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Opinion dissidente du Parti réformiste

au

Comité permanent des comptes publics


24 octobre 1996




Respectueusement soumis par :

Jim Silye, député
John Williams, député



C'est à regret que le Parti réformiste du Canada dépose ce rapport minoritaire. Il espérait que, après avoir examiné le chapitre 1 du rapport du vérificateur général de mai 1996 et questionné des témoins à son sujet, les membres du Comité déposeraient un rapport unanime. Malheureusement, les trois partis n'en sont pas venus aux mêmes conclusions.

Dans son rapport, le vérificateur général soulève les questions de l'imposition des biens canadiens imposables qui sortent du Canada et du processus des décisions anticipées en matière d'impôt.

Les auteurs du rapport majoritaire exposent correctement les mesures que le ministère des Finances a prises pour clarifier les dispositions fiscales ambiguës concernant l'imposition des émigrants et colmater les échappatoires concernant l'imposition de biens canadiens au moment de l'émigration d'un contribuable.

Cependant, lorsqu'il s'agit de décrire ce qui s'est passé en 1991, ils omettent ou négligent certains faits et, par conséquent, tirent des conclusions fort différentes des nôtres.

Dans la section intitulée Documentation, ils trouvent préoccupant le manque de documentation, mais n'explique pas pourquoi. La documentation de Revenu Canada est claire et abondante jusqu'aux réunions du 23 décembre 1991, le jour où la décision finale a été rendue. Mais il n'existe aucun compte rendu des réunions qui ont eu lieu ce jour-là.

La décision finale va à l'encontre de toutes les opinions documentées avant le 23 décembre 1991, lesquelles montrent montre clairement que Revenu Canada s'opposait à une décision favorable au contribuable.

Dans les notes de service qu'ils lui ont envoyées le 18 et le 20 décembre 1991, les hauts fonctionnaires informent le sous-ministre du Revenu national que le ministère n'est pas en mesure de rendre une décision favorable. En fait, même le Comité d'examen des décisions de Revenu Canada a décidé, le 12 décembre 1991, qu'il ne fallait pas rendre une décision favorable.

En l'absence de comptes rendus des réunions du 23 décembre 1991, réunions auxquelles les ministères des Finances et de la Justice sont apparemment parvenus à régler la question de politique et les questions juridiques, rien ne prouve que des arguments contraires ont été examinés et il n'y a pas de lien entre les recommandations portant jusqu'à cette date de rendre une décision défavorable et d'autres analyses et documents. Le vérificateur général craint que la décision fiscale relative à l'opération n'ait frustré l'intention du législateur.

En outre, la preuve montre que, pour rendre l'opération acceptable, Revenu Canada a rendu une décision favorable à condition que le contribuable fournisse une renonciation et prenne l'engagement de ne pas invoquer le traité fiscal entre le Canada et les États-Unis. Il en ressort clairement que, jusqu'au 23 décembre 1991, Revenu Canada avait raison de croire que les opérations envisagées frustraient l'intention du législateur. Mais qu'est-ce qui s'est passé le 23 décembre 1991????

Dans son rapport, le vérificateur général se demande également si, étant donné que le contribuable avait déjà effectué une partie de l'opération, les fonctionnaires du ministère n'ont pas enfreint la politique sur les décisions anticipées en matière d'impôt sur le revenu. Une fois une opération terminée, Revenu Canada ne peut pas rendre une décision anticipée puisqu'il se trouve devant un fait accompli.

Les auteurs du rapport majoritaire essaient d'excuser les fonctionnaires du ministère en faisant ressortir l'ambiguïté de la législation. Les fonctionnaires soutiennent qu'ils examinaient des opérations proposées. Cependant, ils admettent que, pour rendre l'opération acceptable, ils se sont entendus avec le contribuable pour qu'ils fournissent une renonciation et un engagement. Cette entente parallèle à la décision prouve que, en fait, l'opération avait été effectuée. Il semble donc qu'une décision anticipée en matière d'impôt n'était pas de mise et enfreignait la politique ministérielle et qu'elle n'aurait pas dû être rendue.

La décision est une erreur de la part des fonctionnaires et elle est injuste à l'égard des autres contribuables d'autant plus qu'elle n'a été rendue publique que plusieurs années après. Par conséquent, les autres contribuables étaient dans l'ignorance des actions du ministère et des avantages dont avaient bénéficié ceux qui sont visés par la décision. Lorsque la décision a été rendue publique, l'obligation de fournir une renonciation et un engagement a été passée sous silence.

En critiquant la façon dont le ministère s'est comporté dans cette affaire, nous ne faisons pas un procès d'intention aux fonctionnaires concernés ni ne remettons en doute leur intégrité ni ne suggérons qu'ils ont fait quelque chose de répréhensible en rendant cette décision, mais nous croyons qu'ils se sont trompés et qu'il y a eu irrégularité dans le processus décisionnaire.

Nous croyons que Revenu Canada aurait dû, en consultation avec le ministère des Finances et le ministère de la Justice, informer le contribuable que la décision demandée était impossible parce que la fiducie ayant procédé à la disposition ne résidait pas au Canada depuis dix ans et que, par conséquent, les gains en capital étaient imposables lorsque les biens ont été transférés à l'étranger.

Nous croyons que Revenu Canada n'aurait pas dû rendre une décision favorable du fait qu'il a exigé une renonciation et un engagement comme condition préalable. Les fonctionnaires de Revenu Canada savaient que la renonciation n'était pas exécutoire. L'entente parallèle est un passif éventuel pour les décisions anticipées à venir, car il s'agit d'un précédent que pourront invoquer les contribuables pour obtenir les mêmes conditions.

Ce qui est en jeu, c'est l'intégrité et l'équité du régime fiscal et, en l'occurrence, il faut reprocher aux fonctionnaires responsables de la décision finale ce qui suit :

Ces facteurs donnent lieu de craindre qu'une entente spéciale intervenue entre Revenu Canada et un contribuable ne permette à des fonctionnaires de réduire par inadvertance l'assiette fiscale et de violer le principe fondamental voulant que le droit d'imposer ou non un bien relève du Parlement.

En conclusion, nous ne croyons pas qu'il ait été répondu de façon satisfaisante aux préoccupations du vérificateur général. Le gouvernement a clarifié la législation et supprimé les ambiguïtés au moyen d'une motion de voies et moyens qu'il a déposée à la Chambre des communes malgré sa répugnance à examiner ce qui s'est passé en 1991.

En fin de compte, nous devons remercier le vérificateur général d'avoir porté cette question à l'attention du Parlement sans quoi nous n'aurions peut-être jamais eu cette clarification du traitement fiscal de biens canadiens imposables qui sortent du pays.

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