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FINA Rapport du Comité

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Rapport dissident du Bloc Québécois

La pandémie a usé le tissu social en réduisant la possibilité d’avoir un débat sain, ouvert et nuancé. La polarisation, tant honnie dans différents pays occidentaux, nous a atteints. Pour le Canada, cela n’a pas aidé lorsque le gouvernement de Justin Trudeau a joué sur l’enjeu de la vaccination obligatoire à des fins partisanes durant les élections de 2021. Lorsque le premier ministre d’un pays du G7 attise les divisions, au lieu d’expliquer ses décisions et de s’appuyer sur la santé publique, il manque à son devoir de s’élever au niveau que nécessite son rôle. Alors que le Québec et les provinces mettaient sur pied des plans de déconfinement, à différents rythmes, le fédéral polarisait et envoyait le message que ces revendications ne devaient même pas être entendues. Et ça, ça a choqué.

Après des semaines à laisser pourrir la situation, tant pour les résidents d’Ottawa et de Gatineau que pour les commerces, le gouvernement a décidé d’invoquer la Loi sur les mesures d’urgence pour couvrir leur incapacité à prendre leur responsabilité dans un dossier qui les concernait directement : bien que la plupart des mesures sanitaires relevaient des provinces et du Québec, les manifestants étaient présents pour faire plier les libéraux de Justin Trudeau.

Le gouvernement a choisi la partisanerie, plutôt que d’élever le débat. Et, au moment où la situation s’envenimait et que les gens critiquaient l’inaction de ce gouvernement, ils ont sorti la bombe atomique législative pour régler une situation dont ils ne cessaient de rabattre la responsabilité sur l’Ontario et la ville d’Ottawa. Le gouvernement fédéral aurait dû s’y intéresser, s’y impliquer, dès les premières heures. Et non pas lorsqu’il était rendu gênant, au Canada, au Québec, mais aussi à l’international et chez nos voisins du Sud, de ne pas agir.

On invoque cette loi exceptionnelle quand c’est absolument inévitable. Plusieurs ont fait valoir que la Loi était nécessaire pour envoyer un message aux manifestants. L'article 3 de la Loi précise qu'il n'est pas suffisant qu'il y ait une crise. Il faut, de plus, que la crise « échappe à la capacité ou aux pouvoirs d'intervention des provinces » et qu'il ne soit « pas possible d'y faire face adéquatement sous le régime des lois du Canada ». Or, le gouvernement n'a pas fait cette démonstration dans l'énoncé des motifs qu'il a remis aux parlementaires. Pire, il n'a même pas essayé de le faire, alors que la Loi l'exige. Il demeure totalement silencieux sur le sujet. Nous espérons que, à la suite de ce rapport, le gouvernement justifie son utilisation. Mais avec les témoignages qui s’y retrouvent, nous nous sommes faits à l’idée que le gouvernement n’aura pas de nouvelles justifications à nous offrir, car il n’en existe pas.

Voici un exemple d’enjeu qui nous fait dire que la situation n’exigeait pas l’invocation de la Loi. Conformément au décret, les mesures contre le financement de la criminalité s'étendent jusqu'aux plateformes de sociofinancement. C’est, en effet, une bonne idée. En fait, c'est tellement une bonne idée que les lois actuelles le prévoient déjà : les plateformes de sociofinancement sont déjà encadrées par les provinces et le Québec. Les lois existent déjà, et elles fonctionnent : le 10 février dernier, la Cour supérieure de l'Ontario a accordé une injonction, demandée par la province, pour geler les fonds recueillis par les campagnes « Freedom Convoy 2022 » et « Adopt a Trucker » sur la plateforme de sociofinancement GiveSendGo. Tout cela s'est déroulé en vertu des lois ordinaires, sans la Loi sur les mesures d'urgence, sans le gouvernement par décret.

Comme groupe parlementaire, et pour donner suite aux témoignages entendus au comité et ailleurs, nous aurions voulu voir insérer dans ce rapport remis à la Chambre les recommandations suivantes:

  1. 1)      Que le gouvernement s’assure que les lois en vigueur sont insuffisantes pour régler la situation et qu’il puisse en faire raisonnablement la démonstration à la Chambre avant d’invoquer la loi sur les mesures d’urgence;
  2. 2)      Que le gouvernement privilégie une intervention juste et efficace et qu’il agisse de façon proactive au moment opportun afin d’éviter qu’une situation de crise ne dégénère, notamment en faisant preuve des attributs de leadership que sont la capacité d’établir le dialogue avec les parties concernées et la capacité d’anticiper l’issu d’une situation et de mettre de l’avant les solutions nécessaires pour prévenir qu’elle ne dégénère, avant de mettre en place une intervention musclée après plusieurs semaines d’inactions;
  3. 3)      Que le décret du gouvernement ne prévoit que des mesures réalistiquement applicables et que celles-ci soient raisonnablement nécessaires contrairement aux mesures décrétées visant l’annulation des assurances de sécurité routière auxquelles souscrivaient les camionneurs d’assurer la sécurité et de garantir la protection financière aux Canadiens en cas d’accidents, notamment dans les provinces qui ne sont pas munies d’un système d’assurance routière avec compensation en cas de faute du conducteur;
  4. 4)      Que le gouvernement n’utilise pas le précédent créé par les campagnes de sociofinancement des camionneurs pour chercher à imposer une règlementation fédérale à ces plateformes qui, comme tous les autres intermédiaires financiers, relèvent du droit privé et des autorités provinciales en matière de valeurs mobilières.