Les comités / Pouvoirs des comités
Convocation de personnes : refus du gouvernement de laisser des fonctionnaires comparaître devant un comité (groupe ad hoc) spécial
Débats, p. 6846-6847
Contexte
Le 1er novembre 2001, John Bryden (Ancaster–Dundas–Flamborough–Aldershot) soulève une question de privilège au sujet des travaux d’un comité spécial composé de députés des deux côtés de la Chambre, dont lui-même, étudiant la Loi sur l’accès à l’information. M. Bryden, concédant que sa question sort peut-être du cadre des règles parlementaires, fait valoir que lui et ses collègues du comité ont été empêchés d’entendre des fonctionnaires du gouvernement et de sociétés d’État parce que le gouvernement leur avait donné l’ordre de ne pas comparaître devant le comité. Il ajoute que le comité spécial a été formé dans des « circonstances exceptionnelles », afin qu’il entreprenne une étude et présente son rapport avant que ne le fasse, à l’automne, un « groupe de travail bureaucratique », ce qui a forcé le comité à se réunir pendant le congé parlementaire estival. M. Bryden ajoute que le comité a bien tenu des audiences au cours de l’été et rédigé un rapport. Il termine son intervention en laissant entendre qu’on l’a empêché de s’acquitter de son devoir parlementaire et que, par conséquent, on a porté atteinte à son privilège. Geoff Regan (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes) déclare que le privilège s’applique seulement dans le contexte des délibérations du Parlement, ce dont ne fait pas partie le comité spécial. Donc, précise-t-il, on n’a pu porter atteinte au privilège de M. Bryden. M. Regan précise aussi que, contrairement à ce que M. Bryden prétend, le gouvernement était disposé à ce que les fonctionnaires informent les membres du comité en privé, plutôt qu’en public comme l’exigeait M. Bryden, et cite à l’appui une lettre envoyée par Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes) à M. Bryden, ajoutant que le gouvernement tenait à informer le comité spécial en privé pour éviter d’influer sur certains cas d’accès à l’information faisant l’objet d’un litige à ce moment-là[1].
Résolution
Le Président statue immédiatement qu’il ne s’agit pas d’une question de privilège, puisque, bien que les députés jouissent de certains privilèges, ils n’ont pas le droit de convoquer un fonctionnaire et d’insister pour qu’il réponde à des questions devant un comité spécial. Il ajoute que si le député avait voulu constituer un comité de la Chambre, il aurait pu présenter une motion d’initiative parlementaire en ce sens, ce qui aurait habilité ce comité à convoquer des personnes et à exiger la production de documents et de dossiers. Le Président conclut en disant que le groupe spécial n’avait pas le pouvoir de sommer des fonctionnaires de comparaître et qu’il était donc légitime que ceux-ci refusent.
Décision de la présidence
Le Président : La présidence tient à remercier l’honorable secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre ainsi que le député d’Ancaster–Dundas–Flamborough–Aldershot pour avoir porté cette question à l’attention de la Chambre.
Je suis d’avis que la question a été soulevée dans les plus brefs délais, étant donné que le député a délibérément attendu que son rapport soit prêt, de sorte que sa question de privilège avait atteint tout son développement lorsqu’il l’a signalée à la Chambre.
Puisqu’en attirant l’attention de la Chambre, il a laissé entendre qu’il s’agissait d’une question de privilège, je dois dire qu’à mon avis, ce n’est pas une question de privilège.
Le député qui soulève cette question est un député d’expérience. Il sait fort bien que les députés jouissent de certains privilèges, mais je doute qu’un d’entre nous ait le droit de convoquer un fonctionnaire et d’insister pour qu’il réponde à des questions. C’est ce que prétend le député, puisqu’il a lui-même déclaré que le comité qu’il présidait était un groupe spécial de députés. De toute évidence, il ne s’agissait pas d’un comité de la Chambre. S’il avait souhaité qu’un comité soit formé, il aurait pu déposer une motion d’initiative parlementaire ayant pour objet d’établir un comité précisément chargé d’étudier les questions et les documents sur lesquels s’est justement penché son groupe spécial.
Si le député avait agi ainsi, je suis certain que la motion visant à créer un comité aurait habilité celui-ci, conformément au paragraphe 108(1) du Règlement, à convoquer des personnes et à exiger la production de documents et dossiers. Ce pouvoir extraordinaire dont disposent nos comités aurait permis à son comité de convoquer les personnes voulues, indépendamment de ce que le leader du gouvernement à la Chambre aurait pu dire quant à leur comparution ou leur non-comparution, parce que, si elles n’avaient pas comparu, le comité aurait pu signaler l’affaire à la Chambre. Évidemment, la Chambre aurait alors sommé les personnes en question de comparaître devant elle pour y être réprimandées pour outrage au Parlement.
Une voix : Pour y recevoir le fouet.
Le Président : Un député parle de fouetter les coupables. Cela ne fait pas partie de notre assortiment de punitions, mais il reste que la Chambre peut sommer des gens de comparaître devant elle afin d’y être réprimandés pour outrage au Parlement.
Évidemment, le groupe spécial n’avait pas de pouvoirs de cette nature et, à mon avis, il était parfaitement légitime que certains refusent la comparution de ces personnes ou que celles-ci refusent de comparaître, soit parce qu’on leur en avait donné l’ordre ou parce qu’elles avaient d’elles-mêmes décidé de ne pas comparaître, le groupe spécial n’ayant aucun pouvoir pour les y obliger.
Dans ces circonstances, il m’est impossible de déclarer qu’il y a eu atteinte aux privilèges du député. Je l’exhorte donc, à l’avenir, à recourir aux autres moyens dont lui et tous les députés disposent pour faire valoir leurs revendications, par l’entremise d’un comité parlementaire possédant tous les merveilleux pouvoirs conférés à ces comités.
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[1] Débats, 1er novembre 2001, p. 6845-6846.