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FEWO Rapport du Comité

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Rapport sur l’autonomisation économique des femmes : Rapport dissident des conservateurs

Ce rapport supplémentaire reflète les opinions des députées conservatrices qui siègent au Comité permanent de la condition féminine (« FEWO ») : Michelle Ferreri (Peterborough-Kawartha), Anna Roberts (King-Vaughan) et Dominique Vien (Bellechasse-Les Etchemins-Lévis).

Introduction

Comme indiqué dans le rapport, l’étude a examiné l’autonomisation économique des femmes en mettant l’accent sur les écarts entre les sexes, la participation et la rétention des femmes dans le secteur du travail, l’accès au financement, le mentorat, la formation et l’autonomisation des entreprises détenues et exploitées par des femmes.

Les membres conservatrices de ce Comité ont soutenu et participé activement à la poursuite de cette étude, compte tenu de son importance cruciale pour garantir que le gouvernement du Canada reconnaisse correctement les obstacles à l’émancipation économique des femmes et agisse en conséquence. L’intérêt des conservateurs pour cette étude découle également de la nécessité d’examiner la mise en œuvre par le gouvernement du Canada de son système pancanadien d’apprentissage et de garde des jeunes enfants afin de s’assurer qu’il soutient la prospérité économique des femmes à travers le Canada.

En 2021, lorsque le gouvernement du Canada a lancé son Programme National d’Apprentissage et de Garde des jeunes enfants, l’un des piliers fondamentaux qu’il présentait était de faciliter le retour des femmes sur le marché du travail. Or, la réalité est toute autre : les femmes entrepreneures sont menacées d’extinction, les services de garde d’enfants ferment leurs portes, les parents n’ont pas le choix et sont confrontés à de longues listes d’attente, et la participation des femmes au marché du travail est en baisse.

Observations

Bien que nous appréciions le travail du Comité dans la poursuite de cette étude, ce rapport n’aborde pas les nombreuses lacunes rencontrées par les femmes entrepreneures dans le déploiement du système pancanadien d’apprentissage et de garde des jeunes enfants, telles qu’elles ont été exprimées par les témoins devant le Comité.

Pas de représentation du secteur privé

En ce qui concerne les accords pancanadiens sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants, bien que les conservateurs soient réceptifs au développement du secteur canadien de la garde d’enfants, nous sommes consternés par le fait que les échecs de la mise en œuvre de ces accords ne soient pas pleinement compris ni reflétés de manière adéquate dans ce rapport.

Alors que le rapport reconnaît qu’il y a un manque d’accès à des services de garde d’enfants adéquats et abordables et que ces services doivent répondre aux besoins des femmes et de leurs familles à travers le Canada, il ne reconnaît pas l’exclusion des opérateurs privés de services de garde d’enfants des accords pancanadiens sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants signés avec les provinces et les territoires.

Ces propos ont été repris dans les témoignages recueillis lors de l’étude du Comité sur l’émancipation économique des femmes. En particulier, Andrea Hannen, directrice générale de l’Association of Day Care Operators of Ontario, a déclaré que « la question que se posent de nombreuses exploitantes de garderies canadiennes est de savoir si elles ont leur place dans le programme national de garderies du Canada ou si elles ont un avenir dans le secteur de la garde d’enfants tout simplement ».[1] Par ailleurs, Rosemary Cooper, directrice exécutive de Pauktuutit Inuit Women of Canada, a déclaré : « Nous sommes encore très dépendants des prestataires de services de garde en milieu familial pour assurer la participation des femmes inuites à la vie active ».[2]

Le principe directeur du projet de loi C-35, Loi relative à l’apprentissage et à la garde des jeunes enfants au Canada, consiste à privilégier l’accès aux services de garde publics et sans but lucratif par rapport à tout autre type de service de garde d’enfants. Les services de garde d’enfants de qualité existent sous toutes les formes et dans toutes les tailles, et le gouvernement fédéral ne doit pas dicter quel type de service de garde d’enfants convient le mieux aux familles.

L’absence de ces informations est extrêmement préoccupante étant donné que « la majorité des entrepreneures privés de garde d’enfants sont des femmes ».[3] L’idée qu’une étude d’un comité sur l’émancipation économique des femmes exclut les preuves directes des obstacles est préjudiciable à l’intégrité de l’étude.

Les femmes chefs d’entreprise sont menacées d’extinction

Les femmes entrepreneures au Canada risquent de disparaître et de s’éteindre, en raison des politiques fédérales mises en œuvre ces dernières années.

Étant donné que plus de 95 % des travailleurs du secteur de la garde d’enfants sont des femmes[4], et que la majorité des garderies sont détenues par des femmes[5], les entrepreneurs du secteur de la garde d’enfants qui subissent les conséquences négatives de cette situation sont en grande partie des femmes[6].

La dernière chose dont les femmes entrepreneures canadiennes ont besoin, c’est d’être évincées de l’un des seuls secteurs qu’elles dominent. Ce sentiment a été exprimé par Andrea Hannen lors d’un récent témoignage, lorsqu’elle a été citée en ces termes : « C’est au détriment de toutes les femmes que les entrepreneurs du secteur de la garde d’enfants sont menacés d’extinction par la nationalisation du secteur canadien de la garde d’enfants »[7]

Le rapport du Comité passe sous silence le langage affirmé et puissant utilisé par les témoins du Comité, y compris Mme Hannen, et ne reconnaît pas le fait que les femmes chefs d’entreprise sont menacées d’extinction. La garde d’enfants n’est plus un domaine dans lequel les femmes entrepreneures peuvent exceller et prospérer. Au contraire, elles sont poussées hors d’un domaine auquel elles ont participé pendant des décennies.

L’Accord pancanadien sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants ne tient pas compte de la façon dont ces entreprises détenues et exploitées par des femmes seront affectées, et encore moins des mesures prises pour atténuer les effets négatifs auxquels elles sont confrontées en conséquence directe de sa mise en œuvre.

Les membres conservatrices du Comité reconnaissent le rôle crucial que jouent les femmes entrepreneures du secteur de la garde d’enfants au Canada en facilitant la mise en place de services de garde d’enfants abordables et accessibles à tous. L’Accord pancanadien sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants vise directement leurs entreprises et nuit donc à l’autonomisation économique des femmes.

Les fournisseurs de services de garde d’enfants ferment leurs portes

Les membres conservatrices du Comité reconnaissent que les accords pancanadiens sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants n’ont pas seulement un impact sur les exploitants privés de services de garde d’enfants, mais aussi sur tous les exploitants de services de garde d’enfants, qu’ils soient publics ou à but non lucratif.

Tout au long de l’étude du Comité, les membres du Comité ont entendu des témoins qui ont exprimé leurs inquiétudes quant au fait que l’objectif de 10 $ par jour pour les services de garde d’enfants pour toutes les familles canadiennes prendrait plus de temps que l’échéance de 2026, si même cet objectif était atteint. Malgré cela, le rapport du Comité ne reconnaît pas que les exploitants de services de garde d’enfants risquent de fermer ou ferment leurs portes en raison de la mise en œuvre du programme canadien de garde d’enfants.

Dans son témoignage, Medora Uppal, directrice générale du YWCA de Hamilton, a déclaré : « Nous commençons déjà à voir des fournisseurs de services de garde d’enfants sans but lucratif envisager de fermer, de ne pas ouvrir de nouvelles places ou de fermer leurs programmes de soins aux nourrissons, qui sont si essentiels dans le secteur des services de garde d’enfants, parce qu’ils n’ont pas les moyens d’exercer leurs activités. Ils ne peuvent pas embaucher de personnel et ne peuvent pas payer les lois. »[8] Les services de garde d’enfants publics et à but non lucratif qui peuvent bénéficier d’un financement disposent d’un budget fixe et ne peuvent pas se permettre d’embaucher du personnel supplémentaire ou, dans certains cas, de rester ouverts.

Les membres conservatrices du Comité reconnaissent que pour alléger le fardeau qui pèse sur les services de garde publics et à but non lucratif, il faut inclure les services de garde privés. En incluant les opérateurs privés de services de garde d’enfants, non seulement les femmes entrepreneurs en bénéficieront, mais tous les opérateurs de services de garde d’enfants et les familles en profiteront grâce à une plus grande accessibilité.

La participation des femmes au marché du travail n’augmente pas

L’un des piliers de la mise en œuvre des accords pancanadiens sur l’éducation préscolaire et la garde d’enfants était d’aider les femmes à entrer dans la vie active. Malheureusement, cet objectif est loin d’être atteint, au détriment de l’émancipation économique des femmes.

En avril 2015, le taux d’activité des femmes en âge de travailler était de 66,2 %[9]. En 2024, après la mise en œuvre du programme national de garde d’enfants du gouvernement du Canada, le taux de participation des femmes à la population active a diminué. En avril 2024, le taux d’activité des femmes en âge de travailler était de 65,4 %[10].

Les accords pancanadiens sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants n’ont pas atteint l’objectif d’avoir un impact sur la participation des femmes au marché du travail. Non seulement la participation des femmes n’a pas augmenté, mais elle a même diminué de 0,8 %.

Les membres conservatrices du Comité reconnaissent que le taux d’activité des femmes en âge de travailler est en baisse et qu’il n’a en fait pas augmenté, contrairement à ce qui est indiqué dans le rapport du Comité. Depuis des années, les accords pancanadiens sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants ne parviennent pas à favoriser l’émancipation économique des femmes.

Pas de flexibilité

Lors de la mise en œuvre de la nationalisation du programme canadien de garde d’enfants, le gouvernement du Canada a signé des accords individuels avec chaque province et territoire du pays. Lors de la signature de ces accords, des carcans idéologiques ont été imposés aux provinces et aux territoires, sans aucune marge de manœuvre pour modifier les accords.

Compte tenu des préoccupations susmentionnées qui ont un impact direct sur l’autonomisation économique des femmes, les membres conservatrices du comité sont alarmés par l’incapacité du gouvernement du Canada à travailler avec les provinces et les territoires pour améliorer l’autonomisation économique des femmes par le biais des accords pancanadiens sur l’éducation préscolaire et la garde d’enfants.

Dans certaines provinces, les opérateurs privés représentent une part importante du secteur de la garde d’enfants, ce qui entraîne des conséquences disproportionnées. En Nouvelle-Écosse, les opérateurs privés représentent 55 % du secteur de la garde d’enfants de la province.[11] Cependant, lorsque le gouvernement provincial s’est adressé au gouvernement fédéral pour lui faire part de ses préoccupations, il a été rejeté par le gouvernement du Canada.[12]

Bien que le rapport du Comité souligne quelques-unes des préoccupations soulevées par les témoins au sujet du plan d’apprentissage et de garde des jeunes enfants, il ne parvient pas à confier au gouvernement du Canada la responsabilité de collaborer avec les provinces, les territoires et les fournisseurs de services de garde d’enfants afin d’offrir une plus grande flexibilité. En particulier, en ce qui concerne l’amélioration de la collaboration avec les femmes entrepreneures et l’assurance que davantage de femmes sont en mesure de réintégrer le marché du travail.

Dans son témoignage devant le Comité, Bonnie Brayton, directrice générale du DisAbled Women’s Network of Canada, a développé ce point lorsqu’elle a déclaré : « on n’a pas veillé à ce que ce soit l’occasion de repenser les services de garde d’enfants »[13] citant que cela ne fonctionne pas pour toutes les femmes, y compris celles qui ont besoin d’une garde familiale, d’une garde 24 heures sur 24 et les femmes qui ne travaillent pas de neuf à cinq.[14]

Les membres conservateurs du Comité estiment que le fait que le rapport du Comité ne reconnaisse pas le rôle du gouvernement du Canada dans la collaboration avec les provinces et les territoires pour améliorer la flexibilité dans le cadre des accords pancanadiens sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants constitue un obstacle important à la résolution des lacunes de ce programme.

Pas de choix pour les parents

Les membres conservatrices du Comité reconnaissent que les familles canadiennes devraient avoir accès à des services de garde d’enfants abordables et de qualité et devraient pouvoir choisir les prestataires de services de garde d’enfants qui répondent le mieux aux besoins de leur famille.

Le rapport du Comité souligne à juste titre que de nombreux témoins ont déclaré que le manque d’accès à des services de garde d’enfants adéquats et abordables constituait un obstacle important à l’autonomisation économique des femmes. Cependant, il n’aborde pas le fait que le cadre actuel de l’Accord pancanadien sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants pourrait être amélioré afin d’accroître le choix offert aux parents et aux familles qui ont besoin de services de garde d’enfants.

Dans son témoignage, Andrea Hannen, directrice générale de l’Association of Day Care Operators of Ontario, a déclaré : « La question que se posent de nombreux entrepreneurs canadiens du secteur de la garde d’enfants est de savoir s’ils ont une place dans le programme national de garde d’enfants du Canada ou s’ils ont un avenir tout court »,[15] car toute une partie du secteur de la garde d’enfants du Canada souhaite contribuer à atténuer les difficultés liées à la recherche de services de garde d’enfants abordables et accessibles. Cependant, en raison des contraintes idéologiques qui pèsent sur le programme, ils ne peuvent pas y participer.

Caitlin Morrison, directrice des opérations et de la communication du Prosperity Project, a expliqué plus en détail le manque d’accès aux services de garde d’enfants pour les parents en déclarant : « Nous pensons qu’encourager un meilleur accès aux services de garde d’enfants dans certaines provinces serait très utile pour permettre aux femmes de continuer à rechercher des rôles de leadership »[16]

En réalité, le programme pancanadien d’apprentissage et de garde des jeunes enfants a réduit le choix des parents et rendu plus difficile l’accès aux services de garde d’enfants. Selon Statistique Canada, le pourcentage de familles déclarant avoir des difficultés à trouver des places pour leurs enfants est passé de 36,4 % en 2019 à 46,4 % en 2023.[17] De plus, en 2022, 19 % des parents d’enfants âgés de 0 à 5 ans qui n’utilisaient pas de services de garde ont déclaré qu’ils avaient un enfant sur une liste d’attente, contre 26 % en 2023.[18]

Les membres conservatrices du Comité sont profondément préoccupées par l’approche du gouvernement du Canada concernant le déploiement des accords pancanadiens sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants, qui limite le choix des parents et, par conséquent, nuit à l’autonomisation économique des femmes.

Recommandations complémentaires

Compte tenu de ces observations, les membres conservatrices de ce Comité recommandent que la recommandation suivante soit ajoutée au rapport du Comité :

Le gouvernement du Canada devrait appuyer tous les types de garderies afin de faciliter l’autonomisation économique des femmes et leur participation au marché du travail, ce qui profiterait à la fois aux fournisseurs de services de garde d’enfants et aux mères désireuses d’occuper un emploi.

Conclusion :

En formulant leurs observations et recommandations supplémentaires, les membres conservatrices du Comité souhaitent remercier les analystes et les greffiers de la Chambre des communes pour le travail considérable qu’ils ont accompli en vue de l’achèvement de ce rapport. Ce rapport supplémentaire n’est en aucun cas une façon de mettre en doute leur travail, mais plutôt de souligner les lacunes du rapport adopté par la majorité des membres du Comité. Bien que le Comité n’ait pas tenu compte de bon nombre de nos observations, nous espérons que ce rapport supplémentaire permettra au gouvernement du Canada de mieux comprendre le processus de mise en œuvre des accords pancanadiens sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants.

Merci,

Michelle Ferreri, députée

Peterborough–Kawartha

Anna Roberts, députée

King–Vaughan

Dominique Vien, députée

Bellechasse–Les Etchemins–Lévis


[1] Comité FEWO- Témoignages, 16 février 2024 (Andrea Hannen)

[2] Comité FEWO- Témoignages, 16 février, 2024 (Rosemary Cooper)

[3] Comité FEWO- Témoignages, 16 février, 2024 (Andrea Hannen)

[4] Site web de Statistique Canada, 25 juin 2021, Témoignages

[5]Statistique Canada, 2021, 25 août. Témoignages

[6] Innovation, Sciences et Développement économique Canada, 3 avril 2024, Témoignages

[7] Comité FEWO- Témoignages, 16 février 2024 (Andrea Hannen)

[8] Comité FEWO- Témoignages, 16 février, 2024 (Medora Uppal)

[9] Statistique Canada, 23 mai 2024, Témoignages

[10] Statistique Canada, 23 mai 2024, Témoignages

[11] CBC News, 3 mai 2024, Témoignages

[12] CBC News, 3 mai 2024, Témoignages

[13] Comité FEWO- Témoignages, 16 février 2024 (Bonnie Brayton)

[14] Comité FEWO- Témoignages, 16 février 2024 (Bonnie Brayton)

[15] Comité FEWO- Témoignages, 16 février 2024 (Andrea Hannen)

[16]Comité FEWO- Evidence, 16 février 2024 (Caitlin Morrison)

[17] Statistique Canada, 12 mai 2023, Témoignages

[18] Statistique Canada, 12 mai 2023, Témoignages