:
Je déclare la séance ouverte.
Bienvenue à la 49e réunion du Comité permanent du commerce international.
Bienvenue à tous. Je souhaite tout spécialement la bienvenue ce matin aux suppléants, qui représentent tous les partis politiques.
La réunion d’aujourd’hui se déroule en mode hybride, conformément à l'ordre de la Chambre du 23 juin 2022. Il y a donc des membres qui y assistent en personne dans la salle et d'autres à distance grâce à l'application Zoom.
J'ai quelques observations à faire à l'intention des témoins et des membres du Comité.
Attendez que je vous nomme avant de prendre la parole, et parlez aussi lentement et clairement que possible. Si vous participez à la réunion par vidéoconférence, cliquez sur l'icône du microphone pour l'activer, et mettez‑le en sourdine quand vous n'avez pas la parole.
Pour l'interprétation, les personnes qui sont sur Zoom ont le choix, au bas de leur écran, entre le parquet, l'anglais et le français. Les personnes présentes dans la salle peuvent utiliser l'oreillette et sélectionner le canal souhaité.
Je vous rappelle que toutes les interventions doivent être faites par l'intermédiaire de la présidence. Pour ceux qui sont dans la salle, si vous souhaitez prendre la parole, veuillez lever la main. Pour ceux qui sont sur Zoom, veuillez utiliser la fonction « lever la main ». La greffière et moi allons gérer la liste des intervenants du mieux que nous le pouvons. Nous vous remercions de votre patience et de votre compréhension à cet égard.
Veuillez noter également qu'il est interdit de prendre des photos dans la salle ou de faire des captures d'écran sur Zoom.
Conformément à notre motion de régie interne concernant les tests de connexion des témoins qui comparaissent par vidéoconférence, j'informe le Comité que tous les témoins ont effectué les tests de connexion requis avant la réunion. Si vous éprouvez des difficultés techniques, veuillez m'en informer, et nous suspendrons la séance afin de nous assurer que tout le monde a la possibilité de participer.
Conformément au paragraphe 108(2) et à la motion adoptée par le Comité le mercredi 2 février 2022, le Comité reprend son étude des considérations relatives à l'environnement et aux droits de la personne au sein des sociétés minières canadiennes à l'étranger.
Nous accueillons aujourd'hui deux groupes de témoins. Le premier groupe est composé de trois témoins qui s'exprimeront par vidéoconférence. Nous allons entendre deux représentantes d'Exportation et développement Canada: Rachel Guthrie, vice-présidente, Stratégie, rayonnement et rapports, ainsi que Sophie Roy, vice-présidente, ESG groupe succès des clients. Nous allons également entendre Sheri Meyerhoffer, ombudsman au Bureau de l'Ombudsman canadien pour la responsabilité des entreprises.
Je vous souhaite la bienvenue à toutes les trois.
Nous allons commencer par les déclarations préliminaires, puis nous passerons aux séries de questions.
Madame Guthrie, je vous invite à prononcer une déclaration préliminaire de cinq minutes ou moins.
Bonjour, madame la présidente, et distingués membres du Comité.
C'est un grand plaisir d'être parmi vous aujourd'hui. Nous sommes heureux de contribuer à l'étude du Comité sur les considérations relatives à l'environnement et aux droits de la personne au sein des sociétés minières canadiennes à l'étranger.
Depuis plusieurs années, Exportation et développement Canada, ou EDC, s'est doté d'un programme qui place le commerce durable, responsable, progressif et inclusif au centre de ses activités commerciales. Ce programme est fondé sur un ensemble de politiques qui assurent la clarté et la responsabilité dans trois domaines clés: la durabilité environnementale, l'éthique et la transparence en affaires, et la protection des droits de la personne partout où se trouvent les clients d'EDC.
Pour ceux qui sont moins familiers avec EDC, permettez-moi de vous présenter une brève introduction.
EDC est une société d'État dont le but est d'aider les entreprises canadiennes à réussir sur la scène internationale. Nous sommes des experts internationaux en gestion du risque, et à ce titre, nous offrons nos services aux entreprises de toutes les tailles et dans tous les secteurs de l'économie. Nous avons un vaste éventail de solutions financières et de services consultatifs pour aider nos clients à accroître leurs activités en toute confiance.
Comme le Comité le sait sans doute, EDC fonctionne selon des principes commerciaux. Tout au long de son histoire, EDC a toujours été rentable. Depuis sa création en 1944, EDC a également eu tendance à refléter la taille et la nature de l'économie canadienne. Comme les ressources naturelles formaient le moteur de l'économie canadienne, elles constituaient également une grande partie de nos portefeuilles de prêts et d'assurances. Aujourd'hui, à mesure que l'économie croît et se diversifie, EDC en fait autant, de sorte que notre portefeuille et nos activités reflètent actuellement des secteurs aussi diversifiés que l'économie proprement dite.
EDC continue de jouer un rôle de soutien du secteur des ressources naturelles, notamment le secteur minier, qui est à la fois dynamique et complexe. Au cours de l'histoire du Canada, ce secteur a joué un rôle clé dans la croissance économique en tant que producteur de matières premières très en demande dans le monde entier. Cet héritage se poursuit aujourd'hui, d'autant plus que les minéraux critiques deviennent de plus en plus importants pour permettre au Canada d'atteindre son objectif de passer à une économie à faibles émissions de carbone.
Bref, mener des affaires de manière responsable fait partie intégrante d'EDC et c'est quelque chose que nous prenons très au sérieux. Chaque transaction approuvée par EDC a fait l'objet d'un processus de diligence raisonnable qui reflète les meilleures pratiques de l'industrie et respecte nos engagements internationaux. Si nous décelons des problèmes particuliers au cours de ce processus, nous prenons les mesures nécessaires pour comprendre ces problèmes et les régler.
EDC dispose d'un cadre de gestion des risques environnementaux et sociaux bien établi. Ce cadre oriente l'ensemble de nos activités et s'agence à divers accords et normes internationaux, notamment les Approches communes mises de l'avant par l'OCDE, les principes directeurs de l'ONU relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme, ainsi que les Principes de l'Équateur. Nos politiques sont accessibles publiquement sur notre site Web, tout comme notre cadre de diligence raisonnable. Nos politiques sont régulièrement révisées dans le cadre d'un solide processus de mise à contribution des intervenants.
Enfin, j'aimerais souligner le rôle important que joue EDC en sa qualité d'institution financière, et la façon dont nous sommes à la recherche d'occasions...
:
Je vous remercie, madame la présidente. Je vais reprendre mon exposé.
Enfin, j'aimerais souligner le rôle important que joue EDC en tant qu'institution financière. Nous recherchons constamment des occasions d'utiliser notre influence pour promouvoir des pratiques commerciales durables et responsables.
Notre rôle consiste, entre autres, à repérer les risques, à collaborer avec l'entreprise pour trouver des moyens d'atténuer ces risques, puis à surveiller de près l'évolution des progrès réalisés. Nous pensons que c'est de cette manière que nous pouvons exercer une influence positive et initier des changements bénéfiques. Afin d'opérer le bon type de changements, nous sommes en constant apprentissage et nous faisons évoluer notre approche. Notre priorité est de nous assurer de mettre en place les processus adéquats pour repérer les risques et prendre de bonnes décisions.
Je vous remercie de m'avoir invitée à comparaître aujourd'hui.
:
Madame la présidente et honorables membres du Comité, je vous remercie de votre invitation à comparaître aujourd'hui. Je répondrai avec plaisir à vos questions.
Pour commencer, j'aimerais souligner que je me joins à vous aujourd'hui sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinabe. Le respect des droits des Autochtones est étroitement lié au travail que fait mon bureau et à l'étude que mène votre comité sur les considérations relatives à l'environnement et aux droits de la personne. En effet, les opérations minières du Canada à l'étranger se déroulent fréquemment dans des régions éloignées, souvent sur des territoires autochtones ou à proximité. Mon équipe et moi honorons la relation durable entre les peuples algonquins et les peuples autochtones du monde entier, ainsi que leurs territoires traditionnels.
Avant de formuler mes observations, je souhaite dire quelques mots à propos de mon mandat. Je suis l'ombudsman du Bureau de l'Ombudsman canadien pour la responsabilité des entreprises, c'est-à-dire l'OCRE. J'ai pour mandat de promouvoir le respect des droits de la personne et la conduite responsable des affaires par les entreprises canadiennes de confection de vêtements, d'exploitation minière, pétrolière et gazière qui exercent leurs activités à l'étranger. Mon bureau fournit également un mécanisme de plainte aux personnes et aux collectivités qui estiment que leurs droits de la personne sont bafoués par des entreprises canadiennes de vêtements, d'exploitation minière, ou de pétrole et de gaz qui font des affaires à l'étranger.
Le Canada est un chef de file sur la scène mondiale, notamment parmi nos partenaires du G7 et de l'OCDE. Le Canada est également un leader en matière d'exploitation minière, et son empreinte écologique est importante sur la planète. Cela signifie que les sociétés minières canadiennes peuvent avoir des répercussions importantes sur les droits de la personne et sur l'environnement dans le monde entier.
Ma première observation est que la stratégie du Canada en matière de conduite responsable des entreprises à l'étranger est claire: notre gouvernement s'attend à ce que les sociétés minières canadiennes respectent les normes canadiennes en matière de droits de la personne et de protection de l'environnement, peu importe où elles exercent leurs activités. La conduite responsable des entreprises inclut le respect des droits de la personne et de l'environnement.
Les sociétés minières canadiennes ont également le devoir de respecter les Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme des Nations unies, de même que les Principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales. Ces deux documents fournissent des orientations reconnues et respectées à l'échelle internationale en matière de droits de la personne et de protection de l'environnement, y compris les droits de la personne et la diligence raisonnable en matière d'environnement.
Ma deuxième observation vise à réitérer le soutien de l'OCRE à un projet de loi sur la diligence raisonnable en matière de droits de la personne et de l'environnement. Nous croyons qu'un tel projet de loi qui s'applique à l'ensemble des secteurs économiques et couvre tous les droits de la personne fera progresser les droits de la personne par les entreprises, en plus d'aider à prévenir les atteintes aux droits de la personne et à l'environnement.
Cette mesure législative exigerait des entreprises qu'elles ciblent et abordent les risques liés aux droits de la personne et à l'environnement, et qu'elles mettent en place des mesures de prévention et des mesures correctives visant à réduire les risques de préjudice pour les travailleurs, les collectivités et l'environnement. Le projet de loi permettrait également de réduire les coûts des entreprises, tant sur le plan financier que sur le plan de la réputation. Il renforcerait le leadership du Canada en matière de protection des droits de la personne et de l'environnement, et ce, partout où les entreprises canadiennes exercent des activités.
Ma troisième et dernière observation est que le Canada a la capacité de renforcer un mécanisme de recours efficace en matière de droits de la personne et de dommages à l'environnement causés par certaines activités des sociétés minières canadiennes à l'extérieur du Canada. Cela peut être accompli en accordant à l'OCRE le pouvoir d'obliger les sociétés minières à produire des documents et de contraindre des individus à témoigner.
J'ai mentionné plus tôt les Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme des Nations unies. Ces principes reconnaissent le devoir des États, y compris le Canada, d'assurer un accès efficace à des recours aux personnes et aux collectivités touchées par certaines activités des sociétés minières.
L'OCRE détient en ce moment le pouvoir de mener des enquêtes, de se lancer dans la médiation et, le cas échéant, de formuler des recommandations en matière de mesures correctives aux entreprises canadiennes et aux entreprises basées dans d'autres pays. Nous avons également l'obligation de présenter des rapports publics et d'assurer le suivi de nos recommandations. Ces pouvoirs peuvent avoir des répercussions positives. Néanmoins, l'OCRE n'a pas à l'heure actuelle le pouvoir d'obliger les entreprises canadiennes de présenter des documents ni de contraindre des individus à témoigner. Ces pouvoirs supplémentaires permettraient à l'OCRE d'avoir un impact positif encore plus important.
Plus précisément, doter l'OCRE des pouvoirs que je viens de mentionner permettrait, d'abord, de fournir aux personnes et aux collectivités touchées l'accès à des recours efficaces. Ces personnes peuvent ne pas avoir accès à des renseignements pertinents et sont à risque de subir des représailles pour avoir exercé leurs droits. Ensuite, cela inciterait les entreprises canadiennes à participer volontairement au processus de plainte de l'OCRE, notamment en recourant à des processus de résolution consensuelle des différends, comme le règlement rapide des plaintes et la médiation. Enfin, accorder de tels pouvoirs à l'OCRE permettrait au Canada de démontrer qu'il respecte son obligation de veiller à ce que l'accès à des recours fasse partie de la responsabilité des entreprises en matière de droits de la personne et d'environnement.
Merci beaucoup.
:
Merci beaucoup, madame la présidente.
Ma première question est pour Exportation et développement Canada, ou EDC.
À propos du mandat d'EDC, la stratégie de 2014 mentionnait que le Service des délégués commerciaux du Canada peut fournir aux sociétés minières canadiennes des contacts et des conseils pour cerner, gérer et atténuer les risques environnementaux et sociaux, comme le risque d'atteintes aux droits de la personne associé à leurs activités minières à l'étranger. Selon la stratégie, le gouvernement du Canada ne doit pas soutenir les sociétés minières canadiennes qui ne se conforment pas aux directives sur la responsabilité sociale des entreprises et aux pratiques exemplaires.
Plus tôt au Comité, nous avons entendu que les entreprises non conformes peuvent encore avoir accès aux délégués commerciaux. Avez-vous des preuves à l'appui? Avez-vous un moyen de faire respecter cela? Vous a‑t‑on déjà signalé une telle situation? Dans l'affirmative, quelles mesures avez-vous prises pour la corriger?
:
Merci, madame la présidente. Je vais poser la majorité de mes questions à la représentante de l'OCRE, Mme Meyerhoffer.
Je suis heureux de vous revoir.
Comme vous le savez, le projet de loi est à l'ordre du jour du 6 mars pour franchir l'étape du rapport et de la troisième lecture. Il est passé par le Sénat, et il a fait l'objet d'un vote unanime à la Chambre. Il a ensuite été renvoyé au comité des affaires étrangères et est maintenant de retour à la Chambre. La témoin qui vous suivra dira qu'il serait mieux que les parlementaires votent contre le projet de loi puisqu'il va à l'encontre du, et je cite, « momentum » entourant la diligence raisonnable.
Comme première question, étant donné que votre organisation est convaincue que le projet de loi doit être adopté le plus rapidement possible, que diriez-vous à ceux, sans oublier la témoin qui vous suivra, qui disent que cette mesure législative ne devrait pas être adoptée?
:
Je veux commencer par dire qu'il est essentiel d'avoir une loi rigoureuse sur les chaînes d'approvisionnement pour prévenir et contrer les atteintes aux droits de la personne dans les chaînes d'approvisionnement mondiales et pour permettre au Canada de demeurer concurrentiel. Je crois — mon organisation croit — que le projet de loi est un premier pas en avant pour renforcer le respect des droits de la personne par les entreprises canadiennes qui mènent des activités à l'étranger. Nous appuyons tous les efforts déployés pour renforcer la transparence dans les chaînes d'approvisionnement.
Comme vous le savez, nous croyons que le projet de loi peut être renforcé. Nous avons présenté un mémoire au Comité sénatorial permanent des droits de la personne pendant ses délibérations, et nous avons proposé quatre façons de renforcer la mesure législative, c'est‑à‑dire ajouter au libellé la lutte contre la traite des travailleurs, prévoir la capacité de prendre des règlements qui établissent des seuils, préciser davantage les exigences de déclaration et renforcer la surveillance, y compris au moyen d'audits indépendants et de rapports annuels.
Vous pouvez trouver notre mémoire sur le projet de loi sur notre site Web, mais pour résumer, nous l'appuyons. Nous pensons qu'il peut être renforcé. Dans notre mémoire, nous disons qu'il peut l'être par voie réglementaire. Aucune loi n'est parfaite.
Je pense que je vais m'arrêter ici.
:
Merci de poser la question.
Je veux juste dire que du point de vue de l'OCRE, et du mien, ce n'est pas un choix entre une loi sur la transparence ou les droits de la personne et une loi sur la diligence raisonnable en matière de droits de la personne et d'environnement. Les deux ont leur raison d'être, et je pense donc qu'elles sont toutes les deux utiles.
À propos de prendre des règlements, nous pouvons voir que les différents secteurs doivent être traités différemment, avec peut-être différents seuils. Certains ont des chaînes d'approvisionnement plus complexes et plus longues. Différentes situations dans chaque secteur doivent être abordées, et nous pensons qu'elles peuvent l'être, et elles doivent l'être, dans une mesure législative.
:
Je vais revenir à ce que j'ai dit dans ma réponse concernant les plaintes.
L'OCRE a reçu des plaintes. Nous nous en occupons. Des entreprises ont refusé de participer à notre processus. Le pouvoir d'obliger des témoins à comparaître et d'exiger la production de documents permettrait à mon organisation de forcer la participation d'une entreprise et de ne pas avoir à s'adresser aux tribunaux en cas d'allégations relatives aux droits de la personne, ce qui est coûteux et moins accessible.
Je pense que nous savons maintenant que ce ne sont pas toutes les entreprises qui participent. Pour aller de l'avant et vraiment faire un travail méticuleux, la seule solution serait d'avoir ces pouvoirs. Dans les autres cas — je répète que c'est ce que nous espérons dans la plupart des dossiers, et ce que nous voyons maintenant —, nous pouvons collaborer de manière productive pour régler le problème, mais ce n'est pas toujours ainsi, et nous en avons déjà la preuve.
:
Merci de poser la question. Pourquoi l'OCRE ne reçoit‑il pas plus de plaintes visant des sociétés minières, alors que nous savons que leur empreinte est considérable?
D'autres témoins ont dit qu'il y a beaucoup de situations qui nécessitent notre attention et une réparation. Je ne connais pas toutes les réponses, mais comme nous le savons tous, il y a beaucoup de dossiers qui se retrouvent directement devant les tribunaux. C'est une des raisons.
Nous avons également entendu dans les témoignages qu'étant donné que nous n'avons pas les pouvoirs nécessaires pour contraindre les gens à témoigner, les organisations de la société civile ne recommandent pas aux personnes avec qui elles travaillent de signaler leur situation à l'OCRE pour régler le différend.
Troisièmement, comme vous l'avez mentionné, je pense que beaucoup de personnes ne savent pas que nous existons. L'OCRE travaille assidûment pour remédier à la situation, car c'est effectivement une des raisons pour lesquelles on ne s'adresse pas à nous.
Je vous remercie d'avoir soulevé ce point.
:
Ce que j'en comprends, c'est que, pour déposer une plainte, il faut aller sur votre site Internet.
Dans la situation hypothétique que je viens d'évoquer, les Autochtones vivant au fin fond de la Colombie qui subiraient l'affront de voir leurs droits violés devraient donc trouver votre site Internet s'ils veulent déposer une plainte.
Ce que vous me dites, c'est qu'il est presque impossible que cela se produise.
De toute façon, ils ne sont même pas dirigés vers votre site Internet. J'en comprends donc que, le site Internet et les moyens financiers qui sont mis en œuvre pour le mettre en place par le gouvernement canadien, c'est de l'argent perdu.
:
Je suis désolé de vous interrompre. Je ne veux pas paraître impoli, mais je n'ai vraiment pas beaucoup de temps.
Je pense que la réponse a déjà fait rire quelques-uns de mes collègues.
Je m'adresse de nouveau aux représentantes d'EDC.
Vous avez entendu la représentante du Bureau de l'OCRE nous dire carrément qu'il est impossible pour cet organisme de faire en sorte que les victimes de violations de droits de la personne déposent des plaintes par l'entremise de leur propre organisation.
Par conséquent, comment votre organisme peut-il savoir si vous financez ou non des compagnies minières qui, à l'heure actuelle, battent pavillon canadien et violent les droits de la personne?
Comment est-ce possible si même l'ombudsman qui est attitré aux enquêtes à ce sujet est incapable de produire des rapports sur ces minières canadiennes?
J'ai bien hâte de vous entendre.
:
C'est ce qui me préoccupe. À quel moment décidez-vous d'agir? Attendez-vous que des groupes indigènes locaux présentent une plainte, ou prenez-vous des mesures proactives?
Il y a l'exemple de Barrick Gold, qui possède la mine Veladero en Argentine. Comme par hasard, elle appartient conjointement à Shandong Gold, une société chinoise. Il y a eu trois ou quatre déversements importants de cyanure, de mercure et d'arsenic dans les rivières locales. Les gens de la place se sont plaints. Le rapporteur spécial des Nations unies sur les droits de la personne, David Boyd, qui vient de l'Université de la Colombie-Britannique, a fait paraître une lettre à ce sujet.
Je me demande si cela vous... Que faites-vous lorsque vous entendez ce genre de choses, et pourquoi n'en avez-vous pas entendu parler? Ne devriez-vous pas communiquer avec ces personnes pour leur demander des détails sur la situation? Je trouve remarquable que les Nations unies aient pris le temps de produire un rapport, mais que vous n'ayez apparemment rien fait dans ce dossier.
:
Nous discutons à diverses occasions avec un certain nombre d'entreprises des situations auxquelles elles font face. Nous donnons des conseils. Nous faisons un suivi de toutes les situations problématiques. Cela nous préoccupe autant que les autres. Comme vous le savez, les tribunaux ont été saisis de certains de ces dossiers. C'est l'approche qui a été retenue. D'autres personnes peuvent s'adresser au point de contact national pour porter plainte ou procéder autrement.
Nous suivons toutefois ces situations de près. Avec l'Association minière du Canada et l'Association canadienne des prospecteurs et des entrepreneurs, nous discutons de sujets d'étude qui pourraient être utiles pour aider les entreprises à faire un meilleur travail et à être plus responsables.
Nous avons seulement reçu deux plaintes. Pour l'instant, nous accordons la priorité à nos plaintes, et il y en a deux qui visent des sociétés minières. L'ombudsman peut également entreprendre un examen, ce que nous pourrions faire à l'avenir. Nous pouvons aussi réaliser une étude. Nous en discutons avec les associations industrielles depuis déjà un certain temps.
:
Merci, madame la présidente.
Je remercie les témoins d'être ici.
J'interrogerai d'abord Mme Meyerhoffer, du Bureau de l'ombudsman.
Vous avez dit que, en janvier 2018, le gouvernement fédéral a annoncé la création du Bureau de l'ombudsman canadien de la responsabilité des entreprises et, dans la foulée, la création d'un groupe consultatif sur la conduite responsable des entreprises. Vous avez dit que le Bureau était essentiellement fonctionnel depuis 2021 et que vous aviez été nommée à votre poste en 2019.
Est‑ce que votre bureau s'inspirait d'un modèle existant à l'étranger? Quels sont son rôle, sa mission, ses pouvoirs, par rapport à ceux des bureaux homologues à l'étranger? Par exemple, que fait la Chine? Que font les États-Unis? Que font, en la matière, certains de nos principaux partenaires commerciaux?
:
Merci beaucoup pour la question.
Mon bureau est le premier en son genre dans le monde entier. Il ne s'inspire donc d'aucun modèle, bien que divers ombudsmans demandent des comptes aux gouvernements. Il existe des ombudsmans qu'on pourrait qualifier d'administratifs et des ombudsmans pour diverses industries. Différents modèles ont pu nous inspirer ou l'ont effectivement fait.
Nous nous sommes également inspirés du Bureau du conseiller-médiateur pour l'application des directives de la Société financière internationale, peut-être une des organisations qui ressemble le plus à la nôtre, mais sans y être identique.
Voilà nos divers modèles. Notre démarche a été de discuter avec des organisations de la société civile, des associations industrielles et des compagnies ainsi que des administrations publiques, pour découvrir comment le mieux nous organiser, vu que nous sommes une création originale, une innovation. Le Canada peut vraiment s'enorgueillir de notre position de chef de file dans ce domaine.
:
Merci pour la question.
En fait, je travaille pour cet organisme depuis 18 mois. Avant, j'étais dans le secteur financier. Je vous avoue que, à mon arrivée, j'ai été très impressionnée par le degré de devoir de diligence. Je suis persuadée que les pratiques d'Exportation et développement Canada surpassent de loin celles de nombreuses institutions financières. Pour ce qui est de la compréhension des droits de la personne, au niveau des directeurs, ils ont de bonnes notions sur les recours et l'influence. En outre, nous avons mis en branle de nombreuses formations dans l'ensemble de l'organisation.
Pour répondre à votre question sur nos rapports avec l'ombudsman, nous restons fidèles à nos propres pratiques de devoir de diligence, mais nous avons régulièrement rencontré l'ombudsman pour lui expliquer notre approche aux opérations relevant des activités de notre organisation. Il nous est arrivé de refuser de participer à de telles opérations. Les chiffres qui y sont relatifs figurent dans notre rapport annuel intégré, qui est du domaine public.
:
Peut-être puis‑je vous renseigner un peu plus sur notre façon d'exercer notre devoir de diligence sur ces opérations.
Comme je l'ai dit au début, dans le cas du secteur minier ou de tout autre secteur de notre ressort, nous examinons les indicateurs de risque et nous privilégions les opérations qui présentent un risque supérieur. Nous tenons compte du pays où l'exploitation aura lieu, du secteur industriel et du bilan des cocontractants. Ce qui est très important, nous tenons compte de la présence de personnes vulnérables qui pourraient être touchées sur le terrain. Il s'agit de peuples autochtones, de femmes, d'enfants et d'autres groupes minoritaires.
Nous examinons également la capacité des clients d'éviter les risques, de les prévenir et de les atténuer grâce à leurs systèmes de gestion du risque. Nous évaluons l'engagement du client en sa qualité de partie prenante et les mécanismes d'examen des griefs qu'il a mis également en place. Après avoir déterminé qu'il subsiste des lacunes dans leur gestion du risque, d'après les normes internationales les plus rigoureuses, nous chercherons à nous entendre sur des mesures à prendre et nous intégrerons certaines de ces ententes dans notre propre documentation. Nous nous assurerons ensuite que les mécanismes seront en place pour, quand ces situations se présenteront, y répondre ou y remédier.
Il importe ici de comprendre que le processus de devoir de diligence que nous avons mis en place commence au début d'une relation ou d'une opération mais ne prend pas fin à la signature; ce devoir subsiste durant la relation commune avec nos clients et, quand surviennent des événements ou des impacts, nous retournons sur les lieux, nous faisons une partie du travail et nous nous engageons de nouveau avec nos clients à l'étranger. Nous examinons leur façon de répondre à certains des impacts et à y remédier. Voilà comment nous le faisons réellement et nous assurons d'atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés et de respecter les normes internationales auxquelles nous avons adhéré.
:
Nous réagirions à cette situation de différentes façons. Nous pourrions être alertés par un client, notre examen annuel de certains produits, des reportages négatifs de médias dont nous faisons une veille nocturne ou la critique de tiers que nous prenons très au sérieux, manifestement.
Ensuite, nous entrerions en contact avec nos clients pour mieux comprendre les répercussions subies sur place, les faits, les mesures qu'on prend pour réagir à la situation.
Il nous est parfois arrivé de prendre directement contact avec des communautés locales touchées pour mieux comprendre la situation et nous assurer que les bonnes mesures correctrices étaient prises. Quand, malheureusement, aucune issue n'est possible, nous déciderons de mettre fin à une relation ou de retirer notre appui.
Je voudrais vous rappeler que l'étude du Comité porte sur les minières canadiennes. Je pense que vous avez deux plaintes de minières canadiennes et non quinze, mais ce n'est pas grave. Je tenais à le souligner.
J'ai une dernière question qui s'adresse à EDC.
Vous avez dit que vous preniez la situation au sérieux et que votre démarche était conséquente. Le Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international, ou SDIR, a fait sensiblement la même étude, au printemps 2021.
S'il y a eu une démarche sérieuse de votre part, j'imagine que des corrections ont été apportées à la suite du rapport du Comité.
Quels correctifs ont été apportés par votre organisation à la suite de l'étude du Sous-comité sur les minières canadiennes dont EDC faisait l'objet?
:
Madame la présidente et éminents membres du Comité, bonjour. Je vous remercie de votre invitation et de votre désir d'étudier cette question essentielle.
[Français]
Nous sommes reconnaissants envers le Parlement de prendre cette question au sérieux et nous l'exhortons à agir rapidement pour répondre aux nombreux rapports de violations des droits de la personne liées aux activités minières à l'étranger.
[Traduction]
Je m'appelle Emily Dwyer. Je suis directrice des politiques au Réseau canadien sur la reddition de comptes des entreprises, le RCRCE.
Fondé en 2005, le RCRCE regroupe 40 organismes et syndicats membres de divers secteurs qui, collectivement, représentent la voix de millions de Canadiens. Nos membres sont répartis d'un bout à l'autre du pays et entretiennent des relations de longue date avec des travailleurs, des femmes et des peuples autochtones du monde entier.
Je travaille dans les territoires traditionnels non cédés du peuple algonquin Anishinabe.
Ce que je peux vous dire de manière non équivoque, c'est que le secteur minier est lié à de graves risques de violation des droits de la personne et de dommages environnementaux. À titre d'exemple, John Ruggie, auteur des « Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme » de l'ONU, a déclaré au Conseil des droits de l'homme de l'ONU que les « industries extractives constituent un cas particulier car nul autre secteur n'a une influence aussi grande et aussi envahissante sur le plan social et environnemental ».
En outre, ces sept dernières années, le Business and Human Rights Resource Centre a fait état d'attaques contre les défenseurs des droits de la personne et il a régulièrement documenté que l'exploitation minière est le secteur le plus dangereux pour ceux qui œuvrent à la protection des droits de la personne.
Ces faits sont particulièrement pertinents étant donné la place prépondérante qu'occupe le Canada dans le secteur minier mondial. Selon Ressources naturelles Canada, près de la moitié des sociétés minières du monde ont leur siège social au Canada, et les sociétés basées au Canada sont présentes dans 97 pays étrangers. Par conséquent, nous avons une responsabilité particulière d'agir.
Je tiens à préciser que je ne suis pas ici pour faire valoir que toute exploitation minière est soit mauvaise, soit bonne. Ce que je suis venue démontrer, c'est que l'approche du Canada à l'égard de l'exploitation minière canadienne à l'étranger est déficiente. Il s'agit d'une approche fondée sur la surveillance volontaire, de sorte que les comportements des sociétés minières reposent presque entièrement sur leur bonne volonté, leur bienveillance et leurs résultats nets, sans véritables règles obligeant les entreprises à respecter les droits de la personne et sans réelles conséquences si elles se livrent à des comportements préjudiciables.
L'approche du Canada permet donc aux entreprises de s'en tirer à bon compte en cas de graves violations des droits de la personne et fait abstraction des répercussions très réelles sur un grand nombre de personnes partout dans le monde. Le genre de violations dont il est question comprend notamment les menaces, les assassinats, les blessures, les viols collectifs, les conditions de travail dangereuses et abusives, le travail forcé, le non-respect des droits des Autochtones et des femmes, et de graves dommages à l'environnement.
Pendant des années, notre réseau, ainsi que des centaines de milliers de Canadiens, d'organisations de divers secteurs, de personnes touchées dans le monde entier et de nombreux organismes des Nations unies ont exhorté le Canada à mettre en place des mécanismes efficaces pour prévenir les violations des droits de la personne commises à l'étranger par des entreprises canadiennes — en particulier dans le secteur minier —, et pour y remédier. D'autres économies avancées reconnaissent de plus en plus que des mesures concrètes pour lutter contre les actes répréhensibles des entreprises sont essentielles à la prospérité et à la durabilité à long terme. Le mouvement vers l'adoption de lois contraignantes sur la diligence raisonnable en matière de droits de la personne et d'environnement obligeant les entreprises à respecter les droits de la personne et l'environnement prend de l'ampleur. Le Canada devrait suivre le mouvement.
Notre réseau exhorte le à agir sans tarder pour respecter l'engagement figurant dans sa lettre de mandat, soit de « présenter un projet de loi pour éliminer le travail forcé des chaînes d’approvisionnement canadiennes et faire en sorte que les entreprises canadiennes qui mènent des activités à l’étranger ne contribuent pas à des violations des droits de la personne. »
Pour être efficace, le Canada a besoin d'une loi qui va au‑delà d'une simple obligation de production de rapports et qui comprend trois éléments clés. La loi doit exiger des entreprises qu'elles préviennent les préjudices au lieu de se concentrer sur la production de rapports, doit aider les personnes touchées à obtenir réparation, et doit s'appliquer à l'ensemble des droits de la personne.
Malheureusement, le projet de loi , qui porte sur la déclaration de l'esclavage moderne et dont le Parlement sera bientôt saisi, ne contribuera pas à lutter contre les abus des entreprises et n'aidera pas le Canada à rattraper le retard qu'il accuse par rapport aux autres économies avancées sur le plan juridique.
Pour terminer, nous constatons l'absence de personnes directement touchées de la liste des témoins pour cette étude. Nous encourageons le Comité à augmenter le nombre de séances afin que les députés puissent entendre directement les collectivités et travailleurs touchés. Nous serions heureux de faciliter cela.
Je vous remercie de votre temps. C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.
:
Merci beaucoup, madame la présidente.
Je tiens à remercier la témoin de son témoignage.
Cette étude a été très instructive, et j'ai hâte de lire le rapport.
Dans votre témoignage, vous avez notamment mentionné que l'approche du Canada est imparfaite. D'autres témoins ont essentiellement admis que cette approche comporte des lacunes et n'a rien de parfait, mais que comparativement à d'autres pays, le Canada est toujours en avance à certains égards.
Au bénéfice des membres du Comité, j'aimerais savoir quels pays font mieux que le Canada. D'autres pays ont-ils un mécanisme comme le nôtre, le Bureau de l'ombudsman canadien de la responsabilité des entreprises? Pourriez-vous nous parler des pratiques exemplaires d'autres pays?
Nous nous sommes exprimés sur la question auprès du gouvernement du Canada et de l'OCRE. Sans le pouvoir de contraindre à comparaître et à fournir des documents, l'OCRE n'est pas bien différent des organismes qui existaient déjà au Canada.
Un point de contact national est une exigence dans l'ensemble des pays de l'OCDE. Le Canada en a un depuis 2002. Il est habilité à recevoir des plaintes, à offrir des services de médiation et à produire des rapports publics. Si l'OCRE avait été doté des pouvoirs d'enquête robustes dont disposent d'autres bureaux d'ombudsman au Canada, il aurait fait figure d'exception en étant le premier en son genre au monde.
Pour ce qui est des pratiques exemplaires, on constate sur la scène internationale un mouvement vers l'adoption de lois contraignantes sur la diligence raisonnable en matière de droits de la personne et d'environnement. De telles lois existent en France et en Allemagne, et des lois applicables dans l'ensemble de l'Union européenne devraient être en place d'ici la fin de cette année. Plusieurs autres lois nationales ont été proposées à l'échelle mondiale.
Voilà ce que les Nations unies demandent au Canada de faire. Les attentes à l'égard du gouvernement canadien, c'est qu'il mette en œuvre les principes directeurs de l'ONU en créant des mécanismes pour exiger des entreprises qu'elles respectent les droits de la personne et pour offrir des recours aux gens.
Je pense que l'idée selon laquelle le Canada est un chef de file sur les questions des entreprises et des droits de la personne ne peut être étayée par les faits.
M. Surya Deva, ancien président du Groupe de travail des Nations unies sur les entreprises et les droits de l'homme, a témoigné devant le Sénat dans le cadre de l'étude du projet de loi . Il a clairement indiqué que si le Canada veut être un chef de file dans le domaine des entreprises et des droits de la personne, il doit donner à l'OCRE le pouvoir de faire enquête à titre indépendant et adopter une loi exhaustive sur les droits de la personne et la diligence raisonnable en matière d'environnement.
M. Deva a également déclaré devant le comité sénatorial qu'il était très surpris que le Canada tente de reproduire des modèles qui se sont avérés des échecs au Royaume-Uni, qui n'ont pas permis de modifier les pratiques des entreprises et qui ne permettent pas de suivre la tendance mondiale, c'est-à-dire l'adoption de lois sur la diligence raisonnable en matière de droits de la personne et d'environnement.
:
Je vous remercie de votre réponse.
Ma question visait toutefois à savoir qui a les meilleures pratiques, actuellement. Vous avez mentionné ce que les Nations unies et d'autres organisations souhaitent.
Je crois comprendre que ce sont des entreprises du Canada, du Royaume-Uni, des États-Unis ou de la Chine, par exemple, qui mènent des activités d'exploitation minière ou d'exploitation des ressources dans ces pays. Si vous comparez le bilan des entreprises canadiennes avec celui des entreprises chinoises, par exemple, vous constatez que la réalité, c'est qu'elles sont présentes partout dans le monde.
Pourriez-vous nous donner des exemples de pays qui font mieux que le Canada actuellement? Ou cela ne fait‑il que commencer, à l'échelle mondiale?
:
Il y a la France et l'Allemagne.
Les Pays-Bas sont avancés. Ils ont une loi sur la diligence raisonnable concernant le travail des enfants, et ils prévoient d'en étendre la portée à d'autres secteurs.
Il y a des règlements dans l'ensemble de l'Union européenne. Les États-Unis ont interdit l'importation de marchandises provenant de la région du Xinjiang et appliquent d'ailleurs l'interdiction d'importer des marchandises issues du travail forcé.
Il y a divers exemples de pays qui déploient des efforts considérables, par l'adoption de lois, pour veiller à ce que les entreprises respectent les droits de la personne.
:
La stratégie de conduite responsable des entreprises du Canada a d'abord été élaborée et introduite en 2009, sous le nom de Stratégie de responsabilité sociale des entreprises. Elle a été mise à jour en 2014, puis en 2022.
L'approche est principalement fondée sur l'offre de conseils aux entreprises en matière de gestion des risques, assortie de lignes directrices à application volontaire, et la possibilité de services de médiation. Cela résume en quelque sorte l'approche de la stratégie de conduite responsable des affaires. Il y a d'autres éléments, mais il s'agit essentiellement de fournir des orientations et des conseils aux entreprises et de mettre en place des mécanismes extrajudiciaires afin d'offrir, possiblement, des services de médiation aux personnes qui ont subi un préjudice.
Ce qui manque, tout particulièrement, c'est une loi contraignante qui énonce que les entreprises ont la responsabilité de respecter les droits de la personne et l'environnement et sont tenues de prendre des mesures pour empêcher les violations des droits de la personne et de l'environnement de se produire dans les chaînes d'approvisionnement canadiennes ou d'aider les personnes qui ont subi un préjudice à obtenir réparation.
:
Notre réseau regroupe 40 organismes et syndicats de partout au pays. Nous travaillons ensemble pour promouvoir le respect des droits de la personne chez les entreprises, notamment par des campagnes de sensibilisation, le dialogue avec les décideurs et l'élaboration de propositions détaillées de réforme des lois et des politiques.
Notre réseau a travaillé avec des entreprises et associations industrielles dans le passé. Ce n'est pas au centre de la mission de notre réseau, mais certains de nos membres le font. C'est en partie attribuable à un manque de ressources, mais aussi parce que ces efforts n'ont pas eu les résultats escomptés, car nous n'avons pas réussi à savoir quel mécanisme indépendant de l'industrie l'Association minière du Canada et l'Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs seraient prêtes à appuyer. Nous n'avons pas réussi à obtenir des renseignements ou un appui à ce sujet.
Nos activités sont surtout centrées sur l'établissement d'un dialogue avec les personnes touchées, l'étude des pratiques exemplaires à l'échelle mondiale et l'aide à apporter pour veiller à ce que la réponse du Canada honore les obligations internationales du pays en matière de droits de la personne.
:
Actuellement, notre priorité est de promouvoir l'adoption d'une loi contraignante sur la diligence raisonnable en matière de droits de la personne et d'environnement au Canada. Comme vous l'avez souligné, à juste titre, plusieurs ministres ont reçu comme mandat de présenter un projet de loi visant à éliminer le travail forcé et à faire en sorte que les entreprises canadiennes qui mènent des activités à l’étranger ne contribuent pas à des violations des droits de la personne ou ne les favorisent pas. C'est notre principal objectif, sans aucun doute, et nous sommes d'avis que cela représente une occasion pour le Canada.
Ce n'est pas la même chose qu'à l'époque où nous préconisions la création d'un poste d'ombudsman, une chose appelée à être une première au monde. Les lois obligatoires sur les droits de la personne et la diligence raisonnable en matière d’environnement sont quelque chose de nouveau. Le mouvement en ce sens prend de l'ampleur dans le monde entier et le Canada a une véritable occasion de rattraper son retard, en plus d'avoir la possibilité d'être un chef de file dans ce domaine. Il existe des exemples de lois très rigoureuses, et le Canada peut aussi faire preuve de leadership s'il veut aller plus loin que les exemples de l'Union européenne.
Outre une loi sur la diligence raisonnable, nous continuons à plaider pour que le Bureau de l'ombudsman canadien de la responsabilité des entreprises dispose des pouvoirs qui ont été promis à l'origine et dont il a besoin, et pour que le gouvernement du Canada reconnaisse la nécessité de ces pouvoirs pour assurer l'efficacité de l'organisme, comme le rapport d'expert du gouvernement du Canada l'a révélé.
En outre, nous pensons que l'approche du Canada à l'égard de la stratégie de conduite responsable des entreprises devrait être modifiée.
:
Je suis contente que Mme Meyerhoffer reconnaisse finalement que son bureau n'a pas les outils nécessaires pour mener de vraies enquêtes.
Cependant, notre réseau l'avait constaté il y a plusieurs années. Nous avons utilisé les anciens bureaux qui existaient au Canada, notamment le Bureau du conseiller en responsabilité sociale des entreprises de l’industrie extractive, qui était le point de contact national. Nous savions que, sans ces pouvoirs, le Bureau de l'OCRE ne pourrait être pas efficace. C'est ce que les études du gouvernement canadien ont démontré, et c'est la raison pour laquelle les Nations unies ont recommandé au gouvernement canadien de donner à ce bureau des pouvoirs contraignants d'enquête.
Il est important que Mme Meyerhoffer demande ces pouvoirs maintenant. Les victimes ne devraient pas attendre encore quatre ou cinq ans pour que le gouvernement agisse.
:
Je vous remercie, et merci, madame Dwyer, de comparaître devant nous aujourd'hui.
Dans une discussion avec un groupe de témoins précédent, M. McKay a discuté de son projet de loi, le projet de loi , et a mentionné que vous auriez peut-être quelques arguments à faire valoir à ce sujet. Je vais vous donner plus d'occasions de le faire.
Dans le cadre de discussions à propos de ce projet de loi, il semble que les efforts déployés par le NPD pour ajouter des mesures de diligence raisonnable à ce projet de loi en feraient quelque chose de vraiment efficace. M. McKay semble penser que cela rendrait son adoption trop difficile. Autrement dit, les libéraux et les conservateurs ne l'appuieraient pas.
Pourriez-vous peut-être faire valoir à nouveau ces arguments? Est‑ce que c'est quelque chose qui se passe ailleurs dans le monde? Accusons-nous un retard? Nous pourrions être un chef de file dans ce domaine. C'est possible. Il faut vraiment que cela se produise si l'on veut que ce projet de loi confère les pouvoirs dont nous avons besoin pour nous assurer de mettre fin au travail forcé.
:
Un point que je voudrais souligner, avec tout le respect que je dois au député McKay, est la description du projet de loi . L'effet que vous en avez donné la semaine dernière donne, à mon avis, une fausse idée de l'incidence qu'aurait le projet de loi. L'affirmation selon laquelle les chefs d'entreprise seraient tenus d'examiner leurs chaînes d'approvisionnement et de s'assurer qu'il n'y a pas de travail forcé dans leurs chaînes d'approvisionnement n'est pas confirmée par une lecture de la mesure législative.
Le projet de loi exigerait que les entreprises déclarent chaque année les mesures qu'elles ont prises, si elles en ont pris, pour cibler, atténuer et traiter le travail forcé et le travail des enfants dans leurs chaînes d'approvisionnement, mais elle n'exige pas des entreprises qu'elles prennent réellement des mesures.
C'est une partie très importante du problème pour la société civile et pour les personnes concernées dans le monde entier. Avoir une loi qui vous oblige seulement à signaler, mais qui ne vous oblige pas à cesser d'utiliser le travail des enfants ou le travail forcé et qui ne vous oblige pas à prendre des mesures pour cerner l'utilisation du travail des enfants ou du travail forcé et qui ne vous oblige pas à...
:
Je m'excuse, madame la présidente.
Ce que nous avons vu dans d'autres instances... Par exemple, je pourrais citer des passages d'une étude quinquennale sur le registre britannique de déclaration de l'esclavage moderne. Cette approche n'a révélé aucune amélioration significative des politiques ou des pratiques des entreprises et n'a pas réussi à être un moteur efficace de l'action des entreprises pour mettre fin au travail forcé.
En fait, j'approuve ce qui a été dit plus tôt, à savoir que ce n'est pas une mesure législative portant sur la transparence par opposition à une mesure législative sur la diligence raisonnable. Les deux peuvent exister. Nous pensons que le projet de loi sera probablement adopté en tant que loi. Cependant, je pense qu'il est important pour les membres du Parlement de comprendre clairement ce que cette loi ferait et ne ferait pas et de comprendre qu'elle ne remplace absolument pas la nécessité pour le Canada de prendre des mesures significatives.
Ce qu'elle ferait, ce serait de rattraper une loi de 2015 au Royaume-Uni, où les preuves ont montré qu'elle n'avait pas d'incidence sur le comportement des entreprises. Pourquoi le Canada reproduirait‑il ce genre d'approche alors qu'il existe d'autres modèles plus complets, qui correspondent à ce que demandent les principes directeurs de l'ONU et à ce que demandent les personnes touchées dans le monde entier?
Quand le Réseau canadien sur la reddition de comptes des entreprises, le RCRCE, a publié son modèle de projet de loi, 150 organismes et syndicats représentant des personnes directement touchées de 32 pays ont appuyé notre modèle. Je n'ai jamais entendu parler d'une personne touchée qui exigeait une loi seulement pour des signalements.
:
Les statistiques ne démontrent pas que les compagnies minières canadiennes sont meilleures que les autres à l'échelle internationale.
Je peux vous donner quelques statistiques. Par exemple, une étude menée en Amérique latine par le Justice and Corporate Accountability Project a démontré que 28 compagnies minières canadiennes étaient liées à 44 décès et à plus de 400 blessés, entre 2000 et 2015.
En outre, des études réalisées par le Centre de ressources sur les entreprises et les droits de l'homme ont aussi révélé que les attaques contre les défenseurs des droits de la personne et les défenseurs environnementaux sont certainement plus dangereuses dans le secteur minier. Ces études ont été entreprises au cours des sept dernières années.
Selon moi, les statistiques répondent à cette question. Cependant, la question n'est pas de savoir si les compagnies minières canadiennes sont pires ou meilleures que les autres. En fait, il y a des exemples d'abus dans tous les secteurs. Nous n'avons malheureusement pas les moyens de traiter de la question.
:
Il existe des exemples très clairs à cet égard. Je dirais d'abord que les Nations unies ont clairement fait savoir que les entreprises sont tenues de respecter les droits de la personne dans le monde entier et que le Canada a des obligations internationales en matière de droits de la personne pour s'assurer que les tierces parties, y compris les entreprises, respectent les droits de la personne.
Par ailleurs, le Canada est tout à fait en mesure de réglementer. Un exemple que je donnerais est le cas de Nevsun Resources, qui opère en Érythrée. Il y a parfois des décisions difficiles à prendre. Cette affaire a été portée devant la Cour suprême du Canada. La société minière canadienne était obligée, pour pouvoir mener des activités en Érythrée, d'utiliser de la main-d'œuvre esclave, de la main-d'œuvre conscrite. Si elle avait fait preuve de diligence raisonnable, elle l'aurait su.
Dans certains cas, les entreprises devront décider que si vous ne pouvez pas mener vos activités en respectant les droits de la personne fondamentaux, peut-être qu'elles ne peuvent pas mener leurs activités là‑bas. Il y a toutefois de nombreux cas où les entreprises ont vraiment beaucoup de pouvoir et d'influence pour pouvoir garantir le respect des droits, et la notion selon laquelle il s'agit simplement de problèmes avec d'autres pays ne donne pas les résultats escomptés. Je citerai une autre affaire judiciaire...
:
Merci, madame la présidente.
Je suis de Sudbury, qui est une plaque tournante de l'exploitation minière au Canada, et je vous dirais qu'à Sudbury, nous avons été témoins de ce qu'une reddition de comptes accrue des sociétés peut faire lorsque nous avons procédé au reverdissement de Sudbury, désormais reconnu dans le monde entier.
Je ne suis pas membre de ce comité, mais je tiens à souligner le travail de ce comité et le travail réalisé dans le cadre de cette étude. Je crois fermement que cette étude est opportune et nécessaire.
Nous constatons de plus en plus que le monde reconnaît qu'il n'y a aucune transition énergétique sans minéraux essentiels. Ils sont les éléments constitutifs de l'économie verte et de l'économie numérique. Sans minéraux essentiels, il n'y a pas de batteries, il n'y a pas de voitures électriques, il n'y a pas d'éoliennes et il n'y a pas de panneaux solaires. Le Canada est un chef de file mondial dans le secteur minier. Nous avons donc un rôle très important à jouer à cet égard.
Comme je viens d'une ville minière, certains pourraient supposer que Mme Dwyer et moi avons des opinions opposées, mais je vous dirais que ce n'est pas du tout le cas. J'ai écouté très attentivement votre déclaration liminaire, madame Dwyer, ainsi qu'une grande partie des réponses que vous avez données. Vous avez dit que le rôle du Canada dans le secteur minier signifie que le Canada a une responsabilité particulière d'intervenir, et je suis d'accord. Je pense que nous devons nous demander comment nous pouvons aider les entreprises minières canadiennes à relever et à atténuer les atteintes à l'environnement et aux droits de la personne qui sont associées à leurs activités minières à l'étranger.
Ma première question est la suivante. Vous avez exprimé des préoccupations pour ce qui est d'obtenir de la coopération du secteur minier au Canada. À votre avis, que peut faire le gouvernement pour aider à tisser ce lien entre l'industrie et des organismes comme le Réseau canadien sur la reddition de comptes des entreprises?
:
J'aimerais donner un petit exemple.
Nous examinons notamment la situation des règles de conduite, par exemple. La plupart des conducteurs vont respecter un panneau d'arrêt ou un feu rouge parce que c'est la bonne chose à faire et qu'ils ne veulent pas blesser les gens autour d'eux, mais certains auront besoin des lois de la route pour y parvenir. Nous reconnaissons que nous ne pouvons pas nous contenter de faire ce qu'il faut parce que nous demandons que ce soit fait.
Je pense que la même chose s'applique lorsqu'il s'agit du secteur minier à l'étranger. Même si vous pensez que la grande majorité des entreprises respectent les droits de la personne, il faudra toujours demander des comptes à celles qui ne le font pas de leur plein gré.
Je pense également que ce n'est pas forcément une question de savoir comment réunir les entreprises et les personnes touchées. La question qui devrait vraiment préoccuper ce comité est de savoir comment s'assurer que le Canada respecte ses obligations internationales en matière de droits de la personne, que les entreprises respectent les droits de la personne et l'environnement, que les personnes touchées peuvent avoir accès à des recours et que les droits des personnes touchées sont respectés.
Je vous remercie.
Le réseau existe depuis 2005. Nous avons participé aux tables rondes nationales. Nous avons travaillé en étroite collaboration très longtemps pour faire avancer le projet de loi , pour la création d'un bureau de l'ombudsman et d'une loi sur la diligence raisonnable en matière de droits de la personne et d'environnement.
Nous nous efforçons également de faire entendre la voix des personnes touchées aux parlementaires, car nous pensons que le fait d'être confrontés aux histoires et aux récits des personnes directement touchées contribuera à susciter les changements nécessaires.
Je vous remercie du temps que vous nous consacrez.
:
J'invoque le Règlement, madame la présidente.
Comme vous pouvez le voir, Mme Dwyer et moi avons une relation compliquée, pour ainsi dire. Elle a beaucoup appuyé le projet de loi . Elle n'a pas vu la lumière en ce qui concerne le projet de loi . Je veux simplement, pour la gouverne du Comité, avoir l'autorisation de déposer le projet de loi S‑211, et les membres pourront lire eux-mêmes si l'article 11 doit être interprété de la façon dont je l'ai exprimé ou de la façon dont Mme Dwyer l'a exprimé.
Si j'ai le consentement unanime, je me ferai un plaisir de le déposer.