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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des finances


NUMÉRO 141 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 2 mai 2024

[Enregistrement électronique]

(0845)

[Traduction]

    Bienvenue à la 141e réunion du Comité permanent des finances de la Chambre des communes. Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 21 novembre 2022, le Comité se réunit pour discuter du rapport de la Banque du Canada sur la politique monétaire.
    La réunion d'aujourd'hui se déroule sous forme hybride, conformément à l'article 15.1 du Règlement.
     Avant que nous commencions, j'aimerais rappeler certaines mesures de prévention importantes à tous les membres du Comité et à tous les autres participants qui sont dans la salle. Elles ont été légèrement modifiées, comme l'indique le bureau du Président dans un message que vous avez reçu, chers collègues.
     Afin de prévenir les rétroactions sonores perturbatrices qui peuvent causer des blessures, on rappelle à tous les participants dans la salle de tenir leur oreillette loin de tous les microphones en tout temps.
    Comme l'indique le communiqué du Président du lundi 29 avril destiné à tous les députés, les mesures suivantes ont été prises pour aider à prévenir les rétroactions acoustiques.
    Toutes les oreillettes ont été remplacées par un modèle qui réduit considérablement la probabilité d'une rétroaction acoustique. Les nouvelles oreillettes sont noires, alors que les anciennes étaient grises. Veuillez n'utiliser que l'oreillette noire approuvée. Par défaut, toutes les oreillettes inutilisées seront débranchées au début d'une réunion. Lorsque vous n'utilisez pas la vôtre, veuillez la placer face vers le bas au milieu de l'autocollant qui se trouve sur la table, comme indiqué. Veuillez consulter les cartes qui sont sur la table pour prendre connaissance des lignes directrices visant à prévenir les rétroactions acoustiques.
    La disposition de la salle a été modifiée afin d'éloigner davantage les microphones les uns des autres et d'ainsi réduire la probabilité d'une rétroaction causée par une oreillette dans la salle. Les mesures ont été mises en place pour que nous puissions mener nos travaux sans interruption et pour protéger la santé et la sécurité de tous les participants, y compris des interprètes.
    Je vous remercie tous de votre collaboration.
    J'aurais quelques observations à faire à l'intention des membres du Comité et des témoins.
    Veuillez attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Les députés présents dans la salle sont priés de lever la main s'ils souhaitent prendre la parole. Ceux qui sont sur Zoom doivent utiliser la fonction « Lever la main ». Le greffier et moi-même ferons de notre mieux pour respecter l'ordre des interventions. Merci de votre compréhension à cet égard. Je vous rappelle que toutes les observations doivent être adressées par l'intermédiaire de la présidence.
     Je vais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins. Nous accueillons le gouverneur de la Banque du Canada, M. Tiff Macklem.
    Bienvenue, monsieur le gouverneur.
    Il est accompagné de la première sous-gouverneure de la Banque du Canada, Mme Carolyn Rogers. Bienvenue, madame.
    Avant d'écouter votre déclaration préliminaire, nous tenons à vous remercier de nous avoir aimablement invités à nous joindre à vous, à la Banque du Canada, pour une visite et une conversation informelle. Au nom des membres du Comité, je vous en remercie.
    Chers collègues, vous devriez tous avoir reçu l'invitation du gouverneur.
     Sur ce, monsieur Macklem, la parole est à vous.
(0850)
    Merci, monsieur le président. Nous avons très hâte de vous accueillir à la Banque du Canada.
    Je suis vraiment ravi d'être ici ce matin en compagnie de la sous-gouverneure, Mme Carolyn Rogers, pour parler de notre récent rapport sur la politique monétaire, ainsi que de la décision relative à la politique monétaire que nous avons prise lors de notre dernière réunion.
    En avril, nous avons maintenu le taux directeur à 5 % et publié des perspectives révisées pour l'économie canadienne. Nous avons livré trois grands messages.
    Premièrement, la politique monétaire fonctionne. L'inflation mesurée par l'indice des prix à la consommation global et l'inflation fondamentale ont encore diminué ces derniers mois, et l'inflation devrait continuer à se rapprocher de la cible de 2 % cette année.
    Deuxièmement, la croissance de l'économie semble être en train de se redresser. Nous prévoyons une croissance solide du produit intérieur brut, ou PIB, cette année, et nous pensons qu'elle continuera à se renforcer en 2025.
    Troisièmement, pour déterminer pendant combien de temps encore il faudra laisser le taux directeur au niveau actuel, nous cherchons des signes que la récente diminution de l'inflation sous-jacente sera durable.
    Avant de répondre à vos questions, je vais parler un peu des nouvelles données économiques et des perspectives de croissance et d'inflation.

[Français]

    Au Canada, la croissance a stagné durant la deuxième moitié de 2023 et l'offre est devenue excédentaire dans l'économie. Le marché du travail s'est modéré après une période de grande surchauffe. L'emploi a progressé moins vite que la population en âge de travailler. Le taux de chômage a donc augmenté graduellement au cours de la dernière année pour atteindre 6,1 % en mars. Il y a aussi des signes que les pressions sur les salaires commencent à diminuer.
    La croissance économique devrait se raffermir en 2024. La forte progression de la population fait augmenter la demande des consommateurs et l'offre de main-d'œuvre. Les dépenses des ménages devraient donc se redresser. Les dépenses publiques contribuent aussi à la croissance, et la forte économie américaine soutient les exportations canadiennes.
    Dans l'ensemble, on prévoit une croissance du PIB canadien de 1,5 % cette année et d'environ 2 % en 2025 et 2026. Cela va aider l'offre excédentaire à se résorber peu à peu en 2025 et au début de 2026.
    L'inflation mesurée par l'indice des prix à la consommation était de 2,9 % en mars. Les hausses de prix sont en train de ralentir pour la plupart des grandes catégories de biens et de services, mais l'augmentation des frais de logement est encore très élevée. Cela reste le facteur qui contribue le plus à l'inflation globale.
    L'inflation fondamentale devrait continuer à diminuer graduellement. Les taux d'inflation fondamentale sur trois mois sont bien en dessous des taux sur douze mois, ce qui indique un mouvement à la baisse. Puisque les prix de l'essence sont en hausse, l'inflation mesurée par l'indice des prix à la consommation va probablement rester autour de 3 % dans les prochains mois. Elle devrait ensuite passer sous la barre des 2,5 % durant la deuxième moitié de 2024 et atteindre la cible de 2 % en 2025.

[Traduction]

     Comme toujours, des risques entourent nos prévisions. L'inflation pourrait être plus élevée si les tensions mondiales devaient s'accentuer, si les prix des logements devaient augmenter plus vite qu'escompté ou si la croissance des salaires devait rester élevée par rapport à la productivité. Pour ce qui est des risques à la baisse, l'activité économique dans le monde et au Canada pourrait être plus faible que prévu, ce qui ralentirait trop la demande et l'inflation.
    Nous ne voulons pas que la politique monétaire reste aussi restrictive plus longtemps que nécessaire. Cependant, si nous baissons le taux directeur trop tôt ou trop rapidement, nous pourrions compromettre les progrès que nous avons réalisés pour freiner l'inflation.
    Globalement, les données depuis janvier ont renforcé notre conviction que l'inflation continuera de baisser graduellement même si la croissance économique se raffermit. Nos principaux indicateurs de l'inflation pointent maintenant tous dans la bonne direction et les données récentes signalent un redressement de la croissance.
    Je sais que la plupart des Canadiens veulent surtout savoir quand nous allons réduire le taux directeur. Pour résumer, ce moment approche. Les données correspondent à ce que nous voulons voir. Nous avons simplement besoin de voir le mouvement se poursuivre pour être certains que les progrès vers la stabilité des prix vont durer.
    Au cours des mois à venir, nous surveillerons de près l'évolution de l'inflation fondamentale. Nous continuons de suivre des indicateurs de la trajectoire de l'inflation, soit l'équilibre entre l'offre et la demande, les attentes d'inflation, la croissance des salaires et les pratiques d'établissement des prix des entreprises.
    Pour conclure, je dirai que nous avons fait beaucoup de progrès dans notre lutte contre l'inflation, et les améliorations récentes sont encourageantes. Nous voulons voir ces progrès se maintenir.
(0855)
    Sur ce, la première sous-gouverneure et moi serons très heureux de répondre à vos questions.
    Merci, monsieur le gouverneur, merci, madame la première sous-gouverneure.
    Je suis sûr que les membres du Comité ont de nombreuses questions à vous poser. Comme vous le savez, nous commençons par une série de questions durant laquelle chaque parti dispose de six minutes.
    C'est le député Hallan qui commence pour la première intervention de six minutes.
    Monsieur le gouverneur, madame la sous-gouverneure, je vous remercie de votre présence.
    Monsieur le gouverneur, je crois comprendre que chaque banque centrale fixe ses propres taux d'intérêt. Existe‑t‑il un taux d'intérêt à l'échelle mondiale qui aurait une incidence sur les hypothèques au Canada?
    Les taux d'intérêt à l'échelle mondiale ont effectivement une incidence sur les taux d'intérêt au Canada. Les marchés financiers mondiaux sont hautement intégrés.
    Évidemment, le marché canadien est fortement intégré à celui des États-Unis, de sorte que les taux d'intérêt américains ont une incidence sur nous. Comme nous avons notre propre monnaie et que nous avons un taux de change flexible, nous pouvons mener nos propres politiques monétaires. Les taux d'intérêt au Canada ne doivent pas nécessairement être identiques aux taux américains ou aux taux mondiaux, mais il y a une limite à leur divergence. Nous ne sommes pas près d'atteindre cette limite. Nous avons la capacité de gérer notre propre politique monétaire en fonction des besoins des Canadiens.
    Dans le même ordre d'idées, nous constatons qu'aux États-Unis, la Réserve fédérale a maintenu son taux. Hier, le premier ministre a déclaré que les taux d'intérêt allaient baisser. Lorsque vous réduirez le taux — quel que soit le moment où vous le ferez —, quelles seront les répercussions sur le dollar canadien si le marché américain demeure inchangé et que les États-Unis maintiennent leur taux?
    Le taux canadien est déjà inférieur au taux américain. Le nôtre est à 5 %. Le leur se situe entre 5,25 et 5,5 %.
    Il est un peu difficile de dire exactement ce qui se passera à ce moment‑là. Globalement, le dollar canadien s'affaiblira probablement un peu, mais cela dépend en grande partie des attentes. Il y a quelques mois, le marché s'attendait à ce que la Réserve fédérale américaine réduise son taux avant la Banque du Canada. Cette attente a changé. Dans une certaine mesure, c'est déjà intégré dans les marchés, donc oui, si nous allons plus bas que la Réserve fédérale, le dollar canadien devrait se déprécier. C'est en partie ainsi que fonctionne la politique monétaire. Un dollar plus faible stimule nos exportations, de sorte que la politique monétaire devient moins restrictive.
    Hier, le premier ministre a déclaré, comme je l'ai déjà dit, que les taux d'intérêt allaient baisser. Il en était sûr, mais son organisme responsable du logement, la SCHL, dit aussi que les mises en chantier de l'année dernière, de cette année et de l'année prochaine vont toutes diminuer. En fait, la SCHL affirme que nous avons besoin de cinq millions de logements supplémentaires en plus de ceux qui sont en construction. La Banque Nationale a déclaré que les ménages canadiens ne doivent pas s'attendre à un répit important concernant l'inflation du coût des logements.
    Si les taux d'intérêt baissent, quels seront les effets sur les prix des logements, étant donné que la demande n'a pas diminué et qu'elle ne fait qu'augmenter?
    Le marché de l'habitation est très sensible aux taux d'intérêt et, actuellement, le taux directeur, qui est à 5 %, freine la demande. Évidemment, le coût d'un prêt hypothécaire est plus élevé, ce qui limite la demande. Si nous abaissons les taux d'intérêt, ce sera moins restrictif pour le logement et, toutes choses étant égales par ailleurs, le marché de l'habitation aura tendance à être plus fort qu'il ne l'aurait été autrement.
    Selon nos propres prévisions, nous assisterons à une reprise assez forte dans le secteur du logement cette année. Nous prévoyons également une certaine augmentation des prix du logement. Nous nous attendons également à ce que l'offre, même si elle n'augmentera pas rapidement, augmente progressivement, et donc à ce que l'écart se réduise, mais je suis d'accord pour dire qu'il faudra certainement un certain temps pour combler cette pénurie de logements.
    Avec tout le respect que je vous dois, monsieur le gouverneur, je ne pense pas que vous ayez entièrement répondu à la question. Il y a déjà une pénurie de logements, une pénurie de l'offre. Nous constatons une augmentation de la demande. N'est‑ce pas exact?
(0900)
    Je suis d'accord avec vous. Oui, il y a une pénurie de logements. Il n'y a aucun doute.
    Selon la SCHL, les attentes des Canadiens concernant l'abordabilité du logement ne seront pas satisfaites aujourd'hui. D'après ce que vous venez de dire, avez-vous déterminé une échéance? Compte tenu de tous les chiffres dont vous disposez maintenant, à quel moment les Canadiens peuvent-ils s'attendre à ce que la situation soit rétablie au Canada sur le plan de l'abordabilité du logement?
    Pendant la pandémie, les prix des logements ont beaucoup augmenté: une hausse de 50 % en deux ans. Ils ont ensuite baissé d'environ 15 %. Ils sont en train de remonter quelque peu maintenant. On parle donc d'une baisse nette d'environ 10 %.
    Nous ne sommes pas vraiment dans le secteur de l'immobilier, mais nous prévoyons que les prix des logements continueront à augmenter progressivement. Je ne pense donc pas qu'il y aura un grand changement.
    Craint‑on qu'une réduction du taux directeur fasse accroître la demande, ce qui pourrait également faire grimper l'inflation dans le secteur du logement?
    C'est un risque. Nous le soulignons dans notre rapport. Je pense que dans...
    Est‑ce plus probable qu'improbable, étant donné que les mises en chantier diminuent?
    Selon nos prévisions, comme je l'ai dit, nous devrions observer une croissance assez forte de l'activité sur le marché du logement au cours de l'année, ainsi qu'une certaine augmentation des prix. Nous avons pris en compte ce risque dans notre scénario de référence. Cela pourrait même dépasser nos prévisions et c'est un risque que nous avons souligné.
    J'ajouterai seulement que le secteur du logement est un élément important de l'économie. C'est un secteur de l'économie sensible aux taux d'intérêt. C'est certainement quelque chose que nous surveillons de très près, mais nous devons mener la politique monétaire pour l'ensemble de l'économie.
    Merci, monsieur Hallan.
    C'est maintenant au tour du député Baker de poser des questions.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur le gouverneur, madame la première sous-gouverneure, je vous remercie de comparaître à nouveau devant le comité des finances.
     Monsieur le gouverneur, je vais vous poser la question que je vous pose chaque fois que vous témoignez devant le Comité. C'est la question que mes concitoyens d'Etobicoke-Centre me posent le plus souvent en ce qui concerne votre rôle de gouverneur.
    Quand les taux d'intérêt vont-ils diminuer?
    Comme vous le savez, et nous en avons déjà discuté au sein de ce comité, les gens sont en difficulté pour toutes sortes de raisons en ce moment. Le coût de la vie est élevé. Les prix des logements sont élevés. Beaucoup de gens ont des hypothèques à taux variable ou à taux fixe qu'ils ont dû renouveler à un taux beaucoup plus élevé. La situation est très pénible pour de nombreuses personnes. Certaines ont dû quitter leur habitation. D'autres ont dû faire des sacrifices importants pour effectuer leurs paiements.
    C'est la raison pour laquelle je pose la question. Je me demande si vous pouvez y répondre du mieux que vous le pouvez et je transmettrai votre réponse à mes électeurs.
    Quand les taux d'intérêt vont-ils diminuer?
    Je vous remercie d'exprimer les préoccupations et les points de vue de vos électeurs. Nous sondons également les Canadiens. Nous obtenons directement leur point de vue et c'est un élément important pour nos décisions en matière de politique monétaire.
     Lors de notre dernière réunion, il y a deux ou trois semaines, nous avons discuté du moment où il serait approprié de réduire notre taux directeur. Comme je l'ai souligné dans la déclaration préliminaire, nous trouvons les améliorations encourageantes. Nous constatons que l'inflation sous-jacente a repris son élan à la baisse. Pendant un certain temps, les choses avaient en quelque sorte stagné. Nous constatons une reprise du mouvement à la baisse.
     Si vous revenez à ce que nous avions dit en janvier et en mars, nous avions alors indiqué que nous voulions voir l'inflation sous-jacente diminuer davantage, et ce, de façon durable. Il y a quelques semaines, nous avons conclu qu'elle avait diminué davantage. Ce que nous voulons maintenant, c'est avoir l'assurance que ce sera durable.
    Notre message aux Canadiens, c'est que nous nous rapprochons du but. Les données correspondent à ce que nous voulons voir. Nous avons juste besoin d'être certains que cela va durer.
    Nous sommes très conscients que nous ne voulons pas que la politique monétaire reste aussi restrictive plus longtemps qu'il ne le faut. D'un autre côté, freiner l'inflation autant que nous l'avons fait a été un difficile combat. Nous ne voulons pas baisser le taux directeur trop tôt ou trop rapidement et compromettre ces progrès. Nous essayons de trouver un équilibre entre les deux risques.
     Nous prendrons notre prochaine décision le 4 juin, je crois. Nous en prendrons une autre en juillet, puis une autre en septembre. Nous prenons nos décisions à la date prévue en fonction des meilleures informations qui sont accessibles à ce moment‑là.
    Je ne vais pas prédire ce que nous ferons pour chaque décision. Nous ferons de notre mieux pour les Canadiens le moment venu.
(0905)
    Je vous remercie.
    Vous dites que vous cherchez des signes que la diminution de l'inflation sera durable avant d'abaisser les taux d'intérêt. Pouvez-vous nous dire quel genre de choses vous observez? Quels sont les éléments que les Canadiens, comme mes concitoyens d'Etobicoke-Centre, devraient examiner pour croire que les choses vont dans la bonne direction ou non?
    En fin de compte, ils veulent que vous réduisiez les taux.
    C'est une très bonne question.
    Tout d'abord, l'inflation globale — l'inflation mesurée par l'indice des prix à la consommation, soit l'IPC — va probablement fluctuer d'un mois à l'autre. Selon les dernières données, elle est de 2,9 %. Elle restera probablement proche de 3 % au cours des mois à venir, car nous savons que les prix mondiaux du pétrole et les prix de l'essence ont augmenté. Cela a un effet très immédiat sur l'IPC.
    Nous espérons que, si l'on fait abstraction de ces éléments, nos mesures de l'inflation fondamentale ou sous-jacente poursuivront leur mouvement à la baisse. Surveillez l'IPC-tronq et l'IPC-méd. Ce sont les deux mesures de l'inflation fondamentale que nous privilégions.
    Concrètement, ce sont les mesures de l'inflation fondamentale que nous privilégions pour de bonnes raisons, mais il existe d'autres mesures de l'inflation sous-jacente, comme l'indice des prix des produits de base non énergétiques et l'IPCX.
    Dans notre rapport sur la politique monétaire, vous verrez un graphique qui indique la part des composantes de l'IPC dont la croissance des prix est de plus de 3 %. Lorsque l'inflation était de 8 %, cette part atteignait 80 %. Selon les derniers chiffres, elle est de 38 %. Une part normale est d'environ 25 %. Nous ne sommes pas encore tout à fait revenus à la normale, mais nous n'en sommes pas loin.
     Nous espérons que l'inflation diminuera et qu'elle sera moins généralisée. Nous essaierons d'analyser les composantes volatiles de l'inflation globale. Nous nous concentrons sur les mesures sous-jacentes.
    Je vous remercie de votre réponse.
    Lors de vos comparutions précédentes devant le Comité, nous avons parlé de la responsabilité financière et de son rôle sur le coût de la vie et l'économie en général. J'ai vu qu'après le dépôt du budget, vous avez fait des commentaires aux réunions du printemps du Fonds monétaire international, ou FMI, je crois, au sujet des garde-fous budgétaires du gouvernement et de leur utilité.
    Comme l'inflation de base continue de diminuer, pouvez-vous nous en dire plus sur le fait que la situation financière du Canada n'a pas vraiment changé depuis la présentation du budget?
    Je suppose que la première chose à dire, c'est que le budget fédéral a été déposé après nos dernières prévisions, de sorte qu'il n'est pas inclus dans le dernier rapport sur la politique monétaire. La plupart des gouvernements provinciaux ont déposé leurs budgets avant notre rapport sur la politique monétaire; ils sont donc inclus dans les prévisions. De plus, un certain nombre de provinces ont augmenté leurs dépenses de financement déficitaire. Cela se reflète dans nos prévisions. Cette décision augmente la contribution globale des gouvernements à la croissance. L'augmentation des dépenses et des déficits budgétaires alors que nous essayons de faire baisser l'inflation n'est pas utile.
    Le budget fédéral, comme je l'ai dit, n'est pas inclus dans nos prévisions. Nous allons les mettre à jour en juillet pour l'intégrer. En ce qui concerne le gouvernement fédéral, on constate que les dépenses sont également en hausse, ce qui est en grande partie accompagné d'une augmentation des revenus. Les revenus sont plus élevés parce que la croissance prévue est plus forte — ce qui génère plus de recettes fiscales — et parce qu'il y a de nouvelles mesures fiscales, la plus importante étant l'augmentation du taux d'inclusion des gains en capital. L'effet combiné de ces facteurs est que la trajectoire financière — c'est‑à‑dire la trajectoire du déficit au PIB et de la dette au PIB — n'a pas beaucoup changé d'un point de vue macroéconomique depuis l'Énoncé économique de l'automne.
    Oui, il faudra regarder les différentes mesures, qui ont différents multiplicateurs budgétaires. Cependant, à l'échelle très macroéconomique, plus de dépenses sont injectées dans l'économie et plus de recettes fiscales en découlent. L'effet final d'un point de vue macroéconomique ne sera probablement pas si important, alors je ne m'attends pas à ce qu'il ait une incidence importante sur nos prévisions.
(0910)
    Je vous remercie.
    En ce qui concerne les garde-fous, ce...
    Nous devrons peut-être revenir sur les garde-fous plus tard, monsieur le gouverneur. Nous avons largement dépassé le temps imparti.
    D'accord. Je suis sûr qu'il y aura d'autres questions sur la politique fiscale.
    Qui sait? Le député Ste-Marie posera peut-être une question sur les garde-fous.
    Monsieur Ste-Marie, vous avez la parole.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Bonjour, madame Rogers et monsieur Macklem. Je vous remercie de votre présence.
    Je suis désolé, mais notre comité a un président très sévère qui gère le temps de main de maître.
    J'aurai des questions à propos du dernier budget, mais, avant de poursuivre la discussion à ce sujet, j'ai une demande à vous faire.
    Vous êtes souvent cités à ce comité pour vos analyses des répercussions de la taxe carbone sur l'inflation. Quand vous étiez venus témoigner de ce sujet au Comité l'automne dernier, vous aviez donné l'exemple de l'Ontario. Je vous demanderais de fournir au Comité, si c'est possible, les résultats de vos calculs, par province, pour ce qui est des répercussions de la taxe carbone sur l'inflation.
    Nous pouvons certainement vous fournir cette information.
    Comme vous le savez bien, les différentes provinces ont des politiques et des approches différentes au sujet de la taxe carbone. Quand nous faisons l'estimation des répercussions de cette taxe sur l'inflation, nous nous basons seulement sur les trois composantes ayant les conséquences les plus directes dans chacune des provinces. Nous rassemblons ensuite toutes ces données afin de réaliser une estimation pour l'ensemble du pays.
    Nous pouvons certainement fournir au Comité nos calculs par province, si vous le voulez.
    Merci beaucoup. Cette information nous serait fort utile.
    Je reviens maintenant sur le budget.
    Selon ce que j'ai compris des réponses que vous avez données à M. Baker, l'analyse en profondeur des répercussions du budget fédéral sur votre politique monétaire dans son ensemble sera faite en juillet prochain, mais, au premier regard, les répercussions sont plutôt neutres ou semblables à celles de l'énoncé économique de l'automne, étant donné que le déficit est compensé par les nouveaux revenus et que ça se maintient. Est-ce exact?
    Oui.
    Tantôt, nous allons voter sur la motion de voies et moyens, à la Chambre. Nous avons commencé à l'étudier, et la mesure qui annonce la hausse de la taxe sur les gains en capital n'y est pas présente. La ministre des Finances avait annoncé, avant-hier, que ça ferait l'objet d'un projet de loi distinct.
    Si jamais cette mesure n'était pas présentée, on pourrait s'attendre à un impact inflationniste du budget. Est-ce bien ça?

[Traduction]

    C'est une question un peu hypothétique.

[Français]

    Cela dit, si on enlève une source de revenus, oui, le déficit sera plus grand et il y aura un effet de stimulation.
    Merci.
    Je change maintenant de sujet.
    Je veux que vous disiez quelques mots sur l'importance de l'indépendance de la Banque du Canada dans la gestion de sa politique, particulièrement en contexte inflationniste.
    On a vu la décision de la Réserve fédérale américaine. Bien des analystes disent que Joe Biden espère que les taux vont baisser avant la fin de la campagne présidentielle pour faire augmenter ses appuis dans les sondages.
    Sentez-vous le même genre de pression ici? On sait que de nombreux chroniqueurs soupèsent les possibilités que l'actuel premier ministre cède sa place, qu'il y ait une course à la chefferie et qu'on espère voir s'améliorer la conjoncture économique, notamment par une baisse des taux d'intérêt, peut-être d'ici l'été. Est-ce que vous sentez ce genre de pression dans vos décisions?
    J'insiste sur la question de l'importance de l'indépendance de la politique monétaire.
    Premièrement, la réponse est non. Il y a une bonne raison pour laquelle nous avons une banque centrale indépendante du gouvernement: c'est exactement pour éviter ce type de situation.
    La politique monétaire n'est pas quelque chose qui a des effets immédiats durant un cycle financier. Ça prend du temps et il est important de garder le cap. C'est exactement pour cette raison que les grands pays ont tous une banque centrale indépendante.
    Donc, non, il n'y a aucune pression. J'ai été très clair hier à ce sujet: les élections, ce sont les élections; la politique monétaire, c'est la politique monétaire. Le mandat est clair et la politique monétaire sera gérée de façon à remplir ce mandat, un point c'est tout.
(0915)
    Je vous remercie de cette information.
    J'aimerais revenir sur certains échanges que vous avez eus devant le comité sénatorial avec mon ami Clément Gignac. En effet, même si c'est un sénateur, je lui trouve des qualités autres que celle-là, certainement. Il rappelait que, jusqu'à la pandémie, il y avait un assez bon arrimage entre votre politique monétaire et celle de la Réserve fédérale américaine, mais que, depuis la pandémie, un écart semblait s'être creusé entre l'économie canadienne et l'économie américaine pour ce qui est des indicateurs de l'inflation fondamentale.
    J'aimerais vous entendre nous parler à nouveau de la possibilité d'avoir une politique monétaire qui diverge de celle de la Réserve fédérale américaine et nous expliquer de quelle façon vous prenez en compte les variations du taux de change dans cette analyse.
    Il est important de souligner dès le départ que notre mandat et celui de la Réserve fédérale américaine sont similaires, de même que la situation économique de nos pays. Surtout, les chocs vécus pendant la pandémie ont été très similaires. Le comportement de la politique monétaire dans les deux pays était similaire, mais ce n'était pas exactement la même chose. Comme je l'ai mentionné, le taux d'inflation était un peu plus élevé aux États‑Unis, et leur taux des fonds fédéraux était plus élevé que le taux directeur du Canada. Cependant, en gros, c'était assez similaire.
    Depuis les derniers mois, on voit plus de différences. Comme je l'ai mentionné hier au comité sénatorial, il semble que la politique monétaire a plus de traction au Canada, et il y a quelques raisons derrière ça.
    Premièrement, c'est probablement dû au fait que la structure de notre marché hypothécaire est différente de celle des États‑Unis. Là-bas, l'hypothèque typique est de trente ans, alors qu'ici, on la renouvelle tous les cinq ans, ou parfois même plus rapidement. Plus de personnes au Canada ont donc déjà renouvelé leur hypothèque, et celles qui ne l'ont pas encore fait sont à la veille de le faire. Les consommateurs savent que leur hypothèque va devoir être renouvelée, et ils font probablement plus d'épargnes en vue de la payer.
    Deuxièmement, l'endettement des ménages est plus élevé au Canada. Une hausse du taux d'intérêt a donc un plus grand impact sur les ménages canadiens, et ça se reflète dans la croissance du PIB: la croissance du PIB est plus faible au Canada qu'aux États‑Unis.
    Il n'est donc pas très surprenant que les pressions inflationnistes au Canada soient moindres. Si les dynamiques de nos économies, et surtout les dynamiques de l'inflation, diffèrent d'un pays à l'autre, la politique monétaire des deux pays sera différente aussi.
    Merci, monsieur Ste‑Marie.

[Traduction]

    Nous allons maintenant passer à M. Davies, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur le gouverneur et madame la sous-gouverneure, je vous remercie d'être parmi nous aujourd'hui.
    Monsieur, dans ses délibérations les plus récentes, le Conseil de direction de la Banque du Canada a indiqué que le comportement des sociétés en matière d'établissement des prix était l'un des quatre indicateurs clés des pressions inflationnistes sous-jacentes. En novembre 2023, dans un article de la CBC, vous avez été cité comme suit:
Lorsque les prix des intrants augmentent... ils se répercutent beaucoup plus rapidement sur les prix des produits finaux. Les ménages subissent donc beaucoup plus pleinement les effets de l'inflation: c'est ce que nous pouvons voir assez clairement dans les données.
    À votre avis, monsieur le gouverneur, pourquoi les augmentations du prix des intrants se sont-elles répercutées sur les prix finaux plus rapidement au cours des dernières années que pendant les décennies précédentes?
    En réalité, nous avons fait pas mal de travail à ce sujet. La première sous-gouverneure a peut-être quelque chose à dire à ce sujet.
    Bien sûr. En fait, dans notre plus récent rapport sur la politique monétaire, il y a une boîte qui traite de cette question de façon assez détaillée.
    Pour répondre directement à votre question, je pense que la raison pour laquelle nous avons vu des entreprises être plus enclines à refiler rapidement les coûts, c'est que la demande était élevée. Elles ont donc pu refiler les coûts sans qu'il y ait d'incidence sur leurs ventes. Les gens payaient encore.
    Lorsque l'inflation est élevée, c'est l'une des dynamiques que nous surveillons de très près. À mesure que l'inflation diminue, la demande diminue et est plus en équilibre avec l'offre, et les entreprises réfléchissent bien à la question de savoir si elles peuvent refiler leurs augmentations de coûts.
(0920)
    Je vous remercie.
    Dans un rapport publié en février 2024, James Orlando, directeur général et économiste principal des Services économiques TD, a déclaré ce qui suit:
L'inflation persistante à laquelle la Banque du Canada (BdC) fait face est principalement liée au secteur de l'habitation. Comme l'inflation du prix des logements représente environ la moitié de l'inflation globale, il s'agit du principal obstacle qui empêche la BdC de réduire son taux.
    Monsieur Macklem, êtes-vous d'accord avec cette évaluation?
    Je suis d'accord pour dire que l'inflation du prix des logements est le plus grand facteur de l'inflation globale, et que c'est un facteur important qui maintient l'inflation élevée.
    À ce sujet, Statistique Canada indique que l'inflation d'une année à l'autre en mars, excluant les intérêts hypothécaires, était de 2 %. C'est exactement l'objectif de la banque. Les intérêts hypothécaires plus élevés ont ajouté près d'un point de pourcentage à l'inflation selon l'indice des prix à la consommation, ou IPC, depuis mai dernier.
    Y a‑t‑il quelque chose de contre-productif dans le fait que la Banque du Canada tente de réduire l'inflation en utilisant un mécanisme d'intervention qui l'augmente de près de 1%?
    Si nous n'avions pas augmenté les taux d'intérêt, l'inflation et tout le reste seraient plus élevés, et l'inflation globale aussi. Nous savons très bien que lorsque nous augmentons les taux d'intérêt, cela augmente le coût des emprunts. La décision a une incidence sur les Canadiens. En fait, c'est ainsi que fonctionne la politique monétaire. Il s'agit de limiter les dépenses pour faire baisser l'inflation et tout le reste.
    L'IPC comprend les frais d'intérêts hypothécaires. C'est un coût important pour les ménages, et il devrait donc faire partie du calcul. Nous savons très bien que c'est la partie de l'IPC sur laquelle nous avons le plus d'effet direct. Lorsque nous augmentons les taux, les coûts hypothécaires montent. Toutes choses étant égales par ailleurs, cela fait augmenter l'inflation. Dans la conduite de la politique monétaire, nous savons également que lorsque nous réduisons notre taux directeur, l'inflation diminue. C'est quelque chose que nous pouvons examiner dans le cadre de la politique monétaire.
    Vous remarquerez que nous avons beaucoup parlé du fait que nous nous concentrons beaucoup sur l'inflation de base. C'est notamment en raison de l'IPC-tronq, qui élimine les choses qui augmentent le plus et celles qui diminuent le plus. Il a systématiquement écarté les frais d'intérêt hypothécaire parce qu'ils augmentent beaucoup. En nous concentrant sur l'essentiel, nous examinons en fait l'incidence des coûts d'intérêt hypothécaire sur l'inflation.
    L'autre chose que je dirais au sujet de nos mesures de l'inflation de base, cependant, c'est que nos deux mesures de référence — l'une est 3,1 et l'autre 2,8 — sont toujours bien supérieures à 2. Cela signifie en effet que si vous retirez simplement ce qui augmente beaucoup, comme les frais d'intérêts hypothécaires, ce qui reste augmente beaucoup plus lentement, soit à environ 2 %. Si vous éliminez systématiquement les choses qui augmentent et celles qui diminuent beaucoup, l'inflation reste bien au‑dessus de 2 %. C'est ce sur quoi nous nous concentrons: réduire ce chiffre.
    Je voulais parler de certaines conséquences imprévues.
    Nous savons que les taux d'intérêt élevés ont empêché de nombreux Canadiens d'acheter une propriété. Évidemment, si les taux hypothécaires sont élevés, il n'y a pas autant de gens qui achètent. On me dit que la situation maintient les gens sur le marché locatif.
    La demande en logements locatifs a‑t‑elle quelque chose à voir avec la hausse rapide des loyers?
    Oui, c'est juste.
    Il y a beaucoup de pression sur les loyers. Je suis d'accord pour dire qu'il y a probablement un effet. Avec des taux d'intérêt élevés, les gens retardent l'achat d'une maison et doivent louer plus longtemps.
    Je pense que l'effet le plus important, cependant, c'est que nous avons eu un marché locatif serré combiné à une forte augmentation de l'immigration. Bon nombre de ces immigrants entrent sur le marché locatif. Nous avons constaté une forte augmentation, en particulier chez les résidents non permanents. Cela exerce beaucoup de pression supplémentaire sur le marché locatif. L'inflation des loyers est d'environ 8 %.
    Oui, c'est exact.
    Je pense que la SCHL dit clairement que l'offre ne devrait pas suivre le rythme de la demande, ce qui entraînera des loyers plus élevés et des taux d'inoccupation moins élevés au cours des prochaines années. Êtes-vous d'accord avec cette affirmation?
(0925)
    J'espère que l'écart se rétrécira graduellement, mais je ne pense pas que la situation se réglera rapidement. Il faudra un certain temps pour construire de nouveaux logements à vocation locative.
    L'autre aspect qui pourrait atténuer la pression, c'est que le gouvernement a récemment annoncé qu'il réduisait le nombre de résidents non permanents qui viennent au Canada, comme vous le savez. Nous avons inclus cette mesure dans nos projections. Elle a été annoncée avant le budget. Cela devrait réduire en partie la pression de la demande.
    En effet, il est difficile de prévoir ces choses.
    Je vous remercie.
    Merci, monsieur Davies.
    Monsieur le gouverneur et madame la première sous-gouverneure, M. Davies est un nouveau membre permanent de notre comité. Le secrétaire parlementaire Turnbull participe également à la réunion d'aujourd'hui.
    Chers collègues, nous en sommes à notre deuxième série de questions.
    Nous allons passer à M. Chambers, qui a cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Monsieur le gouverneur, je vous remercie du travail que vous faites au nom des Canadiens. Je vous remercie de comparaître devant le Comité.
    Lorsque vous avez témoigné il y a environ six mois, nous avons parlé de la politique budgétaire et monétaire. Vous avez dit, je crois, que si le taux de croissance des dépenses gouvernementales pouvait être égal ou inférieur à 2 %, ce serait bien. L'année prochaine, la croissance des dépenses du gouvernement fédéral sera de 6,7 %.
    Je ne m'y connais pas beaucoup en économie et j'apprends toujours quelque chose de vous chaque fois que vous êtes ici. J'essaie de comprendre en quoi il ne s'agit pas d'une pression inflationniste.
    Permettez-moi de revenir un peu en arrière.
    Tout d'abord, le chiffre de 2 % que je vous ai donné représente les dépenses réelles du gouvernement en biens et services. Il ne s'agit ni de dépenses nominales ni de dépenses des comptes publics; il s'agit de la mesure des dépenses gouvernementales en biens et services dans les comptes nationaux. Ces chiffres ne sont pas directement comparables.
    Ce que je peux dire en ce qui concerne notre projection, c'est que si les gouvernements n'augmentent pas leurs déficits et que les dépenses gouvernementales augmentent d'environ 2 %, la production potentielle de l'économie croît d'environ 2 %, de sorte que les dépenses gouvernementales ne haussent pas davantage la demande que l'offre. C'est à peu près équilibré...
    Je vais intervenir ici, si vous n'y voyez pas d'inconvénient. L'augmentation du déficit est une politique budgétaire expansionniste. Est‑ce exact?
    C'est vrai.
    Au cours de la dernière année et demie, le gouvernement a ajouté au cadre financier de nouvelles dépenses nettes, et non brutes, de 100 milliards de dollars. Tout cela est financé par le déficit.
    Êtes-vous en train de dire que nous ne sommes plus dans un environnement fiscal expansionniste?
    Ce que je dis, c'est que la situation financière... Si l'on compare ce budget à l'énoncé économique de l'automne, le ratio du déficit au PIB et le ratio de la dette au PIB n'ont pas beaucoup changé. Je ne m'attends pas à ce qu'il y ait un impact macroéconomique important par rapport à nos prévisions précédentes. Autrement dit, je ne crois pas que le budget fédéral aura une grande incidence sur les prévisions que nous avons publiées il y a quelques semaines.
    Diriez-vous maintenant que la politique budgétaire et la politique monétaire vont dans la même direction?
    Pour en revenir à nos prévisions, la plupart des provinces ont déposé leur budget avant le rapport sur la politique monétaire. Elles ont augmenté les dépenses, et c'était financé en grande partie par le déficit. Cela a augmenté la contribution du gouvernement à la croissance. La dernière fois que je suis venu ici, je crois avoir dit que les dépenses du gouvernement en biens et services devraient augmenter d'environ 2,25 % cette année. Ce pourcentage est maintenant passé à 2,75 %. C'est un peu plus de 2 %. Ce n'est donc pas utile pour essayer de faire baisser l'inflation. Cela fait partie de nos prévisions, et nous ramenons tout de même l'inflation à la cible de 2 %. On y arrive graduellement.
    La dernière chose que je dirai, c'est que nos prévisions s'exposent à un certain nombre de risques, que nous présentons à la fin. Dans la mesure où le gouvernement fédéral s'en tient à ses garde-fous budgétaires, le risque lié aux dépenses du gouvernement est mitigé. En fait, le plus grand risque à nos prévisions d'inflation provient d'événements géopolitiques. D'autres ont mentionné le marché immobilier. Nous pensons que ce sont là des risques plus importants.
(0930)
    Merci beaucoup; c'est très utile.
    Vous avez dit plus tôt que nous pourrions utiliser une calculatrice et le faire nous-mêmes, mais je suis ravi du modèle de la Banque et de la façon dont il examine les dépenses du gouvernement. Vous pouvez comprendre que c'est un peu déroutant.
    Je vais poser ma dernière question.
    Nous pouvons vous en parler en privé. Pour être honnête, c'est assez compliqué.
    C'est très utile, mais j'ai une dernière question, monsieur le gouverneur.
    Toutes les hausses de taxes n'ont pas le même effet sur l'inflation. J'essaie de penser à l'impôt sur les gains en capital, où on met de l'avant un tas de transactions qui auraient eu lieu dans les années à venir. En ce qui concerne ce mouvement d'argent, où une personne transforme un actif en argent comptant et crée un important solde de trésorerie dans le compte bancaire d'une nouvelle personne, ne s'agit‑il pas d'une pression inflationniste, même infiniment?
    Comme je l'ai dit, nous allons devoir examiner le budget d'un peu plus près. Du côté des dépenses, il y a un certain nombre de nouvelles initiatives de dépenses, comme vous l'avez souligné. Elles auront différents types de multiplicateurs fiscaux. Par exemple, les dépenses militaires qui servent principalement à acheter de la machinerie importée des États-Unis n'auront pas une grande incidence inflationniste au Canada.
    Mon temps est écoulé, mais j'ai hâte d'entendre votre explication sur les gains en capital.
    J'y arrive.
    En somme, nous devons examiner plus attentivement les diverses mesures, et nous le ferons en juillet.
    Mon analyse à ce stade‑ci est vraiment macroéconomique. Il y a plus de dépenses dans l'économie, et les mesures fiscales du gouvernement retirent plus d'argent de l'économie. D'un point de vue macroéconomique, l'effet net n'est pas si important sur le plan de l'inflation.
    On sort de l'argent, mais c'est de l'argent qui n'allait pas sortir de toute façon, parce que les actifs n'allaient pas être vendus. C'est un peu théorique, mais nous pourrions peut-être en parler hors ligne.
    Il s'agit de prendre de l'argent du secteur privé et de le donner au gouvernement.
    Merci, monsieur Chambers.
    Nous allons passer à Mme Dzerowicz, qui a les cinq prochaines minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je tiens à remercier le gouverneur et la première sous-gouverneure d'être ici aujourd'hui.
    Je vais commencer par les habitants de ma circonscription de Davenport et par ce qui les préoccupe, et moi aussi.
    Vous avez dit très clairement que l'inflation de base doit être maintenue pendant longtemps. Vous avez comparu devant notre comité à de nombreuses reprises, et j'ai écouté beaucoup de vos discours. Vous avez été très cohérent.
    Voici ce qui m'inquiète. De mémoire d'homme, mes électeurs se souviennent d'une époque de 10 années où les taux d'intérêt étaient anormalement bas. Si vous regardez toute l'histoire, vous verrez que c'était en fait une période très anormale.
    J'ai l'impression que lorsque nous parlons de... Que vous le fassiez en juin ou à l'automne, si vous commencez à réduire les taux d'intérêt, je crains que les électeurs de ma circonscription et les Canadiens aient l'impression que nous reviendrons à un taux d'intérêt anormal pendant une longue période.
    Pouvez-vous nous en parler? Devraient-ils s'attendre à cela, ou regarder la réalité en face?
    Eh bien, cela nous préoccupe nous aussi. En fait, je pense que vous avez fait tout un discours pour essayer de décrire les raisons qui...
    Tout d'abord, les taux d'intérêt ne vont certainement pas revenir aux faibles niveaux d'urgence que nous avions pendant la COVID, et ils sont également peu susceptibles de revenir à ce qu'ils étaient avant. Comme vous l'avez dit, de la crise financière mondiale à la COVID, nous avons traversé une période inhabituellement longue de taux d'intérêt très faibles, et nous n'allons donc probablement pas revenir à ce genre de taux.
    L'autre chose que je dirais, c'est que dans nos propres projections, lorsque nous aurons la certitude que le mouvement à la baisse de l'inflation fondamentale que nous observons se maintiendra et nous permettra d'être solidement en voie de revenir au seuil de 2 %, il sera alors approprié de réduire les taux d'intérêt.
    Nous prendrons les décisions une à la fois. Dans nos projections actuelles, on voit que l'inflation diminue de manière plutôt graduelle, ce qui signifie que même lorsque nous commencerons à réduire les taux, il est probablement que cela se fasse plutôt graduellement.
    Pour ces deux raisons, à long et à court terme, je pense que les Canadiens ne s'attendent pas à ce que nous revenions aux taux d'intérêt d'avant la COVID, et ils ne devraient pas s'attendre à une diminution rapide des taux.
    Merci pour ces explications.
    Comme vous le savez, notre gouvernement prend les changements climatiques très au sérieux. Nous avons un plan de décarbonisation très solide pour atteindre la carboneutralité d'ici 2050. Lors de votre dernière comparution devant notre comité, vous avez confirmé que les hausses annuelles de la tarification du carbone allaient augmenter les prix moyens dans tous les secteurs de l'économie de 0,1 point de pourcentage, et vous avez également dit que c'est plutôt négligeable par rapport aux autres facteurs déterminants de l'inflation.
    Ce qui arrive, c'est que nous disons 0,1 %, mais les Canadiens ne savent pas vraiment ce que cela signifie. Est‑ce que cela signifie 200 $ de plus par mois pour eux, ou 2 $?
    Pourriez-vous premièrement confirmer si c'est négligeable, et deuxièmement, peut-être définir ce qu'il en est pour le Canadien ordinaire qui ne comprend peut-être pas pourquoi 0,1 point de pourcentage serait négligeable selon les calculs de Statistique Canada? Pouvez-vous en parler, s'il vous plaît?
(0935)
    Si vous le voulez, je peux donner ensuite d'autres calculs représentatifs, mais oui, le gouvernement a établi un calendrier de hausses de la taxe sur le carbone, et nous pouvons en tenir compte dans notre projection. De plus, il y a effectivement une incidence sur l'inflation qui se situe quelque part entre 0,1 et 0,15 point de pourcentage.
    Aux dernières nouvelles, le taux d'inflation était de 2,9 %. Si la taxe sur le carbone n'avait pas augmenté, le taux d'inflation serait plus près de 2,8 %. Je peux vous donner des calculs représentatifs, mais c'est un petit chiffre.
    J'aimerais juste qu'il y ait un moyen pour nous de le dire,car les conservateurs donnent l'impression que c'est un gros chiffre, mais lorsque nous en parlons, nous disons que c'est négligeable puisque ce sont les propos du gouverneur.
    Je n'utilise pas d'adjectifs. L'incidence est-elle grande, négligeable, petite... Je vous donne tout simplement un chiffre. Vous pouvez ensuite décider.
    Non, mais à moins qu'il n'y ait un moyen de mieux définir ce qu'il en est pour les Canadiens, il est très difficile de savoir si l'incidence est grande ou petite.
    Je vais poursuivre, monsieur le gouverneur. Ma prochaine question porte encore sur la tarification de la pollution, sur ce que nous appelons aussi la taxe sur le carbone. Les conservateurs ont également avancé qu'en éliminant la taxe sur le carbone ou la tarification de la pollution, l'inflation reviendrait à sa cible. Vous pourriez alors réduire les taux, ce qui atténuerait ensuite les difficultés auxquelles les Canadiens peuvent faire face.
    Ai‑je raison de dire que l'élimination de la tarification de la pollution ne se traduirait pas par une stabilité des prix dans l'économie?
    Il est toujours un peu dangereux de parler de choses qui ne se sont pas produites et de choses qui pourraient se produire, mais en général, si la taxe change — si la taxe sur le carbone est éliminée —, il y aurait une baisse ponctuelle des prix. L'inflation diminuerait pendant une année, et elle reviendrait ensuite où elle aurait été autrement.
    Vous savez, la politique monétaire doit être tournée vers l'avenir. Nous savons que c'est un effet mécanique très temporaire, et nous avons donc tendance à en tenir compte. Si vous voulez un bon exemple tiré du passé, en 1994, le gouvernement a réduit la taxe sur les cigarettes de moitié. Il y avait un gros problème de contrebande et il fallait équilibrer les prix à la frontière. L'effet sur l'inflation a été important. Le taux était d'environ 2 % avant la réduction de la taxe. Il est passé à 0 % pendant une année pour ensuite revenir à 2 % une année plus tard.
    Du point de vue de la politique monétaire, après l'annonce de la réduction de taxe, on observe un effet sur l'inflation. Nous savons toutefois que ce sera fini une année plus tard, et nous en tenons effectivement compte.
    Je vois. Merci.
    Merci, madame Dzerowicz.
    Nous allons maintenant passer à M. Ste-Marie.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Macklem, dans votre exposé, vous avez rappelé que vous vous attendiez à voir l'indice des prix à la consommation, donc l'inflation globale, passer à 3 % durant la première moitié de l'année, à 2,5 % durant la deuxième et à 2 % en 2025.
    Par la suite, vous avez parlé de l'importance de prendre en compte l'inflation fondamentale dans vos analyses.
    La Banque du Canada pourrait-elle commencer à diminuer son taux directeur avant même que l'IPC ait atteint 2 %?
    Oui, et je l'ai déjà dit souvent.
    Il s'écoule toujours un certain temps avant que les changements de taux d'intérêt aient une incidence sur l'inflation. C'est pour cette raison que nous maintenons nos prévisions quant à l'inflation. Quand nous serons persuadés d'être en bonne voie d'atteindre l'objectif de 2 %, il sera temps de commencer à réduire un peu le taux directeur. La politique monétaire demeurera restrictive, mais elle sera moins restrictive qu'aujourd'hui.
    Nous voulons que l'inflation reste aux alentours de 2 %. Nous ne voulons pas qu'elle baisse en dessous de ce pourcentage. Si nous laissons le taux directeur à 5 % jusqu'à ce que l'inflation atteigne 2 %, celle-ci va probablement chuter sous les 2 %.
(0940)
    C'est très clair, merci.
    Dans votre présentation, vous avez dit à deux reprises que l'offre était présentement excédentaire dans l'économie. Est-ce bien ça?
    Oui.
    Quand l'offre est excédentaire, n'est-ce pas un bon moment pour diminuer le taux directeur?
    Ne pensez-vous pas que vous menez votre politique monétaire de façon un peu trop timide?
    Chaque personne jugera de la situation de façon différente. À notre avis, les décisions que nous avons prises étaient appropriées. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous les avons prises.
    Nous tenons compte de plusieurs indicateurs. Oui, nous croyons que l'offre est généralement excédentaire dans l'économie. Dans la deuxième moitié de l'année dernière, la croissance était presque nulle. L'offre a donc rattrapé la demande, et elle l'a même dépassée maintenant. C'est une des grandes raisons pour lesquelles on observe moins de pression sur l'inflation.
    Nous croyons que la croissance sera plus forte cette année que l'année dernière. La demande et l'offre cette année vont donc augmenter à peu près au même rythme, alors l'écart de production va rester sensiblement le même. L'an prochain, nous observerons une baisse.
    Voilà l'un des indicateurs de l'inflation que nous examinons pour prévoir où s'en va l'inflation. Or, ce n'est pas le seul. Nous tenons compte aussi des salaires, surtout dans l'optique de la productivité. Nous tenons compte également des prévisions quant à l'inflation ainsi que de la façon dont les entreprises fixent leurs prix. Tous ces indicateurs pointent dans la bonne direction. Quelques-uns évoluent plus rapidement que d'autres, mais ils vont tous dans la bonne direction. Ça nous donne une bonne raison d'être confiants et de croire que nous sommes sur la bonne voie.
    Merci.
    Merci, monsieur Ste‑Marie.
    Monsieur Davies, vous avez la parole.

[Traduction]

    Merci, monsieur le gouverneur.
    Je veux aborder le logement pour terminer mes questions
    D'après les chiffres, il semble très clair que la construction de logements locatifs a ralenti depuis le commencement de la hausse des taux. Nous savons que les taux d'intérêt sont plus élevés et que les gens n'achètent pas autant de maisons, mais il y a aussi une incidence sur les décisions prises par les entreprises de construction.
    D'après vous, quelle a été l'incidence des taux d'intérêt élevés sur la construction de logements locatifs?
    Les taux d'intérêt élevés font partie des coûts qui entrent dans la construction d'un logement, et le rythme auquel on bâtit a ralenti. Un certain nombre de mesures incitatives ont été prises pour essayer de restimuler le secteur de la construction.
    La politique monétaire a certainement un effet sur les mises en chantier. Nous l'avons observé.
    Merci.
    Je veux maintenant parler du chômage.
    Monsieur le gouverneur, dans un discours que vous avez donné en novembre 2022 au Forum des politiques publiques, vous avez dit que le taux de chômage au Canada, qui était alors de 5,1 %, était trop faible. Il se situe maintenant à 6,1 %. Le taux de chômage est‑il trop faible aujourd'hui? Quelle est votre cible? À quel point doit‑il être élevé avant que ce soit trop selon vous?
    Tout d'abord, soyons très clairs: nous n'avons pas de taux de chômage cible; nous avons une cible d'inflation. Notre mandat consiste à juguler l'inflation.
    Nous examinons le marché du travail sous deux angles. C'est un indicateur important de la mesure dans laquelle la demande ou l'offre est excédentaire dans l'économie. Lorsque j'ai fait ces observations, il était manifeste que l'économie surchauffait. Le marché du travail surchauffait. Une multitude d'entreprises signalaient qu'elles ne pouvaient pas trouver la main-d'œuvre nécessaire. La hausse des salaires s'accélérait. Ce sont tous des signes d'un marché du travail déséquilibré.
    Depuis, le taux de chômage est passé de 5,1 à 6,1 %. Sur le plan pratique, nous avons examiné un vaste éventail d'indicateurs du marché. Sur notre site Web, tout cela est exposé de façon assez détaillée. Il faut regarder les taux de postes vacants, le taux de chômage et les taux de participation. Il faut regarder les chiffres sur les hommes, les femmes et les jeunes. Lorsqu'on prend tous ces chiffres, on voit que le marché du travail est certainement plus équilibré qu'il ne l'était.
    Nous commençons également à observer une croissance plus modeste des salaires — ils ont augmenté trop rapidement par rapport à la productivité.
    Ce sont tous des signes que les pressions inflationnistes devraient diminuer.
(0945)
    Vous m'avez vu venir; je veux parler de la productivité.
    Madame la première sous-gouverneure, vous avez dit, selon un article de CBC, que lorsqu'on compare le bilan de productivité du Canada à celui d'autres pays, ce qui ressort vraiment, c'est à quel point nous accusons un retard relativement aux investissements dans la machinerie, l'équipement et la propriété intellectuelle.
    J'ai fait des recherches. Au Canada, les dépenses des entreprises pour la machinerie et l'équipement ainsi que pour la recherche et développement et l'innovation diminuent depuis de nombreuses années proportionnellement au PIB. Cela remonte au début du siècle, aux réductions de l'impôt des sociétés de Paul Martin. C'est un peu paradoxal, car ces réductions de l'impôt des sociétés étaient censées stimuler les investissements des entreprises, pas l'inverse. Même si nous avons une création rapide d'emplois et une croissance de la population, les dépenses d'investissement des entreprises ne suivent pas le rythme.
    L'Institut C.D. Howe a fait une comparaison entre les États-Unis et le Canada. En 2014, l'investissement par travailleur au sud de la frontière était de 20 700 $. Au Canada, c'était 14 400 $. En 2023, ce chiffre est passé à 27 800 $ aux États-Unis. Nous sommes rendus à 14 500 $. C'est une hausse de 100 $ sur 10 ans.
    Pouvez-vous nous dire quelles pourraient être les stratégies les plus efficaces pour accroître l'investissement de capitaux au Canada, alors que les théories de la percolation bien établies, comme les réductions d'impôt pour les sociétés et les riches, n'ont manifestement pas fonctionné comme on s'y attendait?
    Monsieur Davies, c'est une excellente question, mais il me faut une réponse vraiment très courte. Nous avons largement dépassé le temps alloué, mais vous pourrez peut-être revenir là‑dessus au dernier tour. Si vous voulez une réponse condensée de 20 secondes...
    Je peux être brève.
    Vous avez très bien décrit le problème. Vous avez dit clairement qu'il remonte à longtemps, que nous avons eu différents régimes fiscaux depuis. Nous pouvons en déduire qu'il n'y a pas de solution unique et évidente. Il n'y a pas de mesure magique que nous pouvons prendre pour régler le problème. Une seule mesure ne suffira pas.
    Nous ne sommes pas fiscalistes. Nous ne sommes même pas des experts en matière de productivité.
    Je vais m'arrêter ici, monsieur le président. Je suis certaine que nous allons revenir là‑dessus.
    Je suis certain que vous pourrez en dire plus long au prochain tour, mais nous allons maintenant passer à M. Morantz pour cinq minutes.
    Monsieur le gouverneur, c'est toujours un plaisir de vous voir.
    Je vais vous poser une question très directe. Si le taux d'inflation était actuellement de 2,1 ou 2,2 % plutôt que de 2,8 ou 2,9 %, vous serait‑il plus facile de décider de réduire le taux directeur?
    Si nous étions d'avis qu'il allait rester à ce niveau, absolument, oui.
    Plus tôt pendant la réunion, vous avez dit que la hausse graduelle de la taxe sur le carbone de 65 à 80 $ représentait 0,1 % de l'inflation et que si elle n'avait pas eu lieu, le taux d'inflation se situerait à 2,8 %.
    Est‑ce exact?
    C'est exact.
    Lorsque vous avez témoigné ici en octobre, vous avez dit que l'effet global d'une taxe sur le carbone de 65 $ la tonne était une hausse de 0,6 % de l'inflation.
    Est‑ce exact?
    Oui.
    Pour être parfaitement clair, l'effet combiné aujourd'hui signifie qu'à 80 $ la tonne, la taxe sur le carbone hausse l'inflation d'environ 0,75 %.
    Est‑ce bien le cas?
    Ce n'est pas tout à fait exact.
    Ce qui importe pour l'inflation, c'est la hausse de la taxe sur le carbone, c'est‑à‑dire le passage de 0,1 à 0,15 %.
    Vous avez raison de dire que l'élimination de la taxe sur le carbone se traduirait par une diminution des prix d'environ 0,7 %, ce qui signifie que pendant une année, l'inflation diminuerait de 0,7 point de pourcentage.
    À propos de l'argument sur la période d'un an, je veux également apporter une rectification. C'est une année à perpétuité. On ne peut éliminer la taxe sur le carbone qu'une seule fois.
    Ma question pour vous est plutôt simple.
    Si la taxe sur le carbone avait été abrogée — c'est ce que les conservateurs feront lorsque nous serons au pouvoir — et que cela avait été fait en avril, est‑ce que cela vous aurait aidé à prendre votre décision concernant une réduction des taux d'intérêt? Des millions de personnes qui détiennent une hypothèque auraient profité d'une réduction de leurs paiements.
    Comme je l'ai déjà dit, et comme vous venez tout juste de le dire, on ne peut éliminer la taxe sur le carbone qu'une seule fois, ce qui réduirait l'inflation de 0,7 % pendant une année selon nos estimations.
    Une année plus tard, l'inflation remonterait de 0,7 % puisque la diminution ponctuelle ne serait plus comprise dans le calcul du taux de variation.
    Du point de vue de la politique monétaire, nous avons déjà eu ce genre de changements de taxe dans le passé. J'ai mentionné la diminution de la taxe sur les cigarettes en 1994. Les changements du PIB ont un effet similaire. Ce sont des choses que nous avons tendance à passer en revue.
    En fait, une des mesures de l'inflation fondamentale que nous suivons est l'indice IPCX qui exclue les aliments, l'énergie et les taxes, et c'est exactement pour cette raison. Nous nous concentrons sur la tendance sous-jacente qui se dégage de l'inflation.
    Cette discussion est un peu hypothétique, mais...
(0950)
    Je suis vraiment désolé. Mon temps est limité.
    Pouvez-vous juste répondre à la question?
    Si la taxe sur le carbone était éliminée, votre travail serait‑il plus facile en ce qui concerne la réduction des taxes?
    L'inflation serait plus faible pendant une année, mais pas de façon durable, et je ne pense donc pas que cela changerait grand-chose.
    D'accord.
    Je veux revenir à la question de l'écart entre... Je sais que vous avez dit que nous avons une politique monétaire souple au Canada, mais il y a une limite, comme vous l'avez mentionné.
    À quel point l'écart peut‑il être grand? Notre dollar se situe déjà à 72 ¢. C'est beaucoup trop bas.
    Je viens tout juste d'avoir une réunion, par exemple, avec les gens de la Banque canadienne de grains à Winnipeg. Tous leurs contrats sont en dollars américains. Ils nourrissent les pauvres dans des pays du monde entier, ce qui signifie que les répercussions sont réelles. La valeur du dollar canadien peut être une question de vie ou de mort. Ce n'est qu'un seul exemple.
    Dans quelle mesure êtes-vous prêt à compromettre la valeur du dollar canadien?
    Eh bien, notre taux de change flexible fonctionne bien. C'est ce qui nous permet d'avoir une politique monétaire axée sur les Canadiens.
    De toute évidence, si nous réduisons les taux d'intérêt et affaiblissons ainsi le dollar canadien, il faut en tenir compte au moment de déterminer dans quelle mesure il faut réduire les taux d'intérêt pour obtenir le même effet de stimulation grâce à la politique monétaire.
    C'est certainement une chose dont nous tenons compte, mais c'est justement pour pouvoir axer la politique monétaire sur les besoins des Canadiens que nous avons un taux de change flexible. Nous avons l'intention d'utiliser le système dans l'intérêt des Canadiens.
    Merci, monsieur Morantz.
    Nous allons entendre Mme Thompson pendant cinq minutes.
    Je vous souhaite un bon retour au Comité.
    Merci d'avoir apporté des éclaircissements sur la tarification de la pollution et la remise sur le carbone. Je ne peux pas appeler cela une taxe.
    J'aimerais parler des changements climatiques, si vous le permettez. Je crois que c'est également le sujet que j'ai abordé lors de votre dernière comparution devant le Comité.
    Puisque les changements climatiques deviennent une force croissante ou un facteur important dans l'économie, et qu'ils peuvent aussi mener à un nombre croissant de perturbations de l'approvisionnement, j'aimerais mettre l'accent là‑dessus pendant un moment. Dans des comparutions précédentes, vous avez dit que vous étiez en train d'élaborer un modèle sur les effets des changements climatiques pour vos modèles macroéconomiques ou économiques.
    Avez-vous progressé dans ce dossier? Dans l'affirmative, il serait intéressant d'en entendre parler.
    Oui, nous poursuivons le travail.
    L'une des choses difficiles à propos de l'utilisation de modèles climatiques, c'est que la plupart de nos modèles de projection s'appuient sur des données historiques. Ce qui est difficile dans ce cas‑ci, c'est que l'histoire ne nous donne vraiment pas ce genre de données. Ce que la Banque du Canada et d'autres banques centrales font, c'est tirer avantage de la planification de scénarios, envisager différents scénarios et utiliser une partie des données scientifiques sur le climat pour prédire à quoi nous pouvons nous attendre à l'avenir.
    Nous nous livrons actuellement à un long exercice à la Banque en examinant nos modèles. Nous utilisons de nombreuses choses que nous avons apprises au cours des dernières années. C'est une époque difficile pour ce qui est de la capacité des banques centrales à faire des projections, pour diverses raisons. L'une des choses sur lesquelles nous planchons vraiment consiste à essayer d'intégrer les effets des risques climatiques en macroéconomie.
(0955)
    Pouvez-vous donner un peu plus de détails sur les risques climatiques ou sur ce qui pourrait se produire?
    Les chocs d'approvisionnement sont un des grands risques, comme vous l'avez dit. Ce serait un élément. Nous examinons les risques de transition, les changements à la valeur relative des actifs. Ce serait deux bons exemples.
    Il y en a essentiellement deux types.
    Il y a les risques physiques, comme les inondations et les feux de forêt. Évidemment, cela a des répercussions très directes sur les gens et leurs moyens de subsistance. Cela perturbe également les transports.
    Ensuite, comme l'a dit la première sous-gouverneure, il y a les risques liés à la transition. Nous utiliserons moins de combustibles fossiles et beaucoup plus d'électricité. Ce n'est qu'un exemple. Des changements profonds vont se produire. Comment se répercuteront-ils sur l'économie?
    Je vous remercie.
    Très rapidement, toujours au sujet des risques, vous avez mentionné dans votre déclaration préliminaire que l'une des variables dans les prévisions économiques est l'incertitude mondiale. Pourriez-vous nous parler brièvement de cette incertitude, des variables réelles?
    Nous avons tendance à nous concentrer sur l'aspect microénomique ici, au Comité. J'aimerais que vous nous parliez de ce sujet.
    Le risque géopolitique se traduit habituellement par des changements dans les biens dont les prix sont fixés sur les marchés mondiaux. C'est le cas de beaucoup de matières premières. L'augmentation récente du prix du pétrole est le résultat en partie des tensions géopolitiques au Moyen-Orient en ce moment. C'est un exemple de risque.
    Cela pourrait aussi se traduire par des perturbations de l'approvisionnement. Si le commerce est perturbé, cela peut avoir des effets importants sur l'offre et les prix.
    Je vous remercie.
    Je vais partager une partie de mon temps avec ma collègue, qui aimerait ajouter un point à ses questions.
    Merci, madame Thompson.
    Monsieur le gouverneur, vous avez gentiment offert de nous faire suivre des calculs lorsque je vous remerciais. Si vous pouviez nous donner un peu plus de détails sur l'augmentation annuelle d'environ 0,1 % liée à la tarification du carbone, nous vous en serions très reconnaissants.
    Je vais le faire avec plaisir.
    Merci.
    C'est tout.
    D'accord.
    Madame Thompson, il vous reste 30 secondes. Avez-vous une brève question à poser?
    J'ai une brève question, oui.
    Je reviens à l'allusion aux garde-fous. Je ne pense pas que vous ayez eu l'occasion de nous en dire plus à ce sujet. Je pense qu'il est important de comprendre vos commentaires sur les perspectives économiques et où le Canada se situe par rapport aux prévisions.
    Eh bien, je pense que j'avais en grande partie terminé, mais en ce qui concerne les garde-fous, en particulier le maintien du déficit et de la dette sur une trajectoire descendante, je pense qu'il a été très utile de mettre non seulement un chiffre, mais aussi une date sur cela. Une cible assortie d'une date à laquelle vous devez l'atteindre devient une cible plus significative.
    En ce qui concerne l'objectif de voir le ratio déficit-PIB diminuer et être inférieur à 1 % en 2026-2027 et par la suite, je pense que cet engagement est utile en ce sens qu'il donne une certaine clarté sur la trajectoire globale de la politique budgétaire. Du point de vue de la politique monétaire, je pense que cela atténue le risque que d'importantes dépenses gouvernementales viennent faire déraper l'inflation.
    Je vous remercie.
    Merci, madame Thompson et madame Dzerowicz.
    Chers collègues, après avoir regardé l'heure, je dirai que nous allons répartir le temps qu'il nous reste également. Chaque parti disposera de quatre minutes.
    Nous allons commencer par M. Lawrence, qui dispose des quatre premières minutes.
    Merci, monsieur le gouverneur, de votre présence et de votre disponibilité.
    Qui fixe les taux d'intérêt pour le Canada?
    Le Conseil de direction de la Banque du Canada.
    D'accord. Êtes-vous censés le faire de façon indépendante?
    Oui.
    Hier, à la fin de la période des questions, le premier ministre Trudeau a dit « Les taux d'intérêt vont diminuer, j'en suis sûr, au cours des prochains mois ». Avez-vous fait savoir au gouvernement que vous alliez réduire les taux d'intérêt?
    Je m'entretiens régulièrement avec la ministre des Finances, mais non, je ne... Nous prenons nos décisions au moment voulu, et je les communique ensuite à la ministre des Finances.
(1000)
    Le premier ministre n'a donc aucun moyen de savoir que les taux d'intérêt vont diminuer.
    Nous n'avons pas encore pris de décision, alors...
    Il n'a donc aucun moyen de savoir que les taux d'intérêt vont baisser.
    Pourquoi a‑t‑il dit cela alors?
    Je pense que vous devriez poser cette question au premier ministre .
    Je pense que oui. Je pense que c'est exactement ce que je vais faire.
    Ne pensez-vous pas que c'est un commentaire irresponsable de sa part?
    Je pense que vous devriez en parler au premier ministre. Je vais en rester là.
    D'accord.
    Je vais changer de sujet et parler brièvement de productivité avec Mme Rogers, si vous me le permettez.
    J'approuve ce que vous avez dit dans votre discours du 26 mars, à savoir que l'heure a sonné et qu'il faut agir. Je veux parler d'un facteur en particulier. Je sais qu'il y en a beaucoup. Vous en avez parlé un peu dans votre discours.
    Vous avez parlé de la faiblesse des investissements en capital. Bien entendu, on prévoit que le Canada se classera bon dernier parmi les pays de l'OCDE. Nous avons besoin de capitaux pour maintenir, augmenter et améliorer notre productivité, pour faire croître notre économie et pour lutter contre l'inflation.
    Est‑ce le bon moment pour augmenter les impôts sur le capital?
    Comme M. Davies l'a souligné, il y a eu une diminution des investissements en capital sur une longue période et sous de multiples régimes fiscaux différents. Nous ne sommes pas des fiscalistes, alors nous n'allons pas évaluer une mesure particulière.
    Je dirais qu'il y a, en fait, trois éléments qui contribuent à la productivité. Il y a la main-d'œuvre, il y a l'intensité du capital, puis il y a un effet multiplicateur qui dépend de notre façon d'optimiser ces deux éléments. Notre problème de productivité est lié à tous ces éléments. L'intensité du capital ou l'investissement en capital est l'un de ces éléments, mais on peut faire mieux dans ces trois domaines.
    Oui. Il est logique, cependant, qu'une partie du problème possiblement, je pense, soit la concurrence. Autrement, pourquoi les entreprises n'investissent-elles pas? Je pense que M. Davies a bien fait valoir ce point.
    Cependant, si nous réduisons la part du gâteau et que nous prenons plus d'argent du secteur privé pour le donner au secteur public, et si les entreprises canadiennes disposent alors de moins de capitaux pour investir, nous serons moins productifs. Ce sont là des principes économiques de base.
    Est‑ce une question?
    Oui, ou il peut s'agir d'une déclaration. Vous pouvez être d'accord ou en désaccord.
    Je suis désolé. Allez‑y.
    Fondamentalement, c'est vrai.
    Comme je l'ai dit, il y a trois éléments qui entrent dans la productivité, et on peut faire mieux dans ces trois domaines. J'ai parlé des trois dans mon discours. L'investissement en est un.
    Vous avez aussi parlé dans votre excellent discours, madame Rogers, de la différence dans l'esprit d'entrepreneuriat culturel ou sociétal. Des experts ont dit que les Américains semblent en avoir davantage que les Canadiens.
    La difficulté que j'ai avec le gouvernement libéral-néo-démocrate, c'est qu'il diabolise les entrepreneurs, ceux qui réussissent et les propriétaires d'entreprise. On entend dire notamment que les propriétaires d'entreprise sont des fraudeurs, qu'il faut s'en prendre aux riches, et on entend de plus en plus cette rhétorique sur la guerre des classes de la part du gouvernement libéral-néo-démocrate...
    Je ne m'inquiète pas tant pour ceux qui sont déjà prospères, mais je m'inquiète pour ceux qui veulent devenir riches, et je ne pense pas qu'être riche soit une mauvaise chose. En fait, je pense que c'est une excellente chose.
    Si nous minons les rêves des jeunes Canadiens de devenir riches et de réussir, ne croyez-vous pas que cela a pour effet de miner aussi notre productivité?
    Je pense que les Canadiens ont un fort esprit d'entreprise. Nous avons un système d'éducation solide. Nous avons beaucoup d'éléments requis pour nous permettre d'améliorer notre productivité. Je vais en rester là.
    Nous passons maintenant à M. Turnbull.
    Je remercie le gouverneur et la sous-gouverneure d'être ici aujourd'hui. Je suis heureux de vous voir tous les deux.
    Je veux reprendre là où mes collègues se sont arrêtés et poser des questions sur les changements climatiques et leurs répercussions sur notre croissance économique. Avons-nous une idée, à ce stade‑ci, des répercussions des changements climatiques sur la croissance économique du Canada?
    Je tiens à souligner que l'Institut climatique du Canada a produit un très bon rapport intitulé Limiter les dégâts qui contient une modélisation, et les chiffres sont assez effrayants, pour être honnête, mais je veux vous poser la question, madame Rogers.
    Comme je l'ai dit plus tôt, l'une des difficultés que posent les changements climatiques, c'est que nous ne disposons pas d'un long historique sur lequel baser nos prévisions et les répercussions sur l'économie. Ces répercussions sont le résultat de ce qu'on appelle des chocs, et ils peuvent avoir un effet sur la croissance.
    Si vous regardez le PIB de la Colombie-Britannique, vous voyez manifestement les effets des feux de forêt l'été dernier. Pour bien mesurer ces effets sur l'économie, il faut en quelque sorte prévoir ces chocs, leur fréquence, leur ampleur, etc.
(1005)
    Le défi ne consiste‑t‑il pas à intégrer suffisamment de données scientifiques sur le climat dans vos modèles macroéconomiques?
    Une chose sur laquelle nous travaillons, c'est d'intégrer ce que nous avons appris sur les répercussions de ces chocs dans nos prévisions futures.
    Je m'excuse auprès des membres du Comité et des témoins de devoir vous interrompre. La sonnerie se fait entendre. Je demande simplement le consentement unanime pour que nous puissions continuer.
     Des députés: D'accord.
     Le président: D'accord. Nous avons le consentement unanime. Allez‑y.
    Je tiens simplement à souligner que nous avons un modèle économique et que nos prévisions sont faites à partir de données historiques. Par exemple, nous avons augmenté et baissé les taux d'intérêt à de nombreuses reprises, alors nous pouvons estimer empiriquement que si nous augmentons les taux d'intérêt, cela aura telle incidence sur l'économie, et que si nous les abaissons, cela aura telle incidence sur l'économie.
    Les changements climatiques sont un phénomène nouveau, alors il est très difficile de faire de bonnes estimations, et si quelqu'un affirme pouvoir en prévoir exactement le coût, je pense bien honnêtement qu'on devrait être un peu sceptique. Le mieux que nous puissions faire, c'est probablement de fournir des scénarios et de donner une idée des coûts. Nous y travaillons, mais c'est un peu en dehors de notre façon habituelle de procéder, parce que nous utilisons normalement les fluctuations passées pour prévoir ce qui, selon nous, va se reproduire.
    Je comprends que les risques climatiques et la fréquence de ces phénomènes météorologiques extrêmes sont difficiles à prévoir, car ils ne se sont pas produits aussi fréquemment par le passé. Les changements climatiques en soi ne sont pas nouveaux; ils existent depuis 30 ou 40 ans ou même davantage.
    Je pense que là où je veux en venir, c'est qu'on parle beaucoup sur la scène internationale des risques que posent les changements climatiques pour la stabilité économique, et je veux savoir comment vous, dans votre rôle, songez à atténuer ces risques sur la stabilité économique.
    Je tiens à préciser que la Banque du Canada n'a pas de mandat en matière de politique climatique. Notre mandat se limite à la politique monétaire, à la maîtrise de l'inflation et à l'atténuation des vulnérabilités dans le système financier.
    Les changements climatiques ont des effets puissants sur l'économie. Ils vont avoir des effets sur l'économie. Ils ont déjà des effets sur l'économie. Ce sur quoi nous nous concentrons, c'est de déterminer leurs répercussions sur l'inflation et sur la politique monétaire. Notre rôle n'est pas d'estimer les répercussions des changements climatiques sur le bien-être des Canadiens.
    J'ajouterais au sujet des risques climatiques et des chocs sur l'économie, qu'on peut créer plus de tampons. Dans le monde des finances, on demande aux institutions financières d'avoir des capitaux ou des tampons pour les prémunir contre ces risques à une échelle économique globale.
    C'est l'une des raisons pour lesquelles nous pensons qu'il faut mettre l'accent sur la productivité. Plus l'économie est productive, plus elle a de marge de manœuvre pour absorber les chocs, y compris les chocs liés aux risques climatiques.
    Merci, monsieur Turnbull.
    Nous allons maintenant passer à M. Ste‑Marie. Allez‑y, je vous prie.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Le taux directeur est à 5 %. La Banque évalue-t-elle à combien s'établirait un taux neutre?
    Oui, nous avons des estimations quant à un taux neutre.
    J'aimerais souligner que c'est un concept assez théorique. Le taux neutre, c'est le taux auquel se situe le taux directeur quand l'économie est bien équilibrée, que l'écart de production est nul, que l'inflation est à 2 % et qu'il n'y a pas de chocs économiques.
(1010)
    À combien s'établirait ce taux?
    La seule chose qui soit sûre, c'est que ça n'arrivera jamais, parce qu'il y aura toujours de nouveaux chocs.
    Ça demeure un concept. Nous avons besoin de mettre quelque chose dans notre modèle et, par souci de transparence, nous publions nos estimations du taux neutre. Une fois par année, nous révisons nos estimations du taux neutre ainsi que du taux potentiel de croissance de l'économie.
    Comparativement à notre dernier rapport, notre estimation du taux neutre a augmenté de 25 points de base dans celui-ci. Il se situe dans une fourchette de 2,25 % à 3,25 %, dont le point milieu est de 2,75 %.
    Je tiens à souligner que ce n'est pas quelque chose qui a beaucoup de conséquences sur nos décisions relatives à la politique monétaire d'un mois à l'autre. Il s'agit vraiment d'un concept dont la portée est à plus long terme. À court terme, nous nous concentrons surtout sur les mesures dont nous avons déjà discuté.
    D'accord, merci.
    Combien de mois cela fait-il depuis que vous avez procédé à la première hausse des taux pour lutter contre l'inflation? À combien de mois cela remonte-t-il?
    Je n'ai pas compris votre question.
    Combien de mois cela fait-il depuis que vous avez haussé le taux directeur pour la première fois?
    Je pense que la dernière hausse remonte au mois de juillet dernier.
    Je parle de la première hausse, et non de la dernière.
    La première hausse a eu lieu en mars de l'année... C'était il y a à peu près 18 mois.
    D'accord.
    Je veux citer l'économiste Barry Eichengreen, de l'Université de la Californie, à Berkeley: « Par le passé, de fortes augmentations de prix ont conduit à des progrès dans la gestion de l'inflation. » Il donne ensuite cet exemple: « Certains épisodes nous ont enseigné l'importance de préserver l'indépendance des banques centrales [...] » C'est donc à la suite de la gestion d'épisodes d'inflation qu'on est arrivé à cet enseignement. Il poursuit ainsi: « D'autres nous ont appris la nécessité de voir les banques centrales établir une hiérarchie des priorités politiques, et communiquer ces priorités aux marchés financiers ainsi qu'au public. » Voilà donc des enseignements tirés des épisodes inflationnistes.
    Aujourd'hui, voyez-vous déjà émerger un enseignement qui résulterait de la présente période inflationniste?
    Barry Eichengreen est un économiste qui regarde l'histoire.
    Récemment, j'ai écrit à ce sujet un article qui a été publié dans un ouvrage du CEPR, soit le Centre for Economic Policy Research. J'ai aussi prononcé quelques discours sur cette question, vers la fin de l'année passée. Il s'agit d'une réflexion sur les leçons tirées de cette récente période d'inflation. Tout un chapitre est consacré à cette question. Ce serait trop long à décrire, mais je pense qu'il y a quelques leçons importantes à retenir.
    L'une de ces leçons a déjà été mentionnée par la première sous-gouverneure: quand l'économie est en situation de demande excédentaire, l'effet des chocs d'offre est beaucoup plus grand. Nous avons eu des chocs d'offre au cours des 20 dernières années, mais, la plupart du temps, les effets étaient transitoires. J'insiste ici sur le mot « transitoires ». Quand nous avons constaté qu'il y avait encore des chocs, nous croyions au début qu'ils étaient transitoires. Cependant, du fait que l'économie était en situation de demande excédentaire, nous avons constaté que ces chocs avaient beaucoup plus d'effets sur l'inflation que par le passé. C'est l'une des leçons que nous avons tirées.
    Je pense qu'il y a une leçon qui est probablement plus importante encore. En fait, ce n'est pas vraiment une nouvelle leçon, mais il s'agit d'une nouvelle expérience pour beaucoup de Canadiens qui ont malheureusement eu à la subir. En effet, il n'y a pas eu de grande inflation depuis plusieurs années, soit depuis les années 1970 et 1980. Pour plusieurs Canadiens, c'est véritablement la première fois qu'ils vivent l'expérience d'une inflation. Ce n'est donc pas une nouvelle leçon apprise, mais nous avons pu observer encore une fois que les Canadiens n'aiment pas l'inflation. C'est une situation qui crée beaucoup de divisions et qui donne l'impression que le système ne marche pas. Les Canadiens travaillent fort, mais leur salaire ne leur permet pas d'acheter autant de choses qu'avant.
(1015)
    Merci, monsieur Ste‑Marie.

[Traduction]

    Merci, monsieur le gouverneur.
    Nous allons passer à M. Davies. Vous serez notre dernier intervenant.
    Je veux simplement que tout le monde tienne bon, car nous devrons ensuite passer à notre autre réunion. Tout le monde peut rester à sa place.
    La parole est maintenant à M. Davies pendant quatre minutes.
    Je vous remercie.
    Madame Rogers, je sais que votre rôle n'est pas de donner des conseils stratégiques sur la façon de gérer la productivité, mais vous avez soulevé, de très belle façon, la question de la productivité au Canada.
    Je tiens à insister sur un point. Ma question portait sur le lien entre la politique de réduction de l'impôt des sociétés qui était censée stimuler l'investissement des entreprises. Dans votre réponse, vous avez dit que ce problème persiste sous différents régimes fiscaux. Depuis plus de 20 ans, la politique au Canada sur les taux d'imposition des sociétés consiste à les maintenir bas ou à les réduire. Il n'y a pas eu de politique allant en sens inverse, soit augmenter les taux d'imposition des sociétés.
    Seriez-vous d'accord avec moi pour dire que ce que nous pouvons probablement prévoir, c'est qu'une politique de faibles taux d'imposition des sociétés à long terme ne s'est pas avérée particulièrement efficace pour inciter les entreprises à investir dans la recherche et le développement, l'innovation et la technologie?
    Je pense que ce sur quoi j'aurais tendance à être d'accord avec vous, c'est la première partie de votre déclaration, à savoir que ce problème persiste depuis longtemps sous différents régimes fiscaux.
    C'est la même politique fiscale.
    Encore une fois, nous ne sommes pas des fiscalistes. Ce n'est pas à nous d'évaluer les effets des politiques fiscales.
    Je vous remercie.
    Monsieur le gouverneur, j'aimerais parler un peu des prix de l'essence. Ils ont grimpé en flèche au cours des dernières semaines dans la plupart des régions du Canada, pour diverses raisons. Pouvez-vous estimer l'incidence de cette augmentation des prix sur l'inflation de l'indice des prix à la consommation, l'IPC, d'une année à l'autre pour les mois d'avril et de mai?
    Pensez-vous que la hausse des prix de l'essence est le reflet d'une demande excédentaire dans l'économie intérieure du Canada? Les taux d'intérêt au Canada vont-ils faire baisser les prix de l'essence?
    La réponse courte à la deuxième partie de votre question est non, je ne pense pas que cela reflète une demande excédentaire au Canada. Je pense que cela reflète en grande partie le prix mondial du pétrole, compte tenu surtout des tensions au Moyen-Orient. Cela crée de l'incertitude sur les marchés mondiaux du pétrole. Les prix mondiaux du pétrole ont augmenté, et cela se reflète très rapidement dans les prix à la pompe.
    Pour ce qui est de l'incidence que cela est susceptible d'avoir sur l'inflation, l'augmentation des prix de l'essence est, en fait, la raison pour laquelle nous pensons que l'inflation globale va rester autour de 3 % au cours des prochains mois, même si nous continuons de nous attendre à ce que l'inflation sous-jacente ou de base qui élimine ces composantes volatiles continue de diminuer graduellement, comme nous l'avons vu au cours des derniers mois.
    Évidemment, au bout du compte, notre cible est l'inflation totale de l'IPC. C'est ce qui reflète le coût de la vie pour les Canadiens et c'est ce que nous nous sommes engagés à ramener à 2 %. Les prix mondiaux du pétrole peuvent être instables. Ils fluctuent en fonction des événements géopolitiques et d'autres événements, alors nous avons tendance à en faire abstraction et à nous concentrer sur l'inflation sous-jacente.
    Pour ce qui est du message à transmettre à vos électeurs, nous nous concentrons sur le maintien à la baisse de l'inflation de base.
    Merci, monsieur Davies.
    Sur ce, nous tenons à remercier le gouverneur et la première sous-gouverneure. Merci d'être venus nous présenter le rapport de la Banque du Canada sur la politique monétaire et d'avoir répondu aux nombreuses questions des membres.
    Chers collègues, le gouverneur et son bureau nous ont fait parvenir une invitation. Pouvez-vous lui confirmer votre présence? Nous irons visiter la Banque du Canada en juin.
    Merci, monsieur le gouverneur. Nous vous souhaitons une belle journée.
    Merci, et merci de me donner l'occasion de venir vous rencontrer.
    Nous espérons vous voir en très grand nombre à la Banque du Canada.
    Merci.
    Chers collègues, la séance est suspendue.
    [ La séance se poursuit à huis clos. ]
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