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TRAN Rapport du Comité

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Photo de Guillaume Rousseau.

Opinion complémentaire

Rapport sur la pénurie de main-d’œuvre dans les transports

Par le bureau de Xavier Barsalou-Duval

Présenté au Comité permanent des transports, de l'infrastructure et des collectivités

Le 23 février 2023

Introduction

Tout d’abord, le Bloc Québécois salue les membres du Comité ainsi que le personnel du comité pour le professionnalisme dont ils ont fait preuve et le travail qu’ils ont accompli au cours de cette étude et remercie tous les témoins et citoyens qui ont nourri le débat sur la pénurie de main-d’œuvre dans le secteur des transports. Nos chaînes logistiques dépendent des centaines de milliers de travailleurs et travailleuses qui acheminent à la sueur de leur front les marchandises que nous et nos industries consommons chaque jour. Reconnaître leur apport inestimable et reconnaître les méthodes pour rendre leurs emplois plus attirants est une partie importante de ce rapport.

Cependant, il est aussi important de reconnaître l’agentivité des provinces dans la recherche de solutions sur la pénurie de main-d’œuvre. Le Bloc Québécois se bat jour après jour pour s’assurer que les compétences des provinces soient respectées et que les efforts du gouvernement fédéral soient concentrés sur les compétences qui lui sont dédiées. Il est donc essentiel de souligner qu’une partie des recommandations du rapport auraient comme effet collatéral une érosion de la compétence exclusive des provinces en ce qui a trait à la formation de la main-d’œuvre.

Les compétences exclusives

La constitution canadienne adoptée en 1982 est le fruit d’une entente entre le gouvernement fédéral et neuf provinces canadiennes. Le Québec, peu importe le gouvernement qui le dirige, n’a jamais apposé sa signature sous le document. La loi constitutionnelle s’applique tout de même sur son territoire et il est attendu que le gouvernement fédéral respecte la séparation des compétences entre les paliers de gouvernement.

L’éducation est une compétence clairement définie comme relavant des gouvernements provinciaux. La question est tranchée sans ambiguïté par la Cour suprême. Il est de l’avis du Bloc Québécois que les recommandations 4, 8 et 15 de ce rapport visent à empiéter sur la compétence exclusive provinciale en éducation. La recommandation 10 de son côté est rédigée de manière à concerner la question de l’éducation, mais à demander une intervention selon le pouvoir fédéral de dépenser, reconnue comme légitime à plusieurs reprises par la Cour suprême. La recommandation 4 par exemple se lit comme suit :

« Que le gouvernement du Canada collabore avec les provinces, les territoires et les intervenants concernés pour harmoniser les programmes de formation et de financement afin de soutenir les postes clés pour tous les modes de transports, et d’établir des programmes visant à uniformiser la désignation des professions et d’assurer leur transférabilité à travers le Canada. »

La réalité du travail dans chacune des provinces, tout particulièrement au Québec, est différente d’ailleurs au Canada. Retirer l’agentivité aux provinces dans la formation de leur main-d’œuvre créerait une main-d’œuvre moins bien adaptée à la réalité du terrain sur lequel elle est appelée à travailler. Il est donc de l’avis du Bloc Québécois que cette recommandation ne pourrait pas être mise en place dans le respect des compétences exclusives des provinces, comme elle demande des interventions directes dans les cursus éducatifs professionnels.

Cannibalisation de la main-d’œuvre

Provinces

Taux de chômage (01/2023)

Ontario

5,2%

Québec

3,9%

Colombie-Britannique

4,4%

Alberta

6%

Manitoba

4,2%

Saskatchewan

4,3%

Les recommandations du rapport qui touchent la formation de la main-d’œuvre visent à aider les travailleurs qui habitent dans une province qui dispose d’un surplus de main-d’œuvre à pouvoir trouver un emploi dans une province qui souffre d’un déficit de main-d’œuvre. On permettrait ainsi au travailleur de trouver un emploi, réduisant les dépenses en service social de la province d’origine et accroissant les revenus de taxation de la province d’arrivée. Cependant, on voit peu de variabilité dans les taux de chômage des provinces de plus d’un million d’habitants. Il n’existe pas de bassin de travailleurs au chômage qui pourraient venir pourvoir les emplois disponibles ailleurs. Les témoins entendus pendant l’étude en comité ont plutôt évoqué la reconnaissance des titres de compétence internationaux :

« Elle [l’Association canadienne des Traversiers] demande également au gouvernement du Canada d’envisager de reconnaître, pour les fonctions d’officier de la marine et d’ingénieur naval, les titres de compétence des pays qui respectent les exigences de l’Organisation maritime internationale. »

Le bassin de travailleurs disponible se trouve en effet à l’extérieur de nos frontières, et c’est plutôt sur la reconnaissance de leurs compétences que le gouvernement fédéral devrait se concentrer pour permettre une réduction temporaire de la pression sur le bassin de main-d’œuvre.

Conclusion

La pénurie de main-d’œuvre dans le secteur des transports met en péril nos chaînes d’approvisionnement et la qualité de vie des travailleurs du secteur, il est important d’y apporter des solutions sérieuses qui respectent le cadre juridique québécois et canadien. Demander au gouvernement fédéral d’agir sur la formation de la main-d’œuvre serait non seulement anticonstitutionnel, mais aussi contre-productif. Les études économiques montrent aussi qu’à moyen ou à long terme, l’immigration ne réduit pas le nombre d’emplois disponibles dans une économie. Il est donc important d’aller plus loin dans la réflexion et inclure des incitatifs à l’accroissement de la productivité comme l’automatisation et la formation continue pour réduire le nombre d’heures de travail nécessaires à l’acheminement de nos biens. Il est aussi important de considérer des allégements fiscaux pour inciter les travailleurs qui le désirent à demeurer sur le marché du travail plus longtemps avant la retraite.