Les procédures financières / Travaux des subsides
Motions de l’opposition : recevabilité; adoption de plusieurs projets de loi à toutes les étapes
Débats, p. 8136-8138
Contexte
Le 21 mars 2007, Peter Van Loan (leader du gouvernement à la Chambre des communes) invoque le Règlement au sujet de la recevabilité d’une motion de l’opposition proposant l’adoption à toutes les étapes des projets de loi C-18, Loi modifiant certaines lois en matière d’identification par les empreintes génétiques; C-22, Loi modifiant le Code criminel (âge de protection) et la Loi sur le casier judiciaire en conséquence; C-23, Loi modifiant le Code criminel (procédure pénale, langue de l’accusé, détermination de la peine et autres modifications) et C-35, Loi modifiant le Code criminel (renversement du fardeau de la preuve relativement à la mise en liberté en cas d’infraction mettant en jeu une arme à feu). La motion est inscrite au Feuilleton des avis au nom de Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce–Lachine). Le leader du gouvernement à la Chambre soutient que la motion fait fi de la prérogative du gouvernement de proposer des initiatives ministérielles et qu’elle cherche à contourner le processus législatif; par conséquent, elle exige le consentement unanime[1]. Le Président statue immédiatement que la motion est irrecevable telle que rédigée et qu’elle ne pourra être proposée le lendemain. Il conclut en déclarant qu’il rendra plus tard une décision officielle[2].
Résolution
Le Président rend sa décision le 29 mars 2007. Il déclare qu’il a jugé la motion irrecevable parce qu’elle contourne les règles et usages encadrant le processus législatif d’une façon qui nuirait à l’étude en bonne et due forme des mesures législatives proposées et qu’elle usurpe la prérogative du gouvernement de décider de son programme législatif et d’organiser les travaux de la Chambre. Citant Bourinot, le Président rappelle aussi à la Chambre les principes fondamentaux de la tradition parlementaire, qui reposent sur une structure équilibrée respectant les droits et les responsabilités du gouvernement et de l’opposition. Il fait aussi remarquer que la Chambre s’est peut-être éloignée, au fil du temps, de l’objectif initial des motions de l’opposition, soit d’exprimer des doléances avant d’adopter des crédits. Il estime qu’avoir recours à une motion de l’opposition pour imposer la clôture ou une attribution de temps relativement à quatre projets de loi distincts est manifestement irrégulier; par conséquent, il se dit d’avis, sans l’ombre d’un doute, que la motion de Mme Jennings, telle qu’elle est inscrite au Feuilleton des avis, est « nettement et indubitablement irrégulière » et, par conséquent, irrecevable.
Décision de la présidence
Le Président : Je suis maintenant prêt à rendre ma décision sur le rappel au Règlement soulevé le mercredi 21 mars dernier par l’honorable leader du gouvernement à la Chambre, qui estime irrecevable la motion de l’opposition inscrite au Feuilleton des avis du 20 mars 2007 au nom de la députée de Notre-Dame-de-Grâce–Lachine.
Je tiens à remercier l’honorable leader du gouvernement à la Chambre des communes d’avoir soulevé cette question, ainsi que les honorables députés de Wascana, de Roberval–Lac-Saint-Jean et de Vancouver-Est de leurs interventions.
Vu la complexité de la question soulevée, j’ai regroupé par sujet les arguments présentés afin de résumer les contributions des leaders parlementaires.
Tout d’abord, il y a la question fondamentale de l’équilibre entre la majorité et la minorité dans les travaux de la Chambre. Ce point a été soulevé par le leader du gouvernement à la Chambre lorsqu’il a déclaré qu’autoriser le débat sur la motion de l’opposition inscrite au Feuilleton des avis priverait « les partis minoritaires […] des possibilités et des protections prévues au Règlement [pour] la tenue d’un débat exhaustif ».
La députée de Vancouver-Est a également fait allusion à cette notion lorsqu’elle a affirmé que « le plus petit parti représenté à la Chambre serait victime de la procédure proposée ».
En deuxième lieu, le principe de la prérogative du gouvernement d’établir l’ordre des initiatives ministérielles a été soulevé. Le leader du gouvernement à la Chambre a cité le paragraphe 40(2) du Règlement qui prévoit que « Les Ordres émanant du gouvernement sont appelés et examinés dans l’ordre établi par le gouvernement. »
En signalant que le Règlement ne peut être écarté provisoirement qu’avec le consentement unanime de la Chambre et sans que cela crée de précédent, le ministre a soutenu que la motion en question visait en réalité à faire adopter des projets de loi sous la rubrique des Travaux des subsides, ce qui va à l’encontre des conventions constitutionnelles qui réservent au gouvernement le droit de proposer des initiatives ministérielles.
Les honorables députés de Wascana et de Roberval–Lac-Saint-Jean ont invoqué respectivement le paragraphe 81(13) du Règlement et La procédure et les usages de la Chambre des communes à la page 724, selon lesquels les motions de l’opposition peuvent avoir trait à, et je cite : « […] toute question relevant de la compétence du Parlement du Canada […] ».
Cela nous amène au troisième point, à savoir, comme l’a souligné l’honorable député de Roberval–Lac-Saint-Jean, le fait que : « Le Règlement donne énormément de latitude aux députés pour les motions de l’opposition présentées lors des jours consacrés à l’étude des subsides […] » et la pratique corrélative de la présidence de ne pas intervenir « à moins que la motion ne soit nettement et indubitablement irrégulière » (c’est-à-dire qu’on ne puisse réellement pas soutenir, du point de vue de la procédure, qu’elle est recevable).
Enfin, la députée de Vancouver-Est a fait valoir que la motion de l’opposition proposée, si elle était adoptée, aurait l’effet d’un projet de loi omnibus, regroupant une série de mesures législatives afin d’en accélérer l’adoption. Ce quatrième point, touchant la complexité de la motion elle-même, doit être examiné séparément.
Comme je l’ai déclaré lorsque j’ai jugé la motion irrecevable, la motion de l’opposition aurait pour effet d’imposer la clôture ou l’attribution de temps à l’égard de quatre projets de loi à la fois, ce qui, à mon avis, serait irrecevable même si c’était le gouvernement qui le proposait.
Si le gouvernement souhaitait faire ce que cette motion tente d’accomplir, il lui faudrait présenter une motion avec le préavis requis et, en l’absence d’une entente entre les partis, il pourrait recourir à la clôture pour disposer de la question; ce qui lui coûterait au moins un jour et demi de séance.
J’aimerais également ajouter que nos précédents, à l’exception de ceux ayant trait au rétablissement des projets de loi, ne permettraient pas à la présidence d’autoriser qu’une motion du gouvernement traite de plus d’un projet de loi dans de telles circonstances. Ainsi, le gouvernement pourrait au mieux, en recourant à cette procédure, accélérer les différentes étapes d’un seul projet de loi à la fois.
Les arguments présentés dans le cas présent touchent l’essence même de la procédure parlementaire et donnent à la présidence une bonne occasion de rappeler à tous les députés les principes fondamentaux qui sous-tendent les travaux que nous accomplissons ici.
Il est précisé, à la page 209 de La procédure et les usages de la Chambre des communes, que la procédure « apparaît d’emblée comme le “moyen” servant à circonscrire l’usage du pouvoir, en même temps qu’un “processus” qui légitime l’exercice du pouvoir et sa contestation ».
Bien entendu, les règles ont évolué au fil du temps. La Chambre a jugé opportun d’adopter occasionnellement des règles pour régir la conduite de ses travaux, et certains changements — notamment la clôture en 1913 et l’attribution de temps en 1969 — ont en réalité donné au gouvernement, lorsqu’il est en situation majoritaire, un contrôle accru de l’avancement de ses travaux. Néanmoins, pour citer de nouveau La procédure et les usages de la Chambre des communes, à la page 210 :
[…] il demeure que la procédure parlementaire vise à établir un équilibre entre la volonté du gouvernement de faire approuver ses mesures par la Chambre, et la responsabilité de l’opposition d’en débattre sans paralyser complètement le déroulement des travaux.
À l’heure actuelle, les Occupants du fauteuil, comme leurs collègues dans les comités de la Chambre, doivent relever quotidiennement le défi que posent les pressions inhérentes à la situation de gouvernement minoritaire. Cependant, ni la réalité politique du moment ni la seule force du nombre ne devraient nous obliger à mettre de côté les valeurs inhérentes aux conventions et aux procédures parlementaires qui régissent nos travaux.
Les députés sont tous bien au courant de situations survenues dans les comités de cette législature où des décisions du président d’un comité, pourtant conformes à la procédure, ont été renversées par la majorité des membres parce qu’elles étaient susceptibles d’appel.
Contrairement aux décisions des présidents de comité, les décisions du Président ne peuvent faire l’objet d’un appel. Voilà donc une raison de plus pour la présidence d’assumer cette lourde responsabilité avec prudence et ainsi de veiller à ce que la Chambre, dans le feu de l’action, ne parte pas dangereusement à la dérive.
La présidence ne doit jamais oublier les principes fondamentaux de notre grande tradition parlementaire — principes décrits admirablement par John George Bourinot, Greffier de cette Chambre de 18[8]0[3] à 1902 :
Protéger la minorité et restreindre l’imprévoyance et la tyrannie de la majorité, régler les affaires d’intérêt public de manière convenable et ordonnée, donner à chaque parlementaire la possibilité d’exprimer son avis dans les limites du décorum et éviter les pertes de temps inutiles, accorder la latitude voulue pour l’examen de chaque mesure et faire en sorte qu’aucune décision législative ne soit prise à la légère ou sur une impulsion soudaine[4].
Dans le cas présent, bien que le gouvernement ne détienne pas une majorité de sièges à la Chambre, il conserve le devoir de lui présenter un programme législatif et il est en droit de s’attendre à pouvoir le faire avec toutes les responsabilités, mais aussi toutes les protections, que lui confère la structure équilibrée du droit parlementaire.
C’est pour cette raison que la question de la prérogative est si importante. Le gouvernement a certaines prérogatives; l’opposition en a d’autres. Notre Règlement prévoit même que les simples députés jouissent de certaines prérogatives. Comme l’indique La procédure et les usages de la Chambre de la Chambre des communes, à la page 390 :
Diverses catégories de travaux se sont créées au cours des ans devant la nécessité de s’adapter à l’organisation du travail à la Chambre. Si certaines sont maintenant réservées au parti ministériel, ou à l’opposition, d’autres sont l’apanage des simples députés […]
Comme l’a souligné le leader du gouvernement à la Chambre, ces prérogatives sont établies par le Règlement. Il a cité le paragraphe 40(2) du Règlement à titre d’exemple, mais il y en a beaucoup d’autres. Seul un ministre peut présenter une motion de clôture ou une motion d’attribution de temps. Seul un ministre peut présenter une motion pour suspendre l’application du Règlement, conformément à l’article 53 de celui-ci. Seul un ministre peut présenter une motion en vertu de l’article 56.1 lorsque le consentement unanime est refusé. La présidence a toujours jugé — il existe des décisions du Président à cet égard qui remontent à 1928, 1944, 1961 et 1982 — que toute motion relative à l’organisation des travaux de la Chambre doit être présentée par le gouvernement.
Bref, comme l’a déclaré le Président Fraser en 1988, et je vous renvoie ici aux Débats du 13 juillet de cette année-là, à la page 17506, c’est, mis à part quelques rares exceptions, la « prérogative indiscutable [du gouvernement] d’arrêter le programme des travaux dont la Chambre est saisie ».
Parallèlement, plusieurs dispositions du Règlement énoncent les prérogatives de l’opposition — l’alinéa 81(4)a) portant sur l’étude du budget des dépenses en comité plénier en est un exemple — et un chapitre entier du Règlement décrit les prérogatives des simples députés quant aux affaires qu’ils peuvent présenter.
Il y a chevauchement de ces prérogatives lors de la présentation des motions de l’opposition pendant les jours désignés. Les travaux des subsides sont l’affaire du gouvernement : celui-ci réserve des « jours des subsides » ou des « jours désignés », au cours desquels l’opposition peut se prévaloir du principe selon lequel, d’après Marleau et Montpetit, « il doit être tenu compte des doléances de la Chambre des communes avant qu’elle examine et approuve les demandes budgétaires de la Couronne », en proposant des motions pour le débat. J’invite les députés à consulter à cet égard La procédure et les usages de la Chambre des communes, à la page [701][5].
Comme nous l’ont rappelé les honorables députés de Wascana et de Roberval–Lac-Saint-Jean, ces motions « peuvent avoir trait à toute question relevant de la compétence du Parlement du Canada ». Les députés se voient accorder « énormément de latitude […] pour les motions de l’opposition présentées lors des jours consacrés à l’étude des subsides et à moins que la motion ne soit nettement et indubitablement irrégulière — c’est-à-dire qu’on ne puisse réellement pas soutenir, du point de vue de la procédure, qu’elle est recevable —, la présidence n’intervient pas ».
Les interventions de la présidence ont, par conséquent, été rares dans le passé et se sont limitées aux cas où une motion était « nettement et indubitablement irrégulière ». À ce sujet, le Président Fraser a déclaré qu’« on ne peut porter atteinte à la liberté de choix du sujet à débattre pendant une journée d’opposition, si ce n’est pour les motifs les plus graves et les moins contestables, sur le plan de la procédure ». On trouvera cette citation à la page 6820 des Débats, le 8 juin 1987.
Néanmoins, rien n’indique de près ou de loin, dans les ouvrages de procédure, que les motions de l’opposition présentées lors des jours des crédits aient été envisagées comme un moyen d’accélérer l’étude de projets de loi figurant ailleurs au Feuilleton. En fait, il est évident, si l’on se fie à l’historique parlementaire, que les motions de l’opposition lors des jours désignés n’ont jamais été perçues comme un moyen de contourner le processus législatif.
Puisque nous nous penchons cet après-midi sur la nature des motions de l’opposition présentées les jours des subsides, permettez-moi d’avancer que ces motions n’ont pas non plus été conçues pour traiter des questions de procédure à la Chambre. Comme l’ont souligné les députés, il est en effet évident que le libellé du paragraphe 81(13) du Règlement est extrêmement large. On peut y lire ceci :
Les motions de l’opposition […] présentées les jours désignés […] peuvent avoir trait à toute question relevant de la compétence du Parlement du Canada […]
Dans le même ordre d’idées, j’ai moi-même affirmé en ma qualité de Président, dans la décision rendue le 31 octobre 2002, que l’opposition « a le droit de proposer la motion de son choix, quelle qu’elle soit, lors d’une journée de l’opposition ». Il n’est donc pas surprenant qu’en s’abritant sous ce très grand parapluie, la Chambre se soit peut-être éloignée de la raison d’être initiale de ce type de motion, à savoir la possibilité d’exprimer ses doléances avant d’adopter des crédits servant à financer le programme de la Couronne. Le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre voudra peut-être revoir ces dispositions du Règlement afin de déterminer s’il y a lieu d’en réviser le libellé pour mieux exprimer leur intention première.
La motion qui nous occupe vise à accélérer simultanément le processus législatif de quatre projets de loi émanant du gouvernement en les réputant adoptés à chaque étape qu’il leur reste à franchir. En cela, elle est semblable, sur le fond et la forme, aux motions des ministres qui visent à accélérer les travaux législatifs de la Chambre. Il existe néanmoins une différence cruciale entre ces deux types de motion : bien que toutes deux visent à être appliquées malgré la procédure et les usages de la Chambre, sauf dans certaines circonstances reconnues — comme le rétablissement de projets de loi au début d’une session —, le gouvernement ne peut généralement pas proposer de telles motions sans avoir obtenu le consentement unanime.
Des motions de ce type permettent au gouvernement de réorganiser les travaux de la Chambre au moyen d’une suspension temporaire du Règlement. Elles témoignent d’une pratique bien établie selon laquelle le gouvernement présente des motions ayant trait à l’organisation des travaux de la Chambre. De plus, ces raccourcis du processus législatif ne peuvent se faire que par le consentement unanime, qui peut être difficile à obtenir à l’égard de l’adoption simultanée de plus d’un projet de loi.
L’exigence très contraignante de consentement unanime constitue une protection essentielle qui garantit que toute mesure présentée à la Chambre sera examinée en profondeur et avec soin. Ce qui est proposé non seulement fait disparaître cette protection, mais également tire parti du régime sévère des jours des subsides. À cet égard, il importe de noter que la priorité est accordée aux motions de l’opposition plutôt qu’aux motions de crédits du gouvernement lors des jours désignés.
En outre, des modifications récentes apportées aux règles relatives à ces motions constituent un régime particulièrement sévère : premièrement, les règles prévoient ce qui correspond en fait à un mécanisme de clôture automatique, puisque la motion est mise aux voix à la fin de la journée, garantissant ainsi la prise d’une décision sur la motion; deuxièmement, aucune modification ne peut être apportée à la motion sans le consentement du motionnaire.
En revanche, toute motion pouvant être présentée par le gouvernement pour accélérer l’étude d’un projet de loi serait sujette à débat et à amendement, et l’imposition d’une attribution de temps ou de la clôture exigerait la mise aux voix d’une question distincte de la motion proposant l’adoption du projet de loi à l’une ou l’autre des étapes du processus législatif.
Tout cela ramène la présidence à l’importante question soulevée par la députée de Vancouver-Est à l’égard de la complexité de la motion. Celle-ci vise à accélérer l’adoption non pas d’un seul mais de quatre projets de loi distincts. Puisqu’il s’agit d’une motion de l’opposition, toute modification exigerait le consentement de son parrain, et le consentement unanime de la Chambre ne serait pas nécessaire pour l’adoption de la motion.
La présidence a été incapable de trouver des exemples d’une motion visant plusieurs projets de loi, même parrainée par le gouvernement, qui aurait été présentée après le préavis requis, à l’exception, comme je l’ai noté plus tôt, des motions visant à rétablir des projets de loi au début d’une session. Même dans ces cas, le pouvoir du Président de scinder ces motions ne peut être contesté.
À cet égard, je renvoie les honorables députés aux pages 299 et 300 des Débats du 4 octobre 2002. J’avais alors jugé qu’une telle motion pouvait effectivement être scindée, et j’avais cité à cet égard la page 478 de La procédure et les usages de la Chambre des communes, où l’on retrouve le passage suivant :
Lorsqu’on présente à la Chambre une motion complexe (par exemple, une motion contenant deux parties ou davantage, chacune pouvant constituer une motion distincte), le Président a le pouvoir de la modifier et, partant, de faciliter le processus décisionnel de la Chambre.
Cette citation est confirmée par deux décisions, la première rendue par le Président Macnaughton en 1964, que l’on trouvera aux pages 427 à 431 des Journaux, le 15 juin 1964, et la deuxième, par le Président Fraser en 1991, que l’on trouvera à la page 19312 des Débats, le 10 avril 1991.
Il fait peu de doute que la motion de la députée de Notre-Dame-de-Grâce–Lachine est complexe, dans la mesure où elle vise quatre projets de loi distincts qui seraient adoptés et, pour certains, qui franchiraient plusieurs étapes, au moyen d’un seul vote de la Chambre. Cette motion entend visiblement contourner les règles et les usages qui encadrent le processus législatif, d’une façon qui nuirait à l’étude en bonne et due forme des mesures législatives proposées.
En contournant le processus législatif, en interrompant l’étude des projets de loi en comité et en éliminant les possibilités d’amendement aux diverses étapes du processus législatif sans l’obligation d’obtenir le consentement unanime, il faut peu d’imagination pour comprendre que des motions de l’opposition semblables à cette motion pourraient être utilisées pour priver le gouvernement de la faculté d’exercer un véritable contrôle sur le contenu et l’avancement de ses projets de loi après leur dépôt devant la Chambre. Il en résulterait non seulement une violation de l’esprit des travaux des subsides, mais aussi une ingérence manifeste dans la « prérogative indiscutable » du gouvernement, ce qui serait absolument contraire aux quelques exceptions envisagées par La procédure et les usages de la Chambre des communes et d’autres ouvrages de procédure.
À titre d’analogie, les députés voudront peut-être imaginer quelle serait leur réaction si le gouvernement tentait de s’ingérer de la même façon dans l’étude des Affaires émanant des députés. La présidence est d’avis que n’importe lequel des scénarios d’usurpation suivants — l’opposition qui cherche à s’emparer du programme des travaux du gouvernement ou le gouvernement qui cherche à s’emparer du programme de l’opposition ou de celui des Affaires émanant des députés — pourrait être raisonnablement qualifié de « tyrannie de la majorité » d’un genre que personne, pas même M. Bourinot, n’aurait pu imaginer.
En ma qualité de Président, il est de mon devoir de vous rappeler certains des principes fondamentaux de la procédure parlementaire. Il appartient maintenant à la Chambre de déterminer de quelle façon elle veut voir ses procédures évoluer. Entre-temps, la présidence est d’avis, sans l’ombre d’un doute, que la motion de la députée de Notre-Dame-de-Grâce–Lachine telle qu’elle était inscrite au Feuilleton des avis était « nettement et indubitablement irrégulière » et, par conséquent, irrecevable.
Je suis désolé d’avoir pris tout ce temps pour exposer mes motifs à la Chambre, mais comme il s’agit selon moi d’une question importante, je voulais que l’opinion du Président à ce sujet soit bien claire.
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[1] Débats, 21 mars 2007, p. 7729-7734.
[2] Débats, 21 mars 2007, p. 7734-7735.
[3] Les Débats publiés indiquaient originalement 1890 au lieu de 1880.
[4] Bourinot, J.G., Parliamentary Procedure and Practice in the Dominion of Canada, 2e éd., rev. et augm., Montréal : Dawson Brothers, Publishers, 1892, p. 258-259.
[5] Les Débats publiés indiquaient 722 au lieu de 701.