ORIENTATIONS FUTURES
De nombreux témoins se sont dits d'avis que le Canada devrait se donner de grands objectifs pour le XXIe siècle, car la nouvelle économie sera fondée sur le savoir. Pratiquement tous les participants ont convenu qu'à l'avenir, la création de la richesse reposera sur les industries du savoir lesquelles, par ailleurs, nécessitent une solide assise en R-D.
Il a été signalé au Comité que bon nombre des concurrents du Canada ont effectué un exercice de prévision afin de choisir cinq ou six technologies avant gardistes et prometteuses. Voici les priorités établies au moyen de trois études.
Grande-Bretagne - Priorités globales de S-T
|
Japon-Allemagne Sujets de sondage
|
Australie - Domaines clés
|
Exploitation de la future
technologie des communications
et de l'informatique
|
Microélectronique et société de
l'information
|
Technologie de l'information et
des communications
|
Dépollution
|
Projets de dépollution
|
Environnement
|
Procédés et produits de la biotechnologie
|
Sciences de la vie et le système
de santé de demain
|
Génétique et biotechnologie
|
Précision et maîtrise de la gestion
|
|
|
Matériaux, synthèse et procédés
nouveaux
|
Matériaux et procédés futurs
|
|
|
|
Mondialisation
|
J'aimerais également dire que M. Arthur Carty, président du Conseil national de recherches du Canada, a prononcé un exposé sur les stratégies adoptées par d'autres pays - l'Allemagne, le Japon, par exemple - et les priorités retenues dans ces pays, et lorsqu'on en est arrivé à la diapositive illustrant la situation au Canada, on a constaté qu'il n'y avait pas de priorités ici. Il a effectivement précisé que celles-ci restaient à fixer. L'observation est juste. Cela reste à faire, mais quand cela va-t-il se produire? Nous allons prendre tellement de retard par rapport au reste du monde, qu'il ne nous restera plus beaucoup de secteurs auxquels consacrer nos efforts.
Des témoins ont également traité de l'importance des technologies émergentes, c'est-à-dire qui peuvent modifier les fondements de la concurrence dans les industries en place ou par la création de nouvelles industries. Bon nombre de participants sont d'avis que le Canada devrait privilégier les secteurs de l'agroalimentaire, des télécommunications, du génie biomédical et de la biotechnologie. Ce sont-là des secteurs pour lesquels l'expertise canadienne est forte. Certains sont d'avis qu'il y a lieu de réaliser une étude de prévision pour choisir les cinq ou six technologies d'avant-garde qui sont les plus prometteuses au Canada.
Reconnaissez ensuite qu'il y a des gagnants et des perdants dans le jeu de la haute technologie au Canada. On ne peut pas intervenir partout et dans tous les domaines. Choisissez cinq ou six industries prioritaires pour ensuite les aider, les appuyer, les encadrer et les renforcer sur un plan macro-économique de manière à ce qu'elles se développent avec succès.
Nous devons choisir un certain nombre de gagnants au sein de cette «société canadienne inc.» parce que nous ne pouvons pas tout faire dans tous les domaines.
Des participants ont également avisé le Comité de porter une attention particulière à l'élaboration d'une liste de besoins que l'industrie perçoit pour le long terme, car celle-ci se préoccupe essentiellement du rendement à court terme.
En ce qui concerne les questions qui découlent directement de votre mandat - soit les industries critiques et les technologies de demain - ne vous tournez pas vers les milieux d'affaires pour obtenir des réponses. Les milieux d'affaires ont un instinct de survie à très court terme, fondé sur un plan annuel. Une entreprise peut avoir un plan de cinq ans ou un plan de dix ans, mais elle n'est pas habilitée à rêver aux techniques qui seront notre gagne-pain dans les 100 années à venir. Pour la plupart, les entreprises ne réfléchissent pas du tout de cette façon.
J'arguerais qu'il vous faut vous tourner vers ce secteur de notre population qui est libre d'examiner ces questions ou qui a l'intelligence ou la formation requise. En d'autres termes, adressez-vous à la communauté des chercheurs.
Veillez néanmoins à ce que leur processus de réflexion ait une certaine pertinence, ce qui me ramène à la nécessité qu'ils élargissent leurs intérêts pour examiner les conséquences économiques de ce qu'ils font.
Il a bien été précisé que le gouvernement ne peut offrir à toutes les entreprises de tous les secteurs une aide en matière de recherche et de ressources techniques. Des participants se sont en outre dits d'avis que le Canada devrait, en collaboration avec l'industrie et les milieux universitaires, se donner de grands objectifs pour 2010 en partant des cinq ou six secteurs clés retenus par une étude de prévision, puis établir un plan qui en assurera la réalisation. On a ajouté que le plan ne devait pas être figé et qu'il faudrait l'actualiser à intervalles réguliers. De nombreux participants ont affirmé qu'en vue de diriger le pays vers une Vision 2010, il y aurait lieu de mettre l'accent sur le système et le processus d'innovation et non seulement sur la R-D.
Nous devons viser la valeur et nous devons, ensemble, formuler une vision nationale tellement emballante et convaincante que tout le monde voudra y adhérer. C'est cela le leadership! Le leadership c'est instaurer une vision de l'avenir qui soit tellement emballante et convaincante que tout le monde veuille y adhérer. Mais voilà, mesdames et messieurs, nous n'avons pas de vision de ce que sera le Canada en l'an 2010 ou 2020.
Nous devons commencer par là et penser à un créneau : la science et la technologie. Nous devons imaginer les symboles qui conviendront. Nous devons consacrer les gagnants, conférer un esprit de réussite à tout cela et retenir les leçons que nous avons apprises aujourd'hui à propos de Newbridge Networks et de son approche. Nous avons déjà tiré des enseignements, tous les morceaux sont en place il ne nous manque plus que le désir d'agir. [. . .] Ne concevez pas l'année 2010 sur le modèle de l'année 1996. Transposez-vous en l'an 2010 et élaborez la stratégie nécessaire à partir de 1996. C'est le monde dans lequel nous allons devoir lutter. L'avenir [. . .] ce sont les années 2010 et 2020, et c'est à ce moment-là que le Canada devra faire sa marque. [. . .]
[F]aites véritablement porter votre effort sur les [technologies] que vous avez ciblées et développez des contacts et des connaissances approfondies dans les industries correspondantes. Contribuez ensuite à les encadrer et à leur apporter les outils nécessaires, en envoyant un message de soutien et d'encouragement à ces industries. Ce sont elles qui créeront ensuite les emplois.
[N]otre pays n'a pas pris de véritable résolution et n'a pas déclaré son intention de figurer parmi les six premières nations au monde dans le domaine des sciences et de la technologie.
Plusieurs participants ont fait remarquer que lorsque le Canada se sera donné de grands objectifs à long terme, les universités et l'industrie n'hésiteront pas à acquérir et à exploiter l'innovation dans tous les secteurs liés à ces objectifs. Dans la même veine, il a été mentionné que la stratégie fiscale du Canada devrait viser à favoriser l'innovation et la création de nouvelles entreprises dans les cinq ou six secteurs clés.
On a ajouté qu'un système d'évaluation de la propriété et du capital intellectuels et qu'un «indice d'innovation» favoriseraient l'innovation.
Mon expérience, [. . .] m'a appris [. . .] que l'innovation, le capital intellectuel, la recherche et le développement sont très difficiles à mesurer au niveau de la compagnie et dans le contexte de l'économie dans son ensemble, même si mon travail ne m'amène pas à intervenir dans ce domaine. Au niveau de la compagnie, ces nouveaux avoirs critiques sont très difficiles à mesurer. Nos anciens systèmes ne fonctionnent pas très bien. Il nous faut de nouveaux outils et de nouvelles méthodes de mesure. [. . .] Comme Tom Peters, l'un des grands professeurs de gestion et gourous en matière de consultation, l'a, je pense, dit, ce qui est mesuré est géré et est fait. Si votre principal avoir est un capital intellectuel invisible et intangible que vous avez beaucoup de mal à mesurer, alors il vous sera très difficile de le gérer.
Nous avons de la difficulté à mesurer l'innovation et à définir les critères de mesure correspondants. Prenons l'exemple de l'industrie du textile. Alors que cette industrie est en grande partie considérée comme un secteur de fabrication traditionnel qui investit peu dans la R-D, le secteur des textiles est l'un des chefs de file au Canada pour ce qui est des découvertes canadiennes et de l'introduction des innovations à l'échelle mondiale. Le textile passe avant des secteurs comme les machines, le papier et les produits légers, le caoutchouc, les plastiques et le matériel de transport [. . .]. Par ailleurs, le secteur du textile achète et utilise des machines et de l'équipement à la pointe de la technique dans le cadre de ses opérations de fabrication. On facilite évidemment l'innovation dans l'industrie lorsqu'on se tient au courant de ces nouvelles techniques, lorsqu'on les utilise et lorsqu'on les diffuse, mais il n'en reste pas moins que nos statistiques ne rendent pas bien compte de ce genre d'activité novatrice.
[I]l nous faut des mécanismes permettant de connaître les montants investis dans l'innovation et les résultats tangibles obtenus. Tout le monde ici s'accorde à dire que c'est très difficile à mesurer. Comment mesure-t-on ces choses, etc.?
Il faut néanmoins le faire. Il nous faut une comptabilité transparente. Peut-être faudrait-il une espèce d'indice de l'innovation ou des sciences et de la technologie, publié annuellement - par exemple, où notre pays se situe-t-il par rapport aux dix facteurs clés suivants, qu'il s'agisse du nombre de spécialistes formés et placés dans les entreprises, ou du montant des redevances d'exploitation produites par des technologies que le gouvernement et les universités ont réussi à transférer au secteur privé, le secteur privé s'engageant en retour à verser des redevances - pas des sommes aussi grandes qu'elles deviennent une barrière, mais assez pour indiquer que le secteur privé trouve quelque utilité à ces technologies.
Un projet faisant partie du plan des sciences et de la technologie du gouvernement comprend une série d'études menées par Statistique Canada pour évaluer divers facteurs liés à l'innovation.
Nous menons une enquête pour mesurer les activités innovatrices d'entreprises oeuvrant dans le secteur des services [. . .] nous voulons savoir quelles activités innovatrices sont en cours dans ce secteur. Nous allons également interroger les gens au sujet de l'impact des programmes gouvernementaux [. . .] nous nous penchons sur la R-D en matière de logiciels, sur la biotechnologie, [. . .] sur la réduction et le contrôle de la pollution. [. . .] Nous nous penchons sur la propriété intellectuelle ainsi que sur le commerce des marchandises [. . .]. Nous sommes en train de préparer un cadre en vue de faire en sorte que ces nouveaux indicateurs que nous essayons d'intégrer soient plus faciles à comprendre, de dresser un tableau des activités en matière de science et de technologie au Canada et d'appuyer le débat que vous voudrez peut-être avoir au Parlement.
Des participants ont mentionné au Comité que le gouvernement fédéral, en collaboration avec les provinces, l'industrie et les universités, devrait établir et mettre en oeuvre un programme de sensibilisation visant à accroître l'innovation et à créer une attitude «gagnante» chez les jeunes du Canada. Les principaux intervenants du réseau d'innovation doivent rappeler régulièrement aux Canadiens à quel point les S-T et l'innovation auront une incidence importante sur leur avenir.
Je considère par ailleurs qu'il faut que des voix crédibles se fassent entendre clairement au plus haut niveau des gouvernements, des universités et des entreprises, tous allant dans le même sens et insistant en coeur sur l'importance fondamentale que revêt les sciences [et la technologie] pour l'avenir économique du Canada.