Merci beaucoup à tous. Nous avons un groupe de personnes très impressionnant à l'autre bout de la table. Merci de votre présence parmi nous.
Bienvenue à la 53e réunion du Comité permanent du commerce international.
La réunion d'aujourd'hui est en format hybride, conformément à l'ordre adopté par la Chambre le 23 juin 2022. Par conséquent, les membres participent soit en personne dans la salle, soit à distance grâce à l'application Zoom.
J'aimerais faire quelques observations à l'intention des témoins et des membres du Comité.
Avant de parler, veuillez attendre que je vous donne la parole. Assurez-vous de parler lentement et clairement. Si vous participez par vidéoconférence, cliquez sur l'icône du microphone pour activer votre micro, et veuillez vous mettre en sourdine lorsque vous ne parlez pas.
Pour l'interprétation, les personnes qui sont sur Zoom ont le choix, au bas de leur écran, entre « parquet », « anglais » et « français ». Les personnes présentes dans la salle peuvent utiliser l'oreillette et sélectionner le canal souhaité.
Je tiens à vous rappeler que toutes les observations doivent être adressées par l'entremise de la présidence. Les députés présents dans la salle sont priés de lever la main s'ils souhaitent prendre la parole. Les députés participant sur Zoom doivent utiliser la fonction « Lever la main ». La greffière et moi allons gérer la liste des intervenants du mieux que nous le pouvons, et vous demandons d'être patients et compréhensifs à cet égard.
Veuillez également noter que pendant la réunion, il est interdit de prendre des photos dans la salle ou de faire des captures d'écran sur Zoom.
Conformément à sa motion de régie interne concernant les tests de connexion avec les témoins, j'informe le Comité que tous les témoins se sont pliés à ces tests. Veuillez m'informer de toute difficulté technique. Nous suspendrons la réunion en attendant que le service de traduction fonctionne.
Conformément à l’ordre de renvoi du mercredi 8 février 2023, le Comité étudie le projet de loi , Loi modifiant la Loi sur le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement concernant la gestion de l’offre, comme nous le connaissons tous.
Nous accueillons aujourd'hui Tim Carroll, à titre individuel, par vidéoconférence. Nous accueillons également Keith Currie, le président, et Brodie Berrigan, le directeur des Relations gouvernementales et Politiques agricoles de la Fédération canadienne de l'agriculture. Nous recevons également Gyslain Loyer, le vice-président des Producteurs d'œufs d'incubation du Canada, ainsi que Roger Pelissero, le président, et Emmanuel Destrijker, le deuxième vice-président des Producteurs d'œufs du Canada. Ensuite, nous accueillons Cathy Jo Noble, la vice-présidente, et, par vidéoconférence, James Bekkering, le président du conseil d'administration de l'Association nationale des engraisseurs de bovins. Enfin, nous accueillons Lisa MacNeil, la présidente, et Francesco Mastruzzo, le directeur du Développement des marques de Tree of Life.
Bienvenue à tous et à toutes en ce lundi matin lumineux et ensoleillé.
Monsieur Carroll, je vous invite à prononcer une déclaration liminaire d'une durée maximale de cinq minutes.
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Je vous remercie, madame la présidente. Je souligne que je témoigne à titre personnel.
J'ai déjà été député provincial et ministre de l'Agriculture à l'Île-du-Prince-Édouard. À l'époque où j'étais encore étudiant aux cycles supérieurs, avant de me lancer en politique, j'ai travaillé directement avec le Prince Edward Island Marketing Council. C'était pendant la période tumultueuse où l'Office canadien de commercialisation des œufs et l'Office canadien de commercialisation du poulet ont été créés. Toujours pendant mes études, je me suis rendu dans des offices de commercialisation du Manitoba, de l'Alberta et de la Colombie-Britannique pour étudier leurs systèmes. J'ajoute qu'avant ma carrière universitaire, j'ai été secrétaire du conseil et gestionnaire de l'organisme Ontario Processing Vegetable Growers.
J'appuie le projet de loi . Selon moi, les programmes canadiens de gestion de l'offre dans le secteur laitier et le secteur de la volaille sont des pratiques commerciales distinctement canadiennes, dont l'équité a été démontrée à plusieurs reprises sur le marché international.
Je me souviens de la création des offices nationaux de commercialisation des œufs et du poulet, qui faisait suite à la guerre des poulets et des œufs que le Québec et l'Ontario s'étaient livrée au début des années 1970. Alors que les frontières entre les provinces sont ouvertes, les réactions des deux provinces risquaient alors de nuire à cette ouverture. Comme le veut la tradition canadienne, nous avons imaginé un parallélisme qui permettrait de résoudre le problème tout en respectant les compétences que partagent le gouvernement fédéral et les provinces.
Pendant de récentes négociations commerciales, le gouvernement fédéral a décidé unilatéralement d'ouvrir davantage notre marché à des partenaires commerciaux, un geste qui, selon moi, ne respecte pas le système de commercialisation organisé qui a été établi par les producteurs en vertu de lois provinciales. Selon ma compréhension, le projet de loi limitera les pouvoirs du fédéral pour l'empêcher d'accorder un accès accru au système sûr, organisé et bien servi qui nous sert à fournir des aliments.
Je rappelle que le système de gestion de l'offre du Canada a soutenu un examen attentif pendant les négociations de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce, les négociations de l'Organisation mondiale du commerce — nouveau nom de l'accord général que je viens de mentionner — et celles de l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis conclu en 1988. Il y a également eu un examen attentif dans le cadre de l'Accord de libre-échange nord-américain peu après, puis de l'accord de libre-échange avec l'Europe, du Partenariat transpacifique et, tout récemment, de l'Accord Canada-États-Unis-Mexique.
Qu'est‑ce qui fait le génie du Canada? Serait‑ce que nous sommes des négociateurs coriaces, ou que nous sommes prêts à céder n'importe quoi pour préserver la gestion de l'offre? Quelles balivernes.
Si le système de gestion de l'offre du Canada a survécu à divers examens approfondis au cours d'une quarantaine d'années de négociations commerciales, c'est parce que, malgré ce que peuvent dire les négociateurs de l'autre partie, ce système s'est avéré équitable et n'enfreint pas les règles du commerce.
La gestion de l'offre n'est pas considérée comme une pratique qui enfreint les règles parce qu'il ne s'agit pas d'un programme de subventions qui désavantagerait les concurrents. La législation canadienne permet aux agriculteurs de se rassembler et de partager le marché de manière à stabiliser les prix, et ce, en toute légalité. Nous avons toujours partagé une part de notre marché avec d'autres pays. Le Canada est considéré comme un partenaire juste en raison de cette part de marché.
La gestion de l'offre est une pratique commerciale courante. Pensez un peu à la logique qui la sous-tend. Peu importe la forme qu'elle prend, la gestion de l'offre vise simplement à limiter la production d'une chose de manière à ce qu'elle corresponde assez exactement à la demande du marché. Cet objectif pose de grands défis en agriculture, mais les groupes de producteurs spécialisés ont conçu différents systèmes et approches en matière de gestion et d'offre.
Il est carrément inexact de dire que nos partenaires commerciaux, particulièrement les États-Unis, n'ont pas recours à la gestion de l'offre. Nos principaux partenaires commerciaux utilisent tous une forme ou une autre de gestion de l'offre pour les denrées agricoles.
Je pourrais donner d'autres exemples, mais j'en mentionnerai simplement un que je connaissais très bien à l'époque où je travaillais avec le Vegetable Growers' Marketing Board. Dans ce cas, les États-Unis avaient mis en place plusieurs programmes d'achat d'aliments destinés à l'aide étrangère, à l'armée, aux programmes de repas à l'école et aux programmes de bons alimentaires.
Par exemple, si j'observais un fléchissement du prix des pois en conserve, je pouvais presque prédire qu'en l'espace d'environ deux semaines, le département de l'Agriculture des États-Unis annoncerait un achat massif de pois en conserve pour les écoles, l'armée ou d'autres organisations. Il y avait ainsi moins de produits sur le marché et le prix des pois en conserve augmentait.
Avec la gestion de l'offre...
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Je vous remercie, madame la présidente.
Comme vous l'avez entendu au début, je m'appelle Keith Currie. Je suis président de la Fédération canadienne de l'agriculture, qui représente près de 190 000 agriculteurs et fermes familiales des quatre coins du pays.
Nous sommes, comme je l'ai indiqué, la plus grande organisation. Grâce à nos activités, nous faisons une contribution de près de 135 milliards de dollars au PIB et à l'économie nationale.
Le secteur agricole est résilient. Il est essentiel non seulement à notre système de sécurité alimentaire national, mais également à la sécurité alimentaire partout dans le monde. Autrement dit, le monde a besoin de nos produits.
Notre système de gestion de l'offre, qui existe depuis les années 1960, favorise la résilience et la stabilité de la chaîne d'alimentaire nationale en modulant la production en fonction de la demande, avec le soutien de mesures de contrôle des importations. Ce système réduit également la surproduction et le gaspillage au sein de la chaîne d'approvisionnement en aliments, et permet aux agriculteurs de recevoir une rétribution équitable et prévisible pour leur travail. Cela encourage les investissements visant à améliorer l'efficacité sur les fermes, contribue à atténuer les répercussions des maladies comme la grippe aviaire et favorise la durabilité environnementale.
On oublie souvent dans tout cela que la gestion de l'offre renforce également les communautés rurales en créant des emplois stables au pays, sans empêcher le Canada de devenir un chef de file mondial au chapitre de l'exportation de produits agroalimentaires sur les marchés extérieurs de toutes les régions du monde. Comme le Comité le sait sûrement, le Canada a exporté près de 93 milliards de dollars en produits agroalimentaires en 2022, ce qui en fait le cinquième exportateur de produits alimentaires en importance. Ainsi, nous continuons de soutenir le gouvernement du Canada dans les efforts qu'il déploie pour obtenir l'accès à de nouveaux marchés et à des occasions de diversification pour les produits agroalimentaires et les produits de la mer canadiens.
La Fédération canadienne de l'agriculture recommande depuis longtemps de ne pas accorder d'accès supplémentaire aux secteurs soumis à la gestion de l'offre dans les accords commerciaux futurs, et tous les partis politiques présents à la Chambre des communes se sont engagés à ne pas accorder de tel accès et à ne pas réduire les tarifs hors contingent. En dépit de ces engagements, d'importantes concessions ont été consenties dans de récents accords commerciaux, notamment dans l'Accord économique et commercial global entre le Canada et l'Union européenne, ou AECG, l'Accord de partenariat transpacifique global et progressiste, ou PTPGP, et l'Accord Canada–États-Unis–Mexique, ou ACEUM.
Même si nous nous réjouissons que ces accords commerciaux offrent des occasions d'accès au marché au secteur agricole canadien, ces concessions répétées risquent d'affaiblir la résilience et la stabilité de l'approvisionnement en aliments que la gestion de l'offre favorise. Le projet de loi obligera les fonctionnaires fédéraux à respecter cet engagement au cours des négociations actuelles et futures, protégeant les agriculteurs soumis à la gestion de l'offre et les Canadiens qui dépendent de leurs produits.
Je soulignerais que le Canada a actuellement 15 accords de libre-échange avec 51 pays du monde, offrant un accès à des marchés comptant près de 1,5 milliard de consommateurs. Outre les trois exemples récents que j'ai évoqués, ces accords auraient pu être conclus sans accorder d'accès supplémentaire important aux secteurs soumis à la gestion de l'offre. Plutôt que d'adopter une approche de division et d'opter pour des tactiques qui opposent les secteurs, nous devrions mettre l'accent sur ce qui unit notre secteur, comme les obstacles non tarifaires au commerce, qui limitent l'accès réel au marché pour les produits canadiens, même dans des domaines où le Canada a fait des concessions relativement à l'accès aux produits soumis à la gestion de l'offre.
L'AECG, par exemple, est souvent érigé en modèle d'accord de libre-échange global parce qu'il réduit ou élimine un large éventail de tarifs. Pourtant, même si les échanges commerciaux ont augmenté de façon générale depuis l'entrée en vigueur de l'AECG, ce n'est pas le cas dans les secteurs agricoles canadiens. L'Alliance canadienne du commerce agroalimentaire a affirmé en 2019 que depuis l'entrée en vigueur de l'Accord, les exportations de l'Union européenne au Canada ont augmenté de 10 %, alors que les exportations de produits agroalimentaires canadiens ont décru dans la même proportion. Le Canada a donc offert un accès supplémentaire à des secteurs soumis à la gestion de l'offre comme levier pour obtenir un accès accru à un marché extérieur et a utilisé l'argent des contribuables canadiens pour dédommager les producteurs de produits laitiers pour l'augmentation de cet accès accru. Pourtant, les avantages des exportations accrues ne se font toujours pas sentir.
Ce qui menace réellement le commerce international du Canada, ce n'est pas le système de gestion de l'offre, mais les obstacles non tarifaires qui limitent l'accès au marché. Le commerce international revêt une importance cruciale pour l'économie et l'agriculture canadiennes, et nous comprenons qu'il faille chercher à percer de nouveaux marchés pour les producteurs canadiens axés sur les exportations. Cependant, les trois derniers accords de libre-échange du Canada ont eu des répercussions substantielles sur les fermes familiales soumises à la gestion de l'offre et le système qui les soutient. Nous espérons que ce projet de loi encouragera les négociateurs canadiens à opter pour d'autres stratégies de négociation ne mettant pas des secteurs agricoles en opposition, et à concentrer leur énergie sur les problèmes qui nous unissent, comme les obstacles non tarifaires au commerce.
Nous considérons que le pays a besoin d'un secteur agricole fort et uni, composé de producteurs soumis à la gestion de l'offre et axés sur les exportations, d'autant plus que nous nous efforçons de relever les défis mondiaux du jour sur les plans de la sécurité alimentaire, de la réduction des émissions et de la protection de l'environnement.
Je vous remercie de m'avoir offert l'occasion de m'adresser à vous aujourd'hui, madame la présidente. Je répondrai avec plaisir aux questions des membres du Comité.
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Merci, madame la présidente.
Honorables membres du Comité, je vous remercie de me donner l'occasion de comparaître devant vous aujourd'hui.
Je m'appelle Gyslain Loyer. Je suis un producteur d'œufs d'incubation de la région de Saint‑Félix‑de‑Valois, au Québec. Je suis également le vice-président des Producteurs d'œufs d'incubation du Canada, également connu sous le nom de POIC.
Les POIC, un organisme national représente près de 225 agriculteurs soumis à la gestion de l'offre au Canada. Dans le cadre de la gestion de l'offre, nos producteurs produisent des œufs d'incubation de poulet à chair de grande qualité. Ces œufs d'incubation contribuent à un approvisionnement constant en poulets salubres de grande qualité et nutritifs, pour les consommateurs canadiens et pour l'industrie des services alimentaires.
Pour le dire simplement, nous constituons la première étape, très importante, de la chaîne d'approvisionnement du poulet. Je suis certain que bon nombre d'entre vous seront heureux d'apprendre que les producteurs d'œufs d'incubation produisent plus de 835 millions d'œufs par année au Canada. Ces œufs dépassent une valeur de plus de 450 millions de dollars. Le secteur des œufs d'incubation de poulet à chair assure près de 8 000 emplois au Canada. Nous sommes fiers du rôle important que nous jouons, en tant que producteurs durables, dans la sécurité alimentaire nationale du Canada. Si la COVID‑19 nous a appris quelque chose, ce sont les avantages de la production locale. La gestion de l'offre garantit la sécurité alimentaire nationale. Nous n'aurions pas le même niveau de production d'œufs d'incubation de poulet à chair sans le système de gestion de l'offre. C'est la raison pour laquelle il ne faut pas s'étonner que les Producteurs d'œufs d'incubation du Canada appuient fermement le projet de loi .
Lors d'une réunion précédente, on s'est questionné sur la nécessité d'adopter un tel projet de loi. Je peux affirmer aux membres du Comité que ce projet de loi est nécessaire. Plus tôt ce mois-ci, le a promis publiquement qu'on n'accorderait plus d'accès aux marchés des produits soumis à la gestion de l'offre dans les futures négociations commerciales. J'espère que cette promesse sera tenue.
Tous les producteurs que je représente réclament la possibilité d'avoir une autre méthode de soutien pour renforcer la gestion de l'offre au Canada. Cette possibilité de soutien supplémentaire est aujourd'hui présentée sous la forme du projet de loi d'initiative parlementaire .
Nous ne nous opposons pas à ce que le Canada entame de nouvelles négociations commerciales avec d'autres pays. Au cours des dernières années, tout en maintenant son appui à la gestion de l'offre, le Canada a exporté des produits agroalimentaires dont la valeur a été plus importante que jamais. Je pense qu'il est raisonnable que nos producteurs s'attendent à ce que toute négociation commerciale future n'ait pas d'incidences négatives sur notre secteur ou sur le système de gestion de l'offre au Canada.
Les récents accords commerciaux qui ont été négociés ont permis un accès qui pourrait entraîner une perte estimée à 343 millions de dollars pour nos exploitations agricoles au cours des 20 prochaines années. Notre secteur a toujours importé plus de 21 % des produits nécessaires pour répondre aux besoins canadiens. Les récents accords conclus ont fait augmenter ce pourcentage à un niveau qui peut avoir une incidence sur notre prévisibilité. Nous ne voulons pas que nos producteurs soumis à la gestion de l'offre se retrouvent dans cette situation. Il n'y a tout simplement plus de place pour faire des concessions en matière d'accès au marché dans le système durable de gestion de l'offre au Canada. D'ailleurs, le projet de loi proposé en tient compte.
La prochaine fois que les Canadiens vont se réunir pour déguster du poulet, ils devront se rendre compte qu'ils ont la possibilité de bénéficier d'un approvisionnement stable, provenant d'une chaîne d'approvisionnement canadienne qui soutient des emplois de qualité grâce à notre solide système de gestion de l'offre. D'ailleurs, ce système fait l'envie des producteurs de bon nombre de pays. Il ne devrait pas servir de monnaie d'échange lors des négociations commerciales avec d'autres pays.
En conclusion, j'encourage tous les membres du Comité à adopter ce projet de loi, sans amendement, à l'étape de l'étude en comité. Il faut que le Comité donne son appui au projet de loi, jusqu'à celui-ci devienne une loi.
Je suis prêt à répondre aux questions.
Bonjour, madame la présidente, messieurs les vice-présidents et honorables membres du Comité.
Je m'appelle Roger Pelissero, producteur d'œufs de l'Ontario et président des Producteurs d'œufs du Canada. Je suis accompagné par Emmanuel Destrijker, producteur d'œufs du Québec et deuxième vice-président des Producteurs d'œufs du Canada.
Les Producteurs d'œufs du Canada gèrent l'offre nationale en œufs et font la promotion de la consommation d'œufs, tout en représentant les producteurs réglementés de toutes les régions du pays depuis 1972. Nous avons célébré nos 50 ans cette année à l'occasion de notre assemblée générale annuelle. Nous avons un excellent système.
Notre association compte 1 200 fermes familiales de toutes les provinces et des Territoires du Nord-Ouest. Ensemble, nous produisons des œufs frais, locaux et nutritifs que les Canadiens dégustent quotidiennement. En fait, notre secteur produit plus de neuf milliards d'œufs par année. Le secteur compte 19 000 emplois et fait une contribution de plus de 1,3 milliard de dollars au PIB national.
Nous remercions le Comité de sa détermination à soutenir le gouvernement fédéral alors que ce dernier négocie des accords commerciaux au nom de tous les Canadiens. Ces accords commerciaux aident considérablement le secteur agricole canadien à atteindre son plein potentiel de croissance. Cependant, je ne saurais trop insister sur le fait que la poursuite de ces objectifs ambitieux ne doit pas se faire au détriment de la sécurité alimentaire des Canadiens.
Voilà pourquoi nous témoignons pour exprimer notre appui à l'égard des mesures visant à renforcer le système de gestion de l'offre du Canada et à offrir la stabilité au plus grand nombre dans le secteur agricole et agroalimentaire. Le projet de loi tient compte du contexte agricole particulier du Canada, où la combinaison des industries qui approvisionnent les marchés intérieurs et extérieurs offre des avantages aux Canadiens et à l'ensemble du pays.
Voyez-vous, alors que les produits d'exportation subissent l'influence des fluctuations et des prix volatils sur les marchés mondiaux, les secteurs soumis à la gestion de l'offre sont comme un investissement sûr qui compense ces risques. Ces secteurs constituent une force stabilisatrice dans note secteur agricole. L'équilibre atteint grâce à la combinaison de nos produits destinés aux marchés intérieurs et extérieurs confère un avantage concurrentiel au Canada.
Comment atteint‑on cet équilibre? Quand les prix dégringolent à l'échelle mondiale et font en sorte qu'il est difficile pour les producteurs axés sur les exportations de couvrir leurs coûts d'exploitation, les agriculteurs soumis à la gestion de l'offre reçoivent un revenu stable. Ces agriculteurs continuent d'acheter de la nourriture pour animaux, de l'équipement et divers services auprès de leurs fournisseurs locaux, permettant aux entreprises locales comme les cabinets de vétérinaire et les vendeurs d'équipement de rester en affaires. Ils offrent des emplois stables aux membres de la communauté et soutiennent directement les économies locales alors que d'autres secteurs affrontent les forces imprévisibles du marché en s'aventurant sur de nouveaux marchés extérieurs. Grâce à cette dynamique, quand les prix mondiaux reprennent leurs cycles normaux, les agriculteurs axés sur les exportations peuvent s'appuyer sur une infrastructure rurale florissante.
À notre avis, il ne s'agit pas de comparer un secteur à un autre ou de juger des mérites d'un système par rapport à un autre. Cette façon de faire est réductrice et désinvolte. Nous avons devant nous l'occasion de célébrer les avantages que les produits soumis et non soumis à la gestion de l'offre apportent à notre système agricole et de tirer parti de cette plateforme qui permet à tous de croître.
Je veux également souligner l'importance cruciale de conserver les petites fermes familiales. Dans le cadre de notre engagement mondial, nous avons observé de visu les difficultés qu'éprouvent les agriculteurs du monde entier qui ne peuvent couvrir leurs coûts d'exploitation. Cette situation entraîne la disparition de fermes familiales et fait en sorte que les agriculteurs jeunes ou débutants ne voient plus d'avenir dans l'agriculture.
Il suffit de nous tourner vers nos voisins américains pour observer les effets des systèmes centralisés, où le seul moyen de survivre est de prendre de l'expansion. Ce modèle favorise l'agriculture industrielle et pousse les petits producteurs à se retirer du marché. Les petites fermes disparaissent, tout comme les entreprises locales et les gens qui vivent et travaillent dans les régions rurales. Ce degré élevé de concentration est à l'origine de graves problèmes d'approvisionnement en aliments aux États-Unis, alors que le système de production est privé de plus de 47 millions de poules pondeuses en raison des répercussions sans précédent de la grippe aviaire, qui a entraîné une réduction de 18 % de la production aux États-Unis.
La principale force du Canada, c'est que les fermes y sont plus petites et plus nombreuses, et que la production est répartie partout au pays. Grâce à notre modèle, nous sommes en mesure de supporter les pressions de la chaîne d'approvisionnement et nous ne subissons pas les contrecoups de la perturbation des marchés observée dans les industries fortement concentrées. L'an dernier au Canada, seulement 1,4 million de poules pondeuses ont été touchées par la grippe aviaire hautement pathogène et notre production n'a diminué que de 4,6 %.
Si une éclosion de grippe survient dans une région du Canada, on peut déplacer la production ailleurs et l'augmenter dans d'autres provinces. Nous pouvons maintenir la production pour combler des manques potentiels. Cela permet aux agriculteurs du pays de travailler ensemble pour assurer la production nationale d'œufs.
J'aimerais enfin aborder la question des répercussions des accords commerciaux sur nos secteurs.
L'exclusion des secteurs soumis à la gestion de l'offre des accords commerciaux ne constitue pas un obstacle qui empêche les autres secteurs de s'adonner au commerce extérieur. Les accords commerciaux ne devraient toutefois pas être conclus au détriment de nos secteurs nationaux.
Les concessions consenties au chapitre de l'accès au marché dans le cadre l'AECUM, combinées aux exigences de l'OMC et du PTPGP, auront des répercussions durables sur la viabilité de nos fermes. Au titre de ces accords, un total de 51,4 millions de douzaines d'œufs entreront au pays en provenance des États-Unis et d'autres régions du monde, le tout équivalant à 7 % de la production annuelle totale d'œufs sur le marché actuel.
Ce serait la fin pour chaque ferme productrice d'œufs à l'est du Québec. Il n'y aurait plus la moindre production d'œufs dans le Canada atlantique. Pouvez-vous imaginer les effets dévastateurs et ce que cela signifierait pour les communautés rurales? Cela ferait en sorte que des milliards d'œufs ne pourraient jamais être produits par les agriculteurs canadiens et leurs enfants, et aurait également des répercussions sur les communautés du pays qui dépendent des fermes pour fournir des emplois et soutenir les entreprises et les communautés locales.
Nous conclurons en indiquant nous sommes enchantés d'entendre que le gouvernement s'est engagé à ne plus accorder d'accès supplémentaire à notre secteur dans les futurs accords commerciaux. Nous demandons que dans l'avenir, vous soyez les champions de cet engagement à protéger et à défendre la gestion de l'offre, ce que les derniers accords commerciaux ne font pas. En appuyant un projet de loi qui protège le système canadien de gestion de l'offre, vous renforcez l'approvisionnement essentiel en aliments du pays.
Nous vous remercions de nous accorder du temps aujourd'hui et de nous permettre de vous présenter nos points de vue. Nous répondrons à vos questions avec plaisir.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Bonjour. Je m'appelle James Bekkering et je suis l'ancien président de l'Association nationale des engraisseurs de bovins, ou ANEB. Je suis accompagné de Cathy Jo Noble, vice-présidente de l'ANEB, qui est avec vous aujourd'hui.
Je vous parle aujourd'hui depuis ma ferme de Taber, en Alberta. Je suis propriétaire d'une exploitation d'engraissement de bovins que j'exploite avec ma famille. Nous avons quatre parcs d'engraissement d'une capacité totale de 30 000 têtes. Environ 25 % du bétail que nous expédions sont exportés directement aux États-Unis.
À titre d'information, sachez que l'industrie canadienne du bœuf fait une contribution annuelle de 21,8 milliards de dollars au PIB national. Chaque année, nous exportons environ la moitié de la valeur du bétail et du bœuf du Canada, 75 % de ces exportations prenant le chemin des États-Unis. Nous avons donc fortement intérêt à diversifier nos activités sur d'autres marchés grâce à de nouveaux accords commerciaux.
Je tiens à indiquer clairement que la forte opposition de l'ANEB à l'égard du projet de loi est attribuable aux répercussions négatives profondes et immédiates qu'il aura sur l'économie canadienne s'il est adopté. Je suis engraisseur de bovins, mais avant tout, je suis un agriculteur canadien. Chaque jour, je travaille, comme tous les agriculteurs canadiens, afin de produire des aliments de haute qualité tout en subvenant aux besoins de ma famille et en contribuant à la vie de ma communauté. Malheureusement, ce projet de loi ne fera pas que lier les mains de nos négociateurs commerciaux; il dressera des agriculteurs canadiens et des voisins les uns contre les autres, même s'ils font partie du même milieu agricole.
Au fil des ans, le secteur agricole s'est évertué à trouver des solutions pour permettre à tous de réussir; pourtant, le Parlement, en proposant ce projet de loi, nuit aux partenariats dans le secteur. Il ne manque pas de débouchés internationaux pour l'agriculture canadienne; il en existe suffisamment pour que nous en sortions tous gagnants. Alors quand je vois le gouvernement régir les négociations commerciales pour protéger mon proche voisin aux dépens de ma propre entreprise, je suis mécontent. J'implore tous les députés d'accorder la priorité à la stabilité économique et commerciale à long terme du Canada et de ne pas appuyer le projet de loi .
Je vous cède la parole, madame Noble.
Le projet de loi est tout simplement une politique commerciale malavisée qui modifie profondément l'approche à laquelle le Canada a toujours adhéré dans le cadre des négociations commerciales. Il établit un dangereux précédent qui a une incidence sur tous les secteurs, tout en offrant des avantages limités au secteur soumis à la gestion de l'offre.
Le projet de loi ferait connaître notre position de négociation universelle avant même que nous nous soyons à la table. Nos partenaires commerciaux suivront le mouvement et retireront d'entrée de jeu des produits des négociations. Les politiques commerciales à venir du Canada concernent de nombreux pays qui n'ont même pas d'intérêt marqué pour nos produits soumis à la gestion de l'offre. Pourtant, le projet de loi les laisserait libres de retirer des produits avant même le début des négociations.
Un des principaux négociateurs du Canada, Aaron Fowler, a affirmé qu'« à [s]a connaissance, aucun partenaire commercial du Canada n'a de mesure législative qui interdit les négociations » comme le fait ce projet de loi. Je me demande pourquoi le Canada voudrait être un chef de file mondial à cet égard. M. Fowler a également déclaré au Comité que le Canada a « toujours réussi à conclure des accords commerciaux de grande qualité tout en appuyant le système de gestion de l'offre », ajoutant qu'il ne « verrai[t] pas pourquoi nous ne pourrions pas y arriver cette fois‑ci, avec ou sans ce projet de loi. »
S'il a tenu de tels propos, c'est parce que le système contient des mesures de sauvegarde qui exigent que le Cabinet approuve le texte négocié et que le gouvernement fédéral énonce publiquement son engagement à l'égard de la gestion de l'offre. Si ce projet de loi est adopté, les industries soumises à la gestion de l'offre feront des gains limités, alors que le reste des secteurs canadiens encaisseront des pertes substantielles. Pourquoi nous faire cela à nous-mêmes? Que ferons-nous la prochaine fois qu'un secteur canadien préconisera un projet de loi pour protéger le commerce?
Ce projet de loi n'est pas une politique commerciale éphémère; il sera extrêmement difficile de renverser la vapeur et de réparer les dommages causés à notre réputation et à nos débouchés commerciaux, et de corriger les répercussions sur la sécurité alimentaire.
L'ANEB demande au Comité de ne pas appuyer le projet de loi .
Je vous remercie.
Mesdames et messieurs les membres du Comité, je vous souhaite le bonjour. Je m'appelle Lisa MacNeil et je suis présidente de Tree of Life Canada. Je suis accompagnée de mon collègue Francesco Mastruzzo, notre directeur du développement commercial.
Je suis ici aujourd'hui pour vous indiquer que, vu l'incidence négative du projet de loi sur de nombreuses petites entreprises au Canada, y compris nos clients et nous-mêmes, les parlementaires ne devraient pas le soutenir.
Tree of Life est l'un des principaux distributeurs de produits naturels et de spécialité au Canada. Bien que nous importions une vaste gamme de produits, nous voulons vous parler aujourd'hui de notre importation de crème caillée et de crème double en provenance de Grande-Bretagne. Généralement servies avec le thé en après-midi accompagnées de scones et de confitures, ces crèmes de spécialité sont vendues dans les magasins de thé et les détaillants partout au pays. En tout et pour tout, Tree of Life fournit ces crèmes à environ 2 000 petites et moyennes entreprises dans l'ensemble du pays.
Ces crèmes sont offertes dans un contenant de verre conçu expressément à cette fin au Royaume-Uni au moyen d'un procédé exclusif permettant de produire des crèmes prêtes à l'exportation qui ont une longue durée de conservation et une teneur en matières grasses légèrement inférieure à celle du beurre. Il importe de souligner que ces produits ne sont pas fabriqués ailleurs qu'au Royaume-Uni. On n'en fabrique pas au Canada, pas plus que dans les différents pays avec lesquels nous avons conclu des accords commerciaux. Ces crèmes sont véritablement uniques.
Malgré le fait qu'il n'existe aucun produit comparable fait au Canada, Tree of Life s'est buté à de nombreux obstacles dans ses tentatives d'importer ces crèmes de spécialité britannique. En effet, l'accès à ces crèmes nous a presque été totalement refusé pendant des années sur le marché canadien, simplement parce qu'elles n'entrent pas d'emblée dans l'une ou l'autre des catégories établies aux fins des contingents tarifaires pour la crème.
À la demande d'Affaires mondiales Canada, nous avons entrepris des efforts de bonne foi pour trouver un fournisseur national pouvant répondre à la demande des clients canadiens, et malgré nos efforts diligents au fil des ans, nos tentatives se sont révélées vaines. Nous avons constaté que les producteurs laitiers au pays ne souhaitent pas investir dans le matériel spécialisé nécessaire pour produire ces crèmes de spécialité, étant donné que le marché canadien est considéré comme étant trop restreint pour justifier de tels investissements.
Effectué il y a des dizaines d'années, l'investissement de Coombe Castle's se fondait sur le marché britannique de bien plus grande taille, de même que sur l'exportation vers les marchés étrangers où ce produit fin est prisé.
Avec une demande des consommateurs qui est stable et l'absence de producteur au Canada, on pourrait s'attendre à ce que l'obtention d'un permis d'importation soit relativement simple. Malheureusement, cela n'a pas du tout été le cas jusqu'à présent.
De 2019 à 2021, nous ne pouvions pas importer ces produits sans droits de douane. Nous avons depuis été en mesure d'obtenir des permis temporaires, mais cette méthode d'accès donne peu de place à la planification et à la croissance des affaires. Fréquemment, nous épuisons nos stocks et devons demander aux clients de revenir une prochaine fois. Les PME et les consommateurs canadiens doivent se passer de ce produit sans qu'aucun motif d'intérêt public ne puisse le justifier.
Les négociations prochaines entre le Canada et le Royaume-Uni donnent l'occasion à Tree of Life de garantir l'accès au marché canadien à ces produits de spécialité britanniques. Toutefois, l'adoption du projet de loi pourrait mettre un frein aux initiatives en ce sens. Ce projet de loi demande à ce qu'on exclue les secteurs soumis à la gestion de l'offre des futures négociations commerciales, y compris la négociation d'un accord de libre-échange entre le Canada et le Royaume-Uni. Les importateurs comme nous seraient inutilement et injustement touchés par le projet de loi , puisqu'il mettrait à mal la possibilité d'avoir un contingent tarifaire adapté pour le commerce de la crème entre le Canada et le Royaume-Uni.
Essentiellement, dans le cas de ces crèmes de spécialité, ce projet de loi aurait l'effet indésirable de protéger un secteur inexistant au sein de l'industrie laitière au Canada, au détriment de véritables entreprises canadiennes et de leurs clients qui dépendent de la capacité de Tree of Life d'importer régulièrement des crèmes de spécialité britanniques à un prix abordable.
C'est pourquoi Tree of Life exhorte respectueusement les membres du Comité de considérer les conséquences non souhaitées des mesures proposées et de voter contre le projet de loi .
Je vous remercie.
Je tiens à remercier tous les témoins pour leur contribution à l'alimentation des Canadiens et du monde entier, ainsi que pour leurs interventions d'aujourd'hui.
En guise de commentaire, il n'est probablement que trop évident pour la plupart des membres du Comité que le Royaume-Uni souhaite ardemment conclure des accords commerciaux post-Brexit avec le reste du monde, étant donné l'intérêt qu'il porte à l'Accord de partenariat transpacifique global et progressiste et à l'accord entre le Canada et le Royaume-Uni, mais je m'en tiendrai là.
Monsieur Currie, je commencerai par vous. Dans la mesure du possible, veuillez répondre en 90 secondes environ.
Habituellement, lorsque nous parlons de la gestion de l'offre et de son héritage, 50 ans après sa création par le gouvernement de Pierre Trudeau, nous parlons de ce qu'elle a fait au niveau national. Monsieur Currie, vous avez parlé du concept de sécurité alimentaire à l'échelle de la planète. Je pense que cette question est devenue très importante pour nous tous, en tant que parlementaires, compte tenu de la guerre injuste et illégale en Ukraine et de son invasion par la Russie.
Pouvez-vous nous expliquer un peu plus en détail comment les règles canadiennes de gestion de l'offre, telles que celles que nous essayons de mettre en place avec ce projet de loi, contribuent à renforcer non seulement la sécurité alimentaire des Canadiens, mais aussi la manière dont les agriculteurs canadiens acheminent les denrées alimentaires vers le reste de la planète?
Je vais maintenant m'adresser à M. Pelissero.
Je voudrais parler d'un élément que vous avez soulevé et le relier à un autre élément qui a été souligné il y a quelques semaines.
Vous avez parlé des petites exploitations agricoles et de leur protection, c'est-à-dire des exploitations familiales par opposition aux grandes exploitations industrielles. Je vous dirai franchement que je représente une circonscription de Toronto. Il n'y a pas beaucoup d'exploitations agricoles dans Parkdale—High Park, qui se trouve au centre-ville de Toronto, mais il y a beaucoup de gens qui croient à la réduction de la taille des exploitations agricoles et au maintien des exploitations familiales et des petites exploitations. Ils voient cet enjeu sous l'angle des effets environnementaux. La question a été soulevée la semaine dernière, c'est-à-dire le concept de la pensée globale et de l'achat local. Il s'agit de se procurer des produits agricoles et des marchandises d'un fournisseur qui se trouve peut-être à 20 minutes en voiture, plutôt qu'à quatre minutes en voiture et qui doivent venir en avion.
Pouvez-vous nous expliquer en quoi la gestion de l'offre contribue à ce concept global de l'agriculture, de la stabilité agricole et des effets environnementaux?
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Exactement. Vous vivez dans la région du Grand Toronto, et je suis à Niagara. Les œufs que je produis se trouvent probablement en épicerie près de chez vous. Vous en achetez peut-être.
En ce qui concerne l'approvisionnement intérieur au Canada, une ferme familiale moyenne compte quelque 30 000 poules pondeuses. Aux États‑Unis, on parle de 4,5 millions d'oiseaux. Cinquante entreprises américaines contrôlent plus de 95 % de la production dans ce pays. La production moyenne y est d'environ 330 millions de poules pondeuses par année. Nous avons 30 millions de poules pondeuses au Canada. C'est évidemment en raison de l'écart entre les populations des deux pays.
Pour ce qui est des répercussions environnementales, nous avons une empreinte carbone très réduite. Le secteur a un impact environnemental bien moindre. Nous suivons le même programme de bien-être des animaux d'un océan à l'autre. Tous les producteurs le font: nous ne sommes pas en concurrence les uns contre les autres. Nous travaillons ensemble comme une famille pour approvisionner le marché parce que nous pouvons utiliser une formule du coût de production.
Lors de la récente éclosion de grippe aviaire, le prix des œufs aux États‑Unis a atteint 6 $ la douzaine. Au Canada, nous n'en sommes jamais arrivés là. J'ai de la famille au sud de la frontière qui m'a demandé: « Pourquoi le prix des œufs est‑il aussi élevé? » J'ai répondu que c'était à cause de la grippe aviaire. Aux États‑Unis, 18 % de la production a été touchée par la grippe aviaire contre seulement 4,6 % ici. L'écart s'explique par le fait que nous avons de plus petites fermes, où il est possible de mieux contrôler la biosécurité que dans les grandes exploitations agricoles. Quand une grande ferme est frappée de plein fouet et qu'il faut rétablir un troupeau de 3,5 millions d'oiseaux, imaginez la taille du trou qui doit être creusé pour enterrer tous ces oiseaux. Lorsqu'on parle d'empreinte écologique, il faut tenir compte de cet aspect.
Ma prochaine question s'adresse aux engraisseurs de bovins.
Je vous remercie également de vos présentations.
Vous nous avez invités à rejeter le projet de loi, qui serait nuisible aux autres secteurs et qui viendrait nous lier les mains. Je vous avoue que je n'ai pas bien compris pourquoi. C'est un argument que nous avons entendu à plusieurs reprises.
Or nous avons reçu des experts, des constitutionnalistes et des spécialistes de droit international qui nous ont dit que cela ne posait pas de problème et que cela ne nous lierait pas les mains, et qu'il était aussi faux de prétendre qu'aucun pays ne protégeait son agriculture par force de loi. Il y a des lois aux États‑Unis concernant le coton et le sucre. L'Union européenne vote des mandats au Parlement avant de négocier.
J'avoue donc que je ne comprends pas vraiment votre démonstration là-dessus. J'aimerais vous entendre sur ce point.
Je remercie les témoins d'être avec nous aujourd'hui.
Monsieur Currie, vous représentez la Fédération canadienne de l'agriculture; donc, vous représentez tout le monde. Dans votre exposé, vous avez clairement dit que la gestion de l'offre pouvait exister, qu'on n'avait pas à aller piger dedans pour favoriser les autres secteurs, que les deux modèles pouvaient coexister et que votre fédération croyait quand même au commerce international.
J'aimerais que vous en disiez un peu plus là-dessus et que vous nous parliez de la façon dont on soutient les autres secteurs qui ne sont pas assujettis à la gestion de l'offre, notamment par l'entremise de programmes de soutien à l'exportation ou de programmes agricoles du gouvernement.
Ne trouvez-vous pas qu'on devrait insister sur ces éléments plutôt que d'essayer de ne pas protéger les secteurs assujettis à la gestion de l'offre?
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En effet, de la même manière que le Canada dispose de différents moyens de contrôler l'offre sur le marché pour différents produits de base, on observe la même chose, comme vous l'avez dit, en Europe et aux États-Unis.
Par exemple, il y en a un que je connais en Europe, simplement parce que j'y ai travaillé à un moment donné. Les producteurs de porcs du Danemark ont un système qui consiste plus ou moins à créer un fonds. Les producteurs en activité cotisent à ce fonds et, pour ceux qui ont limité leur production ou aidé à renforcer le marché, le conseil d'administration fait une projection de leurs besoins et gère un programme de ce type.
Au Royaume-Uni ou en Europe en général, ce sont généralement les pays qui contrôlent la quantité de produits cultivés, mais ils sont également assez bien indemnisés pour mettre les terres hors production et les utiliser à des fins environnementales. Cela fonctionne également pour la gestion de l'offre.
Comme je l'ai dit, il existe de nombreux programmes. Ils peuvent différer de ceux du Canada, mais il existe d'autres programmes gérés par les producteurs ou par le gouvernement.
Les Pays-Bas se sont débarrassés de la gestion de l'offre dans le secteur du lait, tout comme la Nouvelle-Zélande, mais leurs programmes de gestion de l'offre pour le lait ont coûté de l'argent. L'argent des contribuables a été utilisé pour traiter avec les producteurs et leur verser des indemnités afin de réduire l'offre. Les États-Unis paient aussi pour les surfaces de maïs qui sont retirées de la production.
Ce que j'ai essayé de mettre en avant dans ma présentation, c'est que la gestion de l'offre est une pratique commerciale normale. Il s'agit simplement de savoir qui la contrôle. Je ne connais aucune industrie ou entreprise qui ne fasse de prévisions de la demande et qui n'essaie d'adapter son offre à cette demande. Les secteurs de la volaille et du lait semblent y être parvenus à merveille.
Je me tourne vers vous, monsieur Currie, parce que vous avez mentionné les barrières non tarifaires et cette idée que nous dressons en quelque sorte un secteur contre l'autre si nous essayons de protéger le secteur de la gestion de l'offre.
Dans le cadre de l'Accord économique et commercial global, on semble dire que le secteur de la viande bovine bénéficie d'un meilleur accès au marché européen, mais d'après ce que j'ai compris, nos exportations de viande bovine vers l'Europe ont chuté depuis l'entrée en vigueur de cet accord, ce qui signifie qu'il se passe quelque chose d'autre.
Dans quelle mesure ces secteurs sont-ils liés à ces accords commerciaux, à ces négociations?
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D'après mon expérience, tous les secteurs agricoles font un excellent travail de collaboration avec leur gouvernement fédéral pour s'assurer que chaque accord commercial sert leur intérêt.
En ce qui concerne l'Accord économique et commercial global, vous avez raison. Je crois que seulement 3 % de notre bœuf est exporté en Union européenne. Mes collègues du secteur de la production bovine seraient mieux en mesure de répondre à cette question, mais je sais que dans le cas du porc, l'accès au marché européen est nul.
Par exemple, un problème qui persiste est le fait que nous n'exportons aucun blé dur en Italie en raison d'obstacles non commerciaux.
Vous avez posé une question à M. Carroll concernant le soutien. J'aimerais établir une comparaison avec nos voisins du Sud. Au Canada, en moyenne, 4 % de notre revenu provient des programmes offerts par le gouvernement fédéral. Aux États-Unis, l'aide du gouvernement représente 40 % du revenu annuel de nos homologues. C'est, en soi, un obstacle non commercial. La gestion de l'offre n'a pas d'incidence sur cet aspect de nos activités commerciales. Les producteurs n'ont pas besoin de l'aide du gouvernement fédéral. Ils peuvent demeurer rentables tout en maintenant les prix à un niveau stable pour les consommateurs.
Les gouvernements ont toutes sortes de moyens de manipuler les frontières internationales pour faciliter ou empêcher l'importation d'un produit. Nous devons examiner cela de plus près lorsque nous négocions des accords commerciaux. Nous devons trouver comment éviter ces situations.
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Je remercie tous les témoins de leur présence aujourd'hui.
J'aimerais d'abord m'adresser à Mme Noble.
Vous avez répété que tous les partis appuient la gestion de l'offre. Le concept a survécu à nos récents accords commerciaux, mais comme l'a mentionné M. Carroll, des pays comme la Nouvelle‑Zélande et le Danemark se sont, pour des raisons que j'ignore, débarrassés de leur gestion de l'offre. Je ne sais pas vraiment quelles ont été les conséquences de cette décision dans ces pays.
Vous avez soulevé une préoccupation importante. Vous avez dit que lorsque l'on retire une chose de la table de négociation, cela pourrait avoir des répercussions pour les futurs accords. Je sais que votre organisme a envoyé une lettre à la expliquant certaines de ces préoccupations, notamment la crainte de créer un précédent, c'est-à-dire la crainte que d'autres secteurs réclament des exclusions comparables dans les négociations, et la crainte que faire passer l'intérêt d'un secteur avant celui d'un autre risque d'entraîner de graves conséquences à long terme.
L'opinion à l'égard de cette question semble en effet divisée. M. Currie, qui représente la Fédération canadienne de l'agriculture, dit que cette organisation appuie fermement ce projet de loi.
Premièrement, la a‑t-elle répondu à votre lette du 16 février 2023?
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Pour mettre les choses en perspective, nous sommes ici pour parler du projet de loi, pas pour débattre du bien-fondé de la gestion de l'offre. Nous pourrions tous aller prendre une bière et débattre de cet enjeu jusqu'à la fin des temps. La raison pour laquelle nous sommes ici est de discuter de l'utilité de ce projet de loi pour la politique commerciale du pays. À notre avis, il ne lui sera pas utile.
Notre opinion est fondée sur toutes les raisons que j'ai énoncées, parce que nous tendons la main avant même d'être arrivés à la table de négociation, mais même si on laisse la question des négociations de côté — je pense au fait que le Comité étudiera la question des barrières non tarifaires —, comme l'a mentionné M. Seeback, on ne peut pas dire quoi faire aux autres pays. S'ils n'aiment pas ce que nous faisons — il y a fort à parier qu'ils regardent ce que nous faisons, comme nous regardions ce qui se passait aux États‑Unis au sujet des initiatives relatives à la mention du pays d'origine sur l'étiquetage —, ils peuvent donner la réponse qu'ils veulent. Leur réponse ne sera pas nécessairement donnée à la table de négociation; elle pourrait prendre la forme de barrières non tarifaires ou venir d'ailleurs dans les relations entre les deux pays.
Comme je l'ai dit, si le négociateur du gouvernement du Canada nous dit qu'il est en mesure de protéger la gestion de l'offre que ce projet de loi soit adopté ou non, c'est lui qui négocie, alors je le crois sur parole.
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Très bien. Merci beaucoup.
Je suis d'Oshawa, où on construit des voitures. Beaucoup d'argent est impliqué, alors les précédents que ce projet de loi établirait sont très importants, parce que si un secteur obtient quelque chose, je m'inquiète de la possibilité que d'autres secteurs fassent aussi des demandes, et il y a la question de la compensation. Je ne sais pas si quelque chose a été prévu à cet égard.
J'aurais peut-être une question pour Mme MacNeil. Comme la ministre du Commerce doit présenter au Parlement les objectifs de négociation à l'avance, pourriez-vous dire ce qui fait que le projet de loi est nécessaire?
Je me demande également ce que vous pensez... Les délégués commerciaux du gouvernement s'étaient opposés au projet de loi , mais ils semblent avoir changé d'avis et ils ont changé d'avis au sujet du projet de loi . Il s'agit à peu de choses près de projets de loi identiques. Est‑ce que ces différences justifieraient qu'on interroge de nouveau les délégués? Nous devrions peut-être les inviter de nouveau, parce que, de ce que je constate, il ne semble pas y avoir unanimité, notamment ici, autour de la table.
Je dirais que nous ne pensons pas que le projet de loi soit nécessaire. De notre point de vue, les Canadiens seraient perdants si ce projet de loi était adopté. Je veux dire par là qu'en ce qui concerne l'importation de crème britannique, de crèmes de spécialité provenant du Royaume‑Uni, nous sommes en quelque sorte des orphelins. En effet, nous ne correspondons à aucune des catégories du secteur laitier ou à aucune catégorie de produits laitiers.
Les Canadiens seraient perdants à deux égards. Ils n'auraient plus accès à nos produits du fait que ces derniers seraient condamnés à être considérés comme des suppléments. Nous savons que l'accès au marché canadien nous est déjà refusé et nous ne sommes pas en mesure de vendre des crèmes doubles grumeleuses de spécialité à nos clients canadiens.
Je dirais surtout que les Canadiens seraient privés d'une expérience unique. Si vous avez eu l'occasion de lire Le lion, la sorcière blanche et l'armoire magique à vos enfants ou à vos petits-enfants, vous savez que l'un de ses chapitres évoque le thé britannique, le thé de l'après-midi, et qu'il y est question de crème grumeleuse. Imaginez un instant ne pas être en mesure de vous rendre à l'épicerie pour vous procurer des petits pots de cette crème, et de les rapporter à la maison pour donner vie à ce récit.
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Merci, madame la présidente.
Je tiens à remercier nos témoins.
Je dirais que si les Britanniques ne sont pas en mesure d'exporter leurs produits vers le Canada à l'heure actuelle, c'est à cause du Brexit. En effet, le Royaume‑Uni a choisi de se retirer de l'Accord économique et commercial global qui avait été signé. À présent, le Royaume‑Uni doit négocier de nouveau avec le Canada. Bien que je suis convaincu que nous parviendrons à conclure un accord à plus long terme, ce n'est pas vraiment la faute du Canada. Des pressions externes sont en cause.
Monsieur Currie, vous avez abordé un sujet qui me tient particulièrement à cœur, à savoir la cohésion du secteur agricole. Je comprends et je respecte tous les secteurs agricoles. Je viens d'une circonscription où bon nombre d'agriculteurs sont soumis à la gestion de l'offre, mais où d'autres ne le sont pas. De nombreux producteurs laitiers ont également des cultures commerciales et exportent des céréales. Pour eux, les accords de libre-échange sont tout aussi importants que la protection de la gestion de l'offre.
Ce n'est pas que je veuille vous confier cette tâche publiquement, mais comme vous venez d'être élu, que vous occupez ce poste et que la Fédération canadienne de l'agriculture appuie le projet de loi , quel est votre point de vue sur la nécessité de s'assurer que ce qui est favorable à la gestion de l'offre est également favorable au libre-échange et que ce qui est bon pour les agriculteurs qui dépendent des accords de libre-échange l'est aussi pour les secteurs soumis à la gestion de l'offre? Comment assurez-vous cette cohésion?
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Merci, monsieur Drouin. C'est un plaisir de vous voir, comme toujours.
Nous sommes en mesure de contenir les coûts parce que nos exploitations sont plus petites et que le risque de grippe aviaire est moindre. Aux États-Unis, ce sont les grandes exploitations qui sont touchées. Des installations de trois millions et demi de volailles sont touchées. Les États-Unis ont perdu 18 % de leur production.
Nous tirons 7 % de notre approvisionnement national des États-Unis, donc lorsqu'il y a pénurie sur le marché américain, cela nous nuit également, mais nous réussissons malgré tout à maintenir des prix bas. Les producteurs sont payés. Nous ne fixons pas les prix dans les magasins d'alimentation, donc ce que font les détaillants n'est pas de notre ressort — et je sais que des représentants des détaillants ont comparu devant vous sur les prix des produits alimentaires. Nous arrivons à faire en sorte que les agriculteurs obtiennent un rendement acceptable pour leur travail tout en maintenant des prix d'alimentation très abordables pour les consommateurs du pays.
En ce qui concerne les effets sur le commerce et les accords conclus, nous ne sommes pas contre les accords de libre-échange. Nous voulons que le Canada soit une nation commerçante. Nos homologues américains, les United Egg Producers, n'ont pas demandé d'accès élargi à notre marché, mais notre gouvernement leur a pourtant accordé. C'est pourquoi ce projet de loi est nécessaire.
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Merci, madame la présidente.
Encore une fois, je remercie tous les témoins d'être ici aujourd'hui.
J'ai bien aimé parler avec M. Pelissero au début. Je lui ai dit qu'avant de me lancer en politique, j'avais travaillé avec les Producteurs laitiers de l'Ontario. J'ai alors fait la connaissance de l'un de ses anciens employés, M. Mitchell. J'ai eu le plaisir de travailler avec lui pendant plusieurs années dans le domaine de la gestion de l'offre.
Je pense que vous pouvez constater que beaucoup de personnes ici — et même tout le monde, d'un point de vue politique — appuient la gestion de l'offre. Si nous avons des réserves, je dirais qu'elles concernent simplement sa codification elle-même et l'effet qu'elle pourrait avoir sur d'autres secteurs agricoles dans le cadre d'éventuelles négociations commerciales.
Je vais d'abord m'adresser à M. Currie.
Pulse Canada, les Producteurs de grains du Canada, l'Association nationale des engraisseurs de bovins, l'Association canadienne des bovins et l'Alliance canadienne du commerce agroalimentaire sont venus nous faire part de leurs préoccupations quant aux conséquences possibles de l'adoption de ce projet de loi.
J'aimerais savoir comment la FCA voit tout cela. Je pense que M. Drouin tirait les mêmes conclusions. D'autres aussi nous ont fait part de leurs préoccupations.
Comme vous portez la voix d'une organisation mondiale représentant l'ensemble du Canada — je m'adresse ici aux gens de la Fédération canadienne de l'agriculture — comment peut‑on rectifier le tir ou concilier ces idées concurrentes?
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Comme on l'a dit, il est toujours difficile de représenter autant de produits de base différents.
En fin de compte, notre politique de défense de la gestion de l'offre est guidée par la volonté de nos membres. Nos membres appuient la politique de défense de la gestion de l'offre, donc nous maintenons le cap. Cela ne signifie pas que nous ne soutenons pas d'autres segments de l'agriculture, parce que nous représentons tout le monde, en gros, par défaut, par l'intermédiaire des organisations agricoles générales provinciales présentes au sein de la fédération.
Comme je le disais, il n'est pas nécessaire d'abandonner l'un pour l'autre. Je reprendrai l'exemple de l'AECG, dans le cadre duquel il y a eu consensus pour autoriser des importations de produits laitiers au Canada, mais il n'y a pratiquement aucune réciprocité de la part de l'Union européenne d'un point de vue commercial en agriculture. Si le fait de renoncer à la gestion de l'offre ne nous permet pas d'obtenir l'accès au marché, peut-être devrions-nous cesser d'y renoncer jusqu'à ce que nos interlocuteurs soient prêts à nous y donner accès pour d'autres produits.
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Merci, madame la présidente.
C'est une discussion très intéressante. Comme je ne cesse de le répéter, nous sommes prospères au Canada grâce au commerce. Le commerce, en particulier le commerce international, représente de 62 à 65 % de notre PIB. Bien que les agriculteurs canadiens soient peu nombreux en chiffres absolus, puisqu'ils ne représentent qu'une petite partie de notre population de 39 millions d'habitants, leurs excellentes exportations placent le Canada au cinquième rang des exportations mondiales de produits agricoles et agroalimentaires. Je pense que nous devrions tous en être très fiers.
Je suis assez surpris que la Fédération canadienne de l'agriculture, qui était censée représenter les intérêts de tous les agriculteurs, il me semble... Mais je suis très heureux qu'il existe des organisations comme l'ACCAA, qui représente Pulse Canada, le Conseil canadien du canola, les Producteurs de grains du Canada, le Conseil canadien du porc, Céréales Canada et l'Association canadienne des bovins. Les membres de ces organisations multiplient les efforts pour exporter les produits canadiens dans le monde entier.
Grâce à nos accords de libre-échange, nous avons accès à 51 pays différents. Nous négocions actuellement un accord de libre-échange dans la région Asie-Pacifique. Comme vous le savez, en dehors de la Chine, la région Asie-Pacifique est un marché en pleine croissance. La population y est en croissance. Les économies y sont en croissance. C'est un marché en expansion pour les exportations canadiennes. Parmi les pays avec lesquels nous négocions actuellement un accord préliminaire de libre-échange, il y a l'Inde et l'Indonésie, le troisième pays le plus peuplé de la région Asie-Pacifique, et peut-être le cinquième pays le plus peuplé au monde.
Avec ce projet de loi, nous lions les mains de nos négociateurs et nous donnons des munitions aux négociateurs de l'Inde, de l'Indonésie et d'autres pays. Nous leur donnons un outil pour limiter les exportations canadiennes et les règles de libre-échange qui seraient bénéfiques pour le Canada.
Je pense, madame la présidente, que dans nos études sur des projets de loi ou différents sujets, il y a toujours un témoin qui fait une déclaration particulièrement percutante. Dans ce cas‑ci, je pense que la palme revient à M. James Bekkering, lui-même agriculteur et président de l'Association nationale des engraisseurs de bovins, qui a déclaré que ce projet de loi « dressera des agriculteurs canadiens et des voisins les uns contre les autres ». Je pense que c'est tout à fait juste.
Mme Noble a mentionné que ce projet de loi présente des avantages limités pour le secteur soumis à la gestion de l'offre, mais qu'il entraînera une baisse importante de la plupart des exportations du secteur agricole.
Madame Noble, je ne pense pas que vos membres exportent directement leurs produits vers la région Asie-Pacifique, mais vous comprenez sûrement l'importance des marchés de l'Asie-Pacifique et des négociations d'accords de libre-échange en cours avec les pays de la région.
Êtes-vous d'accord avec moi pour dire que ce projet de loi, s'il est adopté, donnera des munitions aux négociateurs de l'Inde et de l'Indonésie pour réduire l'accès à leurs marchés ou pour faire moins de concessions dans l'ouverture de leurs marchés aux exportations canadiennes?
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Je vous remercie de cette question.
J'aimerais juste clarifier une chose que vous avez dite. La Fédération canadienne de l'agriculture est une excellente association très crédible, mais elle ne représente pas l'ensemble du secteur agricole, et notre association n'en est pas membre. Nous sommes membres de l'Alliance canadienne du commerce agroalimentaire. Je pense qu'il est important de le préciser.
Le Canada dépend du commerce, et nous devons avoir la capacité de négocier. Comme l'a dit M. Bekkering, 75 % de nos exportations de bœuf sont destinées aux États-Unis. C'est dangereux. Nous savons qu'il est dangereux de dépendre de ce marché, parce que nous ne savons pas comment la situation pourrait évoluer à l'avenir, politiquement ou autrement.
Nous avons besoin de nouveaux accords commerciaux et nous devons diversifier nos exportations. L'Indo-Pacifique, comme vous l'avez dit, présente un potentiel très intéressant pour la viande bovine et pour l'ensemble du secteur agricole.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Monsieur Currie, vous avez dit que dans le cadre de l'ACEUM, 11 %... J'aimerais revenir en arrière.
Tout le monde ici présent appuie la gestion de l'offre. C'est mon cas. Ma circonscription compte de nombreuses exploitations soumises à la gestion de l'offre. Je les visite souvent et je les soutiens pleinement. La gestion de l'offre est un excellent système. Je sais que tous les députés conservateurs sont d'accord avec moi à cet égard. Je tiens à ce que ce soit formulé très clairement dans le compte rendu.
Lorsque nous posons ces questions, nous essayons de comprendre quels effets le projet de loi pourrait avoir sur de futures négociations commerciales. Si nous posons ces questions, ce n'est pas parce que nous n'aimons pas la gestion de l'offre ou parce que nous pensons qu'elle ne devrait pas être protégée. Elle devrait l'être.
Voici où nous en sommes. Vous avez dit qu'un accès à 11 % des parts de marché avait été accordé dans le cadre de l'ACEUM. Des représentants du gouvernement canadien nous ont dit qu'ils faisaient tout ce qui était en leur pouvoir pour protéger la gestion de l'offre, tout. Lorsqu'ils entament des négociations commerciales, ils disent qu'ils ne donneront pas accès à la gestion de l'offre.
Cela ne vous amène‑t‑il pas à la seule conclusion possible, à savoir qu'ils ont accordé cet accès au marché parce que s'ils ne le faisaient pas, il n'y aurait pas eu d'accord commercial?
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Encore une fois, tout dépend des accords commerciaux qui sont en vigueur. Il est très difficile de répondre de façon précise à la question, mais selon toute vraisemblance, je pense qu'elles disparaîtraient rapidement.
Les États-Unis cherchent chaque jour à accroître leur accès à nos produits. Ce que les gens ne comprennent pas, c'est que si les États-Unis avaient accès à tous nos produits laitiers, cela ne résoudrait pas leur problème de surproduction, mais cela anéantirait l'industrie laitière au Canada.
Si la gestion de l'offre disparaissait, l'avenir ne me semblerait pas prometteur. Peut-être que je me trompe et que tout irait bien. Peut-être trouverait‑on une solution, parce que nos agriculteurs font preuve de créativité et lancent des initiatives formidables, mais je ne vois pas d'avenir vraiment radieux à cet égard.
N'oublions pas non plus la qualité des produits de notre secteur sous gestion de l'offre.
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Je ferai quelques observations puis je me tournerai vers mon collègue, M. Destrijker, qui pourra en ajouter.
Je dirais qu'il en résulterait une mort lente. Soutenez la gestion de l'offre. C'est une autre part du gâteau qui revient à tout le monde ici présent. Nous sommes la carotte, que ce soit au début ou à la fin de l'accord commercial. Je compatis avec les producteurs de bœuf et de porc. J'avais autrefois une ferme porcine. Des barrières non commerciales empêchent nos collègues d'expédier leurs produits. Pour chaque livre de bœuf que nous expédions vers l'Union européenne, 11 livres nous sont envoyées, et M. Currie en a parlé.
Quand notre gouvernement s'attaque enfin à ces questions et lorsque nous parlons de barrières non commerciales ici, au Canada, nos producteurs doivent respecter certaines normes pour pouvoir produire des aliments destinés aux Canadiens. Des œufs peuvent provenir d'autres pays, et ces producteurs ne sont pas tenus de respecter les mêmes normes.
Je me souviens que, dans le cadre d'un accord commercial, Steve Verheul a dit que tout ce que le gouvernement avait à faire, c'était de nous soutenir, de mettre cela en place, et que les produits n'entreraient pas ici. Où est notre gouvernement? Où nous défend‑il? Il ne le fait pas. Il ne s'agit pas de nous défendre et de dire que c'est fini.
Le projet de loi va vraiment mettre les choses en marche. Nous devons promouvoir la gestion de l'offre partout dans le monde, car c'est un excellent système qui permet aux agriculteurs d'obtenir des revenus équitables.
Monsieur Destrijker, je ne sais pas si vous vouliez ajouter quelque chose.
:
Merci, monsieur Pelissero.
[Français]
Depuis des décennies, nous entendons nos gouvernements dire qu'ils vont protéger et défendre la gestion de l'offre. Or, à chaque négociation, on en coupe une petite partie.
Nous demandons donc au gouvernement de cesser de couper cette petite partie pour redonner confiance à nos producteurs afin qu'ils puissent réinvestir et transmettre les entreprises à leurs enfants à l'avenir. C'est simplement cela que nous vous demandons.
Nous vous croyons, vous, nos députés, et nous vous faisons confiance, mais, chaque fois, cela se produit. Nous souhaitons que cela n'arrive plus jamais.
Je voudrais poursuivre cette discussion. Il semble que c'est très important et que c'est au cœur de la question.
Nous parlons de la gestion de l'offre. Il s'agit avant tout de gérer l'offre, et nous pouvons le faire à l'échelle nationale. C'est évidemment ce que nous faisons. Nous gérons l'offre nationale et nous gérons les prix afin qu'ils soient équitables pour les agriculteurs et les consommateurs, mais nous devons gérer l'offre qui vient de l'étranger. Au fil des ans, dans le cadre des trois derniers accords, nous avons perdu 10 % de cette part de marché. Nous en avions déjà perdu environ 8 %, et nous en sommes donc à 18 %, si j'ai bien compris. À quel moment la gestion de l'offre cesse‑t‑elle de fonctionner? Vous parlez de mort lente. Y a‑t‑il un moment où l'on se dit « à quoi bon? »
Les conservateurs semblent penser qu'il n'y a pas de mal à se servir de cet élément comme monnaie d'échange et à en céder une part chaque fois, seulement pour conclure l'accord. À quel moment cela cessera‑t‑il de fonctionner?
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Je ne connais pas le chiffre magique à partir duquel cela cesserait de fonctionner. Tout ce que je sais, c'est que lorsque nos jeunes ne reviennent plus à la ferme parce qu'ils ne veulent pas...
Mes enfants disent qu'ils ne veulent pas travailler dans une ferme porcine parce qu'il n'y a pas d'avenir dans le secteur. Trente pour cent des producteurs d'œufs au Canada ont moins de 45 ans. Cela montre qu'ils veulent se lancer dans le secteur, mais à un moment donné, les choses changeront à cet égard. Si nous examinons les négociations commerciales et ce qui s'est passé, si c'est si bon pour nous, pourquoi nous donnent-ils des compensations pour atténuer les effets de l'accord commercial qu'ils ont conclu pour nous. Je suis désolé. Peu importe le parti au pouvoir, on cherche à nous offrir des compensations. S'il n'y a pas d'effet négatif sur notre industrie, pourquoi nous donne‑t‑on des compensations?
Bien sûr, on peut parler de statistiques qui montrent qu'il y a une croissance, mais la population augmente. La croissance est aussi liée à ce fait. Ce pays a besoin de plus d'immigrants, de plus de nouveaux arrivants. Nous voulons répondre aux besoins de ces marchés avec des œufs canadiens et nous pouvons le faire. Cependant, regardez ce qui se passe lorsque nous avons des homologues dans le secteur du bœuf — M. Bekkering et sa ferme familiale, et ma ferme familiale — et que vous nous montez les uns contre les autres. Trouvez un moyen pour qu'il puisse expédier du bœuf ailleurs dans le monde sans céder une partie de notre approvisionnement national aux Américains et à d'autres pays.