PROC Rapport du Comité
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COMPÉTENCE ÉLARGIE POUR LA SÉCURITÉ PARLEMENTAIRE
OPINIONS DISSIDENTES DE L’OPPOSITION OFFICIELLE
La majorité du Comité de la procédure et des affaires de la Chambre va trop loin, trop vite avec certaines de ses recommandations demandant l’affirmation de la compétence fédérale en matière de sécurité au centre-ville d’Ottawa et la fermeture de la rue Wellington.
C’est pourquoi l’Opposition officielle aurait accordé beaucoup plus d’importance à la recommandation du Comité selon laquelle la recherche d’un juste équilibre pour assurer la sécurité du Parlement du Canada tout en restant ouvert et accessible à tous, y compris aux manifestants pacifiques, devrait être la responsabilité des professionnels de la sécurité et du maintien de l’ordre, sous réserve de la surveillance du Parlement.
En fait, les conservateurs suggèrent que les recommandations de la majorité du Comité qui prescrivent des solutions pour la sécurité autour de la Colline du Parlement auraient dû céder à cette perspective de laisser les experts, encouragés comme il se doit à collaborer pour trouver la bonne approche, élaborer une proposition conjointe, du concept jusqu’aux détails nécessaires.
Il se peut que les dispositions recommandées par la majorité du Comité soient celles qui seront finalement adoptées. Certes, nous reconnaissons qu'il y avait des preuves que c'était le résultat préféré de certains des témoins du Comité.
Cependant, nous avons également entendu — haut et fort — l’importance de la communication, de la collaboration, de la coordination et de la clarté des lignes de responsabilité.
Steve Bell, le chef de police intérimaire d’Ottawa de l’époque, a dit qu’il ne fallait pas seulement avoir une vue d’ensemble, mais aussi les détails essentiels : « Si nous voulons réagir efficacement à des événements complexes et changeants, il faudra définir clairement les limites des compétences, les responsabilités et les stratégies de collaboration. »[1] Dans le cas contraire, les conséquences pourraient malheureusement se manifester par des « lacunes dans notre réponse ».[2] Ce message a été réitéré par la chef adjointe intérimaire du Service de police d’Ottawa, Trish Ferguson, lorsqu’elle a comparu devant le Comité des droits de l’homme.[3]
L’ancien chef de la police d’Ottawa, Peter Sloly, a mis l’enjeu en perspective pour nous en indiquant ce qui est facilement réalisable et ce qui ne l’est pas : « les changements concernant les lois ou les champs de compétence sont ce qui est le plus lointain et le plus difficile à obtenir. Il faut beaucoup de temps et d’efforts pour concrétiser de tels changements et il se peut qu’en fin de compte, on passe à côté des principaux problèmes qui ont été soulevés jusqu’ici aujourd’hui. »[4]
La Commission de la capitale nationale, malgré son mandat très différent en ce qui concerne le centre-ville d’Ottawa, a également souligné, par l’intermédiaire de son directeur général, Tobi Nussbaum, la nécessité de travailler patiemment ensemble :
Je voulais simplement répéter qu’à mon avis, l’avenir de la rue Wellington repose pour une large part sur une plus grande collaboration et coopération entre les partenaires fédéraux et municipaux… Je voulais simplement souligner notre engagement en ce sens à mesure que nous progressons.[5]
S’il est nécessaire de redoubler de collaboration au sujet de la rue Wellington, c’est parce qu’il ne s’agit pas exclusivement d’une question de sécurité, mais aussi d’une artère critique pour le transport au centre-ville d’Ottawa, par exemple. Les témoins des deux opérateurs de transport en commun de la région de la capitale nationale ont, pour leur part, souligné l’importance de l’accès à la rue Wellington, à la fois comme élément essentiel de leur offre de services — y compris comme itinéraire potentiel pour la ligne de tramway de Gatineau vers Ottawa — et comme itinéraire de déviation de secours pour les autobus.[6]
Quant au projet de ligne de tramway vers le centre-ville d’Ottawa, le Comité a également appris que la collaboration avec les professionnels de la sécurité est un élément essentiel de sa planification :
Nous mettons vraiment l’accent sur le volet lié à la sécurité, et nous le faisions même avant les manifestations qui ont eu lieu à Ottawa. Nous travaillons avec les services de sécurité spécialisés pour tout ce qui touche le volet lié à l’insertion, par exemple, sur la rue Wellington. Pour ce qui est de l’emplacement des stations, nous prenons en compte la question de la sécurité. Je pense notamment à l’édifice Langevin et à l’endroit où l’on inspecte les véhicules qui se dirigent vers la Colline du Parlement. En ce qui concerne l’accès à la Cité judiciaire et à la Cité parlementaire, nous travaillons de concert avec les services de sécurité. Tout ce volet sera donc pris en charge par des experts.[7]
La ministre des Services publics et de l’Approvisionnement, qui est également responsable de la Commission, l’honorable Filomena Tassi, elle-même ancienne députée de ce comité, nous a souligné l’importance de travailler avec l’ensemble des intervenants dans les domaines suivants : « de bien faire les choses » :
C’est pourquoi votre étude est si importante : elle répond au besoin de tenir différentes conversations. Vous devez entendre un certain nombre de témoins. Pour bien faire les choses, nous devons consulter toutes les parties intéressées et tous les intervenants. SPAC est actuellement en plein dialogue avec la Ville d’Ottawa, par exemple, sur cet enjeu même. Il est important de bien faire les choses.
Il faut aussi reconnaître dès maintenant que c’est ardu, parce qu’avec les questions et les limites de compétence, il est très difficile d’agir de manière à vraiment protéger la sécurité des gens à Ottawa, dans cette zone précise. C’est pourquoi il est si important d’en discuter.[8]
Mme Tassi a rappelé un exemple concret de ces délicats équilibres lorsqu’il s’agit de questions concernant le National War Memorial, car
il appartenait auparavant à quatre propriétaires différents, mais il n’en reste plus que trois. Le monument lui-même appartient à SPAC, mais pensez aux problèmes de compétence lorsque trois propriétaires doivent décider de la suite des choses. En fin de compte, on nous a demandé à SPAC de construire une barrière, une clôture. Il a fallu du temps, parce qu’il fallait s’assurer que tout le monde était d’accord, que c’était respectueux pour l’endroit et que c’était la chose à faire.[9]
Son collègue, l’honorable Marco Mendicino, ministre de la Sécurité publique, a également souligné la nécessité d’aborder cet enjeu avec prudence du point de vue des ressources : « Même avec le périmètre actuel et son agrandissement éventuel, je pense bien,… que nous devrions soigneusement planifier les ressources de manière à ce qu’il y ait un degré élevé de communication et de coopération… »[10]
Dans l’ensemble, les conservateurs ont été impressionnés par l’étendue des preuves et des arguments convaincants concernant l’importance à accorder à la collaboration, en particulier lorsqu’il s’agit des interactions complexes impliquées dans ces enjeux.
C’est pourquoi nous avons été heureux d’entendre qu’il existe des relations de travail positives entre les différents partenaires et que les événements de ces derniers mois ont conduit à une prise de conscience encore plus grande de la situation unique du Parlement ainsi qu’à une collaboration inter-agences plus forte, comme l’a expliqué par exemple le surintendant Larry Brookson, directeur par intérim du Service de protection du Parlement, lors de ses interventions du 21 juin et du 27 octobre 2022.
À notre avis, l’avenir en constante évolution de la sécurité parlementaire devrait tirer parti de cette dynamique et la renforcer, plutôt que d’être inutilement perturbée par l’imposition d’instructions de politiciens.
Pour être certain, nous n’avons pas entendu d’argument convaincant de la part des témoins pour que les politiciens interviennent et donnent des directives aux professionnels de la police et de la sécurité. En effet, nous avons entendu des points de vue selon lesquels le statu quo était insatisfaisant pour certains et que la stagnation sur ces questions ne serait pas la bienvenue, mais nous n’avons pas entendu dire qu’il y avait une impasse que seuls des politiciens non experts pouvaient résoudre.
À notre avis, cela signifie qu’il faut donner aux professionnels concernés le mandat et les encouragements nécessaires pour composer un plan qui puisse être soutenu par les divers intervenants et autres parties intéressées — ce qui est, selon nous, le but de la recommandation que nous avons soulignée dans les premiers passages.
En terminant, l’Opposition officielle souhaite exprimer sa gratitude et son respect à l’égard de tous les professionnels, dans divers organismes, qui travaillent fort pour assurer la sécurité du Parlement, de ses invités et des principes de démocratie que l’institution défend. C’est ce même respect qui a guidé notre point de vue sur la question de savoir qui devrait être aux commandes pour l’élaboration de propositions concernant ces questions importantes.
[1] Comité permanent de la procedure et des affaires de la Chambre, Témoignages. 17 mai 2022, page 1.
[2] Idem, page 6.
[3] Comité permanent de la procedure et des affaires de la Chambre, Témoignages, 27 octobre 2022, page 11.
[4] Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, Témoignages, 2 juin 2022 page 9 (accentué).
[5] Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, Témoignages, 27 octobre, 2022, page 13 (accentué).
[6] Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, Témoignages, 9 juin 2022, page 2 (Renée Amilcar, directeur général, département des services de transport en commun, ville d’Ottawa) et page 4 (Patrick Leclerc, General Manager, Société de transport de l’Outaouais).
[7] Idem, page 8 (Mr. Leclerc) (accentué).
[8] Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, Témoignages, 17 mai 2022, page 17 (accentué).
[9] Idem, page 20 (accentué).
[10] Idem, page 18 (accentué).