Recueil de décisions du Président Peter Milliken 2001 - 2011

Les procédures financières / Comptes du Canada

Les Comptes publics du Canada : hauts fonctionnaires du Parlement; fonds dépensés sans l’autorisation du Parlement

Débats, p. 8723-8724

Contexte

Le 2 octobre 2003, John Williams (St. Albert) invoque le Règlement au sujet de certains fonds que, selon la vérificatrice générale, le Commissariat à la protection de la vie privée aurait dépensés au cours de l’exercice 2002-2003 sans l’autorisation du Parlement[1]. M. Williams cite un rapport de la vérificatrice générale dans lequel elle constate que malgré l’obligation qu’ont les organisations fédérales de présenter des états financiers complets, exacts et fidèles, le Commissariat à la protection de la vie privée a omis de le faire. Comme la Loi sur la gestion des finances publiques interdit tout paiement du Trésor sans l’autorisation du Parlement, M. Williams se demande comment cet excédent de dépenses a pu survenir. Il soutient que le gouvernement devra résoudre le problème que constitue le fait d’obtenir l’approbation du Parlement pour des fonds qui ont été dépensés en 2002-2003. Le 6 octobre 2003, Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes) répond au rappel au Règlement de M. Williams. Il déclare que le gouvernement corrigera l’excédent de dépenses selon un processus d’autorisation clair prévu par la Loi sur la gestion des finances publiques et les politiques du Conseil du Trésor. Le Président prend l’affaire en délibéré[2].

Résolution

Le 24 octobre 2003, le Président rend sa décision. Il affirme que son rôle dans l’affaire se limite à déterminer s’il y a eu manquement aux règles et usages de la Chambre. Il déclare qu’il ne possède aucun élément de preuve pouvant l’amener à conclure à une tentative directe d’induire les députés en erreur et souligne que le leader du gouvernement à la Chambre a assuré la Chambre que le poste budgétaire figurerait correctement dans les Comptes publics, qui seront déposés plus tard au cours de l’exercice. Il constate avec regret qu’encore une fois, les députés ont eu de la difficulté à obtenir les renseignements dont ils ont besoin dans les documents du Budget. Toutefois, il conclut qu’il n’y a pas eu manquement aux règles de la Chambre.

Décision de la présidence

Le Président : Je suis maintenant prêt à rendre ma décision sur le rappel au Règlement soulevé le 2 octobre 2003 par l’honorable député de St. Albert, qui soutient que le Commissariat à la protection de la vie privée aurait dépassé les crédits accordés par la Chambre. Je tiens à remercier le député de St. Albert qui a soulevé cette question, ainsi que le leader du gouvernement à la Chambre pour ses observations.

À l’appui de ses prétentions, le député de St. Albert a cité le « Rapport sur le Commissariat à la protection de la vie privée du Canada » présenté par la vérificatrice générale. Le Rapport mentionne que le Commissariat à la protection de la vie privée ne s’est pas conformé à l’exigence, applicable aux organisations fédérales, de soumettre des états financiers qui sont complets, exacts et fidèles.

Plus particulièrement, le paragraphe 111 précise ce qui suit :

Nous avons constaté que, malgré ces exigences, les responsables de la préparation des états financiers de l’exercice se terminant le 31 mars 2003 du Commissariat, soit le directeur des services financiers, le chef du personnel et le directeur exécutif, ont sciemment omis des créditeurs à la fin de l’exercice d’environ 234 000 $.

Le rapport conclut comme suit, au paragraphe 112 :

Cette omission a induit le Parlement en erreur parce qu’elle donnait l’impression que le Commissariat n’avait dépensé que les montants autorisés par le Parlement pour l’exercice 2002-2003.

Le 2 octobre dernier, le leader du gouvernement à la Chambre a indiqué qu’il vérifierait pour s’assurer que les renseignements fournis à la Chambre étaient exacts. Le 6 octobre, l’honorable ministre a précisé devant la Chambre la procédure qu’applique le gouvernement dans de tels cas. Dans ses remarques, le leader du gouvernement à la Chambre a souligné que la façon de traiter le dépassement de crédits est bien établie, tant dans les lignes directrices du Conseil du Trésor que dans la Loi sur la gestion des finances publiques.

Selon le paragraphe 37.1(4) de la Loi sur la gestion des finances publiques :

Le montant excédentaire qui résulte d’un paiement effectué […] pour une dépense supérieure à un crédit est débité au crédit disponible pour le prochain exercice.

Le leader du gouvernement à la Chambre a alors affirmé ce qui suit :

Par conséquent, la somme de 234 000 $ sera inscrite dans les Comptes publics pour 2002-2003, puisque cette dépense a été engagée au cours de cette période.
Il en résultera l’inscription, dans les Comptes publics de 2002-2003, d’un dépassement de crédits, en l’occurrence le crédit 45 du Commissariat à la protection de la vie privée, d’environ 234 000 $ […] 

Les députés savent déjà que le Parlement doit approuver les fonds demandés dans le budget des dépenses. Le gouvernement ne peut dépenser que les sommes que le Parlement lui a accordées, et il ne peut les employer qu’aux fins auxquelles elles ont été accordées. En ce qui concerne le contrôle des dépenses du gouvernement, La procédure et les usages de la Chambre des communes mentionne ce qui suit à la page 698 :

D’abord, le Parlement doit approuver toutes les mesures législatives donnant application à la politique gouvernementale et la Chambre des communes autorise à la fois le montant et l’objet ou la fin de toute dépense publique. Ensuite, par un examen des rapports annuels des ministères sur leur rendement, des Comptes publics et des rapports du vérificateur général, la Chambre s’assure que seules ont été effectuées les dépenses qu’elle avait autorisées.

Le député de St. Albert ainsi que le leader du gouvernement à la Chambre reconnaissent que le Commissariat à la protection de la vie privée a dépassé de 234 000 $ les fonds accordés au titre du crédit 45 pour 2002-2003. Ce point n’est pas contesté.

Le député de St. Albert prétend que cela posera un problème au président du Conseil du Trésor. Le leader du gouvernement à la Chambre soutient que la situation sera traitée au moment opportun, lorsque les Comptes publics de 2002-2003 seront publiés conformément aux lignes directrices en vigueur au Conseil du Trésor et aux dispositions de la Loi sur la gestion des finances publiques.

Les députés savent bien que le rôle du Président est limité. Selon La procédure et les usages de la Chambre des communes, à la page 261, et je cite :

Malgré l’autorité considérable que détient le Président, il ne peut exercer que les pouvoirs que lui confère la Chambre, dans les limites établies par cette dernière. Lorsqu’il rend ses décisions sur les questions de procédure, le Président s’en tient strictement à ce principe […]

La question sur laquelle je dois me prononcer en tant que Président est de savoir si l’on a enfreint de quelque façon les règles ou les usages de la Chambre. Or, cette plainte est présentée à un moment assez problématique pour la présidence puisqu’elle traite de difficultés éventuelles. Ainsi, par exemple, la vérificatrice générale a laissé entendre que la Chambre sera induite en erreur, alors que le leader du gouvernement à la Chambre a assuré à la Chambre que l’élément en question figurera correctement aux Comptes publics. Même le député de St. Albert semblait convaincu que le commissaire à la protection de la vie privée par intérim prend les mesures nécessaires pour s’assurer que cela sera fait.

Le 12 juin 2003, lorsqu’elle a approuvé le Budget principal des dépenses pour l’exercice 2003-2004, cette Chambre a accordé au Commissariat à la protection de la vie privée la somme de 9,8 millions de dollars au crédit 45. Les députés voudront certainement savoir si la somme de 234 000 $ a été débitée du crédit disponible, comme l’exige la Loi sur la gestion des finances publiques.

Bien que la présidence n’ait aucun élément de preuve d’une tentative directe d’induire les députés en erreur, il est regrettable, à mon avis, de constater encore une fois que les députés ont eu de la difficulté à obtenir les renseignements dont ils avaient besoin dans les documents du Budget. Même si le dépassement de crédit figurera aux Comptes publics pour l’exercice 2002-2003, les députés n’ont normalement pas accès aux Comptes publics lorsqu’ils examinent le Budget principal des dépenses pour l’exercice suivant. Je sais que de nombreux députés estimeraient utile d’être informés de cas de ce genre avant d’avoir terminé l’examen du Budget principal des dépenses.

Je tiens à féliciter l’honorable député de St. Albert : sa vigilance à l’égard de ces questions lui fait honneur et fait honneur à la Chambre. Pour le moment, cependant, rien ne me permet de conclure qu’il y a eu manquement aux règles de la Chambre.

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[1] Débats, 2 octobre 2003, p. 8115-8116.

[2] Débats, 6 octobre 2003, p. 8212-8213.

Pour des questions au sujet de la procédure parlementaire, communiquez avec la Direction des recherches pour le Bureau

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