu d’informations. Le gouvernement semble extrêmement coincé et confus sur les mesures à prendre. Toutefois, plusieurs options sont possibles.
    Premièrement, il pourrait demander une prolongation à la Cour supérieure du Québec, comme il l’a déjà fait. Je suis sûr qu’il pourrait le faire de nouveau.
    Deuxièmement, le gouvernement pourrait faire appel de la décision. Cela se fait couramment et est nécessaire quand les changements apportés à la loi ont des répercussions aussi profondes sur le pays.
    Plusieurs outils sont à la disposition du gouvernement. Il choisit simplement de n’en utiliser aucun.
    Madame la Présidente, je félicite mon collègue d'avoir abordé l'aspect humain de cette question. Il a parlé de ses deux oncles atteints d'un grave handicap qui ont tous les deux mené une vie productive et enrichissante. Il a mentionné que ces oncles lui ont appris la tolérance, ce qui se fait rare parfois à la Chambre, comme on l'a entendu pendant la période des questions aujourd'hui. On a qualifié les gens qui s'opposent à l'élargissement de l'aide médicale à mourir de fanatiques religieux.
    J'aimerais savoir si le député pense qu'il s'agit d'une façon appropriée de qualifier ceux d'entre nous qui ont de sérieuses réserves par rapport à la mesure législative.
    Madame la Présidente, c'est tout à fait inapproprié. Nous sommes 338 députés à la Chambre. Nous sommes loin d'être d'accord sur tout. Nous venons de différents milieux et appartenons à diverses confessions religieuses. Nos croyances, nos expériences et nos familles sont différentes. Nous sommes tous uniques.
    C'est là que réside la force de la Chambre. Les députés, dans toute leur diversité, se réunissent pour adopter de bonnes lois en s'appuyant sur leurs expériences uniques.
    Il est très important que nos collègues à la Chambre nous parlent de leurs expériences pour les faire connaître à tous. Ensemble, nous pouvons adopter de bonnes lois.
    Madame la Présidente, en écoutant le député de Winnipeg-Nord, j'ai eu l'impression qu'il avait recours à la tactique de la théorie du complot. J'ai aussi entendu une théorie du complot à propos de la stratégie sur l'aide médicale à mourir du Parti libéral du Canada: elle laisse entendre que les libéraux défendent l'élargissement de cette procédure parce qu'ils veulent économiser de l'argent en retirant les soins palliatifs. Je ne pense pas que le Parti libéral du Canada tomberait aussi bas.
    J'aimerais savoir ce que mon collègue en pense.
(1535)
    Madame la Présidente, les théories du complot sont toujours une destination étrange et intéressante, mais la députée a soulevé un point que je voulais aborder, notamment les soins palliatifs. Ma belle-mère a fait face à une situation de fin de vie en soins palliatifs et il était très important pour ma famille d’avoir cette possibilité. Malheureusement, 70 % des Canadiens n’ont pas accès aux soins palliatifs et c’est ce qui fait augmenter la demande à l’égard de l’aide médicale à mourir.
    Il est important que nous, en tant que pays, et le gouvernement élaborions une stratégie et un plan pour mettre en place des soins palliatifs adéquats et améliorés au pays. Cela aidera beaucoup les personnes âgées et celles qui se trouvent en fin de vie.
    Madame la Présidente, c’est un honneur pour moi de prendre la parole une troisième fois sur le projet de loi C-7, qui aurait pour effet d’élargir considérablement l’accès au suicide assisté au pays.
    Je représente des milliers de voix à travers le pays qui ont l’impression que ce projet de loi les met dans la ligne de mire. Je fais référence aux Canadiens vulnérables qui ont des handicaps ou des maladies invalidantes et qui se sentent ciblés. Ils nous ont dit que cette loi les vise de façon particulière en leur fournissant un chemin spécial vers la mort assistée. Ils veulent que nous ici sachions que leur vie compte. C’est la dernière occasion pour les députés de légiférer sur le projet de loi C-7 afin de veiller à ce que leurs intérêts soient pris en compte.
    J’aimerais utiliser mon temps aujourd’hui pour réitérer un thème que j’ai abordé dans toutes mes interventions sur le projet de loi C-7. Les libéraux se proposent d’imposer une vaste loi qui aura des conséquences considérables, malgré ce que le Parlement et les Canadiens leur ont clairement indiqué. Ils ont même fait fi de leurs propres lois.
    Le gouvernement n’aurait pas dû proposer d’adopter le projet de loi avant l’examen du projet de loi C-14 par le Parlement, qui est censé avoir lieu d’ici la fin juin l’année prochaine. Il aurait dû faire cela d’abord. Nous n’avons pas encore une idée assez claire des répercussions du régime pancanadien d’aide médicale à mourir sur notre pays. Cinq années ne suffisent vraiment pas pour bien cerner les tendances, les abus et l’incidence de l’aide médicale à mourir sur la liberté de conscience protégée par la Charte.
    Je me rappelle les paroles de l’ancien député de Winnipeg-Centre, Robert-Falcon Ouellette, pendant le débat sur le projet de loi C-14. Selon lui, les libéraux auraient dû retarder la mise en œuvre du régime pancanadien d’aide médicale à mourir d’au moins dix ans, jusqu’à ce qu’on puisse déterminer adéquatement l’incidence de la mort assistée dans toutes les communautés de notre vaste pays diversifié. M. Ouellette s’opposait à ce qu’on jette de l’huile sur le feu de la crise des suicides, qui avait eu des conséquences si dévastatrices dans les réserves.
    Tyler White, le PDG de Siksika Health Services, a récemment dit que le projet de loi C-7 risquait de détruire le travail qu’avaient effectué les aînés autochtones pour réduire la fréquence des suicides chez les jeunes Autochtones. Quel message le projet de loi C-7 envoie-t-il à ces jeunes gens? Si les militants autochtones croient que le projet de loi C-14 était un pas dans la mauvaise direction, pourquoi le gouvernement pousse-t-il les choses encore plus loin avec le projet de loi C-7? Pourquoi veut-il accélérer son adoption?
    Je me souviens également de certains éléments du débat sur le projet de loi C-14 qui portaient sur les cas d'abus observés dans d'autres régions du monde à l'égard de l'aide médicale à mourir. C'est un aspect essentiel. Le régime de la Belgique, qui a servi de modèle au projet de loi C-14, est connu pour ses abus. En Belgique et aux Pays-Bas, les lois sur l'aide médicale à mourir, qui ne s'appliquaient d'abord qu'aux adultes mentalement aptes souffrant d'une maladie en phase terminale, incluent maintenant des adultes et des enfants avec une déficience mentale, des personnes lourdement handicapées et même des personnes souffrant d'un trouble psychiatrique traitable comme l'anorexie et la dépression. Aux Pays-Bas seulement, on a observé, entre 2012 et 2017, une hausse de 600 % des euthanasies liées à un problème psychiatrique.
    Quand le gouvernement comptait-il se pencher sérieusement sur le régime canadien d'aide médicale à mourir pour déterminer comment prévenir de tels abus dans l'avenir? Le ministre de la Justice affirme qu'on travaille là-dessus et que cela fait partie du plan. Pourquoi n'a-t-il pas commencé par cela? On met la charrue devant les bœufs. C'est le monde à l'envers.
    En faisant fi de l'examen quinquennal, le gouvernement a aussi mis de côté les préoccupations des médecins. Nous ne pouvons pas faire abstraction de l'importance monumentale que les professionnels de la santé accordent à leur serment d'Hippocrate. C'est le cas notamment de la Dre Ramona Coelho, qui milite pour la liberté de conscience dans son domaine. Elle a dit ceci à l'ancien député David Anderson à la fin de la dernière législature: « Les médecins savent que la liberté de conscience est importante parce qu'elle leur permet de se protéger et de protéger leurs patients [...] On pousse des gens comme moi à quitter la médecine familiale. Je connais des médecins du domaine des soins palliatifs en Ontario qui ont mis fin à leur pratique. Je connais des membres du personnel infirmier de certains établissements qui se sentent intimidés [...] qui ont décidé de changer de domaine ou de prendre une retraite anticipée [...] Ce genre de pression existe, et nous voulons qu'elle diminue. »
    Cela m'attriste que le gouvernement n'ait pas encore établi de protection pour la liberté de conscience des médecins, qui ne veulent pas agir contre leur conscience au chevet d'un patient. Ce projet de loi demande aux médecins d'aller encore plus loin que ce que leur demandait le projet de loi C-14. Comme l'a déclaré la Dre Coelho: c'est ma conscience qui me pousse à aller plus loin et je pense que les soins aux patients en pâtiront si les médecins ne peuvent pas vivre en toute intégrité et en suivant leur conscience.
    C'est en raison de ce risque d'abus à plusieurs égards que de nombreux députés de ce côté-ci de la Chambre ont quitté les débats sur le projet de loi C-14 avec le mauvais pressentiment que la mise en œuvre du régime d'aide médicale à mourir avait engagé le Canada sur une pente très glissante menant à la culture de la mort sur demande. Nous étudions le projet de loi C-7 aujourd'hui.
(1540)
    Cependant, il y avait de la lumière au bout du tunnel avec le projet de loi C-14. L'examen quinquennal prévu était important pour les députés et pour tous les Canadiens. C'est une honte que nous devions adopter ce projet de loi à la hâte avant même que cet examen ait commencé.
    D'ailleurs, je me rends compte que les libéraux sont frustrés que mes collègues et moi-même ayons été aussi assidus pour exprimer les inquiétudes des personnes handicapées, des professionnels de la santé et de ceux dont les convictions personnelles entrent en conflit avec le projet de loi. Il en va de notre responsabilité.
    Les libéraux souhaitent désespérément accélérer l'adoption de cette mesure législative sur une question de vie ou de mort. Ils veulent respecter l'échéance imposée par la Cour supérieure du Québec, ce qu'ils auraient très bien pu faire si la Chambre avait siégé en mai et en juin, et que le premier ministre n'avait pas prorogé le Parlement en août.
    D'une certaine façon, cela n'a pas d'importance. L'échéance du 18 décembre est arbitraire, comme l'était celle du projet de loi C-14. En tant que législateurs, notre mandat consiste à adopter le meilleur projet de loi possible pour tous les Canadiens. J'insiste sur l'expression « pour tous les Canadiens ».
    Le projet de loi n'a presque pas été étudié, car le Comité permanent de la justice et des droits de la personne n'a pu se réunir que quatre fois à son sujet. De nombreux témoins n'ont pas pu être entendus et de nombreux mémoires n'ont pas eu la chance d'être présentés. Bien entendu, les libéraux auraient pu, auraient dû et pourraient toujours interjeter appel de la décision de la Cour supérieure du Québec. Nous aurions pu parvenir, en toute bonne foi, à un juste équilibre relativement à ce que les Canadiens souhaitent en matière de décisions de fin de vie.
    Comme je l'ai dit dans un débat précédent, les quatre années qui se sont écoulées depuis l'adoption du projet de loi C-14 ont permis aux Canadiens de jongler davantage avec l'idée de l'aide à mourir. Près de 80 % des Canadiens croient qu'il devrait être plus facile de prendre des décisions de fin de vie pour eux-mêmes. C'est 7 % de plus qu'il y a quatre ans, au moment de l'adoption du projet de loi C-14.
    Par ailleurs, les Canadiens tiennent mordicus à des mesures de sauvegarde solides pour les plus vulnérables de notre société, ainsi qu'à des mesures visant à protéger la liberté de conscience des professionnels de la santé. Ils y tiennent absolument. Selon un sondage de la firme Angus Reid publié le mois dernier, la même majorité de Canadiens qui souhaite pouvoir avoir un mot à dire au sujet des décisions entourant leur fin de vie souhaite aussi que le Parlement soupèse les risques associés à l'aide médicale à mourir pour les personnes souffrant de troubles mentaux, comme la dépression.
    Soixante-neuf pour cent des Canadiens craignent que les personnes en dépression perçoivent l'aide médicale à mourir comme un moyen d'éviter d'affronter la cause profonde de leur état. Soixante-cinq pour cent des participants souhaitent que le Parlement et les instances judiciaires tiennent compte de l'incidence de l'aide médicale à mourir sur les personnes âgées ou handicapées. Ils craignent que la mort sur demande encourage ces Canadiens à s'en prévaloir pour ne plus être ce qu'ils considèrent comme étant un fardeau pour les autres. On encourage ce sentiment. Il faut faire plus de recherche.
    Soixante-deux pour cent des Canadiens souhaitent que le Parlement et les instances judiciaires examinent l'incidence potentielle de l'aide médicale à mourir sur le système de santé. Le danger est qu'une dépendance accrue à l'aide médicale à mourir mène les décideurs à commencer à négliger les soins à long terme et palliatifs. Je dis « commencer » par courtoisie puisque, selon moi, cette tendance décourageante s'observe déjà.
    Soixante-dix pour cent des Canadiens continuent de vivre sans avoir accès à des soins palliatifs. Pendant ce temps, le gouvernement n'a pas investi les 3 milliards de dollars qu'il avait promis pour contribuer à remédier à cette insuffisance. De toute évidence, il y a discordance.
    Les Canadiens défendent avec tout autant d'ardeur la protection de la liberté de conscience des médecins et de ceux dont la foi les empêche de participer à l'aide médicale à mourir. Cinquante-sept pour cent conviennent que les maisons de soins infirmiers et les centres de soins palliatifs devraient, en cas d'objection de conscience, pouvoir refuser l'aide médicale à mourir à ceux qui en font la demande. Selon l'Association médicale canadienne, 23 000 médecins sont en mesure d'offrir ce service, ce qui est plus que suffisant pour l'ensemble du Canada. Nous devons protéger le droit à la liberté de conscience.
    Les Canadiens veulent que le projet de loi C-7 prévoie des mesures de sauvegarde raisonnables. Ils veulent que le Parlement veille à leurs intérêts quand il légifère — pas ceux des tribunaux, les leurs. Ils veulent que la Chambre continue de tenir compte de l'opinion des professionnels de la santé et des personnes handicapées.
    Malheureusement, à voir la manière dont se déroule le débat jusqu'ici, le projet de loi C-7 nous prouve encore une fois que le gouvernement laisse les tribunaux légiférer pour les Canadiens. Cette mesure législative ne correspond pas aux valeurs des Canadiens, qui se soucient de tous leurs concitoyens, quels que soient leur âge, leurs croyances ou leurs limitations et qui font de la compassion une vertu cardinale.
    Que ce soit au chapitre de la santé publique ou de l'économie, l'adoption de mesures de sauvegarde a été la plus grande priorité de la Chambre depuis le début de la pandémie. On comprend donc pourquoi autant de députés et de Canadiens trouvent terriblement paradoxal et inquiétant que le projet de loi C-7 veuille supprimer celles qui balisaient la fin de vie des gens. Voilà pourquoi je suis dans l'impossibilité de l'appuyer.
(1545)
    Madame la Présidente, j'aimerais raconter une anecdote à la députée. Dernièrement, j'ai affiché sur ma page Facebook un dessin montrant une clinique arborant deux écriteaux: l'un, au-dessus d'un escalier, portant les mots « prévention du suicide », et l'autre, au-dessus d'une rampe pour fauteuils roulants, où on peut lire « suicide assisté ». Je l'ai dit et je le répète: ce projet de loi va créer deux classes de citoyens.
    Dernièrement, j'ai reçu un appel de Mme Keay, de Whitecourt, dans ma circonscription, qui estimait que cette image ne reflétait pas vraiment la situation actuelle au Canada. Je lui ai assuré qu'elle était au contraire tout à fait conforme à la réalité.
    Ma collègue pourrait-elle nous en dire plus sur les deux catégories de citoyens que créerait le projet de loi?
    Madame la Présidente, c'est assurément une question qui doit être abordée. Pour une raison que j'ignore, les députés d'en face ont l'impression d'avoir entendu ce qu'avaient à dire les personnes handicapées. Je me demande bien à qui ils ont parlé parce que toutes les organisations de personnes handicapées au pays ont affirmé que le projet de loi représentait un danger pour les personnes handicapées et qu'elles voulaient qu'il contienne des mesures de sauvegarde.
    Il se peut que de nombreux Canadiens ne prennent conscience que maintenant de cette réalité, mais comme mon collègue, j'ai reçu de nombreuses lettres qui montrent toutes que le projet de loi suscite de grandes inquiétudes. Au Canada, nous attachons une grande valeur à la vie de toute personne. Mes enfants ont eu le privilège de fréquenter une école où les élèves ayant des handicaps ou des invalidités étaient intégrés à la classe, ce qui n'est pas du tout l'expérience que j'ai eue. Nous sommes de plus en plus conscients que toutes les vies comptent, peu importe l'état de santé d'une personne, et que nous avons tous quelque chose à apporter à notre pays, à notre famille et à notre collectivité.
    Madame la Présidente, ma collègue de Yorkton-Melville a parlé de la pente très glissante sur laquelle nous nous trouvons. Lors du débat sur le projet de loi C-14 à la Chambre, beaucoup d'entre nous craignaient que ce soit effectivement une pente glissante, et nous avons fait l'objet des railleries générales en plus d'être accusés de mener une campagne de peur. Or, aujourd'hui, il est très évident que nous avions bel et bien raison.
    Ce sont les Canadiens vulnérables qui sont exposés à l'aide médicale à mourir. Je veux demander à la députée ce qu'elle pense des affirmations du gouvernement, qui donne l'assurance que les gens ayant des problèmes de santé mentale, les enfants et d'autres Canadiens vulnérables n'y seront pas exposés à l'avenir et que la loi qui sera adoptée les protégera pleinement.
    Est-ce qu'elle le croit sur parole?
    Madame la Présidente, ce que dit le gouvernement et ce qu'il fait me troublent beaucoup. Il publie des préambules dans des sites Web, mais il ne les inclut pas dans ses projets de loi.
    Sur ma page Facebook, j'ai écrit: « Si ça ne se trouve pas dans le projet de loi, ça n'existe pas. Si ça ne se trouve pas là, il y a lieu de s'inquiéter. » De ce côté-ci de la Chambre, en tant qu'opposition officielle, nous avons entendu ces inquiétudes formulées par des groupes partout au pays. Si les libéraux croient vraiment ce qu'ils disent, ils doivent s'assurer que ces mesures de protection figurent dans le projet de loi. Ils devraient faire un effort supplémentaire et dire qu'ils se soucient vraiment des personnes vulnérables et qu'ils en font leur priorité. En ce moment, ce n'est vraiment pas ce que les Canadiens entendent de la part du gouvernement.
    Madame la Présidente, un député a affirmé plus tôt, à la période des questions, que ce sont des membres de groupes religieux qui bloquent le projet de loi et qu'ils ont une idée derrière la tête. D'après ce que j'ai vu, lors des séances au comité et de l'audition des témoins, même si les groupes religieux ont participé au débat, ce sont d'abord et avant tout les personnes handicapées et les communautés autochtones qui ont sonné l'alarme à propos de ce projet de loi.
    J'espérais que la députée puisse nous expliquer à quel point il est odieux de discréditer les motivations des personnes vulnérables qui essaient simplement de défendre leur droit à la vie.
    Madame la Présidente, il est très déconcertant de voir qu'on en arrive à ce point. Je crois que cela témoigne du désespoir de certains.
    Cela dit, voici la réalité: nous avons tous nos croyances. Mes croyances sont peut-être très différentes de celles d'une autre personne, mais tout ce que nous faisons dans cette enceinte est motivé par ce que nous sommes, par les valeurs que nous avons adoptées à cause de nos relations, par les idées auxquelles nous sommes exposés et par les points de vue que nous apportons à la Chambre. C'est un honneur pour moi de siéger dans cette enceinte et de m'exprimer en fonction de mes convictions. Nous siégeons à la Chambre des communes. Chacun d'entre nous représente son coin du Canada, donc toutes les régions et tous les points de vue sont représentés. C'est un honneur pour moi de prendre la parole ici au nom des gens qui sont venus nous demander de l'aide dans ce dossier, les personnes handicapées…
(1550)
    Malheureusement, nous devons reprendre le débat.
    Le député d'Elmwood—Transcona a la parole.
    Madame la Présidente, je prends la parole aujourd'hui pour participer au débat à l'étape de la troisième lecture du projet de loi C-7. La juge Truchon a déclaré dans sa décision que le critère du décès raisonnablement prévisible pour avoir accès à l'aide médicale à mourir va à l'encontre de la Charte et qu'il est nul et non avenu. Nous devons maintenant relever un défi bien réel pour répondre aux questions légitimes et difficiles soulevées dans cette décision. Je précise que l'échéance fixée en décembre que nous tentons de respecter correspond au moment où la décision de la cour entrera en vigueur et où le critère ne s'appliquera plus, peu importe, si le projet de loi C-7 est adopté ou non. À ce moment-là, le décès raisonnablement prévisible ne sera plus une condition pour obtenir l'aide médicale à mourir.
    Cette décision soulève beaucoup de questions difficiles sur la dignité humaine. Il va sans dire qu'un élément dont il faut tenir compte dans le débat qui dure depuis longtemps sur l'aide médicale à mourir est le respect de la dignité des personnes qui endurent d'extrêmes souffrances et qui savent que leur état ne va pas s'améliorer. Le fait de pouvoir choisir soi-même le moment et les conditions de sa mort donne un sentiment d'autonomie.
    La dignité humaine comporte un autre aspect très important, que d'autres députés ont soulevé aujourd'hui. Je parle de la dignité des personnes qui choisissent de vivre et qui veulent choisir la vie. Elles ont besoin d'avoir la certitude que choisir la vie signifie qu'elles auront les ressources dont elles ont besoin et que leurs droits fondamentaux seront respectés de façon à ce qu'elles puissent choisir la vie et aller de l'avant.
    Je tiens à prendre le temps de souligner que, pour la communauté des personnes handicapées au Canada, ce débat survient dans un contexte très difficile. Il arrive après des décennies de négligence et de pénuries de ressources et de mesures de soutien. On reconnaît finalement les obstacles qu'elles doivent franchir pour vivre une vie bien remplie et réaliser leur potentiel, mais ce débat survient dans un contexte de pandémie où des discussions ont eu lieu sur la manière de distribuer de maigres ressources, et où les personnes handicapées craignent que les décideurs n'accorderont peut-être pas la même valeur à leur vie qu'à la vie des autres. Nul doute que cette pensée leur fait peur.
    Quand les personnes handicapées ont voulu être rassurées, se faire dire qu'elles pouvaient compter sur le gouvernement et que ce dernier comprenait leurs préoccupations, elles ont plutôt constaté qu'au cours des premiers mois de la pandémie, environ six ou sept mois, le gouvernement se traînait les pieds pour respecter son engagement de leur verser un paiement unique afin de les aider à payer les coûts supplémentaires et à pallier les difficultés en raison de la pandémie. Je peux comprendre pourquoi les personnes handicapées n'ont pas vraiment confiance que le gouvernement est là pour elles et qu'il comprend leurs inquiétudes.
    Considérant la décision Truchon combinée à la négligence qui perdure depuis si longtemps envers les personnes handicapées et au sentiment d'urgence émanant de la pandémie, je comprends totalement comment cette question est devenue si délicate. Je comprends l'émotion que peuvent ressentir certaines personnes, surtout dans la communauté des personnes handicapées. Elles ne veulent pas se retrouver avec le terrible dilemme d'avoir à choisir entre une vie dans la pauvreté et la souffrance, d'un côté, ou une mort prématurée, de l'autre.
    Plusieurs députés se sont exprimés à propos de cet enjeu, rappelant que nous devons nous assurer que personne ne soit contraint à une mort prématurée. Cependant, je pense que c'est impossible si nous ne sommes pas prêts à aborder un autre aspect important, qui est de reconnaître le nombre écrasant de personnes handicapées au Canada qui sont forcées de vivre dans la pauvreté. Certaines ont réussi à surmonter de nombreux obstacles pour obtenir un emploi rémunéré et subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille, et c'est une excellente chose. C'est d'ailleurs ce que je souhaite à toutes les personnes vivant avec un handicap pour qui c'est une possibilité.
    Néanmoins, nous devons également reconnaître que de nombreuses personnes handicapées ne pourront pas accéder à un emploi à temps plein comme tout le monde. Il existe des obstacles qui ne le permettent tout simplement pas. C'est pourquoi tant de personnes handicapées bénéficient de divers types de régimes d'aide sociale et d'autres programmes de soutien du revenu.
(1555)
    Ces programmes se sont avérés complètement inadaptés pour permettre aux personnes qui dépendent d'eux de vivre dans la dignité. Parlant de dignité, il faut également parler des droits de la personne et de l'importance de reconnaître que les personnes handicapées ont des droits et méritent de vivre dans la dignité. Il faut des ressources pour y parvenir.
     Je souhaite vraiment prendre le temps de mettre l'accent sur cet aspect, car la cour a pris une décision sur la question de savoir si une mort raisonnablement prévisible peut faire partie des critères d'admissibilité pour obtenir l'aide médicale à mourir. Le gouvernement a choisi de ne pas faire appel de cette décision. Ni le NPD ni moi-même ne pouvons changer la décision du gouvernement sur ce point. En revanche, nous pouvons, comme le gouvernement l'a fait, insister sur le sentiment d'urgence en faisant adopter cette loi par la Chambre pendant que celle-ci siège encore.
    Je comprends. C'est tout à fait légitime de faire valoir qu'il nous aurait fallu plus de temps à la Chambre pour débattre de ces questions. Les députés ont raison de dire que la prorogation a eu une incidence sur le temps dont nous disposons à la Chambre. Nous constatons que le gouvernement ressent le besoin urgent d'agir dans ce dossier, mais nous aimerions qu'il fasse preuve du même genre d'empressement pour mettre en place des mesures de soutien pour les personnes handicapées. On éviterait ainsi que la très grande majorité d'entre elles soient contraintes de vivre dans la pauvreté parce qu'elles dépendent d'un quelconque programme de soutien.
    En tant que porte-parole du NPD en matière d'inclusion des personnes handicapées, la semaine dernière, j'ai été fier de rédiger, en collaboration avec le député d'Esquimalt—Saanich—Sooke, une lettre à l'intention du gouvernement pour lui demander de mettre en œuvre un programme national de soutien du revenu pour les personnes handicapées. Ce programme ciblerait toutes les personnes qui obtiennent déjà un soutien du revenu sous les auspices d'un programme de prestations d'invalidité, qu'il s'agisse d'un soutien territorial, provincial ou fédéral. Nous aimerions que 2 200 $ par mois soient versés aux prestataires, puisque nous avons reconnu, surtout en cette période de pandémie, qu'un montant de 2 000 $ par mois permet de maintenir un niveau de vie acceptable. Ce n'est pas facile pour personne, j'en conviens, mais il s'agit d'un niveau de revenu raisonnable. Cette question n'a jamais dégagé un aussi large consensus.
    Nous devons aussi reconnaître, comme nous l'avons fait quand la Prestation canadienne d'urgence pour les étudiants a été instaurée, que les personnes handicapées doivent absorber des coûts supplémentaires. Les étudiants handicapés ont eu droit à une indemnité. Ils ont reçu un peu plus d'argent en raison de ces coûts supplémentaires. À mon avis, 2 200 $ par mois permettraient d'atteindre cet objectif et de garantir que, peu importe où une personne habite au Canada, elle a une forme de revenu de base lui permettant de se loger et de se procurer les produits de première nécessité. Accorder de la valeur à la vie ne peut pas simplement dire « ne pas entraîner la mort ». Cela doit signifier fournir les ressources nécessaires pour que les gens puissent vivre une vie qu'ils chérissent vraiment et qui leur permet de réaliser leur plein potentiel.
    Ce n'est pas seulement une question de revenu. Il est aussi question d'intervenir délibérément et efficacement pour adopter une stratégie d'emploi en vue de modifier l'attitude de nombreux employeurs, qui n'ont pas d'expérience avec les personnes handicapées. Nous pouvons les informer sur ce qu'ils peuvent faire pour rendre leur milieu de travail plus accueillant pour les personnes handicapées. Ces mesures permettront d'éliminer certains obstacles et de modifier les attitudes dans la société en général.
    Il est aussi question de mesures de soutien, comme des investissements dans de bons logements sociaux, dont les loyers sont établis en fonction du revenu afin que les personnes qui n'ont pas un revenu élevé puissent tout de même se permettre un bon logement. Il est question d'investir dans de bonnes options de transport pour que les personnes handicapées qui ne peuvent pas posséder ou conduire un véhicule disposent tout de même de bonnes options pour se déplacer dans la ville. Ces mesures contribuent non seulement à l'emploi, mais aussi à la socialisation, quand une telle chose est possible.
    Si nous voulons parler de la valeur de la vie, il s'agit non seulement de mesures dont nous devons parler, mais que nous devons aussi prendre. Nous devons les prendre avec la même urgence que le gouvernement a invoquée pour faire adopter la mesure législative. J'ai vraiment hâte de prendre ces mesures de toute urgence, et le NPD continuera à les réclamer.
(1600)
    Madame la Présidente, j'ai eu l'honneur d'entendre le père du député, un député estimé qui a siégé pendant très longtemps, donner une conférence à mon université sur le lien entre la foi, l'évangile social et la fondation du NPD.
    Dans le cadre de présent débat, un député a dit, pendant la période des questions, que les croyants qui pourraient s'opposer au projet de loi sont de soi-disant fanatiques religieux. J'aimerais que le député nous en parle et qu'il confirme que le point de vue des croyants concernant les projets de loi comme celui de l'aide médicale à mourir est légitime.
    Madame la Présidente, je ne pense pas que les commentaires faits plus tôt au cours de la période des questions sont utiles pour le débat. Il s'agit d'une question difficile, à juste titre, et des plus importantes. C'est une question existentielle fondamentale.
     Les convictions religieuses des gens influencent leur façon d'aborder ce débat. Cela ne signifie pas que tout le monde sera d'accord. Par exemple, nous savons que ce n'est pas tous les membres de la communauté chrétienne qui sont d'accord sur ce point. Il y a des croyants qui sont en faveur de l'aide médicale à mourir, tout comme il y en a qui y sont opposés. De plus, il existe d'innombrables positions intermédiaires.
    Ce qui est important, c'est de rester concentré sur la question à l'étude et de ne pas se lancer dans des arguments ad hominem. Je sais que la tentation existe souvent en politique, mais il est important de l'éviter, surtout pour des questions comme celle-ci.
    Madame la Présidente, il existe une préoccupation très légitime, dont il serait vraiment bien de parler quelque peu: les soins palliatifs. Selon l’endroit où une personne vit au Canada, en milieu urbain ou rural, la possibilité de recevoir des soins palliatifs varie grandement.
    Le député d’Elmwood—Transcona connaît très bien les compétences provinciales et les compétences fédérales, je serais alors très intéressé de l’entendre nous dire ce qu’il pense du rôle que le gouvernement fédéral devrait jouer relativement aux soins palliatifs. J’aimerais beaucoup connaître son opinion au-delà de la question de l’argent.
    Madame la Présidente, je remercie le député de Winnipeg-Nord de soulever la question des soins palliatifs. Je prends un instant pour souligner l’excellent travail qu’a fait le député de Timmins—Baie James au fil des ans à ce sujet. Il a aidé la Chambre à adopter une motion réclamant une stratégie nationale de soins palliatifs. Voilà une question à laquelle le gouvernement devrait accorder la même priorité que celle qu’il accorde au projet de loi C-7. Or, cette motion a été adoptée il y a longtemps, et rien n’a encore été fait à ce sujet.
     Il faut prendre des mesures dans ces domaines. Les personnes aux prises avec des déficiences et d’autres populations vulnérables se rendent bien compte que rien n’est fait, et cela crée de l’anxiété chez elles. Le gouvernement et les politiciens parlent de ces problèmes, mais il faut maintenant montrer qu’on peut passer à l’action.
     Il faut agir pour les soins palliatifs. Il faut agir pour des choses comme l’assurance-médicaments et les soins dentaires. Nous devons veiller à ce que tous les Canadiens, peu importe leur travail ou leur revenu, aient accès à ces mesures pour améliorer leur vie. Nous devons mettre en place des mesures d’aide pour les gens aux prises avec des déficiences qui permettront à ceux qui choisissent de vivre de le faire avec dignité et de s’épanouir. Je crois que c’est ce que la plupart des gens veulent.
    Madame la Présidente, je veux remercier le député d’Elmwood—Transcona pour avoir travaillé avec moi à la proposition que nous avons présentée au gouvernement concernant un programme national de soutien du revenu pour les personnes handicapées qui remplacerait l’ensemble disparate de programmes gérés par les provinces partout au pays.
    Je me demande si le député pourrait nous parler des réactions que pourraient avoir les premiers ministres des provinces à un programme national fédéral de soutien du revenu pour les personnes aux prises avec des déficiences.
(1605)
    Madame la Présidente, je crois que la plupart des députés savent que les gouvernements provinciaux éprouvent de nombreuses difficultés à cause de la pandémie. Dans bien des cas, ils ont demandé des transferts de fonds supplémentaires sans condition.
     Le gouvernement fédéral est celui qui a le plus de moyens financiers, et la modification du régime d'aide médicale à mourir met encore plus en relief la nécessité urgente de soutenir les personnes handicapées. Cela signifie qu'il faut dégager les budgets des provinces qui ont des programmes de soutien du revenu pour les personnes handicapées afin qu'elles puissent consacrer les sommes en cause à d'autres priorités.
    Rapidement, je voudrais ajouter que cela ne devrait pas servir à remplacer les mesures d'aide non liées au revenu qui sont offertes en matière de logement et de transport. Ce serait une solution rapide pour redonner de l'argent aux provinces et augmenter le niveau d'aide accordée aux personnes handicapées, peu importe où elles vivent au pays. Ce serait l'un des avantages de cette proposition.
    Madame la Présidente, le député ne s'inquiète-t-il pas de la possibilité que le projet de loi à l'étude crée deux catégories de citoyens? Pour la première catégorie, constituée des Canadiens non handicapés, dès la première demande, des mesures de prévention du suicide seraient offertes. Pour la deuxième catégorie, constituée des Canadiens handicapés, s'il s'agit pour l'un d'entre eux d'une des pires journées et qu'il fait une tentative de suicide, on lui offrira l'aide médicale à mourir.
    Le député ne s'inquiète-t-il pas de la possibilité que le projet de loi à l'étude crée deux cheminements différents et deux catégories de citoyens?
    Madame la Présidente, avec sa question, le député m'offre l'occasion de mettre en lumière une disposition du projet de loi dont il n'a pas été beaucoup question au cours du débat.
    Les conservateurs ont dit craindre que la période de 90 jours ne soit pas suffisante pour les personnes dont la mort n'est pas raisonnablement prévisible. Toutefois, cette période d'attente ne s'applique qu'aux personnes handicapées dont la mort n'est pas raisonnablement prévisible. Ainsi, le projet de loi C-7 ajoute une contrainte qui n'existera pas si nous n'adoptons pas le projet de loi avant l'échéance. Il pourrait y avoir une personne dont la mort n'est pas raisonnablement prévisible, mais qui répond à tous les autres critères et qui, par conséquent, pourrait avoir accès à l'aide médicale à mourir beaucoup plus rapidement que si nous adoptons le projet de loi C-7 avant l'échéance.
    Madame la Présidente, les observations du député sont toujours réfléchies et justes. Je l'en remercie.
    La dignité de la vie repose en grande partie sur la capacité de la personne à subvenir à ses propres besoins et à obtenir un revenu. À cette fin, concernant la proposition d'un nouveau programme gouvernemental visant à soutenir les personnes handicapées, quel genre de réponse le député a-t-il reçue de la part du gouvernement?
    Madame la Présidente, nous n’avons toujours pas reçu de réponse. Nous avons envoyé la lettre vers le milieu de la semaine dernière.
    Ce que nous savons du gouvernement, c’est qu’il s’était engagé vaguement lors du discours du Trône à mettre en place un nouveau programme audacieux de soutien au revenu des personnes handicapées. Nous essayons de répondre aux questions laissées en suspens. Souvent, sur d’autres questions, nous voyons le gouvernement en place faire des promesses sans donner beaucoup de détails. Il est dans l’ADN des néo-démocrates de s’intéresser aux détails et à la manière de procéder.
    Voilà pourquoi nous avons proposé un nombre, une façon de procéder et les avantages de cette façon de procéder: pour nous assurer que ni la région du pays où vivent les gens ni le niveau de soutien au revenu des personnes handicapées n’auront une incidence. C’est une façon de remettre de l’argent entre les mains des provinces à un moment où elles en ont désespérément besoin et de s’assurer maintenant que si elles ont besoin d’un soutien au revenu en tant que personnes handicapées, elles ne sont pas obligées de passer sous le seuil de pauvreté. Si nous regardons les taux qui sont payés dans les provinces et par le gouvernement fédéral, ce n’est pas suffisant pour y arriver. Ce n’est tout simplement pas suffisant et il faut que ça change.
    Quand il est question de la valeur de la vie, de permettre aux gens de choisir la vie et de ne pas les placer devant un dilemme entre une mort prématurée ou la pauvreté et la souffrance, il faut que ce revenu ne les maintienne pas sous le seuil de pauvreté. Un changement est nécessaire. Voilà le véritable enjeu de cette proposition.
    Nous espérons que le gouvernement retiendra cette proposition comme un bon moyen de réaliser sa promesse. Si les libéraux ont une autre idée, ils feraient mieux de se dépêcher et de la partager, car il faut s’y attaquer avec le même sentiment d’urgence que celui qui a présidé à l’adoption de ce projet de loi par la Chambre.
(1610)
    Madame la Présidente, je n'ai aucun plaisir à prendre à nouveau la parole pour m’opposer au projet de loi C-7, une mesure législative profondément imparfaite et dangereuse. Les libéraux se sont plaints dans les médias du fait que les conservateurs retardent à leur avis l’adoption du projet de loi et qu’ils vont leur faire manquer la date limite du 18 décembre imposée par le tribunal, mais ils n’ont personne d’autre à blâmer qu’eux-mêmes. Les conservateurs s’acquittent du mandat que leur confère la Constitution: obliger le gouvernement libéral à rendre des comptes sur son projet de loi.
    L’examen du bilan des huit derniers mois le prouve, il est clair que mon parti a fait l’impossible pour donner aux libéraux la marge de manœuvre nécessaire pour mettre en œuvre l’aide économique d’urgence et d’autres mesures liées à la COVID. Nous avons été très coopératifs. Nous avons aussi vu un grand nombre de lois gouvernementales être adoptées assez rapidement à la Chambre cet automne, et ce, même dans un gouvernement minoritaire.
    Regardons ce que les libéraux ont fait pour faire avancer le projet de loi. Le gouvernement s'est mis dans cette déplaisante situation dès le début, quand il a refusé de défendre son propre projet de loi, le projet de loi C-14, qui avait été adopté lors de la dernière législature. Même si certains députés libéraux ont affirmé sur Twitter que le projet de loi était inconstitutionnel — c'était leur sentiment même s'ils ont voté pour —, ils n'ont pas saisi l'occasion d'interjeter appel devant la Cour suprême du Canada. À mon avis, cela prouve que le gouvernement avait l'intention d'utiliser les tribunaux pour contourner le Parlement.
    Dans le cadre du projet de loi C-14, le Parlement avait pour mandat de procéder à un examen approfondi de l'aide médicale à mourir l'an prochain. Il est important de prévoir ce genre d'examens dans les lois quand on parle de quelque chose d'aussi important que l'aide médicale à mourir, une mesure législative nouvelle et une nouvelle notion dans notre société. Les Canadiens n'ont pas vraiment eu le temps de réfléchir à ce qu'ils ressentent au sujet de cette loi et d'examiner leurs propres expériences.
    Un examen quinquennal était une disposition adéquate pour donner aux Canadiens un peu de temps pour évaluer le projet de loi et ensuite demander au Parlement de formuler des recommandations et peut-être de modifier la loi afin d'en corriger les faiblesses, qu’il s’agisse de renforcer quelques éléments favorisant les abus ou d'assouplir certaines dispositions au besoin. Cependant, le gouvernement libéral, désireux de court-circuiter le processus législatif et la volonté de la législature précédente, a choisi d’accélérer la loi en décidant de ne pas faire appel devant la Cour suprême. Je pense que tout a été prévu de façon délibérée pour s’assurer que la loi serait adoptée avant qu’un examen n’ait lieu.
    Si l’examen avait eu lieu, comme nous l’avons vu avec le Conseil des académies canadiennes, il y aurait eu beaucoup de questions sur la mise en pratique de la loi et sur la manière dont elle a été appliquée au cours des dernières années. Des abus ont été soulevés en comité et à la Chambre à plusieurs reprises, mais le gouvernement n’a fait aucun effort pour tirer parti de ces expériences et faire de cette loi un texte plus sûr pour les personnes vulnérables.
    Passons à l’exemple suivant qui montre pourquoi le problème du gouvernement est un problème qu’il a lui-même créé. Le gouvernement a dû demander plusieurs prolongations du délai accordé pour l'adoption du projet de loi en raison de la pandémie de COVID-19. Je conviens que ce n'était pas de sa faute. Les tribunaux étaient prêts à approuver ces prolongations et, à la fin de l’été, les libéraux ont choisi de proroger le Parlement. Ce faisant, ils signaient l'arrêt de mort de toutes les mesures législatives à l'étude. Ils recommençaient depuis le début et nous renvoyaient à la case départ. Ils ont ainsi encore retardé cette loi. Le fait que le gouvernement libéral prétende que les conservateurs retardent l’adoption du projet de loi alors que tout ce que nous faisons, c'est remplir notre mandat constitutionnel, en particulier sur un sujet aussi important, une question de vie ou de mort, cela sonne faux.
    Un autre exemple est que, si le projet de loi était à ce point important qu'il fallait que le gouvernement l’adopte très rapidement, pourquoi n’a-t-il pas été le premier projet de loi présenté dans le domaine de la justice? Le projet de loi C-3 a été adopté de manière très rapide avec l’appui de tous les partis à la Chambre. Il a été adopté, en grande partie, avec l’appui du comité après l'adoption d'amendements minimes. Malgré cette adoption accélérée, le projet de loi dont nous sommes saisis a ainsi été retardé de plusieurs semaines. Les libéraux parlent et se plaignent de la façon dont les conservateurs retardent prétendument la loi, mais ce sont leurs propres choix qui ont entraîné ce retard.
(1615)
    Voilà maintenant que le gouvernement se plaint que les conservateurs font leur travail. Nous faisons notre travail, qui consiste à faire la critique du projet de loi des libéraux. Nous leur demandons de rendre des comptes. Nous défendons les droits des personnes vulnérables. Nous ne nous excuserons jamais de faire ce pour quoi nos électeurs nous ont élus, c'est-à-dire défendre leurs convictions profondes, en tenant compte de leurs préoccupations, et défendre les personnes vulnérables.
    Les Canadiens vulnérables ont communiqué haut et fort leurs souhaits et leurs inquiétudes au comité. Je suis heureux que l'autre endroit ait disposé de plus de temps pour écouter les témoins. Je crois que les sénateurs ont entendu plus de 80 témoins, dont la grande majorité était contre le projet de loi. Bien franchement, à la Chambre, nous avons seulement pu consacrer quatre réunions du comité à ce projet de loi très important. Je suis donc ravi que le Sénat prenne sa responsabilité au sérieux en examinant minutieusement le projet de loi et en écoutant les personnes vulnérables et d'autres qui sont préoccupées par le projet de loi.
    Les membres de ces collectivités avaient peur du projet de loi C-14. Le gouvernement leur avait assuré qu'ils seraient protégés et que les personnes souffrant de maladies mentales ne seraient pas admissibles. Il y avait des mesures de protection pour les enfants. Il y avait aussi le critère de mort raisonnablement prévisible, qui a été salué comme une excellente mesure de protection pour les personnes handicapées. Je peux dire aux députés que tous ces gens sont terrifiés par le contenu du projet de loi du gouvernement libéral.
    Aujourd'hui, j'ai lu sur le site de la CBC que le ministre de la Justice semble se livrer à un bras de fer avec les groupes des personnes handicapées qui demandent d'abandonner le projet de loi. Il est carrément inacceptable que le ministre de la Justice, dont le rôle est de faire respecter la Charte des droits et libertés qui protège tous nos concitoyens, lutte contre les personnes handicapées et d'autres Canadiens vulnérables et fasse la sourde oreille à leurs appels.
    Les conservateurs, eux, sont à l'écoute. Nous luttons pour ces Canadiens vulnérables. Il semble que personne d'autre ne soit prêt à se battre pour eux. C'est ce que nous allons faire. Nous nous battons pour ces Canadiens vulnérables. Nous ne faisons pas preuve d'intransigeance par rapport au projet de loi. Les conservateurs ont divers points de vue sur la question. Nous avons présenté, en tant que parti, des amendements pleins de bon sens qui ne minent pas la légalité de l'aide médicale à mourir en tant que pratique générale, mais qui contribueront grandement à rassurer les Canadiens vulnérables.
    Parmi ces modifications sensées proposées par le Comité, il y a la protection des patients contre toute contrainte excessive. Quand on parle de contrainte, les gens imaginent immédiatement un médecin dans une situation immorale qui prône l’aide médicale à mourir auprès de personnes vulnérables isolées de leurs êtres chers et des membres de leur famille. Je ne cherche pas à affirmer que c’est ce qui se produit. Franchement, selon les expériences vécues, la situation est beaucoup plus anodine que cela. Ce ne sont pas les médecins qui prônent, de manière énergique, l’aide médicale à mourir auprès des gens.
    Une personne peut se trouver dans une situation où il y a déséquilibre du pouvoir. À titre de personne ayant une incapacité, de personne vulnérable ou de personne plus âgée, elle n’a peut-être pas de membres de la famille ou accès à des soutiens, comme des travailleurs sociaux et des psychologues. Dans ce cas, elle fait confiance à son médecin. C’est bien, car les médecins travaillent avec acharnement et sont très professionnels. Cependant, si une personne entretient une telle relation de confiance avec son médecin et si le médecin lui demande si elle a déjà envisagé l’aide médicale à mourir, cette situation peut sembler anodine à une personne ordinaire. Si je me trouvais dans une telle situation et que le médecin me posait la question, je lui répondrais « non merci ». Cependant, nous ne savons pas ce que les autres vivent et nous ne connaissons pas les défis qu’ils doivent relever.
    Si la personne n’a personne vers qui se tourner, elle peut penser que le médecin a à cœur ses intérêts. Si le médecin lui suggère d’envisager l’aide médicale à mourir, le médecin a peut-être raison, et la personne devrait peut-être l’envisager. Dans ce cas-ci, on reconnaît qu’il y a déséquilibre du pouvoir. Au sein du Comité, on a suggéré de présenter des protections très rigoureuses indiquant que les professionnels de la santé ne doivent, en aucun cas, présenter l’aide médicale à mourir comme option aux patients. Il s’agit d’une protection élémentaire.
(1620)
    Il s’agit d’un point dont nous avons parlé dans le cadre du projet de loi précédent. J’ai été, en fait, très perturbé, lors du débat à la seconde lecture, lorsqu’un député du Parti libéral s’est levé pour parler d’un couple qu’il connaissait qui n’avait jamais envisagé l’aide médicale à mourir. C’était une histoire très touchante. Le député a dit, de manière nonchalante, que le médecin a remis au couple un dépliant et lui a demandé s’il avait déjà envisagé l’aide médicale à mourir. Le député, je pense, a cru qu’il s’agissait d’une situation anodine et inoffensive. Selon moi et selon les membres des communautés de personnes ayant une incapacité et vulnérables, il était très terrifiant de savoir qu’on pourrait se retrouver dans une telle situation sans avoir les soutiens adéquats. On pourrait penser qu’on nous force à prendre une décision.
    Nous voulions également ajouter des protections plus rigoureuses en ce qui concerne le délai de réflexion. Je crois que le délai de réflexion est essentiel, puisque, même dans les rapports du gouvernement sur l’aide médicale à mourir, il y avait de nombreux cas où les gens n’avaient pas reçu de mesures de soutien pour les personnes ayant une incapacité, mais avaient obtenu l’aide médicale à mourir. Il s’agissait de gens qui attendaient d’obtenir des soins palliatifs, qui n’y ont pas eu accès, mais qui ont reçu l’aide médicale à mourir.
    Cette situation illustre, de toute évidence, que le gouvernement n’offre pas les ressources pour aider les Canadiens ayant une incapacité, ou les Canadiens qui ont besoin de soins palliatifs. Si nous réduisons le délai de réflexion ou l’éliminons dans sa totalité, nous perdons vraiment l’occasion de permettre aux gens d’accéder à ces services exceptionnels qui peuvent rendre la fin de la vie beaucoup plus paisible.
    Ce qui est triste dans le débat d'aujourd'hui, c'est que je me sens forcé à défendre le statu quo, adopté au cours de la dernière législature dans le cadre du projet de loi C-14. Je n’étais pas un fervent partisan du projet de loi C-14. On a pu voir à maintes reprises que cette loi ne protège pas les personnes vulnérables. Elle n’a certainement pas protégé les détenus qui ont obtenu l’aide médicale à mourir.
    Cette question a été soulevée par le Bureau de l’enquêteur correctionnel. Elle est associée à de profonds problèmes d’ordre moral et éthique. Les détenus n’ont vraiment aucun pouvoir. Le Bureau a mentionné un cas où un détenu arrivait à la fin de sa vie et voulait mourir paisiblement dans la communauté, en ayant accès à des soins palliatifs. Il s’est vu refuser sa demande. Il a donc plutôt opté pour l’aide médicale à mourir. Je crois que l’enquêteur correctionnel a été très astucieux lorsqu’il a mentionné ce cas. Dans une situation où une personne n’a pas le droit de déterminer la manière dont elle mourra ou la manière qui lui permettra de mourir, comment peut-on lui donner l’occasion de choisir l’aide médicale à mourir? Cela soulève d’importantes questions.
    Dans de nombreux cas, les gens n’étaient pas vraiment malades. Dans un cas rapporté dans le Globe and Mail il y a quelques années, un couple âgé de plus de quatre-vingt-dix ans souhaitait mourir ensemble. Selon l’article, les deux personnes n’avaient aucun problème de santé existant, sauf l’arthrite. Cependant, on a jugé qu’en raison de leur âge avancé, leur décès était raisonnablement prévisible. C’est une situation vraiment troublante. Des professionnels de la santé ont mentionné qu’aucune revue médicale ne définit vraiment un décès raisonnablement prévisible. Il n’existe pas de définition de l'expression « raisonnablement prévisible ». C’est un concept subjectif. J’aimerais d’ailleurs que, dans le cadre de cette loi, le gouvernement propose une véritable définition médicale de l'expression « raisonnablement prévisible ». Le gouvernement a plutôt choisi de l'éliminer, ce qui réduit les protections.
    Le projet de loi C-14 n’a pas empêché les personnes ayant une maladie mentale d’obtenir l’aide médicale à mourir. À Chilliwack, une personne ayant des antécédents de dépression a été en mesure d’obtenir rapidement l’aide médicale à mourir. Sa famille n’a été informée qu’à des étapes très avancées du processus, et n’a pas pu intervenir ni expliquer pourquoi cette personne, qui avait un problème de santé menant à un décès raisonnablement prévisible, souffrait également de dépression, en plus de devoir surmonter d’autres difficultés. Dans ce cas-ci, un travailleur social ou un psychologue aurait peut-être pu l’aider à résoudre ses problèmes et éviter ainsi qu'elle demande l’aide médicale à mourir.
    Selon moi, il est évident que nous éliminons les protections les plus élémentaires. Nous éliminons ce délai de réflexion adéquat et faisons en sorte que cette loi, dont de nombreuses personnes abusent déjà, fera encore plus l’objet d’une utilisation abusive.
(1625)
    Selon le gouvernement, le projet de loi à l'étude ne pose pas de danger puisqu'il refuse explicitement aux personnes atteintes seulement d'une maladie mentale d'avoir accès à l'aide médicale à mourir. À l'époque où le premier projet de loi était débattu, je ne siégeais pas à la Chambre, mais j'ai assisté à de nombreuses réunions. Fait intéressant, quand il a témoigné devant un comité ou le comité mixte spécial, le Dr Sonu Gaind, de l'Association des psychiatres du Canada, hésitait fortement à envisager que les personnes atteintes d'une maladie mentale puissent avoir accès à l'aide médicale à mourir, surtout si elles n'avaient qu'une maladie mentale. Selon ces témoignages, aucune maladie mentale n'est considérée comme impossible à traiter. Il y a toujours un traitement. Il s'agit parfois d'un traitement très ardu ou permanent, mais la société ne doit jamais accepter l'idée que la maladie mentale est impossible à traiter. L'autre option serait de cesser d'aider les gens et que ceux-ci demandent l'aide médicale à mourir.
    Le gouvernement parle d'exclure de l'aide médicale à mourir les personnes souffrant exclusivement d'une maladie mentale. C'est une question épineuse, mais il arrive trop souvent que des personnes qui seraient normalement admissibles à l'aide médicale à mourir en raison d'une maladie physique et parce que leur mort est raisonnablement prévisible aient aussi une maladie mentale.
    En ce qui concerne les médecins, ils sont très bien formés, mais ils ne sont pas nécessairement au fait de tous les aspects de la santé. Les médecins n'ont pas tous des compétences en psychologie ou ne sont pas tous aptes à tirer des conclusions sur une maladie mentale. Si une personne dont la mort est raisonnablement prévisible a souffert d'une maladie mentale, comment peut-on avoir l'assurance qu'elle n'a pas demandé l'aide médicale à mourir parce qu'elle est déprimée à cause de sa maladie mentale?
    Ce projet de loi ne prévoit aucune mesure de protection pour ces personnes lorsqu'elles demandent l'aide médicale à mourir. Le gouvernement a beau dire qu'elles sont admissibles parce qu'elles ont un problème de santé grave et irrémédiable, mais nous devons prévoir plus de mesures de protection pour nous assurer que des personnes souffrant d'une maladie mentale ne demandent pas l'aide médicale à mourir sous le coup de l'émotion. Une personne pourrait avoir souffert d'un incident qui la pousse à demander l'aide médicale à mourir, mais en lui donnant du temps pour réfléchir, on pourrait l'en dissuader.
    Comme je l'ai dit, il n'y a pas de mécanismes. Je ne vais pas me contenter de critiquer. Je vais aussi proposer des solutions concrètes qui, selon moi, amélioreraient ce projet de loi. Malheureusement, le gouvernement ne semble pas disposé à accepter bon nombre des amendements proposés par les conservateurs, mais je vais quand même en parler. Nous devrions exiger que des travailleurs sociaux ou des psychologues participent aux décisions lorsque l'on constate des problèmes de santé mentale sous-jacents ou des problèmes liés à la pauvreté ou à l'accès à des mesures de soutien du revenu.
    J'ai été fort troublé de lire dans le magazine Maclean's que certaines personnes demandent l'aide médicale à mourir parce qu'elles vivent dans la pauvreté. Ce genre de situation n'a jamais été couverte par la loi. Cela n'a jamais fait partie des situations visées par l'aide médicale à mourir. En incluant ces importants professionnels de la santé dans le processus, nous pourrions faire en sorte qu'il soit beaucoup plus difficile d'offrir l'aide médicale à mourir à une personne qui ne la demanderait peut-être pas si cette décision ne restait pas seulement entre les mains du patient et du médecin.
    Cela m'amène à l'un de mes derniers arguments. Le gouvernement élimine une partie des exigences concernant les témoins. Avec l'ancien projet de loi, il fallait faire appel à un témoin indépendant, qui n'avait rien à voir avec le processus médical. Cela permettait de garantir une certaine responsabilisation, de sorte que les médecins et les professionnels de la santé devaient faire preuve de diligence raisonnable et veiller à ce que tout soit conforme. En éliminant cette exigence, la décision revient uniquement au médecin et au patient.
    Je m'opposerai à ce projet de loi. J'espère que l'autre endroit nous enverra des amendements dignes de ce nom. J'ai hâte de débattre de ces amendements pour en arriver au meilleur projet de loi possible, qui protégera les personnes vulnérables à l'échelle du pays.
(1630)
    Madame la Présidente, je sais que le député est un homme compatissant et empathique. Il s'est exprimé longuement pour faire valoir plusieurs arguments convaincants avec lesquels je suis en grande partie d'accord. Nos points de vue ont un dénominateur commun.
    Nous avons entendu des députés conservateurs parler de la dignité et de la vie, mais, plus tôt dans ce débat, quand des mesures de soutien financier ont été proposées, un membre du caucus conservateur a répondu avec beaucoup de désinvolture qu'il fallait en échange soutenir le secteur de la production pétrolière et gazière.
    Je vais donner l'occasion au député de préciser, au nom de l'empathie et de la compassion, tous les propos sur le soutien des personnes et la dignité de la vie. Le député est-il prêt à appuyer les mesures d'aide financière que nous proposons pour sortir de la pauvreté et du désespoir les personnes handicapées, dont les conservateurs prennent la défense relativement au projet de loi C-7?
    Madame la Présidente, je ne ferai pas de commentaire sur les échanges auxquels le député fait allusion puisque je n'en connais pas le contexte. Je dirai cependant que j'appuie sans réserve la mise en place de mesures d'aide économique renforcées pour les personnes ayant un handicap et celles qui vivent dans la pauvreté. Ce qui compte vraiment, c'est la manière dont on y arrive. Nous vivons dans une confédération. Certaines provinces ont leurs propres mesures de soutien au revenu. Je sais que les députés néo-démocrates faisaient référence à une mesure nationale. Il s'agit de trouver la meilleure solution réalisable sur le plan politique pour faire en sorte que les gens aient accès aux mesures de soutien au revenu dont ils ont besoin.
    On a mentionné certaines statistiques selon lesquelles bon nombre de ceux qui se prévalent de l'aide médicale à mourir font partie de la classe supérieure, mais que les pauvres qui y ont accès le font parce qu'ils s'inquiètent de ne pouvoir effectuer leurs paiements ou de vivre leur vie comme ils l'entendent. Alors que nous étudions le projet de loi, nous devons nous pencher sur ces facteurs socioéconomiques intersectoriels qui, à mon avis, n'ont pas reçu l'attention qu'ils méritent.
    Madame la Présidente, durant les six heures que j'ai passées dans cette enceinte, je n'ai pas entendu le nom de Robert Latimer.
    Robert Latimer était un agriculteur de Biggar. Il a tué sa fille, Tracy, lorsqu'elle avait 12 ans. Il a été reconnu coupable du meurtre de sa fille de 12 ans. Celle-ci était lourdement handicapée. À cette époque, je travaillais dans la salle de nouvelles du réseau CTV Saskatoon, et nous avons fait plusieurs reportages sur la famille Latimer, presque chaque semaine. De toutes les annales judiciaires canadiennes, l'affaire de Robert Latimer, qui a tué sa fille de 12 ans, Tracy, est l'une des celles qui a semé le plus de divisions.
    Tracy ne pouvait ni marcher, ni parler, ni s'alimenter seule. Nous voici, plus de 25 ans après, dans cette enceinte, à examiner une situation semblable. J'aimerais seulement savoir quelque chose. Mon collègue de l'Alberta a entendu parler de cette affaire. Tout le monde, je crois, a entendu parler de ce cas qui remonte à plus de 25 ans. Robert Latimer a purgé sa peine, d'une dizaine d'années, à Victoria.
    Je souhaite connaître les réflexions du député de l'Alberta alors que nous débattons du projet de loi C-7 aujourd'hui.
    Madame la Présidente, c'était une affaire choquante, qui a fait surgir des questions très délicates. Selon moi, c'est une des grandes raisons pour lesquelles tous les partis se sont montrés si favorables, au cours du débat sur ce projet de loi, à l'idée de refuser l'accès à l'aide médicale à mourir aux mineurs. Il est absolument essentiel que nous veillions à ce que, dans notre pays, il demeure impossible pour les mineurs d'obtenir l'aide médicale à mourir.
    Cela soulève également la question de la valeur que nous donnons aux êtres humains. Ma jeune sœur, qui est décédée, était trisomique. Nous vivons dans une société beaucoup plus inclusive aujourd'hui, et c'est fantastique, mais il y a des gens qui déprécient la vie de personnes comme ma sœur cadette. Nous devons défendre la vie de ces personnes et en faire respecter la valeur. C'est ce que nous essayons de faire, dans le caucus conservateur, lorsque nous nous battons pour les personnes vulnérables qui seront touchées par cette mesure législative, au point d'en mourir dans certains cas.
(1635)
    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de Sturgeon River—Parkland pour son magnifique discours, plein de compassion, mais aussi de respect pour la vie humaine.
     Malheureusement, nous sommes nombreux ici à déplorer le fait que nous ne pouvons plus faire preuve d'esprit critique dans le débat. Nous ne pouvons pas faire valoir notre point de vue en nous basant sur le bien-fondé des arguments. Nous l'avons vu aujourd'hui lors de la période des questions, lorsque ceux qui s'opposent à cette mesure législative ont été qualifiés de fanatiques religieux.
    J'aimerais demander à mon collègue ceci. N'est-il pas d'accord pour dire qu'il est déplacé de diffamer et de déprécier ceux qui s'opposent aux efforts du gouvernement libéral pour rendre le suicide assisté accessible à plus de gens?
    Madame la Présidente, je remercie le député de nous faire profiter ainsi de sa sagesse. Comme le disait notre collègue du NPD un peu plus tôt, cela n'apporte rien d'utile au débat que certains se laissent aller à la calomnie et remettent en cause les motivations de certains groupes. Je connais des gens dans les deux camps qui ont été élevés dans la religion et qui envisagent le débat sous l'angle de la religion, et ce sont tous des gens honorables qui veulent agir selon ce que leur dicte leur conscience.
    C'est méprisant de mettre ainsi tous les Canadiens qui s'opposent à ce projet de loi dans le même panier, alors qu'il a été décrié autant par les personnes handicapées que les Autochtones et les personnes vulnérables en général. Il s'agit d'un coup bas qui rabaisse le niveau du débat et empêche les législateurs que nous sommes de faire valoir le point de vue de leurs concitoyens. C'est ça, la vie démocratique: pouvoir faire valoir son point de vue et façonner l'avenir du Canada. Il s'agit d'un exercice extrêmement important.
    Le député a raison quand il dit que la capacité à débattre semble péricliter. Nous devons freiner cette tendance sans plus attendre, et je dirais même que nous devons la renverser. C'est le Canada qui en sortira perdant si l'un des côtés se fait dire qu'il ne peut pas participer au débat.
    Madame la Présidente, je me réjouis que ce débat ait lieu. Dans son intervention, le député d'en face a affirmé que le procureur général a ignoré les appels du milieu des personnes handicapées. Croit-il vraiment que le procureur général ignore les appels du milieu des personnes handicapées?
    Tous les députés de ce côté-ci de la Chambre — et de l'autre côté aussi, espérons-le — ont à cœur les intérêts des Canadiens. Le dossier est difficile et complexe. Nous le comprenons et il est bien que nous tenions ce débat.
    Le député croit-il vraiment que le procureur général a ignoré les appels des personnes handicapées?
    Madame la Présidente, l'enfer est pavé de bonnes intentions, comme on dit. Le député n'a pas à me croire sur parole lorsque j'affirme que le procureur général fait fi des appels de la part des Canadiens handicapés. Il n'a qu'à les écouter. Ils l'ont dit au comité. Je viens de lire un article de la CBC d'aujourd'hui, selon lequel il s'est engagé dans un bras de fer avec les milieux des personnes handicapées et vulnérables, qui réclament que l'étude du projet de loi soit interrompue.
    Si le ministre écoute bel et bien les appels du milieu des personnes handicapées, pourquoi la majorité des membres du comité a-t-elle rejeté toutes les recommandations présentées par les milieux des personnes handicapées et vulnérables? Pourquoi les libéraux sont-ils si intransigeants face aux efforts de ces communautés pour faire modifier le projet de loi de manière à protéger leur vie et leur dignité?
    En vérité, c'est au gouvernement qu'il incombe de montrer qu'il a entendu ces appels, car, selon moi, rien n'indique que le procureur général l'ait fait.
(1640)

[Français]

    Conformément à l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement ce soir, à savoir: l'honorable députée de Vancouver-Est, Le logement; l'honorable député de Regina—Lewvan, Le transport aérien; l'honorable député de Leeds—Grenville—Thousand Islands et Rideau Lakes, L'éthique.

[Traduction]

    Madame la Présidente, je suis honoré de prendre encore une fois la parole à la Chambre cet après-midi au sujet d'un projet de loi qui, selon moi, mérite qu'on l'examine attentivement et rigoureusement. Les conséquences de ce projet de loi se feront sentir sur une très longue période, au-delà d'une législature ou du mandat d'un groupe de parlementaires. Voilà pourquoi il incombe au gouvernement de veiller à prendre le temps requis pour bien examiner ce projet de loi et bien faire les choses. Je l'ai déjà dit, mais il est important de le rappeler, surtout dans le cadre des débats sur ce projet de loi, on peut voir la vraie nature d'une nation à la façon dont elle traite ses membres les plus vulnérables.
    J'aimerais citer un passage tiré d'un livre ancien, plus précisément le livre des Psaumes, que certains députés connaissent bien. Ce passage est utilisé depuis des siècles, d'une génération à l'autre, partout dans le monde. Au chapitre 23 des Psaumes, on peut lire: « Quand je marche dans la vallée de l'ombre de la mort, Je ne crains aucun mal, car tu es avec moi. »
    Ayant déjà été pasteur, j'ai eu le privilège d'accompagner des personnes et des familles dans la vallée de l'ombre de la mort. J'ai personnellement vu et vécu ce que cela signifie que d'être affecté par la mort d'un être cher, tout comme nombre de députés, j'en suis certain, et peut-être même toutes les personnes à la Chambre.
    Le projet de loi est assorti d'une grande responsabilité. Il traite littéralement de questions de vie et de mort et de décisions sans appel. Je pense qu'il incombe à la Chambre de prendre le temps nécessaire pour réfléchir aux témoignages éloquents que nous avons entendus au comité, des témoignages comme celui de M. Roger Foley, qui raconte s'être fait refuser des services de santé qu'il avait demandés et avoir plutôt subi des pressions de demander l'aide médicale à mourir. Il se bat maintenant pour que plus personne ne vive la même situation que lui et il appuie nos amendements au projet de loi.
    Krista Carr a également témoigné devant le comité. Elle est d'Inclusion Canada et elle travaille avec des personnes handicapées. Elle a déclaré au comité qu'avec le projet de loi C-7, les pires craintes des personnes handicapées étaient en train de se réaliser. Même la ministre de l’Emploi, du Développement de la main-d’œuvre et de l'Inclusion des personnes handicapées du gouvernement a déclaré que les médecins ne devraient pas parler de l'aide médicale à mourir aux personnes handicapées.
    Des dirigeants autochtones, dont l'ancienne procureure générale et ministre de la Justice du Canada, ont également exprimé de sérieuses préoccupations concernant le projet de loi et les mesures de sauvegarde inadéquates. Des médecins ont fait part de leurs préoccupations concernant la liberté de conscience dans le cadre de l'aide médicale à mourir.
    À la lumière de toutes ces préoccupations exprimées et de tous ces puissants témoignages entendus, on constate que les Canadiens d'un océan à l'autre sonnent l'alarme et nous encouragent, nous, les parlementaires, à bien faire les choses en raison du caractère définitif de cette décision.
    Qu'y a-t-il de mal à prendre le temps de bien réfléchir à une question d'une telle gravité? Qu'y a-t-il de mal à intégrer des mesures de sauvegarde adéquates pour remédier aux préoccupations des personnes les plus vulnérables? Nul ne peut prétendre que ces préoccupations n'ont pas été exprimées avec véhémence et insistance. À ce moment-ci, nous, parlementaires, devons prendre le temps de réfléchir et nous demander quelles mesures nous prenons pour remédier à ces préoccupations dans le projet de loi.
    Quand j'étais pasteur, j'ai fait la connaissance d'une dame qui souffrait beaucoup d'une maladie qui était, à bien des égards, invalidante. La dame ne pouvait plus marcher. La maladie a progressé à un point tel qu'elle ne pouvait même plus lever son bras pour manger. Sa santé se détériorait. Sa stabilité émotionnelle avait déjà été ravagée par la perte de son époux, mort à l'étranger.
(1645)
    Je me souviens lui avoir rendu visite à l'hôpital et avoir regardé sa mère la nourrir à la cuillère. C'était une sorte de bouillie parce qu'elle perdait lentement sa capacité de mâcher de la nourriture. Son état était affligeant. Ces visites nous affectaient beaucoup.
    Je dois dire que nos communautés paroissiales et nos groupes confessionnels ne ménageaient aucun effort pour l'encourager. Leurs membres venaient lui rendre visite et s'assuraient qu'elle recevait suffisamment de nourriture et de soutien, dans la mesure du possible. Elle avait vécu tant d'épreuves qu'elle avait même du mal à exprimer tout ce qu'elle ressentait. Je me souviens être allé la voir à l'hôpital un jour où il semblait qu'il ne lui restait plus beaucoup de temps à vivre. J'ai observé sa mère en train de la nourrir. Je me souviens qu'en partant, j'étais ébranlé et j'espérais qu'il y aurait une meilleure solution pour cette dame.
    Or, je suis heureux d'informer les députés que la situation de cette dernière s'est remarquablement améliorée. Son histoire ne s'est pas terminée comme nous le pensions. Même si son parcours jusque là avait été caractérisé par beaucoup de souffrances, de désagréments et de pertes terribles, je suis heureux de dire que, plus de 12 ans plus tard, elle est complètement rétablie, s'est remariée et profite de la vie.
    On pourrait bien se demander ce que cela a à voir avec la question dont nous sommes saisis. C'est étroitement lié. Je pense qu'il y a de nombreux autres Canadiens qui ont traversé la vallée de l'ombre de la mort, qui se demandaient si leur vie valait toujours la peine d'être vécue et s'ils allaient être en mesure de traverser la rude épreuve à laquelle ils étaient confrontés. Grâce au soutien, aux soins et à l'amour de leurs amis, de leur famille et des membres de leur collectivité qui les ont accompagnés dans les circonstances les plus difficiles, ils ont réussi à traverser la vallée de l'ombre de la mort et à en ressortir de l'autre côté.
    Combien d'autres Canadiens qui se trouvent actuellement dans des circonstances terribles et qui se sentent accablés par ce qu'ils vivent gagneraient-ils à se faire épauler pendant qu'ils traversent la vallée? C'est peut-être tout ce dont ils ont besoin pour y arriver. Ce n'est pas forcément le cas pour tout le monde, mais je sais que ce l'était pour cette femme. Je suis si heureux pour elle que les choses se soient passées ainsi. Elle est en vie maintenant parce que les gens n'ont jamais arrêté de croire en elle, même au moment où elle-même avait abandonné tout espoir. Maintenant qu'elle est remise de cette épreuve, elle est une source d'inspiration pour de nombreux autres qui sont dans la même situation.
    Je conclurai en vous disant ceci: même si la vallée de l'ombre de la mort est une période très sombre pour ceux qui la traverse et pour leur famille, en tant que député qui a perdu un proche, je peux affirmer que nous avons l'obligation, à titre de parlementaires, de prendre le temps de prévoir toutes les mesures de sauvegarde pour que, quand une personne traverse cette vallée, elle ne prenne pas sa décision alors qu'elle se trouve toujours dans l'obscurité, soit une fois arrivée à la fin de la vallée.
    La dernière partie du psaume que j'ai lu tout à l'heure est « car tu es avec moi ». Selon moi, tous les parlementaires doivent se poser les questions suivantes: serons-nous là pour tous les Canadiens qui se trouvent au milieu de la vallée de l'ombre de la mort? Serons-nous là pour eux en mettant adéquatement en place toutes les mesures de sauvegarde et de soutien nécessaires pour leur permettre d'aller de l'avant?
     Madame la Présidente, j'aime à penser que je serais là. J'ai vécu une expérience personnelle avec mon père, ses derniers jours ayant été particulièrement difficiles en raison de la douleur intense qu'il ressentait. Je suis très reconnaissant d'avoir pu être à ses côtés au moment de sa mort. Les médicaments ont réussi à soulager ses souffrances, mais certains professionnels de la santé m'ont indiqué qu'ils auraient probablement raccourci son espérance de vie également.
    Je comprends l'importance de la différence entre le suicide assisté et l'aide médicale à mourir. Mon père était un homme très fier et je crois dans mon cœur qu'il est mort dans la dignité, de la manière qu'il souhaitait.
    Je comprends l'importance que revêt ce projet de loi, et je rappelle aux députés que ce débat a lieu depuis de nombreuses années, et qu'il se poursuivra pendant bien des années encore. En effet, nous sommes tous conscients, quelle que soit notre position sur la question, de l'importance de veiller à effectuer le bon choix. Je pense que nous continuerons à prendre de bonnes décisions lors de l'étude du projet de loi en comité. Toutefois, nous sommes tenus de respecter certains délais. Le député pourrait-il nous dire ce qu'il en pense, ou nous faire part de ses commentaires, selon ce qui lui convient le mieux?
(1650)
    Madame la Présidente, je remercie le député de nous avoir fait part de son expérience personnelle en ce qui concerne sa marche dans la vallée de l'ombre de la mort avec son père. Je peux comprendre. Mon frère a été atteint d'un cancer à l'âge de 34 ans et a beaucoup souffert vers la fin de sa vie. Je me souviens d'avoir été là et de l'avoir vu. Oui, les médicaments ont joué un rôle dans le soulagement de sa douleur et l'allègement de sa souffrance, mais nous avons fini par marcher dans cette vallée. Après tous les traitements et tous les problèmes que nous avons surmontés, il n'a pas été facile d'être témoin de certaines choses, mais je dirai que je suis très reconnaissant d'avoir pu passer chaque moment que j'ai passé avec mon frère. Je suis extrêmement reconnaissant de la façon dont on nous est venu en aide pendant cette période et de la façon dont des gens de tous les horizons dans ma communauté se sont montrés à la hauteur de la situation.
    Je pense parfois que dans notre hâte d'alléger la souffrance, ce que nous voulons naturellement tous faire, nous manquons peut-être les leçons et les vertus que seule la souffrance peut nous apprendre. Comme le dit l'ancien dicton, il y a plus à apprendre dans la maison de deuil que dans toute autre maison. Les leçons que nous apprennent les personnes qui ont vécu une tragédie, des épreuves ou des circonstances douloureuses nous aident tous à comprendre ce qui compte le plus.
    L'une des leçons les plus importantes que j'ai apprises pendant cette période est que nous devons chérir chaque seconde de vie. J'en suis très reconnaissant. Ce qui est dit dans ces moments...
    Je dois interrompre le député pour permettre au député de St. Albert—Edmonton de poser une dernière question.
    Madame la Présidente, le député a parlé du cas de Roger Foley. À la fin de son intervention, il a parlé de la nécessité de mettre en place des mesures de sauvegarde adéquates. Compte tenu du cas de Roger Foley, je me demande si le député pourrait dire ce qu'il pense du fait que ce projet de loi retirerait une mesure de sauvegarde clé, soit l'obligation de faire appel à deux témoins indépendants. En plus d'éliminer cette mesure, le projet de loi permettrait à toute personne qui fournit des soins au demandeur d'aide médicale à mourir de servir de témoin.
    Madame la Présidente, j'estime que le retrait de toute mesure de sauvegarde constitue une grave menace. Nous devons mettre en place des mesures de sauvegarde adéquates pour toute personne qui traverse la vallée de l'ombre de la mort...
    Nous reprenons le débat. Le député de St. Albert—Edmonton a la parole.
(1655)
    Madame la Présidente, je suis heureux d'intervenir une fois de plus pour parler du projet de loi C-7, le projet de loi sur l'aide médicale à mourir. Je reconnais qu'il s'agit d'un sujet incroyablement complexe qui suscite de nombreux points de vue différents.
    Cela dit, la manière dont le gouvernement et le procureur général ont géré le dossier du projet de loi est une leçon sur ce qu'il ne faut pas faire, compte tenu de la gravité du sujet. Je dis cela en ayant le plus grand respect pour le ministre de la Justice et procureur général. Je crois que c'est une personne sincère et intelligente qui est compatissante et qui veut faire ce qu'elle croit être juste.
    Cela dit, lorsque le ministre de la Justice s'est exprimé à la Chambre à l'étape de la deuxième lecture, il a indiqué qu'il y avait eu de vastes consultations et que ces dernières avaient abouti à un consensus. Ni l'un ni l'autre ne sont vrais.
    Les consultations dont le ministre a parlé se sont déroulées en grande partie sur une période d'un mois en janvier dernier. Il s'agissait de consultations en ligne qui excluaient les groupes vulnérables de la population, notamment les personnes à mobilité réduite, les personnes souffrant de handicaps cognitifs ou visuels, les personnes n'ayant pas accès à Internet et les personnes vivant dans des communautés isolées et nordiques. Leurs voix n'ont pas été entendues ou elles l'ont été difficilement en raison du fait que la période de consultation en ligne n'a duré qu'environ un mois.
    De plus, certains soutiennent que le résultat des consultations était déterminé à l'avance. Autrement dit, le ministre avait déjà une idée du projet de loi qu'il souhaitait élaborer, et il s'est servi du processus pour obtenir les réponses qu'il souhaitait.
    On n'a pas à me croire sur parole. Les gens qui ont participé au processus de consultation, comme Heidi Janz, du Conseil des Canadiens avec déficiences, ou la Dre Catherine Frazee, ancienne commissaire en chef de la Commission ontarienne des droits de la personne et ardente défenseure des droits des personnes handicapées le disent aussi. Quand elles ont comparu devant le comité de la justice, elles ont affirmé que le résultat des consultations était prédéterminé.
    Que faut-il penser, alors, du consensus qui serait supposément ressorti des consultations qui étaient supposément poussées mais ne l'étaient pas vraiment? Nous savons que, mis à part les consultations, presque tous les organismes nationaux de défense des droits des personnes handicapées s'opposent à ce projet de loi. En ce moment même, ils demandent au ministre et au gouvernement de mettre le projet de loi sur pause. On sait aussi que plus de 1 100 médecins ont écrit une lettre dans laquelle ils expriment leur opposition. Le rapporteur spécial des Nations unies sur les droits des personnes handicapées a aussi exprimé des inquiétudes.
(1700)
    À peu près tous les témoins, pour ne pas dire la totalité d'entre eux — à part peut-être le ministre lui-même, qui a comparu devant le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, qui s'est réuni au cours des deux dernières semaines — a descendu le projet de loi en flammes. On dirait qu'il ne plaît à personne. Dire qu'à entendre le ministre à l'étape de la deuxième lecture, il faisait consensus. Il ne peut pas y avoir de consensus, puisqu'il n'y a pas eu de consultations dignes de ce nom, que l'issue de celles qui ont eu lieu était décidée d'avance et que la mesure législative qui en a résulté a été vertement critiquée par à peu près tout le monde.
    Depuis le début du débat, les députés — du parti ministériel, mais des autres aussi — parlent de cet enjeu comme s'il n'y avait aucun risque: « Ôtez-vous de là, laissez les patients décider eux-mêmes de ce qu'ils veulent et débarrassons-nous des mesures de sauvegarde existantes parce qu'autrement, ce serait faire fi de l'autonomie des gens. » Au paragraphe 105 de l'arrêt Carter, la Cour suprême du Canada a reconnu qu'il y en a, des risques, mais elle précise ailleurs « que [c]es risques “peuvent être [...] réduits considérablement dans un régime soigneusement conçu” qui impose des limites strictes scrupuleusement surveillées et appliquées ». C'est ce que la Cour suprême du Canada a dit.
    Lorsqu'on parle de ces risques, il suffit d'examiner le cas de Roger Foley, qui est gravement handicapé, qui a besoin de soins constants et qui habite dans un établissement hospitalier à London, en Ontario. Je vais lire ce qu'il a raconté à propos de son expérience, car c'est vraiment très choquant. Lorsqu'il a comparu devant le comité de justice, il a parlé de ce qui peut arriver lorsqu'il n'y a pas suffisamment de mesures de sauvegardes — il est question ici des mesures de sauvegardes prévues dans le projet de loi C-14, qui seront amoindries par le projet de loi C-7. Voici ce qu'en dit M. Foley:
    On me pousse vers l'aide à mourir à force d'abus, de négligence, de manque de soins et de menaces. Par exemple, quand j'ai réclamé de l'aide pour pouvoir vivre chez moi et y recevoir des soins à domicile autogérés, l'éthicien et les infirmières de l'hôpital ont essayé de me pousser vers l'aide à mourir en menaçant de me facturer 1 800 $ par jour ou de me forcer à quitter l'hôpital sans avoir accès aux soins dont j'ai besoin pour vivre. J'ai senti des pressions de la part du personnel pour me convaincre d'opter pour l'aide à mourir plutôt que de voir mes souffrances allégées grâce à des soins dignes et empreints de compassion.
    Compte tenu de ce témoignage, nous avons présenté un amendement pour que la demande doive venir d'abord du patient. La ministre de l'Inclusion des personnes handicapées a dit qu'elle était grandement préoccupée par ce qui est arrivé à Roger Foley, et qu'elle a souvent entendu parler d'autres cas semblables. Or, même devant ces témoignages, le gouvernement a rejeté notre amendement tout à fait raisonnable ainsi que d'autres amendements et a plutôt choisi d'aller imprudemment de l'avant. Nous en sommes maintenant dans cette situation intenable où les personnes les plus vulnérables de notre société sont susceptibles d'être exposées à de tels risques. C'est vraiment malheureux que tout se soit passé ainsi. J'espère seulement que le Sénat présentera des amendements de fond pour corriger ce projet de loi qui comporte de graves lacunes.
(1705)
    Madame la Présidente, le député se tourne vers le gouvernement et l'accuse d'avoir rejeté les amendements des conservateurs. À mon avis, si le député réfléchissait à ce qui s'est passé au comité, il découvrirait probablement que, dans une situation minoritaire, le Parti libéral ne peut remporter un vote à lui seul. Le député le sait très bien.
    Les conservateurs ne sont pas parvenus à convaincre suffisamment de membres du comité d'appuyer les amendements qu'ils proposaient. Je suppose que la mesure législative dans sa forme actuelle est conforme aux idées générales de l'arrêt Carter de 2015 et de la décision de la Cour supérieure du Québec, qui a essentiellement imposé l'échéance du 18 décembre.
    En ce qui concerne les autres députés de son caucus, l'un d'entre eux a affirmé que le gouvernement du Canada a deux options: demander une prolongation à la Cour du Québec ou renvoyer la question à la Cour suprême du Canada. Le député est-il d'accord et peut-il en parler davantage?
    Madame la Présidente, en quelques mots, je suis d'accord avec mon collègue. J'ajouterais que nous n'aurions jamais dû en arriver là parce que si le procureur général avait suivi la démarche appropriée, il aurait fait appel de la décision Truchon dès le départ. Si le ministre l'avait fait, nous ne saurions à tout le moins pas obligés de tenter d'adopter le projet de loi avec précipitation devant l'échéance du sursis visant la déclaration d'invalidité constitutionnelle.
    Madame la Présidente, je sais que les conservateurs ont fait part de nombreuses inquiétudes concernant certaines personnes qui ont reçu plus d'argent qu'elles n'étaient censées pendant la pandémie. Je sais qu'ils ne parlaient pas des 20 milliardaires qui ont engrangé 38 milliards de dollars dans les six premiers mois de la pandémie.
    Les conservateurs s'inquiètent des gens qui reçoivent la Prestation canadienne d'urgence, la PCU, mais qui n'y ont pas droit. Au cours de la dernière semaine, un certain nombre de gens de ma circonscription, des personnes handicapées, ont communiqué avec mon bureau parce qu'ils avaient reçu des lettres de l'Agence du revenu du Canada les informant qu'ils devaient rembourser les 14 000 $ en versement de PCU qu'ils avaient reçus. Ces personnes handicapées, des travailleurs autonomes, ont utilisé les sommes qu'elles ont reçues pour payer le loyer et les factures de services publics et pour couvrir d'autres dépenses. Elles n'avaient pas compris la distinction entre les montants bruts et les montants nets au moment de faire leur demande. Les personnes qui reçoivent des prestations d'invalidité en Colombie-Britannique peuvent gagner jusqu'à 12 000 $ par année avant qu'on commence à récupérer, dollar pour dollar, les prestations d'invalidité qu'elles ont reçues.
    Le député voudrait-il voir plus de compassion sur cette question pour qu'on prenne soin des personnes handicapées maintenant, pendant qu'elles sont encore en vie et qu'elles tentent de survivre? Selon lui, que devrions-nous faire?
    Madame la Présidente, ce que j'espère, c'est que les inquiétudes exprimées par la communauté des personnes handicapées seront entendues dans le débat sur cet important texte de loi.
    Malheureusement, elles n'ont pas été écoutées par le procureur général. Elles n'ont pas non plus été écoutées par les députés libéraux. Par contre, elles l'ont été par mon ami de Nanaimo—Ladysmith, qui a présenté à l'étape du comité d'importants amendements que nous avons appuyés et qui, selon nous, représentaient un pas dans la bonne direction puisqu'ils visaient à mieux protéger les personnes vulnérables. Toutefois, ces amendements ont été rejetés par les libéraux.
    Compte tenu de tout cela, j'espère que le Sénat réussira à faire un meilleur examen que celui que nous avons eu à la Chambre.
    Madame la Présidente, je savais que, en me lançant en politique fédérale, je devrais participer à de nombreux débats très importants à la Chambre. Cependant, devoir me prononcer sur des questions de vie ou de mort porte les choses à un tout autre niveau. En tant que personne venant d'une petite ville du Nord de la Saskatchewan et qui a maintenant le privilège de représenter toute la moitié septentrionale — 52 % du territoire — de la Saskatchewan, j'espère pouvoir apporter un point de vue un peu unique au débat.
    Tandis que nous débattons de cette mesure législative ici, à Ottawa, plusieurs communautés dans ma circonscription sont aux prises avec des taux de suicide particulièrement élevés. Par exemple, dans la Première Nation de Makwa Sahgaiehcan, qui compte environ 1 000 habitants, il y a une centaine de membres de la communauté placés sous surveillance étroite par crainte qu'ils se suicident.
    Partout au pays, on observe un manque d'établissements de soins de longue durée et de soins palliatifs, mais ce problème est encore plus criant dans les collectivités nordiques et éloignées. Nous devons songer au message que nous envoyons, en tant que législateurs, à ces communautés vulnérables quand nous allons bien au-delà de l'arrêt Carter de la Cour suprême du Canada, en supprimant les mesures de sauvegarde qui protégeraient les Canadiens les plus vulnérables.
    Le gouvernement cherche maintenant à jouer un rôle actif, et non un rôle passif, dans la fin de la vie des Canadiens. Je trouve cela extrêmement troublant et j'implore mes collègues d'en face de nous accorder le temps nécessaire pour examiner les conséquences à long terme de la mesure législative et pour écouter tous les points de vue qui nous sont présentés. Nous n'avons pas besoin de nous dépêcher inutilement.
    J'aimerais aborder deux éléments principaux concernant le projet de loi C-7. Le premier, c'est l'incidence de l'adoption de ce projet de loi sur les communautés autochtones, et le deuxième, c'est l'importance de conserver les mesures de sauvegardes qui visent à protéger les Canadiens les plus vulnérables.
    Je ne prétends absolument pas être en mesure de m'exprimer au nom des Autochtones du Canada. Cela dit, tout au long de ma vie, j'ai tissé des liens avec de nombreux membres des Premières Nations et Métis dans le Nord de la Saskatchewan et, au fil des ans, je me suis entretenu avec beaucoup d'entre eux au sujet de l'aide médicale à mourir. Les dirigeants de ces communautés craignent grandement que de légitimer ainsi le suicide dans notre culture ait, au sein de leur culture, une incidence sur les jeunes générations et les personnes qui approchent la fin de leur vie.
    Ces préoccupations ont d'ailleurs été soulevées au cours de la dernière législature par le député libéral Robert-Falcon Ouellette, lors de son discours sur ce qui était à ce moment-là le projet de loi C-14. Il a dit ceci:
    Pour les Autochtones, tout est lié. La vie est un tout, c’est-à-dire que, si l’on change quelque chose à un endroit donné, l’effet s’en fait sentir ailleurs, et on ne peut pas les séparer l’un de l’autre. Dans l’univers occidental, souvent, nous cloisonnons les choses. Nous croyons que nous avons du jeu, que nous pouvons contrôler certaines situations, que nous pouvons changer quelque chose ici sans rien modifier ailleurs. Surtout, nous en sommes venus à croire que nous pouvons tout prédire et tout contrôler, contrôler l’avenir. Cela ne signifie toutefois pas que nous ne devrions rien faire.
     L'incidence de ce projet de loi sur les gens de Toronto sera peut-être très différente de celle sur les gens du Nunavik ou d’Attawapiskat. Les parlementaires que nous sommes doivent se mettre à la place des autres, marcher dans leurs mocassins si l’on peut dire. Nous devons sortir de nos propres expériences pour regarder le monde à travers une cosmologie différente afin de voir les effets que nos décisions auront sur les autres.
     Nous apportons des changements profonds à des notions qui touchent à la vie. Nous ne pourrons plus renverser ces changements à l’avenir. La tradition et la philosophie autochtones exigent que nous prévoyions les effets qu’auront nos décisions sur les sept générations à venir. Si je me trompe, s’il n’y a aucun lien entre Attawapiskat et l’aide médicale à mourir ou le suicide médicalement assisté, si les gens ordinaires n’y voient pas de lien et si cette notion n’augmente pas le stress des communautés, alors je serai heureux d'avouer que je me suis trompé. Toutefois, si ce que nous faisons a des répercussions causées par la valorisation du suicide, alors qu’allons-nous faire?
    M. Ouellette a poursuivi en racontant le récit très personnel et difficile des difficultés vécues par lui et ses frères et sœurs dans leur tendre enfance, ce qui l'a amené à vouloir mettre fin à ses jours.
    Si, au cours de ma vie, j'avais vu ou j'avais su que ma grand-mère avait eu recours à l'aide médicale à mourir ou s'était suicidée avec l'aide d'un médecin, si j'avais appris qu'un autre membre de ma famille avait commis cet acte irréparable, j'aurais probablement eu de la difficulté à continuer.
    Nous pouvons penser qu'il n'y aura pas d'incidence, mais nous ne le savons pas. Nous pensons connaître ces choses. Nous décidons de l'avenir ou de la fin de quelques personnes.
    Dans un entretien à la CBC, à l'époque du débat sur le projet de loi C-14, le sénateur Murray Sinclair a présenté un point de vue semblable. Il a dit:
    Chez les Autochtones, s'enlever la vie n'est pas encouragé. En fait, c'est une chose que l'on décourage et qui fait l'objet d'enseignements dans ma communauté: les enseignements Ojibwa, selon lesquels on est, ou non, en mesure de voyager jusqu'au monde des esprits de la bonne manière, ou, si on prend la décision de mettre fin à ses jours sans raison valable, une cérémonie pourrait être tenue.
(1710)
    Au Sénat, le sénateur Sinclair a parlé des jeunes à ses collègues:
    Il n'en faut pas beaucoup à un jeune vulnérable pour croire que sa situation est intolérable. Par conséquent, nous devons veiller à ce que le message lancé aux Canadiens par le projet de loi soit qu'il s'agit là d'un droit qui ne doit pas être facile à exercer ou dont nous nous réjouissons.
    Les Premières Nations du Nord de la Saskatchewan, M. Ouellette du Manitoba et le sénateur Sinclair ne sont pas seuls. Tyler White, président-directeur général des Services de santé Siksika, et le Dr Thomas Fung, un médecin en chef de la même nation, sonnent l'alarme à propos du projet de loi. Au cours d'une entrevue à CTV, M. White a dit: « L'expansion de l'aide médicale à mourir envoie un message contradictoire à nos gens: on devrait faire de la prévention du suicide auprès de certaines personnes et apporter de l'aide au suicide à d'autres ».
    Dans une lettre envoyée à mon bureau, M. White et le Dr Fung racontent l'expérience d'un patient souffrant d'une maladie pulmonaire qui lui fait perdre le souffle facilement, même lorsqu'il effectue de simples tâches ménagères. Ce patient utilise un déambulateur, mais il ne peut pas marcher plus de quelques minutes sans s'essouffler. Bien que son problème de santé soit incurable, il pourrait sûrement améliorer sa qualité de vie s'il avait accès aux ressources financières nécessaires pour pouvoir recevoir des services d'oxygénothérapie à domicile, mais il ne répond pas tout à fait aux critères pour être admissible à une aide financière. Le Dr Fung conclut en disant qu'avec le projet de loi C-7, son patient serait admissible à l'aide médicale à mourir, alors que n'importe qui devrait comprendre qu'il y a d'autres façons d'alléger les souffrances de cet homme et d'améliorer sa qualité de vie. Les patients comme celui du Dr Fung méritent mieux.
    Dans un pays aussi développé et plein de ressources que le Canada, nous ne pouvons nous permettre d'abandonner ainsi les gens. Notre système de santé fait la fierté de nombreux Canadiens. C'est grâce à l'accès universel aux traitements qui peuvent sauver des vies, et non à l'admissibilité universelle à l'aide médicale à mourir.
    J'aimerais parler un instant des mesures de sauvegarde pour les Canadiens vulnérables et de la façon dont le projet de loi rate la cible à cet égard. Je ne suis pas avocat, mais, heureusement, le chef de l’opposition l'est. Nous sommes probablement tous contents que ce soit le cas, c'est-à-dire que ce n'est pas moi l'avocat. J'étais ravi d'être à la Chambre lorsqu'il a prononcé son discours sur le projet de loi C-7 ce matin.
    Pour m'appuyer sur son expertise juridique, je me permets de répéter une partie des propos qu'il a tenus concernant les litiges précédents entourant l'aide à mourir, car ils m'ont semblé très importants. Il a dit: « Tous ces juges ont parlé du rôle de l'État dans la protection des personnes vulnérables dans la prise de leur décision, comme on les appelait, c'est-à-dire les personnes qui peuvent être poussées à demander un traitement de fin de vie parce qu'elles ont l'impression d'être un fardeau. Ce sujet fait l'objet de discussions depuis les années 1990, et le procureur général actuel supprime les mesures de sauvegarde de notre régime. Toute la jurisprudence sur la question de l'aide à mourir, de l'euthanasie ou du suicide assisté traite de la protection des personnes vulnérables. »
    Parlant de la protection des personnes vulnérables, le chef a également dit: « Tous les principaux groupes de personnes handicapées au Canada sont d'accord avec mes collègues conservateurs, dont la position est fondée sur la compassion et la raison. Je suis très fier des efforts que nous avons déployés dans le dossier. Des juristes, des dirigeants autochtones et des personnes travaillant avec des personnes souffrant de problèmes de santé mentale ont uni leurs efforts aux nôtres. » J'appuie sans réserve les propos que mon ami a tenus ce matin et je réitère la nécessité que le gouvernement revienne sur sa décision d'abroger les dispositions qui garantiraient une période d'attente de 10 jours et la présence de deux témoins.
    D'ailleurs, en ce qui concerne la période d'attente de 10 jours, voici ce qu'un cadre supérieur de l'Assemblée des Premières Nations a écrit sur Twitter récemment: « Ces 10 jours ont carrément sauvé la vie d'un proche. L'AMM doit être accessible, mais aussi requérir le consentement éclairé. Les libéraux doivent revoir leur position. »
    Pour conclure, je veux reconnaître pleinement que les deux camps dans ce débat font preuve de compassion. Je comprends que le gouvernement a élaboré le projet de loi en toute bonne foi, mais la réalité est qu'il a manqué à son devoir envers les Canadiens. C'est pourquoi je voterai contre ce dangereux projet de loi, et j'espère que mes collègues d'en face reconsidéreront leur appui également.
(1715)
    Madame la Présidente, le député a dit qu'il s'agit d'une question de vie ou de mort. Souvent, lorsque nous siégeons à la Chambre, nous nous penchons sur ces questions en leur accordant le degré d'importance qu'elles méritent.
    Lors de l'étape de l'étude du projet de loi en comité, il y a eu quelques difficultés. Je sais que le caucus conservateur a proposé quelques amendements raisonnables. Je me demande si le député pourrait nous parler de ces amendements raisonnables et de leur importance dans l'élaboration du projet de loi.
(1720)
    Madame la Présidente, je conviens que certains amendements raisonnables ont été proposés et nous aimerions que la période de réflexion de 10 jours dont j'ai parlé soit rétablie. J'aimerais faire part à la Chambre d'une histoire très personnelle à ce sujet, qui, selon moi, fera valoir ce point.
    En 2014, dans ma petite ville de Meadow Lake, en Saskatchewan, une jeune athlète extraordinaire a terminé ses études secondaires. Elle venait d'obtenir son diplôme en sciences infirmières lorsqu'elle a eu un terrible accident de voiture — c'était un mardi soir, je pense — et s'est retrouvée paraplégique. Il s'agit d'une amie de la famille et j'ai eu le privilège, ou peut-être l'horreur, d'être à l'hôpital avec sa famille ce soir-là et les jours suivants. Je peux assurer à la Chambre que cette jeune femme aurait alors choisi de mourir plutôt que de vivre si elle en avait eu le choix.
    Quelques années se sont écoulées depuis et elle est maintenant une athlète paralympique. Elle a recommencé à faire des choses incroyables avec sa vie. Les compétitions et l'entraînement l'ont amenée à parcourir le monde entier. Je pourrais en parler longtemps, mais je me contenterai de citer quelques mots que son père a dits: « Une des choses vraiment intéressantes que nous commençons lentement à réaliser, c'est que les membres de ce groupe spécial de personnes ne se sentent pas limités d'une quelconque manière. » Les personnes handicapées ne voient plus leur handicap lorsqu'elles ont surmonté l'épreuve initiale. Dans le cas de cette jeune femme, c'était l'accident.
    Madame la Présidente, nous savons que les médecins sont très préoccupés par les mesures de protection de la liberté de conscience pour les médecins praticiens. Depuis le début, avec le projet de loi C-14, beaucoup de personnes ont insisté pour que ces mesures soient incluses dans le projet de loi C-7, et pourtant, le gouvernement libéral a fait complètement fi de ces demandes et il a refilé le problème aux provinces. Selon moi, l'aide médicale à mourir a une incidence sur les soins palliatifs et sur les attentes des gens qui veulent devenir des professionnels de la santé. Le député peut-il nous dire ce qu'il en pense?
    Madame la Présidente, je suis tout à fait d'accord. La deuxième préoccupation la plus courante dont on me parle est probablement la liberté de conscience. J'ai discuté avec des gens qui croient que c'est un énorme problème. Ils estiment que leurs croyances, leur foi ou leur cheminement de vie ne devraient pas être touchés par une mesure quelconque imposée par le gouvernement.
    Je tiens à faire une autre brève observation. Lors de la législature précédente, au cours du débat sur cette question, l'ancienne procureure générale et ministre de la Justice a parlé d'éviter la normalisation du suicide pour protéger les personnes vulnérables, qui courent un risque disproportionné d'être encouragées au suicide. Elle a répété cet argument à maintes reprises. Voici un extrait d'un article de CTV:
     En défendant le projet de loi devant le Sénat, [l'ancienne ministre de la Justice] a prévenu qu'élargir les critères d'admissibilité pour inclure toute personne en proie à des souffrances intolérables « env[errait] le message que la société juge approprié de traiter la souffrance par la mort volontaire. Un tel message risque d'encourager des personnes qui traversent une crise et qui songent déjà à se suicider à passer aux actes [...] »
     Je ne crois vraiment pas que nous devrions placer les professionnels de la santé dans cette position.
    Madame la Présidente, c'est un honneur pour moi ce soir de parler du projet de loi C-7, vu le grand nombre de discours prononcés par mes collègues conservateurs, qui se préoccupent du sort de nos concitoyens, en particulier les personnes handicapées et les aînés.
    Je suis aujourd'hui grandement préoccupé par le projet de loi C-7 et les modifications proposées à la loi. Je sais que c'est une question chargée d'émotions pour tout le monde et que nous tenons une discussion importante ce soir. Tous les projets de loi présentés au Parlement nécessitent un examen approfondi; c'est d'autant plus vrai pour les projets de loi qui traitent littéralement d'une question de vie ou de mort.
    Je crois fermement que le gouvernement fédéral aurait dû faire appel devant la Cour suprême pour obtenir des précisions sur le cadre dans lequel le Parlement peut légiférer. Malheureusement, il ne l'a pas fait, et nous voici aux prises avec un projet de loi hâtif qui met en jeu la vie des Canadiens les plus vulnérables.
    Qu'on ne s'y trompe pas: en tant que chrétien, je m'oppose fermement à l'aide médicale à mourir. Cela dit, je comprends que les tribunaux ont rendu une décision et que le projet de loi est nécessaire. Cependant, il faut s'assurer que ce genre de projet de loi prévoit des garanties pour les membres les plus vulnérables de notre société et pour la liberté de conscience des médecins et des autres professionnels de la santé.
    C'est pourquoi les conservateurs ont présenté un certain nombre d'amendements raisonnables pour rétablir des mesures de protection que le gouvernement libéral avait tout simplement choisi d'éliminer, ce qui est troublant. Nous avons proposé notamment de rétablir la période de réflexion de 10 jours lorsque la mort est raisonnablement prévisible, de prolonger la période de réflexion lorsque la mort n'est pas raisonnablement prévisible, de protéger les patients vulnérables en exigeant que ce soit le patient qui prenne l'initiative de demander de l'information sur l'aide médicale à mourir et de protéger la liberté de conscience des professionnels de la santé.
    Il est malheureux que ces amendements aient été rejetés par le gouvernement. Je suis profondément préoccupé par le fait que ce projet de loi vise à autoriser l'aide médicale à mourir pour les Canadiens qui ne sont pas mourants en éliminant l'exigence selon laquelle la mort doit être raisonnablement prévisible pour que la personne soit admissible à l'aide au suicide et à l'euthanasie.
    Mon père a 86 ans, et ma mère a 76 ans. Étant le fils de deux aînés, je suis très préoccupé par les effets que ce projet de loi pourrait avoir sur les aînés du pays, notamment en ce qui concerne l'accès aux soins. Se retrouveront-ils dans une situation où ils devront choisir entre recevoir des soins et mourir, simplement à cause des pressions externes? Étant donné que le projet de loi vise à élargir l'accès à l'aide médicale à mourir, cela risque de nuire aux soins palliatifs à tel point que les patients pourraient considérer l'aide médicale à mourir comme une meilleure option.
    Je sais que les Canadiens partagent mes préoccupations. Il faut dire que toutes les organisations nationales représentant les personnes handicapées au Canada s'opposent à ce projet de loi. Krista Carr, vice-présidente à la direction d'Inclusion Canada, a déclaré ce qui suit en comité: « Le projet de loi C-7 est notre pire cauchemar. ». Ces organisations nous avertissent que l'élimination du critère de la mort naturelle prévisible est discriminatoire à l'égard des personnes handicapées et met leur vie encore plus en danger. Mme Carr a fait remarquer:
     Cette exigence de fin de vie était le seul moyen d'éviter que le handicap soit l'unique critère pris en considération. Comme le projet de loi C-7 ferait en sorte que la présence d'un handicap deviendrait en soi une justification pour mettre fin aux jours d'une personne, les bases mêmes de la Charte des droits et libertés seraient ébranlées. La discrimination fondée sur le handicap serait ainsi à nouveau enchâssée dans le droit canadien.
    Il est honteux que dans sa hâte d'adopter ce projet de loi avant Noël, le gouvernement libéral continue à négliger les préoccupations légitimes soulevées par les personnes handicapées.
    Je suis également très inquiet du fait que le droit à la liberté de conscience de nos professionnels de la santé soit peu protégé. Bien que certains médecins et travailleurs de la santé aient pu être à l'aise avec l'aide médicale à mourir dans le cadre du projet de loi C-14, l'élargissement continu des critères d'admissibilité pourrait les amener à repenser leur soutien.
    D'autres intervenants, qui ont toujours été contre l'aide médicale à mourir, ressentent déjà la pression d'agir à l'encontre de leurs valeurs. Comme l'a indiqué le Collectif des médecins contre l'euthanasie dans un communiqué de presse en mars dernier: « La pression a été intense pour beaucoup de médecins, particulièrement chez les spécialistes en soins palliatifs, certains choisissant de quitter la spécialité médicale avant les récents développements. Les descriptions reçues font état d’environnements de travail toxiques et de crainte de mesures disciplinaires par les autorités médicales réglementaires. »
    Des membres du comité de la justice ont entendu les témoignages de défenseurs des droits des personnes handicapées, qui s'opposent farouchement au projet de loi C-7 et à l'élargissement rapide de l'aide médicale à mourir et qui soutiennent qu'il constitue une forme mortelle de discrimination qui fait qu'il est plus facile pour les personnes handicapées de mourir que de vivre. C'est honteux.
(1725)
    Le projet de loi C-7 a aussi été décrié par les professionnels de la santé, qui craignent de devoir mettre une croix sur leur liberté de conscience et qui s'inquiètent de voir la vitesse à laquelle le gouvernement veut le faire adopter. Voici ce qu'Adam Taylor avait à dire sur l'absence de consultations à propos de cette mesure législative: « En tant qu'urgentologue et omnipraticien, je sais à quel point les consultations sont importantes: on ne peut tout simplement pas en faire fi, pas plus qu'on peut faire fi de ce que vivent quotidiennement certains Canadiens et de leur souffrance. Je suis terriblement inquiet. » Pourtant, voyons où cela nous a menés. Les libéraux continuent de nous pousser dans le dos pour que nous adoptions leur projet de loi malgré les récriminations des principaux intéressés. Je l'ai dit et je le répète: ils devraient avoir honte.
    Comme le disait l'Alliance évangélique du Canada dans son mémoire au Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes, nous devons évaluer attentivement les répercussions du projet de loi C-7 et tenir compte des réserves exprimées par bon nombre de Canadiens, surtout les personnes handicapées. Ne serait-ce qu'en raison des vies humaines qui en dépendent, cette mesure législative est trop importante pour être adoptée à toute vitesse.

Affaires émanant des députés

[Affaires émanant des députés]

(1730)

[Traduction]

Le Jour de l'émancipation

    Que la Chambre reconnaisse: a) que le Parlement britannique a aboli l’esclavage dans l’Empire britannique le 1er août 1834; b) que l’esclavage existait en Amérique du Nord britannique avant son abolition en 1834; c) que les abolitionnistes et ceux qui luttaient contre l’esclavage, y compris ceux qui sont arrivés au Haut-Canada et au Bas-Canada par le chemin de fer clandestin, ont historiquement célébré le 1er août en tant que jour de l’émancipation; d) que le 30 janvier 2018, le gouvernement du Canada a annoncé qu’il reconnaîtrait la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine des Nations unies afin de souligner l’importante contribution que les personnes d’ascendance africaine ont apportée à la société canadienne, et d’établir une plateforme pour lutter contre le racisme à l’égard des Noirs; e) l’héritage et la contribution que les personnes d’ascendance africaine ont apportés et continuent d’apporter au Canada; et que, de l’avis de la Chambre, le gouvernement devrait faire du 1er août de chaque année le « Jour de l’émancipation » au Canada.
    — Monsieur le Président, j'ai aujourd'hui le plaisir de présenter ma motion, qui porte le numéro M-36. Cette motion demande à la Chambre de faire officiellement du 1er août le Jour de l'émancipation et, par conséquent, de faire suite à l'engagement du gouvernement en soulignant l'importante contribution que les personnes d'ascendance africaine ont apportée à la société canadienne et en continuant de lutter contre le racisme à l'égard des Noirs. Elle m'a été inspirée par le travail remarquable de la sénatrice Wanda Thomas Bernard et le projet de loi S-255 qu'elle a présenté à la session précédente.
     La motion M-36, qui porte sur le Jour de l'émancipation, invite le Parlement à reconnaître officiellement l'abolition de l'esclavage dans l'Empire britannique, notamment en Amérique du Nord britannique, ce qui constitue le Canada actuel, le 1er août 1834; la participation des colonies britanniques, y compris notre pays, à la traite transatlantique d'esclaves et le rôle des abolitionnistes, qui ont préparé le terrain en vue du changement et qui ont défié les normes de l'époque; l'histoire du Jour de l'émancipation, y compris les nombreuses histoires inédites et les réalisations méconnues de Canadiens noirs dans la société canadienne. La motion nous invite également à reconnaître la nécessité de lutter contre le racisme envers les Noirs sous l'égide de la Décennie internationale des personnes d'ascendance africaine de l'Organisation des Nations unies, et pour atteindre notre objectif de créer une société juste, inclusive et équitable.
    En 1807, le gouvernement britannique a voté pour mettre fin à la traite transatlantique des esclaves. Le 1er août 1834, l'esclavage a été aboli dans l'Empire britannique et dans tous les territoires du Commonwealth, y compris le Canada. Ce fut une victoire historique pour les communautés noires dans l'ensemble de l'Empire britannique et en particulier pour les Canadiens noirs qui se sont organisés, ralliés et battus pour faire adopter cette mesure législative. C'était une journée de réjouissances pour les Canadiens noirs, qui étaient fous de joie à l'idée de pouvoir vivre librement et être indépendants, mais c'était également l'occasion idéale pour réfléchir à la lutte qu'ils ont menée pour obtenir cette liberté.
    Le Jour de l'émancipation permet aux Canadiens d'origine africaine ou caraïbe de tisser des liens en racontant ce qu'ils ont vécu et pour transmettre l'histoire de leurs ancêtres qui ont été soumis à l'esclavage, dont les noms et le vécu sombreraient autrement dans l'oubli ou ne seraient pas honorés dans les livres d'histoire portant sur cette époque.
    La reconnaissance mondiale du Jour de l'émancipation est au cœur de cette motion et l'un des principaux piliers au chapitre de l'éducation et de la sensibilisation. C'est important de le souligner. Cet été, dans les semaines qui ont précédé le Jour de l'émancipation, j'ai eu l'occasion de consulter divers groupes de défense des intérêts des personnes concernées relativement à cette motion. Je tiens à mentionner un groupe de discussion sur le Jour de l'émancipation auquel j'ai participé avec d'éminents universitaires noirs du Canada, dont l'honorable Jean Augustine, première femme noire à avoir été élue députée au Canada.
    L'un des principaux éléments que je retiens de cet événement est l'importance de l'éducation. Le but premier de la motion est de continuer d'éduquer notre collectivité sur l'histoire et la culture du Canada ainsi que de faire la lumière sur une partie de notre histoire que nous n'avons pas toujours reconnue. La motion nous offre également une occasion unique d'apprendre au sujet des grandes figures noires de notre histoire, des chefs de file communautaires noirs et des pionniers noirs du Canada.
    L'histoire du Jour de l'émancipation va plus loin que l'abolition de la traite des esclaves. Elle doit mettre en valeur l'œuvre des nombreux universitaires, activistes et agents de changement noirs. Nous voulons précisément reconnaître les événements historiques tels que le chemin de fer clandestin, grâce auquel, de 1850 à 1860, des dizaines de milliers d'Afro-Canadiens et d'Afro-Américains ont courageusement échappé à l'esclavage dans le Sud et sont venus se réfugier au Canada. Nous souhaitons reconnaître les abolitionnistes canadiens noirs d'influence ainsi que les chefs de file du milieu culturel tels que Mary Ann Shadd, première femme éditrice de journal au Canada et première éditrice noire en Amérique du Nord.
(1735)
    Mme Shadd a fondé The Provincial Freeman et a été à la tête du journal tout au long de sa publication, de 1853 à 1860. C'était une ardente militante antiesclavagiste. Elle s'est servie de sa plateforme pour faire connaître la culture noire et pour parler de sujets touchant à la politique et aux droits de la personne, comme l'abolition, les droits des femmes et le droit de vote. Elle a par la suite établi une école sans ségrégation dans la ville de Windsor.
    Je tiens aussi à parler de Viola Desmond. Cette entrepreneure de la Nouvelle-Écosse a été arrêtée en 1946 parce qu'elle s'est assise dans une section réservée aux Blancs dans une salle de cinéma. On l'a plus tard accusée de fraude fiscale. Cet incident a été un catalyseur de changement alors qu'elle refusait de se soumettre aux politiques racistes de son époque. Son cas a donné naissance à un mouvement pour la défense des droits civiques en Nouvelle-Écosse et a inspiré une génération de Noirs, en Nouvelle-Écosse et ailleurs au Canada, à lutter pour la justice et les droits de la personne.
    Il faut également reconnaître les Canadiens noirs qui ont joué un rôle déterminant dans l'effort du Canada durant la Première Guerre mondiale. En dépit de la discrimination et des obstacles qui cherchaient à les empêcher de joindre les forces armées, un groupe significatif d'hommes noirs se sont dévoués à l'effort de guerre. Ils ont participé à de multiples combats et assumé de nombreux rôles de soutien.
    Par exemple, nous devrions rendre hommage au 2e Bataillon de construction. Cette unité militaire composée exclusivement de Noirs a creusé des tranchées, désamorcé des mines terrestres, fait des provisions de munitions et retiré les soldats blessés du champ de bataille. La contribution du 2e Bataillon de construction n'a été reconnue que bien plus tard pendant la guerre.
     Comme l'a déjà dit la sénatrice Bernard: « Le Jour de l'émancipation a servi à faire connaître l'histoire et à rendre hommage à la mémoire de ceux qui les ont précédés, ainsi qu'à les guider pour qu'ils reprennent là où leurs ancêtres se sont arrêtés. »
    Depuis que j'ai immigré au Canada, j'ai eu la chance de vivre dans plusieurs circonscriptions diversifiées et multiculturelles comme celle de Richmond Hill. J'ai quand même pu constater les effets du racisme, des préjugés et de la discrimination dans mon quotidien. Je sais que je ne connaîtrai jamais les difficultés que les Canadiens noirs vivent dans la société actuelle, mais en tant qu'alliés, il est de notre devoir de souligner les problèmes qui ont encore un impact sur les communautés noires partout dans le monde et à l'échelle du Canada et de continuer à nous renseigner à leur sujet.
    En juillet, mon bureau a mis sur pied une campagne de médias sociaux sur le thème de la reconnaissance. Cette campagne mettait en valeur des Canadiens noirs qui ont apporté une contribution déterminante à notre société, mais qui sont ignorés dans les livres d'histoire ou dans les salles de classe.
    Je souhaite que cette motion constitue la première étape vers la reconnaissance des lacunes de notre système d'éducation. Elle pourra inciter les intervenants à mettre davantage l'accent sur l'histoire des Noirs et à inclure des récits sur les Canadiens noirs dans les cours d'histoire et d'études sociales.
    Le Jour de l'émancipation invite les Canadiens à faire un peu d'introspection et à éliminer les préjugés et les comportements qui sont liés à l'histoire de l'esclavage et qui expliquent la sous-représentation des Canadiens noirs dans les livres d'histoire, les programmes scolaires et la fonction publique, et parmi les représentants élus. C'est aussi l'occasion d'éliminer les vestiges du racisme institutionnel, de la discrimination et de la surreprésentation des Canadiens noirs dans les établissements correctionnels.
     Le Jour de l'émancipation donne aux Canadiens l'occasion de prendre connaissance de cette réalité et de militer en faveur de la diversité, de l'inclusion et de l'égalité des chances.
    Je tiens à souligner le soutien que m'a accordé ma collègue, la sénatrice Wanda Thomas Bernard, pour l'élaboration de cette motion. C'est grâce à ses conseils essentiels que j'ai pu aborder la motion avec tout le soin et la délicatesse nécessaires. La sénatrice Bernard défend abondamment cette cause et demeure une ardente défenseure des communautés noires du Canada.
(1740)
    Je tiens aussi à remercier, pour leur soutien à cette cause, le député de Hull—Aylmer, président du Caucus des parlementaires noirs, ainsi que les membres de ce caucus multipartite.
    Je tiens à saluer les observations judicieuses faites par des intervenants de la communauté, notamment Rosemary Sadlier de la Royal Commonwealth Society, l'Ontario Black History Society et l'Association canadienne des travailleuses et travailleurs sociaux. C'est en grande partie grâce à leurs conseils et à leur soutien qu'il a été possible d'attirer l'attention sur cet enjeu.
    En l'honneur du Jour de l'émancipation et de la Décennie internationale des personnes d'ascendance africaine de l'ONU, j'invite tous les Canadiens à confronter ensemble l'histoire du racisme et de l'émancipation au Canada afin d'ouvrir la voie à de meilleures possibilités et à une meilleure représentation des personnes marginalisées, un groupe dans lequel les Canadiens noirs sont surreprésentés, tout comme les Premières Nations, les Métis et les Inuits.
    Pour ma part, je continue de militer en faveur d'une société plus inclusive, plus diverse et plus sensible aux questions culturelles, où le Jour de l'émancipation et les origines ancestrales seront représentés et incorporés dans les écoles et les institutions.
    J'espère sincèrement que tous les Canadiens, surtout les députés, exploreront avec moi l'histoire de notre pays et qu'ils célébreront le Jour de l'émancipation dans leur communauté le 1er août prochain. Je prie les députés de soutenir la motion M-36.
    Monsieur le Président, nous vivons un moment vraiment historique. Je remercie le député de Richmond Hill d'avoir poursuivi l'important travail de la toujours honorable sénatrice Wanda Thomas Bernard.
     Dans son discours, nous avons entendu qu'il s'agissait effectivement d'un premier pas. Il s'agit d'un premier pas symbolique, mais d'un premier pas tout de même pour mettre fin au racisme à l'endroit des Noirs. Quelles seraient les prochaines étapes que le député prioriserait, compte tenu de l'occasion qui se présente au gouvernement, pour mettre fin au racisme à l'endroit des Noirs?
(1745)
    Monsieur le Président, le député et moi avons eu l'occasion de travailler ensemble au sein du comité des opérations gouvernementales, mais, plus important encore, aujourd'hui même à la Chambre. Comme l'a mentionné le député, il s'agit du premier pas. Le premier pas d'un long parcours. Ce parcours n'est pas différent des autres parcours entamés par le pays. La reconnaissance constitue le premier pas. J'espère que, une fois que la motion aura été adoptée, cette reconnaissance sera établie pour de bon.
    Comme je l'ai dit, il nous revient, ainsi qu'au gouvernement, de veiller à ce que nous fassions les prochains pas. Il pourrait s'agir d'investir dans d'autres programmes et d'accroître la sensibilisation à leur sujet, par exemple des programmes sociaux ou éducatifs, afin de soutenir la motion.

[Français]

    Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement le discours de mon honorable collègue. Je veux le féliciter pour le dépôt de cette motion. Je pense qu'il y a un consensus autour de celle-ci.
    Franchement, j'ai été touché par les expériences personnelles dont il nous a fait part. Il a lui-même fait face à du racisme. Visiblement, il est très sensibilisé à cette cause. Ma question sera simple.
    Est-ce que l'honorable collègue peut nous dire quels bénéfices cette motion apporterait si elle était adoptée à la Chambre?

[Traduction]

    Monsieur le Président, je crois que la réponse est évidente. Le premier pas de tout parcours, par exemple celui qui mène à la réconciliation, est la reconnaissance et l'acceptation. L'avantage est que ce premier pas a maintenant été fait et que nous pouvons passer au prochain.
    Comme je l'ai dit, mon objectif demeure de combler les lacunes que je constate, soit en matière d'éducation, pour faire en sorte que l'importance de la contribution des Afro-Canadiens, particulièrement à l'édification du Canada, soit bien reflétée, amène une meilleure compréhension au sein de la population du pays et rende ce dernier plus sûr pour les minorités visibles afin de leur permettre de s'épanouir et de trouver la place qui leur revient au sein de la société canadienne.
    Monsieur le Président, c'est un honneur de poser une question au député. Je le remercie d'avoir présenté cette motion. J'aimerais dire officiellement que le Parti vert appuie sans réserve la reconnaissance du Jour de l'émancipation, qui est déjà reconnu dans de nombreux pays dans le monde. Je suis particulièrement heureuse de souligner notre percée historique cette année. En effet, notre nouvelle cheffe, Annamie Paul, est la première femme noire à la tête d'un parti politique fédéral au Canada.
    Que pouvons-nous faire de plus, à titre personnel, en tant que députés? Nous savons que les projets de loi et les motions d'initiative parlementaire peuvent mettre du temps à franchir toutes les étapes du processus législatif à la Chambre. Comment faire en sorte que cette désignation se concrétise avant la fin de la présente législature?
    Monsieur le Président, je suis content d'entendre que la Chambre appuie cette motion à l'unanimité. Cela en dit long sur son importance. À titre personnel, nous pouvons devenir des champions de la lutte contre le racisme et communiquer avec les organismes de notre collectivité et les personnes vulnérables qui sont en difficulté afin de les aider. À la Chambre, nous pouvons appuyer la motion à l'étape de la deuxième lecture.
    Monsieur le Président, j'aimerais simplement complimenter mon collègue du travail fantastique qu'il a déjà accompli en saisissant la Chambre de cette résolution.
    Pourrait-il parler davantage de l'importance de l'éducation dans tout cela?
    Monsieur le Président, j'estime que lorsque quelque chose fait partie du programme scolaire, cela devient un fait établi, c'est officiel. C'est une source dont on peut se servir pour transmettre ce savoir de façon structurée. C'est d'ailleurs pour cette raison que j'ai déterminé que la prochaine étape du processus devrait s'intéresser à l'éducation et à la sensibilisation.
(1750)
    Monsieur le Président, j'aimerais commencer mon intervention un peu différemment en racontant une histoire.
     Imaginons une fillette de sept ans, l'âge de ma fille, dans le Sud des États-Unis dans les années 1830. La vie est dure. On emprunte un chemin de fer dit clandestin pour s'en aller vers le nord. Ce n'est pas un voyage facile où l'on peut simplement acheter un billet, monter à bord et partir. Il faut s'y prendre à la faveur de la nuit. Souvent, il faut voyager à pied. Il faut utiliser des mots de passe, et on craint sans cesse de se faire attraper et remettre en esclavage. Un jour, toutefois, on parvient à atteindre la frontière du Canada, ou plutôt, du Haut-Canada, et à la traverser. On commence à ressentir une lueur d'espoir. On sait qu'on est plus en sécurité qu'on ne l'était auparavant, mais on n'est pas encore prêt à s'arrêter. On continue à voyager jusqu'au poste le plus au nord du chemin de fer clandestin, le village de Sydenham, que l'on connaît aujourd'hui sous le nom d'Owen Sound, qui — j'en suis d'ailleurs très fier — se trouve dans ma circonscription, Bruce—Grey—Owen Sound.
     Si cette fillette doit fuir, c'est tout simplement à cause de la couleur de sa peau. C'est bien triste, mais je suis heureux que le Canada ait un passé si riche et que ma circonscription ait un passé si riche dans le contexte de l'abolition de l'esclavage. Au total, le chemin de fer clandestin a contribué à la libération de 30 000 à 40 000 esclaves. C'était un symbole d'espoir. Il offrait aux Noirs la possibilité de s'installer, d'élever leur famille et de trouver un emploi. Je répète que je suis fier de la circonscription dont je viens.
     Je tiens à remercier le député de Richmond Hill d'avoir présenté cette motion, la motion M-36, poursuivant ainsi l'initiative non pas de la sénatrice Bernard mais bien de l'honorable Deepak Obhrai, qui, en 1999, il y a 21 ans, a présenté le projet de loi d'initiative parlementaire C-282 à la Chambre. Une mesure semblable a ensuite été présentée au Sénat par la bonne sénatrice, qui a tenté, en vain, de la faire adopter. Malheureusement, elle n'y est pas parvenue avant la dissolution du Parlement. Fort heureusement, le député de Richmond Hill a décidé de présenter la motion à l'étude. Je suis d'accord sur ce qu'il a dit tout à l'heure. Je n'ai aucun doute que, lorsqu'elle sera mise aux voix, la motion sera adoptée à l'unanimité à la Chambre.
    Ma circonscription témoigne de quelques-unes des contributions uniques des personnes d'origine africaine à ce grand pays. Cela rejoint aussi le sujet de la motion. Dans la partie la plus au sud de ma circonscription se trouve la municipalité de Priceville. Avant de préparer ce discours, j'ignorais qu'elle avait été nommée ainsi en l'honneur du colonel Price, qui était noir. Encore une fois, cela montre la riche contribution des Noirs tout au long de l'histoire du Canada.
    De même, de 1993 à 2004, ma circonscription a été représentée par l'ancien député Ovid Jackson. À l'époque, Ovid Jackson avait fait les manchettes à l'échelle nationale parce que, bien que ma circonscription ne soit pas aussi diversifiée sur le plan des origines ethniques que certaines circonscriptions situées dans les grands centres urbains, M. Jackson avait été élu, et il était noir. Cela en dit long sur les citoyens de ma belle circonscription. Cela montre non seulement à quel point ils sont justes et équilibrés, mais aussi à quel point M. Jackson était lui-même un homme gentil, intelligent et compétent. Malheureusement, à mon avis, il était membre du mauvais parti, mais c'est une question dont nous parlerons un autre jour.
    Ce qu'il y a d'unique également à propos de ma circonscription, et particulièrement à propos d'Owen Sound ou du village de Sydenham, comme on l'appelait à l'époque, c'est le Festival de l'émancipation d'Owen Sound. Il s'agit du festival qui dure depuis le plus longtemps en Amérique du Nord. Il a commencé en 1862, cinq ans avant que le Canada devienne officiellement un pays, parce qu'Owen Sound, ou le village de Sydenham, voulait souligner l'importance de la loi de 1833 du Commonwealth britannique abolissant l'esclavage, loi qui est entrée en vigueur le 1er août 1834. À ses débuts, le festival prenait la forme d'un pique-nique auquel participaient les premiers colons. On le célèbre sans interruption depuis. Cette loi a libéré plus de 800 000 esclaves dans les colonies britanniques, et ce festival perdure depuis.
    En 2004, un cairn commémoratif a été érigé. J'invite tous les députés de passage dans ma circonscription à venir le visiter.
(1755)
    Il se trouve au parc Harrison, en plein centre-ville d'Owen Sound, et c'est un magnifique cairn où les gens de tous les horizons peuvent aller se recueillir un instant, réfléchir à l'importance et aux contributions des personnes noires à notre pays et se souvenir des défis qu'ils ont dû relever au cours de notre histoire. Il rend hommage aux premiers colons de ma région: les Miller, les Johnson, les Scott, les Green et les Courtney. Leurs descendants reviennent. Ils ne sont pas seulement dans la région, ils reviennent en fait de tout notre grand pays et, j'ose le dire, du monde entier, tous les ans pour participer à cette fête annuelle, qui s'est en fait transformée en un événement de trois jours.
    J'entretiens une relation unique avec Blaine Courtney, qui a déjà été président du Festival de l'émancipation d'Owen Sound et aussi mon entraîneur d'athlétisme quand j'étais adolescent. Blaine et moi nous entendions très bien. Il n'a jamais cessé de me pousser tout le temps à donner le meilleur de moi-même, et je pense en fait que je lui dois, ainsi qu'à tous mes entraîneurs, beaucoup de gratitude pour avoir fait de moi la personne que je suis aujourd'hui. Je pense que c'est beaucoup grâce à eux si j'ai réussi dans ma carrière militaire, en espérant que cela mènera à ma réussite ici, dans ma carrière politique.
     Il y a à peine un an et demi, ma fille et moi avons pris part au festival de 2019, et j'ai éprouvé tellement de fierté quand le crieur public a choisi ma fille pour y participer. Elle a pu faire sonner la cloche, et ce, avec les petites-filles de la sénatrice Bernard. Ce fut une expérience unique. L'une des choses pour laquelle j'ai un peu envié ma fille, c'est qu'elle a fait la une du journal local, l'Owen Sound Sun Times, le plus grand journal de ma circonscription. Quelques mois auparavant, je venais d'être choisi comme candidat conservateur, mais c'est ma fille qui a fait la une du journal, alors qu'on n'a pas du tout mentionné mon nom. Elle a peut-être un avenir en politique si elle le souhaite. Bien sûr, cette année a été légèrement différente. Le festival de 2020 a eu lieu en ligne, mais je dois dire que c'était impressionnant de voir tout le monde se réunir quand même et y contribuer.
    Le musée Grey Roots est un autre élément important de ma circonscription. Ce musée est un trésor de connaissances pour informer les gens, et la motion témoigne de l'importance d'une telle chose. Je crois vraiment que l'avantage fondamental de la présente motion est de garantir que nous n'oublierons jamais et, parallèlement, de renseigner les gens.
    J'ai parcouru le monde à l'époque où j'étais dans l'armée. Je suis allé un peu partout sur la planète, y compris dans ses recoins les plus sombres. J'ai toujours dit que je n'ai encore rencontré personne, quel que soit l'endroit du monde où il vit, qui soit vraiment différent du Canadien moyen. À la base, les gens veulent juste vivre en paix et voir leurs enfants grandir en bonne santé, en sachant qu'ils sont bien nourris et qu'ils peuvent aspirer à un avenir meilleur.
    J'ai côtoyé des gens de toutes les origines et de tous les horizons. Pendant mon instruction militaire, à Chilliwack, j'ai rencontré un type — j'ai oublié son nom de famille, mais je sais qu'il s'appelait Derek et qu'il venait de Montréal. Nous sommes tout de suite devenus les meilleurs amis du monde. Nous étions comme les deux doigts de la main. Nous étions dans la même cohorte à Chilliwack et nous faisions de notre mieux pour ne pas nous mettre dans le pétrin. Il n'a malheureusement pas réussi sa formation, et nous ne nous sommes plus jamais revus. De mon côté, je suis allé au Collège militaire royal, où je me suis lié d'amitié avec des types comme Scott Morrow et Austin Douglas. J'ai fait partie du Royal Canadian Regiment en même temps qu'Austin, d'ailleurs. C'est là que nous avons connu le caporal-chef Raymond Farmer, que je n'oublierai jamais, car il m'a pour ainsi dire servi de garde du corps personnel pendant ma première mission en Afghanistan. Je ne sais pas où est Raymond aujourd'hui. Tous ces hommes sont noirs.
    Je ne peux pas m'imaginer vivre dans un autre pays que le Canada. Nous sommes tellement chanceux, et je suis extrêmement content que nous ayons pu aider concrètement les esclaves à fuir les États-Unis dans les années 1800. Je suis également content que cette motion nous ait été présentée par le député de Richmond Hill. Il s'agit d'un bon moyen de célébrer la contribution des personnes d'ascendance africaine à notre beau et grand pays. Il s'agit aussi d'un bon moyen de sensibiliser les gens à leur réalité et de souligner tout ce qu'ils font encore aujourd'hui pour la société. Voilà le Canada dans lequel je veux voir ma fille grandir et dont je suis si fier.
(1800)

[Français]

    Monsieur le Président, dans un premier temps, j'aimerais remercier mon honorable collègue de son discours et de son amitié, qu'on peut clairement voir aujourd'hui.
    Je vais parler de la motion M-36 visant à instituer le Jour de l'émancipation. Mon collègue parlait d'éducation, alors je profiterai de ce moment pour faire un retour en arrière, car il n'y a rien de mieux que de savoir d'où on vient pour savoir où on s'en va. Je vais donner quelques faits historiques.
     Selon l'Encyclopédie canadienne, l'abolition de l'esclavage dans l'Empire britannique commence par le Décret pour l’abolition de l’esclavage dans les colonies britanniques pour le développement du travail des esclaves émancipés et pour indemniser les personnes ayant droit aux services de ces esclaves, aussi connu comme la loi de l’abolition de l’esclavage. Le député en a parlé tantôt. Cette loi reçoit l'assentiment royal le 28 août 1833 et entre en vigueur en août 1834.
    Cette loi abolit l'esclavage dans la plupart des colonies britanniques et libère ainsi les 800 000 esclaves africains se trouvant dans les Caraïbes, en Afrique du Sud et au Canada. Cependant, dans les colonies Est du Bas-Canada, désormais le Québec, de la Nouvelle-Écosse et du Nouveau-Brunswick, les efforts abolitionnistes restent sans succès.
    En 1793, par exemple, le député Pierre-Louis Panet présente un projet de loi à l'Assemblée nationale pour abolir l'esclavage dans le Bas-Canada, mais celui-ci est sans cesse remis à plus tard et ne fait finalement jamais l'objet d'un vote. Ce sont plutôt les contestations judiciaires individuelles, soulevées pour la première fois vers la fin des années 1700, qui ébranlent l'institution de l'esclavage dans ces régions.
     D'ailleurs, un cas important se produit en février 1798, lorsqu'une esclave nommée Charlotte est arrêtée à Montréal et refuse de retourner à sa propriétaire. Elle est menée devant un juge de la Cour du banc du roi, James Monk, qui sympathise avec le mouvement abolitionniste. Il la fait relâcher en raison d'une formalité juridique.
    En effet, selon la loi britannique, les esclaves ne peuvent être détenus que dans des maisons de correction et pas dans des prisons communes. Comme il n’existe aucune maison de correction à Montréal, Charlotte ne peut y être détenue. Elle et une autre esclave appelée Judith sont donc libérées l’hiver même. Le juge Monk indique dans sa décision qu’il a l’intention d’appliquer son interprétation de la loi à tous les cas similaires.
    D'ailleurs, la Nouvelle-France n'a pas non plus échappé à l'esclavage. Bien qu'ils soient datés, c'est grâce aux travaux pionniers de l'historien Marcel Trudel que nous en savons autant sur l'esclavage au Québec. Ce dernier a recensé au total 4 185 esclaves pour la période allant du XVIIe siècle jusqu'en 1834. De ce nombre, les trois quarts furent des esclaves autochtones. Ainsi, la traite a pris des proportions différentes. La proportion d'esclaves autochtones, les Panis, était plus grande que celle d'esclaves afrodescendants. En 1759 — cela fait beaucoup de dates, mais il faut s'en souvenir —, on dénombrait 1 100 esclaves noirs au Canada, vers la fin de la guerre de Sept Ans. C'est épouvantable.
(1805)
    Évidemment, on ne peut pas parler d'esclavage sans parler de la jeune Marie-Josèphe-Angélique, née en 1710 et pendue en 1734. Dans leur livre Elles ont fait l'Amérique, l'anthropologue Serge Bouchard et Marie-Christine Lévesque ont contribué à faire connaître l'histoire de Marie-Josèphe Angélique à un large public. Son histoire est le premier cas répertorié de résistance à l'esclavage dans l'histoire du Québec et du Canada.
    Évidemment, en 2020, nous convenons que l'esclavage est une activité profondément injuste. Malheureusement, ça n'a pas toujours été le cas au cours de l'histoire. Ce n'est qu'au XIXe siècle que l'esclavage a peu à peu été aboli.
    Bien que le Bloc québécois soit en faveur de cette motion, il aurait peut-être été judicieux que la motion souligne davantage l'agentivité des esclaves dans le processus de l'abolition de l'esclavage. Que veut dire agentivité? C'est la capacité des acteurs historiques, notamment les opprimés, à agir sur le monde, à le transformer et à l'influencer pour le mieux, au lieu de simplement le subir.
    En effet, la motion semble accorder un rôle tout puissant au parlement britannique dans l'abolition de l'esclavage comme si c'était un cadeau du ciel que les parlementaires anglais auraient accordé aux esclaves des quatre coins de l'empire. Or, la réalité historique est beaucoup plus complexe. Il faut rappeler dans quel contexte l'esclavage a été aboli. La proclamation de l'émancipation n'est que l'aboutissement d'un processus historique dont les esclaves furent partie prenante.
    Jusqu'à maintenant, nous avons eu une lecture de l'histoire qui a attribué aux seuls abolitionnistes libéraux le mérite d'avoir mis fin à ce système injuste. Or, dans un ouvrage assez récent intitulé Plus jamais esclaves! De l'insoumission à la révolte, le grand récit d'une émancipation 1492-1838, l'historienne russe Aline Helg démontre l'agentivité des esclaves, c'est-à-dire que ceux-ci ont été les artisans de leur propre libération.
    Afin d'appuyer sa position, elle écrit, par en bas, l'histoire dans laquelle elle analyse les différentes révoltes et stratégies d'émancipation adoptées par ces esclaves dans les Amériques entre 1492 et 1838. De quelle façon les esclaves ont-ils été les agents de leur propre libération? Par le biais du marronage, de l'affranchissement légal, de l'engagement militaire et de la révolte. Il ne faut pas l'oublier.
    Cette motion s'inscrit également dans le sillage de la Décennie internationale des personnes d'ascendance africaine des Nations unies, dont le thème est « Personnes d'ascendance africaine: reconnaissance, justice et développement ». En proclamant cette décennie ici, la Chambre des communes se distinguera comme à l'avant-plan dans la reconnaissance, la justice et le développement des personnes d'ascendance africaine comme groupe ayant des droits devant être promus et protégés. Il faut le dire clairement ici dans les institutions démocratiques de tous les citoyens.
    C'est pourquoi la lecture de cette motion qui reconnaît les faits historiques et qui s'inscrit également dans le sillage de cette décennie internationale souligne la contribution des afro-descendants aux sociétés québécoise et canadienne et rappelle l'existence de l'esclavage au Canada par une journée nationale de commémoration.
    Évidemment, le Bloc québécois votera en faveur de cette motion. Je prends quelques secondes pour saluer notre cher maire noir dans ma circonscription, Laurentides-Labelle, qui a été au pouvoir pendant 14 ans. Il n'y en avait que deux au Québec. Je salue pour ses 14 ans M. Michel Adrien, parce que...
    M. Sébastien Lemire: Et Ulrick Chérubin.
    Mme Marie-Hélène Gaudreau: Oui, évidemment, il y avait aussi M. Ulrick Chérubin à Amos, dans la circonscription de mon honorable collègue.
    En terminant, l'histoire des personnes noires, c'est notre histoire.
(1810)

[Traduction]

    Monsieur le Président, j'ai souvent eu le privilège de prendre la parole à la Chambre, mais je ne me suis peut-être jamais considéré aussi privilégié de pouvoir le faire qu'aujourd'hui. Tout d'abord, je dois dire que 10 minutes sont loin de suffire pour rendre hommage à la vie et au vécu des descendants de la traite des esclaves africains.
    Je tiens à remercier encore une fois le député de Richmond Hill d'avoir, motivé par son dévouement pour la justice et la juste reconnaissance, présenté de nouveau cette motion d'une importance capitale. Il attire l'attention sur le travail de la toujours honorable sénatrice Wanda Thomas Bernard, qui compte en effet parmi les personnes d'origine africaine les plus érudites et éminentes au Canada.
    Comme beaucoup de Canadiens noirs et racialisés, on me demande souvent d'où je viens. Lorsque je réponds que je suis Canadien, on me demande alors d'où viennent mes parents, d'où viennent mes grands-parents. Je continue de répondre que je suis Canadien. Mes ancêtres sont ici depuis six générations. Dans son intervention tout à l'heure, le député a mentionné au passage que les Green étaient l'une des familles fondatrices de la colonie qui est maintenant Owen Sound. En effet, et ce que je représente maintenant, mes ancêtres auraient seulement pu l'imaginer dans leurs rêves les plus fous.
    Parmi mes premiers souvenirs de famille, il y a notre voyage annuel au parc Harrison, à Owen Sound, et c'est un souvenir que je partage avec le député qui représente cette région. C'est à cet endroit que nous faisions un pique-nique avec ma famille élargie et que j'ai pris l'habitude de célébrer le Jour de l'émancipation. C'est un jour où nous commémorons un fait historique qui remonte à 1862, soit avant la Confédération canadienne.
    Je suis ici pour rendre hommage à la Moïse noire, Harriet Tubman, qui a échappé aux conditions abjectes et brutales de l'esclavage dans le Sud et qui a risqué sa vie en suivant l'étoile du Nord et le chemin de fer clandestin à la recherche de la terre promise. Cette femme exceptionnelle à l'esprit militaire était dotée d'un sens du leadership dont tout le monde serait fier. Mes ancêtres qui ont suivi cette étoile du Nord, probablement en partant de la région qu'on appelle aujourd'hui le Maryland, ont dû voyager pendant des jours dans des contrées sauvages.
    Nous avons entendu aujourd'hui comment les esclaves ont été présentés par le passé, et j'aimerais apporter des précisions. Étant donné l'éducation que j'ai reçue dans ma jeunesse, j'aurais pu dire que je suis fils d'esclaves en fuite. C'est évidemment faux. Le contexte est très problématique, car ces gens étaient non pas des esclaves, mais des personnes qui avaient été réduites en esclavage.
    Ce sont des gens qui ont survécu à la traite transatlantique des esclaves et qui ont abouti dans des colonies où ils ont souffert de conditions parmi les plus abjectes qu'un humain puisse endurer, pendant le chapitre le plus sombre de l'histoire des États-Unis d'Amérique, et ils ont survécu malgré cela. Ce sont eux qui ont tout risqué pour suivre le chemin de la liberté, et ce sont eux qui nous enseigneront aujourd'hui ce qu'est l'émancipation.
    Les livres d'histoire nous enseignent qu'on nous a donné la liberté. Je cite le grave avertissement lancé par la Moïse noire, Harriet Tubman: « Si vous entendez les chiens, continuez. Si vous voyez les torches dans les bois, continuez. Si on crie après vous, continuez. N'arrêtez jamais. Continuez. Si vous voulez goûter à la liberté, continuez. »
    Dans notre classe collective, les manuels d'histoire omettent une triste réalité. Il y a des choses que j'ai dû découvrir moi-même. La députée a raison d'affirmer qu'il faut changer le système d'éducation. C'est dans un ouvrage de Daniel Hill Sr. que j'ai appris être en fait le descendant d'esclaves en quête de liberté. Je m'en voudrais de ne pas souligner que la motion énonce clairement des faits de l'histoire canadienne et que le Parlement britannique a aboli l'esclavage dans l'Empire britannique le 1er août 1834.
(1815)
    Elle reconnaît également que l'esclavage existait dans l'Amérique du Nord britannique avant son abolition en 1834, ce qui est une reconnaissance claire que la Couronne britannique participait activement à la traite des personnes et à l'esclavage de la diaspora africaine, et en profitait.
    Où le gouvernement libéral reconnaît-il une telle chose? Où présente-t-il des excuses officielles aux descendants des esclaves africains?
    Nous avons déjà entendu parler des abolitionnistes et d’autres gens qui ont participé à cette lutte, comme on le mentionne au point c) de la motion, et il est vrai qu'à l'époque, des hommes de foi, des gens de foi, des quakers entre autres, ont tout risqué pour offrir un asile aux esclaves en quête de liberté. Mes ancêtres ont été les premiers à trouver refuge dans ces terres. Il y a lieu de se demander ce que l'on est prêt à sacrifier pour que d'autres jouissent de la liberté, sans discrimination, sans brutalité policière et sans aucun obstacle systémique.
    Aujourd'hui, le gouvernement fait face à un recours collectif présenté par la fonction publique. Il faut absolument contextualiser ce que signifie l'émancipation. Je pense souvent aux réfugiés qui ont cherché asile au chemin Roxham.
    Quand le gouvernement du Canada annonce la Décennie internationale des personnes d'ascendance africaine pour souligner d'importantes contributions et pour fournir une plateforme où confronter le racisme envers les Noirs, c'est l'occasion parfaite pour que le premier ministre reconnaisse clairement leur contribution et pour qu'il procède à des réparations pour le déplacement forcé d'anciennes communautés noires, d'Africville à Hogan's Alley, en passant par toutes les autres.
    C'est vrai que nous nous rassemblons pour fêter la beauté profonde de mon peuple et pour célébrer notre liberté, notre libération et les luttes collectives de nos ancêtres. Je terminerai en citant le travail des abolitionnistes contemporains de notre époque, ceux qui se sont ralliés au mouvement Black Lives Matter du Canada, dont les membres, les membres fondateurs, les abolitionnistes de notre époque ont écrit leur œuvre majeure, le livre Until We are Free par Black Lives Matter Toronto, et qui ont consacré leur vie — et pour qui je consacre la mienne — à une émancipation véritable et durable. Il y est écrit « Pour nos ancêtres, dont nous poursuivons la lutte jusqu'à ce que nous soyons libres. Pour nos aînés, dont nous poursuivons la lutte jusqu'à ce que nous soyons libres » et j'ajouterai ceci: pour les futures générations qui continuent de lutter pour notre libération et notre émancipation collectives, pour nos enfants et leurs enfants, jusqu'à ce que nous soyons libres.
    Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui au sujet de la motion no 36, qui demande au gouvernement de faire du 1er août de chaque année le Jour de l’émancipation au Canada.
     La motion no 36 reconnaît que le Parlement britannique a aboli l'esclavage dans l'Empire britannique le 1er août 1834, et que l'esclavage existait en Amérique du Nord britannique avant son abolition en 1834. En fait, Olivier Le Jeune est considéré comme étant le premier esclave africain à habiter la Nouvelle-France dans les années 1600. Le nom de naissance d'Olivier n'est pas connu, car il a été enlevé d'Afrique lorsqu'il était un jeune enfant et s'est éventuellement fait donner le nom du prêtre qui l'a acheté.
    C'est le 1er août 1834 que la Loi sur l'abolition de l'esclavage est entrée en vigueur et a mis fin à l'esclavage dans l'Empire britannique et, par conséquent, au Canada. Toutefois, la première colonie de l'Empire britannique à se doter d'une loi contre l'esclavage est le Haut-Canada, aujourd'hui l'Ontario. Malheureusement, la loi de 1793 visant à abolir l'esclavage n'a pas permis de libérer un seul esclave. Elle a été remplacée par la Loi sur l'abolition de l'esclavage.
    Pour mieux comprendre la loi de 1793 visant à abolir l'esclavage, il nous faut aborder l'histoire de Chloe Cooley. Chloe était une jeune femme noire soumise à l'esclavage à Fort Erie à la fin des années 1700. Son propriétaire l'a obligée à traverser la rivière Niagara à bord d'un bateau pour la vendre aux États-Unis. On croit que cet incident aurait mené à l'adoption de la loi de 1793 dans le Haut-Canada visant à empêcher l'importation d'esclaves dans la province.
    Même si la Loi sur l'abolition de l'esclavage a mis un terme à l'esclavage dans les colonies britanniques, elle n'a pas mis un terme à cette pratique dans les États américains du Sud. Jusqu'à 40 000 esclaves afro-américains dans le Sud des États-Unis ont tenté de s'enfuir pour recouvrer leur liberté dans les États du Nord ou au Canada.
    C'est à ce moment que le chemin de fer clandestin a fait son apparition. Ce n'était pas du tout un chemin de fer, mais bien un réseau clandestin complexe formé notamment de Noirs, d'autres esclaves, de sympathisants blancs ou autochtones, de quakers, de méthodistes, de baptistes, d'agriculteurs, d'Américains et de Canadiens, qui offraient un lieu de refuge aux hommes, aux femmes et aux enfants soumis à l'esclavage dans les plantations du Sud et qui les aidaient à se rendre dans le Nord pour retrouver leur liberté.
    Seulement entre 1850 et 1860, jusqu'à 20 000 esclaves sont arrivés au Haut-Canada, qui est devenu la principale destination du chemin de fer clandestin. Les Canadiens noirs ont contribué au développement de solides communautés et à celui des provinces où ils s'étaient installés. Certains vivaient dans des colonies peuplées exclusivement de Noirs, comme Elgin, Buxton, Queen's Bush et la colonie de Dawn, près de Dresden, en Ontario, ou Birchtown et Africville en Nouvelle-Écosse.
    Ils ont cultivé la terre, construit des maisons et élevé leur famille. Les Noirs ont établi des institutions religieuses, sociales et culturelles, des groupes politiques et des organismes de développement communautaire. Signalons aussi la création de deux journaux: The Voice of the Fugitive, fondé par Mary et Henry Bibb, et The Provincial Freeman, fondé par Mary Ann Shadd Cary, première femme noire à devenir rédactrice en chef d'un journal en Amérique du Nord.
    Au fil des ans, les Canadiens noirs se sont butés à différents types de discrimination. Ils étaient souvent relégués à des postes particuliers et se voyaient refuser le droit de vivre à certains endroits en raison de leur race. Les parents étaient forcés d'envoyer leurs enfants dans des écoles réservées aux Noirs situées dans certaines régions de l'Ontario et de la Nouvelle-Écosse. C'est ce que les historiens appellent la « ségrégation résidentielle ».
    Les personnes d'origine africaine ont façonné le patrimoine et l'identité du Canada depuis l'arrivée du navigateur et interprète Mathieu Da Costa, au début des années 1600. On n'a toutefois pas toujours reconnu à sa juste valeur le rôle essentiel qu'elles ont joué.
    Inspirés par ces récits de courage et de résilience, les Canadiens noirs d'un passé un peu moins lointain ont apporté d'énormes contributions à notre société. Je pense à un certain nombre de personnalités marquantes: Violet King, de l'Alberta, la première avocate noire du Canada; Gloria Baylis, qui a gagné en 1965 la toute première affaire sur la discrimination raciale en milieu de travail au Canada et qui a fondé la Baylis Medical Company; Fergie Jenkins, de Chatham, en Ontario, l'un des meilleurs lanceurs à avoir joué dans la Ligue majeure de baseball, qui a remporté le trophée Cy Young en 1971 et qui est devenu le premier Canadien à être intronisé au Temple de la renommée du baseball, à Cooperstown, dans l'État de New York, en 1991; Édouard Anglade, le premier agent noir, et le seul pendant plusieurs années, du service de police de Montréal.
(1820)
    Sur une note très personnelle, dans mes cours d'histoire à l'école secondaire à Toronto, je n'ai pas vu mon histoire. Les livres d'histoire ne m'incluaient pas. On aurait dit que l'histoire noire avait été effacée. Toutes ces années plus tard, des dizaines d'années plus tard, ma fille de 16 ans n'a toujours pas accès à ce que je souhaitais avoir. Elle ne se reconnaît pas dans les livres qu'elle étudie.
    Aujourd'hui, je dis aux députés que l'histoire des Noirs fait partie de l'histoire du Canada.
(1825)
    Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir prendre la parole sur cette importante motion qu'a présentée mon ami et collègue à la Chambre. Je ne pense pas être en mesure de prononcer un discours aussi éloquent que ceux que nous avons entendus durant la dernière heure; ces discours venaient du cœur et ils étaient prononcés avec passion et enthousiasme. J'ai néanmoins quelques idées à partager.
    Le député néo-démocrate a parlé de générations. Je crois l'avoir entendu dire que sa famille remontait à huit générations. Cela m'a fait penser à quelque chose. Il y a longtemps, je dirais il y a 20 à 25 ans, j'étais à l'Hôtel Victoria. Il y avait une femme noire debout à côté de moi, et un homme blanc s'est approché d'elle et lui a demandé: « Depuis combien de temps êtes-vous au Canada? » Même si la question se voulait innocente, je soupçonne qu'elle n'aurait pas été posée du tout si la femme avait été blanche.
    Je pense que nous n'avons pas fait un très bon travail en matière d'éducation et de sensibilisation aux différences culturelles. C'est pourquoi j'ai fait valoir l'importance de ces choses-là auprès de mon bon ami. Tout progrès passe par l'éducation, et je ne parle pas seulement des salles de classe. Je parle également des moyens de rejoindre la population active, les collectivités entières. Il y a quelques années, le Conseil interculturel du Manitoba a dit que, pour combler de telles lacunes, il fallait des programmes de sensibilisation aux différences culturelles. J'ignore si le conseil existe encore aujourd'hui.
    Je pense que Hollywood a raconté et fait connaître beaucoup d'histoires intéressantes au fil des ans. Je suis très ému lorsque je regarde certaines des vidéos que j'ai achetées. Par exemple, j'ai un coffret de la série Roots. On ressent toutes sortes d'émotions lorsqu'on regarde la série, mais surtout, de la colère à l'idée qu'une société puisse traiter les gens de la sorte; c'est impensable.
    La façon dont William Wilberforce a été représenté dans le film Amazing Grace, qui porte sur l'abolition de l'esclavage dans le Commonwealth britannique, est très pertinente au débat que nous avons aujourd'hui. Toutefois, comme ma collègue qui a parlé juste avant moi y a fait allusion en mentionnant sa fille, cet aspect important de notre patrimoine canadien n'est pas du tout enseigné aux jeunes et ne reçoit pas l'attention qu'il mérite.
    Je suis très fier de l'attitude générale adoptée par les parlementaires quand nous parlons, par exemple, du Caucus des parlementaires noirs, ainsi que des efforts déployés pour attirer davantage l'attention sur le problème du racisme systémique, qui existe bel et bien. Il s'agit d'un problème bien réel et concret qui fait souffrir beaucoup de Canadiens partout au pays.
    L'objectif de cette motion est fort louable et doit être mis en place. Je soupçonne que lorsque la motion sera débattue et mise aux voix, elle sera adoptée par la Chambre, car une telle motion s'imposait depuis longtemps.
(1830)
    Cela sera une étape importante, mais nous reconnaissons que nous devons en faire bien davantage. Je pense que tous les députés, qu'ils soient ministériels ou de l'opposition, sont déterminés à déployer de tels efforts de diverses façons. Quel que soit le rôle qu'ils jouent à la Chambre, on s'attend beaucoup à...
    Il va falloir qu'on s'arrête là pour l'instant, mais il restera quatre minutes et demie au député de Winnipeg-Nord lorsque la Chambre reprendra le débat sur la motion.
    La période réservée à l'étude de cette initiative parlementaire est maintenant écoulée et l'article retombe au bas de la liste de priorité du Feuilleton.
    Comme il est 18 h 30, conformément au paragraphe 37(7) du Règlement, la Chambre passe maintenant à l'étude du projet de loi C-230, sous la rubrique des affaires émanant des députés.

Loi sur la stratégie nationale visant à remédier au racisme environnemental

    , avec l'appui de la députée de Saanich—Gulf Islands, propose que le projet de loi C-230, Loi concernant l’élaboration d’une stratégie nationale visant à remédier au racisme environnemental, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
    — Monsieur le Président, comme l'a dit Vanessa Gray de la nation Aamjiwnaang de l'Ontario: « La terre est notre mère, et donc si la terre perd sa valeur à nos yeux, les femmes y perdent également leur valeur. » Je suis tout à fait d'accord. Je suis également fermement convaincue que, à l'instar du racisme systémique, le racisme environnemental est une réalité que l'on néglige depuis beaucoup trop longtemps. Le temps est venu pour nous de poser des gestes pour remédier aux problèmes du passé et y mettre un terme une fois pour toutes. Il ne fait aucun doute que l'accès à de l'air, de l'eau et une terre propres devrait être un droit fondamental pour tous les Canadiens.
    J'ai été sensibilisée au racisme environnemental pour la première fois il y a cinq ans, quand j'ai rencontré Mme Ingrid Waldron, professeure à la faculté des sciences infirmières de l'Université Dalhousie, dans un café à Halifax près de l'assemblée législative provinciale, où je travaillais en tant que députée. Mme Waldron m'expliquait ce que nous apprennent sa recherche et les données qu'elle avaient recueillies à propos de la réalité du racisme environnemental en Nouvelle-Écosse.
    J'ai dit qu'élaborer un projet de loi pour s'attaquer au problème pourrait être utile à ce moment-là afin de sensibiliser la population et d'attirer l'attention du gouvernement de la Nouvelle-Écosse. Pendant plusieurs semaines, Mme Waldron et moi avons travaillé ensemble sur mon tout premier projet de loi d'initiative parlementaire, le projet de loi no 111, la loi de prévention du racisme environnemental, que j'ai présenté à Province House en 2015.
    Plus tard, Mme Waldron a écrit un livre intitulé There's Something in the Water, qui souligne le racisme environnemental dans les communautés noires et autochtones en Nouvelle-Écosse. Récemment, elle s'est associée à l'acteur néo-écossais Elliot Page pour réaliser en 2019 un documentaire inspiré de son livre.
    Il y a un an, quand je suis arrivée à Ottawa comme députée, ma priorité était de présenter un projet de loi semblable, mais, cette fois-ci, en tant que stratégie nationale, afin de lutter contre le racisme environnemental partout au pays. Par conséquent, la portée du projet de loi C-230 est plus large et plus globale que mon projet de loi provincial initial.
    Le projet de loi C-230 permettrait de recueillir des données, notamment sur la situation socioéconomique des communautés touchées par le racisme environnemental au Canada et sur les effets physiques et mentaux du racisme environnemental sur ces communautés. Les effets sont très variés. Ils vont des éruptions cutanées et des maux d'estomac à des affections plus graves, telles que les maladies respiratoires comme l'asthme, les maladies cardiovasculaires, la morbidité reproductive comme les naissances prématurées et les bébés trisomiques, ainsi que les cancers qui touchent les femmes de manière disproportionnée. Il est prouvé que de nombreuses maladies chroniques dans les communautés autochtones, par exemple, ne sont pas principalement attribuables à la génétique ni à des facteurs internes, mais plutôt à des facteurs externes, tels que les polluants qui se trouvent dans l'air, dans l'eau et dans l'environnement.
    Je remercie personnellement la députée de Saanich—Gulf Islands d'avoir appuyé le projet de loi C-230. Je pense que c'est un exemple de ce que les Canadiens veulent vraiment voir de la part de leur gouvernement, surtout en ces temps dangereux; ils veulent que les parlementaires travaillent ensemble.
    Je remercie David Suzuki et la Fondation David Suzuki, le mouvement Bleu Terre et le projet ENRICH de leur soutien et de leur appui à ce projet de loi essentiel. Je remercie aussi Mme Ingrid Waldron de sa passion, de son dévouement, de ses recherches, de son étude assidue et de son consentement à me prêter ses notes ce soir, car tout le monde doit prendre conscience du racisme environnemental et de ses effets sur les communautés racialisées.
    En tant que députée de Cumberland—Colchester, je tiens à expliquer ce qu'est le racisme environnemental. Il s'agit du nombre disproportionné d'Autochtones, de Noirs et autres personnes racialisées qui vivent à proximité d'industries polluantes et d'autres risques environnementaux, ainsi que de la plus grande exposition de ces communautés à ces dangers. Ces éléments toxiques ont été liés à des taux élevés de cancer, comme je l'ai dit, et à d'autres problèmes de santé dans ces communautés.
    De la décision, il y a une soixantaine d'années, de décharger les effluents des usines de pâte à papier dans le port pour embarcations jadis vierge de la Première Nation de Pictou Landing et dans les décharges et dépotoirs toxiques situés dans les communautés néo-écossaises d'origine africaine de Shelburne, Lincolnville et Africville à la contamination au mercure dans la Première Nation de Grassy Narrows, en passant par les installations pétrochimiques dans la vallée des produits chimiques de l'Ontario et en Colombie-Britannique, l'héritage du racisme environnemental ne peut plus être ignoré.
(1835)
     Le projet de loi C-230 demande au ministre de l'Environnement et du Changement climatique d'élaborer une stratégie qui prévoit des mesures visant à:
    a) examiner le lien entre la race, le statut socioéconomique et le risque environnemental;
b) recueillir des renseignements et des statistiques concernant l’emplacement de dangers environnementaux;
c) recueillir des renseignements et des statistiques concernant les problèmes de santé dans les collectivités touchées par le racisme environnemental;
d) évaluer l’exécution et le contrôle d’application des lois environnementales dans chaque province;
e) s’attaquer au racisme environnemental, notamment en ce qui a trait aux éléments suivants:
    (i) les modifications possibles aux lois, politiques et programmes fédéraux,
(ii) la participation de groupes locaux dans l’élaboration des politiques en matière d’environnement,
(iii) l’indemnisation des particuliers ou des collectivités,
(iv) le financement continu des collectivités touchées,
(v) l’accès des collectivités touchées à de l’air pur et de l’eau propre.
    Je soutiens que les femmes noires et autochtones créent, depuis des décennies, des mouvements populaires voués à l'environnement et à la justice sociale dans le but de contester les programmes juridiques, politiques et commerciaux qui sanctionnent et facilitent le racisme environnemental et d'autres formes de violence coloniale dans leurs communautés. La violence sexiste et coloniale existe toujours. Pensons par exemple à la crise entourant les femmes et les filles autochtones assassinées ou portées disparues, aux peuples autochtones chassés de leurs terres par les projets d'extraction de ressources d'une entreprise, à la violence policière à l'endroit des Noirs et des Autochtones, et à d'autres types de violence sanctionnés par l'État qui font que les Autochtones, les Noirs et les femmes ont du mal à répondre à leurs besoins fondamentaux en matière d'emploi, de revenus, de soins de santé et d'autres ressources.
    La colonisation et le génocide sont liés aux corrélations entre les terres et les corps autochtones. Les femmes sont victimes de violence parce que ce sont elles qui sont chargées de prendre soin des terres pour les générations futures. Par conséquent, la violence faite aux femmes nuit aussi aux nations, ce qui facilite la prise de possession des terres.
    Pour les femmes autochtones en particulier, la production et la reproduction, la terre et la vie, la résistance et la survie sont toutes intimement liées. Il n'existe aucune séparation. Par conséquent, en luttant contre le racisme environnemental, en défendant leurs terres et territoires et en protégeant leurs eaux, les Autochtones résistent à l'oppression fondée sur le sexe.
    Que veut-on dire exactement par « racisme environnemental »? Comment définissons-nous cette notion?
    Comme je l'ai dit, c'est une forme de discrimination raciale, qui fait référence au nombre disproportionné d'Autochtones et de personnes racialisées qui, parce qu'ils vivent à proximité d'industries polluantes et d'autres risques environnementaux, sont plus grandement exposés à la contamination et à la pollution. Le racisme environnemental, c'est aussi le fait que ces communautés ne possèdent pas suffisamment de pouvoir politique pour résister à l'installation de pollueurs industriels sur leur territoire, la mise en œuvre de politiques qui autorisent la présence nocive et, dans bien des cas, potentiellement mortelle de poisons dans ces communautés, les répercussions négatives disproportionnées des politiques environnementales qui donnent lieu à des différences dans les taux de nettoyage des contaminants environnementaux dans ces communautés, et l'habitude d'exclure les Autochtones et les personnes racialisées des grands groupes environnementaux, des conseils décisionnaires, des commissions, des organismes de réglementation et du mouvement féministe.
    En ce qui a trait aux répercussions pour la santé du racisme environnemental au Canada, elles incluent, comme je l'ai dit, toute une gamme de maladies graves. Des études nous fournissent des preuves que les répercussions du racisme environnemental sur la santé sont à la fois sexospécifiques et racialisées et qu'elles touchent les femmes autochtones de façons bien précises, notamment en ce qui a trait à leur santé génésique. Une des façons les plus importantes dont le racisme environnemental touche les femmes autochtones précisément est par les effets néfastes sur la santé des contaminants toxiques, comme des taux élevés de toxines dans le lait maternel, le placenta, le sang de cordon ombilical, le sérum sanguin, et le gras corporel ainsi que l'infertilité, les avortements spontanés, les accouchements prématurés, la ménopause prématurée, les cancers du système reproductif et l'incapacité d'avoir des enfants en santé à cause des systèmes endocrinien et immunitaire compromis in utero.
    Ce projet de loi, le projet de loi C-230, est important. Pourquoi? Parce qu'il jouerait un rôle important pour trouver une solution aux problèmes découlant de l'héritage de racisme environnemental au Canada et parce qu'il garantirait que les collectivités visées aient accès à un air et une eau propres, auxquels tous les Canadiens ont droit.
(1840)
    Cela contribuerait aussi à régler les iniquités en matière de santé environnementale qui affligent les communautés autochtones et noires, parce qu'elles sont situées à proximité de sites contaminés et pollués.
    C'est aux détenteurs du pouvoir, et non à ceux qui sont touchés par le racisme environnemental, qu'il incombe de s'attaquer au problème. Ceux qui ont le plus d'influence et une voix plus forte doivent faire partie de la solution. Il importe que toutes les communautés aient le pouvoir de contrôler leur environnement. À l'heure actuelle, les communautés autochtones, noires et racialisées, c'est-à-dire non blanches, n'ont pas ce pouvoir. Elles n'ont pas voix au chapitre en ce qui concerne ce qui se passe dans leurs collectivités et nous en pâtissons tous.
    Le projet de loi C-230 s'attaque à ce déséquilibre des pouvoirs et profite à tout le monde. Il est bénéfique pour nous tous. Il est bon pour le Canada. Il donne la possibilité aux communautés les plus touchées par le racisme environnemental de participer à l'élaboration de politiques environnementales.
    Selon un habitant de Lincolnville, en Nouvelle-Écosse, qui est mentionné dans l'ouvrage de Mme Waldron, There's Something in the Water, les membres de la communauté ont vu leur état de santé se détériorer depuis la création du premier site d'enfouissement dans la localité en 1974, y compris une incidence accrue du cancer et du diabète.
    Cette personne a aussi raconté ce qui suit:
     « Si on se penche sur la santé de la communauté avant 1974, c'est-à-dire avant l'aménagement du site d'enfouissement, il semble qu'elle était meilleure. À partir de 1974 jusqu'à aujourd'hui, nous avons remarqué que la santé de notre population semble s'être détériorée. On dirait que les membres de notre communauté meurent plus jeunes. Ils développent différents types de cancer que nous n'avions jamais entendu parler avant 1974. Le taux de cancer de l'estomac semble être à la hausse [...] Les gens se retrouvent avec des tumeurs. Nous n'avons aucune idée de ce qui en est la cause. La Municipalité affirme qu'il est impossible que le site d'enfouissement nous affecte. Pourtant, si les sites d'enfouissement dans d'autres régions ont des répercussions sur la santé des gens, n'est-il pas logique de penser que celui qui est situé tout près de notre communauté nuit aussi à notre santé? »
    Il n'y a peut-être pas d'exemple plus classique et symbolique de communauté afro-canadienne ayant subi l’embourgeoisement et le racisme environnemental qu'Africville, l'ancienne communauté noire sur les rives du bassin de Bedford.
    En 1965, la Ville d'Halifax s'est lancée dans une campagne de réaménagement urbain qui a entraîné le déplacement forcé des résidants d'Africville. La région a alors accumulé les dangers sociaux et environnementaux, comme une usine de fabrication d'engrais, un abattoir, une usine de goudron, une usine de concassage de charbon et de pierres, une usine de coton, une prison, trois réseaux de chemins de fer et un dépotoir à ciel ouvert.
    Je demande à tous les députés d'appuyer ce projet de loi. Faisons œuvre de pionniers. Franchissons ce pas dont nous pourrons tous être fiers et faisons-le pour les Canadiens.
(1845)
    Je vois que beaucoup de députés souhaitent participer à la période des questions et observations. Je demanderais donc aux députés de limiter leurs interventions à au plus 45 secondes, autant pour la question que pour la réponse.
    Le député de Central Okanagan—Similkameen—Nicola a la parole.
    Monsieur le Président, je remercie la députée d'avoir présenté ce projet de loi; je comprends que c'est une question qui lui tient beaucoup à cœur. Le projet de loi impose une obligation au ministre de l'Environnement, mais bon nombre des questions qu'elle soulève touchent à la réconciliation avec les Autochtones.
    Pourquoi mentionne-t-on seulement le ministre de l'Environnement? Pourquoi la députée pense-t-elle que le ministre critiquerait les nombreux échecs du gouvernement en matière de réconciliation? Dans bien des cas, il s'agit de torts historiques qui remontent au siècle dernier. J'aimerais entendre ce que la députée pense de tout cela.
    Monsieur le Président, au début, quand j'ai commencé mes recherches, je pensais qu'il s'agissait d'un enjeu de compétence provinciale. Les dépotoirs, les décharges, les sites d'enfouissement de déchets toxiques — tout cela relève des compétences provinciale et municipale. Quand j'ai approfondi mes recherches, j'ai commencé à comprendre que c'était un problème d'envergure nationale. Il y a beaucoup de pollueurs industriels, et c'est une des raisons pour lesquelles de nombreuses communautés autochtones n'ont toujours pas d'eau potable et des enfants souffrent d'éruptions cutanées et de toutes sortes de maladies. C'est pourquoi il incombe maintenant au gouvernement de remédier à la situation. Je pense que cela prendra l'intervention de plusieurs ministères, mais c'est au ministère de l'Environnement de commencer à...
    Nous poursuivons les questions et commentaires. La députée de Victoria a la parole.
    Monsieur le Président, je tiens à remercier la députée de Cumberland—Colchester d'avoir présenté ce projet de loi vraiment important. Je salue son travail.
    Je suis curieuse de savoir ce qu'il en est des réparations. Le projet de loi parle des conséquences sur les collectivités autochtones et les communautés racialisées. Nous venons de débattre d'un projet de loi concernant le Jour de l'émancipation. La discussion sur la façon d'indemniser les collectivités qui ont été touchées est importante.
    Selon la députée, quelle est la place du projet de loi dans une discussion sur les réparations?
    Monsieur le Président, je sais que la députée d'en face a également étudié le racisme environnemental et qu'elle a même donné des cours à ce sujet à l'université.
    C'est une composante importante du projet de loi. Nous en parlons actuellement en Nouvelle-Écosse et dans la communauté noire. C'est un sujet très important. Le débat vient de commencer.
    Le projet de loi vise à permettre aux gens de participer à la discussion et de dire au gouvernement ce que nous devrions faire. J'espère que le gouvernement prendra les suggestions en note et qu'il y donnera suite. C'est très important.
    Monsieur le Président, je remercie la députée de Cumberland—Colchester d'avoir présenté le projet de loi C-230. Je suis honorée de pouvoir l'appuyer.
     C'est en Nouvelle-Écosse, où je vivais à l'époque, que j'ai pris conscience du racisme environnemental en voyant l'horreur des étangs bitumineux de Sydney dans le secteur industriel de l'île du Cap-Breton. Ils ont plus ou moins été nettoyés depuis. Du moins, ils sont enfouis. Je signale que ce que l'on appelait les étangs bitumineux était, à l'origine, un estuaire où pêchaient les Micmacs. On a forcé les Micmacs à quitter ces terres et à s'installer à l'emplacement actuel de la collectivité de Membertou afin de bâtir une aciérie et des fours à coke. Bref, la seule collectivité noire d'origine africaine au Cap-Breton était située entre les fours à coke et l'aciérie. Il y a eu de nombreux cas de cancer au sein de la population. C'était le plus important lieu d'élimination des déchets toxiques au Canada.
    Comme j'aurais aimé que le projet de loi soit en place à l'époque. Qu'en pense la députée, que je remercie encore une fois?
(1850)
    Monsieur le Président, je remercie la députée d'appuyer mon projet de loi.
    Il s'agit d'un exemple probant. Boat Harbour en est un autre. C'était une magnifique lagune où les collectivités des Premières Nations venaient pique-niquer pendant des milliers d'années. Je suis allée là-bas et j'ai vu la dégradation de ce site et senti l'odeur nauséabonde. J'ai constaté l'effet sur la population. Bon nombre des personnes avec qui j'avais érigé un barrage pour protester contre l'usine de pâtes et papiers à l'époque ne sont plus là aujourd'hui. Elles sont décédées du cancer.
    L'heure est venue d'adopter ce projet de loi. Il incombe à chacun de nous de faire en sorte qu'il en soit ainsi.
    Le temps est écoulé, mais je vais prendre la liberté d'accepter une dernière question.
    Monsieur le Président, je voudrais d'abord remercier la députée de ses commentaires, ainsi que de son leadership et de son engagement ferme à rétablir la justice dans ce dossier.
    En tant que Micmac de la Nouvelle-Écosse, j'ai appris de nombreuses fois dans le cadre de mes recherches que les populations autochtones étaient chassées de leurs terres traditionnelles, qui étaient souvent à proximité de leurs ressources dans des zones lucratives, pour être regroupées dans de petites réserves dans des régions qui les rendaient vulnérables et susceptibles d’être exploitées.
    Ma question est la suivante: selon la députée, comment son projet de loi permettra-t-il de provoquer une prise de conscience nécessaire au sujet de ces injustices? Selon elle, l'éducation constitue-t-elle maintenant une partie intégrante du projet de loi?
    Monsieur le Président, le député a déployé beaucoup d'efforts pour mieux faire connaître les traités en Nouvelle-Écosse, et je pense que ce genre d'initiative devrait être déployée à l'échelle du Canada.
    Les gens ne semblent pas comprendre que les Autochtones étaient installés ici 13 000 ans avant nous. Je suis tellement dévastée quand j'entends les gens dire « Retournez d'où vous venez: ramassez vos tentes et retournez chez vous ». Je pense que le projet de loi dont nous sommes saisis permettrait vraiment d'entamer le dialogue et de sensibiliser la population à cette situation qui sévit depuis beaucoup trop longtemps. Je pense que c'est à nous de trouver une solution.
    Monsieur le Président, c'est toujours un plaisir de prendre la parole à la Chambre pour participer au débat, surtout dans le cadre des affaires émanant des députés. Je suis sûr que je ne suis pas le seul à éprouver de l'admiration pour la passion et les idées de mes collègues de tous les partis.
     En général, soit on s'oppose à un projet de loi d'initiative parlementaire, soit on l'appuie. En de rares occasions, du moins, à mon avis, je vais m'opposer à un projet de loi d'initiative parlementaire même si j'appuie le principe qui le sous-tend. Pour moi, il s'agit de l'une de ces rares occasions, et je tiens à faire part à la Chambre de mes observations concernant le projet de loi.
    D'abord, je tiens à féliciter la députée de Cumberland—Colchester d'avoir soulevé cette préoccupation très importante. La députée qualifie cette préoccupation de « racisme environnemental » et propose ultimement de créer une stratégie nationale pour promouvoir des efforts d'un bout à l'autre de notre grand pays afin de réparer les torts causés par ce dernier.
     Comment la députée de Cumberland—Colchester définit-elle le « racisme environnemental »? Dans l'une des parties du projet de loi, on peut lire ceci:
     [Q]ue l’établissement de sites dangereux pour l’environnement, notamment des sites d’enfouissement et des établissements industriels polluants, dans des zones peuplées majoritairement par des membres de ces collectivités pourrait être considéré comme une forme de discrimination raciale;

[Français]

    En fait, il se trouve que j'ai quelques exemples locaux qui témoignent directement de ce problème. Je vais en faire part à la Chambre pour illustrer pourquoi j'ai dit, au cours de mon introduction, que j'appuyais le principe soulevé dans ce projet de loi.
    Mon premier exemple local concerne l'entreprise Appleton Waste Services. Celle-ci a été payée par de nombreux citoyens de Penticton et de la région pour ramasser et collecter les ordures pour ensuite les transporter et les déverser à la décharge locale. Cette entreprise n'a pas payé l'exploitant de la décharge, qui était un autre gouvernement local, à savoir le District régional d'Okanagan-Similkameen, ou RDOS, comme nous l'appelons dans la région. Puisque la facture n'était pas payée, le RDOS a dû suspendre le service lié à Appleton Waste Services.
    Malheureusement, cela n'a pas empêché l'entreprise de continuer à ramasser les déchets et à faire payer ses clients pour cela, puis de conclure une entente qui a finalement entraîné le déversement de 5 000 tonnes de déchets sur les terres de la Bande indienne de Penticton. L'arrangement était que ces déchets passeraient par une station de transfert avant d'être transportés ailleurs.
    Comment cela a-t-il fini? Eh bien, l'entreprise a disparu, mais un tas massif de déchets est devenu un grave problème à traiter pour les membres de la Bande indienne de Penticton, et ce n'étaient même pas leurs propres déchets. Ils venaient des citoyens de la ville de Penticton.
(1855)

[Traduction]

    Autrement dit, la Bande indienne de Penticton s'est retrouvée avec un véritable site d'enfouissement, lequel, comme le dit le projet de loi, était situé
dans des zones densément peuplées majoritairement par des membres de ces collectivités.
    Si on se fie au projet de loi, il pourrait s'agir d'une forme de discrimination raciale.
    Il s'agit d'un premier exemple qui, à mes yeux, fait ressortir les lacunes du texte. En voici un deuxième.
    Bien des gens savent que la région de l'Okanagan, d'où je viens, est reconnue pour ses excellents vins, mais peu de gens savent qu'il y a longtemps, c'était pour la culture des fruits qu'elle était reconnue. On y trouve donc de nombreuses infrastructures fruiticoles, surtout dans les petites localités, et la plupart commencent à montrer des signes de vieillissement.
    La vieille station fruitière qui se trouvait à Namrata devait être démolie et retirée du terrain, mais l'entreprise qui a remporté le contrat de récupération des matériaux est aussi partie avec les débris de bois. Qui se sont retrouvés où, selon les députés? Eh bien oui, sur les terres de la Bande indienne de Penticton, où ils ont fini par être brûlés.

[Français]

    Maintenant, dans ce cas, des accusations environnementales provinciales ont été portées contre les parties impliquées dans cette affaire. Finalement, cette affaire a fait son chemin devant les tribunaux. Les défendeurs ont fait valoir que ces activités avaient eu lieu dans la réserve indienne de Penticton, qui n'est pas de compétence provinciale dans de telles questions environnementales.
    Ils ont fait valoir qu'ils avaient respecté toutes les exigences du gouvernement local, en l'occurrence les directives de la Bande indienne de Penticton.
    En fin de compte, une demande a été faite, contestant ces accusations pour des motifs constitutionnels. Le juge a finalement rendu une décision de non-culpabilité et a déclaré que cette demande était sans objet, car il n'y aurait pas d'autres procédures judiciaires.
    Après m'avoir entendu partager ces deux exemples concernant le Canada, on pourra probablement comprendre pourquoi j'appuie les défis soulevés dans ce projet de loi. Toutefois, je vais maintenant expliquer pourquoi je m'opposerai à ce projet de loi, même si je reconnais ces défis.

[Traduction]

    Ces deux cas ont une chose en commun: les terres de la Bande indienne de Penticton qui ont subi des dégâts environnementaux étaient ce qu'on appelle des « terres occupées par un titulaire d'intérêt individuel ». Bien des gens ignorent en effet que les terres n'appartiennent pas toutes aux Premières Nations et aux bandes indiennes qui les occupent. C'est ce qu'on appelle des terres occupées par un titulaire d'intérêt individuel. Un peu comme pour les terres privées, les titulaires de l'intérêt individuel peuvent les aménager sans avoir à consulter les chefs et les conseils de bande élus. Or, dans les deux cas, des gens d'affaires non autochtones de la région ont conclu un accord financier avec les membres des bandes qui contrôlaient les terres en cause.
    Nous savons tous que le gouvernement fédéral, et plus particulièrement Services aux Autochtones Canada, est censé défendre les intérêts des communautés autochtones afin d'éviter que les situations comme celle-là se produisent. Ici à Ottawa, nous entendons rarement parler de ce qui a causé ces situations. Ce qui nous amène à la question suivante: est-ce à Services aux Autochtones Canada de dire à une famille titulaire d'un intérêt individuel ce qu'elle peut faire — ou pas — sur ses terres, ou est-ce aux chefs et aux conseils élus?
(1900)

[Français]

    J'ai une autre question: la députée a-t-elle été approchée par une Première Nation locale de la circonscription afin de présenter ce projet de loi, ou s'agit-il d'un autre exemple de cette attitude d'Ottawa voulant qu'il s'y connaisse mieux que quiconque et présente donc une autre série d'études visant à mettre au point une stratégie d'application uniforme, comme il fait depuis des décennies? Je ne connais pas la réponse à cette question.
    Dans ce projet de loi, je vois deux défis. Comme je l'ai mentionné précédemment, j'aimerais être en mesure d'appuyer ce projet de loi. Toutefois, je me retrouverais alors dans la situation où je voterais en faveur de quelque chose qui pourrait avoir des répercussions sur un bon nombre de collectivités des Premières Nations de ma région, sans avoir aucunement entendu ce qu'ils pensent de ce projet de loi. De bonne foi, je ne peux tout simplement pas faire cela.
    Je pense que l'époque où l'on prenait des décisions comme celle-ci à Ottawa, sans d'abord s'asseoir avec les chefs et les conseillers locaux pour entendre directement ce qu'ils en pensent, doit prendre fin. Il est évident que les facteurs environnementaux ont des répercussions sur les Premières Nations. Grassy Narrows me vient à l'esprit, ainsi que le renvoi à ces questions par le premier ministre. Merci pour le don, en effet.
    Il est important d'étudier ces répercussions, mais l'utilisation du terme « racisme » implique que les Canadiens sont racistes et responsables de ces actes et ne tient pas compte de l'échec à long terme du gouvernement libéral.

[Traduction]

    En effet, pas plus tard que cette semaine, le gouvernement libéral a confirmé qu'il n'allait pas respecter sa promesse concernant l'eau potable; c'est un autre échec. Les Canadiens sont des gens chaleureux et généreux qui aimeraient qu'on trouve de meilleures solutions pour que tout le monde puisse être en santé et s'épanouir. Il est injuste de rejeter la faute sur un pays raciste.
    Le Canada n'est pas un pays raciste, et il est tout simplement honteux de soutenir une telle chose. Je sais que la députée de Cumberland—Colchester est bien intentionnée. Cependant, je dois rendre des comptes à de nombreuses communautés autochtones dans ma circonscription. C'est pour cette raison que je ne peux pas appuyer ce projet de loi. Je remercie la députée d'avoir soulevé cette préoccupation.
    Je remercie également les députés d'avoir pris le temps d'écouter mon intervention aujourd'hui. C'est pour moi un plaisir de représenter les gens des collectivités de ma région.

[Français]

    Monsieur le Président, avant d'expliquer les raisons pour lesquelles le Bloc québécois n'est pas en faveur de ce projet de loi, je vais souligner certains points.
    D'abord, nous reconnaissons l'existence des problèmes liés aux disparités géographiques sur le plan du niveau de vie et de l'accès à un environnement de qualité. Ensuite, nous sommes préoccupés par le fait que des citoyens issus de l'immigration ou des communautés autochtones sont plus directement affectés par les disparités. Enfin, nous sommes tout à fait favorables à des mesures gouvernementales qui visent à contrer les iniquités subies par toute la population dans son rapport à l'environnement.
    Toutefois, dans le projet de loi C-230, il y a un nombre élevé de problèmes liés aux dispositions qui y sont prévues, à commencer par une attaque frontale contre la souveraineté environnementale du Québec et des provinces. On ne sera donc pas surpris d'apprendre que le Bloc québécois va s'opposer à tout ce qui remet en question la législation du Québec et ses compétences. Aussi, à l'égard du sujet dont nous discutons, il est loin d'être évident que c'est le fédéral qui aurait la compétence constitutionnelle de mettre en œuvre les mesures attendues.
    Ce n'est pas tout. Il y a aussi l'absence d'une définition, et mon collègue vient de l'aborder. Selon ce que nous entendons, il n'y a pas de définition du racisme environnemental. Quand on introduit un nouveau concept dans une loi, particulièrement lorsqu'il découle d'une théorie bien spécifique, il faudrait le voir précisé. Dans la société et le monde académique, le sens des concepts évolue dans le temps, mais celui d'une loi devrait toujours être clair, connu et reconnu.
     Effectivement, il y a dans le projet de loi C-230 une utilisation abondante du mot « race ». Nous comprenons l'intention antiraciste et antidiscriminatoire de l'honorable députée, et nous ne remettons pas du tout cette intention en cause. Toutefois, un malaise demeure: la réhabilitation sociologique de la race dans une telle perspective n'est pas un procédé qui fait l'objet d'un consensus scientifique ou social.
    Ce concept, un autre qui nous vient des États-Unis, repose sur l'analyse d'un rapport entre le social, c'est-à-dire les classes, le genre et la race, et la nature. Certains se souviendront peut-être du film Erin Brockovich, seule contre tous. Cette femme luttait justement contre une industrie, mais elle parlait de précarité financière. Aujourd'hui, elle poursuit sa lutte en Grèce, mais elle parle toujours de pauvreté.
    La professeure et auteure Ingrid Waldron, qui fonde beaucoup d'espoir sur le projet de loi C-230, ramène la question réelle et importante de la discrimination environnementale sous l'angle de la race et de la couleur. On ne veut pas contredire la professeure Waldron, mais il faut reconnaître que l'injustice environnementale, qui affecte de façon disproportionnée les communautés minoritaires, correspond davantage à une posture idéologique fondamentalement anticapitaliste.
    Ailleurs, elle pose ses recherches avec les conditions qui alimentent le racisme environnemental:
    Les facteurs sociopolitiques qui, conjointement, alimentent le racisme environnemental comprennent la pauvreté, le manque de pouvoir et de représentation politique, le manque de protection et d’application de la loi, et les réformes politiques néolibérales.
 
    Donc, elle reconnaît que nous sommes en présence de multiples facteurs de vulnérabilité. Pourquoi parlerait-on de racisme?
    L'expression « racisme environnemental » est chargée sur les plans théorique et politique. Pour en débattre dans une perspective d'ouverture, on ne doit pas être déjà engagé dans des prémisses théoriques contraignantes, des prémisses dominées par des approches sociologiques qui sont résolument militantes. Comme mes collègues le savent, j'ai été enseignante et présidente de syndicat. Du militantisme, j'en ai fait. Je suis donc la première à reconnaître que c'est important. Cependant, quand le législateur dépose un projet de loi, il doit être guidé autrement.
    La professeure Waldron cite notamment les rapports inégalitaires entre les langues minoritaires, dont les langues autochtones, bien sûr, et la langue majoritaire anglaise comme étant l'un des facteurs qui contribuent au fardeau environnemental:
    Certaines provinces et certains territoires se sont dotés d’une « charte des droits environnementaux » et d’un cadre juridique régissant les droits environnementaux, mais il subsiste des lacunes dans les domaines qui relèvent de l’administration fédérale.
 
    Nous y sommes; des lacunes, il y en a.
(1905)
    La semaine passée, je suis intervenue sur le projet de loi C-225 de mon collègue de Jonquière. La mobilisation citoyenne à laquelle je faisais référence et les mouvements sociaux qui mènent aux luttes politiques ont un impact souhaitable sur l'action gouvernementale. Ces luttes sont souvent distinctes les unes des autres selon les réalités vécues.
    Toutefois, pour le législateur, le défi est tout autre. Sa responsabilité est d'élaborer des lois qui servent la justice, certes, mais qui doivent s'appliquer à tous les citoyens. Une bonne politique est une politique universelle. Elle est au service du bien commun, et elle s'adresse à l'ensemble de la population. Plus encore, les politiques publiques à vocation universelle ont aussi pour effet de démanteler des structures inégalitaires et des pratiques discriminatoires. Faire le choix du paramètre ou de la lunette de la race pour observer un phénomène intersectoriel comme celui de la discrimination environnementale nous apparaît mal choisi dans un contexte législatif.
     Au Québec, la Commission des droits de la personne et de la jeunesse du Québec s'est d'ailleurs prononcée sur la question:
    l'idée selon laquelle les différences socioéconomiques, culturelles et politiques entre les groupements humains puissent reposer en tout ou en partie sur des disparités biologiques et génétiques a été largement récusée par la majorité des chercheurs en sciences sociales
    La Commission ajoute qu'elle qualifie l'union entre les sciences sociales et la notion de race d'union dangereuse.
    Le Canada a un examen de conscience à faire devant la réalité des travaux décrits par la professeure Waldron, ne serait-ce qu'à l'égard des peuples autochtones et des conditions inadmissibles qui prévalent dans de trop nombreuses communautés partout au Canada.
    On s'explique mal, pour ne pas dire très mal, comment le projet de loi C-230 peut prévoir une disposition remettant entre les mains du fédéral « l'exécution et le contrôle d'application des lois environnementales de chaque province », alors que nous avons des exemples éloquents où le fédéral démontre son indifférence pour les mécanismes législatifs qui sont déjà en place dans les autres administrations. Cela me ramène encore une fois au projet de loi C-225 de la semaine passée et à la triste réalité de la préséance indue de la législation fédérale sur les préoccupations environnementales et les lois provinciales.
    Les lois canadiennes sont beaucoup plus permissives que celles du Québec en matière de protection de l'environnement, et, malgré tout, elles ont préséance sur les lois du Québec. On ne va pas donner au fédéral une autre chance d'avoir encore plus de préséance sur les provinces; il en a déjà trop. Le Canada doit examiner ses priorités en matière de protection de sa population devant les changements climatiques, aux enjeux de la pollution, aux effets sur la santé et à l'ensemble des inégalités qui caractérisent son action en matière environnementale. Oui, l'État fédéral doit corriger les lacunes auxquelles Mme Waldron fait référence.
    Avec elle, j'interpelle aussi les députés à poser une réflexion sur le triste héritage qui suit l'application des politiques néolibérales, celles qui mettent à mal l'État providence. Il faut être ferme dans nos intentions législatives à veiller et à enrayer les discriminations, mais nous devons le faire dans une perspective collective et non de division. En voici des exemples: l'équité salariale, l'égalité homme-femme, l'accès universel à des ressources nécessaires à la vie, comme l'eau potable dans les communautés autochtones, et l'accès à la justice. Bref, il faut lutter encore et toujours pour s'assurer que le fossé cesse de se creuser.
    Je tiens à rappeler que le droit de vivre dans un environnement sain a été enchâssé dans une multitude de constitutions et de chartes nationales; la députée l'a d'ailleurs évoqué dès son introduction. Pourquoi est-ce qu'on ne pourrait pas considérer la même chose au Canada, soit l'obligation de vivre dans un environnement sain aux côtés des autres garanties juridiques fondamentales, et ce, sans égard à notre biologie, à notre communauté d'appartenance, à notre statut socioéconomique ou selon le lieu géographique où l'on demeure?
    Serions-nous devant un autre argument pour discuter de la Constitution? Nous sommes prêts.
(1910)

[Traduction]

    Monsieur le Président, je remercie encore une fois la députée de Cumberland—Colchester d'avoir soulevé cette question importante à la Chambre.
    Le racisme environnemental est un problème immense dont on fait souvent abstraction. D'ailleurs, bien des gens ne connaissent pas ce concept. Comme la députée l'a mentionné, avant de devenir députée, j'ai donné un cours qui portait sur le racisme environnemental, et j'ai demandé à mes étudiants de lire le projet de loi provincial que la députée de Cumberland—Colchester a présenté lorsqu'elle était députée néo-démocrate dans une assemblée législative provinciale. Je suis déçue que ce projet de loi n'ait jamais été adopté à l'échelle provinciale, mais j'espère que nous pourrons l'adopter à l'échelle fédérale.
    Partout au Canada, des décharges de matières toxiques, des projets polluants, des pipelines dangereux, des sources d'eau potable contaminées et les effets des changements climatiques nuisent de façon démesurée aux Autochtones, aux Noirs et aux communautés racialisées. La discrimination systémique s'est implantée dans les politiques environnementales, tout comme l'application inégale des règlements et des lois, le choix d'endroits habités par des communautés autochtones, noires ou racialisées pour construire des installations de gestion de déchets toxiques, l'approbation officielle de la présence de poisons et de polluants mortels et l'exclusion de ces communautés du processus décisionnel.
    Nous devons également y réfléchir dans le contexte du fait que nous exportons nos déchets vers des pays situés principalement dans l'hémisphère Sud et que ce sont souvent les communautés racialisées qui subissent les conséquences de cette pollution toxique. J'appuie le projet de loi et je crois que nous devons prendre des mesures de toute urgence relativement à la justice environnementale. J'aimerais également que le droit à un environnement sain soit inscrit dans la loi sous forme de charte des droits environnementaux.
    Le racisme environnemental au Canada est bien documenté. Il s'agit d'une conséquence directe des effets historiques et continus de la colonisation. Beaucoup ont vu le documentaire intitulé There's Something in the Water, qui a été mentionné. Il est basé sur le rapport d'Ingrid Waldron à la Commission canadienne pour l'UNESCO. Le documentaire met en lumière les histoires poignantes et percutantes des communautés autochtones et noires de la Nouvelle-Écosse qui luttent pour la justice environnementale.
    Après sa visite au Canada en 2019, le rapporteur spécial sur les incidences sur les droits de l’homme de la gestion et de l’élimination écologiquement rationnelles des produits et déchets dangereux écrivait: « J'ai observé une tendance répandue à l'inaction du côté du gouvernement du Canada face aux menaces pour la santé découlant de décennies d'injustices environnementales passées et présentes. » Un rapport présenté au Conseil des droits de l'homme pas plus tard qu'en septembre dernier indiquait que « [l]a pollution et l'exposition à des produits toxiques menacent le droit à la vie, à une vie dans la dignité » et que « la violence invisible infligée par les produits toxiques est un fardeau insidieux qui affecte de façon disproportionnée les Autochtones au Canada ».
    Il ressort aussi clairement que nous avons un problème de racisme systémique et que le gouvernement ne fait pratiquement rien pour le régler. En l'absence d'une action gouvernementale ou d'un projet de loi, les communautés autochtones et racialisées et leurs alliés, souvent exclus des hautes sphères des grands mouvements environnementaux, réclament la justice environnementale et exigent qu'on respecte leurs droits et qu'on tienne compte de leur opinion. Ils ont récemment réussi à empêcher l'achèvement de projets dangereux pour l'environnement dans leur communauté au moyen de la mobilisation communautaire, de pétitions et de la désobéissance civile, mais ils ne devraient pas avoir à se battre pour ne pas être empoisonnés par l'air qu'ils respirent ou par l'eau qu'ils boivent.
    Les effets négatifs pour la santé de l'exposition à des substances toxiques s'ajoutent aux autres inégalités et aux problèmes que vivent les groupes autochtones et les autres groupes racialisés: faible revenu, pauvreté, sous-emploi, chômage, insécurité alimentaire et mauvais accès aux soins de santé. Tous ces facteurs, en plus des impacts directs sur la santé humaine, ont un effet sur le racisme environnemental, qui détruit les milieux naturels et fait disparaître l'accès aux sources alimentaires traditionnelles et les pratiques culturelles.
    Cette exposition disproportionnée à des substances toxiques contribue également à confiner les populations autochtones et les populations racialisées du pays à un cercle vicieux de pauvreté intergénérationnelle. Les maladies qui découlent de l'exposition aux métaux lourds causent une diminution des revenus et du potentiel de revenu. Les revenus plus faibles et la pauvreté sont des facteurs importants expliquant pourquoi les ménages des communautés racialisées sont moins souvent en mesure de quitter les endroits où l'environnement est néfaste pour la santé que les ménages blancs.
(1915)
    Bon nombre d'entre nous reconnaissent les noms des collectivités qui ont été dévastées par la pollution toxique, mais qu'aurions-nous pu faire pour empêcher cela?
    Dans la vallée des produits chimiques, il y a 62 grandes installations industrielles, ce qui représente environ 40 % de l'industrie pétrochimique du Canada. Ces installations sont exploitées à quelques kilomètres de Sarnia et de la Première Nation Aamjiwnaang, exposant les résidants à toute une gamme de polluants nocifs qui provoquent des taux croissants d'asthme, de troubles reproductifs, de troubles d'apprentissage et de cancer.
    À Grassy Narrows, l'empoisonnement continu au mercure, découvert en 1970, a eu des répercussions dévastatrices sur la santé, en plus d'avoir contaminé l'eau et les poissons dont dépendait la communauté.
    À Boat Harbour, une usine de traitement des effluents de l'usine de pâte à papier Northern a été construite et exploitée par le gouvernement provincial près de la Première Nation de Pictou Landing, en Nouvelle-Écosse, transformant un estuaire tranquille et un terrain de chasse et de pêche fertile en un lieu de toxicité aigüe.
    N'oublions pas de mentionner ce qui est peut-être l'exemple le plus notoire du racisme environnemental: Africville.
    Il ne s'agit pas seulement de communautés qui sont devenues des sites tristement célèbres de pollution toxique. Dans les zones urbaines du Canada, 25 % des quartiers les plus défavorisés sur le plan socioéconomique, où vivent un nombre disproportionné de personnes racialisées, se trouvent à moins d'un kilomètre d'une grande installation industrielle polluante, contre seulement 7 % des quartiers les plus riches, où vivent plus souvent des familles blanches. Il en résulte des risques élevés d'hospitalisation pour des maladies respiratoires et cardiovasculaires.
    Les changements climatiques ont des conséquences disproportionnées sur les Autochtones. Le Canada se réchauffe deux fois plus vite que le reste du monde et le Nord du pays se réchauffe trois fois plus vite, ce qui épuise les sources de nourriture traditionnelles, augmente le coût des substituts alimentaires importés et contribue à un problème croissant d'insécurité alimentaire et aux effets négatifs sur la santé. Cependant, les communautés autochtones résistent. Elles font preuve de résilience face à cette injustice. Le Canada ne soutient pas suffisamment les efforts des Autochtones pour s'adapter à la crise climatique et il ne contribue pas suffisamment à la réduction des gaz à effet de serre.
    La Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones doit être inscrite dans la loi. Je suis heureuse de voir le gouvernement déposer enfin un projet de loi concernant la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, mais je crains que la mesure législative soit diluée par rapport à ce que souhaitent de nombreux organisateurs et peuples autochtones de tout le pays qui se sont battus. Nous devons tenir compte de la science et du savoir autochtones en matière d'environnement et de protection de celui-ci.
    Je tiens également à parler du droit à un environnement sain. La recommandation principale du Conseil des droits de l'homme des Nations unies, en septembre 2020, a été que le Canada reconnaisse dans la loi le droit à un environnement sain. Même si l'Ontario, le Québec, le Yukon, les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut ont des lois sur les droits environnementaux ainsi que des lois provinciales et territoriales qui traitent de ces droits, il n'existe pas de loi fédérale qui reconnaît explicitement le droit à un environnement sain au Canada. La Loi canadienne sur la protection de l'environnement ne comprend aucune mention de la justice environnementale, des droits de la personne ou des populations vulnérables. Elle est vieille de 20 ans et a grandement besoin d'être modernisée.
    Depuis de nombreuses années, mes collègues néo-démocrates militent pour qu'on adopte une charte des droits environnementaux. Je tiens à remercier l'ancienne députée néo-démocrate Linda Duncan d'avoir présenté le projet de loi et ma collègue néo-démocrate la députée de Winnipeg-Centre, qui a présenté le projet de loi C-232, qui demande que l'on reconnaisse le droit de tous les Canadiens à un environnement sain et sécuritaire s'appuyant sur un engagement à respecter la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Nous demeurons résolus à mettre en œuvre une charte des droits environnementaux et à renforcer la Loi canadienne sur la protection de l'environnement pour mieux protéger les Canadiens des substances toxiques.
(1920)
    Nous appuyons en général le projet de loi et la nécessité de prendre des mesures urgentes dans le sens de la justice environnementale. Nous devons remédier aux répercussions environnementales qui touchent de façon disproportionnée les communautés autochtones, noires et racialisées. Le projet de loi stipule que la stratégie doit inclure des mesures pour s'attaquer au racisme environnemental, notamment l'indemnisation des particuliers ou des collectivités et le financement continu des collectivités touchées…
    Je crains que le temps soit écoulé.
    Nous reprenons le débat. Le secrétaire parlementaire du ministre de l’Environnement et du Changement climatique a la parole.

[Français]

    L'objectif de ce projet de loi est de promouvoir les efforts déployés dans tout le Canada pour prévenir et réparer les situations dans lesquelles les communautés autochtones et racialisées affrontent de manière disproportionnée la pollution, la dégradation de l'environnement et d'autres formes de dommages environnementaux.
(1925)

[Traduction]

    Il s'agit d'une préoccupation légitime, qui m'interpelle tout particulièrement dans le contexte actuel de la COVID-19, étant donné que les répercussions de la pandémie touchent de façon disproportionnée les groupes défavorisés. Selon de nombreuses études de Statistique Canada, la pandémie a des répercussions inégales sur divers groupes. Par exemple, une étude a révélé que les immigrants et les minorités visibles représentent une plus grande proportion des travailleurs de première ligne, notamment les aides-infirmiers, les préposés aux bénéficiaires et les associés au service de soins aux patients. L'étude laisse supposer que certains groupes de Canadiens sont probablement plus susceptibles d'être exposés au virus que d'autres.
    D'autres données de Santé publique Ontario montrent que les gens qui vivent dans les quartiers les plus diversifiés sur le plan ethnique sont plus susceptibles de contracter le virus que les autres Canadiens. Diverses analyses montrent également que certains groupes, comme les Canadiens autochtones, sont beaucoup plus vulnérables. C'est signe que nous devons agir.

[Français]

    Ce projet de loi arrive un moment où de nombreux Canadiens réfléchissent attentivement à tous les aspects du racisme, y compris sa dimension environnementale. Le public est très préoccupé par le racisme systémique dont sont victimes les Noirs, les Autochtones et les personnes de couleur en raison de politiques et de pratiques institutionnelles.
    Dans le discours du Trône, notre gouvernement s'est engagé à poursuivre la lutte contre le racisme systémique par des efforts concertés et concrets. Des mesures importantes ont déjà été prises avec la publication de la stratégie canadienne de lutte contre le racisme 2019-2022, avec un investissement de 45 millions de dollars qui permettra de prendre des mesures immédiates pour lutter contre le racisme et la discrimination.

[Traduction]

    Dans le cadre du programme d'action et de lutte contre le racisme, le gouvernement du Canada investit 15 millions de dollars pour le financement de 85 projets de lutte contre le racisme dont l'objectif est de lever les obstacles systémiques auxquels sont confrontés les communautés racialisées, les minorités religieuses et les Autochtones au Canada. Nous nous sommes également engagés à favoriser les changements transformateurs en agissant pour lutter contre la haine en ligne, pour renforcer les efforts d'autonomisation visant des communautés ciblées, pour mettre en œuvre un plan d'action visant à accroître la représentation dans les recrutements et les nominations ainsi que le développement du leadership au sein de la fonction publique et pour prendre de nouvelles mesures afin de soutenir les contributions artistiques et économiques de la culture et de l'héritage des communautés noires canadiennes.
    Nous savons que le projet de loi met en évidence le fait que les efforts pour combattre le racisme systémique peuvent contribuer à la résolution de problèmes en matière d'environnement et de santé. Nous prenons aussi des mesures face à ces problèmes.
    Le gouvernement du Canada entend également améliorer de façon continue la façon dont on tient compte des populations vulnérables dans l'évaluation et la gestion des produits chimiques et d'autres substances aux termes de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement et d'autres lois fédérales. Les produits chimiques font partie du quotidien et sont essentiels à notre santé, à notre bien-être, à l'économie, aux collectivités et à nos maisons. Si les produits chimiques présentent des avantages, certains peuvent également avoir un effet nocif sur la santé humaine. Certains Canadiens peuvent être plus vulnérables que d'autres à ces effets.
    Lorsque les renseignements sont disponibles, les ministères tiennent compte de ces éléments au moment de mener des évaluations du risque et de choisir des mesures d'atténuation des risques. Il peut notamment s'agir de tenir compte des personnes qui habitent proche d'installations industrielles commerciales et des populations autochtones et inuites.
    Afin de consolider notre engagement à régler le problème de l'exposition à certains groupes de substances nocives, à la fin de 2018 et au début de 2019, le gouvernement a entrepris des consultations au sujet de la définition des populations vulnérables. C'était le premier pas en vue d'un cadre stratégique sur les populations vulnérables. La rétroaction reçue au moyen de ce processus de consultation contribue à l'élaboration d'activités liées à l'évaluation et à la gestion des produits chimiques, comme le développement d'un cadre stratégique en réponse aux populations vulnérables aux termes de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement.
    Fait à noter, le programme fédéral sur la qualité de l'air comporte l'étude des façons d'atténuer la pollution atmosphérique dans les secteurs particulièrement touchés, ceux qu'on appelle les points chauds. Ces efforts sont importants, car les populations vulnérables peuvent être touchées de façon disproportionnée par la pollution dans ces zones.

[Français]

    Le gouvernement s'est engagé à s'attaquer au racisme systémique, et nous nous sommes engagés à le faire d'une manière qui s'inspire des expériences vécues par les communautés racisées et les peuples autochtones. Cela doit être un effort de coopération et de collaboration.
    La première étape consistera à écouter autant que possible ceux dont les expériences doivent guider notre approche. Le projet de loi C-230 est le début d'une conversation que nous sommes heureux de poursuivre dans le but d'aborder cette importante question.
    En terminant, j'aimerais remercier une fois de plus la députée de Cumberland—Colchester d'avoir présenté ce projet de loi.
    La période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés est maintenant expirée et l'ordre est reporté au bas de l'ordre des priorités au Feuilleton.

MOTION D'AJOURNEMENT

[Motion d'ajournement]

    L'ajournement de la Chambre est proposé d'office conformément à l'article 38 du Règlement.
(1930)

[Traduction]

Le logement

    Monsieur le Président, la pandémie n'a fait qu'exacerber les vulnérabilités existantes des sans-abri et de ceux qui vivent dans la précarité sur le plan du logement.
    Les gens sont toujours confrontés à la montée en flèche des loyers, à la flambée des prix de l'immobilier et aux expulsions pour cause de démolition. Ils sont de plus en plus nombreux à vivre dans des campements. Le plus gros campement de sans-abri du pays se trouve toujours dans Vancouver-Est, alors que les mois froids et humides sont à nos portes. De plus, nous sommes aux prises avec le taux le plus élevé de COVID-19 de la ville.
    L'urgence d'agir est plus criante que jamais. La dernière fois où le fédéral a pris d'importantes mesures pour soutenir le logement remonte à la fin de la Seconde Guerre mondiale. À l'époque, des centaines de milliers de logements abordables avec services de soutien ont été construits par le gouvernement pour que les soldats revenant de la guerre puissent y vivre. Aujourd'hui, les anciens combattants qui ont servi notre pays sont de plus en plus nombreux à se retrouver dans la rue.
    De toute évidence, les libéraux ne ressentent pas le sentiment d'urgence qui assaille les fournisseurs de logements et les défenseurs du droit au logement. Même si les libéraux ont déclaré qu'un logement adéquat est un droit fondamental de la personne, les mesures qu'ils prennent sont bien loin d'être à la hauteur de leurs discours. Il a fallu attendre six mois après l'arrivée de la pandémie avant que les libéraux annoncent l'Initiative pour la création rapide de logements, et cet engagement ne permettra d'ajouter que 3 000 unités pour résoudre la crise de l'itinérance. Étant donné que plus de 235 000 Canadiens vivent en situation d'itinérance chaque année, et que cette situation s'est aggravée depuis l'arrivée de la pandémie, 3 000 unités ne seront tout simplement pas suffisantes.
    L'Association canadienne d'habitation et de rénovation urbaine, l'Alliance canadienne pour mettre fin à l'itinérance, des fournisseurs de logements et des militants affirment tous que cela ne suffit pas. En fait, l'Association canadienne d'habitation et de rénovation urbaine demande au gouvernement fédéral d'ajouter au moins 5 milliards de dollars au financement de l'Initiative pour la création rapide de logements. Elle lui demande aussi de prolonger le programme au moins jusqu'en 2028.
    Par ailleurs, des communautés ont souligné que l'annonce de l'Initiative pour la création rapide de logements ne mentionne aucune ressource supplémentaire destinée à offrir un soutien et des services sociaux complets. Les personnes en situation d'itinérance chronique ont absolument besoin de soutien pour réussir. Les communautés demandent donc au gouvernement fédéral d'inclure des ressources supplémentaires afin de financer un soutien complet qui permettra d'offrir les soins nécessaires à leur réussite.
    Au Canada, 80 % des Autochtones vivent dans des communautés urbaines, rurales et nordiques, et ils sont grandement surreprésentés parmi les itinérants. L'annonce de l'Initiative pour la création rapide de logements ne prévoit pas de volet dédié aux Autochtones des milieux urbains, ruraux et nordiques, ce qui montre une fois de plus que le gouvernement libéral néglige leurs besoins.
    L'Alliance canadienne pour mettre fin à l'itinérance et l'Association canadienne d'habitation et de rénovation urbaine soulignent que, lorsque la Stratégie nationale sur le logement a été annoncée en 2017, elle ne prévoyait rien pour les Autochtones des milieux urbains, ruraux et nordiques. Bien que le premier ministre ait expressément demandé au ministre responsable du logement, dans sa lettre de mandat de 2019, d'élaborer une stratégie sur le logement autochtone en milieu urbain, rural et nordique, il n'y a toujours aucune stratégie un an plus tard.
    Il est plus que temps d'agir. Le caucus autochtone de l'Association canadienne d'habitation et de rénovation urbaine demande au gouvernement fédéral de mettre sur pied un centre national du logement « pour les Autochtones, par les Autochtones ». Il souhaite qu'on ajoute 73 000 logements stables, sûrs et abordables à l'intention des Autochtones. Il souhaite voir le gouvernement agir plus rapidement pour régler le problème de l'itinérance des Autochtones et fournir des services complets qui favoriseront le bien-être des locataires autochtones et leur réussite à long terme. Il souhaite voir le gouvernement agir plus rapidement pour éliminer l'itinérance des Autochtones et mettre l'accent sur le logement dans le Nord.
    Le temps des excuses et des retards est révolu. C'est maintenant le temps d'agir.
    Monsieur le Président, je remercie ma collègue de Vancouver-Est de me donner l'occasion de parler de l'Initiative pour la création rapide de logements, qui a été lancée le 27 octobre par le premier ministre. Cette nouvelle initiative majeure permettra à des Canadiens plus vulnérables d'avoir accès rapidement à un logement quand ils en ont le plus besoin.
    Les gens les plus durement touchés par la COVID-19 sont ceux qui vivent dans des logements précaires. Cela comprend les aînés, les femmes et les enfants fuyant la violence, ainsi que les sans-abri.
    Par exemple, il est impossible de s'abriter dans un lieu sûr quand on n'a pas de foyer. Le gouvernement l'a reconnu, et il s'est mobilisé rapidement pour mettre en place plusieurs mesures de soutien afin de répondre à ces besoins urgents en logement. Il a notamment prévu des fonds supplémentaires de plus de 236 millions de dollars pour le programme Vers un chez-soi: la stratégie canadienne de lutte contre l'itinérance. Ces fonds aideront les collectivités à prolonger la durée et à élargir la portée des mesures d'urgence mises en place au début de la pandémie de COVID-19, en plus de leur accorder la marge de manœuvre nécessaire pour trouver des solutions aux problèmes de logement.
    De nombreuses régions du pays traversent actuellement la deuxième vague de la pandémie. Comme ma collègue l'a fait remarquer, la température est à la baisse. Il est clair que nous avons besoin de plus de logements abordables. Nous en avons un besoin urgent et notre gouvernement est déterminé à aider à le combler.
     C'est là qu'intervient l'Initiative pour la création rapide de logements du gouvernement. Elle représente 1 milliard de dollars en investissements fédéraux et permettra de créer 3 000 nouveaux logements abordables permanents dans l'ensemble du Canada. Tous les logements seront achevés dans les 12 mois suivant la signature de l'accord de financement. L'initiative sera axée sur la création de logements pour les Canadiens qui en ont grandement besoin, les sans-abri et les personnes qui vivent dans des refuges temporaires en raison de la pandémie de COVID-19. Parallèlement, elle stimulera l'économie en créant de bons emplois au moment où nous en avons le plus besoin.
    L'Initiative pour la création rapide de logements sera mise en œuvre dans le cadre de la Stratégie nationale sur le logement du Canada, un plan de plus de 55 milliards de dollars sur 10 ans, mais elle sera réalisée dans un délai beaucoup plus court. La moitié des fonds de l'initiative seront versés directement aux villes qui ont les plus grands besoins en matière de logements pour les sans-abri. L'autre moitié financera des projets pilotés par les provinces, les territoires, les municipalités, les organisations autochtones et les organismes sans but lucratif. Tous les projets financés dans le cadre de cette initiative doivent être achevés dans un délai d'un an. Les fonds peuvent être utilisés pour construire des logements modulaires, acheter des terrains ou convertir des bâtiments existants en logements abordables.
    Je me suis entretenu avec des partenaires municipaux, provinciaux et territoriaux du secteur du logement et ils nous ont conseillés sur la conception du programme. Ils se mobilisent rapidement afin de saisir l'occasion. Le gouvernement est fier de travailler main dans la main avec ces partenaires dévoués, afin d'assurer aux plus vulnérables un logement sûr et la possibilité de s'épanouir au cours des années à venir.
    Je souligne que le secrétaire parlementaire responsable du Logement est l'une des personnes les plus compétentes au Canada dans le domaine du logement à but non lucratif. Je suis fier de le compter parmi les membres de notre caucus. Il a formulé ce genre de propos à maintes reprises et, en fait, il m'a aidé à rédiger ce discours. Au bout du compte, nous avons un gouvernement plus généreux et compatissant que tout autre gouvernement qui l'a précédé, en ce qui a trait aux investissements pour l'élaboration future d'une véritable stratégie nationale du logement.
(1935)
    Monsieur le Président, 3 000 logements dans le cadre de l'Initiative pour la création rapide de logements, c'est tout simplement insuffisant. L'énoncé économique de l'automne n'indique pas que des mesures seront prises pour assurer la mise en place d'un fonds d'acquisition pour appuyer les fournisseurs de logements abordables dans l'achat de logements en difficulté, tandis que des fonds de capital à but lucratif font l'acquisition de ces logements.
    C'est ce qu'a réclamé l'ancienne rapporteuse des Nations unies sur le logement, Mme Leilani Farha, en mars. Elle a écrit au gouvernement le 19 avril à ce sujet. Nous voilà en décembre et le gouvernement n'a toujours pas eu la courtoisie de lui répondre. Sa suggestion est appuyée par de nombreux organismes de défense en matière de logement, dont l'Alliance canadienne pour mettre fin à l'itinérance. Selon un article publié par le Globe and Mail, des acheteurs privés se bousculent pour mettre la main sur des immeubles à appartements, surtout les édifices plus vieux, où le loyer tend à être moins élevé.
    Si nous attendons pour agir, il sera trop tard. L'heure n'est plus aux prétextes. Il est temps d'agir.
    Monsieur le Président, beaucoup trop de Canadiens n'ont nulle part où se loger. La COVID-19 a eu pour effet d'empirer une situation difficile, mais le gouvernement est passé à l'action et est en train d'apporter des améliorations notables pour les Canadiens. L'Initiative pour la création rapide de logements est le plus récent programme mis sur pied par le gouvernement pour aider les Canadiens à traverser cette période difficile et à revenir en force lorsque la situation économique sera meilleure.
    Je demande à la députée ainsi qu'aux députés des deux côtés de la Chambre de participer aux efforts. Je les exhorte à collaborer avec les gouvernements locaux et avec les partenaires du secteur du logement pour aider les électeurs de leur circonscription à traverser ces durs moments et à mettre en place des programmes de logement efficaces. J'encourage fortement la députée à le faire.
(1940)

Le transport aérien

    Monsieur le Président, je suis heureux d'être ici aujourd'hui pour discuter d'une question que j'ai posée concernant NAV CANADA et de la possibilité que la tour de contrôle de la circulation aérienne de l'aéroport international de Regina cesse d'exister prochainement. Il s'agit d'une discussion qui revêt une importance capitale pour les habitants de la Saskatchewan, du Sud-Ouest de la Saskatchewan et de Regina. Je me réjouis à la perspective d'obtenir une réponse de la part du député de Winnipeg-Nord. J'espère qu'il ne se contentera pas de lire des notes d'allocution et que nous pourrons entamer un dialogue, une conversation entre deux parlementaires au sujet d'un dossier que les gens de la Saskatchewan et les Canadiens de l'Ouest ont à cœur.
    J'ai été en mesure de poser une question au député de Winnipeg-Nord et au ministre des Transports. Toutefois, la réponse que j'ai obtenue n'était pas très satisfaisante pour les habitants de Regina-Lewvan. L'aéroport international de Regina est en plein cœur de Regina-Lewvan, et il est très important que les vols à destination et en provenance de cet aéroport soient rétablis en toute sécurité après la pandémie de COVID-19. Cela fera partie intégrante de notre reprise économique lorsque nous verrons la lumière au bout du tunnel.
    J'ai discuté avec des représentants de NAV CANADA et ils ont parlé de la complexité des vols qui passent dans la zone aérienne. Une chose que nous devons comprendre lorsqu'on parle de tour de contrôle, c'est que la 15e Escadre Moose Jaw, la base d'entraînement de l'Aviation royale du Canada, se trouve dans la même zone aérienne que Regina. Pour les vols complexes, nous voulons assurer la sécurité des pilotes militaires. Certains avions qui passent dans cette zone aérienne volent entre 600 et 900 kilomètres à l'heure, donc c'est une situation très complexe. Nous avons besoin de professionnels à la tour de contrôle pour assurer la sécurité du personnel militaire.
    De plus, comme le député de Winnipeg-Nord le sait sûrement, les Snowbirds, de renommée mondiale, sont à la 15e Escadre Moose Jaw et ils décollent de Moose Jaw. Ils peuvent voler dans le même espace aérien que des avions de l'aéroport international de Regina. Par conséquent, la sécurité de tous ces vols complexes doit être prise en compte dans le cadre de cette conversation.
    En fin de compte, Regina est également une capitale provinciale. Si nous n'avions pas de tour de contrôle de la circulation aérienne à Regina, ce serait la seule capitale provinciale au pays à ne pas avoir de mesures de sécurité en place. Je crois que cela envoie un message à la population, non seulement à Regina et en Saskatchewan, mais dans tout l'Ouest canadien. Une capitale provinciale sans tour de contrôle de la circulation aérienne envoie le mauvais message.
    Je me souviens nettement que, le soir de l'élection, le premier ministre a dit qu'il entendait ce que disent les Canadiens de l'Ouest. Il a dit qu'il veillerait à ce que leurs préoccupations soient entendues. Or, ce n'est pas ce que nous observons depuis un an.
    Pour cette raison, je crois qu'il est temps que le gouvernement libéral réponde à l'appel et assure aux Canadiens de l'Ouest qu'il est à leur écoute et qu'il tiendra compte de la complexité de tous ces vols dans l'espace aérien de l'aéroport international de Regina ainsi que de la sécurité des Snowbirds, de l'Aviation royale canadienne et de tous les pilotes de la 15e Escadre Moose Jaw dans sa prise de décision.
    Monsieur le Président, je mets mes notes de côté, car je préfère entamer une discussion que de prononcer un discours. J'assure au député que je soulèverai la question auprès du ministre. Je ne dis pas cela à la légère.
    J'ai passé quelques années en Saskatchewan quand j'étais jeune. Je connais d'ailleurs très bien les Snowbirds, ayant assisté au spectacle aérien à Moose Jaw. Je m'y connais également en contrôle de la circulation aérienne, car j'étais aide-contrôleur de la circulation aérienne dans les Forces canadiennes. Je travaillais dans une tour à Lancaster Park, qui a la plus longue piste d'aéroport; elle fait 14 000 pieds de long. Une navette spatiale pourrait y atterrir, comme je l'ai d'ailleurs rappelé à l'actuel ministre. J'ai aussi de la famille à Regina. Allez, Riders. On aime tous les Riders.
    Nous saisissons le rôle important que jouent les aéroports dans nos collectivités, qu'il s'agisse de petits aéroports comme ceux que l'on retrouve un peu partout dans les Prairies, de plus grands, comme celui de Regina, ou encore d'aéroports internationaux, comme celui de Calgary. Je suis certain que mon collègue connaît l'aéroport de Calgary. Il est immense, et il ne cesse de grossir. Nous avons toutes sortes d'aéroports qui fournissent toutes sortes de services. Je comprends l'importance des tours. Je comprends aussi l'importance des enjeux, ayant moi-même travaillé avec des radars, des zones aériennes, et tout cela. La sécurité est importante.
     NAV CANADA possède un niveau élevé d'expertise, contrairement à moi et contrairement au député d'en face, je présume. Il est donc important que nous obtenions une bonne compréhension. S'il y a quelque chose de concret que nous puissions faire, je peux assurer au député que nous sommes à l'écoute et très intéressés par ce qui peut être fait pour faire avancer la cause.
    Une des choses intéressantes qui se trouvaient dans la présentation budgétaire — le mini-budget — est l'idée qu'il faut un fonds d'investissement pour les Prairies. Pour moi, c'est une indication pour les Prairies que le gouvernement tient à ce que les trois provinces de la région — j'ai habité dans les trois — obtiennent toute l'attention dont elles ont besoin. Je comprends très bien, d'après mon expérience personnelle, l'importance des aéroports et des tours de contrôle dans la région.
    Je note les commentaires du député et j'aurai éventuellement une discussion à ce sujet. Je ne sais pas quand, mais j'en discuterai avec le ministre.
(1945)
    Monsieur le Président, je remercie sincèrement le député de sa réponse. Comme il a déjà travaillé dans une tour de contrôle, je sais qu'il connaît la différence entre ce qui s'y fait et ce que font et offrent les services d'information sur les vols.
    Puis-je lui demander de bien s'assurer, quand il abordera le sujet avec le ministre des Transports, que celui-ci comprend la complexité des vols qui passent par l'aéroport international de Regina? J'estime — et j'espère que le député d'en face sera d'accord — que les services d'information sur les vols ont leur utilité, mais ce n'est jamais comme quand une personne contrôle le trafic aérien à partir d'une tour de contrôle, car tous les mots comptent et il y a une différence entre « vous pouvez atterrir », « vous devriez pouvoir atterrir » et « vous avez le feu vert pour décoller ».
    Le député sait de quoi je parle et il comprend la différence entre les services offerts par toutes ces entités. J'ose espérer qu'il va m'aider à faire en sorte que l'aéroport international de Regina conserve sa tour de contrôle, vu la complexité des vols qui y transitent, mais aussi parce que c'est là que décollent les Snowbirds et les appareils de la 15e Escadre Moose Jaw et parce que nous devons prendre au sérieux la sécurité des hommes et des femmes de courage qui y travaillent et leur fournir les services dont ils ont besoin.
    Monsieur le Président, quand j'étais à Edmonton, j'occupais deux fonctions. La première était au sein du service de recherche et sauvetage, qui, en passant, se trouve désormais à Winnipeg, où je planifiais les vols qui finiraient par apparaître sur le radar et dans les différents espaces aériens. Quand je ne travaillais pas là, j'étais dans la tour de contrôle et j'étais responsable de guider les avions sur le tarmac jusqu'à la piste, où le contrôleur de la circulation aérienne indiquait aux pilotes qu'ils étaient autorisés à décoller.
    Je comprends assez bien la question. Si mon collègue est prêt à appeler NAV CANADA pour organiser une discussion sur Zoom peu après la fin de la session, je serais très intéressé à prendre part à cette discussion, et peut-être que nous pourrons trouver quelque chose à envoyer conjointement au ministre.

L'éthique

    Monsieur le Président, je suis heureux de prendre part au débat d'ajournement. Ma question porte sur des observations que j'ai formulées à la période des questions. J'ai posé une question, mais je ne suis pas certain que nous ayons véritablement obtenu une réponse.
    Évidemment, il s'agit du scandale entourant l'organisme UNIS. Cet été, le tristement célèbre programme de bourse canadienne pour le bénévolat étudiant, d'une valeur de 912 millions de dollars, a été présenté aux Canadiens. Le programme a été annulé avant son lancement officiel. Nous avons vu le premier ministre présenter des excuses pour avoir omis de se récuser. Le ministre des Finances de l'époque s'est lui aussi excusé de ne pas s'être récusé.
    L'organisme UNIS était au centre de l'affaire. Les récusations du premier ministre et de l'ancien ministre des Finances auraient été nécessaires en raison du fait que des membres de la famille du premier ministre avaient été payés près d'un demi-million de dollars par l'organisme UNIS. Le premier ministre était prêt à laisser cet organisme gérer un demi-milliard de dollars d'argent public.
    Les difficultés de l'ancien ministre des Finances sont issues du fait que sa fille a directement travaillé pour l'organisme. L'ancien ministre avait aussi accepté des vacances gratuites d'une valeur de 40 000 $ de la part de cet organisme. Le ministre des Finances et le premier ministre siégeaient à la table du Cabinet lorsque le projet a été approuvé.
    Revenons sur l'histoire récente. L'actuel premier ministre est le premier de l'histoire canadienne à avoir été reconnu coupable d'avoir enfreint les dispositions législatives sur l'éthique. Nous avons pu lire tous les détails dans « Le rapport Trudeau » et le « Rapport Trudeau II ». Dans le premier cas, il était question du voyage du premier ministre sur l'île d'un milliardaire. Dans le deuxième cas, on parlait de son ingérence dans la poursuite criminelle contre ses amis de SNC-Lavalin.
    Nous parlons maintenant d'une situation qui fera l'objet d'un troisième rapport du commissaire à l'éthique: la famille du premier ministre a reçu un demi-million de dollars d'un organisme, puis il lui a offert un demi-milliard de dollars en retour.
    Qu'est-il arrivé lorsque les enquêtes des comités sont devenues trop délicates pour le premier ministre alors que des documents étaient sur le point d'être remis au comité des finances et au comité de l'éthique? Le premier ministre a fermé le Parlement.
    On se rappelle qu'il n'y a pas très longtemps le premier ministre a dit que la lumière du soleil était le meilleur désinfectant. Lorsque le premier ministre a décidé de proroger le Parlement, il a affirmé qu'il y aurait amplement de temps pour répondre aux questions lorsque la Chambre reprendrait ses travaux. Que s'est-il passé à la reprise des travaux de la Chambre? Les libéraux ont fait de l'obstruction pendant plus de 40 heures au comité.
    Le secrétaire parlementaire nous dira que les conservateurs cherchent des scandales partout, mais la question à l'intention du secrétaire parlementaire est très claire. S'il n'y a rien à cacher et si le gouvernement a le courage de ses convictions, pourquoi ne pas simplement laisser ces questions être mises aux voix? Pourquoi faire de l'obstruction? Pourquoi alimenter l'apparence de corruption si, comme il nous le dira, il n'y en a pas? Pourquoi bloquer les questions légitimes de l'opposition officielle et des parlementaires concernant la conduite du gouvernement? C'est un comportement indigne d'un premier ministre. Cela ébranle la confiance des Canadiens envers les parlementaires et le Parlement.
    Nous devons revenir à un gouvernement foncièrement bon et doté d'un sens moral. Je suis impatient d'offrir cette possibilité aux Canadiens aux prochaines élections. D'ici à ce qu'ils puissent élire un gouvernement conservateur avec, pour premier ministre, le député de Durham, le Cabinet du premier ministre actuel, bien qu'il n'occupe ce poste que provisoirement, doit fournir sa part d'efforts et laisser pénétrer la lumière.
(1950)
    Monsieur le Président, je suis sûr que vous ne seriez pas surpris d'apprendre que nous avons déjà un gouvernement foncièrement bon et doté d'un sens moral, un gouvernement qui comprend et reconnaît l'importance de la reddition de comptes et de la transparence. Ce n'est pas parce que les partis de l'opposition affirment que c'est un scandale que cela en est un.
    Malheureusement, je n'ai pas pu participer à beaucoup de discussions sur ce sujet, surtout parce que j'avais d'autres engagements, mais je ne concéderai pas à l'opposition officielle que cette affaire est un grand scandale. Il est intéressant d'entendre mon collègue dire, comme il l'a fait aujourd'hui durant son intervention de trois ou quatre minutes, que l'actuel premier ministre est le premier de l'histoire canadienne à avoir été reconnu coupable par le commissaire à l'éthique d'avoir enfreint les lois sur l'éthique. Or, ce n'est nullement le cas.
    C'est Stephen Harper qui a créé le poste de commissaire à l'éthique. Ce poste n'existait donc pas lorsque ses prédécesseurs étaient à la tête du pays. Toutefois, le député tente de donner l'impression que le premier ministre actuel est vraiment mauvais. Après tout, deux titulaires de ce poste ont découvert des erreurs commises par le premier ministre, erreurs qu'il a reconnues. Il a présenté les excuses appropriées.
    Depuis qu'ils sont dans l'opposition, les conservateurs ont recours à la même tactique, soit la diffamation. Ils se fichent bien des politiques. Ils s'en prennent au premier ministre, au ministre des Finances ou à d'autres ministres, et ils crient toujours au scandale, qu'il y en ait un ou non. C'est tout ce dont ils veulent parler.
    Le député a parlé d'obstruction, disant que les libéraux sont méchants parce qu'ils ont fait de l'obstruction pendant 40 heures, mais ce sont les conservateurs qui sont malveillants à toujours crier au scandale à tout bout de champ. Ils n'en finissent plus d'inviter des fonctionnaires à comparaître devant les comités. Je pense que mes collègues se sont très bien acquittés de la tâche de veiller au maintien des fonctions gouvernementales, alors que l'opposition s'obstine à présenter toutes sortes de théories, parfois même des théories du complot.
    Pour notre part, nous préférons nous concentrer sur le coronavirus, comme nous l'avons clairement démontré. Contrairement aux conservateurs, qui veulent seulement convoquer des fonctionnaires pour leur poser des questions sur leurs théories du complot, nous préférons laisser les fonctionnaires faire ce qu'ils font le mieux, soit servir les Canadiens en minimisant les dégâts causés par le coronavirus. Cela a toujours été notre priorité, comme nous l'avons démontré avec les nombreux programmes que nous avons présentés.
    Il a beaucoup été question de vaccination ces derniers temps, à juste titre. L'autre jour, j'ai demandé à l'opposition conservatrice pourquoi elle ne nous posait pas mille questions sur la vaccination l'été dernier, en juillet ou en août. Le fait est qu'elle préférait passer son temps à ajouter foi à cette idée comme quoi il y aurait un gros scandale. L'affaire de l'organisme UNIS n'est pas un scandale. Je reconnais que certaines erreurs ont été faites, ce qui a d'ailleurs été bien établi, mais le gouvernement continue de concentrer son attention sur la pandémie.
    Les conservateurs ont beau chercher à détourner l'attention, nous sommes déterminés à nous concentrer sur le coronavirus. J'inviterais mon ami à chercher à amener ses collègues à en faire de même.
(1955)
    Monsieur le Président, comme c'est souvent le cas, la réponse du député d'en face à mes commentaires et à mes questions est décevante.
    Les conservateurs ont mis en place ces mesures de reddition de compte et ils n'ont pas été reconnus coupables d'en avoir enfreint une seule, parce qu'ils ne l'ont pas fait. Les Canadiens ont ensuite élu le gouvernement libéral, qui est immédiatement tombé dans le piège que nous lui avions tendu. Quel était ce piège? C'était l'exigence de ne pas enfreindre la loi, de ne pas enfreindre les règles, ce qui s'est avéré impossible pour les libéraux. Il n'a nullement été nécessaire d'inventer des histoires ou de fomenter des complots. Nous avons observé à maintes reprises que la seule chose que les libéraux veulent faire, à part améliorer leur propre sort, c'est aider leurs proches bien placés à améliorer le leur.
    Le député d'en face doit implorer ses collègues de faire ce qui s'impose et d'être véritablement transparents. Je ne surprendrai personne si je dis que l'opposition leur demandera des comptes sur des questions financières, sur la réponse à la pandémie et sur leurs transgressions éthiques.
    Monsieur le Président, je peux assurer au député que nous faisons ce qu'il faut. Je ne suis pas en train de dire que le gouvernement a été absolument parfait. Nous avons fait quelques erreurs à certains égards, mais nous avons reconnu nos erreurs et présenté des excuses lorsque c'était nécessaire. Nous continuons de travailler en collaboration avec le commissaire à l'éthique et d'autres mandataires indépendants du Parlement.
    Cependant, il va sans dire que nous allons continuer de lutter contre les effets négatifs de la pandémie et d'aider les Canadiens de la classe moyenne et ceux qui veulent en faire partie. Ces dossiers sont prioritaires pour le gouvernement et ils le demeureront.

[Français]

    La motion portant que la Chambre s'ajourne est maintenant réputée adoptée. La Chambre demeure donc ajournée jusqu'à demain, à 14 heures, conformément à l'article 24(1) du Règlement.
    (La séance est levée à 20 heures.)
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU